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Conférence de presse de M. Paul Bégin, ministre de la Justice

Présentation du projet de loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme

Version finale

Le mardi 16 avril 2002, 15 h 25

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Quinze heures vingt-cinq minutes)

M. Bégin: Bonjour, mesdames et messieurs. Une déclaration courte. Comme plusieurs États d'Amérique du Nord, le Québec a connu au cours des dernières décennies un développement croissant des activités de représentation auprès des pouvoirs publics. La réflexion du gouvernement du Québec sur les activités de lobbyisme est amorcée depuis un certain temps. En 1995, le rapport du Groupe de travail sur l'éthique, la probité et l'intégrité des administrateurs publics faisait part d'une recommandation, la recommandation 35, je cite: «Que le lobbying fasse l'objet d'une démarche complémentaire de la part du gouvernement, de façon à ce que soit étudiée la question de la pertinence et des modalités d'un encadrement juridique spécifique de cette activité.»

C'est dans la continuité et la tradition de transparence du Parti québécois que le premier ministre M. Lucien Bouchard déclarait, dans son discours d'ouverture de la Deuxième session de la Trente-cinquième Législature prononcé en mars 1996, et je cite: «Il nous incombe à tous, nous, membres de l'Assemblée nationale, de revaloriser la réputation des parlementaires par notre action et nos attitudes, mais le lien de confiance entre l'État et les citoyens demande d'autres actions et d'autres signes de probité. Le projet de loi n° 131 sur le resserrement des règles d'éthique des personnes qui assurent la gestion publique est un premier pas dans cette voie. Nous comptons en franchir un autre en encadrant beaucoup mieux aujourd'hui la pratique du lobbying.» Fin de la citation.

Ceci nous a amenés à un mandat d'initiative portant sur l'examen de l'activité du lobbyisme au Québec. Depuis, le gouvernement s'est penché sur la possibilité d'encadrer l'activité de lobbyisme au Québec. Ainsi, le 13 février dernier, le premier ministre et moi-même avons dévoilé le cadre d'orientation qui constituait les grandes lignes d'un projet de loi sur le lobbyisme. Par conséquent, j'ai déposé aujourd'hui à l'Assemblée nationale le projet de loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme.

Je veux à nouveau souligner que le lobbyisme n'est pas un péché, mais une activité normale et saine dans une société démocratique. Le projet de loi vise donc à rendre transparentes les activités de lobbyisme exercées auprès de titulaires de charge publique et à assurer le sain exercice de ces activités. Aussi, je tiens à préciser que je serai très attentif aux commentaires des personnes et des groupes intéressés, et je les invite donc à me faire part de ceux-ci.

Voici donc les grandes lignes du projet de loi déposé cet après-midi. Alors, plutôt que de reprendre, étant donné que vous avez déjà eu une séance, ce matin, technique d'information, je vais plutôt répondre à vos questions plutôt que d'exposer à nouveau le texte qui pourrait devenir un petit peu redondant, mais je suis certain que vous avez des questions à me poser.

Alors, je voudrais vous dire que je suis accompagné de Me Louis Bourgeois, qui est sous-ministre aux affaires juridiques et législatives, et de Me Pierre Charbonneau, qui est légiste senior au ministère de la Justice.

M. Leduc (Gilbert): M. Bégin, j'aimerais savoir: Est-ce que c'est toutes les municipalités qui vont être assujetties au projet de loi?

M. Bégin: Comme vous le savez, on avait dit que nous assujettirions les municipalités au projet de loi. Plutôt que de faire une règle générale mur à mur, nous avons mis dans le projet de loi un assujettissement, mais sujet à détermination par règlement du conseil des municipalités qui seront assujetties, seront celles qui ont par exemple en haut de 100 000 habitants ou celles qui ont 50 000 habitants, ce sera déterminé par règlement. Donc, ce ne sera pas une universalité normalement, mais plutôt des catégories globales.

M. Leduc (Gilbert): Pourquoi? Il n'y a pas de rang universel?

M. Bégin: Parce que, vous savez, légiférer pour des besoins qui n'existent pas, ce n'est pas très utile. Par exemple, est-ce qu'une municipalité de 800 habitants devrait être couverte comme telle? On peut penser que oui, mais on peut penser aussi que c'est inutile de le faire, d'autant plus que lorsqu'on assujettit la municipalité comme telle, en contrepartie ses élus se trouvent dans l'impossibilité d'agir pendant un certain temps à l'égard de leur propre municipalité. Comme on est dans une hypothèse très petite, ce n'est pas souhaitable, me semble-t-il.

Par contre, lorsque vous tombez dans une ville comme Québec ou Montréal, il va de soi il me semble qu'ils doivent être inclus. Mais où se situe la barre? Est-ce que c'est 25 000, 20 000 habitants? Ça sera déterminé dans un avenir rapproché.

M. Leduc (Gilbert): Il y a des syndicats aussi qui sont... c'est parce que ce qu'on nous a expliqué ce matin, c'est que, comparativement à la loi fédérale où les syndicats doivent s'enregistrer, ce ne sera pas le cas avec la loi québécoise.

M. Bégin: Nous avons fait une nouvelle définition du lobbyisme comme tel, pas le lobbyisme de conseil mais le lobbyiste de... au fédéral, il y a le lobbyiste salarié mais aussi le lobbyiste d'organisation, la troisième catégorie, dans laquelle ils peuvent se trouver. Mais nous avons fait le choix suivant, c'est-à-dire que lorsqu'il y avait des intérêts économiques de profits, que nous insisterions à ce moment-là pour qu'ils soient inscrits. Mais lorsqu'il s'agit par exemple de fins humanitaires, de conditions de travail sociales, socioéconomiques, à ce moment-là, que nous ne les inclurions pas dans le projet de loi. C'est ainsi que le syndicat n'est pas à des fins de faire un profit mais généralement de faire améliorer les conditions de vie des salariés faisant partie du syndicat, et nous les avons exclus.

D'ailleurs, au fédéral, il ne faut pas se surprendre, il reste que les syndicats ne sont pas, dans les faits, inclus parce que je crois que, par interprétation, compte tenu de la règle de pourcentage important, ils ont été exclus, dans les faits, mais ce n'est pas le texte de la loi qui le dit.

M. Lévesque (Éric): M. Bégin, au niveau des mesures disciplinaires et des sanctions, c'est une des nouveautés, là, au Québec. Est-ce qu'on va avoir les moyens de pouvoir faire des enquêtes, là, d'avoir des gens qui vont pouvoir enquêter? Est-ce qu'on va mettre les moyens en place pour les faire?

M. Bégin: D'abord, il y aura deux types de situation qui vont se présenter: le commissaire peut, de sa propre initiative ou sur demande, enquêter sur ce qu'une firme, un individu fait ou fait incorrectement ou ne fait pas, parce que, à l'opposé, on peut avoir quelqu'un qui fait du lobbying et qui ne s'inscrit pas, donc il y a comme une infraction, il pourra faire des enquêtes. Il faut savoir, donc, que le commissaire sera nommé par l'Assemblée nationale et que c'est l'Assemblée nationale qui dotera le commissaire des ressources nécessaires à l'exercice de ses fonctions. Alors, on peut présumer qu'il y aura détermination selon les besoins de ses ressources humaines et qu'on aura ce qu'il faut.

Par ailleurs, une fois que l'enquête aura été complétée par le commissaire, il pourra transmettre au Procureur général, au ministre de la Justice la demande de prendre des poursuites contre la personne qui aurait enfreint les dispositions de la loi comme telle. Il y a aussi d'autres avenues de faire enquête. Vous-mêmes, les journalistes, de par votre métier, allez certainement être intéressés à l'occasion de vérifier si telle personne qui fait des représentations, à votre connaissance, est bien inscrite au registre des lobbyistes, et deuxièmement, est-ce qu'il a bien décrit auprès de qui et sur l'objet de ses représentations. Donc, à l'occasion, je suis persuadé que les journalistes auront une source d'enquêtes et d'informations importante et que ces renseignements glanés et évidemment, plus tard, les énoncés dans vos médias respectifs de ces faits-là pourront entraîner, donc, des décisions de la part du commissaire.

Alors, je crois qu'il y aura les moyens nécessaires à le faire, ça dépendra de ce que nous vivrons sur le terrain en termes de situation réelle.

M.Boivin (Mathieu): M. Bégin, il y a un projet de code de déontologie qui va suivre dans les six mois la nomination du commissaire. Bien, on nous a dit ce matin que ce code de déontologie là aurait une obligation légale, donc que ça aurait valeur de loi de la même façon que ce projet de loi. Qu'est-ce que ce code de déontologie ajourerait à ce qu'il y a déjà dans le projet de loi?

M. Bégin: Écoutez, on peut tomber dans une série de choses qui sont à première vue relativement insignifiantes, mais qui aident les personnes à prendre des décisions en ce qui les concerne ou ce qui concerne leurs clients pour être certains qu'ils se comportent de manière éthique, correcte. Vous savez, c'est un peu comme ne pas faire quelque chose parce que c'est illégal ou ne pas le faire parce que si vous considérez ça comme étant immoral. Il y a... La distinction n'est peut-être pas parfaite, mais le Code va être établi par le commissaire sur la foi des représentations qui lui seront faites et après avoir consulté les personnes concernées et fixera de quelle manière, par exemple, les gens vont se conduire.

Il y en a dans beaucoup de secteurs. Il y en a entre autres pour... j'ai parlé de l'éthique, la probité des administrateurs publics, j'ai fait la loi comme telle qui donne le grand cadre. Mais le coeur de ce que c'est le comportement de ces administrateurs publics, c'est le règlement lui-même que nous avons spécialement adopté en commission parlementaire. C'est la seule fois à ma connaissance qu'on a fait ça. On a adopté un règlement en commission parlementaire comme si c'était un projet de loi, parce qu'on y trouvait une importance.

Alors, c'est là que le côté le plus pointu qui concerne expressément la conduite des membres et qui leur sert de balises pour leur conduite, va être exprimé. Et ça, ce sera obligatoire. Donc, on pourra dire: Vous avez enfreint le code d'éthique, et ça constitue une infraction.

M. Boivin (Mathieu): Est-ce qu'à ce moment-là un code d'éthique comme celui-là va spécifier des choses quant à la proximité qui peut exister, le lien d'amitié entre un ministre puis un lobbyiste?

M. Bégin: C'est le commissaire qui aura à déterminer ce qu'il croit être de l'éthique et des balises exactes à donner. C'est son mandat. Je ne voudrais surtout pas me substituer à lui, d'autant plus que je n'ai ni la compétence ni l'information requise pour le faire. Mais ce sera son travail et ce sera un travail important. Vous savez, par exemple, on dit: On porte une plainte contre un magistrat, hein, il ne s'est pas comporté correctement. C'est quoi avoir une «bonne» conduite? Vous savez, c'est un terme large. Mais c'est certainement différent de commettre une infraction spécifique à un texte de loi.

M. Boivin (Mathieu): Il y a un ministre qui a démissionné quand même en raison entre autres de choses comme une proximité avec un lobbyiste, est-ce qu'on peut penser que ça va donner...

M. Bégin: Toutes les raisons pour lesquelles une personne a pu se comporter dans le passé ne fait pas l'objet de mes préoccupations à ce stade-ci. Je me suis abstenu comme ministre porteur de ce dossier de commenter de quelque manière que ce soit une situation précise, réelle. Je n'ai pas à être ni pour, ni contre. Je veux avoir la distance nécessaire à adopter un projet de loi qui va transcender les préoccupations immédiates, importantes pour tout le monde mais qui ne doivent pas influencer la prise de décisions.

On doit avoir un projet de loi qui s'applique dans le temps correctement et avec lequel tout le monde va être à l'aise. Et pour ça, ça prend une certaine distance. Vous comprendrez donc que je ne me prononcerai pas sur des cas qui ont pu surgir dans le passé.

M. Dutrisac (Robert): Il va y avoir des consultations générales concernant...

M. Bégin: Oui.

M. Dutrisac (Robert): ...donc, commission parlementaire avec groupes financiers?

M. Bégin: Oui. Et je compte beaucoup sur les gens pour venir alimenter notre réflexion parce que c'est, vous le savez, la première fois qu'au Québec on adopte un projet de loi de cette nature, il y a les expériences ailleurs, mais tout n'est pas concluant nécessairement. Par ailleurs, les situations peuvent être bien différentes. Se comparer à Washington, c'est bon, mais ce n'est peut-être pas la situation idéale. Donc, d'entendre ce que les gens vivent ici, comment ça se produit, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'ajuster, d'être plus sévère ou, à d'autres places, peut-être moins pour arriver aux fins pour lesquelles on travaille, mais ça, c'est la commission parlementaire qui va nous le dire.

Alors, des groupes qui vont être assujettis, d'autres qui ont des préoccupations quant à leur assujettissement, et la vérification, tout ça, ça pourra se faire en commission parlementaire. Et moi, je suis certain qu'on est capable d'enrichir le projet de loi.

M. Dutrisac (Robert): Et, justement, par rapport aux échéanciers, là, qu'est-ce que vous entrevoyez pour la commission parlementaire?

M. Bégin: Bon, on a dit, comme gouvernement, qu'on voulait présenter le projet de loi et l'adopter dans cette session. Tout à l'heure, à la période des questions, au moment du dépôt du projet de loi, on a déterminé qu'il y aurait une commission parlementaire générale qui commencerait le 28 mai prochain auprès de la commission des institutions, c'est... pas des institutions, pardon, des finances, et non pas des institutions, des finances, et on va prendre tout le temps requis pour le faire.

Rappelons-nous qu'à partir de cette date-là ou environ, on siège de manière intensive, donc il y a les commissions parlementaires de jour, mais il y a également celles de soir. Ça comprend quatre heures, de 8 heures à minuit, et on est disposé à entendre les gens pour être capable d'adopter le projet de loi et le faire entrer en vigueur avant notre départ, au mois de juin prochain.

Mme Hanes (Allison): M. Bégin, on parle beaucoup ici des obligations, les responsabilités des lobbyistes et les sanctions et les mesures disciplinaires pour les lobbyistes, mais est-ce qu'il y aura aussi des mesures pour les personnages publics, les élus?

M. Bégin: Oui. J'aime beaucoup votre question parce qu'elle me permet de faire une distinction qu'on ne voit pas toujours. Quand on a parlé récemment des dossiers, on n'a pas tout à fait parlé de lobbying, on a parlé de ce qu'on appelle, nous autres, et je pense qu'on peut s'entendre sur l'expression de l'après-mandat. On se demande: Quand un élu cesse d'être élu, qu'est-ce qu'il peut faire, qu'est-ce qu'il ne peut pas faire, et c'est ça qui est important. Donc, c'est l'après-mandat.

Je suis ministre, je ne me représente pas aux prochaines élections. Je dis: Je voudrais faire du lobbying. Puis-je? La réponse est non. Ce n'est pas parce qu'on ne peut pas faire du lobbying. Le lobbying, c'est, je l'ai dit tantôt, ce n'est pas péché, tout le monde peut en faire, sauf que, dans mon cas, compte tenu que je suis ministre et que dans cette fonction de ministre, non seulement je reçois des informations privilégiées dans le domaine du droit du ministère de la Justice, mais j'assiste à plein de comités: le comité de développement social, le comité de développement économique, en plus, j'assiste aux réunions du Conseil des ministres, et là comme ministre, j'apprends plein d'informations privilégiées qui, si je pouvais les utiliser, à l'occasion, pourraient m'être extrêmement utiles, pourraient être extrêmement utiles pour le client que je représenterais, mais qui seraient déloyales, non transparentes par rapport à l'ensemble des citoyens, parce que je ferais bénéficier d'une information privilégiée que je n'aurais pas dû avoir. Donc, je ne pourrai pas après, pendant deux ans, agir comme tel.

On peut se poser la question, mes attachés politiques qui m'accompagnent dans mon travail, qui ont à peu près la chance d'apprendre les mêmes choses que moi, des contacts avec la machine, des contacts avec la population qui vient nous voir, qui viennent développer un bagage de connaissances extraordinaires, pourraient elles aussi, en quittant, utiliser cette information-là à leur bénéfice. Mais là, c'est fait au détriment de la confidentialité, c'est fait au détriment de l'information privilégiée que ces personnes-là ont reçue. Alors, pendant un an, elles ne pourront pas faire de lobbying auprès de ces ministères-là parce que c'est extrêmement grave.

Par contre, on peut se demander: Un député, est-ce que c'est dans la même situation? La réponse est non. Un député dans l'exercice de sa fonction de député n'apprend rien qui soit tel que ça constitue un avantage, une information privilégiée, puisque les députés, dans leur travail, se retrouvent par exemple dans un comté à recevoir les confidences de citoyens qui viennent faire de... demander de l'aide, demander qu'on influence un projet de loi, assistent aux commissions parlementaires où les gestes sont publics par hypothèse, donc il n'y a pas d'information privilégiée là, siègent à l'Assemblée nationale où ils s'expriment, entendent les gens, votent, tout est public. Donc, le député dans son travail de député exclusivement n'apprend rien qui n'est pas public. Donc, pourquoi l'empêcher, une fois qu'il a quitté sa fonction, d'exercer la fonction de lobbyiste qui, je le répète, est une fonction tout à fait légitime.

Alors, vous voyez que la nuance, comment elle se fait, c'est la connaissance, dans l'exercice de la fonction que vous occupez, d'informations privilégiées qui permettraient d'avoir une influence, entre guillemets, indue ou privilégiée. Alors, c'est ça qu'on veut empêcher.

Une voix: Mais qu'est-ce qu'un ministre pourrait faire, justement, dans son après-mandat? Le ministre de la Justice, généralement, souvent, se retrouve dans les cabinets d'avocats. à ce moment-là, vous nous dites qu'il ne pourra pas utiliser l'information qu'il a obtenue...

M. Bégin: C'est-à-dire une information qui est de bonne renommée. Il y a des choses... Je pourrais certainement plaider tous les dossiers devant les tribunaux sans aucun problème au lendemain de mon départ, parce qu'il n'y a absolument aucun rapport entre ça. Mais si, comme membre d'un cabinet, je disais que j'ai un client x qui a avantage à connaître de manière particulière ce qui va arriver dans tel domaine du droit qui l'intéresse et que s'il détenait cette information-là, il pourrait être avantagé par rapport à tous les collègues qui ne l'ont pas, bien là, je me mettrais dans une situation de conflit d'intérêts et surtout de faire ce que je ne dois pas faire. Si je fais des représentations pour faire changer l'idée en tenant compte... si j'utilise cette information pour faire changer un détenteur de charge publique, une décision, à ce moment-là, j'utilise une information privilégiée. Et l'exemple le plus simple, là, qui n'est pas nécessairement au niveau de la justice, parce que c'est un ministère qui n'a pas beaucoup de clientèle, qui n'est pas vraiment exposé aux relations de type lobbyiste bien gros, par contre, si je m'en vais, mettons, au ministère des Richesses naturelles ou un ministère économique, admettons que j'apprends une information à l'effet qu'on va, dans six mois de temps, développer tel truc qui va être une révolution, mais qui va partir un tout nouveau secteur de l'économie, de l'entreprise, je cesse d'occuper ma fonction, j'ai cette information-là, je fais des pressions pour obtenir de l'avantage et que, par exemple, un permis, une autorisation qui a l'air tout à fait banale, et là, à ce moment-là, je deviens détenteur d'un potentiel extraordinaire de développement économique, je le fais en utilisant des informations que je n'avais pas le droit de faire. Je le ferais encore moins au bénéfice d'un client en faisant du lobbying pour que ça se réalise pour le bénéfice de ce client-là.

Donc, on ne peut pas décrire toutes les situations, mais elles pourraient être extrêmement nombreuses où on est en conflit dans l'action de lobbyiste après avoir été ministre. De toute façon, pour ne pas avoir à se poser mille et une questions, la règle est établie de façon claire: pendant deux ans, on ne peut pas faire de lobbying. Mais comme avocat, je peux faire des poursuites judiciaires. Je pourrais, comme avocat, venir devant la commission parlementaire représenter des clients pour faire changer la loi. Ce serait un acte public. Ce qui compte, c'est la transparence. Quand on l'obtient, il n'y a pas de problème.

M. Dutrisac (Robert): Dans un cabinet, vous seriez par exemple appelé à partager vos connaissances de l'appareil de l'État, de la façon justement qu'on conçoit des lois?

M. Bégin: Ce ne sont pas des informations privilégiées parce que ce sont des connaissances qu'un bon étudiant en droit, en principe, connaît; en principe, je dis bien.

Une voix: Mr. Bégin, how difficult will it be to apply the law by October 2002 given the fact that you don't really know how many lobbyists are out there?

M. Bégin: How many?

Une voix : How many lobbyists are out there.

M. Bégin: It doesn't seem to me that that is very important because what we have to do is put the law before the Chamber, adopt it and, after that, there will be people acting to make possible the action. If we have 1 000 people, lobbyists, we will put on the registrate 1 000 people. If we have 2 000 people, we will put them on the registrate. After that, we will have to know exactly the rules about the code d'éthique – I don't know the word in English. We will have to know it. But in six months later, it will be in force.

So I think that we can adopt the law now, put in place the machinery necessary to have a law in force and I think it's possible for this spring. But certain aspects will be in force on May and October, on November. Because we have to put people in place but we have to stop somewhere.

Une voix: Why the necessity to include municipalities? Do you think this is going to hurt relations between the PQ and the municipalities?

M. Bégin: No, I don't think so because I think it's very clear for everybody that the relation should be clear between people taking decisions and people trying to make them change of opinion. Everybody accepts the fact that it's possible for people to influence other people but they understand also that after they ask no longer a member of a decision team that they cannot go on the other side and the other day try to change the people there and say: So you know I know exactly what you are thinking because I was in your place two months ago and I want to change your opinion. So it's regular for people, the municipalities don't have to make lobbying. But people after quitting, leaving – excuse me – have to respect the rule. So I don't think there will be problems.

Une voix: One more thing. Has this law come earlier, what would have changed for the PQ, how would this have changed things for the PQ, do you think?

M. Bégin: I said before that I don't understand what happened before because I want to have a law, which is correct, and I want to be influenced correctly by people, one thing to have a good law. And for that, I don't have the – «le goût» – the intention to make politics with that. I think that is a law very important and I should not make politics with that. So I don't answer your question.

M.Boivin (Mathieu): M. Bégin, avez-vous fait l'objet de lobbying pendant l'élaboration de votre...

M. Bégin: Plein, plein, plein.

M.Boivin (Mathieu): Comment vous avez réagi par rapport à ça?

M. Bégin: Non, je n'ai pas eu de lobbying dans le sens que vous l'entendez. Mais, si vous saviez le nombre de personnes qui, un peu partout, dans l'administration, dans nos cabinets, partout, ont appelé pour dire: Est-ce qu'on est impliqué ou on ne l'est pas? Si vous le faites, vous devriez faire ça comme ça.

Le lobbying, c'est une bonne chose. Ce n'est pas compliqué. Ce n'est pas mauvais. C'est comment après on règle les choses. Aujourd'hui, la personne qui appelle pour influencer la rédaction de ce projet de loi n'a pas à s'inscrire nulle part. Après l'adoption de la loi, quand ils voudront faire des représentations comme celle-là, ils devront le faire après s'être inscrits. S'ils veulent simplement venir en commission parlementaire, pas besoin de s'inscrire, puisque c'est fait publiquement et que tout le monde va être en mesure d'apprécier les représentations qui sont faites.

Donc, moi, ça m'apparaît tout à fait correct. Mais, entre nous, certainement, il y a eu beaucoup de travail. La loi, à ma grande surprise, est beaucoup plus complexe qu'elle ne paraissait au départ. J'ai fait assez rapidement les grandes orientations, ça allait bien. Quand on mettait les morceaux, ça avait l'air à être tout simple, mais lorsqu'il a été le temps de rédiger techniquement, beaucoup plus compliqué. Me Charbonneau peut vous en parler, il représente celui en haut de la pyramide. Je peux vous dire qu'il y a eu vraiment beaucoup d'échanges. Comme je suis le président du Comité de législation, je travaille les lois et je peux vous dire que celle-là nous a donné quand même du fil à retordre. Mais je pense qu'on a un bon texte, un bon projet, sujet à amélioration, mais il est très bon.

Mais il faut avoir de l'influence. Les gens nous disent: Faudrait pas faire ci, faudrait pas faire ça, ça serait mieux ça, ça serait mieux ça. Des fois, on rejette du revers de la main, mais, des fois, il y a une idée qui trotte et on dit: Oui, c'est bon. Alors, on en a eu dans le bon sens du terme.

Mme Hanes (Allison): M. Bégin, vous avez parlé de l'après-mandat des titulaires et des ministres mais est-ce qu'il y a maintenant des règles concrètes pour des ministres alors qu'ils sont toujours des ministres?

M. Bégin: Oui. Oui, parce que le premier ministre, le 13 février, avait déclaré: Nous allons adopter un projet de loi. Mais, vous rappelez-vous, il avait dit: Je vais émettre une directive rapidement. Ce que vous trouvez dans ce qu'on appelle l'après-mandat, c'est les articles 25, 26 et 27. Dans la loi, c'est l'après-mandat. Mais, si vous lisez la directive qu'il a émise au mois de février, vous retrouvez les mêmes principes, et ça s'applique depuis ce temps-là.

Mme Hanes (Allison): Mais est-ce que ça va faire partie de la loi?

M. Bégin: Est-ce que ça va faire?

Mme Hanes (Allison): Est-ce que ça va être inclus dans la loi, les règlements qu'a donnés le premier ministre?

M. Bégin: Non, la loi est une chose... Le premier ministre peut émettre des directives à l'égard du comportement des personnes qui sont les élus ou les membres des cabinets. Il a le pouvoir de faire cela. Alors, est-ce que, dans certains cas, des dispositions vont devenir inutiles? Possiblement, mais on n'a pas cherché à faire la compatibilité ou l'incompatibilité. Mais, dans les faits, à un moment ou l'autre, on harmonisera de manière parfaite, parce qu'il peut y avoir des petites différences entre les deux, pour le moment.

Mme Hanes (Allison): Mais alors, les sanctions pour les amis ou les membres de cabinets seront à la discrétion du premier ministre?

M. Bégin: Non, le premier ministre actuellement, dans sa directive, n'a pas le pouvoir de sanction, à moins que je ne me trompe. C'est ça? La directive, formellement, il n'y a pas, je veux dire, six mois de prison, là. On se comprend. Il y a une sanction autre, qui est de dire: C'est interdit, et la sanction publique, politique est souvent aussi sévère que l'autre sanction. Mais, le pouvoir que nous avons ici dans l'article 25, 26 et surtout les infractions qui sont commises sont beaucoup plus formelles. Mais, dans les deux cas, il y aura impossibilité de faire l'acte de lobbying de la part d'un ministre, par exemple. Est-ce que ça va?

M. Leduc (Gilbert): ...de directives qui touchaient les employés des cabinets concernant leurs possibilité d'accéder à la fonction publique? Est-ce que ça relève de votre ministère?

M. Bégin: Non. Ça, vous avez... Rappelons-nous, là, dans le temps, lorsque le premier ministre a énoncé sa directive, il y a eu

des réactions importantes de la part de certains attachés politiques disant: Bien, voilà, lorsque je me suis engagé, je ne connaissais pas ça, certains ont pensé et je ne pourrais plus agir, je ne pourrai plus faire ci. Alors, les gens ont réagi, c'est tout à fait normal mais ça s'est tout simplement simplifié au fur et à mesure que les gens ont compris ce qui en était. Alors, la directive s'applique aux attachés politiques, s'applique aux ministres, s'applique aux députés et tout ça est très clair maintenant. Et, à partir de maintenant, le projet de loi va également aussi avoir son existence. Je ne suis pas sûr d'avoir répondu à votre question.

M. Leduc (Gilbert): ...une directive, parce qu'il fut un temps où les attachés politiques pouvaient accéder, je pense, après six mois, un an, à la fonction publique.

M. Bégin: Ah, oui, oui, c'est ça. Oui.

M. Leduc (Gilbert): Est-ce que, là, est-ce qu'on prévoit...

M. Bégin: Donc, devant ça... C'est avant ça, il me semblait bien que j'avais oublié une partie de votre question. Devant ça, où, à l'Exécutif, on regarde s'il n'y aurait pas des ouvertures à faire au niveau des potentialités. Est-ce qu'un attaché politique qui ne peut pas faire de lobbying pendant un an – c'est la loi – est-ce qu'on ne pourrait pas ouvrir des postes dans la fonction publique en passant un concours et, à ce moment-là, bon, qu'ils puissent occuper une fonction? Ça a été énoncé, je ne sais pas où ça en est rendu, différentes avenues comme ça peuvent être regardées mais ce n'est pas dans l'objet de ma législation. Il y a certainement quelqu'un au gouvernement qui travaille là-dessus, mais ce n'est pas au ministère de la Justice. D'autres questions? Merci beaucoup.

(Fin à 15 h 53)

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