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Point de presse de M. Marc Tanguay, porte-parole de l'opposition officielle pour la Charte de la langue française

Version finale

Le mercredi 24 avril 2013, 14 h

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Quatorze heures une minute)

M. Tanguay: Alors, je vous remercie beaucoup pour votre présence aujourd'hui. Vous le savez, dans le cadre du dépôt du projet de loi n° 14, nous avons l'occasion de parler beaucoup de l'atteinte de l'épanouissement du français, qui est l'objectif collectif de tous. Et là il n'y a pas un monopole d'aucun parti politique, et je vous dirais même que le bilan du Parti libéral du Québec démontre qu'il est un acteur, comme il a toujours été, de premier plan quant à l'épanouissement du français.
Il est important, je pense, de souligner ce que le Parti libéral du Québec propose, comme des actions pour favoriser l'épanouissement du français. Ce sont des gestes très tangibles, très concrets, qui font appel à tous les acteurs de la société et qui touchent toutes les sphères de notre société québécoise. Il s'agit donc de mobiliser les acteurs tant en matière... tant dans le domaine d'éducation, fonction publique, entreprises, agents économiques et sociaux et aussi interpeller toutes les régions du Québec.
Cette approche et ces gestes que nous proposons sont le fruit d'une réflexion qui est constante au Parti libéral du Québec. Ce sont des gestes tangibles qui s'inscrivent dans une continuité et surtout qui respectent un nécessaire équilibre. En ce sens-là, nous sommes au diapason, notamment, des commentaires très majoritaires que nous avons entendus lors de la dernière consultation générale.
J'aimerais vous souligner, donc, quatre grands axes d'intervention. D'abord, la qualité du français dès l'école primaire. Vous vous souvenez, en février 2008 si ma mémoire est bonne, la ministre libérale de l'époque avait déposé un plan d'action pour favoriser la réussite scolaire, la réussite en français des élèves. Ce plan faisait suite à un rapport intitulé Mieux soutenir le développement de la compétence à écrire et contenait une foule de mesures, contenait, de façon plus précise, 22 mesures très tangibles qui allaient de l'augmentation d'heures d'enseignement du français, tant au niveau des dictées, le nombre de dictées, tant au niveau de l'augmentation des occasions de lecture pour les étudiants au primaire, et également faire en sorte que les enseignants aient tous les outils pour que l'épanouissement du français, qualité du français enseigné au primaire soient une réalité. Nous croyons qu'il est important, depuis cette annonce en 2008 qui s'est déployée dans le réseau de l'éducation, aujourd'hui, d'en faire le bilan. Et il s'agit là, nous en sommes persuadés, de mesures très tangibles qui parlent non seulement aux parents, aux pères et mères du Québec, mais qui font en sorte que, sur les bancs d'école, la qualité du français, dès le jeune âge - puis ça, on l'a entendu durant la consultation générale - il est important de s'y atteler et de faire en sorte de se donner cet outil.
Deuxième grand axe de quatre que j'aimerais vous soulever, intensifier l'usage du français au travail. Ça passe par quelles mesures? Par des mesures proactives d'accompagnement. Nous avons entendu notamment l'Association des dépanneurs du Québec, qui regroupe 1 030 membres, dont 30 % sont d'origine asiatique, et ils ont salué ce qu'avait fait le gouvernement libéral à l'époque, sous le ministère de l'Immigration, qui avait bien reçu leur demande, avait fait en sorte qu'il y ait des professeurs de disponibles, que les propriétaires de dépanneurs d'origine asiatique puissent avoir des cours de français, ce qu'ils ont eus. Ils ont bonifié leur offre de services en français, et ça, ça s'est fait par un partenariat, tout le contraire de ce qui est proposé par le gouvernement.

Également, au niveau d'intensifier le français au travail, la stratégie commune pour Montréal 2008-2013, vous le savez, elle a été soulevée et soulignée... elle a été saluée, devrais-je dire, par tous les intervenants, et il est temps d'en dresser un bilan. Et il y a, là aussi, un terreau extrêmement fertile de partenariat, d'accompagnement qui - et je reviens à mon propos initial - demande un effort par l'accompagnement de tous les acteurs qui sont touchés dans la société québécoise.
Troisième grand axe sur quatre, des quatre que j'aimerais vous souligner et que nous proposons, faciliter la francisation des immigrants. Il faut bonifier cette offre de cours de francisation. Il faut bonifier cette offre tant au niveau de nos régions, tant au niveau également de la disponibilité des professeurs au niveau des horaires atypiques, également de celles et ceux qui doivent et qui veulent suivre un cours de français et également au niveau de l'utilisation des nouvelles technologies: des cours en ligne, des outils, du matériel disponible pour toutes les personnes, entre autres les nouveaux arrivants.
Quatrième axe d'intervention dont le Parti libéral se fait le promoteur et que nous proposons très clairement, la qualité du français à l'ère numérique. Moi, comme père de famille - deux jeunes filles - il y a utilisation du iPad, du iPhone, il y a le téléchargement d'applications. Comment faire en sorte, tant au niveau scolaire que, de façon plus large, au niveau social par exemple, l'Office de la langue française ne pourrait-elle pas nous outiller, nous aider, faire la promotion et s'assurer d'être un acteur qui ferait en sorte que, par rapport aux nouvelles technologies de l'information, nouveaux réseaux sociaux, bien, que le français, là aussi... Vous savez, ces dernières années, on a ouvert ce forum-là, et malheureusement il n'y a pas de stratégie très claire quant à la qualité du français que l'on doit assurer. Alors, il est important, tant au niveau primaire, par les propositions que nous avançons, tant au niveau également de l'Office québécois de la langue française, de mettre de l'avant une stratégie.
Alors, en conclusion, l'épanouissement du français, ça passe par ça. L'épanouissement du français ne passe par le projet de loi n° 14, la raison pour laquelle - puis je ne reviendrai pas là-dessus - nous allons voter contre le principe. Ce sont des mesures très tangibles, concrètes et qui respectent l'équilibre de l'atteinte de l'objectif collectif et du respect des libertés individuelles, et ça, ça parle beaucoup, beaucoup dans notre vie à tous les jours.
Je suis prêt maintenant à recevoir vos questions.

M. Caron (Régys): M. Tanguay, si je fais un parallèle entre ce que vous venez de dire et ce que votre chef a dit il y a à peu près une heure, c'est que l'épanouissement du français ne peut pas... ne doit pas être un frein à l'épanouissement du bilinguisme.

M. Tanguay: Il est important aujourd'hui... Parce qu'on est capables, nous, Québécois, de prendre notre place dans le monde, il est important de parler un français, d'abord, de qualité; également, dans un deuxième temps, d'être capable de parler et de tirer son épingle du jeu en anglais, de communiquer.
Et, ça, on l'a entendu beaucoup dans les consultations. Tout le monde, nous sommes d'accord que... Vous savez, nos entreprises, nos PME... 20 % de nos PME exportent aux États-Unis, et 50 % importent des États-Unis. Bien, ça prend quelqu'un qui soit capable de lire ce qu'on appelle le «purchase order», de lire les «terms and conditions» qui sont à l'endos pour pouvoir toujours être en affaire après un an de la conclusion de ce contrat, parce que c'est du tangible, c'est une commande, on veut la livrer, on est capables au Québec.
Et moi, j'ai eu l'occasion de souligner que le projet de loi n° 14, c'était une attaque au bilinguisme, ce qui a été, je vous rappelle encore une fois, le cri du coeur lancé par la ministre le 5 décembre dernier, quand elle disait: On a regardé une hausse de l'utilisation de l'anglais. Point, fin de la phrase. Il s'agit d'une alerte, et le gouvernement doit agir. Puis la réponse aura été le projet de loi n° 14.

M. Lacroix (Louis): Qu'est-ce que vous allez faire, M. Tanguay, si la CAQ annonce tout à l'heure qu'ils acceptent la main tendue par Mme De Courcy? Bon, vous dites que vous allez voter contre l'adoption du principe, mais vous allez faire quoi au-delà de ça, là? Parce qu'ils vont être majoritaires si la CAQ... Est-ce que vous allez filibuster? Est-ce que vous allez...

M. Tanguay: Écoutez, nous, on va toujours respecter la lettre et l'esprit du règlement parlementaire. Et, en ce sens-là, c'est à la CAQ de faire son lit. Vous savez, c'est une question de principe parce qu'il est... - l'analogie est tout à fait parfaite - on aura le débat sur l'adoption de principe.
Vous savez, on ne sait toujours pas où loge la CAQ. Et je vous rappellerai, le 8 mars dernier, François Legault, en compagnie de Nathalie Roy, qu'on va revoir dans une heure - puis je vous lance l'idée - avait dit: Bien, le projet de loi n° 14, il y a quatre griefs. Il les avait nommés et il avait conclu en disant: Par contre, la modification de la Charte des droits et libertés de la personne, ça, nous, on est pour. Il l'avait dit dans son communiqué de presse le 8 mars. Là, il a entendu le Barreau. Nous, on s'était prononcés avant eux. Il avait entendu le Barreau, la Commission des droits de la personne. Là, la CAQ n'a plus d'arguments pour supporter ce projet de loi là. Alors, nous les écouterons à trois heures et nous regarderons la gymnastique qu'ils feront.

M. Dutrisac (Robert): M. Tanguay, M. Couillard a dit que le bilinguisme pour tous les Québécois, c'était quelque chose d'absolument indispensable. Comment faire, justement, pour faire en sorte que tous les Québécois soient bilingues, là? Parce que vous n'en parlez pas, de ça, là.

M. Tanguay: Oui. Il est important de favoriser les occasions et de ne pas les limiter. Et la ministre De Courcy dit: Ça, c'est de mauvaise foi, ils ont tort. Mais, quand je vous disais que le projet de loi n° 14, il a des mesures pour endiguer la connaissance de l'anglais... Rappelez-vous... Là, je reviens puis j'ai plusieurs exemples. Je ne veux pas vous assommer avec mes mêmes exemples, mais la Fédération des cégeps, 48 établissements collégiaux, dont cinq anglophones, ont dit: Ça n'a pas de bon sens de donner priorité aux étudiants anglophones quant à l'accès aux cégeps anglophones. Ça, c'est un élément que le projet de loi n° 14...
Alors, il faut permettre ces occasions-là. Et je vous dirais même une chose qui est ressortie très clairement: Les commissions scolaires anglophones sont le fruit et sont des agents de francisation extraordinaires. Et nous en voulons pour preuve le fait qu'ils sont parmi, toujours, les premiers en termes de performance quant aux examens de français du ministère. Alors, il est...

M. Dutrisac (Robert): Oui, mais moi, je vous parle du bilinguisme chez les francophones, où on tire e la patte, là. Qu'est-ce qu'on peut faire? Qu'est-ce que vous suggérez, là, qu'on fasse pour faire en sorte que...

M. Tanguay: Vous savez, il y a eu, et je reprends cet exemple-là... C'est sous un gouvernement libéral que nous avions proposé qu'il y ait enseignement intensif de l'anglais en sixième année. Et il y avait déjà une mise en place sur cinq ans de ce modèle-là. Vous savez, on ne perd pas sa langue quand on en apprend une deuxième puis une troisième. Et le Mouvement national des Québécoises et des Québécois est venu nous dire en consultation qu'ils reconnaissent, même eux, qu'il y a une demande chez les parents du Québec pour que leurs enfants - moi, j'en suis - puissent parler, oui, un français de qualité irréprochable mais également être capables de parler l'anglais parce que c'est s'ouvrir les opportunités.
Alors, l'exemple que je peux vous donner, enseignement de l'anglais intensif. Qu'a fait la ministre du Parti québécois, la ministre du gouvernement relevant du Parti québécois? Elle a mis un stop à la mise en application qui avait déjà débuté. Alors, quel est le plan de match là-dessus? Il n'y en a pas.

M. Dutrisac (Robert): Est-ce que... M. Alain Dubuc, ce matin, nous dit qu'essentiellement Montréal est une ville bilingue. Est-ce qu'on ne devrait pas reconnaître, finalement, la réalité des faits, que Montréal, c'est une ville où se côtoient l'anglais et le français, une ville bilingue, essentiellement?

M. Tanguay: Je pense qu'au Québec, par définition, nous devrons toujours demeurer vigilants pour s'assurer de l'épanouissement du français. En ce sens-là, l'accès à des documents, à des éléments en anglais, à des... sera toujours omniprésent. Et moi, je fais toujours écho aux commentaires... Vous vous rappelez, le blogue de M. Lisée, le 19 janvier dernier, reconnaissait aussi que les jeunes anglos montréalais - et c'est le terme qu'il utilisait, «les jeunes anglos montréalais» - sont plus bilingues que jamais. Et ça, c'est démontré statistiquement et, ça, il faut s'en glorifier, il faut le valoriser, il faut le dire et non pas avoir la peur dans l'âme et dire... et avoir l'impact négatif de diviser les gens en disant: Bien, là, là, il y a trop d'anglais, ça menace le français. Je vous le dis, on ne perd pas sa langue en en apprenant une deuxième, on tire son épingle du jeu. Puis je vous dirais même plus, au niveau économique, la force économique du Québec sera toujours garante de l'épanouissement du français.
Il serait intéressant de reconnaître l'impact qu'a eu, par exemple, la Caisse de dépôt et de placement du Québec lorsque des francophones ont eu accès à des postes décisionnels, étaient aux plus hautes sphères du pouvoir financier. Ça a été, ça aussi, un moteur, un outil de francisation qui a été fantastique. Alors, il faut le reconnaître, le valoriser et il ne faut pas gérer la décroissance parce que ce n'est pas comme ça qu'on va réussir l'épanouissement du français.

M. Caron (Régys): M. Tanguay, manifestement, vous ne partagez pas le diagnostic que fait le Parti québécois, le gouvernement, sur l'avancement du français, l'état du français présentement au Québec. Vous venez de proposer quatre axes d'intervention. Le jour où vous retournerez au pouvoir, allez-vous arriver avec un projet de loi? Qu'est-ce que vous allez faire pour mettre de l'avant, là...

M. Tanguay: Bien, comme l'a toujours fait le Parti libéral du Québec, hein:1961, l'Office québécois de la langue française; en 1974, loi 22, première loi, sous Robert Bourassa, qui faisait du français la langue officielle du Québec - et, la loi 22, tous les chapitres de la loi de 1977, 101, y étaient - également en 1993 avec la loi 86, qui rétablissait un équilibre au niveau de l'affichage, nette prédominance du français.

M. Caron (Régys): Ça avait été des projets de loi controversés, M. Tanguay.

M. Tanguay: Bien, c'est un dossier qui est délicat, la langue. Et que nous présente la ministre De Courcy le 5 décembre dernier? Malheureusement, je dois vous redire: Un projet de loi... Lourdeur administrative, perte de droits, paperasse et, en bout de piste, coercition. Et j'ai vu la ministre ce matin qui était courroucée. C'est un projet de loi qui n'atteindra même pas la cible, et nous en sommes tous...
Pour revenir à votre question plus précise, j'ai fait état de mesures très tangibles, en 2008, donc sous la ministre Courchesne, à l'époque, de l'Éducation, quant à l'enseignement de qualité en français. J'ai fait, sous la ministre St-Pierre également, état de la stratégie 2008-2013. Il y aura toujours des outils autres que de dire: On va se donner bonne conscience, on va parler à un certain électorat par calcul politique, on va tout de suite s'attaquer à la charte, donc diviser les gens et s'attaquer à l'équilibre plutôt que de regarder qu'est-ce qu'on peut faire au niveau de la réglementation, des politiques, des partenariats et des programmes également d'accompagnement. Et ça, ça parle, encore une fois, dans la vie de tous les gens.

M. Pépin (Michel): M. Tanguay, est-ce que Montréal devrait être une ville bilingue?

M. Tanguay: En bout de piste, non. Montréal... Je pense qu'il est important de reconnaître que l'anglais à Montréal a permis à Montréal également de tirer son épingle du jeu, comme partout au Québec on veut tirer son épingle du jeu. Mais la Charte de la langue française fait en sorte qu'en bout de piste il y a un équilibre. La langue officielle du Québec... la langue officielle est le français. Il y a reconnaissance de 86 municipalités à statut bilingue déjà, il y en a plusieurs à Montréal, et ça participe d'un équilibre.
Vous savez, des villes qui sont venues nous voir, le maire de Côte-Saint-Luc entre autres, dont je me rappelle le témoignage très, très clair, qui nous disait quoi, en somme? Le maire venait nous dire que la ville avait su faire progresser le français, tout en ayant un statut bilingue, avait fait progresser le français. La bibliothèque avait - ça, c'est très tangible - une offre de livres en français comme jamais auparavant, et les gens étaient capables de tirer leur épingle du jeu.

M. Pépin (Michel): Alors, pourquoi Montréal ne devrait pas être une ville bilingue?

M. Tanguay: Présentement, nous avons un équilibre. Il y a certains arrondissements, certaines villes qui ont déjà le statut, et je pense que c'est important de conserver cet équilibre-là et ne pas entrer dans la division.

M. Pépin (Michel): Entrer dans la division... C'est parce que j'essaie de comprendre votre raisonnement. Parce qu'en même temps il y a une promotion du bilinguisme, en même temps vous vous raccrochez à la Charte de la langue française, qui fait du français la langue officielle du Québec. Vous nous parlez d'équilibre, mais est-ce qu'on ne revient pas, justement, à Montréal, où il y a deux langues très présentes, l'anglais, le français? Est-ce que...

M. Tanguay: En harmonie. En harmonie. Et, vous savez, on peut se donner bonne conscience en faisant des changements à la Charte de la langue française majeurs. Vous savez, cette recherche de l'équilibre là a toujours été une recherche à laquelle le Parti libéral du Québec a participé. Présentement, il y a un équilibre. Présentement, il faut demeurer vigilants pour que l'épanouissement du français demeure une réalité. On n'a pas à aller rejouer dans le statut des villes bilingues, et en ce sens-là la ministre a reconnu qu'il n'y a pas un maire qui est venu lui dire que ça pourrait être le commencement du début d'une bonne idée, au contraire.
Alors, en ce sens-là, quel est l'objectif? L'épanouissement du français? Je pense que c'est par des mesures très tangibles comme ça qu'on peut y arriver, assurément pas par le projet de loi n° 14.

M. Pépin (Michel): Dernière chose. Parce que vous parlez beaucoup de la coercition, que vous dénoncez, en fait, dans le projet de loi n° 14. La loi 101 contenait de nombreuses dispositions coercitives. Est-ce que c'était une mauvaise loi, la loi 101?

M. Tanguay: Non. La loi 101 a su maturer avec les années. Vous savez, il y a eu des jugements de la Cour suprême. Le Parti québécois va vous dire que c'est une cour étrangère puis ils vont vous parler du juge Lebel comme si c'était un pur étranger, alors qu'il est du Barreau du Québec. Alors, la Cour suprême est venue permettre l'atteinte de cet équilibre-là.
Je reviens avec le même exemple. Je pense que c'était l'arrêt Blaikie qui, clairement, au lendemain de la rédaction de la loi 101, venait nous dire que, vous savez, c'est anticonstitutionnel, très clairement, l'article 133 de la Charte canadienne. Il vous dit que vous ne pouvez pas imposer que tous les documents du Parlement du Québec soient exclusivement en français. Donc là, il y a eu évidemment un ajustement qui est venu nous permettre d'atteindre l'équilibre.
Alors, au niveau de la coercition, ce que l'on dit, c'est que projet de loi n° 14, là, dans sa substance même, est presque exclusivement coercitif. Oui, il y a des impératifs dans la Charte de la langue française... fait en sorte que l'on doit faire... on doit évidemment servir en français également au niveau des entreprises de 50 employés et plus. Mais ça participe de cette atteinte d'équilibre qui, avec les années, fait en sorte que, oui, telle que rédigée aujourd'hui, la Charte de la langue française, là, tient la route, nous permet d'atteindre nos objectifs. On n'a pas besoin d'ouvrir ce débat-là. Puis, si on veut réellement parce qu'on est de bonne foi puis on est préoccupés par l'épanouissement du français, allons-y par de telles mesures. Là est l'avenir.

M. Pépin (Michel): La coercition, ça a marché quand même, pour une partie, pour la loi 101.

M. Tanguay: Ça prend un équilibre dans tout. Ça prend un équilibre dans tout. Là, y a un déséquilibre.

Une voix: Mais maintenant...

M. Tanguay:, Non, il y a un déséquilibre. Il y a un déséquilibre. Vous savez... Je vais vous donner un exemple, puis vous me direz si c'est équilibré. La ministre m'a répondu en Chambre - vous vous en rappelez - à une question. Je lui ai dit: Mme la ministre, pourquoi voulez-vous retirer la dernière étape de mise en demeure avant de poursuivre une PME qui aurait commis une infraction à la charte? Elle a dit: Vous savez - puis je vous invite à aller revoir les transcriptions - c'était trop de tracasseries pour l'Office de la langue française. Alors, on enlèverait l'étape de la mise en demeure.

Ça, là, c'est un déséquilibre pour la coercition. Ça veut dire quoi, M. et Mme Tout-le-monde qui nous écoutent? La judiciarisation. Vous faites une coche mal taillée, vous irez vous expliquer devant un juge. Ça, c'est un déséquilibre à la coercition. Ce que la loi présente... L'article 177 de l'actuelle Charte de la langue française nous dit: Vous allez envoyer une mise en demeure exigeant de corriger le tir après un certain délai, et c'est ça, une approche équilibrée, ce qui n'est pas le projet de loi n° 14.

M. Lacroix (Louis): Juste techniquement, M. Tanguay - vous n'avez pas tout à fait répondu à ma question tout à l'heure - quand vous dites: On va respecter la lettre du règlement parlementaire, qu'est-ce que ça veut dire, ça? Ça veut dire que vous allez utiliser tout le temps à votre disposition pour poser des questions, pour apporter des amendements, pour...

M. Tanguay: Vous savez, le projet de loi n° 14, là, le projet de loi n° 14, on va voter contre. La CAQ, vous les entendrez à trois heures. Si d'aventure la CAQ fait oeuvre commune avec le Parti québécois, nous aurons l'occasion, comme opposition officielle responsable, de respecter la lettre et l'esprit du règlement. Et ça, ça voudra dire évidemment que nous allons participer aux débats et nous allons faire les représentations comme je le fais aujourd'hui, comme nous l'avons toujours fait. Et nous allons porter notre message parce que l'on croit que ce n'est pas la voie. Si d'aventure la CAQ et le Parti québécois vont dans cette direction-là, nous serons très actifs, proactifs pour faire valoir notre vision.

Le Modérateur: En anglais.

M. Harrold (Max): M. Tanguay, why are you bringing these four things forward now? Are you feeling left out of the action?

M. Tanguay: No, not at all. I think that it's an important debate. I think that it's important also to answer the question: OK, you, what you will do if, by any chance, you have the occasion to put forward any suggestions? And those are the results of the consultation of what we have heard during this last consultation and, at the end of the day, these are very proactive. We are making a strong partnership with all the actors, and it's very positive. And that's the message that we heard from the great majority of those who took the time to present a brief during the hearings.

M. Harrold (Max): You talk a lot about cooperation.

M. Tanguay: Yes.

M. Harrold (Max): Why not go through with the study of the bill? You could propose your amendments...

M. Tanguay: No.

M. Harrold (Max): ...you could discuss and then vote no eventually. Why not just go to the next step?

M. Tanguay: Very good question. This is a total different approach than Bill 14. This approach is very proactive, not coercitive, and it's important to recognize that this doesn't mix, cannot mix with the substance of the Bill 14, the suggestions. Again, I think that it's important to see that we cannot build anything from Bill 14, and that's the reason why we oppose it, very clearly. But again, it's important to suggest as well.

M. Harrold (Max): And, in terms of Montréal, if I can just get you to... So, you say here there is a «stratégie commune» and you want to build on that...

M. Tanguay: Absolutely.

M. Harrold (Max): ...more support and «accompagnement»...

M. Tanguay: Yes.

M. Harrold (Max): ...than forcing people and... the coercion. So, why not talk about the status of Montréal as a bilingual city?

M. Tanguay: You mean, during the debate, if, by any chance, the CAQ goes with the PQ during the debate to add... or trying to add these suggestions to the bill? You know, I cannot try to amend section 177, by which we're going to get rid of the demand letter, and try to say: You know, I'd like to propose an amendment by which we will be... provide more efficient French course at primary school. It's not the same approach, it's not the same topic.
And again, these topics are very different, first, from the nature of those who are suggested in Bill 14, and we think clearly that, Bill 14, you cannot amend it. You cannot amend Bill 14 because it's the wrong approach by nature.

Mme Montgomery (Angelica): And Diane De Courcy came out this morning saying that she would have... showing this new, more open position on... What did you make of Mme De Courcy's new position this morning?

M. Tanguay: I think that, a little bit late, unfortunately, she realized that Bill 14 doesn't present what the Quebeckers want. You know, at the end of the hearing, I hope that she realized a couple of things and, for instance, that people want to be helped and not to add coercion. And I think that she realized that, and it's an attempt to try to convince the CAQ.
And now the CAQ, finally, will have the occasion to speak very clearly. Again, I refer you to their press release of last March the 8th, by which the CAQ said: OK, this, this, this. And there was four examples we're against these proposed amendment, but we think, and the CAQ mentioned that... they agreed with the modification to the Charter of Rights. Wow! Two weeks ago, the Barreau du Québec and the Commission des droits de la personne strongly mentioned that it could not happen, must not happen. Now, the CAQ is left with nothing to amend, and I'm curious to see if the CAQ will say: You know, we're going to vote for it and we're going to try to amend it. Amend what if you're not to talk about any amendment with respect, for this example alone, to the Charter of Rights?

Mme Montgomery (Angelica): Mme De Courcy says that, even though many business... all of the business groups said that they were against this bill, they came forward with recommendations, and it would be insulting not to consider them.

M. Tanguay: Yes. I mean, Mme De Courcy, as I mentioned a little bit earlier, realized that there's something very substantially wrong with the proposition included in the Bill 14. And I know that Mme De Courcy used to say: You know, this is just a short list of those who talk.
But again, Conseil du patronat, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, Fédération des chambres de commerce, Manufacturiers et exportateurs du Québec, Conseil canadien du commerce de détail, Conseil québécois du commerce de détail, des entreprises, l'association des dépanneurs... Ça commence à... It started to be not only a short list. And these people said one thing: You should get rid of these suggestions. You should get rid of these suggestions. And, at the end of the day, that's the message, that's the end result of our analysis, and that's the reason why we're going to be voting against this Bill 14.

M. Dougherty (Kevin): Mr. Tanguay, in the previous Assembly, there is a Bill 14, which was about mining, and the Parti québécois Opposition, at that time, used the rules, and as a result it was never adopted. Is that what's going to happen with this Bill 14?

M. Tanguay: Sorry, can you repeat the question? Sorry about that.

M. Dougherty (Kevin): You talked about your respect of the rules, of the «règlement».

M. Tanguay: Yes, absolutely.

M. Dougherty (Kevin): Yes. And I'm saying: In the last Assembly, there was a Bill 14, which was about mining. The PQ opposed it and the used the «règlement», amendments and dragging things out, and it never passed. Is that the kind of strategy you will have with this Bill 14?

M. Tanguay: I mean, we'll make sure to respect, again, the spirit and the letter of the procedures.

M. Dougherty (Kevin): ...

M. Tanguay: And are you giving me a good argument if, by any chance, the Parti québécois is unsatisfied with our action? We'll see. But, at the end of the day, we will the respect the spirit and the letter. We'll be there and, if we have to... and even if we we're the only ones standing up in front of the CAQ and the PQ - we'll see in a couple... in half an hour - we'll be those ones.

M. Dougherty (Kevin): I am wondering if there is a problem of methodology. Because, you know, when you say that more people have to be bilingual on the work place... There was a time when people had to be bilingual because the boss didn't speak French, right? But now it's because people have customers in others countries, in the United States.

M. Tanguay: Absolutely.

M. Dougherty (Kevin): So, are we asking the wrong question when we say: Do you have to use another language? Do you have use English? You know, why are you... Maybe we should say: Why are you using English in the work place? instead of «do you».

M. Tanguay: Yes. I think that we saw a clear extension of the importance, even for a small business, to have someone in the place to be able to answer the phone calls, to read the faxes, to answer an email - those are today's reality - to send a «texto» to someone in the US.
You know, we met a small business - there was five employees... not five, nine employees - where they were doing exclusively with a company in Russia, and the business was trading in English. So, it's not the day-to-day reality only to the huge businesses but also to the small businesses. And again, we're not going to be losing French because we're able to conduct business, for instance, in English or we will be able to talk and to communicate in English on the larger scale, obviously.

M. Pépin (Michel): Why do say it's late, those... Pourquoi cette proposition arrive-t-elle trop tard? C'est bien ce que vous avez dit à propos de Mme De Courcy à la réponse...

M. Tanguay: Non. Ce que je disais par rapport à ça, c'est que Mme De Courcy réalise... Et on me demandait: Quelle est votre lecture des propositions de Mme De Courcy de ce matin, qui semblait vouloir négocier avec la CAQ? Et je pense qu'elle était offusquée que le CAQ n'ait pas daigné donner suite dans la dernière semaine.

M. Pépin (Michel): Non, mais vous avez dit: It's a bit late. J'aimerais savoir en quoi est-ce que...

M. Tanguay: Non, je ne suis pas sûr. Il faudrait voir, là, mais le contexte, le point, là, juste pour m'assurer de bien répondre à votre question, je pense que c'est: «it's a bit late for Mme De Courcy» de réaliser qu'il y a un problème avec son projet de loi n° 14. Il est tard un peu pour Mme De Courcy de dire: Bien, voyez-vous... Elle s'offusquait qu'elle était devant presque un cul-de-sac, tout dépendamment de ce que dira la CAQ. Je pense qu'il est un peu tard, après les consultations, de le réaliser.

M. Pépin (Michel): Bien, pourquoi? Est-ce que ce n'est pas le processus normal, parlementaire? Après les consultations, on fait des ajustements.

M. Tanguay: Je vous pose une question: Croyez-vous qu'il aurait été du processus normal...

M. Pépin (Michel): ...

M. Tanguay: Non, mais je veux y répondre. Questions-réponses. Et je ne la formulerai même pas de façon interrogative.
Il aurait été du processus normal, par exemple, non pas le 12 mars dernier, de nous déposer une étude d'impact économique qui disait: Ça va coûter aux PME entre 25 et 30 millions, une étude que l'on peut également questionner. Il n'aurait pas été normal... Je pense que oui, il aurait été normal que l'étude lui soit remise avant le 5 décembre, date de dépôt du projet de loi. Et Mme De Courcy, candide, nous a dit, le 12 mars: «Je suis fière de déposer... À la question qui m'a été posée, quels sont les impacts économiques?, j'ai eu la réponse la semaine passée.» Elle nous disait ça le 12 mars.
Quand je dis que «it's a bit late, it's a bit late to call for a study, it's a bit late to read it and it's a bit late to say: You know, afterwards, OK. That's part of the answer that now we have. I think that it's the wrong approach» dans le fond et dans la forme.

M. Pépin (Michel): J'apprécie le temps que vous nous accordez pour répondre à toutes ces questions.

Le Modérateur: On va prendre une dernière question avec Régys.

M. Pépin (Michel): Oui, certainement. Mais je veux savoir qu'est-ce qu'on fait avec les unilingues francophones?

M. Tanguay: Avec les... Je veux juste comprendre... sûr de comprendre votre...

M. Pépin (Michel): ...les unilingues francophones en milieu de travail. Quel genre... Il y a des gens qui ne parlent que français.

M. Tanguay: Oui, puis il n'y a pas de problème là-dessus. Ce n'est pas... C'est important de reconnaître qu'il y a des gens qui sont plus touchés, en contact avec d'autres qui doivent communiquer en anglais, que d'autres personnes. Et en ce sens-là je pense que c'est l'atteinte de l'équilibre. Et, vous savez, ce que la ministre De Courcy voulait faire avec le projet de loi n° 14, c'est de dire à tous les employeurs du Québec: Tous vos postes, si tant est... Parce que ce n'est pas tous les postes qui requièrent l'anglais, mais, si tant est que vous demandez un tant soit peu l'anglais, vous devrez nous remettre un rapport à l'office démontrant la validité de votre demande de l'anglais. Encore une fois, c'est la mauvaise approche.
Mais, pour votre point, ceci dit, il y a des emplois qui ne requièrent pas, évidemment, de parler l'anglais. Et en ce sens-là pourquoi la ministre vient dire: Bien, tous ceux qui le requièrent, vous devrez... vous allez être enquêtés? Mauvaise approche.

M. Caron (Régys): M. Tanguay, vous répondez quoi aux gens qui vont vous dire: Les Canadien anglais unilingues anglophones, sachant que les Québécois sont bilingues, quand ils vont s'adresser à eux, c'est anglais que ça va se passer? C'est le sous-entendu au bilinguisme qui est soulevé souvent dans les rangs péquistes. Vous répondez quoi à ça?

M. Tanguay: Je pense qu'il est important, lorsque l'on veut être servi en français, de le demander. Et ça, vous savez, on a souvent, puis moi le premier, le réflexe de poursuivre en anglais parce qu'on est capables de parler et de communiquer en anglais. Puis je pense que c'est important de le demander, de l'exiger et de se faire servir en français lorsqu'on le désire et...

M. Caron (Régys): Là, vous parlez des restaurants, mais au travail, par exemple... Parce que Mme De Courcy a exprimé ce matin, encore une fois: son cheval de bataille avec son projet de loi n° 14, c'est surtout le français au travail. Alors, le sous-entendu dont je vous ai fait part, les communications avec le Canada anglais par exemple, sachant que les Québécois sont bilingues, est-ce que ce n'est pas en anglais que ça va se passer?

M. Tanguay: Bien, il est important, lorsqu'on a à avoir une communication d'affaires... Puis vous revenez sur le moyen du travail... ou le domaine du travail. Il est important, pour être efficace en 2013 au Québec aujourd'hui, si l'interlocuteur parle anglais, peu importe le contexte, d'être capable... et, si l'interlocuteur est capable de parler en français, bien, tant mieux, tout le monde est d'autant plus content, mais d'être capable de faire affaire en anglais quand la situation, évidemment, l'exige.
Et les PME aujourd'hui, le contexte de 2013, mondialisation de l'économie, fait en sorte que c'est nécessaire de reconnaître la hausse de cette demande de pouvoir communiquer en anglais. Et, je vous le dis, on ne perd pas sa langue en parlant... en étant capable de communiquer en anglais ou dans une autre langue.

Des voix: Merci.

M. Tanguay: Merci à vous.

(Fin à 14 h 34)

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