L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Actualités et salle de presse > Conférences et points de presse > Point de presse de Mme Françoise David, députée de Gouin, et M. Jean-François Lisée, porte-parole de l'opposition officielle en matière de services sociaux, de protection de la jeunesse, de soins à domicile et de prévention

Recherche avancée dans la section Actualités et salle de presse

La date de début doit précéder la date de fin.

Point de presse de Mme Françoise David, députée de Gouin, et M. Jean-François Lisée, porte-parole de l'opposition officielle en matière de services sociaux, de protection de la jeunesse, de soins à domicile et de prévention

Version finale

Le mardi 17 février 2015, 13 h 15

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Treize heures dix-huit minutes)

Mme Cyr (Claudelle) : Alors, mesdames messieurs, merci d'être présents. Je me présente, je suis Claudelle Cyr, directrice du Regroupement des organismes communautaires de l'Estrie. Je voudrais aussi remercier la présence des députés Mme Françoise David de Québec solidaire et M. Jean-François Lisée du Parti québécois, qui sont ici en appui à nos revendications aujourd'hui.

Donc, la Coalition des tables régionales d'organismes communautaires regroupe 14 regroupements régionaux d'organismes présents dans 14 régions du Québec, donc, qui oeuvrent majoritairement en santé et services sociaux. On est plusieurs milliers d'organismes communautaires.

Vous entendez aujourd'hui, pour la ixième fois encore, des gens dénoncer la Loi modifiant l'organisation de la gouvernance dans le réseau de la santé et des services sociaux notamment par l'abolition des agences, ce qui était le projet de loi n° 10. Le titre en dit long sur la volonté du ministre de vouloir s'attaquer encore une fois, tout comme l'ensemble de l'appareil gouvernemental actuellement, à tout ce qui pourrait avoir une connotation régionale. On va y revenir plus tard.

Mais pourquoi les organismes communautaires sont inquiets de cette réforme? Ils sont inquiets, car on voit une hypercentralisation des pouvoirs entre les mains d'un ministre, partant de la nomination des conseils d'administration, allant à la planification stratégique régionale, allant jusqu'aux activités de perfectionnement destinées aux membres des organismes communautaires. Ce n'est pas parce qu'un médecin est disponible à deux coins de rue de chez soi qu'on peut parler d'un service de proximité. Les services de proximité, c'est des services qui sont définis dans la localité, définis avec les gens, à partir des gens et des besoins. Les organismes communautaires, on est reconnus pour être capables de répondre rapidement aux besoins émergents : c'est la soupe populaire qui permet aux chômeurs, parce que l'usine vient de fermer dans le quartier, de manger un repas chaud entre la recherche d'emploi, les dettes qui s'accumulent puis l'insécurité qui s'installe; c'est l'organisme d'aide aux devoirs qui ouvre une nouvelle plage horaire parce que, dans sa région, il y a une augmentation du décrochage scolaire importante; c'est tout, sauf du mur-à-mur.

Les organismes travaillent avec les gens à partir de leur réalité et non à partir d'orientations stratégiques élaborées dans un bureau à Québec par un radiologiste et son équipe. Ces organismes sont non seulement inquiets, ils sont inquiets de comment ils vont pouvoir répondre aux personnes avec qui et pour qui ils travaillent. Mais ils sont aussi inquiets de savoir si le travail de concertation qui a été mis en place depuis plus de 20 ans avec les régies régionales et par la suite ce qui s'est appelé les agences de santé et de services sociaux sera complètement à refaire parce qu'anéanti par la grosse machine que sera le CISSS. Parce que, dans les faits, les organismes communautaires pèsent bien peu dans la balance face à un centre hospitalier. On craint d'être oubliés, mais aussi de ne pas être écoutés, comme on a pu l'être à l'intérieur de nos structures régionales depuis des dizaines d'années. Je laisse maintenant la parole à ma collègue Véronique Thibault.

Mme Thibault (Véronique) : Bonjour. Donc, Véronique Thibault, coordonnatrice de la Table régionale des organismes communautaires du Bas-Saint-Laurent. Eh bien, comme vient de dire ma collègue, vous voyez que les impacts en région sont très grands.Notamment, le gouvernement, présentement, nous impose un modèle de gestion centralisée dans toutes les régions avec le même modèle. Il y a une perte importante de la marge de manoeuvre pour maintenir les spécificités régionales. Il y a des ententes, dans certains dossiers, qui vont tomber. On va avoir beaucoup les impacts… On a vu notamment tout ce qui se passe avec les travailleurs de rue. Donc, les impacts sont déjà réels, et encore il y en aura beaucoup à venir au cours des prochaines semaines, malheureusement. Les besoins ne sont pas les mêmes d'une région à l'autre, et je peux vous le dire, pour vivre dans une de celles-là, on ne peut pas comparer le Bas-Saint-Laurent avec la Gaspésie, avec la Côte-Nord, avec Chaudière-Appalaches ou l'Outaouais. Nous avons tous des spécificités vraiment précises d'une région à l'autre, et c'est ce qui fait la beauté du Québec présentement. Et les priorités ne sont pas les mêmes non plus d'une région à l'autre. Donc, c'est très important de pouvoir respecter cela, et surtout de faire en sorte qu'on ne perd pas la couleur de chacune de nos régions.

Il faut rappeler l'importance de la régionalisation. Chaque région est différente, comme je viens de vous le dire, mais en plus les citoyens doivent pouvoir s'exprimer et être représentés de façon adéquate. On doit être capables de rejoindre nos représentants. N'oubliez pas que, dans la majorité des régions du Québec, peut-être qu'il n'y a pas autant de population que dans les grands centres, mais, au niveau de la situation géographique, nous avons des territoires immenses que nous devons couvrir, et cette réalité-là, on n'en tient pas compte présentement.

Il y a aussi une perte au niveau de la régionalisation, mais pas seulement en santé, mais aussi dans le développement économique régional. Il y a eu des impacts très récemment, on en a beaucoup parlé, au niveau des coupes dans les conférences régionales des élus, les centres locaux de développement, les carrefours jeunesse-emploi et l'aide aux milieux dévitalisés. Notamment, pour les CRE, une des pertes importantes en région, c'est le FQIS, qui n'existera plus, c'est-à-dire les fonds de lutte à la pauvreté. Au Bas-Saint-Laurent, en ce moment, toute la région s'est concertée ensemble pour faire un grand lancement régional, justement, pour lutter contre la pauvreté, et ces initiatives-là, on ne pourra plus les avoir parce qu'on n'a plus d'argent pour les faire, donc on n'aidera plus les clientèles les plus vulnérables dans chacune de nos régions. On parle d'une perte financière importante, bien sûr, mais une perte d'expertise essentielle à chacune de nos régions et de représentation également.

Et finalement je conclurais en disant que, nous, présentement, à la CTROC et chacun de mes collègues de toutes les régions du Québec présents, nous appuyons officiellement le collectif Touche pas à ma région!, qui est présent dans huit régions du Québec en ce moment. C'est très important pour nous parce que ce qui se passe, c'est vraiment une implication citoyenne. Ce n'est pas vrai qu'il y a une majorité silencieuse qui existe, on le voit présentement dans nos régions, ce qui se passe, il ne faut pas se laisser faire, on n'est pas d'accord avec ça. Voilà. Alors, je cède maintenant la parole à M. Lisée.

M. Lisée : Je vais laisser Françoise y aller d'abord.

Mme David (Gouin) : Bon, petit mélange. Merci beaucoup d'être présents en si grand nombre. Merci aux organismes communautaires de s'être déplacés ici, à l'Assemblée nationale. Je pense que c'est important d'entendre leur cri du coeur. Puis ce cri du coeur là, évidemment, je le partage beaucoup, c'est un milieu dont je viens, donc je le comprends et non seulement je le comprends, mais je l'appuie au nom de Québec solidaire, au nom de ma collègue Manon Massé, qui est aussi ici présente.

Écoutez, durant toutes les consultations sur le projet de loi n° 10, on n'a cessé de dire au ministre responsable : Vous allez trop loin, vous centralisez trop, vous vous gardez trop de pouvoirs, il faut que les régions puissent vivre, il faut qu'elles puissent respirer, mais non seulement les régions, moi, je dirais les localités, les municipalités, les villages, les quartiers des grandes villes. C'est de ça aussi qu'il est question aujourd'hui. Donc, quand les organismes communautaires disent : Plus d'autonomie, plus de capacités de répondre réellement aux besoins des gens à la base, bien, évidemment, comment voulez-vous qu'on ne soit pas d'accord?

Nous allons déposer une motion aujourd'hui, appuyée entre autres par les collègues du Parti québécois, et, dans cette motion, nous allons demander, vraiment, au ministre de respecter l'autonomie des régions et leur capacité de se définir elles-mêmes, de respecter les ententes déjà prises par les agences de la santé et des services sociaux avec les organismes communautaires, mais on va aussi demander au gouvernement du Québec de vraiment bien prendre en compte le fait que, sur les conseils d'administration des nouveaux établissements régionaux, les CISSS, centres intégrés de santé et de services sociaux, il y a maintenant un poste pour les organismes communautaires. Nous ne voulons pas que la personne qui occupe ce poste vienne de n'importe où et de nulle part. Nous souscrivons à la demande de la Coalition des tables régionales d'organismes communautaires à l'effet que ce soit une personne, vraiment, du communautaire, rattachée au communautaire, proposée par le communautaire parce que sinon, bien entendu, ça n'a aucun sens. Merci.

M. Lisée : Merci, Françoise, Claudelle Cyr, Véronique Thibault, tous ceux qui sont là des tables régionales. De quoi il est question, au-delà de tous ces débats de structure? Bien, c'est de la pauvreté au Québec, la pauvreté au Québec. On peut s'enorgueillir ici d'avoir réussi, après 1996‑1997 et malgré un déficit zéro qui avait été difficile à atteindre, à avoir une chute du taux de pauvreté, au Québec, plus forte que n'importe où en Amérique du Nord. Et ça, c'est une réussite qu'on doit beaucoup au communautaire, aux gens qui sont sur le terrain, aux gens qui se désâment, qui prennent 1 $ et qui font des miracles avec ça auprès des gens qui sont en dépendance, auprès des itinérants, auprès des gens qui sont en réinsertion sociale, qui redonnent de la vie de quartier, qui distribuent du bonheur de vivre à des gens qui n'en avaient plus.

Et ça, ça a été possible parce qu'on a réussi de toutes sortes de façons : en aidant l'économie sociale, en aidant les municipalités, en aidant les groupes communautaires eux-mêmes à créer un tissu économique suffisant — pas optimal, mais suffisant — pour faire baisser la pauvreté au Québec. Et là ce qu'on voit, en ce moment, c'est la déconstruction de ces outils-là, qui sont nombreux, qui va faire en sorte que notre capacité à rendre la pauvreté moins misérable et à faire sortir les gens de la pauvreté est en train d'être amoindrie de façon très significative.

Alors, on parle du projet de loi n° 10, mais, lorsque la ministre Charlebois dit : Ah! On a au moins indexé les budgets des groupes communautaires, bien d'abord ils ont indexé seulement la somme globale, pas la somme de chaque groupe communautaire, et ils avaient admis eux-mêmes que les groupes communautaires étaient sous-financés. Et nous, on s'en souvient, avec Véronique Hivon, on voulait augmenter ce financement-là.

Mais ce n'est pas tout. C'est la réponse qu'elle donne : Mais ce n'est pas tout. Comme on l'a dit avant moi, couper les CRE, c'est couper des sommes qui allaient aux organisations communautaires contre la pauvreté; couper les CLD, c'est faire la même chose; couper les centres jeunesse-emploi, c'est faire la même chose; couper 300 millions de dollars aux municipalités dans le nouveau pacte fiscal, c'est dire aux municipalités d'arrêter de financer des groupes communautaires.

Moi, je le vois dans Rosemont : dans Rosemont, on a des groupes communautaires qui n'ont plus leurs budgets parce que la ville a coupé. L'arrondissement coupe, et c'est le communautaire qui écope. Et la nouvelle entente Québec-Canada sur l'itinérance, qui a enlevé des sommes très importantes aux groupes de lutte à l'itinérance qui en faisaient un usage polyvalent et qui maintenant ne peuvent plus y avoir accès, tout ça cumulé fait que le gouvernement Couillard est en train de déconstruire ce que le Québec, collectivement, avait fait pour sortir des Québécois de la pauvreté.

Alors, l'expression qui est faite aujourd'hui devant vous, là, c'est une des premières vagues, d'un certain nombre de vagues d'impact. Et l'impact, ça va être plus d'itinérance, plus de pauvreté, plus de dépendance, et, à la fin, plus d'hospitalisations, plus d'incarcérations, qui coûtent beaucoup plus cher que les petites sommes que M. Coiteux, M. Couillard pensent économiser en serrant la vis aux gens qui, tous les jours, sont dévoués pour les Québécois les plus fragiles.

Alors, évidemment, le Parti québécois, mon collègue Harold LeBel, qui s'occupe des questions de pauvreté, on est à 100 % avec les groupes qui sont aujourd'hui devant vous pour dire au gouvernement du Québec : Assez, c'est assez! Prenez acte du dommage que vous causez. Et quelqu'un qui n'est pas aidé aujourd'hui, ça va être un problème social pour lui et pour la société plus tard, alors c'est le temps de rebrousser chemin avant qu'il ne soit trop tard. Merci beaucoup.

Mme Cyr (Claudelle) :Donc, pour le mot de la fin, on voudrait répondre à la ministre Charlebois, qui met en doute, actuellement, nos difficultés financières dans le milieu communautaire. Nous rappelons à Mme Charlebois que nous sommes en campagne de mobilisation sur la question de notre financement depuis octobre 2012, donc ça ne date pas d'hier, et on voudrait aussi lui rappeler que son parti a appuyé une motion unanime à l'Assemblée nationale, en mai 2013, reconnaissant le sous-financement des organismes communautaires.Si hier les organismes communautaires étaient sur la corde raide, aujourd'hui, bien, ils ont la corde au cou.

Mme Thibault (Véronique) :Je voudrais aussi rappeler la présence avec nous, derrière les caméras, de mes collègues de toutes nos… de nos régions, en fait, ceux qui sont à la CTROC, notamment la Gaspésie et l'Abitibi, qui sont particulièrement touchés par toutes les coupes et l'austérité en ce moment. Donc, si jamais vous aviez des questions, sachez qu'ils sont là.

La Modératrice : Pour la période de questions, je vais vous demander de venir poser vos questions au micro. On a des invités aujourd'hui, donc les questions sur le sujet, s'il vous plaît. Si vous avez des questions sur autre chose, venez nous voir après. On va commencer avec le micro de gauche, Régys Caron.

M. Caron (Régys) : Oui, bonjour. Je comprends que vous dénoncez autant sinon davantage les coupes budgétaires que le projet de loi n° 10.

Mme Cyr (Claudelle) :Bien, en fait, ce qu'on dénonce par rapport au projet de loi n° 10, c'est toute la centralisation des pouvoirs. Donc, aujourd'hui, on est ici pour dire que le projet de loi n° 10, associé à tout ce qui a été fait avant, donc l'abolition de ce qui a été dit par ma collègue, des CRE, des CLD, etc., renforce encore une fois une hypercentralisation entre les mains du gouvernement.

M. Caron (Régys) : Quelles sont les conséquences que vous voyez sur le terrain quant à la réduction de vos budgets? Vous avez évoqué les travailleurs de rue, vous avez évoqué l'aide aux devoirs, la soupe populaire. Quels sont les services qui sont… qui disparaissent avec ce que vous dénoncez aujourd'hui?

Mme Thibault (Véronique) :Bien, en ce moment, je peux vous dire qu'on est vraiment touchés par l'effet domino. Toutes les coupes annoncées par le gouvernement ont un effet, présentement, dans le communautaire. C'est aussi simple que ça.

M. Caron (Régys) : Quels sont ces effets?

Mme Thibault (Véronique) : Quels sont ces effets? Bien, si les commissions scolaires ne peuvent plus aider, par exemple, des parents qui ont des enfants avec une déficience intellectuelle ou physique, bien, les organismes communautaires devront le faire, la même chose pour l'aide aux devoirs, la même chose pour à peu près tout ce qui existe, tout ce que les organismes communautaires font présentement, ce qui fait qu'on a une augmentation de la clientèle qu'on peut déjà voir.Et l'impact est là parce qu'on ne peut plus répondre adéquatement à nos missions, puisque, comme on a une augmentation, présentement, de la clientèle, on n'a pas plus d'argent pour les aider. On voudrait offrir notre service de première ligne comme nous devons le faire, mais on n'a pas les moyens de le faire en ce moment.

Le Modérateur : Micro de droite, Marco Bélair.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Bonjour. Une précision : Vous dites que vous constatez, vous observez une augmentation de la clientèle, pouvez-vous la spécifier?

Mme Cyr (Claudelle) :Bien, on voit de plus en plus de travailleurs venir cogner aux portes des organismes communautaires, ce qui, il y a 10 ans, était à peu près inexistant. Donc, on a des familles qui viennent cogner à la porte parce qu'ils ont besoin d'un sac à dos pour leur jeune au mois de septembre, parce que ce n'est plus vrai que l'éducation publique, elle est gratuite. On a des travailleurs dont les usines ferment et qui doivent venir, comme on l'a mentionné tantôt, chercher des denrées dans les banques alimentaires. Avant, les travailleurs réussissaient à subvenir à leurs besoins. Là, aujourd'hui, le salaire minimum ne suffit plus, et on cogne chez nous.

M. Bélair-Cirino (Marco) :Mais c'est un phénomène qui n'est pas apparu hier, vous constatez cette hausse-là depuis quelques mois déjà?

Mme Thibault (Véronique) :Oui, mais le visage de la pauvreté a beaucoup changé, puis on le voit vraiment beaucoup, aussi, depuis les coupes, on voit vraiment que ça augmente. Oui, ça avait commencé un peu avant, mais on voit vraiment l'impact, en ce moment, directement dans les organismes communautaires, que ce soit dans les banques alimentaires, que ce soit dans tous les organismes qui aident directement la population pour les clientèles plus dévitalisées ou en problématique de crise. On voit vraiment, présentement, l'effet.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Puis qu'est-ce que vous répondez lorsque la ministre, justement, Charlebois, vous répète qu'elle a indexé les sommes allouées aux organismes communautaires?

Mme Cyr (Claudelle) :L'indexation ne date pas d'hier, l'indexation des budgets. On a eu une indexation, mais vous conviendrez, entre vous et moi, qu'une indexation de 0,9 % ou de 1 %, ça ne couvre pas l'augmentation de mon loyer pour l'organisme, ça ne couvre pas l'augmentation du nombre de cafés que je dois servir parce que j'ai plus de monde chez moi, ça ne couvre pas un nouveau salaire parce qu'il y a de plus en plus de monde qui ont des problèmes de santé mentale et qui viennent aussi cogner à ma porte.

Mme Thibault (Véronique) :Puis vous savez que les employés des organismes communautaires, très souvent, sont d'abord et avant tout des gens très compétents, et il y en a plusieurs qui ont un salaire qui frôle une situation de pauvreté parce que, justement, on n'a pas les moyens de payer adéquatement des intervenants. Il y a des intervenants qui gagnent 12 $ ou 13 $ de l'heure puis ils font du 28 heures-semaine. Si vous faites un calcul rapide, ce n'est pas beaucoup, là.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Vous dites que la majorité silencieuse n'appuie pas les mesures de redressement financier, budgétaire du gouvernement Couillard. Les sondages laissent entendre, disons, le contraire ou du moins…

Mme Thibault (Véronique) :Moi, ce n'est pas ce que je vois chez nous, sur le terrain.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Mais qu'est-ce que vous dites à la majorité silencieuse, celle qui appuie toujours le gouvernement Couillard, qui appuie les mesures prises pour atteindre l'équilibre budgétaire? Qu'est-ce que vous dites à ces gens-là, là?

Mme Cyr (Claudelle) :Bien, faites le calcul, vous allez le voir vous-même combien ça vous coûte plus cher d'Hydro-Québec, combien ça vous coûte plus cher dans les CPE, combien ça vous coûte plus cher pour l'hypothèque, combien ça coûte plus cher pour tout, finalement. Puis au bout du compte, ils vont le voir, ça vient jouer dans nos poches, en plus des impôts qu'on paie.Puislà on va finir par se poser la question : Pourquoi qu'on paie des impôts si on paie de plus en plus nos services? Et là on tombe dans un cercle vicieux où la répartition de la richesse, elle n'a plus de valeur.

La Modératrice :Micro de gauche, Alain Laforest

M. Laforest (Alain) :Est-ce qu'ondoit reporter l'équilibre budgétaire?

Mme Thibault (Véronique) :Mais, vous savez, on n'est pas… On comprend qu'il y a certaines coupes qui doivent se faire. Par contre, arrêtons d'aller chercher l'argent dans les poches de ceux qui n'en ont déjà plus. Il faut aller chercher l'argent ailleurs. Présentement, il y a la coalition main rouge qui offre 10 milliards de solutions au gouvernement, et le gouvernement n'écoute pas ça, ne veut pas le voir. On offre d'autres solutions, présentement, qui existent. On ne dit pas d'arrêter toutes les coupes, on dit de le faire autrement, d'arrêter d'aller chercher…

M. Laforest (Alain) :…banques?

Mme Cyr (Claudelle) :Oui, ou, tu sais, de diminuer le plafond des REER. Il n'y a pas grand monde qui ont les moyens de mettre 24 000 $ par année dans un REER, donc ne serait-ce que de diminuer ce crédit d'impôt là, on peut aller chercher plusieurs millions; mettre un nouveau palier d'imposition, on peut aller en chercher. Bien sûr, les banques, mais, si on veut y aller même un peu moins évanescent dans les mesures comme de dire lutter contre les paradis fiscaux qu'on a de la misère à chiffrer, concrètement il y a des mesures aussi qui sont possibles, mais ça ne favorise pas… Ça ne semble pas avoir une oreille.

M. Laforest (Alain) : On sait qu'actuellement on a un problème d'augmenter l'écart de richesse entre les riches et les pauvres au Québec, là, et c'est de plus en plus marqué. Vous en parlez, vous travaillez à Sherbrooke, vous savez, il y a beaucoup de fermetures d'usines, Dominion Textile, et tout ça. Est-ce qu'on est en train d'écraser la classe moyenne, actuellement?

Mme Cyr (Claudelle) :Bien, on pense que oui. Vous parlez de Sherbrooke, moi, j'habite Sherbrooke. On regarde à East Angus, avec la fermeture de Cascades, on ne sait pas ce qui va arriver, là, avec toutes les nouvelles… les mesures, justement, où est-ce qu'on enlève de plus en plus de pouvoirs aux municipalités, c'est inquiétant. Et effectivement ça risque de… Ça risque d'écraser encore davantage. La classe moyenne, il n'y en aura plus à ce rythme-là.

Mme Thibault (Véronique) :Et c'est de même partout au Québec, en fait, parce que, comme nous, par exemple à Rimouski, si je prends chez nous, on était beaucoup… excusez-moi…

Mme Cyr (Claudelle) :Institutionnalisés.

Mme Thibault (Véronique) : … — merci — au niveau des institutions. Donc, en coupant dans les commissions scolaires, on perd des emplois importants. En coupant dans les cégeps, les universités, on perd des emplois très importants. La fonction publique, en ce moment, on ne sait même pas ce qui va se passer au cours des prochaines semaines. Tout ça fait en sorte qu'on fragilise, en ce moment, la région. Il y a déjà des gens qui ont une expertise incroyable, qui ne prennent pas de chance, puis ils vont aller dans les grands centres chercher un emploi plutôt que de rester dans une région où ils voudraient rester à la base.

La Modératrice : Une dernière?

M. Caron (Régys) : …précision : Pouvez-vous dépeindre le nouveau visage de la pauvreté que vous avez évoqué?

Mme Thibault (Véronique) :Bien, c'est… Ce n'est plus… Avant, on pensait beaucoup que c'était les gens qui vivaient dans la rue. Mais maintenant c'est vraiment des familles, c'est aussi des jeunes enfants, c'est des étudiants. C'est vraiment des travailleurs, maintenant, qui vont chercher de l'aide. On voit vraiment qu'il y a vraiment un virage qui se passe. Et les organismes communautaires le voient vraiment très bien.

Mme Cyr (Claudelle) :On parlerait aussi de plus en plus de pauvreté économique. Avant, la pauvreté économique était beaucoup liée à la pauvreté culturelle et à la pauvreté au niveau de l'éducation, etc. Là, on a une pauvreté économique qui touche absolument... à peu près, à beaucoup plus de gens.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Avez-vous tenté de rencontrer la ministre? Est-ce qu'il y a une demande formelle à son cabinet qui a été faite?

Mme Cyr (Claudelle) : Pas encore.

La Modératrice : O.K., merci beaucoup.

Des voix : Merci.

(Fin à 13 h 39)

Participants


Document(s) associé(s)