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Point de presse de M. Dave Turcotte, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi et d'économie sociale, et en matière de lutte à la pauvreté et de solidarité, et Mme Françoise David, députée de Gouin

Version finale

Le mardi 9 février 2016, 11 h 30

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Onze heures quarante-cinq minutes)

Mme Larivière (Virginie) : Bonjour. Aujourd'hui, c'est la rentrée parlementaire et c'est aussi la reprise des travaux de la Commission sur l'économie et le travail qui étudie le projet de loi n° 70. Depuis le début de cette commission parlementaire, on a eu droit à un remaniement ministériel. Comme vous le savez, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale est donc désormais entre les mains du ministre François Blais.

On est ici aujourd'hui pour lui rappeler qu'outre la question fondamentale des droits de la personne sur laquelle le projet de loi n° 70 devrait être plus en adéquation on est ici en cette journée de reprise des consultations particulières de la commission pour faire la démonstration par les chiffres que le projet de loi n° 70 est tout simplement voué à l'échec. Les derniers chiffres de Statistique Canada démontrent clairement qu'en 2015, pour un emploi vacant, il se trouvait cinq personnes en recherche d'emploi. En 2015, il y avait 69 485 emplois vacants et 342 000 chômeurs. Ce que ces chiffres-là nous disent, c'est que le marché de l'emploi est un marché compétitif, difficile, exigeant, au sein duquel il y a cinq personnes pour un emploi vacant.

Ce que ça veut dire aussi, c'est que le projet de loi n° 70 ne fait aucun sens. Obliger les personnes assistées sociales à intégrer le marché du travail en espérant les voir y rester de façon durable alors que l'on sait qu'il y a des milliers de personnes en recherche d'emploi qui n'y arrivent pas, c'est absurde et improductif. Le marché de l'emploi ne peut tout simplement pas remplir la promesse du projet de loi n° 70. En conséquence, le collectif invite le ministre Blais à miser sur une approche volontaire par rapport aux programmes d'aide à l'emploi et aux programmes de formation. Forcer des personnes, ce n'est pas une option ni pour les personnes ni pour le gouvernement.

M. Petitclerc (Serge) : En fait, au-delà du projet de loi n° 70, le ministre Blais est aussi responsable des consultations en vue du prochain plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Le ministre doit être aussi responsable de tout le processus qui va entourer la mise en place d'un éventuel revenu minimum garanti. Et ce qu'on dit aujourd'hui, ce qui a été dit dans les derniers jours et, dans les prochaines semaines, ce qui va être dit, c'est que l'approche punitive à l'aide sociale, ça ne fonctionne tout simplement pas et qu'il y a une profonde contradiction entre les autres mandats de M. Blais ainsi que le projet de loi n° 70.

Ce que demande le collectif, dans le fond, le Collectif pour un Québec sans pauvreté, c'est que le ministre précise ses intentions. Au minimum, on s'attend à ce que, cet après-midi en commission parlementaire, le ministre annonce ou dépose tout simplement des amendements à son propre projet de loi pour mettre de côté l'approche punitive qui, entre autres, se trouve à l'article 28 du projet de loi, qui porte sur la création du programme Objectif emploi. Dans le fond, notre message, c'est que, M. Blais, vous avez une occasion en or, dès cet après-midi, de ramener le débat sur l'essentiel, c'est-à-dire de sortir les gens de la pauvreté et qu'on arrête de perdre notre temps à discuter, à s'obstiner sur le caractère odieux de l'approche punitive et sur l'inefficacité de cette approche-là. Merci beaucoup. Jean-Yves.

M. Desgagnés (Jean-Yves) : Alors, bonjour. Donc, à titre de professeur et directeur du Module en travail social de l'UQAR, je tiens, dans le fond, à apporter, en fait, mon appui aux demandes du collectif, qui sont totalement justifiées. Alors, il est à espérer, dans le fond, que le ministre Blais, finalement, qui est un chercheur, un professeur d'université, dans le fond, élève le débat. Parce que jusqu'à maintenant, malheureusement, les arguments utilisés pour justifier le projet de loi n° 70 et justifier, dans le fond, l'approche punitive sont fondés, effectivement, sur des préjugés. Quand on regarde, effectivement, l'évolution des prestataires à l'aide sociale, ce qu'on sait, dans le fond, c'est qu'au cours des 20 dernières années le nombre de ménages à l'aide sociale a diminué de 50 %. Alors, j'invite donc le ministre Blais à élever le débat, à fonder, finalement, ses décisions et les solutions pour aider les jeunes sur des bases scientifiques et des études sérieuses.

Et une des... Et, par exemple, le ministre Blais pourrait, par exemple, rétablir ce qu'on appelle... ce qui s'appelait jadis le programme Alternative jeunesse. C'est un programme qui permettait à 6 000 jeunes par mois de pouvoir, effectivement, entreprendre une démarche de réinsertion sociale qui menait éventuellement à l'intégration en emploi. 6 000 jeunes, sur une base volontaire, de 2007 à 2014, ont participé à ce programme-là. Alors, pourquoi le gouvernement a-t-il aboli un programme qui fonctionnait et qui ciblait, justement, les jeunes qui sont ciblés par le programme Objectif emploi? Donc, voilà.

Alors, effectivement, l'approche punitive, ce n'est pas, effectivement, la solution. Le programme Alternative jeunesse a démontré que c'est possible d'avoir une approche volontaire. Et n'oublions pas aussi que les gens à l'aide sociale sont en compétition aussi avec les 325 000 chômeurs, chômeuses qui cherchent de l'emploi. Alors donc, la compétition pour les emplois, elle est très difficile. Les gens qui se retrouvent à l'aide sociale, en général, partent de très loin. Ils ont besoin de soutien et non pas d'un coup de bâton pour intégrer le marché de l'emploi.

M. Turcotte : Donc, ça me fait plaisir, au nom du Parti québécois, de me joindre au Collectif pour un Québec sans pauvreté et à ma collègue de Québec solidaire pour, justement, dénoncer ce projet de loi, le projet de loi n° 70, qui, comme je l'ai dit et je le répète, s'attaque davantage aux pauvres qu'à la pauvreté. Au même moment où le même gouvernement est en train, derrière des portes closes, de tenir des consultations sur le plan de lutte à la pauvreté et l'exclusion sociale, pourquoi étudier à la hâte ce projet de loi qui va créer davantage de pauvreté qu'il y en a déjà en ce moment au Québec?

Donc, pour le Parti québécois, moi, comme porte-parole, nous demandons le retrait du projet de loi n° 70. Nous avons autre chose à faire que du bricolage avec le ministre Blais et en commission parlementaire, où là on va prendre un article, on va le modifier, on va écouter, quand les gens n'ont pas tous été entendus, tous ceux qui voulaient... entendus. Nous avons demandé des consultations générales, nous avons eu des consultations particulières triées sur le volet.

Donc, il y a, au sein du gouvernement actuel, une non-volonté d'écouter la population, des gens qui ont des choses à dire, des choses intéressantes, des choses pertinentes. Et, je le répète, nous considérons que, par efficacité, pour s'assurer de lutter efficacement contre la pauvreté et non s'attaquer aux pauvres comme le gouvernement veut le faire... nous considérons qu'il est plus sage de la part du nouveau ministre, M. Blais, de réétudier son projet de loi, de nous arriver avec une nouvelle mouture qui va respecter davantage l'ensemble des Québécoises et des Québécois.

Mme David (Gouin) : Donc, au nom de Québec solidaire, je veux exprimer mon accord avec mon collègue du Parti québécois et, bien sûr, mon accord avec les gens du collectif. On a devant nous un projet de loi mal ficelé, dans sa première et sa deuxième partie, d'ailleurs, la partie qui porte sur les partenaires du marché du travail, le mandat de la commission, et particulièrement la partie qui porte sur l'aide sociale, qui est vraiment épouvantable. Je ne suis pas certaine que le ministre va accepter de vraiment refaire ses devoirs. Alors, au minimum, si M. Blais refuse notre proposition, il doit, dès cet après-midi, annoncer qu'il renonce à tout ce qui est la partie coercitive de ce projet de loi là. C'est parfaitement inefficace, inutile, improductif, et, oui, ça s'appuie essentiellement sur les préjugés qui disent qu'on sait bien, les gens à l'aide sociale ne veulent pas travailler, ce qui est tellement faux.

Je réitère aussi notre préoccupation démocratique, qui rejoint celle de mon collègue, quant à la petitesse de cette consultation. Plusieurs organismes auraient voulu être entendus et ne le sont pas, je pense, entre autres, au Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes à Montréal, mais je pense aussi au Syndicat de la fonction publique, qui réunit les agentes et agents de l'aide sociale et des centres locaux d'emploi, qui n'a pas été entendu, qui s'est vu refuser le droit de venir s'exprimer. Pourtant, voilà des gens qui connaissent la machine de l'intérieur et qui sont capables — leur mémoire est éloquent — de venir nous dire que, déjà, il y a de graves problèmes à répondre aux besoins réels des personnes assistées sociales. Alors, le projet de loi n° 70 ne s'attaque pas du tout à ce problème. Je demande au ministre Blais, si la commission se poursuit, d'entendre le Syndicat de la fonction publique du Québec, d'entendre les gens qui sont aux premières lignes dans ce travail qui devrait consister à aider les personnes pauvres et non pas à se battre contre elles. Merci.

La Modératrice : Merci. Donc, s'il n'y a pas de question, nous en terminerons ici. Merci.

(Fin à 11 h 54)

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