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Point de presse de Mme Françoise David, députée de Gouin, M. Amir Khadir, député de Mercier, et Mme Manon Massé, députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques

Version finale

Le mardi 22 mars 2016, 15 h 35

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Quinze heures trente-six minutes)

Mme David (Gouin) : Alors, mesdames messieurs, bonjour. Vous aurez remarqué qu'une motion améliorée, je dirais, mais qui, sur le fond des choses, est la même que celle de jeudi dernier, donc présentée par Québec solidaire, vient d'être adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale et, qui plus est, avec un vote par appel nominal. Nous en sommes très heureux, nous sommes très fiers d'avoir contribué à un pas en avant dans cette Assemblée nationale.

Je vous fais remarquer que, dans cette motion, nous félicitons l'UPAC pour son excellent travail, nous demandons au gouvernement d'agir avec diligence et de mettre en route, là, tous les principes des recommandations de la commission Charbonneau et nous lui demandons aussi d'élargir la portée du projet de loi sur les lanceurs d'alerte. Alors, vous aurez remarqué que le gouvernement libéral a consenti à cette motion. J'en conclus que le projet de loi sur les lanceurs d'alerte sera élargi aux entreprises et aux municipalités.

Et enfin la motion demande à tous les partis politiques de coopérer, n'est-ce pas, de façon claire et de rembourser au DGEQ les sommes qui auraient été illégalement acquises. Or, nous sommes à même de vous apporter quelques exemples, dans certains cas, de décisions rendues par le Directeur général des élections et qui, sans l'ombre d'un doute, viennent dire que de l'argent a été acquis illégalement par des partis politiques. Nous avons les sommes, nous allons vous en parler, et donc, si on veut être conséquents avec la motion qui vient d'être adoptée, chacun des partis politiques concernés doit immédiatement rembourser ces sommes acquises illégalement au DGEQ. Je laisse mes collègues vous parler de ces exemples.

Mme Massé : Merci. Alors, si vous comprenez le principe, le DGEQ fait enquête — il y a des éléments qu'on va vous amener où les enquêtes sont terminées, d'autres qui sont en cours — et soit par plaidoyer de culpabilité ou tout simplement, donc, par reconnaissance que les gens ont contribué illégalement aux caisses... aux caisses, pardon, des différents politiques ou par un jugement... Il y a des entreprises, par exemple, pas plus tard que dernièrement, là, on n'a pas besoin de retourner très, très loin, le 28 janvier dernier, il y a eu cinq plaidoyers de culpabilité, qui totalisent 5 000 $ pour le Parti libéral du Québec, donc des individus qui ont reconnu... qui ont eu à payer cette amende-là parce qu'ils avaient utilisé leur nom — en fait, ce qu'on a appelé les stratégies de prête-noms — pour financer les caisses électorales.

Là, on parle d'événements qui ont eu lieu en 2008. Le 17 juillet dernier, donc en 2015, la firme Construction DJL et ses dirigeants ont enregistré 16 plaidoyers de culpabilité, entre 2008 et 2009, totalisant 32 000 $. Alors, cet argent-là a été versé, ils ont reconnu, il a été redonné au DGEQ, et là nous, la question, c'est... bien, c'est donc qu'il y a des partis politiques — parce que vous verrez que c'est des partis politiques — qui, eux, ont accepté cet argent-là, et donc, comme le disait Françoise, bien, on dit : Bien, vous nous le devez.

M. Khadir : Il y a encore plus. 2 décembre 2014, 55 plaidoyers de culpabilité enregistrés au DGEQ par trois firmes, par des personnes liées à trois firmes de génie-conseil en lien avec l'histoire du stratagème des prête-noms. Alors, il s'agit de Roche, maintenant infâme Roche, liée aux arrestations de la semaine dernière, Groupe-conseil TDA et Dessau, hein? Dessau, c'est la soirée avec Mme Nathalie Normandeau, là, à 100 000 $. Ce sont des dizaines de milliers de dollars qui ont été versés au PLQ, dans une moindre mesure au PQ, par ces firmes et leurs dirigeants. Alors, à notre connaissance, les deux partis qui se sont échangé le pouvoir n'ont pas encore remboursé. Ces aveux de culpabilité ont été enregistrés. Donc là, M. Couillard ou M. Founier ne peuvent pas dire : On va attendre le résultat. Les résultats sont là. Il faut rembourser.

Il y a SNC-Lavalin, SNC-Lavalin et un ex-dirigeant qui sont présentement poursuivis pour avoir organisé un stratagème de prête-noms qui a permis de verser, écoutez bien, 237 000 $ au Parti libéral et au Parti québécois. Alors là, je veux savoir de la part des deux partis : Est-ce qu'ils ont mis cet argent-là de côté, là? Il ne faudrait pas utiliser cet argent pour organiser la campagne électorale de Chicoutimi. C'est ce genre d'argent qui permet au Parti libéral de gagner ses élections. C'est ce genre d'argent qui permet au Parti libéral de gagner ses élections, élection partielle après élection partielle, élection générale après élection générale. Donc, il faut que le Parti libéral mette ces argents-là de côté.

Je rappelle, juste entre 2006 et 2011, le DGEQ parle de 7,3 millions de dollars. Alors, imaginez, sur les 15 ans de la commission Charbonneau, ça peut approcher facilement les 20 millions de dollars pour le Parti libéral du Québec. Est-ce que le Parti libéral du Québec a fait des provisions?

M. Robillard (Alexandre) : Est-ce que votre compréhension des conséquences de l'adoption de votre motion fait en sorte, selon vous, que M. Couillard va accepter de rembourser sur une période plus longue que les sept ans dont il parlait dans sa réponse en Chambre aujourd'hui?

M. Khadir : C'est moins clair. C'est la première fois qu'il y a le... enfin, que, de manière un peu plus solennelle, il y a une admission qu'il faut faire quelque chose et un engagement. Il y a une avancée importante sur la question des lanceurs d'alerte. Là, le Parti libéral vient dire : Bien, on va l'étendre aussi pour la protection des lanceurs d'alerte dans le secteur privé.

Maintenant, pour ce qui est d'augmenter la période d'admissibilité ou, enfin, la période... le délai de prescription, c'est sûr que pour vraiment, de manière sincère, démontrer un engagement à faire en sorte que la machine libérale, qui a forcé tant de gens à agir mal et à finir par être arrêtés par l'UPAC, cette machine libérale soit tenue responsable. Parce qu'il pourrait y en avoir trois, quatre autres qui vont être autant de boucs émissaires, mais ce n'est pas eux, les responsables. Eux, c'est des exécutants qui remplissaient les commandes de la machine libérale. Et pour que la machine libérale soit tenue responsable, il faut que la machine libérale rembourse les millions de dollars mal acquis.

M. Robillard (Alexandre) : Là, vous parlez des remboursements, mais pour ce qui est des poursuites à proprement parler, jusqu'à combien de temps en arrière on devrait pouvoir remonter?

M. Khadir : Comme nous sommes tout à fait d'accord, nous étions conjoints, ma collègue était conjointe avec la motion de la CAQ, 15 ans, c'est-à-dire, pour être cohérents, depuis 1996, le début du mandat que couvrait la commission Charbonneau.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce que le président de l'Assemblée nationale applique de façon trop restrictive le règlement de l'Assemblée nationale, notamment l'article 35, en... Il a interrompu les différents porte-parole des partis, là, en matière de Justice ou, bon, les chefs lorsqu'il était question de l'affaire Normandeau. Selon vous, est-ce que vous avez davantage de latitude que semble le penser le président?

Mme David (Gouin) : Mon opinion, notre opinion, c'est que je pense que le président applique les règles de façon un petit peu restrictive, quand même. Que les parlementaires ne commentent pas une enquête en cours va de soi. La séparation du judiciaire, du législatif, du politique, c'est correct. Mais de refuser qu'une personne aille simplement jusqu'à mentionner le fait qu'il y a une affaire en cours me paraît un peu excessif.

Mais sincèrement, aujourd'hui, le message que nous nous voulons lancer, il est bien différent et il est, à mon avis, plus important. C'est celui qu'une fois notre motion adoptée unanimement à l'Assemblée nationale, sans aucune abstention, les partis politiques concernés doivent, dès à présent, rembourser au DGEQ les sommes mal acquises.

M. Caron (Régys) : S'agit-il d'une morale plutôt que légale, Mme David?

Mme David (Gouin) : Je pense que l'obligation est d'abord et avant tout morale, mais elle est politique, mais, écoutez, ça tombe sous le sens. Un citoyen ordinaire, là, qui serait surpris à frauder, tiens, le ministère du Revenu ou qui, même de façon bien intentionnée, aurait omis de payer certains frais, je vous garantis que le ministère du Revenu va lui courir après jusqu'à temps qu'il paie avec intérêts en plus.

Pourquoi est-ce que ça serait différent pour les partis politiques? Alors, moi, je pense que, si nous voulons être pris au sérieux, la classe politique au Québec, nous devons nous appliquer à nous-mêmes les mêmes règles éthiques que ce que nous demandons au simple citoyen.

M. Caron (Régys) : Mais ça n'a pas valeur d'une loi, ni d'un ordre de la cour, là, on s'entend.

Mme David (Gouin) : Pour le moment, non. J'espère que ça viendra. On pourrait très bien imaginer qu'un gouvernement donne mandat au DGEQ, par exemple, que ça fasse partie des mandats du DGEQ et que celui-ci ait plus de moyens pour agir. Ça, c'est une chose importante aussi. On pourrait très bien imaginer que le remboursement des sommes mal acquises devienne une obligation. Mais, quoi qu'il en soit, l'obligation morale est là puis elle est extrêmement importante, extrêmement importante. Il en va de la crédibilité de la classe politique.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Pourquoi le gouvernement a décidé de donner son consentement à l'étude de cette motion-là aujourd'hui, alors que la semaine dernière il s'y est refusé?

Mme David (Gouin) : J'imagine qu'il a dû réfléchir beaucoup en fin de semaine. Alors, je pense que c'était impensable qu'il ne souscrive pas à une motion qui dit des choses élémentaires, là : vous devez rembourser s'il y a de l'argent mal acquis, les recommandations du rapport Charbonneau doivent être mises en oeuvre, et il faut féliciter l'UPAC. Franchement, je pense que c'est jeudi dernier qu'ils se sont trompés.

M. Caron (Régys) : La Chambre a dû attendre pendant plusieurs minutes le premier ministre qui avait quitté le salon bleu. On a entendu la cloche pendant plusieurs minutes. C'est un accident fortuit, d'après vous, Mme David?

Mme David (Gouin) : Demandez-le donc à Mme Couillard. L'important, c'est qu'il soit revenu et c'est qu'on ait voté unanimement pour cette motion.

M. Khadir : Ça n'arrive pas souvent que moi, je me lève en premier, puis Philippe Couillard en deuxième. Je ne me rappelle pas...

Mme David (Gouin) : Alors, on en est heureux.

M. Robillard (Alexandre) : ...restrictive de l'article 35, selon vous, là, plutôt, disons, stricte, est-ce que ça témoigne d'un malaise face à la situation qui est visée par les commentaires restreints?

M. Khadir : C'est sur qu'il y a un malaise. Et c'est sûr que ça doit choquer beaucoup de ministres actuels de voir que leur ex-collègue a été, je dirais, si outrageusement incriminée par l'arrestation de l'UPAC. Après tout, c'est une collègue qui faisait à peu près la même chose que les autres ministres, que le premier ministre, ramasser 100 000 $. Son seul... Bon, elle a des responsabilités comme les autres, mais ce qui la rendait plus facilement atteignable par la justice, c'est qu'elle devait distribuer des contrats. Après tout, c'est elle qui est aux Affaires municipales.

Mais je vous rappelle que l'autre qui a été pas mal incriminée ces derniers temps, c'était Mme Boulet, qui était aux Transports. Or, qui était le ministre du Transport dans le gouvernement Charest, un autre ministre du Transport? Sam Hamad, aujourd'hui à la tête du Conseil du trésor. Qui était au ministère du Transport au début de la période faste du financement du Parti libéral, 2003, 2004, 2005? C'était qui? C'était Jean-Marc Fournier. Ces deux ministres-là...

Journaliste : ...

M. Khadir : J'ai dit quoi? Des Transports? Affaires municipales, je veux dire. Donc, Transports pour Sam Hamad, municipal pour Jean-Marc Fournier. J'imagine qu'ils doivent se sentir très mal que Nathalie Normandeau soit tenue responsable pour des choses... là, c'est évident, là, je veux dire, je pense, on ne peut pas se raconter de salades. Il faut être très naïf pour penser qu'elle était la seule à faire ça.

M. Khadir : ...des choses. C'est évident, là, je veux dire, je pense, on ne peut pas se raconter de salades, il faut être très naïf pour penser qu'il a été le seul à faire ça.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Mais peut-on penser que le président de l'Assemblée nationale éprouve ce malaise-là également?

M. Khadir : Pardon? Juste...

M. Bélair-Cirino (Marco) : Peut-on penser que M. Chagnon, qui était également un collègue de Mme Normandeau, éprouve ce malaise-là?

M. Khadir : M. Chagnon est président de l'Assemblée nationale. Pour que nous puissions identifier les vrais responsables de cette, entre guillemets, machination du financement illégal... Ça, c'est une machine, d'accord? Jean Charest était chef du Parti libéral, puis son argentier s'appelait Marc Bibeau, puis il y avait des ministres proches. Concentrons-nous sur ça, parce que là on risque de détourner l'attention sur un petit phénomène puis là risquer de laisser les gros poissons s'échapper encore.

M. Robitaille (Antoine) : Vous lui demandez quand même quelque chose à Jacques Chagnon, d'après ce que je comprends, là...

Mme David (Gouin) : Regardez, là, je pense que je l'ai exprimé...

M. Robitaille (Antoine) : Vous lui demandez de regarder l'article en question.

Mme David (Gouin) : Oui, je l'ai exprimé clairement tout à l'heure. Nous pensons, et nous ne sommes pas les seuls, je pense, la députée de Montarville dirait exactement la même chose, parce qu'elle s'est fait rappeler à l'ordre elle aussi, là, je pense que le président de la Chambre interprète l'article en question de façon trop restrictive.

Je répète cependant qu'évidemment c'est son travail de s'assurer que l'ensemble des parlementaires ne mêle pas le judiciaire et le politique. Mais après, comme président de la Chambre, il a le choix d'appliquer une règle de façon très restrictive ou moins restrictive. Il a choisi le très restrictive. Nous trouvons que c'est un peu trop. Ça, ça mériterait sans doute une discussion entre leaders, à laquelle nous aimerions bien participer, d'ailleurs.

Mais attention, je le répète, là, ce n'est pas l'événement du jour. L'événement du jour, c'est le fait qu'une motion a été adoptée à l'unanimité, que nous avons des exemples d'entreprises qui ont utilisé des prête-noms. Il y a des partis politiques qui sont concernés par ça, au premier chef le Parti libéral, mais aussi le Parti québécois. Nous demandons que ces partis-là, maintenant que la motion est adoptée, remboursent. Ça, c'est l'événement du jour.

M. Caron (Régys) : J'aurais une précision à demander à M. Khadir. Avez-vous souhaité ou prédit l'arrestation éventuelle des personnes que vous avez nommées?

M. Khadir : Bien, c'est tout l'ensemble du Québec, je pense, l'ensemble de ceux... des journalistes qui ont commencé à déterrer ces choses-là à la fin des années 2000, mes collègues ici, à l'Assemblée nationale, Sylvie Roy, Jacques Duchesneau, d'autres collègues du PQ qui ont dénoncé certains... On était tous anxieux de savoir si un jour justice commencerait à être faite.

Mais je ne trouve pas que justice est faite quand une seule personne est offerte en bouc émissaire. Mme Normandeau a des responsabilités, mais elle n'est pas la seule. Il y a des ministres des Affaires municipales, des ministres de Transports, qui ont des hautes fonctions dans ce gouvernement et qui faisaient partie de la même machine à ramasser des sous, à donner des contrats.

M. Caron (Régys) : ...mériteraient d'être arrêtés?

M. Khadir : Bien, qui mériteraient d'être questionnés et de savoir qu'est-ce qu'ils ont fait à l'époque où cette machine opérait. C'était quoi, leur rôle? Parce qu'eux aussi donnaient des contrats. Je ne pense pas que M. Fournier, à la tête du ministère des Affaires municipales, avait fermé le robinet des contrats puis je ne pense pas que c'est le cas de M. Hamad, qui est associé à la firme Roche d'ailleurs, et l'autre à la firme SNC-Lavalin

Moi, je ne me gêne pas de dire qu'il y a des ministres dans ce gouvernement qui doivent être gênés aujourd'hui que Nathalie Normandeau soit la seule à payer la facture.

Mme David (Gouin) : Et nous rappelons que l'UPAC a beaucoup d'autres enquêtes en cours. Nous sommes absolument certains que ce n'est pas la fin de l'histoire. Merci.

(Fin à 15 h 51)

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