(Dix heures dix-sept minutes)
Mme Thériault
:
Bonjour. Vous allez d'abord me permettre de vous présenter les collègues qui
m'accompagnent : Nicole Ménard, la députée de Laporte et présidente du
caucus du gouvernement; Stéphane Billette, député de Huntingdon et whip en chef
du gouvernement; Marie-Claude Nichols, députée de Vaudreuil et whip adjointe du
gouvernement; Caroline Simard, députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré; mon
collègue Marc H. Plante, député de Maskinongé; ainsi que Véronyque Tremblay, la
députée de Chauveau, qui est par ici; et Patrick Huot, qui est député de
Vanier-Les Rivières et whip adjoint du gouvernement.
Nous sommes réunis ce matin parce que nous
estimons que cette fois la députée d'Hochelaga-Maisonneuve a vraiment dépassé
les bornes. À titre de vice-première ministre surtout, mais comme ministre
également responsable de la Condition féminine, je tiens à rappeler que
l'ensemble des enjeux qui concernent les femmes sont beaucoup trop importants
pour qu'on laisse des considérations partisanes teinter nos débats.
En tant que parlementaires, nous avons le
devoir d'élever nos débats au-dessus de la partisanerie. Et, en tenant des
propos d'une telle gravité, sans le moindre fondement, la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve banalise la véritable violence que subissent les femmes
et détourne l'attention des véritables enjeux.
Donc, le moins que l'on puisse dire, c'est
que c'est vraiment très regrettable, les propos qu'elle a tenus. Donc, si vous
me permettez, je vais passer la parole maintenant à ma collègue Nicole Ménard,
qui était présente lors de l'étude des crédits.
Mme Ménard
: Merci. Merci
beaucoup. Alors, comme vous le savez, vendredi dernier, lors de l'étude des crédits
budgétaires attribués à la Condition féminine, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve
et porte-parole de l'opposition officielle en matière de Condition féminine a
déclaré que : «...depuis deux ans, [le] gouvernement s'emploie à mettre en
oeuvre des actes de violence et de discrimination sexiste qui peuvent être
physiques, psychologiques, verbaux, économiques, sexuels, sociaux et politiques».
Nous sommes donc réunis ici ce matin car
nous estimons que Mme Poirier a franchi le point de non-retour et que nous
souhaitons exprimer, d'une seule et même voix, de notre profonde indignation
devant la démagogie excessive et malveillante dont a fait preuve la députée du
Parti québécois.
Notons au passage qu'à deux reprises Mme
Poirier a eu l'occasion de clarifier sa pensée, soit à la suite de
l'intervention de ma collègue députée de Vaudreuil en commission parlementaire
et lors de la mêlée de presse qui a fait suite à l'étude des crédits
budgétaires dévolus à la Condition féminine. À ces deux occasions, au lieu de
faire amende honorable en s'excusant et en retirant ses propos, Mme Poirier
s'est plutôt entêtée à les répéter. En accusant ainsi, sans le moindre
fondement, le gouvernement du Québec de s'en prendre à l'intégrité physique,
psychologique et sexuelle des Québécoises, Mme Poirier a dépassé les bornes.
En tant qu'élus, que nous soyons des
femmes ou des hommes, nous ne pouvons pas accepter que de telles accusations
soient proférées à l'encontre du gouvernement du Québec. Il s'agit pour nous
d'une question de respect des institutions démocratiques et de l'esprit du
parlementarisme. Nous reconnaissons à Mme Poirier le droit d'avoir des opinions
contraires à celles qui sont exprimées par notre gouvernement. Nous lui
reconnaissons la même liberté d'expression que celle qui est reconnue à toutes
les citoyennes et les citoyens du Québec, mais nous refusons de nous taire
devant l'injustice que constituent les accusations absurdes et sans fondement
qu'elle a proféré vendredi dernier à l'encontre de notre gouvernement.
Les débats d'idées et les divergences
d'opinions sont non seulement sains et utiles, ils sont essentiels au bon
fonctionnement de notre démocratie. Mais il y a une ligne qui ne peut être
franchie, celle du respect de nos institutions, et cette ligne, Mme Poirier l'a
clairement franchie.
Le Québec est une démocratie exemplaire à
bien des égards, et le Parlement au sein duquel nous nous trouvons présentement
est le plus grand symbole de cette démocratie. Depuis 2008, le principe de
l'égalité entre les femmes et les hommes est inscrit au préambule de la Charte
québécoise des droits et libertés de la personne. Il s'agit d'une valeur
fondamentale de notre société et il est malhonnête d'oser prétendre que des
élus du peuple s'en prennent volontairement à l'intégrité physique,
psychologique et sexuelle des Québécoises.
Dans les circonstances, nous n'avons
d'autre choix que d'exiger de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve qu'elle retire
ses propos et qu'elle présente des excuses officielles à toutes celles et ceux
qui auraient pu en être offensés ou, à défaut, qu'elle démissionne de ses
fonctions à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de
condition féminine.
Pour paraphraser le chef de l'opposition
officielle, les accusations injustifiées et mensongères lancées par la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve vont à l'encontre du respect élémentaire auquel ont
droit tous les élus de l'Assemblée nationale. Nous en appelons donc à son sens
civique ainsi qu'à sa considération pour nos institutions et la démocratie
parlementaire. Un chef de parti ne peut tolérer qu'un membre de notre Parlement
adopte une telle attitude. Au nom des principes qu'il a lui-même invoqués à de
multiples reprises au cours des derniers mois, M. Péladeau doit impérativement
se dissocier des propos tenus par la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et
présenter des excuses à la population et au gouvernement du Québec au nom du
Parti québécois. Merci.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mme Thériault, vendredi dernier, après l'étude des crédits, on vous a
questionnée, on vous a demandé de commenter les propos de Mme Poirier. Vous
avez dit qu'ils étaient sans doute exagérés, mais vous n'en avez pas fait de
cas puis ensuite vous avez émis une série de communiqués où le ton était
beaucoup plus, disons, sévère. Pourquoi, aujourd'hui, vous décidez de réagir
aussi fortement et plusieurs jours après l'événement?
Mme Thériault
: Je vais
vous faire remarquer que, pour commencer, mes collègues ont réagi très
fortement aux paroles de Mme Poirier. Elle a réitéré ses propos suite à
l'intervention de ma collègue. Après mon point de presse, elle l'a réitéré
encore une fois... pas une fois, pas deux fois, trois fois elle l'a dit, trois
fois elle a dit que notre gouvernement s'affairait, depuis deux ans, à mettre
en place des politiques qui faisaient de la violence aux femmes.
Ce matin, elle a dit quoi? Qu'elle a
utilisé une métaphore. La définition d'une métaphore, c'est un procédé
d'expression qui consiste à donner à un mot la valeur d'un autre, style :
la pomme est tombée pas loin de l'arbre. Ce n'est pas tout à fait ce qu'elle a
fait. Honnêtement, là, elle a répété ses paroles et elle a même dit : Ne
jouons pas sur les mots. Elle l'a écrit, son discours, elle l'a pensé, elle l'a
dit. Elle a répété ses paroles après l'intervention de ma collègue et en point
de presse. Et ce matin, elle parle de métaphore. Honnêtement, ce n'est pas ce
que je m'attends d'une parlementaire, là. Honnêtement, pas du tout.
Mme Richer (Jocelyne) :
Est-ce que vous avez l'indignation à retardement? C'est que ça fait trois
jours, Mme Thériault. Et vendredi, on vous a questionnée là-dessus. Moi, je
vous ai demandé si c'était un dérapage, puis vous avez évité la question.
Mme Thériault
: Je vous
ai laissée poser vous-même le constat. Aujourd'hui, force est de constater, à
la mesure de tout ce que j'ai entendu et pour avoir discuté avec beaucoup de
mes collègues aussi… Vous savez, souvent, des choses qui vont se passer en
commission, les gens vont réagir en commission…
Mme Richer (Jocelyne) :
…vous, ça ne vous a pas choquée. Pourquoi, trois jours après, ça vous choque?
Mme Thériault
: Non, ça
m'a choquée sur le coup, mais mes collègues ont fait des interventions, puis
après ça, l'étude des crédits, il faut qu'elle se continue. En point de presse,
je l'ai dit, et elle en a rajouté. Et ce matin, elle dit qu'elle utilise une
métaphore. Honnêtement, ce n'est pas une métaphore qu'elle a utilisée, et
chaque mot qu'elle a dit, elle l'a pensé. Et jamais elle n'a pensé s'excuser.
Moi, j'exige que la députée s'excuse. Il y
a des propos qu'on ne doit pas tenir dans un parlement, et, de la manière dont
elle parle, honnêtement… puis qu'elle dit : Ne jouons pas sur les mots, et
qu'on s'emploie, nous, depuis deux ans, à faire des actes de violence contre
les femmes, je m'excuse, là, mais, par respect pour les électeurs que nous
représentons, par respect pour les membres du Parlement que nous sommes…
Nous, notre gouvernement, on prend des
décisions qui sont courageuses. On a le devoir de céder un Québec aux
générations qui vont nous suivre où la maison va être en ordre. Bien, ça, c'est
pour les filles aussi qui vont nous suivre, pour nos enfants puis nos
petits-enfants.
Mme Richer (Jocelyne) : Mais
vous dites qu'il faut s'élever au-dessus de la partisanerie. Si on parle des
vrais enjeux, est-ce que, vous, vous êtes prête à admettre qu'après deux ans de
coupures, de compressions, de mesures d'austérité, que tout ça a pu avoir un
impact pour accentuer la précarité des femmes, des conditions de vie des
femmes?
Mme Thériault
: Est-ce
que vous voulez voir la liste de mesures qu'on a faites? Le bouclier fiscal,
c'est nous. Écoutez, là, j'ai je ne sais pas trop combien de pages ici de tout
ce qu'on a pu faire de mesures pour les femmes. Les budgets de la Condition
féminine n'ont pas été coupés cette année. On a même une légère augmentation.
Les sommes sont au rendez-vous pour les plans d'action. Il y a zéro coupure,
moi, dans les crédits que j'ai défendus vendredi. Et pourquoi elle arrive avec
ça? Honnêtement, là, elles sont toutes là, les mesures. Elles sont toutes là.
Elle, là, quand le gouvernement du Parti
québécois, là, a coupé de 20 % les salaires, ça, ça a fait mal au monde,
pas rien qu'à peu près. Mais ce qu'elle a dit, il n'y a aucune espèce commune
de mesure avec tout ce qu'on a pu entendre dans ce Parlement-ci au cours des
derniers mois puis des dernières semaines, aucune.
Mme Dufresne (Julie) : Mais,
Mme Thériault, si ce sont des propos, comme le disait Mme Ménard, qui sont
démagogiques, pourquoi leur accorder une telle importance en faisant une sortie
aussi grande avec tous les députés pour les mettre en lumière et en parler
encore?
Mme Thériault
: Parce
qu'on veut qu'elle s'excuse, parce qu'on veut que le ton change, parce qu'on
veut qu'on dise les bons mots. Qu'il y ait des débats au Parlement, c'est sain.
Elle l'a dit, ma collègue. Il n'y a pas de problème, on est prêtes à débattre.
Mais de là à nous accuser de tous les maux puis de dire que notre gouvernement
s'emploie à faire des gestes de violence envers les femmes du Québec, c'est...
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais c'est le concept de violence économique qui a été...
Mme Thériault
: Bien,
le concept de violence économique...
M. Bélair-Cirino (Marco) :
...qui a été mis de l'avant. Est-ce que vous demandez à Manon Massé, qui a
aussi dit que votre gouvernement perpétrait des actes de violence économique,
de s'excuser...
Mme Thériault
:
Physiques. Bien oui. Regardez...
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que vous demandez à la Fédération des femmes du Québec puis au R des
centres des femmes de s'excuser également?
Mme Thériault
: La
vraie déclaration : «Ne jouons pas sur les mots, depuis deux ans, ce
gouvernement s'emploie à mettre en oeuvre des actes — on s'emploie,
nous, à mettre en oeuvre — des actes de violence et de discrimination
sexiste qui peuvent être physiques, psychologiques, verbaux, économiques,
sexuels, sociaux et politiques.»
Pensez-vous vraiment qu'il y a un député
de l'aile parlementaire libérale qui va être en accord avec ces paroles-là?
Jamais. Jamais.
Nous, là, on gouverne pour nos enfants,
pour nos petits-enfants. Il y a des choix déchirants à faire, c'est vrai qu'on
les fait. Par contre, on prend quand même le soin d'avoir des mesures pour les
plus démunis, y compris les femmes. Ça fait que jamais je ne vais accepter qu'on
traite un gouvernement de la manière dont elle l'a fait. Elle dépasse
clairement les bornes. Oui.
Mme Delainey (Marie-Laurence) :
Mme Poirier dit elle-même qu'elle est très militante, qu'elle est très engagée
auprès des organismes envers les femmes. Est-ce que ça peut expliquer son... si
on se dit très féministe, ça pourrait expliquer qu'on puisse s'emporter quand
il y a une question qui touche les femmes? Est-ce que Mme Poirier est plus
féministe que vous?
Mme Thériault
: Non. Je
m'excuse, là, Mme Poirier est certainement pas mal plus démagogique que moi.
Puis ça, ça, je prends ça vraiment comme de la démagogie, braiment comme de la
démagogie. C'est de la démagogie, et elle doit s'excuser, et le chef doit la
relever de ses fonctions.
Mme Delainey (Marie-Laurence) :
Elle a déjà dit qu'elle n'allait pas s'excuser, qu'elle avait mal utilisé les
mots.
Mme Thériault
:
Honnêtement, elle n'a pas mal utilisé les mots, et ce qu'elle a dit, c'est
qu'elle a utilisé une métaphore. Je vous relis : «Procédé d'expression qui
consiste à donner à un mot la valeur d'un autre.» Et, quand je lis sa
déclaration, ce n'est exactement pas ce qu'elle a fait. Ce n'est pas une
métaphore.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que c'est le premier dérapage verbal de Carole Poirier?
Mme Thériault
: Je vous
dirais que celui-là a dépassé toutes les limites. Honnêtement, il a dépassé
toutes les limites.
Et, quand on veut parler des questions de
condition féminine, il faut qu'il y ait des circonstances propices, hein? Ça
prend un préalable. Il faut avoir une ouverture, il faut être capable de ne pas
être démagogique et partisane comme ça. Ça n'a pas de bon sens.
Comment pensez-vous... N'importe quelle
action politique ou geste que je pourrais poser pour améliorer le sort des
femmes, comment voulez-vous qu'elle dise que c'est quelque chose de bon que
j'ai fait? Elle n'a même pas été capable de reconnaître ça.
Le Modérateur
: En
anglais, peut-être.
Mme Fletcher
(Raquel) : Do we have evidence or statistics
that she's wrong? Do you have any statistics that would prove that your
austerity measures haven't increase the rate of sexual violence or domestic
violence?
Mme Thériault
:
In the budget? We add the amount of money for make the politic and the action
plan. So it's not true. If I look here, I know we add a lot of things. We do,
like… sorry, it's in French...
Mme Fletcher (Raquel) : I'm just wondering, do we know for certain that the rate of sexual
violence has not increased after the austerity plan?
Mme Thériault
: They had no... no statistics on it, no. No, no, not on it.
Mme
Fletcher (Raquel) : OK. And you don't have any
statistics either to prove that what she said was statistically wrong.
Mme Thériault
: The only thing we have is all the action about our government, and we know we don't... it's not
logical. But did she say it's not logical and no statistics about that?
Mme Plante (Caroline) : This isn't the first war of words that we hear at the National
Assembly. There have been several in the past few months. Do you worry that
they will affect, increase the population's cynicism?
Mme Thériault
: Yes, it should. It should but, when she said that word, how do you
think all the people, the citizens had... Did you see Facebook and Twitter
this weekend? I looked at it, and the people said : My God, it's not
logical. Why she says that? She doesn't have anything to say something like
that, and we're supposed to have a debate, a good debate, not that kind of
debate. And she had two times to say : No, it's not necessarily what I
wanted to say, but she repeated and she said : I don't play with the words,
and she writes the words, so... And this morning she said it's a metaphor and
she doesn't say sorry.
Mme Plante (Caroline) : What is the most hurtful thing about those words?
Mme Thériault
: Sorry?
Mme Plante (Caroline) : What's the most hurtful thing about those words?
Mme Thériault
: All the words. All the words. It's not true. My Government, for two years ago, we don't do
that. Why she says that? It's not cool, it's not fair, and I don't accept that.
Mme Johnson (Maya) : Mme Thériault, can we just have one more
question please, Mme Thériault?
Why today? Why now and why not Friday?
Mme Thériault
: Because this morning she said it's a metaphor and it's not a
metaphor.
(Fin à 10
h 33)