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Point de presse de Mme Stéphanie Vallée, ministre de la Justice

Version finale

Le mardi 31 mai 2016, 15 h 15

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Quinze heures seize minutes)

Mme Vallée : Bien, bonjour à toutes, bonjour à tous. Tout d'abord, merci de votre intérêt pour la question. Je reconnais des visages avec qui j'ai discuté, il n'y a pas si longtemps, de la question des enfants transgenres. Alors, aujourd'hui, vous constatez que... bien, en tout cas, pour nous, pour moi, c'est un jour qui est très important pour le Québec avec un pas qu'on franchit ensemble en vue d'aller plus loin pour la reconnaissance des droits des personnes trans, pour la reconnaissance des droits des enfants trans. C'est donc avec fierté que j'ai déposé le projet de loi visant à renforcer la lutte contre la transphobie puis à améliorer la situation des mineurs transgenres, le projet de loi n° 103. Ce n'est pas un choix, vous savez, pour un jeune trans que de grandir dans un corps qui ne correspond pas à son identité réelle, et on ne peut pas être insensible à l'écoute des témoignages de ces jeunes qui aspirent à la reconnaissance de leur nature profonde et qui se butent encore à de nombreux obstacles, obstacles administratifs. Alors, il y a plusieurs familles qui peuvent témoigner de ces difficultés, et elles les accompagnent dans cette quête.

Notre gouvernement est donc extrêmement sensible à la réalité de ces jeunes qui souhaitent être appuyés dans leur démarche. L'heure est maintenant venue de lever les obstacles administratifs qui nuisent à la reconnaissance de la réelle identité de genre de ces jeunes, et nous devons prôner l'égalité un pas à la fois. C'est également pour assurer le respect des droits de l'ensemble des Québécoises et des Québécois que nous faisons cette annonce aujourd'hui.

Le projet comporte deux volets. D'abord, il permet à une personne mineure d'obtenir, à certaines conditions, le changement de la mention de sexe qui figure à son acte de naissance. Ce sera désormais possible pour ces jeunes sans devoir, d'une part, subir un traitement médical mais à certaines conditions. Je vous rappelle que le Code civil, actuellement, permet à un majeur de faire une telle demande, et ce, depuis le 1er octobre dernier.

Un autre point important qui est inscrit dans le projet de loi, c'est de prévoir que l'identité de genre sera désormais un motif interdit de discrimination dans la charte québécoise des droits et libertés de la personne. Alors, à l'article 10, la question de l'identité de genre sera identifiée de façon très claire. Pourquoi?, vous me demanderez. Parce que, pour lutter contre la transphobie, il faut la nommer, il faut en parler. Et il s'agissait d'une revendication très importante des groupes LGBT, notamment des groupes trans.

C'est un projet de loi qui va, je crois, au-delà des allégeances politiques en ce sens qu'il reprend aussi les recommandations, vous vous souviendrez, de la Commission des relations avec les citoyens. On a notre collègue Manon Massé qui a aussi fait un énorme travail de sensibilisation quant à cette question-là, puis je veux le reconnaître parce que Manon a toujours porté ces dossiers-là également. Mais c'est aussi le dossier qui était porté par un ensemble de parlementaires lors du dépôt du rapport, en juin dernier. Alors, c'est pour vous dire que le travail qui se fait en commission parlementaire, c'est un travail pour lequel on a beaucoup d'écoute et c'est un travail pour lequel on a beaucoup de respect.

Et il est important pour nous que les enfants trans puissent bénéficier des mêmes avancées que les adultes trans. Il n'y a pas de distinction entre un adulte et un enfant, et je suis profondément et personnellement convaincue qu'il était nécessaire d'agir dans ce sens-là, et c'est pourquoi j'ai fait du dépôt de ce projet de loi là une priorité.

On a aussi adapté... Vous verrez, dans le projet de loi, il y a des changements plutôt de concordance. On a voulu également que le processus de changement de nom puisse suivre le même processus que le changement de la mention de sexe. Alors, on a tout encadré ces démarches-là, et un certain nombre de conditions sera prévu.

Certains diront : Mais pourquoi le Québec va de l'avant aujourd'hui avec cette démarche? Sachez que l'on s'inspire des meilleures pratiques qui existent dans d'autres juridictions. L'Ontario a légiféré, le Nunavut a légiféré. Donc, plusieurs juridictions canadiennes ont déjà légiféré en ce sens et permettent aux enfants mineurs d'apporter des modifications à leur acte de naissance. Il y a également d'autres pays qui ont légiféré en ce sens. Pensons à l'Argentine, Malte et aux Pays-Bas, à la Suède et à l'Irlande. Donc, le Québec ne fait pas exception, et la reconnaissance des réalités des personnes trans porte les fruits des avancées de la recherche, du droit, et elle sera de plus en plus présente à l'échelle internationale.

Donc, bien que les droits des personnes trans soient déjà protégés par la charte — je reviens avec l'amendement à la charte québécoise — j'estime qu'il est important de légiférer et d'apporter une protection explicite aux personnes transgenres de façon à prévenir toute ambiguïté et pour contribuer à la pleine acceptation sociale de la différence, de leur différence.

J'aimerais conclure mes propos en vous rappelant que tous et toutes avons le droit au respect et à la dignité et nous devons être plus attentifs à la réalité qui est vécue notamment par les jeunes qui ont besoin de notre soutien pour construire aujourd'hui les adultes accomplis et épanouis de demain et qui sont membres à part entière de cette société ouverte, inclusive, qui est la nôtre.

Je tiens également à remercier les gens... et là j'ai été un petit peu impolie, j'ai oublié de vous présenter les gens qui m'accompagnent. Alors, M. Claude Leblond, qui est un habitué de l'Assemblée nationale, qui est président de la Fondation Émergence, Mme Mona Greenbaum, qui est présidente du conseil des familles LGBT. On a Mme Marie-Pier Boisvert, qui est présidente du Conseil québécois LGBT, et, derrière moi, qui se cache, toute discrète, Mme Annie Pullen Sansfaçon, vice-présidente d'Enfants transgenres Canada et aussi maman d'une merveilleuse jeune fille que je salue aujourd'hui et qui a été mon inspiration derrière ce projet pour son courage et sa détermination à prendre son bâton du pèlerin et à venir rencontrer le ministre.

Alors, je vous remercie.

Mme Pullen Sansfaçon (Annie) : Bien, au nom d'Enfants transgenre Canada, je voudrais vous dire qu'on accueille ce projet chaleureusement. Les revendications qu'on a faites sont toutes à l'intérieur du projet de loi, donc on est extrêmement contents de ce qu'on a lu. Ma fille aurait aimé ça être ici aujourd'hui pour le dépôt; malheureusement, elle a un examen de sciences. Donc, il a fallu avoir des priorités, mais je suis certaine qu'elle et les enfants qui fréquentent Enfants transgenres Canada vont être absolument ravis.

Vous ne pouvez pas vous imaginer qu'est-ce que ça veut dire, d'avoir à vivre avec une identité de genre qui n'est pas conforme à l'état civil. Ces jeunes-là doivent vivre des situations de discrimination sur une base journalière à l'école, dans les services de santé, en voyage lorsqu'on sort un passeport. Et donc le dépôt de ce projet de loi là aujourd'hui, qui, comme Mme la ministre l'a mentionné, est un effort collectif, et je veux vraiment remercier encore tous les gens qui ont participé, incluant Manon Massé... c'est un projet qui va vraiment améliorer la vie des enfants de façon significative. Alors, je vous remercie.

Mme Boisvert (Marie-Pier) : Oui, rapidement, en fait, au nom du Conseil québécois LGBT, c'est sûr qu'on veut saluer, là, le dépôt de ce projet de loi là. Ça répond à des revendications de longue date de toute la communauté LGBT. C'est certain aussi qu'on souhaite une adoption rapide de ce projet de loi là pour qu'en fait les enfants puissent rentrer à l'école en septembre avec la bonne mention de sexe sur leurs documents, puis donc pas seulement leurs documents à l'école, mais pour les soins de santé, etc. Donc, pour que le directeur de l'état civil puisse faire tous ces changements-là cet été, il faudrait que ça se fasse vite.

Sinon, on voulait dire aussi que... Bien, c'est sûr que ça place un des morceaux du casse-tête, là, dans le fond, pour les revendications, les diverses revendications qu'on avait au niveau de la défense des droits des personnes trans. Il reste des combats à faire, c'est sûr, mais on veut que ça, ce soit un dossier clos.

Mme Greenbaum (Mona) : Aussi, la Coalition des familles LGBT accueille le dépôt du projet de loi énormément... C'est une loi qui va aider les jeunes, qui va aider à réduire leurs souffrances. Et puis, évidemment, on veut aussi que ça soit adopté rapidement avant la fin de la session. On a déjà eu des consultations. Dans d'autres consultations, déjà trois fois, on a discuté des jeunes trans. Donc, on n'a pas besoin d'autres consultations sur ça. C'est sûr que l'adoption de ce projet de loi va beaucoup, beaucoup aider les jeunes qui vivent de la discrimination actuellement.

C'est une première étape pour la communauté trans. Il y a d'autres luttes à faire, il y a les immigrants, il y a les familles. Mais, symboliquement et puis dans la vie quotidienne, pour les jeunes, c'est énorme, c'est vraiment une bonne nouvelle. Merci.

M. Leblond (Claude) : Bonjour. Alors, à titre de président de la Fondation Émergence, je ne peux qu'être heureux aujourd'hui. Effectivement, deux semaines après notre journée de lutte à l'homophobie et à la transphobie arrive ce dépôt du projet de loi qui modifie également le Code civil. Mme la ministre nommait tout à l'heure le fait qu'il faut rendre explicites les choses si, effectivement, on veut pouvoir les combattre, faire évoluer la pensée sociale, faire en sorte que tous les citoyens, qu'ils soient enfants, adultes ou aînés, là, aient pleine capacité de vivre leur citoyenneté de façon ouverte. Bien, il faut nommer les éléments qui les entravent. Alors, merci, Mme la ministre, d'avoir inclus également des modifications à la Charte des droits et libertés pour rendre ce droit très explicite.

Et, si je reprends mon autre chapeau de président de l'ordre des travailleurs sociaux, vous auriez certainement également nos grands remerciements aussi pour faire en sorte... parce que vous savez que les travailleurs sociaux considèrent importants les droits des personnes au Québec et le respect desdits droits.

Alors, souhaitons également, maintenant, que tous les parlementaires vont se sentir interpellés à agir rapidement pour résoudre les difficultés qui sont vécues, donc, particulièrement par les enfants trans pour qu'à l'automne, effectivement, tout soit bouclé et qu'ils puissent vivre plus sereinement leur réalité.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Mme la ministre, avez-vous l'assurance du leader du gouvernement que ce projet de loi là est sur la voie rapide, qu'il pourrait y avoir une adoption d'ici la semaine prochaine?

Mme Vallée : De notre côté, du côté de mon leader, les choses peuvent aller très rondement. Évidemment, j'en appelle aussi à la collaboration des collègues. Vous vous souviendrez, il y a quelques semaines, notre collègue Manon Massé avait déposé une motion et, lors de cette motion-là, elle interpellait le gouvernement, demandant de déposer un projet de loi, demandant aussi que l'on puisse aller de l'avant parce qu'il y a des enfants qui, pour la prochaine rentrée scolaire, aimeraient beaucoup pouvoir avoir un document de l'état civil conforme avec leur identité de genre.

Alors, lors de cette adoption-là, je me souviens très bien des propos de Véronique Hivon, qui nous interpellait aussi, et même, pas plus tard qu'il y a deux semaines, lorsque le chef de l'opposition officielle a fait la sortie en compagnie de Mme Hivon, a fait référence aussi à des demandes de Mme Poirier, formulées par Mme Poirier. Alors, je pense que, du côté du Parti québécois, il y a aussi une volonté, il semble émerger une volonté d'aller rondement. Et, pour ce qui est de la CAQ, là-dessus, bien, il faudra voir, mais je crois qu'ils ont participé aux travaux de la commission parlementaire. On avait une commission parlementaire qui était unanime. Lors de cette commission parlementaire là, on a eu l'opportunité et le grand privilège d'échanger avec des experts du domaine : le Dr Shuvo Ghosh, la Dre Susset, qui sont des sommités en la matière au Québec, qui ont pu échanger avec les parlementaires, parler de la réalité des enfants trans. Même, je vous avoue que la commission, qui portait sur les modalités de changement de sexe pour un adulte, a porté beaucoup sur la question des mineurs, d'où les recommandations, à la fin, qui ont été formulées par les membres de la commission.

Alors, on verra, mais je vous dirais que, de notre côté... Évidemment, on ne peut jamais présumer de la volonté des parlementaires, mais, de notre côté, la volonté, elle est là.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Mais donc des consultations élargies seraient superflues puisque ces consultations-là ont déjà été tenues dans le passé.

Mme Vallée : Mais les leaders se sont entendus sur des consultations particulières il y a de ça quelques minutes.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Qu'est-ce que ça signifie, ça? Deux, trois groupes?

Mme Vallée : C'est sur invitation. Bien là, c'est les leaders qui déterminent, mais c'est sur invitation.

Mme Richer (Jocelyne) : Est-ce qu'il n'y a pas, selon vous, un risque d'erreur de la part du législateur quand on parle de mineurs, donc d'enfants et d'adolescents, chez qui l'orientation sexuelle peut être floue? L'identité sexuelle peut être floue chez certaines personnes. Est-ce qu'il n'y a pas un risque d'erreur?

Mme Vallée : Le risque d'erreur, il serait de ne pas permettre à un enfant de s'identifier au genre auquel il croit s'identifier. Je vais vous donner un exemple. Stéphanie fait sa transition et se présente comme François. Elle est vêtue comme un garçon, donc il se présente comme étant François. Mais à chaque fois qu'il est devant un professeur, à chaque fois qu'il est devant une direction d'école, il doit expliquer pourquoi il est identifié comme étant une fille. Il doit faire cette transition. À chaque fois qu'il va à la salle de bain, il doit expliquer ça parce qu'on pose des questions. Mais toi, tu étais Stéphanie il y a quelques mois. Pourquoi aujourd'hui… Ça, là, ça contribue à exclure des enfants. Et vous n'avez pas idée de la solitude que vivent ces jeunes-là qui doivent déjà faire face à une réalité personnelle qui est particulière, le regard de l'autre. Expliquer tout son parcours à chaque fois pour être accepté, c'est terrible pour un enfant. Et donc il n'y a aucune exigence de traitement médical, il n'y a pas d'exigence. Et c'est d'ailleurs ça qui était...

Mme Richer (Jocelyne) : Excusez-moi. Est-ce que c'est peut-être trop facile, ce qui fait que, de façon impulsive, disons, un jeune pourrait dire : Je revendique un changement de...

Mme Vallée : C'est très mal connaître la réalité des enfants trans, ce que vous posez comme question.

Mme Richer (Jocelyne) : ...et, quelques années plus tard, vouloir refaire le chemin inverse?

Mme Vallée : C'est très mal connaître la réalité des enfants trans. Je vous invite, Mme Richer, à aller écouter le... je vous réfère au témoignage de la Dre Susset, du Dr Ghosh parce que ces questions-là ont été posées aux experts, et c'est à peu près inexistant. Puis peut-être que Mme Pullen Sansfaçon pourra vous l'expliquer davantage puisqu'elle travaille au quotidien auprès de ces jeunes-là, mais les enfants trans, dans un premier temps... bon, les enfants qui manifestent ce besoin d'être identifiés à une identité de genre qui est différente de l'identité de leur acte de naissance, ça se manifeste de façon très profonde de la part de l'enfant, ça se manifeste au fil des ans. Et ces enfants-là sont bien souvent accompagnés et majoritairement accompagnés de professionnels du milieu de la santé pour accompagner les enfants et la famille dans la transition. D'ailleurs, vous verrez que le règlement prévoit qu'une demande de changement de sexe pour un mineur est accompagnée évidemment de documentation provenant du milieu de la santé — travailleurs sociaux, psychologues, médecins dans certains cas — parce qu'une famille qui traverse tout ça, souvent, a besoin d'accompagnement parce qu'on souhaite toujours ce qu'il y a de mieux pour l'enfant. Puis l'exclusion de l'enfant, l'exclusion sociale d'un enfant, ce n'est certainement pas ce qu'il y a de mieux pour l'enfant.

Mme Richer (Jocelyne) : Il y a deux catégories d'âge, hein? Il y a 14 ans et plus et moins de 14 ans.

Mme Vallée : Exactement comme les...

Mme Richer (Jocelyne) : Et, je voudrais savoir, pour les jeunes, par exemple... Mais il n'y a pas de limite inférieure. Autrement dit, si des parents se présentent avec un enfant de cinq ans, puis il dit : Bien, mon garçon, c'est une fille, on procède? Il n'y a pas de limite.

Mme Vallée : Il n'y a pas de limite. C'est 14 ans... Bien, l'âge de 14 ans est identifié parce qu'à compter de l'âge de 14 ans un enfant peut consentir ou non à des soins médicaux. Et donc c'est à partir de l'âge de 14 ans que la demande peut être présentée par l'adolescente, par l'adolescent, de lui-même. Il faut penser aussi, puis ça, on en parle très peu, mais il y a des enfants qui sont actuellement placés en centre jeunesse ou placés auprès de familles d'accueil parce qu'ils font l'objet de rejet affectif de la part de leurs parents en raison de cette manifestation que leur identité de genre n'est pas leur identité qui est officiellement déclarée. Et un jeune qui traverse cette période, qui fait l'objet d'exclusion de la part de ses parents, ne peut pas compter sur ses parents pour apporter les modifications. Et c'est donc pour ça qu'on prévoit, à partir de l'âge de 14 ans, que l'enfant peut le faire lui-même. Évidemment, l'autorité parentale est respectée, vous verrez dans les dispositions du projet de loi, parce qu'elle est présente.

Mme Richer (Jocelyne) : Je n'étais pas sûre de bien comprendre, là, le rôle des parents pour 14 ans et plus, 14 et moins, à savoir à partir de quel moment, si un des deux parents dit : Non, je refuse...

Mme Vallée : Dans les deux cas, le titulaire de l'autorité parentale ou le parent — parce que, parfois, les parents n'existent plus ou ne sont pas présents — a la possibilité de s'objecter. Et, dans un tel cas, le dossier est présenté devant la cour, devant le tribunal, comme on le fait, par exemple, dans les cas de consentement aux soins. Pensez à un enfant qui doit subir une intervention chirurgicale. Parfois, pour des questions religieuses ou des questions de principe, un parent va refuser. Et, lorsque l'intérêt de l'enfant est en cause, les tribunaux sont rapidement saisis de la question et ont à se prononcer non pas en fonction de l'intérêt des parents, mais bel et bien en fonction de l'intérêt de l'enfant. Et, dans des cas comme ça, c'est certain que l'accompagnement de la demande par des documents officiels va venir... l'expertise va venir indiquer quel est l'intérêt de l'enfant.

Donc, évidemment, on balise parce que les parents... mais je vous dirais qu'on a ces cas d'exception où les enfants font l'objet d'un rejet affectif. Il faut quand même leur permettre de pouvoir passer cette transition comme on le fait pour les soins de santé. Donc, on a vraiment fait le parallèle avec les soins de santé. Si un adolescent de 14 ans peut consentir à une opération, peut consentir à un traitement médical, l'enfant a aussi la capacité de prendre ces décisions-là. Évidemment, les parents font toujours partie de la décision.

Mme Richer (Jocelyne) : Quelle vérification le Directeur de l'état civil devra faire pour s'assurer que l'enfant ou l'adolescent qui dit être transgenre est vraiment transgenre?

Mme Vallée : Le Directeur de l'état civil s'assure que les critères sont remplis, donc de la conformité des critères. Il n'a pas un pouvoir d'appréciation, comme il n'a pas un pouvoir d'appréciation actuellement pour les adultes qui présentent une demande de modification. Alors, ça aussi, on en avait discuté en long et en large lors des consultations en commission parlementaire. Le Directeur de l'état civil, lui, regarde si, à sa face même, le dossier correspond aux exigences du projet de loi.

Mme Lajoie (Geneviève) : Il y a un débat, en ce moment aux États-Unis, sur les toilettes, les vestiaires. Ce projet de loi là, est-ce qu'il va clarifier la situation pour, par exemple, les écoles? Un enfant qui va réussir à changer, donc, son identité de sexe à l'état civil...

Mme Vallée : Une petite fille va dans la toilette des petites filles.

Mme Lajoie (Geneviève) : Mais donc est-ce que les commissions scolaires vont être tenues de suivre cette directive-là, là?

Mme Vallée : Vous savez, on a déjà discuté de la question, vous et moi. L'objectif n'est pas d'instaurer une police de la toilette, là, on s'entend. Une petite fille qui a fait sa transition, qui est une petite fille, va aller à la toilette des petites filles. Puis on s'entend qu'un enfant qui va à la salle de bain, un adolescent qui va à la salle de bain, ils sont généralement pudiques, hein? Alors, est-ce qu'on peut... Et mettre en place un réseau de salles de bain parallèles peut aussi contribuer à stigmatiser les enfants davantage, puis ce n'est pas du tout l'objectif.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Vous nous répétiez au cours des derniers mois, notamment l'été dernier, lorsque vous étiez en train d'élaborer puis de modifier le règlement pour, bon, les transgenres adultes, qu'une de vos principales préoccupations, c'était d'assurer la stabilité du registre de l'état civil. Est-ce que vous estimez que ce projet de loi là répond bien à cette préoccupation-là?

Mme Vallée : Oui parce que ce projet de loi là fait suite aux consultations. Lorsqu'on a abordé les consultations, notre objectif, c'était d'assurer la stabilité des actes de l'état civil. Et encore une fois je vous réfère... je pense que c'est le Dr Ghosh qui est venu expliquer que les allers-retours, comme certains pourraient les appeler, sont des cas d'exception. C'est vraiment...

M. Bélair-Cirino (Marco) : Même chez les enfants?

Mme Vallée : Même chez les enfants, et c'étaient des cas d'exception. Et ça, il s'agit, comme je vous le mentionnais tout à l'heure, des experts, des sommités ici, au Québec, qui, au quotidien, travaillent avec les enfants, les parents des enfants trans et aussi avec le milieu parce que, parfois, le travail, c'est aussi de sensibiliser le milieu, de sensibiliser le milieu de CPE, l'école, l'enseignant. Et puis, lorsqu'on relativise tout ça et lorsqu'on met de l'avant l'intérêt de l'enfant, on estompe beaucoup de préoccupations et de questionnements.

Journaliste : Mrs. Vallée, would you say...

Mme Lajoie (Geneviève) : Peut-être juste une dernière question en français, une petite précision, justement pour le rôle des parents, là. Je comprends après 14 ans. 14 ans et moins, vous dites que c'est la même chose. Mais est-ce que je comprends que, dans ce cas-là, ça va être les parents qui vont faire la demande?

Mme Vallée : Les parents ou le titulaire de l'autorité parentale.

Mme Lajoie (Geneviève) : Ou le titulaire. Mais un parent, donc, peut s'opposer à ça.

Mme Vallée : Oui, certainement.

Mme Lajoie (Geneviève) : O.K. Et puis vous nous dites que, là, ça s'en va devant le tribunal.

Mme Vallée : Si un des deux parents est en désaccord, n'est pas en accord avec la demande, le tribunal tranchera pour déterminer si l'intérêt de l'enfant milite en faveur du changement.

Une voix : En Cour supérieure.

Mme Vallée : En Cour supérieure, comme on le fait pour le consentement aux soins.

Mme Plante (Caroline) : So, would you say that the situation is urgent? And what are the chances that this Bill 103 will be adopted before the end of the session?

Mme Vallée : We consider that it's urgent in the sense that we have a lot of children, a lot of young girls and young boys that are waiting for this project to go forward in order to have a more normal life, as we say, so that their documentation and legal paperwork is in sync with their identity.

Mme Plante (Caroline) : When you say a lot, how many children?

Mme Vallée : Well, we consider that, right now, we have about 20, is that… that you know of or more than 20? Yes, most of the children are working with… «transgenre», but there are others that are in parallel. So, it's 0,3% of the population.

Mme Pullen Sansfaçon (Annie) : Dr Ghosh voit deux ou trois personnes.

Mme Plante (Caroline) : And can I ask a question for Mrs. Sansfaçon?

Mme Pullen Sansfaçon (Annie) : I didn't mean to cut you. I just wanted to give a statistic that you might find interesting, actually.

Mme Vallée : Non, non, non. Il n'y a pas de problème.

Mme Plante (Caroline) : Is there anything in the bill that you don't like?

Mme Pullen Sansfaçon (Annie) : Listen, we looked at it an hour ago. From what I've seen, we're really happy with it. You know, when Enfants transgenres Canada, Gender Creative Kids, went to do consultations with Ontario when they changed their law, we asked for what's in this bill in terms of… the children… you know, the part for under 18. So, as far as the children are concerned, we are really happy with that.

Mme Plante (Caroline) : How will this help Olie, very concretely, as she enters high school, I believe?

Mme Pullen Sansfaçon (Annie) : She's already in high school. I mean, this is a long-term project, but it's going to help enormously. I mean, I said earlier, you know : Imagine you don't have an ID that corresponds to who you are. That means that, every time you go to a place where you need to get an ID out, you have to explain, to justify what you've got in your pants, which is totally unacceptable, you know, in a society that is supposed to respect the dignity of people. So, how is it going to help Olie and other children is that they're just going to be able to live a life that's going to be facilitated. And I say facilitated because we've got to be aware that the society is still… you know, there's still a lot of work to do in terms of transphobia, there's still a lot of work to do in terms of, like, stigmatization of trans youth, but, at least, these young people will be in control of their identity. They will be able to be affirmed and they will be also… I think it's extremely symbolic, what happened today, because it is in fact the Government of Québec that says : You know what, trans youth? You exist, and we recognize you. So, this is an extremely important piece of legislation, and we're really happy.

Mme Plante (Caroline) : And what is the importance of adopting this very quickly?

Mme Pullen Sansfaçon (Annie) : It is extremely important because, as the Justice Minister has just explained, there are some children who are waiting for that. There are some children who are probably doing some advocacy to get those bill pass, but there are some other kids who, you know, don't want to talk about being trans. And so, these children just want to go on with their life. And, when you pass, you know…

The start of the year is always a very difficult one, September is always a very difficult one because this is the moment you got to get your timetable. In a lot of schools, there's still a «m» or «f» on your timetable. So, imagine the situation. And a child that is already anxious about starting school, who got to go to get a timetable, which everyone will seebecause you need to look where you're going, you know, the room where you are going to have your course in... you've got a sex mention. Then you need to go to get your ID card. Again, you need to explain, you need to say : Well, it's the wrong sex. No, we can't change it, there's a permanent code on that.

So, the start of the year is extremely, you know, anxiety raising for any kid because they've got new peers, they've got new teachers, they've got everything. And, when you talk about trans youth, they also have a situation in which they have to argue with other people that the identity they claim is the right one. So, it is extremely difficult.

So, yes, we need that project urgently so that these children can actually start September 2016 with the right ID card. So, that's going to get the stress…

M. Hicks (Ryan) : To the Justice Minister : Is there anything that will go hand in hand with this, touching on what she was just talking about, when it comes to teachers, people in position of authority, making them more aware to the reality of trans youth?

Mme Vallée : Yes. Well, at the same time, we're having consultations with … «le plan de lutte à l'homophobie et la transphobie», and our intention is to act on that part because that's not something that is going to be necessarily dealt with with a piece of legislation but mostly with programs, with education programs and a lot of activities that are actually done greatly by «la Coalition des familles homoparentales du Québec».

M. Hicks (Ryan) : And, just quickly, you talked about this before in terms of the timetable for this, but considering that there would have to be «consultations particulières» and we only have now about less than two weeks left before the end of the session, is it actually realistic that this could be passed by next Friday?

Mme Vallée : It is. As I said a few weeks ago, we had a motion here, and all parties said that they wanted to go forward with this, they wanted to go quickly with this. They pressed the Government for this. So, if they really meant it, now's the time to show it.

Mme Plante (Caroline) : But why table a bill so late in the session?

Mme Vallée : Well, the bill had to be prepared. We had other things. Remember, we were working on another kind of piece of legislation. So, this has been tabled and here it is.

Mme Plante (Caroline) : 59 is what blocked it?

Mme Vallée : It's not 59, but we presented 98, we do have a lot of things. We've made this a priority. We got it to go through all the process. So, just so that you know, the same team of lawyers working on this bill were the… «les légistes» working on 59 as well. So, they were spending their time in the National Assembly with us on the article by article. So, you know, that's one of the consequences, but we dealt with that last week.

Des voix : Merci beaucoup.

Mme Vallée : Merci! Merci beaucoup!

(Fin à 15 h 46)

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