(Quatorze heures deux minutes)
Mme
Charbonneau
:
Alors, bonjour et merci d'avoir répondu à cette belle invitation. Je suis
heureuse d'être accompagnée de mes collègues M. Barrette,
Mme Charlebois et Mme Vallée suite au dépôt du projet de loi visant à
lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure
en situation de vulnérabilité.
Vous voyez sûrement d'autres gens avec
nous à l'arrière. Je vous les présente, ce sont des gens très importants :
Marie Beaulieu, titulaire de la Chaire de recherche sur la maltraitance envers
les personnes aînées; Mme Nicole Bolduc-DuBois, présidente de la
Conférence des tables régionales de concertation des aînés du Québec; M. Pierre
Blain, directeur général du Regroupement provincial du comité des usagers; et M. Richard
Lévesque, inspecteur des services de police de la ville de Trois-Rivières;
et — laissez-moi feuilleter pour trouver son nom correctement, sinon,
je vais vous dire... — M. Boisvert, Pierre Boisvert, que vous
avez reconnu, un bleu, un vert, toujours de la ville de Trois-Rivières, pour la
Sûreté du Québec. Merci d'être avec nous et de nous accompagner dans cette très
belle annonce.
Nous sommes ici aujourd'hui, et c'est en
partie grâce à notre ancienne collègue Mme Marguerite Blais, qui nous a
ouvert les yeux et, je vous dirais, percé le chemin pour parler de maltraitance
au Québec, mettre des mots sur des gestes qui se posaient, Mme Blais, qui
avait déposé, en 2013, un projet de loi pour lutter contre la maltraitance. Le projet
de loi n'a malheureusement jamais été appelé par le gouvernement du Parti
québécois. Mais c'est important pour nous de remercier le chemin qui a été
fait.
Depuis, nous avons poursuivi la réflexion,
nous sommes retournés à la rencontre de nos partenaires et aujourd'hui nous
présentons le fruit du travail effectué. Nous avons déposé ce matin un projet
de loi qui vise à mieux prévenir et mieux intervenir face à des situations de
maltraitance. Cette responsabilité, elle est partagée avec mes collègues, mais
aussi avec l'ensemble de la société, surtout dans le contexte du vieillissement
de la population. On considère sept types de maltraitance : la
maltraitance physique, psychologique, sexuelle, maltraitance matérielle ou
financière, organisationnelle, la violation des droits de la personne et
l'âgisme.
Depuis plus d'une trentaine d'années, le
Québec se préoccupe de ce phénomène, notamment à l'endroit des personnes
aînées. Des gestes spécifiques, significatifs ont d'ailleurs été posés au cours
des dernières années. C'est un gouvernement libéral qui, en 2010, a déposé le
tout premier Plan d'action gouvernemental pour contrer la maltraitance envers
les personnes aînées, le PAM. Nous avons prolongé le plan jusqu'en 2017 et
avons déjà amorcé les travaux entourant son renouvellement. Il témoigne de la
volonté de notre gouvernement de promouvoir l'égalité entre les personnes de
tous les âges, peu importent leurs conditions.
Au-delà de ce plan, plusieurs actions ont
été élaborées : des programmes de formation, des guides d'intervention
ainsi que des orientations pour prévenir et intervenir dans des situations de
maltraitance. Il ne faudrait surtout pas oublier une mesure importante de ce
plan qui a eu un impact considérable sur les aînés victimes de maltraitance, la
ligne Aide Abus Aînés. La Loi sur les services de santé et les services sociaux
vient également assurer la qualité des soins des services dispensés dans tous
les établissements du réseau de la santé et des services sociaux. À tout cela
s'ajoutent différentes instances qui assurent le respect des droits de la personne
tels le Curateur public et la Commission des droits de la personne et des
droits de la jeunesse. Toutes ces mesures constituent les mailles du filet de
sécurité qui permettent de prévenir la maltraitance, d'identifier les personnes
qui pourraient en être victimes et d'intervenir pour les protéger.
Malgré tout, il se produit encore des
gestes déplorables. Le projet de loi déposé aujourd'hui vise à resserrer les
mailles de ce filet de sécurité. C'est pourquoi le gouvernement souhaite agir
par le dépôt du projet de loi n° 115, qui contient cinq mesures ciblées.
En premier, l'adoption d'une politique
obligatoire de lutte contre la maltraitance envers les aînés et toute autre
personne majeure en situation de vulnérabilité qui serait en vigueur dans l'ensemble
du réseau de la santé et des services sociaux. Cette politique s'applique pour
les services offerts à domicile, pour les services donnés en établissement
public ou privé, pour les résidences privées pour aînés, pour les ressources
intermédiaires et celles de type familial reconnues par la Loi sur les services
de santé et les services sociaux. Cette politique aurait pour objet de mettre
en place des mesures visant à prévenir la maltraitance, à lutter contre celle-ci
et à soutenir les personnes dans toute démarche entreprise afin de mettre un
terme à la maltraitance dont elles se sentent victimes.
Deuxièmement, le projet de loi propose la
bonification du rôle du commissaire local aux plaintes et à la qualité des services.
Il serait dorénavant obligé, en plus de traiter les plaintes des usagers, de
traiter le signalement concernant une situation potentielle de maltraitance, les
plaintes et les signalements en provenance des personnes autres que l'usager,
par exemple un membre de la famille, qui devraient être traités. Le projet de
loi propose également l'élaboration d'un règlement visant à déterminer les
modalités d'utilisation des mécanismes de surveillance, tels les caméras ou tout
autre moyen technologique.
Depuis quelques années, la question de
l'utilisation de la vidéosurveillance dans les CHSLD a été discutée dans
l'espace public. Nous avons confié au Comité national d'éthique sur le
vieillissement un mandat portant sur la production d'un avis concernant les enjeux
d'éthique de l'utilisation des caméras vidéo dans les différents milieux de vie
des aînés. Les recommandations du comité ont alimenté nos réflexions quant à la
modalité à prévoir. Actuellement, la vidéosurveillance dans les milieux de vie
n'est pas régie par un cadre précis.
Nous souhaitons proposer des balises
claires sur les modalités d'utilisation des mécanismes de surveillance tout en
s'assurant que les incidences sur la vie privée soient réduites au minimum. Les
modalités pourraient notamment spécifier qui pourrait installer le mécanisme de
surveillance, à quel endroit, dans quelles circonstances ainsi que l'obligation
et la responsabilité de ceux qui seraient en possession des images
enregistrées. Il n'est pas question de limiter le droit à la vie privée de
quiconque dans ce règlement. L'objectif est d'établir un juste équilibre entre
les besoins des familles, le droit des usagers à la vie privée et la
préservation de la relation professionnelle du personnel soignant.
Le projet de loi propose également de
faciliter la dénonciation des situations de maltraitance par des intervenants
et les professionnels en clarifiant notamment la portée du secret professionnel
dans certaines circonstances qui pourraient constituer des cas de maltraitance
envers une personne en situation de vulnérabilité. De plus, le projet de loi
prévoit interdire à quiconque d'exercer des mesures de représailles contre une
personne qui, de bonne foi, ferait un signalement ou collaborerait à l'examen
d'un signalement ou d'une plainte. Ma collègue Mme Vallée vous en parlera
davantage dans quelques minutes.
Finalement, le projet de loi propose la
mise en place dans toutes les régions du Québec d'un processus d'intervention en
matière de maltraitance maltraitance. Nous avons, depuis deux ans, appelé ce
comité «sociojudiciaire». Pour le point de presse, on a changé le nom. Concrètement,
ça veut dire qu'un aîné qui, par exemple, ferait appel à la police pour porter
une plainte suite à un abus financier, entre 24 et 48 heures une table
regroupant les intervenants nécessaires serait mise en place pour identifier
les meilleurs moyens afin de faire cesser la situation, bref, une cellule
d'intervention rapide calquée sur les besoins de l'aîné victime de
maltraitance. Ce processus fait suite à la mise en place d'un projet pilote
implanté dans la région de la Mauricie—Centre-du-Québec en 2014. Le projet a
clairement démontré son efficacité. Je souligne d'ailleurs la présence de
certains partenaires qui sont ici aujourd'hui avec nous. Vous avez, en arrière
de moi, je vous les ai présentés plus tôt, M. Lévesque, M. Boisvert,
mais aussi avec nous Brian Dickinson, chef des services CIUSSS
Mauricie-Centre-du-Québec, et Mme Céline LeBlond, coordonnatrice régionale
Mauricie-Centre-du-Québec lutte contre la maltraitance envers les aînés.
L'objectif de ce processus d'intervention est de garantir une meilleure
protection et d'apporter l'aide nécessaire rapidement aux personnes aînées
victimes de la maltraitance. Les partenaires suivants feraient partie de cette entente :
la Sûreté du Québec, les corps de police municipaux, la direction de la
poursuite criminelle et pénale, les établissements concernés du réseau de la
santé et des services sociaux, le ministère de la Famille par l'intermédiaire
de ses coordonnateurs régionaux en matière de maltraitance envers les aînés.
D'autres partenaires seraient interpellés selon la situation. Je vous en nomme
quelques-uns : la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse, le Curateur public, le Protecteur du citoyen ou même l'Autorité des
marchés financiers.
Je cède maintenant la parole à mon
collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Barrette : Merci,
Francine. Alors, chers collègues, évidemment chers amis qui êtes ici avec nous,
mesdames et messieurs, bienvenue à cette annonce, évidemment, qui est une
grande annonce. Et vous me permettrez par commencer par féliciter ma collègue
Mme Charbonneau, qui est à l'origine d'un grand travail qui a pris beaucoup
de temps et, on le voit aujourd'hui par la présence des gens qui sont devant
vous, une grande collaboration avec tous les acteurs du milieu.
Et ce qui est évidemment impressionnant
dans cet exercice-là, au-delà de la grande quantité de travail qui nous amène
aujourd'hui à ce projet de loi, bien, c'est de réaliser ensemble, et on le voit
ici devant vous, là, comme Mme Charbonneau vient de le dire, les
situations, les moments où il y a de la maltraitance, bien, c'est une infinité
de possibilités que l'on doit combattre. Et, pour pouvoir les combattre, il
faut faire progresser nos lois et règlements dans nos différents secteurs
d'activité. Et Francine a eu la bonne idée, le courage et la patience, avec
tous les collaborateurs qui sont ici devant vous et d'autres qui sont derrière
la caméra, de faire en sorte que, collectivement, on puisse identifier dans nos
secteurs respectifs les améliorations à mettre en place pour qu'on arrive, dans
notre société, à vivre dans une situation législative et réglementaire qui nous
donne les moyens de lutter contre la maltraitance des aînés et des personnes
majeures en situation de vulnérabilité. Et, en soi, ce projet de loi est un
succès par définition.
En santé plus spécifiquement, vous savez, la
LSSSS, la Loi sur les services de santé et les services sociaux, contient déjà
des mesures qui visent la qualité, qui visent la protection du public. Que ce
soit par la mise en place de codes d'éthique, d'un agrément, le médecin
examinateur, des directions de la qualité, des visites ministérielles, on a
senti, dans l'exercice que l'on faisait sous la direction de Francine, qu'il y
avait lieu de rajouter certains éléments. Et, comme ma collègue vous l'a dit il
y a quelques instants, deux éléments nous apparaissent significatifs. Le
premier, donc, et je le répète, c'est l'obligation pour chaque institution de
mettre en place un programme de lutte à la maltraitance localement dans chacune
des institutions, une structure qui fait en sorte que cette politique-là de
lutte à la maltraitance soit en place partout, qu'elle soit sous la responsabilité
et donc l'imputabilité de la direction de l'établissement, et que cette
politique soit revue à tous les cinq ans, et qu'il y ait un rapport qui soit
fait à cet égard. C'est un élément qui est important parce qu'au-delà de
l'agrément, par exemple, et des mesures qui sont déjà en place, le fait d'avoir
nominativement une politique de lutte contre la maltraitance aura un impact
dans les organisations. On sait que, dans les organisations, lorsqu'on met en
place une politique, bien, c'est l'organisation entière qui doit bouger dans le
sens, dans la direction du thème de la politique en question. On sait aussi,
comme ma collègue l'a mentionné, que nous avons localement un commissaire local
aux plaintes et à la qualité des services.
Ce ne sont pas des mots qui sont anodins,
plaintes et qualité des services, commissaire. Cette personne-là a la
responsabilité de faire en sorte qu'il y ait un point de chute pour quiconque a
à déposer des plaintes. Mais, vous savez, une plainte, ce n'est pas quelque
chose de simple à faire. D'abord, il faut avoir connaissance de certaines
choses. Et ce n'est pas simple, là, je vais le dire, et je crois en ce que je
dis, là, aller déposer une plainte, ça demande un certain courage. Ça demande à
se présenter, exposer une situation, mettre son nom, des fois ça peut être
gênant. Il y a d'autres éléments qui peuvent être faits dans la détection, la
mise en évidence de situations qui sont déplorables, inacceptables, pour lesquelles
il doit y avoir des correctifs, et c'est la raison pour laquelle, dans le
projet de loi, nous donnons l'autorité, nous allons donner l'autorité au commissaire
aux plaintes et à la qualité des services l'obligation de traiter
systématiquement tous les cas de signalement.
Un signalement, c'est quelque chose de
simple, c'est vous, c'est moi, qui avons connaissance ponctuellement d'un
geste, d'une circonstance, d'une attitude qui peuvent être considérés comme
étant de la maltraitance envers un aîné ou un adulte en situation de
vulnérabilité. Ce n'est pas banal. Ce sera une obligation légale pour le
commissaire de traiter cet élément-là. Le commissaire pourrait recevoir un
signalement d'un geste, d'une situation qui fait référence à des services qui
ne sont pas ceux qui sont sous la LSSSS. Le commissaire, dans la loi, aura
alors l'obligation de référer aux autorités appropriées — dans ce cas
de figure là, qui sont à l'extérieur de l'hôpital, par exemple — le
signalement pour que le signalement soit traité par les autorités compétentes.
Alors, il est clair qu'avec ces deux ajouts-là dans les différentes politiques
qui sont déjà en place dans notre réseau de santé et des services sociaux, on
vient d'ajouter non seulement un levier supplémentaire, mais une possibilité supplémentaire
de divulguer, de mettre en évidence, de rapporter des situations qui sont inacceptables,
un levier, un chemin de plus offert à tout le monde. Un signalement, là,
rappelons-le, c'est quelque chose d'extrêmement simple à faire. Ça peut être un
appel, ça peut être un mémo, ça peut être quelque chose d'extrêmement simple,
mais on donne à la population maintenant un chemin supplémentaire pour faire en
sorte que notre loi et la situation des aînés et les adultes en situation de
vulnérabilité soient encore plus protégés.
Alors, je termine en remerciant évidemment
mes collègues, Mme Charbonneau en premier, mais mes collègues, parce que
cette conclusion-là, c'est le fruit d'un effort concerté pas simplement des ministres
et du gouvernement, mais aussi de tous les intervenants dans le milieu, que je
remercie pour leur collaboration. Et je suis convaincu qu'à partir de bientôt,
si la loi est adoptée, nous aurons fait un pas de plus dans ce que l'on doit
appeler la bonne direction, qui est celle de la protection des aînés et des
personnes adultes en situation de vulnérabilité. Merci. Je passe la parole maintenant
à Mme Charlebois.
Mme
Charlebois
:
Alors, ma chère collègue Francine, qui est ministre responsable des Aînés,
responsable de la Lutte contre l'intimidation, quelle belle responsabilité tu
as aujourd'hui, hein, Gaétan — moi, je me permets de les appeler par
leur prénom — et Stéphanie, ministre de la Justice, mesdames et
messieurs, vous, les partenaires qui êtes ici, je ne vous renommerai pas tous,
mais vous êtes des partenaires indispensables. Moi, je suis très heureuse de
partager la tribune aujourd'hui avec mes collègues, mais aussi avec ses
partenaires pour le projet de loi qui aura un impact certain pour les aînés,
mais aussi pour les personnes majeures en situation de vulnérabilité.
Comme l'ont soumis mes deux collègues
précédemment, les personnes en situation de vulnérabilité comme les personnes
majeures qui ont une déficience physique, intellectuelle ou encore des
problèmes de santé mentale sont susceptibles d'être victimes aussi de
maltraitance. Parce que, quand on parle de maltraitance, on pense tout de suite
aînés, mais les personnes qui sont en situation de vulnérabilité, ça peut
commencer à 18 ans, là. Tu es dans un centre et tu as besoin d'aide, là.
Alors, c'est pour ça qu'aujourd'hui on a
un projet de loi qui est si important pour les aînés, mais aussi pour les
personnes en situation de vulnérabilité. Le projet de loi qu'on a sous les yeux
permet de resserrer la sécurité autour des personnes hébergées dans le réseau
de la santé et des services sociaux, mais aussi dans les ressources
intermédiaires ou de type familial. Parmi les dispositions du projet de loi,
nous proposons notamment que les présidents-directeurs généraux et/ou les
directeurs généraux des CIUSSS, centres intégrés universitaires de santé et de
services sociaux, ou des CISSS, centres intégrés, sans l'université, les
centres de santé et services sociaux, bref, que les P.D.G. et/ou les directeurs
généraux soient responsables de l'application de cette politique de lutte
contre la maltraitance envers les personnes en situation de vulnérabilité.
Il est de notre responsabilité à ce que
notre réseau soit conscient de la vulnérabilité de certaines personnes, dont
celles qui ont potentiellement ou qui ont une déficience physique,
intellectuelle, et que les actions nécessaires soient prises en cas de
maltraitance. Comme je le dis souvent, c'est quasiment ma marque de commerce
maintenant, Francine me le dit souvent, c'est en travaillant en équipe qu'on
arrive à faire de grandes choses. Bien, vous l'avez, mon ami Gaétan, le
ministre de la Santé, m'a volé ma maxime juste avant, mais c'est en équipe, c'est
avec la collaboration que Francine est allée chercher des partenaires dans le
milieu et celle des ministères qu'on est arrivés à ce résultat de projet de
loi. Alors, ce projet de loi est un très bel exemple de travail de partenariat.
C'est fini, le temps où les ministères, chacun dans notre cour, on travaillait
en silo. On travaille tous ensemble. Mais non seulement on travaille ensemble,
on travaille avec les partenaires sur le terrain. Et c'est là qu'on va chercher
la force de nos projets de loi.
Comme je le disais, on est tous ensemble à
lutter contre la maltraitance. On a tous notre rôle à jouer. Et évidemment je
ne répéterai pas tous les partenaires qui sont ici, mais il y a certainement là
quelque chose avec toutes les personnes qui sont là, Sûreté du Québec, corps
policiers municipaux, commission des droits de la personne et de la jeunesse,
Directeur des poursuites criminelles et pénales, Curateur public, Protecteur du
citoyen. Bref, c'est une belle journée pour l'ensemble des personnes qui auront
besoin de ces services-là et qui, par le passé, auraient pu en avoir besoin
mais qu'on n'était pas rendus là.
C'est ensemble qu'on fait bouger les
choses pour mieux protéger les personnes et c'est ensemble que nous posons les
actes pour faire en sorte que des actes répréhensibles soient réprouvés et dénoncés
dans la société.
Et, en terminant, je suis convaincue que
ce projet de loi là va sans contredit favoriser davantage de vigilance, c'est
assez clair, parce que, là, il y a un signal qui est envoyé par plusieurs
personnes ici, pour protéger toute personne majeure en situation de
vulnérabilité contre toute forme de maltraitance nonobstant le milieu ou la
situation où prend place cette maltraitance, et ce, tout en respectant l'intérêt
et l'autonomie des personnes.
Alors, moi, je veux te féliciter,
Francine, d'avoir tenu le fort.
Mme
Charbonneau
:
C'est gentil, mais c'est vous autres.
Mme
Charlebois
:
Mais oui, mais c'est nous autres, mais c'est toi qui as piloté pour faire
coordonner les efforts de tout le monde qui est ici. Alors, félicitations! Et, encore
une fois, comme l'a dit Mme Charbonneau, on salue Marguerite Blais, qui nous a
aiguillés sur le bon chemin. Merci. Bonne journée. Maintenant, Stéphanie.
Mme Vallée
: Bonjour à
tous. Alors, il me fait plaisir de prendre part à cette belle communication, cette
belle annonce. Francine, tu as agi comme un chef d'orchestre dans l'organisation
de ce projet de loi là, parce que, comme vous avez pu le constater, il y a énormément
de membres de la société civile qui sont impliqués dans l'atterrissage d'un projet
de loi qui se veut un outil important dans la lutte à l'intimidation et dans la
protection des personnes vulnérables. Alors, Francine, c'est tout à ton honneur,
ce qui se fait aujourd'hui. Et c'est toujours un plaisir de collaborer avec les
collègues. Vous nous avez vus, il y a quelques semaines, avec le dossier sur l'adoption.
Ce sont des dossiers sociaux qui touchent de nombreuses personnes et qui
commandent aussi l'intervention de plusieurs ministères.
Alors, on le fait en équipe, on a du
plaisir. Et on le fait pour les gens, les personnes qui sont en situation de
vulnérabilité, les personnes aînées, les personnes majeures qui ont une
déficience physique, une déficience intellectuelle, ou qui ont des problèmes de
santé mentale, comme le disait Lucie, peuvent être victimes de maltraitance. Et
le projet de loi va mettre des conditions qui vont faciliter la dénonciation
dans le souci du respect de la capacité de chaque personne de décider par elle-même
et pour elle-même.
L'une des mesures du projet de loi qui est
énumérée par mes collègues mais qui est non la moindre consistait à clarifier
le concept de danger imminent et à définir l'expression «blessures graves» relativement
à la levée de la confidentialité ou du secret professionnel dans certaines
circonstances qui pourraient constituer des situations de maltraitance envers
une personne en situation de vulnérabilité. Ces clarifications pourraient
contribuer à une meilleure compréhension du principe général et de l'application
de celui-ci par les professionnels, d'une part, et, d'autre part,
faciliteraient son application, lorsque les conditions sont réunies, afin
qu'ils prennent la meilleure décision possible dans l'intérêt de leurs clients.
Actuellement, un professionnel peut lever
son secret professionnel lorsqu'il obtient un consentement clair et volontaire
de son client ou le consentement du tribunal. Le professionnel peut
transmettre, sans le consentement de son client, une information qui serait
normalement protégée par le secret professionnel afin de prévenir un acte de
violence. Dans une situation où le professionnel croit qu'il y a un danger de
mort imminent ou de blessures graves pour une personne ou un groupe de
personnes, il peut dévoiler l'information nécessaire pour la prévention de
l'acte aux personnes concernées comme, par exemple, à un agent de police.
C'est pour ces cas spécifiques que le projet
de loi viendrait clarifier dans quelles circonstances un professionnel pourrait
lever son secret professionnel. C'est une clarification qui vient codifier,
encadrer de façon juridique un jugement rendu par la Cour suprême. C'est donc
ce que la Cour suprême a elle-même défini par «danger imminent» comme «un
risque sérieux dont la nature de la menace est telle qu'elle inspire un
sentiment d'urgence». C'est ainsi que le projet de loi inclut la blessure
psychologique grave.
Je dois dire que mes collègues et moi, on
se réjouit particulièrement de la prise en compte des blessures psychologiques
dans la notion de «blessures graves». Les blessures psychologiques peuvent sans
conteste avoir des effets plus pénétrants, plus permanents chez une personne
qu'une blessure physique. Prenons, par exemple, une personne aînée à qui un proche
rend visite ponctuellement qui en profite pour lui soutirer une somme
importante d'argent sans son consentement. Il n'y a pas de blessure physique
dans cette circonstance, mais la personne aînée, elle est bouleversée par ces
visites. Elle développe une peur significative à l'endroit de son proche. Elle
devient nerveuse, anxieuse, et cette anxiété peut se transformer en dépression
majeure au fil du temps et va accentuer davantage son état de vulnérabilité.
Ainsi, grâce au projet de loi, le professionnel, toujours après avoir tenté d'obtenir
le consentement de la personne victime de maltraitance et avoir documenté ses
observations, pourra décider de lever son secret professionnel pour faire
cesser l'abus financier.
Je tiens à être claire : dans toutes
les circonstances, l'obtention du consentement de la personne sera toujours
privilégiée. L'objectif, ce n'est pas de compromettre la relation de confiance
entre le professionnel et son client, mais d'instaurer plutôt un climat de
vigilance chez les professionnels afin de mieux protéger les personnes victimes
de maltraitance. En ce qui concerne les intervenants comme les préposés aux
bénéficiaires, ceux-ci ne sont pas tenus au secret professionnel, mais ils sont
toutefois tenus de respecter la confidentialité des renseignements qu'ils détiennent
sur les personnes dont ils s'occupent. Les dispositions du projet de loi
faciliteraient aussi la décision de l'intervenant, lorsque les conditions sont
réunies, de divulguer des renseignements considérés confidentiels. Par contre,
dans toutes les circonstances, l'obtention du consentement de la personne devra
toujours être privilégiée.
Le projet de loi prévoit interdire à
quiconque d'exercer des mesures de représailles, comme le congédiement pour un
employé ou le déplacement vers un autre établissement pour un usager, contre
une personne qui, de bonne foi, dans le cadre de l'application de la loi, fait
un signalement ou va collaborer à l'examen d'un signalement ou d'une plainte.
Il est également proposé d'interdire de menacer une personne de mesures de
représailles pour qu'elle s'abstienne de faire un signalement ou qu'elle
collabore à l'examen d'un signalement ou d'une plainte visée. Ce projet de loi
va donc apporter aussi des modifications à la Loi sur les normes du travail.
Je suis convaincue que ce projet de loi va
contribuer à favoriser l'augmentation du degré de vigilance afin de protéger
nos aînés, les personnes majeures en situation de vulnérabilité contre toute
forme de maltraitance, quel que soit le milieu où cette forme de maltraitance
se manifeste, tout en respectant, évidemment, l'intérêt de ces personnes et
surtout leur autonomie.
Alors, je vous remercie de votre
attention. Je sais que c'était long, mais c'était une communication importante.
La Modératrice
: On va
passer à la période de questions. M. Bovet.
Mme
Charbonneau
:
Oh! je vais faire la conclusion, ça te tente-tu, Marie-Pier?
La Modératrice
: Ah! je
m'excuse.
Mme
Charbonneau
:
Ah, il n'y a pas de souci. C'est sa fête, elle est un petit peu perturbée. Mais
c'est un beau cadeau de fête qu'on t'offre aujourd'hui, Marie-Pier, un beau
projet de loi.
Donc, pour le gouvernement du Québec, on
souhaite lancer un message clair : Les aînés ainsi que toute personne
majeure en situation de vulnérabilité doivent pouvoir vivre dans un
environnement sécuritaire et exempt de maltraitance parce que la maltraitance,
c'est inacceptable.
Je vous laisse en vous disant : Quatre
personnes ont pris la parole, ça aurait pu être celles qui ne l'ont pas prise
qui vous parlent, puisqu'elles ont travaillé tout aussi fort que l'aspect légal
et gouvernemental à mettre en place un processus légal pour parler de
maltraitance au Québec. Donc, chers collaborateurs, merci beaucoup de votre
implication sur l'ensemble du déroulement.
La Modératrice
: M. Bovet.
M. Bovet (Sébastien) :
Merci. Bonjour, mesdames, bonjour, messieurs, bonne fête, Marie-Pier.
Une voix
: Merci.
M. Bovet (Sébastien) : Il
y a trois ans, jour pour jour ou presque, Marguerite Blais déposait son projet
de loi n° 399 à l'Assemblée nationale. Un des éléments importants pour
Marguerite Blais, à l'époque, c'était d'obliger les gens qui sont témoins de
maltraitance de dénoncer. Je n'ai pas l'impression qu'on retrouve cette
notion-là dans votre projet de loi, à moins que je ne me trompe. Est-ce que
c'est dans le projet de loi, l'obligation de dénoncer?
Mme
Charbonneau
:
Vous vous trompez rarement, M. Bovet. Non, vous ne vous trompez pas, ce
n'est pas l'obligation de dénoncer.
M. Bovet (Sébastien) :
D'accord. Alors, pourquoi vous ne reprenez pas, si vous avez salué le travail
de Mme Blais, qui a ouvert le chemin et pavé le chemin, l'obligation de
dénoncer pour les intervenants?
Mme
Charbonneau
:
Mme Blais était la première à parler de maltraitance ouvertement de façon
politique, on va le dire comme ça, puisque, quand on en parle ouvertement de
façon politique, ça se rend partout. Maintenant, au moment de déposer son projet
de loi, la façon que l'étude avait été faite, ça avait été fait dans le
principe de l'obligation. Depuis ce temps, il y a eu un parcours parsemé de
consultations, de sollicitations, mais il y a aussi un grand sommet sur la
lutte contre l'intimidation qui nous a donné un chemin différent mais tout
aussi important, puisque la dénonciation sera faite, elle est protégée, et on
peut faire en sorte que l'aîné peut être entouré de gens qui vont l'aider à
s'en sortir.
M. Bovet (Sébastien) :
Ce n'était pas aussi dans le projet de loi de Mme Blais, le fait qu'on
entourait la personne, qu'on la protégeait? Ça allait moins loin?
Mme
Charbonneau
:
399 comblait deux choses : l'obligation de dénoncer et la mise en place de
politiques dans les institutions. On a repris le projet de loi, on l'a regardé
avec beaucoup d'attention, on a fait le tour du Québec pour en parler aux
partenaires. Ils nous ont dit : La politique dans les institutions, c'est
important. Il faut utiliser ce que nous avons pour le mettre en place encore de
façon plus forte. Par contre, l'obligation viendrait avec des sanctions,
viendrait avec des façons de faire qui ne protègent pas l'aîné, mais qui
mettent des sanctions à la personne qui dénonce. Donc, le projet de loi est
différent, mais tout aussi fort avec cinq mesures très précises.
La Modératrice
: Marco.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Permettez-moi de rebondir sur la question de mon collègue. Vous dites que, s'il
y avait eu une obligation, il y aurait nécessairement eu des sanctions possibles
si la personne qui avait dénoncé...
Mme
Charbonneau
:
Bien, vous avez compris qu'une obligation fait en sorte que, si tu ne le fais
pas, je dois te sanctionner parce que tu ne l'as pas fait. Sur l'autoroute, c'est
marqué 100 miles à l'heure, si vous allez plus vite, il y a une sanction.
Alors, la volonté, c'est de faire en sorte
qu'on puisse donner l'occasion aux gens de dénoncer, de s'avancer sur le sujet.
L'enquête se fait et le travail se fait. Mais l'obligation peut faire en
sorte... Puis je vous donne un exemple un peu banal, mais vous allez voir :
une aînée dans un CHSLD, et dans une période où personne ne regarde, dit à son
petit-fils : Tu sais, je voulais te donner 20 $ pour ta fête, va le
chercher dans ma sacoche. Pendant ce temps, l'aînée se déplace, va à la chambre
de bain, le préposé passe, voit le jeune fouiller dans la sacoche, l'aînée n'est
pas dans son lit. Qu'est-ce qu'il fait? Est-ce qu'il faut qu'il dénonce? Alors,
il se sent obligé parce qu'il y a une obligation, et là on part une enquête
pour un événement qui pouvait être anodin. Avoir l'obligation occasionne
peut-être des choses un peu malencontrantes, tandis qu'avoir la possibilité de
le faire peut faire en sorte que les discussions se font dans le calme et que
les histoires se finissent beaucoup mieux.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Très bien. Quelles sont les sommes nécessaires pour mettre en oeuvre les
mesures contenues dans votre projet de loi? Il va y avoir des investissements
supplémentaires, j'imagine?
Mme
Charbonneau
:
Je vous dirais qu'il va y avoir du travail de fait sur le terrain, hein? Il va
falloir regarder le déploiement, mais pour l'instant il n'y a pas de frais dans
les mesures qu'on met en place. Les partenaires qui vont travailler ensemble
dans le comité sociojudiciaire, c'est déjà leur emploi, ils sont déjà dans leur
emploi, ils font les choses. Le commissaire aux plaintes est déjà en place. Le
directeur général, ou le P.D.G, a déjà des responsabilités, il prendra celle-là
de plus. Donc, vous avez compris qu'on utilise l'ensemble du système qu'on a
déjà en lui donnant une responsabilité supplémentaire, mais en perfectionnant
nos façons de faire.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Je comprends qu'il va y avoir un projet de règlement qui va être soumis après l'adoption
de la loi. Pouvez-vous nous en dire davantage quand même sur ce que vous voyez
comme une utilisation appropriée des mécanismes de surveillance, notamment les
caméras vidéo?
Mme
Charbonneau
:
Ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a eu un grand débat existentiel sur le
droit ou pas le droit. En ce moment, on a le droit d'utiliser la caméra vidéo.
Malheureusement, à tous les endroits, les droits ne sont pas permis de la même
façon, et ça se fait un petit peu... nous, on dit un petit peu comme le far
west, là, on n'est pas sûrs si on peut ou si on ne peut pas. Ce qu'on veut
faire, c'est asseoir des professionnels, des gens du milieu ensemble pour faire
un règlement qui va ressembler à une protection des uns et des autres. On ne
veut pas que, dans l'installation, ou dans la prise de possession, ou dans le
captage d'images, ni les employés, ni l'environnement de l'aîné, ni l'aîné
soient biaisés dans la captation d'images. Donc, on va s'asseoir puis on va le
faire de façon, je vous dirais, très systématique, très légale pour s'assurer
que, si l'utilisation... pas «si», l'utilisation en CHSLD et en institution
sera faite correctement.
La Modératrice
:
Mylène.
M. Barrette : Je peux-tu
faire un complément?
Une voix
: Si vous en
avez un, monsieur.
M. Barrette : Je voulais
juste faire un court complément parce que Francine, qui a le mérite d'avoir développé,
pensé et coordonné tout ça... Évidemment, il y a des impacts potentiels dans le
réseau de la santé et des services sociaux. Je peux vous dire aujourd'hui que,
comme Francine vient de vous le dire, nous utilisons d'une façon plus avancée
les ressources qui sont en place, et j'ai la ferme intention de faire en sorte
que, pour que les commissaires, par exemple, puissent exercer pleinement leur
travail, s'il y a un besoin d'avoir des ressources supplémentaires, on ne parle
pas ici de créer une nouvelle structure, là, mais on parle de faire en sorte
que ces gens-là qui ont qui ont la responsabilité d'exercer certains nouveaux
pouvoirs et certaines nouvelles obligations, s'il y a lieu d'avoir à mettre en
place certaines ressources, on sera au rendez-vous.
La Modératrice
:
Mylène.
Mme Crête (Mylène) : Oui.
Pour Mme Charbonneau. Alors, à qui va s'appliquer votre projet de loi, à
quels établissements? Première question.
Mme
Charbonneau
:
Tous les établissements de la santé, le réseau de la santé et services sociaux,
à la maison, tous les gens qui reçoivent des services de la santé, je vous
dirais.
Mme Crête (Mylène) : Et,
pour les caméras, comment est-ce que vous allez vous assurer, dans votre
règlement, par exemple les résidences privées, que ça soit possible peut-être
pour des gens qui ont des soupçons, de vérifier au moyen de caméras s'il y a de
la maltraitance?
Mme
Charbonneau
:
Au départ, on parle d'installation de caméras dans les institutions de la santé,
puisque vous savez qu'à la maison vous pouvez mettre une caméra. Il y en a beaucoup
de gens qui l'ont déjà.
Mme Crête (Mylène) : Je
voulais dire résidences privées.
Mme
Charbonneau
:
Ah, les résidences privées avec aînés? Le règlement va couvrir l'ensemble du
spectre des résidences avec chacun... le regard qu'on se doit de porter sur dépendamment
quelle sorte d'institution c'est.
Mme Crête (Mylène) : Puis
comment vous assurer que, dans une résidence privée, il n'y pas des réticences,
par exemple, des propriétaires de telle résidence par rapport à...
Mme
Charbonneau
:
Vous avez compris qu'on va faire le tour du sujet dans notre règlement pour
s'assurer de l'aisance, mais de la possibilité, parce qu'en ce moment un aîné
qui se retrouve au privé, au public, est chez lui. Il est chez lui, donc il a
le droit d'utiliser une caméra.
Maintenant, ce que nous, on veut, c'est
que ça soit fait dans une réglementation qui vient couvrir le spectre des gens
qui sont autour aussi de l'aîné, parce qu'il y a des gens qui sont des
employés, il y a des gens qui sont de la visite puis des fois il y a même un
voisin de chambre. Donc, il faut faire attention à l'ensemble de ces gens-là
puis le règlement va couvrir l'ensemble des gestes.
Mme Crête (Mylène) : Vous vous
donnez combien de temps pour la présentation du règlement?
Mme
Charbonneau
:
À partir du moment où le projet de loi est déposé, je peux commencer à mettre
en place le comité, et, au moment où on va déposer la loi en article par
article, on aimerait bien avoir le règlement.
La Modératrice
: Tommy.
M. Chouinard (Tommy) :
Bonjour. Tommy Chouinard, La Presse. Quelles sont les sanctions
prévues pour les personnes qui entravent la lutte contre la maltraitance?
Mme
Charbonneau
:
Vous devez me donner un exemple comme entrave, parce que la possibilité de
déposer ou de dénoncer, autant chez nos professionnels que chez nos gens
alentour qui sont syndiqués, elle est faite pour assouplir la démarche et faire
en sorte qu'elle se fait en toute simplicité. Si on se doit de punir les gens
qui ne le font pas, on retourne au 399.
M. Chouinard (Tommy) :
Non, je comprends, mais, par exemple, vous dites : Il ne peut pas y avoir
de mesures de représailles. Bon, bien, si quelqu'un fait une mesure de
représailles contre quelqu'un.
Mme
Charbonneau
:
Bien là, vous avez les ordres professionnels, vous avez les syndicats, mais il
y a surtout le P.D.G. qui va être responsable de sa politique locale qui va
s'assurer qu'il n'y pas de gestes de représailles.
M. Chouinard (Tommy) : O.K.
Mais ce n'est pas précisé, les sanctions. Parce que ce que j'avais compris de l'engagement
du Parti libéral, c'est qu'il y avait aussi des amendes prévues pour ceux qui
entravent la lutte contre la maltraitance.
Mme
Charbonneau
:
Notre volonté, c'est de le regarder sur un aspect positif, pas négatif; pas
punir ceux qui ne le font pas, la dénonciation, mais faire en sorte que ceux
qui le font sont protégés de représailles de leur environnement, parce qu'on
est quand même dans un environnement de travail où il pourrait y avoir des
représailles...
M. Chouinard (Tommy) :
Je répète, là, mais des amendes pour ceux qui entravent la lutte contre la
maltraitance. C'était ça, l'engagement du Parti libéral sur cet aspect-là.
Mme
Charbonneau
:
Qui entravent la lutte.
M. Chouinard (Tommy) :
Au-delà de l'obligation de dénoncer, on dit : Ceux qui vont entraver la
lutte contre la maltraitance, on va imposer des amendes. C'était ça,
l'engagement. Là, ce n'est pas là, c'est ce que je comprends.
Mme
Charbonneau
:
Non.
M. Chouinard (Tommy) :
D'accord. Maintenant, j'aimerais savoir si, en vertu du futur règlement, il
sera plus facile ou plus difficile d'utiliser les caméras de surveillance.
Mme
Charbonneau
:
Il sera plus juste de les utiliser.
M. Chouinard (Tommy) :
Mais plus facile ou plus difficile?
Mme
Charbonneau
:
Quand vous dites... Ça va dépendre de l'environnement, mais la volonté, c'est
que ça devienne facilitant, mais bien réglementé pour que chacun s'y retrouve.
M. Chouinard (Tommy) :
Facilitant.
Mme
Charbonneau
:
Oui.
M. Chouinard (Tommy) :
Donc, ce qui prime, c'est le droit de l'usager plus que le droit, disons, du
personnel, des employés.
Mme
Charbonneau
:
Des employés, oui, du personnel.
M. Chouinard (Tommy) : Qu'est-ce
qui prime?
Mme
Charbonneau
:
En ce moment, l'usager a tous les droits. En ce moment, il a le droit
d'installer, dans une institution... mais, puisque ce n'est pas encadré, il y a
des institutions qui se permettent, malheureusement, de dire non. Ce qu'on veut
faire, c'est de faire en sorte qu'on facilite l'utilisation pour que chacun s'y
retrouve, autant l'institution que le bénéficiaire.
M. Chouinard (Tommy) : O.K.
Mais, si, à l'heure actuelle, l'usager a tous les droits, est-ce que le
règlement pourrait faire en sorte qu'il n'ait plus tous les droits?
Mme
Charbonneau
:
Non. On ne veut surtout pas enlever les droits de personne, on veut juste avoir
un juste équilibre entre ce qui est capté en image puis ce qui ne devrait pas
être capté, comme l'intimité de l'usager.
M. Lecavalier (Charles) :
Bonjour, Charles Lecavalier, Journal de Québec. Je voulais savoir, le
mécanisme de protection des plaignants ou des lanceurs d'alerte, est-ce qu'il
va fonctionner uniquement dans le cas où la plainte est adressée au commissaire
aux plaintes ou ça va être bon aussi dans d'autres circonstances?
Mme
Charbonneau
:
Si on est en institution en santé puis... Si jamais vous avez le goût d'intervenir,
vous m'arrêtez, mais c'est quand même pas pire, hein? Si je suis en
institution, c'est le commissaire aux plaintes. Si je suis à la maison, c'est
le service de la sécurité publique qui met en branle le comité que je vous
parlais.
M. Lecavalier (Charles) :
Et dans une résidence privée, par exemple, ça serait...
Mme
Charbonneau
:
Je ne vous entends pas bien, je m'excuse.
M. Lecavalier (Charles) :
Au privé, par exemple, une résidence privée, ça...
Mme
Charbonneau
:
Les résidences privées, ça va être aussi le service de police ou la politique
locale qu'il y aura à l'intérieur, parce que les résidences privées aussi
auront l'obligation de mettre en place une politique.
M. Lecavalier (Charles) :
O.K. Donc, le Protecteur du citoyen, est-ce que ça peut être une avenue?
Mme
Charbonneau
:
Le Protecteur du citoyen fait partie des démarches qui existent déjà. Donc, on
peut l'utiliser maintenant, on va pouvoir continuer à l'utiliser par après.
M. Lecavalier (Charles) :
Je reviens, moi aussi, sur les caméras. Vous dites que, pour l'instant,
l'usager a tous les droits, qu'il faut, disons, balancer le pour et le contre
de l'usage des caméras et qu'il faut protéger, aussi, là, les employés. Donc,
pouvez-vous nous donner un exemple d'un employé dont les droits seraient brimés
par une caméra de surveillance?
Mme
Charbonneau
:
Je ne vais pas vous donner un exemple tel que vous le mentionnez, mais je vais
vous donner une expérience vécue. On est allés dans un CHSLD en Outaouais qui
allait très bien, on a posé des questions, puis ils ont dit : Savez-vous
quoi? On en a mis une, caméra pour voir qu'est-ce qui se passait parce qu'il y avait
des doutes qui venaient du bénéficiaire. Et finalement la bande a signifié que
c'était le bénéficiaire qui posait des gestes qui pouvaient être calculés comme
indécents auprès de la personne qui lui venait en aide. Donc, la caméra, c'est
pour trouver ce juste milieu là qui fait en sorte qu'on se retrouve dans un
milieu sain et sécuritaire, mais qu'elle sera installée de la bonne façon, au
bon endroit, qui garde l'intimité du bénéficiaire.
M. Lecavalier (Charles) :
Mais j'ai de la misère à comprendre comment les droits d'un employé peuvent
être brimés par une caméra. Ça serait...
Mme
Charbonneau
:
Parce que c'est votre lieu de travail, donc les gens n'ont pas l'habitude... Je
suis dans un milieu intime, hein, je suis dans un milieu de santé, je prodigue
des soins. Peut-être que la caméra est de trop à certains moments.
M. Hicks
(Ryan) : Good afternoon. Ryan Hicks, CBC News.
I'm just piggybacking on that question about the cameras. What are some of the issues that you have to
balance before you put in place that regulation?
Mme
Charbonneau
: I think we have to take in notice what happened in the news before.
We had all kinds of situations reported. So, what we
want to do is make sure that the system that will be in place will be done
correctly for the right reasons and at the right place into the location.
M. Hicks (Ryan) : How many complaints have there been, I guess, say last year, for
example, about potential mistreatment of seniors in Québec?
Mme
Charbonneau
:
On that one, I will have to give you the numbers after. I don't have them with
me right now. But what I can say is that, every time we talk to the people from
the phone line Aide Abus Aînés, we know that they guide lots of people everyday
to the right direction to ask questions about abuse.
M. Hicks (Ryan) : Would someone be able to make a complaint, say they felt that the
conditions that the person was living in? So, that could range from any… Now,
we've heard in the news from the quality of food or the hygiene of the person.
Could someone make a complaint about that?
Mme
Charbonneau
:
But, right now, they can make the complaint about that. So, we're not
amplifying the fact that they can do it, we're saying : You can do it, you
can do it right now, but if you feel it goes further than what you think they
should have as a service, if you think, financially, there's an abuse,
sexually, there's an abuse, or physically, then we put that law in place to
make sure that they get the service and they are not in that condition anymore.
M. Hicks (Ryan) : And what message are you trying to send?
Mme
Charbonneau
:
We're trying to say : Elderly, they're our future. It's funny to say it
this way, but in a couple of days, we're going to be mostly a majority than the
young people. I'm pointing you because you're much younger than me. La plus
grande partie de la population is going to be elderly. So, we want to make sure
that Québec is a safe place to live and that everybody respects everybody. All
through Québec, we have different measures to make sure the population is safe.
But with what we see in the news and what we hear, we have to make sure that we
go a step further. And that is the step further.
La Modératrice
:
Caroline.
Mme Plante (Caroline) : Hello. Caroline Plante, from the Montreal Gazette. Minister,
how do you explain that after… you know, we have the Human Rights Commission,
the Curator, we had a government policy, we have the help line, that, still,
cases of elder abuse persist in 2016?
Mme
Charbonneau
:
I think we have to be in a certain reality, a reality check, I have to say,
that it exists. It exists for all kinds of reasons : financially, abuse because they have no
visitors, or the visitors that come are not at the right place when they come
to see the elderly. We have to make sure that everywhere in Québec everybody is safe, whatever your age
is, whatever your condition is.
Mme Plante (Caroline) : Why do you think it's so difficult to fight against it?
Mme
Charbonneau
: Well, I would say, everywhere in Québec, everything is not that simple. We have to make sure sometimes that
people know what they're doing. Some people are doing abuse and they don't even
know by asking for things in exchange of something else.
As a government, we're not trying to see how come
we're up there. We have to see what's our meeting place to make sure that we
ban the fact that there are elderly that are mistreated.
Mme Plante (Caroline) : Is it because essentially it's very difficult to denounce these kinds of situations? And can you explain how
Bill 115 will make it easier for people to denounce?
Mme
Charbonneau
: I wouldn't say it's hard because I think that my colleagues put in
place many tools so people can go. We can say the commissaire aux plaintes, we
can say the police, 911 works for everybody. What we're seeing is that sometimes
it's not enough. And, for a grandma, to say that her son is an abuser is
something that she won't do. She wants to keep her family. For a grandfather,
to say that his... «son petit-fils» does something that is irregular is not
something he wants to do. So, he doesn't do it.
We're there to put the
tools around the elderly to make sure that it's easy for the person to do what
they have to do and to say it to the person they feel they can say it.
And we go a step further.
Now we say, and that's a big work that my colleague Stéphanie
Vallée did, is that if the elderly doesn't say it, if
he doesn't go that step across the fact that he wants to denounce someone, a
professional can say it. A professional can step up and say : I think
something is wrong with my patient, and we can go further with that.
Mme Plante (Caroline) : And finally do I understand that the use of cameras could be
extended to, let's say, all hospital rooms in the province? Does that pave the
way for an increased use of cameras in the province?
Mme
Charbonneau
: No. You have to know that everybody has a right to use a camera,
everybody. But, if you're in a hospital, in a hospital room, then you're not
home. But, if I'm in a CHSLD, in a room, I'm home, this is my home. And we're
saying that an elderly that wants to do something like using a camera, he can
do it if he's at home. So, if he's in a private home, he's still at home. If
he's in a CHSLD, he's at home, so he should have the right to use it, but he
has to know that there is a right way of using it. And what we want to do is do
a «règlement» to make sure
that, if he wants to use it, everybody will be in the right to do it.
Mme Plante (Caroline) : Just add a small, small clarification, but the
resident or the patient would have to pay his own camera?
Mme
Charbonneau
:
Oh, right now, that's how it works. If you want to install something, you, it's
your responsibility. Because, like I was saying, the room is your house. So,
whatever you put in your house is yours.
M. Bélair-Cirino
(Marco) :M. Blain, est-ce qu'on
pourrait avoir vos premiers commentaires sur...
M. Blain (Pierre) : Oui,
bien sûr. On est très contents d'avoir un projet de loi sur la lutte contre les
aînés. Je pense que c'est la bonne direction. Ça fait des années qu'on le
demande.
Maintenant, cependant, il faut qu'on précise
certaines choses, et on pense que les commissaires aux plaintes sont une bonne
mesure pour mettre en place. Ce qu'on pense qu'il manque actuellement, c'est
plutôt le soutien pour les personnes qui voudraient porter plainte. On pense
qu'à ce moment-là il faudrait que les comités des usagers, et même nous, le
RPCU, nous puissions être impliqués là-dedans. Parce que porter plainte, comme
le ministre l'a dit tantôt, c'est difficile, et il faut qu'on puisse l'aider.
Présentement, il y a aussi des problématiques
concernant les commissaires aux plaintes, on l'a entendu, étant donné qu'il y a
moins d'établissements. Et je pense que le ministre nous a dit qu'il était pour
rétablir ça prochainement avec un ajout de commissaires adjoints. Et on pense
que c'est une bonne façon, mais on pense que le soutien aux personnes est extrêmement
important.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Et que pensez-vous du retrait de l'obligation de dénoncer? Est-ce que ça, vous
êtes à l'aise avec...
M. Blain (Pierre) : Pour
moi, l'obligation de dénoncer n'est pas quelque chose d'important. Ce qui est important,
c'est de pouvoir porter la plainte et d'avoir des mesures pour contrer les
représailles. D'ailleurs, notre congrès de cette année, qui s'ouvre aujourd'hui,
est sur la peur des représailles. Et, pour nous, c'est ça, la chose le plus importante.
Mais je pense qu'il faut aller un petit peu plus loin, justement, dans les
politiques quand on va le faire. Et je pense qu'à ce niveau-là, au niveau des
politiques locales, il va falloir qu'on soit très clairs sur la façon qu'on va
pouvoir les traiter.
M. Lecavalier (Charles) :
Et dans le privé?
M. Blain (Pierre) : Bien,
le privé, c'est encore pire parce que, justement, nous, on dit, au RPCU, que
présentement il n'y a personne qui protège les personnes dans les résidences
privées. On pense qu'il y a une obligation, actuellement, des comités des
usagers de pouvoir, justement, protéger ces personnes-là dans les résidences
privées, ce qui n'est pas absolument le cas actuellement. Et on est en
négociation là-dessus.
M. Hicks (Ryan) : Est-ce
que vous parlez un peu en anglais?
M. Blain (Pierre) :Yes, of course.
M. Hicks (Ryan) : Do you think this bill goes far enough?
M. Blain
(Pierre) :This bill
is a very good start. We are very pleased with this bill. What we need to have
now, it's more support for the people who want to complain. This is the main
part, to help the ones who need to complain, to help them to do so.
M. Hicks (Ryan) : So, what do you mean by giving more support to people who want to
complain?
M. Blain
(Pierre) :Well, you
have to have on organism like our group that could be there to help these
people to put a complaint in front.
Mme
Charlebois
: Just a second, OK? I just want to say something here. Now, today,
we've got a big bill. Le projet de loi qui est là, là, c'est : la
maltraitance, c'est inacceptable et pour les aînés et pour les clientèles
vulnérables que je représente. C'est ça, l'essence de l'affaire. Aujourd'hui,
là, on vient de dire aux gens, là, la ministre responsable responsable des Aînés
et moi, la clientèle vulnérable, on vient de dire, là : C'est
inacceptable, la maltraitance. Alors, on opère un changement de mentalités. Là,
l'obligation, pas l'obligation, moi, je pense, là, qu'aujourd'hui il y a un
message fort, et les gens, là, ils vont, un, être sensibilisés au fait qu'ils
peuvent porter plainte, parce que ce n'est pas si sûr que ça que tout le monde
le sait, alors on va devoir faire de la pédagogie, de la prévention, etc. Et, deuxièmement,
oui, il y aura des processus, puis il y en a déjà en place, mais c'est un
changement de mentalités, là. On est en train de dire aux gens : Vous avez
des droits. Puis, vous savez, la population est vieillissante, alors il y a de
plus en plus de cas parce qu'il y a de plus en plus de monde. Mais là la
ministre responsable des Aînés met un moyen en place justement pour leur dire :
Il y a un projet de loi maintenant qui est là pour vous protéger puis on va
prendre les moyens pour.
Mme
Charbonneau
:
Merci, tout le monde.
(Fin à 14 h 56)