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Point de presse de Mme Françoise David, députée de Gouin, et Mme Manon Massé, députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques

Version finale

Le jeudi 27 octobre 2016, 12 h 09

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Douze heures dix minutes)

Mme David (Gouin) : Alors, madame messieurs, bonjour. Ce matin, ma collègue et moi, nous voulons vous parler de deux questions, mais deux questions très liées parce que ça touche vraiment, dans le fond, toute la politique québécoise contre les agressions sexuelles. Moi, je veux parler de la motion que j'ai déposée, qui demande qu'il n'y ait pas de délai de prescription applicable aux victimes d'agression sexuelle. C'est une demande que j'avais déjà faite en 2013 lorsque le ministre Bertrand St-Arnaud avait fait adopter des changements au Code civil. Je m'étais vraiment opposée à ce qu'il y ait un délai de prescription de 30 ans, même si c'est vrai que c'était une avancée tout à fait importante par rapport à la situation qui prévalait jusque-là, qui était de trois ans. Mais surtout je m'étais objectée à ce que ça ne soit pas rétroactif. Ça, c'est très important.

Ce qu'il faut comprendre, là, c'est qu'avec un délai de prescription de 30 ans mais qui n'est pas rétroactif, tout s'applique à partir du moment de l'adoption de la loi en 2013. Alors, oui, c'est vrai que des victimes d'agression sexuelle en 2035 pourront non seulement poursuivre au criminel, mais au civil, mais le fait que cette loi ne soit pas rétroactive empêche les victimes d'agression sexuelle qui ont été victimes avant 2010, en fait, parce qu'il y a un délai de trois ans, quand même... Avant 2010, là, ça n'est pas rétroactif. Donc, les enfants qui ont été victimes d'agression sexuelle de la part de religieux, et il y a parfois 40 ou 50 ans, ne peuvent pas poursuivre au civil pour obtenir des dommages et intérêts, et la même chose pour des femmes qui ont été victimes d'agression sexuelle.

Dans les autres provinces canadiennes, ce n'est pas le cas. Il n'y a pas de délai de prescription, et on peut n'importe quand… Les lois établissant qu'il n'y a pas de délai de prescription sont rétroactives. La Nouvelle-Écosse, qui, dans un premier temps, avait adopté, bon, le fait qu'il n'y ait pas de délai de prescription, ne l'avait pas mis rétroactif et, devant le tollé général, la Nouvelle-Écosse est revenue sur sa décision première, la décision est rétroactive.

Alors, je demande vraiment solennellement à la ministre de la Justice, dans le fond, de faire quelque chose, vous ne serez pas habitués à entendre Québec solidaire dire ça, mais à appeler le projet de loi de la Coalition avenir Québec. La Coalition avenir Québec a déposé un projet de loi en 2016 — M. Simon Jolin-Barrette — disant, à peu de choses près, ce que je viens de dire : On abolit le délai de prescription et on rend le tout rétroactif. Moi, je pense que ce projet de loi devrait être appelé, et nous aimerions contribuer à son adoption.

Mme Massé : L'autre dimension, au niveau des agressions sexuelles, c'est bien sûr ce qu'on a appris ce matin : la ministre va déposer demain, donc, la stratégie gouvernementale en matière de lutte face aux violences sexuelles, et ma préoccupation, c'est : Qu'est-ce que va contenir ce plan? Et combien d'argent va y être investi? Alors, vous dire que j'étais des consultations lorsque Mme Vallée, à l'époque, avait fait les consultations en commission parlementaire et à travers un forum itinérant. Je pense que les attentes des groupes de femmes, les attentes des femmes en matière, notamment, d'agression sexuelle sont assez claires. Je l'ai entendu plusieurs fois.

Premièrement, il faut agir en amont. Comment on agit en amont? C'est que des cours d'éducation sexuelle et de saines relations soient enseignés aux cursus primaire et secondaire.

(Interruption) Oui, c'est ça. Vous allez m'excuser, on est dans le rhume.

Mme David (Gouin) : Toutes les deux.

Mme Massé : Toutes les deux. Alors donc, que les cours d'éducation sexuelle soient remis maintenant, maintenant. Déjà, ça fait 15 ans qu'on ne les a plus. Le gouvernement péquiste les a abolis. Il est temps de les remettre. Ça a des impacts réels.

Ensuite, toujours dans agir en amont, les groupes de femmes l'ont dit, la logique humaine le dit, ces grandes campagnes, et on en vit une actuellement, mais qui est soutenue par la population, qui est Sans oui, c'est non!, bien, les groupes de femmes nous disaient, voilà un an, parce que nous venions à peine de sortir du mouvement #agressionnondénoncée : Ça nous prend des grandes campagnes sociétales. Il ne faut pas juste une petite campagne ici puis une autre là, trois ans après. Il faut, de façon soutenue, comme nous l'avons fait pour l'alcool au volant, comme nous l'avons fait pour la violence conjugale, avoir ce type de campagne là. Et, dans ces campagnes, parlons de consentement, parlons de c'est quoi, la violence, les violences sexuelles, les violences faites aux femmes. Donnons un visage à ce qu'il semble que nous ne voulons pas voir.

Au niveau du système judiciaire, le délai de prescription, Françoise, c'est ce que les femmes sur le terrain ont demandé, mais elles ont aussi demandé que le système judiciaire soit beaucoup mieux formé pour accueillir les personnes qui sont victimes de violence et victimes d'agressions sexuelles.

La formation des intervenants, ce n'est pas juste au niveau judiciaire. On l'a entendu, pour les policiers, les policières, dans les mouvements sociaux, au niveau médical, donc le système de santé, ça aussi, c'est quelque chose qu'il faut agir maintenant pour nous assurer que, dans l'avenir, on puisse éliminer les violences sexuelles faites aux femmes.

Je terminerai en disant : Nous avons, et ça, j'ai beaucoup d'attentes par rapport à ça, dans le cadre de ces forums-là, entendu que déjà les agressions sexuelles ou les violences sexuelles, c'est dur pour toutes les femmes, mais qu'il y a des femmes pour qui c'est encore plus dur. Pourquoi? Parce qu'elles en sont plus victimes. On pense tout de suite aux femmes autochtones. Il y a quelque chose qu'il faut, dans notre savoir québécois, dans notre stratégie québécoise, qu'on adresse de façon particulière pour aider à éliminer les violences faites aux femmes autochtones. Les femmes racisées sont celles qui sont ciblées, c'est celles qui, dans les faits, vivent plus de violence et une violence plus muette, plus derrière les portes. Des femmes handicapées, hein? Encore hier soir on apprenait que plus que 40 % des femmes avec un handicap sont victimes d'agressions sexuelles, il faut agir, et bien sûr les femmes trans et les femmes trans racisées encore plus que les autres.

Alors donc, voilà, demain, je vais être à l'écoute, mais ma grande question, ça va être : Combien? Combien d'argent? Il y a un surplus de 4 milliards actuellement au Québec, et ce surplus-là ne peut pas ne pas être investi, entre autres, au niveau de la stratégie gouvernementale en matière de lutte et de prévention des violences sexuelles.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Mme David, quelle est l'importance de la stratégie qui sera annoncée demain matin?

Mme David (Gouin) : Capitale. Ce n'est pas compliqué, là, si cette stratégie est insuffisante, si elle ne répond pas aux attentes des groupes de femmes et de toutes les intervenantes dont Manon a parlé, s'il n'y a pas d'argent, tout le monde va comprendre que le gouvernement du Québec ne prend pas du tout à coeur la question des agressions sexuelles. L'enjeu, là, il est capital. Et je pense que, demain, toutes les femmes du Québec vont être au rendez-vous, vont vouloir savoir. Le rôle des médias va être très important, d'ailleurs. Nous allons vouloir savoir si ce gouvernement est sérieux en matière d'agressions sexuelles. C'est le test ultime demain. C'est aussi important que ça.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Vous aviez dénoncé, au cours des derniers jours, vendredi dernier notamment, que l'austérité, notamment les coupes dans les programmes voués aux femmes puis, bon, de façon plus précise, pour contrer les violences sexuelles avaient fait des dommages importants. Donc, j'imagine que vous êtes en mesure de le réitérer aujourd'hui. Mais est-ce que ça prend, dans le fond, des investissements importants? Puis en même temps on ne peut pas quand même effacer les dommages qui ont été faits au cours des dernières années.

Mme Massé : Bien, vous avez absolument raison. Ce qu'il va falloir être à l'écoute demain, c'est que ce gouvernement-là, dans ses compressions budgétaires des dernières années, a coupé énormément d'argent qui allait directement dans les groupes de femmes, notamment, vous parliez, en matière d'exploitation sexuelle. Le gouvernement de M. Couillard a aboli un programme dans lequel il y avait 5 millions sur trois ans, de façon spécifique, orienté contre les agressions sexuelles auprès des adolescentes. Ce programme-là a été aboli. Parce qu'on a fait des pressions, parce qu'il s'est passé ce qu'il s'est passé au niveau des centres jeunesse, le gouvernement est revenu avec un programme qui, là, a 3 millions sur cinq ans, mais qui ne s'adresse plus du tout à la même affaire.

Alors, demain, nous allons être très vigilantes pour faire ces comparatifs des budgets qui ont été coupés versus ceux qu'on espère qui vont être réinvestis, mais on ne se laissera pas avoir avec de la poudre aux yeux. Tu sais, on a bien beau nous annoncer un réinvestissement... Par exemple, dans ce programme-là, ce qu'a fait le ministre de la Sécurité publique, il a dit : Nous allons investir 3 millions sur cinq ans. Aïe! C'est parce qu'avant il y en avait 5 millions sur trois ans. Et c'est là-dessus qu'on va être vigilantes demain. Parce que la ministre m'a dit en Chambre, vous l'avez entendue, qu'elle n'arriverait pas seulement avec la stratégie, mais qu'elle arriverait aussi avec les budgets, et on va être vigilantes là-dessus.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Voilà. La question s'adresse au gouvernement, mais comment expliquez-vous le délai ou la préparation aussi longue de cette stratégie-là?

Mme Massé : La question s'adresse vraiment au gouvernement parce que, depuis les auditions, le forum, tout ça, a eu lieu l'an dernier, en 2015. Nous avions déjà terminé au début, début septembre 2015. Je suis incapable sinon que de dire qu'entre septembre et octobre 2015 il y a eu un changement d'une ministre, mais ça ne devrait pas arrêter une machine qui écrit des bilans de plans d'action. Je n'ai aucune idée. Ce que je sais... Ce qui me porte à croire... Et là-dessus c'est important, les mouvements qui se passent actuellement comme Sans oui, c'est non!, c'est des mouvements sociaux qui viennent mettre des pressions sur le gouvernement. Est-ce que Mme Thériault avait déjà prévu de déposer sa stratégie avec les budgets vendredi cette semaine? Allez la questionner. Je n'en ai aucune espèce d'idée. Ce que je sais, juste par exemple, c'est qu'elle savait très bien que, là, on n'attendrait plus, que ça ne se pouvait pas. Ça aurait pu être déposé vendredi passé, là. La semaine passée, à Laval, c'était le même cri du coeur. C'est assez. Donnons-nous les moyens et nous avons ici, au Québec, des choses qui s'appellent notamment une stratégie. Ça fait que je ne le sais pas.

Mme Johnson (Maya) :So, Mme David, just a couple of questions in English. You say you're supporting a CAQ bill. What's the number of the bill? This was…

Mme David (Gouin) : 596.

Mme Johnson (Maya) : OK, thank you. And why you support this measure?

Mme David (Gouin) : Bien, because it's important to permit people to do «recours civil»…

Une voix : Pursue… pursuit…

Mme David (Gouin) : ...civil pursuit «en dommages et intérêts».

Mme Johnson (Maya) : Ça, je ne peux pas vous aider. Je ne connais pas le terme.

Mme David (Gouin) : It's important. It's like reparation, you know. People can go to a criminal court, there's no prescription on that.

Mme Johnson (Maya) : Statute of limitations.

Mme David (Gouin) : Limitation. OK. But, after that, when people want to have reparation, then it's impossible for people who have all kind of sexual assault before 2010. So, you know, that doesn't cover a lot of people.

Mme Massé : As the Minister said this morning in the room, she said that we changed the law a couple of years ago in 2013. But what she didn't say… Now, it's real. You have 30 years on the Civil Code to ask to have reparation. But what she didn't say, now it's in 2035… It will be OK for 30 years… in the back 30 years, but now it starts in 2010. So, all the… and we know what happened a couple of years ago about the assault, children assault in the Church, for example, these people cannot go and ask the Church to have reparation.

Mme Johnson (Maya) : It's «damages», «seeking damages». It just came back to me.

Mme Massé : Yes, thank you. So, they cannot go back to have damages.

Mme Johnson (Maya) : OK. And you said earlier in French that you are going to see tomorrow if the Government is really putting its money where its mouth is, so to speak. Does the money come with the words? So, it's a test.

Mme David (Gouin) : Yes, and it is very important. It's the «ultime test».

Mme Johnson (Maya) : The ultimate.

Mme David (Gouin) : Ultimate test.

Mme Massé : Because, you were there, we heard last week the Minister say : It's coming. This week, we have Mr. Leitão who told us that we are in 4 billion of surplus. So, in my mind and, I think, in the women's minds, that means, in this strategy against women's assault, sexual assault, sexual violence, we hope and we will be very, very upset if we don't find in this plan the money that we need to stop this.

Mme Johnson (Maya) : One final question for you, because from what I understand, if Mr. Sklavounos comes back to the National Assembly, he will be sitting beside you, and he doesn't seem to intend to leave at this point. How would you feel sitting beside him in the House, given the allegations?

Mme Massé : Yes. You know, I think that we were very clear last week that we think that, because of the kind of work that we have, we are elected people, we ask to Mr. Sklavounos to resign by himself, and I cannot imagine… I heard this morning that he came with a letter, but I cannot imagine him sitting just behind me, sitting anywhere in this room.

Mme David (Gouin) : Merci.

(Fin à 12 h 27)

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