(Onze heures dix-neuf minutes)
M. Legault
:
Bonjour, tout le monde. Bien, écoutez, nouvelle session qui commence aujourd'hui,
la CAQ va beaucoup parler de la situation des familles québécoises. D'abord, on
sait que plusieurs familles québécoises ont de la difficulté, actuellement, à
arriver. Les salaires, au Québec, ne sont pas assez élevés, hein, on l'a
souvent dit. Les personnes en Ontario gagnent 4 500 $, en moyenne, de
plus que les personnes au Québec. Donc, on doit augmenter le salaire moyen au
Québec. On doit aussi réduire les impôts. Donc, on va talonner le gouvernement
pour réduire les impôts d'au moins 1 000 $ par famille pour compenser
les hausses de taxes et de tarifs qu'elles ont subies depuis trois ans.
On va aussi, bien sûr, parler d'éducation.
Il faut investir, actuellement, en éducation pour la réussite des jeunes, entre
autres offrir des prématernelles quatre ans gratuites à tout le monde au
Québec.
On va parler aussi des aînés. Quand on
rencontre les familles, une des préoccupations qu'on entend de plus en plus
souvent, c'est l'inquiétude face à leurs parents vieillissants, donc comment on
traite nos aînés au Québec. Ce seront des sujets, donc, sur lesquels on va
revenir.
Par contre, aujourd'hui, je veux revenir
sur la demande de Philippe Couillard, dans la foulée de l'attentat de Québec,
d'adopter ensemble rapidement un projet de loi sur la neutralité religieuse.
Je veux d'abord rappeler notre position. La
CAQ croit que les personnes qui sont en autorité ne devraient pas pouvoir
porter de signes religieux. C'est une question de neutralité, mais aussi
d'apparence de neutralité. On pense que c'est important d'être ouverts pour
accueillir les nouveaux arrivants, mais il faut encadrer le port des signes religieux
pour mieux vivre ensemble. Donc, maintenant, quelles sont les personnes qui
sont en autorité au Québec? Dans le rapport Bouchard-Taylor, on suggérait les
magistrats, procureurs de la couronne, policiers, gardiens de prison, président
et vice-présidents de l'Assemblée nationale. La CAQ a ajouté les enseignants du
primaire et du secondaire. Cependant, pour faciliter l'adoption du projet de loi
sur la neutralité religieuse, la CAQ est prête à faire un compromis et à
exclure les enseignants de la liste des interdictions. Je vous le dis, là, c'est
pour faire un compromis. Ça restera dans le programme, par contre, de la CAQ,
là, pour l'élection générale l'année prochaine.
Donc, ce que je demande aujourd'hui au premier
ministre, c'est de faire aussi un compromis. Si Philippe Couillard veut qu'on
avance sur la question, qu'on mette cette question-là derrière nous, je lui
tends la main. Je tends la main aussi au Parti québécois, à Québec solidaire. Je
propose donc que, rapidement, on adopte un projet de loi où on interdira, au Québec,
les signes religieux pour les policiers, les gardiens de prison, les juges,
donc, et le président de l'Assemblée nationale. Donc, ce qu'on demande, c'est
d'adopter rapidement la recommandation principale de la commission
Bouchard-Taylor. C'est une proposition qui fait largement consensus au Québec,
c'est une position qui est rassembleuse, et je crois que, dans le contexte
actuel, le bien commun exige un compromis honorable de part et d'autre. Donc,
si M. Couillard veut qu'on avance dans le dossier de la neutralité
religieuse, je lui demande de faire lui aussi un compromis. Et, sur cette base,
je lui offre toute notre collaboration pour qu'au cours des prochaines semaines
on soit capables, sans partisanerie, d'adopter un projet de loi sur la neutralité
religieuse. Donc, la balle est maintenant dans le camp de Philippe Couillard.
Merci.
La Modératrice
: Merci.
On va commencer la période de questions en commençant par Alain Laforest, TVA.
M. Laforest (Alain) :
Bonjour, M. Legault. Bon, je comprends que vous voulez changer l'ambiance
à l'Assemblée nationale, que vous trouvez, j'ai l'impression, que ça a été un
peu trop loin. Premièrement, est-ce que vous trouvez que ça a été trop loin au
cours des derniers mois?
M. Legault
: Oui,
bien, je ne pense pas que le ton qui a été utilisé par la CAQ soit allé trop
loin. Par contre, le sujet, entre autres les signes religieux, on en parle
depuis 10 ans, donc je pense que ça peut nuire au climat général au
Québec, et c'est pour ça que je pense qu'on doit régler ce dossier-là
rapidement.
M. Laforest (Alain) :
Juste une sous-question là-dessus. M. Lisée a fait son mea culpa en disant
que lui, il est allé trop loin. M. Couillard maintient, lui, que tout ce
qu'il a dit, ça a été correct, même quand il vous a dit que vous avez soufflé
sur les braises de l'intolérance. Vous, est-ce que vous trouvez, à un certain
moment donné, soit dans vos propositions ou vos propos, que vous êtes allé trop
loin?
M. Legault
: Non,
moi, je ne pense pas. Je pense qu'on a toujours défendu ce que la grande
majorité des Québécois souhaitent. Vous savez, il y en a un, consensus au
Québec, c'est la proposition de Bouchard-Taylor, interdire les signes religieux
pour les personnes en autorité. C'est la position que défend la CAQ depuis
2015. Donc, je pense qu'on a été rassembleurs et donc je souhaite que M. Couillard
fasse aussi un compromis. Ce que je vous dis aujourd'hui, c'est qu'on est prêts
à retirer notre proposition d'ajouter les enseignants, donc garder seulement
les juges, les gardiens de prison, les policiers puis le président de
l'Assemblée nationale, comme le proposent M. Bouchard et M. Taylor,
qui ne sont pas des gens qui sont radicaux, et comme le souhaitent, je dirais,
à peu près 80 % des Québécois.
M. Laforest (Alain) : Et
on repousse le dossier en 2018, sur l'élection, chacun va avoir sa position,
puis on refera le débat? C'est un peu ça que vous dites.
M. Legault
:
Exactement, exactement. Donc, dans 20 mois, lors de l'élection en 2018,
bien, nous, on proposera d'ajouter les enseignants. Mais je pense que c'est
important, là. Ça fait 10 ans que le dossier traîne, je pense que ça nuit
au climat. Je pense que c'est important de le régler rapidement. Moi, je suis
prêt à m'asseoir avec Philippe Couillard, comme il l'a demandé. Je suis prêt à
faire un compromis, mais je pense que lui aussi doit faire un compromis.
La Modératrice
: Merci.
Nicolas Vigneault, Radio-Canada.
M. Vigneault (Nicolas) :
M. Legault, s'il n'y a pas d'attentat la semaine dernière à Québec, est-ce
que vous modifiez votre position ou vous gardez le cap, à savoir qu'il y a des
enseignants… ou que le gouvernement permet aux enseignants de porter le tchador
au Québec?
M. Legault
: Bien,
comme je vous dis, on la garde, notre position, là. Donc, moi, je souhaiterais,
dans un monde idéal, que les enseignants au primaire et au secondaire, qui sont
souvent des modèles pour les enfants, ne puissent pas porter de signes
religieux. Mais, dans le contexte de ce qui est arrivé la semaine dernière, je
pense qu'il y a effectivement une urgence de régler le dossier des signes
religieux et de mettre ça derrière nous. Puis je pense que c'est important de
mettre un cadre puis de dire aux Québécois : Voici ce qui est permis puis voici
ce qui n'est pas permis, puis passons à un autre sujet puis travaillons tous
ensemble contre l'intolérance.
Donc, moi, je pense, dans le contexte de
la semaine dernière, là, oui, il y a une certaine urgence d'adopter… Le projet
de loi n° 62, pour moi, est un peu insignifiant, puisqu'il ne permet pas
d'interdire les signes religieux. Tout ce qu'il dit, c'est «pourrait peut-être
interdire les services à visage couvert». Puis, encore là, même, il y aurait
possibilité d'avoir des exceptions.
Donc, moi, je pense qu'il y a un
consensus, là, je vois 80 % des Québécois qui disent : Les personnes
en autorité ne devraient pas pouvoir porter de signes religieux. Il faut que ça
arrête de traîner. 10 ans, c'est trop long. Même trois ans, là, deux ans et
demi de régime Couillard, ça aurait dû être réglé depuis longtemps. Réglons-le.
Puis moi, je suis prêt à m'asseoir avec Philippe Couillard, avec Jean-François
Lisée, avec les gens de Québec solidaire puis de régler ça dans les prochaines
semaines.
M. Vigneault (Nicolas) :
Vous avez entendu, évidemment, les propos dans la foulée de ce qui s'est passé
la semaine dernière, que ce soit le premier ministre Couillard, le maire de Québec,
disant qu'effectivement il faut revoir les propos. Est-ce que vous vous êtes
senti visé par ces déclarations-là?
M. Legault
: Non,
parce qu'on a besoin de faire des débats au Québec. Je veux dire, le dossier
des accommodements religieux, c'est un dossier qui revient à tous les trois
mois, à tous les six mois depuis 10 ans, et je peux comprendre certains
Québécois d'être fâchés devant l'inaction des gouvernements qui se sont succédé
depuis 10 ans. Donc, nous, ce qu'on a demandé, à la CAQ, c'est de dire :
Réglons ce dossier-là, faisons un compromis. Ce matin, j'en propose encore un,
compromis. Il faut régler ce dossier-là. C'est ce que la CAQ souhaite, c'est ce
que les Québécois souhaitent.
La Modératrice
: Marco
Bélair-Cirino, Le Devoir.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Si le premier ministre rejette votre main tendue, est-ce qu'on peut penser
qu'il n'adhérera pas, qu'il ne donnera pas suite au rapport de la commission
Bouchard-Taylor? Le gouvernement libéral ne l'a pas fait au cours des 10 dernières
années, des huit dernières années. Est-ce que vous allez vous opposer à
l'adoption du projet de loi n° 62?
M. Legault
: Oui,
écoutez, là, moi, ce que je souhaite, là, c'est que le premier ministre réponde
à ce que souhaitent 80 % et plus des Québécois, qu'on interdise les signes
religieux. Puis, pour l'instant, la seule option que je veux envisager, c'est
que le premier ministre comprenne l'importance, dans le contexte actuel, puis
entre autres avec ce qui s'est produit la semaine dernière, de mettre ce
dossier-là derrière nous. Et il ne peut pas aller contre 80 %des
Québécois.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais d'aller de l'avant avec une interdiction de recevoir ou de dispenser des
services à visage couvert, est-ce que ce n'est pas là un premier pas que
l'Assemblée nationale doit faire?
M. Legault
: C'est
un pas qui est nettement insuffisant. Je pense que les gens, là, s'attendent à
ce que les juges, les gardiens de prison, les policiers... On en voit, au
fédéral, qui ne portent pas de signes religieux. Et je pense que, si on veut
arrêter certaines personnes d'aller peut-être à l'extrême, c'est important
d'encadrer. Puis ce n'est pas suffisant, c'est nettement insuffisant de juste
parler de visage couvert ou découvert.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que la classe politique québécoise a une certaine responsabilité dans la
montée d'un sentiment de xénophobie, par exemple, ici, à Québec, selon vous?
M. Legault
: Bon, d'abord,
je l'ai déjà dit, je ne pense pas que ça soit une culture ou un courant
généralisé. Je ne crois pas qu'il faille faire de lien entre l'attentat de la
semaine dernière puis ces propos-là. Par contre, il y a un contexte qui est un
peu malsain parce qu'on n'a pas réglé le dossier des signes religieux depuis 10 ans.
Donc, il y a des Québécois, avec raison, qui sont fâchés que, régulièrement,
les accommodements aillent trop loin, qu'on n'ait pas mis de balises. Donc,
moi, je pense que là où il y a une responsabilité, c'est que ça aurait dû être
réglé depuis longtemps, depuis le dépôt du rapport Bouchard-Taylor, ce
dossier-là.
La Modératrice
:
Jean-Marc Salvet, Le Soleil.
M. Salvet (Jean-Marc) :
Bonjour, M. Couillard. Bonjour aux deux députées également. Est-ce que,
rétrospectivement, le fait d'avoir transposé au Québec le débat français sur le
burkini était judicieux ou ça a constitué une erreur, à vos yeux?
M. Legault
: Bien
là, on parle d'un autre dossier, hein? On parle du dossier des valeurs. On s'est
exprimés clairement sur ce dossier-là. Là, ce qu'on parle aujourd'hui, là, c'est
les signes religieux pour les personnes en autorité. Donc, on ne parle pas d'un
vêtement...
M. Salvet (Jean-Marc) :
Si vous permettez, je vais élargir aux valeurs, parce que vous portez un test
des valeurs. Donc, est-ce que le fait d'avoir abordé ce débat comme il l'a été,
rétrospectivement, vous vous dites que peut-être ça aurait pu être abordé
différemment?
M. Legault
: Je ne
pense pas. Je pense, encore là, que ce sera un autre sujet qu'on devra aborder.
On ne peut pas éviter ces débats-là, ces débats-là ont lieu partout dans le
monde. Donc, on ne peut pas dire : Au Québec, on va mettre ça en dessous
du tapis, et ça va être réglé parce qu'on a mis ça en dessous du tapis. Il va
falloir avoir le courage d'avoir ces débats-là, de le faire d'une façon
sereine.
M. Salvet (Jean-Marc) :
Je fais partie des observateurs de la scène politique québécoise. Je me
permettrais de dire que je n'imagine pas un seul instant M. Couillard
aller dans le sens que vous dites, c'est-à-dire d'interdire le port de signes
religieux chez les figures de coercition. Bien, c'est peut-être une opinion que
j'émets, je ne l'imagine pas, avec tout ce qu'il a dit ces derniers mois, ces
dernières années. J'entends, en même temps, votre ton modéré comme celui de
tout le monde. Est-ce à dire que, s'il ne prend pas votre main tendue, pour
reprendre votre expression, ce ton-là va voler en éclats, c'est-à-dire qu'on va
retrouver ce qu'on retrouvait il n'y a pas si longtemps?
M. Legault
: Bien,
moi, ce que je souhaite d'abord, c'est que Philippe Couillard écoute ses
députés, hein? Il a 70 députés qui doivent parler comme nous avec les Québécois
sur le terrain, doivent entendre ce consensus pour adopter la recommandation
Bouchard-Taylor. Donc, pourquoi Philippe Couillard refuse? Pourquoi refuse-t-il
ce qui est proposé par une grande majorité de Québécois? Je comprends que respecter
la charte fédérale, c'est peut-être, pour lui, plus important que d'écouter les
Québécois, mais moi, je l'invite à écouter ses députés puis à écouter les
Québécois, à écouter le consensus puis à comprendre qu'on a besoin d'un
compromis actuellement, puis j'ai confiance qu'il fasse ce compromis.
M. Salvet (Jean-Marc) :
D'accord. Merci.
La Modératrice
: Martin
Croteau, LaPresse.
M. Croteau (Martin) :
Bonjour, M. Legault. Vous vous êtes fait le défenseur des valeurs
québécoises et, au nom de ces valeurs, vous avez dénoncé le Parti libéral et le
Parti québécois en les accusant de vouloir autoriser le port du tchador dans
des salles de classe. Par votre annonce d'aujourd'hui, ne vous trouvez-vous pas
à promouvoir le port du tchador dans les salles de classe vous aussi?
M. Legault
: Non,
non, pas du tout. D'abord, on a un gouvernement majoritaire libéral, hein?
Donc, quand même je voudrais adopter un projet de loi qui interdise les signes
religieux, incluant le tchador pour les enseignants, je ne peux pas le faire,
je suis minoritaire actuellement. Puis même avec le PQ, on est minoritaires,
mais...
M. Croteau (Martin) :
Mais vous êtes prêt à appuyer un projet de loi qui aurait cet effet-là.
M. Legault
: Non,
parce que ce qu'on dit aujourd'hui, on dit à Philippe Couillard, là :
Est-ce que vous êtes d'accord pour dire : Les juges, les gardiens de
prison, les policiers, le président de l'Assemblée nationale ne portent pas de
signes religieux? Donc, j'exclus les enseignants, là, parce que ça semble être
quelque chose qui chatouille Philippe Couillard plus spécifiquement. Donc, je
fais un compromis, je dis : O.K., tenons-nous-en à ce qu'a recommandé le
rapport Bouchard-Taylor. Bon, Gérard Bouchard, Charles Taylor, deux personnes
qui ont étudié le dossier, qui ont consulté, ça fait consensus, donc pourquoi
on n'adopterait pas au moins ça? Ça ferait un premier pas. Et, nous, dans la
campagne électorale de 2018, on va proposer d'ajouter les enseignants.
M. Croteau (Martin) :
Mais ce projet de loi là que vous êtes prêt à appuyer, vous en convenez,
permettrait le port du tchador dans les salles de classe.
M. Legault
:
Écoutez, actuellement, je ne peux pas m'y opposer, je suis minoritaire. Je vous
dis que, si j'étais au gouvernement, je l'interdirais. On va proposer, si on
est au gouvernement le 1er octobre 2018, que ça soit interdit. Pour
l'instant, je fais un compromis en disant : On va prendre les personnes
recommandées par le rapport Bouchard-Taylor. Mais je souhaiterais effectivement,
dans un monde idéal, qu'on interdise tous les signes religieux pour les
enseignants qui enseignent à des enfants. Je ne parle pas du cégep ou de l'université,
là, je parle à des enfants.
M. Croteau (Martin) :
Une question sur Gerry Sklavounos. Est-ce qu'il est le bienvenu à l'Assemblée
nationale? Manon Massé semble penser que non. Quelle est votre position
là-dessus?
M. Legault
: O.K.
Bon, d'abord, il faut reconnaître qu'il a été blanchi de l'accusation de Mme Paquet.
Maintenant, il y a eu d'autres allégations, ce n'est pas juste moi qui le dis, c'est
même Philippe Couillard. Je pense que la seule personne, actuellement, qui peut
répondre à cette question-là, c'est Philippe Couillard. Moi, si j'étais à la
place de Philippe Couillard, là, j'aurais un bon tête-à-tête avec M. Sklavounos
pour savoir est-ce qu'il y a un fondement à toutes les allégations qu'on a
entendues à son sujet. Et, tant qu'on n'a pas cette réponse-là, c'est
difficile. Donc, je veux attendre de voir ce que va faire M. Couillard. Je
suppose qu'il doit être en train, actuellement, de poser ces questions-là ou de
s'assurer que, dans deux mois, il n'y aura pas une autre accusation contre M. Sklavounos.
Donc, le seul qui peut répondre à cette question-là, c'est M. Couillard. Puis,
pour l'instant, bien, moi, je n'ai pas de preuves pour l'exclure.
M. Croteau (Martin) : Mais
est-ce que vous entendez... Vous faites même allusion aux allégations qui
circulent à son sujet. On comprend que le DPCP conclut qu'il n'a pas commis
d'acte criminel. Mais là, entre le criminel et l'approprié ou l'inapproprié,
est-ce que ce que vous savez au sujet des allégations autour de lui est digne
ou indigne d'un député de l'Assemblée nationale?
M. Legault
: Bien,
ce sont seulement des allégations, donc je ne peux pas, moi, décider du sort de
quelqu'un seulement sur la base d'allégations.
La Modératrice
: Merci.
Charles Lecavalier, LeJournal de Québec.
M. Lecavalier (Charles) :
Bonjour, M. Legault. En général, vos députés sont plutôt hyperactifs dans
les médias. La semaine dernière, vous avez fait un point de presse lundi, et
ensuite ça a été plutôt silence radio de la coalition. Comment vous expliquez
ça? Pourquoi?
M. Legault
: Je
pense que ce n'était pas approprié la semaine dernière. Puis, bien honnêtement,
même aujourd'hui, j'aurais aimé vous parler de la situation financière des
familles. Mais je comprends très bien, là, avec ce qui s'est produit de très
grave il y a une dizaine de jours, que c'était difficile, au moins la semaine
dernière, de parler d'autres sujets. Donc, évidemment, plus le temps va passer,
plus on va pouvoir revenir à l'économie, à l'éducation, au sort des familles québécoises.
M. Lecavalier (Charles) :
Pardon, qu'est-ce qui n'était pas approprié?
M. Legault
: Ce
n'était pas approprié de parler d'autres sujets. Je veux dire, les Québécois
n'étaient pas attentifs...
M. Lecavalier (Charles) :
Vous ne vouliez pas parler de...
M. Legault
:
...les journalistes n'étaient pas attentifs à d'autres sujets. Puis je ne pense
pas que c'était le temps non plus de ramener les débats, comme je commence à le
faire ce matin, sur qu'est-ce qu'on fait avec le port de signes religieux,
qu'est-ce qu'on fait avec les tests de valeurs, avec les tests de français. Je
ne pense pas que c'était le temps, là. C'était le temps d'être tous ensemble
avec les proches des victimes puis de dénoncer d'une seule voix la violence
inacceptable, injustifiée qu'on a vécue il y a une dizaine de jours.
M. Lecavalier (Charles) :
La semaine dernière, Alexandre Cloutier a dit que les députés de l'Assemblée
nationale n'en ont pas fait assez pour lutter contre l'islamophobie. Êtes-vous
d'accord avec lui?
M. Legault
: Bon,
d'abord, je le répète, je ne pense pas qu'il y ait une culture d'islamophobie
au Québec. Il y a des actes. Ça, c'en est un. Il y a un climat, hein, que moi,
j'associe davantage au fait qu'on n'a pas mis de balises, hein? Mettre des
balises, mieux encadrer pour mieux permettre... on n'a pas répondu à cette
demande des Québécois, aux inquiétudes des Québécois. Donc, dans ce sens-là,
effectivement, moi, je pense que les suites du rapport Bouchard-Taylor auraient
dû être adoptées depuis très longtemps.
M. Lecavalier (Charles) :
Mais est-ce que les députés en ont fait assez pour lutter contre
l'islamophobie?
M. Legault
: Bien,
écoutez, il faut toujours en faire plus, mais il ne faut pas non plus éviter
d'autres débats qui sont très importants aussi, où les Québécois souhaitent
qu'on protège leurs valeurs, que les Québécois souhaitent avoir des personnes
en autorité qui sont neutres, que les Québécois veulent qu'on intègre mieux les
immigrants. Donc, il ne faut pas tout mettre dans le même paquet, là, mais il
faut aussi lutter contre l'intolérance, lutter contre le racisme. Il y en a
dans notre société, et il faut en faire plus aussi de côté-là.
La Modératrice
:
Alexandre Robillard, LaPresse canadienne.
M. Robillard (Alexandre) :
Bonjour, M. Legault. M. Paulson, le commissaire de la GRC, s'inquiète
de l'apparition d'un discours politique corrosif qui, selon lui, contribuerait
à radicaliser des individus. Donc, je voulais savoir : Est-ce que vous
vous sentez visé par ça, vous?
M. Legault
: Non,
pas du tout. Je pense que c'est important, encore une fois, qu'on se donne des
balises au Québec, qu'on dise clairement aux Québécois : Voici ce qui est
permis, voici ce qui n'est pas permis, hein? On est accueillants. Les Québécois,
là, ont toujours été accueillants, seront toujours accueillants, mais les Québécois
veulent qu'on mette des balises. Et évidemment ça ne fait pas unanimité, la
liste des balises qui doivent être mises en place. Donc, il doit y avoir des
débats, et ces débats-là sont nécessaires. Donc, évidemment, plus vite ils
auront lieu, mieux ça sera. Plus vite on mettra ça derrière nous, mieux ça
sera. Malheureusement, on a des gouvernements qui ont manqué de courage pour
arriver à...
M. Robillard (Alexandre) :
Quand M. Paulson dit ça, est-ce que ça ne discrédite pas un peu la classe politique?
En lançant une affirmation comme ça, vous ne la recevez pas...
M. Legault
: Bien
là, est-ce qu'il est en train de dire que, partout dans le monde, la classe politique
prend des mauvaises positions? Moi, je pense qu'on ne règle pas un problème en
le mettant sous le tapis. Et c'est un peu ce que fait Philippe Couillard, et
c'est un peu ce que ce monsieur suggère. Mais on ne peut pas régler des
problèmes en les cachant. Il faut en débattre, prendre des mesures qui sont
raisonnables, équilibrées, mais ça, ça doit être fait.
M. Robillard (Alexandre) :
Est-ce que vous pensez que l'Assemblée nationale a la responsabilité de faire
la lumière sur les allégations d'employées de l'Assemblée nationale concernant M. Sklavounos?
Est-ce que c'est une responsabilité de l'Assemblée nationale?
M. Legault
: Non.
Je pense que c'est une responsabilité du chef du Parti libéral. Écoutez, je me
dis, là : Si c'était un de mes députés, là, j'aurais un bon face-à-face pour
savoir à quoi m'attendre, parce que, pour l'instant, ce ne sont que des
allégations, mais il y en a beaucoup...
M. Robillard (Alexandre) :
Oui, mais, justement, je veux dire, est-ce que vous pensez que M. Couillard
est capable de faire une enquête de lui-même ou est-ce que ce serait... Compte
tenu qu'il y a des dispositions qui ont été adoptées il y a quelques années à
l'Assemblée nationale, qui pourraient peut-être servir, vous ne pensez pas que
ce serait approprié de recourir à ces outils-là?
M. Legault
: Bien,
j'espère que Philippe Couillard va faire preuve de leadership, va confronter M. Sklavounos
et va aller au fond du dossier. Parce que, pour l'instant, il n'y a pas de
plainte officielle en suspens.
La Modératrice
:
Mathieu Boivin, Cogeco.
M. Boivin (Mathieu) : M. Legault,
je veux être certain de comprendre le lien entre ce qui s'est produit à la
mosquée de Québec et votre proposition politique. En faisant l'hypothèse que M. Couillard
ait réglé à votre satisfaction et appliqué intégralement le rapport
Bouchard-Taylor, en quoi est-ce que ça va empêcher le geste d'un extrémiste
criminel comme Alexandre Bissonnette?
M. Legault
: Bon,
d'abord, je ne pense pas qu'il faut faire de lien direct, O.K., mais il y a un
climat au Québec depuis 10 ans. C'est un dossier qui traîne, c'est un
dossier que et Jean Charest, et Mme Marois, et M. Couillard ont
laissé traîner, et je pense que tout ce qui traîne se salit. Et c'est un débat
qui est comme interminable et qui peut être vu par certaines personnes d'une
façon exagérée. C'est un débat qui, à mon avis, est nécessaire, mais il a duré
depuis trop longtemps. C'est pour ça que je tends la main à Philippe Couillard
pour qu'on le règle au cours des prochaines semaines.
M. Boivin (Mathieu) : Un
monsieur comme Alexandre Bissonnette protestait à sa façon contre le fait qu'on
aurait présumément laissé trop de latitude à l'expression de signes religieux
en autorité?
M. Legault
:
Écoute, de toute évidence, là, il n'y a rien qui peut justifier qu'on tue des
personnes, là. Puis, M. Bissonnette, on ne peut pas faire de lien entre le
discours des politiciens puis le geste qu'il a posé. Mais ce que je dis, c'est
que, là, il y a une inquiétude qui était là, il y a une inquiétude qui
s'ajoute, entre autres dans la communauté musulmane. Il est temps qu'on règle
le dossier, qu'on mette des balises, qu'on dise : Voici ce qui est permis,
voici ce qui n'est pas permis. Je pense que ça serait bon et pour la communauté
musulmane et pour l'ensemble des Québécois.
M. Boivin (Mathieu) : Et
ce serait de nature à calmer un autre extrémiste criminel de la même trempe?
M. Legault
: Encore
une fois, il ne faut pas faire de lien direct entre les deux, mais ça serait de
nature à apaiser notre société, qui est inquiète. Écoutez, là, ça a été perçu
d'une façon très choquante, ce qui s'est produit à la mosquée de Québec, par
beaucoup de Québécois. Évidemment, la majorité des Québécois ne se
reconnaissent pas puis s'attendent à ce qu'on pose une série de gestes. Puis je
pense que, parmi ces gestes-là, on doit s'entendre sur ce qu'on appelle la
neutralité religieuse, la place de la religion dans notre société.
Évidemment, moi, j'ai été, comme ministre
de l'Éducation, un de ceux qui ont un peu sorti la religion des écoles, hein?
Bien, il va falloir aussi qu'on se demande : Est-ce qu'un policier ou une
policière devrait pouvoir porter un signe religieux? Moi, je pense que non puis
je pense que plus de 80 % des Québécois pensent que non. Mais, pour toutes
sortes de raisons liées peut-être à la charte fédérale, M. Couillard ne
veut pas agir. Je pense qu'il n'aura pas le choix d'agir. Puis c'est bien beau,
la charte fédérale, là, mais là il faut écouter ce que souhaitent les
Québécois, ça presse.
La Modératrice
: Merci.
On va passer aux questions en anglais. Ryan Hicks, CBC.
M. Legault
:
Yes, good morning.
M. Hicks (Ryan) : Good morning. I'm just interested and wondering what kinds of
discussions or reflections you've had with your caucus about the way you're
going to debate the identity and the values issue moving forward, the tone and
the words that you're going to choose.
M. Legault
:
OK. I think, right now, with what happened last week, we need to unify. In
order to do so, I propose today a compromise regarding the Bill 62. I
think that the Bouchard-Taylor recommendation to forbid religious signs for
people in authority makes consensus. I would say that more than 80% of
Quebeckers agree with that. So, at the CAQ, we added to those people in
authority teachers. What I say today is: I'm ready to put aside, in the list, the teachers. I will come
back in 2018 with this proposal. But, right now, in order that all parties
adopt a bill in the next few weeks, be unified, I think everybody must make
compromises and we should adopt a bill about religious neutrality as soon as
possible.
M. Hicks (Ryan) : And back to my original question, tough, in terms of, you know, how
U.S. politicians are going to carry out the debate over identity, over values,
have you had any reflections over the past week about how you'll do that moving
forward?
M. Legault
:
OK. I don't see important changes in the way the CAQ is
dealing with these matters. I think Mr. Couillard must change his way of
dealing with these matters. When he accuses me of being intolerant because we
want to discuss this matter that is discussed everywhere in the world, I think
he made an error. And I think we have to sit together. Mr. Couillard offered me
to have personal meetings with leaders of the different parties. I'm open to
that, and I'm ready that we adopt a bill in the next few weeks, and I think it
would send a very strong message to the population.
M. Hicks (Ryan) : One of the things that people talked about last week was some of
the tone — and in
English we call it dog-whistle politics — when you kind of say something but you mean to says something else.
And we've had some people say that they feel… OK, they admitted, like
Jean-François Lisée admitted some of his comments have gone over the line when
he talked about burkas and AK-47s. Do you think that ad that your party put out
with the women in a chador before the by-election… that that kind of ad went over
the line?
M. Legault
: No, I don't think. I think what we said at the time, with this
publicity, is that we think that teachers — and
I'm talking about teachers teaching to children, all right? — must
not wear religious signs, including the chador. I still think that today. So, I
think we really need to at least put in a bill that judges, policemen and women
and Crown prosecutors be forbidden to wear religious signs. I think it's
important. But eventually we'll also have to include teachers because I think
that our teachers are models to our children and they cannot push for a certain
religion.
La Modératrice
:
Raquel Fletcher.
Mme Fletcher (Raquel) : If it's OK to make this kind of compromise, backing down from the
teachers when you went so hard on that before, if it's OK to make this type of
compromise in light of what happened last week, why weren't you willing to
compromise before?
M. Legault
:
Because I still think that teachers should be included in this list. But
because of what happened last week, I agree with Philippe Couillard that we
have to do something the next few weeks. So, I propose a compromise. He should
also propose a compromise. We must try to find a middle ground in order to
adopt a bill and send a strong message about the way we want to live all
together with all communities.
Mme Fletcher (Raquel) : So, was the mosque attack, then, like a wake-up call?
M. Legault
:
I think, of course, many Quebeckers were very sad with what happened. They had
some worries before because of all the terrorist acts that they saw everywhere
in the world. But I think that, right now, it went up a bit more in Québec,
this sad feeling from the population. So, I think, as responsible people at the
National Assembly, we must do a strong gesture.
Mme Fletcher (Raquel) : I have a question for Nathalie Roy, ici.
M. Legault
:
Yes. Excuse, tiens, vas-y donc comme ça.
Mme Fletcher (Raquel) : Last week, you gave us a statement at Global News saying that you
wanted the Justice Minister to abandon Bill 62 and replace it with a new bill.
Have you changed your mind about that? Do you agree with Mr. Legault and
his compromise?
Mme Roy
:
Well, like Mr. Legault said, right now, I think it's the time to find a
compromise because it's an urgent situation, an exceptional situation, and we
have to show the population that we can work and find a way to regulate
religious signs or neutrality, neutrality of the State, and the context is quite
different. Because I already said I would vote against «p.l. n° 62»,
Bill 62 as it is right now because, as you know, there's almost nothing in
that bill. It's not a secularism bill, and neutrality without secularism is
nothing. So, even the word «secularism» is not in that bill. The thing is that
no religious signs were touched. We were saying that we have to ban some
religious signs, like Bouchard-Taylor told us to do so, and at the time we
added teachers with youngsters. And the other point is that there's the
article 9, who said that services should be given and received with open
face, but the thing is that Mr. Couillard forget to say that, in the same
article, he allows an exception, and that's unacceptable.
So, we ask for a
compromise, we make a compromise, we said, we won't
touch the teachers, but it's going to be in our program in 2018. But, right
now, the situation needs us to
take a moment together and to find a way because it's been 10 years, 10 years
that the Liberals and the PQ did nothing and they used that matter. So, I think
that the population is waiting for an answer.
And doing that compromise
and accepting our compromise, our hand, to accept a bill who would say that
religious signs will be bind for only those people in authority, which are
policemen, judges, Crown prosecutor, «gardiens de prison» and even the
president of the National Assembly and the
vice-president, just accepting that, that's the compromise we asked for, and it
will be a huge sign for the entire population because we believe that 80% lf the
population agrees with that.
La Modératrice
:
Phil Authier.
M. Authier (Philip)
:
Last question. Mr. Legault, just a technical question. The points that you
make on the compromise proposal, is your vision that you would add that to
Bill 62 or start over with a new bill?
M. Legault
:
Whatever. But I think that, right now, there is not much in the Bill 62,
so we can restart from zero or make modifications. But, I think, what is
important is that we target the main recommendation of Bouchard-Taylor and that
we put that in the bill, adopt that unanimously in the next few weeks.
M. Authier (Philip)
:
That's why I asked, because the bill does not have these things.
M. Legault
:
Whatever is faster.
M. Authier (Philip)
:
Whatever is faster?
M. Legault
:
Yes.
M. Authier (Philip)
:
O.K. And you don't think — just a follow-up on the other questions — that
there was no excessive language on the part of the CAQ, your membership in all
of that? Because last week, you were blaming «radios-poubelles», there were
many, many factors. People said there were many factors that created that
climate that the Muslim spokesperson… the insidious climate, and the CAQ had nothing
to do with that, right?
M. Legault
: I never spoke about AK-47. I never spoke about intolerance from one
of my vis-à-vis. So, no, I think what we propose is
mainly what Bouchard-Taylor is proposing, and I think that is what 80% and more
of the population wants.
La Modératrice
:
On va juste revenir à Raquel Fletcher, une question pour sa collègue Maya, qui
est en...
Mme Fletcher
(Raquel) : Oui, parce que Maya est en haut.
M. Legault
: Maya, qu'est-ce qui arrive avec Maya?
Mme Fletcher (Raquel) : She's doing a live. So, she just wants to know if you think Gerry Sklavounos should be welcomed back
into the Liberal caucus.
M. Legault
:OK. I think, the
only one who can answer this question is Mr. Couillard because we heard,
in the last few months, many allegations about the way Mr. Sklavousnos was
dealing with women. It was only allegations. So, I think if I was Mr. Couillard,
if I was his leader, I would have a good talk with him to make sure that what
he did in the past respects regulations, laws and ways that you should treat
women.
Mme
Fletcher (Raquel) : O.K. Merci.
La Modératrice
: Merci
beaucoup.
M. Legault
: Thank you.
(Fin à 11 h 57)