(Huit heures une minute)
M. Lisée
: Le maire de Montréal
a dit hier qu'il y a des gens qui ont dormi au gaz. Il y a des gens qui ont
dormi au gaz puis qui sont payés pour être vigilants. Il y a des gens qui sont
payés pour assurer la sécurité des Québécoises et des Québécois, en particulier
en situation d'urgence, à la Sûreté du Québec, au 9-1-1, au ministère des
Transports, dans la fonction publique, dans les cabinets de ministres, au
niveau ministériel, au cabinet du premier ministre et le premier ministre. Ces
gens-là sont payés pour veiller à la sécurité des Québécois. Ces gens-là sont
payés pour voir venir la difficulté. Ces gens-là sont payés pour organiser les
services pour qu'on soit prêt au pire.
De toute évidence, sur toute la chaîne, il
y a eu des manquements graves. Il y a eu des fautes professionnelles, il y a eu
des bris de service. Il y a des gens qui n'ont pas fait le travail pour lequel
ils sont payés, et ces gens-là doivent répondre de leurs actes. La première
personne qui doit répondre de ses actes, c'est le ministre des Transports,
Laurent Lessard, qui hier a démontré hors de tout doute qu'il n'était pas à la
hauteur de la tâche qui est la sienne. Nous pensons que le premier ministre
doit le suspendre de ses fonctions, doit le démettre immédiatement. Il n'était
pas à la hauteur de la tâche avant la crise, pendant la crise, après la crise.
Le ministre des Transports a laissé tomber les Québécois au moment où ils
avaient besoin de lui.
Des informations qui nous proviennent
depuis hier montrent que les décisions indispensables pour assurer la sécurité
des Québécois n'ont pas été prises, des décisions d'affectation, des décisions
de mettre en vigueur des protocoles existants pour augmenter le nombre de
personnes en charge de la sécurité. Nous devons savoir qui, à quel moment, n'a
pas fait son travail, et pour ça, ça prend un enquêteur externe. Nous ne
demandons pas une grande commission d'enquête qui va prendre un an, nous
demandons un enquêteur administratif, un ancien sous-ministre de la Sécurité
publique, de la protection civile ou des Transports, désigné conjointement par
le gouvernement et l'opposition, une condition indispensable à établir la
confiance dans cette enquête.
Nous demandons que cet enquêteur prenne
quelques semaines pour faire le tour de ce qui s'est produit et vienne rendre
compte à une commission parlementaire. Et nous demandons que cet enquêteur ne
fasse pas que nous dire quels ont été les processus. On veut qu'il nous dise
qui a dit quoi, à qui, à quel moment, qui n'a pas fait son travail et quelles
sanctions doivent être posées pour les fautes professionnelles graves qui ont
été commises au cours des 48 dernières heures, fautes professionnelles graves
qui ont mis à risque la vie de centaines de Québécois.
Nous espérons que le premier ministre,
aujourd'hui, contrairement à hier, sera à la hauteur de la situation. On espère
que le premier ministre reconnaîtra avec nous que son ministre des Transports,
ses services administratifs, les sous-ministres qu'il a lui-même
désignés — c'est le premier ministre qui désigne les sous-ministres — n'ont
pas été à la hauteur de la tâche qui est la leur, et que le premier ministre va
se rendre compte que ce fiasco, en fin de course, il lui appartient, à partir
des désignations qu'il a faites, des personnes qu'il a choisies, et que donc il
doit admettre avec nous qu'un enquêteur externe désigné conjointement doit
faire la lumière et faire ses recommandations.
Nous voulons savoir aussi, au niveau
politique, comment il se fait que, lorsque la SQ était incapable de parler au
MTQ, il n'y a pas eu un signal d'alerte qui s'est rendu plus haut, au cabinet
du ministre de la Sécurité publique, pour dire : Il y a un problème, on
est en crise majeure, des centaines de personnes sont dans leur voiture. La SQ
ne peut pas parler au MTQ, que se passe-t-il pour réparer ce bris de communication?
À quel moment est-ce que le ministre de la Sécurité publique a été avisé qu'un
des services essentiels, dont il a la charge, n'arrivait pas à faire son
travail? À quel moment est-ce que le ministère de la Sécurité publique a avisé
le ministère des Transports que le ministère des Transports ne répondait pas à
l'appel? Et, si ça n'a pas été fait, pourquoi? Où sont les incompétents? Qui
sont les incompétents et combien d'heures faudra-t-il avant qu'ils soient
remplacés par des gens compétents?
J'ai eu la chance, dans ma vie, d'être
conseiller de Lucien Bouchard au moment où il y avait la crise du verglas, et
tous les jours on se demandait : Qu'est-ce qui peut arriver de pire dans les
24 prochaines heures et sommes-nous prêts au pire? Et le leadership politique,
il est essentiel pour donner l'énergie, donner l'impulsion à l'ensemble des
services administratifs. Je ne dis pas que le premier ministre aurait dû faire
comme Lucien Bouchard à l'époque, parce qu'on n'avait pas une ampleur
semblable, mais c'était le ministre des Transports et le ministre de la
Sécurité publique qui auraient dû, à partir de mardi, annuler tous leurs
rendez-vous et dire : Bien, on va gérer cette crise-là, on va envoyer les
bons signaux, on va poser les bonnes questions.
Et de toute évidence, pour eux, ce qui
s'en venait, ce qui était prévu, ce qui était sur les écrans, ce qu'on voyait
en couleur se dégager de l'Ontario vers chez nous, ce n'était pas assez important
pour qu'ils en fassent une priorité. Il y a une grave responsabilité politique
qui est engagée et il y a une grave responsabilité administrative. Les Québécois
ont l'impression, avec raison, que leur gouvernement les a laissé tomber dans
un moment de grand besoin. Nous devons savoir qui, nous devons savoir comment.
Et avant de, bien sûr, faire en sorte que ça n'arrive plus jamais, il faut que
les gens qui sont responsables d'avoir laissé tomber les Québécois soient
imputables et sanctionnés.
M.
Bérubé
: Responsabilité
ministérielle et gestion de crise, encore une fois, le ministère des Transports,
sous le gouvernement libéral, on a passé à côté de potentielles tragédies
humaines importantes. Les questions que le chef du Parti québécois pose sont
très importantes.
À partir de quel moment le ministre de la
Sécurité publique et le ministre des Transports ont-ils reçu l'appel, l'état de
situation les informant de la gravité? Et, à partir de cette séquence-là, on va
être capable de mesurer leur réaction. Et je regrette, à titre de
parlementaire, qu'hier, dans un moment important, où il faut donner
l'information, expliquer et rassurer, que le blâme a été porté sur vous, alors
qu'on aurait dû s'adresser aux Québécois et surtout aux personnes qui étaient
malencontreusement prises, captives sur l'autoroute, leur expliquer comment on
a failli. Et, en ce sens, le message qu'on veut envoyer, c'est qu'on veut faire
toute la lumière, toute la vérité pour, un, d'abord comprendre ce qui s'est
passé, ensuite s'assurer que ça ne se représente jamais.
Nous avons vécu, le chef du Parti
québécois et moi, cette responsabilité ministérielle aussi de la gestion de
crise, que ce soit Mégantic ou L'Isle-Verte, rapidement, il faut agir. C'est
une façon pour un gouvernement d'être rapidement en phase avec la situation,
et, en ce sens, c'était une crise qui commandait des réponses extraordinaires.
Et je termine en disant qu'en matière de
sécurité publique, quand on m'explique que le 9-1-1 a été appelé, que la
réponse n'était pas immédiate, qu'on ne répond pas aux policiers au ministère
des Transports, imaginez, là, si on perd confiance, dans une situation comme
celle-là, aux autorités policières et aux liens qu'ils peuvent faire avec leurs
partenaires, on a un sérieux problème.
Le Modérateur
: Merci,
MM. Lisée et Bérubé. On va y aller avec les questions. Merci d'avoir une question,
une sous-question. On va au micro de droite, M. Laforest.
M. Laforest (Alain) :
Bonjour. Si on fait un peu rapidement la genèse des événements, on a un
sous-contractant, on a le ministère des Transports, on a la Sûreté du Québec,
on a la Sécurité publique. On append que la Sécurité publique n'a pas jugé bon
d'ouvrir son centre d'urgence, et là vous blâmez le ministre des Transports.
À ce que je sache, ce n'est pas le ministre
des Transports qui est responsable d'ouvrir le centre d'urgence. Ce n'est pas
le ministre de la Sécurité publique?
M. Lisée
: Tu veux
répondre?
M.
Bérubé
: Bien,
oui. En fait, la Sûreté du Québec a tenté à plusieurs reprises de rejoindre le ministère
des Transports pour une raison très simple : leurs véhicules ne peuvent
pas se rendre sur les lieux, ils ont besoin de l'outillage, des charrues, des
instruments du ministère des Transports ou de leur sous-traitant pour pouvoir
se rendre sur place. C'est une question de sécurité, sinon eux-mêmes se mettent
en danger.
Alors, cette question-là, il y a des
dizaines d'appels qui ont été logés, ils n'ont pas pu se rendre. Quant à un centre
d'hébergement, c'est une autre responsabilité, là. Qu'ils appellent la sécurité
civile à ce moment-là. Ça s'est produit à d'autres endroits, ça aurait pu se
faire là également.
Mais d'abord que les policiers puissent
aller constater, avec les paramédics potentiellement, l'état du danger, ça,
c'était la première étape préalable ou potentiellement simultanée à un centre,
là, d'accueil pour les personnes qui étaient, là, prises dans le froid.
M. Lisée
: La question
va se poser, il n'est pas certain qu'il fallait que la Sécurité publique entre
en action à ce moment-là. Ce qui est certain cependant, c'est que la SQ tentait
de rejoindre le MTQ et n'arrivait pas à le rejoindre. C'est pourquoi je pose la
question au ministre Coiteux : Quand a-t-il su qu'il y avait un bris de
communication, dans une situation grave, entre les services policiers de son ministère
et les services du ministère de M. Lessard? S'il l'a su, qu'a-t-il fait, lui,
ou son cabinet, ou son administration? À quelle heure? Et, de toute évidence,
pendant toute la nuit, ça n'a pas été fait.
Donc, il y a une responsabilité qui est
engagée de la part de M. Coiteux, mais on voit bien que le noeud du problème
est au MTQ, et c'est l'inaction du MTQ qui a fait en sorte que la SQ, entre
autres, et d'autres ne pouvaient pas faire leur travail correctement. Et donc
la responsabilité première, elle est au ministre Lessard, mais je ne dis pas
que M. Coiteux a fait ce qu'il devait faire au bon moment. Nous voulons avoir
des réponses à ces questions-là aussi.
M.
Bérubé
: Juste
un petit élément. Il y a des caméras partout sur le réseau. Je ne peux pas
croire que c'est les mêmes qu'on avait à Orsainville, là, qui n'ont rien vu,
là. Ces caméras, elles étaient partout sur le réseau, elles permettent...
Écoutez, là, ils ont capté un harfang des
neiges, là, qui allait devant l'écran, là, puis ils ont montré ça, là, sur le
site du ministère, il y a à peu près deux ans, comme une grande fierté. Est-ce
qu'on peut voir ce qui se passe sur l'autoroute aussi? Les caméras sont
partout.
M. Laforest (Alain) : Donc,
pour vous, les 300 personnes prises dans leur véhicule, à Montréal... il y a quand
même eu deux morts, là, dans la région de Montmagny. Est-ce qu'on a tout fait
pour aller les chercher?
M. Lisée
: Bon, ça, il
y aura une enquête du coroner dans ce cas-là. Les informations que nous avons
pour l'instant, c'est que la volonté de trouver ces personnes était au
rendez-vous. Je ne veux pas tirer de conclusion politique sur ces cas-là. Je
veux laisser l'enquête du coroner faire la lumière là-dessus. Je ne doute pas
de la volonté de chacun des intervenants, que ce soit la SQ, des pompiers, les
policiers, ceux qui étaient au travail, qui ont voulu bien faire leur travail.
Je veux savoir s'il y avait assez de gens au travail, s'ils étaient
correctement coordonnés, si des décisions avaient été prises pour renforcer les
équipes. Nous avons des indications ce matin que ce n'était pas le cas. Ça,
c'est une décision politique de renforcer ou de ne pas...
M. Laforest (Alain) : On parle
de Montréal ou on parle de Montmagny?
M. Lisée
: Non, je ne
parle pas de Montmagny. Montmagny, je mets à l'écart, O.K.? Montmagny, le
coroner nous le dira. Je ne veux pas faire de politique avec des questions où
il y a mort d'homme. Laissons le coroner faire ça. Là où nous savons qu'il y a
une responsabilité politique, c'est dans la gestion de crise sur l'autoroute
13.
Le Modérateur
: Merci.
Mme Richer, LaPresse canadienne.
Mme Richer (Jocelyne) :
Bonjour, M. Lisée. Au cours des dernières années, il y a plusieurs ministres
qui se sont succédé au ministère des Transports. Ça semble être des portes
tournantes et ça semble être un ministère difficile ou impossible à diriger, à
gouverner.
Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu... Vous
demandez une enquête. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'y voir, dans
cette crise, un problème non pas circonstanciel mais structurel? Et est-ce
qu'il n'y a pas lieu d'élargir l'enquête sur toute la gouvernance et la
structure du ministère des Transports? Est-ce qu'il y a un problème plus
profond?
M. Lisée
: Écoutez, la
structure était la même lorsque nous étions au pouvoir et que nous avons géré
la crise du verglas, lorsque nous avons géré la crise à Lac-Mégantic, à L'Isle-Verte,
mais à Lac-Mégantic, il y avait des problèmes de transport aussi. Ça marchait.
Ça marchait. Il y avait des organigrammes assez semblables.
Et moi, je pense qu'il y a une
responsabilité individuelle. Des personnes n'ont pas pris les bonnes décisions
pour des raisons qui sont obscures. Est-ce que c'est de l'incompétence, c'est
de la nonchalance, de l'inefficacité? C'est sûr qu'il y a des questions à la
MTQ qui créent un malaise sur… Lorsqu'il y avait un ministre, Robert Poëti,
qui voulait faire la lumière, il a été retiré de son poste, mais ce n'était pas
la lumière sur une situation comme celle qu'on vient de voir, c'est sûr les
questions de malversation.
Est-ce que la gestion de M. Couillard du ministère
des Transports, à changer le ministre régulièrement, est une bonne chose?
Évidemment non. Est-ce que l'incapacité du premier ministre de trouver un bon ministre
des Transports aggrave les choses? Évidemment oui. Mais, sous d'autres gouvernements,
ce ministère-là, dans des situations d'urgence, a bien fonctionné.
Mme Richer (Jocelyne) : C'est
le premier ministre Couillard qui a nommé M. Lessard dans cette fonction-là.
Selon vous, quelle part de responsabilité doit-il assumer dans le cafouillage
qu'il y a eu mardi?
M. Lisée
: Une énorme part
de responsabilité, et c'est ce que l'enquête doit démontrer. Les personnes que
M. Couillard a choisies comme compétentes pour gérer des situations de crise se
sont montrées incompétentes. Alors, le jugement de M. Couillard est engagé.
Le Modérateur
: Merci. On
va avec M. Lecavalier.
M. Lecavalier (Charles) :
Bonjour, M. Lisée. Vous dites qu'il y a des gens qui ont prises des mauvaises
décisions. Donc, si on enlève M. Lessard, là, au ministère des Transports, il y
a un sous-ministre qui est responsable de ça, il y a des employés. Quelles
seraient les conséquences qu'il pourrait y avoir? Parce qu'on a toujours
l'impression qu'il n'y a pas vraiment de conséquence pour les employés de la fonction
publique.
M. Lisée
: Il faut que
l'impunité cesse. Il faut que des gens soient tenus responsables. Alors, moi,
je ne peux pas vous dire qui, quoi, à quelle heure et quelle sanction.
Mais c'est pourquoi nous demandons un enquêteur externe, qui connaît
l'administration publique, qui sera choisi de concert entre le gouvernement et
l'opposition pour nous dire : Bien, voici ce qui aurait dû être fait par
telle personne. Elle ne l'a pas fait. Il y a des règles, il y a des sanctions.
Lorsqu'une faute professionnelle, grave ou non, a été commise, il peut y avoir
une suspension, on peut avoir un renvoi. Ces règles-là existent. Elles…
Une voix
:4uvUne mutation...
M. Lisée
: Une
mutation… On ne veut pas de Gilles. C'est fini, les Gilles. On n'en veut pas.
M. Lecavalier (Charles) :
Parce qu'on a souvent l'impression que le genre de punition, c'est de se
retrouver administrateur à l'ENAP ou…
M. Lisée
: Une faute
professionnelle grave doit encourir une réelle sanction. Si quelqu'un est
incompétent dans un poste, il y a peut-être des responsabilités beaucoup moins
importantes que cette personne-là devrait assumer, avec un salaire beaucoup
moindre, pour ne pas mettre en danger les personnes dont il a la charge.
M. Lecavalier (Charles) :
Comment est-ce qu'on peut expliquer que ce soit le maire Coderre qui ait donné
une chronologie des événements, incluant les gestes ou les non-gestes du MTQ,
et non pas le ministère des Transports qui a fait un point de presse avec tous
les faits, ce qui s'est déroulé, etc?
M. Lisée
: Il est plus
compétent. Denis Coderre est plus compétent que Laurent Lessard. C'est aussi
simple que ça, et, si M. Couillard veut convaincre M. Coderre d'être ministre
des Transports, moi, comme citoyen du Québec, je serais très content.
Le Modérateur
: On y va
avec M. Vigneault, Radio-Canada.
M. Vigneault (Nicolas) : M.
Lisée, vous avez parlé de suspendre Laurent Lessard. Pourquoi vous ne demandez
pas carrément sa démission? Est-ce que vous souhaitez qu'il quitte carrément,
définitivement?
M. Lisée
: Oui. Oui, je
souhaite qu'il quitte ses fonctions, oui.
M. Vigneault (Nicolas) : Sur
cette enquête-là, l'enquêteur... qu'est-ce que vous attendez de cette enquête?
Vous ne voulez pas vraiment une commission, évidemment, il y en a déjà
suffisamment. Qu'est-ce que vous attendez de cette enquête-là?
M. Lisée
: Donc, je
veux de la rapidité. Je veux quelqu'un qui peut entrer au ministère des
Transports, entrer au ministère de la Sécurité publique, avoir le mandat
d'interviewer les gens, de faire la chronologie, de comparer les témoignages et
de rendre un rapport sur ce qui n'a pas marché et les personnes qui n'ont pas
fait leur travail, les personnes administratives, les personnes politiques. À
partir d'une réelle chronologie des événements et des témoignages, on peut
avoir, en quelques semaines, un portrait de la situation, des recommandations
de sanction, et je veux que cette personne-là fasse rapport à une commission
parlementaire.
Le Modérateur
: On y va
avec M. Boivin, Le Soleil. Micro de droite.
M. Boivin (Simon) : Bonjour,
M. Lisée. Croyez-vous que la façon dont cette crise a été gérée ouvre la porte
pour les gens qui en ont subi les conséquences à une forme de dédommagement?
Est-ce qu'ils devraient être compensés pour ce qu'ils ont subi?
M.
Bérubé
:
Bien, d'abord, la première décision qui s'imposait, c'est pour le remorquage. Ils
ont pris... ça, ça a été... il y en a eu une bonne décision, c'est celle-là,
pour le remorquage. Pour le reste, il y a des gens qui ont manqué du travail,
il y a des gens qui ont manqué de nourriture. Il y a des gens qui étaient en
situation problématique quant à leur santé. Il y a un diabétique hier, un citoyen
diabétique qui a parlé qu'il était en manque grave pour sa condition. Alors,
il n'est pas exclu qu'ils décident eux-mêmes d'intenter des recours. Compte
tenu de la situation, il y a une responsabilité ministérielle, une
responsabilité de l'État sur une route qui est gérée par le gouvernement du
Québec, en plein centre-ville de Montréal, de ne pas être capable de les
secourir, de leur apporter le réconfort et l'aide nécessaire. C'est grave. Imaginez,
c'est à Montréal. Moi qui habite une circonscription rurale, ce que je peux
vous dire, cet après-midi, quand je vais me rendre au Bas-Saint-Laurent, je
vais me poser des questions, s'il arrivait quelque chose dans une région peu
densément peuplée.
Alors, je pense qu'il en vient aux
citoyens d'abord d'obtenir des réponses, des excuses, et potentiellement ça
leur appartiendra, des dédommagements.
M. Boivin (Simon) : Mais ils
auraient raison de le faire, à votre avis...
M.
Bérubé
: Ça
leur appartient. Là, on est dans une démarche entre des citoyens, mais je les
comprendrais d'en demander, je vais dire ça comme ça.
M. Boivin (Simon) : Autre question,
M. Lisée. Hier, M. Lessard a parlé d'une sous-ministre qui était en charge de
la coordination des mesures d'urgence. Craignez-vous qu'on cherche à identifier
un bouc émissaire chez les fonctionnaires pour éviter de subir soi-même un
traitement, disons, désagréable?
M.
Bérubé
: Il a
commencé par les journalistes hier.
M. Lisée
: C'est sûr qu'il
y a une chaîne de commandement où il y a eu des manquements un peu partout sur
la chaîne, alors chacun doit être tenu pour responsable de ce qu'il a fait ou
il n'a pas fait. Parce que c'est très public, parce qu'on l'a tous vu agir et
ne pas agir, on peut tous conclure que le ministre responsable a été
irresponsable et ne peut plus être ministre.
Maintenant, à l'intérieur, derrière les
portes du MTQ, comment ça s'est déroulé? C'est certain qu'il y a eu des
manquements. Lesquels? Ce n'est pas des boucs émissaires qu'il faut aller
chercher, ce sont des responsables qui n'ont pas fait leur travail. Mais c'est
sûr que, s'il fallait que seulement des fonctionnaires soient sanctionnés et
que le ministre des Transports, dont tout le monde a pu constater
l'incompétence, reste en poste, ce serait une grave injustice.
Le Modérateur
: On
continue avec Boivin, M. Cogeco Nouvelles.
M. Boivin (Mathieu) : M.
Coiteux et M. Lessard nous ont demandé 48 heures, hier, pour en arriver à
une conclusion, une enquête crédible. Vous avez tous les deux été au
gouvernement. Est-ce que 48 heures pour en arriver à tirer le fin mot de
l'histoire, c'est réaliste? Est-ce que c'est nécessaire? Et qu'est-ce qu'il
risque de se passer pendant ces 48 heures là?
M. Lisée
: Bien, c'est
sûr que, d'abord, 48 heures, c'est à la fois trop long et pas assez long.
Alors, c'est sûr que tant mieux si, en 48 heures, on a des informations
supplémentaires sur la chronologie. Mais vous avez remarqué que
Denis Coderre, lui, en quelques heures avait une première chronologie
qu'il rendait publique. C'est comme ça qu'il faut faire. C'est comme ça qu'on a
fait dans la crise du verglas, c'est ce qu'on a fait dans la crise de Lac-Mégantic
et à L'Isle-Verte.
Alors, M. Coderre, lui, savait
comment gouverner pendant une crise. Les deux ministres, hier matin, à
9 h 20, donc très tard, n'avaient pas de chronologie à vous donner,
n'avaient pas d'informations concrètes à vous donner, balbutiaient devant vous.
Clairement, ils n'ont pas été à la hauteur de la tâche. Nous espérons que,
demain, ils aient des informations complémentaires à nous donner, mais elles
vont faire une chronologie, j'espère, mais elles n'identifieront pas les
responsables du fiasco, en particulier eux deux.
Alors, je doute que, dans cette
chronologie, on nous dise quel était l'horaire du ministre Lessard pendant les
48 heures précédentes. Et, pendant cette fameuse nuit, combien de fois
est-il intervenu? Quel comité d'urgence, quelle cellule de crise a-t-il
constitué? Quand est-ce qu'ils se sont parlé pendant la nuit, le ministre de la
Sécurité publique et le ministre des Transports? Quel appel a été fait ou n'a
pas été fait au bureau du premier ministre pour dire qu'il y avait
300 voitures de citoyens qui étaient pris? À quelle heure le premier
ministre a-t-il été avisé de ça? Pourquoi il s'est présenté devant vous, hier
matin, comme un passant ahuri de ce qui se passait plutôt qu'un premier
ministre en charge d'une situation de crise?
Je ne pense pas que ça soit dans le
rapport demain, et donc raison de plus d'avoir une enquête indépendante rapide pour
répondre à toutes ces questions-là.
M. Boivin (Mathieu) : En bref
et en clair, vous prédisez qu'il n'y aura rien de spécialement valable dans
cette reddition de comptes là, demain.
M. Lisée
: Non, mais je
présume qu'on va apprendre des choses demain. Est-ce qu'on va apprendre toutes
les choses qu'on doit savoir? Je présume que non.
Le Modérateur
: Merci.
Je crois que c'est... Dernière question en français, M. Bélair-Cirino.
M. Bélair-Cirino (Marco) : M.
Bérubé ou M. Lisée, là, comme vous le souhaitez... M. Bérubé, puisque vous êtes
porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité publique, quel
était le rôle du centre de contrôle, du centre de coordination du gouvernement,
dans la mesure où ce centre de contrôle là a accès à toutes les caméras,
notamment du ministère des Transports. Il y a des employés qui sont là 24
heures sur 24, sept jours sur sept. Ils surveillent, notamment, le printemps,
la crue des eaux. Donc...
M.
Bérubé
:
Bien, voilà, alors, pour n'importe quel automobiliste de la région de Montréal
ou de la banlieue, sachez une chose : si vous passez sur une autoroute,
sur une autoroute, et qu'on est capable de capter votre plaque pour vous
envoyer une facture, bien... ça, c'est le minimum, ils sont capables de le
faire. On ne serait pas capable de voir 300 véhicules sur une autoroute? Je n'y
crois pas.
Il y a un centre de contrôle avec des
caméras partout. Je disais tantôt, en boutade, qu'on s'est vanté, il y a deux
ans, ah, on a vu passer un harfang des neiges. Vous avez tous vu ça, là, ça a
été un buzz sur les réseaux sociaux. Qu'on n'ait pas vu ça, il y a manifestement
eu de la négligence ou a capté les images, on a transmis cette information à
quelqu'un à la Sécurité publique, à la direction du MTQ. Et, à partir de ce
moment-là, quand le politique est au courant de ça, qu'est-ce qu'il en fait?
Quelle est son appréciation de la situation? Et 300 véhicules, vous avez vu des
images, c'est quand même assez imposant. Et là il y a l'effet cumulatif, parce
qu'il y a d'autres véhicules qui peuvent s'accumuler, potentiel de collision,
un peu un jeu de billard, comme il s'est passé à Magog.
Alors, je ne comprends pas comment ils ont
pu ne pas voir. Et, si les gens ont vu, pourquoi ils n'ont pas été crus? C'est
ma réflexion.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que le Plan national de sécurité civile aurait dû être déployé et à
quelle heure, selon vous?
M.
Bérubé
: La
sécurité civile, ça s'applique en toutes circonstances, lors de catastrophes
ferroviaires, lors de catastrophes humaines, en mer, en forêt. Et maintenant,
on apprend qu'il va falloir en déployer en milieu urbain, là où il y a pourtant
des services de santé, de sécurité, d'assistance qui sont à proximité. Alors,
la sécurité civile, l'assistance, la gestion de crise, les centres
opérationnels, c'est en toutes circonstances. Est-ce que le ministère de la
Sécurité publique l'a envisagé? Je n'ai pas cette réponse, mais, chose
certaine, la situation commandait ce genre de décision de la part du ministre.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Parce qu'on semble se questionner sur qui était responsable, mais il y a un
mécanisme qui prévoit...
M.
Bérubé
:
C'est un automatisme. Il y a...
M. Bélair-Cirino (Marco) :
...dans des situations semblables que le sous-ministre associé coordonne les
opérations. Donc, il y a quelqu'un...
M.
Bérubé
: Il y
a une séquence, il y a quelqu'un qui dirige, il y a un interministériel. On
nous a même dit que le ministère des Transports a négligé de participer à
plusieurs discussions, conférences téléphoniques dans la nuit. Alors, pour
quelle raison ils étaient aux abonnés absents? Je ne le sais pas. Mais chose
certaine, cette séquence-là est importante parce que chaque minute comptait,
compte tenu des conditions climatiques, compte tenu du confinement dans lequel
étaient les automobilistes. On dit 300, mais c'est plus que ça, 300 véhicules.
Il y a manifestement... C'est plus sérieux
et les conséquences étaient plus périlleuses qu'on peut le croire, à la lumière
de ce qu'on apprend maintenant sur chacune des histoires de chacun des
véhicules qui étaient là.
Le Modérateur
: Merci. On y va en anglais. M. Hicks.
M. Hicks (Ryan) : M. Lisée, you talked about politicalresponsibility and
an administrative responsibility. So how should Quebeckers divide up the blame over the failure to rescue these stranded
motorists?
M. Lisée
: Well, the politicalresponsibility is first and
foremost because the people designated by the Premier to head these departments
had the responsibility to make
sure that the administration is
up to speed in cases like that. And clearly we all saw that they were not up to
speed. They failed in their responsibility. That's why we're asking for Mr. Lessard to be removed from his
post immediately.
Now, how in the chain of
command administrative were the faults? Now, we need an impartial expert
designated by the Premier and the Opposition to go into the machine, ask all
these questions, someone who
knows how this works, someone who was there in previous crisis that when well,
like «la crise du verglas» or Mégantic. I mean, the Québec
Government and administrative services worked very well
during «la crise du verglas», during Mégantic. They were superb. I mean, we've
been teaching, as case studies, how Québec fared well in these crises.
So clearly, now, under
the Liberal Government, under
these people, the failure is apparent. So we have to go down with this enquiry,
say who was responsible of not doing their jobs, and what are the sanctions
that should be put. No one should go unpunished for having put in jeopardy the
health of so many Quebeckers.
M. Hicks (Ryan) : Do you think there is a deeper structural problem within the ministry? And I don't want to tie things
together that aren't related, but, I mean, last year, around this time, we
started to hear all kinds of allegations about a poor work culture within the Ministry of Transportation, allegations of
corruption, and obviously they are not the same thing, but we're seeing that
some kind of dysfunction happened here. Do you think that this symbolizes a
deeper problem?
M. Lisée
: Well, it's clear that, under Liberal administration, the Department of Transportation is the sick man of the Government. OK? Under our
administration, we didn't have this problem. Under our administration, it worked pretty well. Under our administration, during times of crisis, everyone was up to speed.
So is there a problem of
Liberal culture? Is this the people that the Liberals designate in the
leadership positions, in this department? The fact that will always be followed
me is when they had a Minister who wanted to fix things, Robert Poëti, they
kicked him out, and they kicked him out, and then they had two other chances to
put him back in, and the Premier just doesn't want him to be Minister of
Transportation. Well, maybe he has another chance to right this wrong.
M. Hicks (Ryan) : Mr. Bérubé, you talked about cameras, you talked about the fact
that the Ministry of Transportation was quick to put out a video clip of a
snowy owl flying in front of a camera. So what do you think this situation says about where there priorities
are?
M.
Bérubé
: Well, it's our national bird emblem. Well, there's cameras
everywhere around this highway, so, if you get caught not paying what you have
to pay on some highways, they are going find you, they're going to give you a
clear image. But first they didn't see 300 cars together totally not rolling?
This is first question.
If they know that, if the
Minister of Public Security and the Minister of Transport are aware of that,
what they decide to do? When did the call was receive? What is the schedule of
the Minister, since they had the news till they take action? So what we have in
mind is hard to understand how a situation like this can happen in an urban area. I live in a rural area. If
something happens there, in the Gaspé area, what is going to be the reaction of the authorities? If they
can't fix it in Montréal and you
have 300 families, people, 12 hours under cold, hungered, snow, anxiety, fear,
I'm clueless. So we're asking questions for the people and we want the truth for the people.
Le Modérateur
: Merci. Mme Fletcher.
Mme Fletcher (Raquel) : Mr. Bérubé, if I understand correctly what you're saying is that,
you know, they had the cameras. If they see you speeding, they'll give you a
ticket, but, if they see you in trouble, they do nothing?
M.
Bérubé
: Big Brother is all around the highways of Québec. If you don't pay what you have to pay, they're going to catch you.
They even catch the «harfang des neiges», which is a beautiful bird. They put
the video and the picture everywhere. They were proud of that. I want to see
the tape of what they have about 300 cars stuck on a highway under those
conditions.
So there's a question. I
do remember, in the Québec
jail, they didn't see nothing. No picture, nothing. So is there the same
operator? I don't think so. So, if they know something, if they have something,
a tape, pictures, something, someone has to do something.
Mme Fletcher (Raquel) : Do you want to make that video public?
M.
Bérubé
: Well, it could help the inquiry, sure.
Mme Fletcher (Raquel) : Mr. Lisée, what do you think of the behavior of Mr. Lessard or his
reaction yesterday during his first press conference? He told the reporters to
quit yelling at him. I don't know if you saw the video of that. Some
commentators said that it was bizarre behavior.
M. Lisée
: Well, bizarre, it was not only bizarre, it was unacceptable. A
minister of Transport, after a night of crisis, should have been up very early,
if he had slept at all. He should have been here at 6 :00 o'clock in the
morning to tell you the run down of what had happened, what needs to happen,
how the thing is managed. And he came in a nonchalant way, at 9 :20,
finding it was early, early for tough questions. Clearly he showed, just by his
demeanor, that he was not up to the task that is his to protect the drivers of Québec on the highways in these difficult conditions.
Le Modérateur
:
Merci. Dernière question, Mme Johnson.
Mme Johnson (Maya) : Just one final question, Mr. Lisée. I believe you addressed this in
French, but can you explain who would be responsible for this external
investigation, how it would be managed?
M. Lisée
: Yes. Well, I think what we need now, first, is for the Minister to
leave. I mean, everyone saw that he was incompetent in a time of crisis. Who
else was incompetent in the chain of command? We need an independent person, a
former «sous-ministre»…
Une voix
: Deputy Minister.
M. Lisée
: So we need an independent former Deputy Minister who handle crisis
well in Megantic, or in «la crise du verglas», or at L'Isle-Verte, someone who
knows how it should have happened, someone designated both by the Premier and
the Opposition that takes a few weeks to interview everyone in the chain of
command and then render a report on what failed and who failed and recommend
sanctions.
Some people there, by
their action or inaction, put in jeopardy the health of hundreds of Quebeckers.
They need to be held responsible, and so we want this report to be made public,
to a «commission parlementaire»,
a parliamentary commission, so we can hear what has happened. And we want
sanctions to be applied where it is opportune to do so. OK? Merci.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup, tout le monde.
(Fin à 8 h 36)