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Point de presse de Mme Manon Massé, députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques, et M. Harold LeBel, porte-parole de l’opposition officielle en matière d’emploi, de solidarité sociale et de lutte contre la pauvreté

Version finale

Le jeudi 18 mai 2017, 13 h 30

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Treize heures trente et une minutes)

M. Tremblay-Marcotte (Yann) : Bonjour, tout le monde. Merci d'être là. Je me présente, Yann Tremblay-Marcotte, je suis du Front commun des personnes assistées sociales du Québec et je représente la Coalition Objectif Dignité, qui a reçu l'appui de plus de 20 organisations communautaires et l'appui d'une centaine autres organisations communautaires, une coalition qui s'est formée particulièrement pour dénoncer les pénalités et les mesures de coercition prévues dans le projet de loi n° 70 ou le programme Objectif emploi. Je vais être accompagné par Véronique Laflamme, du FRAPRU, mais aussi de la Coalition Objectif Dignité, ainsi que Manon Massé, députée de Québec solidaire, Adel Arezki, qui est un étudiant en médecine qui a été l'origine de la lettre des professionnels de la santé, ainsi que le député Harold LeBel, du Parti québécois.

M. LeBel : Rimouski.

M. Tremblay-Marcotte (Yann) : Oui, de Rimouski. Donc, on vient d'entendre le ministre Blais. Évidemment, il ne nous a rien appris de nouveau dans tout ça. On n'est pas contre la vertu d'aller chercher le maximum, le potentiel des gens, d'aider toutes les personnes dans le besoin, toutes les personnes qui veulent se former, qui veulent apprendre plus, qui veulent terminer leur secondaire V. Nous, depuis le début, on est pour ces mesures-là. C'est important de garantir des formations qualifiantes pour l'ensemble des personnes. Mais, encore une fois, le ministre Blais a mis de côté complètement le principal problème au programme Objectif emploi, qui est les pénalités et les mesures coercitives. Donc, là-dedans, le ministre Blais, il a complètement élucidé de dire que couper un chèque de 628 $ par mois, pour lui, ça demeure acceptable. Il nous a parlé d'un revenu minimum garanti. Mais l'aide sociale n'est plus garantie, donc le 628 $ ne devient plus garanti, l'aide sociale peut être coupée.

Donc, nous, ça fait déjà un an et demi qu'on s'oppose à ce projet de loi avec beaucoup, beaucoup d'appuis qu'on a eus. La semaine dernière, c'était la Semaine de la dignité des personnes assistées sociales, la 44e qu'on organisait. Il y a eu 400 personnes qui étaient présentes à la manifestation, c'est énorme, des personnes à l'aide sociale qui osent aller dans la rue pour dénoncer ces mesures-là, qu'ils vont trouver injustes pour les personnes qui vont se retrouver à l'aide sociale. Donc, voilà.

La première question qu'on veut poser au ministre Blais, c'est : M. Blais, pourquoi tenez-vous à banaliser, hein, et voire ridiculiser l'expertise de tous celles et ceux qui sont sur le terrain, qui vous mettent en garde contre une approche coercitive à l'aide sociale? Parce que, nous, c'est vraiment ça qu'on voit au quotidien. C'est les organismes qui sont inquiets, les organismes qui vont devoir ramasser ces gens-là qui vont se faire couper à l'aide sociale, qui vont se retrouver avec moins que 628 $ par mois, qui vont avoir des problèmes de logement, qui vont avoir des problèmes de santé mentale qui vont s'aggraver.

Donc, nous, c'est vraiment face à face à ça qu'on veut mettre en garde le ministre et qu'il doit enlever les pénalités financières et enlever les mesures coercitives. On va donner la parole, mais on a vu qu'il y a 582 professionnels de la santé qui nous appuient. Il y a eu près de 300 professeurs chargés de cours de l'université et des cégeps qui nous ont appuyés. Il y a des organisations importantes qui étaient opposées à ça, la Commission des droits de la personne, la Protectrice du citoyen, j'en passe. Il y a vraiment beaucoup d'organisations qui sont opposées à ça.

Donc, le ministre ne nous a rien appris. Ça fait longtemps qu'on s'oppose à ça. Ça fait longtemps que les personnes assistées sociales méritent d'avoir beaucoup mieux que des coupures à l'aide sociale. Ils méritent une formation ou des formations qualifiantes. Ils méritent d'être accompagnés, effectivement, mais pas au prix de menaces de sanctions financières. Donc, là-dessus, je vais passer la parole à mes autres collègues pour continuer.

Mme Laflamme (Véronique) : Merci, Yann. Bonjour, tout le monde. Donc, je suis Véronique Laflamme, je suis une des co-porte-parole, aujourd'hui, de la Coalition Objectif Dignité et je suis porte-parole du FRAPRU, le Front d'action populaire en réaménagement urbain. Yann l'a dit, le problème aujourd'hui, c'est la question des sanctions financières et c'est la question qui a été ignorée totalement par M. Blais dans son point de presse. M. Blais nous a appris aujourd'hui que le projet de règlement s'en venait, qu'il était presque terminé. Et ce que M. Blais a également dit, c'est que s'il y avait des modifications à lui faire, on les fera, je le cite. Eh bien, ce qu'on lui demande à M. Blais, c'est de retirer, comme mon collègue Yann l'a dit, les sanctions financières. Ce n'est pas compliqué, on lui demande de les retirer au projet de règlement. C'est une modification bien claire qu'il pourrait faire dès maintenant.

Je vais vous parler, moi, des conséquences des coupes à l'aide sociale. On a vu tout récemment dans les médias que le ministre Blais avait sous-estimé les conséquences et surtout le nombre de personnes qui seraient touchées par les coupes à l'aide sociale qui ont été effectuées en 2015. Et aujourd'hui on pense que le ministre continue également à sous-estimer les conséquences d'Objectif emploi.

628 $ par mois, actuellement, c'est 100 % des besoins de base, avec ça, qui ne sont pas couverts, ce n'est pas compliqué. Le logement... À Québec, on est une des régions où le loyer médian est le plus élevé partout au Québec, mais le loyer médian, pour l'ensemble de la province, pour une personne seule, c'est 578 $. Faites le calcul, 50 $ par mois qu'il reste pour vivre. Et là, ça, c'est si vous êtes chanceux, chanceuse, que vous trouvez un loyer à 578 $. On le sait, actuellement, les trois et demie qui sont en location, quand vous vous promenez, c'est plus 800 $, là. Alors, les personnes à l'aide sociale, pour vivre, il ne leur reste rien, ce n'est pas compliqué. Elles doivent se priver, elles doivent aller dans les comptoirs alimentaires, elles doivent se rendre malades. Et Adel va en parler tout à l'heure, des conséquences sur la santé. Le ministre a balayé, tout à l'heure, de la main les impacts sur la santé en réduisant ça à des personnes qui pourraient avoir des épisodes pratiquement psychotiques, là. Ce n'est pas de ça dont on parle quand on parle de conséquences sur la santé de coupes à l'aide sociale.

Donc, 224 $, ce n'est pas une pénalité qui est minime. On parle d'une pénalité qui représente le tiers d'un revenu qui ne couvre déjà pas la moitié de ce qu'on devrait avoir, là. C'est gros, 224 $, pour une personne à l'aide sociale. Arrêtons de balayer du revers de la main les conséquences d'une telle coupe. C'est ce qu'on dénonce aujourd'hui. C'est ce qu'on demande au ministre de revoir de toute urgence.

Enfin, je terminerais en disant que le Québec s'est engagé à respecter le droit à un revenu suffisant en ratifiant le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et il s'est engagé à respecter les droits à la hauteur des mesures disponibles. On a un budget qui nous a été déposé en mars dernier, qui est un budget, incluant les versements au Fonds des générations, qui avait les surplus parmi les plus élevés de l'histoire du Québec, et il n'y a absolument rien pour lutter contre la pauvreté. C'est inadmissible. Et on interpelle ce gouvernement-là, M. Blais et l'ensemble de son gouvernement pour qu'ils agissent sans tarder pour lutter réellement contre la pauvreté et respecter les droits, dont celui à un revenu suffisant. On ne peut pas accepter plus longtemps un chèque d'aide sociale à 628 $ avec les conséquences qu'on connaît sur la santé, notamment, mais également sur bien d'autres éléments, dont le développement des enfants, dont on parle très peu, mais c'est une autre conséquence très grave de laisser des gens vivre, là, survivre avec un revenu aussi bas.

Donc, on interpelle M. Blais aujourd'hui, on interpelle ce gouvernement-là pour qu'il rehausse les prestations de base à l'aide sociale afin de couvrir 100 % des revenus de base. Et je vais laisser mon collègue Adel nous parler des conséquences sur la santé de telles coupes à l'aide sociale.

M. Arezki (Adel) : Merci. Alors, bonjour, je m'appelle Adel Arezki et je suis présentement étudiant à l'Université McGill en médecine. Alors, je suis ici aujourd'hui pour représenter plus de 582 signataires d'une lettre adressée au ministre Blais pour exprimer les inquiétudes du monde médical et du monde de la santé vis-à-vis la dernière réforme sur l'aide sociale, la loi n° 70.

Travaillant dans le domaine de la santé, nous sommes d'accord avec l'idée d'aider les personnes les plus démunies de la société à se trouver un emploi et à s'épanouir, mais par contre, en pratique, ce n'est pas aussi simple que le la loi n° 70 le laisse sous-entendre. Les mesures coercitives proposées par le ministre Blais mettent les prestataires d'aide sociale en position de précarité. En tant qu'intervenants de la santé, nous constatons les conséquences de la pauvreté, nous constatons les conséquences médicales et psychosociales de la pauvreté. Et cette loi, à notre avis, ne ferait que les aggraver.

Comment imaginer qu'une personne qui vient de se faire sortir de son appartement, qui n'a plus de numéro de téléphone, qui n'a pas d'Internet, qui n'a même pas une adresse fixe essaie de tout de suite se chercher un emploi? Alors, cela serait malheureusement un véritable recul pour le Québec. Alors, on peut facilement envisager l'augmentation de la détresse psychologique sur des personnes qui sont déjà éprouvées financièrement. Alors, il n'est pas difficile d'imaginer la hausse des coûts de santé que cela engendrera.

Et aussi nous sommes inquiets, car actuellement le projet de loi mentionne que les bénéficiaires seraient accompagnés tout au long de leur démarche d'obtention d'un emploi. Toutefois, en pratique, lorsqu'on réfère nos patients à des services sociaux et communautaires, ces services communautaires sont nettement insuffisants, ils sont sous pression et ils débordent. Alors, comment le gouvernement peut couper dans les services communautaires et sociaux d'un bord, et ensuite présenter le projet de loi Objectif emploi alors qu'il n'y a même pas assez d'intervenants pour pouvoir encadrer les prestataires?

Alors, compte tenu des restrictions budgétaires, il est clair pour nous qu'il manquera de professionnels pour mener à terme et à bien le programme Objectif emploi. Avant de s'attaquer à un tel projet, le gouvernement a le devoir de consolider le système de santé et de consolider les services communautaires et sociaux offerts à la population.

Aussi, vous connaissez tous les difficultés d'accès à un médecin dans les CSSS. Et maintenant imaginez l'augmentation des rendez-vous à teneur médico-administrative pour évaluer la faculté à travailler des personnes qui sont invalides. Il n'est pas difficile d'imaginer l'augmentation des délais d'attente que cela engendrera pour les Québécois qui ont des besoins cliniques réels.

Et enfin nous sommes inquiets que les critères d'ajustement et les exemptions ne sont pas encore énoncés, ne sont pas encore détaillés dans la loi n° 70. Ces critères étant de nature réglementaire pourraient faire l'objet de modifications plus tard par le gouvernement, et ce, sans nécessiter une consultation des organismes et des professionnels qui sont vraiment sur le terrain et qui connaissent la situation.

Alors, pour toutes ces raisons, nous demandons à nouveau au ministre Blais de reconsidérer la loi n° 70 en regard aux conséquences psychosociales et médicales qu'elle engendrera et entre autres en retirant les mesures coercitives. Alors, merci, et je vais laisser la députée...

Mme Massé : Oui, merci, Adel. Bien, écoutez, je pense que les gens vous l'ont dit, le ministre Blais est venu, en fait, dire rien, rien qu'on ne savait déjà, sinon que les règlements devraient... d'une loi qu'on ne veut pas, d'une loi où il y a plusieurs professionnels de l'éducation, de la santé, des groupes sur le terrain qui viennent nous dire que cette loi-là n'a pas de bon sens. Alors, ces règlements-là s'en viennent et ces règlements-là s'en viennent pour venir mettre des conséquences, mettre des sanctions pour les gens qui ne répondent pas aux objectifs, pour les premiers demandeurs qui ne répondent pas aux objectifs visés par ce programme-là.

J'entendais le ministre qui parlait beaucoup des jeunes, des jeunes, des jeunes. Je rappelle que les premiers demandeurs n'ont pas tous et toutes en bas de 25 ans, en bas de 30 ans. Ils sont souvent des nouveaux arrivants. Ils sont des gens qui ont perdu une job, qui ont eu accès au chômage, puis après ça il n'y a plus de chômage, et donc ils vont à l'aide sociale. Donc, ce n'est pas... Je veux bien qu'il y ait une partie de ces gens-là qui sont des jeunes, mais je voudrais défaire ce mythe que c'est exclusivement des jeunes.

Donc, c'est clair qu'à l'instar des gens qui sont ici aujourd'hui, nous aussi, à Québec solidaire, on demande... Parce qu'à l'étape des règlements, le ministre peut encore renoncer aux sanctions, hein, ça réside dans le règlement et il peut encore reculer sur cet élément-là, où là, écoutez, il y a une unanimité. Les gens disent... Il y a à peu près juste lui au Québec qui pense que la coercition va lui permettre d'atteindre ses objectifs, alors même que le gouvernement libéral ontarien a compris que ce n'est pas en tapant sur la tête du monde qu'on leur permet de vivre dans la dignité, mais plutôt en expérimentant, par exemple, la question du revenu minimum garanti, que le ministre avait l'air pas très heureux de voir, mais en tout cas, bref, et on se dit que la dignité, l'objectif dignité devrait être un objectif de tout gouvernement.

Je veux saluer, bien sûr, Harold, on est là ensemble. On le sait, Harold et moi, que, grâce à Françoise David, ma collègue, mon ex-collègue, et Dave Turcotte, qu'il y a eu une guerre de chaque instant pour essayer de faire comprendre au ministre que ça n'avait pas de bon sens. Même on a dû se retourner de dos pour voter, qui a permis d'ébranler un peu les murs du temple. Et je veux juste vous dire que, si c'était à refaire, je le ferais encore, malgré la réprimande. Pourquoi? Bien, à chaque fois qu'il est question des personnes à l'aide sociale, c'est comme si, là, c'était légitime de, par exemple, couper de moitié.

Je veux juste terminer en vous disant qu'au nom de Québec solidaire je m'engage, si toutefois on prend le pouvoir en 2018, à retirer immédiatement les sanctions pour les premiers demandeurs à l'aide sociale. Harold.

M. LeBel : Merci, Manon. C'est un beau clin d'oeil, Manon, effectivement, à Françoise puis à Dave, qui ont travaillé beaucoup sur le projet de loi. J'ai pu travailler aussi, en terminant, vers la fin, associé avec Dave, effectivement. Pendant tout le travail qu'on a fait en commission, on s'est toujours, ensemble, prononcé contre les sanctions. Et je vous le dis aussi, puis je vais utiliser ta même formule, un gouvernement du Parti québécois abolirait ce genre de sanctions immédiatement.

Je le dis parce que le ministre — puis ça m'a toujours fait frissonner à chaque fois qu'il en parlait — il joue beaucoup sur les préjugés. Quand il nous ramène des pourcentages de gens qui ne se présentent pas, tu sais, qui ne viennent pas, qui arrivent à l'aide sociale mais qui ne se présentent pas aux bureaux des CLE, puis là il nous amène des pourcentages, c'est quoi qu'il y a en arrière de ça? Il veut dire que les gens ne veulent pas s'aider. C'est le message qu'il essaie de passer. C'est le gros préjugé. C'est un ballon de plage qu'il essaie de nous passer.

Quand il dit que le ministère, dans sa loi, il ne peut pas rencontrer les personnes, il ne peut pas rencontrer les primodemandeurs, c'est faux. Il peut les rencontrer. S'il ne les rencontre pas, c'est parce qu'il est mal organisé. Qu'il s'ouvre un peu, qu'il trouve des nouvelles méthodes pour accueillir les primodemandeurs. Il faut bien qu'ils passent, à un moment donné, au CLE, ces gens-là. C'est faux de dire qu'il ne peut pas les rencontrer.

Mais tout ça, qu'est-ce qu'il y a en arrière de ça? Le préjugé que les gens ne veulent pas s'aider puis que, s'il n'y avait pas du bon gouvernement bien fin qui va les sortir de la pauvreté puis qui va les aider, ils ne seraient pas capables de s'en sortir. Voyons donc! Il y a plein de groupes communautaires qui interviennent pour aider les gens à se sortir de la pauvreté. Qu'il arrête de couper les groupes communautaires puis qu'il travaille avec ce monde-là. Il me semble que ça pourrait aider.

Puis en plus, là, moi, je... C'est le ministre, je n'en reviens pas, Sam Hamad, au début, qui avait développé le projet de loi n° 70 — puis j'étais, à ce moment-là, critique sur la pauvreté — Sam avait dit que c'était pour sauver 50 millions dans le système. Le nouveau ministre arrive, lui, il dit que ce n'est plus ça, son objectif. Je me demande c'est quoi, l'objectif fondamental de ce projet de loi si ce n'est pas encore l'objectif de Sam Hamad du début, de couper, d'aller chercher 50 millions dans le système.

Puis c'est un ministre qui est absent. Moi, je n'en reviens pas. Tantôt, il vient ici pourquoi? Pour dire qu'il n'est pas prêt? Il vient encore dire que c'est... Et ça fait longtemps qu'on travaille sur ce projet de loi là, là. Là, il vient nous dire que les règlements, là, où il pourrait nous donner des nouvelles sur les sanctions, il pourrait les retirer, ces règlements. Il n'est pas prêt, ça va être à l'automne. Ça fait des mois, puis il chialait après nous autres qu'on posait trop de questions, qu'on lui faisait perdre du temps en commission parlementaire, mais qu'est-ce qu'il faisait pendant ce temps-là? Tu sais, ça n'a pas de sens qu'il ne soit pas prêt. Il n'est pas prêt pour le plan de lutte. Le plan de lutte est reporté. C'est le ministre du report, c'est le ministre qui reporte toujours en avant, puis on ne voit jamais de résultat.

Puis je veux juste vous souligner qu'au dernier budget il n'était pas prêt non plus parce que, le dernier budget, le ministre des Finances, là, il n'a rien donné à ce ministre-là. Pas une cent pour le SACAIS, le financement des groupes de défense de droits des personnes assistées sociales entre autres, pas une cent. Dans le fond, on pourrait dire : Il veut tellement passer sa loi puis il veut tellement que le monde ne chiale pas qu'il ne financera pas les groupes qui chialent, tu sais. Puis il l'a déjà dit, il dit : Ces groupes-là, ça sert surtout à monter à la tête des gens, à mettre de l'huile sur le feu. Ça fait qu'il ne mettra pas une cent là pour être sûr que ça passe.

Bref, c'est le ministre qui n'est pas prêt. Il est venu juste nous dire qu'il n'était pas encore prêt, qu'il reporte tout à l'automne. Pourtant, pour d'autres domaines, pour Bombardier, pour les médecins, il était prêt. Mais pour ça, on va attendre encore. Les plus pauvres de la société devront attendre de voir ce que ce gouvernement-là va faire. Mais je trouve ça bien dommage.

Puis je suis très heureux d'être ici avec ces groupes-là, avec des groupes qui défendent des droits. À Rimouski, j'en ai plein, de groupes comme ça, puis je travaille avec eux autres le plus souvent possible. À un moment donné, ces groupes-là, il faut qu'ils prennent la parole puis il faut qu'on soit capables de pousser avec eux autres, cette parole-là. Il faut que les gens comprennent, il faut qu'on sorte des préjugés.

Le Modérateur : On va prendre les questions, s'il y en a qui en ont.

Mme Porter (Isabelle) : Avez-vous été étonnés par les propos du ministre concernant les organismes d'employabilité qui, apparemment, manquent de demandeurs?

M. Tremblay (Yann) : Bien, ça, c'est vraiment n'importe quoi. Je vous proposerais même d'interviewer ces organismes-là parce que, nous, ce n'est pas ça qu'on entend de leur part. En fait, là, c'est qu'ils sont complètement débordés puis... Ce que j'ai entendu comme rumeur, comme quoi le propos de l'entente, c'est plutôt qu'ils vont être obligés de privilégier les premiers demandeurs, mais ça veut dire qu'ils ne pourront pas... ils vont avoir de la difficulté à rejoindre l'ensemble des personnes, tu sais.

Ça fait que, dans leur mission, les organismes ont beaucoup revendiqué de pouvoir donner de l'aide à beaucoup de personnes, mais les ministres les contraignent à réduire les personnes auprès de qui ils peuvent intervenir, et ça, ils sont absolument contre cette chose-là. Ça fait que je vous invite vraiment à les questionner parce que, nous, sur le terrain, ce n'est pas ça qu'on entend, c'est qu'ils sont débordés, c'est qu'ils trouvent l'accompagnement difficile. Et l'accompagnement va être encore plus difficile si les personnes ne sont pas volontaires. Ça, c'est un accompagnement qui est difficile pour les organismes. Et donc ce n'est pas vrai que les organismes manquent de job, là. C'est vraiment méprisant de la part du ministre de dire ça, là.

M. Dion (Mathieu) : Par rapport aux pénalités financières, il a mentionné qu'il n'y avait pas d'obligation de résultat mais une obligation de démarches. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Tremblay (Yann) : Bien, une démarche, c'est un résultat, tu sais, c'est ce qui... La façon qu'il pense, c'est qu'il va y avoir un suivi, donc est-ce que tu t'es présenté à tel endroit, à tel endroit, à tel endroit à tel moment. Est-ce que tu as fait... On ne sait pas encore ça va être quoi, le contenu, hein, mais est-ce que tu as fait 10, 15... Ça, c'est des résultats. Je ne comprends pas pourquoi il dit qu'il n'y a pas de résultats à atteindre, il y a des résultats à atteindre et si ces résultats-là ne sont pas atteints, c'est là qu'il va proposer des pénalités aux gens, tu sais.

Mme Porter (Isabelle) : Si je comprends bien, dans le fond, l'information que vous avez... Ça fait que ce que vous attendez de voir dans le règlement, c'est ce genre de nuance là, à savoir quelles sont les conditions précises en vertu desquelles une sanction serait imposée. Parce que, tout à l'heure, le ministre nous a dit : Bien, j'ai tout dit sur ce qu'il allait y avoir dans le règlement. Qu'est-ce qu'il n'a pas dit? Qu'est-ce qui reste à clarifier, selon vous?

M. Tremblay (Yann) : Bien, il reste tout à clarifier, en fait. Oui, il a dit ses intentions, il nous a exposé des beaux tableaux, ça, on a vu ça. Mais qu'est-ce qui va être effectivement mis dans le projet de règlement? Ça va être quoi, les obligations des personnes? Ça être quoi, les sanctions prévues? Ça va être quoi... attends, j'ai...

Mme Laflamme (Véronique) : Bien, les démarches.

M. Tremblay-Marcotte (Yann) : ...oui, les démarches qui vont être obligatoires, les organismes qui vont être accrédités pour que ce soit une démarche qui soit acceptable? Il y a vraiment un ensemble de mesures qui doivent être précisées. La seule affaire qui est sûre actuellement, c'est qu'il veut pénaliser le monde, les obliger et retenir le chèque si les gens ne se présentent pas à leur rendez-vous. Là, retenir un chèque du seul revenu disponible, c'est complètement dramatique, là, on s'entend.

M. Lecavalier (Charles) : Mme Massé, qu'est-ce qu'il y a de nouveau pour faire cette sortie-là aujourd'hui? Parce qu'on a l'impression qu'il y avait une espèce de trêve depuis l'adoption du projet de loi. Puis là, c'est quoi, on reprend... vous reprenez le combat, finalement, contre...

Mme Massé : Bien, ces règlements-là... Tant et aussi longtemps que les règlements ne sont pas déposés, on peut encore influencer, comme parlementaires. Harold l'a dit, on s'est retrouvés, dans les derniers, mois à attendre beaucoup. La lutte à la pauvreté, c'est une lutte de chaque instant. On était extrêmement indignés de voir, dans le budget, qu'il n'y avait rien au niveau de l'aide sociale, qu'il n'y avait rien au niveau, en fait, de la lutte à la pauvreté. On nous promet un plan de lutte cet automne dans lequel, à part le mot «revenu minimum garanti», dont le ministre vient de vous dire : Oui, puis on est en train de voir comment, dans le fond, tous les transferts vont se retrouver là-dedans... Holà! On commence à avoir peur.

Alors donc, la semaine dernière était la semaine nationale de la dignité des personnes assistées sociales — c'était la semaine dernière, c'est ça, mercredi dernier — et je pense que, dans cette foulée-là, il y a eu un rassemblement, il y a eu des jeunes personnes de la santé qui sont sorties, et je pense que, là, on est rendus au bout. Et à preuve qu'on est rendus à un bon bout de faire cette pression-là, c'est que le ministre s'est senti l'obligation de venir dire qu'il n'y avait rien qui avait avancé encore. Alors donc, nous, on dit : Bien, avancez, mais retirez la sanction, ça presse.

M. LeBel : Puis la nouvelle aujourd'hui, ce que j'ai vu un peu de nouveau tantôt, là, ce qui me fait un peu frissonner, c'est quand il dit que ses règlements vont être à l'automne. Moi, ça me dit que le plan de lutte, ça va être basé sur la même philosophie que le projet de loi n° 70. Et, si c'est ça, ça ne marchera pas; si c'est ça, ça ne passera pas, les groupes vont se lever partout. Si ce plan de lutte est fait sur les mêmes préjugés que le projet de loi n° 70, je vous le dis, ça ne passe pas.

Mme Lévesque (Catherine) : Quelles sont les prochaines étapes? Bon, il y a eu des lettres ouvertes, on essaie de conscientiser le public. Mais quelles sont les prochaines étapes? Est-ce que c'est des manifestations? Qu'est-ce qu'il va falloir faire?

Mme Laflamme (Véronique) : Bien, en fait, Mme Massé vient de dire : Aujourd'hui, c'est un peu, tu sais, un point culminant qui fait suite à ces différentes interventions. Bien, en fait, aujourd'hui, on interpelle le ministre pour lui dire : Écoutez, vous n'avez pas encore fini votre projet de règlement, là, retirez les sanctions. Quand il y a eu une manifestation, quand il y a eu des lettres ouvertes, quand il y a eu non seulement des professionnels de la santé, là — plus que quelques centaines, là, ce n'est quand même pas rien — et quand il y a eu également des universitaires qui sont sortis publiquement pour dénoncer ce projet de loi là, en plus des différentes organisations de la société civile, là — qui ne sont pas seulement les groupes de lutte à la pauvreté, là, on parle des grandes centrales syndicales, on parle de regroupements de divers milieux en santé mentale, en lutte à la pauvreté, les organismes, les groupes de femmes, etc., qui sont sortis pour dénoncer ce projet de loi là — bien, ce qui reste à faire, c'est de taper sur le clou. C'est ce qu'on est venus faire aujourd'hui. Parce qu'une manifestation de personnes assistées sociales, c'est difficile à tenir. Yann en a parlé tout à l'heure, les gens qui sont victimes de préjugés tout au long de l'année, et pour ne pas dire à chaque jour, bien, de se mobiliser pour leur dignité, c'est quelque chose. Donc là, nous, on prend la balle au bond aujourd'hui pour dire : On porte la voix de ces personnes-là qui se sont fait entendre de façon importante.

Et ça fait longtemps, au Québec, qu'on n'avait pas entendu autant de témoignages sur l'importance de l'aide sociale. Je vous rappellerais que, dans la semaine, dans les jours qui ont précédé, là, il y a eu des courriers d'opinion dans les médias régionaux, notamment, et dans les grands médias nationaux aussi — je pense au Devoir et à LaPresse encore la semaine dernière — de personnes qui ont parlé de l'importance pour elles d'avoir eu accès à cette aide-là de dernier recours et des conséquences qu'auraient eu sur elles Objectif emploi si ça avait été en oeuvre au moment où ces personnes-là avaient eu besoin de l'aide au dernier recours. Et ça, ce n'est pas rien. Et là on parle de personnes de différents milieux, notamment des femmes qui essayaient de retourner aux études, qui avaient des enfants à faire vivre, et toutes sortes d'autres personnes qui se sont fait entendre pour dire : Écoutez, ça n'aurait pas été praticable pour moi pour telle et telle raison.

Et ce qu'on dit aujourd'hui, c'est que l'aide au dernier recours, ce n'est pas pour rien que ça s'appelle l'aide au dernier recours. Il y a toutes sortes de raisons qui font en sorte que des personnes se rendent là. Et, quand elles y arrivent, la solution, ce n'est pas de leur taper encore plus sur la tête, c'est de les aider à s'en sortir. Et, pour ça, ce n'est pas par des sanctions financières qu'on va y arriver, qui relèvent pratiquement du harcèlement, c'est en les aidant, parfait, mais en laissant faire les sanctions financières, et mieux encore, en augmentant ces prestations-là, qui sont insuffisantes, qui font en sorte que les personnes ne peuvent même pas se chercher d'emploi. Comment voulez-vous, avec un revenu aussi bas que celui-là qui vous permet à peine de payer votre logement, pouvoir vous déplacer si vous êtes dans une région, de vous déplacer pour aller rencontrer des employeurs, de vous acheter des vêtements qui ont de l'allure pour rencontrer des employeurs?

Donc, ce qu'on dit, c'est qu'il faut lutter contre la pauvreté, le faire beaucoup mieux. Et, si on veut aider les personnes à trouver de l'emploi, il faudrait d'ailleurs s'assurer que l'emploi permette de sortir de la pauvreté — ça, c'est un autre débat sur lequel il faudrait revenir — mais il faudrait arrêter les mesures coercitives.

Mme Lévesque (Catherine) : Concrètement, je voulais savoir : Comment est-ce qu'on peut vivre avec 400 $ par mois? C'est quoi, le pire scénario?

Mme Laflamme (Véronique) : Bien, écoutez, ce qu'on entend, là... Bien, moi, je peux vous parler de... je pense que Yann pourra compléter, mais 400 $ par mois, là, nous, quand on entend des gens qui ont de la misère à arriver, c'est de la colocation forcée. Mais là, colocation forcée, tu vas avoir une coupe, donc tu vis dans une chambre, dans un logement insalubre, les personnes qui se ramassent à la rue. Écoutez, c'est ça, notre crainte, c'est que de plus en plus de personnes se ramassent à la rue. Et, là encore, la lutte à l'itinérance, on a plusieurs voix qui se sont élevées récemment pour s'inquiéter de l'inaction gouvernementale en matière de lutte à l'itinérance, du fait que la Politique nationale de lutte à l'itinérance qui a été adoptée, les bottines ne suivent pas les babines, finalement. Mais c'est ça qui attend les gens, là. On en voit des femmes, là, de moins de 65 ans qui ont une insuffisance de revenus puis se retrouvent en situation d'errance. Des témoignages comme ça, on en entend tous les jours. Mais c'est ça, ultimement, qui attend... pas tout le monde, mais une partie de ces personnes-là, malheureusement.

M. Tremblay-Marcotte (Yann) : Puis, je veux juste rajouter... je pense que c'est vraiment une belle explication, Véronique, c'est juste... Tu te retrouves avec 400 $ par mois. Après ça, tu viens de tomber... un pas de recul pour, après ça, être en bonne posture pour te trouver un emploi. Le temps que tu vas vivre avec 400 $ par mois, c'est du temps que tu vas handicaper ta santé, que tu vas te retrouver dans une situation encore plus précaire mentalement et physiquement, et après ça c'est encore plus difficile de te retrouver un emploi. Donc, ça va vraiment... l'intention du gouvernement ne fonctionnera pas. S'il souhaite amener les gens vers l'emploi, ça va les précariser encore plus, on parle de la rue. Évidemment, tu ne peux pas payer un logement 400 $ par mois, te loger. Les organismes communautaires vont être encore plus sollicités pour répondre à différents besoins de santé. C'est impossible, impossible.

M. LeBel : Moi, je veux juste témoigner... Dans nos bureaux de comté, là, juste récemment, là... Quand tu vis, tu n'as pas d'argent, qu'est-ce que tu fais? Tu coupes — il peut être là pour en témoigner — dans la santé, tu coupes dans... Moi, j'ai plusieurs cas, là, actuellement, puis c'est surtout les femmes qui vivent la pauvreté plus, problèmes de dentition. Tu sais, ils ont 60 ans, tu sais, ils repoussent le dentiste. Ils repoussent le dentiste, ils n'ont pas les moyens. À un moment donné, ils se ramassent, là, avec des gros problèmes, puis là nous autres, au bureau de comté, il faut travailler... on essaie de trouver des solutions, mais il n'y a rien. On appelle à la RAMQ, ils disent : On a plein de problèmes de même. Il n'y a pas rien, on ne peut pas aller nulle part. On en vit, ça, plein de ça. Et c'est ça. La pauvreté, là, des fois tu caches ça, tu caches ça, tu caches ça, mais ça s'accumule, ça s'accumule. Tu fais des choix, puis à un moment donné c'est ta santé qui est en danger.

Une voix : Je veux juste mentionne qu'il y a trois témoignages qui sont dans le petit paquet de feuilles que je vous ai remis au début.

Mme Laflamme (Véronique) : Donc, si on veut économiser 50 millions, ce n'est pas... c'est une économie de bouts de chandelles parce que ça nous coûte beaucoup plus cher, en bout de ligne, comme société. Merci.

Mme Lévesque (Catherine) : On a entendu Pascal Bérubé, on a entendu Jean-François Lisée sur la convergence...

Mme Massé : Bien, si vous voulez, on ne prendra pas ce genre de question là quand on a des invités où on parle d'aide sociale. Ça arrive tellement peu souvent, qu'on va aller au fond de celle-là. Puis je pense que j'ai tout dit ce matin, vous m'avez eue en long et en large. C'est les membres qui vont décider en fin de semaine.

M. Lévesque (Christian) : Vous ne voyez pas un flip-flop entre ce que M. Bérubé et M. Lisée disent?

Mme Massé : Je ne commenterai pas ça. Je n'aime pas ça quand ils se mêlent de mes affaires.

(Fin à 14 heures)

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