(Huit heures une minute)
Le Modérateur
: Bonjour,
messieurs dames. Alors, si vous êtes prêt, M. Lisée va débuter sa
déclaration.
M. Lisée
: Aujourd'hui,
il y a une annonce qui va être faite sur le financement fédéral du Réseau
électrique métropolitain. Il n'y a rien qui nous ferait plus plaisir que d'être
enthousiastes face à un investissement de 6 milliards de dollars dans le
transport en commun au Québec et à Montréal. Rien ne nous ferait plus plaisir.
Cependant, aujourd'hui, les deux premiers
ministres vont confirmer qu'un investissement public considérable va être fait
sans aucune obligation de contenu québécois, sans aucune obligation de contenu
québécois. Lorsque j'étais ministre du Commerce extérieur, on négociait
l'accord avec l'Europe, et nous, du Parti québécois, avons insisté pour que,
dans l'accord, il y ait une disposition qui permette 25 % de contenu
québécois ou canadien dans exactement cela, c'est-à-dire des projets de
construction, de transport en commun, d'assemblage, d'autobus, de rails. Nous
avons fait introduire dans l'accord Canada-Europe une disposition nous
permettant de réclamer 25 %. Et puis on a été modestes parce qu'aux
États-Unis c'est 60 %. Et on a réclamé également que l'assemblage du
matériel roulant se fasse sur notre territoire. Et là on se rend compte que le
gouvernement Couillard et le Gouvernement Trudeau n'utilisent pas cette
disposition qui est non seulement légale, mais prévue à un accord
international.
Lorsque le projet de loi créant la filiale
de la Caisse de dépôt a été discuté, Nicolas Marceau et Alain Therrien n'ont
pas arrêté de demander au ministre Leitão d'introduire une disposition de
contenu québécois. Il a refusé. Les collègues de la CAQ qui étaient présents
ont été complètement muets, complètement muets.
Moi, depuis janvier, je fais le tour des
chambres de commerce et je suis allé à la Chambre de commerce de Montréal,
devant des représentants de la caisse, et j'ai dit : Comment se fait-il
que vous ne réclamez pas de votre propre initiative un contenu québécois? J'ai
eu une rencontre avec Michael Sabia en présence de Nicolas Marceau et j'ai
demandé à M. Sabia : Pourquoi ne demandez-vous pas un contenu
québécois? Parce qu'il n'y a pas de volonté politique. Il n'y a aucun signal du
gouvernement Couillard et, d'après ce qu'on voit, aucun signal du gouvernement
Trudeau de protéger nos propres emplois. Et récemment des Chinois ont obtenu un
contrat de transport en commun pour la région métropolitaine.
Alors, ce n'est pas de la politique
économique nationaliste, ce n'est pas de la politique économique qui met le
Québec d'abord. Ce n'est pas de la politique économique qui est au diapason de
ce que font les autres. C'est comme si on était les plus idiots de la classe. Les
Américains le font, les Européens le font, les Chinois le font, mais, nous, il
ne faudrait pas le faire. C'est ce que je ne comprends pas dans le refus du
gouvernement Couillard de défendre les emplois québécois.
Le Modérateur
: Merci,
M. Lisée. On va aller au micro de gauche, M. Boivin, Cogeco.
M. Boivin (Mathieu) : Si
c'est possible de le faire et qu'on ne le fait pas, est-ce que c'est du
sabotage?
M. Lisée
: C'est
une idéologie qui met... C'est mal comprendre l'ouverture des marchés. Les
nations qui performent bien à l'international performent bien localement puis
prennent des mesures pour protéger leur industrie. Il faut faire les deux, hein?
Dans l'internationalisme, il y a le mot «nationalisme». Alors, on fait du nationalisme économique et on se projette à
l'étranger. Clairement, M. Couillard ne comprend pas ça, ne comprend pas
qu'on peut faire les deux. Barack Obama était ici il y a quelques jours. Barack
Obama lui-même a introduit le Buy American Act. Il l'a fait lui-même, et c'est
un grand internationaliste. Alors, je pense que c'est simplement un genre de
pauvreté intellectuelle.
M. Boivin (Mathieu) :
Pauvreté intellectuelle de la part de M. Couillard lui-même ou de son
parti en général?
M. Lisée
: De son
idéologie.
Le Modérateur
: Merci.
M. Laforest, micro de droite.
M. Laforest (Alain) :
C'est un mauvais projet?
M. Lisée
: Je ne
dis pas que c'est un mauvais projet, je dis qu'on aimerait que ce soit un
meilleur projet, on aimerait que, pour 6 milliards de dollars, on ait plus
de garanties de : ...Couillard lui-même ou de son parti en
général?
M. Lisée
: De son
idéologie.
Le Modérateur
: Merci.
M. Laforest, micro de droite.
M. Laforest (Alain) :
C'est un mauvais projet.
M. Lisée
: Je ne
dis pas que c'est un mauvais projet. Je dis qu'on aimerait que ce soit un
meilleur projet. On aimerait que, pour 6 milliards de dollars, on ait plus
de garanties de >retombées locales. On aimerait que, pour 6 milliards
de dollars, il y ait davantage d'automobilistes qui laissent leur automobile
pour prendre les transports en commun. On aimerait que, pour 6 milliards
de dollars, il y ait plus de réduction de gaz à effet de serre.
M. Laforest (Alain) : On
revient avec le pont d'or ce matin. Vous en pensez quoi?
M. Lisée
: Bien,
je pense que ça fait des années qu'on aimerait avoir des réponses à ces
questions. Et les questions que pose l'UPAC, ce sont des questions que des
journalistes ont posées et qui sont toujours sans réponses. Alors, j'ai hâte
d'avoir des réponses.
Le Modérateur
: Merci.
M. Lavallée.
M. Lavallée (Hugo) :
Bonjour, M. Lisée. On a entendu des représentants de votre parti critiquer
le REM depuis son annonce. Il y a des élections l'année prochaine, comme vous
le savez. Le projet n'aura pas été achevé d'ici là. Si vous prenez le pouvoir,
vous allez faire quoi avec ce REM? Allez-vous tout balancer? Conserver? Dire
que c'est la faute du gouvernement précédent?
M. Lisée
: Bien,
on veut bien indiquer que, nous, investir dans le transport en commun dans la
région de Montréal, c'est une bonne idée. Le projet, il est là. Il va être
construit. Lorsqu'on prendra le pouvoir, le 1er octobre 2018, il va être
très avancé. Alors, il n'est pas question de revenir en arrière. Si on peut
l'améliorer au moment où on sera là, on le fera.
Mais tout ce qu'on fait depuis le début du
débat, c'est essayer de l'améliorer, essayer de comprendre le montage financier.
Et d'ailleurs, aujourd'hui, il y a une incertitude. Est-ce que la contribution
fédérale sera un prêt ou un investissement? On le saura tout à l'heure. Ça
change beaucoup de choses. On a appris, hier en commission parlementaire, à
force de poser des questions, qu'il y aura des redevances de 600 millions
sur 50 ans pour les nouvelles constructions dans un rayon d'un kilomètre autour
du REM. Ça, on ne savait pas ça jusqu'à hier et on ne sait pas encore combien
de plus paieront les villes de banlieue et Montréal pour leur contribution au
REM. On ne le sait pas encore. Donc, on n'arrête pas d'essayer de faire notre
travail de juste savoir et d'améliorer.
M. Lavallée (Hugo) :
Même question concernant l'accord de libre-échange Canada-Europe. Vous avez été
aussi critique. On a vu le vote hier. Vous allez faire quoi de cet accord-là si
vous prenez le pouvoir?
M. Lisée
: Bien,
écoutez, nous, ce qu'on a toujours voulu, c'est garder un rapport de force du
Québec envers Ottawa, et on l'avait. On a des textes écrits d'Ottawa disant qu'ils
allaient préciser la compensation agricole avant la ratification par
l'Assemblée nationale, mais, à partir du moment où M. Couillard a dit à
son arrivée qu'il signerait de toute façon, bien, on a perdu des centaines de
millions de dollars. Le refus de M. Couillard d'utiliser le rapport de
force avec l'appui de la CAQ, d'ailleurs, qui ne voulait pas utiliser le
rapport de force, la CAQ a dit : Nous, on signe de toute façon, a privé
les agriculteurs du Québec de centaines de millions de dollars de compensation.
Et, de la même façon, on avait réussi à faire en sorte, avec les autres
provinces, que le gouvernement fédéral s'engage à compenser les provinces pour
les frais supplémentaires de 250 millions par année dans le médicament
parce que l'accord prévoit de prolonger la protection des brevets. Et là
c'était être de bons négociateurs que de dire : On va attendre votre offre
avant de signer.
Alors, M. Couillard, avec l'appui de
M. Legault, a démontré qu'il était très mauvais pour négocier Bombardier,
très mauvais pour négocier la Banque de l'infrastructure, très mauvais pour
négocier les transferts en santé, ils viennent de démontrer qu'ils sont très
mauvais pour négocier l'accord dans l'aspect Ottawa-Québec. Alors, qu'est-ce
qu'on fera? Bien, écoutez, on va récolter les dégâts de M. Couillard avec
l'appui de M. Legault du fait que Québec n'a pas pu utiliser son rapport
de force.
Le Modérateur
: Merci.
Mme Plante, micro de droite.
Mme Plante (Caroline) :
Bon matin, M. Lisée. Changement de sujet complètement. Est-ce que
l'article 1 du projet de loi n° 144 sur l'éducation, donc assurant l'accès
à l'école aux enfants sans-papiers, devrait s'appliquer dès septembre?
M. Lisée
: Nous,
on dit depuis très longtemps qu'il faut faire en sorte immédiatement de
permettre aux enfants sans-papiers d'avoir de l'éducation. Et le retard qu'a
pris le gouvernement Couillard à introduire une législation ne devrait pas
pénaliser ces enfants qui ont besoin d'éducation.
Mme Plante (Caroline) :
Donc, qu'entendez-vous faire?
M. Lisée
: Bien,
on entend continuer à dire au gouvernement de donner les dérogations
nécessaires aux commissions scolaires et les budgets qui vont avec pour leur
dire : Inscrivez-les dès septembre. Il n'est pas indispensable d'avoir une
loi. De la volonté politique, de la volonté réglementaire, de la volonté
budgétaire pourraient suffire, dans l'intervalle, à le faire. Puis ça aurait dû
être fait en septembre de l'an dernier puis en septembre de l'année précédente.
Le Modérateur
: Merci.
On va y aller avec Mme Lamontagne ensuite.
Mme Plante (Caroline) : Il
y a quelques jours encore... quelque chose de concret qui pourrait se faire
cette semaine, avant que les travaux se terminent à l'Assemblée nationale? Ça peut
passer par une motion?
M. Lisée
: Bien,
la volonté de l'Assemblée est claire. Je pense qu'on a déjà voté une motion
là-dessus. Tout ce qu'il manque, c'est la volonté gouvernementale. Comme l'aide
alimentaire, hein? Il y a 10 jours, il n'y avait aucune volonté, d'ailleurs ils
niaient le problème, et, à force de leur dire de le faire, ils ont reconnu qu'il
y avait un problème et ils l'ont réglé. C'est, entre autres, ce à quoi sert l'opposition.
Mais ils n'avaient pas besoin de loi pour le faire. Ils l'ont fait tout seuls. Ils
devraient faire la même chose pour les enfants sans-papiers.
Le Modérateur
: Merci.
Mme Lamontagne.
Mme Plante (Caroline) :
Vous allez mettre de la pression?
M. Lisée
: J'en
mets en ce moment grâce à vous, madame.
Le Modérateur
: Mme Lamontagne,
micro de gauche.
Mme Lamontagne (Kathryne) :
Sur le REM, juste une petite précision. Quelles sont vos cibles pour ce projet-là?
Quelle garantie vous voulez avoir? C'est 25 %, en fait?
M. Lisée
: Bien,
nous, on pense que, normalement, pour le transport, ça devrait être 60 %.
Ça devrait être 60 %. Les Américains font 60 %. Pourquoi est-ce que
le Québec ne fait pas 60 %?
Mme Lamontagne (Kathryne) :
Sur un autre sujet...
M. Lisée
: Et
d'ailleurs on trouve que la CAQ est très, très modeste en parlant de 25 %.
Ça dépend des secteurs. Dans le secteur du transport lourd, la norme, c'est
60 %. Dans d'autres secteurs, ça peut être 25 %, dans d'autres
secteurs, ça peut être : Sur un autre sujet...
M. Lisée
: Et
d'ailleurs on trouve que la CAQ est très, très modeste en parlant de 25 %,
ça dépend des secteurs. Dans le secteur du transport lourd, la norme, c'est
60 %. Dans d'autres secteurs, ça peut être 25 %. Dans d'autres
secteurs, ça peut être >30 %.
Mme Lamontagne (Kathryne) :
Pour le REM, 60 %?
M. Lisée
:
60 %, oui.
Mme Lamontagne (Kathryne) :
Sur un autre sujet. Un juge de la Cour du Québec qui fait des prêts privés,
est-ce que c'est digne de la magistrature?
M. Lisée
:
Écoutez, j'ai regardé ça ce matin. Je dois vous avouer que je ne suis pas assez
éclairé pour vous donner une opinion tranchée là-dessus.
Mme Lamontagne (Kathryne) :
Ah oui? Aucune opinion?
M. Lisée
: Pour
l'instant, pas suffisamment informé pour ça.
Mme Lamontagne (Kathryne) :
O.K. Donc, pas au courant du dossier.
M. Lisée
: Bien
j'ai vu, comme vous, ce qui était là. Alors, quels sont les précédents? Quelle
est la pratique? Que dit le Conseil de la magistrature, etc? Ce sont de bonnes
questions. Aujourd'hui, j'admets que je n'ai pas de bonne réponse.
Mme Lamontagne (Kathryne) :
On va vous la pardonner, celle-là. J'en ai une dernière pour la route.
M. Lisée
:
Allons-y.
Mme Lamontagne (Kathryne) :
Les dépenses de 2016 de Mme Jean qui disparaissent, est-ce qu'on n'a pas
un manque de transparence du côté de l'OIF?
M. Lisée
: Elles
disparaissent?
Mme Lamontagne (Kathryne) :
Enfin, on a eu les données pour 2014‑2015, et là, surprise, les dépenses de
voyage 2016 ne sont plus dans les dossiers.
M. Lisée
: C'est
louche.
Mme Lamontagne (Kathryne) :
Ce sera tout?
M. Lisée
: Ça sera
tout.
Le Modérateur
: Est-ce
que... En anglais? Maya Johnson? Oui. Allez-y.
Mme Johnson (Maya) : Bonjour.
Hello, Mr. Lisée. First of all, can you explain what your
concerns are about the electric train project and the lack of guaranties in
terms of Quebec production and products?
M. Lisée
:
Well, when I was Minister of Foreign Trade, we were in mission of negotiation
with Europe, and we insisted, and, thanks to what we did, we got at least a
requirement of 25 % of local content for this kind of projects. So we have
the ability to use this clause, and, in fact, the Americans ask for 60 %
of American content for public transportation.
And so, today, we're
going to have an announcement that says that Quebec tax payers will invest, in
one way or another, 6 billion dollars in this project, but there is zero requirements
for local content. There is zero requirements for having jobs created here for
the train itself. Of course, the cement, you know, will be here and the
construction will be here, but for the train, the electric train itself, it
could be all built outside of Quebec. And I think that's just nonsensical, you
know.
The reason why Bombardier
has a plant in Plattsburgh, it's because to have to sell subways to New York
City they need 60 % American content. So why are we the most stupid in the
class? And do we not look at our own interest when we can do it? And I've been
asking for that during the debate on the bill that created the Caisse ability
to do this. We asked for Quebec content. The CAQ didn't say anything at that
point. I met with Michael Sabia, I asked him, I went to the Montréal Chamber of
Commerce, I asked for that. This is an issue on which
the PQ is front and center. And today, there is still opportunity for Mr.
Trudeau, Mr. Couillard, Sabia to say: Well, we decided to be as mindful of our
own industry as the Americans are or others are, and so we are stepping up the
Canadian content or the Québec
content requirement. That's the last chance.
Mme Johnson
(Maya) : On another subject, Mme Charbonneau
will be unveiling the Government Action Plan to fight the mistreatment or the abuse of seniors. What
are you hoping to see in that action plan?
M. Lisée
: Well, what we have seen from the Liberals on all these issues in
the last three years is announcements, postponements and very little budget.
So, I'm looking for means. Is this going to be only just words or are there
going to be means?
Le Modérateur
: Merci. Mme Fletcher.
Mme Fletcher
(Raquel) : Good morning. Just another question
on the REM. Are you concerned that, without the guarantee that you are asking
for, without that guaranteed content, that there won't… are you concerned that
there won't be Québec firms
working on the train at all?
M. Lisée
: Well, there are going to be Québec firms because there are Québec firms in everyone of the coalitions that are biding on the project,
but nothing tells them to build in Québec. They can build in Plattsburgh, they can build in Ontario, they can
build in Europe. There is no constraint for building in Québec, and so creating jobs in Québec.
So, it may very well be
that, in the end, we're gonna have some Québec content, but we have no guarantees. And there is no reason why. The
Americans do it, the Europeans do it. Why are we so lackadaisical with our own
industry and our own jobs, not to make sure that we're gonna have a maximum
impact on our economy or our tax dollars?
Mme
Fletcher (Raquel) : Thank you.
M. Lisée
: Merci.
Le Modérateur
: Merci.
(Fin à 8 h 17)