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Point de presse de Mme Stéphanie Vallée, ministre de la Justice

Version finale

Le mardi 15 août 2017, 13 h 15

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Treize heures dix-sept minutes)

Mme Vallée : Bon, bien, rebonjour, et bonjour pour ceux et celles que je n'ai pas eu la chance de saluer tout à l'heure à l'entrée des travaux parlementaires. Donc, bon retour à l'Assemblée nationale.

Je voulais simplement prendre quelques minutes, là, avec vous pour pouvoir expliquer un petit peu le processus dans lequel on s'est lancés ce matin, c'est-à-dire le processus d'étude article par article du projet de loi n° 62. Comme vous avez pu le constater, j'ai d'emblée déposé une série d'amendements. J'ai déposé ces amendements-là en liasse, en toute transparence, pour permettre à nos travaux d'avancer rondement. Je pense que ce matin, ça a quand même bien commencé. C'est certain que, pour un projet de loi aussi important que le projet de loi n° 62, qui vient édicter des principes, des fondements de notre société, mais des principes qui ne sont pas édictés dans aucune loi... Donc, un petit rappel, évidemment, le projet de loi n° 62 vient établir la neutralité de l'État québécois, de ses institutions. Alors, on parle bien de neutralité, on ne fait pas référence à la laïcité. On a eu des échanges fort intéressants sur cette question-là.

Le projet de loi vient affirmer que la prestation des services de l'État, la réception des services de l'État se fasse à visage découvert. Et ça, il y a des raisons derrière tout ça dans une société libre et démocratique. L'objectif de ce principe-là, c'est d'assurer une saine communication entre les individus, entre ceux et celles qui doivent offrir la prestation de services et ceux qui la reçoivent, assurer évidemment l'identification des personnes, parce que lorsqu'on on est en droit de recevoir un service, il faut s'assurer que c'est bel et bien la personne qui est en droit de recevoir les services, mais aussi pour des enjeux de sécurité. Donc, alors, ces principes-là sont balisés, et il y a un consensus social autour de ces principes. Et le projet de loi vient aussi définir les règles générales qui vont servir de cadre d'analyse pour les demandes d'accommodement religieux, des règles qui sont inspirées et qui s'inspirent de la tendance jurisprudentielle, donc, qui ont été établies au fil des ans par nos tribunaux, mais qui ne se retrouvent pas au sein d'un texte. Et, si vous vous souvenez, lors des consultations, on nous a souvent dit qu'il manquait de références, de guides pour ceux et celles qui étaient responsables de ces demandes, de recevoir et de traiter les demandes d'accommodement religieux.

Donc, notre objectif, évidemment, c'est de permettre d'aller de l'avant avec ce projet de loi là. Ce sont des prémisses qui font consensus. Il n'y a pas d'enjeux, il n'y a pas de débat sur le fond de ces trois principes-là. Lorsqu'on échange, lorsqu'on discute, au-delà de l'utilisation des termes, au-delà de l'utilisation des mots, on s'entend. On s'entend sur la nécessité de déclarer à l'intérieur d'un texte, à l'intérieur d'une législation le principe de la séparation entre l'État et la religion. Tout le monde s'entend là-dessus, mais étrangement il n'y a pas un texte de loi au Québec qui le prévoit. On s'entend que la prestation de services doit se faire de façon tout à fait impartiale. Il ne doit pas y avoir de préjugés, de préjudices en raison de la croyance d'une personne ou de la non-croyance d'une personne, en raison de la manifestation de cette croyance-là, tout le monde s'entend là-dessus. On s'entend sur le principe des services à visage découvert et on s'entend sur le besoin d'encadrer les demandes d'accommodement religieux. Il y a eu, au fil des ans, bon nombre d'articles dans les médias. Ça a suscité énormément d'émotivité, ces questions-là, alors c'est important de bien encadrer.

Donc, on a présenté des amendements, entre autres l'assujettissement des municipalités. Fait cocasse ou fait particulier, ma collègue du Parti québécois a déposé un amendement presque identique à cet égard. Donc, je comprends que, là-dessus, il y a une unanimité, je pense, sur cette question-là.

On a également une collègue qui nous a présenté également un projet de préambule, parce qu'on ajoute un préambule au texte de loi. On a des discussions là-dessus en ce moment.

Alors, ce que je sens, c'est qu'il y a des points sur lesquels on s'entend. Maintenant, vous allez me dire : Bien oui, mais il y a des éléments sur lesquels vous ne vous entendez pas. C'est vrai. Et puis, nous, le travail, le projet de loi sur lequel on travaille aujourd'hui, ça correspond à nos engagements. Ça correspond à ce qu'on a édicté depuis un certain temps. Maintenant, si des formations politiques souhaitent aller plus loin, ça leur appartient, mais je pense que le Québec est mûr pour à tout le moins avoir un texte et une loi qui est conforme à ce sur quoi on est capables de s'entendre dans cette Assemblée.

Donc, évidemment, j'en appelle à la collaboration des collègues. J'ai appelé à la collaboration des collègues. À date, le ton est, je vous dirais, très positif. Parce qu'on a quand même trois heures de travaux parlementaires derrière nous. C'est certain qu'il y a des bonnes discussions, mais c'est normal d'avoir une discussion de base. Alors, on est là-dedans aujourd'hui. On est dans cette discussion de base qui va servir au reste de nos travaux, qui va servir aussi lorsqu'on va aborder certaines questions plus pointues. Donc, voilà.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Juste deux petites questions un peu techniques pour commencer, là, mais juste pour qu'on soit clairs. Dans l'article 1, vous avez ajouté le fait de recevoir les services à visage découvert. Ce n'est pas nouveau, c'était déjà là dans l'article 9. Est-ce que c'était juste par simple concordance avec...

Mme Vallée : Bien, en fait, on a retravaillé l'objet du projet de loi parce qu'on ne retrouvait pas cette référence-là à l'article 1 puis on a considéré que c'était quand même important de l'inclure dans l'article 1. Donc, dans la révision, là, lorsqu'on a analysé le projet, on a considéré qu'il ne fallait pas omettre cet aspect-là du projet de loi, donc c'est pour ça qu'on le retrouve. On a un objet qui est un peu plus concret qu'il ne l'était au départ.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Autre question du même type, là, si vous me permettez. Même chose dans l'article 9, on a enlevé l'accommodement pour des raisons de sécurité, puis tout ça. Est-ce qu'en fait on a juste voulu garder les accommodements dans l'article 10 seulement puis les enlever du 9 pour cette raison-là?

Mme Vallée : L'interprétation qui a été donnée par ceux et celles qui sont passés en commission parlementaire, l'interprétation qui a été donnée par certaines personnes qui n'étaient pas nécessairement celles qui étaient à l'origine de notre projet de loi nous ont amenés à porter des précisions au projet de loi, et c'est ça, les accommodements religieux sont vraiment traités à part. Et, pour ce qui est d'un principe, je pense qu'il est important que notre principe soit très clair. Il y a une raison pour laquelle les services sont offerts et donnés à visage découvert, et puis ce principe-là est clairement établi par l'article 9.

M. Laforest (Alain) : Vous lâchez du lest, Mme la ministre, là, vous lâchez du lest sur le 9, là, parce que, dans l'ancien projet de loi, il y avait l'obligation, là, il y avait des obligations que vous avez retirées. Donc, ça veut dire... C'était un des gros points d'achoppement des discussions, là.

Mme Vallée : Non, en fait, je ne comprends pas, il n'y a pas d'obligations qu'on retire. Les références, les motifs de sécurité, d'identification et de communication se retrouvent dans le projet de loi. Il n'y a pas de lest qui est lâché. Mais il ne faut pas non plus... Parce que rappelez-vous les discussions qu'on avait, à savoir : Ah! mais vous dites une chose et son contraire dans le même article. Ce n'était pas le cas, mais on a un principe de base plus clairement défini.

M. Chouinard (Tommy) : Mais ce sera toujours possible de soumettre une demande d'accommodement en vue d'obtenir un service à visage couvert, je vais le dire comme ça.

Mme Vallée : Il faut s'entendre, la demande d'accommodement, c'est une demande d'accommodement en vertu d'un des motifs prévus à l'article 10 de la charte. Ces demandes-là, quelqu'un... parce que la charte prévoit la possibilité d'accommodement, on ne peut pas empêcher quelqu'un de faire une demande. Maintenant, l'analyse et la réponse qui sera donnée, on verra parce que la réponse qui sera donnée devra considérer les principes du projet de loi, devra considérer aussi les impératifs de communication.

M. Chouinard (Tommy) : Il ne faut pas interpréter votre amendement comme étant le refus d'obtenir tout accommodement en termes de port...

Mme Vallée : Ce serait inconstitutionnel de le faire.

M. Chouinard (Tommy) : Ce serait inconstitutionnel. Vous assujettissez par ailleurs les sociétés de transport à votre projet de loi. Bon, les sociétés de transport donnent des services publics. Donc, dois-je comprendre qu'une personne qui prend l'autobus serait tenue d'avoir le visage découvert?

Mme Vallée : Tous ces cas d'espèce là... Moi, je ne suis pas ici aujourd'hui pour analyser chaque cas d'espèce, parce qu'on pourrait être ici jusqu'à 17 heures cet après-midi.

M. Chouinard (Tommy) : Mais c'est votre loi qui a des effets. Là, j'essaie de comprendre les effets.

Mme Vallée : Là, l'objectif est que les services soient reçus et donnés à visage découvert. Il y a des raisons pour ça, c'est les raisons, les impératifs du vivre-ensemble, qui sont la communication...

M. Chouinard (Tommy) : ...vous le savez, vous êtes avocate, là, bon. Selon ce que vous en comprenez, est-ce qu'une personne pourrait prendre l'autobus à visage couvert, là, en portant un signe religieux, disons, n'importe quel, là, qui...

Mme Vallée : Il faudrait... Chaque cas est un cas d'espèce puis chaque cas... Je ne veux pas commencer à analyser des cas individuels parce que ce que vous...

Des voix : ...

Mme Vallée : Non, mais...

M. Laforest (Alain) : Déjà, vous laissez entendre que votre loi va être testée devant les tribunaux.

Mme Lamontagne (Kathryne) : Exact, parce que qu'est-ce que ça va changer? En fait, quelqu'un qui veut passer son permis de conduire, quelqu'un qui veut prendre l'autobus, quelqu'un qui veut se présenter à l'hôpital à visage couvert, dans le fond, il va pouvoir le faire et sans problème.

M. Laforest (Alain) : Les bibliothèques?

Mme Vallée : Ça, c'est votre interprétation.

Mme Lamontagne (Kathryne) : Non, c'est ma question.

Mme Vallée : Le principe, c'est ça qui est important, puis d'où le principe bien établi dans l'article 9, c'est que, lorsqu'on veut recevoir un service, lorsqu'on offre un service, cette prestation de service là, elle est offerte à visage découvert, puis il y a des raisons pour ça, il y a des raisons, et ces raisons-là sont les motifs... puis ce n'est pas anodin. Je sais que je répète, mais la communication entre les individus... les motifs... dans certains cas, le visage couvert peut comporter des enjeux de sécurité pour la personne elle-même. Les enjeux d'identification, savoir que la personne qui reçoit le service est bel et bien la personne qui est en droit de le recevoir, commencer à entrer dans les cas d'espèce...

M. Laforest (Alain) : Mais ce n'est pas un cas d'espèce, là.

Mme Vallée : Non, non, non, mais...

Des voix : ...

La Modératrice : Un à la fois, s'il vous plaît!

M. Laforest (Alain) : La ville de Montréal s'occupe du métro, s'occupe des bibliothèques, s'occupe des terrains de tennis. Quelqu'un qui va arriver avec le visage couvert, selon la loi, va devoir recevoir des prestations à visage découvert, mais la prestation est donnée par la ville, le métro est opéré par la ville, le chauffeur du métro doit voir le visage, non?

Mme Vallée : À ce que je sache, les métros sont automatisés maintenant, mais, bon.

M. Laforest (Alain) : Le chauffeur d'autobus, le chauffeur d'autobus.

Mme Lamontagne (Kathryne) : Bien, parce que la question est simple, c'est : Ces gens-là, est-ce qu'ils vont pouvoir se présenter à visage couvert ou découvert? Puis s'ils veulent contester comme...

Mme Vallée : L'objectif, c'est d'offrir les services à visage découvert. Les demandes, évidemment, la charte prévoit des moyens, des demandes d'accommodement non seulement pour... l'ensemble des demandes d'accommodement pour les motifs visés par l'article 10. Alors, quelqu'un qui souhaite aménager un accommodement à ce principe-là devra en faire la demande, et la demande sera analysée.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Mais pourquoi vous répondez en parlant de l'offre quand notre question porte sur la réception du service?

Mme Vallée : Je parle aussi de la réception. C'est la réception et la prestation des services qui sont à visage découvert, des services...

M. Chouinard (Tommy) : Est-ce qu'on doit comprendre que vous avez décidé d'assujettir les... Je vais prendre cet exemple-là parce que c'est écrit dans un des amendements. Est-ce que vous avez pris la décision d'assujettir les sociétés de transport sans évaluer par ailleurs quel allait être l'impact concret au quotidien de ce qui allait arriver lorsqu'on va donner les services d'un autobus, là, tu sais, du genre... C'est parce que la population essaie de comprendre ce projet de loi là va faire quoi, va changer quoi.

Mme Vallée : La population, je pense, au Québec... Puis, si je me réfère aux débats qu'on a pu avoir, aux échanges, aux discussions qu'on a pu avoir, je pense que la prestation de services à visage découvert, c'est un principe qui fait consensus au sein de la population québécoise, et c'est ça qui est à la base de notre projet de loi.

M. Chouinard (Tommy) : Mais la réception...

Mme Vallée : La réception de services également. Donc, maintenant, les amendements vont faire l'objet de discussions, vont faire l'objet d'échanges avec nos collègues, mais je suis d'avis que c'est tout à fait... les amendements qui sont déposés sont conformes à ce qu'on a pu entendre aux échanges, aux demandes qui ont été formulées par certains collègues parlementaires, certains intervenants en commission. Et notre objectif, évidemment, notre travail, c'est de rassembler et de voir, là, où on est capables d'en arriver à des points communs d'entente. C'est le travail qu'on a fait, c'est le travail que j'ai présenté ce matin, c'est le résultat du travail que j'ai présenté par la voie des amendements. Maintenant, on aura les échanges et on pourra par la suite voir concrètement, une fois que le projet de loi sera adopté, comment tout ça évoluera. Mais l'objectif, oui, c'est la prestation de services à visage découvert dans le contexte.

Mme Lamontagne (Kathryne) : Dans le fond, ça sonne plus comme une volonté que comme une réelle application, comment c'est libellé tout ça.

Mme Vallée : Pas du tout.

M. Bergeron (Patrice) : Donc, on doit comprendre ou la population doit comprendre que vous avez émis, donc, un grand principe général pour la prestation des services et la réception des services à visage découvert, mais qu'il y aura, au fil du temps, de nombreuses exceptions.

Mme Vallée : On ne pourrait pas, d'entrée de jeu, dire — parce que je voyais... j'ai pris connaissance un peu des volontés de certains qui nous ont formulé des demandes d'amendements — qu'il n'y a aucun accommodement possible. Que ce soit pour les différents motifs de la charte, on ne peut pas faire ça sans porter atteinte aux principes mêmes de la charte.

Mais ces accommodements-là... Ce n'est pas parce qu'un accommodement est demandé... puis, ça aussi, c'est important de faire la nuance, ce n'est pas parce qu'on demande un accommodement que, nécessairement, on y a droit. Et c'est là qu'entre l'article 10 du projet de loi, qui vient établir un cadre d'analyse pour une demande d'accommodement qui serait fondée sur un motif religieux. Il y a des accommodements aussi qui sont fondés pour des raisons de handicaps. D'ailleurs, la plupart des enjeux d'accommodement sont sur cette question-là.

La Modératrice : Ça va être la dernière question en français.

M. Laforest (Alain) : La CAQ est revenue sur sa position concernant les enseignants. À Noël, tout le monde disait : O.K., on règle, on s'entend. Ce n'est pas arrivé. Vous avez décidé d'aller consulter et de revenir avec vos amendements de ce matin. Là, ils sont revenus à leur position de dire : Il faut inclure les enseignants. Êtes-vous prête, pas prête?

Mme Vallée : Non.

M. Laforest (Alain) : Non?

Mme Vallée : Non.

M. Laforest (Alain) : Donc, ça, ça va être un point d'achoppement.

Mme Vallée : Parce que la proposition de la CAQ, elle est attentatoire, elle porte atteinte à la liberté de religion prévue à la Charte des droits.

M. Laforest (Alain) : En quoi? C'est des fonctionnaires, les enseignants, là, à ce que je sache.

Mme Vallée : Oui. Et l'interdiction d'un port d'un signe religieux à un enseignant vient d'exclure de la profession, de la pratique de l'enseignement tous ceux et celles qui, dans le cadre de leur foi, portent un signe de cette appartenance religieuse.

M. Laforest (Alain) : Mais vous le faites pour les juges, les policiers.

Mme Vallée : Non, non, non, on n'a pas d'amendement dans ce sens-là. C'est ma collègue Agnès qui a déposé un projet de loi en ce sens.

M. Laforest (Alain) : Ça fait que vous, vous n'irez pas là, là?

Mme Vallée : Non. Vous ne retrouvez pas cet amendement-là dans les...

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Mme Vallée, la neutralité religieuse, ça veut dire donner une place égale à toutes les religions, contrairement à la laïcité, où on sépare l'État de la religion?

Mme Vallée : Pas tout à fait.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Si une personne peut porter un turban sikh, une autre peut porter un tchador, une autre un kirpan, etc., mais que tout le monde est égal, là, dans son port de signes religieux, est-ce qu'on peut dire, donc, que l'État est neutre, puisque l'expression de la religion chez chacune de ces personnes-là est égale, qu'il y a une sorte d'équilibre?

Mme Vallée : La neutralité de l'État... Puis je vous réfère à nos échanges de ce matin, peut-être — je comprends que vous êtes appelés à couvrir plein de sujets en même temps, là — on a eu des échanges sur cette question-là. Neutralité, laïcité, c'est deux choses. Laïcité ouverte, c'est un concept qui se rapproche, qui est très, très près... qui équivaut à la neutralité. La neutralité, c'est quoi? C'est que l'État a une impartialité, c'est-à-dire que, dans ses relations avec les citoyens, l'État ne va pas favoriser ou défavoriser, ne va pas traiter le dossier, par exemple, d'un citoyen en raison de la croyance religieuse de la personne, ou de son appartenance, ou de sa non-appartenance à une communauté religieuse. Les représentants de l'État sont neutres dans leur approche, dans leur façon de transiger avec les citoyens, et cette neutralité-là, elle n'amène pas les individus... de façon individuelle, elle n'oblige pas les individus à être neutres. Dans leur croyance religieuse, les gens ont le droit de manifester cette croyance-là. Le fait de transiger avec quelqu'un qui porte la kippa, qui porte le turban ne porte aucunement atteinte au principe de neutralité.

Mais on a eu des discussions superintéressantes sur la laïcité parce que... Je donnais l'exemple, l'interprétation de la laïcité ou la finalité de la laïcité, elle n'est pas la même, et ça, ce n'était pas très, très compliqué. Prenez les déclarations de chacun de mes collègues ce matin. Agnès Maltais, Nathalie Roy, Gabriel Nadeau-Dubois, chacun d'entre eux a plaidé pour inclure le concept de laïcité au projet de loi, mais chacun d'entre eux a une interprétation différente de ce que c'est, la laïcité.

La neutralité, c'est beaucoup plus objectif, c'est synonyme d'impartialité. Puis c'est ça, dans le fond, qu'on retrouve au Québec, c'est une séparation entre l'État, les institutions et la religion. Alors, c'est ce que j'expliquais lors de nos travaux, parce qu'on a proposé des amendements, on a proposé qu'au préambule on fasse référence à la laïcité, mais la laïcité, elle est définie de façon tellement différente... même, on regarde le projet de loi, puis ce sont des concepts qui sont... C'est complexe, là, c'est très théorique.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : ...la neutralité, c'est la séparation entre l'État et la religion. C'est ce que vous venez de dire.

Mme Vallée : La neutralité, oui, oui, la neutralité, mais on retrouve ces concepts-là également dans la laïcité. Mais la laïcité, pour certains... On a donné à la laïcité, suivant une conception fermée ou une conception ouverte, une interprétation différente. Même en...

M. Chouinard (Tommy) : Mais pourquoi vous n'incluez pas laïcité puis vous expliquez : Bien, c'est en fonction de notre définition?

Mme Vallée : Parce que ces interprétations, au fil du temps... Regardons ce qui s'est passé en France. Au tout départ — Gabriel Nadeau-Dubois nous a fait un résumé historique fort intéressant puis nous a cité des passages — à l'époque, c'était vraiment une volonté d'enchâsser la neutralité de l'État. Puis, au fil des temps, cette laïcité-là a été utilisée, selon le passage des individus qui étaient au pouvoir, de façon différente. Donc, nous, on a toujours dit que nous allions de l'avant avec un projet de loi pour déclarer, pour consacrer le principe de la neutralité de l'État.

La Modératrice : On fait les questions en anglais.

M. Chouinard (Tommy) : Mais ce dont vous parlez, c'est le concept de laïcité républicaine, laïcité ouverte...

La Modératrice : Tommy, s'il vous plaît, on va manquer de temps. Tommy.

M. Chouinard (Tommy) : ...mais ça reste de la laïcité, en tout cas.

Mme Vallée : Bien, c'est que le... comment je pourrais dire? C'est qu'ultimement, selon l'interprétation, suivant le type de laïcité, la finalité n'est pas la même.

M. Chouinard (Tommy) : Mais politiquement il va y avoir un impact.

Mme Vallée : Et, dans la laïcité fermée, on est beaucoup plus rigides et on n'accepte pas la manifestation de la croyance religieuse. La laïcité ouverte reconnaît la liberté de religion et sa manifestation.

La Modératrice : Maya Johnson.

Mme Vallée : Sorry.

Mme Johnson (Maya) :No problem. This morning, you said that you wanted to establish a framework that will create social peace, and I'm wondering how you see that happening when it appears that the parties here, at the National Assembly, can't even reach a consensus on some of the basic principles of the bill.

Mme Vallée : Well, I think we'll… I'm pretty sure, with the days to come… I think we can come up with a joint perspective. I understand that some parties may want to go further, may want to be more rigid on some principles. It's up to them. We have what we are presenting, and the amendments that we are presenting are what we consider being a gathering of the different suggestions that were in directions with what we were presenting at the beginning. We can always make legislation better, and we listen, and we presented the basis but there are differences. But, when I say… and we closed and we ended the session this morning on this principle, I say my colleagues are asking that we include the principle of «laïcité de l'État».

Mme Johnson (Maya) :Secularism.

Mme Vallée : Secularism, yes. And the reason why they are asking for this is they say : Well, it's very important to establish that the State, that the institutions are completely apart from religion and that there be no consideration whatsoever for religion. Well, neutrality is that independence between the State and religion, it's been restated by the Supreme Court. Even in 2015, with «le Mouvement laïque québécois» and «la ville de Saguenay», the Supreme Court clearly stated that the neutrality of the State and of the institution implies that the treatment, with regards to a person, is notwithstanding the religious beliefs of that person.

Mme Johnson (Maya) : So, what's the issue the word «secularism»?

Mme Vallée : Well, secularism is being given different interpretations. And, if you go back to the comments that were made by my colleague from Québec solidaire, and my colleague from the PQ, and my colleague from the CAQ, they all are asking for that word to be included in the bill, but none of them is giving it the same interpretation, the finality of it all is not the same. If you take, for example, the presentation that was made by my colleague Nathalie Roy and you take Gabriel Nadeau-Dubois' presentation, they are completely at two opposite dimensions, but they are both asking for secularism.

Mme Johnson (Maya) : So, as far as you're concerned, «neutrality» is the most objective word that can be used.

Mme Vallée : Exactly, exactly, and it represents what Québec society is all about.

Mme Johnson (Maya) : Are you worried about right-wing movements in Québec drawing inspiration from what's happening in the States, for example in Charlottesville, given this renewed discussion over religious accommodation, identity issues, immigration?

Mme Vallée : You know, it's never easy to start a discussion on these issues, there's always something. I think it's important that we continue the work that has been started on Bill 62. This being said, I hope that it can also send the message that diversity is welcome in Québec, is needed in Québec. And we will always stand strong against the manifestation of hate, of rejection such as the ones that were put forward and that we were made aware of this morning. I think we have to have an inclusive speech, and that's what we have been trying and working hard on doing. Québecsociety...

Mme Johnson (Maya) : But could this add fuel to the fire?

Mme Vallée : That's our responsibility, the way that we approach the file, the examples that we use, the way we open the discussion. And I must tell you that, this morning, the discussion was very serious. I consider that each of my colleagues knows the importance of addressing this issue, but addressing it in a responsible manner, and, so far, I think we're on the right track.

Mme Johnson (Maya) : And just one final question, and I know obviously we're talking more about religious accommodation, but it ties into the broader discussion related to immigration, and migrants, and so on. And the Premier, this morning, mentioned the fact that he felt that Mr. Lisée was essentially suggesting we should build a wall. And I just wonder, you know, what you make of those comments and how Mr. Lisée seems to be suggesting we deal with migrants.

Mme Vallée : The past few days, the past few weeks brought some politicians to use very strong words. We have to be careful. We have a duty to protect minorities. We understand that immigration and all the refugee questions may bring some worries, may have a potential to give a sense of insecurity to some people. It's our responsibility to explain the process. Those people that are trying to come here, in Canada, are subject to a very strict process, and it's a process that is guided by federal legislation. And the process is there, and we have to... As I said, we have a responsibility to address these issues, and not to try to build on the fear that some people have on the insecurity that it raises. We are aware of these insecurities, we are aware of this fear, but we also have a duty to give the real information and not to play… and not to use a situation that is a situation exceptional that we are facing right now, and it's important not to use it for political purpose.

We are Parliamentarians, we sit here, we have the privilege to sit here, at the National Assembly, and we have a duty to make sure to respect the minorities. The effect that some speeches have is that some people won't make a difference and may have… may build their… How can I say it? Well, we don't want to give fuel to intolerance, I'll leave it as is, and by saying that it's not saying that we're willing to accept everything that happens. We have regulations, we have legislation to treat and to analyze requests that are being made, and Canada and Québec have these legislations, and it's important to say it. Saying : If we were independent, we wouldn't be facing this situation, is incorrect. There's no way that Mr. Lisée can say that by being independent he would not have to deal with situations such as this one. And we have political parties, in some time, a few months ago, that said : We have a duty to respond to those who are in hopeless situations and situations where they fear for their safety, their security, and now, today, because it seems to be popular, change their way of approaching the issue. But there's no magical situation to a situation such as today. We're facing totally something that was unexpected and that is exceptional, and I think we're doing it with a sense a responsibility and a duty not to push forward intolerance. Merci. Désolée, je m'enfarge encore des fois dans mes…

(Fin à 13 h 51)

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