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Conférence de presse de M. Simon Jolin-Barrette, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de justice et Mme Lise Lavallée, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de santé publique

Présentation du cadre réglementaire de la CAQ sur la légalisation du cannabis.

Version finale

Le mercredi 13 septembre 2017, 11 h

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Onze heures cinq minutes)

M. Jolin-Barrette : Alors, bonjour à tous. Je suis accompagné de ma collègue députée de Repentigny, Mme Lise Lavallée, qui est porte-parole en matière de santé publique.

Alors, tout d'abord, la CAQ tient à réaffirmer son profond malaise et ses sérieuses réserves face au projet de légalisation du cannabis du gouvernement fédéral. Je vous le dis d'entrée de jeu, nous sommes opposés à la légalisation du cannabis. Nous subissons les conséquences de Justin Trudeau. Il est maintenant de la responsabilité des élus québécois de se préparer à ce bouleversement majeur qui s'en vient, soit la légalisation du cannabis.

Beaucoup de groupes et de citoyens se sont fait entendre au cours des dernières semaines, et la majorité partage les mêmes inquiétudes que nous face aux conséquences de cette décision. Le Québec peut et doit agir. Comme toutes les provinces canadiennes, il a la liberté de modifier certaines mesures contenues dans le projet de loi fédéral.

Jusqu'à maintenant, le débat sur la légalisation du cannabis porte beaucoup sur les raisons pourquoi est-ce qu'on doit le légaliser. Nous, nos propositions, à la CAQ, vont à contre-courant. Nous souhaitons ramener le débat sur la nécessaire lutte contre la consommation de cannabis.

Ainsi, nous avons un éventail de mesures pour que le Québec assume pleinement sa juridiction en matière de santé publique, de sécurité publique et de prévention. Nous croyons que le Québec doit se doter d'un cadre réglementaire responsable, un cadre qui prévoira la mise en place de plusieurs mesures contraignantes afin de limiter la consommation de cannabis. En bref, nous voulons que le gouvernement du Québec adopte la ligne dure face à la légalisation du cannabis.

Soyons clairs, le cadre réglementaire proposé par le gouvernement fédéral est beaucoup trop permissif et risque d'entraîner des conséquences néfastes s'il est appliqué tel que tel. Vous savez, la consommation de drogues brise des familles, ravage des familles. Nous devons le modifier, le cadre fédéral, et envoyer un message clair : La consommation de cannabis ne doit pas être banalisée; au contraire, elle doit être restreinte autant que possible, et tout geste illégal doit être puni sévèrement.

Il faut avant tout protéger nos jeunes. La consommation de drogues peut avoir des effets désastreux sur leur santé et compromettre leur avenir. C'est pourquoi nous proposons de hausser l'âge légal pour acheter du cannabis au Québec de 18 à 21 ans. Cet avis est partagé par plusieurs professionnels de la santé. Le projet de loi fédéral interdit la vente aux personnes de moins de 18 ans, en indiquant que ce geste est criminel. Nous, on veut être plus stricts, en précisant que la vente aux Québécois âgés de 18 à 21 ans est aussi illégale, mais en vertu du droit pénal québécois. On propose de créer des infractions pour la vente aux moins de 21 ans.

Aussi, même si le fédéral propose une limite de possession à 30 grammes par individu, nous souhaitons de couper de moitié cette quantité qui nous apparaît exagérée. Nous proposons donc de limiter la possession de cannabis à 15 grammes et non à 30 grammes, comme le propose le fédéral, au niveau de la possession par individu.

Concernant la distribution et la vente au détail, nous devons avant toute chose tenir compte du contexte dans lequel survient la décision du gouvernement fédéral, une décision qui est précipitée. Présentement, la vente de cannabis est assurée par des réseaux criminels qu'il nous faudra d'ailleurs continuer de combattre. Ce sera une lutte sans relâche. C'est pourquoi nous avons décidé qu'un réseau public devrait être en charge de la distribution et de l'exploitation des points de vente. La Société des alcools du Québec — et la constitution d'une filiale — constitue un choix logique pour remplir ce mandat, puisqu'elle possède déjà l'expertise et l'infrastructure nécessaires pour opérer un produit devant être consommé avec modération. Elle a déjà une expertise, elle a déjà les ressources, elle a déjà le réseau de distribution, la planification au niveau des achats. Nous n'avons pas besoin d'une nouvelle société d'État. Le tout peut se faire par le biais d'une filiale de la SAQ.

Le cannabis ne devrait toutefois pas être vendu dans les succursales actuelles de la SAQ. Il devra être offert dans des établissements dédiés, une forme de filiale de la SAQ, comme je vous expliquais, en arborant une autre enseigne. Nous devons éviter de mélanger la vente d'alcool et de cannabis pour ne pas encourager leur consommation simultanée. C'est d'ailleurs ce que les études démontrent aussi, qu'on ne doit pas favoriser le fait que l'alcool et le cannabis soient consommés en même temps et que la vente non plus ne doit pas être effectuée au même endroit. Dans cet esprit, on croit que les revenus tirés de la vente de cannabis doivent être dédiés au financement des dépenses reliées à la santé, à la sécurité publique et à la prévention, notamment auprès des jeunes gens.

Compte tenu des coûts que la légalisation du cannabis va engendrer pour le gouvernement du Québec, nous demandons à ce qu'Ottawa cède son champ fiscal complet au Québec. Le gouvernement du Québec doit absolument l'exiger, notamment au niveau de la TPS qui pourrait être imposée sur le cannabis et également au niveau de la taxe d'accise qui pourrait être imposée sur le cannabis. C'est un peu le parallèle qu'on fait avec les boissons alcoolisées. Actuellement, vous avez quatre taxes sur les boissons alcooliques : donc, vous avez la TVQ, la taxe spéciale pour les produits alcooliques, vous avez également la TPS, vous avez une taxe d'accise. Nous, on propose que, pour le produit de cannabis au Québec, les deux taxes fédérales qui sont imposées soient libérées, en fait le champ fiscal soit libéré pour le Québec pour que le Québec puisse, s'il le souhaite, augmenter la TVQ ou prendre la place de la taxe d'accise fédérale par le biais de ses propres taxes, puisque l'ensemble des conséquences financières vont être assumées par l'État québécois. Donc, toutes les conséquences en matière financière, et aussi en matière de santé publique aussi, et de sécurité. La lourde facture que le Québec aura à assumer en raison de la décision du gouvernement libéral justifie amplement que tous les revenus de taxation reviennent exclusivement au Québec.

Toujours concernant la vente, nous croyons qu'il faut interdire la vente en ligne et les achats de cannabis à l'extérieur du Québec. Nous souhaitons éviter que des produits ne respectant pas le cadre réglementaire québécois se retrouvent sur les tablettes et disponibles dans la province. Nous souhaitons également interdire la vente en ligne sur le territoire du Québec. On ne veut pas que la société d'État, la SAQ, avec sa filiale, puisse livrer, par le biais de la poste et par un achat en ligne, le cannabis à domicile. Également, on souhaite interdire le transport de cannabis interprovincial par les particuliers. Un peu à l'image de ce qu'il se faisait avant 2014 pour l'alcool, on ne souhaite pas qu'on puisse acheter du cannabis dans une province puis le transporter au Québec. Aussi, des amendes importantes en matière pénale seront imposées aux contrevenants pour venir circonscrire cette proposition-là.

En ce qui concerne la consommation de cannabis sur les lieux de travail, on considère qu'on ne devrait pas avoir le droit, comme c'est le cas pour le tabac. Il n'est évidemment pas souhaitable non plus que des employés se présentent au travail sous l'effet du cannabis, et nous devons être clairs dans le cadre réglementaire québécois qui va être développé. Et on doit aussi fournir des outils aux employeurs pour faire en sorte que les employés auront de la prévention, mais aussi donner des outils, une prise aux employeurs pour faire en sorte de respecter cette politique-là. Déjà, de nombreux employeurs l'ont, lorsqu'il y a du travail sous des facultés affaiblies, mais je pense qu'il faut outiller les employeurs en ce sens-là.

Autre point, la culture du cannabis à domicile sera interdite dans la proposition que nous faisons. La possibilité que des plants de marijuana cultivés à domicile puissent se retrouver en présence d'enfants ou d'adolescents est complètement intolérable pour nous. Chez nous, à la CAQ, c'est zéro plant à la maison. On souhaite que les gens s'approvisionnent, s'ils souhaitent consommer du cannabis, dans une des succursales d'une filiale de la société d'État pour que les gens ne puissent pas le produire à domicile.

Ça entraîne énormément de conséquences, la proposition fédérale, d'avoir quatre plants de pot d'une hauteur maximale d'un mètre. Nous considérons que cette possibilité-là n'est pas réaliste, et c'est pour ça que nous proposons qu'on ne permette pas, au Québec, de cultiver à domicile, sans compter les conséquences que ça peut avoir sur la santé, mais aussi sur l'infrastructure des bâtiments. Pour contrer cela, nous proposons une amende pénale élevée, en vertu de la juridiction québécoise, qui devra être imposée à ceux qui feront de la production de cannabis à domicile malgré l'interdiction imposée par Québec.

Nous proposons aussi de permettre aux propriétaires de logements qui le désirent d'interdire la consommation de cannabis dans leurs logements qui sont loués. Donc, on veut intervenir directement dans les baux pour permettre aux propriétaires d'interdire le fait que leurs logements soient loués avec la possibilité de fumer du cannabis. Il reviendra aux propriétaires, de façon unilatérale, à le déterminer pour les baux qui existent déjà.

Au niveau des copropriétés, au niveau des condos, pour les règlements existants, pour les conventions de copropriété existantes, nous recommandons d'intervenir directement dans le droit privé afin d'interdire la consommation de cannabis dans les parties privatives, soit à l'intérieur du logement. Les copropriétaires pourront modifier leur convention de copropriété, s'ils le désirent, afin de le permettre. Ça, ça veut dire que, déjà, la Loi sur le tabac va s'appliquer au niveau des parties communes, supposons vous avez un hall dans un immeuble de copropriétés; bien, pour les parties privatives, les condos des gens, dans le fond, on suggère, pour ceux qui existent déjà, de l'interdire, la consommation, à moins que le syndicat de copropriété dise et fasse la modification à sa convention de copropriété pour dire : Oui, on va le permettre dans notre immeuble pour les copropriétés qui sont déjà existantes.

Aussi, nous souhaitons une interdiction totale et complète de la consommation de cannabis dans les lieux publics. Par lieux publics, on entend l'intérieur et l'extérieur des édifices publics, ministères, hôpitaux, écoles, cégeps, campus universitaires, restaurants, tours à bureaux, centres commerciaux, etc. Également, on souhaite interdire la consommation de cannabis sur les trottoirs et les voies publiques, de même que dans les parcs et les autres places publiques. Aussi, on souhaite interdire la consommation de cannabis dans les véhicules automobiles et dans les transports publics. Donc, on souhaite une législation provinciale à ce niveau-là pour ne pas laisser aux villes le problème d'adopter des règlements là-dessus, sur la consommation dans les lieux publics ou dans les parcs. On veut que ça vienne de Québec et que ça soit très clair que la consommation, dans les lieux publics, de cannabis est interdite. Également, nous suggérons d'imposer des amendes dissuasives pour les contrevenants qui contreviendront à ces règles.

Au niveau de la sécurité routière, nous sommes favorables aux mesures proposées par Ottawa dans son champ de juridiction concernant la conduite d'un véhicule avec les facultés affaiblies par le cannabis. Le fédéral a incorporé un projet de loi particulier justement sur cette question-là au niveau de la sécurité routière. Par contre, dans son champ de juridiction, le Québec devra adapter le Code de la sécurité routière pour punir les conducteurs fautifs d'avoir pris le volant sous l'effet du cannabis en s'inspirant des mesures existantes pour les facultés affaiblies avec l'alcool. Donc, on suggère d'avoir un régime, comme c'est déjà le cas avec le Code de la sécurité routière, des sanctions administratives en plus des sanctions pénales si vous conduisez avec des facultés affaiblies causées par le cannabis.

Donc, je vais désormais passer la parole à ma collègue députée de Repentigny et porte-parole en santé publique, Mme Lise Lavallée. Je vous remercie.

Mme Lavallée : Merci, Simon. En matière de santé publique, la légalisation du cannabis annoncée par le gouvernement Trudeau pourrait avoir des conséquences importantes. C'est pourquoi la responsabilité du gouvernement est d'encadrer sans banaliser ni encourager. Ainsi, parmi les propositions que nous faisons aujourd'hui, nous souhaitons notamment limiter le plus possible le nombre de points de vente et des heures d'ouverture. Les points de vente devront se trouver le plus loin possible des écoles, des garderies et des lieux publics fréquentés par les jeunes. La législation québécoise en matière de zonage, notamment la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, devrait être modifiée en ce sens.

La légalisation et la mise en marché du cannabis ne devra pas se faire dans une optique de faire le plus de profits possible. La santé publique, la prévention et la sécurité publique doivent primer. Ce principe devra guider toute l'action gouvernementale sur le sujet.

L'emballage des produits distribués dans ce réseau public devra être neutre. On ne veut pas encourager la consommation par le biais d'emballages accrocheurs comme ce fut le cas pour les produits du tabac dans le passé.

Nous souhaitons par ailleurs que l'emballage soit sécuritaire et non accessible aux enfants, comme les contenants de médicaments vendus sous ordonnance dans les pharmacies. Il ne doit pas être permis de faire la promotion du cannabis dans les médias, sur des panneaux publicitaires et dans les points de vente.

Finalement, nous souhaitons également interdire la vente des produits dérivés du cannabis. On entend par les produits dérivés les gâteaux, pâtisseries et confiseries. Maintenant, nous sommes prêts à recevoir vos questions.

Le Modérateur : On va commencer immédiatement avec Nicolas Vigneault.

M. Vigneault (Nicolas) : Votre proposition, si je comprends bien, 21 ans, pourquoi exactement? Plusieurs personnes diront qu'à 18 ans on a l'âge légal de voter, on peut prendre toutes les décisions sur notre avenir. Pourquoi fixer ça à 21 ans?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, vous savez, on a entendu les nombreux intervenants, notamment la Fédération des médecins spécialistes, les psychiatres également, qui disaient que ça avait des conséquences jusqu'à 25 ans. La Fédération des médecins spécialistes dit 21 ans. Nous, on se rallie à leur proposition parce que, justement, ça peut avoir des effets sur la santé des jeunes jusqu'à 25 ans. Et je pense que la proposition de 21 ans nous permet de faire le pont le plus possible afin de prévenir, dans le fond, les différentes conséquences qu'il peut y avoir sur la consommation de cannabis par les jeunes.

M. Vigneault (Nicolas) : Sur les points de vente, on comprend que vous vous rangez un peu derrière l'Ontario, qui a manifesté ou a clarifié sa position avec la LCBO. C'est un peu ça, votre image? C'est un peu ce que vous voyez en termes de points de vente?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, nous, on travaille depuis assez longtemps sur la proposition. L'Ontario, effectivement, a proposé ça la semaine dernière, mais pour nous, c'est important que ça soit sous le chapeau de la SAQ, mais pas dans le même magasin. On veut une filiale qui est dédiée avec des établissements distincts où la vente pourra se faire. Donc, en ce sens-là, on considère que le monopole d'État pour l'achat et la distribution est le meilleur outil afin de favoriser le fait que le cannabis soit consommé de façon responsable.

M. Vigneault (Nicolas) : Petite dernière. Sur la fiscalité, Dr Barrette a eu toute la misère du monde à rapatrier quelques milliards de dollars en matière de santé, malgré les sorties publiques. Comment pensez-vous convaincre le gouvernement fédéral, sérieusement, là, de rapatrier les profits du cannabis, reliés au cannabis alors que les coffres du gouvernement fédéral ont aussi soif, là?

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, en fait, vous savez, le cannabis est un nouveau produit. Il faut gérer les conséquences d'une décision fédérale. La décision fédérale de dire «on légalise» sans consulter ses partenaires fédératifs est irresponsable. Le gouvernement Trudeau a pris sa décision et impose une marche à suivre aux provinces d'adopter un cadre réglementaire extrêmement rapidement alors que lui-même ne l'a pas fait.

Nous, ce qu'on va suggérer, c'est d'avoir un front commun avec les autres provinces parce que, vous savez, il y a des conséquences — ce n'est pas juste au Québec — dans toutes les provinces canadiennes, des conséquences. D'ailleurs, je voyais hier qu'il y avait un député de l'Ouest canadien qui est allé témoigner au comité à Ottawa pour dire qu'il y avait des conséquences aussi dans ces provinces, puis il demandait de reporter la date d'entrée en vigueur. Donc, pour nous, c'est fondamental que faire alliance avec les autres provinces et d'expliquer très clairement au fédéral les conséquences et la pression que ça va avoir sur le système de santé, sur la sécurité publique également.

Vous savez, les corps de police sont sortis pour expliquer à quel point les coûts de détection pour détecter un conducteur avec des facultés affaiblies par le cannabis sont beaucoup plus élevés. Les coûts, aussi, de formation pour les policiers qu'il va y avoir parce que des agents qui sont accrédités en détection, il n'y en a pas énormément au Québec et il va falloir en former plusieurs aussi. Donc, l'ensemble des coûts tombe dans la cour des provinces, donc c'est légitime et souhaitable que le fédéral accède à cette demande-là. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que je vais proposer à la ministre Lucie Charlebois, très clairement, de faire les revendications auprès du fédéral à ce niveau-là parce qu'on ne peut pas laisser ça comme ça. C'est un nouveau produit qui est légalisé, ça a des conséquences sur la population, et donc il faut que la source de revenus suive également le choix du fédéral qu'il a fait de légaliser le cannabis.

Le Modérateur : Denis Lessard.

M. Lessard (Denis) : Bien, un des objectifs de la loi, c'est d'éliminer le marché noir, hein, c'est central dans la démarche d'Ottawa. Et puis, à ce compte-là, le prix de vente sur le marché va devenir très important parce que tu ne peux pas avoir un marché qui vend beaucoup plus cher que le marché noir. Or, ce que vous proposez, c'est des établissements où les employés vont être syndiqués, comme la SAQ. Les coûts vont être beaucoup plus importants que ce que les gens peuvent trouver sur la rue actuellement, donc vous ne pourrez pas freiner le marché noir avec ce système-là, là. Les Hell's Angels n'ont pas de convention collective. Il n'y aura pas de guichetier à 30 $ de l'heure ou de caissier à 30 $ de l'heure pour vendre ça, là. Compétitivement, ça n'éliminera pas le marché noir.

M. Jolin-Barrette : Lors du forum d'experts, puis l'ensemble des intervenants qu'on a entendus au cours de l'été disaient la nécessaire importance que le produit soit vendu à un coût qui est compétitif avec le marché de la rue, et nous en sommes. Il faut que le produit soit compétitif. Il faut que les gens qui décident de consommer du cannabis le fassent dans une société qui est légale, comme une filiale de la SAQ. Donc, il va y avoir du travail à faire à ce niveau-là, mais c'est sûr que le produit, il faut qu'il soit vendu à un coût compétitif.

Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que le message qu'on envoie, nous, c'est qu'on ne souhaite pas favoriser la consommation de cannabis, et, s'il y a consommation de cannabis, il faut que ça soit fait de façon responsable. C'est pour ça qu'on propose les établissements dédiés. Mais une chose est sûre, il faut que le coût de la matière soit compétitif, il va falloir qu'on travaille avec les différents intervenants.

M. Lessard (Denis) : ...un gouvernement de la CAQ serait prêt à le vendre à perte pour matcher, si on veut, le prix qu'on trouve sur le marché noir?

M. Jolin-Barrette : Ça, il faudrait regarder les modèles économiques qu'il y a en place, mais il y a une chose qui est sûre, c'est que, le coût social d'imposer la légalisation du cannabis, il va y avoir des conséquences aussi. Ça fait qu'à partir du moment où on gère le produit, il faut que, oui, le coût soit compétitif, mais il faut faire en sorte aussi que les employés qui offrent le produit soient des employés qui sont formés, qui puissent détecter, dans le fond, est-ce que les gens qui viennent acheter le produit sont en situation de vulnérabilité, un peu comme il y a à la SAQ également.

M. Lessard (Denis) : Comment vous allez avoir un prix compétitif, là, avec ces obligations-là?

M. Jolin-Barrette : Bien, je pense qu'à la SAQ ils ont les ressources pour mettre en marché le produit, et on va réussir à trouver des mécanismes pour faire en sorte que le produit soit accessible à un prix qui soit compétitif avec la rue parce que sinon les consommateurs pourront acheter, comme vous le dites, dans la rue. Sauf qu'il y a une chose qui est sûre, c'est qu'il y a un aspect de santé et de sécurité publique. Nous souhaitons que, si les consommateurs décident d'acheter du cannabis, ils le fassent dans une succursale de la SAQ parce que le produit aussi va être certifié aussi.

Vous savez, le fédéral émet des permis de production. Donc, à partir de ce moment-là, on connaît la qualité de la matière, et ça, je pense que c'est fondamental que le produit qui se retrouve dans les succursales soit compétitif. Mais il y a une chose qui est sûre aussi, c'est que l'utilisation du réseau de distribution, ça va engendrer des coûts, certainement. Mais c'est un nouveau marché, on va s'adapter aussi, et on ne veut pas avoir trop de succursales non plus. On veut avoir un nombre de succursales limité. Il faut offrir...

M. Lessard (Denis) : Les contribuables vont avoir à défrayer le... Si on vend à perte pour matcher le prix du marché noir, est-ce que les contribuables vont avoir à défrayer la différence?

M. Jolin-Barrette : Ça, c'est une question hypothétique, parce qu'on ne sait pas quels vont être les coûts de système rattachés à ça. Mais, lors du forum d'experts, le sous-ministre aux Finances du gouvernement actuel disait qu'il y avait un marché de 322 millions et qu'il y avait la possibilité aussi de générer des revenus avec la consommation.

Donc, nous, on considère... et on va travailler en collaboration avec le gouvernement là-dessus de façon à faire en sorte que ça soit équilibré; s'il y a des revenus, que ça soit équilibré et que, s'il y a des profits, ils soient destinés à la santé publique et à la sécurité publique. Mais il y a une chose qu'il ne faut pas oublier, puis ça va avec la proposition qu'on fait avec le champ fiscal... Vous nous dites : Écoutez, il faut que ce soit compétitif puis il ne faut pas que ce soit à perte. On est d'accord avec vous, c'est pour ça qu'on dit aussi au gouvernement fédéral, puis ça fait partie de notre proposition aujourd'hui : Libérez le champ fiscal. Parce que c'est sûr que, si le fédéral impose une TPS, impose une taxe d'accise, nécessairement ça va faire augmenter le coût du cannabis. Il faut que le Québec soit le seul sur la glace pour imposer des taxes sur ce produit-là parce que, un, la conséquence de la légalisation, la conséquence, c'est des coûts pour le Québec et non pas pour Ottawa, et deuxièmement, bien, si le fédéral commence à imposer aussi sa TPS-TVQ, ça va faire augmenter le prix du produit comme tel.

Donc, nous, ce qu'on suggère, c'est, à cause que des conséquences financières sont au Québec, que ça soit uniquement le Québec qui l'impose. Mais deuxièmement aussi ça va avoir un impact sur le prix. Si le fédéral le taxe en plus, bien, c'est sûr que le coût… le produit va être plus élevé.

M. Lessard (Denis) : Juste une dernière question sur la vente en ligne. Concrètement, comment vous pouvez interdire ça? Parce qu'actuellement ils ne sont même pas capables d'exiger les taxes sur les transactions en ligne. C'est un libre-faire complètement, là, c'est absolu, là, tu sais. Comment Québec pourrait interdire à quelqu'un qui est chez lui qui, par Internet, achète là-bas puis qui… ça revient par la poste, là, ce qui est prévu dans le projet de loi fédéral, de toute façon?

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, en fait, il va y avoir des amendes. On va imposer un cadre réglementaire avec des amendes. Vous savez, il y a des gens qui se font livrer des armes prohibées par Internet aussi, actuellement, et c'est déjà illégal. Il y a des gens qui se font livrer de la marijuana, actuellement, et c'est un produit qui est illégal. Nous, ce qu'on propose, c'est un cadre qui va l'interdire. On ne souhaite pas que les autres provinces puissent vendre de la marijuana en ligne. Donc, les contrevenants seront poursuivis, mais, dans le fond, on…

M. Lessard (Denis) : ...inspecteurs? Comment ça va fonctionner? Ça va être la SQ qui va gérer les transactions?

M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, comme toute forme d'infraction pénale, s'il y a constatation d'une infraction pénale au Québec, c'est soit la police ou soit les inspecteurs d'un organisme dédié. Mais, dans un cas comme celui-là, généralement, c'est la police, la Sûreté du Québec ou les régies intermunicipales de police qui ont la juridiction pour le faire. Lorsque ça se retrouve dans le cadre d'une loi pénale, généralement, ce sont les forces de l'ordre. Donc, à savoir qui le fera, pour nous, dans notre esprit, c'est davantage la police qui… s'il y a une infraction réglementaire là-dessus.

Mais pour revenir sur la vente en ligne, vous savez, au Québec, ça se faisait. Dans le fond, vous ne pouviez pas commander, supposons, des bouteilles de vin d'une autre province canadienne et vous les faire livrer en ligne. Donc, ça existait déjà. Ça a été modifié par l'entente interprovinciale sur le commerce, notamment, maintenant il y a un assouplissement à ce niveau-là. Même chose aussi pour le fait d'acheter des bouteilles de vin, supposons, vous-même, en Ontario, à la LCBO puis les amener au Québec, c'était un geste illégal. Donc, nous, on veut rétablir ça, mais au niveau du cannabis et au niveau des produits.

Donc, les compagnies qui se... Parce que, pour produire le cannabis aussi, vous allez devoir détenir un permis fédéral pour le faire. Donc, si vous avez un producteur de Colombie-Britannique qui produit le cannabis et qui décide de shipper ça au Québec, bien, il va être passible d'infraction pénale puis le client aussi va être passible d'infraction pénale aussi.

Nous, ce qu'on veut, là, c'est restreindre le plus possible la consommation de cannabis. Donc, je pense qu'on a une question de société ici, à se dire : Qu'est-ce qu'on veut? Est-ce qu'on veut que ça soit le «free-for-all» ou on veut avoir une approche qui est restrictive, une approche qui est réfléchie, une approche qui fait en sorte où on va prévenir les gens sur les dangers de la consommation de cannabis, sur les conséquences que ça peut avoir? Je pense que c'est important de vraiment travailler sur cet aspect-là. Et l'État aussi doit prendre ses responsabilités. C'est pour ça qu'on le propose dans le cadre du réseau public avec une filiale de la SAQ.

Même chose sur la vente en ligne au Québec par le biais des filiales de la SAQ. On ne souhaite pas que cette filiale-là fasse de la vente en ligne comme, supposons, elle le fait avec le vin actuellement, notamment pour des questions d'accès aux produits comme tels parce que c'est difficile, avec la vente en ligne, de valider que le consommateur qui achète au bout est une personne autorisée à en consommer, exemple qu'il a plus de 21 ans. On peut se retrouver dans toutes sortes de situations.

Donc, nous, on considère que le fait que ça soit un établissement physique, qui est un dispensaire, qui lui va valider l'âge de la personne, va valider l'état de vulnérabilité de la personne, l'état d'intoxication de la personne qui vient acheter le produit, un peu comme ça se fait à la SAQ actuellement... Les employés de la SAQ suivent un code de conduite, ils ont des formations pour outiller les consommateurs aussi, à savoir dans quel état ils sont au moment de venir consommer... de venir acheter le produit. Je pense que ce qu'on propose, c'est vraiment une approche responsable pour dire : Écoutez, si vous voulez consommer du cannabis, vous devrez vous présenter dans une des filiales associées à la SAQ. Et l'idée, c'est de ne pas faire la promotion de la consommation du cannabis, mais plutôt d'avoir une approche de prévention en ce sens-là.

Le Modérateur : Annabelle Blais.

Mme Blais (Annabelle) : Oui. Je voudrais juste poursuivre, là, sur la vente en ligne. Parce que vous dites : C'est l'approche responsable, de l'interdire. Ce n'est pas plutôt irresponsable de fermer les yeux sur tout ce qui se passe actuellement? C'est très facile d'acheter déjà du cannabis illégal en ligne. La poste le livre sans aucun problème. C'est le facteur qui va venir livrer à la porte du client. Je veux dire, à quel moment la SQ peut intervenir là-dedans?

Deuxième chose aussi : Qu'est-ce que vous faites avec les producteurs autorisés, les 58 qui sont déjà autorisés, qui fonctionnent dans le cannabis médical et qui ont déjà tout un système en ligne... où on peut juste commander en ligne, finalement? Donc, tout ça existe déjà, et ces producteurs autorisés là veulent prendre une part très active dans le marché récréatif. Ils vont continuer à livrer en ligne, c'est un système qui est déjà établi. Donc, comment vous allez pouvoir vraiment intervenir pour empêcher ça? Et aussi comment vous allez départager si ce producteur autorisé là envoie à un patient qui, lui, a le droit de se faire livrer du cannabis? Est-ce que, lui, c'est un patient versus son voisin qui n'est pas un patient? Ça m'apparaît impossible, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, je vais débuter par votre deuxième question au niveau du cannabis médical. Dans un premier temps, vous devez avoir une prescription pour pouvoir commander, actuellement. Les gens qui se font livrer, actuellement, du cannabis par la poste qui n'est pas du cannabis médical, là, sans prescription, ils commettent une infraction. Dans ce cas-ci, c'est une infraction criminelle.

Mme Blais (Annabelle) : Ça existe déjà.

M. Jolin-Barrette : Peut-être que ça existe, mais moi, je ne pourrai jamais cautionner de commettre un geste illégal et une infraction criminelle, par le fait même. Ce n'est pas parce que ça se fait qu'on doit baisser les bras dans toute forme d'infraction. Donc, il faut que, dans le fond, les ressources soient mises à la disposition aussi pour contrer...

Mme Blais (Annabelle) : Mais à la disposition de qui? Concrètement, je comprends que vous ne voulez pas que ça se fasse, mais, comme ça se fait déjà, comment vous allez faire pour mettre les balises en place pour l'interdire? Parce que c'est déjà interdit et ça se fait.

M. Jolin-Barrette : Mais, vous savez, il y a plein de choses qui sont interdites et il y a plein de choses qui se font quand même, mais il ne faut pas abandonner le combat par rapport à toutes les infractions criminelles qui sont commises. Donc, je pense que c'est important de bien doter les différents corps policiers pour qu'ils réalisent leur mission à ce niveau-là. Donc, pour le cannabis médical, en fait les gens disposent déjà d'une prescription avec les taux de THC prévus. Donc, on ne souhaite pas toucher à ça pour les personnes qui en ont de besoin et qui ont une prescription d'un médecin. Pour le cannabis médical, ça demeure, nous, notre proposition.

Là, nous, on parle vraiment du cannabis récréatif. Et, comme ça se faisait dans le vin auparavant, on souhaite imposer le même régime pour dire que, si vous voulez vous approvisionner, bien, vous vous approvisionnez au monopole d'État. Toute autre forme d'approvisionnement est illégale par le biais de sanctions pénales provinciales. Donc, c'est un peu la même démarche qu'avec les bouteilles de vin. Actuellement, si vous voulez avoir du vin, il faut vous approvisionner à la SAQ, donc vous ne pouvez pas importer du vin d'un vignoble en Europe sans passer par la SAQ ou un importateur privé qui est accrédité, ou, si vous le faites vous-même, bien, il faut payer les taxes associées à l'importation de vin. Donc, c'est un peu la même chose que l'on souhaite. On souhaite que le produit qui soit vendu soit contrôlé et on encourage les gens, notamment pour la qualité du produit, à se le procurer dans une des filiales de la SAQ qui serait mise en place, de façon à faire en sorte que la qualité du produit est assurée, la prévention aussi, mais aussi les conséquences suite à cette consommation-là pourront être gérées aussi. Nous, on propose un cadre responsable qui va faire en sorte de s'assurer que le client qui consomme va s'approvisionner dans un approvisionnement de l'État.

Mme Blais (Annabelle) : O.K. Mais, dans les faits, là, la seule piste de solution pour ça, c'est de donner plus d'argent aux corps policiers? De ce que je comprends de ce que vous proposez pour l'instant, c'est ça.

M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, ce n'est pas juste une question d'argent, c'est une question aussi globale, aussi, des conséquences associées à ça. On est face à un débat de société, présentement, et là vous vous retrouvez face à une situation où le Québec doit réagir. On dit : Comment est-ce que les consommateurs québécois vont s'approvisionner? Les gens devraient respecter la loi, puis on les encourage à respecter la loi. À partir du moment où vous ne le faites pas, vous êtes exposés à des amendes, à des sanctions. C'est comme ça que notre régime de droit est fait.

Personnellement, puis à la CAQ aussi, on souhaite que les gens respectent le cadre réglementaire. Et la façon que ça fonctionne, c'est, si vous ne respectez pas le cadre réglementaire, que ce soit en matière criminelle, en matière pénale aussi, vous êtes passible de poursuites, vous êtes passible d'amendes. Les infractions criminelles doivent être poursuivies. Donc, à partir de ce moment-là, nous, on considère que les corps policiers ou les différents intervenants doivent être outillés pour faire leur travail.

Mme Blais (Annabelle) : Ça reste un peu vague.

Le Modérateur : Excuse-moi, j'ai oublié...

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Oui. Donc, votre vision, c'est tolérance zéro au volant. Est-ce que c'est ce que je comprends?

M. Jolin-Barrette : Bien, nous, on considère qu'effectivement les conducteurs ne devraient pas conduire avec des facultés affaiblies. Là, les experts que nous avons entendus tout au courant de l'été nous ont dit : Bien, les appareils de détection doivent être mis à point, puis il faut être capables de mesurer qu'est-ce qu'une conduite avec facultés affaiblies. Mais on considère que les gens qui consomment du cannabis ne devraient pas conduire, pour la sécurité des gens qui se retrouvent sur les routes, effectivement.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Donc, il y aurait zéro tolérance. À partir du moment où on consomme, on ne devrait pas prendre le volant. Il n'y aurait pas une tolérance comme c'est le cas pour l'alcool au Québec en ce moment, au Canada.

M. Jolin-Barrette : Bien, je répondrais à votre question qu'il faut établir la norme avec les experts. Ce n'est pas la même chose que l'alcool. Le cannabis demeure beaucoup plus longtemps dans le système d'un individu, ça fait qu'il faut voir à partir de quel moment il a des facultés affaiblies ou non. Mais, à partir du moment où la ligne sera tracée pour dire : Voici, c'est ça, le standard pour lorsque vous prenez le volant, vous êtes apte à conduite, vous êtes apte à conduire de façon sécuritaire, bien là, à ce moment-là, la ligne qui sera tranchée. Nous, on propose d'être plus sévères qu'avec l'alcool au niveau des sanctions administratives et des sanctions pénales parce que les conséquences que ça a, elles sont dramatiques, de conduire sous l'effet d'un produit comme le cannabis. Donc, le message qu'on envoie, c'est que, si vous fumez du cannabis, on ne souhaite pas que vous preniez le volant. Mais c'est tout aussi important que l'alcool aussi. Si vous conduisez avec des facultés affaiblies dues à l'alcool, c'est un geste qui est criminel.

Le fédéral a proposé que la conduite avec facultés affaiblies avec le cannabis, ça soit un geste criminel. Là, on est plus dans la mécanique. Le taux, ça, ce sont les experts qui vont pouvoir le déterminer. Puis aussi il va falloir travailler avec les corps policiers au niveau de la détection, les appareils de détection puis aussi la formation, parce que vous savez que les policiers, quand ils remplissent, supposons, le... pour remplir le fardeau de preuve aussi, bien, ce ne sont pas tous les policiers qui sont habilités à passer l'ivressomètre sur le bord de la route avec l'appareil de détection autorisé. Oui, ils le font, mais, à partir du moment où la personne est interceptée et il y a des motifs raisonnables de croire que la personne a conduit avec des facultés affaiblies reliées à l'alcool, bien, l'individu est amené au poste de police, et là il y a un agent de police autorisé qui a passé ses formations en détection. Donc, tout ce processus-là aussi, les corps policiers, il va falloir qu'ils s'adaptent, et ça aussi, ça entraîne des coûts importants. Vous savez, actuellement, pour l'alcool, les policiers sont formés à Nicolet à ce niveau-là, donc ça demande des formations importantes. Donc, il va falloir former aussi différents... bien, en fait, les différents intervenants des corps de police par rapport au cannabis pour détecter les facultés affaiblies et les conséquences que ça amène dans le processus judiciaire aussi parce que, bon...

Puis le législateur est intervenu à différentes façons pour modifier la loi au niveau de la preuve pour faire la preuve de conduite avec facultés affaiblies, parce qu'il y avait certains jugements qui excluaient certaines preuves, tout ça, et le législateur est venu fermer certaines défenses possibles au niveau de l'alcool. Donc, nous, on veut un peu la même chose avec le cannabis, de faire en sorte d'outiller les corps de police à ce niveau-là pour, un, la détection, mais aussi les appareils de détection et au niveau de la formation aussi. Mais tout ça, ça coûte de l'argent, puis le fédéral doit compenser les provinces à ce niveau-là parce que c'est son choix unilatéral de légaliser le cannabis. Et donc les conséquences que ça amène, ça amène des coûts financiers importants dans le budget des municipalités, dans le budget du gouvernement du Québec, donc il faut que le fédéral cède son champ fiscal à ce niveau-là.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : C'est quoi, les conséquences qu'on prévoit pour les mineurs qui consomment, qui sont pris en possession de cannabis?

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, en fait, nous, on propose de hausser jusqu'à 21 ans. Donc, vous n'êtes pas mineur, mais on propose, dans le fond, que la vente soit interdite aux mineurs. Le gouvernement fédéral propose qu'on permette aux mineurs d'avoir cinq grammes de 12 à 18 ans. Nous, notre proposition est à l'effet qu'on ne devrait pas permettre aux mineurs d'être en possession de cannabis. Donc, il faut y aller notamment avec de la prévention, et les sanctions pourraient être discutées, là, au cours de l'étude du projet de loi. Mais il y a une chose qui est sûre pour nous, on ne devrait pas faire en sorte que les mineurs puissent être en possession de cannabis.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Ce seraient des sanctions pénales, j'imagine? Est-ce que vous aimeriez qu'il y ait des sanctions criminelles? Je sais que ce n'est pas dans le pouvoir d'une province de le faire.

M. Jolin-Barrette : Non, bien, le fait de criminaliser les enfants n'est pas approprié considérant que ça ne constitue pas un crime pour un adulte. Donc, vous ne pouvez pas, dans un régime légal, imposer un crime pour une catégorie d'individus puis pas pour l'autre, là, ça ne fonctionne pas. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que je pense qu'il va y avoir des conséquences. Cependant, je pense qu'on est beaucoup mieux d'y aller avec la prévention. Mais ça ne devrait pas être acceptable que des jeunes aient en leur possession une quantité de cannabis de cinq grammes. Je pense que ça doit être tolérance zéro puis qu'on doit confisquer le produit qui est dans les mains d'un jeune entre 12 et 18 ans. On ne devrait pas lui permettre d'avoir du cannabis. On devrait lui enlever le cannabis.

Le Modérateur : Jean-Marc Salvet.

M. Salvet (Jean-Marc) : Bonjour à vous deux. Qu'en est-il des teneurs en THC et comment statuer là-dessus?

M. Jolin-Barrette : Oui. Au niveau des teneurs en THC, c'est important de se fier à ce que les experts nous disent. Et là, nous, notre proposition va de concert avec le fait d'avoir une filiale de la SAQ, parce qu'avec un monopole d'État, on va décider qu'est-ce qui va être vendu dans les magasins au détail aux citoyens québécois. Donc, on n'a pas de taux précis par rapport au THC, mais on va pouvoir avoir une approche responsable pour dire : Bien, écoutez, selon les experts de la santé publique, les taux de THC acceptables sont les suivants, et donc la société d'État va pouvoir s'approvisionner auprès des fournisseurs en fonction de son exigence au niveau de la qualité du produit, mais aussi au niveau du taux de THC. Ça, je ne suis pas un expert là-dedans, donc il va falloir se référer aux gens de la santé publique pour déterminer quelles sont les conséquences...

M. Salvet (Jean-Marc) : ...envoyer un signal, donc, et les gens de la Santé publique du Québec pourraient envoyer un signal, et on pourrait s'y fier, quoi? Cest un peu à eux à en faire la suggestion, puis... les recommandations, à tout le moins?

M. Jolin-Barrette : Bien, oui, mais je pense que c'est la même chose, puis la SAQ le fait déjà en termes de produits alcooliques. Dans le fond, ils s'assurent, bon, de la qualité du produit, mais aussi de ce qui est vendu. Donc, c'est un peu la même image qu'on veut faire, mais on veut avoir une approche responsable à ce niveau-là aussi.

M. Salvet (Jean-Marc) : Merci.

M. Lacroix (Louis) : En fait, ce que vous dites, parce que, là, vous présentez tout à l'heure votre projet, vous dites qu'on ne pourra pas consommer en voiture, pas dans la rue, pas dans les espaces publics, pas dans les parcs, pas dans les apparts, pas dans les condos. Bref, on ne peut consommer nulle part?

M. Jolin-Barrette : En fait, vous pouvez consommer à domicile...

M. Lacroix (Louis) : À condition de ne pas être dans un appartement ou dans un condo.

M. Jolin-Barrette : Bien, à condition que vous ayez un bail qui vous permette de consommer ou à condition, si vous achetez une copropriété, que le règlement de l'immeuble le permette. Donc, vous savez, il y a de plus en plus de Québécois qui vivent en copropriété, puis je pense que c'est important aussi, dans un souci de faire en sorte de respecter les droits de tous et chacun, que les syndicats de copropriété décident entre eux est-ce qu'on permet ce type d'usage dans... même si c'est dans une partie privative. Vous savez, déjà, dans les règlements d'immeuble, il y a plein de règlements d'immeuble qui existent, exemple la grosseur des chiens, pas de chien, vous devez le prendre dans vos bras si c'est ça, le critère pour qu'il puisse être…

Mme Lavallée : Se promener dans les parties communes.

M. Jolin-Barrette : ...exactement, se promener dans les parties communes. Donc, il y a déjà une foule de règlements. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est qu'on propose à tous les propriétaires de condos de dire : Bien, la clause grand-père qui va exister, c'est qu'il n'y en a pas, à moins que le syndicat de copropriété l'exige. Parce que, vous savez, il y a toute une mécanique qui s'impose lorsque vous imposez des nouveaux droits, des nouveaux usages, vous avez le vote à passer, et tout ça. Donc, c'est beaucoup plus responsable et utile de passer par une imposition... une interdiction, et par la suite, si le syndicat le veut, bien, il pourra le faire. Mais donc c'est possible de consommer…

M. Lacroix (Louis) : Je comprends les exceptions que vous expliquez, là, mais le principe de votre présentation, c'est de dire : On va tellement limiter la consommation que les gens ne pourront pas, finalement… On va tellement mettre de contraintes, en fait, à la consommation que vous espérez que ça va empêcher les gens de consommer. C'est un peu ça.

M. Jolin-Barrette : Non, ce n'est pas ça. C'est plutôt d'avoir une consommation responsable. Je vous donne un exemple : dans de nombreuses municipalités — supposons, prenons l'alcool — bien, l'alcool, ce n'est pas permis de le consommer sur les voies publiques ou dans les parcs. Vous avez souvent, en vertu du règlement sur la paix, ordre, bon, gouvernement des différentes municipalités, une interdiction de consommer de l'alcool dans les lieux publics ou de consommer sur la voie publique. Donc, c'est un peu la même chose. Mais pour le cannabis, ce que l'on dit, c'est que, oui, c'est permis d'en consommer, mais c'est permis d'en consommer dans des lieux privés.

M. Lacroix (Louis) : Sur un autre sujet… Ah! bien, je vais aller à Marie-Michèle juste avant.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Oui, bien, c'est une question de précision là-dessus, pour les copropriétaires qui voudraient consommer chez eux. Savez-vous comment ça se change, une convention de copropriété?

M. Jolin-Barrette : Comment ça se change?

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Oui.

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, ça se change avec un vote du syndicat de copropriété. Mais, nous, notre proposition…

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Non. Je ne sais pas si vous êtes copropriétaire, mais ça se change en allant chez le notaire. Ça fait que ce que vous sous-entendez, c'est qu'il va falloir passer chez un notaire pour changer une convention de copropriété pour pouvoir consommer de la marijuana chez nous.

M. Jolin-Barrette : Lise, tu veux…

Mme Lavallée : Bien, pas nécessairement parce qu'il y a toujours des assemblées de copropriétaires à tous les ans. Des fois, il y a des assemblées spéciales, puis à ce moment-là les gens peuvent décider de modifier une réglementation.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Mais ça ne sera pas écrit. C'est ce que vous dites, là.

M. Jolin-Barrette : Oui, oui, c'est dans le règlement...

Mme Lavallée : Oui, mais on peut, à ce moment-là, amender la déclaration de copropriété…

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Ça, ça demande l'intervention d'un notaire, là. C'est ça que je vous dis.

Mme Lavallée : Oui, mais il y a toujours quand même… avant de faire la modification pour des copropriétés existantes, c'est de faire des nouvelles assemblées puis de mettre le sujet à l'ordre du jour. Puis à ce moment-là on peut décider que ça devient un nouveau règlement si on a adopté ce règlement-là avec les pourcentages qui sont établis par le Code civil du Québec.

M. Jolin-Barrette : Mais je vous donne un autre exemple, là, à votre question, là, parce que... Je comprends ce que vous voulez dire. Ça serait possible, dans la… Parce que, quand vous avez une déclaration de copropriété, vous allez chez le notaire. Mais la déclaration de copropriété prévoit également… C'est un peu comme une loi avec règlements, là. La déclaration de copropriété, si vous faites le parallèle avec votre loi, là, vous pouvez, dans le fond, établir que c'est possible de faire des règlements, et ça, ce règlement-là n'est pas sujet à une modification par un acte notarié.

Donc, à l'assemblée des copropriétaires, vous avez votre déclaration de copropriété. Supposons, prenons, la déclaration de copropriété qui dirait : Le syndicat peut, par règlement, permettre ou interdire la consommation de cannabis dans les parties privatives. Ça, c'est ce que dit la convention de copropriété. Ensuite, on se transporte à l'assemblée annuelle des copropriétaires, et là l'assemblée a ce pouvoir réglementaire là de régir. Donc, par un vote, par le biais du règlement, ça serait possible de l'autoriser ou de l'interdire. Donc, vous n'aurez pas besoin de passer chez le notaire pour modifier votre déclaration de copropriété parce que la déclaration de copropriété vous habilite, par voie réglementaire, à le faire en assemblée et donc, là, ça respecte la volonté des copropriétaires dans le cadre d'une assemblée générale de copropriété. Donc, vous n'aurez pas besoin d'aller chez le notaire amender votre déclaration de copropriété.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Je ne veux pas faire un débat sur le notariat, mais ça implique que cette clause-là soit là au départ, ce qui n'est pas le cas en ce moment, puisque le cannabis n'est pas légal.

M. Jolin-Barrette : Non.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Mais je vais laisser Louis continuer, là, parce que je ne veux pas...

M. Jolin-Barrette : Bien, juste sur votre point, c'est le sens de notre proposition. Nous, ce qu'on dit, c'est que, pour toutes les copropriétés existantes, O.K., on dit : Ce n'est pas permis, O.K.? On intervient dans le droit privé et on propose de dire : Ce n'est pas permis dans une copropriété de consommer du cannabis, à moins que les copropriétaires le permettent par le biais d'un règlement en assemblée générale annuelle. Donc, il n'y a pas de nécessité pour les copropriétés existantes de retourner nécessairement chez le notaire. S'ils veulent le faire pour l'incorporer dans la déclaration de copropriété, bien, ils le feront. Mais ce n'est pas absolument nécessaire si on leur donne les outils en ce sens-là. Pour les nouvelles copropriétés, ils pourraient déjà le prévoir lorsqu'il y a l'acte constitutif de la convention de copropriété. À ce moment-là, ils pourraient le faire.

Donc, l'idée, là, ce n'est pas de mettre les copropriétaires devant le fait accompli, mais plutôt de leur donner les outils pour contrôler, parce que, vous savez, lorsqu'il y a des changements à un immeuble lors d'une assemblée générale, parfois c'est houleux, ça peut être compliqué Donc, actuellement, c'est interdit. Donc, on suggère, s'ils veulent le faire, qu'ils puissent le faire en tout respect des différents copropriétaires.

M. Lacroix (Louis) : La question qu'on doit poser à ce moment-ci, je pense, c'est : Est-ce que vous avez déjà consommé du cannabis, M. Jolin-Barrette?

M. Jolin-Barrette : Moi? Non, jamais.

M. Lacroix (Louis) : Et vous, Mme Lavallée?

Mme Lavallée : Oui.

M. Lacroix (Louis) : Ah oui?

Mme Lavallée : Plus jeune.

M. Lacroix (Louis) : Plus jeune?

Mme Lavallée : Plus jeune.

M. Lacroix (Louis) : Et malgré ça, vous êtes contre la légalisation?

Mme Lavallée : Bien, c'est parce que ce qu'on parle, c'est d'encadrer sans banaliser ni encourager, puis je pense que c'est là, le défi qu'on avoir, c'est de protéger les jeunes, c'est ce qui est ressorti dans le forum des experts puis les différentes consultations. En bas de 25 ans, il y a des dangers pour la santé mentale, puis je pense qu'il faut...

M. Lacroix (Louis) : Non, je comprends, mais c'est parce que la position de la CAQ, c'est d'être contre la légalisation du cannabis. Alors, vous qui avez déjà consommé, est-ce que vous partagez cette position-là?

Mme Lavallée : Oui, oui, je suis très à l'aise avec ça.

M. Lacroix (Louis) : D'accord. Merci.

Le Modérateur : Pascal avait une dernière question.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : On parle, là, pour les copropriétés, de fumer du cannabis ou de le consommer? C'est-à-dire est-ce qu'on a le droit de se faire des brownies à la maison si on est dans un condo?

M. Jolin-Barrette : C'est une question...

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Importante, pertinente?

M. Lacroix (Louis) : Gastronomique.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Parce que la seule façon de le consommer, ce n'est pas juste de le fumer, là, puis l'idée, c'est de ne pas déranger ses voisins en fumant. Mais, je veux dire, si je fais du brownie chez nous, mes voisins ne vont jamais le savoir.

M. Jolin-Barrette : Effectivement. Nous, dans notre perspective, de la façon dont on l'avait analysé, c'est au niveau des conséquences au niveau de la fumée.

M. Lacroix (Louis) : Et, juste pour terminer, M. Couillard, tout à l'heure — sur un autre sujet — a mentionné qu'il voulait redonner une espèce de renouveau à son gouvernement en faisant le changement de garde qu'on a vu à son bureau, là, avec M. Jean-Louis Dufresne. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Il a dit entre autres que c'était une espèce... qu'on était passés maintenant de la phase de restauration à une phase où il fallait progresser, là, avec le gouvernement. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, on va laisser les libéraux réparer les pots cassés chez eux. Mais, manifestement, le départ de M Jean-Louis Dufresne répond à une certaine grogne de la part du caucus libéral, et ultimement c'est la responsabilité de Philippe Couillard. On constate qu'il y avait du mécontentement contre Philippe Couillard à son caucus comme dans la population.

Mme Blais (Annabelle) : Juste une petite question. Là, on parlait de Jean-Louis Dufresne, et on sait qu'il va quand même... on a compris hier qu'il allait rester proche du premier ministre. Est-ce que vous souhaitez que les rencontres comme ça de... peut-être de genre de... peut-être de conseiller informel soient inscrites dans les agendas de ministres puis dans les données qui sont publiques sur le Web?

M. Jolin-Barrette : Bien, tout à fait, tout à fait parce que, quand vous allez à transparence.gouv.qc.ca, tout ce que vous voyez dans les rencontres, généralement, là, des ministres, là, supposons le mercredi, c'est la période de questions puis le Conseil des ministres.

Le gouvernement Couillard avait dit : Nous allons être le plus transparent. J'ai posé des questions à la ministre de l'Accès à l'information lors des crédits budgétaires là-dessus notamment, et elle a de la difficulté à convaincre ses collègues, et c'est véritablement une problématique, et ça avait été mis en place par leader du gouvernement, Jean-Marc Fournier, et le gouvernement n'est pas transparent du tout.

Donc, oui, c'est souhaitable que, dans tous les agendas, on sache qui les ministres rencontrent, pourquoi ils les rencontrent. Toutes les communications d'influence doivent être rendues publiques. Et actuellement on constate que les ministres du gouvernement de M. Couillard ne le font pas. Donc, c'est important que les agendas soient publics. Et, si Jean-Louis Dufresne reste dans l'entourage, bien, on souhaite le savoir aussi, et quelle est la nature de son poste.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Pensez-vous que votre performance dans les sondages a un peu poussé M. Couillard à vouloir lancer une transformation au sein de son parti?

M. Jolin-Barrette : Je ne pourrais pas vous dire. Je ne suis pas au caucus libéral, là.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Vous êtes prudent.

Des voix : Ha, ha, ha!

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Merci.

M. Jolin-Barrette : Merci à vous. Bonne journée!

(Fin à 11 h 55)

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