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Point de presse de M. Carlos J. Leitão, ministre des Finances

Version finale

Le vendredi 10 novembre 2017, 12 h

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Douze heures six minutes)

M. Leitão : Alors, mesdames messieurs, bonjour. Merci d'être là. Aujourd'hui, j'ai déposé un rapport assez important en réponse au rapport, qui était aussi très important, de la Commission des finances publiques qui nous a été donné… qui nous a été remis en mars de 2017 et qui avait une série de recommandations pour adresser la question très importante, qui nous concerne tous, de l'évasion fiscale et de l'évitement fiscal.

Alors, dans le rapport que nous avons déposé aujourd'hui en réponse à la commission et dont, je suis sûr, M. Bernier, le président de la commission, va prendre le temps de l'analyser avec les membres de la commission, dans ce rapport, ce que… je peux juste vous rappeler rapidement, nous l'orientons sur cinq grands objectifs : premièrement, de percevoir la taxe de vente dans un contexte d'économie numérique — on a parlé amplement dernièrement à cet égard-là; deuxièmement, de récupérer les montants dus au titre de l'impôt sur le revenu des sociétés; troisièmement, de récupérer des montants aussi importants et dus au titre de l'impôt sur le revenu des particuliers; quatrièmement, c'est important, de renforcer la transparence fiscale, un sujet qui concernait beaucoup la Commission des finances publiques; et finalement, cinquièmement et non pas le dernier, de mettre en place des moyens qui vont bloquer l'accès aux contrats publics, contrats gouvernementaux aux entreprises et particuliers participant à des stratégies d'évitement fiscal, y compris le recours aux paradis fiscaux.

Donc, ça, c'est un bref résumé d'un rapport très, très complet. Nous jugeons que ce plan d'action… bon, ce plan d'action contient 14 mesures concrètes, efficaces, à notre avis, qu'on va commencer à déployer dans la nouvelle année. Certaines de ces mesures nécessiteront des changements législatifs, donc on va aussi faire ça. Probablement dans le budget qui aura lieu quelque part en mars 2018, on trouvera ces mesures législatives là.

Donc, moi, je m'arrête ici. Je ne pense pas que l'objectif soit de faire un très grand discours.

Une voix : ...

M. Leitão : Donc, je suis accompagné aussi, bon, de M. Bernier, bien sûr, le président de la Commission des finances publiques, et aussi de mon adjoint parlementaire, M. Saul Polo.

M. Bergeron (Patrice) : M. Leitão, comment va fonctionner la nouvelle unité spéciale dont vous avez parlé? Quand est-ce qu'elle sera mise en place, combien de personnel va être dans cette unité-là, où elle va travailler, etc.?

M. Leitão : Il y a déjà un groupe, à Revenu Québec, de 80 personnes qui existe déjà. Ce groupe-là, jusqu'à maintenant, se concentrait surtout sur la fiscalité des entreprises, donc un groupe spécial, donc, sur la récupération de l'impôt corporatif. Ce groupe-là va être amélioré et augmenté pour s'occuper aussi de la récupération fiscale provenant des particuliers. Et puis aussi Revenu Québec va commencer, parce que nous l'avons déjà demandé, à concrétiser ce nouveau régime d'inscription simplifié pour qu'on puisse, en 2018, le plus rapidement possible, mettre ça en place pour forcer les entreprises numériques à s'inscrire et donc percevoir la TVQ.

M. Gagnon (Marc-André) : Pour les biens tangibles, pourquoi devez-vous passer par les services... les douanes?

M. Leitão : Le service transfrontalier, l'agence canadienne. Écoutez, parce que, et ça, ça s'inspire... Il y a deux aspects. Ça s'inspire, bon, des travaux, des réflexions de l'OCDE, qui recommande une telle approche, mais aussi de la réalité. La réalité est telle qu'il y a des milliers, des milliers et des milliers de fournisseurs. On parle beaucoup seulement des grands géants, mais, écoutez, vous n'avez qu'à aller sur le Web, il y a des fournisseurs partout, au Vietnam — où se trouve maintenant notre premier ministre canadien — en Chine, en Europe, en Afrique, en Asie, au Portugal, même au Portugal. Donc, il y en a, des fournisseurs partout, donc c'est physiquement impossible pour Revenu Québec de «monitorer», si un tel mot existe — M. Robillard, vous me pardonnerez — donc de suivre de très près tous ces fournisseurs-là. Donc, c'est pour ça... et ce que l'OCDE recommande, que le contrôle se fasse à la frontière. Donc, c'est à la frontière que les agences de douanes, mais aussi... pas les agences, mais les services de livraison, les UPS de ce monde, Postes Canada, etc., qui travaillent, eux, avec l'agence canadienne des services transfrontaliers, donc, c'est là qu'on doit identifier le produit et nous assurer que la TVQ est perçue.

M. Gagnon (Marc-André) : Qu'est-ce que vous allez faire avec l'argent qui sera donc ainsi récupéré, tant la TVQ que la TPS? On comprend que vous allez envoyer un chèque au fédéral, là, mais...

M. Leitão : Écoutez, la TPS ne nous appartient pas, donc on ne peut pas la garder.

M. Gagnon (Marc-André) : Mais la TVQ, donc qu'est-ce que vous allez faire avec?

M. Leitão : La TVQ, ça va aller comme tout... comme la TVQ, les 16 milliards de TVQ, cela va dans le fonds général du revenu du gouvernement.

M. Bergeron (Patrice) : Comment ça va fonctionner, l'argent que vous allez donner à l'Agence des services frontaliers du Canada?

M. Leitão : Non, non, écoutez, ça, c'était un peu avec un peu d'exaspération parce qu'il y a eu un des arguments qu'on nous servait des fois, c'était dire : Mais, écoutez, on n'a pas vraiment toute la technologie appropriée, on n'a pas encore déployé toute la technologie pour pouvoir faire le suivi des colis qui rentrent. Et moi, j'ai dit : Écoutez, si c'est un problème de machines, là, je vous paie les machines. C'est un peu dans cet état d'esprit là que j'avais fait la suggestion. J'étais un peu exaspéré, là.

M. Bergeron (Patrice) : Votre collègue, en interpellation, a fait référence à des travaux exploratoires qui ont déjà commencé. Donc, on serait déjà prêts à envoyer des enveloppes au fédéral pour lui payer des meilleures machines?

M. Leitão : Non, non. Ce qu'on dit, c'est : Si ça, c'est l'obstacle, si l'obstacle, c'est une certaine lenteur dans le... Parce qu'ils ont un plan de déploiement, Postes Canada, et tout. Ils ont un plan de déploiement d'équipement optique, et tout, pour pouvoir arriver à ça. Et, dans leur plan de déploiement, moi, je le trouve un peu lent en ce qui concerne les grands entrepôts au Québec, surtout à Montréal. Et si, dans ce plan de déploiement là, l'enjeu est un de disponibilité financière, le gouvernement du Québec est prêt à considérer un moyen, là, pour qu'on puisse avancer avec ça.

M. Boivin (Mathieu) : M. le ministre, c'est difficile à admettre pour un contribuable que le Québec perçoive la TPS sur le commerce électronique, alors même que le gouvernement fédéral, dans le dossier de Netflix à tout le moins, a dit qu'il ne souhaitait pas la percevoir. Vous nous avez laissé entendre hier que vous n'aviez pas le choix. Vraiment, c'est la seule réponse qu'on puisse avoir?

M. Leitão : S'il n'y a pas une indication formelle de la part du gouvernement fédéral qu'en effet il ne souhaite pas taxer telle compagnie ou tel secteur, donc si on n'est pas notifiés formellement que le gouvernement fédéral ne souhaite pas faire ça, nous, on n'a pas le choix. L'administration de la taxe de vente au Québec, TPS, TVQ, est faite par Revenu Québec, donc, si l'autre gouvernement ne nous dit formellement qu'il ne veut pas qu'on perçoive la TPS, nous, on doit la percevoir. S'ils nous disent formellement qu'ils veulent se retirer, bon, ça, c'est une autre chose.

M. Boivin (Mathieu) : Vous attendez-vous à ce que ce soit fait ou attendez-vous des... Demanderez-vous, vous, des clarifications pour ne pas vous retrouver dans le rôle de percepteur involontaire d'une taxe dont l'autre... Allez-vous prendre...

M. Leitão : Il va falloir adresser cette question, et c'est pour ça que je vous dis : J'ai envoyé la lettre cette semaine, et donc il y a une période de 60 jours où on va attendre maintenant la réponse détaillée du gouvernement fédéral. On verra à la fin de ces 60 jours là. Ce que je dis, c'est que nous sommes prêts à avancer seuls si le gouvernement fédéral souhaite ne pas le faire. Nous jugeons toujours que ça serait plus efficace si on agissait ensemble de façon coordonnée, mais, bien sûr, ils ont leurs priorités, ils choisiront. Mais il faut qu'ils nous le disent aussi formellement : Ne percevez pas la TPS sur tel et tel...

M. Boivin (Mathieu) : Mais ça reste à clarifier, bien entendu, parce que c'est difficile d'imaginer qu'un chèque se promène sans qu'il y ait quelqu'un pour le recevoir à l'autre bout, là.

M. Leitão : Mais, regardez, pour toute la TPS sur tous les autres biens et services, c'est Revenu Québec qui administre ça. Donc, Revenu Québec envoie ça à Ottawa. Alors, si, pour ces services en particulier, le gouvernement fédéral décide...

Parce que ce qui est important de constater, c'est que ce service-là, donc ce n'est pas une nouvelle taxe. Ce service-là, il existe, bien sûr, et il est taxable. Maintenant, si le gouvernement fédéral décide qu'il ne veut pas imposer sa taxe à ce service-là, il faut qu'il nous le dise formellement. Comme ça, nous, il va falloir exclure ça de la perception de...

M. Boissonneault (Alex) : Qu'est-ce que ça entraîne, M. le ministre, en termes de changements législatifs? Le plan d'équité que vous avez présenté, ça va nécessiter des changements législatifs aussi ou c'est un plan exécutif?

M. Leitão : Le plan d'équité?

M. Boissonneault (Alex) : Le plan d'équité que vous avez présenté, est-ce qu'on va devoir changer, proposer quelque chose légalement?

M. Leitão : Certains éléments requièrent des changements législatifs, particulièrement en ce qui concerne la taxe de vente, si on veut un effet... pas «si on veut», on veut y aller seuls, si c'est le cas. Alors là, oui, ça, ça demande des changements législatifs, pas seulement des changements administratifs.

Pour ce qui est de...

M. Boissonneault (Alex) : La même chose pour la lutte à l'évitement fiscal, à l'évasion fiscale, l'ensemble des mesures?

M. Leitão : L'ensemble des mesures, non. Il y a certaines mesures qui requièrent un changement législatif, mais pas toutes les mesures.

M. Robitaille (Antoine) : Dans le projet de loi d'Amir Khadir et de Québec solidaire, qu'est-ce que vous seriez prêt à retenir, qu'est-ce que vous seriez prêt plutôt à laisser de côté?

M. Leitão : Écoutez, je partage entièrement le diagnostic, pour employer un terme que M. Khadir connaît très bien — et d'ailleurs il a fait allusion à ça — je partage entièrement le diagnostic, et nous voulons arriver à la même destination que lui, mais je ne partage pas du tout le remède qu'il a proposé. Il nous dit que le remède qu'il propose est très efficace; au contraire, nous jugeons que le remède qu'il propose... Je ne vais pas... Écoutez, ce n'est pas une question de vouloir diminuer qui que ce soit, mais le remède qui est proposé par Québec solidaire... Et ils ont bien réfléchi à ça. Je ne veux pas non plus dire qu'ils ont juste inventé ça. Non, non, ils ont bien réfléchi, ils ont demandé des conseils à des personnes très réputées, je ne remets pas en question cela, mais le remède qui est proposé est non applicable. Il ne peut pas s'appliquer. Et il y a plusieurs éléments qui entrent en considération. Un dont on a parlé beaucoup ici dans l'interpellation, c'est donc de faire percevoir la TVQ par les fournisseurs de services de paiement, dont les cartes de crédit et PayPal, donc c'est impossible, c'est physiquement impossible de le faire. J'aimerais bien, là, ça réglerait beaucoup de choses, mais ça ne peut pas se faire, alors il faut trouver d'autres moyens. Il y en a d'autres, éléments, et particulièrement celui qui me préoccupe le plus, parce que c'est quand même important, c'est que c'est une approche qui est très unilatérale.

Alors, notre régime fiscal canadien, c'est une approche qui est collaborative, Revenu Québec et Revenu Canada fonctionnent beaucoup ensemble. Nous avons beaucoup à gagner à être le plus harmonisé possible, et l'avenue qui nous est proposée par Québec solidaire, c'est une avenue unilatéraliste qui, à mon avis, comporte beaucoup plus d'aspects négatifs que de bénéfices possibles.

La Modératrice : Peut-être une dernière question avant de passer en anglais.

M. Robitaille (Antoine) : Au début du mandat, vous aviez demandé à Mme Robillard de faire une révision, là, de l'État, au fond, et elle avait proposé qu'on transfère à l'Agence du revenu du Canada la perception des taxes. Au fond, on voulait presque se débarrasser de Revenu Québec. Si vous aviez adopté cette recommandation-là, qu'est-ce qu'il en serait aujourd'hui de la possibilité pour le Québec de faire des choix?

M. Leitão : On ne serait pas ici en train de discuter de ces enjeux-là.

M. Robitaille (Antoine) : C'est ça, hein? Donc, c'est pour ça que vous n'avez pas... pour garder l'autonomie fiscale.

M. Leitão : Absolument. Absolument. Vous avez tout à fait raison, oui.

M. Bergeron (Patrice) : Une petite dernière pour vous, concernant la fiscalité. Le fédéral a reparlé du cannabis aujourd'hui, la taxe sur le cannabis, il est arrivé avec la même proposition.

M. Leitão : Ah! quel plaisir.

M. Bergeron (Patrice) : Je voulais savoir : Est-ce que vous avez une réaction? Est-ce que vous voulez vous situer par rapport à la façon dont il voulait faire la taxe d'accise sur le cannabis?

M. Leitão : Excusez-moi, vraiment, j'étais en interpellation, je n'ai pas suivi.

M. Bergeron (Patrice) : En fait, le fédéral est revenu avec la même proposition que ce qu'il avait déjà fait à propos de la taxe d'accise sur le cannabis. En quoi, donc, cela implique pour vous des décisions à prendre, des choix à faire?

M. Leitão : Je pense qu'on est loin d'une décision finale. Nous allons avoir, d'ailleurs... je vous donne un scoop qui n'est pas un scoop, vous le savez probablement, mais le 11 et le 12... non, le 10 et le 11 décembre à Ottawa, il va avoir une réunion fédérale-provinciale des ministres des Finances. Un des sujets à l'agenda, et probablement le plus important, c'est la taxation du cannabis, et on va en discuter longuement. On n'est pas rendus là.

La Modératrice : En anglais.

M. Leitão : Yes. Merci beaucoup, hein?

Mme Montgomery (Angelica) : I'd like to ask you about a couple of important points that you have brought up. You talked about creating a special unit to go over data. What kind of data do you think you would have available and how would this unit work?

M. Leitão : Excellent question. We have lots of data. The unit exists already, but its focus, its mission is basically just corporate income taxes, so to look at the corporate income tax and possible tax evasion amongst the businesses. We are going to beef up this unit so that it also tracks personal income taxes, and personal tax evasion, and tax avoidance. It's not the same thing, but it's important. So, it's going to… It's not a new unit, it's an existing unit that is going to be beefed up.

Now, what kind of information? From two sources. One is from you, from the media. And by that I mean, for example, the Paradise Papers. The Paradise Papers, as I understood from your colleagues at CBC, is going to be made public. It's going to be published, I think, on your website, November 14th. That's a huge mine of information that is going to reveal many things. And I think tax authorities everywhere, including, of course, Revenu Québec, are going to be very interested in taking a good look at this new source of information. And there might be other leaks in the future. Who knows? So, that's one source of information.

Another one, and that's equally important, perhaps even more important, is, in the context of the work being done by the OECD and the agreement between the different countries, the sharing of information. So, other jurisdictions, and not just Revenu Canada, but other jurisdictions elsewhere will start sharing information with the different tax authorities, the end, really, which is what it's going to be, the end of the «secret bancaire», the banking secrecy. A lot of people will always say : Well, you know, I can't really help you because there are bank-secrecy laws in country x, y and z, so we can't give that information. Well, with the work being done by the OECD, the different countries have signed on to this, that's the end. From, I think, July 1st of 2018 — I'll have to check the date on that, but it's around that — it'll be the end of banking secrecy, and tax authorities all over the OECD member countries will be able to have access to this information. So, there will be a lot more information available, and so the tax authorities, including Revenu Québec, need to have the resources and the teams to analyse and fully utilise this information because, in tax matters, information is the key. Long answer, sorry about that.

La Modératrice : Dernière question.

Mme Montgomery (Angelica) : And I just want to ask as well : When we talk about taxing at the border, one, is this not already done, to some extent? And then secondly, how do we start to differentiate between a good that's being bought and a good that is… you know, you forgot your mittens in Florida and somebody is sending them back to you?

M. Leitão :OK. Yes, that's one of the complexities of this thing. Well, the… Sorry, what was your first question? It's been a long day.

Mme Montgomery (Angelica) : Is this not already being done, in some way?

M. Leitão : Yes. No. It is being done in some ways, yes, but that's precisely the point, it is not being done with sufficient rigour, it's not being done as completely as it should. So, therefore, you know, what we have asked Revenu Canada… not Revenu Canada, the Canadian Border Services Agency, is for them to fulfill their mission. They have the mission, they have the mandate to collect the taxes at the border, and, so far this collection of taxes at the border is a little… you know, is not complete. And so, they should be more… you know, they should do it better, they should dedicate… It's not because they don't want to do it, it's a question of resources, we are told. So, they should put the sufficient resources into this to make sure that their mandate is fulfilled.

La Modératrice : Merci.

M. Leitão : OK? Merci beaucoup. Thank you. Gracias. Obrigado.

(Fin à 12 h 25)

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