(Onze heures trente-deux minutes)
Mme Lamarre : Bonjour. Alors,
ce matin, je tiens à saluer l'ouverture qui a été conclue entre le Collège des
médecins et les physiothérapeutes pour leur permettre de demander des
radiographies, donc d'émettre des ordonnances pour un examen comme la
radiographie.
Le 30 août, nous avons fait, au Parti
québécois, une annonce officielle de notre plan santé, et clairement les
physiothérapeutes étaient cités comme étant des professionnels dont on pouvait
décloisonner les actes et leur permettre de prescrire des radiographies. Alors,
on se réjouit. Ça va exactement dans le sens de ce qu'on a promu et de ce qu'on
recommande. Maintenant, il faudrait le faire pour beaucoup d'autres, on l'a
dit, pour les superinfirmières, pour les psychologues, pour les travailleurs
sociaux, pour les infirmières bachelières. Donc, il faut aller dans cette
direction-là. Sinon, on ne résoudra jamais notre problème de première ligne.
Maintenant, ce qui est frappant, c'est la
résistance du ministre Barrette, clairement un ministre de la Santé qui n'a pas
vu venir ça et qui n'est pas du tout, du tout favorable à ça. On a reconnu la
même résistance qu'il a exprimée à maintes reprises sur la clinique SABSA qui
donnait, dans le fond, aux superinfirmières la possibilité de poser certains
actes et d'avoir une certaine autonomie, alors une résistance à cette
autonomie. Et nous, on dit : Bien, il faut vraiment permettre qu'il y ait
plus qu'une porte d'entrée aux soins en santé. Les portes d'entrée dans le
système de santé ne doivent pas être exclusivement le médecin, mais elles
doivent absolument passer par d'autres professionnels qui ont des compétences,
qui ont des champs d'exercice, qui ont des limites et qui doivent donc
travailler à l'intérieur de ça, mais ne pas restreindre les compétences de ces
professionnels-là.
Ce qui est un peu inquiétant quand on lit
un peu l'article... on va suivre de près les modifications législatives
qui sont prévues, mais c'est l'obligation du corridor de services. Alors,
ça, ça peut laisser croire que ça va prendre absolument une autorisation
médicale, une forme de délégation aux physiothérapeutes pour que les
physiothérapeutes puissent effectivement demander des radiographies, et, pour
nous, ce n'est pas nécessaire. Alors, je prends l'exemple d'un physiothérapeute
qui serait installé... il y en a des cliniques à côté d'un cégep, où il y a
beaucoup de blessures sportives, bien, c'est sûr que ce physiothérapeute-là
devrait, même s'il n'y a pas de médecin à proximité, avoir la possibilité de
demander des radiographies et pouvoir, à ce moment-là, traiter les jeunes quand
la radiographie revient puis si elle est négative.
Dans le fond, ce qui est intéressant pour
les physiothérapeutes, c'est de s'assurer qu'il n'y en a pas de fracture. C'est
beaucoup ça, parce que, quand il n'y a pas de fracture, eux peuvent faire des
interventions au niveau musculaire qui sont vraiment très sécuritaires, mais
l'exclusion de la fracture doit être faite. C'est vrai aussi pour des personnes
âgées qui auraient des... une chute, on ne sait pas s'il y a une fracture, s'il
y a une fracture de côte, des choses qui sont moins facilement visibles aussi,
donc des diagnostics qu'on doit vérifier et que le physiothérapeute va pouvoir,
par l'exclusion d'une radiographie qui dirait : il n'y a pas de fracture,
bien là, il va pouvoir traiter de façon beaucoup plus efficace.
Donc, nous, on veut qu'il y ait
effectivement des relations et de l'interdisciplinarité, mais, si on met
absolument l'obligation qu'un médecin ait autorisé le physiothérapeute à chaque
fois pour pouvoir demander cette radiographie-là, on restreint encore et on
ramène toujours à l'obligation d'avoir le médecin qui est au-dessus de la
pyramide. Nous, on pense que l'interdisciplinarité, c'est quelque chose qui est
beaucoup plus transversal au même niveau, et qu'il y a une collaboration, et
que ce physiothérapeute-là, s'il a un résultat où il y a une fracture, bien,
c'est sûr qu'il va référer au médecin, mais il n'a pas besoin d'avoir une
autorisation préalable d'un médecin avant de pouvoir prescrire cette radiographie-là.
Et ça, clairement, ça augmenterait l'amélioration
de l'accessibilité et le début des traitements beaucoup plus rapidement pour
des gens. On se rappelle qu'on a encore 22 % des Québécois qui n'ont pas
de médecin de famille. Alors, pour eux, la seule option, à ce moment-là, c'est vraiment
le recours à l'urgence pour des situations qui ne justifient pas le recours à
l'urgence.
Donc, on se réjouit, on est contents. On
note très clairement la résistance du ministre à ce moment-ci. On va surveiller
de près comment ça va entrer en vigueur. Et, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il
faut vraiment aller, mais vraiment avec beaucoup d'intensité vers ce
décloisonnement des professionnels. On a beaucoup de professionnels très
compétents, très bien formés au Québec, et il faut leur donner la latitude et
l'autonomie pour pouvoir régler des problèmes.
M. Dion (Mathieu) : Est-ce que
ça va être clair, dans la tête des gens, que, s'ils ont une blessure qui est un
peu plus grave, qu'ils doivent se tourner vers l'urgence et non chez un physiothérapeute,
en sachant que le physiothérapeute... parce que ça peut-être aller plus vite,
tu sais. Est-ce que ça va être clair dans la tête des gens, ça?
Mme Lamarre : Bien, moi, je
pense que oui. Quand les gens ont une blessure, d'ailleurs spontanément,
plusieurs d'entre eux, si on pense aux blessures sportives, là, clairement, les
gens se dirigent beaucoup plus rapidement chez un physiothérapeute qu'à
l'urgence d'un hôpital. Alors, c'est clair que cette ouverture-là... et d'ailleurs
il y a des disponibilités. Les physiothérapeutes sont beaucoup plus rapidement
et facilement accessibles. Alors, c'est facile d'avoir un rendez-vous chez un
physiothérapeute.
Ce qui limite le physiothérapeute, c'est
que parfois il dit : Bien, moi, je ne peux pas commencer le traitement
parce que, s'il y a une fracture, je ne veux pas, par mes manoeuvres, accentuer
ou engendrer quelque chose de plus grave. Donc, j'ai besoin d'avoir cette radiographie-là.
Si le patient se rend pour une radiographie et qu'il y a fracture, on va le
diriger vers la bonne référence, qui sera l'urgence. Mais, à ce moment-ci, je
vous dirais même qu'on devrait développer d'autres lieux que l'urgence
hospitalière pour qu'on puisse faire des plâtres à des gens. Il y a beaucoup
d'autres endroits. Quand il s'agit de fracture de côte, on n'a pas besoin de
faire de plâtre, il n'y a pas de plâtre. Il y a un certain contrôle au niveau
de la mobilité qui est recommandé tout simplement.
Mais donc, dans les cas où il n'y a pas de
fracture, on revient immédiatement chez le physiothérapeute qui peut commencer
le jour même les traitements de physiothérapeute.
M. Dion (Mathieu) : C'est
juste que ça va être dur pour les gens, par exemple, de dire : Bon, je
vais-tu chez le physio ou à l'urgence en fonction de la blessure que j'ai? Tu
sais, est-ce que ça va être clair, dans la tête des gens, où est-ce qu'ils
doivent aller, sachant que ça peut être plus facile chez le physiothérapeute
d'avoir une radiographie? C'était ça, ma...
Mme Lamarre : Moi, je suis
convaincue que les gens vont, quand ils vont savoir que ça existe, aller chez
le physiothérapeute rapidement et préférer entrer là en sachant qu'ils ont un
grand pourcentage de chances de pouvoir commencer le traitement tout de suite,
alors que, s'ils passent par l'urgence, eh bien, évidemment, même s'il n'y a
pas de fracture, en passant par l'urgence, on se rend compte que, là, il va
falloir repasser vers le physiothérapeute.
Moi, je crois sincèrement que les gens
vont adopter rapidement le recours au physiothérapeute. En tout cas, dans les
blessures sportives, sans hésitation, parce que spontanément, les sportifs,
c'est ce qu'ils font. Les jeunes, les sportifs, les équipes de sport réfèrent
rapidement, lorsqu'il y a une blessure pendant un sport, on réfère les gens au
physiothérapeute. Malheureusement, c'est là que ça bloque parce qu'il faut
qu'on passe par la longue attente à l'urgence.
Alors, il faudrait probablement qu'il y
ait des corridors avec des réseaux privés de radiographie, des cliniques
privées de radiographie qui rembourseraient, que les gens n'auraient pas besoin
de rembourser, mais qui feraient en sorte qu'on offrirait un accès rapide hors
hôpital à l'examen radiologique.
M. Dion (Mathieu) : Est-ce que
ça ne risque pas non plus d'engorger, qu'il y ait trop de demandes de
radiographie justement à terme? Parce que, là, les physiothérapeutes vont
pouvoir le faire, les médecins aussi. Peut-être que les médecins étaient plus
prudents de faire des demandes de radiographie. Est-ce que ça ne pourrait pas,
justement, faire en sorte qu'il y ait trop de radiographies qui sont inutiles, par
exemple?
Mme Lamarre : Vous savez, chaque
professionnel a ses règles, et les normes, et les règles de conduite, et les
lignes directrices de traitement et de prescription, elles sont les mêmes.
Actuellement, on parle beaucoup de surdiagnostic et de surtraitement, et il n'y
a que les médecins qui prescrivent et qui traitent.
Alors, quand on va avoir des
physiothérapeutes, ces physiothérapeutes-là vont être soumis à des lignes
directrices de traitement, et on ne demandera pas une radiographie s'il y a
telle ou telle condition. Donc, c'est présumer que d'autres professionnels que
les médecins ne sont pas capables d'avoir une pratique qui est balisée. Alors,
leur ordre va avoir à contrôler, et, s'il y a une mauvaise prescription de ces examens-là,
une surprescription... mais je vous réaffirme que déjà il y en a du côté des
médecins, puis on ne se questionne pas à retirer le droit de prescrire des
radiographies aux médecins, hein?
Alors, je pense qu'on a un travail de
balise à faire auprès de tous les professionnels à qui on donne une certaine
ouverture au niveau de leurs actes. Ça va pour les physiothérapeutes, ça va
pour les superinfirmières, ça va pour les médecins, ça va pour les pharmaciens,
ça irait pour les psychologues qui prescriraient des médicaments, par exemple.
Alors, il y a des normes à respecter pour ça, mais ce qu'on sait c'est
qu'actuellement la porte d'entrée des gens est le Ritz-Carlton. C'est toujours
l'urgence qui coûte le plus cher. Alors, les consultations, quand les gens
passent par l'urgence d'un hôpital, ça coûte entre 250 $ et 500 $
pour avoir ce premier épisode de traverser le triage et puis d'avoir ensuite un
premier contact avec un médecin. C'est anormal et ce sont des coûts inutiles,
c'est de l'argent mal utilisé dans notre système de santé.
(Fin à 11 h 42)