(Neuf heures trente et une minutes)
M. Ouellet : Merci
beaucoup. Alors, bonjour, tout le monde. Nous sommes ici ce matin pour faire un
peu le suivi des suites de la commission Charbonneau. Nous l'avons vu, la
semaine passée, dans les médias, un groupe d'experts, six au total, font le
suivi de l'application des recommandations de la commission Charbonneau par le
gouvernement libéral en place. Et, dans l'article en question, oui, on nous
parle qu'on a fait certaines avancées, mais ce qui a attiré notamment notre
attention, c'est la partie du monde municipal.
Écoutez, depuis que je suis porte-parole
des affaires municipales, nous talonnons le ministre pour, effectivement,
obtenir, dans différents projets de loi, une protection pour les lanceurs
d'alerte, mais aussi une protection et l'inclusion des vérificateurs généraux
dans les municipalités. Le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation
du territoire nous rappelle, à chaque projet de loi qu'il dépose, que ça
viendra dans un nouveau projet de loi.
Alors, aujourd'hui, ce qu'on est venus
dire au ministre, ce sont nos attentes par rapport aux suivis de la commission
Charbonneau, mais surtout les attentes par rapport à l'intégration des
vérificateurs généraux dans les municipalités de plus de 100 000 habitants
et surtout une mesure de protection pour les lanceurs d'alerte.
Donc, sans plus tarder, je vais laisser ma
collègue Nicole Léger vous entretenir sur la partie des lanceurs d'alerte et,
par la suite, je vais vous entretenir sur la partie de vérificateurs généraux.
La Modératrice
: Merci.
Mme Léger.
Mme Léger
: Alors,
merci. Alors, lorsqu'on parle de lanceurs d'alerte, on parle des divulgateurs
d'actes répréhensibles, dans le fond, dans les organismes publics. Nous avons
étudié, au projet de loi qu'on appelle 87, loi que le gouvernement a enfin
déposée sur les lanceurs d'alerte, pour protéger ces lanceurs d'alerte... Ça a
été déposé en 2015, on a niaisé souvent durant l'année, pour le faire en 2016
et, en fin de compte, l'adopter à la fin 2016. Lorsqu'on l'a adopté, on a
apporté plusieurs amendements. J'ai eu à travailler avec trois ministres depuis
le temps parce qu'on est passés de Martin Coiteux à Sam Hamad à Carlos Leitão,
et le ministre des Finances à l'époque, président du Conseil du trésor, n'a pas
voulu intégrer les municipalités, donc protéger les lanceurs d'alerte dans les
municipalités.
On a eu beaucoup de discussions aussi sur
les gens publics, parce que n'importe qui qui voit une malversation, qui voit
quelque chose devrait être capable aussi de divulguer et peut le faire, mais on
a apporté énormément d'amendements pour que ces personnes-là puissent aussi
être protégées, parce qu'ils ne le sont pas, présentement, financièrement,
s'ils perdent leur travail, etc.
Dans le monde municipal, qui est un monde quand
même... On s'entend, les municipalités, au Québec, il y en a plusieurs, les
supramunicipales aussi, les organismes mandataires avec les municipalités, on
parle de tout ce milieu-là qui n'est pas intégré par le projet de loi
n° 87, qui est devenu la loi n° 87. Donc les lanceurs d'alerte, les
gens qui voient des choses, des gens qui voient un acte répréhensible, qu'il se
passe des éléments qu'ils croient être capables de divulguer, ils ne sont pas
protégés présentement. On se souvient que, dans la commission Charbonneau, un
des éléments était vraiment dans le monde municipal. Alors là, ils ne sont pas
protégés.
On attend un projet de loi depuis tout le
temps. Carlos Leitão nous l'a promis, le gouvernement libéral nous l'a promis,
et là, maintenant, c'était dans les mains de Martin Coiteux, le ministre des
Affaires municipales, qui devait déposer depuis plus d'un an un projet de loi
pour protéger le monde municipal. Et là ce qu'on entend, c'est que, dans
l'omnibus, il va peut-être — peut-être — y avoir des
amendements. Alors, des amendements, ce n'est pas un projet de loi, mais, sur
les amendements, il faut protéger... il faut qu'il y ait un régime général pour
protéger les lanceurs d'alerte. Et le monde municipal... On ne peut pas passer
à côté du monde municipal.
La Modératrice
: Merci.
M. Ouellet.
M. Ouellet : Merci,
Nicole. Effectivement, il nous l'a été promis à plusieurs reprises. Lors du
dernier omnibus, le projet de loi n° 83 en 2016, déjà, je commençais à
parler avec le ministre en question pour dire : Il faut qu'on touche les
parties des municipalités qui n'ont pas de vérificateur général, Il faut qu'on
protège les lanceurs d'alerte. On me dit : Écoute, Martin, ça sera dans un
prochain projet de loi. D'accord.
Deuxième projet de loi, gouvernements de
proximité. Là, on donne de l'autonomie, on donne la flexibilité, tous les
maires du Québec sont venus nous voir pour nous dire : C'est un bon projet
de loi; grâce à ça, on est capables d'avoir les deux mains sur le levier de
développement économique, on est capables de mieux gérer. On a dit : C'est
ça que vous voulez, en contrepartie ça prend de la transparence, ça prend de la
reddition de comptes. On croyait voir apparaître les dispositions pour les
lanceurs d'alerte et surtout de venir intégrer les municipalités de moins de
5 000 avec un vérificateur général. Rien de tout ça dans le 122. Le
ministre me dit, encore une fois : Martin, ça s'en vient dans un autre
projet de loi, dans un omnibus; le prochain, Martin, fais-moi confiance, il
sera là.
On arrive dans le projet de loi
n° 155, le minibus qui vient d'être déposé juste avant de fermer la
session, il n'y a absolument rien pour les lanceurs d'alerte et il n'y a
absolument rien pour les vérificateurs généraux dans les municipalités de moins
100 000.
Le ministre a convoqué les deux partis
d'opposition pour nous annoncer que son intention avait été de mettre ces
dispositions-là dans le projet de loi en question. Malheureusement, à cause des
élections, il n'a pas pu faire sa tournée paroissiale pour rencontrer
l'ensemble des maires et mairesses pour savoir qu'est-ce qu'ils voulaient dans
ces dispositions-là. Je peux comprendre, mais ça fait deux ans qu'on attend.
Cela étant dit, on espérait effectivement avoir ces dispositions-là. Là, ce
qu'on apprend et ce qu'on a appris, c'est qu'il y a des scénarios qui circulent
à travers le ministère, le ministre en question et son équipe testent
différents scénarios pour les lanceurs d'alerte et pour les municipalités de
moins de 100 000 habitants, et notre crainte, bien honnêtement, c'est
que, dans ces scénarios-là, il y en a plusieurs qui sont en deçà de ce que
recommande la commission Charbonneau.
Alors, le point de presse ce matin, il est
très simple. Ce qu'on dit au ministre des Affaires municipales : Déposez
les amendements à l'intérieur du projet de loi n° 155 avant les consultations,
puisqu'on veut pouvoir discuter avec les différents groupes qui seront
interrogés pour... avant l'étude article par article, qu'on puisse discuter
avec eux des tenants et aboutissants. Mais surtout, dans ces recommandations-là,
dans ces amendements-là, on s'attend minimalement, minimalement, qu'ils représentent
ce que la commission Charbonneau nous avait cité.
Recommandation 8 pour les lanceurs
d'alerte, la commission recommandait pour les lanceurs d'alerte : «D'améliorer
le régime de protection des lanceurs d'alerte pour [garantir leur protection,]
garantir la protection de l'identité de tous les lanceurs d'alerte, peu importe
l'instance à laquelle ils s'adressent; l'accompagnement des lanceurs d'alerte
dans leurs démarches; [et surtout] un soutien financier, lorsque requis.» Et,
dans le cas des VG, recommandation 26 : «D'ajouter les municipalités
de moins de 100 000 habitants au champ de compétence du Vérificateur
général du Québec...»
Alors, nous, ce n'est pas compliqué, on
tend la main aujourd'hui au ministre, on dit : Si vous voulez un bon projet
de loi, si vous voulez que le Parti québécois travaille avec vous sur ce projet
de loi là, il y a une seule avenue possible : vous déposez les amendements
avant qu'on puisse entendre les groupes, et surtout ces amendements-là
répondent en tous points aux deux recommandations de la commission Charbonneau.
On a demandé plus d'autonomie, les
municipalités en ont eu. Ils ont demandé plus de proximité, là c'est le temps
de la reddition de comptes, c'est le temps de protéger les citoyens, comme ma
collègue l'a dit, protéger les lanceurs d'alerte, protéger ceux et celles qui
voient les comportements répréhensibles, et la meilleure façon de le faire,
c'est la commission Charbonneau qui l'a édictée. Alors, on s'attend à ce que le
gouvernement libéral nous dépose ça en accord avec la commission Charbonneau.
La Modératrice
: Merci.
On va maintenant passer à la période de questions. Micro de gauche, Hugo
Lavallée, Radio-Canada.
M. Lavallée (Hugo) :
Oui, bonjour. Peut-être une question pour Mme Léger. D'abord, en ce qui
concerne la protection des lanceurs d'alerte, est-ce qu'il peut y avoir un
avantage à avoir un régime différent pour les lanceurs d'alerte à l'échelle
municipale et ceux, donc, qui ont déjà été protégés en ce qui concerne l'administration
gouvernementale?
Mme Léger
: Je
n'en vois pas du tout pour le moment, parce que l'important, c'est que, si on
se met à la place du citoyen ou du fonctionnaire municipal, il doit y avoir le
même type de régime que partout on a au Québec. Pourquoi qu'un fonctionnaire au
ministère des Affaires municipales ou au ministère du Tourisme n'aurait pas…
celui du monde municipal n'aurait pas la même protection? Et je vais plus loin,
moi, j'y vais même «tout citoyen et tout individu», mais le ministre, lorsqu'on
a fait le projet de loi n° 87, n'était pas d'accord.
Alors, c'est sûr que n'importe qui peut
aller à la police, peut aller à l'UPAC, peut aller au Protecteur du citoyen,
qui sont les trois, je pense, voies possibles, et dans l'organisme lui-même. Mais,
si l'organisme lui-même est en situation de conflit lui-même, alors c'est sûr
qu'un fonctionnaire ne peut pas aller dans son propre organisme, il faut qu'il
aille ailleurs. Mais, lorsque tu existes dans le monde public, le citoyen en
lui-même n'est pas… Protégé, ça veut dire aussi que, s'il y a un acte… si son
employeur ou les gens autour de lui lui font enlever sa job, il perd son
travail, il faut qu'il soit protégé, il faut, financièrement, qu'il soit
protégé. Donc, actuellement, avec le projet de loi n° 87, on peut le
protéger, un fonctionnaire, pas un citoyen. Le citoyen, il n'est pas protégé,
il peut perdre sa job. Et le monde municipal ne l'est pas du tout pour le
moment.
M. Lavallée (Hugo) :
Quels arguments on vous a donnés pour justifier ça?
Mme Léger
: Aucun.
On commence. On commence le projet de loi. On commence, on verra. Et M. Leitão
disait : Bien, mon collègue municipal va vous répondre, mon collègue
municipal… Alors, je l'ai interrogé, et en étude du projet de loi n° 87,
et en période de questions, et en communiqués. Partout, je pousse le ministre
des Affaires municipales : Quand est-ce que vous allez déposer votre
projet de loi pour protéger le monde municipal? Et là, bien, il devait accoucher
d'un projet de loi, puis là il accouche d'un omnibus, puis, dans ça, il n'y a
rien pour protéger les lanceurs d'alerte.
M. Lavallée (Hugo) : En
ce qui concerne les vérificateurs généraux dans les municipalités, là, si je
comprends bien, en ce moment, ils existent dans les municipalités de 100 000 habitants
et plus. En bas de ce seuil-là, il n'y a pas de vérificateur général. Et donc,
vous, votre souhait, ce serait que le Vérificateur général du Québec puisse y
aller ou qu'il y ait un nouveau vérificateur général itinérant d'une
municipalité à l'autre? Quelle est votre demande?
M. Ouellet : Bien, il y
a deux choses. Il y a un ménage à faire pour ce qui est des municipalités en
haut de 100 000, on l'a vu d'ailleurs dans le cas de la ville de Saguenay,
dans le processus de nomination, dans le processus de sélection, dans les
ressources attitrées au travail même du Vérificateur général. Il y a un ménage
à faire pour adopter de meilleures pratiques, et la ville de Gatineau l'a fait
en ayant un comité totalement indépendant, en ayant vraiment un processus qui
permet de préserver l'intégrité.
Cela étant dit, pour les municipalités de
moins de 100 000, qui ne sont pas couvertes présentement, les
vérificateurs généraux devraient se référer effectivement à la VGQ, on pense
que cette entité-là a toute la légitimité, tout le poids, toute la crédibilité
pour mener à bien des enquêtes. Et on veut que ces personnes-là… parce qu'on
est bien conscients que ça ne sera pas dans toutes les municipalités qu'il y
aura un VG engagé, mais ça prend une équipe volante qui va pouvoir se promener
d'une municipalité à l'autre. C'est au ministre de trouver la façon la plus
adéquate d'être capable d'arriver à terme, mais on veut surtout que ça ne coûte
pas cher pour les municipalités, cette nouvelle façon de fonctionner là, on
veut que ça respecte la capacité de payer. Mais est-ce que le VGQ, présentement,
est outillé pour le faire? La réponse est non.
Alors, si on s'en va vers là, il va
falloir qu'on donne des moyens et surtout des ressources à la VGQ pour réussir
à faire l'ensemble de ces vérifications-là. Les villes de moins de 5 000 habitants,
il y en a tout près... 700... 700, à peu près, au Québec. Ça fait plusieurs
vérifications. Est-ce qu'on y va de vérifications annuelles? Est-ce qu'on y va
d'une vérification cyclique? Il y a différentes choses qu'on peut...
M. Lavallée (Hugo) : À
ce moment-ci, il n'y a pas du tout de vérification.
M. Ouellet : Ils sont
juste audités pour leurs états financiers. Et, écoutez, encore hier soir, là,
je vais vous faire une confidence, j'ai des citoyens et citoyennes qui
m'appellent chez nous... qui m'appellent, pardon, pour me dénoter des
situations qui sont vécues dans une municipalité. Si on avait eu un VG, est-ce
que ces situations-là auraient pu être dénotées d'avance? Ma prétention, c'est
que je pense que la réponse est oui.
Donc, on est rendus, au Québec, de mettre
beaucoup plus de poids puis beaucoup plus d'intégrité dans nos élus. Ils
viennent tous d'être réélus à partir de novembre dernier, c'est le moment de
faire une nouvelle politique municipale. Comme je disais tout à l'heure, oui,
plus de proximité, on était d'accord avec ça, oui, plus d'autonomie, mais la
contrepartie, transparence, mais surtout reddition de comptes et intégrité.
Merci.
(Fin à 9 h 43)