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Point de presse de M. Gabriel Nadeau-Dubois, député de Gouin

Version finale

Le jeudi 31 mai 2018, 13 h

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Treize heures trois minutes)

Le Modérateur : Alors, bonjour. Bienvenue à ce point de presse concernant l'application des normes du travail et l'exclusion des joueurs athlètes. Je cède la parole à Gabriel Nadeau-Dubois qui sera suivi de M. Gilles Lupien, agent de joueur.

M. Nadeau-Dubois : Bonjour. Vous savez que demain débute l'étude détaillée du projet de loi n° 176 qui est une vaste réforme des normes du travail au Québec, une réforme qu'on attend d'ailleurs depuis longtemps. Ce projet de loi là contient toutes sortes de choses. Il a été largement discuté, les clauses de disparité de traitement, les agences de placement, les vacances, tout ça, mais aujourd'hui on est ici pour vous parler d'un aspect en particulier de ce projet de loi là, un aspect qui est complètement, jusqu'à maintenant, passé sous le radar. Je veux vous parler de l'article 1 du projet de loi n° 176.

L'article 1 a l'air banal, mais il a des conséquences très, très, très inquiétantes pour des centaines de jeunes au Québec. Cet article-là vient exclure les jeunes athlètes qui fréquentent l'école de l'application des normes du travail au Québec. C'est donc un article qui, en un coup de crayon, vient rayer les droits du travail de centaines de jeunes athlètes québécois. Ça va avoir un impact direct, donc, sur des centaines de jeunes, à commencer par les joueurs de la Ligue de hockey junior majeur du Québec. Ça va également créer un dangereux précédent en instaurant, au sein des normes du travail, une discrimination basée sur le statut d'étudiant.

Pour ces deux raisons-là, Québec solidaire demande aujourd'hui à la ministre de retirer cet article de son projet de loi. J'étais en Chambre il y a quelques minutes, je lui ai demandé de le faire dans le cadre de l'adoption de principe. Il faut absolument que la ministre retire cet article 1 du projet de loi n° 176. Depuis des années au Québec, le statut des joueurs de la LHJMQ fait débat. Ça fait des années que le monde du hockey débat de cette question-là. Les joueurs du junior majeur sont-ils des professionnels? Sont-ils des amateurs? Devraient-ils être rémunérés ou non?

Dans les faits, la condition des joueurs du junior majeur au Québec est identique à celle des joueurs professionnels. Ces jeunes-là sont sélectionnés au repêchage, donc ils ne choisissent pas là où ils jouent. Ces joueurs-là peuvent être échangés ou renvoyés, selon leur performance, sans avoir leur mot à dire.

Les équipes, elles aussi, fonctionnent exactement comme des équipes professionnelles. Ce sont des entreprises privées. Les Remparts de Québec, par exemple, appartiennent à Québecor. L'entreprise Irving est propriétaire d'une équipe. L'entreprise McCain est propriétaire d'une équipe. Donc, ce sont de réelles entreprises privées. Ces entreprises-là tirent leurs revenus, comme les équipes professionnelles, de la vente de billets, de la vente des droits de diffusion, de la vente d'objets promotionnels qui souvent, d'ailleurs, portent le nom des joueurs. Ces entreprises-là rémunèrent tout le monde, rémunèrent leurs dirigeants, rémunèrent leurs entraîneurs. Certains entraîneurs font même jusqu'à 250 000 $ par année. Ces équipes-là rémunèrent, bref, tout le monde sauf les jeunes qui produisent le spectacle, les joueurs qui, eux, reçoivent une maigre compensation financière. On parle de 60 $ par semaine, 60 $ par semaine dans des équipes qui, pour certaines, font plusieurs millions de dollars de profit chaque année.

C'est une situation qui est extrêmement problématique. Il y a des voix, comme celle de Gilles Lupien, qui s'élèvent depuis des années pour dénoncer cette situation-là. Et, avec l'article 1 de son projet de loi, la ministre du Travail va venir rendre permanente cette situation problématique.

En terminant, je veux vous parler du processus qui a mené à l'inclusion de cet article-là dans le projet de loi. La ministre a reconnu que c'est suite à une rencontre avec la direction de la Ligue de hockey junior majeur du Québec et suite à la réception d'une lettre de la direction de la ligue qu'elle a inclus cet article dans le projet de loi. On sait aussi qu'il y a un recours collectif qui est en préparation au Québec et qui va demander des salaires non payés à certains anciens joueurs de la ligue de junior majeur du Québec.

Bref, la ligue junior majeur souhaite prendre un raccourci pour éviter ses responsabilités légales, et c'est pour ça que la ministre a inclus cet article dans son projet de loi. La ministre a d'ailleurs reconnu elle-même, dans les médias, que c'est pour protéger les équipes contre ce recours juridique là qu'elle modifie la Loi sur les normes du travail. C'est un raccourci qui est inacceptable.

Je le répète, ce qu'on demande aujourd'hui, à Québec solidaire, c'est le retrait de cet article. Il faut faire un vrai débat de société sur le statut de ces jeunes sportifs là. Il faut que la Ligue de hockey junior majeur du Québec ouvre ses livres, qu'on trouve une solution équitable qui va à la fois respecter la réalité du hockey et le droit de ces jeunes-là d'avoir un certain droit et une rémunération minimalement équitable.

Je suis accompagné aujourd'hui de Gilles Lupien, qui a évolué dans la Ligue nationale de hockey, qui a évolué dans la ligue junior majeur aussi, qui, depuis près de 35 ans, est dans le monde du hockey et représente aujourd'hui des joueurs au sein de la ligue nationale et au sein du junior majeur. Il est ici aujourd'hui pour témoigner avec moi de ce qui se passe dans la ligue. Il est ici pour demander, avec Québec solidaire, le retrait de l'article 1. Gilles.

M. Lupien (Gilles) : Merci, Gabriel. Mon nom est Gilles Lupien. Je suis un ancien joueur de la ligue du Québec. J'ai joué dans la ligue nationale six, sept ans, et je représente des joueurs depuis 35 ans. Je côtoie les parents, je côtoie les joueurs et je côtoie tous les gens. Je suis à peu près la seule personne que... je ne cherche pas un emploi dans ces groupements-là.

J'entends les parents dire que, financièrement, c'est très difficile. Je sais tous les messages que la ligue junior majeur du Québec envoie aux journaux. Je demande à la ministre : S'il vous plaît, retirez ça. Vous enlevez des droits fondamentaux à des enfants. La ligue, il y a certaines équipes qui font beaucoup d'argent, il y en a qui en font moins, je le sais. Mais, si on s'assoit et qu'on discute franchement pour aider nos jeunes du Québec à être bien éduqués... Le voyagement, la violence sur la glace, il faut s'asseoir... Ça fait 30 ans qu'on parle de ça. J'aimerais ça qu'on commence à en discuter.

Je demande à la ministre Vien de former une table ronde, de s'asseoir puis de parler honnêtement avec les vrais chiffres, et puis on va peut-être sortir de là, de vérifier comme... qu'on a aidé des enfants et des parents. Même mettre les pensions des joueurs, qui sont payées 100 $ par jour... des bonhommes de ma grandeur, de ma grosseur, tous les gens le savent que 100 $, c'est difficile, pour ces pensions-là, d'aider les petits gars à bien manger.

Ça fait que c'est ça, Gabriel, c'est mon message. J'aimerais ça m'asseoir avec tout ce beau monde-là et puis de mettre les affaires sur la table. Merci beaucoup.

Le Modérateur : Merci beaucoup. On va prendre les questions maintenant. Vous présenter, s'il vous plaît, au micro.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Oui. Pascal Dugas de l'Agence QMI. M. Nadeau-Dubois, comment est-ce qu'on paie ces joueurs-là? Est-ce qu'on les paie à la partie? Est-ce qu'on les paie par semaine? Est-ce qu'ils ont un meilleur salaire s'ils sont sur le premier trio par exemple?

M. Nadeau-Dubois : Votre question me permet de préciser quelque chose. Si vous m'avez bien écouté, vous voyez que ce qu'on ne demande pas, c'est que les normes du travail soient appliquées mur à mur aux jeunes joueurs de la ligue junior majeur, parce que la réalité du hockey, elle est particulière. Et, en effet, il faut réfléchir à un mode d'encadrement, de rémunération qui est conforme à cette réalité-là.

Donc, je vais être très, très clair, là, on ne dit pas : Demain matin, il faut que toutes les normes du travail s'appliquent intégralement, mur à mur, à tous les joueurs. Mais ce qu'il ne faut pas faire, par contre, c'est exclure tout le monde. Ça, c'est inacceptable. C'est pour ça que ce qu'on demande, c'est simplement le retrait de l'article le temps que tout le monde s'assoit pour trouver un encadrement légal qui est conforme à la réalité du hockey de 2018 au Québec.

Et c'est dans cette discussion-là qu'on pourra se poser la question : Qu'est-ce qu'une heure de travail dans ce domaine-là? Est-ce que c'est une heure de voyagement, une heure d'entraînement? Est-ce que c'est une heure de match? Comment on les rémunère? Toutes ces questions-là, il faut les poser. Mais là ce que la ministre va faire, si elle adopte ce premier article du projet de loi, c'est très radical. Elle va exclure des centaines de jeunes Québécois de l'application d'une loi sociale de base. Parce que c'est ça, les normes du travail, c'est une loi sociale qui vient donner un minimum à tous les salariés. Et là la ministre va dire : Et voilà, cling, ces gens-là disparaissent des normes du travail.

Je veux également porter à votre attention le fait que, dans les équipes junior majeur, là, il y a aussi des joueurs étrangers. Ces joueurs-là, là, ils ne fréquentent pas l'école québécoise, et donc, en vertu de cet article-là, eux pourraient continuer à recevoir des rémunérations importantes. Il y a des joueurs, en ce moment, dans les équipes du junior majeur, qui font 50 000 $, 60 000 $, 80 000 $ par année, parce qu'ils sont des joueurs étrangers, pendant que les petits gars du Québec, à côté, sur le même trio, dans le même club, font 60 $ par semaine.

Et, avec son article, la ministre vient rendre cette injustice-là permanente en disant : Dès que tu vas à l'école, tu n'as plus le droit aux normes du travail.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Donc, on décourage l'éducation, d'une certaine façon, aussi?

M. Nadeau-Dubois : C'est un des impacts de la situation actuelle, c'est que les jeunes veulent atteindre leurs rêves, ils travaillent fort, ils mettent leurs études de côté. Et souvent, en bout de course, hein — c'est seulement 2 % des joueurs de la LHJMQ qui se rendent à ligue nationale — bien, en bout de course, ils se ramassent devant rien, avec des études bâclées.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Est-ce qu'il y a d'autres sports... Là, vous avez parlé beaucoup de la LHJMQ et du hockey, mais est-ce qu'il y a d'autres sports qui seraient peut-être touchés par ça?

M. Nadeau-Dubois : C'est sûr qu'au jour d'aujourd'hui le principal groupe de gens qui vont être touchés, c'est les joueurs du junior majeur, mais ça ouvre un précédent, puis un dangereux précédent, parce que là ça vient dire : Si tu es dans une ligue sportive et que ta participation à la ligue est conditionnelle à la fréquentation scolaire, tu n'es plus couvert dans les normes du travail. Donc, oui, ça crée un dangereux précédent.

Je vais même aller plus loin, ça ouvre un précédent parce que ça rend légal le fait que, dans une même entreprise, un salarié soit... en fait, une personne soit salariée ou non, dépendamment de son statut. Si elle est étudiante, elle ne sera pas salariée; si elle n'est pas étudiante, elle sera salariée. Donc, c'est pour ça que je vous parlais d'un effet discriminatoire indirect. Ça vient dire : En fonction du statut d'étudiant, ça va déterminer si tu es salarié ou non.

Donc, ça, oui, ça ouvre un dangereux précédent. Juridiquement, c'est extrêmement fragile, d'ailleurs. Ça pourrait tout à fait être jugé discriminatoire par certaines cours. Donc, nous, on dit : Un instant, là, ce n'est pas une solution, en un article de deux lignes, exclure des centaines de jeunes des droits du travail. Ça ne peut pas être ça, la solution.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : On sait que le G7 s'en vient. Est-ce que déjà vous êtes capable de condamner toute éventuelle violence qui viendrait des groupes qui manifestent?

M. Nadeau-Dubois : Bien sûr, bien sûr, bien sûr.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Oui? Il n'y a pas de raison qu'on pourrait utiliser la violence dans un dessein de désobéissance civile?

M. Nadeau-Dubois : Ça a toujours été la position de Québec solidaire et la mienne, ça ne changera pas cette année.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Merci.

Le Modérateur : On va aussi prendre les questions d'abord sur le sujet...

M. Nadeau-Dubois : Sur le sujet, oui, d'abord.

Le Modérateur : ...puis on prendra les questions à part...

Journaliste : Oui, mais juste sur la question du G7 puis une seule question, si vous permettez. Vous, est-ce que, personnellement, vous allez aller manifester en marge du G7?

M. Nadeau-Dubois : Je n'ai pas prévu de le faire, mais je sais que Québec solidaire, par contre, va participer à une mobilisation pacifique qui va avoir lieu devant l'Assemblée nationale, je crois. On va vous donner le détail.

Journaliste : Très bien.

Le Modérateur : Sur le sujet.

Journaliste : Oui, évidemment. Pouvez-vous m'expliquer... Est-ce que les jeunes québécois sont, disons, désavantagés, à l'heure actuelle, comparativement aux jeunes de ligue semblable dans les autres provinces ou même aux États-Unis, ou si c'est le même, grosso modo, régime qui s'applique pour tout le monde?

M. Lupien (Gilles) : Au travers du Canada, là, c'est à peu près toute la même affaire. Ils sont contrôlés par une ligue, qui est la ligue canadienne, qui a des ligues Ontario, Ouest et Québec. En dessous de ça, vous avez des propriétaires d'équipe qui appartiennent à la ligue. Ça fait que les salaires, ils sont établis au Canada au complet. Tu sais, ça a de l'air facile, et puis ils gagnent 60 $ par semaine. 60 $, 40 semaines, c'est 2 400 $ pour une saison de hockey. Puis les instructeurs, les équipes forcent les joueurs à s'entraîner l'été. Ça coûte 1 500 $ pour avoir un entraîneur. Ça fait que le 2 500 $ moins 1 500 $, ça donne à peu près 600 $ par année dans les poches du joueur de hockey.

Puis on dit aujourd'hui : S'il y a des clubs qui ferment les portes, ça va être à cause de 600 $. Admettons que ça monte à 800 $. Il y a quelqu'un qui ne sait pas compter, ou moi, je ne comprends pas ça du tout, là. J'aimerais ça qu'on rectifie beaucoup de choses, qu'on mette des papiers sur la table puis qu'on essaie de se comprendre parce qu'en ce moment, là, si tu vas à l'école... si on transfère ça dans la vraie vie, l'étudiante qui veut... qui s'en va en droit, que le bureau d'avocats l'engage, ça veut dire que, si on compare ça aux joueurs de hockey, là, l'étudiante qui va travailler 50 heures par semaine pour un bureau d'avocats, le bureau d'avocats va avoir le droit de lui donner 50 $ par semaine.

Dans la vraie vie, on dit : Ça n'a pas bon de sens, puis, quand c'est un joueur de hockey, on dit : Bien, ce n'est pas grave, il joue, lui, au hockey. Mais, dans ce milieu-là, là, rendu à ce niveau-là, on ne joue plus, on travaille, parce qu'à 60 heures, puis il faut que tu sois à l'heure, les pratiques puis, quand tu ne pratiques pas, tu es puni. Quand tu joues mal, tu es dans les journaux, ça va mal. Il y a un stress énorme pour ces jeunes-là à 60 $ par semaine et il faut qu'ils s'entraînent.

M. Nadeau-Dubois : Je rappelle qu'il y a des entraîneurs dans la ligue junior majeure, en ce moment, qui font jusqu'à 250 000 $ par année, là. Moi, je serais très curieux de connaître le salaire de Patrick Roy qui vient d'être embauché par les Remparts de Québec. Je suis pas mal sûr que ça a six chiffres. Et pendant ce temps-là, on nous dit : Ah non! les joueurs, donc le produit de la ligue junior majeur du Québec, eux, là, il ne faut pas les reconnaître comme des gens qui travaillent. C'est très dérangeant, ces inégalités-là.

Il y a aussi des inégalités à l'intérieur des équipes. Quand on regarde la Ligue canadienne de hockey, là, c'est structuré d'une manière tout à fait comparable aux autres ligues, c'est-à-dire il y a à peu près un tiers des équipes qui font de l'argent, à peu près un tiers des équipes qui ont des finances équilibrées puis à peu près un tiers des équipes qui perdent de l'argent. Mais ça, c'est comme ça dans toutes les ligues de hockey puis même dans plusieurs ligues professionnelles. La solution que les ligues ont trouvée, c'est faire du partage de revenus. La ligue junior majeur du Québec a décidé de ne pas faire de partage de revenus, et c'est ce qui crée des inégalités immenses avec des petits marchés qui disent : On n'a pas les moyens de payer les joueurs. Mais il y a d'autres équipes qui, eux, ont les moyens.

Donc, quand on disait : Faire une table ronde, un comité pour discuter de tout ça, bien, ça, il faut que ça fasse partie de la discussion. Comment on fait pour mieux répartir l'argent pour que ces jeunes-là, ces jeunes Québécois qui travaillent puissent avoir une rémunération respectueuse de ce qu'ils font quand même et des profits qu'ils génèrent pour la ligue junior?

Journaliste : C'est quoi une rémunération respectueuse?

M. Nadeau-Dubois : Bien, ce n'est pas...

Journaliste : Non, mais le minimum?

M. Nadeau-Dubois : Nous, ce qu'on dit, c'est : Là, il y a une urgence, il faut retirer l'article puis il faut en parler. Ce n'est pas à Québec solidaire ici, à l'Assemblée nationale, à dire : C'est ça, le bon niveau. Il y a énormément de choses à définir. C'est un univers particulier, le hockey, et nous, on pense qu'il faut que tout le monde s'assoie pour trouver une solution.

Journaliste : Mais, M. Lupien, je ne sais pas si vous êtes mêlé au recours collectif, là, qui se prépare.

M. Lupien (Gilles) : Du tout, du tout, du tout.

Journaliste : Mais là c'est pour retrouver des sommes de salaires non versés. Dans le fond, j'imagine que là on va avoir...

M. Lupien (Gilles) : Mais ça, je pense que c'est les avocats qui devraient s'occuper de ça, les gens qui forment ce comité-là pour faire ça. Moi, je ne suis pas là-dedans du tout. Moi, je suis...

Journaliste : O.K. Mais en voyant le salaire qui est demandé, on a une idée de...

M. Lupien (Gilles) : Non, mais moi, je veux m'asseoir... Moi, j'ai de la difficulté à comprendre que Gilles Courteau, il fait 300 000 $ par année, tandis que vous avez des petits gars qui font 600 $ par année. Ce n'est pas 25 000 $ puis 55 000 $, là, puis je le sais que la ligue junior majeur du Québec, il dit : Oui, mais on paie l'université aux joueurs, ça, il faut le mettre dans le salaire.

Moi, je dis : aujourd'hui, là, je veux que les bourses universitaires, là, que la ligue du Québec cancelle tout ça, que ces bourses-là, là, ils devraient les canceller et puis mettre cet argent-là dans un fonds. Ils disent qu'ils donnent 4 000 $ par année. Bon, bien, qu'ils cancellent les bourses, qu'ils mettent 4 000 $ dans le compte de banque, puis à 20 ans, le petit gars prend son 16 000 $. C'est à lui, ça. Parce qu'il y a du petit faufilage que... ils disent qu'à tous les joueurs juniors ils paient l'université. Mais, quand tu te fais repêcher, tu ne peux plus faire partie de ça, c'est-à-dire que cinq petits gars par année qui se font repêcher, ils ne peuvent plus participer à ce 4 000 $ là.

Le petit gars que l'école et le voyagement, c'est dificile, lui aussi ne peut plus participer à ce 4 000 $ là. Ça fait qu'avec le voyagement, tout ça, le petit gars ne peut pas aller à l'école... ça fait que là, le groupement du 250 joueurs, il est rendu à peu près à 160 joueurs, mais ils disent qu'ils fournissent l'université à tout le monde. C'est faux. Parce que moi, si à l'école j'ai de la grosse difficulté, au moins, avec le 16 000 $, je vais pouvoir m'acheter une auto pour aller travailler à quelque part. Parce que j'ai travailé, admettons, à 0,50 $ de l'heure.

Ça fait que, voyez-vous, ça joue sur plusieurs tableaux puis ça dit au monde qui font des choses …Bien, j'aimerais ça le mettre sur papier, puis m'asseoir avec la ministee, puis dire : Bien, regardez là, ils vous ont dit ça, là, mais la réalité, là, c'est ça.

Ça fait qu'entre ça et ça, il doit y avoir un milieu, puis c'est ce milieu-là qu'il faudrait atteindre, puis je remercie Gabriel que ça fait un an qu'il m'appelle : Gilles, Gilles.

Finalement, j'ai dit O.K., j'y vais, parce que là ce n'est pas une question qu'il veut… les élections s'en viennent là. Peut-être certains partis qu'il faut le faire avant que les élections arrivent pour… je vais méchant, pour les amis de la ligue du Québec.

Journaliste : Est-ce que la ligue fait une campagne de peur, voire d'intimidation, auprès des parents puis des enfants en...

M. Lupien (Gilles) : Oui.

M. Nadeau-Dubois : Ce qui est clair, c'est que la ligue, en ce moment, puis elle le reconnaît, a fait des représentations auprès de la ministre. Elle a dit : Il y a un recours collectif qui s'en vient, et, si on le perd, on n'y arrivera pas.

Et là la solution trouvée, c'est : Ah! bien, on exclut tout le monde des normes du travail. Je le répète, ça ne peut pas être ça la solution. Puis on est tout à fait pragmatiques, là, on est conscients qu'il faut probablement, fort probablement réfléchir a un encadrement légal spécifique pour ces jeunes joueurs-là, spécifique.

Mais il faut le faire, ce travail-là. On ne peut pas sortir tout le monde des normes du travail. Ça ne peut pas être ça, la solution. Et oui, la ligue junior majeur dit : Ah! bien, si vous faites ça, on va fermer des équipes. Puis ces équipes-là, bien, c'est vrai que dans plusieurs régions, c'est important, mais là il faut sortir de cette crainte-là puis trouver une solution. Des solutions, il en existe.

Journaliste : M. Lupien, les jeunes puis les parents acceptent de jouer le jeu en raison du rêve que, quoi, 2 % d'entre eux vont pouvoir réaliser, c'est-à-dire jouer dans la ligue nationale du Québec. C'est ça leur salaire, non?

M. Lupien (Gilles) : Bien, ce n'est pas un salaire, avoir un rêve. Moi, je voudrais être avocat, ça veut dire qu'il faut que je sois payé 2 $ de l'heure parce que j'ai le rêve d'être avocat? Bien, pourquoi que le joueur de hockey, s'il a un rêve, lui, il faut qu'il joue à 0,50 $? Tu sais, en quelque part...

Puis il y a toujours ce jeu-là de dire : Bien, si ça ne fonctionne pas, tu vas perdre ta job. Mais le petit gars, là, lui, il joue... son instruction est en jeu. Imaginez-vous, sur le coin de la rue... Je ne sais pas si vous avez des enfants... qui voyagent des 12 heures, des 14 heures, des 15 heures en autobus. Est-ce qu'il peut compétitionner avec ton voisin, le petit bonhomme sur le coin de ta rue? Tout parent va dire... Si on se couche à 7 heures le matin puis je vais à l'école à 11 heures, je suis dans la classe, mais je dors en regardant le professeur.

Ça fait que c'est toutes ces choses-là qu'il faut parler. Tu sais, même un petit... ils les font jouer, les petits gars, à 16 ans, dans la ligue junior majeur du Québec. Ils voyagent des 14 heures, des 15 heures puis ils n'ont même pas fini leur secondaire V. Ça fait 10 ans que je demande à la ligue... Tout jeune qui n'a pas fini son secondaire V devrait... il a le droit de jouer junior majeur, mais il n'a pas le droit de jouer plus qu'à deux heures de sa ville pour qu'il se couche, le soir, là, et le passer, son secondaire V.

M. Nadeau-Dubois : C'est que l'horaire très exigeant des parties fait en sorte que, même sur le plan du parcours scolaire, ces jeunes-là ont énormément de difficulté, ce qui rend encore plus fallacieux l'argument qui dirait : Ah! c'est des étudiants avant d'être des joueurs de hockey.

La vérité, puis tout le monde dans le monde du hockey le sait, c'est que ce sont, avant tout, des joueurs de hockey. Ils étudient un peu à côté, et encore, c'est extrêmement difficile de le faire. Donc, il y a vraiment un enjeu de protection sociale de ces jeunes-là, puis il faut qu'ils poursuivent leurs rêves, puis on le souhaite, mais il faut les protéger comme société, parce qu'en ce moment ils sont dans une situation très précaire. Moi, j'en ai rencontré, dans les derniers jours, en personne et au téléphone, et il y a des histoires vraiment qui ne sont pas loin d'être des histoires d'horreur.

M. Lupien (Gilles) : Bien, regardez, je veux juste poursuivre là-dessus. Tu sais, on parle du voyagement des joueurs, puis les gens sont là puis... bien, ils voyagent. Mais savez-vous que Rouyn-Noranda—Bathurst... pour nous autres, c'est là puis là, mais savez-vous que Rouyn-Noranda—Bathurst, c'est Montréal-Winnipeg? Savez-vous que c'est Montréal-Floride?

M. Nadeau-Dubois : Puis le lendemain matin, ils sont censés être rentrés à l'école parce que c'est des étudiants. Ce n'est pas sérieux comme...

Le Modérateur : Dernière question, on est attendus ailleurs. Dernière question.

Journaliste : Si M. Nadeau-Dubois est attendu ailleurs, il peut quitter la...

Le Modérateur : M. Lupien est attendu...

Journaliste : Mais, M. Lupien, vous qui avez côtoyé des jeunes, qui sont moins jeunes aujourd'hui, qui sont passés à travers ce système-là, pouvez-vous nous donner justement des cas, là, ceux qui n'ont pas réussi à aller dans la ligue nationale du Québec et qui ont...

M. Lupien (Gilles) : Monsieur, moi, j'ai pour dire, les joueurs de hockey, à 15 ans, 16 ans, 17 ans, c'est nos leaders de notre province. C'est des petits gars qui prennent soin de leur corps, c'est des gagnants, c'est des gars qui travaillent en équipe, c'est des gars qui sont prêts à tout faire pour une compagnie.

On ne les instruit pas, on fait des bien-être sociaux avec eux. Je sais que ça choque, là, mais c'est la vérité. Prenez un citoyen, un enfant de 16 ans, qui fait des 18, des 22, des 24 heures d'autobus, pensez deux secondes. Oui, je veux jouer au hockey, mais est-ce que c'est normal? Toute la province, j'espère, va dire : Ça n'a pas de bon sens. Puis c'est pour ça que je dis merci à Gabriel. C'est un des... pas un, c'est le premier qui se lève qui dit : Aïe! on est trop loin. Merci. Les enfants te disent merci.

M. Nadeau-Dubois : Bien, merci, Gilles, d'être là avec nous autres aujourd'hui.

Le Modérateur : Merci beaucoup, tout le monde. Bonne journée.

(Fin à 13 h 28)

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