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Point de presse de M. Simon Jolin-Barrette, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de justice

Version finale

Le jeudi 14 juin 2018, 11 h 55

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Onze heures cinquante-six minutes)

M. Jolin-Barrette : Alors, bonjour à tous. Aujourd'hui, j'ai déposé le projet de loi n° 1196, Loi visant à faciliter la communication de renseignements médicaux au bénéfice des personnes adoptées ou issues d'une technique de procréation assistée.

Alors, j'ai déposé ce projet de loi pour faire en sorte que les personnes qui ont été confiées à l'adoption ou les personnes qui sont issues de la procréation assistée puissent avoir accès au dossier médical de leurs parents biologiques. Parce qu'il faut comprendre, ce qui arrive, c'est, généralement, lorsque vous avez été confié à l'adoption, bien, vous n'avez pas accès au dossier médical de vos parents biologiques. Ça fait en sorte que, si jamais il y a eu des maladies héréditaires, si jamais il y a des cancers chez vos parents biologiques, bien, les personnes confiées à l'adoption n'ont pas cette information-là.

L'an passé, on a modifié le Code civil du Québec, dans le cadre du projet de loi n° 113, qui va rentrer en vigueur dans les prochains jours, et la notion de risque de préjudice est toujours présente. Ça, ça signifie que le médecin pourrait obtenir des renseignements, mais à un moment qui serait trop tard dans le stade... dans l'évolution de la maladie, parce que le risque de préjudice va s'évaluer à partir du moment où la personne adoptée est dans le cabinet du médecin et souffre d'une pathologie, souffre d'une maladie.

Alors, nous, ce qu'on souhaite faire, c'est agir en amont pour que la personne qui a été confiée à l'adoption, son médecin traitant, lui, ait les informations du dossier médical des parents biologiques de la personne adoptée, qu'il puisse le consulter en assurant la confidentialité du dossier, puisque c'est un professionnel qui est régi par le Code des professions. L'information ne sera pas communiquée à la personne qui a été confiée à l'adoption, mais, par contre, le médecin pourra prodiguer les examens, les tests, les scans et les suivis nécessaires aux maladies, aux pathologies qui se retrouvaient dans la famille biologique de la personne confiée à l'adoption.

Donc, il reste deux jours à la session. J'invite la ministre de la Justice à appeler le projet de loi pour faire en sorte que les personnes confiées à l'adoption puissent connaître les maladies de leur famille biologique, d'autant plus que les personnes confiées à l'adoption ont, elles aussi, des familles, et ça découle pour leurs enfants, pour leurs petits-enfants. Donc c'est vraiment un geste important, un geste qui... on parle de la vie des gens, et donc c'est vraiment fondamental qu'un tel projet de loi soit adopté, que le Code civil soit modifié. Il nous reste deux jours à la session, et je pense que c'est possible de travailler tous ensemble. C'est une situation qui est humanitaire, et il faut permettre aux gens qui ont été confiés à l'adoption de pouvoir connaître leurs antécédents médicaux.

Alors, je vais céder la parole à Mme Caroline Fortin, présidente du Mouvement Retrouvailles.

Mme Fortin (Caroline) : Alors, bonjour. Bon, au niveau du Mouvement Retrouvailles, en fait, c'est certain que, pour les antécédents médicaux familiaux, c'est très, très important, parce qu'en tant que personne adoptée, moi-même, j'ai retrouvé ma famille biologique et j'ai eu la chance d'avoir accès à mes antécédents médicaux, et disons que ça a aidé. Mais il y a combien de personnes qui ont été adoptées et qui ne peuvent pas avoir accès parce que c'est tout à fait confidentiel?

Alors, je crois que ce projet de loi là, le n° 1196, est un projet de loi qui devrait être mis de l'avant vraiment rapidement, parce que ça vient combler un besoin puis, je dirais même plus que ça, un droit.

On a parlé beaucoup du droit à l'identité. Bien, ça, c'en fait partie, parce que nos antécédents médicaux, c'est une partie de notre identité. Alors, je remercie M. Simon Jolin-Barrette d'avoir déposé ce projet de loi là et effectivement j'appelle Mme Vallée et tous les autres membres de l'Assemblée d'aller de l'avant, si c'est possible, assez rapidement avec ça. Alors, merci beaucoup.

M. Jolin-Barrette : Alors, Mme Poitras va vous adresser quelques mots également.

Mme Poitras (Diane) : J'aimerais vous faire part de mes réflexions sur les questions en santé que les adoptés se posent.

Alors, il est surprenant de constater que les médecins et les spécialistes en santé ne se sont jamais prononcés publiquement sur les besoins en santé des personnes adoptées qui ignorent complètement tout de leurs antécédents médicaux familiaux. Quand il y a eu des projets de loi sur l'adoption au Québec, pas un médecin n'est venu pour revendiquer le droit des adoptés de connaître leurs antécédents médicaux afin de pouvoir profiter d'un meilleur suivi médical.

Aujourd'hui, je veux dénoncer que les enfants adoptés, de 50 à 90 ans et plus, ont été totalement ignorés et complètement abandonnés par tout le système médical. Et pourtant, à l'époque des années 1920 jusqu'en 1970, il y a eu 300 000 enfants qui ont été laissés dans les crèches. À cette époque, le clergé, l'État et les médecins étaient très impliqués dans le système d'adoption.

Aujourd'hui, les médecins ne sont plus là pour défendre le droit des adoptés de connaître leurs antécédents médicaux. Ils sont là pour faire tchik-a-tchik avec la carte d'assurance maladie, c'est payant, mais ils ne sont pas sur les tribunes pour organiser un système efficace afin que les adoptés puissent connaître leurs antécédents médicaux.

Aussi, les associations médicales, le Collège des médecins, les associations de lutte contre le cancer et les maladies cardiaques et autres ne s'occupent pas des besoins des adoptés qui désirent leurs antécédents médicaux. Personnellement, je ne peux participer à des études sur certaines maladies parce que je ne connais pas les maladies de mes parents d'origine. Certains médecins ont pour leur dire qu'ils ont toute la technologie pour nous soigner en cas de besoin. Et pourtant il arrive bien souvent que l'on se fait raconter une histoire où une personne est morte de tel type de cancer ou d'une autre maladie héréditaire et que, si les médecins étaient intervenus avant pour prodiguer des soins, ils auraient pu guérir la maladie ou, mieux, la prévenir ou faire gagner 10 ans de vie à une personne.

Combien de parents ont été dévastés d'apprendre que leur enfant a hérité d'une maladie génétique grave rendant leur enfant hypothéqué à la vie. S'ils avaient su, l'un d'entre eux ou les deux parents, qu'ils étaient porteurs de cette maladie, ils auraient plutôt préféré faire un autre choix et même prendre des décisions en début de grossesse.

Au Québec, des dizaines de milliers de personnes ne savent pas qu'elles ont été adoptées. Lors des visites médicales, ces personnes donnent les antécédents médicaux de leurs parents adoptifs ou des autres personnes de leur famille d'adoption. Donc, leurs antécédents médicaux sont faux, et ça donne de mauvaises pistes aux médecins. Alors, il arrive que les adoptés doivent passer plus ou trop de tests pour répondre aux questions du médecin. Dans bien d'autres cas, les adoptés n'ont pas assez passé de tests qui auraient pu détecter une maladie grave à temps pour leur sauver la vie.

Je souhaite que tous les besoins en santé des adoptés deviennent un sujet à l'ordre du jour au ministère de la Santé du Québec et que des études soient entreprises sur ce sujet. Je tiens à remercier M. Barrette pour le dépôt de la loi aujourd'hui. Les adoptés sont aussi des personnes et elles ont des besoins en santé. Et, dans mon cas, j'ai trois enfants, cinq petits-enfants, et la vérité sur les antécédents médicaux familiaux, c'est très important. Merci.

M. Jolin-Barrette : Alors, pour conclure, je pense que Mme Fortin et Mme Poitras ont démontré l'importance d'adopter un tel projet de loi rapidement. Comme société, il est arrivé que, dans le passé, on fonctionnait d'une certaine façon, mais, lorsqu'on parle du droit à la confidentialité de la vie privée versus le droit à la vie, je pense qu'il est possible de baliser de façon raisonnable le droit à la confidentialité, tout en s'assurant que le droit à la vie des personnes qui ont été confiées à l'adoption soit mis de l'avant, parce qu'on se retrouve dans des situations où le critère prévu au Code civil du Québec ne rend pas service aux personnes qui ont été confiées à l'adoption.

Alors, nous demandons d'une façon importante à la ministre de la Justice de faire tout en son pouvoir, d'ici la fin de la session, qu'on puisse étudier le projet de loi, c'est possible de le faire, et de faire réaliser aux parlementaires toute l'importance de la réalité des personnes qui ont été confiées à l'adoption. Alors, je vous remercie et bonne journée. Merci.

(Fin à 12 h 4)

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