(Onze heures quatorze minutes)
Le Modérateur
: Alors,
bonjour à tous. Nous avons avec nous aujourd'hui la Protectrice du citoyen,
Marie Rinfret, ainsi que les vice-protecteurs Claude Dussault et Hélène
Vallières à la suite du dépôt du rapport annuel d'activité 2017‑2018 de la Protectrice
du citoyen. Alors, je vous laisse immédiatement la parole à Mme Rinfret.
Mme Rinfret (Marie) : Merci.
Bonjour à tous. Je vous remercie de vous joindre à moi pour la présentation du rapport
annuel 2017‑2018 du Protecteur du citoyen. Comme M. Poulin vous l'a dit, je
suis accompagnée de Me Hélène Vallières, vice-protectrice aux affaires
institutionnelles et prévention, responsable notamment de notre mandat en
matière d'intégrité publique, et de M. Claude Dussault, vice-protecteur, services
aux citoyens et aux usagers.
L'an dernier, au moment de la parution de
notre rapport annuel, j'occupais la fonction de Protectrice du citoyen depuis
quelques mois seulement. Cette fois-ci, les nouvelles et les nouveaux venus
sont, pour plusieurs, du côté des parlementaires. Je tiens donc, dès à présent,
à les assurer, de même que celles et ceux qui sont de retour à l'Assemblée
nationale, de mon engagement à veiller, tout comme eux, au respect des droits
des citoyens et des citoyennes par les services publics. J'inclus ici, au titre
de citoyens, les entreprises, les associations et les groupes. Par ailleurs,
l'intervention du Protecteur du citoyen, je le rappelle, se fait en toute
indépendance et sans parti pris.
Notre rapport annuel rend compte de lacunes
constatées au fil de nos enquêtes, que ce soit dans des ministères, des
organismes, des établissements de détention ou dans le réseau de la santé et
des services sociaux. Dans de nombreux cas, nous avons recommandé et obtenu les
correctifs nécessaires. D'autres avancées se font toujours attendre et
requièrent toute la vigilance et la persévérance de mon extraordinaire équipe.
Je voudrais revenir brièvement sur les
obligations premières des services publics, des obligations qui font l'objet d'engagements
formels de leur part. Ces engagements sont inscrits dans les lois, les politiques
et dans les déclarations de services aux citoyens. Ainsi, tous les ministères,
les organismes gouvernementaux, les établissements de détention et le réseau de
la santé et des services sociaux ont le devoir de donner les services prévus
selon les programmes en vigueur. Ils doivent aussi livrer une information
appropriée et traiter toutes les demandes avec rigueur et équité. Après
l'examen d'un dossier, ils doivent transmettre une réponse compréhensible et
juste dans des délais raisonnables. C'est la seule façon de permettre
l'exercice des recours adéquats. Ils sont aussi tenus d'appliquer la loi avec transparence
et humanité.
Qu'en est-il du respect de ces
engagements? J'estime que l'appareil public fait des efforts considérables pour
qu'ils se concrétisent, mais, année après année, des plaintes et des
signalements au Protecteur du citoyen révèlent des lacunes importantes,
certaines persistantes.
Je vous donne quelques exemples. On se
souviendra des inondations survenues au Québec en mai 2017. Or, en 2018,
certains sinistrés ne sont toujours pas indemnisés. Pour eux, les délais
s'allongent, en dépit de l'engagement du ministère de la Sécurité publique
d'appliquer un programme spécial d'aide financière bonifiant les dispositions
habituelles.
En août 2017, les services de l'aide
financière aux études du ministère de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur, soumis, comme tout service public, au devoir de bien renseigner la
clientèle, n'avait répondu qu'à 12 % des 188 969 appels
téléphoniques reçus.
La Direction de l'indemnisation des
victimes d'actes criminels interprète parfois la définition de «victimes» de
façon trop étroite. C'est ainsi qu'on exige d'une personne qu'elle ait été
directement un témoin visuel ou auditif du crime pour être indemnisée. Cela
prive des gens d'une compensation qui leur est due.
Lors de vérifications du crédit d'impôt
pour frais de garde d'enfants, Revenu Québec a établi des cotisations sur la
base de soupçons de fraude plutôt que sur des éléments de preuve tangible. Enfreignant
sa propre Charte des droits des contribuables et des mandataires, en ne donnant
pas les motifs à l'appui de ses cotisations, il n'a pas respecté le droit de se
défendre adéquatement. En contexte de surpopulation carcérale, les
établissements de détention n'arrivent pas à respecter leur obligation d'offrir
aux personnes incarcérées des conditions de détention humaines et sécuritaires.
Du côté des services de santé et des
services sociaux, les engagements doivent aussi être respectés, et ce, même si
on ne peut nier que la pression sur le réseau augmente continuellement, entre
autres, en raison du vieillissement de la population. Ainsi, on constate que le
personnel en CHSLD peine à suffire à la tâche. Les équipes de soins doivent
souvent composer avec des effectifs incomplets. On assiste alors au report ou à
l'annulation de certains soins ou services. De telles pratiques entrent en
contradiction avec la Loi sur les services de santé et les services sociaux
ainsi qu'avec les orientations du ministère qui doivent guider la prestation
des soins dans un milieu de vie. Selon ces balises, les besoins des personnes
hébergées doivent constituer le fondement de toute décision en matière d'organisation
et d'intervention.
Le ministère de la Santé et des Services
sociaux s'est engagé à assurer à 85 % de la population du Québec
l'inscription auprès d'un médecin de famille. L'objectif devait être atteint le
31 décembre 2017. Or, à cette date, le taux d'inscription plafonnait à
78,3 % en moyenne au Québec. Je tiens toutefois à souligner les progrès
accomplis. En effet, ce taux représente une hausse de 3,9 % par rapport à
l'année précédente. De plus, certaines régions ont dépassé les projections. C'est
le cas, par exemple, du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, de
Chaudière-Appalaches et du Saguenay—Lac-Saint-Jean.
Toutefois, pour la grande région de Montréal, ce
taux était de 66 % seulement.
Finalement, le nombre de personnes qui ont
reçu des services de soutien à domicile de longue durée — je pense
ici aux personnes âgées ou aux personnes handicapées — est inférieur
à la cible annoncée dans le plan stratégique 2015-2020 du ministère de la Santé
et des Services sociaux. Bien que ce nombre soit en hausse, il demeure
insuffisant, vu l'augmentation de la clientèle qui a besoin de ces services
Pour d'autres ministères et organismes, le
Protecteur du citoyen demeure en attente de certains engagements. Il en va ainsi
du recours au protecteur de l'élève dans les commissions scolaires. En
octobre 2017, le Protecteur du citoyen a produit un rapport recommandant
des avenues pour que ce recours devienne plus simple, rapide, efficace et
impartial. Le projet de loi intégrant plusieurs de nos recommandations est,
selon l'expression consacrée, mort au feuilleton. Je suis donc attentive aux
suites qui seront données à cette question prioritaire pour les élèves et leurs
parents.
Je souligne, par ailleurs, les avancées en
ce qui concerne le suivi des apprentissages des enfants scolarisés à la maison,
grâce aux nouvelles dispositions de la Loi sur l'instruction publique et du
règlement sur l'enseignement à la maison. Il faut maintenant que les
engagements découlant des nouvelles dispositions trouvent place dans la réalité
des familles qui ont recours à cette formule d'enseignement.
Ce rapport annuel présente le bilan des
11 premiers mois d'activités de notre nouvelle direction des enquêtes sur
les divulgations en matière d'intégrité publique. D'ores et déjà, le nombre de
divulgations reçues, soit 136, confirme le bien-fondé d'un tel recours
indépendant et impartial. Cette nouvelle direction, rappelons-le, est sans
compromis quant à la protection de l'identité des personnes qui font une
divulgation ou qui collaborent à une enquête. Une telle garantie est
indispensable pour dissiper les craintes que certaines personnes pourraient
avoir quant aux conséquences pour elles de faire une divulgation.
En terminant, je rappelle qu'il y a 50 ans,
un 14 novembre, le Parlement adoptait la loi créant le Protecteur du
citoyen. 893 125, c'est le nombre exact de demandes et de plaintes reçues
par nos services en cinq décennies. Dès sa création, le Protecteur du citoyen a
eu pour mandat d'assurer le respect des droits des citoyens et des citoyennes
dans leurs relations avec les services publics. Au fil du demi-siècle, il a
tenu ses engagements, et pour l'avenir, j'ai la chance de pouvoir prendre appui
sur une équipe dévouée et solide qui porte toujours plus loin une mission
unique et essentielle.
Je vous remercie de votre attention et je
répondrai avec plaisir à vos questions.
Le Modérateur
: Merci.
Alors, c'est Louis Lacroix de Cogeco Nouvelles qui va poser la première question.
M. Lacroix (Louis) : Bonjour,
Mme Rinfret, M. Dussault, Mme Vallières. D'abord, sur les CHSLD, vous dites qu'il
y a un manque chronique de personnel. Est-ce que vous pouvez nous donner des
exemples concrets de l'impact que ça peut avoir sur des usagers des CHSLD?
Mme Rinfret (Marie) : Bien
sûr, bien sûr, bien sûr, et on en dresse certains dans notre rapport annuel. Je
vous référerai à des exemples très, très, très concrets qui ont été portés à
notre attention dans le cadre de nos enquêtes, à savoir les bains qui sont
reportés, les soins d'hygiène buccale qui sont annulés. On a des personnes qui
n'ont pas été levées de leur lit pendant 36 heures. Et, bref, on a
également des CHSLD qui, ma foi, parce qu'ils rencontrent ces difficultés de
manière fréquente, ont mis en place une directive écrite qui guide le personnel
de soins sur l'organisation des soins et des services qui peuvent être annulés
ou reportés. Ça, pour nous, c'est la démonstration que la mission du CHSLD
n'est pas respectée, que les orientations ministérielles ne sont pas respectées
puisque, rappelons-nous, un CHSLD, c'est un milieu de vie substitut. C'est
l'endroit où des personnes qui ne peuvent plus vivre dans leur domicile se
retrouvent parce qu'elles ont besoin de soins de longue durée. Alors, ce sont des
exemples très concrets qui ont été portés à notre attention et qui, dans le
cadre de nos enquêtes, bien, se sont révélés exacts.
M. Lacroix (Louis) : Est-ce
qu'à votre avis il s'agit de négligence? Parce qu'on parle quand même de la
dignité humaine, est-ce que vous qualifieriez ça de négligence?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, votre question, elle est très pertinente et je vous avouerai qu'on
qualifie l'ensemble de ces manquements, d'être rendus à avoir des directives
écrites sur les soins qu'on peut reporter, qu'on peut annuler parce qu'on est
en déficit de personnel... Pour nous, ça équivaut, ça s'apparente à de la
maltraitance organisationnelle, au sens de la nouvelle loi.
Le Modérateur
: Merci.
Charles Lecavalier, Le Journal de Québec.
M. Lecavalier (Charles) :
Oui, bonjour. Sur les 45 000 prestataires d'aide sociale qui ne reçoivent
pas le crédit d'impôt solidarité, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, là.
Bon, il n'y a pas d'estimation, mais est-ce qu'on peut savoir à peu près
combien d'argent ne leur est pas versé, peut-être en moyenne, qu'est-ce que ça
représente?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, le crédit d'impôt pour solidarité, c'est le remboursement, c'est une
partie du remboursement de la taxe de vente qu'on paie, et donc les personnes
qui ont un revenu qui n'est pas suffisamment élevé peuvent obtenir un crédit d'impôt.
Donc, vous comprendrez que les prestataires d'aide de dernier recours vont
recevoir... sont susceptibles de recevoir le montant le plus élevé du crédit d'impôt
pour la solidarité. Eh bien, de fait, ce qu'on constate, c'est qu'on a des
personnes qui ont droit à ce crédit d'impôt pour solidarité et qui ne reçoivent
pas le remboursement.
M. Lecavalier (Charles) : Le
maximum, ça se trouve à être?
Mme Rinfret (Marie) : Le
maximum? Est-ce qu'on le sait, M. Dussault, le maximum?
M. Dussault (Claude) : Non, je
n'ai pas ça.
Mme Rinfret (Marie) : On
pourrait vous revenir.
M. Dussault (Claude) : On va
vous trouver l'information, puis on va vous revenir.
Mme Rinfret (Marie) : On
pourrait vous revenir avec Revenu Québec, là. Ils doivent certainement avoir un
seuil maximum pour le remboursement. Mais le chiffre exact, là, je ne l'ai pas.
M. Lecavalier (Charles) :
Mais, bon, vous écrivez que les trois instances proposent des moyens pour
réduire le nombre de prestataires, mais je vous sens sceptique, dans le
rapport, par rapport à ça. Si je comprends bien, vous préférez que ce soit
directement sur le versement d'aide sociale?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, ce qu'on a proposé aux trois instances qui sont concernées, puis je
pense que c'est important de les nommer, on parle de l'Agence du revenu du
Québec, du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale et du
ministère des Finances, qui est responsable de l'élaboration des politiques
fiscales et budgétaires, nous, ce qu'on a proposé comme solution, c'est de
revenir à ce qui se faisait avant d'exiger que ça passe par la déclaration de
revenus ou encore l'annexe D de la déclaration de revenus. Et avant, ça se
passait par le remboursement sur le chèque d'aide de dernier recours aux
personnes. Alors, c'est ce qu'on proposait. Les trois instances nous demandent
d'examiner d'autres façons qui, selon elles, pourraient être plus efficaces.
Écoutez, pour être tout à fait honnête
avec elles et avec vous, ils ont déployé beaucoup d'efforts pour rejoindre les
personnes, pour leur favoriser aussi la facilité de remplir leur déclaration de
revenus. Et, bien, ma foi, il n'en demeure pas moins qu'on a quand même 45 000 personnes — malgré
tous ces efforts-là de rendre plus accessible, de remplir la déclaration de
revenus, parce que c'est une obligation, parce que c'est un peu pour ça qu'ils
tirent sur cette ligne-là — bien, ça ne fonctionne pas, là, la
réalité nous rattrape. Il y a 45 000 personnes… Et là, c'est un
droit, là. Ces 45 000 personnes ont droit de recevoir le crédit
d'impôt pour solidarité sociale. Elles ne le reçoivent pas en raison d'une
formalité administrative, à toutes fins utiles, parce qu'on exige de compléter
une déclaration de revenus.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Merci.
Le Modérateur
: Merci.
Tommy Chouinard, La Presse.
M. Chouinard (Tommy) :
Oui. Bonjour, Mme Rinfret. Pour qu'on se comprenne bien, vous dites que ça
s'apparente à de la maltraitance au sens de la loi. La loi définit clairement c'est
quoi, la maltraitance. Ce que vous nous présentez, c'en est ou pas, de la maltraitance?
Mme Rinfret (Marie) :
Bien, je vous dirais qu'en ce qui nous concerne, c'est de la maltraitance, oui.
Oui.
M. Chouinard (Tommy) : Maintenant,
on dit… Il était… Supposément qu'il y avait une règle, là, de deux bains par
semaine dans les CHSLD, là, sauf pour les personnes qui ne peuvent pas tolérer
ça pour des raisons personnelles. Bon, là, on voit qu'il y en a qui n'ont même
pas un bain par semaine. Bon. Là, le problème, là, est-ce que c'est le discours
politique qui nous fait croire toutes sortes de choses, là, et puis qu'il n'y a
pas de raté sur le terrain, et puis, dans le fond, ce n'est pas la responsabilité
des établissements dans le sens où ce n'est juste pas les moyens qui suivent?
Expliquez-nous, là, l'origine du problème. Est-ce que c'est le discours politique
qui nous fait croire des choses ou c'est le terrain qui n'obtempère pas?
Mme Rinfret (Marie) :
Pour répondre à votre question de manière très honnête, M. Chouinard, je
vais vous dire que je crois profondément au dévouement des personnes qui
offrent les services, notamment aux personnes qui sont hébergées dans les
CHSLD, puisque c'est de cela dont on parle. Maintenant, ce qu'on constate, c'est
une pénurie de personnel. Il y a des manques d'effectif qui obligent la
réorganisation des soins, qui obligent la réorganisation des services. Partant
de là, les gens vont au plus pressant. Et c'est pour ça qu'on parle de
maltraitance organisationnelle. Ce n'est pas… C'est dans l'organisation du
travail où, là, on perd de vue que notre organisation du travail doit, malgré
tout, être centrée sur les besoins des personnes. Et ce manque d'effectif va
forcer les gens à aller au plus court, à faire des oublis, à oublier, par
exemple, de remplir le registre à l'effet que je n'ai pas levé
M. Tremblay, par exemple. Et ce qui fait que la préposée aux bénéficiaires
qui va rentrer dans le quart de travail suivant, parce que ça n'aura pas été
entré au registre, elle ne le saura pas qu'il n'a pas été levé. C'est ce qui
fait que ça cause des embûches.
M. Chouinard (Tommy) : Est-ce
qu'il est compatible, le discours politique, avec les moyens qui sont déployés?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, il y a manifestement des efforts qui doivent être faits, et c'est ce
qu'on demande, c'est ce qu'on demande au ministère de la Santé et des Services
sociaux, de répondre aux besoins de la population, de s'assurer que les
personnes qui sont hébergées... que les orientations ministérielles, que les
directives ministérielles soient claires et qu'elles soient appliquées. C'est
aussi ce qu'on demande, quand on intervient aux CISSS, aux établissements, aux
CISSS et aux CIUSSS, d'avoir une surveillance adéquate des institutions pour
justement s'assurer que les besoins des personnes qui sont hébergées sont
satisfaits.
M. Chouinard (Tommy) :
Justement, sur ce point-là, concernant les contrats de service, là, pour
l'achat de lits d'hébergement souvent transitoires dans des résidences privées,
là, vous parlez de cas où, même s'il y a toutes sortes de dénonciations qui ont
été faites à une panoplie d'autorités, là, il y a des autorités qui tolèrent
des situations d'éclosion de gale pas contrôlée. Bon. Pourtant, là, les règles
sont claires, là, sur les responsabilités qui incombent aux autorités. Là,
qu'est-ce que le gouvernement peut faire de plus, là, pour s'assurer du respect
des règles existantes, là, qui sont censées protéger les gens?
Mme Rinfret (Marie) : Le
gouvernement peut certainement émettre un message fort, des lignes directrices
claires sur ce qui est attendu à l'égard des résidences privées qui sont sous
entente, par exemple. Donc, d'avoir — puis c'est ce qu'on déplore,
dans le rapport annuel de cette année — des conditions de vie
sécuritaires et également que les centres hospitaliers, lorsqu'ils réfèrent les
personnes dans ces résidences privées, s'assurent que la résidence privée est
en mesure de répondre aux besoins des personnes qui doivent être hébergées en
fonction de la lourdeur ou non de leurs cas. Parce que ce qu'on a constaté,
c'est qu'il y a des personnes qui sont référées dans des résidences privées dont
le cas est trop lourd pour obtenir les services auxquels ils ont droit et, conséquemment,
ce qu'on a constaté, c'est que la formation des préposés aux bénéficiaires ou
du personnel qui accompagne les personnes hébergées... ils ne sont pas en
mesure de répondre à leurs besoins. C'est ce qui fait qu'on demande aux CISSS,
on demande aux CIUSSS et, par conséquent, au ministère d'avoir des ententes beaucoup
plus encadrantes. Et non seulement d'avoir des ententes plus encadrantes, mais
d'en faire un suivi plus étroit parce que... puis c'est vrai aussi dans le
cadre des demandes de certifications. Lorsqu'on fait un renouvellement d'une
certification parce qu'on est une résidence privée pour aînés certifiée, bien,
à ce moment-là, ça vaut la peine d'aller voir comment ça fonctionne, ça vaut la
peine de s'assurer que les conditions pour émettre le certificat sont
respectées. Et ces moments-là...
M. Chouinard (Tommy) :
Dernière question...
Mme Rinfret (Marie) :
...doivent être faits pas juste au moment de l'émission du certificat. Parce
que nous, on arrive, puis on... ça fait partie de notre travail, lorsqu'on a un
signalement, parce que c'est souvent dans ce cadre-là qu'on va intervenir
auprès des résidences privées ou des CHSLD. On a un signalement qui nous vient
soit d'une personne qui est allée visiter quelqu'un ou encore un membre du
personnel, ou encore un membre d'un comité des usagers, et, bien, on procède,
quand on voit, par préenquête, que c'est sérieux, on procède par visite non
annoncée. Donc, on débarque, là.
M. Chouinard (Tommy) : J'ai
une dernière question. La démission de Mme Thermitus, est-ce que c'était la
seule chose à faire, d'après l'enquête que vous avez faite?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, pour ma part, je vais revenir, puis ça me donne l'occasion de rappeler
le rôle du Protecteur du citoyen dans le cadre des divulgations que l'on
reçoit. D'abord, de faire une enquête rigoureuse, de protéger — et
vous allez m'entendre dire ça souvent — de protéger jalousement
l'identité de la personne qui a déposé ou des personnes qui ont déposé des
divulgations auprès de nous, et de même que celles qui ont collaboré à
l'enquête.
Alors, à cet égard-là, moi, mon rôle, à
partir du moment où mon enquête est faite sur la base de faits et conduite
d'une manière très rigoureuse, en respectant tous les concepts d'équité
procédurale, parce que, là, on a des enjeux de réputation, hein, on a des
enjeux qui sont très larges, donc, ce que je fais, c'est que je fais rapport à
la plus haute autorité administrative du ministère ou de l'organisme, ou encore
à la ou le ministre responsable de cette organisation, je constate s'il y a des
manquements, donc, s'il y a des actes répréhensibles, et je propose des
mesures. Et, en l'espèce, je prends acte de la démission de Mme Thermitus, qui
a été déposée ce matin à l'Assemblée nationale. Et pour le reste, je suis en
attente du suivi des mesures auprès de la ministre.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Donc, oui, en clair, Mme Rinfret, vous avez identifié des manquements et vous
avez proposé des correctifs au ministre responsable?
Mme Rinfret (Marie) : En
clair, nous avons constaté des manquements à la loi et nous avons demandé à la
ministre de nous soumettre les mesures qui seront prises pour faire en sorte
que les manquements soient corrigés.
M. Chouinard (Tommy) :
Comment pouvez-vous qualifier ces manquements-là? Quel niveau de gravité ces
manquements-là représentent pour vous?
Mme Rinfret (Marie) : La loi
prévoit que les manquements doivent être graves. En l'espèce, il y a eu des
manquements graves — puis là je vais reprendre mon texte parce que je
ne veux pas vous dire n'importe quoi — des manquements graves aux
normes d'éthique et déontologiques, donc l'article 4, paragraphe 3° de la
loi, ainsi qu'un cas grave de mauvaise gestion, y compris un abus d'autorité, à
savoir, l'article 4, paragraphe 4° de la loi. Et je n'irai pas plus
loin.
Le Modérateur
: Très
bien. Alors, Mathieu Dion, Radio-Canada.
M. Dion (Mathieu) : Oui,
bonjour, Mme Rinfret. Juste pour... En suivi à une question de mon collègue sur
la pénurie de personnel, là, vous dites que ça conduit même à une forme de
maltraitance. Dans le contexte actuel, où il y a une pénurie de main-d'œuvre,
comment voyez-vous une issue?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, c'est intéressant, votre question, parce qu'on a formulé des
recommandations aux CHSLD concernés. Et, dans les recommandations que nous
formulions, puis vous les retrouvez, là, à la page 72-73 de notre rapport, nous
sommes maintenant dans une phase de suivi de l'implantation de nos
recommandations. Et dans nos recommandations, ce qu'on demandait, c'est de
revoir les ratios du personnel responsable des personnes hébergées selon la
nature de la lourdeur de leur cas, à toutes fins utiles. Et conséquemment,
bien, effectivement, dans l'organisation du travail, les personnes se sont
mises en marge.
De la même manière, il y avait des
difficultés, puis vous allez le voir à la lecture du rapport, dans
l'identification des personnes pour chaque quart de travail. L'identification
de ces personnes-là venait tard auprès des supérieurs, ce qui fait que c'était
comme quelques jours avant d'assurer la prestation de travail que les supérieurs
se rendaient compte que, oups! il y a un trou là, je n'ai pas personne. Alors
là, ils se mettaient en mode urgence pour combler le besoin de personnel pour
ce quart de travail.
Donc, ce qui a été revu, c'est
l'organisation du travail, ce sont les méthodes de travail. Les personnes aussi
qui sont responsables de faire les horaires de travail, d'attribuer les tâches
au personnel ont été clarifiées, ce qui fait en sorte que, bien, ça fonctionne
beaucoup mieux au sein de cette institution.
M. Dion (Mathieu) : Mais avec
un contexte de pénurie de main-d'oeuvre, avez-vous des inquiétudes pour
l'avenir?
Mme Rinfret (Marie) : Bien, écoutez,
les inquiétudes que j'ai, c'est que, oui, parce qu'ils ont de la difficulté,
là. C'est un fait, là, qu'il y a de la difficulté à recruter notamment les
préposés aux bénéficiaires. Maintenant, avec une meilleure organisation du travail,
avec des bassins de personnel qui peuvent être appelés au moment approprié pour
leur permettre de se libérer, parce que là, c'est le cas actuellement, ce qui
n'était pas le cas avant, notamment, bien, ça permet de combler la lacune, le
manque, la pénurie comme telle de personnel.
Ce qui fait qu'au-delà... Et, moi, le
message que je passe ici ce matin : Avant d'arriver à élaborer un guide
des soins et des services à ne pas rendre quand je suis en pénurie de
personnel, réfléchissons à la façon dont on organise nos soins, nos tâches en
fonction du personnel, qui peut être disponible, par ailleurs, parce que je les
informe à temps que j'aurais besoin d'eux à telle heure pour tel jour.
M. Dion (Mathieu) : Une
question sur la facturation pour les lits d'hôpitaux. Je vais vous poser la
question directement : Est-ce que c'est de l'arnaque?
Mme Rinfret (Marie) : Je vous
dirais que ma réponse va être plus nuancée. Ça ne vous surprendra pas. C'est
clairement, je vous dirais, un réflexe qu'on trouve quand on rentre à l'hôpital,
qu'on passe par le service des admissions. Le personnel nous indique, nous
demande : Quel choix de chambre vous voulez? et prennent pour acquis
souvent que vous savez que si vous faites le choix d'une salle, vous ne serez
pas facturé, que si... Ce que vous ne savez pas, par exemple, c'est que si vous
faites le choix d'une chambre semi-privée, bien, ça, ils vont vous le dire
probablement, que vous faites le choix d'une chambre semi-privée, vous allez
être facturé, alors que, s'il n'y a pas de salle dans l'établissement, dans
l'hôpital, dans le centre hospitalier, bien là, vous ne serez pas facturé, mais
vous allez avoir une chambre semi-privée quand il n'y a plus de salle.
Donc, à quelque part, c'est un manque
d'information du personnel auprès des personnes qui sont hospitalisées. De la
même manière, ce qu'on a constaté, c'est qu'il y a des disparités dans un même
centre hospitalier. Il y a des disparités aussi entre les centres hospitaliers
parce que, dans nos nouveaux hôpitaux, pour prévenir les infections
nosocomiales, notamment, il n'y a plus du tout de salle, ce ne sont que des
chambres privées.
Alors, dans certains nouveaux
établissements, si on vous accueille puis on vous demande quel choix de chambre
vous prenez, que vous faites un choix de chambre privée, bien, même s'ils ont
juste des chambres privées, ils vont vous facturer la chambre privée, alors
que, dans d'autres hôpitaux où il n'y a que des chambres privées, on ne vous
facturera pas la chambre privée parce qu'on est tout à fait conscients que ce
ne sont que des chambres privées. Et la loi, de même que le règlement,
obligent... et ça, c'est notre... c'est la base de notre système universel
gratuit des services de santé, ça prend un choix pour les personnes qui est
gratuit.
M. Dion (Mathieu) : Ce que
vous dites, c'est qu'il n'y a pas de décision consciente qui est prise de
l'offrir, puis la personne dit oui, puis que, là, on facture, puis en sachant
très bien que... Est-ce qu'il y a des décisions conscientes qui sont prises à
cet égard-là dans les hôpitaux? Est-ce qu'il y a des patrons qui...
Mme Rinfret (Marie) : Oui, je
pense que ce sont des directives qui sont données au personnel de l'admission
pour remplir le formulaire. On coche, puis on ne se pose pas trop de questions.
Je ne pense pas que ce soit délibéré, mais, la conséquence de ça, c'est, oui,
on facture, alors que, dans d'autres établissements, on ne facture pas pour le
même type de chambre. De la même façon, dans certains établissements, quand le
médecin prévoit que c'est médicalement requis, l'hôpital ne facturera pas,
alors que d'autres hôpitaux vont facturer parce que c'est une chambre privée.
Donc, vous voyez, il y a là vraiment une
iniquité, là. Il y a un traitement qui est un peu anarchique, disparate,
inéquitable. En somme, c'est inéquitable, et ce qu'on a demandé au ministère,
c'est de revoir son règlement qui date de 1981 afin de le mettre à jour, de
l'actualiser pour que transparaissent les nouvelles pratiques en matière
d'hospitalisation.
Le Modérateur
:
Jocelyne Richer, LaPresse canadienne.
Mme Richer (Jocelyne) :
Bonjour, Mme Rinfret. Je me demandais, au sujet du manque de personnes, la
pénurie de personnel, ça semble être un problème très, très grave que vous avez
identifié comme source, là, de négligence envers les personnes hébergées, pourquoi,
dans vos recommandations, n'avez-vous proposé, par exemple, un plan de
recrutement massif de bénéficiaires? Parce qu'on se souvient, il y a deux ans,
M. le ministre Barrette avait annoncé l'embauche de... je pense que c'est
1 500 préposés aux bénéficiaires. Alors, ça semble être difficile.
Mais pourquoi n'avez-vous pas axé les recommandations là-dessus?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, ça aussi, c'est intéressant comme question, et je vous dirais que,
dans nos recommandations, ce qu'on suggère, c'est de mettre en place des
conditions pour favoriser la rétention du personnel. Et au CHSLD en question,
il y avait des difficultés de rétention du personnel parce que, notamment, il y
a une aile où des personnes hébergées en lourde perte d'autonomie s'y
retrouvent. Donc, pour le personnel, c'est encore plus exigeant. Alors, ce
qu'on a demandé également aux CHSLD, c'est de mettre en place des mesures qui
favorisent la rétention du personnel, et, à cet égard-là, on est, encore une
fois, en suivi de nos recommandations.
Mme Richer (Jocelyne) : O.K.
Sur la question de la maltraitance, vous dites : C'est rendu au point où
le gouvernement, finalement, ne respecte pas sa propre loi sur la maltraitance
envers les aînés. J'aimerais ça, vous entendre là-dessus, élaborer sur ça dit
quoi sur un gouvernement qui ne respecte pas une telle loi qu'il a lui-même
adoptée. Ça vous dit quoi?
Mme Rinfret (Marie) : Oui. Et
là je vais retourner sur la mission d'un CHSLD, la mission qui est prévue dans
la loi et sur laquelle on s'appuie, nous, dans le cadre de nos enquêtes. Alors,
la mission d'un CHSLD, c'est d'offrir un milieu de vie substitut incluant les
soins cliniques et des soins d'assistance, de soutien et de surveillance aux
personnes qui ne peuvent plus demeurer à domicile. Les soins doivent être
dispensés de façon adéquate, avec continuité, de façon personnalisée et
sécuritaire.
Dans les enquêtes qui ont été portées à
notre attention, ce qu'on a constaté, c'est que toutes les personnes hébergées
qui reçoivent les soins de base, administration de médicaments, l'alimentation,
certains soins d'hygiène minimaux... mais il y a d'autres soins comme les bains
hebdomadaires, les soins d'hygiène buccale, le rasage, la coiffure. Ça, c'est
évacué dès le moment où on est en manque d'effectifs. Je reviens sur le fait
que... Et ces situations-là sont suffisamment fréquentes pour faire en sorte
que les CHSLD mettent en place des guides de pratique, des directives écrites
qui guident le personnel de soins dans les choix qu'ils doivent faire sur
l'annulation ou le report des soins à donner aux personnes qui sont hébergées
dans les CHSLD parce qu'elles ne peuvent plus demeurer chez elles. On se
rappelle, un CHSLD, c'est un milieu de vie substitut.
Et ces manques font en sorte que les
personnes demeurent dans leur chambre, ne se rendent pas à la salle commune, ne
socialisent plus, mangent seules. C'est ce qui fait, au fond, que ce n'est plus
un milieu de vie, mais ça ne devient qu'un milieu de soins pour les soins de
base. C'est ce qui nous fait dire que, compte tenu de la mission des CHSLD, on
se retrouve dans des situations qui s'apparentent à de la maltraitance
organisationnelle parce que la situation et la façon dont on organise les soins
font en sorte que les besoins des personnes âgées ou en perte d'autonomie — parce
qu'il n'y a pas juste des personnes âgées dans les CHSLD au moment où on se
parle, ou en perte d'autonomie — ne s'y retrouvent plus, là, dans un
milieu de vie.
Alors, leurs conditions de vie se
détériorent. Ils ne se retrouvent plus non plus dans un milieu sécuritaire. On
voit aussi qu'il y a des personnes qui cohabitent avec d'autres personnes alors
qu'ils ont des profils qui ne sont pas compatibles. Alors, il peut y avoir de
la violence entre les personnes, et, à ce moment-là, on a aussi constaté que,
bien, les préposés aux bénéficiaires ou les personnes qui donnent les soins aux
personnes hébergées prennent plus de temps à répondre aux alarmes, que ce soit le
siège, parce que la personne est sur le bord de tomber, ce qui fait qu'il y a
plus de risque de chute. Donc, vous le voyez, c'est un ensemble de situations
qui nous ont conduits à constater la maltraitance organisationnelle dans
certains milieux. Ce n'est pas tous les milieux, entendons-nous, mais dans les
milieux qui ont été portés à notre attention et sur lesquels on a enquêté. Et
cette situation est suffisamment alarmante pour qu'on la dénonce dans notre
rapport annuel d'activité 2017‑2018.
Mme Richer (Jocelyne) : On
vous écoute, ça donne un peu froid dans le dos, on dirait un musée des
horreurs. C'est quand même l'État, c'est un service public. Diriez-vous que
l'État ne remplit pas sa mission dans les CHSLD? Quel est, selon vous...
pouvez-vous qualifier l'état de la situation, la gravité de la situation, selon
ce que vous avez observé?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, c'est le fil d'Ariane de notre rapport annuel, de mon rapport annuel
2017‑2018, c'est un message que je demande, que je lance, d'honorer nos
engagements. Alors, à partir du moment où on a une loi, on a des orientations
ministérielles qui sont claires, pour ma part, un redressement est nécessaire à
l'égard des CHSLD, à l'égard de l'accès à l'hébergement pour les personnes
âgées. La même chose en matière de soutien à domicile, parce que ça aussi, ça
fait partie de la clé, hein? Si on a des services de soutien à domicile mieux
organisés, qui répondent davantage aux besoins des personnes âgées ou des
personnes handicapées, bien, à ce moment-là, les personnes vont demeurer plus
longtemps chez elles, et donc ça va permettre aux CHSLD de vraiment répondre
aux besoins plus lourds d'une clientèle mieux ciblée.
Mme Richer (Jocelyne) : En
terminant, quand vous voyez le vieillissement de la population, est-ce que ça
accroît votre inquiétude?
Mme Rinfret (Marie) : C'est
certain, c'est certain. C'est pour ça d'ailleurs qu'on réfère, notamment en
matière de soutien à domicile... La courbe qui est présentée dans notre rapport
annuel d'activité, à la page 77, démontre très clairement qu'en ce qui
concerne la planification stratégique, donc l'engagement qu'a pris le ministère
de la Santé et des Services sociaux sur le nombre de personnes qui devraient
pouvoir profiter de services en matière de soutien à domicile, bien, on n'y
répond pas. On n'y répond clairement pas. Et ça, pour moi, ça commande un
redressement nécessaire. Et là, pour être totalement honnête, à la suite du
rapport de l'an passé, donc, 2016‑2017, il y a eu, dans le budget de cette année,
une annonce où on prévoit d'octroyer — c'était
100 millions? — en matière de services de soutien à domicile. M.
Barrette, à la suite d'une question qu'on lui avait demandée, s'était engagé,
mais verbalement, à ce que cette somme soit récurrente.
Donc, il y a là une avancée, je dirais, un
côté positif à un geste positif qui a été posé par le gouvernement pour
améliorer les services de soutien à domicile. Mais, au moment où on se parle,
au Protecteur du citoyen, malgré le fait qu'on fait le suivi, on est en attente
des mesures concrètes, comment ça se déploie, là, cet argent-là. Et je vous
assure qu'on va faire un suivi auprès du ministère à cet égard-là. Et moi, je
souhaite ardemment vous faire un rapport beaucoup plus positif l'an prochain
sur les avancées et les services offerts aux personnes qui en ont besoin, en
matière de santé et services sociaux.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Merci, Jocelyne. Avant de donner la parole à mes collègues de médias
anglophones, je vais vous poser une ou deux questions. Concernant tout d'abord
la surpopulation carcérale, le problème perdure-t-il ou s'aggrave-t-il?
Mme Rinfret (Marie) : Bien
écoutez, à cet égard-là, nous avons reçu, il y a quelques jours à peine, une
excellente nouvelle de la part du ministère de la Sécurité publique à l'effet
qu'il n'y aurait plus de triplement cellulaire. C'est une chose qu'on dénonçait
depuis assez longtemps. Donc, on nous a annoncé ce fait en nous mentionnant
toutefois que ça pouvait arriver pour des périodes de 24 heures. Alors, en
ce qui nous concerne, on est très contents de cette annonce, mais on va
demeurer en suivi, encore une fois, pour veiller au grain.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Très bien. Donc, c'est une bonne nouvelle?
Mme Rinfret (Marie) : C'est
une excellente nouvelle.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Parce que vous aviez identifié des problèmes de tensions dans les cellules où
justement il y avait des détenus qui étaient considérés…
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
une cellule moyenne, parce qu'il y en a d'un peu plus grandes puis d'un peu
plus petites, là, on peut se dire, là, que c'était 7,5 mètres carrés, et
trois personnes pouvaient y être logées, donc deux sur des lits superposés et
la troisième par terre, avec les effets personnels de l'ensemble des détenus.
Donc, vous comprendrez que, dans des périodes de chaleur, au sens propre et au
sens figuré, ça pouvait occasionner des problèmes de sécurité et de tensions
entre les personnes incarcérées, notamment.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui, et de propagation de maladies… de santé.
Mme Rinfret (Marie) : Exactement.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que vous avez identifié des cas où c'étaient seulement des risques que
vous entrevoyiez?
Mme Rinfret (Marie) :
Non, c'étaient des cas, là, où vraiment il y a eu des épisodes de violence entre
les personnes incarcérées qui étaient dus au triplement cellulaire.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
…maladies, aussi. Vous avez observé des cas de maladies.
Mme Rinfret (Marie) :
Oui, oui.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Très bien. Concernant les enquêtes en matière d'intégrité publique, vous avez
indiqué qu'il y a eu 136 divulgations. Ça peut être des divulgations, pour
un même dossier, de personnes différentes?
Mme Rinfret (Marie) :
Oui, ça peut… en fait, une divulgation peut comporter plusieurs motifs, oui.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
O.K. Puis pouvez-vous donner d'autres exemples, puisque c'est très peu
détaillé? Est-ce que, par exemple, il y a des cas que vous avez soumis à
l'attention de corps de police, notamment l'Unité permanente anticorruption?
Puis c'est surtout… En fait, la nature, là, des dossiers qui vous sont soumis
ou des signalements qui vous sont soumis depuis l'entrée en vigueur de la loi?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, oui, puis ça, ça apparaît des données qui sont mentionnées dans le
rapport annuel, là. On a eu neuf divulgations qui ont été portées à l'attention
soit de l'UPAC soit de corps de police ou encore de syndics d'ordres
professionnels. Alors, ça peut référer à des fraudes, à des vols, parce que la
Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard d'organismes
publics peut vouloir dire, quand on parle d'un usage abusif de fonds publics,
bien, ce que nous, on peut voir, ça peut être un vol et, partant de là, on va
référer le dossier aux corps de police. Est-ce que ça répond à votre question?
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui. Puis, dans ces neuf cas-là, celui de la Commission des droits de la
personne, est-ce qu'il fait partie de ces neuf cas-là non?
Mme Rinfret (Marie) :
Vous me permettrez de ne pas répondre à votre question.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Très bien, merci. Une dernière question concernant... Bon, vous avez évoqué les
inondations puis les problèmes liés au programme d'indemnisation. Est-ce qu'il
y a déjà des plaintes qui été soumises après les tornades, les rafales de vent
à Gatineau?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, on n'a reçu qu'un cas à l'égard de cet épisode, ce qui ne veut pas
dire, nécessairement, qu'il n'y en aura pas. Mais, encore là, là, c'est
nettement moindre, là. On voit que le volume, peut-être, de sinistrés explique
aussi, là, le fait que nous n'ayons pas reçu beaucoup de demandes à cet
égard-là.
Le Modérateur : Merci. Est-ce
que... Oui, Cathy Senay, CBC.
Mme Senay (Cathy) : Good morning. Bonjour. Regarding seniors homes, we heard, in the
last few years, that the situation was very difficult, it was really hard to
recruit care attendants. We had even stories about trainings for care
attendants that were done in a fast track, and that was criticized because the
training was not sufficient sometimes. What do you say to the population of Québec today? Citizens should be alarmed by
the situation in seniors' homes?
Mme Rinfret
(Marie) : Écoutez, à
cet égard-là, je pense que...
Mme Senay (Cathy) : Is it possible to have an answer in English?
Mme Rinfret
(Marie) : Oh! OK.
Mme Senay (Cathy) : I'm really sorry, but...
Mme Rinfret (Marie) : Vas-y.
M. Dussault (Claude) : Regarding the situation in the CHSLD, the long-term care
facilities, regarding the staff, there's one thing to mention that is very important. Of course, there's a lack of
staff, it's difficult to find staff, but a large part of the problem is due to
the bare facts that the conditions that the staff works in are not acceptable.
They have a ratio of staff to provide x and y number of services, but those are
average numbers. And what we found out is, when you have people who are more...
who need more attention, OK,
the burden on the staff is so high, then the staff say : I don't want to
work in this section or in this hospital, I don't want to work there because
the pressure on me is too big, OK? So, you have lack of staff there, and because you have lack of
staff, even less people want to work there, and then you have a kind of spin
that goes in the wrong way. That's why, in many of our recommendations, we say :
Make sure it's alright to have, you know, x number of staff for the people who
need the services, but make sure to adapt the number of staff given the context
you work in, because if you don't have the right amount of staff, then the
situation is so bad on the staff that nobody wants to work there, and then the
problem gets even worse. But if you do correct the situation and you make sure
you have the right amount of staff, then it becomes much easier to attract
staff and to solve the problem.
So sometimes it spins in
the wrong direction, but you could make it spin in the right direction if you
have the right amount of staff. And if the conditions you work in are more
acceptable, then you will be more attracted to work there.
Mme Senay (Cathy) : If you don't have the staff?
M. Dussault (Claude) : Well, the point here is, if all you heard… Let's say somebody you
consider working either as a nurse or to work as an assistant nurse or as a
«préposé aux bénéficiaires». If all you heard is : You are going to be
overwhelmed by the task, OK, there is no… you won't be attracted. OK?
If, on the other hand,
OK, what you heard from your colleagues or from the media is : We do
provide the right amount of staff, we're going to make sure that, if you have
to work with this person that is… let's say, I need two persons just to take
her or him out of the bed, OK, you're going to have the right amount of staff,
then you're going to be attracted by the job.
So what we're saying…
what we find out at the Protecteur du citoyen, one of the explanations for the shortage of staff is the simple
fact that the condition the staff is working on is too difficult. If we do make
sure to have the right amount of staff right at the beginning, then, I would
say, the condition of attractiveness will be there and it will be more easier to
attract people and have the right amount of staff.
Mme Senay (Cathy) : What kind of worries are you going to say to the Government to make sure that they understand
your message that, in 2018, with these annual reports, finally, they are going
to get it?
M. Dussault (Claude) : Yes. At the beginning, in the past years, the response of the Government was to, I'd say… they are going
to say : We are going to use quotas or ratios saying x number of staff or
that number of persons. That was their primary answer. The ratios in general
are fine but, of course, they are average ratios. So, when you have an average
ratio, it's OK for the average person, but it's not… if you have more cases
that need more attraction.
So, what we're saying now
to the Government is : Please,
adapt your ratios given the people you must deal with. So far the message has
been well received, both from the ministry and from the installation, the CHSLD
where we provided the recommendations.
So we ought to see in the
future if the resources will be there, but I think it's very important to say
of course it might have a lack of staff, but if the conditions of the people
worked on are not good, I mean, you won't attract anybody, and the problem then
gets even worse. If, on the other hand, you provide right conditions, put the
right amount of staff, then you will have more attractiveness to have staff.
Le Modérateur
: Merci. Raquel Fletcher, Global News.
Mme Fletcher (Raquel) : How long do you think the CHSLDs that are really experiencing bad
working conditions… how long before new staff is hired? I guess my question...
I'll reform my question : How long is it before new staff is hired, before
the staffs that are already working there burns out? So, what I'm asking is :
At what point does it become a crisis? At what point do we need to start
worrying about lack of staff in these seniors homes?
M. Dussault (Claude) :
Well, it will depend on, I would say, the resilience of the staff there, and
resilience is an individual quality. What I say : As soon as you find out
you have people that cancel their shift at the last minute, it's a sign that
you have a problem. Actually, that's something that we say to the managers of
the CHSLD : We have such types of signs, don't wait that it becomes a
crisis, because the things get only even worse, because if you lack staff, then
it's more pressure on the staff that is still there, and then they are going
to... it builds down. So, if you react... The more quickly you react, the more
quickly you will be able to solve the problem and... So, usually, if you react
quickly, you won't have to face a crisis, because if you offer good conditions,
people... Because the staff, you know, can move from one place to another. So,
if they know that, let's say, Place D is an awful place, I don't want to go
there, you see, even if there's a job offered there… so, I won't go there, it's
too awful. But if you react quickly, you don't wait until the situation is not
acceptable, you will be able to correct the situation and... So, the problem
often is, we wait too long before reacting and correcting the situation.
M. Authier (Philip)
:
It's a vicious circle.
M. Dussault (Claude) :
Yes.
M. Authier (Philip)
:
Is that what you mean?
M. Dussault (Claude) :
Yes. It's a vicious circle if you don't... if you do anything, and it could be
a positive circle if you do the right thing. If you provide the right
conditions, you are going to attract staff. If you don't provide the good
conditions, you are going to loose staff. And then, if you loose staff, things
get worse. If you provide the right conditions, the right amount of staff, the
right ratio of staff given the people you have to serve, then you are going to
attract staff and things will spin in the right direction.
Mme Fletcher (Raquel) : And when you say react quickly, what do you mean? What steps does
management need to take when they see these warning signs?
M. Dussault (Claude) : There's one case we described in the annual report. You know, for so many months that the...
When we do... One case we investigated, OK, the staff there tells us that, in
this section of the... The problems were especially in aisle of the hospital
where the more heavy cases were located. It was so difficult there, nobody
wanted to work there, OK? So, what happened was the people were declaring
themselves sick, you know,
before their shift, OK? So, the manager had to, you
know, call people right at the last minute or ask
somebody who was already there to stay there longer, OK? And that was occurring
for so long… so you should have reacted before. And the staff was saying :
Well, we're telling the manager that it's too heavy, we don't have enough staff
in this section, OK? So, why did they have to wait for the report from the Québec Ombudsman to correct the situation? Because, once again, when you put
the right amount of staff, it's possible to… staff and you solve the problem.
So, you need, you know... One
thing we found out, it's important to have a ratio to avoid too much «disparency» in the services,
but, at the same time, the ratio must not be, you know, a kind of very narrow track that you follow. You need to adapt
given the people you have to deserve and, when you do that, once again, I think
things could improve quite rapidly.
Mme Fletcher (Raquel) : I just have one more question about the flooding, the victims of flooding. Can you explain why...
what caused the wait delays and the lack of information? You mentioned four things here, but what was the root cause of
those delays?
M. Dussault (Claude) : Well, there were several causes. One... The main cause was the information provided to the citizens was not
clear at the beginning. There was also... I would say, we had a couple of cases
where the documents were lost by the ministry. And finally the other problem
was the lack of answers. Once again, you tried to call them and… no answer over
the phone, or you had to wait for so long, or not even an answer to an email.
So, all those factors were... Actually, in the complaints we received, we did
find out roughly 37% of the complaints were received regarding the floods… that
we found that were substantiated. That means that the delays were due to the
ministry. In some cases, it might be the citizen who didn't provide the right information. But we did find out, in 37% of
the cases, that the delays were due to the ministry and were not acceptable.
Le Modérateur
:
Merci. Ceci met fin à la conférence de presse. Merci à vous tous. À bientôt.
(Fin à 12 h 15)