(Treize heures vingt-quatre minutes)
Mme Montpetit : ...j'étais là aujourd'hui
pour réagir, dans le fond, à la question des cibles de réduction des gaz à
effet de serre. On a entendu M. Legault la semaine dernière qui mentionnait
qu'il voulait réviser ces cibles de réduction de GES, et je voulais réagir à ça
parce que c'est un très mauvais signal.
On a des cibles qui ont été fixées non
seulement pour 2020, on a des cibles qui ont fixées pour 2050 aussi. Le Québec
a toujours été… ça fait plusieurs années qu'on fait office de leader sur la
scène internationale au niveau des questions environnementales. On a toujours
été très ambitieux par rapport à toutes ces questions-là également, et c'est un
très mauvais signal que M. Legault, que le gouvernement est en train d'envoyer
à la population. Quand il parle de réalisme, ça sonne drôlement comme
défaitisme. Ça donne vraiment l'impression qu'il est en train d'abandonner la
bataille dans un moment où, on l'a vu avec le rapport du GIEC, on l'a vu avec
l'ONU encore ce matin qui nous rappelle que plus que jamais il faut redoubler,
tripler même les efforts qu'on doit faire quant à la lutte au réchauffement
climatique, quant à la lutte aux changements climatiques également et c'est un
très mauvais signal.
Le gouvernement, le chef du gouvernement,
le premier ministre doit être un leader dans ces questions-là, doit adopter une
posture de leadership au niveau environnemental, et ce dont on se rend compte, dans
le fond, c'est… on a présentement une responsabilité de faire tout ce que l'on
peut pour vraiment venir lutter contre les changements climatiques. Le temps,
c'est vraiment… c'est maintenant qu'il faut le faire et c'est extrêmement
préoccupant, très inquiétant qu'on ait un premier ministre, qu'on ait M.
Legault qui soit en train de se questionner et ça donne drôlement l'impression
qu'il achète du temps aussi.
On n'est pas contre la question de refaire
un bilan. Ça, c'est quelque chose qu'il faut faire de façon continue de toute
façon pour savoir où on en est. Mais réviser les cibles comme telles, c'est un
très mauvais signal. Ça donne l'impression qu'il lâche la serviette alors que
les Québécois et les Québécoises sont prêts à faire des efforts. On l'a vu au
cours des dernières semaines, il y a une mobilisation importante qui se fait.
Les partis de l'opposition aussi souhaitent de façon unanime que ce soit une
priorité ultime du gouvernement. Et donc c'est un très mauvais signal et on
retend la main à M. Legault, on retend la main au gouvernement présentement qui
aura l'occasion demain, dans son discours inaugural, de, on le souhaite, nous
rappeler à quel point, c'est un dossier important, qui doit être au coeur des
priorités du gouvernement.
Mme Porter (Isabelle) : Vous,
Mme Montpetit, est-ce que vous avez signé le Pacte pour la transition?
Mme Montpetit : Oui. J'ai évidemment
signé le Pacte pour la transition. Je pense que c'est une mobilisation qui a
été très intéressante, une initiative qui est très intéressante, le pacte, en ce
sens qu'elle se repose, dans le fond, sur une volonté… sur la différence que
chacun d'entre nous peut faire. Donc, moi, évidemment, je l'ai signé et j'ai
appuyé les initiateurs très ouvertement.
M. Cormier (François) : Mme
Montpetit, si on pose 72 gestes… je dis n'importe lequel chiffre là, mais on
pose 72 gestes qui ne sont pas adéquats, est-ce qu'on n'est pas mieux d'en
poser seulement 50 mais de les faire comme il faut? Est-ce que ce n'est pas ça,
réduire les cibles, mais de le faire comme il faut plutôt que de ne pas
atteindre un lot plus grand de cibles?
Mme Montpetit : Bien, je pense
que, pour répondre à votre question, quand il parle de réviser les cibles, on
parle de réduire les cibles. Après ça, c'est toute une autre question de
comment on y arrive, et là on n'est pas là encore.
Ce que M. Legault nous dit, c'est qu'il
souhaite les réviser pour les rendre plus réalistes, donc les diminuer. Mais, de
toute façon, il n'y a pas de plan non plus qui a été présenté, et ça, c'est l'autre
chose, on attend de savoir quel est son plan. Peu importe quelle sera la cible,
on n'a toujours pas vu le début d'une action, à part certaines, justement, qui
sont très questionnables, où il est... je pense notamment à Anticosti, je pense
notamment à Esker avec la mine de lithium, à savoir s'il y a aura un BAPE ou
pas, on n'est toujours pas fixé par rapport à cette question-là. Et donc il n'y
a toujours pas de plan, il n'y a toujours pas de moyen.
Donc, à votre question, c'est... la question
ultime, c'est de maintenir ces cibles-là et de redoubler les efforts pour y
parvenir.
M. Croteau (Martin) : ...la
cible de 2020 puis il y a la cible de 2030. Ce que M. Legault vient de nous
dire, c'est que la cible de 2030, il semblait assez clairement commis sur cette
cible, mais il disait qu'on semblait ou... en tout cas, il semblait avancer
qu'on était en voie de rater la cible de 2020.
Selon vous, est-ce que cette cible, celle
de 2020, est atteignable?
Mme Montpetit : Bien, elle est
atteignable dans la mesure où on veut faire les efforts pour l'atteindre. Elle
est atteignable dans la mesure où on a la volonté politique de le faire et, en
ce moment, la volonté politique, elle n'est clairement pas au rendez-vous,
parce qu'on a M. Legault, on a le premier ministre du Québec qui, à peine
arrivé en poste, un mois et demi plus tard, nous dit, la première décision
qu'il va prendre en matière de lutte aux changements climatiques, c'est de
venir réviser à la baisse ces objectifs-là et avant même de se questionner sur
comment il va les atteindre.
C'est pour ça que je dis, la première
chose qu'il devrait faire, c'est à tout le moins de faire un plan, de commencer
à évaluer tout ça, de voir comment il peut les atteindre.
M. Croteau (Martin) : Le
dernier bilan de GES québécois date de 2015. Il montrait que le Québec était
largement en voie de rater ses objectifs climatiques, et ce bilan était
antérieur à l'ouverture de la cimenterie McInnis.
Est-ce que vous êtes sûre que la cible de
2020 est atteignable? Parce que la plupart des gens pensent que le Québec va la
rater.
Mme Montpetit : Bien, écoutez,
ce sera au gouvernement de faire ces évaluations-là. La question, c'est :
Est-ce que c'est une raison pour réviser la cible à la baisse? C'est déjà lancer
la serviette. C'est exactement ça, moi, ce que ça me dit. C'est pour ça que je
dis : Le réalisme dont parle M. Legault, c'est du défaitisme. C'est ce
qu'il est en train de nous dire, que peu importe qu'on ait évalué qu'on y
arrive ou pas, il est en train de dire qu'il va le réviser à la baisse. Et moi,
ce que je vois, en ce moment, c'est ce que je disais tout à l'heure, ce
que je vois, c'est que les Québécois et les Québécoises sont prêts à faire des
efforts au niveau des enjeux environnementaux et ils veulent y parvenir.
M. Croteau (Martin) : Votre
gouvernement a été au pouvoir pour la quasi-totalité, là, des 15 dernières
années. Est-ce que vous estimez que, sous la gouverne du Parti libéral, le
Québec était en voie d'atteindre ses cibles de 2020?
Mme Montpetit : Bien,
écoutez, au niveau du Parti libéral, on a toujours été extrêmement, extrêmement
ambitieux non seulement par ceci, mais par les actions qu'on a posées aussi. Tu
sais, je ne serai pas sans vous rappeler qu'on a été le premier gouvernement notamment
à adopter une loi sur... un plan de lutte aux changements climatiques. Au
niveau de l'eau également, au niveau des gaz à effet de serre, il y a beaucoup
de choses qui ont été faites, puis on pourra en reparler. Donc, moi, je pense
que tous les efforts ont été investis pour y arriver, et c'est ce qui doit
continuer d'être fait.
M. Croteau (Martin) : Mais
est-ce que le Québec était en voie de les atteindre ces objectifs? Vous dites :
Tous les efforts ont été investis pour, mais ça ne veut pas dire...
Mme Montpetit : Bien,
écoutez, on avançait dans la bonne... De façon certaine, deux choses, on
avançait dans la bonne direction, et on s'était fixé des objectifs déjà pour
2030, et on était en train de discuter des objectifs pour 2050. Donc, nous, on
était en train de regarder vers l'avenir.
M. Cormier (François) : En
même temps, Mme Montpetit, quand on vous demande si c'est réaliste
d'atteindre les objectifs de 2020, vous dites que c'est réaliste quand il y a
la volonté politique et quand on redouble d'efforts. Si on redouble d'efforts,
c'est parce qu'on ne maintient pas les efforts au niveau actuel, donc les
efforts que votre gouvernement avait déterminés. C'est donc dire que, si on
maintenait les efforts au niveau où vous l'aviez mis, vous étant votre
gouvernement, on n'y arrivait pas.
Mme Montpetit : Bien là,
vous me faites dire des choses que je n'ai pas dites. C'est votre
interprétation. Ce que je vous dis, c'est qu'au cours des dernières années, au
cours de la décennie, on a toujours accéléré ces efforts-là. La lutte aux
changements climatiques est quelque chose qui a évolué au cours des années.
Elle a évolué dans les 10 dernières années, elle a évolué dans les cinq
dernières années. Encore cette année, on a adopté la loi pour les véhicules
zéro émission. On est le leader au Canada en termes de nombre de véhicules
électriques. Il y a beaucoup de choses qui ont été faites, et ces efforts-là
ont toujours redoublé. Ils ont toujours augmenté d'année en année, et ce qu'il
faut faire, c'est de continuer dans cette direction-là, pas de reculer.
Mme Porter (Isabelle) : Mais
le gouvernement devrait-il remettre en questionde son appui à l'usine
de Bécancour ou au projet de gaz naturel au Saguenay—Lac-Saint-Jean, par exemple?
Vous, qu'est-ce que vous feriez par rapport à ces deux projets-là?
Mme Montpetit : Bien, je
pense qu'aujourd'hui, en 2018, là, ce n'est même plus une question. Pour
l'ensemble des projets qui sont faits, il doit y avoir une évaluation des considérations
environnementales. Ça doit être primordial, peu importe dans quel dossier ça se
trouve à être. C'est pour ça que je parlais tout à l'heure du...
Ça dépasse l'entendement de voir une
ministre de l'Environnement qui tergiverse à savoir si elle va faire un BAPE
pour une mine de lithium qui se trouve à quelques mètres de la source d'eau la
plus potable du monde. Je veux dire, c'est fondamental, c'est de base. Donc,
pour l'ensemble des projets, cette question-là doit devenir au coeur des décisions.
Mme Porter (Isabelle) :
Mais ma question, c'est plus dans le sens aussi, ça devait... il faut être
ambitieux en matière de réduction des GES, et une bonne manière d'y arriver, c'est
d'y aller par blocs. Puis on peut penser qu'un projet de la taille de Bécancour
ou de la taille de celui de Saguenay... Bien, le gouvernement, s'il dit : Non,
ça ne se fera pas de toute façon, bien là, vous en avez un effort pour le GES.
Est-ce que ce serait un exemple de choses
que le gouvernement devrait faire, à votre avis?
Mme Montpetit : Bien,
écoutez, je pense que le gouvernement devrait commencer par faire un plan. Déjà,
si le... tu sais, je veux dire, la question, le coeur de la question est là,
c'est quelles sont ses intentions. M. Legault a dit qu'il avait entendu la population.
C'est ce qu'il a dit, il avait de bonnes intentions. Nous, ce qu'on voit à
l'heure actuelle c'est que chaque geste qui a été posé et chaque déclaration
qui a été faite, dont celle-ci de venir réduire les cibles qu'on a, sont des
gestes et des paroles qui vont dans le sens contraire.
Donc, la première chose qu'il doit faire,
c'est de nous démontrer que ce n'est pas seulement de bonnes intentions, qu'il
y a vraiment des... qu'il va passer à l'action puis qu'il fasse son plan, et
ça, ça va venir prendre... ça va être un tout, dans le fond.
La Modératrice
:
D'autres questions? Merci.
(Fin à 13 h 34
)