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Point de presse de Mme Christine Labrie, porte-parole du troisième groupe d’opposition en matière d’éducation, et M. Vincent Marissal, porte-parole du troisième groupe d’opposition en matière de fiscalité

Version finale

Le jeudi 6 décembre 2018, 12 h 40

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Douze heures quarante-cinq minutes)

M. Marissal : Bien, bonjour. Merci d'être là. Évidemment, on est ici, avec ma collègue de Sherbrooke, Christine Labrie, pour, évidemment, réagir au dépôt du projet de loi n° 3, celui sur l'uniformisation de la taxe scolaire. On trouve d'abord, évidemment, que c'est assez curieux, d'un côté, de dire que l'éducation, c'est la priorité, d'un autre côté, de s'autopriver. J'ai rarement vu un ministre des Finances aussi content de se priver de revenus. On parle de jusqu'à 900 millions de dollars par année. C'est assez incohérent, pour dire le moins, quant aux priorités de ce gouvernement-là.

Par ailleurs, on craint aussi qu'en voulant apparemment régler une inéquité entre les régions dont on vous reparlera plus longuement, on va créer une autre inéquité, c'est-à-dire que cette inéquité va toucher gravement les locataires, les locataires qui sont autour de 40 % au Québec. C'est quand même très élevé, c'est 60 % à Montréal, Christine vous parlera de Sherbrooke. Dans mon comté, Rosement, là, c'est 72 % de gens qui vivent à loyer. Alors, ces gens-là, il est illusoire de penser qu'ils vont retoucher les fruits de cette baisse de taxe scolaire. Les propriétaires n'ont aucun intérêt et surtout aucune obligation à retourner cet argent-là aux locataires.

Alors, c'est d'autant plus inéquitable pour les personnes âgées, qui sont très nombreuses en logement, et qui ont payé toute leur vie la taxe scolaire, et évidemment ne retoucheront pas, je le disais, les fruits de cette baisse parce que les propriétaires vont mettre cet argent-là, évidemment, dans leurs poches.

Alors, si le gouvernement Legault veut mettre de l'argent dans les poches du monde, en ce moment tout ce qu'il fait, c'est en envoyer directement dans la poche des propriétaires. Faites des petits calculs : à Montréal, par exemple, là, pour un triplex, ça peut représenter une économie de 500 $ à 700 $, peut-être même jusqu'à 800 $ par année pour un propriétaire d'un triplex. C'est beaucoup d'argent, faites le calcul. Ça pourrait être redonné, redistribué. Alors, on s'attend, au minimum, au minimum, à ce qu'il y ait un mot d'ordre du gouvernement qui dise aux propriétaires : On compte sur vous pour faire une certaine redistribution. Mais on ne se racontera pas d'histoires, on sait fort bien que c'est illusoire de penser que ça va arriver.

Je laisse ma collègue de Sherbrooke vous parler des commissions scolaires.

Mme Labrie : Oui. Le taux de locataires est le même à Sherbrooke aussi, hein? On parle, dans la circonscription de Sherbrooke, de 60 % des gens qui sont locataires qui ne verront pas un seul sou de cette baisse de taxe scolaire là. Et également les familles qui sont locataires ont un revenu moyen qui est plus de deux fois moins élevé que les familles qui sont propriétaires. Donc, quand on a un gouvernement qui nous dit qu'il veut remettre de l'argent dans les poches des familles, visiblement il n'a pas choisi d'en remettre dans les poches des familles les plus démunies. C'est son choix.

Ce qu'on constate avec ce projet de loi là, en fait, c'est une poursuite de l'opération d'affaiblissement des commissions scolaires qui avait été entreprise sous les libéraux, qui, dans les derniers mois, avaient fait exactement la même manoeuvre, hein, en régionalisant les taux, de diminuer les revenus autonomes des commissions scolaires en les compensant par une indemnisation du gouvernement...

M. Marissal : Une indemnité.

Mme Labrie : ...une indemnité. Ce que ça fait en sorte, là, c'est que les premiers 700 à 900 millions qui vont être mis sur la table par le ministère de l'Éducation, là, ça ne sera pas du nouvel argent. Ce qu'on a besoin en éducation, c'est de l'argent neuf pour réussir à réparer nos écoles, pour réussir à aller embaucher les professionnels dont on a besoin, pour offrir les services aux élèves dont on a besoin. Puis ça, ce n'est pas du nouvel argent qui va arriver, là, ça va être juste presque 1 milliard de dollars qui vont être mis en éducation pas pour réinvestir, pour combler une baisse de revenus que le gouvernement a décidé lui-même de créer.

Donc, nous, on pense que ça aurait été préférable de laisser les choses telles quelles. Et, tant qu'à investir près de 1 milliard sur quatre ans en éducation, on aurait préféré que ce soit un réinvestissement.

M. Bourgault-Côté (Guillaume) : M. Marissal, concernant les locataires, qu'est-ce qui pourrait être fait ou, enfin, qu'est-ce que vous allez proposer lors de l'étude de ce projet de loi là pour s'assurer qu'effectivement il y a un effet positif?

M. Marissal : Oui, bien, ma première réponse, ce que j'aurais envie de vous dire : Ce n'est pas à nous à proposer ça. C'est un mauvais projet de loi, c'est le gouvernement qui arrive avec ça, c'est contre-productif, c'est contre-intuitif, ça va à l'encontre de ce qu'ils disent parce que ça pénalise des gens qui ont le moins de revenus et qui auraient besoin, justement, d'avoir un peu plus d'argent dans leurs poches.

Malheureusement, et le ministre l'a admis lui-même, il n'y a pas de poignée légale pour obliger les propriétaires à redistribuer cet argent-là sous forme de baisse de loyer ou, à tout le moins, de gel. Bon, on peut s'attendre minimalement à ce que la Régie du logement, dans sa recommandation, tienne compte de cette baisse-là, tienne compte de la baisse dont vont profiter les propriétaires pour essayer d'en faire bénéficier aussi les locataires. Mais, encore là, on ne se racontera pas d'histoires, là, la Régie du logement n'a pas de moyen légal d'imposer ce genre de décision là. Et le ministre, qui était ici avant nous, là, tout à l'heure, visiblement, a l'air embarrassé avec ça parce que c'est embarrassant, puis il n'a pas de réponse à ça.

Alors, je pense qu'on peut minimalement dire : Retournez à la table à dessin, ce n'est pas une bonne mesure pour les locataires.

M. Cormier (François) : Mais, quand on bénéficie de sièges sur des commissions parlementaires, n'est-ce pas votre travail de suggérer des choses sur un projet de loi? Vous dites : Ce n'est pas notre travail de proposer ça. Au contraire, c'est votre travail de député de faire des propositions, M. Marissal.

M. Marissal : Oui, mais, en tout respect, je n'ai pas dit ça. Je dis que nous, on va proposer des choses, mais ce n'est pas nous, là, qui avons déposé ce projet de loi là, qui est un mauvais projet de loi.

M. Cormier (François) : Mais c'est votre travail de l'améliorer.

M. Marissal : Ce qu'on dit, c'est qu'on va proposer de retirer cette mesure-là parce que c'est une mauvaise mesure. Les anglophones ont une expression pour ça, là, ils disent : «Good politics, bad policy». Ça, ça vient d'une promesse électorale populiste, puis maintenant on est pris avec cette décision-là. On va y aller, en commission parlementaire, on va certainement faire notre travail. On va faire la démonstration qu'il y a des locataires à Montréal, parmi les plus pauvres, qui vont se retrouver à ne pas bénéficier de la baisse de taxe scolaire alors qu'ils ont payé la taxe scolaire toute leur vie.

Et, j'insiste, là, par exemple, dans Rosemont, là, les 72 % de gens qui vivent à logement, là, c'est souvent des personnes âgées seules et assez démunies aussi qui n'ont pas les moyens d'avoir une maison.

Alors, on va y aller, en commission parlementaire, vous pouvez prendre ma parole là-dessus. On va aller leur dire que c'est une mauvaise mesure et qu'il faut qu'ils trouvent, à la limite, un moyen compensatoire. Mais, comme il n'y en a pas légalement, on ne va pas réinventer la roue. Il faut qu'ils retirent ce projet de loi.

M. Cormier (François) : Dans votre discours, est-ce que vous diabolisez les propriétaires? C'est-à-dire que ce n'est pas juste les méchants propriétaires qui ont 172 millions d'appartements qui n'enverront pas... il y a aussi les petites familles qui ont des triplex, qui vont peut-être décider de freiner la hausse de l'augmentation des loyers et qui vont ne pas donner d'augmentation ou encore réduire le loyer. Là, vous dites : Personne ne va y toucher, tous les propriétaires ne le rendront pas. Est-ce que vous n'essayez pas de diaboliser les propriétaires?

Mme Labrie : C'est quand même ce qu'on encourage les gens à faire, effectivement, puis je suis certaine qu'il y en a qui vont le faire. Mais en même temps la réalité, c'est ça, c'est que c'est une diminution de taxe scolaire qui va bénéficier aux personnes qui possèdent les propriétés les plus dispendieuses.

M. Marissal : Et tant mieux si, effectivement, il y a des propriétaires avec un bon sens du civisme et de l'équité, qui disent à leurs locataires : On va vous geler cette année ou alors on va répartir la baisse sur quatre ans, on va la répartir pour que vous bénéficiiez au moins en partie de cette baisse. Sauf que, soyons clairs, là, on dit à un propriétaire de triplex, là... Et ce n'est pas des méchantes personnes, là. C'est le gouvernement qui n'a pas fait sa job, qui propose un mauvais projet de loi. Je ne veux pas les diaboliser, ces gens-là, mais on lui dit : Tu vas pouvoir garder 700 $ de plus dans tes poches à la fin de l'année. Il n'y a rien d'illégal là-dedans. À la limite, il n'y a aucun mécanisme qui dit qu'il faut que ça bénéficie aux locataires. Non, il ne s'agit pas de les diaboliser, il s'agit de dire que c'est un très mauvais projet de loi qui fait l'inverse de ce que le gouvernement veut faire, c'est-à-dire remettre de l'argent dans les poches du monde.

M. Croteau (Martin) : Vous avez évoqué quand même une piste de solution d'entrée de jeu. Vous avez parlé, au minimum, ça prendrait une directive pour faire en sorte que les locataires puissent... Pouvez-vous élaborer là-dessus?

M. Marissal : Je parlais de la recommandation annuelle du pourcentage d'augmentation des loyers qui est émise par la Régie du logement. Mais ça, vous savez, c'est une directive, hein, il n'y a personne qui vérifie ça. Chaque année à chaque 1er juillet, on a des histoires d'horreur de gens qui se retrouvent avec des augmentations de loyer beaucoup trop élevées. On peut s'attendre, au minimum, à ce que la Régie du logement, qui est là pour protéger les locataires, en tienne compte dans sa directive ou dans sa recommandation. C'est même une recommandation, là, qu'on dit : Cette année, vous pourriez, vous, propriétaires, augmenter de 2 %, par exemple, parce que c'est le coût de la vie. Il faudrait tenir compte du fait que les propriétaires vont avoir plus d'argent à la fin dans leurs poches en raison de la baisse. Mais on s'entend que c'est symbolique, là. Ça a valeur morale, ça n'a pas valeur légale, là.

M. Croteau (Martin) : Mais qu'est-ce qui vous fait douter que la régie sera en mesure de jouer son rôle et d'effectivement faire profiter les locataires de cette nouvelle donne fiscale, finalement?

M. Marissal : Parce que c'est une recommandation, c'est une recommandation. Et tant mieux si la régie le fait, là, j'insiste, parce qu'effectivement c'est son rôle que de défendre les locataires. Mais les directives et les recommandations de la régie, année après année, n'empêchent pas parfois, malheureusement, des abus dans l'augmentation des loyers.

Mme Labrie : Puis ça va aussi être éminemment complexe parce que ce taux-là qui est proposé, il est proposé pour l'ensemble du Québec, alors que les diminutions de taxe scolaire vont varier d'une région à l'autre.

M. Croteau (Martin) : Sur le coût de la promesse, ça avait été chiffré à 700 millions en campagne électorale. Là, on pourrait atteindre 900 millions, selon ce que nous dit M. Girard. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

Mme Labrie : Bien, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, c'est pratiquement 1 milliard de fonds supplémentaires, d'argent neuf dont on aurait cruellement besoin en éducation. C'est de l'argent dont on a besoin en ce moment dans les classes, dans les écoles. Vous connaissez aussi bien que moi... Les Québécois et les Québécoises connaissent la situation dans les écoles. Ils savent que les toits coulent. Ils savent que la qualité de l'air est mauvaise. Ils savent qu'il manque de professionnels, que les classes débordent. Je pense qu'on n'a pas les moyens, comme société, en ce moment, de dire : On va mettre presque 1 milliard sur la table seulement pour compenser une diminution de taxe scolaire. On a besoin de cet argent-là de plus.

M. Marissal : C'est curieux qu'on arrive à 200 millions d'écart. C'est quand même 200 millions, là, ce n'est pas le petit change au restaurant, là. Alors, comment se fait-il que, pendant la campagne, alors que les chiffres sont publics, les chiffres sont connus, on n'ait pas évalué de façon plus claire? Quant aux explications du ministre des Finances tout à l'heure, ce n'était pas très, très clair non plus. C'est peut-être 700 millions, peut-être 900 millions. Il faudrait qu'on s'entende au moins sur le montant. Justement, on parlait d'aller faire le travail en commission parlementaire, et nous le ferons, mais il faudrait au moins qu'on sache exactement de quel montant il est question ici, là.

M. Croteau (Martin) : J'ai une question sur un autre sujet, là, si mes collègues ont terminé. J'aimerais vous entendre sur cette alarme lancée par le DGEQ, ce matin, qui réclame du législateur qu'il encadre la collecte de données par les partis politiques. Comment le gouvernement doit-il réagir à cet appel du DGE?

M. Marissal : Je pense que le gouvernement doit effectivement toujours s'assurer de la protection des renseignements personnels. En tout cas, je vais parler pour mon parti, c'est ce que nous faisons. On l'a toujours fait en respect des lois. On respecte toutes les lois en matière de protection de la vie privée et des renseignements personnels, c'est absolument essentiel. Mais, de toute façon, c'est essentiel pour notre relation avec nos militants, avec nos membres puis avec les gens avec qui on peut entrer en contact, de toute façon.

Cela dit, je n'ai pas lu complètement la directive ou le rapport dont vous faites part tout de suite. Je vous invite, si vous avez des questions très précises sur le fonctionnement à Québec solidaire, de contacter les gens de Québec solidaire à Montréal, c'est-à-dire ce qu'on appelle le national. Mais je sais, parce qu'on sort d'une campagne électorale, que le respect de toutes les lois en matière de renseignements personnels, le respect est total, en tout cas, en ce qui nous concerne.

M. Croteau (Martin) : Mais actuellement les partis politiques ne sont soumis à aucune loi sur la protection de la vie privée, contrairement à l'entreprise privée, justement. Est-ce qu'ils devraient l'être et peut-on faire confiance aux partis? Je ne parle pas nécessairement de Québec solidaire, je pourrais parler de n'importe quel parti.

Mme Labrie : Bien, je pense qu'un meilleur encadrement est bienvenu parce que c'est très important pour la confidentialité des citoyens. Puis, nous, certainement qu'on va s'y conformer si l'encadrement est amélioré.

M. Marissal : Je ne peux pas vous parler, M. Croteau, des autres partis, je ne connais pas leurs pratiques. On a vu parfois, dans le passé, des pratiques très douteuses, là, de financement sectoriel. Ça n'a pas nécessairement à voir directement avec le renseignement, la protection de renseignements personnels, mais, en tout cas, je peux vous garantir qu'à Québec solidaire, là, on est, en latin, là, «by the book» sur ces affaires-là parce que, de toute façon, c'est une question de respect avec les gens avec qui on communique. Mais, de toute façon, ce ne serait pas brillant bien, bien de notre part que de tricher sur ce genre de renseignements, sur ce genre de relation qu'on a parce que c'est une relation de confiance qu'on a avec...

Cela dit, on pense aussi — et c'est dit dans le rapport, là, le DGEQ l'admet, là — qu'il faut garder un équilibre pour assurer que nous soyons capables, comme parti politique, d'entrer en contact avec les gens, y compris pour faire de la sollicitation, y compris pour les inviter à des événements. Donc, oui, il doit y avoir absolument un équilibre. On ne peut pas construire un mur de fer entre la population et les partis politiques, ce serait aussi contre-productif parce qu'on a besoin de leur parler. Ça circule dans les deux sens, ils veulent nous parler aussi à l'occasion. Mais, si on a besoin ou qu'on juge qu'on doit renforcer la loi ou inclure dans la loi, on n'est certainement pas contre le fait de protéger la vie privée des gens. Merci.

(Fin à 12 h 58)

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