(Onze heures cinquante minutes)
M. Carmant : Bonjour, tout le
monde. Hier, les DPJ ont déposé leur bilan annuel. Je tiens, en premier lieu, à
saluer tout le travail accompli au cours des 40 dernières années par tous les
intervenants du milieu. Merci beaucoup. Votre travail est essentiel pour nos
enfants.
Cet été, j'ai eu le plaisir de faire le
tour de toutes les DPJ du Québec, de les rencontrer et d'écouter leurs difficultés
et les solutions qu'ils voient pour l'avenir. Ça a été des plus constructif et
ça m'a permis de mieux comprendre ce qu'ils vivent sur le terrain. Je suis
conscient qu'il reste énormément de travail à faire. Les Québécois nous ont
élus pour qu'il y ait du changement, et ça fait partie de mon engagement. Je
travaille tous les jours en ce sens.
Ceci dit, comme vous, j'ai constaté une augmentation
des signalements. Plusieurs facteurs expliquent une telle hausse.
Tout d'abord, l'élargissement de la loi en
2007, qui permet aux gens de faire des signalements s'ils croient qu'un enfant
puisse être en situation de danger, par exemple un risque d'abus physique ou
encore un risque de non-fréquentation scolaire, ça ne veut pas dire
automatiquement que les enfants sont retirés de leur famille, mais la DPJ n'a
pas d'autre choix que d'évaluer la situation.
De plus, suite aux événements des dernières
années, le niveau de sensibilisation de la population est à la hausse. Les gens
sont plus attentifs à ce qui peut arriver à nos enfants, à une situation qui
pourrait mener à de l'abus physique ou verbal. La sécurité de nos enfants, c'est
d'abord et avant tout une responsabilité collective, et j'insiste là-dessus.
Depuis que le gouvernement a agi, on
constate une diminution au niveau des listes d'attente. C'est une très bonne
nouvelle en soi. En date du 8 septembre, la liste est passée de 3 800
à 2 500. C'est certain qu'on voudrait qu'il y en ait moins, mais c'est
quand même un bon début.
Notre gouvernement a injecté
65 millions de dollars, 18 millions pour le soutien clinique, ce qui
veut dire plus d'intervenantes seniors pour épauler les équipes. Ça, je pense,
c'est important de bien comprendre ce concept-là. Ce qu'on voyait auparavant,
c'était vraiment une fuite des intervenantes qui venaient à la DPJ et qui
quittaient. Nous, ce qu'on a voulu faire, c'est une nouvelle stratégie où on a
décidé d'encadrer les équipes avec du personnel plus senior pour stabiliser le
recrutement.
Par la suite, on a engagé un deuxième
47 millions où là les jeunes intervenantes vont venir, vont pouvoir
travailler avec la DPJ, être mieux encadrées et rester dans les équipes, qui
seront plus stables. C'est plus de 500 nouveaux postes pour les DPJ. On
est également conscients du défi que représente l'embauche de ces ressources,
surtout en période de plein emploi. Il faut revaloriser cette profession, leur
donner les outils nécessaires pour faire leur travail et qu'elles souhaitent
demeurer en poste.
Maintenant, que reste-t-il à faire pour ne
plus que ça se reproduise, un drame comme cet été? Bien sûr, la création de la
commission Laurent est un point important car elle nous permettra certainement
de cibler où sont les problèmes et nous pourrons, dès lors, nous y attaquer.
J'ai une très grande confiance en Mme Laurent, et les commissaires, ainsi
que les élus qui ont décidé d'y participer. La commission saura nous dresser un
portrait réel et juste de la situation.
Mais il faut aussi regarder vers l'avenir,
faire une réflexion et définir ce que nous voulons, comme société, pour nos
enfants. Les signalements à la DPJ, c'est une chose, mais il faut voir plus
grand. La DPJ ne peut pas être la salle d'urgence des services sociaux. Il faut
faire de la prévention, du dépistage. Tout est vraiment intimement lié. Et c'est
pour ça que notre gouvernement a lancé le programme Agir tôt, pour qu'on puisse
diminuer les risques de négligence chez les enfants de 0-5 ans et qu'on
puisse s'assurer que les services en première ligne soient présents pour tous
nos enfants dès leur plus jeune âge.
Le gouvernement s'est donné comme priorité
l'éducation et la santé de nos enfants. Bientôt, j'annoncerai de nouvelles
directives ministérielles qui aideront aussi les DPJ et les intervenants dans
la poursuite de leur mission. Merci beaucoup.
La Modératrice
: M.
Cormier.
M. Cormier (François) : Concernant
le rapport de la Protectrice du citoyen, M. Carmant, on a vu qu'il y a
des enfants qui font face à un bris de service, notamment pour les troubles du
langage. C'est-à-dire qu'ils ont des services du ministère de la Santé jusqu'à
cinq ans, ils arrivent à l'école, et là il n'y a plus de service disponible. La
Protectrice du citoyen dit au ministère de la Santé : Il faut que vous
vous occupiez de ces enfants-là jusqu'à tant qu'ils retrouvent du service à
l'éducation. Est-ce qu'il faut faire un rappel à vos troupes que ces gens-là
ont besoin d'aide?
M. Carmant : Merci de la question.
En fait, il faut qu'on reçoive le rapport et puis qu'on l'étudie. Mais, sur ce
sujet-là, précisément, là, je pense que c'est la beauté d'Agir tôt. Agir tôt,
ce n'est pas juste la santé, mais c'est également la famille et l'éducation.
Donc, maintenant, ce qu'on va faire, on va les dépister plus tôt. On va leur
donner des services plus tôt puis on va s'assurer que le service se transmette justement
du milieu de la santé au milieu de l'éducation ou du milieu préscolaire,
garderie, jusqu'à l'éducation. Donc, ça fait partie de notre mission, de
s'assurer qu'il n'y ait pas de...
M. Cormier (François) : Donc,
vous leur dites : Tenez bon, ce problème-là va se régler. Est-ce que c'est
ce que je comprends?
M. Carmant : Absolument. On
est en train de s'y attaquer. Et les premiers recrutements ont commencé pour le
programme Agir tôt.
M. Bovet (Sébastien) : Il y a
aussi, dans le rapport de la Protectrice du citoyen, semble-t-il, le cas évoqué
de jeunes en difficulté et des risques de suicide lorsqu'ils sont pris en
charge par la DPJ, notamment le fait qu'on ne porte peut-être par une attention
assez grande à ces cas-là, et il y a le cas d'un ado qui s'est suicidé. Est-ce
que c'est quelque chose qui vous préoccupe, ce risque de suicide et cette prise
en charge des ados dans les centres jeunesse?
M. Carmant : Ah! absolument. Puis
la santé mentale de nos jeunes, c'est quelque chose de prioritaire. On veut faciliter
l'accès aux services, comme je vous parlais tantôt, de services en première
ligne. Les psychologues, l'accès aux psychologues, c'est quelque chose de très important
et qui est difficile à avoir actuellement au niveau de la DPJ parce que justement
la première ligne s'est vidée, au cours de ces dernières années, de ces
services. Les psychologues travaillent peu dans le réseau. Ils sont
sous-utilisés. Il faut en ajouter dans le réseau, et, Mme McCann et moi, on
travaille là-dessus. La santé mentale aussi, on veut faciliter l'accès. Au
forum Jeunes et santé mentale, ce qu'on a vu, c'est que les jeunes nous
disaient qu'ils frappaient trop souvent à des portes closes. Donc, ce qu'on a
décidé de faire, c'est de lancer le programme Aire ouverte pour qu'il y ait
accès plus facilement pour les jeunes qui ont des problèmes psychosociaux ou de
santé mentale.
M. Bovet (Sébastien) : Ici, par
contre, c'est très précis, là. Puis je comprends que vous n'avez peut-être pas
tout lu le rapport de la protectrice, mais il est question de la sécurité des
jeunes dans les centres d'hébergement. Donc, une fois qu'ils sont pris en
charge par l'État, dans le fond, par la DPJ, on présume que, lorsqu'ils sont
là, ils sont en sécurité. Or, on s'aperçoit, à la lumière de cet exemple
précis, qui est peut-être marginal, mais qui est quand même un drame, là, parce
qu'un ado s'est suicidé, qu'il y a des problèmes de sécurité. Est-ce que vous
êtes capable de dire aux Québécois aujourd'hui que les enfants qui sont dans le
réseau de la DPJ ou en centre d'hébergement, plus précisément, là, sont en
sécurité?
M. Carmant : Oui, on veut
qu'ils soient en sécurité. Et c'est pour ça qu'on veut faciliter la transition
des services également. Ce qu'on a demandé au début de l'été, suite à la
tragédie de la Capitale-Nationale, c'est de s'assurer qu'il y ait un meilleur
arrimage entre les centres jeunesse et les services qui sont à l'extérieur des
centres jeunesse. Évidemment, à l'intérieur des centres jeunesse, on veut, encore
une fois, également consolider les équipes, s'assurer que le personnel soit
expérimenté, bien encadré et qu'il veuille rester en place.
M. Bovet (Sébastien) : Je
termine là-dessus, mais vous admettez qu'il y a un problème, quand même, de
rétention de personnel, de pénurie de main-d'oeuvre qui affecte tout le monde,
là, finalement, mais qui affecte aussi les centres d'hébergement de la DPJ.
Vous admettez ça?
M. Carmant : Tout à fait. Et
ce qu'on veut faire, c'est vraiment ajouter du personnel. Mais il faut, en
premier lieu, mieux les encadrer parce que c'est un travail très difficile
qu'ils doivent faire, ces jeunes intervenants.
M. Bovet (Sébastien) : Est-ce
que ça pose un problème de sécurité en ce moment, selon vous?
M. Carmant : Bien, écoutez,
selon le cas que vous rapportez, c'est sûr que c'est un problème dans certaines
situations. Mais, en général, nous, on veut s'assurer que ça ne se reproduise
plus.
La Modératrice
:
Questions en anglais?
Mme Fletcher (Raquel) : Yes. In English, on the same issue, can you explain why the
services are not streamlined? You mentioned you want to make a better... have
the services inside the center and services outside the center. Why are they
not accessible in this moment? Why is there that problem?
M. Carmant : Which topic are you talking about, the speech therapists or
suicide?
Mme Fletcher (Raquel) : No, the case of suicide, yes.
M. Carmant : Well, I think that's one of the things that the commission Laurent
will look at. Why are not things very streamlined, as you mentioned? I think
there's a lack of continuity in these services, and we need to improve this. And
this is one of the things that was recommended by the CDPDJ after the
Capitale-Nationale event and this is one thing that we're going to make sure is
taken care of over the next few months.
Mme Fletcher (Raquel) : On the annual report, you talked about when children are taken away
from their homes, and it says that the DPJ — I
guess we say the same thing in English, I'm not sure what it is in English…
M. Carmant : Youth protection.
Mme Fletcher (Raquel) : …youth protection, thank you — has
no other choice in certain cases, and you were presenting a new strategy. Can
you elaborate a little bit on that point that you're trying to make in English?
M. Carmant : I don't understand, really, the question.
Mme Fletcher (Raquel) : You said in French that, when kids are taken away from their homes or
taken out of their homes… you mentioned that in French. What was the point that
you were trying to make there?
M. Carmant : I don't think I mentioned that in French. But, I mean, the baseline
thing is that what we want is that the youth protection system is for... to
protect the kids first. I mean, that's the big change. That's what we announced
after the Granby event. The thing that has to be taken into account first is
the protection of the children.
Mme Fletcher (Raquel) : And you said you want a new strategy. What is the new strategy?
M. Carmant : Well, OK, so what I talked about was about
hiring new personnel because before, when the waiting list was growing, what
they would do would be to do what they call a blitz where they would take
experienced people from other regions and bring them into, let's say, «les
Laurentides» to help, but then they would go away after, back to their local
networks. So, now, what we decided to do is to increase the number of
experienced workers from within. Some actually came back
from retirement to help us, and I thank them a lot. And now that the teams are
stable and that the younger professionals have a more stable environment, now
we can hire much more of these young professionals and we believe that they will stay within youth protection.
Mme Fletcher (Raquel) : And what difference is that making?
M. Carmant : Well, from now on, we already see that there's already a third in
the reduction of the waiting list, which is something they're very happy with.
And we hope that, in the next few months, we'll see that these young professionals will be staying with youth
protection.
M. Bovet (Sébastien) : Le
chiffre du tiers de la réduction de la liste d'attente, c'est depuis quand, ça,
c'est depuis les mesures que vous avez instaurées?
M. Carmant : Entre le 23 juin
et le 8 septembre. Ce qui est intéressant, c'est que cette diminution reflète
surtout le premier 18 millions d'encadrement parce que les recrutements
qu'on a faits après l'annonce de 47 millions à la fin juin commencent à
peine à entrer. Donc, c'est pour ça qu'on est encouragés par ce qu'on voit.
M. Bovet (Sébastien) : Le
18 millions a permis d'embaucher du monde que vous allez garder?
M. Carmant : Oui, d'expérience.
M. Bovet (Sébastien) : Le
taux de rétention, est-ce qu'il a changé?
M. Carmant : C'est difficile
de dire pour le moment parce que les jeunes commencent à rentrer actuellement.
M. Bovet (Sébastien) : C'est
difficile, c'est trop tôt? D'accord.
M. Carmant : Ce qu'on a fait,
c'est qu'on a ramené des plus expérimentés sur le terrain puis on a
consolidé... Ceux qui avaient déjà plus de 20 ans d'expérience, par exemple,
ont pu avoir des postes d'encadrement, et les jeunes les ont remplacés.
Mme Fletcher (Raquel) : Mais,
quand vous dites les jeunes, vous voulez dire les jeunes travailleurs?
M. Carmant : Travailleurs,
oui, excusez-moi.
M. Bovet (Sébastien) : Donc,
ça prenait juste 18 millions?
M. Carmant : Vous savez,
initialement, quand je les avais rencontrés en janvier, c'était l'investissement
qu'on voulait faire, mais on aurait rattrapé les choses sur un beaucoup plus
long intervalle. Le 47 millions nous donne espoir que, d'ici un an, ça va
être réglé.
M. Bovet (Sébastien) : Régler
la liste d'attente?
M. Carmant : La liste
d'attente, oui. Les autres choses, ça s'en vient.
Des voix
: Merci.
M. Carmant : Merci, tout le
monde.
(Fin à 12 h 2)