(Dix-sept heures cinquante-trois minutes)
M. Arseneau : C'est commencé,
je pense. On va débuter le point de presse, si vous voulez bien. Alors, Joël
Arseneau, porte-parole du Parti québécois en matière de transports, notamment.
M. Ouellet : Martin Ouellet,
leader parlementaire du Parti québécois.
M. Arseneau : Alors,
évidemment, le sujet, aujourd'hui, c'est le taxi. On est dans la phase finale
de l'adoption du projet de loi sur le taxi, le projet de loi n° 17.
Alors, ce qu'on peut dire aujourd'hui, c'est que, dès le départ, le projet de
loi qui a été déposé par le ministre Bonnardel était mauvais. Il le demeure,
malheureusement. Au bout de plus d'une centaine d'heures de travaux en
commission parlementaire, on ne peut pas dire que le projet de loi, dans son
fondement, a changé de façon profonde.
C'est un projet qui est présenté sous le
couvert de la modernisation de l'industrie du taxi, alors qu'il s'agit
essentiellement d'un projet de déréglementation qui fait sauter les cadres qui
étaient en place. Plutôt que favoriser une transition pour l'industrie du taxi
actuelle, qui pourrait effectivement se moderniser et permettre à de nouveaux
joueurs de prendre leur place, on a décidé essentiellement de faire sauter tous
les cadres, avec des conséquences qu'on anticipe comme étant dramatiques pour
nombre de familles, de chauffeurs, de propriétaires de taxi. Ça, on l'a dit dès
le départ et on le répète encore aujourd'hui.
Évidemment, dans le processus des
nombreuses heures de discussion, on a senti dès le départ une résistance très
grande du ministre. Et ça, il faut le mentionner. On est dans les dernières
heures, où il y a eu un peu de mouvement, mais dès le départ, le gouvernement,
et le ministre en particulier, lorsqu'il était question de bonifier son projet
de loi, nous disait que, si on n'était pas d'accord avec son projet de
pseudo-modernisation, on était passéistes. Il a souvent interpellé l'opposition
pour dire que, si on n'était pas avec lui, on était contre lui; si on n'était
pas du côté du projet de loi n° 17, on avait un
regard vers le passé plutôt que vers l'avenir. On verra comment la chose va se
déployer.
Mais essentiellement, si on a un gain,
c'est celui d'obliger le ministre à se rasseoir avec nous à l'Assemblée
nationale, le 31 mars 2022, pour pouvoir faire un premier bilan de la
déréglementation dans l'industrie du taxi. C'est un gain qu'on a obtenu à
l'arraché hier. Et il était assez hallucinant d'entendre le ministre nous
accuser de faire du blocage dans les travaux parlementaires, tout de suite
après avoir accepté de rendre des comptes à l'Assemblée nationale, et aux
citoyens, et à l'industrie du taxi à court terme, alors qu'au départ il ne
voulait le faire que dans cinq ans.
Alors, ça, c'est un gain, je pense, qui
est significatif. Parce qu'on sait qu'il va y avoir des ajustements à faire
dans ce projet de loi. Je le mentionnais à plusieurs reprises ces derniers
jours que, sur les 275 articles du projet de loi, il y en a au-delà de 200
qui ont dû être amendés et la plupart par le gouvernement lui-même. C'est donc
dire que ses devoirs, il ne les avait pas faits.
Aujourd'hui, on a aussi obtenu une copie
du rapport ou du rapport préliminaire des projets pilotes pour l'ouverture du
marché du transport rémunéré de personnes au Québec à des compagnies comme
Uber, un rapport qui est largement caviardé et qui ne nous permet pas,
contrairement au moment où on l'avait demandé, c'est-à-dire à l'ouverture des
travaux de la commission... il ne nous a pas permis de juger de l'impact des
nouveaux joueurs et comment on pourrait bonifier le projet de loi n° 17 tel qu'il avait été déposé. Alors, oui, le ministre,
en bout de ligne, remet son rapport, mais il est inutile pour bonifier le
projet de loi, ce qui est profondément malheureux.
Mme Crête (Mylène) :
Qu'est-ce qui vous fait croire que le ministre Bonnardel veut identifier les
lacunes de sa loi dans le premier bilan qui sera fait en 2022?
M. Arseneau : Bien, je pense, en
fait, que l'autre élément qui a été obtenu par l'industrie du taxi et qui
n'aurait pas pu être obtenu sans le travail de l'opposition, en commission
parlementaire, c'est celui d'une table de concertation qui va devoir se pencher
sur les impacts du projet de loi, sur le déploiement, là, du nouveau modèle. Alors,
je pense qu'il faut quand même faire confiance au ministère des Transports et
au ministre pour faire preuve de suffisamment de transparence au moment d'un
rapport d'étape et d'apporter les modifications nécessaires lorsque le temps
sera venu de faire l'évaluation des changements qui ont été imposés.
Je voulais aussi mentionner qu'on avait pu
aussi accélérer le paiement des compensations. Le ministre ne souhaitait pas le
faire, et il a finalement décidé, en bout de course, de le faire. Même si les
paiements ne sont pas suffisants, au moins, ils seront effectués immédiatement
après l'adoption du projet de loi. C'est un gain pour l'industrie, même si, en
contrepartie, ce qu'on aurait voulu, c'est que l'industrie puisse continuer de
fonctionner avec un certain nombre de secteurs réservés. Il y en a quelques-uns
qui ont été aussi ajoutés au projet de loi, là, le transport adapté, les
contrats gouvernementaux pour le secteur de la santé, la CNESST et certains
autres contrats. Donc, c'est un gain. Et, au départ, ce n'était pas prévu. Le
ministre avait oublié la mobilité durable, il avait oublié le transport adapté
et nombre d'éléments également.
Je vais laisser Martin peut-être compléter
sur la procédure actuellement aussi, là, puis ensuite on pourra prendre les
questions.
M. Ouellet : Merci, Joël.
Très brièvement, juste rappeler que Joël, comme porte-parole, a fait un travail
de proposition et non pas d'opposition pendant tout le long du projet de loi en
question. Parce qu'on est une équipe qui manque peut-être de joueurs
présentement, actuellement, à l'Assemblée nationale, évidemment, dans certains
moments du projet de loi en question, on ne pouvait pas être deux endroits au
même moment. Joël a dû, certaines fois, sortir du projet de loi n° 17
pour aller faire d'autre chose mais gardait un oeil attentif sur ce qui se
passait.
Bref, j'ai trouvé quand même hasardeux le
ministre Bonnardel, hier soir ou tôt ce matin, de nous accuser de faire de
l'obstruction. Vous avez souvent entendu notre chef... d'être une opposition de
proposition. C'est ce qu'on a fait à travers le projet de loi. Évidemment, on
n'a pas réussi à le faire modifier à la saveur et à la couleur qui nous
auraient amenés à voter pour. Évidemment, on est contre les dispositions
finales. Mais, de dire que le Parti québécois cherchait à faire de
l'obstruction ou, du moins, de ne pas participer aux travaux, c'était
extrêmement dommageable pour le travail fait par notre formation politique.
Juste donner un exemple. Le projet de loi
sur les maternelles quatre ans vient juste de terminer. Donc, on dirait qu'il y
a, dans cette volonté du gouvernement caquiste de procéder rapidement à leurs
projets de loi, dans certains cas brouillons, qu'ils amendent et ils amendent
des articles à la lueur de l'étude détaillée... Le Parti québécois fait un
travail, je pense, juste, de proposer des modifications qui répondent aux
préoccupations des acteurs qui sont touchés. Joël a eu l'opportunité de
discuter avec plusieurs acteurs du taxi, entre autres, dans le projet de loi
n° 17, Véronique l'a fait aussi du côté des maternelles quatre ans. Donc,
notre travail est de s'assurer que la pièce législative, lorsqu'on est surtout
contre, dans certains cas, on est capables de minimiser les impacts sur les
clientèles qui nous contactent.
Donc, on est souvent le porte-voix des
gens qui sont touchés par les projets de loi en question. Donc, on les entend
dans la rue, ils nous appellent et ils nous envoient des courriels. Donc, c'est
important pour nous d'être leur voix. Donc, j'aimerais juste rappeler au gouvernement
de la CAQ que, même s'ils ont eu une majorité, ils n'ont pas la majorité des
députés à l'Assemblée nationale, et qu'il y a des gens, des groupes qui nous
appellent pour faire entendre leur voix, et on sera cette voix-là, comme opposition,
pour faire des propositions pour amender, dans certains cas, les projets de loi
et continuer à faire notre travail.
M. Dion (Mathieu) : L'entente
que vous avez eue aujourd'hui... Vous y prenez part à l'entente, là, quelque
part là, l'entente de principe?
Une voix
: Oui.
M. Dion (Mathieu) : Bon.
Un bâillon fait porter l'odieux au gouvernement d'adopter une loi qui n'a pas
le réel consentement de la Chambre. Aujourd'hui, d'accepter cette entente-là, d'ailleurs,
n'avez-vous pas l'impression d'abandonner l'industrie en vous disant : On
ne sera pas allés jusqu'au bout de ce qu'on pouvait? L'obstruction parlementaire,
c'est un levier législatif que vous avez. Vous n'avez pas un peu cette
impression-là d'abandonner un peu, en quelque sorte, l'industrie?
M. Ouellet : Bien, de
notre côté, ça n'a jamais été notre intention dans le cas du projet de loi
n° 17. Je le disais tout à l'heure, Joël a travaillé pour amender le
projet de loi en question. Évidemment, on était contre, au départ, et, à la
mesure que les discussions avançaient et on voyait la fermeture du ministre, on
ne trouvait pas une façon d'être totalement enchantés et de voter pour. Mais ça
n'a jamais été notre intention de bloquer les travaux et de forcer le
gouvernement à l'adopter, effectivement, sous bâillon.
Et je veux juste rappeler, et Joël en a
fait part devant les représentants du taxi, si on avait été dans un bâillon, si
ça avait été la volonté d'une autre formation politique de se rendre jusque là,
le gouvernement aurait pu, dans certains cas, décider de retirer des choses
dans le projet de loi, et, à mon humble avis, peut-être que l'industrie aurait
été encore plus perdante que le projet de loi actuel. Il y a toujours un risque
de se rendre en bâillon parce que, là, le cadre temporel, il est connu, il est
verrouillé, et là, c'est au désir et à la volonté du gouvernement de décider de
la finalité. Donc, nous, ce n'était pas une option qui était privilégiée.
On a toujours été en étroite collaboration
avec les gens de l'industrie. On a fait des propositions au ministre puis on a,
à travers les branches, essayé des voies de passage qui, à notre avis, auraient
pu être satisfaisantes pour le Parti québécois, mais ça ne s'est pas tout à
fait tout passé comme ça. Mais nous, à chaque moment du projet de loi, on a
essayé de le faire avancer. Donc, on trouvait assurément, pour notre formation
politique, très hasardeux de décider de mettre les freins aujourd'hui et hier
et plutôt de dire : Bien, écoutez, ça va être le coût politique à payer si
c'est un bâillon.
M. Arseneau : Bien,
d'ailleurs, juste en complément, depuis le début des travaux, là, on parle du
mois d'août jusqu'à maintenant, on n'a jamais fait d'obstruction. Les travaux
ont été particulièrement lents, par bouts, et ce n'est pas nous qui faisions
durer les débats ou les séances. On n'a pas non plus ralenti le rythme ces
derniers jours. Donc, on n'a jamais eu l'intention de pousser le gouvernement à
porter l'odieux de l'adoption de ce projet de loi par bâillon. On a, au
contraire, cherché à aller défendre l'industrie et les consommateurs jusqu'au
bout, et c'est ce qui fait qu'hier, plutôt que de faire de l'obstruction, on a
fait des propositions.
Et je parlais du rapport tout à l'heure. On
a obtenu un gain, là-dessus, sur une reddition de comptes à plus court terme.
L'autre élément que j'avais oublié de mentionner tout à l'heure, c'est qu'aujourd'hui
aussi le gouvernement s'est engagé à ce qu'au-delà de la formation d'une table
de concertation, qu'elle ait un mandat qui touche le déploiement du service des
taxis à travers les régions et les territoires et qu'on voie, par exemple, sur
le nombre de voitures qui seront déployées dans certaines régions, à trouver un
équilibre qui soit adéquat entre les besoins du territoire en question et
l'offre de l'industrie. Et ça, ça a été réglé, je dirais, il y a deux heures.
Si on avait fait preuve de résistance et
qu'on avait bloqué l'évolution des discussions et des travaux, il y a fort à
parier que ce gain-là, on ne l'aurait pas obtenu dans un bâillon. Alors donc,
l'objectif, pour nous, ce n'est pas d'amener le gouvernement à prendre la voie
autoritaire, c'était d'arriver avec la meilleure pièce législative possible. Et
ce qu'on a conclu, ces derniers jours, c'était de continuer à faire des
propositions. C'était la meilleure façon d'obtenir des gains pour l'industrie
et pour les Québécois.
Des voix
: Merci.
M. Arseneau : Merci.
(Fin à 18 h 5)