(Neuf heures trente-trois minutes)
Le Modérateur
:
Bonjour. Alors, bienvenue à cette conférence de presse matinale de l'aile parlementaire
du Parti québécois. S'adresseront à vous, dans l'ordre, M. Sylvain Gaudreault, porte-parole
du Parti québécois en matière de santé; Mme Dominique Massie, directrice
générale de l'Association pulmonaire du Québec; Dr Frédéric Series, du centre
de recherche de l'IUCPQ; et M. Anthony Kavanagh, porte-parole de l'Association
pulmonaire du Québec. M. Gaudreault.
M. Gaudreault : Oui. Alors,
bonjour à tous et à toutes. Ça me fait extrêmement plaisir d'être ici. Je veux,
d'abord et avant tout, souhaiter la bienvenue au Dr Series, à Mme Massie et, bien
sûr, à Anthony Kavanagh, comme porte-parole de l'Association pulmonaire, qui
sont ici aujourd'hui avec nous pour parler d'un dossier absolument important
pour des milliers, des centaines de milliers de Québécois et de Québécoises,
dont je fais partie. Je vous l'affirme aujourd'hui, je souffre d'apnée du
sommeil, et cet appareil, qui est le mien, m'accompagne depuis quelques mois déjà
et aide beaucoup à réduire l'apnée du sommeil et les conséquences, surtout, de
l'apnée du sommeil.
Cependant, cet appareil que vous avez ici,
qui m'a été prescrit par mon pneumologue, m'a coûté 1 365 $. Heureusement,
comme député, j'ai une assurance qui a fait en sorte qu'elle a été... que cet
appareil, c'est-à-dire, m'a été remboursé. Mais, pour la plupart des gens qui
ont des problèmes d'apnée du sommeil et qui doivent avoir ce type d'appareil,
il n'y a pas de remboursement, plusieurs d'entre eux n'ont pas d'assurance, et
même chez ceux qui ont une assurance, certaines assurances ne couvrent pas
l'appareil ou couvrent en partie seulement l'appareil. Il n'y a pas non plus,
au gouvernement du Québec ou à la Régie de l'assurance maladie, de crédit
d'impôt spécifique ni d'autres types de couverture, contrairement à ce qui se
passe dans d'autres provinces et dans d'autres pays à travers le monde. Anthony
pourra vous en parler tout à l'heure.
Alors, pour nous, c'est extrêmement
important de porter cette cause aujourd'hui, de demander à la Régie de
l'assurance maladie du Québec de demander au gouvernement du Québec, à la
ministre de la Santé de trouver une couverture pour les gens qui ont le
problème de l'apnée du sommeil et qui ont besoin de cet appareil-là.
Moi, j'ai écrit une question à la ministre,
une question au feuilleton, dans notre jargon parlementaire, au mois de juin.
Elle nous a répondu, il y a quelques semaines, au mois de septembre, mais c'est
clairement insuffisant. Elle a répondu qu'elle analysait la question du
remboursement et, deuxièmement, elle a répondu qu'elle mettait un comité sur
pied pour cette question, mais, dans ce comité, malheureusement, l'Association
pulmonaire n'a pas été invitée à siéger. Alors, on demande à la ministre
minimalement d'inviter l'Association pulmonaire, mais deuxièmement, d'accélérer
le pas et de rembourser cet appareil.
Alors, je laisse la parole...
Le Modérateur
: Oui,
Mme Massie.
Mme Massie (Dominique) :
Alors, bonjour à tous. Merci d'être là, un lendemain d'élection.
Alors, tout d'abord, permettez-moi de
remercier M. Sylvain Gaudreault, justement, pour cette question posée en
Chambre, parce que, naturellement, c'est un traitement qui est disponible, mais
trop souvent inaccessible. Nous sommes très heureux de la mise en place du
comité. Naturellement, comme M. Gaudreault a dit, nous aurions aimé faire
partie du comité, mais nous réagirons, bien entendu, au projet de règlement.
Quand je dis «un traitement disponible,
mais trop souvent inaccessible», je dois vous dire que... Je vais vous parler
de notre expérience. L'Association pulmonaire du Québec existe depuis
134 ans. Nous couvrons 89 maladies et causes, mais un de nos dadas et
une de nos maladies que nous avons énormément de difficulté à pouvoir répondre...
On a, chez nous, cinq inhalothérapeutes qui répondent au téléphone. Nous
recevons des appels, plus de 5 000 appels par année, et majoritairement
sur l'apnée du sommeil.
Généralement, on a des appels où les gens
veulent avoir de l'information, mais particulièrement les gens nous appellent
parce qu'ils n'ont pas les moyens de pouvoir se payer l'équipement et, très
souvent, les gens sont même menacés leur carte de compétence s'ils n'ont pas
les équipements. Et, comme M. Gaudreault vous disait il y a quelques
minutes, bien, les gens au Québec, ce n'est pas tout le monde qui ont une
couverture d'assurance et ce n'est pas tout le monde qui ont les moyens de
pouvoir se le payer. La RAMQ ne couvre pas, naturellement, le remboursement de
tels appareils, contrairement à ce qu'on observe dans d'autres provinces
canadiennes ou ailleurs dans le monde.
Vous savez, en 2017, un Québécois sur
20 — ça représente 417 000 — détenait un diagnostic
d'apnée du sommeil. Toutefois, c'est près d'une personne sur 10 qui aurait dû
recevoir un diagnostic d'apnée. Donc, imaginez, on a une population qui tourne
autour de 8,4 millions. Cela représente combien de personnes? 834 150
qui auraient dû avoir un diagnostic.
Donc, l'apnée du sommeil non traitée est
associée à d'importantes conséquences de santé, dont le Dr Series va vous
parler, et notre porte-parole Anthony va vous témoigner de son expérience
personnelle.
Juste deux petites statistiques. Les personnes
qui souffrent éprouvent généralement de la somnolence excessive durant la
journée et l'autre moitié d'entre elles sont déprimées. C'est sans compter le
risque d'accident de la route. Dans la population générale, on parle de
2,5 %, quand elles ont de l'apnée du sommeil, qui risquent d'avoir plus
d'accidents et, chez nos camionneurs, on parle de 6,3 % de risque
d'accident.
Donc, en plus de répondre à un besoin
d'équité, le remboursement du traitement pour les personnes souffrant d'apnée
du sommeil entraînerait, sans conteste, une réduction importante des coûts pour
le système de santé et représenterait également un investissement significatif
dans la santé et la qualité de vie des Québécois. C'est sûr que les personnes
qui souffrent d'apnée du sommeil vont plus souvent chez leur médecin que la
population en général. On parle de quatre à cinq fois de plus par année.
D'ailleurs, en avril 2014, à la demande du
MSSS, l'INESSS s'était penché sur le sujet, et le rapport de l'INESSS indique,
sur le plan des coûts associés à la mise en place d'un programme de
remboursement, les projections budgétaires de 2014 à 2018 concernant la mise en
place d'une politique de remboursement de la CPAP, couverture publique
complète, on estimait des coûts annuels récurrents variant entre 30 et 34 millions
pour l'équipement et de 11 à 12 millions pour le remplacement annuel des
accessoires. Nous croyons que nous sommes rendus à payer pour les gens qui sont
dans le besoin. Merci.
Le Modérateur
: Merci,
Mme Massie. Dr Series.
M. Series (Frédéric) :
Bonjour. Merci beaucoup de cette invitation. Je pense, mon rôle, c'est un peu de
présenter la maladie, qu'est-ce que la maladie telle que l'apnée du sommeil et
est-ce que c'est une pathologie qui est rarissime ou pas. Écoutez,
statistiquement parlant, ça peut varier d'un pays à l'autre, on pense que la
prévalence, à l'intérieur de la population, varie entre 5 % et 10 %,
en général plus élevée chez l'homme que chez la femme, mais, en fait, c'est vrai
jusqu'à la ménopause. À la période de la ménopause, la prévalence chez la femme
rattrape la prévalence de chez l'homme.
Il y a des stéréotypes. On parle toujours
apnée du sommeil, on pense à un profil d'un monsieur de 50 ans, obèse,
avec un gros cou, etc. Je pense que c'était ce qui était vrai probablement,
historiquement, il y a 20 ou 30 ans — on pense toujours à M.
Hitchcock qui devait faire de l'apnée du sommeil — ce n'est plus
vrai. En 2019, on fait des diagnostics beaucoup plus facilement qu'on le faisait
auparavant et actuellement on fait des diagnostics chez des sujets plus jeunes,
c'est des sujets qui n'ont pas d'excès de poids. Il faut éviter les stéréotypes
en disant : Cette personne-là a un poids normal ou c'est une femme, donc
elle ne fait pas d'apnée du sommeil. Je pense qu'il faut retirer ces
stéréotypes-là de nos idées.
Après, c'est quoi, l'apnée du sommeil?
Bien, l'apnée du sommeil, c'est simplement le fait qu'au cours de la nuit il y
a des périodes d'arrêt ou de baisse de respiration liées à des fermetures au
niveau de la gorge, qui surviennent des centaines et des centaines de fois au
cours de la nuit, dont le patient ou la patiente n'a pas conscience. Accessoirement,
il peut se réveiller avec l'impression d'étouffer, la nuit, mais c'est le plus
rarement, en fait. La plupart du temps, c'est observé soit par l'entourage,
soit les personnes ne s'en rendent pas compte. Les conséquences, bon, c'est, en
général, un sommeil de mauvaise qualité, de la fatigue, de la somnolence dans
le jour, l'impression de ne pas récupérer. Ce sont des symptômes qui existent
depuis des années.
Lorsqu'on voit un patient en consultation,
il est, en général, porteur de cette condition depuis 10, 15, 20 ans. Il a
intégré toutes ces conséquences dans sa qualité de vie, dans ces perturbations
de sa vie de tous les jours. Il ne se sent pas malade comme tel. Il va avoir
des troubles du caractère, il va être impatient, il va être fatigué, il va être
somnolent, mais on va dire : Bien, tu as toujours été comme ça, tu es un
sujet ronfleur. On dit : Bien, c'est normal, tu ronfles, ton sommeil n'est
pas bon. Mais ce n'est pas le problème du ronflement. C'est le problème de ces
troubles de respiration au cours de la nuit.
Donc, c'est très fréquent. Il faut y
penser. Je pense que dans les 10, 20 dernières années, au niveau technologie,
on est maintenant capable de faire des diagnostics beaucoup plus fréquemment
qu'il était autrefois. Si je me réfère à notre centre à l'Hôpital Laval,
l'IUCPQ, initialement, on faisait des diagnostics essentiellement en
laboratoire de sommeil. Maintenant, la plupart des diagnostics sont faits à
domicile, avec des appareils ambulatoires, qui nous permettent de faire à peu
près trois quarts des diagnostics en dehors du laboratoire de sommeil, ce qui
permet de faire des diagnostics plus précoces. On a encore besoin d'examens en
laboratoire, mais dans des cas beaucoup plus spécifiques.
Après, pourquoi est-ce qu'il faut traiter?
Bien, il y a les conséquences dont je vous ai parlé, en termes de conséquences
sur la qualité de vie, la somnolence, etc. Mais il y a aussi des conséquences
en termes de risques, en particulier, cardiovasculaires. On sait que chez les
personnes, particulièrement, qui ont de l'apnée sévère, il y a un risque
augmenté d'infarctus du myocarde, d'hypertension artérielle, de troubles du
rythme cardiaque, d'accident vasculaire cérébral, et ça, ce risque-là est
directement proportionnel à la sévérité de la maladie. Donc, même des personnes
qui ne sont pas symptomatiques, qui ne se plaignent pas de somnolence, qui ne
se plaignent pas de fatigue, s'ils ont des anomalies respiratoires sévères, ce
sont des indications à les traiter.
En termes de traitements, qu'est-ce qu'il
y a à notre disposition? Il y a tout un éventail de dispositifs possibles pour
le traitement. La pression positive continue, dont on vous a parlé, est le
traitement qui est actuellement le plus connu. Il a été disponible depuis 1981.
C'est le traitement qui est le plus efficace. 100 % des personnes qui
l'utilisent vont avoir leur problème d'apnée corrigé. Ce n'est pas la panacée.
Ce n'est pas forcément possible chez tout le monde. Ça peut être une solution
transitoire. En particulier, chez les personnes qui peuvent perdre du poids, la
perte de poids peut être très efficace.
Il y a d'autres options thérapeutiques
aussi, mais je pense que ce traitement-là est le traitement qui concerne probablement
75 % à 80 % de nos patients, et c'est important de le rendre
accessible à tous, parce qu'effectivement certains de nos patients ont des
régimes d'assurance qui les couvrent. Ce n'est pas vrai pour tout le monde, et
on voit tous les jours des patients qui ne peuvent pas être traités parce que
leurs moyens financiers ne leur permettent pas de fournir la machine. Donc, je
crois, c'est quelque chose qui est capital, et je pense que, si on fait
référence à d'autres pays, ou provinces au Canada, ou d'autres pays européens,
je pense que le Québec devrait se comparer favorablement à toutes ces autres
entités géographiques. Merci.
Le Modérateur
: Merci,
Dr Series. M. Kavanagh.
M. Kavanagh (Anthony) : Bonjour,
mesdames et messieurs. Merci de votre présence ce matin. C'est avec plaisir que
je m'adresse à vous aujourd'hui en tant que porte-parole de l'Association
pulmonaire du Québec et en tant que personne vivant avec l'apnée du sommeil
depuis maintenant plus de 30 ans.
Vous savez, Dominique et, bon, le docteur
ont dit beaucoup de choses que je vais vous redire, mais je crois qu'il faut
redire les choses pour que ça rentre dans la tête des journalistes et des
Québécois. Une personne sur 10 souffre d'apnée du sommeil. C'est énorme. Parmi
les maladies qui sont aggravées ou déclenchées par ce syndrome, on note
principalement l'hypertension artérielle, l'infarctus du myocarde, le diabète
de type 2, l'obésité, la dépression, la perte de libido, des troubles de
concentration et des pertes de mémoire, un taux de cholestérol élevé,
l'hypothyroïdie, l'artériosclérose, l'angine de poitrine et l'arythmie
cardiaque. La liste est beaucoup, beaucoup trop longue. Certains articles
récents font même un lien entre la présence d'apnée du sommeil et la maladie
d'Alzheimer. D'autres statistiques démontrent même un taux d'accidents de
voiture jusqu'à 15 fois plus élevé que celui du reste de la population. En résumé,
l'apnée du sommeil diminue significativement l'espérance de vie et la qualité
de vie du patient.
Toutefois, dû au fait que la condition se
développe lentement, le patient ne réalisera que très rarement l'étendue de son
problème. J'ai perdu mon père trop jeune, car il n'avait pas été diagnostiqué à
temps, par l'apnée du sommeil. Il a souffert de la majorité des maladies que je
viens de mentionner. Ma femme et mes enfants ont failli me perdre à deux
reprises, la deuxième fois en décembre 2017, lorsque j'ai fait une embolie
pulmonaire suivie d'un infarctus pulmonaire. Étant alors en Nouvelle-Calédonie,
j'ai dû attendre trois semaines avant de revenir près des miens. Conséquemment,
j'ai raté Noël et le temps des fêtes avec ma famille.
L'apnée pulmonaire détruit la vie de bien
des gens avant qu'elle ne soit détectée. Ça a pris 20 ans pour moi et ça a
laissé bien des cicatrices. Entre autres, j'ai souffert de perte de mémoire, de
dépression, de problèmes d'anxiété, des changements d'humeur et d'irritabilité
ont été très fréquents, le manque de concentration, de jugement, les maux de
tête, la baisse de libido et, bien sûr, la fatigue chronique que j'ai dû
affronter pendant des années avant d'être diagnostiqué. J'en étais arrivé à un
point où je ne pouvais même plus supporter mon poids d'humanité et je n'ai pas
encore mentionné les dommages collatéraux : la souffrance des conjoints,
de la famille et de l'entourage des malades, les dommages économiques causés
par la baisse de performance au travail et les absences dues aux congés
maladie, sans compter les visites incessantes chez les médecins et à l'hôpital
qui, elles, sont un poids pour notre système de santé.
Vous comprenez pourquoi je veux sensibiliser
les gens à la problématique de l'apnée du sommeil. Je vous pose la question
suivante : Pourquoi tous les pays développés qui offrent l'assurance
maladie universelle, en gros, tous sauf les États-Unis, remboursent ou offrent
les appareils à pression positive continue à leurs concitoyens, mais pas le
Québec? Pourquoi? Pourquoi les provinces le font et pas le Québec? Pourquoi?
L'équipement coûte entre 1 300 $ et 3 000 $, selon le type
d'appareil par patient, une somme qui ferait économiser des millions au
gouvernement et à la société. J'ai confiance en la bonne foi du gouvernement
caquiste et aussi au Parti québécois, surtout, qui a fait le pas, et on est là
grâce au Parti québécois, grâce au... Et j'espère qu'ils vont remédier à cette
injustice car les Québécois méritent beaucoup mieux. Merci.
Le Modérateur
: Merci beaucoup.
On passe maintenant aux questions. Mme Richer.
Mme Richer (Jocelyne) :
Oui, bonjour. Ça serait pour M. Kavanagh, s'il vous plaît. Ça semble être
une cause qui vous tient à coeur, si vous avez accepté d'être porte-parole.
J'aimerais... vous avez un peu énuméré les problèmes que vous avez eus.
J'aimerais que vous me disiez à quel point cet état-là ou cette maladie-là peut
être invalidante pour quelqu'un qui...
M. Kavanagh (Anthony) :
Bien, tout ce que je vous ai mentionné, j'ai vécu tout ça. Je vivais... mon
médecin, quand j'ai été diagnostiqué, m'a dit : Je ne sais même pas
comment vous faites pour fonctionner, pour tenir debout, pour faire vos
spectacles. Je gardais deux heures d'énergie par jour pour faire mes shows, et
tout le reste de la journée j'étais dans un brouillard, j'étais épuisé et
j'étais dans un état de faiblesse même au niveau de la volonté et du mental, et
tout, et il y a des gens qui en ont profité. Il y a des gens qui ont profité de
cette faiblesse-là, et ça m'a fait perdre beaucoup d'argent, des opportunités,
beaucoup de choses.
Mais ma qualité de vie, d'être moins
présent pour justement, bien, ma femme, mes enfants. Je ronflais comme un
marteau-piqueur. Ma femme me donnait des coups chaque soir. Elle dormait...
quand on était en tournée, elle dormait dans la baignoire tellement je faisais
du bruit. Je pensais que je devenais fou. Je pensais que je devenais fou parce
que... je ne comprends pas pourquoi j'étais déprimé, pourquoi ma vie n'avait
aucune saveur, aucun goût. Bien, c'est parce que je ne dormais jamais.
Le médecin m'a dit : Vous ne dormez
jamais, M. Kavanagh. Vous perdez connaissance, vous ne récupérez jamais,
jamais. Donc, heureusement que j'ai eu cette chance, j'ai eu cette chance
d'être né avec une énergie débordante, sauf qu'à un moment donné l'âge nous
rattrape.
Mme Richer (Jocelyne) : Si
c'était aussi invalidant, comment se fait-il que ça n'a pas été diagnostiqué
plus tôt?
M. Kavanagh (Anthony) : Bien,
parce que souvent les médecins ne sont pas au courant. Les autres spécialistes
ou les généralistes ne connaissent pas bien l'apnée du sommeil, donc ils ne
sont pas au courant. Donc, ce qui m'est arrivé, moi, j'allais voir plusieurs
médecins... encore une fois, ça fait perdre de l'argent aux concitoyens, parce
qu'on gaspille de l'argent en allant voir une dizaine de médecins qui nous
prescrivent toutes sortes de médicaments qui, eux, aggravent l'apnée du
sommeil. Donc, c'est un cercle vicieux et c'est ce qui m'est arrivé. On me
prescrivait des antidépresseurs, des ci, des ça, et je n'en avais pas besoin. J'avais
juste besoin de dormir, de dormir correctement, et donc... Ça a pris, une fois
que j'ai été diagnostiqué et on m'a apporté mon appareil, ça a pris deux ans...
Ah oui! j'ai oublié de vous dire, j'étais 10 ans plus vieux que mon âge, au
niveau hormonal, à l'intérieur. Le manque d'oxygène m'avait fait vieillir, et
j'étais 10 ans plus vieux que mon âge. Et, grâce à la machine, j'ai retrouvé
les taux normaux, mais ça a pris deux ans.
Mme Richer (Jocelyne) : Si je
comprends bien...
M. Kavanagh (Anthony) : J'ai
95 ans en ce moment.
Mme Richer (Jocelyne) : Bien,
vous ne les faites pas quand même. Avec l'appareil, c'est un peu comme une
béquille, dans le sens qu'on ne guérit pas, si je comprends bien, de cette
maladie-là, mais c'est comme une béquille qui aide à vivre et à dormir...
M. Kavanagh (Anthony) : Bien,
en fait, je ne serais pas devant vous ce matin, si je n'avais pas eu cet
appareil. Je serais parti. On est venu me chercher... J'étais en tournée encore
en Europe, on est venu me chercher, on pensait que je faisais un infarctus.
J'avais tous les symptômes d'un infarctus : la douleur au bras, à la
poitrine, tout ça, et c'est là où on m'a diagnostiqué, on m'a dit : M.
Kavanagh, la prochaine fois, ce sera le vrai infarctus. Ça m'a sauvé la vie et
ça a sauvé la vie de plusieurs de mes amis dans mon entourage parce que je leur
ai parlé de ça. J'ai des amis qui étaient malades souvent et qui ne
comprenaient pas pourquoi ils étaient malades, et ça leur a sauvé la vie aussi.
Mme Richer (Jocelyne) : Une
question à M. Gaudreault. Vu l'importance de cette maladie-là et sa prévalence
qui est importante, comment vous expliquez le fait que ça n'a jamais été pris
au sérieux puis que ça ne l'est toujours pas encore aujourd'hui?
M. Gaudreault : Bien, je ne
l'explique pas, justement. Alors, c'est pour ça que je demande au gouvernement
et à la ministre d'agir rapidement. Moi, je pense qu'il y a, et je pense que c'est
M. Series ou Mme Massie qui l'ont dit, je pense qu'il y a beaucoup de préjugés
reliés à l'apnée du sommeil pour toutes sortes de raisons peut-être reliées à
ce qu'on pense être des mauvaises habitudes de vie, simplement au fait qu'on
dort de travers ou on n'est pas du bon bord. Le conjoint nous pousse de l'autre
côté parce que tu ronfles moins quand tu es de ce bord-là, mais ça dure cinq
minutes.
Alors, c'est beaucoup de méconnaissance, de
mythes sur l'apnée du sommeil. Et pourtant, je pense qu'Anthony l'a décrit
mieux que quiconque, ça a des conséquences majeures sur la qualité de vie et
sur la santé. Et également l'apnée du sommeil provoque des dommages collatéraux
qui sont majeurs et qui entraînent des coûts supplémentaires au réseau de la
santé. Quand on doit traiter quelqu'un après un infarctus, ça coûte plus cher
que de payer 1 300 $ pour un CPAP.
Alors, il faut absolument que le gouvernement
agisse. On est en période, ce que nous dit le gouvernement, de surplus. Alors,
il faut être capable d'agir pour permettre aux citoyens d'avoir le remboursement
de la machine.
Journaliste
: ...
M. Gaudreault : Oui, bien, peut-être
juste pour répondre, ça pourrait coûter combien, au total, on évalue à autour
de 30 millions, à peu près, 30 millions, puis, après ça, il y a du remplacement
de machines, parce qu'au bout d'un an il faut peut-être remplacer le tuyau ou
le masque. Donc, voilà.
Le Modérateur
: Oui,
Mme Germain.
Mme Massie (Dominique) : Mais
l'équipement de masque et de tuyaux, on dit que ça coûte 11 millions.
Mme Germain (Nicole) : Avez-vous
chiffré actuellement combien les gens au Québec ont accès à cet appareil-là, parce
que...
M. Gaudreault : Pardon?
Combien...
Mme Germain (Nicole) : Avez-vous
chiffré combien de Québécois ont accès à cet appareil-là et ont pu avoir
l'appareil parce qu'ils avaient les moyens ou... en pourcentage ou en... C'est-u
un sur deux?
Mme Massie (Dominique) : On
parle à peu près 75 000 personnes qui ont accès, présentement.
Mme Germain (Nicole) : Sur
combien, ça? Sur combien?
Mme Massie (Dominique) :
Bien, on dit que, normalement, ça devrait être une personne sur 10 qui devrait l'avoir.
Ça fait que, faites le calcul, ça fait 800 quelques mille.
Mme Germain (Nicole) : ...personnes
qui ont l'appareil, c'est les personnes qui avaient... soit qui ont une
assurance privée...
Mme Massie (Dominique) : Qui
devraient être diagnostiquées, mais présentement, ceux qui sont diagnostiqués,
c'est une personne sur 20, mais ils n'ont pas nécessairement l'appareil, parce
qu'ils n'ont pas nécessairement les moyens de l'avoir.
Mme Germain (Nicole) : Ceux
qui ont l'appareil, vous dites, autour de... O.K., puis eux...
M. Kavanagh (Anthony) : Mais
il faut penser à un truc, parce qu'on m'écrit... depuis que je suis porte-parole,
on m'écrit, des gens qui souffrent d'apnée du sommeil m'écrivent, et il ne faut
pas oublier que 2 000 $ à 3 000 $... Une mère de famille ou
un père de famille qui a deux enfants ou plus doit faire des choix, et souvent
ils me disent : Je n'ai pas les moyens de mettre 2 000 $,
3 000 $ sur une machine. Donc, ils continuent à souffrir, continuent
à être malades, et ça peut aller très, très loin.
Je parlais de l'Europe et des autres pays
développés. En Europe, non seulement c'est remboursé, mais ils viennent chez
toi t'apporter ta machine, t'équiper, et il y a un suivi qui se fait. Partout,
sauf au Québec. C'est insensé, pour moi.
Mme Germain (Nicole) :
M. Kavanagh, depuis que vous avez l'appareil, quelle différence vous avez
vue, là, sur votre état de santé?
M. Kavanagh (Anthony) :
Je revis. Je revis. Au niveau hormonal, tout va bien. J'avais une testostérone
qui était au sous-sol. Toutes mes hormones étaient... J'ai perdu du poids, je
me sens mieux. Dès que l'appareil est mal calibré, tout de suite, je replonge,
puis, oh, on le recalibre, tout va bien. Je vivais dans une espèce de tunnel
sombre et puis soudainement j'ai repris goût à la vie. Tout avait du goût
soudainement, et j'ai retrouvé de l'inspiration, voilà, l'envie de sortir,
l'envie de vivre. J'étais plus joyeux, plus intéressant pour mes amis, pour ma
famille. Donc, ça m'a sauvé la vie et ça a changé ma vie.
Le Modérateur
: Il nous
reste deux minutes.
Mme Germain (Nicole) : Pourquoi
il y a si peu de gens qui sont actuellement diagnostiqués? Peut-être, M. le
pneumologue, pourquoi il y a si peu de gens qui sont diagnostiqués?
M. Series (Frédéric) : Bien, écoutez,
les statistiques sont vraies à travers tous les pays. 80 % des patients
avec apnée du sommeil sévère ne sont pas diagnostiqués, soit parce qu'ils ne
sont pas reconnus, ils ne sont pas adressés en centre spécialisé, soit parce
qu'ils... en fait, c'est quelque chose qui n'est simplement pas considéré.
Le nombre de personnes qui sont venues en
consultation parce qu'ils ont demandé à leur médecin d'être référées, parce que
le médecin pensait que ce n'était pas une problématique d'apnée du sommeil, je peux
vous en donner une liste effroyable, parce que c'est souvent méconnu. Ça c'est
beaucoup amélioré, je vous dirais, avec l'éducation médicale continue, l'augmentation
de l'accès aux moyens diagnostiques, ça s'est beaucoup amélioré. Mais reste qu'on
a une majorité d'apnées sévères qui ne sont pas reconnues et ne sont pas
traitées, puis c'est vrai partout à travers le monde.
Mme Massie (Dominique) :
Mais il faut dire aussi que les gens n'ont pas tous les moyens. Il faut dire
que les gens n'ont pas tous les moyens d'être diagnostiqués parce que c'est
difficile d'avoir un rendez-vous à l'hôpital pour avoir un diagnostic. Puis,
quand il faut payer pour avoir un diagnostic, bien là, sortir 1 000 $
de ta poche... On ne l'a pas.
Le Modérateur
: Oui.
M. Laforest.
M. Laforest (Alain) :
Petite dernière question. Bonjour, M. Gaudreault. Si vous voulez juste
vous mettre au centre. En tant que futur chef du Parti québécois, qu'est-ce que
vous pensez de l'élection fédérale hier?
M. Gaudreault : Bien,
écoutez, là, votre préambule... je ne sais pas où vous avez pris cette
nouvelle-là, là. On aura l'occasion d'en reparler, mais mon chef parlementaire
intérimaire fera un point de presse à 11 h 30.
M. Laforest (Alain) :
...vous pensez quoi du résultat, là, vous, là?
M. Gaudreault : Bien,
écoutez, moi, je veux féliciter tous les candidats qui sont élus. Je suis
extrêmement heureux des résultats pour le Bloc québécois, notamment Mario
Simard dans Jonquière, que j'ai accompagné, que j'ai aidé du début jusqu'à hier
soir tard, j'ai fait des appels. Mais, pour le reste, pour les interprétations
plus larges, je vais vous laisser avec mon chef Pascal Bérubé.
M. Laforest (Alain) : La
souveraineté vient de renaître?
M. Gaudreault : Bien, la souveraineté
n'est jamais morte, M. Laforest. Et ce qui va faire en sorte que nous allons
avancer davantage, c'est que le Québec va gagner davantage. Et nous avons un
Bloc québécois qui va défendre inconditionnellement les intérêts du Québec.
Alors, ça, c'est un gain extrêmement important.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. Merci.
(Fin à 10 heures)