(Onze heures quarante-quatre minutes)
M. Roy
: Bien, merci
beaucoup à tous d'être là. Écoutez, nous sommes devant un précédent qui, selon
moi, est extrêmement dangereux pour les retraités au Québec. Bon, on est dans
le cas de Capitales Médias, dont les retraités vont probablement perdre 30 %,
ou on ne sait pas trop encore les chiffres, là, de leur fonds de pension.
De manière rétrospective, qu'est-ce qu'on
a devant nous? Une forme de «creative management», une espèce de tour de
passe-passe où, pour se débarrasser d'une entreprise avec un fonds de pension
déficitaire, bien, on le transfère à quelqu'un d'autre, une personne qui,
d'entrée de jeu, ne semblait pas très solvable, pour répondre aux obligations
de... bon... et des ententes qui venaient avec l'entreprise par rapport au
fonds de pension, et qui, par la suite, fait faillite et se lave les mains
complètement des responsabilités et du soutien aux retraités qui méritent d'avoir
ce qui leur est dû.
Donc, première question, pourquoi Retraite
Québec n'a pas enquêté sur la solvabilité de M. Cauchon par rapport à la
reprise de l'entreprise? Deuxième question, bien, pourquoi deux poids, deux
mesures avec LaPresse?
Donc, c'est extrêmement inquiétant et ça
nous ramène à un enjeu fondamental, c'est celui d'une assurance fonds de
pension au Québec comme le modèle de l'Ontario, sur lequel nous devrons
réfléchir et faire pression sur le gouvernement pour y avoir accès.
Donc, je vais laisser la parole à
M. Pelchat.
M. Pelchat (Pierre) Oui, c'est
à mon tour? Merci. Alors, je me présente, Pierre Pelchat, porte-parole de
l'association des retraités syndiqués du Soleil.
Tout d'abord, je vais remercier les
trois partis politiques de l'opposition, Mme Melançon, le monsieur du Parti
québécois et Vincent Marissal du... pas du Bloc, mais, excusez-moi, de Québec
solidaire. C'est vraiment très émouvant, je vous dirais, d'obtenir un tel
appui.
D'entrée de jeu, je vous dirai par contre
que nous avons été très surpris, et pour ne pas dire très déçus, du refus du gouvernement,
du parti gouvernemental, de ne pas appuyer cette motion de demander à Power
Corporation simplement de garantir les régimes de retraite au Soleil et
au Groupe Capitales Médias comme ils l'ont fait à LaPresse.
Pour nous, c'est un peu incompréhensible. Mais enfin il y a des choses dans vie
qu'on ne comprend pas, mais ça nous arrive.
Je voudrais aussi profiter de l'occasion
qui m'est donnée aujourd'hui de remercier le Réseau FADOQ avec ses — attendez-moi — 530 000
membres qui nous ont appuyés en fin de semaine dernière. Je dois remercier
aussi l'association des retraités de l'éducation et des autres services
publics. Je pense qu'ils ont 60 000 membres qui nous ont donné leur appui
hier. On a reçu ça hier. En passant, c'est des appuis qu'on n'a pas sollicités,
qui nous sont venus, et on va peut-être en solliciter d'autres. Et, s'il y en a
d'autres qui veulent nous appuyer, ils sont les bienvenus.
Ce qui est demandé à la famille Desmarais,
qui détient le contrôle de Power Corporation du Canada, c'est de conserver la
responsabilité des régimes de retraite du Groupe Capitales Médias pour le passé
comme elle le fait pour LaPresse — en passant, on
est très heureux que nos collègues de LaPresse aient obtenu
cet avantage — d'ici à la remontée des taux d'intérêt, qui fera disparaître
le déficit de solvabilité. Cela n'oblige nullement Power à débourser le montant
de 65 millions de déficit, en passant, parce que plusieurs ont de la difficulté,
et c'est complexe aussi à comprendre, cette mécanique de fonds de pension.
Le compromis serait que Power garantirait
le paiement des cotisations au régime de retraite, si nécessaire, comme à LaPresse.
Au cours des deux dernières années, je vous donne l'exemple du Soleil,
les cotisations pour le seul régime de retraite du Soleil n'ont été que
de 124 000 $, pour un déficit de 23 millions. C'est les
nouvelles règles du jeu pour le financement des déficits de solvabilité.
Pourquoi? Parce que le fonds, hein, continue, l'entreprise continue, et il est
pleinement capitalisé. Le taux de capitalisation, aux dernières nouvelles, est
autour de 108 %.
Bref, l'engagement qu'on demande à Power
n'est pas la mer à boire pour la famille Desmarais, pour qui la valeur du
respect envers ses employés et, nous espérons, ses ex-employés est très
importante. En 2018, on m'a demandé qu'est-ce que c'était, Power Corporation du
Canada, Power a dégagé un profit net ajusté de 1,4 milliard de dollars. Son
actif consolidé était de 452 milliards. Et ses deux principales filiales
sont les compagnies d'assurance Great-West et la London Life. Et, je termine
là-dessus, la moyenne des rentes non indexées des retraités du Groupe Capitales
Médias est de 17 000 $ par année.
Alors, s'il y a des questions, je répondrai
tout à l'heure. Et avez-vous d'autres... Ça va être tout? Parfait. Merci.
M. Marissal : Isabelle?
Mme Melançon : Merci, M.
Pelchat. Quand on sait qu'il y a plus de 1 000 retraités, donc, qui sont
dans une situation, actuellement, donc, précaire, avec une diminution de
30 % des régimes de retraite... J'ai entendu des histoires d'horreur de
certains de vos camarades qui doivent actuellement penser à déménager de
résidences de personnes retraitées dû à cette coupure de 30 %. Donc, ils
ne seront plus capables de payer, dans les résidences, là où ils demeurent...
On doit se pencher... Ce qui était demandé, c'est que la vérificatrice puisse
faire les vérifications auprès de Retraite Québec. Je pense que c'est
nécessaire qu'on puisse faire des vérifications. Et, s'il y a des besoins de
changer les législations, bien, on est là, comme législateurs, pour le faire.
Alors, la demande... très surprenant, en
effet, donc, de voir aujourd'hui que les trois partis d'opposition,
malheureusement, sont seuls, pas accompagnés, pour... avec une certaine
ouverture. Si seulement nous avions eu une petite ouverture pour faire des
vérifications, qu'est-ce qu'on peut faire pour ces 1 000 personnes là.
Malheureusement, ce n'est pas le cas aujourd'hui.
Vous savez que, pour moi, depuis près d'un
an, tout ce qui se passe dans les médias, je suis ça de très près. Et c'est
d'abord et avant tout les journalistes qui font l'information au Québec, et le
journalisme avec le grand J. On doit continuer à veiller au grain. Et c'est en
ce sens-là, bien entendu, que nous sommes tous présents devant vous
aujourd'hui. Alors, bien entendu, voilà pourquoi les partis d'opposition sont
ici devant vous aujourd'hui.
Cher Vincent?
M. Marissal : Merci. Bien,
c'est particulier pour moi de me retrouver ici aujourd'hui. Vous savez, les
quatre ex-collègues du Soleil faisaient partie des gens qui m'ont
accueilli quand j'ai commencé dans le métier en 1993, quand je suis arrivé ici.
Et d'ailleurs Michel aussi, Michel Corbeil, travaillait à la Tribune de presse,
où j'ai passé deux ans pour Le Soleil à l'époque. Tous ces gens
faisaient partie des mentors qui ont accueilli les jeunes journalistes, un
contingent dont je faisais partie en 1993. Ça ne me rajeunit pas. Ça ne
rajeunit pas non plus mes ex-collègues qui ont besoin de leur retraite, et
c'est la leur. C'est leur argent. Ce n'est pas de l'argent fictif. Ce n'est pas
de l'argent Monopoly. Ce n'est pas l'argent de Power ou l'argent que Cauchon
n'avait pas. C'est l'argent des travailleurs qui ont cotisé toute leur vie. Ça
leur appartient en propre.
Alors, je ne peux pas croire, là, qu'en
2019, presque 2020, après les histoires d'horreur qu'on a connues au Québec,
là, la Singer, la White Birch, par exemple, Sears plus récemment, qu'on soit encore
plongés dans ce genre de capitalisme sauvage, là, du plus fort la poche. Et la
réponse de M. Girard, le ministre des Finances, tantôt, franchement, ne
m'a pas seulement déçu, m'a un peu dégoûté, à savoir que, bien, il y a des
perdants puis des gagnants dans l'économie, puis, qu'est-ce que tu veux, bien,
c'est la différence entre travailler dans le privé puis dans le public. Un
instant, là, les entreprises ont une responsabilité sociale.
Les Desmarais, là, comme Pierre l'a dit...
et je ne personnaliserai pas, mais Power Corp. a une capitalisation supérieure
à la Caisse de dépôt et placement du Québec. Ils ont quand même une
responsabilité après avoir fait de l'argent, parce que, oui, des journaux ont déjà
fait de l'argent à une certaine époque, et même de l'argent comme de l'eau, ça
marchait super bien. Bien, c'est des gens qui sont ici aujourd'hui à devoir
quêter ce qui leur revient qui leur ont permis de faire de l'argent. Alors, un
peu de dignité. Il n'y a pas juste le cash puis le fric dans la vie. Il y a eu
un stratagème, là, de vente juste assez longtemps à M. Cauchon, qui a
permis de créer un sas de décompression, duquel s'est extirpé Power Corp. pour,
après ça, se dégager de ses responsabilités.
Alors, je leur demande de faire preuve de responsabilité
morale, mais financière aussi. Il y a des solutions qui existent. Et je demande
au ministre des Finances et au gouvernement de la CAQ de s'élever un petit peu
et de prendre en considération les solutions qui existent plutôt que de dire :
Bien, c'est comme ça, «tough luck», dans la vie, tu gagnes, tu perds. Puis,
dans le cas des salariés du Soleil, bien, ils ont perdu. Moi, je
n'accepte pas ça. Puis on va se battre pour que ça ne se passe pas comme ça.
Merci.
M. Gagnon (Marc-André) :
On vient justement d'en discuter longuement, là, avec le ministre des Finances,
et puis lui refuse de regarder ce qui s'est fait par le passé. Il nous a répété
que lui n'était pas en poste lorsqu'il y a eu la transaction avec
M. Cauchon. Il nous a répété également qu'il doit faire avec la situation
actuelle, où il y a une entreprise privée qui fait défaut. J'aimerais vous
entendre sur sa réaction parce que, visiblement, il n'a pas l'intention
d'appuyer votre demande, là, de pointer du doigt Power Corp.
M. Pelchat (Pierre) :
Écoutez, ce n'est pas juste notre demande qui est en cause, là, c'est pour les
prochains qui vont passer dans le tordeur aussi, là. C'est parce que, là, il y
a une — comment je pourrais vous dire ça? — manoeuvre
toxique actuellement à Retraite Québec pour faire en sorte... Pour une
entreprise, si elle est en difficultés financières, pour une raison ou pour une
autre, avec un gros déficit de fonds de pension, elle pourrait trouver quelqu'un,
le même passage toxique, pour se libérer de payer, justement, les déficits,
payer les pleines rentes aux gens. Alors, c'est ça, ça dépasse notre cas. On a
les cas passés, le nôtre et les futurs qui s'en viennent. Puis, avec les
procédés toxiques à Retraite Québec, c'est ça qu'il faut qu'on regarde attentivement.
Et je ne mets pas en doute la bonne foi
des gens de Retraite Québec en disant cela. Je pense qu'ils appliquent les lois
qu'on leur donne, les règlements qu'on leur donne. Mais, à quelque part, c'est peut-être
le temps de revoir ça pour éviter justement d'autres drames dans les prochaines
années. Il va y en avoir d'autres s'il n'y a rien qui change. C'est clair, net
et précis.
Puis, dans le cas de M. Girard, là, c'est
sûrement un bon ministre, là, je n'en doute pas, là. Mais, à quelque part, j'ai
envie de lui dire qu'est-ce qu'a dit M. Fitzgibbon à Desjardins. Ce serait
peut-être le temps qu'il revoie sa position, qu'il reconsidère sa décision dans
ce dossier-là.
M. Gagnon (Marc-André) :
Bien, justement, on a reçu un communiqué dans les dernières minutes où
Desjardins nous annonce qu'ils vont revoir... jeter un regard nouveau sur le
plan d'affaires maintenant que le ministre Fitzgibbon veut bonifier...
M. Pelchat (Pierre) : Oui. Bien,
je ne veux pas être désobligeant, mais M. Girard devrait peut-être s'inspirer
de ce que Desjardins vient de faire.
M. Gagnon (Marc-André) : Il
nie aussi tout conflit d'intérêts en ce qui concerne la présidence de Mme
Lalande.
M. Pelchat (Pierre) : Moi,
j'ai... Il n'y a peut-être pas de conflit... Là, c'est un autre dossier, là,
remarquez bien, là, mais... Il n'y a peut-être pas de conflit d'intérêts
ouvert, mais il y a une apparence très grande de conflit d'intérêts, puis
souvent c'est aussi dommageable qu'un vrai conflit d'intérêts. À ce moment-là,
je trouve que les... En tout cas, moi, Desjardins, ils ont des devoirs à
refaire de ce côté-là, je pense.
M. Robitaille (Antoine) :
Pour le montant que Power Corp. devrait verser, vous dites que ce n'est pas le
65 millions de déficit?
M. Pelchat (Pierre) : Non.
M. Robitaille (Antoine) : Ça
serait combien? Donnez-nous un exemple de l'ordre de grandeur.
M. Pelchat (Pierre) : Bien, je
vais vous dire, là, il y a une date importante. S'il y a une terminaison de
régime, c'est 65. Si on règle avant, c'est beaucoup, beaucoup moins, comme à LaPresse.
Pourquoi? Parce que, si on règle avant puis on maintient les régimes, les
régimes demeurent en continu, c'est beaucoup moins cher parce que les
rendements de la caisse vont être beaucoup plus élevés. Si on termine le
régime, il faut placer la caisse à des rendements très faibles en Obligations
d'épargne du Canada. Au lieu d'avoir du 6 %, on va avoir du 1,5 %.
Alors, c'est là le drame du 30 % de coupures.
Mais, si la famille Desmarais disait :
Bien là, on va faire comme à LaPresse, on va s'arranger
pour garantir les fonds de pension et on va avoir des très bons rendements
encore, ça ne coûtera pas très cher. Puis, dès le jour où le taux de
solvabilité va augmenter, parce qu'il va finir par augmenter avec les taux
d'intérêt, c'est comme ça que ça marche... puis là, à ce moment-là, on liquide
la caisse, c'est tout. C'est ce qui est prévu à LaPresse.
On ne demande pas plus que ça. On ne demande pas 65 millions ni
80 millions, c'est peut-être quelques centaines de milliers de dollars
pour des gens... avec une capitalisation plus élevée que la Caisse de dépôt et placement.
Alors, c'est juste ça.
M. Robitaille (Antoine) :
Quelques centaines de milliers...
M. Pelchat (Pierre) : Bien, je
pense, ça ne dépassera pas... ça ne sera pas une fortune. Je ne suis pas
actuaire, mais les évaluations... Je pourrais vous ressortir la lettre qu'on a
eue des actuaires du Groupe Capitales Médias. C'est qu'actuellement on n'a pas
besoin de cotiser pour le déficit. Il est pleinement capitalisé. Le seul
problème qui pourrait survenir, c'est que, s'il y a un ralentissement, une
baisse boursière importante, là, il faudrait capitaliser, mais c'est payable
sur 11 ans. Alors, quand vous avez une date sur 11 ans... Puis, pendant la
période de 11 ans, on peut-u se dire que la bourse va remonter aussi? Alors,
tout va disparaître. C'est ça, le danger. Mais je ne pense pas que ça soit un
risque énorme pour la famille Desmarais avec les moyens qu'ils ont.
M. Croteau (Martin) : M.
Pelchat, vous avez parlé d'une apparence de conflit d'intérêts à Desjardins. Je
vais vous poser la question directement, là. Est-ce que vous soupçonnez que,
d'une manière ou d'une autre, Québecor a pu faire des pressions sur Desjardins
pour qu'elle se retire du montage financier?
M. Pelchat (Pierre) : C'est ce
que tout le monde pense, mais je n'ai aucune preuve de ça. Mais c'est ce que
tout le monde pense.
M. Croteau (Martin) : Mme
Melançon, M. Marissal, M. Roy, qu'en pensez-vous?
M. Marissal : Mme Melançon?
Mme Melançon : Bien, je ne
peux pas prêter d'intention. Cependant, vous avez soulevé la question, vous, du
côté des journalistes. C'est certain que, lorsqu'on voit le nom de Mme Lalande,
qui est aussi du côté de Québecor, mais qui est aussi la présidente, donc, pour
Desjardins, parfois, quand on se pose des questions, on peut se surprendre à
dire : Est-ce que c'est vrai, est-ce que ce n'est pas vrai? Moi, je n'ai
pas la réponse.
Cependant, une chose est sûre, j'accueille
vraiment très favorablement le fait d'apprendre que Desjardins va reconsidérer.
On doit sauver les six journaux. Je le dis depuis plusieurs semaines, plusieurs
mois. C'est une coopérative. Là, il y a là, là, quelque chose, un fondement qui
est important, et pour la démocratie, parce que l'information, c'est ce que ça
donne, hein, c'est le savoir, c'est la démocratie. Partout, six régions, six
journaux, 350 employés, des familles, un droit à l'information, c'est de ça
dont on parle actuellement. Il faut absolument que le plan de sauvetage puisse
fonctionner.
M. Croteau (Martin) : M.
Marissal?
M. Marissal : Je ne sais pas
ce qui s'est dit ou pas dit derrière les portes closes au conseil
d'administration du fonds de développement régional de Desjardins. Je ne peux
donc pas spéculer sur un scénario ou sur un autre. Ce que je sais, et je m'y
réfère souvent, à feu mon ami Jean Lapierre, qui était une encyclopédie de
citations, et il en avait une, que j'aimais beaucoup et que j'essaie de
pratiquer, qui disait : Dans la vie, le trouble est en option. Alors je
pense que Desjardins risque de se mettre dans le trouble avec des gens qui sont
beaucoup trop impliqués dans des secteurs où ils risquent de devoir prendre des
décisions d'investissement, parce que, prenons l'affaire à l'envers, mettons
que le fonds de développement régional de Desjardins soit appelé à investir dans
une filière de Québecor et que, là, sur le conseil d'administration, on a deux
personnes de Québecor, bien, ça la fout mal.
Alors, est-ce que Desjardins pourrait
trouver peut-être d'autres personnes, ouvrir les fenêtres, faire venir d'autres
gens, d'autres expertises? Parce qu'effectivement on est devant ces
questions-là aujourd'hui. Et le ministre Fitzgibbon les a posées de façon très
marquée, hier, là, ces questions, parce que le Québec de la haute finance est
nécessairement un petit monde, mais il y a quand même assez de monde, je crois,
pour qu'on puisse éviter ce genre d'imbriquement là qui peut soulever des
questions du genre, parce que, là, Desjardins revient à la table, à la table à
dessin. Tant mieux. On les invite à le faire. Et j'invite aussi le ministre
Fitzgibbon, qui dit à tout le monde qu'il a un gros, gros, gros chéquier, là,
puis qu'il a quasiment, là, un fonds illimité pour aider les entreprises :
Bien, voici une belle occasion de mettre les paroles aux actes et de sauver les
six quotidiens. Ça va de soi. Et son ministre des Finances, je le redis, doit
intervenir pour sauver les retraites.
M. Croteau (Martin) : M. Roy?
M. Roy
: Sages paroles.
Le trouble est en option.
M. Marissal : Mais ce n'est
pas de moi.
M. Roy
: Non, mais, écoutez,
moi, je n'irai pas sur le terrain glissant à savoir qui a dit quoi par rapport
à l'enjeu de Québecor versus Desjardins. Bon, la conclusion, c'est qu'ils
semblent intéressés, là, à soutenir...
Ceci étant dit, revenons à l'enjeu.
L'enjeu, c'est la protection des fonds de pension. Et j'ai comme l'impression
que nous sommes devant une expérimentation de stratégie de dislocation des
fonds de pension, avec une certaine collaboration de Retraite Québec, ce qui
est extrêmement dangereux. Et pourquoi la VG ne fait pas enquête? Nous, on
demande une enquête de la Vérificatrice générale et on demande pourquoi Retraite
Québec n'a pas agi ou réagi par rapport aux transferts qui étaient, de toute
évidence, non viables. Ça fait que, là, là, on a comme un... Il y a quelque
chose dans l'air qui n'est pas sain pour l'avenir des retraités. Et là on a
plusieurs cas qui ont été cités, mais avec les gens avec qui nous sommes ici aujourd'hui,
c'est un exemple patent de nouvelle stratégie et d'expérimentations qui... Et
là ça passe ou ça casse.
M. Croteau (Martin) : Est-ce
que vous vous attendez à ce que Desjardins mette en place des mesures particulières
dans sa nouvelle analyse du dossier de GCM pour se prémunir contre des
apparences de conflit d'intérêts? Qu'est-ce que vous attendez d'eux à cet
égard-là?
M. Marissal : Bien, elle
serait assurément bien avisée. Elle serait assurément bien avisée, Desjardins,
de se prémunir de toute forme de question sur sa structure interne. Les Anglais
ont une expression, là, «too close for comfort», là. Il n'y a pas un bras de
distance, là. C'est des gens qui siègent directement dans une entreprise concurrente
de celle qui pourrait recevoir de l'aide. Regardez, ça pose, à tout le moins,
un petit problème de distance.
M. Gagnon (Marc-André) : Est-ce
que vous remettez en doute la parole de Desjardins? Dans leur communiqué, là,
ils précisent que Mme Lalande n'a jamais été en situation de conflit d'intérêts
puisque le C.A. de CRCD n'a pas été associé à la décision de décliner la
demande de contribution. Et on dit aussi qu'il n'y a eu aucune communication,
d'une part, entre Mme Lalande ou quelque autre administrateur de Desjardins
avec Capitales, là, concernant ce dossier-là. Est-ce que vous remettez en doute
ce qu'ils affirment?
M. Marissal : Non. À votre
question, la réponse est non, je ne remets pas en doute. Desjardins a donné sa
parole. C'est une entreprise, une institution sérieuse. Tout ce que je dis, c'est
que cette situation crée une atmosphère malsaine, de toute évidence, et ce n'est
nécessaire. Je le répète à la mémoire de mon ami Jean Lapierre, dans la vie, le
trouble est en option.
M. Gagnon (Marc-André) : Vous
ne craignez pas que le fait de dénoncer cette apparence de conflit d'intérêts
là puisse nuire au regard nouveau que Desjardins va porter sur la situation?
M. Marissal : Desjardins
fait des deals tous les jours, des milliards de dollars. Je ne pense pas qu'ils
vont s'enfarger dans les fleurs du tapis avec ça. Je pense que ce sont des gens
majeurs et vaccinés qui comprennent les règles d'éthique et de transparence et
qui vont prendre les meilleures décisions d'affaires. Et je suis content, comme
mes collègues, d'ailleurs, que Desjardins revienne à la table à dessin pour
voir ce qu'on peut faire pour sauver les journaux de Groupe Capitales Médias
qui sont orphelins maintenant, donc les six quotidiens.
Mme Crête (Mylène) :
M. Roy, je voulais vous entendre sur l'assurance fonds de pension. J'ai
posé la question à M. Girard tout à l'heure en scrum, puis il nous a
répondu que c'est un choix de société que le Québec avait fait de ne pas en
avoir puis que les travailleurs étaient déjà suffisamment taxés, là, avec
toutes les taxes qui existent déjà au Québec, là, les garderies, etc.
M. Roy
: Bien, écoutez,
c'est une vue de l'esprit. En Ontario, ça existe et ça protège les retraités.
Mais là, dans une situation où les entreprises respectent leur engagement par
rapport à leurs employés, bon, là, écoute, tout va bien. Mais, à partir du
moment où on voit des fractures et une tentative de dislocation des fonds de
pension comme on le voit actuellement, bien là il faut remettre le dossier sur
la table, et le proposer, et l'amener comme piste de solution pour ces gens-là
qui vont perdre du pouvoir d'achat et qui ont travaillé des décennies à
enrichir des entreprises qui vont se pousser par la suite avec les gains, puis
on va avoir une socialisation des pertes.
Mme Crête (Mylène) :
Ce n'était pas une réponse d'ouverture de la part du ministre?
M. Roy
: Bien,
écoutez, il n'y a rien comme la pédagogie puis poursuivre les combats, et les
aînés le méritent. Ce n'est pas le seul enjeu sur lequel il faut travailler,
mais ça, c'est un enjeu fondamental sur lequel nous allons faire notre travail
et défendre ces gens-là. S'il n'y avait pas de situation comme on vit
actuellement, on ne le mettrait pas sur la table. Mais là, écoutez, ça devient
évident que les fonds de pension sont en danger par les stratagèmes auxquels
nous venons d'assister, et cette tendance à l'appauvrissement des retraités au
Québec...
M. Pelchat (Pierre) : Je
peux-tu rajouter un complément d'information?
Mme Melançon : Allez-y,
allez-y.
M. Pelchat
(Pierre) : Ce que vous dites est tout à fait vrai, là. Mais,
concernant l'Ontario, le programme d'indemnisation compensatoire donne jusqu'à
1 500 $ par mois. Si vous perdez 1 000 $ ou 500 $,
vous avez 500 $ ou 1 000 $, mais pas 1 500 $. On l'a
posé à... On a demandé, nous autres, aussi, par écrit au ministre des Finances
s'il n'y a pas moyen d'instituer un tel programme d'assurance rente, si on peut
parler comme ça, pas financé par les taxes et les impôts, financé par les
entreprises comme en Ontario. Alors, on ne voulait pas rajouter un fardeau
fiscal à personne avec ça. C'est le problème des gens, des entreprises, des
employés qui ont un régime à prestations déterminées. Mais donnons-nous un
programme d'assurance comme on a dans plusieurs autres domaines au Québec, en
agriculture ou n'importe où.
Alors là, on
nous répond : C'est trop cher, ça risque de conduire à la perte de
plusieurs autres régimes à prestations déterminées parce que ça va coûter trop
cher. Mais, si c'est trop cher, 1 500 $ par mois, on ne pourrait pas
prendre... on commencerait à 500 $ par mois, notre police d'assurance?
Donc... trouver d'autres mécanismes : le premier 200 $, on ne le paie
pas, on paie les 500 $ autres? Je ne le sais pas. Mais je me dis qu'à
500 $ qui ça va avantager? Ça va être les gens qui ont des très petites
rentes. C'est ceux-là qui sont vraiment dans le collimateur actuellement. Mais
je n'ai senti aucune ouverture du gouvernement de ce côté-là. Je trouve ça
extrêmement décevant, désolant. Puis on est supposés être un gouvernement
proche du monde, mais là ce n'est pas proche du monde, c'est proche des grandes
entreprises. Mais c'est qui qui ont des gros régimes de ce type-là? C'est Bell,
Rio Tinto et d'autres. Mais, je m'excuse, là, il faudrait peut-être penser au
petit monde aussi, depuis le temps...
Je parle longtemps, là, mais je vais vous
dire une chose, là, il y a trois ans, là, il y a eu des changements, là, aux
régimes de retraite. On a permis aux employeurs de ne plus cotiser pour les
déficits de solvabilité pour le passé, les rentes déjà achetées. Mais, au Soleil,
je pense, au Groupe Capitales Médias, c'est 700 000 $,
800 000 $ qu'ils ont sauvé par année, puis ça a fait peut-être
augmenter le déficit par la même occasion. Mais calculez toutes les entreprises
qui ont sauvé, depuis trois ans, sur trois ans... le nombre de millions, de
dizaines, voire de centaines de millions. On n'aurait pas pu prendre une petite
partie de ça pour lancer un petit programme d'assurance? Je ne demande pas la
Cadillac, là, je ne demande pas la Mercedes. On pourrait avoir quelque chose,
un deux portes pas trop cher, là, puis on va aider les gens qui sont dans le
trouble.
C'est tout. Merci. Je ne parle pas plus
longtemps.
M. Robitaille (Antoine) :
Vous étiez au pouvoir quand il y a eu la vente, la fameuse vente, là, de Gesca
à Groupe Capitales Médias. Est-ce que ça n'aurait pas dû être une condition
d'approbation, de la part du gouvernement du Québec, de cette vente-là, de
protéger les retraités? Est-ce que, dans l'avenir, il ne faudrait pas avoir au
moins un tel réflexe de la part du gouvernement?
Mme Melançon : Bien, c'est
exactement pourquoi je suis ici aujourd'hui. Quand on demande justement à la
Vérificatrice générale de faire la vérification auprès de Retraite Québec...
Justement, comme je l'ai dit lorsque j'ai pris la parole tout à l'heure, il ne
faut plus que ça arrive. Et, pour ce faire, on peut faire les vérifications
avec la Vérificatrice générale, qu'on puisse se pencher... Et, s'il y a des
changements à effectuer, bien, qu'on les effectue. On est là pour ça.
M. Robitaille (Antoine) : Vous
étiez où à ce moment-là, quand...
Mme Melançon : Je n'étais pas
élue à ce moment-là. Donc, je ne peux pas...
M. Robitaille (Antoine) :
Vous n'étiez pas une élue? Donc, vous étiez au ministère de la Culture.
Mme Melançon : Non, non, pas
du tout, pas du tout.
M. Robitaille (Antoine) :
Non? Vous étiez... O.K.
Mme Melançon : Bien, lorsqu'il
y a la transaction, peut-être à la fin, là. Je ne me rappelle pas.
M. Robitaille (Antoine) : Vous
étiez peut-être au cabinet?
Mme Melançon : C'est possible,
mais ce n'est pas à la Culture non plus que ça s'est passé. Je tiens à le
mentionner, là, c'est plus du côté de l'Économie où ça se passe. On va se dire
les vraies choses. Cela étant dit, pour moi, il est important qu'on puisse
faire les vérifications. Puis, s'il faut faire les changements, bien, qu'on les
fasse. M. Pelchat...
M. Robitaille (Antoine) : Ce
que je veux dire, le gouvernement libéral aurait dû allumer, là. C'est ça que
je veux dire. Le gouvernement Couillard...
Mme Melançon : Bien, moi, je
ne peux pas refaire l'histoire. Moi, je regarde en avant, actuellement, là.
M. Robitaille (Antoine) : Je
sais bien, mais, des fois, il faut regarder en arrière au lieu de regarder en
avant, là.
Mme Melançon : Ah! bien là,
moi, je regarde complètement en avant puis je vous le dis... Puis, avec M.
Pelchat, j'ai eu les discussions justement. Moi, je ne pouvais pas... Je
n'avais pas de boule de cristal à ce moment-là, là. Mais là on a vraiment
quelque chose qui est concret. Comme M. Pelchat l'a dit, c'est pour aujourd'hui,
mais aussi pour demain. Et c'est pour ça que je suis là avec les gens, avec les
oppositions. Puis que la vérificatrice nous dise exactement comment ça s'est
fait, puis, s'il y a vraiment un stratagème, comment est-ce qu'on peut empêcher
que ça puisse se reproduire.
M. Pelchat (Pierre) :
...des recommandations.
Mme Melançon : Voilà. Exactement.
Merci.
M. Marissal : Merci.
Mme Melançon : Merci beaucoup.
M. Pelchat (Pierre) Merci
beaucoup.
(Fin à 12 h 10)