(Quinze heures cinquante-huit minutes)
Mme Blais (Prévost) : Je
présente aujourd'hui un projet de loi visant à renforcer le Régime d'examen des
plaintes du réseau de la santé et des services sociaux, notamment pour les
usagers qui reçoivent des services des établissements privés. Ce projet de loi
fait suite à certaines situations préoccupantes qui ont été portées à notre
attention et qui ont notamment été communiquées dans les médias.
Je souhaite, par ailleurs, dire merci aux
gens qui signalent les situations de maltraitance. Il faut briser les tabous. Et
c'est d'ailleurs ce qui me motive tous les jours à mettre en œuvre des
solutions pérennes comme celle que je vous présente aujourd'hui.
Ce projet de loi vise notamment à préciser
l'exigence d'indépendance requise pour un commissaire aux plaintes et à la
qualité des services, indépendance si importante dans le contexte de
l'application du régime d'examen des plaintes. Par ce projet de loi, nous
souhaitons accroître la protection offerte aux personnes vulnérables. Il
prévoit plusieurs mesures, dont les suivantes.
Le traitement des plaintes des usagers qui
reçoivent des services d'un établissement privé serait confié aux commissaires
aux plaintes et à la qualité des services et aux médecins examinateurs des
CISSS ou des CIUSSS à l'égard de toute installation, telle qu'un établissement
situé sur son territoire.
L'ajout de critères d'indépendance pour la
nomination, et pour toute la durée du mandat, des commissaires aux plaintes et
à la qualité des services, l'ajout d'un représentant du CISSS ou d'un CIUSSS au
comité de vigilance et de la qualité des établissements privés... Ce comité est
notamment responsable d'effectuer le suivi des recommandations du commissaire
aux plaintes et du Protecteur du citoyen. L'utilisation, par les établissements
publics, d'un actif informationnel en vue de gérer les dossiers de plainte des
usagers serait rendue obligatoire, et ça, en vue de dresser un portrait complet
du traitement des plaintes effectuées.
Outre le projet de loi, et dans la même
foulée, je vous annonce la création d'une fonction de commissaire-conseil au
ministère de la Santé et des Services sociaux. C'est une première dans
l'histoire du Québec. Son rôle consistera notamment à établir un réseau de
communication et de soutien entre le ministère de la Santé et des Services
sociaux, les commissaires aux plaintes et les médecins examinateurs, s'assurer
que les mesures recommandées seront mises en place, conseiller les commissaires
aux plaintes notamment sur les meilleures pratiques à appliquer et sur une
utilisation harmonisée de celles-ci, recommander la mise en oeuvre de solutions
quant aux enjeux portés à sa connaissance en matière de plainte.
J'aimerais par ailleurs spécifier que nous
prévoyons annoncer le nouveau commissaire aux alentours de février 2020.
Enfin, les mesures proposées par le projet
de loi représentent un appui financier récurrent de 1,2 million de dollars
de la part du gouvernement. Cette somme permettra aux CISSS et aux CIUSSS de
traiter les plaintes des usagers des établissements privés. À cette somme
s'ajoute un financement non récurrent de 1,2 million pour permettre la
modernisation de l'actif informationnel, dont l'utilisation serait rendue
obligatoire dans la gestion des dossiers de plainte.
En conclusion, nous prenons les moyens
nécessaires afin d'assurer une meilleure protection des usagers du système de
santé. Nous avons aussi à coeur de soutenir la lutte contre la maltraitance
chez les usagers, et notamment les personnes aînées, et nous croyons que cela
passe, entre autres, par des mesures renforçant l'indépendance des commissaires
aux plaintes responsables du traitement des plaintes des usagers.
Nous apportons ainsi des solutions qui
feront une réelle différence dans la vie des usagers parce que la qualité des
services constitue notre plus grande priorité, pour ma part et pour mes
collègues, les ministres McCann et Carmant. Je les remercie d'ailleurs de leur
soutien, de même que l'ensemble de nos équipes impliquées dans l'application du
régime d'examen des plaintes.
Ce projet de loi vient répondre à un
besoin réel de notre collectivité, dans le respect des droits de l'ensemble des
usagers. Et j'ai à coeur de le voir être adopté avec la collaboration de tous
les partis politiques. Merci.
M. Chouinard (Tommy) :
Bonjour. On avait Harold LeBel, il y a quelques minutes, qui nous disait que ce
n'était peut-être pas la bonne solution que de transférer de nouvelles responsabilités
aux commissaires actuels, qui en ont plein les bras, puis que c'est vrai qu'il
y a plusieurs groupes qui disent ça. Craignez-vous que, dans les faits, ça
amène toujours un problème dans, vraiment, les efforts qui sont consacrés au
traitement des plaintes?
Mme Blais (Prévost) :1263 Mme Blais
(Prévost) :Ils n'auront pas
plus de responsabilités. On va embaucher 12 personnes pour faire en sorte
que nous puissions répartir le travail pour être en mesure justement de combler
les postes dans les CHSLD privés. Donc, il y a cette embauche-là qui va
arriver. Et, avec la venue du commissaire-conseil... Vous savez, dans les
établissements, le commissaire aux plaintes est seul. Il n'y a pas de réseau.
Alors, ça va permettre à tous les commissaires aux plaintes d'être réseautés,
de pouvoir échanger sur les meilleures pratiques, d'harmoniser les pratiques,
de pouvoir évoluer par rapport à ça.
Aujourd'hui, ce qu'on annonce, là, c'est vraiment
un grand changement. En 2001, il y avait les commissaires aux plaintes qui
relevaient du directeur général. En 2005, les commissaires aux plaintes
relevaient du conseil d'administration de l'établissement. Ils vont toujours
répondre au conseil d'administration de l'établissement. Et ça, c'est
important, c'est pour mettre une distance aussi avec les présidents-directeurs
généraux des CISSS et des CIUSSS, là. Il faut qu'ils aient cette indépendance-là.
Mais, avec le commissaire-conseil, il va y avoir toute la formation. Le commissaire
aux plaintes, aussi, s'il a des difficultés, je vous donne un exemple, avec son
conseil d'administration ou s'il n'est pas capable de résoudre une problématique,
bien, il va pouvoir s'adresser au commissaire-conseil.
M. Chouinard (Tommy) : Qu'est-ce
que vous pensez de cette idée qui est justement amenée par M. LeBel, de
dire : On devrait créer un protecteur des aînés, dans les faits?
1263 Mme Blais (Prévost) : 1263 Mme Blais (Prévost) : Bien,
M. LeBel, il pense notamment à la Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse. Je vous rappellerai, M. Chouinard, qu'en 2009,
quand on a déposé le premier plan d'action pour combattre la maltraitance
envers les aînés, on a mis en place une équipe, à la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse, chapeautée par un vice-président.
Donc, la commission des droits agit déjà, autour des plaintes qui lui sont
confiées, avec un vice-président. Alors, c'est le titre de protecteur des aînés.
Puis j'irais aussi... en vous disant que le Protecteur du citoyen a aussi, dans
la loi, la responsabilité d'être le protecteur des aînés.
M. Lecavalier (Charles) :
Mais M. LeBel dit aussi que votre projet de loi, il est un sparadrap,
finalement, sur le réseau de la santé, qu'avec le vieillissement de la population
il y a beaucoup d'aînés qui sont dans des situations difficiles, mais qui sont
à l'extérieur du réseau de la santé. Donc, vous ne réglez pas leur problème, là.
Ça ne leur donne pas un endroit où ils peuvent se plaindre de leur situation.
Mme Blais (Prévost) : Bien,
moi, je vais me concentrer à ce projet-là. J'ai visité 84 CHSLD puis les gens
me posent souvent des questions, à savoir qu'est-ce que ça a donné. Ça a donné
que je me suis rendu compte que, dans les CHSLD privés, on embauchait des
commissaires aux plaintes pour le secteur privé. Puis ça pouvait adonner aussi
que le ministère de la Santé et des Services sociaux achetait un nombre de
places, et c'était le commissaire aux plaintes embauché par le CISSS ou le
CIUSSS qui offrait le service pour les personnes qui étaient sous la gouverne,
je dirais, ou protégées par le gouvernement, et les autres, là, avaient un
autre commissaire aux plaintes. Alors, c'est un peu bizarre que, dans le même
établissement, il y a deux commissaires aux plaintes à deux niveaux.
Et je crois qu'on est rendus, avec les
dossiers de plainte concernant la maltraitance, à venir renforcer le rôle des
commissaires aux plaintes, à leur donner plus de moyens. Puis ces moyens-là
vont venir d'un commissaire aux plaintes qui va commencer à faire aussi une
communication entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et les
commissaires aux plaintes et à la qualité des services. Aujourd'hui, c'est un
projet de loi, là, là-dessus, là.
M. Lecavalier (Charles) :
Est-ce qu'une personne va pouvoir porter plainte, par exemple, en raison d'un
manque de services parce qu'il manque de personnel?
Mme Blais (Prévost) : Bien, écoutez,
c'est toutes les plaintes, là, c'est toutes les...
M. Lecavalier (Charles) : ...
Mme Blais (Prévost) : Bien
oui, c'est toutes les plaintes que les gens rencontrent dans les établissements,
bien sûr. Et toutes ces plaintes-là n'étaient pas forcément déposées dans un
dossier informatisé, là, et là il y aura une obligation de déposer toutes les
plaintes. Alors, on va pouvoir avoir une plus grande vigie par rapport aux
plaintes et on va savoir dans quelles régions... Mais actuellement, là, il y en
a qui ne déposaient même pas de dossier. Et on a un comité, aussi, de vigilance.
C'est dans la Loi de la santé et des services sociaux et il y a des établissements
privés qui n'en avaient pas. Ça fait partie de la loi.
Il y aura donc une obligation, qui était déjà
dans la loi, de réellement mettre en place ce comité de vigilance, parce qu'il
y aura deux personnes, notamment le commissaire aux plaintes et à la qualité
des services et une autre personne nommée par l'établissement... d'aller sur le
comité de vigilance des établissements privés pour qu'on soit en mesure de
regarder les choses correctement et assurer beaucoup plus... je dirais, de
surveiller davantage nos personnes vulnérables et être capables de pouvoir agir
le plus rapidement possible quand il y a des plaintes.
M. Chouinard (Tommy) : ...une
chose que vous avez dite. Il y a des commissaires qui reçoivent des plaintes et
qui ne les déposent pas?
Mme Blais (Prévost) : Bien, il
n'y avait pas d'obligation pour déposer les plaintes dans le système
informatisé. Ce n'était pas dans la loi. Le projet de loi, là, vient renforcer
le fait que, maintenant, il y aura obligation de déposer toutes les plaintes
dans le système informatisé. Comme ça, le ministère va pouvoir assurer une
meilleure vigie. Et, si on se rend compte que, dans telle région, admettons,
là, supposition, il y a plus de plaintes, bien, on va pouvoir commencer à
examiner davantage la situation pour pouvoir agir.
M. Chouinard (Tommy) : Et ça,
c'est l'actif informationnel, ce dont...
Mme Blais (Prévost) : Oui,
oui.
M. Chouinard (Tommy) : O.K.
Et c'est un système informatique qui existe déjà, si je comprends bien?
Mme Blais (Prévost) : Oui, et
on va prendre 1,2 million de dollars pour le mettre à jour davantage pour
faire en sorte... Parce que je sais qu'une de vos préoccupations, c'était que,
dans les dossiers de plainte concernant la maltraitance, il y avait des
dossiers qui étaient plus étoffés, il y en a d'autres qui étaient moins
étoffés, qui étaient plus courts. On veut harmoniser partout le système de
plainte et faire en sorte que tous les dossiers aient la même qualité. C'est ça
qu'on veut.
M. Chouinard (Tommy) : Et en
particulier dans les rapports qui sont faits des situations.
Mme Blais (Prévost) : Tout à
fait, tout à fait.
M. Chouinard (Tommy) : Donc,
ça, est-ce que le projet de loi touche à ça également, c'est-à-dire qu'on rend
compte de la situation des plaintes, bien, il faut être...
Mme Blais (Prévost) : Oui, tout
à fait. Puis il va y avoir aussi une exigence de... Les commissaires aux
plaintes devront tous signer un avis d'intérêt qui stipule qu'ils n'ont pas de
lien direct, entre autres, avec le président-directeur général des CISSS et des
CIUSSS. On ne veut pas avoir de conflits familiaux.
M. Chouinard (Tommy) : Est-ce
qu'il y en a qui ont des conflits, qui sont en situation conflictuelle?
Mme Blais (Prévost) : Écoutez,
ça, on ne le sait pas, là, parce que ce n'était pas une obligation, mais ça va
devenir une obligation.
M. Lecavalier (Charles) :
Est-ce que vous avec l'impression qu'il y a plus de plaintes que ce que... mais
qu'il y avait beaucoup de plaintes qui n'étaient pas enregistrées dans le
système informatique? Quand vous avez fait votre tournée, est-ce que c'est...
Mme Blais (Prévost) : Bien,
écoutez, on a su qu'il y avait seulement... Dans les dossiers de CHSLD privés,
il y a des endroits où il y avait zéro plainte, là, zéro plainte, là. Alors, je
pense qu'on est rendus à un point où il faut faire en sorte aussi de protéger
les personnes les plus vulnérables, et aussi dire aux familles : Bien, on
prend nos responsabilités. On actualise le régime des plaintes. On fait en
sorte que, oui, s'il y a des plantes concernant la maltraitance, et c'est
normal qu'il y en ait eu parce qu'on a une loi n° 115
concernant la maltraitance envers les aînés, mais on va pouvoir agir. On va
davantage pouvoir agir en amont, avec un commissaire-conseil qui va être
capable de davantage former tous les conseillers aux plaintes et de faire en
sorte qu'ils soient en mesure d'évoluer dans leurs façons de faire. On va
harmoniser les pratiques.
Là, je répète, là, chaque commissaire est
individuel dans l'établissement. Ils se rencontrent peut-être une fois par
année, je ne le sais pas, là. Mais maintenant ils vont pouvoir se rencontrer
plus fréquemment, échanger puis évoluer avec les besoins de la population.
(Fin à 16 h 13)