(Douze heures trente-quatre minutes)
M. Nadeau-Dubois : Bonjour. On
souhaitait d'abord réagir à la décision qui a été rendue par le président de l'Assemblée
nationale au sujet de notre requête en outrage au Parlement. On veut dire que,
bien, d'abord, c'est une bonne décision de la part du président de l'Assemblée
nationale du Québec. C'est une décision documentée et surtout une décision
claire. Le ministre a bel et bien commis un outrage au Parlement, à première
vue. Et ça vient démontrer encore une fois l'attitude de ce gouvernement-là,
une attitude empressée, une attitude arrogante où on croit qu'on peut tout
faire, où on croit que parce qu'on a 76 députés on a la totalité du
pouvoir. Il y a un manque chronique de respect pour les oppositions et les
parlementaires du côté de la Coalition avenir Québec. Et cet outrage au
Parlement de la part du ministre de l'Environnement en est une nouvelle
démonstration.
Alors, on est satisfaits de la décision du
président. On va analyser cette décision-là. Et on se garde la possibilité de
poursuivre les démarches et d'inscrire une motion en vertu de
l'article 315 de notre règlement pour faire la lumière sur la situation et
déclencher une enquête officielle. Donc, bref, voilà une décision qui est, pour
nous, satisfaisante et qui vient souligner une erreur grave, un geste
antidémocratique de la part du ministre de l'Environnement.
On souhaite également réagir au dépôt par
la ministre de la Justice et des Institutions démocratiques d'un grand
amendement au sujet du projet de loi sur la réforme du mode de scrutin, des
amendements qui viennent encadrer un éventuel référendum sur la question.
D'abord, il faut saluer ce geste-là. C'est
un geste de transparence que pose la ministre aujourd'hui en nous déposant en
amont, avant même les consultations, les amendements qui viennent préciser de
quoi aurait l'air un éventuel référendum sur la réforme du mode de scrutin au
Québec. On souhaiterait que tous les ministres de la Coalition avenir Québec aient
cette transparence et cet esprit d'ouverture en déposant d'avance comme ça les
amendements.
Ce que ces amendements-là nous permettent
aujourd'hui, c'est au moins de savoir à quoi on a affaire. C'est-à-dire que
maintenant on sait au moins de quoi aurait l'air cet éventuel référendum sur la
réforme du mode de scrutin. Par contre, sur le fond, notre position reste la
même. Pour nous, ce référendum-là, il n'est pas nécessaire. C'est une démarche
qui est inutile puisque le consensus québécois, il existe puis il est fort en
matière de réforme du mode de scrutin.
Par contre, il y a une question qui reste
en suspens, et le dépôt de ces amendements-là vient relancer cette question-là,
et la question, c'est : Quelle sera la position de François Legault comme
premier ministre du Québec lors d'un éventuel référendum sur la réforme du mode
de scrutin? Si ce référendum-là a lieu, comment va se positionner le premier
ministre? C'est la grande question que vient relancer aujourd'hui le dépôt de
ces amendements-là. Comment le premier ministre va se positionner dans un
éventuel référendum si on en arrive là?
La seule position responsable, au vu de sa
promesse électorale de réformer le mode de scrutin, c'est de s'afficher
clairement en faveur du camp du oui, en faveur d'une réforme du mode de
scrutin. Déjà que le premier ministre a brisé sa promesse de réformer le mode
de scrutin dans ce mandat-ci, la moindre des choses, à ce stade-ci, maintenant
qu'il se cache derrière un référendum, c'est d'assumer sa position et
d'annoncer dès maintenant que, s'il y a référendum, il sera dans le camp du oui
et il va publiquement, ouvertement faire campagne pour la réforme du mode de
scrutin. Voilà.
Mme Crête (Mylène) :
Qu'est-ce que vous pensez du projet de loi qui vient d'être déposé par le
ministre Girard sur les agences de crédit?
M. Nadeau-Dubois : Je n'ai pas
eu le temps de le regarder encore. Mon collègue Vincent Marissal pourra
commenter. Je n'ai pas, pendant la période de questions, pu lire le projet de
loi.
Mme Crête (Mylène) :
Vous êtes leader parlementaire. Qu'est-ce que vous pensez du fait que des
députés caquistes fassent pression, dans trois commissions parlementaires — bien,
celle de l'avenir des médias puis Desjardins, ça s'est avéré, là — pour
avoir des rapports sans recommandations, avec seulement des observations?
M. Nadeau-Dubois : Moi, je
trouve que ça ressemble à un gouvernement qui veut occuper ses députés, mais
qui ne veut pas leur donner de pouvoirs. On fait travailler les députés pendant
des dizaines d'heures en commission parlementaire pour creuser une situation,
pour explorer un problème de société, et ensuite on leur dit : Ne tirez
aucune conclusion de ce travail-là. Pourquoi fait-on des commissions
parlementaires si on est pour bâillonner, en fin de course, les députés puis
leur dire : Ah! ne tirez aucune conclusion du travail sérieux que vous
avez fait? Les commissions parlementaires, ce n'est pas juste pour remplir les
agendas des députés du gouvernement. C'est pour creuser un problème, analyser
une situation et ensuite tirer des conclusions, faire des recommandations.
C'est encore plus insultant pour les députés
quand on sait que ces recommandations-là ne sont pas contraignantes pour le gouvernement.
Il n'y a pas de risque politique à avoir au moins quelques recommandations dans
un rapport. C'est vraiment envoyer le message que, quand on accorde une commission
parlementaire, quand on fait travailler les députés, bien, c'est pour les
occuper parce que, sur le fond, on ne veut même pas qu'ils tirent de
conclusions de leur travail.
Mme Crête (Mylène) :
C'est quand même plus contraignant que des observations dans la mesure où un gouvernement
doit expliquer pourquoi il ne veut pas ajouter certaines recommandations dans des
projets de loi.
M. Nadeau-Dubois : Bien, c'est-à-dire
que ça a une valeur politique, oui, mais ça n'est pas contraignant au sens fort
du terme «contraignant». Le gouvernement peut prendre des recommandations, en
appliquer certaines, en laisser certaines de côté. Il n'est pas obligé par des
recommandations d'une commission parlementaire. Donc, pourquoi ne même pas
permettre à ses propres députés puis aux députés de l'opposition de tirer des
conclusions de ce qu'ils entendent, et de ce qu'ils lisent, et de ce qu'ils
voient? L'impression que ça donne, c'est qu'on fait des commissions
parlementaires pour occuper la majorité du gouvernement, mais qu'au fond on ne
veut pas vraiment que ces gens-là tirent des conclusions de leur travail.
Mme Crête (Mylène) :
Qu'est-ce que vous pensez que le citoyen retient? Il y a quand même eu
au-dessus de 4 millions de Québécois, là, qui se sont fait voler leurs
données chez Desjardins. Qu'est-ce que vous pensez que le citoyen qui voit ça
de l'extérieur retient ce matin?
M. Nadeau-Dubois : Le message
que ça envoie, c'est que le gouvernement ne prend pas au sérieux la question de
la fuite de données puis du vol d'identité, qu'on ne veut pas vraiment avoir un
débat de société sur cette question-là. Pourtant, c'est des millions de Québécois
qui sont touchés, des gens qui se demandent si, demain matin, ils vont faire
l'objet d'un vol d'identité. Et le message que le gouvernement envoie, c'est, excusez-moi
l'expression, d'une part, on a botché la commission parlementaire et, d'autre
part, on ne veut même pas qu'il y ait de recommandations.
Donc, ça ne correspond pas, comme
démarche, au sérieux de la situation. Ça ne correspond pas au niveau
d'alarmisme dans la population, un niveau d'alarmisme qui est justifié. Et moi,
je l'ai dit au sortir de cette commission-là, cette minicommission ou cette commission-minute
qu'a improvisée le gouvernement, elle a davantage inquiété les élus qu'ouvert
la voie à des pistes de solutions parce qu'on n'a pas eu le temps de travailler.
Et là on rajoute l'insulte à l'injure en disant : Il n'y aura même pas de
recommandation.
M. Laforest (Alain) : Mais il
y a quand même trois projets de loi, là, une politique et deux projets de loi.
Vous trouvez que ce n'est pas assez?
M. Nadeau-Dubois : Bien, à ce
stade-ci, il y a un projet de loi qui a été déposé sur la question des agences
de crédit. Le gouvernement nous promet des projets de loi plus tard. Mais, à ce
stade-ci, il n'y en a pas, d'autres projets de loi que celui qui a été déposé
aujourd'hui.
M. Laforest (Alain) : Vous ne
leur faites pas confiance?
M. Nadeau-Dubois : Bien,
l'utilité des commissions parlementaires, là, c'est pour explorer de manière
transpartisane un enjeu de société puis essayer de dégager des consensus. C'est
à ça que ça sert, une commission parlementaire. Un projet de loi, c'est ce que
fait un gouvernement pour aller de l'avant avec ses orientations à lui. Ce n'est
pas le même exercice. Et je pense que, quand il y a un débat de société aussi
grave, aussi pressant et aussi nouveau, ça mérite une commission parlementaire
pour s'y pencher sérieusement. C'est ce que toutes les oppositions ont demandé
à de multiples reprises. Finalement, acculé au pied du mur, le gouvernement a
improvisé une commission-minute. Et là il nous dit : Ah! puis, en plus,
savez-vous quoi, il n'y a même pas de recommandation.
M. Laforest (Alain) : ...doivent
craindre encore? Est-ce que le risque zéro existe?
M. Nadeau-Dubois : Le risque
zéro n'existe pas. Ça, c'est clair. C'est pour ça qu'il faut parler, oui, du
vol de données, mais aussi du vol d'identité puisque c'est malheureusement
quelque chose qui va continuer à exister. Par contre, un réel exercice sérieux,
là, ici, au Parlement, aurait permis de rassurer la population puis de rassurer
les élus. Moi, je suis ressorti de cette commission parlementaire plus inquiet
que quand j'y suis entré parce qu'on a eu le temps à peine d'effleurer la
surface du problème. On n'a pas eu le temps d'aller en profondeur. Et là, en
plus, on nous dit : Il n'y aura pas de recommandation.
(Fin à 12 h 43)