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Point de presse de Mme Christine Labrie, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière d’éducation

Version finale

Le mercredi 15 janvier 2020, 13 h

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Treize heures deux minutes)

Mme Labrie : Bonjour. Donc, je voulais revenir sur les propos du ministre de l'Éducation, d'hier, qui nous a dit que le principal défi en éducation, c'est celui de la pénurie de main-d'oeuvre. Il a raison de dire ça, je partage totalement son avis. Par contre, ce que je constate, c'est que, si c'est le plus grand défi, ce n'est pas là où lui met le plus d'énergie.

En ce moment, on prend des dizaines d'heures par semaine pour étudier le projet de loi n° 40 sur les commissions scolaires, alors que le principal défi, il l'a dit lui-même, et tout le monde le reconnaît, c'est la pénurie de main-d'oeuvre, qui engendre d'énormes problèmes dans le réseau d'éducation, notamment parce qu'il manque d'enseignants, mais il manque aussi de professionnels pour soutenir les élèves, pour leur réussite. Ça crée des situations où il peut y avoir une augmentation de la violence dans les classes, une diminution de la réussite des élèves.

Donc, moi, ce que je demande au ministre, aujourd'hui, c'est d'être cohérent avec ce qu'il dit être le plus grand défi du réseau de l'éducation, et de donner la priorité vraiment à ce défi-là, et de mettre sur la glace l'étude du projet de loi n° 40, qui ne règle absolument en rien l'enjeu de la pénurie de main-d'oeuvre, pour vraiment réunir tous les acteurs du milieu de l'éducation et réfléchir ensemble quelles pistes de solution on peut mettre en oeuvre rapidement pour contrer la pénurie à la fois d'enseignants mais également de professionnels, de personnel de soutien, parce que c'est un défi qui est en augmentation en ce moment et qui va l'être encore dans les prochaines années.

Donc, si on ne se met pas tout de suite tout le monde ensemble pour trouver des solutions et pour élaborer un plan, on a des très gros problèmes, là, qui se dessinent devant nous.

Mme Plante (Caroline) : Qu'est-ce qui cause la pénurie, d'après vous?

Mme Labrie : Bien, il y a la détérioration des conditions de travail au fil des dernières années. Avec toutes les coupures qu'il y a eu, il y a une désaffection du personnel. Il y a la concurrence entre les différents milieux, notamment pour les professionnels. On le voit, souvent, ils vont choisir d'aller oeuvrer dans le réseau de la santé, où les conditions de travail sont plus intéressantes. Donc, clairement, il faut s'attarder aux conditions de travail, mais, pour trouver des solutions rapidement, il faut aussi réfléchir à la formation, comment on peut améliorer l'accès à la formation.

Mme Plante (Caroline) : Puis, d'après vous... Là, vous dites que le ministre n'a pas agi, mais est-ce qu'il y a des mesures qu'il a mises en place qui ont pu aider, là, au recrutement des enseignants? On voit qu'il y a eu une petite amélioration depuis septembre.

Mme Labrie : Bien, quand on regarde les principales actions du ministre, depuis qu'il est entré en fonction comme ministre de l'Éducation, ce qu'on voit, c'est qu'il a consacré beaucoup d'énergie à des projets parallèles, des projets de son parti politique, comme l'implantation des maternelles quatre ans, comme l'abolition de la démocratie scolaire. Ce sont des projets qui ont mobilisé énormément d'énergie de sa part puis de la part du ministère de l'Éducation, et malheureusement ce sont deux projets qui ne répondent en rien à cet enjeu-là. Donc, il a peut-être agi de manière isolée pour intervenir sur la question de la pénurie de main-d'oeuvre, mais visiblement, s'il reconnaît que c'est le principal défi, il n'est pas en train d'y consacrer la majorité de ses énergies.

M. Dion (Mathieu) : ...il doit réfléchir à la formation? Est-ce qu'il doit rendre ça plus restreignant, plus difficile, à quelque part, pour valoriser la profession et s'assurer qu'on ait des enseignants de très bonne qualité? Tu sais, des fois, la contingence attire, à quelque part.

Une voix : Le contingentement.

M. Dion (Mathieu) : Le contingentement, pardon...

Mme Labrie : Il y a plusieurs manières de valoriser la formation et le métier d'enseignant ou de professionnel. Moi, je pense qu'il va falloir réfléchir à des passerelles plus efficaces pour que les personnes qui ont un diplôme spécialisé puissent avoir accès au métier d'enseignant, par exemple. La valorisation du métier peut se faire de plusieurs façons, notamment par les conditions de travail, là. Je ne pense pas en ce moment qu'on devrait restreindre les admissions en éducation. Ça ne veut pas dire qu'il faut être laxiste non plus dans les règles d'accès, mais le... On manque de plusieurs centaines d'enseignants à chaque année. C'est vrai aussi dans les communautés autochtones. Donc, on ne peut pas, en ce moment, envisager de restreindre le nombre de personnes admises dans ces programmes-là.

    Mme Sioui (Marie-Michèle) : Ça a déjà existé, un certificat, au Québec, pour les personnes qui voulaient devenir enseignantes, mais qui avaient déjà une formation en autre chose. Ça existe pour l'Ontario. Est-ce que

vous seriez favorable à ce qu'on ramène ce certificat-là?

Mme Labrie : Bien, en ce moment, il existe des programmes que certaines peuvent suivre quand elles ont un diplôme de premier cycle spécialisé dans un domaine. Souvent, pour avoir accès à ce programme de formation là, elles doivent être déjà à l'embauche d'une commission scolaire. Je pense qu'il faut réfléchir collectivement. Moi, je ne prétends pas avoir toutes les solutions, je pense qu'il n'y a personne qui a toutes les solutions en ce moment. Mais, si on ne réunit pas ensemble tous les acteurs du réseau de l'éducation pour discuter collectivement de ces propositions-là, on ne réussira jamais à enrayer le problème, et puis jusqu'à maintenant il ne l'a pas fait.

M. Robitaille (Antoine) : Mais, sans avoir toutes les solutions, est-ce que ce n'en est pas une, solution, ça, le certificat?

Mme Labrie : Bien, je pense que, oui, il faut certainement le considérer. Oui, il faut considérer tout ce qui peut nous permettre d'enrayer la pénurie de main-d'oeuvre parce que, là, en ce moment, non seulement on a des classes dans lesquelles il n'y a pas de titulaire, à la rentrée scolaire, on a des classes pour lesquelles on ne réussit pas à trouver des suppléants, puis finalement c'est à peu près n'importe qui, qui fait de la suppléance. On a des élèves qui ont des besoins particuliers qui ne réussissent pas à avoir le soutien des professionnels nécessaire. On a des enseignants qui vivent des défis avec des élèves pour lesquels ils ne reçoivent pas de soutien, qui subissent de la violence en classe de manière marquée. Moi, on me l'a souligné dans ma région. Et ça, ce sont tous des problèmes qui sont en lien avec la pénurie de main-d'oeuvre. On a des services de garde qui dépassent les ratios parce qu'ils ne réussissent pas à avoir suffisamment de techniciennes en service de garde. Donc, le problème, il est vraiment omniprésent dans tout le réseau.

Mme Plante (Caroline) : Le ministre Roberge a annoncé ce matin que la CAQ renonce à rendre l'école obligatoire jusqu'à 18 ans. C'était une promesse qui avait été faite et défendue par le premier ministre François Legault. J'aimerais vous entendre sur la forme et sur le fond. Premièrement, ça fait au moins trois fois, là, depuis les articles sur le cours d'ECR, qu'on apprend certaines décisions du ministre à travers des articles de journaux. Qu'est-ce que vous pensez de cette méthode-là? Puis, sur le fond, est-ce que c'est une bonne nouvelle qu'il renonce à cette promesse-là?

Mme Labrie : Bien, d'abord, sur le fond, moi, je pense que c'est une bonne nouvelle qu'il renonce à cette promesse-là. Je n'ai jamais compris pourquoi il privilégiait un moyen coercitif pour retenir, finalement, les jeunes sur les bancs d'école, alors que, dans le fond, les jeunes qui décrochent, souvent, c'est parce qu'ils n'étaient pas suffisamment soutenus. Donc, ce n'est pas en leur imposant de rester à l'école plus longtemps qu'on va les aider à réussir ou qu'on va les convaincre que l'éducation est importante.

Ensuite, sur la manière dont il annonce ses nouvelles propositions, bien, écoutez, il les met sur la place publique. Évidemment, moi, je pense qu'il a avantage à consulter. Je sens qu'il commence de plus en plus, depuis les dernières semaines, à tâter l'opinion avant d'arriver avec une mesure. Par exemple, il a annoncé cette intention-là, il ne l'a pas... Au début, on voyait qu'il procédait de manière réglementaire, directement, hein? On se souvient de la question des récréations, par exemple, on se souvient du dossier de l'école à la maison aussi. Il procédait de manière directe sans avoir lancé l'idée dans l'espace public avant, donc sans mesurer les réactions. Moi, je pense que c'est sain de sa part de consulter davantage.

Mme Plante (Caroline) : Vous débattiez, ce matin, de l'article 100 qui concerne les stages en entreprise. Est-ce que vous pensez que les stages peuvent inciter les jeunes à abandonner leurs études puis aller travailler?

Mme Labrie : Bien, en fait, c'est un phénomène qu'on constate. Moi, je le vois dans ma région, les étudiants souvent vont accepter une offre d'emploi au terme d'un stage. Mais, en même temps, les stages en milieu professionnel sont aussi une manière de retenir les élèves dans le réseau de l'éducation. Évidemment, c'est sûr que, si les stages sont rémunérés, il y a plus de chances que les étudiants suivent des programmes de formation dans lesquels il y a des stages et continuent leurs programmes jusqu'à ce qu'ils obtiennent leurs diplômes. La rémunération des stages, c'est un dossier important pour nous, puis c'est vrai pas juste pour les stages à l'université, mais aussi dès la formation professionnelle. Donc, moi, je pense que la coexistence ou le partage du temps entre les études et les stages est une bonne manière de retenir les jeunes pour qu'ils aillent chercher un diplôme tout en développant une expérience professionnelle.

Mme Plante (Caroline) : Les libéraux s'inquiétaient vraiment, là, ce matin, de ça. Est-ce que vous partagez la même inquiétude?

Mme Labrie : Bien, oui, je partage un peu cette inquiétude-là parce que je le vois chez nous. Au cégep de Sherbrooke, par exemple, on constate une diminution des inscriptions, on constate que les étudiants ne reviennent pas après l'été pour compléter leurs programmes ou encore ils se sont inscrits après le secondaire, finalement ils ne se présentent pas à l'automne parce qu'ils ont trouvé un emploi, parce qu'ils ont... soit dans leurs domaines de formation ou un emploi, bon, n'importe quel emploi, finalement, qu'ils occupaient pendant l'été pour lequel ils se font offrir encore des heures à l'automne. Donc, c'est une préoccupation que j'ai. Mais certainement les stages doivent être une solution pour convaincre les jeunes de développer une expertise professionnelle tout en restant à l'école. Je ne pense pas que ça serait une bonne façon de régler l'enjeu que d'abolir les stages.

Mme Plante (Caroline) : Est-ce que vous accueillez favorablement l'idée d'une campagne, une vaste campagne de sensibilisation auprès des jeunes dans les écoles pour qu'ils poursuivent leurs études et complètent leurs études, en fait?

Mme Labrie : Bien, assurément, il faut sensibiliser les jeunes au fait que, s'ils obtiennent un diplôme, ils vont avoir des meilleures conditions toute leur vie par la suite. Il faut aussi sensibiliser les employeurs à l'importance de soutenir les jeunes dans leurs études. Il faut développer des partenariats pour que les institutions d'enseignement et les milieux de travail puissent travailler conjointement pour que les jeunes puissent occuper un emploi souvent, même, dans leurs domaines, tout en continuant l'école, et que ça ne soit pas un obstacle, là, de faire les deux en même temps.

M. Bossé (Olivier) : Sur l'amendement qui a été déposé ce matin par le ministre concernant, là, le nombre de parents sur les conseils d'administration pour les centres de services, est-ce que c'est un pas dans la bonne direction ou est-ce que vous êtes pour ça?

Mme Labrie : On va le regarder, mais, en toute honnêteté, l'idée de remplacer des élus par un conseil d'administration dont bien des gens vont être nommés ou élus par une très petite fraction de personnes bien spécifiques nous déplaît à la base, là. Donc, pour moi, c'est une technicalité, là, le changement qu'il propose. Sur le fond, je pense qu'on se nuit collectivement en retirant un palier de démocratie puis en le remplaçant par un conseil d'administration.

M. Dion (Mathieu) : Ça répondait quand même à une demande des groupes.

Mme Labrie : Il y a des groupes qui ont proposé ça, mais essentiellement, moi, j'ai entendu beaucoup plus de groupes se prononcer contre l'abolition d'un palier de démocratie que de demander spécifiquement qu'on ajoute, par exemple, un membre de la communauté sur le C.A. aussi.

M. Bossé (Olivier) : Visiblement, le gouvernement s'en va quand même vers la réforme des commissions scolaires. Dans cette optique-là, vaut-il mieux que ce soit une majorité de parents ou pas qui soient sur ces conseils d'administration là?

Mme Labrie : Moi, je pense que ça devrait être des élus puis des élus à suffrage universel. Ça, c'est ma position là-dessus. Mais ce que je suis en train de vous dire aujourd'hui, c'est que ça n'a aucun sens dans le contexte de pénurie de main-d'oeuvre dans le milieu de l'éducation, qui est reconnue par tout le monde, qui est reconnue par le milieu, qui est reconnue par tous les partis politiques, par le ministre lui-même. Tout le monde partage cette préoccupation-là et reconnaît que c'est le principal défi. Là, en ce moment, lui, il consacre son énergie à réfléchir qui devrait être sur un conseil d'administration de commission scolaire ou de centre de services. En aucun temps ces débats-là ne nous aident à contrer la pénurie dans le réseau puis à offrir des meilleurs services aux élèves.

M. Dion (Mathieu) : Tantôt, M. Roberge a dit que, sur l'idée d'un bâillon, que c'est un spin des journalistes. Trouvez-vous que c'est fondé de dire ça?

Mme Labrie : Bien, écoutez, dans son projet de loi, il y avait une date qui était mentionnée, c'était celle du 29 février. Je ne le sais pas, s'il va faire un bâillon, mais on est préoccupés par cette date-là parce qu'elle nous impose un calendrier de travail qui est vraiment très, très restreint. C'est impossible, c'est absolument impossible de traiter plus de 300 articles en quelques semaines comme ça. Donc, soit il ne tient pas à cette date-là et il est prêt à la changer ou, s'il y tient, à ce moment-là, on ne pourra pas traiter tous les articles.

M. Bossé (Olivier) : Donc, ce n'est pas une invention médiatique, vous partagez cette crainte-là qu'on va peut-être...

Mme Labrie : On la partage, et elle est partagée par tous les acteurs du milieu.

Le Modérateur : Merci.

(Fin à 13 h 14)

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