(Onze heures trente-quatre minutes)
Le Modérateur
: Alors,
bonjour à tous. Bienvenue à ce point de presse sur les transferts fédéraux en éducation.
Prendront part à ce point de presse, M. Philippe Lebel, président de l'Union
étudiante du Québec; M. Philippe Clément, président de la Fédération étudiante
collégiale du Québec; Mme Marwah Rizqy, porte-parole libérale en matière
d'éducation et d'enseignement supérieur; M. Pascal Bérubé, chef du troisième
groupe d'opposition; M. Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole en matière
d'éducation supérieure à Québec solidaire.
M. Lebel (Philippe) : Donc,
bonjour, tout le monde. Merci d'être ici ce matin. Pour bien vous expliquer
l'enjeu, laissez-moi revenir quelques années en arrière.
Dans les années 1940, le gouvernement
du Canada a créé son propre programme de prêts et bourses, puis, comme le
gouvernement du Québec avait déjà un programme similaire, il a demandé un droit
de retrait avec compensation. Sur le principe, on n'a pas de problème, étant
donné que ce que ça permettait, c'est d'avoir un seul programme, au Québec,
bonifié. Donc, c'était plus facile pour les étudiants et les étudiantes.
«Fast forward». En 2016, le gouvernement
du Canada a décidé d'abolir deux crédits d'impôt, celui pour études et celui
pour manuels. En abolissant ces crédits d'impôt là, ce qu'il a fait, c'est
qu'il a réinvesti de l'argent en prêts et bourses. Donc, ce que ça permettait
de faire, c'était d'avoir des liquidités pour les étudiants et les étudiantes
qui en avaient vraiment besoin, pour améliorer l'accessibilité aux études
supérieures.
Depuis, le gouvernement fédéral a même
réinvesti encore plus que le montant des coupes dans son programme de prêts et
bourses. Au Québec, on avait droit aux crédits d'impôt, mais, comme je vous
l'ai expliqué, on n'a pas le droit aux prêts et bourses canadiens parce que le
gouvernement du Québec reçoit un transfert compensatoire. Avec ce transfert
compensatoire là, le gouvernement du Québec aurait investi seulement
80 millions de dollars dans son programme d'aide financière aux études.
Aujourd'hui, si on avait encore les crédits
d'impôt fédéraux, c'est 277 millions de dollars que la population
étudiante du Québec recevrait pour l'aider à financer ses études. Si le gouvernement
du Québec n'a remis que 80 millions de dollars en aide financière aux
études, la différence est facile, c'est 197 millions de dollars qui
manquent en aide à l'accès aux études supérieures.
C'est pour ça que la Fédération étudiante
collégiale du Québec et l'Union étudiante du Québec ont lancé la campagne Où
est notre argent?. Ce qu'on demande, c'est un engagement budgétaire du gouvernement
pour que les étudiants et les étudiantes du Québec ne soient pas pénalisés par
la coupe des crédits d'impôt, parce qu'en ce moment on est les seuls au Canada
à l'être.
On remercie beaucoup les porte-parole et
chefs des partis d'opposition de nous soutenir là-dedans. Et je leur passerais
la parole. Mme Rizqy.
Mme Rizqy : Merci beaucoup. Écoutez,
aussi, dans l'histoire, dans le fil d'événements, en 2016, la Coalition avenir
Québec avait promis de réinvestir ces sommes d'argent. C'est très simple, si ça
vient de la poche des étudiants, ça doit revenir dans la poche des étudiants.
On ne peut pas commencer à prendre cet argent-là pour financer d'autres projets,
que ce soit maternelle quatre ans ou troisième lien, il faut respecter les
promesses. Le gouvernement de la CAQ n'arrête pas de nous dire : Il faut
absolument faire suite à nos promesses, même à coups de bâillon. Là on ne lui
demande pas de bâillon, on lui demande simplement de respecter ses engagements
dans le prochain budget.
M. Nadeau-Dubois : Bonjour,
tout le monde. Je suis très content d'être ici au nom de Québec solidaire.
Toujours heureux d'être aux côtés des amis du mouvement étudiant.
Il y a eu une interpellation il y a
quelques mois, ici au salon bleu, et j'avais posé la question, à l'époque, au
ministre Roberge, je lui avais demandé ce qu'il prévoyait faire avec cet
argent-là qui vient d'Ottawa. Et il y avait eu, à ce moment-là, un pas de fait
dans la bonne direction, il avait dit qu'il souhaitait mettre cet argent-là en
aide financière aux études. Ce qu'on lui demande, aujourd'hui, c'est de
respecter cette parole-là qui a été donnée en campagne électorale et réitérée
au salon bleu il y a quelques mois.
Il n'y a pas de raison actuellement de ne
pas donner un break aux étudiants et aux étudiantes du Québec. Les surplus sont
historiques, les coffres sont pleins. Il n'y a pas de bonne raison de ne pas
investir cet argent-là dans l'accessibilité aux études pour les jeunes
Québécois, les jeunes Québécoises. C'est un gouvernement qui prétend faire de
l'éducation sa priorité, bien là, il a l'occasion de le démontrer non pas en
faisant une réforme de structure qui est inutile, mais en remettant de l'argent
dans les poches de nos étudiants puis nos étudiantes qui veulent faire grandir
la société québécoise en étudiant. Merci.
M.
Bérubé
:
Merci, cher collègue. À mon tour, au nom du Parti québécois et à plusieurs
titres, comme député de l'Assemblée nationale, comme ancien vice-président de
la Fédération étudiante universitaire du Québec, qui a beaucoup défendu la
condition étudiante, également comme responsable de l'aide financière au
ministère de l'Éducation... J'ai vécu ça de différentes façons.
Et je dirais au gouvernement, si son
slogan, c'est : Mettre davantage d'argent dans les poches des
Québécois... et des étudiants et des étudiantes, qui en ont bien besoin.
Cet argent-là, c'est le nôtre, c'est de l'argent qui est destiné à la condition
étudiante. On sait qu'il existe. Qu'est-ce qu'on en fait? Est-ce que ça
contribue directement à améliorer la condition étudiante, à permettre de vivre,
d'étudier, de se réaliser pendant les études? Le combat du mouvement étudiant,
il est légitime, puis il est nécessaire, puis il est très concret.
Alors, j'ai l'impression que rapidement on
pourrait nous indiquer en quoi la somme a contribué aux objectifs qui sont
évoqués et que, dans le budget 2020‑2021, ça pourrait être précisé aussi. Mais
il faut s'assurer que cet argent-là serve à améliorer la condition étudiante.
Et à nouveau trois partis d'opposition,
des représentants étudiants, demandent quelque chose de relativement simple :
qu'on s'assure que l'argent qu'on a disponible pour améliorer la condition
étudiante serve à cette fin. On en a besoin. On a trop, dans nos
circonscriptions puis au gré des rencontres qu'on fait, de témoignages de gens
qui ont besoin de cet argent-là pour faire leurs études convenablement. Voilà.
M. Clément (Philippe) :
Bonjour. Merci beaucoup aux oppositions d'être ici aujourd'hui. On l'a dit,
mais je veux absolument le répéter, ce dont il est question aujourd'hui, c'est
une promesse de Jean-François Roberge. Alors qu'il était dans l'opposition, en
2016, il avait fait une conférence de presse ici, au Parlement, avec François
Legault, avec les associations étudiantes. Il était très fier d'avoir un
dossier dans lequel il appuyait le mouvement étudiant. On était contents de
l'avoir à nos côtés à ce moment-là. Il a réitéré en 2019, à une question de
Gabriel Nadeau-Dubois, cet engagement-là que l'argent qui venait de la poche
des étudiants et des étudiantes devait retourner dans la poche de la communauté
étudiante.
On a eu une rencontre il y a deux semaines
avec le ministre Roberge. Ça s'est bien passé. Il a encore cette ouverture-là
sur ce principe-là. Par contre, depuis ce temps-là, on n'a pas eu de suivi, pas
eu de nouvelle. Il y a eu un beau communiqué, le soir où on a rencontré le
ministre Roberge, à l'effet qu'il y avait déjà une deuxième rencontre de suivi
qui était planifiée avec les associations étudiantes. Moi, je n'ai pas eu
d'invitation à cette rencontre-là. Philippe Lebel non plus.
On attend un suivi à ce niveau-là. On veut
avoir un dialogue qui doit être productif avec le ministre Roberge et qui doit
déboucher sur un engagement clair, dès le prochain budget, que l'argent qui
vient de la poche des étudiants et des étudiantes va y retourner.
C'est pour ça qu'on fait une action
symbolique, la première d'une série, devant l'Assemblée nationale, aujourd'hui,
avec des militants et des militantes pour envoyer le message à M. Roberge
que c'est un enjeu qui rassemble les gens sur le terrain ici et un peu partout
à travers le Québec.
M. Bérubé : J'aimerais
rajouter juste un mot.
M. Clément (Philippe) :
Bien oui.
M. Bérubé : Dans le cadre
du projet de loi n° 40, souvent, les enseignants, on dit : Il est des
nôtres, c'est un enseignant. Bien, il n'est pas que ça. Parce qu'il y a
22 ans, dans le mouvement étudiant, mon directeur de cabinet et moi
siégions avec Jean-François Roberge, qui était le représentant étudiant de
l'association des sciences de l'éducation de l'UQAM, et on demandait exactement
la même chose lorsqu'on était beaucoup plus jeunes. Alors, je lui demande de se
souvenir de ses jeunes années de militantisme, et, dans sa position, de bien
comprendre les revendications étudiantes, et de poser le geste qui s'impose.
Jean-François Roberge, tantôt enseignant, tantôt militant étudiant, maintenant
ministre, on compte sur vous.
Le Modérateur
: Alors,
procédons à la période de questions. Je vous prierais de vous limiter au sujet
du jour. Marco Bélair.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui, bonjour. On parle toujours de 200 millions de dollars?
Une voix
: ...
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui? Puis cet argent-là doit être investi dans quoi? Dans l'aide financière aux
études? Bonifier les bourses?
M. Lebel (Philippe) : Oui. Dans
le fond, nous, ce qu'on demande, c'est que ce soit investi dans l'aide
financière aux études. Dans les suggestions que nous, on fait, là, on suggère
de rattraper les dépenses admises, c'est-à-dire que le programme d'aide
financière représente le vrai coût de la vie, parce qu'en ce moment il est
vraiment en dessous. Puis, si on arrivait à faire... si on peut avoir le
réinvestissement qu'on demande, ça ferait une différence de 125 $ par mois
pour les gens qui en ont vraiment besoin, ceux qui sont 100 %
bénéficiaires du programme.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Donc, augmenter la capacité d'emprunt ou c'est vraiment bourses non
remboursables?
M. Lebel (Philippe) : Ce
serait des bourses qui seraient données pour les gens qui seraient
bénéficiaires.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
O.K. Jusqu'où êtes-vous prêts à aller pour faire entendre raison au
gouvernement?
M. Lebel (Philippe) : Nous, ce
qu'on veut, évidemment, c'est un engagement budgétaire. Comme mon collègue l'a
dit, on a... puis la première action de plusieurs, qui s'en vient devant
l'Assemblée nationale. Puis nous, on va escalader jusqu'à tant qu'on ait une
écoute du gouvernement.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
O.K. Une dernière question. On voit Mme Rizqy à vos côtés. Le mouvement
étudiant a été plutôt à couteaux tirés avec le Parti libéral du Québec au cours
des dernières années et décennies. Est-ce que, Mme Rizqy, vous allez sortir vos
casseroles pour faire pression sur le gouvernement?
Mme Rizqy : Bien, écoutez,
tantôt, on s'en va servir de la soupe populaire. Vous êtes le bienvenu.
M. Chouinard (Tommy) : Oui,
bonjour. Question. Vous avez rencontré le ministre déjà. Donc, est-ce que c'est
ce qu'il a admis, là, l'existence de ce fossé, des 200 millions? Est-ce
qu'il... Parce que je croyais comprendre qu'il n'accrédite pas nécessairement
le chiffre, là.
M. Clément (Philippe) : Bien,
c'est ça, en fait, vous l'avez bien dit. On a des discussions sur les chiffres.
Nous, on a les chiffres. On est solides sur les chiffres qu'on avance. On a
fait faire les analyses qui devaient. Puis nous, on n'a pas encore vu la
démonstration inverse de ces chiffres-là. Puis, quand on a rencontré le
ministre, il a réitéré cet engagement de principe là que l'argent devait
retourner dans la poche des étudiants et des étudiantes. Mais, sur les
chiffres, ça ne tient pas la route, là, donc il faut qu'il y ait la promesse
puis l'action qui suit le principe initial.
M. Chouinard (Tommy) : Donc,
si vous dites que ça ne tient pas la route, c'est qu'il vous est arrivé avec un
chiffre qui n'était pas exactement le vôtre, si je comprends bien?
M. Clément (Philippe) : Bien,
je ne dirais pas qu'il a fait une offre. On a eu des discussions, des analyses
que lui a fait faire. On n'est pas dans les mêmes ordres de grandeur.
M. Chouinard (Tommy) : Et
donc c'est quel ordre de grandeur? On est où au gouvernement, là?
M. Clément (Philippe) : Pas le
même ordre de grandeur.
M. Chouinard (Tommy) : O.K.
C'est la moitié moins ou...
M. Clément (Philippe) : Ah!
beaucoup moins que ça.
M. Chouinard (Tommy) : Ah!
beaucoup moins que ça? O.K. Donc, 50 millions, mettons?
M. Clément (Philippe) : Je ne
dirai pas de chiffre.
Une voix
: Vous leur
poserez la question.
M. Chouinard (Tommy) : Non,
mais juste pour comprendre exactement la position...
M. Clément (Philippe) : Oui,
oui, mais, en fait... Mais M. Roberge pourrait vous répondre beaucoup mieux que
moi à cette question-là.
M. Chouinard (Tommy) : Parce
que, jusqu'ici, il n'a pas répondu.
M. Clément (Philippe) : Parce
que je sais qu'il a changé d'idée, là, dans les discussions qu'on a eues avec
lui. Les chiffres ne sont pas les mêmes tout le temps. Donc, posez-lui la
question Je pense qu'il va avoir la réponse.
Mme Rizqy : C'est comme les
maternelles quatre ans. Ça varie de semaine en semaine.
M. Chouinard (Tommy) : Merci.
Le Modérateur
: C'est
tout? Merci.
(Fin à 11 h 45)