(Neuf heures dix-neuf minutes)
Mme Montpetit : Donc, écoutez,
on tenait à venir vous rencontrer aujourd'hui parce que le gouvernement a fait
le choix d'appeler un seul projet de loi pendant la session intensive qui
commence aujourd'hui et il appelle le projet de loi n° 44, projet de loi
qui, pour mémoire, abolit, dans le fond, deux structures très performantes :
le Conseil de gestion du Fonds vert et Transition énergétique, deux jeunes
structures qui ont été mises en place en 2017‑2018 et qui ont fait leurs
preuves depuis. On a eu l'occasion d'avoir ces échanges-là avec vous.
Mais donc le projet de loi, on ne s'est
pas rencontrés depuis le 19 février, et le gouvernement fait le choix
d'appeler ce projet. Donc, on se questionne sur les intentions du gouvernement
de faire ce choix-là, alors qu'il aurait pu faire le choix, par exemple,
d'appeler le projet de mon collègue André Fortin sur les ratios. Il aurait
pu faire le choix d'améliorer les conditions de vie des travailleurs dans le
réseau de la santé. On est en pleine crise sanitaire, et il décide d'appeler un
projet de loi qui en est à peine à ses balbutiements. Pour vous donner une
idée, on n'a même pas commencé l'étude détaillée encore. Donc, on n'a pas commencé
l'article 1 de ce projet de loi. Donc, ce n'est pas comme si on était à la
fin d'un projet de loi et qu'ils pouvaient penser qu'on avancera assez
rondement pour le finaliser parce qu'il reste seulement certains articles. Non,
ce n'est pas du tout le cas.
Donc, ce n'est pas que je veux prêter des
intentions au gouvernement, mais force est de constater que, depuis un an et
demi, ça devient très clair, la façon dont ils gouvernent, c'est-à-dire une
question d'abolition, de contre-pouvoir. On l'a vu avec le fameux projet de loi
n° 34, qui s'est fini en bâillon, qui est venu, dans le fond, émasculer complètement
la Régie de l'énergie qui faisait contrepoids au monopole d'Hydro-Québec et
surtout aux intentions politiques qu'il pouvait y avoir autour de la gestion;
l'abolition aussi des commissions scolaires; là, on le voit en ce moment avec
le Conseil du trésor, il y a une volonté du gouvernement d'assouplir les règles
d'octroi des contrats. Et là, avec le projet de loi n° 44, on se retrouve
dans la même situation, c'est l'abolition de deux structures, dont le Conseil
de gestion du Fonds vert qui a été mis en place suite aux nombreux commentaires
qui ont été faits par la Vérificatrice générale à l'époque. Et c'est la raison
pour laquelle on avait mis... on va l'appeler un garde-fou, dans le fond, qui
avait été mis en place pour s'assurer justement que l'argent du Fonds vert soit
bien géré.
Il y a 1,8 milliard dans le Fonds vert,
et, encore là, je ne veux pas prêter d'intention au gouvernement, mais je
m'explique mal l'empressement de mettre ce projet de loi à l'étude là,
présentement, en session intensive, en pleine crise sanitaire, si ce n'est pas
dans une intention de mettre rapidement les mains dans le plat à bonbons, les
mains dans le 1,8 milliard et de vouloir récupérer rapidement cet
argent-là, parce que, si ce n'est de cette question, le reste, c'est vraiment
des questions de structure. Puis pour ceux qui ont suivi les consultations, on
l'a bien vu, c'était unanime, les gens qui sont venus ont demandé notamment de
ne pas abolir Transition énergétique Québec. Puis j'en profite pour vous
mentionner d'ailleurs qu'il y a une seule société d'État, pendant la crise
sanitaire, qui a présenté des mesures de relance, et c'est Transition
énergétique Québec. Donc, c'est vous dire à quel point, non seulement elle est
pertinente, elle est efficace, elle est agile et, dans un contexte de relance,
elle continue de l'être.
Donc, j'en profite pour réinviter le
ministre de l'Environnement, mais également le premier ministre à reconsidérer
le contenu de leur projet de loi. On a fait des motions de scission, on leur a
proposé de retirer Transition énergétique. On veut rencontrer Transition
énergétique, ils ont refusé. On a demandé de rencontrer le ministre des
Ressources naturelles, ils sont sur le point de le refuser également. Donc, on
les invite à revenir sur leur réflexion et maintenir cette structure qui a fait
ses preuves, qui continue de faire ses preuves, dont on a absolument besoin
dans un contexte de relance économique, de relance environnementale aussi, et
ça, pour moi, c'est absolument nécessaire.
Mais, comme je vous dis, je veux être
vraiment sur le fond de la question, et c'est celle-là qu'on doit se poser,
c'est : Pourquoi le projet de loi n° 44, aujourd'hui, est le seul
projet qui est à l'étude dans un contexte de crise sanitaire et dans un
contexte de session intensive? Moi, ça me pose beaucoup de questions, surtout
que le ministre de l'Environnement n'a toujours pas présenté son plan
d'économie durable qu'on attend depuis plus d'un an et demi. Il n'y a toujours
pas de relance en économie verte, il n'y a toujours pas de relance en
environnement. C'est à se demander quelles sont leurs ambitions au niveau
environnemental, si ce n'est que de faire de la structurite comme c'est le cas
avec ce projet de loi.
Et là j'entends déjà, parce qu'on connaît
la dynamique et on a déjà joué dans ce film, j'entends déjà Simon
Jolin-Barrette, le leader du gouvernement, qui va venir dire, dans les
prochaines heures, qu'on fait de l'obstruction, qu'on pose trop de questions,
qu'on fait du «filibusting». Moi, je veux juste vous rappeler qu'on n'a pas
débuté l'étude de l'article 1. Donc, on est mardi, là, je vous mets dans
le bain, là, on ne l'a pas commencé puis on ne la commence pas dans les
prochaines heures parce qu'on est en train de discuter de l'importance de
recevoir en consultation le ministre des Ressources naturelles. Donc, je
l'entends déjà nous dire ça, nous dire qu'on pose trop de questions et
compagnie.
Il y a des... Les gens, les experts qui
sont venus en consultation ont soulevé énormément de questions, et on a reçu
des centaines et des centaines d'amendements qui ont été soumis par des avocats
en environnement du Québec. Donc, c'est pour vous dire à quel point le projet
de loi actuel mérite d'être bonifié, à quel point il manque beaucoup
d'ambition, beaucoup d'audace, fait le choix de l'échec, là, ça, ça a été... c'est
unanime chez les experts qui sont venus.
Ce n'est pas un projet de loi climat. Le
ministre l'a bien dit, l'a bien répété, les cibles de climat ne font pas partie
du projet de loi. Ce n'est pas un projet en environnement à proprement dit. Ce
n'est pas un projet de loi qui nous permet, à l'heure actuelle, de mettre
des... il n'y a pas de mesures qui vont nous permettre d'atteindre les cibles.
Donc, les cibles sont complètement exclues du projet de loi. Donc, ça va faire
partie des discussions qu'on aura.
Et, dans le fond, ce que je veux
communiquer, c'est le fait que nous, on posera toutes les questions qu'il y a à
poser. Et, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas les réponses à toutes ces
questions-là, on va continuer de les poser parce que c'est un projet qui est
très, très, très imparfait. Et je me questionne encore et j'espère qu'on... En
tout cas, les prochains jours ou les prochaines heures nous permettront
d'avoir, je pense, une réponse à cette question qui est : Pourquoi le
projet de loi n° 44 est le seul projet de loi qui est mis à l'étude en ce
moment?
M. Bergeron (Patrice) :
Mme Montpetit, quel est le risque, à partir du moment où le ministre met
la main, de façon discrétionnaire, sur les 1,8 milliards du Fonds vert? Quel
est le risque que ça représente, selon vous?
Mme Montpetit : Bien, c'est le
recul. On revient exactement où on ne voulait plus être. On a fait le choix,
dans les dernières années, de mettre un conseil de gestion du Fonds vert pour
s'assurer, justement, de dépolitiser la gestion de ce fonds, d'augmenter la
transparence, d'augmenter la reddition de comptes, mais surtout, justement,
d'enlever tout ce qui pourrait être politique autour des choix qui sont faits.
Le ministre de l'Environnement pourra dire
ce qu'il veut, il est assis au Conseil des ministres avec plusieurs ministres
autour de lui et il se fragilise en faisant ce choix. Et le conseil de gestion
a été mis en place justement pour s'assurer d'avoir un garde-fou qui peut permettre
de faire les meilleurs choix avec un comité d'experts en place, avec un conseil
d'administration. Et donc le risque, c'est de repolitiser, de faire des mauvais
choix et que les sommes qui sont dans le 1,8 milliard n'aillent pas à la
lutte aux changements climatiques.
M. Laforest (Alain) : Vous en
avez parlé d'entrée de jeu, vous avez, entre autres, été travailler dans un
CHSLD. Qu'est-ce que vous pensez de la campagne publicitaire que le
gouvernement lance pour attirer des préposés? Est-ce que c'est réaliste,
atteignable et est-ce qu'il y a des risques?
Mme Montpetit : J'aurais envie
de vous répondre à ça qu'il n'y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas
voir. Il y a une situation... La CAQ, et M. Legault, et M. Paradis, à
l'époque, qui était porte-parole en santé, ont décrié pendant la dernière
législature, haut et fort à quel point il y avait un enjeu dans les CHSLD, à
quel point ça devait être une priorité, à quel point le nombre... le personnel
devait être augmenté, à quel point les ratios devaient être réglés aussi. Force
est de constater qu'un an et demi après, ça fait 19 mois, là, qu'ils sont au
pouvoir, ça n'a pas été fait.
Et je réitère que j'ai mon collègue André
Fortin qui a déposé un projet de loi, la semaine dernière, sur la question des
ratios. Je pense que le premier ministre devrait faire le choix d'appeler ce
projet de loi et de l'étudier. Il a fait le choix contraire, il a fait le choix
de mettre le projet de loi n° 44. Alors qu'on est en session intensive, on
pourrait faire ça.
Et tant qu'il ne réglera pas la question
des ratios, il ne réglera pas la situation. Puis il faut bien comprendre que,
dans un CHSLD, au niveau des ratios, c'est que, sur une journée de 24 heures,
il y a des moments qui... moi, je l'avais fait à, l'époque, la tournée des
CHSLD, juste avant qu'on fasse cette recommandation-là en 2018. Il y a des
moments dans une journée qui nécessitent plus de gens. Il y a 70 % grosso
modo des gens en CHSLD qui ont des déficits cognitifs, alzheimer et compagnie.
Ça peut prendre jusqu'à 40 minutes, 50 minutes, 60 minutes, les
nourrir, parce qu'il faut vraiment les nourrir à la cuillère. Bien, c'est sûr
qu'il y a des heures dans la journée, par exemple des heures de repas, où ça
prend plus de personnel pour faire lesdites tâches que dans le reste de la
journée. Mais c'est pour ça qu'il faut établir des ratios extrêmement clairs
parce qu'il y a des disparités d'un endroit à l'autre, que ce soit au niveau
des infirmières, des infirmières auxiliaires ou des préposés aux bénéficiaires.
Donc, il doit absolument prendre cette
question-là en délibéré, et il doit s'en occuper, et il ne l'a pas fait depuis
18 mois. On en parle depuis des semaines, il y a un projet de loi sur la table
et il fait encore le choix de ne pas le faire.
M. Laforest (Alain) : Vous
rejetez l'idée qu'il avance, que ce n'est pas possible de mettre des ratios
parce qu'il manque 10 000 personnes. Avant de mettre les ratios, il faut
trouver 10 000 personnes. C'est comme un chien qui se court après la queue,
non?
Mme Montpetit : Bien, moi, je
pense qu'on peut marcher puis mâcher de la gomme en même temps. Ce n'est pas la
première fois que vous entendrez cette expression-là. Je ne comprends pas
pourquoi il ne peut pas... Je pense qu'il y a une question... que le projet de
loi est déposé par mon collègue, est-ce que c'est ça, la raison? Il peut très
bien commencer à travailler sur son projet de loi, il peut très bien mettre les
ratios en place et, du même coup, partir une campagne de recrutement de personnel,
là.
Journaliste : ...l'an passé,
ça s'est déjà fait, régler la question des ratios, par exemple, puis on l'a
fait pour les résidences pour personnes âgées. On a dit que vous devez avoir,
en fonction des services donnés dans les résidences, tant de préposés aux bénéficiaires.
Ça, ça a été adopté, mis en vigueur et non respecté par la vaste majorité des
résidences privées pour aînés, parce qu'il n'y avait pas le personnel, avec
pour conséquence que toutes ces lois-là qui avaient été mises en place, ces
règles-là qui avaient été mises en place pour éviter la maltraitance puis
assurer des bons soins, bien, aujourd'hui, là, ce n'est même pas en vigueur. Ça
a été suspendu parce qu'il manque de monde.
Donc, est-ce qu'il y a un risque, selon
vous, à ce qu'on établisse des ratios qui soient ensuite non respectés puis qu'on
retourne à la case départ parce qu'on manque de personnel?
Mme Montpetit : Bien, je pense
que ce n'est pas une raison pour ne pas les établir. Il faut établir des ratios
et il faut s'assurer qu'ils soient respectés. Après ça, c'est une mathématique.
Oui, il manque du personnel à l'heure actuelle, il manque du personnel qui est
malade, qui est absent, pour différentes raisons, à cause de la crise
sanitaire, mais...
Journaliste : Est-ce que vous
soupçonnez le gouvernement de ne pas vouloir mettre du tout de ratios pour
éviter d'avoir, si on veut, des barèmes à respecter puis des barèmes qu'on peut...
Mme Montpetit : Bien, je fais
le constat qui est le suivant : C'est qu'à l'heure actuelle ils ne le font
pas. Ils ne mettent pas de ratios en place, ils n'appellent pas un projet de
loi sur les ratios. Donc, clairement, il n'y a pas de volonté de mettre des
ratios en place. Je ne peux pas faire une autre lecture que celle-ci avec
toutes les conséquences que ça a.
En ce moment, il manque du personnel, il
manque près de 10 000 personnes. Les gens qui... les
10 000 personnes dont il est question, ce ne sont pas des gens qui
étaient absents avant la crise de la COVID-19. Ce sont des gens... Moi, j'y ai
été, vous l'avez mentionné, j'ai été dans un CHSLD pendant deux semaines, jour
après jour, je suis rentrée, et le personnel avec qui je travaillais, qui était
là la veille, il ne l'était plus le lendemain. Donc, les
10 000 personnes dont on parle, qui sont absentes, il y en a
là-dedans qui ont attrapé la COVID-19, sont revenues, reviendront au fur et à
mesure aussi. Donc, c'est du personnel qui est malade.
Il y a eu beaucoup de détresse aussi
psychologique. C'est extrêmement stressant, travailler dans ces conditions-là,
quand on sait qu'on peut s'infecter à tout moment. Il a manqué du matériel au
début de la crise. Ça, c'est absolument inacceptable. Les consignes sont venues
très tard aussi. Donc, c'est sûr que ça a engendré beaucoup, beaucoup, beaucoup
de stress aussi chez le personnel soignant. Moins il y a de monde, plus il y a
de stress aussi. Le fait que... moi, je suis arrivée à la semaine cinq, ça
faisait déjà cinq semaines que le personnel travaillait des 12 heures
par jour, des chiffres doubles. On leur disait : Vous n'aurez pas de
vacances, vous ne pouvez pas quitter, vous n'avez pas de jours fériés, vous
n'avez pas de contrôle, dans le fond, sur vos horaires. Ça a augmenté le
stress. Donc, «no wonder» qu'il y a des gens qui, malheureusement, au fur et à
mesure des jours, ont quitté le bateau, tout simplement...
M. Laforest (Alain) : Comment
vous le qualifiez, ce travail-là? Après avoir travaillé avec elles, là, ou avec
eux pendant deux semaines, comment vous le qualifiez, le travail de préposé
aux bénéficiaires, actuellement?
Mme Montpetit : C'est un travail
qui est, je vous dirais... un, c'est extrêmement difficile. C'est un travail
qui demande une grande abnégation de soi, qui est, à la fois un immense
privilège, mais qui a besoin d'être valorisé.
Moi, c'est ce que j'ai toujours dit, c'est
un travail qui... malheureusement, on trace souvent puis... on trace souvent le
portrait très sombre et très noir des CHSLD et ce qui fait porter un fardeau
très, très lourd aux employés puis aux préposés aux bénéficiaires qui
travaillent dans les CHSLD, mais ces gens, ces employés nettoient, lavent,
hydratent, font manger nos parents, font manger nos grands-parents, font manger
les gens... s'occupent des gens les plus vulnérables de la société. C'est un
travail extrêmement noble, qu'on devrait valoriser. Il y a des très beaux
reportages qui ont été faits pendant la crise, justement, et j'espère que ça
continuera pour... si on veut attirer des gens, encore faut-il mettre de
l'avant le côté très positif aussi du travail.
Moi, j'avais plusieurs CHSLD dans ma
circonscription qui étaient en zone rouge, et j'ai été interpelée de toutes
parts sur la situation à Montréal, et j'y ai référé beaucoup de gens pour aller
y travailler. C'est la raison pour laquelle, moi, j'y suis aussi allée, parce
que je voulais aussi montrer que ça se faisait, parce que l'inquiétude, elle
était tellement élevée que c'était impossible d'attirer des gens dans un tel
contexte. Et donc il faut avoir des messages aussi qui sont positifs par
rapport à ça.
C'est un travail qui est difficile, qui
est routinier. Ce n'est pas tout le monde qui peut faire ça, surtout sur une
carrière à long terme, mais je pense qu'il faut certainement quelqu'un qui aime
les personnes aînées, qui aime les personnes vulnérables, qui a une propension
à s'occuper des gens. C'est un travail qui est extrêmement merveilleux, mais il
faut le valoriser. Il faut bien le payer, mais il faut surtout s'assurer que
ces gens-là n'en viennent pas à de l'épuisement parce que c'est un métier qui
est difficile. Et, si on les met dans des conditions, justement, où les ratios
ne sont pas rencontrés, ce que ça fait, c'est que les gens finissent leur
journée en n'étant jamais satisfaits du travail qu'ils ont fait, parce qu'ils
ont été obligés de nourrir plusieurs personnes trop rapidement, et ça, c'est...
Moi, j'ai eu beaucoup d'échanges avec eux.
Quand tu as eu 15 minutes pour nourrir quelqu'un rapidement puis ça t'en
aurait pris 25 minutes ou 30 minutes, c'est sûr qu'un employé n'est
pas heureux de ça. Quand ça se fait une journée, c'est une chose; quand ça se
fait trois ans, c'en est une autre; quand ça se fait pendant
cinq ans, bien, c'est sûr qu'il y a un effritement, même, de l'estime
personnelle qui s'installe, et il faut s'assurer, si on veut une bonne
rétention de personnel, s'assurer que ces gens-là soient bien au travail.
M. Bergeron (Patrice) : Si
vous permettez, Mme Montpetit, juste pour revenir sur le projet de loi
n° 44, là, vous dites, donc, le gouvernement a choisi d'appeler ce projet
de loi là, alors qu'on est dans une situation exceptionnellement courte, là, mais
vous dites, donc : Ce n'est pas opportun, ce n'est pas celui-là qu'on
aurait dû appeler. Celui-là aurait pu attendre. Ce n'est pas opportun.
Mme Montpetit : Bien, il n'a
pas, le ministre... Non, ce n'est pas opportun. Le ministre n'a pas fait la
démonstration, en déposant ce projet de loi, que ni le Conseil de gestion du
Fonds vert ni Transition énergétique Québec n'avaient pas joué le rôle qu'on
souhaitait, comme État, qu'ils jouent. Donc, déjà, il n'a pas fait cette
démonstration.
Et, en plus, il n'a pas fait la
démonstration qu'en les abolissant et en ramenant leurs tâches, si on veut,
leurs missions au sein du ministère de l'Environnement et au sein du ministère
des Ressources naturelles, il allait faire des gains supplémentaires. Donc,
c'est pour ça que ça a été qualifié par plusieurs chercheurs de faire le choix
de l'échec, parce qu'il revient à une situation qui était celle d'avant la
formation de ces deux institutions et qui avait été décriée par le Commissaire
au développement durable et par la Vérificatrice générale. Et c'est la raison
pour laquelle on avait mis ces deux institutions.
Donc, il n'a pas fait la démonstration
qu'il y avait une nécessité de les abolir. Il n'a pas fait la démonstration
qu'on allait faire des gains en les abolissant. Donc, aujourd'hui, bien, je
pense que le ministre de l'Environnement devrait s'activer à présenter un plan
de lutte aux changements climatiques. On attend toujours ce plan-là. On n'a pas
vu un début de mouture.
Je pense que, pour les deux prochaines
semaines, si j'avais un conseil à lui donner sur les énergies qu'il a à
consacrer, je lui dirais qu'il aille travailler à son plan d'économie durable,
qu'il aille travailler à la relance, parce que la relance économique du Québec,
le ministre de l'Environnement va devoir en faire partie. Je sais qu'encore
dernièrement il ne faisait pas partie du comité, ce qui est quand même curieux,
parce que, si on veut redéfinir notre économie différemment, qu'on veut y
mettre une touche environnementale, s'ils ont l'ambition de faire ça, bien,
encore faut-il que le ministre de l'Environnement y participe. Et c'est à ça
qu'il devrait s'occuper à l'heure actuelle.
M. Bergeron (Patrice) : Par
contre, il y a eu beaucoup d'articles qui ont montré les problèmes de gestion
de conflits à l'intérieur de la gestion de Transition énergétique, Fonds vert,
des fois des mauvaises dépenses aussi. Donc, on aurait pu régler ces
problèmes-là, mais sans aller vers ce projet de loi là?
Mme Montpetit : Bien, ce à
quoi vous faites référence, c'est à des enjeux qu'il y a eu avant la mise en
place du Conseil de gestion du Fonds vert. Donc le Conseil de gestion du Fonds
vert, l'essence de son existence, c'est justement de venir s'assurer que les
dépenses qui sont faites sont vraiment dans des projets qui servent directement
à la lutte aux changements climatiques. Le ministre n'a jamais... vous vous
rappelez, Mme Chagnon, la P.D.G. qui est venue lancer un grand cri du
coeur dans les consultations, qui dit qu'elle n'a jamais été rencontrée par le ministre
de l'Environnement, qu'il n'y a jamais eu de discussions pour voir comment, justement,
il pouvait y avoir une collaboration un petit peu plus efficace entre le ministère
de l'Environnement et le conseil de gestion. Elle n'a jamais été consultée non
plus sur l'abolition. Même chose pour la table des parties prenantes de
Transition énergétique, elle n'a pas été consultée.
Donc, si vous me posez question :
Est-ce que c'est opportun?, moi, je pense qu'en pleine crise sanitaire, à
l'heure actuelle, on devrait être en train d'étudier et de mobiliser les gens
sur le projet de loi de mon collègue André Fortin et sur le projet de loi
sur les ratios. Et, pour ce qui est de l'environnement, les énergies devraient
être mises sur un projet de relance, relance économique, relance
environnementale, s'assurer de mettre une voie rapide, par exemple, pour tout
ce qui est projet vert. On l'avait déjà proposé l'année dernière, donc
s'assurer que tout ce qui est projet vert qui va venir vraiment aider la
relance économique soit... il y en a des solutions, là, il y en a plein. Il
faut juste les mettre en place et, à l'heure actuelle, aller travailler sur ce
projet de loi.
Comme je vous dis, je ne veux pas prêter
des intentions au gouvernement, mais je ne peux que faire la lecture qui est la
suivante, c'est qu'il y a une volonté de mettre les mains dans le plat à bonbons,
d'aller chercher le 1,8 milliard pour pouvoir l'utiliser comme il le
souhaite et en faire un fonds discrétionnaire, ce qui n'est absolument pas souhaitable
dans un contexte où la lutte aux changements climatiques doit être leur
priorité.
Une voix
: Merci.
Mme Montpetit : Ça me
fait plaisir.
(Fin à 9 h 41)