(Neuf heures une minute)
M. Barrette : Alors, merci,
effectivement, d'être là, parce qu'on est un peu tôt, mais, que voulez-vous,
les consultations commencent tôt ce matin. Alors, quelque moment pour faire le
point sur la journée d'hier.
Alors, hier, ça a été une journée qui a
été très intéressante pour nous pour une raison fondamentale, tous les groupes,
presque sans exception, sont venus nous dire qu'ils pouvaient atteindre les
objectifs souhaités par le gouvernement, à savoir augmenter l'activité
économique du Québec, sans la loi n° 61. C'est quand même extraordinaire.
Tous les groupes nous ont dit qu'on pouvait faire ce que 61 visait sans avoir
le projet de loi n° 61. Première chose.
Deuxième chose, les doléances exprimées
par tous les acteurs, qu'ils soient du côté de l'entrepreneuriat, du côté des
syndicats ou du côté du Conseil du patronat, bien, elles sont à l'effet,
essentiellement, que : Voici, il y a tel, tel, tel problème. Je prends les...
tous les entrepreneurs sont venus nous dire que leur problème principal,
c'était une question d'assurance d'avoir des paiements en temps requis. On n'a
pas besoin de la loi n° 61 pour ça, il y a un décret de 2018 qui pourrait
en devenir une loi qui ferait le travail.
Du côté des villes et des entrepreneurs,
ils sont tous venus nous dire… nous parler des tracasseries de l'environnement.
Ils n'ont pas contesté la validité de la portée de la loi québécoise sur
l'environnement, ils ont critiqué avec force l'application de ces règles-là.
Quand on écoute les villes et l'entrepreneuriat, ce n'est pas compliqué, ils
décrivent un État dysfonctionnel. Si l'État est dysfonctionnel, est-ce que
c'est à cause des règles ou c'est parce que les règles sont mal appliquées?
Tous les exemples qui ont été donnés sont des exemples de dysfonction de
l'application. Alors, quand on souhaite avoir un allègement et que l'allègement
passe par un meilleur fonctionnement, ça ne permet pas d'aucune matière
d'attaquer le fondement de la loi.
Alors, ce que la CAQ propose,
essentiellement, c'est d'alléger les procédures, alléger la démarche
environnementale, par exemple, pour la rendre plus courte. La rendre plus
courte, dans la plupart des cas, va la rendre moins efficace. Alors, il y a une
différence entre critiquer l'application et vouloir avoir des lois qui vont
changer l'application de la loi et même la loi elle-même.
Alors, ça, ils sont tous venus dire ça. Les
syndicats sont venus nous dire : Regardez, on peut aller plus vite,
planifiez mieux, annoncez-les, vos projets, lancez-les, vos projets, lancez-les
dans le bon calendrier de façon à ce qu'on puisse utiliser l'année de
calendrier de façon plus efficace. De l'autre côté, les entrepreneurs nous
disent : On a des problèmes de liquidités parce que, contrairement aux
autres provinces, on n'a pas au Québec une loi qui fait en sorte que les
payeurs, incluant le gouvernement, paient dans les délais requis. Alors, ça, c'est
un autre exemple qu'on n'a pas besoin de la loi n° 61
pour appliquer quelque chose qu'on peut déjà appliquer. Il y a déjà un décret
depuis 2018.
Alors, quand on demande, par exemple, à
l'Association des constructeurs de routes : Oui, mais vous nous parlez
liquidités, vous ne nous parlez pas de la loi n° 61
comme telle; en quoi la loi n° 61 va-t-elle changer
les choses? Bien, écoutez, nous, là, on pense que c'est une bonne chose puis on
aimerait que ça soit permanent. Oui, mais qu'est-ce qu'il y a dans la loi n° 61, là, exactement, qui vient régler vos problèmes de
liquidités, de calendrier, et ainsi de suite? Bien, on n'a pas de réponse.
Puis là, je ne prends pas juste
l'association des constructeurs routiers, là. Tous les groupes sont venus nous
dire la même chose. Les syndicats viennent nous parler de la problématique de la
sécurité au travail. Bien oui, mais c'est parce que ça se règle rapidement. Si
ça ne s'est pas réglé, ce n'est pas parce qu'on a besoin de changer une loi, c'est
parce qu'on n'a pas appliqué la chose.
Alors, aujourd'hui, là, après une journée
de consultations, on est obligés de constater que les améliorations à apporter
au milieu économique qui est celui de la construction, bien, elles sont d'ordre
fonctionnel, au gouvernement, et non sur le fond. Et pour régler ça on n'a pas
besoin de 61, à moins que le gouvernement souhaite absolument se servir de 61
pour se donner un paquet de pouvoirs non nécessaires, comme tout le monde le
soupçonne.
Je termine en disant qu'on a quand même eu
un petit moment intéressant, hier, quand M. Dubé a quand même admis que ce
n'est pas vraiment un plan de relance économique, mais bien un projet
d'infrastructures. Parce qu'on a beaucoup, beaucoup abordé ça, la relance
économique, là, et ça, ça a été vraiment bien démontré par la Fédération canadienne
de l'entreprise indépendante, c'est de l'aide directe aux entreprises, celles
qui vont mourir, là, ou qu'on voudrait qu'elles survivent. C'est ça, un plan de
relance économique. Ça, ce n'est pas ça. C'est un projet d'infrastructures,
point à la ligne, qui n'est qu'un prétexte pour changer un paquet de lois et se
donner des pouvoirs qu'on considère, nous, excessifs.
M. Lavallée (Hugo) : Et, à
partir du moment où vous faites ce constat-là, qu'est-ce que vous suggérez? Qu'on
retire carrément le projet de loi? Si, dans le fond, on n'en a pas besoin, on
peut s'en passer.
M. Barrette : Vous avez tout à
fait raison. Alors, je ne demande pas que le projet de loi soit retiré, mais,
s'il y a une chose qui est certaine, si le projet de loi est pour servir à
quelque chose, il devra être amendé. Alors, je l'ai dit hier, nous, on aura des
propositions à faire, claires, précises et on les fera. Mais il est clair pour
nous, à la suite de la journée d'hier, que les pouvoirs, qui sont très vastes,
inédits, extraordinaires, qui sont proposés par le projet de loi n° 61,
ils ne sont pas nécessaires.
M. Laforest (Alain) : C'est
un projet qui ne sert à rien, là?
M. Barrette : Bien, c'est un
projet qui a un agenda qui n'est pas nécessairement avoué. Alors, on sait que
le gouvernement du Québec… François Legault lui-même est un homme de
déréglementation. C'est un homme qui veut un État qui soit plus entre les mains
du pouvoir sans qu'il y ait vraiment de contre-pouvoir. Moi, c'est ce que je
vis comme parlementaire, quand on parle de réforme parlementaire, c'est ce que
je vois. Et, dans cette loi-là, je vois une opportunité pour le gouvernement
d'enlever un paquet de garde-fous. Et là je pense que la finalité, elle est là,
sous le prétexte, hein, très alléchant de lancer des projets.
M. Laforest (Alain) : Alors,
vous l'accusez de vouloir limiter les pouvoirs des oppositions?
M. Barrette : Je ne l'accuse
pas, je constate que le projet de loi vient limiter le pouvoir des oppositions.
M. Gagnon (Marc-André) :
…ministère de la Santé, il n'y a pas des projets sur lesquels vous allez
travailler et pour lesquels un projet de loi comme ça aurait pu vous être
utile?
M. Barrette : Moi, les projets
de loi… je m'excuse, les projets sur lesquels j'ai travaillé ont… Ah! bien là,
vous me posez une question, ma réponse va être un peu longue, là, suivez-moi,
elle ne sera pas trop longue.
Je disais aux gens : Le Plan
québécois des infrastructures, là, c'est une structure, c'est une règle qui
nous permet d'être transparents pour les projets, mais c'est d'abord et avant
tout, dans le fonctionnement de l'État, un outil qui gère le rythme de
décaissement. Vous voulez faire avancer un projet? Annoncez-le et dites qu'il
est financé. Fin de la discussion.
Regardez les projets que j'ai annoncés,
là, dès que je l'ai annoncé, et je m'en suis fait une fierté, à chaque annonce
que j'ai faite, j'ai dit : Les projets que je vous annonce, ils vont aller
de l'avant selon la séquence qui est prévue à la loi. Et c'est ce qui est
arrivé, dans tous les projets que j'ai annoncés, et ils sont tous allés vite.
Le PQI gère le rythme de décaissement. Vous voulez augmenter l'activité
économique du Québec par des projets de construction? Annoncez-les, mettez sur
la table le montant d'argent autorisé au Trésor, et ils vont tous aller vite,
par définition. Il n'y a rien d'autre qui va les ralentir, sauf, et ça, je
concède ça au milieu de la construction, la dysfonction des évaluations
environnementales.
Pas besoin d'une loi pour régler les
dysfonctions. Le premier remède pour corriger le problème de la dysfonction gouvernementale,
il est le même que la Vérificatrice générale nomme pour le MTQ : embaucher
des ressources pour qu'ils soient fonctionnels. Ça se résume à ça. Alors, pour
répondre à votre question, je m'excuse de la longueur de la réponse, mais c'est
ça, la réalité.
M. Gagnon (Marc-André) : Mais
je repose ma question : Donc, il n'y a pas eu des projets, là, quand vous
étiez ministre de la Santé, où vous auriez aimé ça aller plus vite? Ça a bien
été...
M. Barrette : Écoutez, il n'y
a pas un ministre qui n'a pas hâte d'aller vite. Mais est-ce que ce qui est
prévu dans nos lois, un coup que les projets sont lancés, est-ce que ça va... est-ce
que ça peut aller vite dans la structure actuelle des choses? La réponse, c'est
oui, je l'ai fait. Je l'ai fait. Je l'ai fait. Et moi, je ne me suis jamais
plaint de la vitesse parce qu'un coup que j'avais l'autorisation budgétaire je
m'assurais, évidemment, que ça avance. Puis, ce n'était pas dur, hein, parce
que les gens que ça concernait voulaient, eux autres aussi, que ça l'avance. Et
ça a avancé. Alors moi, bien, je suis content que vous me posiez la question,
je peux vous parler par expérience.
Alors, le premier moyen de ralentir les
projets, c'est le PQI parce que le PQI dépend du budget. Si, dans une année x,
vous n'avez pas l'argent, O.K., il est inscrit sur un PQI, mais sur une période
de 10 ans... Bien, vous remarquerez que, dans le PQI, il y a bien des
projets qui sont dans la dernière année, là. Alors, je vous le dis, là, je vous
confirme par l'expérience et les faits : Vous voulez lancer la
construction? Mesdames et messieurs, pour les 202 projets, voici le budget :
Go! Ça va aller vite.
Hier, il y a des gens qui ont dit ça. Les
gens qui construisent, là, un des premiers groupes qui est venu, là,
l'Association des constructeurs, de mémoire, ont dit : Écoutez, là,
construire une route, là, dites-le nous, là, plan, devis, appel d'offres, là,
on ne va pas inventer des nouvelles... peut-être des nouvelles routes, oui,
mais pas des façons de construire. Alors, ils disent eux-mêmes, les syndicats
nous disent : Vous voulez aller vite?, faites vos annonces à telle période
de l'année, plutôt que de les faire n'importe quand comme vous le faites actuellement.
Tout le monde est venu nous dire :
Regardez, en termes de rapidité, vous êtes dysfonctionnels, vous n'avez pas besoin
d'une loi, agissez d'une façon conséquente. Et pour ce qui est de
l'environnement, bien, embauchez du monde, puis ça va aller plus vite, hein? Ou
bien donc : S'il y a des gens qui font mal leur travail, remplacez-les.
Les appels d'offres, et ainsi de suite, la même chose. Alors, le projet de loi,
là, il ne va pas s'adresser à ça d'aucune manière. Ils peuvent le faire sans projet
de loi.
Je reviens encore sur les paiements. Franchement,
les paiements, il y a un décret; qu'ils en fassent une loi puis qu'ils mettent
des dents à leur loi, tout simplement.
Le Modérateur
: On va y
aller en anglais parce que M. Barrette doit quitter...
Mme Crête (Mylène) :
À la lumière de ce que vous avez entendu, quels changements vous apparaissent
incontournables?
M. Barrette : Pardon?
Mme Crête (Mylène) :
À la lumière de ce que vous avez entendu hier, quels changements vous
apparaissent incontournables?
M. Barrette : Écoutez, les
changements, on va les… les propositions, on va les faire. Aujourd'hui, je vais
aller bientôt en commission parlementaire, il est clair que la démonstration
hier a été faite. Tout ce que les gens demandent n'a pas besoin de passer par
le projet de loi n° 61.
Le Modérateur
: En
anglais, s'il vous plaît...
M. Lavallée (Hugo) : Est-ce
que c'est une maladresse politique ou c'est une tentative d'instrumentalisation
de la crise?
M. Barrette : Bien, écoutez, c'est
votre mot, je le trouve très bon. Il y a une instrumentalisation de la crise
pour faire en sorte qu'actuellement on enlève un paquet de règles pour que ça
soit plus confortable pour l'État et que l'État puisse faire ce qu'il veut,
tout en soustrayant tout ça à l'examen des parlementaires. Une seule question
parce qu'il faut vraiment que j'aille entendre l'autre groupe, qui est très
important pour moi.
Mme Senay (Cathy) : Yes. Well, it's going to be a huge day, maybe like a turnaround day
because you have many groups that will probably criticize way more the Bill 61.
Bill 61, citizens have to understand that it's a bulldozer bill?
M. Barrette : Totally. Totally. And it's a pretext to do a number of things that
are unnecessary to have as a bill. You don't need this bill to do what is
needed to be done. Therefore, there is something else that they want to be done,
and we will address that in the next few days.
Mme Senay (Cathy) : But, like, the wake-up call that you're giving today, you cannot do
anything to… you cannot do block this bill, Mr. Barrette. What are the
consequences, if Bill 61 becomes law, with the dispositions that they have?
M. Barrette : My role today, and I will end on this, if you don't mind, my role
today is to make sure that the population is aware of what's happening today in
this process. And, up to now, this bill, everybody who has been heard in those
hearings have said : We don't need Bill 61 to go forward. Period.
Merci. Je suis désolé, là, je vais aller à
la commission parce qu'elle… Le premier groupe, vous savez c'est qui.
Le Modérateur
: Merci.
(Fin à 9 h 14)