(Neuf heures une minute)
Mme Rizqy : Bonjour. Alors, ma
collègue Marie-Claude Nichols et moi, aujourd'hui, 12 août, en plein été,
on se présente pour une commission où est-ce que nous, on aurait souhaité une
commission beaucoup plus large qui comprend un dossier tout aussi urgent, sinon
plus, le dossier de la reconnaissance faciale.
On sait que, présentement, la Sûreté du
Québec est allée en appel d'offres, alors qu'ailleurs dans le monde, que ça
soit en France ou aux États-Unis, il y a vraiment un moratoire, car, on le
sait, ces logiciels ont des défaillances, notamment pour les personnes de
couleur. Et nous avons demandé à plusieurs reprises à Simon Jolin-Barrette, qui
est maintenant ministre de la Justice, de faire un moratoire et de convoquer
une commission. Il a souhaité à la place avoir une commission très, très
restreinte sur la COVID-19, qui porte sur le traçage.
Le traçage doit répondre à une
problématique, et moi, aujourd'hui, je me pose la problématique suivante :
Comment se fait-il qu'un des principaux intéressés, Shopify, est le grand
absent? Est-ce qu'on aurait toléré qu'Uber ne se pointe pas en commission sur
l'industrie du taxi? Il me semble que Shopify, aujourd'hui, aurait dû tout
faire pour être présent, et c'est un grand absent. Et j'espère que par la
suite, si jamais le gouvernement désire d'aller plus loin dans une application
de traçage, par conséquent, Shopify ne pourrait pas soumissionner. C'est un
manque de respect pour l'ensemble des Québécois qu'aujourd'hui une application
qui est utilisée et que les gouvernements fédéraux enjoignent la population à
utiliser... alors que Shopify ne vient pas répondre à nos questions.
Nous avons une série de questions que nous
allons donner à la commission pour qu'elles soient transmises directement à
Shopify. Nous voulons savoir depuis quand qu'ils sont capables de tracer les
gens, depuis quand qu'ils sont capables aussi de vraiment s'assurer qu'il n'y
ait pas de croisement de données. Et ça, pour nous, c'est vraiment des
questions très, très importantes.
Et il y a une affirmation qui circule et qui
est très claire maintenant, de la part du mémoire de la Commission des droits
de la personne et des droits de la jeunesse, lorsqu'il est indiqué que c'est
impossible d'identifier des personnes. Dans le mémoire, c'est indiqué que c'est
une affirmation qui est non factuelle. Donc, il est possible d'identifier des
gens.
Alors, je ne sais pas si ma collègue
voudrait compléter sur... Alors, je pense qu'on peut prendre aussi quelques
questions s'il y en a.
Mme Prince (Véronique) :
Bonjour. Véronique Prince, Radio-Canada. Qu'est-ce que vous pensez,
concrètement, d'une application comme Alerte COVID, où les gens,
volontairement, enregistrent le fait qu'ils ont été testés positifs? Pour que
ça fonctionne, il faut qu'il y ait énormément de gens qui participent, là, mais
est-ce que c'est quand même quelque chose qui peut être acceptable au niveau
éthique?
Mme Rizqy : Bien, la première
des questions qu'on doit se répondre, là, d'un point de vue juridique,
lorsqu'il y a une atteinte... une possible atteinte aux droits de la personne,
notamment au droit à la vie privée, c'est quoi, la problématique qu'on veut
répondre? En quoi le traçage de personnes aurait fait en sorte que nos CHSLD ne
seraient pas transformés en mouroirs? En quoi l'application de traçage aurait
fait en sorte qu'on aurait eu plus de masques lorsque c'était le temps? En quoi
qu'on aurait fermé plus rapidement l'aéroport de Montréal?
En fait, là, le gros problème de la
gestion de la pandémie, c'est au niveau, oui, de la planification en amont. On
doit apprendre de qu'est-ce qui est arrivé. Mais l'application de traçage ne
répondra pas au vrai problème. Les bras qu'on a manqué, là, dans nos CHSLD,
bien, c'est l'armée qui est venue répondre à ça, ce n'est pas l'application de
traçage. Et au contraire, selon les différents rapports qui sont présentement
déposés, ces applications pourraient faire en sorte qu'il y a un faux sentiment
de sécurité.
Et d'autre part, ces applications... je
vous donne un exemple très concret. Si, vous et moi, on est ici, mais que moi,
je suis dans la pièce juste à côté, on pourrait me notifier, mais on n'a jamais
été en contact parce qu'il y a un mur qui nous sépare. Et ça pourrait faire en
sorte que plusieurs personnes pourraient être contactées, puis iraient faire le
test, et pourraient créer, en fait... faire en sorte d'accentuer le nombre des
personnes qui voudraient être testées, alors que la personne qui est dans
l'autre pièce à côté n'a pas besoin d'être testée.
Alors, ça, c'est vraiment des affaires que...
L'application ne répond pas à un vrai problème urgent. Le vrai problème, on le
sait, c'était qu'on a vraiment manqué de personnel et on n'a pas été capables
de dire de façon rapide qu'une personne qui travaille dans un CHSLD, une zone
chaude, ne doit pas être transférée dans une zone froide. Et ça, ça a pris des
mois avant de changer cette situation-là.
Mme Prince (Véronique) : Mais,
dans la perspective où le gouvernement essaie de convaincre les gens, de
pousser les gens à aller se faire tester puis let's go, allez-y, est-ce que ça
ne peut pas être un outil de plus? Je comprends que ça ne changera pas ce qui
s'est passé dans les CHSLD, et tout ça, là, mais est-ce que vous ne le voyez
pas comme un outil supplémentaire, de dire : Ah! bien, peut-être que je
devrais aller me faire tester, je n'y avais pas pensé que...
Mme Rizqy : Si on reprend la
trame factuelle qui existe, là, ça nous a pris des jours avant de fermer
l'aéroport. Ça nous a pris des jours avant de fermer le chemin Roxham. Ça nous
a pris des jours à vraiment avoir des masques puis dire aux employés :
Non, les masques ne seront pas sous verrou. C'est ça qui est arrivé. Ça nous a
pris plus que 10 jours, lorsque le Parti libéral du Québec a demandé
l'envoi de l'armée, pour que finalement la demande parte de Québec puis se
rende à Ottawa pour avoir enfin des bras pour venir aider nos aînés. C'est ça
qui est arrivé au Québec. Et, lorsqu'on aura une enquête publique indépendante,
là, on pourra tirer des conclusions.
Mais, avant de donner de l'argent aux
GAFAM... Parce qu'en ce moment, c'est Google puis Apple, notamment, qui
frappent aux portes des gouvernements pour dire : Mettez de l'argent
là-dedans. Donc, au fond, ils nous demandent de payer pour cette nouvelle
technologie. Qu'ils commencent à payer leurs impôts eux autres aussi. Ça ferait
peut-être du bien, puis on aurait peut-être plus d'argent pour mettre dans nos
ressources humaines, notamment dans les CHSLD.
Mme Crête
(Mylène) : Qu'est-ce que vous pensez de l'expérience au fédéral
jusqu'à maintenant? Il y a plusieurs provinces qui se disent encore :
Bien, on va attendre avant de décider si on veut que nos citoyens
participent...
Mme Rizqy : Sage décision
des autres provinces d'attendre. Lorsqu'on regarde ailleurs dans le monde, il y
a déjà des exemples. On peut voir que, par exemple, Singapour, même si plus de
80 % de la population l'a utilisée, ça n'a pas été un franc succès. Ils
ont dû aller plus loin en termes de violation de la vie privée, ils ont dû
aller vers la géolocalisation avec le GPS et même encore plus loin, et c'était
rendu qu'il y avait... pas des bracelets mais pratiquement un bracelet sur les
gens à Singapour. Ils sont allés vraiment plus loin, alors que plus de
80 % avaient d'abord téléchargé l'application que nous, on appelle, dans
le jargon, l'application soft, c'est-à-dire Bluetooth, qui est moins invasive,
somme toute, par rapport à la géolocalisation avec le GPS.
Mme Crête
(Mylène) : C'est une porte ouverte à des dérives?
Mme Rizqy : Oui. Puis le
mémoire... parce qu'on en a eu quelques-uns qui ont été déposés. La Commission
des droits de la personne et des droits de la jeunesse émet beaucoup, beaucoup
de zones grises que nous, on doit poser comme questions. Mais celui de la ligue
des droits de la personne est excessivement court, concis et précis en matière
de violation des droits de la vie privée. Et il est très clair que ce n'est pas
du tout le remède pour venir aujourd'hui dire que la prochaine vague, on va
être prêts. Ce n'est pas ça qui va faire en sorte qu'au Québec on va avoir une
autonomie sanitaire. Ce n'est pas ça qui va faire en sorte qu'on va avoir plus
de gens dans nos CHSLD et que notre anticipation va être accentuée. Alors,
c'est vraiment des décisions humaines qu'aujourd'hui on doit questionner et
c'est ça qui devrait être fait dans une enquête publique indépendante.
M. Bossé (Olivier) :
Mme Rizqy, si je comprends bien, vous ne la téléchargerez pas, vous, là,
sur votre téléphone?
Mme Rizqy : Vous parlez à
une femme qui n'a jamais téléchargé Waze, là. Ça vous donne une idée. Alors,
non, je ne la téléchargerai pas, l'application. Je suis plus d'une approche
qu'aujourd'hui au XXIe siècle, la donnée, c'est de l'or, c'est du pétrole,
là. Et je suis très consciente que les GAFAM courent après ces données parce
qu'ils font du croisement de données, c'est bien connu, ils veulent identifier
nos comportements, ils veulent savoir qu'est-ce qu'on aime acheter. Et, quand qu'on
ne sait pas ce qu'on aime acheter, ils vont nous dire ce qu'on a envie
d'acheter. Alors, non. Dès que je vois Google puis Apple, savez-vous quoi, j'ai
déjà un petit drapeau rouge.
M. Lachance (Nicolas) :
Est-ce que le Parti libéral... analyser le code source...
Mme Rizqy : Vous parlez
du code source? Vous parlez à une personne qui n'est pas ingénieure en
informatique. Par contre, j'ai communiqué avec Steve Waterhouse, qui m'a donné beaucoup
plus de lignes directrices. J'ai aussi demandé qu'il soit présent, et il sera
présent vendredi où est-ce qu'on pourra poser davantage de questions.
Et vous posez la question en parlant du
code source. Je suis, je crois, quand même une citoyenne moyenne, là, avec une
forme de scolarité. Si moi-même, je ne comprends pas le code source, à quoi ça
me sert que vous me dites que j'ai accès à un code source si je ne sais même
pas comment ça peut m'aider?
M. Lachance (Nicolas) : Non,
mais la question, c'est : Est-ce que chez vous il y a des gens qui... au Parti
libéral?
Mme Rizqy : Qui ont analysé?
M. Lachance (Nicolas) : Et
c'est pour ça que vouliez voir...
Mme Rizqy : Là, j'ai de la
misère à entendre à cause du masque, et ce n'est pas de votre faute à vous.
M. Lachance (Nicolas) :
Est-ce que chez vous il y a quelqu'un, au Parti libéral, par exemple, qui est
capable de l'analyser ou c'est pour ça que vous vouliez que des représentants
d'entreprise qui présentent...
Mme Rizqy : C'est pour ça que
j'ai voulu avoir non seulement des gens de l'entreprise qui soient présents,
qui nous expliquent comment eux sont capables de faire ce que nous, on appelle
une muraille de Chine, c'est-à-dire vraiment séparer le côté commercial versus
le côté qu'on pourrait appeler à but non lucratif, qu'ils veulent développer,
une technologie pour le bien de la population, pour le bien commun. Et on
voulait avoir ces informations non seulement de Shopify, mais aussi de d'autres
experts en informatique.
Le Modérateur
: Est-ce
qu'il y a d'autres questions en français ou on passe en anglais?
Mme Fletcher
(Raquel) : Can you summarize your main point,
just speaking in English for us, concerning the commission this morning?
Mme Rizqy : I'm going to try to make it short and sweet.
Mme Fletcher (Raquel) : Yes.
Mme Rizqy : So, today, August 12th, we're in the middle of summer and we're
having a public consultation about something very important. But we ask Simon
Jolin-Barrette, the Justice Minister, to make sure that we can also address another
issue that is very important, facial recognition. And multiple times, we asked
him if we can have a larger debate on this, and he shut the door and he
said : No, it will be a very specific commission only regarding the
tracking of COVID-19. So, this is a disappointment for us, the Québec Liberal
Party.
And also, today, we're
starting the consultation, but someone is missing, Shopify, who is one of the
key actors of developing the new application. And it's like having Uber not
showing up at the taxi industry consultation. It doesn't make any sense. And
this is why today we're going to send a letter from the National Assembly to Shopify, because we do
have some questions, especially regarding how they are going to manage the
separation of the data. Because we all know that, the 21st century, data is a
major issue. The Big Tech wants all of our data, and we want to know how they
are going to manage to separate the commercial branch of Shopify and the other
branch that is developing COVID 19 application.
Mme Senay
(Cathy) : But, COVID Alert, the federal
application, is already available for free for citizens to download since the
end of July. So, the train has left the station. So, what is your position on
this? I guess you read about COVID Alert. You know that they are not taking
your name, your address, your location, they don't take any personal
information. So the second wave is coming, winter is coming, why don't you
think this tool should not apply in Québec?
Mme Rizqy : What I am saying... But, first and foremost, when they say they are
not taking any personal information, according to the report that we read, the
one from the Commission des droits de la personne et
des droits de la jeunesse, it said: It's not likely they won't be able to
identify. But yes, it is possible to identify you. So this is not, like, a true
statement when they said: It is not possible at all. It is possible. So, this
is one thing.
Second of all, what
lesson that we have learned from the past, from the COVID-19, the way they
managed the crisis? How the tracking of the people will make sure that we are
going to have enough masks, that we going to have enough people inside of the
seniors' facilities? This is the big question. And the tracking will not help
us. This is not the reason we were not able to shut down the airport quickly,
this is not the reason we were not able to call the military to come and help
us, this is not the reason we are going to be able to face the second wave.
And also, it can actually
give us a false feeling of safety, according to many reports. Because, for
instance, if you and me, we are in the same building, but not in the same room,
you are going to receive an alert, so many people will receive the alert, and
we know that we don't have, like... Now, today, yes, we are able to test a lot
of people, like, about 16,000 people a day. But sometimes it takes two, three
or four days to get the results. So this is a tool, yes, but we still have some
questions about privacy and we hope that we are going to have answers today.
Mme Senay
(Cathy) : OK. But, if you are notified that,
in the last 14 days, a person who tested positive was nearby you, don't you
want to know?
Mme Rizqy :
But they already do it, right? If, for instance, I am tested positive, someone
from the Public Health will call me and say: Marwah, can you tell me, the last
days, where were you? Well, I went to that place and I spoke with this person.
If you go right now online, there is the very specific path. You have to put
all the informations of the people that you have been in contact for the last
days. This is what they do.
And remember, Mr.
Trudeau, the Premier of Canada, said: It has to be volunteer. In one of the
reports, it says: If it's going to be volunteer, you have to make sure that the
second... there is an option. So today, the question is: What is our options,
here, in Québec? And the option that we have right now, is to have more people
working the same way that we've been doing it. It means that we have the people
calling you, and you can also fill the survey online, saying: I've been to that
place on that day, I met that person, this is her phone number, you can reach her.
Mme Senay
(Cathy) : Can I hear you about the OFLQ, l'Office québécois de la langue française, the new study that
came out yesterday about the fact that English... municipalities, companies,
well, businesses in Montréal
will ask people for English knowledge, solid English knowledge? So, what do you
think about this?
Mme Rizqy : Well, I didn't have the occasion to read entirely the report, but,
of course, it's a concern that we have at the QuébecLiberal Party. We want to make sure that
people understand that language is the official… language everywhere, including
at the office. My colleague Hélène David, who's the spokesperson, will comment
on that issue specifically.
Mme Fletcher
(Raquel) : Also, can we hear you on the
back-to-school plan, the back-to-school plan that Mr. Roberge tabled two
days ago, I guess? There has been, since then, a lot of reactions, a lot of
concerns about the... I guess, the classroom bubbles in particular, that the
bubbles are… 25, 30 kids in the classroom. Can we just hear your reaction to
the reactions, I guess?
Mme Rizqy :
So, there was a lot of confusion because on Monday everyone understood that the
bubbles are out, masks are in, but we understood also that, if you are wearing
a mask, there is no more physical distancing between the kids. But, yesterday,
the Education department said no, and what they said, well, and I hope this is
the correct statement, they said: The kids inside of the same class, when they
wear a mask, there's no physical distancing. But, if you have a kid from
another class, even though they are both wearing a mask, if they're not in the
same group, they have to have a one-meter distance between them.
Mme Fletcher
(Raquel) : …acceptable to you?
Mme Rizqy :
It's not manageable. If you go to any high school, the teachers will be like
police officers all the time. So, they're going to say: OK, you're not in that
group, you're not in that class, make sure that you can keep the distance. And,
let's be honest here, a lot of our classes, a lot of our schools here, in
Québec, are already overcrowded, there's no way we can have one meter between
every kid. That means… it's like the distance of the Olympic Stadium if we want
to make one meter between every kid from a high school. They're, like, over
2,000 kids in some high schools.
Le Modérateur
:
Merci…
Des voix
:
…
Mme Rizqy :
Welcome back!
M. Authier (Philip)
:
Sorry, I'm late.
Mme Rizqy :
It's OK.
M. Authier (Philip)
:Have you expressed your
opinion on... Mr. Legault, yesterday, was talking
about an inquiry, an inquest into the situation in the CHSLDs, but he was vague
on when and how. What's your opinion? What needs to be done? Does it need to be
a full public investigation? What is your view?
Mme Rizqy :
He promised a public, independent investigation. That was his promise.
Yesterday, he said the word «possible». That's not the promise. A promise is
the public investigation from an independent committee. And this is what we're
all expecting now.
Le Modérateur
: Merci.
Mme Rizqy : Merci.
(Fin à 9 h 18)