(Treize heures trois minutes)
M. Ouellet : Bonjour, tout le
monde. Au tour de la formation du Parti québécois de donner son opinion et ses
avis suite à la fin des consultations orchestrées par le gouvernement pour
savoir si, oui ou non, on va aller de l'avant avec une application de traçage COVID-19,
là, par la notification de contacts.
D'entrée de jeu, je veux juste rappeler à la
population du Québec que le Parti québécois a adopté une position responsable
avant le début de sa consultation. Avant de condamner l'utilisation des
technologies de l'information, afin d'accentuer notre lutte contre la pandémie,
on s'est montrés ouverts. On voulait entendre les experts, on voulait entendre les
experts en droit, en cybersécurité, en science, en technologie, à l'accès à l'information
pour se faire une idée juste de la solution appropriée à prendre pour la lutte
devant la COVID-19.
Vous le savez, cette situation, elle est
exceptionnelle, elle est préoccupante et dans certains cas, même, elle est
tragique. Et la population s'attend à ce que ses élus s'élèvent en haut de la
partisanerie et travaillent ensemble pour le bien commun pour qu'on mette en
place les meilleures solutions pour faire face à cette crise sanitaire.
Nous comprenons aussi que le gouvernement
est à la recherche de toutes, toutes, toutes les solutions possibles qu'il peut
mettre de l'avant pour améliorer la lutte, mais surtout améliorer la protection
de sa population face à cette pandémie. L'utilisation d'une application de
traçage pouvait représenter un potentiel intéressant pour améliorer la gestion
du risque lors de la crise sanitaire. Mais, lors des consultations avec les
différents experts qu'on a rencontrés, les experts, comme je disais tout à
l'heure, de la science, du droit, de la technologie, de la cybersécurité et de
l'accès à l'information sont venus nous dire que, finalement, cette
application-là ne répondait pas aux exigences.
En somme, le Parti québécois pense
maintenant que l'application telle que présentée ne devrait pas être
recommandée à sa population pour le moment. C'est simple, l'efficacité
théorique de cette application de traçage pour lutter contre la COVID repose
sur le nombre d'utilisations par un grand nombre d'individus. Or, lorsqu'on
regarde les statistiques ailleurs, à l'étranger, on se rend bien compte que
ceux et celles qui l'ont mis de l'avant n'ont pas atteint le seuil de 60 %
à 70 %.
La technologie Bluetooth représente une
vulnérabilité très critique. On est venu nous dire en consultation que sa
fiabilité, elle était défaillante et qu'elle ne permettait pas d'identifier de
vrais contacts COVID-19. Ça, ça veut dire qu'avec cette technologie-là on
aurait pu générer de faux contacts. Donc, des gens auraient pu penser avoir
contracté la COVID-19, demander un rendez-vous, être testés et d'être obligés
de se mettre en quarantaine, alors que l'application avait tout faux. L'autre
chose aussi qui nous permet de ne pas la recommander, c'est que l'utilité de
cette application n'a pas été démontrée. Et, à part une étude qui a été faite,
du côté des États-Unis, on n'a pas d'identification claire que ça, mis de
l'avant, ça répond à des exigences mais ça répond surtout aux attentes.
D'autant plus que, si on va de l'avant
avec cette application, ça prend un téléphone d'une certaine génération, moins
de cinq ans, ça prend un certain type de téléphone. Et donc, même si, au
Québec, 77 % des gens possèdent un téléphone, ce n'est pas à ce chiffre-là
qu'on doit faire référence pour savoir combien de personnes détiennent un
téléphone avec cette technologie-là. Et d'autant plus qu'on laisse un grand pan
de la population qui n'a pas accès à cette technologie de côté.
Donc, pour nous, c'est prioritaire que, si
on est pour poser des gestes pour assurer une meilleure gestion de la crise
sanitaire, il faut que ça inclue toute la population, les plus vulnérables et
les moins nantis. Et présentement cette application-là n'atteint pas ces
objectifs.
On a appris aussi que le cadre juridique
actuel du gouvernement du Québec n'est pas suffisant pour protéger les données
mais aussi pour interdire à des employeurs ou à des compagnies de forcer le
téléchargement de cette application sur votre téléphone pour avoir accès à
votre travail ou avoir accès à votre commerce. Oui, le gouvernement a fait
référence au projet de loi n° 64, qui sera débattu cet automne, mais ce
qu'on a entendu en commission parlementaire, ce n'est pas suffisant. Il
faudrait adopter un décret, minimalement, pour encadrer cette partie-là
juridique. Et présentement on n'a pas d'indication claire que le gouvernement
veut aller dans ce sens-là.
Donc, ce que je suis en train de vous
dire, c'est : Quand qu'on fait la somme de tout ce qu'on a entendu, il y a
beaucoup plus d'inconvénients que de bénéfices. Et, si on veut que ça
fonctionne, tout ça se reporte sur la confiance des citoyens et des citoyennes
du Québec. Et présentement, parce que la technologie est vulnérable, parce
qu'elle n'est pas fiable, parce qu'elle ne couvre pas l'ensemble de la population,
parce que, malheureusement, le cadre juridique n'est pas suffisant pour
protéger nos données, nous, on pense qu'à cette étape-ci, telle qu'on la
connaît, cette application-là, il ne serait pas juste et acceptable d'aller de
l'avant.
Cependant, ce que le gouvernement devrait
faire, c'est mettre ses énergies, ses moyens et ses ressources à s'assurer
d'avoir le nombre de tests suffisant et d'être capable de les délivrer rapidement.
Ce que la population du Québec s'attend du gouvernement, présentement, c'est de
savoir si, oui ou non, lorsqu'ils ont la COVID, ils peuvent se faire tester,
un, rapidement et, deux, obtenir leur résultat rapidement. Et c'est à ce
moment-là qu'on va être capables de dire que le Québec aura tout fait pour
réaliser qu'il a été capable de vaincre cette crise sanitaire, parce qu'il aura
eu entre les mains tous les moyens nécessaires pour y faire face.
Et ces moyens-là, nous les avons connus
pendant la première vague. On peut et on doit se préparer pour cette deuxième
vague. Et la meilleure façon de sécuriser les Québécois, ce n'est pas, présentement,
avec ce genre d'application, mais c'est surtout de garantir l'accès à un test
rapide, mais surtout l'accès à des résultats. Merci.
Mme Lévesque (Fanny) :
M. Ouellet, vous avez dit à deux reprises que, dans les circonstances
actuelles, la proposition ou, bon, l'application telle que présentée, la
solution, ce n'est pas recommandable. Est-ce que vous êtes ouvert à certains
compromis? Est-ce qu'on pourrait, par exemple, présenter ou ajouter des cadenas
supplémentaires ou, pour vous, c'est vraiment fin de non-recevoir, ça ne sert à
rien une application comme ça au Québec?
M. Ouellet : Si le gouvernement
du Québec est capable de me démontrer par des tests et par des études que cette
technologie-là a un véritable impact, qu'elle ne... puis je suis conscient, là,
qu'on ne peut pas garantir à 100 % la sécurité, mais que toutes les
failles qui ont été dénotées par le passé sont corrigées, si le gouvernement du
Québec est capable de démontrer que, si on déploie cette technologie-là, elle
sera accessible à l'ensemble de sa population, peu importe son âge, peu importe
son revenu, oui, je serais intéressé à réétudier. Mais présentement, ce que le gouvernement
nous dit, c'est que le gouvernement fédéral a lancé cette application, on n'est
pas convaincus que c'est celle-là qu'on va prendre, ça pourrait être une autre,
on nous dit juste que ça serait probablement une technologie moins intrusive
que la géolocalisation.
Alors moi, ce que je dis au gouvernement :
Lorsque vous aurez fait votre choix du type de la technologie, reconvoquez la
commission, étudions la technologie en question que vous aurez choisie, mais
voici les critères pour avoir l'aval de notre formation politique, à savoir
qu'elle soit accessible, que les failles de sécurité soient fermées et surtout
que le cadre juridique soit adéquat.
Et ça, j'aimerais avoir ce débat-là avec
d'autres experts, parce qu'on a eu ce débat-là avec un état de fait qui était
un peu incomplet. Donc, par pleine bonne volonté, les experts nous ont parlé,
dans leur champ d'expertise, de ce qu'ils connaissaient et ont répondu à nos
questions. Mais, tant qu'on n'a pas la solution optimale choisie ou la solution
préconisée par le gouvernement, il est difficile pour nous de dire : C'est
la bonne chose à faire.
Donc, on dit au gouvernement :
Refaites vos devoirs, si vous voulez la présenter, mais présentement, votre
énergie n'est pas à essayer de convaincre la population du Québec que cette
application-là serait souhaitable et utile, mais c'est de convaincre la
population du Québec que toutes les ressources humaines et financières du
gouvernement seront disponibles et accessibles pour offrir des tests rapidement
et pour tout le monde.
Mme Crête (Mylène) :
Donc, quand vous avez dit d'entrée de jeu que l'application ne devrait pas être
recommandée, vous faisiez référence à l'application fédérale?
M. Ouellet : Oui, parce que
c'est elle qui… C'est un peu l'éléphant dans la pièce. On fait référence à son
existence, le gouvernement fait référence effectivement à sa technologie, mais
incessamment, il en existe d'autres ou le Québec pourrait peut-être en
développer d'autres.
Mais, cela étant dit, le gouvernement
parle de technologie Bluetooth. Or, les experts sont venus nous parler de sa
piètre fiabilité, que ce n'est pas un outil de mesure de distance, qu'elle peut
faire des erreurs, elle peut nous signaliser… nous signaler, pardon, un contact
que nous aurions eu avec quelqu'un peut-être porteur de la COVID, même si on
portait un masque ou même s'il y avait une cloison entre les deux personnes. Donc,
pour nous, c'est un sentiment de fausse sécurité.
Et il y a des experts qui sont venus nous
dire ce matin : Il faut faire attention, si on est pour dire à la population
que cette technologie-là, elle est nécessaire, et on va de l'avant, et qu'on
doit tirer la plug parce que, finalement, ça ne répond pas aux résultats, on
vient de créer une barrière à l'implantation d'une autre technologie qui, cette
fois-ci, serait peut-être plus sécure et plus nécessaire, mais, parce qu'on a
raté notre coup, les gens seront méfiants.
Et je veux le répéter, et c'est pour ça
que la population du Québec a réussi à aplanir la courbe, ils ont eu confiance
aux différentes mesures que la Santé publique leur ont demandé de respecter. Si
le Québec fait mieux qu'ailleurs, c'est parce les Québécois, Québécoises ont eu
confiance. Et c'est là la clé pour vaincre la pandémie. Il faut s'assurer que
les mesures soient appliquées, et pour avoir une adhésion, ça prend la
confiance.
Alors, comme l'application n'est pas
fiable, elle est vulnérable et le cadre juridique ne protège pas adéquatement,
pour nous, il y a un bris de confiance, et c'est là-dessus qu'on doit travailler.
Mme Crête (Mylène) :
M. Bengio disait : Il faut aussi tenir en ligne de compte le nombre
de vies que ça peut sauver, dans son témoignage.
M. Ouellet : On a posé la question
à des spécialistes, et malheureusement il n'y a pas d'étude complète qui est
capable de nous dire qu'on est capable de sauver des vies. Et je le disais
d'entrée de jeu, tout à l'heure, je comprends le gouvernement de regarder tout
ce qu'on peut faire pour sauver des vies. Mais, présentement, mettre ses
argents et son énergie à déployer cette technologie, ce n'est peut-être pas la
chose importante et primordiale à faire présentement, mais c'est de s'assurer
d'avoir des tests, s'assurer d'être bien approvisionné avec les écouvillons et
surtout être capable de tester le monde rapidement et d'avoir la réponse rapidement.
On le voit, avec ce qui se passe du côté de Québec avec le cas du côté de
Costco, tout le monde s'est garroché pour avoir des tests. Il faut être capable
de répondre rapidement, si dans certaines situations on a des éclosions, pour
s'assurer qu'elle n'est pas en train de se multiplier.
Mme Crête (Mylène) :
Vous parlez du délai pour les tests. Ça ressemble à quoi dans votre
circonscription?
M. Ouellet : J'ai eu du
48 heures, mais j'ai eu du quatre à cinq jours. Ça dépendait du moment
puis ça dépendait, effectivement, du lieu. Et vous avez raison de soulever le
point, ce n'est pas toutes les régions du Québec qui sont organisées. Moi, j'ai
des Premières Nations, j'ai deux nations autochtones... j'ai deux réserves
autochtones, pardon, la nation d'Essipit et de Pessamit, et j'ai des
territoires qui sont un peu plus isolés. Donc, pour eux, c'est avoir accès aux
tests et avoir accès à la rapidité du test. Donc, dans certains cas, il n'y a
pas accès à Internet ou, du moins, l'accès est un petit peu particulier.
Et, au final, les gens n'ont pas confiance
en la technologie, ils ont confiance en des humains, et c'est ça qu'on doit
leur donner, notamment parce que ces populations-là sont plus vulnérables. Et
ce n'est pas pour rien que ma région a été aussi fermée le plus longtemps
possible, la Côte-Nord a été une des dernières à s'ouvrir au reste du Québec,
c'est parce qu'on avait une prédisposition. Donc, quand je parle aux gens chez
nous, ce qu'ils veulent savoir : Est-ce que j'aurai accès à des tests?, est-ce
que j'aurai les réponses rapidement? Mais on ne me parle pas beaucoup de
l'application comme étant un outil supplémentaire pour vaincre cette pandémie.
Le Modérateur
: ...
Mme Fletcher
(Raquel) : At the beginning of the week, you
were very enthusiastic about a future contact tracing app and now you changed
your mind.
M. Ouellet : I did not change my mind, it's been an evolution. At the beginning
of the week, we just said: OK, maybe that technology can help us, we want to
see how and we want to see what we have to do to make sure that population will
go for it. After three days in consultation, at the end, what we saw it's, no,
that kind of technology is not... «fiable», sorry...
Mme Fletcher
(Raquel) : ...
M. Ouellet : ...OK, it is vulnerable and it is not the right thing to be sure
that, if you have COVID, you can contact someone who you've been in contact.
So, it's an evolution about what the experts said.
I'm not an expert in
COVID-19, I'm not an expert in cyberterrorism or I'm not an expert in law, but
the experts said: You know, that kind of technology, they have problems with
that. And, when we look at the benefits and the inconveniences, it's the
inconveniences, it's much bigger than the benefits. So, I'm not enthusiasm
today, but I was enthusiasm to know more about it. But, at the end of the three
days, my conclusion is: that apps is not quite ready, and the Government are not ready to launch it.
Mme Fletcher
(Raquel) : What's your impression of the take
away from the Government? What
do you think that the Government is going to do? They heard the same testimony as you did. Do you
think that they'll come… to the same conclusion?
M. Ouellet : I hope they will do that. Because what population want? They want
more tests and the they want a result quickly. The right response about if the Government said: You know what, we changed
our mind about if we launch the apps, it's… at then end, we're going to put
much tests and we're going to be sure that, when you're going to be tested,
you're going to have your result very rapidly. So, that's the particular case
that gouvernement Legault have
to response to the population.
Des voix
:
Merci.
(Fin à 13 h 17)