(Onze heures vingt et une minutes)
M. Arseneau : Bonjour. Aujourd'hui,
j'ai posé une question à la ministre de la Sécurité publique pour lui demander
essentiellement d'entamer des pourparlers avec le Nouveau-Brunswick pour
s'assurer qu'on puisse avoir une voie de passage sécuritaire entre le Québec
continental et les Îles-de-la-Madeleine.
On dénombre quatre accidents graves qui
sont survenus depuis l'été, les deux derniers durant les deux dernières
semaines. Et, en fin de semaine dernière, encore une fois, il y a un jeune
couple qui a été victime d'un accident. Et c'est aussi le traitement qu'ils ont
reçu de la part des autorités du Nouveau-Brunswick qui est absolument
révoltant. Parce que, là, on les oblige à conduire de nuit.
Donc, ils sont partis de Terrebonne à
18 h 30, ils ont passé la frontière du Nouveau-Brunswick vers
11 h 30, puis, vers 4 heures du matin, malheureusement, ils ont
frappé un orignal, ils l'ont évité tout juste, là, ils l'ont attrapé de côté,
ce qui fait qu'ils n'ont pas été blessés sérieusement, la voiture étant une perte
totale. On fait appel à la GRC qui leur dit : Bon, on prend tout ça en
note et on fait sortir l'orignal de la voie, mais, en ce qui vous concerne,
vous devez prendre un taxi et vous rendre en ville. La ville de Moncton est à
95 kilomètres de l'endroit, Fredericton est encore plus loin, aucun taxi
ne veut se déplacer. On appelle la dépanneuse de CAA, et la GRC dit : Malheureusement,
il faut que vous vous débrouilliez tout seuls, code COVID, nous ne pouvons pas
vous prendre et vous ramener en ville.
Or, le traversier qu'ils doivent prendre,
c'est la même journée, c'est le samedi. À midi, ils doivent être à Souris, à l'Île-du-Prince-Édouard,
sinon, le traversier suivant est le mardi. Donc, on va devoir passer deux,
trois jours au Nouveau-Brunswick, terre hostile, où on leur dit : Vous
n'avez pas le droit de vous reposer, vous n'avez pas le droit d'aller dans les
hôtels et vous n'avez même pas le droit d'embarquer dans la voiture d'un
policier. Alors, ils en viennent à la conclusion, lorsque la dépanneuse arrive,
de négocier avec le conducteur, qui n'a pas plus le droit que la GRC de leur
offrir le transport vers la ville, et ils lui offrent un montant d'argent, essentiellement,
ils le soudoient et, masques au visage, ils se font reconduire à Moncton pour louer
une voiture à 8 h 30 et atteindre finalement le traversier.
C'est les conditions dans lesquelles les
gens, maintenant, doivent traverser le Nouveau-Brunswick, alors qu'on a négocié
au mois de juin, là, une voie de passage, un corridor de passage. À l'époque,
on disait : Bien, allez à Pointe-à-la-Croix, vous pourrez dormir la nuit
et ensuite vous pourrez essentiellement conduire de jour, parce qu'en se levant
à 5 h 30 le soleil se lève, et puis c'est possible de se rendre au
traversier à temps. Les conditions ont changé. À l'heure actuelle, si on
regarde les heures d'ensoleillement, avec l'automne qui est arrivé, là, on est
passé de 15 h 40 min d'ensoleillement, au Nouveau-Brunswick, à bientôt
8 h 30 min, environ, ce qui fait que l'essentiel de la conduite
est de nuit. Les témoignages sont nombreux de gens qui ont évité le pire.
Moi, ce que je veux, c'est que le gouvernement,
tout simplement, fasse une proposition au Nouveau-Brunswick pour déterminer des
endroits où on peut loger, où on peut s'arrêter une seule nuit en toute
sécurité, sans mettre à risque la santé des gens du Nouveau-Brunswick, mais
surtout assurer la sécurité des voyageurs.
Et les voyageurs, ils doivent se
déplacer... en fait, ce sont les Madelinots, c'est la population locale qui doit
se déplacer pour des raisons de travail, pour des raisons de santé, pour les
études. On n'est pas en confinement, et il y a toujours un petit volume de
transport, au moins trois fois par semaine, avec le traversier. Il faut
s'assurer que les conditions soient sécuritaires pour ces gens-là, et c'est au
gouvernement du Québec de défendre la population des Îles-de-la-Madeleine et du
Québec pour s'assurer qu'on puisse avoir un minimum de sécurité sur les routes.
Moi, je n'en reviens pas encore de penser
qu'on a des campagnes de la SAAQ qui disent : La fatigue tue sur les
routes, il faut se reposer, que le Nouveau-Brunswick dit que conduire fatigué,
c'est essentiellement conduire avec les facultés affaiblies et qu'on oblige la
population locale à conduire dans des conditions invivables comme celles-là,
insoutenables. C'est insoutenable, c'est irresponsable.
Et moi, la plus grande crainte que j'ai,
je vais terminer là-dessus, c'est que le prochain coup de téléphone, bien, ce
soit un appel de la Sûreté du Québec pour nous annoncer que le pire est arrivé,
qu'un accident mortel s'est produit. Et ça, je regrette, là, mais la
responsabilité du gouvernement du Québec sera évidente si le pire survient au
cours des prochaines semaines. Il faut agir rapidement.
Le Modérateur
:
...questions.
M. Lacroix (Louis) : ...ça,
vous, les 28 jours, le défi de 28 jours de M. Dubé?
M. Arseneau : Je pense que les
chances qu'on puisse arriver à casser la vague en 28 jours sont
extrêmement minces. C'est ce qu'on a pensé dès le début, dès l'annonce. C'est
ce que certains experts semblent aussi dire de plus en plus. Et même le
gouvernement n'écarte pas cette possibilité-là. Alors, qu'on soit dans une
période de reconfinement graduel jusqu'aux fêtes, c'est tout à fait plausible.
M. Lacroix (Louis) : Donc,
vous vous attendez à ça, vous?
M. Arseneau : Oui, on s'attend
à ça, tout à fait, pour toutes sortes de raisons. Je pense qu'il est
extrêmement optimiste de la part du gouvernement de penser qu'on puisse arriver
et revenir à une situation où l'essentiel de la deuxième vague est derrière
nous à l'Halloween. Ça me semble extrêmement difficile à croire.
M. Lacroix (Louis) :
M. Fitzgibbon a dit tout à l'heure que, son optique à lui, le
4 milliards qui avait été mis de côté par Eric Girard comme fonds de
prévoyance pour la deuxième vague allait être complètement dépassé. C'est signe
que ça va durer plus longtemps que 28 jours?
M. Arseneau : Bien oui. Je
pense que le gouvernement a encore une fois failli à sa tâche d'être
transparent avec les Québécois. On y va avec des annonces au compte-goutte, on
essaie de préparer, là, les gens psychologiquement à une annonce qui sera à
chaque fois plus contraignante. Encore une fois, moi, je pense qu'il faut faire
confiance aux gens, il faut être honnête, il faut leur dire la situation telle
qu'elle est. Puis effectivement, si on s'attend à ce que ça dure deux mois,
trois mois, bien, je pense qu'il faut le dire, puis on va s'y habituer, on va
s'y conformer, on va prendre les bons moyens. Mais il faut mettre la population
dans le coup. On le dit depuis des semaines, si on veut favoriser l'adhésion à
des mesures sanitaires, bien, ça prend de l'information puis ça prend de la transparence.
Mme Côté-Chabot (Claudie) :
Sur l'histoire dont vous parliez il y a quelques minutes à peine, là, vous, est-ce
que vous avez eu des échanges avec des élus au Nouveau-Brunswick ou encore avec
le gouvernement, là, concernant la possibilité de...
M. Arseneau : Écoutez, moi,
j'ai formulé, par lettre, des demandes au gouvernement, au premier ministre, à
quatre reprises. J'ai aussi contacté les autorités des provinces voisines à
deux reprises, en cherchant par tous les moyens à les sensibiliser au fait que
les Madelinots se sentent essentiellement abandonnés, et ils doivent quand même,
pour toutes sortes de raisons...
Ce matin, il y avait encore une dame qui
me disait : Mon fils vient de terminer ses études, il revient à la maison,
le transport va être devancé un peu, puisqu'on annonce une tempête demain, donc
il faut qu'il soit rendu à l'Île-du-Prince-Édouard à 5 heures du matin
pour prendre le traversier à 6 heures; il dit : Je ne dormirai pas de
la nuit; penses-tu qu'il pourrait quand même s'essayer et arrêter dormir au Nouveau-Brunswick?
Je lui ai dit : Il peut très bien le faire, mais il encourt une amende
d'au-delà de 1 000 $, s'il le fait, alors moi, je ne peux pas lui
conseiller de faire un arrêt et de contrevenir aux règles du Nouveau-Brunswick.
Ce que je demande au gouvernement du
Québec, c'est de négocier pour qu'on puisse identifier des endroits, des hôtels
déterminés à l'avance, où on puisse se reposer et continuer la route en toute
sécurité. Et ça, ces cas-là... Il y a des gens qui sont venus ici pour des
traitements de santé, des personnes âgées qui aussi prennent la route de façon,
je dirais, intrépide et dangereuse lorsqu'ils ne peuvent pas prendre l'avion.
On leur impose un voyage, et une fatigue, et un danger qui est inadmissible, complètement.
Mme Côté-Chabot (Claudie) :
Avant, ils pouvaient s'arrêter à Pointe-à-la-Croix. Là, ce n'est plus possible
non plus.
M. Arseneau : Bien là, depuis
trois jours, on se demande si on peut passer encore à Pointe-à-la-Croix, et il
est possible de le faire parce que le décret adopté par le gouvernement du
Québec dit que, si les circonstances sont sérieuses, on va laisser passer les
gens. Donc, nous, on a compris que de retourner à la maison après avoir subi, par
exemple, des traitements de santé, bien, c'est une demande qui est sérieuse, ce
n'est pas frivole. On ne va pas là pour s'acheter un paquet de cigarettes, on
traverse la région de Pointe-à-la-Croix et de Campbellton pour se rendre par la
route du Nouveau-Brunswick jusqu'à la maison. Alors, jusque-là, il n'y a personne
qui s'est vu interdire le passage. Mais, même en couchant la nuit à
Campbellton, il faut quand même conduire pour se rendre, par exemple, à
5 heures du matin, comme c'est le cas, là, bien évidemment, il faut
conduire de nuit, avec les risques que ça impose, la fatigue, essentiellement,
et les animaux sur la route.
M. Lacroix (Louis) : Vous,
vous faites «fly in, fly out».
M. Arseneau : Absolument, oui.
Oui, on fait...
M. Lacroix (Louis) : ...chez
vous et puis quand est-ce que vous prévoyez y aller?
M. Arseneau : En fait, moi,
j'ai continué à faire les allers-retours par avion le jeudi ou le vendredi, le
retour le lundi après-midi. Les deux dernières fois que je suis retourné, la fin
de semaine dernière et la fin de semaine précédente, bien, je suis allé à la
maison. J'ai essentiellement fait du télétravail.
M. Lacroix (Louis) : Vous
n'êtes pas supposé parce que vous êtes en zone rouge puis vous allez en zone...
C'est quoi? C'est vert, à l'île...
M. Arseneau : C'est la
deuxième fois que vous me posez la question, puis elle est totalement
pertinente. En fait, le gouvernement du Québec dit qu'il faut préserver le
gagne-pain des Québécois puis à tout prix garder les écoles. C'est ça, le mot
d'ordre qu'il a donné. Le gagne-pain de votre vis-à-vis, c'est de travailler à l'Assemblée
nationale...
M. Lacroix (Louis) : Non,
non, non, vous faites erreur...
M. Arseneau : ...donc moi, je
suis à la maison, et je viens travailler à l'Assemblée nationale une fois par
semaine, et je retourne à la maison. C'est ça, mon travail.
Mais, de façon plus sérieuse, ce que je
veux vous dire, c'est que le mot d'ordre à l'effet d'éviter les contacts
sociaux, pour moi, il est à observer de façon la plus stricte. Et c'est ce que
j'ai fait au cours des deux dernières fins de semaine. Je reste chez moi avec
ma conjointe et j'ai des travaux d'automne à faire autour de la maison. On fait
du télétravail pour le poste que j'occupe et puis on revient ensuite.
Et puis, si la situation s'envenime, si on
tombait, par exemple, dans une zone rouge également, bien, il faudrait peut-être
reconsidérer à la fois les travaux de l'Assemblée nationale, là, parce qu'il y
a plusieurs gens qui se déplacent d'une zone rouge à une zone rouge, une zone
orange à une zone rouge, Québec. Donc, on a convenu qu'on continuerait jusqu'à
la pause puis on va réévaluer ça au cours de la pause de la semaine prochaine,
à savoir si on continue de voyager sur une base hebdomadaire, si on vient
s'installer à Québec, si on reste à la maison. Mais les travaux de l'Assemblée
nationale sont complémentaires à ceux qu'on fait sur le terrain, qu'on essaie
de faire en toute sécurité. Merci.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup.
(Fin à 11 h 32)