(Huit heures vingt-neuf minutes)
La Modératrice
: Bon
matin. Bienvenue à ce point de presse de Québec solidaire. Prendront la parole tout
d'abord Christine Labrie, députée de Sherbrooke, suivie de Gabriel Nadeau-Dubois,
porte-parole de Québec solidaire. Vous pourrez poser vos questions par la
suite.
Mme Labrie : Je vais vous
reparler à nouveau de la pénurie de services de garde, ce matin, parce que c'est
grave, ce qu'on traverse en ce moment.
Moi, je fais partie d'une génération qui a
grandi en ayant la conviction qu'au Québec c'était possible pour les femmes de
fonder une famille et de poursuivre des études, d'avoir une carrière, d'avoir
une vie professionnelle riche, de faire les deux en même temps, et c'est malheureusement
de moins en moins vrai à cause de décennies de négligence des différents
gouvernements qui n'ont pas suffisamment développé le réseau de services de
garde, qui ont laissé les conditions de travail des éducatrices se dégrader. Et
j'inclus la CAQ là-dedans, parce que ça fait quand même deux ans qu'ils sont au
pouvoir puis ils ont laissé les conditions des éducatrices se dégrader.
Et à cause de ça, on se retrouve avec une
pénurie d'une ampleur telle qu'en ce moment il y a des dizaines de milliers de
parents, essentiellement des femmes qui ne peuvent pas travailler comme elles
le souhaitent parce qu'elles n'ont pas de place en service de garde. On parle
de femmes principalement parce que, malheureusement, l'équité salariale, on a
travaillé là-dessus, mais on ne l'a jamais atteint au Québec. Donc, dans la
majorité des familles, c'est encore la femme qui gagne le salaire le moins
élevé. Et la famille, même si elle est progressiste, même si elle aspire à
l'égalité, elle fait le choix rationnel de garder à la maison la personne qui a
le salaire le moins élevé quand elle n'a pas de place en service de garde.
Donc, ce sont les femmes qui subissent ça
de plein fouet, ce sont elles qui perdent leur indépendance économique, qui
font des concessions sur leur parcours professionnel. On parle d'infirmières,
d'éducatrices spécialisées, d'enseignantes, d'agricultrices, d'ingénieures, de
médecins. On parle d'entrepreneures qui avaient fondé une entreprise, qui vont
difficilement pouvoir poursuivre leurs activités. C'est extrêmement grave, ce
qu'on vit en ce moment. Et un des problèmes qu'on a, c'est que le gouvernement
ne semble pas prendre suffisamment au sérieux l'ampleur de la crise. On est
devant un potentiel recul de plusieurs décennies dans les conditions
économiques des femmes en ce moment.
Je trouve que la CAQ banalise le problème.
Ils ont annoncé la tenue d'un livre blanc dans les prochains mois. Ça va être
long. Pendant ce temps-là, on a des dizaines de milliers de femmes, essentiellement,
qui ne peuvent pas continuer de travailler. On a besoin d'elles, on a besoin
d'elles pour la relance économique. Elles ont aussi besoin de travailler.
Alors, je vais demander au gouvernement deux
choses très, très, très simples, qui relèvent de la transparence sur l'ampleur
de cette crise-là. Vous l'avez vu depuis des mois, on vit une crise avec la
pandémie, on a besoin d'être informés sur l'état des lieux aussi souvent que
possible. On a besoin de savoir ce qui se passe, de mesurer les progrès faits,
de mesurer l'impact des mesures prises par le gouvernement. Alors, je demande
deux choses à la CAQ dans une motion aujourd'hui : de s'engager à rendre
publics dès aujourd'hui les taux de couverture actuels, qui tiennent compte des
fermetures de places des derniers mois et des taux de couverture anticipés pour
2022. Ce sont des cartes qui n'ont pas été mises à jour depuis 2019. Le
portrait a totalement changé. Et je vais leur demander de rendre compte
mensuellement, à partir de maintenant, du nombre d'enfants en attente d'une
place, du nombre de places fermées, du nombre de places créées, et ça, dans
chacune des régions du Québec. Parce qu'on a besoin d'avoir accès à un portrait
détaillé, on a besoin de savoir si les mesures qu'ils mettent en place fonctionnent
et on a besoin qu'ils ressentent aussi la pression de voir cette situation-là
évoluer et d'agir, parce que c'est extrêmement grave ce qu'il se passe pour les
conditions économiques des femmes en ce moment. Je vous remercie.
M. Nadeau-Dubois : Merci
beaucoup, Christine, très important, ce que tu dis aujourd'hui.
Je veux terminer la semaine comme je l'ai
commencée en vous parlant de Pharma-Québec. Lundi, Québec solidaire a demandé
la tenue d'une commission parlementaire pour discuter de l'enjeu crucial de
l'autosuffisance médicale du Québec et de la pertinence de créer une société
d'État pour s'en occuper, c'est-à-dire Pharma-Québec.
Mardi, on a déposé une motion pour que le
gouvernement du Québec reconnaisse que ça doit être un chantier prioritaire
pour la relance de l'économie. Je parle, bien sûr, de l'enjeu de l'autosuffisance
médicale. La motion a été adoptée, c'est un pas dans la bonne direction. Mais
le jour même, en point de presse, le premier ministre a eu un discours pour le
moins confus. Il nous a dit : Oui, c'est important, l'autosuffisance
médicale. C'est vrai qu'on n'aurait pas dû privatiser nos capacités de
production de vaccins. Mais ce n'est pas réaliste, Pharma-Québec, parce que ça
coûte trop cher. J'ai été surpris quand j'ai entendu le premier ministre dire
ça.
Le 22 mai dernier, mon collègue solidaire
de Jean-Lesage, Sol Zanetti, posait la question à la ministre de la Santé,
Danielle McCann : Qu'est-ce que vous faites pour préparer la
vaccination au Québec? Êtes-vous en train de faire un plan pour qu'on produise
des vaccins au Québec? Voici la réponse que lui a donné la
ministre McCann, à l'époque ministre de la Santé : «Bon, M. le
Président, je veux être claire, là, on a une capacité de production de vaccins
sur le territoire québécois. Alors, on en a, des compagnies pharmaceutiques,
qui sont bien en mesure de produire un vaccin à forte échelle, quand on va en
trouver un, si on en trouve un, mais il y a des chances qu'on en trouve un
évidemment. Alors, on est bonne position, sur le territoire québécois, pour
faire en sorte que notre population ait accès à des vaccins. Et les
considérations budgétaires dont parle le collègue — mon ami
Sol — ne seront pas une embûche pour le gouvernement québécois. M. le
Président, le budget n'est pas une embûche, nous allons investir ce qu'il faut,
M. le Président.»
Mme McCann était ministre de la
Santé, puis elle le disait clairement : On est capable, au Québec, de
produire nos vaccins, puis on va mettre l'argent. Neuf mois plus tard, où en
est-on? Bien, neuf mois plus tard, on est plus vulnérable que jamais. Le gouvernement
du Québec en est réduit à mendier des doses de vaccin au gouvernement fédéral,
à se mettre à genoux devant Justin Trudeau : S'il vous plaît, Justin,
s'il vous plaît, donne-nous des vaccins.
Moi, je pense que le Québec est meilleur
que ça. À Québec solidaire, on pense que le Québec est meilleur que ça. Ma question,
ce matin, c'est : Si Pharma-Québec, ça coûte trop cher, c'est quoi, le
plan de la CAQ pour assurer l'autosuffisance médicale du Québec? Si
Pharma-Québec, ce n'est pas réaliste, c'est quoi, le plan de François Legault?
Je pense que le premier ministre doit avoir l'humilité de reconnaître que la proposition
de Québec solidaire est pertinente et qu'elle mérite d'être discutée. Il doit
avoir l'humilité de reconnaître qu'on a besoin d'une commission parlementaire
pour aller au fond de cet enjeu-là. C'est ce qu'on lui demande à nouveau ce
matin.
La Modératrice
: On va
prendre vos questions. Une question, une sous-question.
Mme Gamache (Valérie) : Bien, tout
d'abord, peut-être, sur le français, quand on regarde la possibilité du gouvernement
de peut-être contingenter les places dans les cégeps anglophones, est-ce que c'est
une voie que vous trouvez la bonne pour améliorer le sort du français au Québec?
M. Nadeau-Dubois : On n'a pas
vu, toujours, la proposition du gouvernement sur cette question-là, donc c'est
difficile pour moi de dire si c'est la bonne solution, puisque je ne l'ai pas
encore vue. Nous, on n'est pas fermés à des mesures de contingentement, mais il
y a une chose qui est certaine, l'enjeu fondamental, c'est celui du
financement. Les cégeps francophones, particulièrement en région, sont
sous-financés au Québec. Il faut un réinvestissement majeur dans les cégeps
francophones. La meilleure manière d'encourager les jeunes Québécois, les
jeunes Québécoises à étudier au cégep en français, c'est de rendre nos cégeps
francophones attrayants, et pour ça, ça prend de l'argent.
Mme Côté (Claudie) : Sur le
tramway, M. Nadeau-Dubois, bon, visiblement, là, rien ne va plus entre le gouvernement
et le maire de Québec, Régis Labeaume. Ce matin, Dominique Anglade qualifiait
l'attitude du gouvernement, particulièrement de François Legault, de
paternaliste. Vous, vous qualifiez l'attitude du gouvernement comment dans ce
dossier-là?
M. Nadeau-Dubois : Je trouve
ça un peu arrogant de la part du gouvernement d'être aussi sourd à toute une
région qui, depuis des années, se mobilise pour un vrai projet de transport
collectif digne d'une capitale moderne comme Québec. Je trouve que le gouvernement
manque tellement d'ambition. J'ai l'impression que, pour la CAQ, Québec, c'est
une petite bourgade folklorique, là, puis qui n'a pas vraiment besoin de ça, un
vrai réseau de transport structurant. Ça manque d'ambition. Je pense que Québec,
c'est une grande ville, et Québec mérite un grand réseau de transport en
commun.
M. Bergeron (Patrice) : ...le
caucus caquiste se met les deux mains dans le tracé, là, ce n'est pas quelque
chose d'électoraliste, ça? On dit : On va dessiner ça comme nous autres,
là... pour que ça nous serve bien dans nos comtés, là. Il n'y a pas quelque
chose de partisan là-dedans?
M. Nadeau-Dubois : C'est une
bonne question, ça. Quand je parle d'arrogance, c'est de ça dont je parle. Au lieu
de dessiner des lignes sur une carte, le rôle du gouvernement du Québec, c'est
de mettre l'argent sur la table et de donner le go à un projet qui est réclamé
depuis des années par toute la région, puis pas juste les écolos qui votent
pour Québec solidaire. Le milieu économique au complet à Québec est pour ce
projet-là.
Donc, à un moment donné, la CAQ doit
choisir son camp, soit ils écoutent les citoyens et citoyennes de la région de
Québec, le milieu économique de Québec, la société civile de Québec, soit ils
écoutent les radios-poubelles. C'est un ou l'autre.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Et à Montréal, en ce moment, est-ce que le gouvernement joue son rôle en
annonçant de façon successive de nouvelles phases du REM, alors que la phase 1
n'est même pas encore en activité?
M. Nadeau-Dubois : Ça
fait des beaux articles dans les journaux que d'annoncer que, dans 10,
15 ans, il y aura des REM partout dans la région de Montréal. De un, on
est loin de la coupe aux lèvres. Puis, de deux, moi, ce que je constate, c'est
que la CAQ est prête à développer du transport collectif seulement quand ça ne
leur coûte pas grand-chose puis qu'ils sous-traitent les projets à des acteurs
privés, dans le cas du REM, la Caisse de dépôt et placement du Québec.
Le modèle du REM, c'est un modèle de PPP,
et c'est révélateur que ce soient ces projets-là qui aillent vite, alors que
les projets de transport en commun publics, comme le tramway de Québec, sont
constamment noyés dans les délais administratifs. C'est révélateur de leur
faible engagement, au fond, envers le transport collectif. En anglais, on dit
souvent, «money talks», l'argent parle. Moi, ce que je constate, c'est que c'est
juste quand ça ne coûte pas trop cher à Eric Girard que les projets de transport
en commun avancent.
M. Bergeron (Patrice) :
Est-ce qu'il n'y a pas des questions à se poser concernant les ententes qui
seraient éventuellement signées avec le gouvernement, par exemple? Parce que,
pour le REM actuel, le gouvernement doit verser des redevances d'au-dessus de
400 millions en montants, là, pour 20 ou 50 ans à la Caisse de dépôt
pour que la Caisse de dépôt puisse faire de l'argent sur le projet. Est-ce que,
si on dit : On va développer une ligne vers Châteauguay, une ligne... est-ce
qu'il n'y a pas, avant, une idée de ce que la caisse va demander au
gouvernement du Québec pour...
M. Nadeau-Dubois : Bien,
c'est le gros problème du modèle du REM. Je viens de dire : Quand ça ne
coûte pas trop cher... En fait, c'est un peu plus compliqué que ça. On pense
que ça ne coûtera pas cher, mais les attentes de rendement de la Caisse de
dépôt sont tellement irréalistes qu'il pourrait y avoir un retour du refoulé,
et qu'en pensant refiler la facture à la caisse, finalement, ce sont les
Québécois, Québécoises qui se ramassent avec la facture. Parce que des
rendements aussi importants que ceux que la caisse attend du REM, il n'y a à
peu près pas de projets de transport collectif dans le monde qui en génèrent.
M. Lacroix (Louis) :
Juste par curiosité, M. Nadeau-Dubois, quand vous parlez des
radios-poubelles, vous faites référence à quoi, à qui? Vous avez dit : Les
radios-poubelles...
M. Nadeau-Dubois : Oui. Bien,
il y a dans la région de Québec, depuis de nombreuses années, un climat
médiatique...
M. Lacroix (Louis) : Oui,
mais c'est qui, les radios-poubelles, là?
M. Nadeau-Dubois : ...et une
convergence de plusieurs voix médiatiques qui sont très claires dans leur opposition
féroce et dogmatique au projet de tramway. Moi, je me rappelle de députés de la
CAQ dans l'opposition qui allaient sur ces tribunes parler en long et en large
contre le tramway.
M. Lacroix (Louis) : Ma
question, ce n'est pas ça. Ma question, c'est : Vous faites référence à
quelles tribunes? C'est qui les tribunes?
M. Nadeau-Dubois : Bien, je...
M. Lacroix (Louis) : C'est
qui les radios-poubelles?
M. Nadeau-Dubois : Bien, je
pense que...
M. Lacroix (Louis) : ...les
nommer?
M. Nadeau-Dubois : Bien,
d'abord, je ferais une nuance, là. Il y a, sur certaines... il y a de la
diversité médiatique à Québec plus que jamais. Il y a eu une diversification
médiatique dans les dernières années, puis ça, d'ailleurs, il faut le saluer.
Je pense qu'il y a des gens qui tombent dans la catégorie radio-poubelle dans
les gens qui prennent encore la... bien...
M. Lacroix (Louis) : Bien, c'est
qui?
M. Nadeau-Dubois : Je pense
qu'à Radio X il y a des discours qu'on peut mettre dans la catégorie des radios-poubelles.
M. Lacroix (Louis) : Et les
autres, c'est qui?
M. Nadeau-Dubois : Vous voulez
que je fasse une liste des stations? Pour moi, ce n'est pas une liste de
stations...
M. Lacroix (Louis) : Les
radios-poubelles, moi, je veux savoir qui sont les radios-poubelles.
M. Nadeau-Dubois : Bien, moi,
je pense qu'à CHOI Radio X il y a des discours de radio-poubelle. Je vous donne
un exemple.
M. Lacroix (Louis) : C'est
une radio-poubelle, là.
M. Nadeau-Dubois : Bien, ça en
est une bonne. Moi, j'ai déjà entendu des discours au 93,3. Ça ne fait pas du
93,3 une radio-poubelle, par contre, parce qu'il y a une diversité d'opinions
sur plusieurs de ces antennes-là, mais je vous donne un exemple où je pense
qu'il y a des discours qui se mettent dans la catégorie des radios-poubelles,
puis c'est CHOI Radio X.
M. Lacroix (Louis) : C'est
difficile de dire qu'ils ne veulent pas du tramway, alors qu'au contraire ils
disent : On va le dessiner nous-mêmes. On y tient tellement, là, que c'est
nous qui allons le faire.
M. Nadeau-Dubois : Le gouvernement
de François Legault ne manque jamais d'originalité pour créer des délais. Ça ne
m'étonnerait pas que ce soit encore une de ces stratégies-là.
M. Larin (Vincent) : À propos
d'autre chose que le tramway, M. Nadeau-Dubois...
Journaliste
: Ah! bien
là...
M. Nadeau-Dubois : Oh!
Des voix
: ...
M. Nadeau-Dubois : Moi, je ne
veux pas créer de tension.
M. Larin (Vincent) : Sur les
avis publics de la Santé publique.
M. Nadeau-Dubois : Oui.
M. Larin (Vincent) : On en a
un premier exemple, là, qui a été déposé comme ça sur le site du ministère de
la Santé, un document très détaillé qui montre les différents scénarios que le gouvernement
avait en main concernant la réouverture ou la fermeture des bars, l'été dernier,
à Montréal. On va avoir beaucoup d'autres documents comme ça qui, supposément,
doivent être publiés dans les prochains jours.
J'aimerais savoir, premièrement, qu'est-ce
que vous en avez pensé, si vous avez pu le consulter. Puis deuxièmement, c'est
qu'à la lecture de ça, on se rend compte que finalement, la Santé publique,
elle prend en compte des éléments économiques, c'est-à-dire, la fermeture
potentielle des bars, elle prend en compte la cohérence du message
gouvernemental, elle prend beaucoup plus d'éléments en compte qu'uniquement des
données scientifiques sur la santé de la population. Est-ce que c'est son rôle
de faire ça?
M. Nadeau-Dubois : Bien, vous
me posez une vaste question, là, mais je pense que la santé publique, ce n'est
pas juste la santé physique. La santé mentale, ça fait partie de la santé
publique. Les déterminants sociaux de la santé, oui, c'est important de les
prendre en compte. Et moi, je m'attends des départements de Santé publique au
Québec à ce qu'on ait cette vision englobante, certains diraient «holistique»
de la santé. Moi, ça, ça ne me dérange pas, c'est même ce à quoi on s'attend d'un
département de Santé publique, de ne pas avoir une vision strictement médicale
de la santé, mais une conception sociale et collective de la santé des
populations. D'ailleurs, c'est ce que la Santé publique faisait bien mieux
avant les coupures sauvages des années libérales où on a pratiquement scrapé
entièrement cet aspect prévention dans la santé. Donc, moi, de lire ça dans les
avis de Santé publique, ça ne me dérange pas, bien au contraire.
M. Larin (Vincent) : Je ne
parle pas de la santé mentale, M. Nadeau-Dubois, il est écrit noir sur
blanc, par exemple, dans les avantages, désavantages qui sont exposés au
gouvernement pour, par exemple, la fermeture des bars, un des désavantages qui
est évoqué, c'est la survie potentielle des bars. Donc, ça, c'est un argument
qui est avancé par la Santé publique au gouvernement. Est-ce que c'est vraiment
son rôle de faire ça?
M. Nadeau-Dubois : Bien, vous
avez posé une large question. Moi, quand je parle de déterminants sociaux de la
santé, ça, ça implique des enjeux comme le logement et comme l'activité
économique. Donc, oui, qu'on tienne… qu'on prenne en considération les
déterminants sociaux de la santé, ce n'est pas juste important, c'est
essentiel.
Là, vous posez une question différente :
Est-ce que, spécifiquement, les pertes pour des entreprises en particulier, ça
doit être un facteur qui entre dans la balance? Je ne dis pas qu'il faut l'évacuer,
mais, en temps de pandémie, ce qui devrait primer sur les pertes économiques de
certaines entreprises, c'est la lutte contre la pandémie. Donc, qu'on le
considère, c'est normal. Est-ce que ça devrait prédominer? Non, et surtout ça
devrait toujours passer en deuxième après la transmission du virus.
Mais ce n'est pas… Je vous fais peut-être
une réponse pas pleinement satisfaisante dans la mesure où c'est des enjeux qui
sont complexes. Puis lutter contre une pandémie, ce n'est pas juste une
question médicale, c'est aussi une question psychosociale, et il faut en tenir
compte, puis l'activité économique, c'est un déterminant social de la santé.
Donc, moi, quand je dis ça, je ne dis pas : Il faut que Vincent Guzzo soit
d'accord avec toutes les mesures. Ce que je dis, c'est : Prenons en
considération les déterminants sociaux de la santé, puis ça, c'est deux choses
différentes.
La Modératrice
: Une
dernière question en français.
M. Bergeron (Patrice) : Mme
Labrie, vous avez entendu, donc, la conférence de presse surréaliste à laquelle
on a eu droit la semaine dernière, là, M. Lacombe qui nous avoue son
impuissance. Est-ce que M. Lacombe, étant donné, là, ses performances dans les
dernières semaines, les derniers mois, est encore le bon homme au bon endroit
pour développer le réseau des garderies?
Mme Labrie : Je pense que, jusqu'à
maintenant, la CAQ, en tant que formation politique, n'a démontré aucun intérêt
pour le développement du réseau public des services de garde et pour les conditions
de travail des éducatrices. Un ministre a besoin de l'appui de son gouvernement
pour pouvoir avancer sur ce dossier-là, et notamment du ministre des Finances.
M. Carabin (François) : Dans
vos propos d'ouverture, Mme Labrie, vous avez mentionné les impacts des politiques
de la CAQ sur les mères de famille. Puis, depuis le début de la pandémie, vous
parlez aussi beaucoup, au sein de votre formation politique, des impacts sur
les professionnel-le-s de la santé. Est-ce que le gouvernement de la CAQ est
sexiste?
Mme Labrie : Ça a été beaucoup
dit que le gouvernement de la CAQ est un «boys' club». Il y a pourtant des
femmes très intéressantes dans ce gouvernement-là, très compétentes, dont les
réflexions ne sont certainement pas mises à profit comme elles le devraient. Ce
qui est clair, c'est que la pandémie a eu des impacts majeurs sur les femmes,
c'est abondamment documenté, à tous les niveaux, et on ne sent pas une volonté
réelle de la CAQ de s'intéresser à ces questions-là. Ils n'ont pas pris
l'habitude de faire l'analyse différenciée selon les sexes de leurs politiques.
Ils ne l'ont pas fait pour leur plan de relance économique; ils ne le font
pas... ils ne l'ont pas fait pour le projet de loi sur l'IVAC que j'étudie en
ce moment. Ce n'est pas une habitude qu'ils ont prise. Donc, moi, ce que ça
m'envoie comme message, c'est que, non, ils n'ont pas de préoccupation
particulière pour les conditions des femmes.
Mme Gamache (Valérie) :
Avez-vous l'impression justement qu'au sein même du Conseil des ministres ce
«boys' club» là fait en sorte que le point de vue des femmes actuellement dans
la pandémie n'est pas entendu?
Mme Labrie : Je pense qu'il
n'est pas suffisamment entendu, non.
M. Pilon-Larose (Hugo) : La
liste d'attente... Juste une dernière petite question par rapport à ça. La
liste d'attente, est-ce que vous faites une adéquation entre le chiffre
d'environ 50 000, 51 000 enfants sur la liste d'attente du guichet
unique, et donc qu'il y aurait 50 000, 51 000 femmes qui ne peuvent
pas développer leur plein potentiel au niveau professionnel, par exemple, parce
qu'elles ne peuvent pas aller sur le marché du travail?
Mme Labrie : Moi, j'ai parlé
de plusieurs dizaines de milliers. Évidemment, sur les 51 000, il y a
là-dessus des parents qui touchent encore des prestations du RQAP, par exemple.
Ça fait partie des raisons pour lesquelles on a besoin des données détaillées,
et ça, le ministre refuse de nous les fournir. Si on avait la répartition des
personnes sur cette liste d'attente là par tranche d'âge, par exemple, on
pourrait mesurer un peu mieux combien de personnes exactement ont besoin d'une
place en ce moment ou combien sont des enfants à naître, par exemple. Ce n'est
pas des données que le ministre nous fournit en ce moment.
M. Pilon-Larose (Hugo) : Mais,
selon vous, est-ce que la situation socioéconomique des femmes, en date
d'aujourd'hui, a reculé comparativement à ce qu'elle était en 1997, lors de la
création du réseau des CPE?
Mme Labrie : Par rapport à
1997, là, je ne suis pas en mesure de vous répondre exactement, mais elle a certainement
reculé dans la dernière année, oui.
La Modératrice
: Une
dernière question…
Mme Côté (Claudie) : …la
connexion Internet, parce que vous en avez souvent parlé, là, il y a une
annonce qui a fuité, un peu, dans les médias, que le gouvernement s'apprête à
faire. Bon, encore, là, on veut connecter via satellite. Bon, successivement,
ça a toujours été un échec, là, des gouvernements. Est-ce que cette fois-ci,
c'est la bonne?
M. Nadeau-Dubois : Si on ne
change pas le modèle, le plan de la CAQ sera un échec comme les plans des
libéraux et des péquistes ont été des échecs. Si on ne change pas notre
approche, on va avoir les mêmes résultats. Il y a quelqu'un qui a déjà dit que
poser les mêmes gestes et s'attendre à des résultats différents, ce n'était pas
exactement une preuve d'intelligence.
Je pense qu'il faut faire preuve
d'intelligence. Il faut changer de stratégie. Et nous, notre proposition, c'est
d'arrêter de pelleter par millions de dollars de l'argent dans les poches des
entreprises privées. Forcer la concurrence sur le marché en ajoutant un joueur
public comme Réseau Québec, pour nous, ça, c'est une vraie solution,
comparativement aux tentatives désespérées de la CAQ de répéter les erreurs du
passé.
Une voix
: …
M. Nadeau-Dubois : J'ai
d'énormes doutes, énormes doutes que ça va fonctionner.
La Modératrice
: On va
passer en anglais, s'il vous plaît.
Mme Senay
(Cathy) : Hello, good morning. You have two
MNAs in the Québec City region.
How do you see the fact that the CAQ now wants to present its own layout for
the tramway, after…
M. Nadeau-Dubois : I find that intention a little bit arrogant. The whole region has
been mobilized for years around that very concrete project. And not only, you
know, Québec solidaire MNAs and
Québec solidaire electors, the
whole economic ecosystem of the region is behind that project.
So, I don't think the
role of the Government of Québec is to draw lines on a map. I think
it's to put money on the table to realize a project that is asked by the region
since years now.
Mme Senay (Cathy) : And you said that it's arrogant. Do you mean that…
M. Nadeau-Dubois : Yes, it's arrogant to think that…
Mme Senay (Cathy) : …
M. Nadeau-Dubois : The Government of Québec… the Government of the Coalition avenir Québec always finds new ways to add further delays on that project. I
think this might be one of those strategies.
Mme Fletcher (Raquel) : You have that idea about how the vaccination rollout should take
place. You mentioned that in French. Can you tell us in English what you're
expecting, what you want to see?
M. Nadeau-Dubois :
You know, last May, my colleague Sol Zanetti asked the then Minister of Health,
Mrs. McCann, what was the plan to produce vaccines here, in Québec. And Mrs. McCann, it was on May 22nd,
said : Don't worry, we are going to take care of this, and money will
never be an issue.
This week, Mr. Legault
said precisely the opposite. He said that : Well, we have to do more in Québec, but, you know, it's not realistic
what Québec solidaire is saying
because it costs too much. Nine months later, we are at the same point,
begging, literally begging vaccines from Mr. Trudeau.
I think and we think Québec is better than that. We are a rich
society. We can have the ambition to produce our own vaccines, at least some of
them, in Québec. We can do
this. And it's so sad, so sad to see Mr. Legault saying publicly that :
No, we're not good enough, we're too small, it costs too much.
So what we are expecting
Mr. Legault to say and to recognize is that Québec
solidaire has a proposition that deserves to be
discussed and that the Parliamentary commission we are asking is a good way to
explore that issue because we cannot tolerate the status quo.
Mme Johnson (Maya) : Good morning. There's been a lot of talk about language in the
media lately, despite the absence of an actual bill here, at the National Assembly, one of the latest stories
being a front-page article talking about the historic decline of French, the
usage of French in free fall. Do you agree with that assessment about the
status of the French language in Québec right now?
M. Nadeau-Dubois : French will always be fragile in Québec, it is fragile now, it was fragile for decades and will still be
fragile. And we should always be finding new ways to protect it, and not only
to protect it, but to make sure it flourishes in Québec. French in Québec
is not only a language, French is an integral part of our identity, of our
collective culture. We need to take care of it. So, yes, I'm worried, just like
I think every Quebecker should
be worried, and we will have propositions to make sure that French flourishes
in Québec when Mr. Jolin-Barrette
will finally, maybe one day, we never know, table his bill.
Mme Johnson (Maya) : You're not willing to share any of those propositions right now?
M. Nadeau-Dubois : I will let my colleague, Ruba Ghazal, do those announcements when
the time comes.
Mme Johnson (Maya) : What do you think is taking Mr. Jolin-Barrette so long?
M. Nadeau-Dubois :
It's a very good question. I don't know. I think… I don't know. I don't know.
He's been talking about this for a year now. What is he doing? I don't know.
Mme Johnson (Maya) : Do you think it's because there maybe isn't an appetite for a
language debate in the middle of a pandemic?
M. Nadeau-Dubois :
I think we can fight the pandemic and still debate on other issues. I think we
can fight the pandemic and talk about social housing. I think we can fight the
pandemic and talk about the issue of day care. I don't think the pandemic
should be an excuse to throw away all the other important debates in Québec.
La Modératrice
:
Merci beaucoup.
(Fin à 8 h 58)