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Point de presse de Mme Manon Massé, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière d’énergie et de ressources naturelles, et M. Vincent Marissal, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de santé

Version finale

Le mardi 15 mars 2022, 10 h 30

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Dix heures trente-quatre minutes)

Mme Massé : Bonjour, tout le monde. Bon retour. C'est le fun de vous retrouver. Le budget arrive à grands pas. C'est dans une semaine. Et, à chaque jour, nos concitoyens, concitoyennes ont en pleine face une augmentation du coût de la vie qu'ils n'arrivent plus à soutenir pour plusieurs d'entre eux et elles. Les familles québécoises, que leur colonne de dépenses ne cesse d'augmenter, vous le savez comme moi, l'épicerie, le logement, Hydro-Québec... C'est de plus en plus difficile parce que la colonne de revenus, elle, n'augmente pas, quand, tout simplement, elle ne diminue pas... elle diminue.

Alors, ce matin, j'étais très ébranlée de voir cette alarme qui a été sonnée par des experts qui nous disent que, dans le fond, il y a des enfants qui ne mangent pas à leur faim, qui ont des problèmes au niveau de l'alimentation, qui n'arrivent pas... la famille n'arrive pas à subvenir, et ça, ça a un impact sur leur développement. Moi, là, je suis convaincue qu'on vit dans un pays riche, et ça, là, je trouve que ça n'a pas de bon sens, ce n'est pas acceptable.

Le gouvernement du Québec, bien sûr qu'il ne peut pas stopper l'inflation comme ça, bien sûr qu'il n'a pas une baguette magique pour faire en sorte que la guerre arrête, bien sûr que ce n'est pas des outils qu'il a, mais il a des outils qu'il doit utiliser, et notamment notre hydroélectricité. Ça nous appartient collectivement. Il peut agir là-dessus.

En 2019, la CAQ a fait un choix. En fait, elle a fait une erreur. Elle a revisité nos façons de fonctionner et, sous bâillon, je nous le rappelle, a adopté une loi qui allait définitivement coller l'augmentation des frais d'Hydro... des coûts d'Hydro, pardon, à l'inflation. Vous vous rappellerez, parce que je sais que vous êtes perspicaces, qu'à l'époque le premier ministre, le ministre de l'Énergie nous disaient : Non, non, mais inquiétez-vous pas, 2 % d'inflation, là, ça n'arrive pas, ça, ceux qui pensent que ça arrive, ils vivent sur une autre planète. Bien, voilà, on est rendus sur cette planète, M. Legault, parce qu'en janvier on parlait d'une inflation de 5 %. Ça, là, c'est les familles qui paient pour ça. Ça, c'est les gens qui ont de la misère à arriver, qui voient leur facture d'électricité augmenter.

Alors, cette erreur-là qu'a commise monsieur Legault, un, il faut qu'il la reconnaisse. Il faut qu'il arrête de dire : Bah! vous savez, c'est de remettre de l'argent dans le portefeuille de tout le monde, puis nous, on est pour d'autres actions à faire. Non, non, attendez, là. Comment est fixé le taux d'augmentation d'Hydro-Québec relève d'un calcul qui, à l'époque, permettait un équilibre et maintenant, puisqu'il est collé à l'inflation, bien, fout le bordel dans le portefeuille de bien des Québécois et Québécoises. Alors donc, il faut que le gouvernement de la CAQ reconnaisse qu'ils ont commis une erreur, ils doivent geler, cette année, c'est là que l'urgence, elle est, pour les familles, l'augmentation des coûts d'Hydro et, bien sûr, revoir le bordel qu'ils ont fait avec le projet de loi n° 34, parce que c'était une erreur, puis ils doivent le reconnaître.

M. Marissal : Merci, Manon. Bonjour. On entre dans une période critique pour ce Parlement, parce que c'est la dernière session qui mène aux élections. Mais on entre, là, cette semaine en particulier, dans une période critique dans la gestion de la pandémie de COVID-19, pour plusieurs raisons. D'abord, parce que le gouvernement nous a promis plusieurs réformes dont on attend les détails, nous n'avons eu que les contours, à ce stade-ci, plusieurs réformes, notamment pour la fin de l'urgence sanitaire. Et ça, ça devient, ma foi, plus qu'important, ça devient essentiel, c'est urgent.

Les constitutionnalistes le disent, ce n'est pas normal de gouverner, dans une démocratie comme le Québec, depuis deux ans, avec un petit groupe d'individus qui prennent des décisions en vase clos, sans jamais avoir de comptes à rendre. Et l'illustration la plus frappante de ça, là, en argent sonnant et trébuchant, c'est les 17 milliards de dollars que la CAQ a donnés en contrats de gré à gré, depuis qu'il est là, et en particulier à la faveur de la pandémie, prétextant qu'il y a toujours urgence puis qu'il n'a jamais de comptes à rendre. 13 milliards juste pour la pandémie, c'est du jamais-vu, c'est un glissement qui est extrêmement dangereux.

Alors, moi, je leur demande, là, de mettre fin à cette urgence sanitaire. On nous promet un projet de loi, vraisemblablement, cette semaine, là. Il n'y en aura plus, de chèques en blanc. Et d'ailleurs, ce chèque en blanc, on nous l'a imposé puisqu'on nous a refusé le fonctionnement de la démocratie dans toute sa fonctionnalité, ici, qui devrait exister. Alors, il n'y en aura pas, de projet de loi qui va passer, en tout cas, en ce qui me concerne, s'il n'y a pas les mécanismes de reddition de comptes. On ne veut plus de ce gouvernement qui s'arroge tous les pouvoirs, derrière des portes closes, à décider les contrats, les couvre-feux, les mesures sanitaires sans jamais avoir de comptes à rendre. Ça a assez duré. Et je pense que M. Legault en a beaucoup trop profité depuis deux ans, mais c'est fini.

L'autre chose qui m'inquiète, évidemment, beaucoup, quand je dis qu'on arrive à un moment crucial, là, et là j'élargirais le moment crucial au réseau de la santé, c'est qu'évidemment, chassez le naturel, il revient au galop, ce bon gouvernement néolibéral a resuccombé au chant des sirènes de la privatisation en santé. Quelle surprise! Quelle surprise!

Moi, je suis assez vieux pour avoir couvert Daniel Johnson, premier ministre — le fils, je précise, quand même pas le père — et avec son ministre de la Santé, ses ministres de la Santé, les ministres de la Santé subséquents. Rappelez-vous Jean Charest qui est arrivé ici en 1998, son idole était Mike Harris, en Ontario, la révolution du gros bon sens, il fallait faire une réingénierie de l'État. Évidemment, ça passait par plus de privé en santé. Mario Dumont a ensuite poussé le gouvernement Charest vers plus de privé en santé. Les néolibéraux, depuis 40 ans au Québec, font un concours de savoir qui qui va pousser le plus vers le privé. Bien, c'est de valeur, parce qu'ils vont nous trouver sur leur chemin, parce que le système de santé au Québec, il doit être public, on va le défendre. Puis, s'ils ont juste ça à proposer aux Québécois, c'est qu'ils ont démissionné, ils n'y croient plus, et c'est la preuve de leur échec.

Alors, voici où j'en suis en ce début de session. Je pense qu'on va avoir des débats fascinants. Pas début de session, mais reprise de session, je devrais dire. 

La Modératrice : On va prendre vos questions, une question et une sous-question. Claudie Côté, TVA.

Mme Côté (Claudie) : Je continuerais sur le privé en santé, M. Marissal. Parce que la vision du gouvernement, en ce moment, apparaît claire, là, on va faire... on va avoir recours au privé pour décharger un peu la liste d'attente des chirurgies, mais il n'est pas question d'augmenter la part du privé. C'est plutôt d'aider le public qui ne suffit plus à la demande, là. Ça, pour vous, ce n'est pas acceptable?

M. Marissal : Êtes-vous sûre de ça? Moi, je lis M. Dubé, je le pratique depuis longtemps et je n'ai pas compris qu'il faisait appel au privé seulement pour vider les listes d'attente. Ou peut-être que ce n'est pas ça, son projet. En tout cas, moi, je me méfie énormément. Parce que, quand il dit... Puis, souvenez-vous qu'une semaine avant le ministre Dubé c'est le chef de cabinet de M. Legault qui est sorti. Ça, c'est assez inusité quand même, là. Un chef de cabinet, normalement, ça ne se tient pas devant un kodak, mais en arrière, là, c'est sa job de conseiller le premier ministre. Il est sorti pour dire : On veut plus de privé en santé. Parce que, si c'était ça, ça se fait déjà. On veut vider les listes d'attente. Ce n'est pas la solution idéale, mais c'est le moindre mal parce qu'il y a des gens qui attendent, cataractes, genou, hanche, tutti quanti, depuis des mois, puis il faut soulager ces gens-là, je comprends.

Ça fait des années que le privé et en particulier les assureurs privés regardent la vitrine du réseau de la santé comme des enfants devant un magasin de bonbons puis qu'ils se disent : Si on pouvait avoir la clé de ce magasin-là, on se ferait un méchant party. Et là M. Dubé est en train de leur tailler une clé. Alors, moi, je ne crois pas que ses projets se limitent à la liste d'attente. Il a dit clairement qu'il voulait avoir plus de privé, ajoutant : Vous savez, les gens, peu importe où est-ce qu'ils sont soignés, l'important, c'est d'être soigné. Bien, moi, je pense que l'important, c'est d'être soigné dans notre réseau public, parce qu'ouvrir la porte au privé on sait ce que ça va faire.

Mme Côté (Claudie) : La porte n'est pas déjà ouverte?

M. Marissal : Bien, malheureusement, elle est déjà beaucoup trop ouverte parce que, notamment, les libéraux précédents, le Dr Barrette, le ministre Barrette, le premier ministre Couillard, avaient dit qu'il allait augmenter le financement en santé. Ils ne l'ont pas fait. Ils ne l'ont pas augmenté à la hauteur normale et minimale, ce qui fait qu'évidemment, puis ça avait déjà commencé avant, avec les gouvernements précédents... qu'on, évidemment, se tourne toujours de plus en plus vers le privé. Mais ça, c'est une démission, c'est une démission du gouvernement et des gouvernements, et celui-ci en particulier qui se colle sur les conservateurs, parce qu'il voit les conservateurs dans son rétroviseur, à droite, et il se dit : Bien, il faut absolument que je surenchérisse, moi aussi, pour aller vers le privé.

C'est un film qui tourne en boucle, avec les néolibéraux, depuis des années, au Québec, parce qu'ils n'y croient pas, au public, ils n'y croient pas, à notre système public. Puis ça, c'est dommageable, c'est dommageable pour les gens qui travaillent dans le réseau, mais c'est dommageable pour nous qui payons, de toute façon, des impôts depuis des années pour avoir un système public.

Mme Massé : Oui, puis j'ajouterais, si tu permets, Vincent. Dans les faits, c'est des choix, des choix politiques qui ont été faits. Vous avez raison, le privé est là et est de plus en plus là parce que les gouvernements, depuis les 30 dernières années, ont assoiffé la bête de la santé, ont diminué les budgets de la santé, ont donné des mauvaises conditions à nos travailleuses...

Mme Côté (Claudie) : ... année après année, en santé, quand même, là?

Mme Massé : Oui, bien sûr. Mais où va l'argent? Va-t-elle pour les médicaments, par exemple, médicaments dont, au moins depuis 12 ans, Québec solidaire dit que nous pourrions économiser plus de 1 milliard annuel si nous prenions Pharma-Québec comme modèle? Non, les gouvernements n'ont pas fait ces choix-là. Alors, c'est pour ça que c'est très préoccupant de voir le gouvernement actuel se coller sur la perspective d'amener le privé encore plus... de façon plus importante en santé, comme, présentement, le met de l'avant le Parti conservateur. Parce que, dans les faits, il y a plein d'exemples à travers le monde qui nous démontrent que c'est encore de... Puis dans ce cas-là, des fois, ce n'est plus juste deux vitesses, c'est plusieurs autres vitesses qui s'installent.

Alors, nous, on défend une vision, puis je pense que les Québécois et les Québécoises se reconnaissent dans cette vision de la santé au public. Mais bien sûr qu'ils veulent des services, je les comprends, moi la première.

La Modératrice : Nicolas Lachance, Journal de Québec.

M. Lachance (Nicolas) : Oui, bonjour. J'aimerais revenir sur les contrats de gré à gré. M. Marissal, vous avez dit : C'est un glissement qui est extrêmement dangereux. J'aimerais que vous m'expliquiez un glissement vers quoi? Et est-ce que vous avez des demandes, concernant ces contrats-là, avant les élections?

M. Marissal : En fait, la meilleure personne, je pense, pour vous expliquer, là, dans ce Parlement, les immenses risques de la systématisation des contrats de gré à gré, ça tombe bien, c'est la présidente du Conseil du trésor de ce gouvernement. Alors, je ne sais pas comment qu'elle se sent, Mme LeBel, de voir cette multiplication de contrats, parce qu'elle était à la commission Charbonneau, elle a très bien vu qu'à partir du moment où on baisse la garde et qu'on muselle nos chiens de garde, notamment les appels d'offres, notamment la concurrence, notamment les comptes à rendre, la reddition de comptes ici, à l'Assemblée nationale, bien, c'est la porte ouverte, c'est la porte ouverte.

Et ce gouvernement s'est servi de la pandémie plus que jamais. Tout y passe, hein, tout y passe. Et puis depuis deux mois, ici, on débat régulièrement de la fin de l'urgence sanitaire, ce qu'on nous a refusé à ce jour. On nous ressort toujours les mêmes litanies, là : Oui, mais il fallait acheter des masques; oui, mais fallait acheter des gants; oui, mais il fallait faire la vaccination. De un, ça ne s'est même pas fait dans les règles de l'art. De deux, je pense que des masques, c'est bon, là, on en a acheté, là. Il y a eu d'autres contrats qui ont été donnés, notamment à des amis fondateurs de la CAQ, notamment, pour ce qu'on appelle un hub avec les médecins de famille. Ça a été donné, un beau gros contrat de 36 millions, sans appel d'offres. Les contrats sans appel d'offres, de gré à gré, ça doit être l'exception. Là, c'est devenu, de toute évidence, là, 17 milliards... c'est devenu la norme ici, là.

Ce que je demande, effectivement, c'est de voir les contrats, d'avoir les détails. Parce que, vous le savez, puis là permettez-moi de radoter, mais c'est un élément important de l'équation, là. La Vérificatrice générale, elle a une enquête en cours là-dessus, mais le gros de l'enquête ne sortira pas avant les prochaines élections parce que son rapport ne sera pas prêt avant la fin juin, on ne siégera pas, elle ne pourra pas déposer son rapport. Alors, c'est quand même malheureux de voir qu'un volume si important de contrats a été donné de gré à gré et qu'on n'aura pas l'occasion, la population n'aura pas l'occasion de se faire une idée réelle du pourquoi et du comment.

M. Lachance (Nicolas) : Bien, on l'a fait, nous. Établir chacun des contrats, bon, c'est un travail de moine, c'est pratiquement impossible de les ouvrir les uns après les autres. Est-ce que l'AMP et la directrice générale... la Vérificatrice générale ont assez de pouvoirs, assez de personnes, assez de budgets pour faire enquête convenablement sur ce genre de situation là?

M. Marissal : La Vérificatrice générale nous dit que oui. Je vais la prendre au mot. L'AMP nous dit que, malgré que c'est une institution assez récente dans le domaine des contrats publics... a ce qu'il faut. Le problème, en ce moment, c'est qu'il manque de temps, et on a une échéance électorale. Et ce n'est pas normal qu'un gouvernement puisse se cacher derrière des portes closes, prendre des décisions comme ça, dépenser sans compter, sans rendre de comptes. C'est en contradiction profonde avec notre façon de fonctionner ici.

La Modératrice : Fanny Lévesque, La Presse.

Mme Lévesque (Fanny) : M. Marissal, sur le projet de loi qui va être déposé cette semaine, vos attentes, c'est quoi exactement, par exemple, pour la transition et, donc, de laisser en place des leviers qui pourraient nous permettre de réagir en cas de sixième vague ou d'une autre crise? C'est quoi? Qu'est-ce que le projet de loi doit contenir?

M. Marissal : Sous réserve de voir le projet de loi, évidemment, parce qu'on en parle beaucoup, mais je ne l'ai pas vu, moi, ce que je dis, c'est qu'on ne peut pas... et on n'acceptera pas la systématisation de l'état d'urgence. À partir du moment où le gouvernement déciderait, sixième vague, peut-être, on voit ce qui se passe en Europe... alors, à partir du moment où le gouvernement déciderait de remettre l'état d'urgence sur certains secteurs, le masque, le passeport vaccinal, peu importe, c'est ce dont le ministre parle, de toute façon, il ne peut pas se redonner par la porte d'en arrière ce qu'il voulait se donner par la porte d'en avant, c'est-à-dire le pouvoir absolu.

Il faut qu'il y ait un mécanisme de contre-pouvoir ici, c'est à dire, par exemple, comme ça devrait se faire, une révision par les parlementaires en commission parlementaire avec des débats ici, pas le renouvellement automatique. Ça ne devrait pas sortir d'un guichet automatique, les décisions de ce type. Si le ministre dit vouloir avoir besoin de ces cartes-là dans sa manche, bien, qu'il nous démontre d'abord pourquoi, mais qu'il nous dise aussi quel rôle, nous, on aura à jouer là-dessus, pour ne pas qu'on se retrouve dans une situation qui a été décriée, d'ailleurs, là, par une kyrielle de constitutionnalistes qui disent que c'est antidémocratique, et je suis parfaitement d'accord.

Mme Lévesque (Fanny) : Parce qu'ils semblent dire, de ce qu'on sait jusqu'à présent, que ce qui va être dans la loi va nous permettre de réagir sans avoir à réactiver l'état d'urgence sanitaire. Donc là, ça pourrait être de... C'est difficile à voir, mais, par exemple, on pourrait demander de remettre le passeport vaccinal s'il y a une flambée des cas, par exemple. Donc, dans ce contexte-là où on ne semble pas vouloir réactiver l'état d'urgence sanitaire, là, c'est quoi vos... quels garde-fous on devrait mettre en place?

M. Marissal : Il faut que ça passe par ici avant. Parce que ce que vous me dites, c'est l'urgence sanitaire sans le nom. C'est les mêmes pouvoirs dans la poche du même ministre, puis ça, on a joué dans ce film-là, c'est désagréable. Je pense que la population en a soupé aussi de ça, là. Alors, après deux ans, là, c'est déjà beaucoup trop long. Ça fait plus d'un an qu'on demande une loi transitoire. C'est tout simplement de faire ce que les parlements modernes et démocratiques font dans le monde, c'est de débattre de décisions aussi lourdes de sens que celles-là.

La Modératrice : Louis Lacroix, Cogeco.

M. Lacroix (Louis) : Bonjour, Mme Massé, M. Marissal. J'ai une question pour vous, pendant que vous êtes là, puis je vais avoir une question pour Mme Massé aussi. Vous avez dit, tout à l'heure, que la CAQ avait favorisé des amis. Dans quel but, à votre avis, est-ce que la CAQ distribue des contrats sans appel d'offres à des amis? Quel est le but de l'opération, à votre avis?

M. Marissal : Le but d'un gouvernement, quand il donne des contrats, c'est d'aller chercher le meilleur produit au meilleur tarif. Quand on le fait sans appel d'offres, derrière des portes closes, avec un petit groupe de gens, sous urgence sanitaire puis qu'en plus le contrat échoit à un ami personnel du premier ministre, on est en droit de se poser bien des questions sur la libre concurrence puis est-ce qu'on a acheté le bon produit.

Puis, vous savez, moi, je parle beaucoup aux médecins ces temps-ci, au boulot, puis dans le milieu les médecins sont nombreux à se poser des questions sur ce fameux PetalMD, là, qui a hérité du contrat — je cherche le mot en français, je vais me faire chicaner encore — ... le hub, le guichet, le guichet de distribution, là. Ce n'est probablement pas le bon terme. Les médecins, ils sont nombreux à se poser la question : Est-ce qu'on a vraiment acheté la bonne affaire? Bien, moi, je me pose la même question. Puis c'est pour ça que c'est détestable, des contrats sans appel d'offres.

M. Lacroix (Louis) : Et le but derrière le fait de donner un contrat à un ami, à votre avis, c'est quoi? C'est parce qu'il fallait aller vite ou il y a un but... ou il y a un objectif délibéré de vouloir faire profiter...

M. Marissal : Est-ce que c'est par facilité, M. Lacroix? Je ne le sais pas, honnêtement, je ne le sais pas, mais je sais que ça ne devrait jamais fonctionner comme ça. Est-ce que c'est parce qu'on appelle les gens qu'on connaît? Bien là, ça ne peut pas marcher comme ça, vous comprenez, avec le budget du gouvernement du Québec, si on fait juste appeler nos chums quand on a besoin de donner des contrats. On a joué dans ce film-là aussi, là, hein, de favoritisme puis de contrats gré à gré qui étaient donnés sans vérification, puis sans reddition de comptes, et sans que la probité première soit assurée. Ça fait que je pense que ce genre de contrats là ne devrait pas être donné par le gouvernement, certainement pas de cette façon-là.

Mme Massé : Certainement pas 15 milliards.

M. Marissal : 17.

Mme Massé : 17 au total, mais 15 en pandémie.

M. Lacroix (Louis) : Mme Massé, en tout cas, moi, je ne vous ai pas entendue réagir à Luce Daneau qui se présente pour le Parti conservateur, qui s'est présentée à deux reprises pour Québec solidaire. Comment vous expliquez qu'on puisse passer de la gauche à la droite de façon aussi marquée? Parce que c'est deux partis qui sont diamétralement opposés, là, en termes d'idéologies.

Mme Massé : Absolument, c'est le cas de le dire. Bien, écoutez, ça, pour moi, c'est très difficile à expliquer. Il faudrait questionner Mme Daneau. Parce que je pense que le projet de société porté par Québec solidaire est très, très clair. Alors, Mme Daneau a fait ses choix, je vous invite à la contacter pour qu'elle vous aide à comprendre comment cela est possible.

La Modératrice : M. Poinlane, Radio-Canada…

M. Lacroix (Louis) : Vous, est ce que vous la connaissez bien, Mme Daneau?

Mme Massé : Moi, je ne la connais pas vraiment, non. Je veux dire, oui, je l'ai croisée occasionnellement, mais je n'ai pas une connaissance spécifique de cette femme.

La Modératrice : M. Poinlane, Radio-Canada.

M. Poinlane (Pascal) : Oui.Concernant la hausse des tarifs d'Hydro-Québec. C'est sûr que les profits d'Hydro-Québec, bon, vont en dividendes et financent les programmes publics. Donc, en demandant, comme ça, le gel, est-ce que ce n'est pas un peu à l'encontre de ce que vous demandez, c'est un investissement en santé, et tout ça? Donc, on va se priver d'une partie de revenus qui, normalement, financent des programmes publics. Alors, j'essaie de mieux comprendre votre logique quand vous demandez ça.

Mme Massé : La logique est simple. C'est qu'à chaque mois ou à chaque deux mois, les Québécois et Québécoises paient leur hydroélectricité à un tarif qui là, depuis l'erreur causée par la CAQ en adoptant le projet n° 34, sous bâillon, fait en sorte que cette hydroélectricité-là qui est à nous, qu'on a déjà payée, qu'on paie de toutes sortes de façons et qui nous donne aussi des dividendes, comme vous avez raison... Mais ça, on le paie à chaque mois, chaque deux mois. Et lorsque c'est lié à l'inflation, bien, c'est là qu'est le problème.

On avait tout un mécanisme pour assurer qu'il n'y ait pas de choc tarifaire, qui fonctionnait bien, depuis plusieurs années, avec la Régie de l'énergie. La CAQ a décidé de mettre la hache là-dedans en disant que ça ne se peut pas, une augmentation de l'inflation... pas que ça ne se peut pas, mais que ça n'arrive jamais, une augmentation de l'inflation de plus de 2 %, que ceux qui pensent ça, ils vivent dans un monde imaginaire. Bien là, on l'a dans les dents, et c'est les Québécois et Québécoises qui, à chaque mois, ont à payer cette facture-là. Et, entre vous et moi, là, quand ton revenu, prenons le salaire minimum, par exemple, ne te permet même pas de vivre de façon adéquate, viable, bien, l'augmentation de 20 $, 30 $, 40 $ et des fois plus, parce que tu vis dans un logement mal isolé, c'est rendu invivable pour les gens.

Si le gouvernement du Québec a besoin, et je le sais qu'il en a besoin, d'argent pour poser des gestes de services publics comme améliorer le réseau de la santé, c'est... les Québécois et Québécoises, ce n'est pas par là, ce n'est pas par un nouvel impôt un peu déguisé, qui est l'augmentation des tarifs d'électricité, qu'on va y arriver, mais en utilisant d'autres chemins qui sont déjà utilisés au Québec, dont notamment des impôts plus progressifs, comme notre système d'imposition. C'est par là qu'il faut aller, pas en disant : On va aller taxer, ça ne paraîtra pas trop, et, comme ça, les gens ne verront pas qu'on augmente, dans les faits, les frais dans leur portefeuille.

M. Poinlane (Pascal) : Concernant les contrats de gré à gré, je ne sais pas si c'est M. Marissal, mais est-ce que... pour vous, avec la levée de l'urgence sanitaire, est-ce que ça risque de se résorber, cette tendance-là, par soi-même ou est-ce qu'il faut quelque chose de plus musclé, là?

M. Marissal : Bien, la chose plus musclée dont vous parlez et que j'appelle de tous mes vœux, c'est le travail des parlementaires ici. On doit être capables d'appeler les commissions parlementaires, on doit être capables de poser des questions, on doit être partie prenante des débats, et des décisions, et des discussions aussi. J'espère que ça va se résorber, à moins que le gouvernement Legault y ait tellement pris goût, là, parce que c'est vrai que, pour un gouvernement, c'est bien plus facile de gouverner par décrets. Mais moi, je l'ai dit puis je le redis, là, dans notre système parlementaire, un gouvernement qui est majoritaire a déjà beaucoup de pouvoirs, beaucoup de pouvoirs. Alors, vouloir renier les contre-pouvoirs que l'opposition exerce, c'est antidémocratique. Alors, j'espère bien que, cette fois-ci, ils vont avoir compris le message et qu'ils vont, justement, se retenir un peu, là, se garder une petite gêne avec les contrats de gré à gré.

La Modératrice : Olivier Bossé, Le Soleil.

M. Bossé (Olivier) : M. Marissal, est-ce que vous dites que la CAQ, en santé, va aller plus vers le privé pour perdre moins de votes à Éric Duhaime? Est-ce que c'est ce que j'ai compris, ce que vous disiez tantôt?

M. Marissal : Ah! il y a un petit concours à droite, hein, on le voit bien. Puis c'est l'histoire qui se répète. Mario Dumont avait poussé Charest vers la droite aussi, rappelez-vous, hein, Mario Dumont, là, qui avait presque pris le pouvoir, en 2007, puis il avait poussé, évidemment, Charest vers le privé en santé, parce que c'était une des marottes de l'ADQ, l'ADQ qui a donné, par seconde génération, la CAQ. Ça fait qu'on n'est pas bien, bien loin, là, on est dans le même schème de pensée, les mêmes lubies néolibérales. Puis effectivement, M. Legault, son ministre de la Santé ont déjà manifesté certaines propensions à aller vers le privé, vers des contrats de performance. Ça revient souvent, hein? C'est un discours, là, d'hommes d'affaires, de gestionnaires.

Mais là ils ne sont pas en train de gérer une shop, là, hein, ils ne sont pas là pour faire du profit, là. Puis la santé, au Québec, ce n'est pas pour faire du profit. Puis c'est ça qui va arriver. Si on ouvre la porte encore plus au privé, il y a du monde qui vont faire bien, bien de l'argent. Ce n'est pas pour rien que les Power Corporation, les Great-West et toutes les compagnies d'assurance de ce monde sont tellement intéressées par le privé. Il y a de l'argent à faire là, là, et c'est à l'infini, l'argent qu'il y a à faire là.

Mais pour moi et pour nous, ça, c'est bien, bien clair... Je parlais, hier, avec notre candidate dans Saint-François, Mélissa Généreux, qui est une médecin de santé publique, dévouée au système public, puis, honnêtement, entre vous et moi, là, elle s'arrachait les cheveux aussi, là, de lire les déclarations de Christian Dubé, là. Le système de santé, au Québec, ce n'est pas une machine à lait pour le grand capital, là. C'est pour soigner le monde.

La Modératrice : M. Robillard, Le Devoir.

M. Robillard (Alexandre) : Oui, bonjour. M. Marissal, pourquoi, selon vous, le nombre de contrats de gré à gré crée-t-il la perception qu'il y a du favoritisme dans l'octroi?

M. Marissal : Parce que tout ce qui n'est pas éclairé est sombre, hein? Si vous fonctionnez dans l'opacité, ça crée une impression de noirceur, de gris, en tout cas, au moins, là. Et c'est pour ça qu'on s'est donné toutes sortes de balises, au Québec, dans un État moderne, depuis des années, pour éviter ça, pour éviter ça. Parce que, la nature humaine étant ce qu'elle est, à un moment donné, c'est facile, hein, d'appeler un chum, de... Puis on les connaît, les ministres de la CAQ, hein, ils ont tous le bottin, là, du Conseil du patronat, là, puis ils aiment ça, d'ailleurs, là, faire du «name dropping» de tous les noms de boss, là, à travers la planète. Mais ils travaillent pour le monde d'ici, là, ils ne travaillent pas pour leurs chums à la bourse, là. C'est ça, la grande, grande différence qu'ils doivent comprendre.

M. Robillard (Alexandre) : Si vous dites qu'il y a une apparence de favoritisme, à quelles fins ça s'orchestre de cette façon-là? Qu'est-ce que c'est, l'intérêt du gouvernement à favoriser...

M. Marissal : Moi, je pense que c'est juste moins de trouble de fonctionner de même, ne pas avoir de comptes à rendre puis de donner des contrats aux gens qu'on connaît. Prenez-moi pas... prenez-moi au mot pour une fois, là, je vais le faire juste une fois. Je vais vous citer Jean Chrétien qui s'était fait pogner, à un moment donné, dans une affaire assez douteuse, qui avait appelé quelqu'un de la BDC, puis sa réponse avait été : «You call who you know.» Bon, ça a le mérite d'être très clair, là, tu appelles les gens que tu connais. Bien, est-ce que c'est ça qui se passe avec la CAQ? Est-ce que, parfois, on se dit : Bien, on va aller plus vite, on va gagner du temps, hein, on est efficaces, nous autres, on est efficients, là, on va aller plus vite? Mais c'est parce que notre système ne fonctionne pas comme ça, puis il ne faut pas qu'il fonctionne comme ça.

La Modératrice : Cathy Senay, CBC.

Mme Senay (Cathy) : Good morning. The fact that the QuébecAuditor General will investigate… she's investigating for the contracts without a tender process… calls for tenders, I mean, it's not enough for you right now? You don't feel satisfied with this investigation going on?

M. Marissal : Well, don't get me wrong, I have total confidence in the Auditor General, total confidence. And she's telling me that she has the staff necessary to do the job. So, again, I have total confidence with the Auditor General. The problem is the timing. The time frame means that the biggest report will come after the end of the session, which means that she won't be able to table her report here, in front of the National Assembly. So, you won't, and I won't, and the people of Québec won't see it before the next election, meaning, probably, November 2022. That will be a long time after the end of the game. And I think that, after four years of CAQ, after two years of pandemic, after two years of state of emergency, the people in Québec are entitled to know how this Government managed their money.

Mme Senay (Cathy) : But you said in French that you're convinced that the Government went, and took advantage of the situation, and put on the «piédestal» some friends. Are you sure of that or you think it is possible?

M. Marissal : Well, it's certainly possible, because it's easier to govern this way, it's easier to give contracts without any proper process and transparency. It's easier. And the fact is: $17 billion in four years... not even four years, three years and a half, $13 billion just during the pandemic. I mean, facts are facts. They are giving contracts way too easier, without any transparency, without any debate here in the National Assembly. So, basically, what I'm saying is we should not work this way with public money. That's it.

La Modératrice : Une dernière question en anglais.

Mme Senay (Cathy) : I just would like to add one question in English, and then Ian has some questions. You're stuck with the Public Health emergency until the bill of Christian Dubé is adopted. So, what can you do, really? He doesn't need you and the Opposition to adopt the bill. So, you're stuck with it, so what can you change to the situation?

M. Marissal : Well, we know that we have all kinds of tools. Since a draft bill will be debated in commission, we have all kinds of tools available, and I will not refrain to use these tools if I feel that this is a bad draft bill. The thing is we need transparency back, in this Parliament, and I will work to make sure that it is the case with this bill.

La Modératrice : En terminant.

M. Wood (Ian) : So, this bill to repeal the state of emergency, is that necessary, in the sense that you don't need to table a bill… They're going to keep something in it, maybe. Is there anything that the Government could keep from the emergency measures that is justifiable, in your opinion?

M. Marissal : It depends on the situation. I mean, if, and I hope this will not be the case, but if a sixth wave hits Québec and probably the rest of the world as well, probably that it will be justified to go back to some measures. But the thing is we cannot allow this Government to take decisions behind closed doors, with just a small group of people and without any sort of transparency. That's my message today. I will receive this draft bill, I will study this draft bill, like any other draft bills, in good faith, but if they come back with this idea that they will take control of this place, I'm out.

Mme Massé : And that's why, last fall — I think it was last fall — Québec solidaire said that it's time to put an end at the «mesures sanitaires», at the law, with this kind of bill. Because we understand that, in an emergency time, Government needs some «leviers», some tools, but, as Vincent said, it cannot be, now, forever. And that was a problem we raised last Fall. And he decided to do it not last Fall, this week... or next week... this week, I think so. So, that's a problem, we have the sanitary law too long. Mr. Dubé should have change it before today. But we are going to look at it and, of course, we'll be loud about that.

La Modératrice : Merci beaucoup.

(Fin à 11 h 9)

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