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Version finale

14e législature, 1re session
(7 novembre 1916 au 22 décembre 1916)

Le mardi 5 décembre 1916

Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.

Présidence de l'honorable A. Galipeault

La séance est ouverte à 3 heures.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Rapports de comités:

M. Létourneau (Québec-Est): J'ai l'honneur de présenter à la Chambre le onzième rapport du comité permanent des règlements. Voici le rapport:

Votre comité est d'opinion que la pétition de l'Union nationale française et de refuge, demandant de voter une loi amendant sa charte, est régulière et suffisante, que le bill qui a été déposé par le pétitionnaire est régulier et conforme à la pétition et à l'avis qui en a été donné, que cette pétition n'a pas été régulièrement et suffisamment annoncée, et que cette irrégularité ne peut cependant porter préjudice aux tiers. En conséquence, votre comité recommande de suspendre les règles à l'égard de cette irrégularité et de suspendre aussi la règle 516 afin que le bill puisse être présenté.

Adopté.

M. Francoeur (Lotbinière): J'ai l'honneur de présenter à la Chambre le douzième rapport du comité permanent des bills privés en général. Voici le rapport:

Votre comité a décidé de rapporter le bill 52 constituant en corporation la ville de Sainte-Thérèse avec des amendements.

L'honorable M. Gouin (Portneuf): J'ai l'honneur de présenter à la Chambre le neuvième rapport du comité permanent des bills publics en général. Voici le rapport:

Votre comité a décidé de rapporter les bills suivants avec des amendements:

- bill 64 amendant la loi constituant en corporation l'Union Saint-Joseph de Saint-Hyacinthe;

- bill 127 concernant les limites de la municipalité scolaire de Cartierville.

Union nationale française et de refuge

M. Lemieux (Gaspé) demande, appuyé par le représentant de Frontenac (M. Grégoire), la permission de présenter le bill 139 amendant la charte de l'Union nationale française et de refuge.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

 

Dépôt de documents:

Rapport des compagnies de chemins de fer

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) dépose sur le bureau de la Chambre les états, les rapports et les statistiques des compagnies de chemins de fer jusqu'au 30 juin 1916, en conformité des articles 6550 et 6252 des statuts refondus, 1909. (Document de la session no 30)

Rapports des chemins de fer subventionnés

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) dépose sur le bureau de la Chambre les rapports pour l'année expirant le 30 juin 1916, indiquant les recettes et les frais d'exploitation de différentes compagnies de chemins de fer, subventionnées par la Législature de Québec, et adressés à l'honorable ministre des Travaux publics de la province de Québec, en conformité de l'article 1438 des statuts refondus, 1909. (Document de la session no 31)

Subsides

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.

Adopté.

 

En comité:

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas cent mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour service forestier (comprenant l'inspection et la classification des terres), pour l'exercice finissant le 30 juin 1918.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) explique les raisons pour lesquelles plus de cent mille acres de terres de la couronne ont été concédés durant la dernière année fiscale. Les terres ainsi rétrocédées ont été vendues, pour la plupart, il y a plusieurs années.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) discute cette résolution.

La résolution est adoptée.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose: 2. Qu'un crédit n'excédant pas cent mille piastres soit ouvert à Sa Majesté pour cercles agricoles, encouragement à l'agriculture en général, y compris subsides à la compagnie de chemin de fer de la rive sud, en vertu de la loi 63 Victoria, chapitre 2, concours d'abatis, etc., pour l'exercice finissant le 30 juin 1918.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) explique l'augmentation de $15,000 qu'il y a sur la somme votée l'an dernier. Cette année, dit-il, le gouvernement a à son service cinq nouveaux conférenciers agricoles et 16 nouveaux agronomes de districts qui s'occupent constamment de seconder, de guider quand il y a lieu, les efforts des cultivateurs. Ces agronomes sont tous des gradués des écoles d'Oka et de Sainte-Anne de la Pocatière de même que du collège Macdonald.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Sont-ils tous compétents?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Quelques-uns se spécialisent dans une certaine branche, d'autres sont d'une compétence générale.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Et M. Gareau?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Il est d'une compétence générale1.

M. Turcotte (Lac-Saint-Jean) demande si le gouvernement fait quelque chose pour protéger les cultivateurs contre la mauvaise foi des commerçants qui vendent les grains de semence.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Le gouvernement n'a jamais eu de plaintes à ce sujet.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): N'y a-t-il pas eu quelques réformes apportées dans les cercles agricoles depuis deux ans?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Seulement des petites réformes ont été apportées dans l'administration de ces cercles. La loi est restée la même depuis que ces cercles existent. On améliore seulement dans l'administration des cercles.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Le crédit à l'agriculture est-il suffisant pour pourvoir à tous les besoins?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Si l'on pouvait trouver d'autres ressources, on n'aurait pas de peine à les employer. Nous voudrions faire plus, mais nous n'avons pas assez d'argent. Le ministère a dépensé tous ses crédits, soit $510,000, même $100,000 de plus pour l'agriculture.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Comptons-nous, là-dessus, les subsides du gouvernement fédéral?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Oui.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Comment se fait-il que le trésorier de la province accuse, à la fin de l'exercice financier, un surplus de $200,000 quand le ministre de l'Agriculture admet que son département n'est pas suffisamment pourvu? Pourquoi le ministre vient-il déclarer ici que l'on ne peut faire plus pour l'agriculture pour la raison que l'on n'a pas assez d'argent, quand, chaque année, le trésorier provincial s'efforce de venir faire miroiter à nos yeux ses énormes surplus? C'est là double jeu du gouvernement qui, pour faire miroiter aux yeux du public un prétendu surplus, rogne sur les sommes que l'on devrait employer, en ces temps où l'on prêche de toute façon la culture intensive, le retour à la terre et l'encouragement à l'agriculture. On lance des surplus, on les étale dans les journaux à la dévotion du gouvernement; ensuite, ces journaux amis entonnent la louange du gouvernement, sage administrateur, et cet éloge se fourvoie jusque dans les gazettes de Montréal.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Si le chef de l'opposition savait que je me sers plus qu'il ne pense de ce surplus pour l'agriculture au moyen des mandats spéciaux! Ce que demande le chef de l'opposition, c'est précisément ce que nous avons fait au cours de l'année. Quand nous nous sommes rendu compte du surplus dont nous pouvions disposer, nous avons affecté à l'agriculture une somme additionnelle de $100,000.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est précisément ce que je voulais faire dire au ministre. On restreint des dépenses jusqu'à la fin de l'année fiscale et ensuite on adopte des mandats spéciaux. Avant les élections, on ne prend pour l'agriculture que juste ce qu'il faut, puis, après, l'on va demander au trésorier provincial des mandats spéciaux pour ce qui reste à faire encore pour l'agriculture. Avant les élections, on laisse au trésorier le soin de confectionner son surplus. Voilà une manière d'administrer indigne des gens sérieux et qui est de plus injuste pour la Chambre à qui on demande exprès des crédits insuffisants. Cette méthode de mandats spéciaux est dangereuse, condamnée et condamnable.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Le moyen est peut-être irrégulier, mais le gouvernement en prend la responsabilité. Et il est nécessaire. Jamais on ne peut connaître à l'avance le chiffre exact du revenu.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): N'empêche qu'on voit ce que valent les prétendus surplus dont le gouvernement provincial fait si grand état.

Le ministre de l'Agriculture a-t-il aussi eu connaissance d'un discours prononcé par M. Fortier, ancien président de la Chambre de commerce de Montréal, pour appuyer une résolution demandant au gouvernement de favoriser la colonisation et l'agriculture d'une façon générale? C'est à l'occasion de la réunion de la Chambre de commerce de Montréal, le 22 novembre dernier, que M. Adélard Fortier a prononcé cette allocution qui a été citée aussi dans Le Devoir:

"M. Fortier rappelle que l'agriculture est à la base de toute prospérité, même de celle des villes les plus industrielles, et se demande ce que nous réserve l'avenir si nous ne donnons sur-le-champ une aide intelligente et adéquate aux agriculteurs. Il constate que la rétribution du capital engagé dans l'agriculture est dérisoire, que les cultivateurs languissent et se trouvent le plus ordinairement dans l'incapacité d'établir leurs fils, d'où désertion des campagnes. Il faut de toute nécessité, et sans surseoir, remédier à cette situation, sous peine d'infliger à toutes les couches de la société des maux inimaginables.

"Tout en se défendant toute critique politique, l'orateur constate l'insuffisance des crédits accordés à l'agriculture. Sur un budget de 9 millions, la province n'affecte que $370,000 à l'administration de l'agriculture. M. Fortier voudrait que ce chapitre portât un million ou un million et demi."

Le ministre a-t-il eu connaissance de cet article? Et qu'en pense-t-il? M. Fortier avait-il raison?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Il avait raison en ce sens que l'on ne donnait pas suffisamment pour l'agriculture. Mais je ne suis pas prêt de dire qu'il avait raison sur les autres points. Le fait est que nous n'avons pas assez d'argent pour répondre aux besoins de l'agriculture.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Mais le surplus? Le fait est que je doute fort maintenant que ce surplus soit plutôt fictif. Si l'on prenait la peine de faire un examen des comptes publics, on trouverait que ce surplus est plutôt fictif. C'est pour cette raison que l'on ne peut dépenser plus pour l'agriculture.

Au sujet des sociétés d'agriculture, le gouvernement devrait accorder des primes plus considérables et faire une meilleure répartition des prix dans les expositions régionales qu'elles tiennent en certaines régions, comme à Sainte-Scholastique, pour n'en citer qu'une.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): On a tâché toujours d'accorder des prix pour encourager autant que possible les cultivateurs à exposer, et ces prix, jusqu'à présent, ont semblé les satisfaire.

La résolution est adoptée.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose: 3. Qu'un crédit n'excédant pas cinq cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour Société d'horticulture, Québec, pour l'exercice finissant le 30 juin 1918.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): La Société d'horticulture, qu'est-ce que c'est que cela?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) donne des explications au chef de l'opposition.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) pose d'autres questions au ministre de l'Agriculture concernant cette Société.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Cette Société n'a pas actuellement d'existence régulière, mais elle est en train de se réorganiser, et, d'année en année, on s'attend à sa résurrection.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Il est bien étrange que l'on vienne se plaindre que l'on manque d'argent pour l'agriculture et que l'on vote chaque année, depuis trois ans, un montant pour une société qui n'existe pas. En quoi se résume, en somme, cette Société?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) donne des explications sur la Société.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) questionne de nouveau le ministre.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Cette Société possède encore son président, qui est M. I. Campbell, mais il n'y a plus de membres. Elle a cessé de fonctionner à cause de l'Exposition provinciale de Québec.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Alors, la Chambre vote tous les ans des crédits pour une société qui n'existe pas?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): La Société s'attend, d'année en année, de se réorganiser, et on laisse sur les crédits la somme qu'on lui allouait autrefois parce qu'elle pourrait bien un jour ressusciter.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Où va cet argent que l'on vote à une société qui n'existe pas?

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Cet argent retourne au Trésor de la province et on le réclame ensuite pour d'autres sociétés agricoles, et cela, par mandats spéciaux. Mais il n'est pas exact de dire que la Société d'horticulture de Québec n'existe pas, puisqu'elle s'attend, d'un jour à l'autre, d'avoir besoin de ce crédit.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Que le ministre avoue donc que cette Société n'existe pas, qu'elle n'a actuellement que son président, et qu'elle n'a plus un seul membre. Que le ministre avoue donc que cet argent qu'on lui vote retourne à des petits cadeaux à des favoris du département.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine) proteste contre le terme "petits cadeaux".

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Si ce n'est pas "petits cadeaux", c'est autre chose. Le gouvernement a tout un vocabulaire officiel de convention pour ces choses-là. C'est comme "licence" au lieu de "taxe" dans le langage du trésorier.

Il demande au ministre si les crédits que l'on vote pour l'horticulture sont pris à même les subsides fédéraux.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Tout l'argent que l'on vote pour cette branche de l'agriculture est pris à même les subsides fédéraux (sic).

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Pour ce qui est important, on prend sur les subsides fédéraux, mais, pour une société qui n'existe pas, on peut se permettre de prendre à même les octrois provinciaux parce que l'on a des comptes moins sévères à rendre sur l'emploi de l'argent. Voilà où l'on en est. Pendant que l'on prêche partout la culture intensive, le retour à la terre, on n'a pas un sou à voter pour l'horticulture; on se contente de prendre tout à même ce qu'Ottawa nous accorde. Au moins, que l'on ait la décence de l'indiquer dans les rapports.

L'honorable M. Caron (Îles-de-la-Madeleine): Le chef de l'opposition veut créer l'impression que l'encouragement donné à l'agriculture par le gouvernement provincial est dû en majeure partie au subside fédéral. Ce subside est à peine d'un peu plus de $100,000, tandis que le gouvernement provincial consacre à l'agriculture, cette année par exemple, en tout, plus de $600,000.

(Le premier ministre entre à l'Assemblée.)

M. Sauvé (Deux-Montagnes) saisit le premier ministre de la question relative au crédit accordé à la Société d'horticulture de Québec qui, comme l'on vient de le découvrir, n'existe pas. Il lui expose les faits comme ils viennent d'être démontrés et demande si le premier ministre est prêt à voter ce crédit.

La résolution est adoptée.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose: 4. Qu'un crédit n'excédant pas cinq cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour la Société d'agriculture et d'horticulture de Montréal, pour l'exercice finissant le 30 juin 1918.

L'étude de ce crédit est remise à une prochaine séance.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose: 5. Qu'un crédit n'excédant pas cinq cents piastres soit ouvert à Sa Majesté pour la pomiculture et la culture fruitière dans la province de Québec, pour l'exercice finissant le 30 juin 1918.

L'étude de ce crédit est remise à une prochaine séance.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté trois résolutions et demande la permission de siéger de nouveau. Lesdites résolutions sont lues deux fois et adoptées par la Chambre.

La séance est levée à 5 heures.

__________

NOTE

 

1. M. Sauvé fait allusion au fait que M. Gareau, conférencier du ministère de l'Agriculture, avait publié une lettre ouverte critiquant la politique agricole du ministre Caron. Voir L'Événement, 27 novembre 1916, p. 1.