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Version finale

15e législature, 1re session
(10 décembre 1919 au 14 février 1920)

Le mardi 10 février 1920

Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.

Présidence de l'honorable J.-N. Francoeur

La séance est ouverte à 3 heures.

M. l'Orateur: À l'ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!

 

Rapports de comités:

M. Godbout (Beauce): J'ai l'honneur de présenter à la Chambre le vingtième rapport du comité permanent des bills privés en général. Voici le rapport:

Votre comité a décidé de faire rapport que le préambule du bill 95 décrétant l'expropriation, par la cité de Montréal, de certains lots appartenant à Jean-Baptiste Brouillette, de Montréal, et fixant les conditions de telles expropriations, ainsi que certains changements à faire au cadastre au sujet de ces lots, n'a pas été prouvé à sa satisfaction, la preuve apportée ayant été contradictoire.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): J'ai l'honneur de présenter à la Chambre le dix-septième rapport du comité permanent des bills publics en général. Voici le rapport:

Votre comité a décidé de rapporter, sans amendement, le bill 203 autorisant le Collège des chirurgiens dentistes de la province de Québec à admettre Z.-Armour Côté à l'exercice de l'art dentaire.

Palais de justice de Montréal

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 244 concernant la construction d'une annexe au palais de justice de Montréal soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Compagnies et corporations

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions concernant certaines compagnies et corporations.

Adopté.

Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolutions et que Son Honneur en recommande la prise en considération.

 

En comité:

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose: 1. Que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse faire amender, remplacer et abroger des tarifs de droits et honoraires payables lors de la demande de lettres patentes et de lettres patentes supplémentaires, ainsi qu'à l'occasion de tout acte qui devra être fait par le secrétaire de la province, par le département qu'il préside ou par un officier de ce département, de même que par le lieutenant-gouverneur ou par une personne quelconque en vertu de la première partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions; que, s'il le juge à propos, le lieutenant-gouverneur en conseil puisse graduer ce tarif des droits suivant la nature de la compagnie, le chiffre de son capital-actions ou les autres caractères qu'elle présente; que les lettres patentes ou lettres patentes supplémentaires accordées en vertu de la première partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions ne soient livrées qu'après que tous les droits exigibles auront été dûment payés; et que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse également prescrire de temps à autre la manière dont les lettres patentes et les lettres patentes supplémentaires seront enregistrées, et déterminer toutes autres matières et formalités pour assurer la mise à exécution de la première partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions.

Adopté.

2. Que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse faire amender, remplacer ou abroger des tarifs de droits et honoraires payables lors de l'accomplissement de tout acte qui devra être fait par le secrétaire de la province, par le département qu'il préside ou par un officier de ce département, de même que par le lieutenant-gouverneur ou par une personne quelconque, en vertu de la deuxième partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions; que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse également, de temps à autre, prescrire et déterminer toutes autres matières et formalités pour assurer la mise à exécution de la deuxième partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions; et que les actes qui doivent être faits par le secrétaire de la province ou les certificats ou documents qu'il doit émettre en vertu de la deuxième partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions ne le soient qu'après que tous les droits exigibles auront été dûment payés.

Adopté.

3. Que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse faire amender, remplacer ou abroger des tarifs de droits et honoraires payables lors de l'accomplissement de tout acte qui doit être fait par le secrétaire de la province, par le département qu'il préside ou par un officier de ce département, de même que par le lieutenant-gouverneur ou par une personne quelconque, en vertu de la troisième partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions; que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse également, de temps à autre, prescrire et déterminer toutes autres matières et formalités pour assurer la mise à exécution de la troisième partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions; et que les actes qui doivent être faits par le secrétaire de la province ou les certificats ou documents qu'il doit émettre en vertu de la troisième partie de la loi qui accompagne les présentes résolutions ne le soient qu'après que tous les droits exigibles auront été dûment payés.

Adopté.

4. Que les frais d'inspection des affaires d'une compagnie ou d'une corporation, faite en vertu des dispositions des articles 6030, 6071a et 6088c des statuts refondus, 1909, tels qu'édictés par la section 1 de la loi qui accompagne les présentes résolutions, soient à la charge du requérant, à moins que le secrétaire de la province n'ordonne qu'ils soient à la charge de la compagnie ou de la corporation dont les affaires ont été ainsi inspectées.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions, lesquelles sont lues deux fois et adoptées.

Il est ordonné que lesdites résolutions soient renvoyées au comité plénier chargé de l'étude du bill 15 concernant certaines compagnies et corporations.

Terres publiques et bois et forêts

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolution relative au bill 29 amendant les statuts refondus, 1909, relativement aux terres publiques et aux bois et forêts.

Adopté.

Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolution et que Son Honneur en recommande la prise en considération.

 

En comité:

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose: Que toutes les dépenses de la Commission de géographie de Québec, qui sera créée en vertu de la loi qui accompagne la présente résolution pour l'accomplissement des devoirs qui lui seront assignés, soient payées à même le fonds consolidé du revenu, après leur approbation par le ministre des Terres et Forêts.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté une résolution, laquelle est lue deux fois et adoptée.

Il est ordonné que ladite résolution soit renvoyée au comité plénier chargé de l'étude du bill 29 amendant les statuts refondus, 1909, relativement aux terres publiques.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose que le bill 29 amendant les statuts refondus, 1909, relativement aux terres publiques et aux bois et forêts soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Mercier fils (Châteauguay) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Honoraires des officiers de justice

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 250 amendant les statuts refondus, 1909, relativement aux honoraires de certains officiers de justice.

Adopté.

Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolutions et que Son Honneur en recommande la prise en considération.

 

En comité:

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose: 1. Que les exécutions sur lesquelles les shérifs sont autorisés à charger une commission ou rémunération de 2.5 % comprennent les ventes d'immeubles faites par les curateurs aux cessions de biens nommés suivant l'article 868 du Code de procédure civile ou par les liquidateurs suivant les articles 7552 et suivants des statuts refondus, 1909, et que ces curateurs et liquidateurs soient tenus de charger telle commission pour le compte du shérif et de lui en faire remise.

Adopté.

2. Que la commission de 2.5 % que le shérif est autorisé à charger et retenir sur les ventes d'immeubles faites par lui ou par les curateurs et les liquidateurs soit calculée sur le montant réalisé par la vente, pourvu que la somme d'argent perçue excède le montant de la première hypothèque grevant l'immeuble vendu, et sur la moitié de la valeur indiquée au rôle d'évaluation municipale si cette somme n'excède pas ce montant ou s'il n'y a pas d'hypothèque; et que, néanmoins, si le montant réalisé par la vente de l'immeuble, bien que n'étant pas de la totalité de la première hypothèque, est plus élevé que la moitié de l'évaluation municipale, la commission soit prélevée sur le montant réalisé.

Adopté.

3. Que nul transport de biens ou de droits immobiliers fait par un curateur ou un liquidateur, comme susdit, ne sera valide et ne constituera un titre, si la commission ou rémunération payable au shérif en vertu de l'article 3492 des statuts refondus, 1909, n'a pas été payée, et que le régistrateur de toute division d'enregistrement devra refuser d'enregistrer tel transport à moins que la personne qui requerra l'enregistrement du titre ne produise, pour y être gardé en dépôt, un certificat du shérif du district dans lequel est situé l'immeuble affecté, à l'effet que la commission ou rémunération ci-dessus lui a été payée.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Est-ce que la position de shérif est bien nécessaire?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Il a été souvent question de fusionner la position de shérif avec celle de protonotaire, mais je crois que la position de shérif est très importante, qu'elle est nécessaire à l'administration de la justice.

Il a l'intention de faire donner une commission au shérif pour les ventes d'immeubles faites par lui ou le curateur d'une faillite.

M. Renaud (Laval): Quelle commission donnerez-vous?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Deux et demi pour cent.

M. Renaud (Laval): Alors, ce sera deux commissions que les créanciers auront à payer, la commission du curateur et celle du shérif. Je n'ai pas d'objection à ce que l'on augmente les salaires des shérifs si leur salaire n'est pas suffisant, mais on l'augmente aux dépens des créanciers.

M. Boisseau (Saint-Hyacinthe): Est-ce que vous paierez une commission dans les faillites judiciaires?

L'honorable M. Taschereau (Montmorency): Non.

La résolution est adoptée.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions, lesquelles sont lues deux fois et adoptées.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) demande la permission de présenter le bill 250 amendant les statuts refondus, 1909, relativement aux honoraires de certains officiers de justice.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Emprunts spéciaux

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 247 pourvoyant à certains emprunts spéciaux à courte échéance pour diverses fins.

Adopté.

Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolutions et que Son Honneur en recommande la prise en considération.

 

En comité:

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose: 1. Que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse autoriser le trésorier de la province à contracter un ou des emprunts qui ne devront pas excéder, en totalité, la somme de vingt millions de piastres.

Adopté.

2. Que ledit emprunt ou lesdits emprunts puissent être effectués au moyen d'obligations ou rentes inscrites émises pour un terme n'excédant pas 15 ans et à un taux d'intérêt ne dépassant pas 6 % par année, faites dans la forme et pour le montant que le lieutenant-gouverneur en conseil déterminera et payables en la manière et aux endroits qu'il indiquera.

Adopté.

3. Que le produit dudit emprunt ou desdits emprunts doive être employé: (a) au paiement des emprunts temporaires s'élevant à dix millions de piastres, autorisés par la section 1 de la loi 5 George V, chapitre 2, au fur et à mesure qu'ils deviendront dus; (b) à rembourser au fonds consolidé du revenu les avances qui ont été faites ou qui pourront être faites à l'avenir à même ce fonds par le trésorier de la province, de temps à autre, pour exécuter les travaux autorisés par les lois 2 George V, chapitre 23, et 3 George V, chapitre 21, telles qu'amendées par les lois 4 George V, chapitre 19, 5 George V, chapitre 3, 7 George V, chapitre 9, 9 George V, chapitre 6, et 10 George V, chapitre (insérer ici le numéro du chapitre du bill 36); (c) à faire des avances pour les fins de colonisation visées par la loi 10 George V, chapitre (insérer ici le numéro du chapitre du bill 37) en attendant que l'emprunt qui a été autorisé par cette dernière ait été fait.

Adopté.

4. Que le produit de tous emprunts permanents qui pourront être faits à l'avenir, en vertu des lois ci-dessus mentionnées, doive être employé, tout d'abord, au rachat des emprunts spéciaux autorisés par la loi qui sera basée sur les présentes résolutions.

Il explique que la situation monétaire est telle que, pour une courte période, le gouvernement veut être autorisé à négocier les emprunts que le lieutenant-gouverneur en conseil décidera afin de pouvoir faire face à des échéances, afin d'éteindre des parties de la dette et, enfin, pour négocier les emprunts nécessaires à l'exécution de la politique de colonisation que le député d'Arthabaska (l'honorable M. Perrault) a si habilement énoncée à la Chambre la semaine dernière.

La résolution est adoptée.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions, lesquelles sont lues deux fois et adoptées.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) demande la permission de présenter le bill 247 pourvoyant à certains emprunts spéciaux à courte échéance pour diverses fins.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Taxes sur les corporations, compagnies, personnes,
raisons sociales et associations commerciales

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour prendre en considération un projet de résolutions relatives au bill 246 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les taxes sur les corporations, compagnies, personnes, raisons sociales et associations commerciales.

Adopté.

Il informe alors la Chambre qu'il est autorisé par Son Honneur le lieutenant-gouverneur à soumettre ledit projet de résolutions et que Son Honneur en recommande la prise en considération.

 

En comité:

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose: 1. Que, par la loi qui accompagne les présentes résolutions, les articles 1345 à 1359 inclusivement des statuts refondus, 1909, soient interprétés de manière à assujettir au paiement de la taxe exigible en vertu desdits articles toutes les corporations, compagnies, personnes, raisons sociales et associations y mentionnées quoique leurs opérations ne soient pas d'une nature strictement commerciale.

Adopté.

2. Que la loi qui accompagne les présentes résolutions s'applique à toutes les taxes qui seront dues et exigibles à l'avenir sous l'empire des dispositions de la section dix-huitième du chapitre quatrième du titre quatrième des statuts refondus, 1909 (articles 1345 à 1359 inclusivement), ainsi qu'à toutes les corporations, compagnies, sociétés, personnes, raisons sociales et associations ayant fait affaire dans cette province avant l'entrée en vigueur de la loi qui accompagne les présentes résolutions, de la même manière et avec le même effet que si ladite loi avait alors été en vigueur.

Adopté.

 

Résolutions à rapporter:

Le comité fait rapport qu'il a adopté plusieurs résolutions, lesquelles sont lues deux fois et adoptées.

Il est ordonné que lesdites résolutions soient renvoyées au comité plénier chargé de l'étude du bill 246 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les taxes sur les corporations, compagnies, personnes, raisons sociales et associations commerciales.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 246 amendant les statuts refondus, 1909, concernant les taxes sur les corporations, compagnies, personnes, raisons sociales et associations commerciales soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté. Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Mitchell (Richmond) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Loi des accidents du travail

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 234 amendant la loi des accidents du travail de la province de Québec soit maintenant lu une deuxième fois.

Adopté. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose que la Chambre se forme immédiatement en ledit comité.

Adopté.

 

En comité:

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Les ouvriers vont demander au gouvernement d'augmenter l'indemnité de $2,500 et $3,000. Je ne crois pas qu'il y ait objection de la part du patron, et le but de cette loi est de porter à $3,000 le montant de l'indemnité.

M. Cannon (Québec-Centre): On pourrait peut-être spécifier dans la loi que, lorsque l'ouvrier qui est victime d'un accident n'est pas le principal soutien de sa famille, l'indemnité devrait être moins considérable. C'est un juge de la Cour supérieure qui m'a fait remarquer cela.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): La loi est bonne, à mon avis. Elle est meilleure que celles des autres provinces, elle est facile d'application et ne laisse pas trop de discrétion au juge. Je crois que nous ne devrions pas la changer.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Cette loi rencontre-t-elle l'approbation du Conseil des métiers et du travail et du Conseil national des ouvriers?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Je suis convaincu que oui. M. Francq est à Québec en ce moment et nul doute que ce projet rencontrera l'assentiment de la classe ouvrière.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Ce n'est pas cela que je demande au ministre. Les ouvriers nous envoient tous les ans des délégations. On leur promet beaucoup de choses. Je veux savoir si le ministre a l'approbation des ouvriers.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Le gouvernement ne soumet pas ses projets de loi aux ouvriers, mais je puis rassurer la conscience de l'honorable chef de l'opposition. S'il vote pour ce projet, il n'aura aucun reproche des ouvriers.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Le ministre est plus avocat que ministre du Travail. Il dit que M. Francq, représentant des ouvriers, est à Québec. Lui a-t-il soumis ce projet?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Oui, nous en avons causé ensemble.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Et M. Francq l'a approuvé?

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Oui.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Très bien, c'est ce que je voulais savoir.

M. Gault (Montréal-Saint-Georges): Des dispositions devraient être prises afin que les hôpitaux qui s'occupent des ouvriers blessés aient le pouvoir de charger deux dollars par jour pour ce faire, que ce soit à l'ouvrier ou à l'employeur.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse): Dans la majorité des cas, l'employeur envoie son employé à l'hôpital et devient responsable des coûts de traitement1.

Le comité étudie le bill et en fait rapport sans amendement.

L'honorable M. Galipeault (Bellechasse) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

École des hautes études commerciales

L'honorable M. David (Terrebonne) propose, selon l'ordre du jour, que le bill 40 amendant la loi constituant en corporation l'École des hautes études commerciales soit maintenant lu une deuxième fois.

Notre but est d'intéresser les hommes d'affaires à l'oeuvre que poursuit cette école et aux étudiants qui en sortent en les invitant à faire partie de ce conseil d'honneur.

M. Beaudry (Verchères): Adopté, adopté.

La proposition est adoptée. Le bill est renvoyé au comité général.

L'honorable M. David (Terrebonne) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Charte de Montréal

L'honorable M. Gouin (Portneuf): 472.

M. Poulin (Montréal-Laurier) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 100 amendant la charte de la cité de Montréal.

Adopté.

 

En comité:

M. Vautrin (Montréal-Saint-Jacques) propose un amendement, biffé par le comité permanent des bills privés, par lequel une surtaxe de 1 % est imposée pour les travaux de la Montréal Water and Power Company dans les rues ou ruelles publiques.

L'amendement est adopté.

M. Lacombe (Montréal-Dorion) propose un amendement à l'article inséré, au comité des bills privés, par lequel l'ex-chef de police, Olivier Campeau, devrait recevoir de la cité une pension représentant les trois quarts de son salaire. L'amendement autorise la cité à payer à M. Campeau une pension qui ne devrait pas excéder la moitié de son salaire, et ne devrait de toute façon pas excéder $2,500 par année, à partir de la date où celui-ci prend sa retraite.

L'amendement est adopté.

M. Gault (Montréal-Saint-Georges) propose un amendement afin de permettre à la Chambre d'annuler la clause insérée par le comité qui réduit la taxation spéciale de Maisonneuve de 50 cents, soutenant qu'aucune raison ne justifie le fait que la taxe qui a été convenue il y a de cela quelques années par la Législature, comme condition d'annexation, soit changée.

M. Reed (L'Assomption) défend la réduction.

L'amendement est rejeté sur division.

M. Ashby (Jacques-Cartier) propose un amendement par lequel le règlement municipal autorisant la cité à contracter avec la Montreal Abattoir Company relativement à l'enlèvement de la charogne, des restes des animaux et autres aliments malsains est régulier et conforme. Un doute a été soulevé quant à savoir si, selon le règlement municipal, le pouvoir de contracter existait.

L'amendement est adopté.

M. le président (M. Laferté, Drummond) propose l'adoption de l'article 23.

"23. Nonobstant toute disposition à ce contraire, il n'y aura pas d'élection générale pour les charges de maire et d'échevin de la cité de Montréal en 1920, et le terme d'office du maire et des échevins actuellement en fonction, ainsi que de tout remplaçant qui pourra être nommé en vertu de la loi pour remplir une vacance qui se produira parmi eux, se terminera le premier avril 1922."

M. Vautrin (Montréal-Saint-Jacques) déclare que la majorité des électeurs de la cité de Montréal sont opposés à la prolongation du terme du maire et des échevins et réclament le droit de se prononcer sur le choix de leurs représentants au conseil.

J'approuve entièrement le projet de loi en ce qui concerne la commission nommée par le premier ministre qui préparera la nouvelle charte de Montréal.

Il se dit satisfait du travail accompli jusqu'ici, depuis deux ans, par la Commission administrative de Montréal. La Commission administrative, le public ne le sait pas, a fait beaucoup pour Montréal. Cette Commission a relevé les finances de la cité de Montréal et a réussi à administrer la métropole sans contracter de nouvelle dette.

Le désir n'a pas été exprimé de mettre un terme à leur travail tant que le délai de quatre ans pour lequel ils ont été nommés ait expiré. Il croit que la population doit être consultée, mais le bill ne prévoit aucune disposition quant à la volonté populaire. Le maire ainsi qu'une vingtaine de conseillers municipaux ont passé plus d'une semaine à Québec, et il est résulté de ce lobbying une prolongation de la durée de leur service.

Ont-ils réalisé l'ampleur de leurs responsabilités? Je l'ignore.

Voter pour cette clause équivaudrait à réélire le maire et le conseil de Montréal pour deux ans. Voilà pour moi une chose que je ne peux pas plus accepter ici que je l'ai acceptée au comité des bills privés.

Depuis 1910, voilà trois fois que les citoyens de Montréal viennent devant la Législature pour lui demander de changer le système de gouvernement afin de sauver leur ville de la banqueroute. J'ai approuvé le premier ministre quand il s'est rendu chaque fois aux désirs des citoyens de Montréal.

Eh bien, qu'ont fait pendant ce temps le maire et les échevins depuis qu'ils ont été élus lors des dernières élections municipales? Ils ont dénoncé le premier ministre, ils ont dénoncé la Législature pour avoir créé cette Commission administrative et ils ont combattu la Commission dans tout ce qu'elle voulait faire. Ils n'ont jamais cessé de blâmer la Législature de s'ingérer dans le mode d'administration de Montréal et de s'en faire du capital politique devant leurs électeurs.

Le maire et les échevins ont soulevé la population de Montréal au point que nous avons eu des difficultés à nous faire élire, aux dernières élections, comme francs libéraux, tant la population de Montréal était montée contre le gouvernement parce qu'il avait créé cette Commission administrative.

Ils sont rares, les libéraux qui, en cette Chambre, peuvent dire qu'ils ont été élus députés de Montréal en se disant partisans du gouvernement et de la Commission administrative. Quant à lui, il s'est présenté comme franc libéral. Il a été élu, mais ce n'est pas pour favoriser une mesure aussi antilibérale que celle qui est maintenant devant la Chambre.

Il dit que le conseil de ville n'a pas exercé les privilèges que lui conférait la loi constituant la Commission administrative, dont il pouvait approuver ou désapprouver les décisions par un vote des trois quarts.

Les échevins ne veulent pas de cette prolongation. Il cite les opinions recueillies par un journal de tous les échevins: Dixon, Filion, Sansregret, Dubeau, Tremblay, Grealman et Reubenstein. Tous sauf M. Dubeau se prononcent carrément contre la prolongation.

Il cite également le maire de Montréal, qui a dit: "C'est la même chose pour moi, alors que je me prépare pour une prochaine élection, que je devrais remporter."

Il prétend que le gouvernement impose une prolongation de terme à des citoyens qui sont anxieux de se prononcer sur d'autres représentants, et sur des représentants qui ne désirent justement pas d'une prolongation de terme. Les conseillers municipaux de Montréal continuent de donner la responsabilité du gouvernement municipal à la Législature de Québec, et les législateurs en assument trop en imposant ainsi à Montréal le maire et les conseillers municipaux actuels.

Vous le voyez, M. le président, ils se préparent à crier au peuple: "Ce n'est pas nous qui avons empêché le peuple de nous juger, c'est Québec qui nous a réélus."

M. le président, le premier ministre a essayé de faire quelque chose pour améliorer le sort de Montréal; les échevins l'ont dénoncé. Aujourd'hui, pour ce qu'il croit être l'intérêt de Montréal, il propose de prolonger leur terme. Ils vont lui tirer dans le dos.

Il montre quelques-unes des graves erreurs d'administration des échevins, il dit qu'il prend cette attitude pour rester fidèle à ses engagements. Si je votais pour un pareil projet, je ne pourrais pas me montrer devant 25 électeurs de ma division. Mais il y a d'autres raisons pour lesquelles je ne peux pas approuver ce projet. C'est que je suis fier d'être libéral et que je crois que cette proposition est antilibérale puisqu'elle viole les droits des libres électeurs de Montréal.

En s'opposant à cette proposition, il ne veut pas condamner le gouvernement, sachant que ce n'est pas une mesure ministérielle. Il sait aussi ce à quoi le premier ministre et le gouvernement s'exposent avec cette mesure. Mais il veut, lui, libéral, agir selon les principes libéraux qui ont toujours dirigé sa conduite. Il est d'ailleurs convaincu que, si l'on met de côté la question de la prolongation du terme des échevins et du maire, le projet de loi est fait dans le but de donner à Montréal l'autonomie à laquelle elle a droit.

Il parle aussi de la loi sur le pavage et des registres de la Commission administrative, prétendant que la Commission n'a pas travaillé dans l'intérêt du contribuable.

Il croit qu'il serait dans l'intérêt de tous qu'il y ait des élections en avril prochain.

Je propose en amendement au projet que nous avons devant nous que le terme du maire et des échevins ne soit pas prolongé.

M. Lacombe (Montréal-Dorion) félicite le député de Montréal-Saint-Jacques (M. Vautrin) des grosses vérités qu'il a dites, mais il est pour le projet. D'après lui, c'est la seule chose qui pourrait guérir Montréal de ses multiples maux.

Il a fait son élection en prêchant l'autonomie de Montréal. Tous les citoyens désirent cette autonomie et il est heureux de constater que le projet de loi la garantit. À son point de vue, le projet soumis par le gouvernement devrait satisfaire tous les députés et les citoyens de Montréal.

Le premier ministre, lors de la dernière campagne électorale, avait promis de donner à Montréal le projet d'administration que les citoyens désiraient. Aujourd'hui, il leur dit: Choisissez-vous, parmi les associations les plus en vue et qui représentent toutes les catégories de la population de Montréal, 16 hommes qui prépareront le mode d'administration dont Montréal a besoin. Ils prépareront une charte ou constitution qui servira de guide pour les nouveaux administrateurs. Ces 16 hommes qui formeront la commission de la charte de Montréal seront choisis parmi les associations suivantes:

Deux de la Chambre de commerce

Deux du Board of Trade

Deux du conseil de ville

Deux du Conseil central des métiers et du travail

Deux des unions nationales ouvrières

Deux des ligues des locataires

Deux des ligues des propriétaires

Deux de la Commission administrative de Montréal.

Peut-on trouver un projet plus démocrate que cela? Je dis que non et toute la population de Montréal est satisfaite de cette partie du projet.

Maintenant, on critique la prolongation du terme des échevins et du maire. Ont-ils bien compris le projet? Une partie, non, et avec un peu d'explications, ils approuvent l'attitude du gouvernement sur cette question; d'autres que j'ai rencontrés m'ont dit: La position que tu as prise n'est pas populaire, mais c'est la position qu'un homme juste et qui a réellement l'intérêt public à coeur devrait prendre dans les circonstances; et d'autres, qui n'ont que l'esprit de critique dans la tête, n'ont aucune suggestion à faire et ne veulent rien accepter. Critiquer est facile, administrer pour satisfaire tout le monde, c'est chose impossible.

M. l'Orateur, en principe, je suis contre la prolongation du terme des échevins et du maire. Je l'ai dit au comité l'autre jour et le redis aujourd'hui, mais sachant que la commission de la charte de Montréal est obligée de faire rapport pour le ler janvier 1921 et, dans ce rapport, la date des prochaines élections y sera fixée par la Commission, ce qui veut dire qu'il y aura élection l'année prochaine.

Par conséquent, des élections cette année veulent dire conserver le même mode d'administration des deux autres années; être pour le projet de loi tel que présenté veut dire l'autonomie de Montréal dans le cours de l'année prochaine.

Comme je suis en faveur que Montréal conduise sa barque elle-même dans le délai le plus rapproché possible, et que des élections pour les échevins et le maire de Montréal avec pas plus de pouvoirs qu'ils en ont n'amélioreront aucunement la situation, au contraire, ça obligerait la nouvelle Commission à garder l'administration actuelle encore deux ans, chose que je ne veux pas et, à part ça, causer une dépense de $55,000 à la ville inutilement...

Je me déclare en faveur du projet, préférant l'intérêt de la cité de Montréal plutôt que la popularité que je pourrais obtenir en étant contre. Je suis certain que mes amis les ouvriers de Montréal ainsi que les électeurs de mon comté sauront apprécier la position que j'ai prise lorsqu'ils auront pris connaissance du projet comme il le faut.

Je le répète, je suis en faveur du projet parce que je sais que, l'an prochain, il y aura des élections pour mettre en force le nouveau mode d'administration. Et l'année prochaine, quel que sera le rapport ou les rapports, car il peut se faire qu'il y ait rapport de minorité, je serai pour qu'il prenne effet immédiatement ou pour que le peuple se prononce par voix de référendum s'il y un rapport de minorité.

M. Bédard (Montréal-Hochelaga)3 est pour le projet. Je ne partage pas les principes de mon collègue de Saint-Jacques (M. Vautrin), dit-il, car je connais les échevins de Montréal depuis quatre ans et je puis dire que ce sont d'honnêtes citoyens. Il ne veut pas qu'on dise que les échevins n'ont pas fait leur devoir.

Il explique au député de Saint-Jacques les circonstances auxquelles ce dernier fit allusion quand il reprocha au conseil de ville de n'avoir pas usé de son droit de désapprouver certains rapports de la Commission administrative. C'était à l'époque des vacances et six rapports furent adoptés automatiquement du fait que les échevins ne les avaient pas considérés dans le délai prescrit; aucune convocation d'assemblée ne fut jugée nécessaire dans cette période.

Il est contre la prolongation du terme d'office du maire et des échevins de Montréal. Il se déclare en faveur de la nomination d'une commission qui préparera un nouveau système d'administration pour Montréal. Mais, d'après lui, la prolongation du terme de la mairie est une considération secondaire.

Il croit que l'on aurait dû adopter la proposition du député de Montréal-Saint-Louis (M. Bercovitch) et ne prolonger le terme du maire que d'un an afin que, après la réception du rapport de la Commission, il soit loisible à la Législature d'imposer une autre forme de gouvernement, si désiré.

Il sait que 75 % de la population est contre la prolongation du terme du maire et des échevins et pour l'abolition de la Commission administrative. Il dit que ce qu'ils voulaient, eux, les échevins, c'était l'abolition de la Commission administrative. Il a été élu, lui, aussi bon libéral que les autres avec ce programme contre cette même Commission. Il croit que la commission proposée dans le projet de loi conduira à l'autonomie de Montréal.

Il parle de la question des pavages. Il dit que la Législature a eu raison de rappeler l'ancienne loi des pavages, car il ne reste à faire que 35 % des pavages, et cela dans les quartiers excentriques. Il n'est pas juste que les citoyens soient appelés à payer. Sur cette question, il diffère d'opinion avec le député de Saint-Jacques.

M. Poulin (Montréal-Laurier) est pour le projet. Il a consulté ses électeurs vendredi dernier et, quoi qu'en dise La Presse, dit-il, l'assemblée était très représentative et a adopté une résolution approuvant le projet de loi. Devant ce désir de mes électeurs, je voterai pour le projet. Il se dit l'interprète de la grande majorité des contribuables de Montréal en approuvant le projet de loi. Il l'accepte avec plaisir. Il ajoute que le projet de loi constitue pour Montréal la plus belle perspective d'autonomie qu'elle ait jamais eue.

M. Laurendeau (Maisonneuve): M. le président, quand je suis arrivé à Montréal vendredi, mes amis les ouvriers sont venus me trouver et m'ont dit: Laurendeau, tu es un homme, tu as tenu ta parole.

Ma parole, je la tiendrai encore et je voterai contre ce projet, qui enlève aux citoyens de Montréal le droit de choisir eux-mêmes leurs administrateurs en prolongeant le terme du maire et des échevins. Il s'en tient aux promesses qu'il a faites à ses électeurs.

Il est en faveur de la nomination de la commission. On aurait pu nommer, bien des années avant cela, une commission pour étudier un nouveau mode de gouvernement pour Montréal.

M. Renaud (Laval): Comme représentant d'une division qui comprend une partie de la ville de Montréal, fidèle à l'attitude que j'ai prise au cours des élections, je dois déclarer que je voterai contre la prolongation du terme du maire et des échevins de Montréal.

Je n'ai pas eu l'avantage, comme mon ami le député de Saint-Jacques (M. Vautrin), de me présenter comme libéral. Aujourd'hui, il suffit de se dire libéral pour que n'importe qui soit élu. J'ai su conquérir le comté de Laval.

M. le président, je me suis fait élire, aux dernières élections, sans avoir besoin de me proclamer libéral, mais en adoptant la politique que prêchait alors le maire Martin, qui dénonçait la Commission administrative, qui dénonçait le gouvernement. Et c'est pour être fidèle à ma parole que je voterai contre ce projet. Si M. Martin a changé, moi, je reste ce que j'étais et je tiendrai ma promesse.

On n'a pas le droit, selon moi, de prolonger le terme du maire et des échevins. La population de Montréal s'attend à des élections au mois d'avril et je dis, M. le président, que nous n'avons pas le droit de les empêcher, ces élections. Quel que soit le mode d'administration que l'on propose pour Montréal, l'on n'a pas le droit de dire au peuple qu'il n'aura pas son mot à dire sur la question.

Ce que je veux, c'est l'autonomie complète pour la population de Montréal en ce qui regarde son droit de faire élire ses représentants, ce que dénie le bill. Et d'ailleurs, la Législature a refusé à des petites villes des privilèges semblables; pourquoi les accorderions-nous à la ville de Montréal, au mépris des droits des citoyens de la métropole?

M. le président, je voterai contre ce projet et je crois que je représenterai le sentiment des quatre cinquièmes de mes électeurs.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) dit regretter beaucoup que, suite à des circonstances incontrôlables, il n'ait pu être présent lorsque la mesure du gouvernement a été présentée devant le comité des bills privés.

J'ai été fort intéressé en écoutant les honorables députés qui ont parlé sur cette question. Le député de Saint-Jacques (M. Vautrin) s'est placé au-dessus des intérêts politiques. Il n'a envisagé que les intérêts de Montréal et il a pris une attitude que j'appellerai exemplaire.

J'ai écouté les remarques du député de Dorion (M. Lacombe), que je prenais pour un chef ouvrier avant tout. Il nous a dit qu'il favorisait le projet parce qu'il assurait à Montréal son autonomie. J'ai lu le projet et il n'est pas question d'autonomie. On a créé une commission, il est vrai. Mais on en a créé beaucoup de commissions.

Le premier ministre en a créé une pour Montréal. Comme elle ne peut plus fonctionner, on arrive, aux dernières heures de la session, et on nous propose la création d'une commission qui choisira un nouveau mode de gouvernement.

Quant à la création de la commission, je ne m'y oppose pas. Je ne peux comprendre pourquoi le gouvernement arrive à la dernière minute avec cet amendement. Mais pourquoi nous proposer tout ce projet à la dernière minute, quand le public n'en sait rien, quand le public n'est pas en mesure de se prononcer, car il n'a pas eu le temps de l'étudier? Le public a droit d'être informé à l'avance. La mesure a été présentée par un membre du Cabinet, mais elle ne dit pas si la Commission administrative va disparaître.

Et d'abord, le projet n'a-t-il pas pour but de protéger le règne de cette Commission administrative, qui a administré contre le gré de Montréal, et de permettre à cette Commission qui a soulevé toute la population de faire son temps? On essaie de calmer celui qui a tant attaqué le maire de Montréal en prolongeant son terme de maire pour deux ans. Nous comprenons que le maire de Montréal a approuvé le bill, mais nous ne savons pas ce que le maire dira demain. On dit que l'amendement permettra d'écarter le bolchevisme aux élections du mois d'avril prochain. C'est une histoire pour épouvanter les peureux. On a eu des élections il y a quelques mois et on n'a pas vu quelque bolchevisme que ce soit.

L'honorable député de Saint-Henri (M. Bédard) était contre le projet et, maintenant, il est pour. Chose étrange, tous les échevins qui ne sont pas députés de cette Chambre sont contre la prolongation de leur terme et le député de Saint-Henri, lui, qui est échevin-député, est pour. Évidemment, on a parlé des dernières élections, du drapeau libéral, des promesses du premier ministre. Eh bien, le projet qui a été présenté au ministère en l'absence du premier ministre... et qu'il n'avait peut-être pas même vu...

L'honorable M. Gouin (Portneuf): Je l'avais vu.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): Eh bien, ce projet est loin d'être conforme aux promesses du premier ministre. Il lit la déclaration faite par le premier ministre, au Monument national, pendant la dernière campagne électorale:

"Messieurs, nous sommes des démocrates, des démocrates tout court, par exemple, et nous sommes des libéraux, et des libéraux tout court. Si nous en sommes venus à la décision à laquelle nous nous sommes arrêtés quant au système administratif de Montréal, c'était pour nous rendre au voeu de la population de Montréal qui demandait la création d'une commission. Montréal a profité de l'avancement du Québec. Ayez confiance comme dans le passé et, en retour, nous donnerons à Montréal le système administratif qui assurera de la meilleure façon sa prospérité et son progrès. Le moyen, ce sera, dès la prochaine session de la Législature, de proposer et de faire adopter, comme nous croyons bien y réussir, ce système, et nous prendrons les moyens de savoir ce que le peuple de la métropole considère comme le meilleur système pour en arriver à la fin que nous avons tous à coeur." Voilà ce que disait le premier ministre.

Pour racheter sa promesse électorale du Monument national, le premier ministre devrait, à cette session, proposer un nouveau mode d'administration et le soumettre au peuple de Montréal aux élections municipales d'avril.

Le premier ministre fait tout le contraire. Il commence par étouffer la consultation électorale qui devait avoir lieu en avril, en vertu de la charte, et il propose de nommer une autre commission pour savoir si la première commission devra continuer son oeuvre dans deux ans ou si un autre système serait préférable.

Et voilà encore une commission du gouvernement. Pourtant, les organes libéraux dénoncent le gouvernement d'Ottawa parce qu'il nomme des commissions. Le gouvernement de Québec n'est-il qu'une succursale du gouvernement d'Ottawa?

Que veut dire le projet du député de Terrebonne (l'honorable M. David)? Il veut dire à l'électorat de Montréal: Nous t'avons empêché d'élire les commissaires qui administrent ta ville. Aujourd'hui, nous t'empêchons de te choisir un maire et des échevins. Et qui nous dit cela? C'est un gouvernement libéral qui nous propose cela, c'est le ministre le plus libéral du cabinet.

Aujourd'hui, M. le président, l'honorable député qui a subi une métamorphose vient nous proposer de prolonger le terme de ce même maire qui lui refusait le droit de proposer une réforme de l'administration municipale de Montréal. Ce n'est pas la première fois que la Législature se substitue au peuple de Montréal pour nommer elle-même des administrateurs.

Le bill annuel de Montréal a toujours soulevé des débats très intéressants car, à chaque session, les intéressés, les contribuables, puis les "schemers" et les exploiteurs envahissent l'enceinte du comité des bills privés pour demander des privilèges ou pour protester contre des abus. Depuis trop longtemps, faut-il l'avouer, les exploiteurs, les spéculateurs ont obtenu des privilèges exorbitants au détriment des contribuables de Montréal. Mais la Législature n'est pas la seule responsable de cet état de choses déplorable. Les contribuables ont leur part de responsabilité, les uns n'ayant pas toujours su faire un choix judicieux de leurs administrateurs, les autres ayant, par indifférence ou mesquinerie, refusé de s'occuper des élections et du choix de leurs échevins. Il y a eu gâchis, abus de patronage, détournement, péculat, et le public montréalais demandait des réformes. On a changé de mode d'administration.

Un bureau de commissaires fut créé. Il était élu par le peuple "at large" et les échevins élus par quartiers. On proclama alors la nécessité de l'élection des commissaires par le peuple, pour être conforme à l'esprit de notre constitution, "no taxation without representation" - et pour qu'il ne soit pas dit que, sous le régime libéral, on a employé la politique Grit-tory des anciens jours de Craig et de Colborne. Le nouveau mode ne fonctionna pas bien à cause de la rivalité qui existait entre le conseil et le bureau des commissaires. Mais je crois que ce mode aurait fini par s'améliorer à la satisfaction générale. Les "schemers", les faiseurs de réformes revinrent encore à la Législature demander un changement. Les uns voulaient retourner à l'ancien système des échevins et des commissaires composé d'échevins élus par le peuple; les autres voulaient un changement, une commission indépendante, afin d'être à l'abri du patronage, source, disait-on, de tout le mal.

L'honorable député de Terrebonne (M. David) a été plus heureux au début de sa carrière. Un jour, en 1917, que nous étudiions le bill de Montréal, il proposa un petit amendement pour créer une commission administrative. Le maire de Montréal protesta et s'écria: Monsieur, vous n'avez pas le droit de proposer cela. J'opposai moi-même le projet du député de Terrebonne et le premier ministre prit la parole et dit: L'honorable député ne devrait pas insister avec sa motion. On devait laisser au contribuable le temps d'examiner la question. C'était comme toujours aux derniers jours de la session que le jeune libéral-démocrate, mais député ministériel avant tout, essaya de couler sa proposition. Du moment que le premier ministre eut parlé, la proposition fut retirée.

L'année suivante, elle fut de nouveau présentée sous une forme plus arbitraire. On dépouillait les contribuables de leurs droits, on donnait à des commissaires choisis, non par les grands corps organisés de Montréal, mais par le gouvernement de Québec, un pouvoir absolu et l'on dépouillait de tous leurs droits les échevins élus par le peuple. M. Joseph Archambault, député de Verchères, pourrait trouver une forte ressemblance entre cette politique libérale d'aujourd'hui et celle des fameux gouverneurs d'autrefois dont il parlait avec véhémence au Club de Réforme.

Le gouvernement de Québec possède à son crédit des actes qui pourraient inspirer le farouche démocrate de Verchères pour de prochaines conférences.

Pour justifier la nomination de la commission, le chef du gouvernement disait: Montréal subit une crise administrative; on ne s'entend pas entre échevins et commissaires. Cet état de choses ne peut durer plus longtemps; les hommes d'affaires veulent un changement. Ce qu'il faut à Montréal pour rétablir l'équilibre et opérer les réformes demandées, c'est une commission composée d'hommes d'affaires, d'experts dans l'administration.

Il en est beaucoup qui, bien que désapprouvant l'abandon du grand principe constitutionnel pour lequel nos pères ont tant lutté après avoir tant souffert de l'oligarchie, crurent que ce régime pouvait être nécessaire comme intermède et pour remédier à l'état tant déploré.

Mais que fit le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple? Choisit-il des hommes compétents, des experts financiers, des maîtres administrateurs? Il nomma président M. Ernest Décary, cousin d'un ministre et notaire d'un autre ministre des plus importants, puis M. Charles Marcil, ancien journaliste, député libéral à Ottawa pour un comté situé à 300 milles en bas de Québec, Bonaventure, puis Alphonse Verville, un autre député libéral à Ottawa, qui est surtout célèbre par ses girouettes politiques et le reniement de ses actes et de ses paroles; puis un M. Ross, une nullité.

Le gouvernement, après avoir trompé la masse des contribuables de Montréal, trompe ceux-là mêmes qui avaient approuvé la création de la Commission, croyant que le gouvernement nommerait des hommes d'affaires pour faire partie de cette Commission. Le tour était joué. Les contribuables de Montréal comprenaient qu'ils avaient été trompés, blagués encore une fois.

Il est 6 heures, M. le président.

L'honorable M. Gouin (Portneuf): Nous pourrions continuer et finir à 7 heures.

M. Sauvé (Deux-Montagnes) est d'accord.

M. le président, il y a quelque temps, un homme que le premier ministre a fait très grand (M. Martin), accusé d'avoir condamné le gouvernement et la Commission administrative, déclara dans ce Parlement: Je n'ai jamais dit cela, ce sont des racontars de journaux.

Eh bien, M. le président, j'ai retrouvé le manifeste lancé par ce grand homme qui traite le premier ministre de Kaiser, aux dernières élections municipales. Voici ce que dit M. Martin dans son fameux programme qu'il adressait aux électeurs de Montréal, au mois de mars 1918, programme signé de sa main et qu'il ne peut nier, cette fois:

"La proportion de 77.75 % des revenus de Montréal étant payée au gouvernement de Québec, on trouvera naturel que je me sois insurgé à Québec, cette année, contre de nouveaux impôts sur les contribuables de la métropole. Ce fut là toute la raison d'être de mon attitude vis-à-vis de Sir Lomer Gouin dans la lutte actuelle. La Presse, soudoyée par M. Gouin, venant à la rescousse de M. Ainey, déclare que je suis dépité de ne pas avoir été nommé conseiller législatif et que c'est là la raison de ma campagne. Je le déclare, j'ai réclamé au nom des ouvriers de Montréal un fauteuil au Conseil législatif afin de pouvoir, à la Haute Chambre, défendre les intérêts des petits si souvent ignorés par ce corps dont j'aurais réclamé l'abolition même si j'en eusse fait partie. Pourquoi m'a-t-on refusé une place de représentant des ouvriers au Conseil? Parce qu'on craignait évidemment que j'aurais pu faire rater trop de "schemes" de ces messieurs nommés pour la vie et indépendants du peuple.

"Je me suis fortement opposé à la mise en tutelle de la cité, imposée par Sir Lomer Gouin, parce que c'était décréter la défranchisation de toute une population et une violation de nos droits les plus sacrés.

"Sir Lomer a passé outre et M. Ainey s'est humblement courbé devant cette autocratie odieuse.

"Est venue la fameuse annexion de Maisonneuve. Je l'ai combattue énergiquement parce que je considérais qu'elle était faite tout simplement dans le but de désintéresser les propriétaires du parc Maisonneuve de leurs obligations onéreuses, et cela au détriment des citoyens de Maisonneuve et de Montréal, mais on a passé outre encore.

"Je déclare que, si je suis élu, je demanderai qu'une enquête royale soit instituée sur les transactions scandaleuses de ce parc, comme sur les transactions sanctionnées par Sir Lomer Gouin et ses collègues dans le cas du boulevard Pie IX, du boulevard Décarie, du boulevard Monkland, du parc du Sault-au-Récollet, des ventes de terrains à Notre-Dame-de-Grâce et au boulevard Saint-Michel. On verra alors que des amis politiques du premier ministre étaient tous intéressés dans ces expropriations ou achats.

"J'ai déclaré au premier ministre qu'il était odieux que l'on imposât aux locataires, ne payant pas plus de $150 de loyer par année, une taxe quand lui-même s'opposait à ce que les compagnies d'assurance sur le feu le fussent et quand il faisait mettre une clause restrictive de trois années dans la taxe imposée aux compagnies d'utilités publiques pour le passage de leurs poteaux dans nos rues.

"J'ai protesté contre l'augmentation de la taxe scolaire à 20 sous de plus et j'ai déclaré alors au premier ministre qu'il n'aurait pas à écraser le contribuable d'impôts, s'il n'eût pas laissé les petites municipalités s'endetter à souhait avant leur annexion, s'il eût mis un frein aux expropriations, aux ouvertures de boulevards et de rues ordonnées par le bureau des commissaires, dont faisait partie M. Ainey, en dépit de mes protestations.

"La Législature est allée plus loin encore. Elle a augmenté, pour grossir le trésor provincial, la taxe sur les automobiles de 25 % à 35 %, elle a porté la taxe du commerce de 7.5 % à 10 %, elle a décidé que les retardataires concernant les taxes de la cité devront payer un intérêt de 7 % au lieu de 5 %, elle a taxé les célibataires, les salles de billard, les théâtres de vues animées, les encanteurs, les colporteurs, et elle a accaparé notre Sou du pauvre à son profit.

"C'est Québec qui nomme nos recorders et c'est Montréal qui paie leur salaire, la taxe foncière a été portée de 1 % à 1.5 % et, malgré tout cela, M. Gouin n'en a pas encore assez pour augmenter les petits salaires des employés du palais de justice et autres fonctionnaires du gouvernement.

"Je n'ai jamais eu l'intention de fonder un troisième parti, quoi qu'on en dise pour me discréditer. Ce que je veux, c'est que l'on rende aux citoyens de Montréal le droit sacré qu'ils ont de faire eux-mêmes le choix de leurs administrateurs et que l'on cesse de faire de Montréal la vache à lait de la province de Québec."

Cette citation indique dans quel chaos se trouvait la ville de Montréal et combien la composition de la Commission dégoûtait la population. M. Médéric Martin, après avoir porté les plus odieuses accusations contre le premier ministre et après avoir promis qu'il demanderait une enquête s'il était élu, balaya son adversaire. Son triomphe fut extraordinaire et ses échos retentirent jusqu'aux Îles-de-la-Madeleine.

Quelques semaines plus tard, les hommes de police veulent se former en union et s'affilier à l'internationale. On a beau leur représenter que, tenant compte de leur caractère de représentants de l'autorité, de gardiens de l'ordre, ils ne pouvaient s'affilier aux internationaux qui pouvaient décréter des grèves de sympathie et causer les plus grands dommages à Montréal, rien ne les fit reculer. Ils étaient conseillés et encouragés par le maire Martin. Ils formèrent leur union et déclarèrent la grève, toujours sur les conseils du maire Martin. Cette grève coûte $300,000 à la ville de Montréal. Martin menace de bouleverser tout, de tout renverser sur son passage dans la province, de démasquer les gros coupables, les grands exploiteurs qui avaient pillé Montréal et la province. Quelques jours plus tard, l'homme que les chefs et les organes libéraux avaient traité de la façon que l'on sait fut appelé au Conseil législatif par le gouvernement. Des députés libéraux avalèrent difficilement la pilule. Je vois encore la binette qu'avait alors l'honorable député de Terrebonne, révolté contre cet acte inqualifiable. Médéric se tut plutôt, il louangea le gouvernement; il nia en plein Conseil législatif avoir dit quoi que ce soit contre le premier ministre, dont il fit l'éloge. Il renia son propre programme. Le gouvernement a cédé devant Médéric, disait l'ancien député de Laval, pour éviter un plus grand mal, pour éviter la révolte et les massacres. Les élections générales vinrent.

Les élections provinciales ont eu lieu. Voici la première session du nouveau Parlement. M. Médéric Martin s'amène de mauvaise humeur. On refuse de prolonger son terme de maire et on veut lui faire une lutte acharnée. Il vocifère. Il crie, au Château Frontenac, à qui veut l'entendre que, s'il a accepté un siège au Conseil législatif, c'était pour mieux fréquenter les maîtres du pouvoir et mieux les connaître. Je les connais maintenant et je leur donne jusqu'à demain soir, à 4 heures, pour prendre une décision. Quelle décision? M. Martin ne veut pas le dire. Pendant ce temps-là, il y a grève à Montréal, grève des employés de l'aqueduc. M. Martin dénonce la Commission avec la plus grande violence. Lui, maire, premier magistrat, il demande aux échevins de le suivre pour aller s'emparer des usines de l'aqueduc. On refuse de le suivre. Il revient à Québec en crachant des menaces, en criant que ça va mal aller, que de grosses têtes vont sauter dans le panier, que le règne des ouvriers allait arriver. Un bon matin, il part affairé en disant: Grève, grève générale à Montréal! Il revient tout doux et depuis il ne dit plus rien. La commission chargée de faire enquête sur le différend entre la Commission administrative et les employés de l'aqueduc fait un rapport insignifiant. M. Ernest Décary, qui avait donné sa parole qu'il ne céderait pas d'un pouce, a été sacrifié et il a cédé sans mot dire, et M. Médéric Martin, aujourd'hui silencieux, voit son mandat de maire prolongé de deux ans.

Qui a-t-il fait chanter? Car il a fait chanter quelqu'un. Je retire d'avance cette expression, vu que les règles de la Chambre ne me permettent pas d'attaquer de cette façon un conseiller législatif, serait-il le plus grand des coupables, le plus criminel des criminels.

Les échevins ne sont plus ici. Que veut dire ce compromis? Des députés libéraux disent innocemment ou hypocritement: Ceci est fait pour empêcher Médéric de faire triompher le bolchevisme aux prochaines élections. Ces propos, M. l'Orateur, sont tenus par des législateurs, par des députés libéraux, par des hommes qui ont dénoncé avec tant de violence et d'amertume le gouvernement d'Ottawa, qui demandait de prolonger le Parlement à cause de la guerre qui surexcitait et bouleversait les peuples à demi renseignés à cause des secrets de guerre nécessaires pour ne pas renseigner l'ennemi.

Et voilà que non pas devant Guillaume et ses millions d'hommes, mais devant Médéric Martin, on tremble tellement que l'on cède tout, que l'on dépouille davantage les contribuables de Montréal. Et cela au sein de la province de Québec, que l'on a dite si heureuse, si à l'abri des abus du bolchevisme, province d'ordre, province conservatrice, dirigée par un gouvernement libéral ami du peuple.

L'impudence est trop forte. Elle dépasse toutes les limites. On a peur que Médéric Martin fasse des révélations contre des coupables. C'est de cela qu'on a peur et, sachant qu'on peut le convaincre de cette façon, on lui donne du galon.

La Chambre, en adoptant cette clause, commettrait une indignité, une injustice; elle foulerait aux pieds le droit le plus sacré de l'électeur.

C'est pourquoi je supplie l'honorable premier ministre de ne pas permettre un pareil attentat. Pourquoi faut-il qu'il soit dit que M. Martin tient le premier ministre et qu'à coups de menaces il lui fera faire ce qu'il voudra? Cela m'étonne et c'est regrettable.

M. le président, nous allons entendre le premier ministre. Il pourra dire bien des choses, mais il ne pourra pas nous prouver que cette mesure est une mesure libérale; il pourra nous dire tout ce qu'il voudra, il ne nous empêchera pas de dire qu'en subissant l'influence de ceux qui lui font commettre un attentat à la plus chère des libertés du peuple il commet une erreur regrettable dont il se repentira.

L'honorable M. Gouin (Portneuf): Le chef de l'opposition (M. Sauvé) a fait un discours intéressant, mais il a donné libre cours à son imagination au point d'en atténuer l'effet considérablement. Je ne pourrai entrer dans les détails comme lui.

Je tiens à faire l'historique de la question qui a amené la proposition de cette mesure et à dire que ce ne sont pas les enquêtes ni les scandales auxquels le chef de l'opposition a fait allusion qui l'ont déterminée.

Quand le projet de la Commission administrative a été soumis, non seulement la Chambre de commerce et le Board of Trade l'avaient demandé, mais toute la population de Montréal, toute la presse voulaient un changement d'administration. Je n'ai jamais attaqué l'administration municipale de Montréal. Quand une délégation de citoyens très importante de la métropole est venue me rencontrer pour m'exposer la situation et me demander un nouveau mode d'administration, on prétendit que tout allait mal à Montréal et que même la banqueroute s'annonçait. J'ai dit à ces délégués qu'ils avaient tort de dire du mal de leur ville. Il était urgent de changer de système, mais il n'était pas nécessaire de critiquer. Je ne tiens personne particulièrement responsable. Ce sont les circonstances qui l'ont voulu alors; la crise dont le pays souffrait, comme tous les autres, du reste, à cause de la guerre, y fut pour quelque chose.

Il remarque qu'il n'y avait rien de bien extraordinaire à ce que, ayant une certaine expérience en fait d'administration, il ait pensé donner alors un système qui répondît aux besoins du moment. On n'a qu'à faire une revue historique pour se rendre compte que l'exemple des grandes villes américaines de Boston, Chicago et New York a été imité en cette circonstance. Des requêtes signées par des millions de citoyens de toutes les classes, des résolutions de tous les corps publics demandaient un changement. Nous avons regardé autour de nous et nous sommes enquis de ce qui s'était passé dans les grandes villes américaines dans des circonstances analogues.

Nous avons donc eu recours au mode qui a permis à ces villes de reprendre leur crédit et de passer la crise. On nous parle de mesures draconiennes. L'honorable chef de l'opposition s'écria alors que nous n'étions plus démocrates.

M. Sauvé (Deux-Montagnes): C'est le maire qui a dit cela.

L'honorable M. Gouin (Portneuf): Le maire et d'autres l'ont dit. Ils ont pu le dire de la meilleure façon du monde. Nous ne sommes pas après tout aussi mauvais démocrates, puisque nous nous appuyons sur des précédents qui ont rendu de précieux services à plusieurs municipalités américaines dans les mêmes circonstances. On n'a pas à crier au scandale.

Depuis 50 ans, aux États-Unis, plusieurs commissions administratives ont été nommées, à diverses reprises même dans les mêmes villes, par les gouvernements d'État. On ne criait pas au scandale; on ne se voilait pas la face. Quand ces commissions avaient rendu les services qu'on en attendait, on les rappelait. C'est là l'histoire de plusieurs villes importantes chez nos voisins.

Il y a deux ans, on a légiféré ainsi pour Montréal. On prétend que la Commission a mal fonctionné. C'est une question d'opinion. Je crois, comme le député de Saint-Jacques (M. Vautrin), que la Commission a fait du bon travail. Je crois qu'elle a rendu des services. Elle a rétabli le crédit municipal et permis de traverser la crise.

Quant à l'extension du terme du maire et des échevins, je dois dire que, lorsque nous avons créé la Commission administrative, le terme devait en être de quatre ans et que les échevins ont alors demandé le même privilège. Nous leur avons répondu que nous voulions voir auparavant comment les choses se passeraient et nous avons dit que, si l'administration de la Commission était satisfaisante, nous verrions si la demande des échevins était justifiable. Nous croyons le moment venu de racheter cette promesse, étant donné que la Commission a bien fonctionné, non pas à la satisfaction de tous, il est vrai, mais en agissant de bonne foi et en faisant tout ce qu'elle pouvait dans l'intérêt de Montréal.

On a beaucoup critiqué cette Commission administrative. Aux élections générales dernières, on disait que tel était le sentiment à Montréal que je ne pourrais pas y adresser la parole. J'y suis allé avec confiance, connaissant la courtoisie des électeurs de la métropole. J'ai répondu aux questions qu'on me posait et j'aurais parlé quand même de la question même si on ne me l'avait pas demandé. J'ai dit que nous avions donné cette Commission parce que nous en avions été requis. J'ai ajouté que, si on n'était pas satisfait, on n'avait qu'à demander un changement et que nous étions prêts à l'accorder quand le peuple le voudrait. C'était alors au mois de juin. Nous sommes maintenant au mois de février et combien de projets nous sont-ils parvenus? Un seul, de la part de la Chambre de commerce, qu'on a critiqué, que la population n'a pas accepté. Si ce projet avait été adopté, croit-on que c'eût été juste? Pouvions-nous faire mieux que nommer une commission chargée de nous faire connaître le voeu des citoyens de Montréal?

L'honorable chef de l'opposition est obligé de l'admettre. Il n'y a pas un homme raisonnable qui ne l'admettra pas. On a déjà commencé à dire que la Commission ne fera rien. Eh bien, moi, je crois qu'elle fera quelque chose. Les corps publics s'y feront représenter par les avocats qui prépareront une charte, deux chartes, trois chartes s'ils le veulent. Ils les soumettront à la Législature qui les étudiera et, si la Législature croit que les chartes doivent être soumises au peuple de Montréal, elle les lui soumettra.

Voyez l'histoire de ce qui s'est passé aux États-Unis. Il y a 10 ans, quand on a voulu faire le "Greater New York", on a nommé une commission à laquelle cinq avocats se sont adjoints et on a ainsi préparé une charte qui fut acceptée. À Boston, il y a huit ans, un malaise général régnait; une commission a été nommée à laquelle des avocats ont aussi été adjoints; deux projets de charte ont été présentés; on les a soumis à l'électorat qui a fait son choix. Il en sera de même pour Montréal. Si nous avons plusieurs projets, les électeurs seront appelés à se prononcer sur le meilleur d'entre eux.

Les deux projets de la commission de la charte et de la prolongation du terme sont connexes. Il n'y a pas un homme qui ait demandé le rappel de la Commission administrative pour cette session. Nous demandons au maire et aux échevins qui ont l'expérience du fonctionnement de ce système de nous faire bénéficier de cette expérience pour nous aider à faire une charte durable, permanente, satisfaisante pour tous. Si le terme n'était prolongé que d'un an ou de quelques mois, la chose serait à recommencer quand le rapport de la Commission serait soumis.

L'an prochain, si la charte est prête et que la Législature l'adopte, rien ne nous empêchera de rappeler le statut créant la Commission administrative de Montréal, rien ne nous empêchera d'ordonner des élections. Qu'est-ce qu'une différence de quelques mois, même d'une année pour préparer une charte de 50 ans au moins? On se conduit d'une façon enfantine à ce sujet, en certains quartiers. Croit-on sérieusement que les citoyens de Montréal y gagneraient à faire des élections maintenant?

M. le président, on nous accuse de toutes sortes de choses en certains quartiers de Montréal, on nous donne même des noms. Est-on bien en faveur, cependant, de faire des élections à Montréal?

Le chef de l'opposition a parlé de pèlerinages, d'ententes entre le maire et le gouvernement. Il n'y a rien eu de tel. Et je rends au maire et aux échevins ce témoignage qu'ils ne m'ont rien demandé. Le projet a été préparé dans l'intérêt de Montréal uniquement.

La Commission va se mettre à l'oeuvre, M. le président, mais il ne faut pas trop se hâter, car il s'agit de faire une charte qui servira les intérêts de Montréal pour longtemps et qui exemptera à Montréal l'ennui pour ses administrateurs et pour nous de voir la charte de la métropole transportée à Québec tous les ans pour y subir des modifications. J'espère que la charte sera assez bonne pour que l'électorat de Montréal en soit satisfait.

Il n'est pas question de conventions. Je le répète, M. le président, on nous a accusés de bien des choses. Nous oublions les injures qu'on nous lance et nous oublierons même toutes celles qu'on nous a lancées depuis 25 ans, car nous avons la conviction que nous sommes utiles à la population de Montréal dont nous voulons le bonheur. Si la charte de cette ville peut être assez étendue pour s'assurer d'éviter à nos enfants des attaques malveillantes, ce ne sera pas trop cher payer par cette génération pour les services rendus à Montréal, et ce, pour les générations futures.

L'amendement du député de Montréal-Saint-Jacques (M. Vautrin) étant soumis au comité, celui-ci se divise et le rejete par 48 voix contre 114.

Le comité, ayant étudié le bill, fait rapport qu'il l'a adopté avec certains amendements. Les amendements sont lus deux fois et adoptés.

M. Poulin (Montréal-Laurier) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

 

Dépôt de documents:

État des recettes et des dépenses

L'honorable M. David (Terrebonne) présente la réponse à un ordre de la Chambre, en date du 7 janvier 1920, concernant l'état des recettes et des dépenses depuis le 1er juillet jusqu'à date. (Document de la session no 41)

Tracteurs Cleveland

L'honorable M. David (Terrebonne) présente la réponse à un ordre de la Chambre, en date du 7 janvier 1920, concernant copie de toute correspondance entre le ministre de l'Agriculture et toute compagnie fabriquant ou vendant des tracteurs pour l'usage des fermes dans notre province. (Document de la session no 42)

Insoumis

L'honorable M. David (Terrebonne) présente la réponse à une adresse de l'Assemblée législative, datée du 13 janvier 1920, concernant copie de toute correspondance, télégrammes, etc., entre le gouvernement et celui d'Ottawa au sujet des insoumis. (Document de la session no 43)

Établissement des soldats sur les terres de la couronne

L'honorable M. David (Terrebonne) présente la réponse à une adresse de l'Assemblée législative, en date du 21 janvier 1920, concernant copie de toute correspondance entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial relativement à l'établissement des soldats sur les terres de la couronne. (Document de la session no 44)

Tenue d'une exposition universelle à Montréal

L'honorable M. David (Terrebonne) présente la réponse à un ordre de la Chambre, daté du 28 janvier 1920, relative à la copie de toute correspondance, des rapports et des résolutions concernant la tenue d'une exposition universelle à Montréal. (Document de la session no 45)

Infractions à la loi des licences

L'honorable M. David (Terrebonne) présente la réponse à un ordre de la Chambre, en date du 30 janvier 1920, concernant copie de toute correspondance entre le gouvernement provincial et le président de la Ligue antialcoolique de Québec, M. le juge F.-X. Lemieux, au sujet des infractions à la loi des licences depuis le mois de mai 1919. (Document de la session no 46)

Pont sur la rivière Verte

L'honorable M. David (Terrebonne) présente la réponse à un ordre de la Chambre, en date du 30 janvier 1920, concernant copie de toute correspondance échangée entre le conseil municipal de L'Isle-Verte ou toute autre personne de cette municipalité et le département des Travaux publics relativement à l'inspection d'un pont sur la rivière Verte dans les limites de ladite municipalité; aussi copie de rapport de l'ingénieur du département au sujet de ce pont. (Document de la session no 47)

La séance est levée.

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NOTES

 

1. Voici ce qu'ajoute Le Canada: La seule objection qu'on y voit chez les représentants ouvriers est à la dernière clause qui décrète que le montant sera de cinquante pour cent dans les cas où les salaires seront de moins de mille piastres et de vingt-cinq si ces salaires sont de plus de mille. On veut obtenir un montant uniforme de cinquante pour cent. L'amendement sera proposé au Conseil législatif.

2. L'item 47, c'est le bill de Montréal.

3. M. Bédard est échevin à la ville de Montréal. Selon certains journaux, ce député aurait approuvé le projet de loi.

4. Les 11 députés ayant voté contre l'article, à savoir la prolongation du terme du maire et des échevins, sont: MM. Vautrin, Bercovitch, Laurendeau, Bédard, Gault, Bergevin, Paquet (Saint-Sauveur), Monet, Dufresne, Renaud et Sauvé.