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Version finale

28e législature, 4e session
(25 février 1969 au 23 décembre 1969)

Le mardi 9 décembre 1969 - Vol. 8 N° 100

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Onze heures)

M. LEBEL (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre, messieursl

Présentation de pétitions. Lecture et réception de pétitions. Présentation de rapports de comités élus. Présentation de motions non annoncées. Présentation de bills privés. Présentation de bills publics. Affaires du jour.

Questions et réponses

Conflit à la compagnie Daly à Morin

M. PAUL: L'honorable député de D'Arcy-McGee a posé une question hier à l'Intention de l'honorable ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Si la Chambre acceptait, l'honorable député de Saint-Jacques pourrait fournir une réponse qui lui a été donnée par les hauts fonctionnaires du ministère en l'absence de M. Bellemare.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.

M. COURNOYER: Selon les informations, MM. Mérlneau et Laporte, du ministère du Travail, ont agi pendant six jours la semaine dernière comme médiateurs extraordinaires dans ce conflit. Vendredi le 5 décembre la compagnie a fait une proposition finale aux représentants syndicaux. Dans la même journée, la compagnie a réuni ses employés de bureau et a écrit une lettre à tous ses autres salariés qui, en fait, sont en grève. Dans cette lettre et dans la conversation qu'elle a eue avec ses employés de bureau, la compagnie a réitéré ses dernières offres et a aussi avisé ses employés que si ces offres n'étaient pas acceptées, la compagnie ne rouvrirait pas ses portes.

Vendredi le 5 décembre, il y a eu assemblée du syndicat, 175 des 290 employés impliqués étaient présents à l'assemblée, 29 ont voté pour l'acceptation des offres, le reste pour le rejet de ces offres, soit 83% des membres présents. Selon la compagnie, hier matin, le 8 décembre, environ 45 employés se seraient présentés au travail. Au moment de ma conversation de ce matin avec le sous-ministre, M. Réal Mirault, ce dernier m'informait qu'il attendait cet après-midi un rapport détaillé de la part de M. Mérlneau. C'est notre intention d'informer l'assemblée de la situation dès que nous aurons en main ce rapport concernant ce qui est réglé, ce qui n'est pas réglé et les espoirs qui restent de conserver cette compagnie au Québec.

M. LESAGE: Je n'ai pu intervenir lors de l'appel des motions non annoncées.

Pourrais-je réserver le droit de faire une motion non annoncée, plus tard dans la journée, si c'est nécessaire, quant à la composition de la commission des Affaires municipales pour autant que les députés libéraux sont concernés?

M. PAUL: M. le Président, j'admire la confiance de l'honorable chef de l'Opposition, son optimisme et, pour abonder dans le même sens que lui, je voudrais que le même privilège me soit réserve'.

Article 4, M. le Président.

Vente de la machinerie à l'Hydro- Québec

M. LESAGE: Est-ce qu'il n'y a pas un député ou un ministre qui est chargé de répondre aux questions pour le ministre des Richesses naturelles? J'avais donné avis d'une question hier.

M. PAUL: L'avis a été transmis, M. le Président, tel que je m'étais engagé à le faire hier. J'ai discuté ce matin avec l'honorable ministre des Richesses naturelles qui était retenu à son bureau, mais qui doit arriver d'un instant à l'autre.

M. LESAGE: Pourrais-je suggérer que, lorsque nous nous réunirons à nouveau cet après-midi, le ministre, s'il est présent, puisse répondre aux questions? Pourrais-je réserver le droit de revenir à la période des questions, M. le Président? Je sais que c'est une procédure anormale, mais, d'un autre côté, tout ce problème de la vente par l'Hydro-Québec de son matériel lourd de construction inquiète la population. Cette question devient de plus en plus urgente et nous voulons savoir — la population qui est au courant veut le savoir également — quelles sont les intentions de l'Hydro-Québec et du gouvernement en ce qui touche la construction des barrages par les forces de l'Hydro ou par l'entreprise privée.

M. PAUL: M. le Président, nous acceptons avec plaisir cette réserve qui est formulée par l'honorable chef de l'Opposition. D'un autre côté, je ne voudrais pas présumer, cependant, dans un sens ou l'autre, quant à la possibilité où se trouvera placé l'honorable ministre des Richesses naturelles de répondre aujourd'hui à la question de l'honorable chef de l'Opposition.

M. LESAGE: M. le Président, ce que je veux plaider, c'est l'urgence de la réponse. Qu'elle soit négative ou affirmative, peu importe, mais il faut que nous sachions à quoi nous en tenir. Je dis: peu importe; peu importe peut-être, quant au ministre; mais, quant à nous, ça importe parce que nous croyons que, comme je l'ai dit à plusieurs reprises, l'Hydro doit continuer à construire avec ses propres forces et son propre équipement les barrages nécessaires pour fournir l'électricité à la population et à l'industrie du Québec.

M. PAUL: M. le Président, quand l'honorable chef de l'Opposition utilise les mots « qu'importe, quant au ministre », je voudrais bien signaler à la Chambre que l'honorable ministre des Richesses naturelles ne reste pas indifférent devant l'administration de l'Hydro-Québec. C'est pourquoi je voudrais, en toute honnêteté, mentionner avec quel souci, avec quel intérêt, l'honorable ministre des Richesses naturelles s'occupe de ses fonctions. Je craindrais qu'on Interprête mal la portée de l'expression employée par l'honorable chef de l'Opposition; je suis sûr que ce n'est pas ce qu'il voulait dire. D'un autre côté, il faut également protéger l'administration effective et le dévouement de l'honorable ministre des Richesses naturelles dans l'accomplissement de ses fonctions.

M. LESAGE: M. le Président, Je voulais dire que le ministre des Richesses naturelles, à cause de la nature de ses réponses, nous a donné l'impression qu'il n'était aucunement sensibilisé à l'urgence de l'annonce d'une décision définitive.

M. PAUL: M. le Président, l'honorable chef de l'Opposition s'engage dans un terrain qui devient dangereux, parce qu'il prête au ministre des intentions, ce qu'il n'a pas le droit de faire en vertu de l'article 285, 19°.

M. LESAGE: Justement, c'est que je ne lui en prête pas. C'est cela qui m'inquiète.

M. LAPORTE: M. le Président, Je devrais être le dernier à parler d'absence depuis quelques jours, mais dans le cas qui nous intéresse, celui de l'Hydro-Québec et de Manic 3, il suffirait que le ministre, pour des raisons que Je jugerais probablement bonnes quant à lui, soit absent de la Chambre pendant encore un certain nombre de jours pour que nous n'ayons pas, sur une question fondamentalement importante, des réponses que nous sommes en droit d'obtenir sur le problème de la construction de certains grands travaux hydro-électriques par l'Hydro-Québec. C'est pour cela que le chef de l'Opposition a raison d'insister pour que le ministre — son devoir premier pendant la session étant de renseigner la Chambre — prenne des dispositions urgentes pour être ici afin de répondre à toutes nos questions.

M. PAUL: M. le Président, c'est justement ce qu'a fait le ministre des Richesses naturelles, c'est avec urgence qu'il a demandé les renseignements qui lui étaient nécessaires afin de les transmettre avec toute la diligence possible à la Chambre. Lorsque j'ai communiqué ce matin avec lui, un peu avant que la Chambre se réunisse, il m'a informé de son retard, parce que justement il attendait des informations qu'il espérait recevoir d'un instant à l'autre de l'Hydro-Québec.

M. LE PRESIDENT: Affaires du jour. M. PAUL: No 4.

Bill 75 Motion d'amendement de M. Laporte

M. LE PRESIDENT: Reprise du débat sur l'amendement de l'honorable député de Chambly à la motion de l'honorable ministre des Affaires municipales, proposant que le bill 75, intitulé: « Loi de la Communauté urbaine de Montréal », soit maintenant lu la deuxième fois, lequel amendement se lit comme suit: « Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant tous les mots après le mot « Que » par les suivants: « cette Chambre est d'avis, vu l'intérêt public et général qu'éveille dans la province le bill 75, « Loi de la Communauté urbaine de Montréal », a) que le paragraphe 1 de l'article 536 du règlement qui exige que tout bill public soit lu deux fois avant d'être amendé ou renvoyé à un comité, soit suspendu; b)que ce susdit bill soit référé àla commission des Affaires municipales et que cette commission soit autorisée à siéger pendant que la Chambre est en séance et même les jours où la Chambre ne tient pas de séance; avec pouvoirs d'entendre des témoins, et d'envoyer chercher les personnes, les pièces ou dossiers dont il aura besoin et de faire rapport à la Chambre.

L'honorable député de Saint-Laurent.

M. Léo PearsonM. PEARSON: Le rôle des députés n'est

pas toujours facile. Ainsi, le ministre des Affaires municipales nous présente trois bills sur les communautés urbaines, totalisant environ 300 pages de texte, fruit de consultations nombreuses, probablement, répondant à un besoin certain, à un désir de la population, à une nécessité.

Voilà que notre rôle de l'Opposition, parce que nous voudrions corriger certaines lacunes de présentation de ces bills, en particulier du bill 75, risque de nous faire passer pour des trouble-fête, des gens ne cherchant qu'à faire perdre le temps de la Chambre, qu'à tenter de discréditer ou d'atténuer les mérites du ministre, qu'à critiquer indistinctement le bon comme le moins bon, parce que seulement Intéressés à l'aspect électoral. Non, si les gens croient que notre attitude est dirigée contre le ministre, dans le but de le dévaloriser ou dele démériter, ou contre les objectifs du bill 75, ou dans un but strictement électoral, au moins en mon nom, je dirai que ces gens se trompent. S'il le faut, pour corriger cette impression, je dirai, au départ, que le ministre a du mérite, qu'il a dû travailler avec ses aides, qu'il a dû consulter et discuter, il a répondu avec ce bill à une attente longtemps désirée par la population du grand Montréal; le terrain est prêt pour l'action, il profite du travail effectué par les prédécesseurs, en plus du sien, et c'est bon.

L'ancien ministre des Affaires municipales a été marqué pour avoir tenté la même chose. Mais, favorisé par un contexte différent, il ne faudrait pas que le ministre accapare pour lui seul tout crédit ou s'entête dans une position rigide, ne considère les députés de l'Opposition que comme des gens ne visant qu'à critiquer ou détruire, perpétuant ainsi la méfiance traditionnelle, parce que, électorale ment plus rentable, entre les partis représentés majoritairement à l'Assemblée nationale.

Nous sommes en 1969 et non plus en 1940. Ceci dit, M. le Président, je vous dirai que mon comté comporte environ 50% d'électeurs de Montréal et environ 50% d'électeurs d'une ville de banlieue, Saint-Laurent.

Le maire de Montréal et le président du comité exécutif, semble-t-il, appuient entièrement le bill 75. Mais, parmi les maires que le ministre a rencontré est-ce que ces maires traduisent exactement la pensée des conseillers municipaux?

J'ai reçu ce matin, à cet effet, un télégramme de trois conseillers municipaux de la ville de Saint-Laurent qui se lit comme suit: « Le bill 75 est soumis présentement en Chambre au Parlement du Québec. Ce bill affecte grandement les administrations municipales de différentes villes de banlieue faisant partie de la

Communauté urbaine de Montréal proposée par le ministère des Affaires municipales. « Il serait bien normal que les administrateurs municipaux élus par la population puissent s'exprimer sur des points de loi qui régissent les administrations municipales qui les concernent, car la démocratie veut que les élus municipaux répondent à leur mandat devant la population. « Or, comment peuvent-ils être responsables des lois que le gouvernement est en train de passer en Chambre sans la consultation et la négociation des représentants des villes de la communauté urbaine proposée? « Au nom de la démocratie, les administrateurs de ces villes demandent d'être entendus par les membres du Parlement avant que le projet de loi, qui est encore le bill 75, soit accepté. « Sincèrement — et c'est signé — Jean-Louis Cousineau, Georges Bourbonnière et Magella Robichaud, conseillers municipaux de Ville Saint-Laurent. »

Il est temps qu'on finisse par mettre de l'ordre sur l'île de Montréal. Je suis d'accord avec les buts poursuivis par le gouvernement. Ce projet indique la fin de certains petits royaumes, certains fiefs qui ne se maintenaient qu'à cause de l'intérêt personnel. Montréal était en train d'étouffer, certains projets se butaient à des difficultés qui les retardaient ou les changeaient radicalement.

Qui ne se souvient du retard survenu dans la construction du boulevard Métropolitain lorsque ce boulevard a dû franchir les frontières de la ville de Mont-Royal et de Saint-Laurent, par exemple? Qui ne sait que des municipalités auxquelles Montréal vend son eau la paient meilleur marché que les citoyens de Montréal? Tous se souviennent de l'émeute à Saint-Léonard où les policiers de Montréal ont dû assister impuissants au spectacle, paralysés de l'autre côté de la rue. Ce ne sont que quelques exemples indiquant que le moment était venu d'agir.

Mais, il faut savoir comment agir. Ce bill révolutionne les habitudes d'antan qui seront abolies, comme cela instantanément. Quand la population se réveillera, au lendemain de l'adoption du bill, elle réalisera petit à petit toutes les implications de ce bill. J'ai l'impression qu'à l'heure actuelle, devant le peu de publicité ou les réactions enregistrées, elle n'en est pas consciente. Je pense qu'il est du devoir du gouvernement d'éveiller la population à la réalité. Il ne faut pas profiter de son sommeil temporaire ou de son essoufflement pour lui passer une législation à la vapeur, même la meilleure législation.

Le gouvernement devrait avoir une suite lo-

gique dans ses idées. Pourquoi, par exemple, le bill 62 sur la restructuration scolaire de la ville de Montréal est-il envoyé à une commission, tandis que le bill 75 ne l'est pas? Pourtant, le gouvernement a entendu au sujet du bill 62 bien des commentaires à partir de la commission Parent jusqu'à aujourd'hui. Malgré cela, le gouvernement se montre prudent. Il envisage une dernière consultation avant de procéder. Quant au bill 75, qui, à part certains maires, a eu l'occasion de s'exprimer? Qu'est-ce que la population et les corps intermédiaires ont eu à dire jusqu'à maintenant? Rien ou si peu.

Cette vitesse en inquiète plus d'un, au point de susciter des rumeurs qui, si elles prennent un peu d'ampleur, donneront une couleur et une odeur curieuse au bill. Elle risquerait de discréditer le bill et le ministère. Montréal n'est pas un village; c'est la métropole du Canada. Sa population mérite-t-elle moins de considération que celle de la ville de Québec? Le bon sens exige de ne pas faire avaler un menu semblable sans s'assurer que ceux à qui le plat est destiné sachent bien de quoi il est composé.

Personnellement, je souhaite que le bill soit envoyé à la commission parlementaire afin qu'on soit mieux renseigné sur toutes ses implications et qu'on puisse entendre les objections des citoyens.

Je ne voudrais pas qu'un tel envoi à la commission signifie un enterrement ou un piétinement. Ce danger peut se corriger facilement si le ministère limite la durée ou le nombre des séances de ladite commission.

Je voudrais indiquer à ce moment-ci également que je m'oppose à un référendum sur la question. Cela coûterait très cher et il ne serait pas facile d'interpréter les réponses recueillies, surtout si le pourcentage des vo-teurs s'avérait insuffisant. Mais, alors, je pense que le gouvernement devrait fournir quand même l'occasion de s'exprimer à plusieurs citoyens qui voudraient le faire. Ce serait moins coûteux et tout aussi efficace qu'un référendum. Plusieurs questions seraient soulevées amenant des réponses, provoquant des explications. Pourquoi par exemple a-t-on choisi les divisions territoriales suggérées dans le bill plutôt que d'autres se rapprochant des divisions scolaires suggérées dans le bill 62? Pourquoi Laval et la rive sud sont-ils exclus du bill 75? Pourquoi ne pas prévoir une redistribution des pouvoirs selon les populations futures? Pourquoi avoir choisi des modes de représentativité différents pour Montréal et Québec? Pourquoi avoir présenté à la toute fin de la session les trois briques de cent pages, les bills 75, 76 et 77?

Que restera-t-il comme pouvoir réel aux municipalités, si on analyse en particulier l'article 112? Bref, M. le Président, toutes sortes de questions qui pourraient trouver réponse aux séances d'une commission parlementaire. En résumé, l'objectif est excellent, mais plusieurs questions demeurent en suspens. Trop peu de gens ont eu l'occasion de s'exprimer. Certains moyens sont trop autoritaires. Comme député, je ne suis pas personnellement complètement renseigné, et c'est pour ça que j'appuierai la motion du député de Chambly.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de D'Arcy-McGee.

M. Victor-C. Goldbloom

M. GOLDBLOOM: M. le Président, je me lève pour appuyer la motion du député de Chambly. Au départ, je voudrais, à l'instar de mes collègues, situer mon point de vue au sujet de cette motion et au sujet du projet de loi.

Je suis favorable au principe du projet de loi. Si nous étions en ce moment au débat sur la motion elle-même de deuxième lecture, il me ferait plaisir de dire que je voterai pour le principe du bill.

Je ne voudrais donc pas que mon appui à la motion soit interprété comme un moyen direct ou même détourné d'empêcher l'adoption du bill 75 ou d'en remettre l'étude à plus tard. Je voudrais — j'insiste là-dessus — que le projet de loi soit étudié maintenant, avant la fin de la présente session, et je voudrais que la Communauté urbaine de Montréal soit créée et le soit très prochainement; mais cette création devrait être le fruit de discussions utiles et satisfaisantes parmi tous les intéressés, et ceci n'a pas été le cas; donc la motion que vous avez devant vous, M. le Président.

Le ministre des Affaires municipales a dit ici en Chambre, et également en dehors de la Chambre, — parce qu'il a fait plusieurs déclarations publiques sur ce sujet — que la question de la Communauté urbaine de Montréal a déjà été étudiée durant une période de temps tellement longue que toutes les opinions sont nécessairement arrêtées, toutes les conclusions sont nécessairement tirées et tous les renseignements ont nécessairement été donnés. Donc, prétend le ministre, le projet de loi a déjà été étudié à fond et a été accepté par la quasi-totalité des intéressés. Je dois dire...

M. LUSSIER: Permettez. Question de privilège. Je n'ai pas dit que, nécessairement, tout avait été étudié. Le « nécessairement »

est de trop. Ce n'est pas ce que J'ai affirmé en Chambre et à l'extérieur de la Chambre. Enlevez le mot « nécessairement » et vous avez le sens de mes paroles.

M. GOLDBLOOM: Je ne voudrais certainement pas déformer les paroles du ministre et Je retire volontiers le mot « nécessairement ». C'est l'impression qui s'est dégagée, à mon humble avis, des déclarations du ministre, mais Je suis heureux que le ministre dise que ce n'est pas nécessairement que toutes les opinions ont été exprimées et que toutes les conclusions ont été tirées. Autant plus de raison de procéder à un examen, un court examen. Je ne préconise pas une longue étude, compliquée et controversée. Je préconise une étude sérieuse, mais brève, qui nous permettra, à nous, les membres de cette Chambre, de nous prononcer en toute connaissance de cause sur le projet de loi et, en particulier, sur certains de ses articles qui mériteraient d'être améliorés.

Nous savons que le ministre a l'intention d'apporter des modifications; déjà, nous croyons que d'autres sont nécessaires, nous serions très heureux de les étudier avec le ministre et nous croyons qu'une séance de la commission parlementaire des Affaires municipales serait le meilleur véhicule pour l'étude, pour l'acheminement de ce projet de loi vers son adoption.

Je crois donc, M. le Président, que le sujet a été étudié depuis assez longtemps et beaucoup d'opinions ont été exprimées là-dessus. Mais le projet de loi, non. Le projet de loi nous arrive; c'était le 28 novembre, le dépôt de ce projet de loi; cela fait onze jours. Je ne voudrais pas refaire l'historique qu'a tracé le député de Chambly, mais f insiste sur le fait que nous ne connaissons ce projet de loi que depuis onze jours. Avant ce jour-là, nous avions l'impression que c'était le document sessionnel numéro 199, intitulé avant-projet de Loi de la Communauté urbaine de Montréal que nous allions étudier. Mais non, c'est un nouveau projet. J'ai devant moi un court document qui a été préparé par les services de recherche de l'Opposition intitulé: Principales différences entre l'avant-projet 199 et le bill 75, et ce document contient treize différences majeures. Il y en a d'autres qui sont d'importance moindre mais il y en a au moins treize qui semblent assez importantes et qui méritent d'être étudiées devant la commission parlementaire.

Je n'en prends que quelques exemples pour illustrer ce que je veux dire. Le document sessionnel 199 prévoyait l'élection au suffrage uni- versel du président de l'exécutif de la communauté, alors que le projet de loi prévoit que le président et le vice-président de la communauté urbaine seraient élus par les douze membres de l'exécutif. C'est un changement assez important, M. le Président. Nous avons, je crois, besoin de connaître le point de vue de tous les intéressés, surtout de toutes les municipalités de banlieue, sur un changement tellement radical.

Il y a des relations tout à fait différentes qui seraient créées entre les citoyens de la région métropolitaine et le conseil exécutif de la communauté. Contrairement au document 199,il y a mise en candidature au poste de membre du comité exécutif. Dans le document 199, le membre du comité exécutif de la communauté urbaine cessait automatiquement d'être membre du conseil municipal dont il faisait partie. Dans le bill 75, il reste membre. Là aussi un changement assez important, et nous aimerions avoir le point de vue des municipalités de banlieue sur ce sujet.

Le bill 75 — c'est un sujet assez vaste, M. le Président — donne juridiction à la communauté sur l'intégration des services de protection contre l'incendie, sur les bibliothèques régionales et sur la réglementation et le contrôle de l'industrie du taxi, ce qui n'était pas le cas dans le document 199. Là aussi ce sont des sujets à discuter à fond pour savoir de quelle façon cette intégration sera réalisée, de quelle façon ce transfert de pouvoirs, cette coordination seront établis.

Il y a des éléments de ce projet de loi qui sont nouveaux.

Il y a des insistances sur des choses qui étaient facultatives dans le document 199, mais qui deviennent obligatoires dans le projet de loi 75. Donc, au lieu d'être sujet de discussion devant la communauté urbaine comme avec le document 199, ces choses-là deviennent des décisions qui sont imposées. Ces décisions ne seront pas prises par la communauté elle-même; elles auront été prises d'avance par le gouvernement, au nom de la communauté.

On parle de la constitution d'un bureau de révision, de l'établissement d'un schéma d'aménagement du territoire, de la création d'un service de santé qui devra être établi avant le 1er janvier 1972. Ce sont tousdes éléments d'un changement assez important dans l'attitude du gouvernement quant à ce projet de loi.

Dans ce projet, il y a une nouvelle prévision, c'est-à-dire que la communauté devra préparer et soumettre un projet de réaménagement des limites territoriales des municipalités. C'est une chose qui touche toutes les municipalités in-

téressées, M. le Président. Est également nouveau, dans ce projet de loi, le Conseil de sécurité publique. Ce sont toutes des choses, et j'en passe, qui ne méritent pas nécessairement une longue discussion. Cependant, parce qu'il y a des inquiétudes du côté des municipalités de banlieue, ces sujets mériteraient une discussion ouverte et franche pour nous permettre de savoir si nous devons, oui ou non, appuyer sur tous ces points le gouvernement ou si nous devons, si le gouvernement n'accepte pas un point de vue qui diffère du sien, du côté de l'Opposition, proposer et justifier des modifications au projet de loi.

M. le Président, notre motion demande des séances publiques de la commission parlementaire des Affaires municipales. Il n'y a rien d'extraordinaire dans cela. Le gouvernement en avait annoncé - cela a déjà été dit — à l'époque où le document sessionnel 199 était devant nous, il les a ensuite décommandées sans grande explication. Ces séances, qui étaient bonnes à l'automne, pourquoi sont-elles mauvaises et indésirables maintenant?

Le gouvernement s'oppose à notre motion, — semble-t-il, puisqu'il ne l'a pas acceptée — parce que, dit-il, le problème est devenu urgent. M. le Président, j'ai écouté le ministre faire son discours de présentation du projet de loi en deuxième lecture sans pouvoir trouver là-dedans l'explication et la justification de l'urgence qu'il invoque pour s'opposer, apparemment, à notre motion. J'espère toujours qu'il changera d'avis.

Qu'est-ce qui est arrivé, depuis le dépôt du document sessionnel 199 ou depuis l'annulation des séances publiques, pour rendre l'adoption du bill 75 urgente aujourd'hui?

Puisque le gouvernement n'en a pas donné l'explication satisfaisante, nous sommes en droit de demander d'être renseignés sur tous les éléments de cette urgence telle qu'elle est vue par la ville de Montréal et par les municipalités de banlieue.

Le gouvernement n'est clairement pas en mesure de prétendre qu'il a ordonné l'annulation des audiences publiques à l'automne à cause de l'urgence du problème. Ce n'est, après tout, que deux mois plus tard qu'il a présenté devant la Chambre le projet de loi 75.

De deux choses l'une: ou il y a urgence, ou il n'y en a pas. S'il y en a aujourd'hui — et il n'y en avait certainement pas quand le document sessionnel 199 a été déposé, ni quand les audiences publiques ont été décommandées — que le gouvernement l'explique, la précise, la justifie. S'il n'y en a vraiment pas, tant et plus de raisons de convoquer la commission parlementaire pour étudier à tête reposée toutes les implications.

Mais, M. le Président, soyez assuré que l'Opposition ne veut rien retarder, mais veut être en mesure de voter pour le projet de loi et tous ses articles en toute connnaissance de cause.

Au début de mes remarques, j'ai situé mon point de vue quant à la motion et au projet de loi. Je dois aussi situer le rôle que je joue dans toute cette discussion. Le comté que je représente comprend deux municipalités de banlieue et une partie importante qui se trouve dans la ville de Montréal. Il y a trois municipalités qui touchent directement aux frontières de mon comté et trois autres qui sont très près, et avec lesquelles, donc, le comté a certaines relations.

C'est depuis cinq jours seulement que j'ai des communications téléphoniques, à raison de plusieurs par jour, avec trois des maires de ces municipalités et avec d'autres personnes intéressées. Comment aurait-il pu en être autrement? Les maires et les conseillers des municipalités de banlieue n'ont pas été en mesure de prendre connaissance de ce projet de loi avant 28 novembre. Jusqu'à ce moment-là, tous pensaient comme nous que c'était plus ou moins le document sessionnel 199 que nous étions pour étudier. J'ai déjà souligné quelques différences, entre autres, qui existent entre les deux documents. Sans exception, j'insiste là-dessus, sans exception, toutes les personnes qui m'ont appelé au nom des municipalités de banlieue, individuellement et collectivement, ont demandé d'être entendues devant la commission parlementaire.

Récemment, nous avons adopté, dans cette Chambre, certaines lois en disant, d'un côté de la Chambre comme de l'autre: Faisons-en un essai loyal; si elle ne s'avère pas parfaite, nous pourrons ultérieurement la modifier à la lumière de l'expérience vécue. Je soumets que nous ne pouvons le faire, avec le projet de loi 75, parce que nous sommes sur le point de créer des structures trop massives, trop rigides, donc trop permanentes pour qu'elles soient modifiées d'année en année. Nous bâtissons pour l'avenir. Nous bâtissons pour un avenir satisfaisant pour tous les citoyens de la région métropolitaine. Nous bâtissons pour une meilleure et plus efficace administration de cette région métropolitaine. Alors, ce n'est pas le genre de loi que nous devrons ramener d'ici six mois ou un an, pour la modifier en profondeur. Nous devrons bâtir correctement dès le départ.

Quand nous l'adopterons, nous devrons être convaincus de l'approbation d'une forte proportion de la population de cette future Communauté urbaine de Montréal. Il ne faut pas oublier que les 28 municipalités dites de banlieue servent les intérêts et expriment les désirs de plus de

700,000 personnes de la région métropolitaine. Ce n'est pas peu dire.

On me répondra peut-être que ce n'est pas nécessairement parce qu'une municipalité a choisi un maire et un conseil municipal que ces personnes expriment toujours le point de vue majoritaire de cette population sur des questions de cette nature.

Je peux vous assurer, M. le Président, que dans les deux cas qui me concernent directement et dans les six autres cas qui me concernent indirectement, je sais, par mes contacts avec les citoyens de ces municipalités, indépendamment de mes contacts avec les représentants officiels, que, vraiment, sur ce point, les maires et les conseillers expriment le point de vue de leurs citoyens.

Les municipalités de banlieue discernent, dans le projet de loi 75, des problèmes spécifiques. Le ministre a dit lui-même: Qui peut prétendre que les grands problèmes des agglomérations urbaines, tels ceux de la circulation, de la sécurité publique, de la protection contre l'incendie, de la santé publique, de la pollution de l'air peuvent être résolus au niveau local? D'accord, mais quel sera le genre de collaboration? Est-ce que ce sera une collaboration imposée ou une collaboration acceptée volontairement avec approbation? C'est ce que nous devons savoir.

La formule de représentativité est-elle une bonne formule? Je me permets d'en douter. La question de la représentation de chaque municipalité par une personne qui parlera en son nom, plutôt que de donner un poids à la voix de cette personne, selon la population de sa municipalité, c'est une question qui mérite d'être scrutée à la loupe.

On a l'impression, et ici je cite certains représentants des municipalités 4e banlieue — peut-être que cette impression est fausse — mais on a l'impression que tout ce qui est payant est laissé aux municipalités individuelles et tout ce qui ne l'est pas est donné à la communauté urbaine pour que tout le monde assume le fardeau financier. C'est peut-être justifié, peut-être y a-t-il une justification dans chaque cas, pour cet arrangement. Mais, de notre part, nous voudrions savoir que cette idée, cette attitude, ce partage est accepté par tout le monde.

On dit, et je crois avec raison, que le coût de certains services aux municipalités de banlieue sera doublé si nous adoptons le projet de loi 75, tel quel, sans que ces mêmes services soient doublés en qualité ou en quantité. Il y a des explications à recevoir sur ce point aussi.

L'Opposition elle-même a une certaine expé- rience — le député de Chambly y a déjà fait allusion — l'expérience de la création de la ville de Laval, par exemple. Elle devrait avoir l'occasion de faire valoir cette expérience en interrogeant les représentants des municipalités et en commentant les points de vue que ceux-ci pourraient exprimer.

Ainsi les modifications nécessaires, et il y en a qui sont nécessaires, seront étudiées et acceptées, je crois bien, de part et d'autre et nous sortirons de cette discussion avec une meilleure loi que celle que nous avons devant nous en ce moment.

Il ne faut pas que le débat sur ce projet de loi procède par des échanges de déclarations publiques ou de conférences et communiqués de presse. Il faut que cette étude procède par une rencontre brève, une rencontre qui permettra à ceux qui ont des points de vue divergeants, peut-être, de celui du gouvernement, deles exprimer, et pour les membres de l'Opposition d'en prendre connaissance, d'en étudier la valeur et d'agir, par conséquent, de façon à améliorer le projet de loi.

Le député de Louis-Hébert, aujourd'hui chef de l'Opposition, mais à l'époque premier ministre du Québec, a dit un jour que les meilleures lois sont celles qui sont conçues par les intéressés. Je voudrais qu'il en soit ainsi avec le projet de loi 75.

Je termine par une suggestion que je voudrais pratique et qui découle de mes conversations avec les représentants des municipalités de banlieue, il est possible que le gouvernement hésite devant notre motion parce qu'il craint que les discussions soient excessivement longues, que chacune des municipalités veuille s'exprimer individuellement par la voix de son maire et peut-être par la voix de certains de ses conseillers municipaux et que d'autres groupements puissent venir s'exprimer sur le projet de loi, de sorte que nous n'en sortirions pas avant la fin prévue de la présente session.

Je suis informé —je ne suis pas mandaté pour le dire; c'est une impression personnelle que je vous transmets, mais je crois qu'elle est véridi-que — que les municipalités de banlieue ont créé un comité qui serait chargé d'étudier le problème. Si je comprends bien — j'espère que c'est le cas; le ministre pourrait facilement se renseigner précisément là-dessus — ce comité serait mandaté pour parler au nom des ces municipalités, parce qu'il semble qu'il y ait un degré assez élevé d'unanimité parmi ces municipalités-là. Si c'est le cas — cela pourrait être vérifié — ce serait de nature à raccourcir considérablement la durée des séances publiques de la commission parlementaire.

Il y aura lieu aussi —et ceci est important — pour le Front commun des employés municipaux d'être entendu devant la commission. Il y aurait, en principe, deux dépositions importantes! celle d'un comité qui représenterait les municipalités de banlieue et celle du Front commun des employés municipaux, avec évidemment certaines répliques de la part de la ville de Montréal qui se sentira sûrement visée par les commentaires des municipalités de banlieue et avec certains échanges de vues entre les membres de la commission et les opinants qui viendront devant elle. Si nous pouvons être assurés que, du côté de ceux qui demandent les séances publiques de la commission, il n'y a pas le désir d'avoir une étude très prolongée, que nous pourrons passer à travers l'étude devant la commission et l'étude en Chambre et finir par adopter ce projet de loi avant la fin de la session, il me semble que le gouvernement aurait toutes les raisons possibles pour accepter la motion proposée par l'honorable député de Chambly.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Olier.

M. Fernand Picard

M. PICARD (Olier): M. le Président, à la suite des nombreuses interventions en faveur de l'amendement proposé par le député de Chambly et aussi à la suite de l'opinion émise hier par le ministre de la Justice à l'effet que, peut-être, la nuit pourrait porter conseil, j'avais espéré que, dès la reprise du débat ce matin, le ministre des Affaires municipales aurait consenti que le bill 75 soit référé a la commission des Affaires municipales et même qu'il aurait suggéré le retrait de l'amendement présentement à l'étude.

Sur ce point, je pense que la Chambre aurait donné son consentement unanime. Malheureusement, il n'en est pas ainsi. L'Opposition se verra donc dans l'obligation de continuer ces interventions à la limite permise par les règlements de procédure, et ce jusqu'à ce que le ministre réalise que ce sont les représentants de 40% de la population totale du Québec qui désirent faire une étude sérieuse et approfondie avant de se prononcer sur le bill 75.

Il est malheureux qu'il en soit ainsi, surtout si l'on considère que l'objectif principal de ce bill, à savoir la régionalisation de certains services municipaux dans la région de Montréal, semble rallier la très grande majorité des membres des deux côtés de cette Chambre. Depuis quelques semaines, M. le Président, le ministre ne cesse de répéter qu'il y a eu dans le passé amplement d'études faites sur ce problème et qu'il est temps de passer à l'action. D'accord. Au milieu de juin dernier le ministre déposait l'avant-projet no 199 dont nous avons tous pris connaissance. Jusqu'à un certain point, je considère que ç'a été une perte de temps pour nous d'étudier ce projet-là.

Ce document de travail devant faire l'objet d'une étude en consultation avec les corps intermédiaires et tous les intéressés, et ce à la commission des Affaires municipales. Vous savez tous ce qui est arrivé de cette réunion qui devait avoir lieu au mois de septembre dernier. Elle a été annulée. La réaction quasi unanime à cet avant-projet no 199 a été des plus défavorable. C'est donc sans aucune surprise que nous avons pris connaissance, la semaine dernière, du nouveau projet de la Communauté urbaine de Montréal, le bill 75. Personnellement, ma plus grande surprise a été d'entendre le ministre des Affaires municipales dire qu'il ne voyait pas la nécessité de référer le bill à la commission des Affaires municipales, étant donné que toutes les études avaient été faites antérieurement, y compris l'avant-projet no 199.

M. le Président, le ministre, plus que tout autre en cette Chambre, du moins je l'espère, connaît les différences fondamentales qu'il y a entre les deux projets déposés. Afin d'éviter certains affrontements, le ministre a procédé par ce que j'appellerais des consultations sur rendez-vous avec certains intéressés, pas tous. Nous ne saurons peut-être jamais la nature exacte de ces conversations. Qu'en 1969 l'on procède encore par consultation privée avec certains intéressés, pour la préparation de projets de loi, cela me dépasse.

Que l'on refuse d'utiliser les mécanismes en place, les organismes en place auxquels on aime se référer comme étant la démocratie en action — je parle des commissions d'étude — cela m'oblige à me poser la question ou plutôt, je me la poserai intérieurement parce que vous allez m'empêcher de l'exprimer. De toute façon, je me demande si l'Opposition se trouvera dans l'obligation de convoquer elle-même, par ses propres moyens, les corps intermédiaires afin d'entendre leur point de vue sur la loi à l'étude. Si, à l'avenir nous devons procéder de cette façon, il est bien évident qu'il faudra retarder l'étude en Chambre de plusieurs projets de loi. Je considère que le ministre des Affaires municipales aurait avantage à considérer sérieusement la demande formulée par l'amendement présenté par le député de Chambly, amendement pour lequel je voterai et pour lequel j'invite le ministre des Affaires municipales à voter.

M. Noël Saint-Germain

M. SAINT-GERMAIN: II y a déjà assez longtemps qu'on essaie de résoudre le problème de l'harmonisation des services municipaux sur l'île de Montréal, et ceci dans les meilleurs intérêts des citoyens de la région métropolitaine. La population est très sensibilisée à ce problème et elle est tout à fait disposée à accepter toute législation qui pourrait y apporter une solution. Il faut tout de même admettre que c'est un problème qui peut se régler de plusieurs façons.

Il n'est pas nécessaire, à ce stade-ci, pour moi d'énumérer les nombreuses commissions d'étude et les nombreux projets qui ont été soumis au gouvernement comme aux citoyens en vue de résoudre ce problème. Mais le gouvernement, lui, a sa façon de le faire, et c'est le bill 75. Il me semblerait normal que le gouvernement demande les opinions et les avis des divers conseils municipaux, des syndicats qui représentent les employés municipaux qui vivent actuellement avec les structures que nous avons et qui ont certainement acquis une expérience valable au niveau de cette administration publique. Lorsque l'on dit que l'on parle depuis des années des problèmes de la région économique de Montréal et que tout ce qui avait à être dit à ce sujet a été dit, il me semble que cet argument est tout à fait non fondé et non valable. Si on a parlé de ces problèmes en général et des diverses façons particulières de le résoudre, nous avons très peu parlé du bill 75 en particulier, et il serait très important que nous sachions directement des maires et des conseillers municipaux, qui ont une longue expérience de l'administration municipale, ce qu'ils pensent premièrement des principes du bill mais surtout de ses modalités d'application qui semblent loin d'être acceptées unanimement.

C'est un bill de 373 articles. Pour le gouvernement, amener ce bill à la toute fin de la session, c'est déjà un geste peu élégant et peu sérieux. Si le gouvernement croit que c'est la meilleure façon d'écourter les discussions sur ce bill et d'en écourter l'étude, je crois qu'il fait complètement fausse route. A titre de député, il nous est absolument impossible d'accepter un tel bill sans l'avoir très longuement étudié, car on transforme radicalement l'administration de la région économique de Montréal, qui est, M. le Président, il faut bien l'admettre, la région qui contient une concentration de population et qui en plus, joue, au point de vue économique, un rôle de beaucoup supérieur au nombre d'habitants qui l'habitent.

Montréal est le coeur de la province; Mont- réal joue un rôle d'avant-garde dans le développement économique et commercial de notre province. C'est un des endroits où le gouvernement va chercher une grande partie de ses revenus, et si, par une loi, nous allions resteindre, modérer ou chambarder les choses de façon telle que, de tout cela il résulterait une difficulté de développement économique, il me semble évident que ce serait tout à fait catastrophique pour la province de Québec.

Si les députés ne peuvent connaître ce que pensent les maires et ceux qui ont une longue expérience et une expérience pratique, M. le Président, s'ils ne peuvent connaître leurs avis et leurs critiques relativement à ce bill, Je crois que le gouvernement nous prive d'une source de renseignements tout à fait nécessaires; je crois qu'en pratique, il en résultera une longue perte de temps, parce qu'il nous faudra, à nous, les députés, absolument savoir et connaître tous les éléments contenus dans les 373 articles de ce bill; et si nous sommes obligés d'aller chercher ces renseignements par bribes au niveau du ministère ou lors des études en comité, il me semble évident que cette étude sera excessivement longue et qu'elle résultera de nouveau en une perte de temps pour le législateur.

Dans un autre ordre d'idée, M. le Président, on parle depuis longtemps de la trop grande influence des fonctionnaires au niveau de l'étude de nos législations. Voilà qu'on nous amène un bill où les fonctionnaires ont eu, comme d'habitude et traditionnellement, beaucoup à dire. Nous avons actuellement le privilège d'avoir les avis d'hommes publics directement élus par le peuple, qui ont une expérience pratique de l'administration municipale, et voilà que le gouvernement refuse de les entendre et que, de nouveau, comme il le fait toujours, habituellement et traditionnellement, il fait appel exclusivement ou presque exclusivement au dire des fonctionnaires. Je ne voudrais, à ce stade-ci, diminuer en aucune sorte l'importance des fonctionnaires, et il est inconcevable qu'un gouvernement puisse se priver de leur avis.

Mais il est pénible de constater que des hommes publics élus par le peuple, comme le ministre des Affaires municipales, lui-même, d'ailleurs, ancien maire, aient un tel mépris pour les hommes qui ont été élus directement par le peuple et qui sont près du peuple, au premier niveau de tout notre système démocratique. Je crois que le refus de les entendre est pour eux une humiliation, et Je comprends leur réaction devant ce refus.

On parle aussi, depuis longtemps, de fournir aux députés de l'Opposition, dans le con-

texte des modifications de notre système parlementaire, des spécialistes ou des sommes d'argent de façon à leur permettre d'avoir un personnel qui pourrait faciliter énormément leur tâche pour ce qui regarde l'étude des diverses législations soumises par le gouvernement. Mais, alors que l'Opposition pourrait avoir à sa disposition tout un groupe d'experts de la chose municipale, le gouvernement ne se gêne absolument pas pour nous priver de ces sources de renseignement.

Je crois qu'il serait absolument important pour le gouvernement d'écouter tous les gens, d'écouter l'Opposition et de canaliser le savoir et les connaissances de tous ceux qui connaissent quelque chose au sujet de l'administration municipale pour que le bill soit le plus valable possible, toujours en gardant à l'idée que c'est un bill qui modifie profondément la région économique de Montréal qui est assurément la région la plus importante de la province à ce point de vue.

On parle aussi, depuis longtemps, de modifier nos institutions parlementaires de façon qu'elles soient de plus en plus efficaces, de plus en plus démocratiques et qu'elles puissent permettre la participation de tous les corps intermédiaires et de tout groupe d'individus ou de citoyens qui représentent directement la population. Alors qu'il a une occasion merveilleuse de faire adopter une législation où on pourrait réellement avoir, avec une grande facilité, la participation de tous les citoyens, le gouvernement dit non.

Il est absolument regrettable, M. le Président, dans notre contexte, que le gouvernement dise à toute la population qu'il n'est pas intéressé pour cette loi particulière à démocratiser son étude. Alors, je ne puis qu'être pour la motion présentée par le député de Chambly et appuyée par mon collègue, le député de Robert-Baldwin. J'espère que le gouvernement saura écouter nos avis légitimes. Pour épargner du temps et pour rendre le bill le plus efficace possible, j'ai bien confiance qu'il permettra à la commission des Affaires municipales de la Chambre d'entendre les citoyens intéressés à ce projet de loi.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): L'honorable chef de l'Opposition.

M. Jean Lesage

M. LESAGE: M. le Président, je n'ai pas l'intention de prolonger ce débat sur la motion d'amendement du député de Chambly, tendant à référer le projet de loi pour étude à la com- mission permanente des Affaires municipales. Je n'ai pas l'intention d'intervenir purement et simplement pour étirer le temps. Ce n'est aucunement notre but de ce côté-ci de la Chambre. Mes collègues avant moi, tous ceux qui sont intervenus, ont donné, en faveur de l'adoption de la motion du député de Chambly, des arguments qui me semblent péremptoires. Je ne crois pas pouvoir ajouter beaucoup à ces arguments, mais toutefois vous me permettrez de mentionner ceci: En outre du projet de loi de la Communauté urbaine de Montréal, nous avons à étudier à la suggestion du gouvernement, d'Ici dix jours, deux autres projets de loi considérables, l'un touchant la Communauté urbaine de Québec et l'autre, la Communauté urbaine de l'Outaouais.

Parlant plus particulièrement du projet de loi touchant la Communauté urbaine de Québec, que j'ai étudié et qui, dans sa rédaction, offre certaines différences notables avec le projet de loi de la Communauté urbaine de Montréal, je dis qu'il y a quand même un très grand nombre de dispositions qui sont exactement semblables. Le principe fondamental du bill est le même. Dans le cas du projet de loi de Québec et du projet de loi de l'Outaouais, il y a eu des séances de la commission des Affaires municipales dont les membres ont étudié, avec les intéressés et plus particulièrement les maires des municipalités des avant-projets de ce qui sera éventuellement la Communauté urbaine de Québec et la Communauté urbaine de l'Outaouais respectivement. Une telle étude n'a pas été faite dans le cas de Montréal. Je serai très franc et je dirai qu'une discussion avec les intéressés sur le projet de loi de la Communauté urbaine de Montréal pourrait peut-être, probablement même, rapporter assez de fruits pour que nous soyons disposés à étudier le projet de loi touchant la Communauté urbaine de Québec en deuxième lecture et directement en comité plénier, sans avoir à proposer que le projet de loi soit étudié par la commission des Affaires municipales. C'est donc, à mon sens, tout de suite, et malgré l'urgence dont veut nous convaincre le ministre des Affaires municipales, un gain de temps fort appréciable.

Le principe fondamental est le même dans les trois cas, et disons que les principes secondaires nombreux, sont très souvent sensiblement les mêmes. C'est donc, à mon sens, — je le soumets aux membres du gouvernement — un argument de poids pour que nous étudiions au moins, avec les maires des municipalités intéressées au bill de la Communauté urbaine de Montréal, avec les autorités de la ville de Montréal et avec le front commun des

employés municipaux, les principaux principes qui ressortent de ce bill qui est à l'étude. Il est clair qu'il est préférable, à mon sens, que l'étude en comité soit faite avant la deuxième lecture. Une étude après deuxième lecture, par la commission des Affaires municipales, serait d'abord une étude des principes suivant la coutume établie et ensuite une étude des articles, article par article.

A ce stade-ci, une étude par la commission des Affaires municipales s'en tiendrait au principe du bill sur lequel il y a, je crois, au moins consensus, et aussi aux principes qui découlent des diverses sections ou sous-sections du projet de loi, ce qui est différent d'une étude article par article, ce qui est moins fastidieux et qui nous permettrait de nous en tenir à ce qui compte réellement. Quitte, en comité plénier de la Chambre, à étudier le texte des modifications qu'il y aura lieu d'apporter au projet de loi, à la suite des discussions de principe qui auront eu lieu à la commission des Affaires municipales.

Cela aussi, me semble-t-il, c'est un argument de poids. Ai-je besoin d'entrer dans le détail de ces principes à ce moment-ci? Je n'en ai pas l'intention. Je voudrais cependant mentionner, au soutien de la motion de renvoi à la commission, certains points qui jettent dans mon esprit des doutes, ou tout au moins des questions auxquelles je voudrais des réponses précises.

Ainsi, par exemple — et ça c'est un principe fondamental du bill — l'étendue de la compétence de la Communauté urbaine de Montréal, de l'organisme. On propose la création d'un conseil de sécurité qui serait dirigé par un juge et dont les deux autres membres seraient le directeur de la Sûreté du Québec et le directeur de la Sûreté de Montréal. Y aurait-il lieu d'élargir le cadre pour qu'ils y ait quatre membres? Y aurait-il lieu que, à ce conseil de sécurité, soient représentées les municipalités de banlieue? C'est une question sérieuse. L'augmentation du nombre serait-elle une objection tellement forte à l'unité de décision et à la rapidité d'exécution? Je pense que c'est une question qui se pose et sur laquelle il y aurait lieu d'obtenir l'opinion des maires intéressés.

Y aurait-il lieu de donner compétence à la Communauté urbaine de Montréal à la commission des services électriques de la ville de Montréal? Cette commission est un organisme fondé par une loi provinciale et par l'intermédiaire duquel la ville de Montréal peut construire, administrer et entretenir, avec droit d'en réglementer l'usage, un système de conduits souterrains où sont placés tous les fils de télégraphe, de téléphone, d'éclairage électrique, les fils servant à la distribution de la force motrice ainsi que les câbles et lignes de transmission de pouvoir électrique.

La nature de ce service semble intermunicipale sur l'île de Montréal. La distribution de l'électricité, par exemple, ne se confine pas aux lignes d'une municipalité. Les centrales de transformation se préoccupent plus ou moins des limites des municipalités. Ainsi, par exemple, vous savez qu'on enfouit ces fils le long des des boulevards. C'est le cas du boulevard Métropolitain, et c'est cette commission électrique de la ville de Montréal qui a fait le travail tout le long du boulevard Métropolitain pour ces conduites que j'ai mentionnées tout à l'heure. C'est une question sérieuse que nous nous posons et je voudrais bien, là-dessus, avoir l'opinion des autorités de la ville de Montréal et l'opinion des autorités des villes de banlieue.

Maintenant, pour la composition du conseil, pourquoi procède-t-on différemment à Montréal qu'à Québec, surtout lorsqu'il s'agit des votes au conseil? Au conseil, la ville de Montréal aura 53 votes et les municipalités de banlieue, chacune un vote quelle que soit leur importance. Lorsqu'il s'agira de choisir les représentants des secteurs au conseil exécutif, la ville de Kirkland aura droit au même vote que la ville de Verdun. Cela veut dire quoi? Deux ou trois mille habitants, dans le cas de Kirkland, et 90,000, dans le cas de Verdun.

A Québec, le problème ne se présente pas parce qu'on a trouvé le moyen de le régler. Au conseil, chaque représentant de municipalité a droit à autant de votes qu'il y a de fractions de milliers de population à l'intérieur du territoire de la municipalité. Pourquoi ne pas appliquer cette règle à Montréal, même si elle a la majorité, pour qu'au moins, entre les villes de banlieue, on tienne compte du principe démocratique de la représentativité? C'est une question qu'il y a lieu de se poser. Les gens de la région de Montréal ne préféreraient-ils pas ce système?

On dira: Oui, à Québec c'est facile parce qu'il n'y aura qu'un représentant de la ville de Québec au conseil. Il aura droit — en supposant une population de 160,000 pour la ville de Québec — a 160 votes, tandis qu'au conseil la communauté urbaine de Montréal il y aurait 53 représentants de la ville de Montréal. On n'a qu'à prendre la population de la ville de Montréal et à la diviser par 53,000. Chacun des 53 représentants aura le nombre de votes, que donnera le résultat de la division. C'est aussi simple que cela. Il n'y a pas de problème majeur, me semble-t-il, à moins que, devant la commission parlementaire, on ne me prouve qu'il y a un problème majeur qui nous empêcherait de procéder de cette façon

pour équilibrer les votes non seulement au conseil de Montréal, mais également pour le choix des représentants des municipalités de banlieue à l'exécutif.

Le fait que chacune des municipalités de banlieue, à Montréal, aura droit à un vote au lieu d'avoir droit à un nombre de votes proportionné à sa population ne constituera-t-il pas une espèce d'empêchement à toute fusion possible? Si deux ou trois municipalités fusionnent en vertu du projet de loi, elles continueront de n'avoir droit qu'à un vote une fois fusionnées. Non pas un vote chacune, mais un vote pour les trois, si c'est une fusion de trois et un vote pour les deux, si c'est une fusion de deux. La même objection ne se présenterait pas si on adoptait pour Montréal le calcul des votes adopté pour la Communauté urbaine de Québec.

Cela aussi, c'est une question qu'il faudra vider à la commission parlementaire. Nous voudrions avoir l'opinion des autorités de la ville de Montréal et des banlieues là-dessus. Il me semble que ce sont là des suggestions raisonnables. Je pourrais continuer longtemps dans la même voie ou dans la même veine.

Une autre chose qui me semble une incongruité: Pourquoi ne pas avoir un président de la communauté urbaine? Pourquoi nommer un président d'assemblée pour chacune des séances?

Où sera la continuité? Nous avons, à Québec, un président du conseil municipal qui n'est pas le maire, c'est M. Olivier Samson. Et le président du conseil municipal préside les séances du conseil. C'est toujours lui qui les préside. Il y a continuité, et il remplit le rôle que vous remplissez, M. le Président.

Il ne cherche pas ft supplanter le maire. Il ne supplante pas l'exécutif, il préside les séances du conseil. Il y a continuité dans le rôle d'autorité que doit posséder un président d'assemblée délibérante. Alors pourquoi n'avons-nous pas un président de la communauté urbaine à Montréal? La même chose s'applique à Québec. Voici un cas où la discussion dans le cas de Montréal nous éclairera sur ce que nous devrons faire pour ce qui est du projet de loi de la Communauté urbaine de Québec.

Une des choses qui inquiètent énormément de gens, qui m'inquiètent moi aussi, c'est l'équilibre des forces entre l'exécutif proposé et le conseil proposé, il y a, à mon sens, disproportion. Les décisions du conseil seront prises à la majorité — je reviendrai là-dessus dans un instant.

Que penser de la règle du quorum? La régie du quorum proposée, c'est qu'il faut que plus que la moitié des membres du conseil soient présents: Au moins un tiers des représentants des municipalités de banlieue et un tiers des repré- sentants de la ville de Montréal. Je comprends pourquoi l'on exige ce quorum. C'est parce qu'il y a une espèce de droit de veto qui existe pour chacun des groupes, alors qu'aucune décision ne peut être prise à moins qu'un tiers des membres présents et votants des représentants des banlieues n'acceptent, et la même chose pour un tiers des membres présents et votants des membres représentant la ville de Montréal. A-lors, M. le Président, qu'est-ce qui arrive si à un moment donné les membres de la banlieue, absolument en désaccord avec la politique suivie par la majorité représentant la ville de Montréal au conseil, décident de s'abstenir de participer aux assemblées? Tout est paralysé. Ce sont des choses qu'il faut prévoir.

Ce n'est pas l'amende de $100 pour chaque absence non motivée qui peut, sur des questions extrêmement importantes, constituer un élément suffisant de conviction. Je dis que c'est à revoir, M. le Président. Je dis qu'il va falloir obtenir l'opinion des autorités de la ville de Montréal et des autorités de la banlieue sur ce point, il y a un danger, si je ne me trompe; si tel est le cas, j'aimerais mieux l'entendre dire par les représentants des villes intéressées que par le ministre. Ce sont des questions qui nous viennent à l'esprit quand on étudie le projet de loi, des questions auxquelles nous voudrions bien avoir des réponses avant d'avoir à voter en comité plénier sur chacun des articles du projet de loi.

M. le Président, les décisions du conseil, sauf exception, sont soumises à l'exécutif pour rapport. Lorsqu'une question se soulève au conseil, elle doit d'abord être soumise à l'exécutif qui fait rapport au conseil.

Il est bien dit que ce rapport ne peut être approuvé, rejeté, amendé ou retourné à l'exécutif par le conseil. Il faudrait, quand même, savoir de quoi il s'agit. Je voudrais bien connaître l'expérience de la ville de Montréal là-dessus.

M. LUSSIER: Il y a certaines choses que le chef de l'Opposition a soulevées où nous avons des amendements à apporter. Je devais les apporter ce matin, mais la rédaction est en retard. Je n'ai pas voulu me lever là-dessus parce que c'est parfaitement le droit du chef de l'Opposition de mentionner ces points. Pour ce qui est de l'article 58...

M. LESAGE: On n'a pas le droit de mentionner les numéros d'articles. Vous avez remarqué que je m'en suis abstenu.

M. LUSSIER: Alors, je ne l'ai pas mention-

né. C'est une coquille. Il faut enlever le « ne »; il n'était pas dans le texte. C'est pour ça que j'aime autant vous le dire tout de suite. Ceci n'est pas un amendement, en fait, qu'on apporte. On fait tout simplement une correction d'une faute.

M. LESAGE: L'aveu du ministre est la plus belle preuve que, dans ce domaine où nous labourons en terrain neuf, il faut se hâter peut-être, mais se hâter lentement. Il faut prendre la peine d'écouter les autres.

M. LUSSIER: J'écoute « en titi ».

M. LESAGE: Ce que J'ai craint, depuis le début, c'est que le ministre se soit rempli les oreilles de ouate, sûr qu'il était d'avoir le monopole de la vérité et le monopole de la science municipale à cause de son expérience comme maire de l'Assomption.

M. LAPORTE: Non, de Repentigny.

M. LESAGE: De Repentigny. Maire, député, ministre des Affaires municipales. Il s'est imaginé que tout ça lui a donné l'omniscience dans le domaine des Affaires municipales. Accoucheur par-dessus le marché!

M. LUSSIER: Je l'ai répété à maintes reprises: Je ne me prends pas pour un autre. Accoucheur, oui.

M. LESAGE: Si on s'en tient à la qualité du projet de loi, c'est un mauvais accoucheur.

M. LUSSIER: J'accouche des gros bébés. M. LESAGE: Des gros bébés mal faits.

M. LUSSIER: Non, ils sont encore en santé et ils vont très bien. Vérifiez, j'ai de bonnes statistiques.

M. LESAGE: Ils vont très bien avec une amputation ici, une incision là. Il change son bébé à coups d'incisions et il nous dit qu'il y aura d'autres incisions et qu'il veut l'opérer encore une fois.

M. LUSSIER: C'est un bébé qui évolue, qui grandit, qui s'améliore.

M. LESAGE: Oui, mais à coups d'opérations. Cisaille ici, cisaille là. Le ministre vient de l'admettre. C'est l'aveu du ministre qu'il y a des modifications à apporter encore, donc, que son bill, qui était si bien fait, dont il se vantait lors de la présentation en première lecture et de la présentation en deuxième lecture, méritait et mérite encore d'être étudié à fond.

M. LUSSIER: Vous exagérezpas mal.

M. LESAGE: Le ministre m'a laissé entendre que, sur presque tous les points que j'ai mentionnés depuis le début, il y avait des modifications à apporter.

M. LAPORTE: D'ailleurs, le ministre est porté à changer d'idée.

M. LUSSIER: Sur certains points. Vous savez fort bien que vous exagérez quelquefois.

M. LESAGE: Pour ce qui est des amendements que le ministre veut proposer, il en a été question avant le dîner hier soir; il en a été question deux fois durant la soirée hier soir. Nous devions les avoir d'un instant à l'autre et nous n'avons rien encore. Nous sommes à midi et demi et nous n'avons rien encore.

M. LAPORTE: Dépêchez-vous de les déposer; vous allez encore changer d'idée.

M. LUSSIER: N'ayez pas peur. Cela va être prêt.

M. LESAGE: Ne nous dites pas que vous ne changerez pas d'idée, parce que vous allez sans doute changer d'idée sur certains points.

D'ailleurs, l'homme qui ne change jamais d'idée, il y a une place pour lui, c'est derrière les barreaux.

M. LUSSIER: Bon!

M. LAPORTE: Dans ce cas là, vous êtes en sécurité.

M. LUSSIER: Merci, vous avez fait un bon diagnostic!

M. LESAGE: Une des autres choses sur lesquelles il y a lieu de demander l'opinion et des autorités de la ville de Montréal et des autorités de banlieue, c'est la suivante; lorsque le conseil, d'après le projet de loi, n'a pas pris de décision à la date limite d'un délai qui est imparti par la loi, automatiquement le ministre des Affaires municipales devient la compétence qui a le droit de trancher le débat. Je dis, M. le Président, qu'il doit certainement y avoir moyen de trouver des façons plus démocratiques de régler les

impasses que de les laisser à la décision d'un homme, quelque expérimenté qu'il soit comme ancien maire d'une petite ville et comme ministre des Affaires municipales. Je dis qu'il y a certainement des façons plus démocratiques d'imposer une décision à une population de plusieurs millions de personnes, parce que c'est ça, ne nous y trompons pas, c'est imposer une décision à la population de l'île de Montréal qui comporte le tiers de la population de la province, et cela par la décision d'un seul homme. Ce n'est pas le lieutenant-gouverneur en conseil, pas la commission municipale, mais le ministre des Affaires municipales.

M. PAUL: L'honorable chef de l'Opposition ne pourra toujours pas dire que nous ne reconnaissons pas la haute compétence du ministre des Affaires municipales.

M. LESAGE: C'est-à-dire que c'est lui qui se reconnaît. C'est lui qui se la reconnaît.

M. LUSSIER: Je remercie M. le chef de l'Opposition parce qu'il nous dit, qu'en fait, Je serai ministre des Affaires municipales en 1972 et que si je suis ministre des Affaires municipales en 1972, cela voudra dire que l'Union Nationale sera au pouvoir.

M. LESAGE: M. le Président, il fallait bien, que voulez-vous? D'ailleurs, ce n'est pas seulement en 1972, il y a certains délais d'impartis qui expirent avant 1972. Il y en a avant 1972, que le ministre relise son projet de loi.

M. LUSSIER: Il y en a un en 1972, et il y en a un en 1973.

M. LESAGE: Oui. Il y en a trois.

M. DEMERS: II est au courant de son projet de loi.

M. LESAGE: Ce serait bien le bout s'il n'était pas au courant, s'il n'était pas au moins aussi au courant que je le suis, depuis le temps qu'il le triture, son bébé! Ou son madrier! Appelons-le comme on veut.

M. LUSSIER: Je le flatte. Je le flatte.

M. LESAGE : Cela produit de drôles de résultats!

M. le Président, autre question. Est-il opportun d'avoir le principe de l'adoption automatique du budget? C'est une question que j'aimerais bien poser aux maires de banlieue. Et, en par- lant de budget, le ministre a parlé d'un budget de $72 millions. Il a mentionné cela au cours d'une entrevue avec les maires, je crois, il ne l'a pas dit en Chambre, du moins, Je ne l'ai pas entendu.

M. LUSSIER: Avec les maires, hier matin.

M. LESAGE: Avec les maires, hier matin, il a mentionné un chiffre de $72 millions.

M. LUSSIER: Les 29 maires.

M. LESAGE: Il serait important qu'il explique et aux autorités municipales concernées et aux membres de l'Assemblée nationale le détail de cette estimation budgétaire de $72 millions. Nous voudrions être capables de l'examiner. Est-ce que le système proposé pour la perception des taxes, qui peut amener à un moment donné double administration de perception, est recommandable? Est-ce qu'il vaudrait mieux faire percevoir les taxes au complet par la communauté urbaine ou prendre le système qui prévaut dans le cas des commissions scolaires, alors que les taxes sont perçues par les commissions scolaires locales et que la part des régionales est versée par les locales?

Je pense qu'il serait important d'avoir, sur ce point, l'opinion d'hommes d'expérience en administration municipale. Ce sont là, à mon sens, autant de questions sur lesquelles nous sommes justifiés de demander une discussion avec les intéressés. D'ailleurs, j'ose espérer que, pour une fois, le ministre s'est laissé convaincre, que ses collègues se sont laissés convaincre et que lorsque nous reviendrons, après la suspension du débat, le gouvernement sera disposé à accepter que les députés, parce que même si Je ne suis pas membre de la commission des Affaires municipales, j'ai l'intention d'entendre les intéressés m'éclairer avant d'avoir à donner mes votes, non pas en deuxième lecture, Je suis favorable, mais sur chacun des articles du projet de loi, en comité plénier. J'espère alors que le ministre et ses collègues consentiront que nous entendions au moins les autorités municipales concernées de même que les représentants du Front commun des employés municipaux de l'fle de Montréal.

M. PAUL: M. le Président, comme j'ai l'intention de présenter une argumentation lourde de conséquences, Je demanderais la suspension du débat Jusqu'à 3 heures cet après-midi.

M. LESAGE: Il est une heure moins vingt, M. le Président, jusqu'à deux heures et demie? Ah, trois heures, oui c'est vrai.

M. PAUL: Trois heures.

M. LESAGE: Si vous acceptez d'aller en comité, nous allons retourner aux travaux...

M. PAUL: Ce n'est pas certain.

M. LESAGE: ... pênitenciaires du ministre de la Justice.

M. PAUL: Ce n'est pas certain, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à trois heures.

Reprise de la séance à 15 h 2

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable ministre des Richesses Naturelles.

Commission des Richesses naturelles

M. ALLARD: M. le Président, je voudrais demander le consentement unanime de la Chambre pour revenir à la période des questions. Je voudrais immédiatement avertir que la commission parlementaire des Richesses naturelles se réunira lundi matin, à 10 h 30, pour entendre la commission de l'Hydro-Québec, sur toutes les questions qui sont en discussion actuellement.

M. LESAGE: Est-ce que je dois comprendre, M. le Président, que le président et les membres de la commission hydro-électrique de Québec seront présents...

M. ALLARD: Ils seront tous présents.

M. LESAGE: ... et que l'intention est de laisser savoir aux membres de la commission quelle est la politique de l'Hydro, en ce qui touche la construction de Manic-3 et la disposition éventuelle de l'équipement lourd de construction?

M. ALLARD: Les membres de la commission seront présents et répondront aux questions concernant Manic-3. Quant à ce qui concerne l'équipement lourd, on m'a déjà informé — mais vous pourrez continuer à les interroger — que ce qui était actuellement en vente était ce qui était déclaré surplus par l'Hydro.

M. LESAGE: Evidemment, on déclare surplus de la machinerie dont on n'a pas l'intention de se servir, et par conséquent l'importance des surplus dépend de la politique de l'Hydro dans le domaine de la construction des barrages. Alors tout ça fait partie d'un tout.

M. ALLARD: Disons, dans un cas par exemple, je sais qu'il y a en vente un aréna qui est déclaré surplus, étant donné que Manic-3 va être un endroit où on n'aura pas besoin d'une telle construction.

M. LESAGE: Ce ne sont pas des arénas...

M. ALLARD: Alors il y a beaucoup de bâtisses qui sont en vente, parce qu'ils n'en ont pas besoin.

M. LESAGE: Ah! s'il n'était seulement question que de bâtisses, ce serait bien différent, mais il y a de la machinerie lourde, comme des pelles mécaniques de sept verges, par exemple, qui ont été vendues. Alors c'est ça qui nous inquiète, et nous serons présents en force.

M. ALLARD: C'est ça. M. LESAGE: Lundi matin...

M. ALLARD: Alors lundi matin, 10 h 30, à la salle 81, je pense bien.

M. LESAGE: A 10 h 30, à la salle 81, la salle des commissions.

M. ALLARD: A 10 h 30. Et j'ai demandé aussi à l'Hydro si, jusqu'à maintenant, ils avaient des informations concernant la chute des pylônes, de bien vouloir nous les communiquer et aussi répondre aux questions concernant ce problème,

M. MAILLOUX: M. le Président, vous comprendrez qu'au sujet du problème dont parle le ministre des Richesses naturelles, j'espérais au moins que l'Hydro-Québec fasse rapport de la commission d'enquête qui est sur place depuis bientôt quatre semaines, avant que nous puissions discuter en commission.

M. ALLARD: C'est ça.

M. LESAGE: M. le Président, ce matin, j'avais demandé la permission de revenir à l'article « motions non annoncées ». J'avais obtenu, à ce moment-là, le consentement unanime et le leader de la Chambre avait également réclamé le même privilège.

Alors, je fais motion pour que le nom de M. Choquette soit substitué à celui de M. Cliche sur la liste des membres de la commission des Affaires municipales.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. PAUL: M. le Président, je voudrais faire motion pour que les noms de MM. Cour-noyer, Léveillé, Beaudry et Crôteau soient substitués à ceux de MM. Boudreau, Desmeules, Picard (Dorchester) et Shooner comme membres de la commission des Affaires municipales.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. PAUL: Article 3, M. le Président.

Bill 75 Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: Reprise du débat sur la motion d'amendement de l'honorable député de Chambly à la motion de l'honorable ministre des Affaires municipales, proposant que le bill 75, intitulé Loi de la Communauté urbaine de Montréal, soit maintenant lu la deuxième fols, lequel amendement se lit comme suit: « Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant tous les mots après le mot « que » par les suivants: « Cette Chambre est d'avis que vu l'Intérêt public et général qu'éveille dans la province le bill 75, Loi de la Communauté urbaine de Montréal, « a) Que le paragraphe 1 de l'article 536 du règlement, qui exige que tout bill public soit lu deux fois avant d'être amendé ou renvoyé à un comité, soit suspendu; « b) que ce susdit bill soit référé à la commission des Affaires municipales et que cette commission soit autorisée à slgéer pendant que la Chambre est en séance et même les jours où la Chambre ne tient pas de séance, avec pouvoirs d'entendre des témoins et d'envoyer chercher les personnes, les pièces ou dossiers dont elle aura besoin et de faire rapport à la Chambre.

M. PAUL: M. le Président, juste avant la suspension de nos travaux pour l'heure du déjeuner, j'ai informé la Chambre que j'avais l'intention de participer à l'étude de cette motion de l'honorable député de Chambly.

Je voudrais que le point de vue du gouvernement sur cette motion soit exprimé par notre collègue, l'honorable ministre des Affaires municipales, à qui, quant à moi, je suis prêt à laisser la parole immédiatement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales.

M. Robert Lussier

M. LUSSIER: M. le Président, à entendre toutes les interventions qui ont eu lieu depuis hier après-midi, je suis heureux de constater que le principe du bill est accepté.

Cependant, en écoutant très attentivement les opinants, je me suis rendu compte que certaines inexactitudes avaient été dites. J'aimerais rectifier certaines choses le plus brièvement pos-

sible. On a beaucoup parlé de l'avant-projet déposé au mois de juin de cette année; cet avant-projet est fort ressemblant ou encore, le bill 75 est fort ressemblant à cet avant-projet no 199.

Si vous voulez bien, nous nous référerons à cet avant-projet. Si nous regardons le comité exécutif, il était composé de cinq membres de la ville de Montréal, de quatre des banlieues et du président nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil. Ce qui est actuellement proposé dans le projet est de sept et cinq membres. Vous constaterez que si, par exemple, un membre du comité exécutif de la ville de Montréal qui siège à la Communauté urbaine était élu président du comité exécutif, le président du comité exécutif dans ce projet de loi, n'a pas de vote prépondérant. Il arrive que c'est tout à fait ressemblant. C'est comme si un maire avait été élu avec six des siens et qu'il serait obligé d'administrer avec cinq membres d'une autre équipe. Si nous faisons le compte, cela devient six, cinq et un. Si c'est le contraire, évidemment, la position des villes de banlieue s'en trouve renforcie et cela ressemble encore à l'avant-projet. Les membres du comité exécutif — ceci est un amendement que nous avons apporté après que la plupart des représentants municipaux nous aient dit la même chose — ne perdent pas leur sens d'éligibilité au niveau local.

Pour ce qui est du conseil de la communauté, ce conseil est de la même composition que l'avant-projet le proposait. Pour ce qui est des fonctions, je vous les énumère ici, et vous verrez que, d'après cette énumération, les fonctions sont sensiblement les mêmes que celles qui étaient proposées lors de cet avant-projet:

L'évaluation des biens imposables, l'établissement d'un plan directeur du territoire — nous l'appelons cette fois-ci le schéma d'aménagement du territoire; à notre avis, ce sont des termes qui sont conformes au rapport La Haye — l'établissement d'un service centralisé de traitement des données, le contrôle de la pollution de l'air, l'uniformisation et la réglementation de la circulation, l'entretien des chemins d'hiver, l'établissement d'un système intermunicipal d'eau potable, des égouts intermunicipaux et l'ouvrage intermunicipal d'épuration des eaux, l'intégration des services de police et de protection contre l'incendie sur le territoire de la communauté, les dispositions des ordures et la santé publique.

Si vous comparez les deux, c'est sensiblement la même chose. Au point de vue des finances, le financement se fait de la même façon, mais en plus nous avons ajouté des subsides. Et c'était aussi au tour de la Commission de transport de Montréal de devenir une commis- sion de transport rattachée à la communauté urbaine.

Pour ce qui est de l'intégration de la police, une recommandation très ferme des municipalités de banlieue par le comité des sept chargé de représenter les villes de banlieue nous suggérait très fortement qu'une commission de police préside à l'administration et surtout à la préparation, s'il était pour en avoir une, d'une intégration partielle ou totale de la police, de tous les corps de police sur l'île de Montréal. Avec cette énumération rapide, vous pouvez considérer, je pense bien, que cet avant-projet et le bill 75 ont des bases semblables, que le projet 75 est évidemment une amélioration de l'avant-projet, que cet avant-projet a été discuté à plusieurs niveaux et que les principes que nous retrouvions dans l'avant-projet, nous les retrouvions aussi dans la Communauté urbaine de Québec et celle de l'Outaouais.

Les consultations elles ont été très nombreuses. Ce n'est pas parce que j'aime les grosses choses, mais je veux simplement vous montrer un résumé des consultations que nous avons faites, uniquement un résumé.

On a parlé — et Je veux en donner un résumé encore plus bref — des projets 199, 200 et 201 de Québec, de l'Outaouais. Il y a eu des consultations depuis près de deux ans dans ces trois régions.

Dans la région de Québec, il était plus facile, parce que le terrain et l'atmosphère étaient moins gaspillés, moins pollués qu'ailleurs, nous avons pu faire, au tout début, des conférences des maires. Nous avons publié sept cahiers d'information de façon telle que cela serve de base de discussion, que les gens puissent connaître, par des statistiques compilées au ministère, exactement ou le plus exactement possible la situation économique, financière, politique, administrative des villes du Québec métropolitain.

Nous avons aussi tenu une journée d'assemblée devant la commission permanente des Affaires municipales. Plusieurs sont venues se faire entendre, mais, à la suggestion de M. le maire Lamontagne, nous avons consenti que ces séances — selon l'opinion des gens qui y assistaient, elles ne donnaient pas satisfaction pour l'information qu'on voulait en retirer — nous avons fait par groupe de quelques maires et des conseillers des séances d'information. Cette façon de procéder a été répétée dans la région de l'Outaouais. Ces consultations sur les principes mêmes et les principes secondaires du bill nous ont appris évidemment beaucoup de choses et nous ont amenés à proposer et à inscrire dans le projet de loi que vous avez devant vous des amendements que nous avons trou-

vé très logiques. Nous avons toujours dit, comme certains membres de l'Opposition, que ce sont des gens qui sont situés au niveau du territoire et qui tous les jours doivent administrer avec les outils que nous fabriquons ici, ils doivent, non pas eux seuls, mais ils doivent participer à la préparation de ces lois. Mais disons que ce que nous avons appris au niveau de Québec, ce que nous avons appris au niveau de l'Outaouais, ce sont des remarques qui se ressemblent beaucoup.

L'administration municipale, même si elle est plus considérable et plus volumineuse à certains endroits, est, dans ces agglomérations urbaines, fondamentalement et essentiellement la même. Il est évident que certaines régions, à cause des caractéristiques sociologiques et géographiques, du chiffre de la population, ou encore des caractéristiques selon l'évolution de l'histoire, doivent posséder certaines dispositions particulières dans leur charte ou dans les structures administratives. Mais ce sont des changements ou des modifications mineurs, secondaires, et non pas des modifications en profondeur ou substantielles à cette philosophie ou à l'économie de ces lois.

Je vous ferai part, uniquement, d'une façon un peu particulière, des consultations et de la participation au niveau de Montréal. Depuis une dizaine d'années, dans la région de Montréal, il y a eu huit rapports d'étude au moins ou de commissions d'enquête sur les problèmes métropolitains de Montréal. Les rapports suivants ont été étudiés par le ministère des Affaires municipales:

Le rapport de la commission d'étude des problèmes métropolitains de Montréal; on l'a surnommée, celle-là, la commission Paquet;

Le rapport sur un organisme métropolitain pour le grand Montréal; à cette époque c'était le comité Croteau;

Le troisième rapport, celui de la commission d'étude des problèmes intermunicipaux de l'île de Montréal, surnommée la commission Bller; il faut noter qu'après le rapport Blier, la CCI — le Conseil de coordination des villes de banlieue de l'île de Montréal — préparait elle aussi un contre-mémoire et le publiait, le faisait parvenir au ministère des Affaires municipales.

Il existe aussi des rapports d'étude sur les problèmes intermunicipaux de l'île Jésus, la commission Sylvestre; aussi le rapport « The Regional Administration for Montreal, personal view », de M. Harry Lash; il existe encore un autre rapport, celui de la Commission d'étude des problèmes intermunicipaux de la rive sud, le rapport numéro 1, de la commission Lemay. II y a encore la commission provinciale pour es- timer les finances du réaménagement municipal de la rive sud du Saint-Laurent, face à Montréal.

Le huitième rapport serait celui de la Commission provinciale d'urbanisme, la commission La Haye. En plus, nous avons publié l'avant-projet, comme je le disais tout à l'heure, en juin 1969, qui a pu être discuté à différents niveaux. Evidemment, celui de Montréal aussi. Nous avons eu des consultations publiques et des rencontres avec les intéressés privément pour connaître le mieux possible la situation et leur point de vue sur les problèmes municipaux de l'Ûe de Montréal.

L'Union des municipalités du Québec, elle aussi, sentant que les problèmes étalent urgents et qu'il fallait mettre la main à la pâte, a consenti à changer l'ordre de travail de ses comités et a consacré une journée complète d'étude aux communautés urbaines et régionales. Elle a formé un comité spécialement chargé de la communauté urbaine de Montréal; l'autre comité s'occupait des autres communautés urbaines, par exemple, de la communauté régionale de l'Outaouais.

L'association des villes de banlieue s'est réunie après un télégramme que je lui envoyais pour l'informer que, dès cette session-ci, on présenterait un projet de loi et lui dire, évidemment, qu'il fallait qu'elle fasse diligence pour présenter son rapport sur l'avant-projet no 199.

Le ministère des Affaires municipales a mis en parallèle chacun de ces rapports pour dégager les recommandations qui étaient identiques dans chacun d'eux ou celles qui étaient des propositions divergentes. C'est ainsi que nous avons relevé les propositions concernant les territoires de chacun des rapports, les structures, les hypothèses de base pour chacun des organismes proposés, leurs pouvoirs respectifs, les méthodes ou mécanismes de financement proposés par chacune de ces études.

Evidemment, il n'était pas nécessaire de reprendre l'ensemble de ces études pour préparer les dossiers techniques, comme la chose a été faite pour la région de Québec et pour la région de Hull. Un bon nombre de ces rapports s'appuyaient déjà sur une étude poussée et aussi sur une consultation où un grand nombre de municipalités et de corps intermédiaires avaient présenté des mémoires à chacune des commissions d'étude. Le nombre de mémoires présentés de 1955 à 1969 à ces différentes commissions ou comités d'étude dépasse les 200.

Pour préciser certains points importants contenus dans ces différents rapports, les autorités du ministère ont eu un certain nombre de rencontres avec les représentants du comité in-

termunicipal de coordination de l'Ile de Montréal et les autorités de la ville de Montréal. Plus particulièrement, deux mécanismes de consultation ont été constitués, concernant le plan témoin de Montréal et concernant la Commission de transport de Montréal.

En ce qui concerne le plan témoin de Montréal, une rencontre a eu lieu en septembre 1968 où les dirigeants du service d'urbanisme de Montréal sont venus présenter aux autorités du ministère le contenu des études qui avaient été faites par ce service dans le cadre du plan témoin de Montréal. A la suite de cette présentation, un comité technique composé des dirigeants du service d'urbanisme de Montréal et des responsables du bureau du plan du ministère des Affaires municipales, a été constitué aux fins d'analyser l'ensemble du programme d'étude complétant le plan témoin de Montréal. C'est ainsi, par exemple, que sept projets d'étude ont été soumis au ministère pour recevoir une aide financière. Trois de ces projets, plus particulièrement, ont fait l'objet d'une discussion et font encore présentement l'objet d'une analyse aux fins d'une aide financière par la Société d'habitation du Québec, en liaison avec la Société centrale d'hypothèques et de logement.

Le ministère a donc eu accès à un très important nombre de dossiers du service d'urbanisme de la ville de Montréal, division des études d'ensemble sur les grands problèmes de développement et d'aménagement de la région de Montréal. On sait en effet que l'étude du plan témoin a porté sur un rayon de 35 milles autour de la ville de Montréal.

Concernant la Commission de transport de la ville de Montréal, le ministère des Affaires municipales, à la suite d'une décision de l'ancien premier ministre, M. Johnson, lors de la présentation d'un bill sur la Commission de transport de Montréal, a constitué un comité d'étude composé de représentants de la ville de Montréal, de représentants des villes de banlieue de l'Ile de Montréal et de représentants du ministère des Affaires municipales. Ce comité a tenu quinze réunions d'étude à partir du 16 août 1968 au 13 juin 1969.

Le comité était composé des membres suivants: M. Lucien L'Allier, président de la Commission de transport de Montréal; M. Jean-Jacques Bouvrette, trésorier de la Commission de transport de Montréal; M. Jean Labelle, membre du comité exécutif de la ville de Montréal; Me Jacques Viau, représentant des villes de banlieue; M, Roger Charbonneau, directeur de l'école des Hautes études commerciales, représentant les villes de banlieue; M. Raymond Lacasse, spécialiste en transport, représen- tant du ministère des Affaires municipales; M. Yvon Tremblay, directeur du bureau du plan; M. Alain Lamontagne, directeur des études économiques du bureau du plan; et M. Jean-Jacques Lemieux, chargé de mission pour la région de Montréal, du ministère des Affaires municipales.

Des représentants des principales compagnies de chemins de fer, du bureau du métro, du ministère de la Voirie ont été appelés à rencontrer les membres du comité. Une étude des mécanismes administratifs et financiers de la Commission de transport de Montréal a été faite ainsi qu'une réflexion sur les mécanismes futurs administratifs et financiers.

De même, certains membres du comité ont fait un voyage d'étude à Boston pour étudier les structures de l'exploitation du transport en commun du Boston métropolitain.

De même aussi, un certain nombre de membres a participé à des conférences de transport urbain qui se sont tenues à Toronto le printemps dernier.

A la suite des études faites antérieurement, à la suite de leur analyse et de consultations auprès des principaux intéressés, les autorités du ministère des Affaires municipales ont préparé la rédaction de l'avant-projet de loi numéro 199. Plusieurs réunions, discussions, rencontres et consultations ont eu lieu sur cet avant-projet de loi.

L'Union des municipalités a d'abord créé un comité qui a étudié l'avant-projet de loi numéro 199. Au cours de ce même congrès, M. Lucien Saulnier, président du comité exécutif de Montréal, a présenté une conférence au cours de laquelle il a fait connaître ses impressions sur cet avant-projet de loi numéro 199.

Par ailleurs, à la suite de la grève des policiers et des pompiers de la ville de Montréal, plusieurs rencontres ont eu lieu entre les représentants de la ville de Montréal, présidées par M. Lucien Saulnier, et les représentants du gouvernement provincial, sous la direction de M. le premier ministre Bertrand.

Les villes de banlieue ont elles aussi fait parvenir, à la suite de la ville de Montréal, des recommandations quant à la structure du futur organisme de la Communauté urbaine de Montréal.

En somme, si la consultation a été légèrement différente dans la région de Montréal de celles conduites dans les régions de l'Outaouais et du Québec, il est permis d'affirmer que, depuis une dizaine d'année, la plupart des dirigeants municipaux et des dirigeants socio-économiques ont eu amplement l'occasion de faire connaître leur opinion concernant la créa-

tion d'un organisme métropolitain de l'Ile de Montréal. Si cette consultation a été légèrement différente, c'est parce que la situation entre les autorités des différentes villes était — je pense bien qu'on peut le dire sans insulter personne — à son plus bas niveau. Ce n'est que tout récemment que nous avons pu les faire se rencontrer et discuter de leurs problèmes ensemble.

Mais, c'est un événement tout à fait nouveau. Je pense que cette énumération, la plus courte possible, a pu démontrer le sens démocratique et aussi toute la consultation que nous avons voulu faire.

Nous savons aussi que ce n'est pas parce qu'un projet de loi est présenté en première lecture qu'il est adopté tel quel. Nous connaissons la vigilance des gens de l'Opposition, la compétence aussi d'un certain nombre de ses membres.

M. LESAGE: Les compliments ne vous avanceront à rien.

M. LUSSIER: Cela peut toujours faire quelque chose.

M. PINARD: Cela fait plaisir.

M. LUSSIER: Vous n'aimez pas ça que je vous dise de temps en temps ce que je peux penser de vous?

M. LESAGE: Je ne veux pas être obligé de vous rendre la pareille.

M. LUSSIER: Vous me l'avez déjà rendu auparavant.

Le mécanisme qui existe à l'Assemblée nationale, qui n'est pas nouveau, a été mis en place parce qu'on savait que tout projet de loi, tout acte humain, quel qu'il soit, est perfectible.

C'est encore à l'Assemblée nationale que siègent les élus provinciaux du peuple et c'est à eux qu'il revient de prendre les responsabilités de voter une loi. Tout le monde sait qu'il existe une deuxième lecture; tout le monde sait qu'il existe un comité plénier et que c'est à cette étape que l'on étudie un projet de loi article par article. Nous pouvons améliorer un projet de loi à toutes ses phases.

Ce serait faire insulte à la législature de ne pas mentionner le fait qu'il appartient en premier lieu — d'autant plus que nous avons pratiqué cette consultation avec les intéressés — à l'Assemblée nationale de prendre ses responsabilités et de discuter ce projet de loi à tous les niveaux. Conscients en premier lieu que l'Assemblée nationale doit prendre ses respon- sabilités et que les gens qui administrent au niveau local doivent aussi être consultés avant l'adoption finale d'un projet de loi, nous les avons consultés avant la rédaction de l'avant-projet et après sa publication. Avant la rédaction du projet de loi 75, nous avons de nouveau attendu une dizaine de jours.

Nous avons consulté les 39 maires hier matin. Hier après-midi, nous avons rencontré de nouveau le comité des sept avec le président M. Saulnier et nous avons épluché en partie — pour employer une expression populaire — ce projet de loi no 75. D'une entente ou d'un consensus qui s'est dégagé lors d'une réunion de l'après-midi, nous avions trouvé une formule pour qu'avant la publication ou avant de passer en comité plénier il y ait une conférence des maires de l'île de Montréal, demain à onze heures. Cette conférence a été convoquée hier, dans la soirée, après ce consensus du comité des sept et du président M. Saulnier.

C'est une formule que nous avons employée au niveau de Québec et de l'Outaouais, qui nous a profité beaucoup et qui profite, je pense bien, à cette population-là aussi. Comme je le disais tout à l'heure, c'est la première fois que nous pouvons réunir tous les intéressés de l'île de Montréal pour les falres discuter de leurs problèmes. Cette solution nous permettait de connaître et d'améliorer, à ce niveau, de même qu'au niveau de l'Assemblée nationale, ce projet de loi no 75. Si les gens de l'Opposition avaient voulu participer à cette conférence des maires nous n'avions pas d'objection, d'autant plus que, la semaine dernière...

UNE VOIX: Nous n'avons pas été invités.

M. LUSSIER: Laissez-moi finir. Je n'ai pas fini.

D'autant plus que la semaine dernière le Front commun des employés municipaux se présentait ici à Québec après que nous lui ayons donné un rendez-vous. Auparavant, M. le chef de l'Opposition et aussi le chef du P.Q., M. le député de Laurier pouvaient les rencontrer. Tout s'est bien passé, et les gens sont satisfaits de ces rencontres. Nous pensions qu'avec cette formule tout le monde serait satisfait et que le projet de loi présenté au mois de novembre pourrait être adopté vers la fin du mois de décembre, il n'y a rien, je pense bien, de vaporeux là-dedans.

Ce matin, surtout en écoutant certains membres de l'Opposition, on a senti que l'unanimité s'était faite au sujet de l'acceptation du principe du bill. On nous donnait l'assurance que le débat serait bref et concis. On nous donne aussi, selon

les propos tenus en matinée par M. le chef de l'Opposition, l'assurance que ces débats ne seront pas politisés, mais au contraire serviront à l'amélioration de cette loi extrêmement nécessaire pour le progrès économique et industriel de cette population de la ville de Montréal qui est divisée entre 29 administrations qui souvent tirent à hue et à dia, ce qui peut favoriser en partie une certaine stagnation. On a senti aussi que les gens de l'Opposition voulaient être mieux informés et mieux renseignés. Je pense qu'il y a d'autres moyens, mais disons que c'est peut-être un moyen qu'eux-mêmes aussi se renseignent et participent à une rédaction peut-être améliorée d'un projet de loi, comme c'est leur prérogative et leur responsabilité.

Ce qui m'a le plus impressionné, ce sont les paroles de certains députés, surtout de M. le chef de l'Opposition, qui a manifesté sa ferme intention que le projet de loi soit approuvé avant la fin de cette session. Et, en plus, après des consultations avec mes collègues, j'ai le plaisir de présenter un sous-amendement à l'amendement de l'honorable leader de l'Opposition: Que la motion en discussion soit sous-amendée en y remplaçant les mots « avec pouvoir d'entendre des témoins et d'envoyer chercher les personnes, les pièces ou dossiers dont il aura besoin et de faire rapport à la Chambre » par ces mots-ci: « Avec instruction d'entendre le maire ou son représentant de chacune des municipalités de l'île de Montréal, le président du comité exécutif de la ville de Montréal, deux représentants du Front commun des employés municipaux, et de faire rapport à la Chambre ».

M. PINARD: Lui n'a pas besoin de secon-deur?

Adoption du sous-amendement et de l'amendement amendé

M. LESAGE: M. le Président, disons d'abord que, si ma mémoire me sert bien, l'amendement n'est pas régulier. N'est- il pas exact qu'on ne peut pas amender en remplaçant des mots, mais qu'on doit biffer des mots et substituer?

J'attire l'attention de mes collègues de l'autre côté sur ce point de règlement. Cela n'a aucune espèce d'importance, je ne fais que le mentionner, parce que l'on s'en est servi. Le gouvernement, le leader du gouvernement, s'est servi de cette pécadille commise par des députés de ce côté-ci pour faire déclarer des sous-amendements contraires aux règlements.

M. PINARD: C'est vrai.

M. LESAGE: Alors, j'aime bien attirer l'attention du leader du gouvernement sur le fait que lorsque l'on fait des amendements et des sous-amendements, on ne remplace pas mais on substitue après avoir retranché des mots. C'est ce qu'on fait en définitive, mais je me souviens trop bien que le leader du gouvernement a voulu nous donner une leçon, à un certain moment, pour que je ne la lui rappelle pas. Les privilèges de la couronne, ça existe encore.

M. PINARD: Oui, mais ça peut changer.

M. LESAGE: Je suis déçu que le sous-amendement s'en tienne strictement à suggérer d'entendre le maire ou son représentant de chacune des municipalités de l'île de Montréal, le président du comité exécutif de la ville de Montréal ainsi que deux représentants du Front commun des employés municipaux. Il se peut fort bien qu'au cours des délibérations de la commission, il arrive un moment où nous voudrions, par exemple, entendre, sur une question fiscale, le trésorier d'une ville, son secrétaire, son gérant, sur un point particulier. Il peut fort bien arriver qu'après que les représentants du Front commun des fonctionnaires municipaux d'une part, et le représentant des fonctionnaires municipaux des villes de banlieue se soient fait entendre, que nous désirions entendre un représentant de l'Association de bienfaisance des policiers et pompiers de Montréal, il se pourrait fort bien que nous désirions entendre un représentant de la Commission électrique de Montréal. C'est un sujet que j'ai mentionné ce matin comme pouvant éventuellement faire partie de la compétence de la communauté urbaine de Montréal.

Comme le mandat du comité est très précis et que ce mandat est donné par la Chambre, le comité ne pourrait pas entendre d'autres personnes. Je comprends que le gouvernement ne veuille peut-être pas, à la commission même, risquer l'odieux de refuser d'entendre un témoin en utilisant, pour ce faire, sa majorité à la commission, mais il va falloir que le gouvernement prenne ses responsabilités d'une manière ou d'une autre avec sa majorité. Alors, quand même je plaiderais et plaiderais, je ne réussirais pas, j'ai essayé avant la séance, aussi bien vous le dire, il n'y a rien à faire. Le ministre des Affaires municipales est décidé, il est irréductible, mais quand même, j'ai réussi, je crois, j'espère, à le convaincre, de même que le leader du gouvernement, que s'il arrivait qu'au cours des séances de demain, nous nous rendions compte, à un moment donné, qu'il nous est nécessaire d'entendre certains témoins, nous pourrions re-

venir devant la Chambre pour demander de modifier le mandat de la commission en ce qui touche l'identité des personnes à entendre.

Alors, si le ministre ou le leader de la Chambre veut bien nous donner l'assurance que la Chambre siégera jeudi matin à dix heures, nous serons disposés à accepter le sous-amendement proposé par le ministre des Affaires municipales.

J'en profite, avant de m'asseoir, pour suggérer ce qui suit au leader du gouvernement en Chambre. J'ai compris que la conférence des maires avait été convoquée à Québec pour demain matin à onze heures.

M. LUSSIER: C'est pour ça.

M. LESAGE: Est-ce que nous ne pourrions pas, de consentement unanime, décider que, demain matin, la Chambre siégera à dix heures, que jeudi matin la Chambre siégera également à dix heures de façon qu'à dix heures et demie ou onze heures nous puissions retourner à la commission des Affaires municipales, qui pourrait siéger demain matin, demain après-midi et demain soir, que nous puissions y retourner jeudi matin, tenter de terminer l'étude, si c'est le moindrement possible? Jeudi après-midi, je comprends que la commission de l'Education doit entendre les intéressés sur le bill 62, bill de la restructuration scolaire de l'Ûe de Montréal. Il y aurait peut-être moyen de faire siéger les deux commissions en même temps? Mais je n'en suis pas sûr, et dans les deux cas, cela prendrait la grande salle de commission c'est-à-dire la chambre 81. Alors, je laisse le tout...

M. CARDINAL: Permettez-vous...

M. LESAGE: On me suggère que nous pourrions siéger en Chambre...

UNE VOIX: Cela a duré six semaines...

M. LESAGE: Je me souviens d'avoir consenti, une fois, à ce que le comité des bills privés siège en Chambre pour l'étude du bill de Montréal et, M. le Président, cela avait duré six semaines! L'ambiance était aux grands discours dans cette salle.

M. CARDINAL: M. le Président, si on me permettait une interruption très brève. Je pense qu'il y aurait une difficulté physique. Les membres de cette assemblée n'ont pas encore le don d'ubiquité. Or, il s'adonne que les deux projets de loi concernent la communauté urbaine de Montréal...

M. LESAGE: Concernent l'île de Montréal.

M. CARDINLA: C'est ça... et que dans les deux cas, ce sont les mêmes députés qui sont membres des deux commissions dans une très forte proportion. Or, déjà la commission permanente de l'Education a été convoquée pour jeudi après-midi à trois heures trente. La seule suggestion pratique que je pourrais apporter, je ne sais pas si elle peut aider, c'est que j'ai l'impression, d'après les renseignements que je possède à ce jour, qu'il est fort probable que nous agissions comme il y a deux semaines, c'est-à-dire que nous ayons une séance dans l'après-midi et que nous ajournions à la fin de l'après-midi pour remettre les travaux de cette commission ensuite au mois de janvier, ce qui est de plus en plus demandé par les intéressés au sujet du projet de loi 62.

M. LESAGE: Si je comprends bien, lors de la première séance, jeudi dernier, étant donné que la période d'avis avait été très brève, il n'y avait personne ou presque personne qui avait préparé des mémoires ou des représentations. Je n'ai pas eu de renseignements contrairement à ce qui s'était passé jeudi dernier en ce qui touche l'état de préparation de ceux qui ont l'Intention de présenter des mémoires ou de faire des représentations. Le ministre est peut-être plus au courant.

M. CARDINAL: Je peux le donner immédiatement. Présentement, à ma connaissance, il n'y a que trois personnes qui ont manifesté l'Intention de se présenter jeudi. D'autre part, j'avais promis, à cette première séance de la commission, de donner des renseignements, dont plusieurs étalent demandés, d'ailleurs, par le chef de l'Opposition. J'ai recueilli ces renseignements et j'ai l'Intention, au début de la séance, si la commission est d'accord, de remettre à tous les membres de la commission ces renseignements d'écouter ceux qui voudraient alors se faire entendre et ensuite, d'après ce que je sais aujourd'hui, évidemment, j'en saurai plus jeudi matin, j'ai l'impression qu'en fin d'après-midi nous pourrions ajourner en janvier.

M. LESAGE: Evidemment, la politesse la plus élémentaire m'enjoint d'aller à la commission entendre le ministre de l'Education répondre à mes questions. Cependant, je constate la conviction du ministre que nous pourrions ajourner en fin d'après-midi, c'est donc dire que nous pourrions continuer le soir si nous n'avons pas terminé jeudi l'étude du projet de la loi de la Communauté urbaine de Montréal. Si le leader

du gouvernement en Chambre voulait bien accepter mes suggestions, telles quelles ou modifiées, quant aux heures de séances, sur lesquelles nous pourrions nous entendre unanimement. Je n'insisterai pas pour présenter un sous-amendement au sous-amendement pour y ajouter après les mots, après « employés municipaux », les mots suivants: « et toute autre personne que le comité décidera de convoquer».

M. PAUL: M. le Président, je dois d'abord rappeler avec quelle logique l'honorable ministre des Affaires municipales a analysé toute la situation et les différents points qui ont été soulevés.

M. LESAGE: Ah, non! il n'a pas répondu. Pas trop de vantardise.

M. PAUL: J'ai l'impression, M. le Président, qu'il y en a qu'on ne peut pas contenter.

M. LESAGE : Ne poussez pas trop, parce que nous serons obligés de répliquer pour vous dire que ce n'est pas exact.

M. PAUL: Je dis, M. le Président, que le ministre des Affaires municipales...

M. LESAGE: II vente!

M. PAUL: ... a pris le soin d'analyser toutes les recommandations qui lui furent faites. Le ministre des Affaires municipales ne savait pas dans quelle voie précise...

M. LESAGE: Dans quel guêpier il s'était fourré.

M. PAUL: ... il irait pour répondre aux aspirations et aux demandes de l'Opposition. Déjà, le ministre des Affaires municipales avait pensé à un dialogue au niveau des maires des municipalités. Dès hier, il avait convoqué ces maires à une réunion qui devait avoir lieu demain matin à 11 heures. C'est donc dire que, chez lui, l'esprit de démocratie était vivant.

Nos honorables amis d'en face nous ont, à un moment donné, fait part des avantages qu'il pourrait y avoir à convoquer, avant la deuxième lecture, la commission des Affaires municipales. Le ministre aurait pu demander que ce projet de loi soit déféré à la commission après la deuxième lecture. D'ailleurs, connaissant le souci avec lequel le ministre des Affaires municipales administre son ministère et tout le soin qu'il met à la présentation de ses projets de loi, il n'aurait même pas pensé à mettre de côté une règle bien impérative de nos règlements sessionnels qui a été adoptée dès le 5 mars 1969. Cependant, M. le Président...

M. PINARD: Les belles histoires des pays d'en haut.

M. PAUL: ... le gouvernement, soucieux de répondre à l'exercice d'une démocratie pour l'étude d'un projet de loi aussi important, a décidé de présenter un sous-amendement qui, soit dit en passant, est conforme aux dispositions de l'article 171, quatrièmement et également en tout point conforme à la formule 19 que l'on peut trouver dans la série de formules qui apparaissent spécialement à la page 237.

L'honorable chef de l'Opposition est quelque peu déçu, j'en conviens, M. le Président, parce que nous avions pensé, à un moment donné, d'aller dans une certaine voie qui aurait pu paraître plus avantageuse, mais qui ne pourrait nécessairement pas répondre à un besoin immédiat. C'est pourquoi le ministre des Affaires municipales a cru bon de présenter son sous-amendement. Veuillez croire que le gouvernement, comme le ministre, n'a pas l'intention de se lier par le texte de son sous-amendement. D'ailleurs, j'avais eu l'occasion, avant la reprise des travaux de notre séance cet après-midi, de discuter Justement de ce point qu'a soulevé l'honorable chef de l'Opposition à l'effet que, jeudi matin, à l'occasion de la séance de la Chambre, que nous pourrions tenir, pour dix heures, à la période des « motions non annoncées », il serait loisible à la Chambre d'envisager une révision du mandat qui est présentement donné à la commission des Affaires municipales.

Je comprends, M. le Président, que théoriquement, demain, il y aura environ 29 maires qui eux-mêmes ou par la voix de leur délégué dialogueront et feront part de leur point de vue sur toutes les implications du projet de loi 75.

S'il arrivait que, pour une bonne étude ou une étude plus intelligente et progressive de cette loi, il fallait entendre d'autres témoins et que le ministre des Affaires municipales y voit un avantage et un besoin, je n'ai aucun doute que nous pourrons, dès ce moment-là, envisager l'opportunité d'élargir le mandat qui est présentement donné à la commission des Affaires municipales par ce sous-amendement. Je crois que, tant le gouvernement que l'Opposition, tous avaient en vue le dialogue, peut-être à une étape différente de nos travaux, peut-être, également, quant à la façon de procéder quant à l'audition de ces témoins susceptibles et désireux de se faire entendre sur l'étude de ce projet de loi.

Je dis donc que c'est une commission qui

fera, j'en suis sûr, un travail intelligent sans bousculer les témoins, que nous pourrons rapporter progrès et recevoir le rapport de cette commission au plus tôt, pour que nous puissions adopter ce projet de loi dont tous les députés sans exception ont reconnu ou accepté le principe.

Je voudrais que l'honorable chef de l'Opposition ainsi que tous les membres de l'Opposition soient assurés de notre esprit de coopération. Cela ne veut pas dire que, nécessairement, toute demande sera exaucée, mais nous pouvons, par exemple, garantir que toute demande sera sérieusement analysée à son mérite. Et si nous en venons à la conclusion qu'un témoin ou des témoins sont nécessaires pour compléter l'étude de ce projet de loi et qu'il peut y avoir des avantages à entendre un ou plusieurs témoins, je n'ai aucun doute que l'honorable ministre des Affaires municipales, avec tout le sens démocratique qu'on lui connaît, se penchera sur ces besoins d'élargir le mandat qui est présentement donné par ce sous-amendement à la commission des Affaires municipales.

M. LESAGE: M. le Président, je m'excuse, j'étais distrait. Est-ce qu'il est entendu que nous siégerons à 10 heures, demain matin?

M. PAUL: Oui, oui, mercredi matin. M. LESAGE: J'attends la première...

M. PAUL: J'en ai profité pour le dire pendant que le chef de l'Opposition se retirait quelques secondes.

M. LESAGE: Oui, je consultais... J'espère que, demain matin, nous pourrons entendre la première lecture du projet de loi créant le ministère des Communications. J'espère que le bill sera imprimé.

M. PAUL: Je vais vérifier. Et nous avons le projet de loi de la faune qui est maintenant prêt.

M. PINARD: Le ministre est-il prêt, lui?

M. LESAGE: Est-ce qu'il est entendu que nous allons siéger demain pendant que la commission siège?

M.PAUL: Nous ne siégerons pas demain.

M. LESAGE: En Chambre.

M. PAUL: Sauf pour la période normale des questions, et ensuite nous pourrions ajourner au lendemain matin, dix heures.

M. LESAGE: A Jeudi matin, dix heures, entendu.

M. PAUL: A jeudi matin, dix heures.

M. LESAGE: Cela me convient. Si je comprends bien, l'amendement tel que sous-amendé est adopté. Le sous-amendement est adopté et l'amendement tel que sous-amendé est adopté.

M. PAUL: No 8.

Bill 74 Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la deuxième lecture de la Loi modifiant de nouveau le code de procédure civile.

L'honorable ministre de la Justice.

M. Rémi Paul

M. PAUL: M. le président, notre droit est en évolution constante. Il nous faut apporter des amendements au fur et à mesure que l'expérience de nos tribunaux, les suggestions des avocats pratiquants et de la pratique quotidienne de cette profession nous recommandent certains a-mendements. J'ai déjà eu l'occasion de faire part des raisons qui justifiaient le gouvernement de vouloir apporter certaines modifications à notre code de procédure civile, spécialement à l'article 34.

Par ce projet de loi, nous voulons étendre la juridiction de la cour Provinciale de $1000 à $3000, et je voudrais disposer immédiatement de certaines remarques ou de certains doutes qui pourraient s'élever chez plusieurs de nos collègues, qui se demanderont quelle peut être la constitutlonnalité d'un tel amendement apporté à notre code de procédure civile.

Lorsque nous avons apporté un premier amendement quant à la compétence de la cour Provinciale, le gouvernement du temps avait tout simplement fait une référence à la cour d'Appel pour déterminer si le gouvernement provincial — l'Assemblée législative d'alors — avait compétence pour changer la juridiction de l'une de nos cours provinciales.

A l'unanimité, les cinq Juges de la cour d'Appel avaient déclaré ultra vires cette législation qui avait eu pour but d'apporter une certaine modification, une certaine juridiction à la compétence de la cour Provinciale.

C'est alors que l'on a porté ce litige devant la cour Suprême du Canada, qui ne s'est pas arrêtée à toutes les considérations qui avaient été faites, tant en faveur de la légalité que contre la légalité de cette législation.

La cour Suprême, dans un jugement très laconique, a tout simplement dit que ce n'êtait pas inconstitutionnel que d'étendre le mandat de la cour Provinciale, parce que nous n'abolissions pas cet organisme de procédure ou cette cour reconnue comme étant une cour de première instance et, dans un certain cas, une cour de révision qu'est la cour Supérieure du Canada.

Nous juges de la cour d'Appel avaient considéré la cour Provinciale sur le même statut que celles qui existent dans certaines provinces et spécialement en Ontario, soit comme étant une cour de Circuit ou une cour de^Comté.

Heureusement, la cour Suprême a renversé ce jugement unanime de la cour d'Appel, ce qui nous laisse maintenant avec une certaine quiétude quant à la possibilité, au pouvoir que la province peut avoir de légiférer dans ce domaine; c'est pourquoi nous voulons, par le projet de loi 74, étendre la compétence ou juridiction de la cour Provinciale de $1,000, qu'elle est actuellement, jusqu'à $3,000.

Je voudrais, dès maintenant, informer la Chambre que nous ferons disparaître, que nous demanderons que les articles 1 et 2, qui figurent au présent projet de loi, soient rayés.

Sans vouloir entrer dans tout le détail de ces articles 1 et 2, je voudrais tout simplement établir le principe qui nous invitera à mettre de côté ces deux premiers amendements que l'on avait cru nécessaires de prime abord. On nous a présenté les inconvénients et le déséquilibre qui pourraient exister si nous gardions ces deux articles 1 et 2, parce qu'il s'agit du mécanisme d'appel, devant la cour d'Appel, d'un jugement de la cour de Magistrat.

Nous avons actuellement un droit d'appel absolu de tout jugement de la cour Supérieure dont le montant est au-delà de $3,000. Pour tout jugement de la cour Provinciale, nous pouvons aller en appel avec la permission de deux juges de la cour d'Appel. Or, les amendements qu'on nous avait d'abord suggérés auraient créé un déséquilibre, en ce sens que ç'aurait été le montant de l'action qui aurait donné le droit d'aller en cour d'Appel, plutôt que le montant du jugement. Or, il se serait produit un certain appétit ou certaines inclinations de la part des procureurs de vouloir prendre toute action, mime si, en fait et en droit, elle était reconnue comme n'étant que de $800 ou $900, automatiquement, l'action aurait été intentée pour un montant d'au-delà de $3,000.

Par contre, l'avocat un peu plus sérieux, qui aurait eu une meilleure appréciation des dommages réels subis, par exemple, dans un accident d'automobile, se serait vu en quelque sorte pénalisé. S'il avait intenté une action de $800 et que la cour Provinciale lui avait accordé ses $800, l'autre partie, la partie défaillante, se serait trouvée dans l'obligation d'aller en appel. Or, pour aller en appel, elle doit s'adresser à la cour d'Appel.

Les juges en chef nous ont conseillé de maintenir la situation qui existe présentement, d'où la nécessité, pour garder un certain équilibre dans notre droit, de demander à la Chambre— en temps et lieu, lorsque nous serons en comité — la permission de rayer purement et simplement les deux premiers articles du projet de loi, tel qu'ils se présentent actuellement. Il y a également beaucoup d'autres mesures qui nous incitent à apporter certaines modifications au code de procédure civile. Il y a des principes en jeu qui sont d'une extrême importance. Ainsi, pour hâter l'expédition de nos causes devant nos tribunaux et afin de permettre que nos dossiers soient prêts le plus vite possible, nous verrons que l'un des principes de cette loi est de permettre d'adopter certains amendements aux fins d'accorder, soit aux protonotaires de la cour ou au greffier de la cour, certains pouvoirs que le juge seul détenait jusqu'ici, comme, par exemple, dans le cas de changement ou de substitution de procureur, dans le cas d'examen au préalable ou dans le cas d'examen médical.

Il y a un principe de droit nouveau que l'on peut reconnaître dans ce projet de loi. C'est la présomption qui joue en faveur de l'employé dont le salaire est saisi. Son employeur, sans le déclarer ouvertement, congédie cet employé presque en même temps que la saisie-arrêt s'effectue, il y a là une présomption que l'employeur a voulu tout simplement renvoyer son employé à cause de la saisie-arrêt qui a été remise entre ses mains. A ce moment-là, il appartiendra au tiers saisi de prouver, s'il en est requis, qu'il n'y a aucune relation entre le congédiement de son employé et la saisie-arrêt qui lui aurait été signifiée quelques jours auparavant.

De plus, M. le Président, un autre principe est également en jeu, c'est l'occasion qui se prêtait pour des avocats procéduriers d'ignorer totalement l'avis reçu de la part d'un débiteur à l'effet qu'il avait l'intention de se prévaloir de la loi Lacombe, Loi des dépôts volontaires, et qui prenait action quand même contre un débiteur, et alors il retardait l'exécution de son jugement.

Il arrivait que de pauvres employés se trou-

valent dans l'obligation de payer des frais assez élevés d'honoraires et de procédures que l'on peut juger, dans certains cas, comme inutiles, parce qu'au lieu de produire sa réclamation pour être colloque avec les autres créanciers il arrivait que ce procureur préfère prendre des procédures pour éventuellement exécuter le jugement obtenu contre ce débiteur et, par voie de ricochet, obliger ce dernier à payer des coûts de procédure assez élevés.

Ce sont, M. le Président, les grandes lignes de ce projet de loi, et il faudra nécessairement tenir compte de l'obligation où nous sommes placés d'apporter des modifications pour rendre viable une certaine partie du bill 10 que nous avons adopté vendredi dernier, alors que nous prévoyons le mécanisme d'enregistrement de certaines procédures, la faculté pour l'époux de pouvoir saisir les biens de son conjoint et ainsi de suite. Ce sont des amendements de concordance qui s'imposaient pour que nous puissions avoir une certaine logique dans toute notre législation, il est à remarquer, cependant, que la plupart de ces amendements ou du moins les amendements majeurs ne deviendront en vigueur que le 1er juillet 1970. Contrairement à ce qui s'était passé avec l'ancienne procédure d'extension de juridiction de la cour Provinciale, c'est qu'autrefois il fallait en quelque sorte des procédures de l'une ou de l'autre des parties pour que la cause soit référée de la cour Supérieure à la cour Provinciale. Mais, on verra que le mécanisme, cette fois, est de beaucoup simplifié, parce qu'à compter du 1er juillet ça deviendra automatique, toute cause en bas de $3,000 sera rapidement et de facto référée devant la cour Provinciale.

Je dis donc que ce sont des amendements qui s'imposaient à notre code de procédure civile, et je n'ai aucun doute que les confrères, les collègues qui pratiquent leur profession y verront des amendements qui s'Imposaient ou du moins dont l'effet sera d'accélérer les procédures dans beaucoup de dossiers, ce qui hâtera la préparation des dossiers pour que l'enquête et l'audition de ces causes-là ait lieu le plus rapidement possible. Tous savent qu'à Montréal, par exemple, à la suite de cet amendement, il y aura environ 9,000 causes dont la juridiction sera transférée de la cour Supérieure à la cour Provinciale. Ici même dans le district judiciaire de Québec, alors que nous assistons présentement à un certain décalage assez marqué entre les procédures prises devant la cour Supérieure et celles prises devant la cour Provinciale, qui est de l'ordre de 8 contre 1, la projection est à l'effet qu'avec ces amendements apportés à notre code de procédure civile la différence sera de l'ordre de 10 contre 1 dans les procédures prises devant la cour Provinciale comparées à celles qui seront prises devant la cour Supérieure.

Je sais que, de plus en plus, il nous faut envisager des amendements à la lumière des recommandations qui nous sont faites. Par exemple, une autre caractéristique de ce projet de loi, c'est que, pour la première fois depuis sa création, la cour Provinciale de Montréal pourra adopter ses propres règles de procédure. Ce qui n'existait pas. J'ai été informé, j'ai reçu des représentations à quelques reprises dans ce sens-là de la part du juge en chef et de beaucoup de ses collègues quant à la nécessité d'apporter pour Montréal certaines règles de procédure pour établir une certaine discipline administrative qui puisse permettre l'expédition des causes d'une façon encore plus rapide.

Voilà en résumé les différents motifs de la justification de la présentation de ce projet de loi et qui ne sera que bénéfique pour tous. Je comprends que quelques-uns se verront quelque peu chatouillés de voir que nous puissions reconnaître une telle compétence à nos juges de la cour Provinciale. Quant à moi, j'ai l'impression qu'il n'y a pas de juge de haute ou de basse cour. De plus en plus, nos tribunaux sont présidés par des compétences, des hommes qui ont exercé, durant de nombreuses années, leur profession, et qui sont soucieux de se spécialiser, d'étudier à fond les différents problèmes de droit qui se soulèvent devant nos tribunaux. Que ce soit un juge nommé par la cour Provinciale ou que ce soit un juge nommé par le gouvernement fédéral, il s'agit, à mon humble point de vue, de compétence égale. C'est pourquoi je sais que c'est avec empressement que la Chambre votera la deuxième lecture de ce projet pour qu'ensuite nous puissions passer à l'étude en comité plénler de ce même projet de loi. J'ai donc l'honneur de proposer la deuxième lecture du bill 74, Loi modifiant de nouveau le code de procédure civile.

M. Roy Fournier

M. FOURNIER: Avant de passer en comité, permettez-moi de souligner certaines choses qui ressortent du bill 74. Premièrement, je voudrais faire remarquer au ministre de la Justice que les multiplications d'amendements devraient, autant que possible, être évitées. Je comprends que, parfois, les circonstances obligent, comme par exemple l'adoption du bill 10 oblige à adopter des modifications à nos lois de procédure ou du code civil. Mais il ne faut pas, autant que possible, à tour de rôle et deux fois par

session, modifier le code de procédure. Je crois que dans ce domaine l'on devrait s'organiser de façon à avoir en main les différents éléments d'amendements qui sont nécessaires.

Les amendements d'aujourd'hui sont de trois ou quatre ordres. Le ministre de la Justice les a mentionnés. Il y a certains principes qui sont en jeu dans ce bill. Il y a aussi des manques relativement à la procédure que l'on tente d'établir, comme par exemple — et je mentionne ceci — le principe d'activer ou d'accélérer la marche de la justice, j'en suis totalement, et Je crois que les amendements qui sont proposés présentement vont être utiles. Il faut assister, devant les tribunaux, à la journée de pratique pour voir la multiplicité de requêtes qui vont devant le juge, alors que le protonotaire peut bien de lui-même régler ces cas.

Mais, lorsque je pense à l'amélioration que l'on fait relativement à ces motions pour examen médical et autre, dont juridiction sera donnée au protonotaire, je pense au brouhaha, au fouillis indescriptible qui existe à la cour d'Appel à Montréal, lors de l'appel des causes dans la journée de pratique. Les motions par centaines qui sont présentées, les avocats qui n'ont pas de siège; il y a des centaines d'avocats qui tentent de s'identifier dans toute cette procédure de pratique où l'on fait des motions, des motions pour rejet de ci, rejet de ça, qui pourraient très bien être à la charge du greffier de la cour d'Appel. L'encombrement des tribunaux, il faut le voir en pratique — jusqu'à maintenant, évidemment, l'appel va être modifié jusqu'à $3,000 — mais l'encombrement des tribunaux , de la cour d'Apppel, c'est extraordinaire depuis qu'on a enlevé le cautionnement pour aller en appel. Il y a une multiplicité. On a juste à regarder le rôle quand il y a des 900 causes pour un terme de deux semaines, c'est impossible que la cour d'Appel entende ça à Montréal, il y a tous les appels criminels qui passent avant les appels civils ou qui ont leur section, il y a les appels des campagnes, comme nous les appelons, nous autres, les districts en dehors de Montréal.

Ces remarques, c'est simplement pour que, lorsque des modifications sont faites au code de procédure, on pense à l'ensemble de la procédure. J'en suis pour hâter la procédure, et tout le monde est en faveur surtout dans ces questions-là, il y a des précisions qui sont apportées par le bill qui sont certainement avantageuses.

Le ministre a mentionné qu'il retirerait les articles 1 et 2. Qu'il me permette, cependant, de souligner un cas, et peut-être qu'il pourrait y avoir une correction quant à l'article 1. C'est ceci. C'est le cas où l'appel peut être autorisé par deux juges de la cour d'Appel. Si on lit les dispositions de l'article 324, on voit que toute cause susceptible d'appel doit être prise en sténographie. Je dois dire qu'il y a une anomalie, il y a quelque chose qui est difficile d'interpréter — et la cour d'appel n'a pas eu l'occasion, je crois bien, jusqu'à maintenant, de le faire — c'est lors d'une cause de moins de $3,000, quand le défendeur veut aller en appel et qu'il se présente devant deux juges de la cour d'Appel. Quelle sera la nature de cet appel: Il n'y a pas de sténographie qui a été prise. L'on se base simplement sur le jugement et ce que l'honorable juge de première instance a bien voulu écrire dans son jugement. C'est une question qui, à mon sens, présente de grandes difficultés. L'on se demande même, malgré la permission qui est accordée par le paragraphe 4 de l'article 26, si réellement ce n'est pas illusoire, parce que bien souvent la procédure n'indique pas, évidemment, tout le droit qui est impliqué; et le jugement n'indique pas, nonplus, tout le droit qui est impliqué dans l'appel qui pourrait être fait devant le tribunal. Il faudrait peut-être regarder un peu pour vérifier cette situation.

Pour ce qui est de ce que l'honorable ministre de la Justice a mentionné relativement à la nouvelle présomption, eh bien, il s'agit évidemment d'une dérogation au principe général de la preuve qui veut que celui qui veut obtenir justice devant un tribunal doit en faire la preuve lui-même, il ne faut pas nécessairement abuser du système de présomption parce que là, évidemment, ça change tout un système. C'est un système d'exception, et les exceptions doivent être minimisées et être en nombre peu étendu. Mais, dans le cas présent, j'admets qu'il fallait décharger le pauvre débiteur qui est dans certaines difficultés d'avoir à prouver que son employeur, lui, ne l'a pas congédié parce qu'il avait une saisie sur son salaire. Je crois que la présomption, dans le cas présent, est justifiée et nécessaire; elle rendra d'énormes services à ceux qui doivent certaines sommes et qui, juste à cause de ça et non pas à cause de leur compétence dans leur travail et leur esprit de travail, sont congédiés, parce qu'on sait que, dans certaines industries, on dit: Nous autres, nous n'acceptons pas de saisie.

Dans le cas présent, le débiteur pourra nécessairement poursuivre en dommage et intérêts, il n'aura pas le fardeau de la preuve contre lui.

Pour ce qui est de l'ensemble de la procédure, je demanderais à l'honorable ministre de la Justice de vérifier, dans les différents districts,

il nous a mentionné certains chiffres de causes, etc. Présentement, je dois lui dire que, dans le district de Hull, nous sommes en retard, ou du moins après inscription, la cour Supérieure entend nos causes huit mois après. Mais devant la cour de Magistrat, le délai est encore plus long, de sorte qu'il y aurait lieu, nécessairement, de prévoir, quant à notre district, si nous ne voulons pas que la chose, plutôt que de hâter les procédures, les retarde, la nomination de magistrats additionnels parce que, comme je le mentionnais, nous sommes huit mois en retard.

A la cour Supérieure, nous sommes à jour, et ici je dois rendre hommage à nos trois juges, l'honorable juge Paul Sainte-Marie, l'honorable juge Jacques Boucher et l'honorable juge François Chevalier, qui sont trois juges d'une compétence extraordinaire en cour Supérieure et qui travaillent, qui tiennent trois semaines complètes d'audition par mois et qui, en plus, font la pratique, de sorte qu'ils se sont mis à jour. C'est un exemple à citer pour d'autres districts où peut-être les juges n'ont pas le même esprit de travail.

Quant à nos magistrats, je dois aussi dire que nous en avons trois, nous avons le juge Labbé, le juge Labelle et le juge Frenette, et que tous trois ne se ménagent pas pour rendre la justice. Ils travaillent, mais le nombre de causes qu'ils ont à entendre, parce que les sessions de la paix, les causes criminelles, passent devant eux dans notre district, dans certains districts ruraux, et ft cause de cette situation, évidemment, le terme civil ne peut pas être en permanence. Je crois qu'il y aurait lieu de penser, dans notre district, à la nomination d'un quatrième juge de la cour Provinciale.

Ce sont là les remarques générales qui me viennent à l'esprit relativement aux amendements qui sont proposés. Dans l'ensemble, je dois dire que ces amendements sont devenus nécessaires à cause du temps.

M. Armand Maltais

M. MALTAIS (Limoilou): M. le Président, je vais y aller de quelques mots par suite de la présentation de cette loi par l'honorable ministre de la Justice. Je voudrais le féliciter de son apport à l'administration de la justice dans le domaine de la procédure civile, particulièrement.

Nous le remarquons constamment, les causes augmentent d'année en année auprès de nos cours de juridiction civile, on pourrait dire la même chose pour celles de juridiction criminelle également, avec la conséquence que le législateur est forcé de chercher les moyens les plus effi- caces d'accélérer le processus de l'administration de la justice et faciliter aux justiciables le recours à la justice en favorisant autant que possible une déconcentration dans les rôles des tribunaux. Je me rappelle, et c'est un député de l'Opposition — Je ne sais pas de quel comté, je pense que c'est de Drummond — qui rappelait, récemment, je ne sais si c'est à l'occasion de cette loi ou d'une autre, l'historique concernant cette augmentation de la juridiction de la cour Provinciale chez nous. Il n'y a pas tellement longtemps, cette juridiction n'était que de $100.

Elle a été portée à $200, quant aux causes relevant de la cour Provinciale, qui était alors la cour de Magistrat. Par la suite, on est allé à $500 et à $1,000. C'est à ce moment-là qu'il a fallu procéder, comme l'a souligné tout à l'heure l'honorable ministre de la Justice, par voie de consultation pour savoir quel était le droit constitutionnel permettant de poser un tel geste et d'augmenter jusqu'à ce montant la juridiction de la cour Provinciale. Je suis tout à fait d'accord; je pense qu'il n'y a plus aucun doute, depuis la décision récente en cette matière, que nous pouvons, aujourd'hui, porter ce montant à $3,000, pour toute demande dans laquelle la somme demandée ou la valeur de la chose réclamée est inférieure à $3,000.

Il y a un cas ici qui peut nous éclairer. Je songe, entre autres, à ces actions que nous intentons en matière locative, par exemple. On se demandait comment il fallait procéder d'après la valeur locative. Lorsqu'il s'agissait, par exemple, de réclamer le paiement d'un loyer en retard, on se demandait s'il fallait se baser uniquement sur le montant réel à réclamer ou plutôt sur la valeur locative, c'est-à-dire la valeur inscrite au bail, tel que passé. Si c'était une valeur annuelle — cela représentait quand même un loyer qui pouvait varier de $1,000 en montant — eh bien, il fallait, à ce moment-là, aller devant la cour Supérieure.

Alors, je pense que, dans tous ces cas, à l'avenir, cela simplifiera beaucoup la procédure, il y aura encore des exceptions. Lorsque le bail est pour un an, il y a encore de ces loyers qui seront supérieurs à $3,000, mais l'immense majorité sera en bas de $3,000 et cela clarifiera considérablement ce point.

El y a un autre aspect sur lequel Je veux glisser très rapidement, c'est le fait que cette législation apporte également des amendements d'importance à la Loi des dépôts volontaires. Je pense qu'il était temps qu'on apporte ces amendements pour simplifier et rendre plus claire une législation très importante pour le débiteur, il est peut-être bon de souligner ici que cette législation, qu'on appelle la Loi Lacombe,

pour les dépôts volontaires, est une loi très avantageuse pour le débiteur. Par contre, c'est une loi qui est également très sévère. Elle demande que le débiteur, pour s'en prévaloir, la connaisse bien et respecte les obligations de faire des déclarations appropriées lorsque le moment est venu de les faire.

Il arrive souvent qu'un débiteur, lorsqu'il a fait sa première déclaration, s'en retourne chez lui et continue à travailler. Lorsqu'il arrive un changement dans son statut, dans son salaire, ou qu'il cesse de travailler, il néglige de se présenter et de faire une déclaration appropriée, avec toutes les conséquences qui peuvent s'ensuivre pour lui-même et pour ses créanciers également.

Je pense que, par cette nouvelle législation et par ces amendements, nous allons clarifier une quantité de points à l'avantage et des débiteurs et des créanciers. Voilà les quelques observations que Je voulais faire à l'occasion de la présentation de ce projet de loi.

M. PAUL: M. le Président, très brièvement, pour remercier les honorables députés de Gatineau et l'honorable Solliciteur général pour les remarques qu'ils ont faites au soutien de la deuxième lecture de ce présent projet de loi.

L'honorable député de Gatineau a parlé d'une situation qui aurait besoin d'être améliorée dans son district judiciaire, le district judiciaire de Hull. Disons que cette situation se répète dans toute l'étendue de la province.

Ce qu'il y a de consolant pour l'honorable député — je suis sûr qu'il le réalise lui-même — c'est qu'il y a des districts judiciaires qui sont encore plus mal dépourvus de l'administration pratique de la justice que le district de Hull. Je n'ai pas l'intention d'en citer, de donner des noms, mais je crois que, dans deux districts voisins, et par le sud et par le nord, l'honorable député pourra se rendre compte que la situation de Hull, même si elle devrait être améliorée, se compare avantageusement à celle d'autres districts judiciaires.

Je dis que les remarques de l'honorable député et du Solliciteur général ont été marquées de la connaissance du problème et de la situation que nous essaierons de corriger à l'endroit de trop nombreux débiteurs qui, aux prises avec les difficultés du paiement de leurs dettes, se voyaient en quelque sorte également exploités d'une certaine façon par des créanciers peu scrupuleux et beaucoup plus désireux de prendre et de jouir de toutes les ouvertures et moyens prévus par la loi pour forcer quelquefois leurs débiteurs à payer et à acquitter leurs obligations.

Je dis donc qu'il s'agit d'un autre projet de loi qui rencontre l'unanimité de la Chambre, parce que tous réalisent qu'il s'agit là d'améliorations qui s'imposaient pour tâcher, dans un secteur donné de nos tribunaux, pour que nous puissions avoir, si possible, une justice plus expéditive dans certains domaines.

M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénier pour l'étude du projet de loi 74.

Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Comité plénier

M. FRECHETTE (président du comité plénier): A l'ordre! Bill 74.

M. PAUL: M. le Président, comme je le mentionnais brièvement dans mes remarques de deuxième lecture, je voudrais que les articles 1 et 2 soient rayés, parce qu'autrement, nous serons placés devant deux systèmes différents d'appel de nos causes devant la cour Provinciale et devant la cour d'Appel. C'est dans ce sens là que nos juges en chef nous ont fait certaines représentations pour nous suggérer de garder le statu quo. Après examen par les juristes et les conseillers du ministère, je crois qu'il serait plus pratique que nous commencions l'étude de notre projet de loi par l'article 3, qui deviendrait l'article 1, et le renumérotage s'imposerait en conséquence jusqu'au dernier article de notre projet de loi.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, article 3, devenu l'article 1.

M. PINARD: Pour faire suite aux remarques du ministre relativement aux articles 1 et 2, aurait-il objection à nous remettre le texte des recommandations faites par les juges en chef précisément sur cette question-là? De façon que nous sachions exactement quelle est la portée de leurs recommandations par rapport aux articles qui étaient déjà inscrits au bill 74. Cela ferait suite aussi aux remarques faites par le député de Gatineau quant aux

conséquences du bill 74 par rapport aux appels possibles dans les causes émanant de la cour Provinciale, alors qu'il y aurait permission demandée à deux juges de la cour d'Appel, mais quand on sait qu'il n'y a pas de notes sténo graphiques...

A ce moment-là, comme l'a souligné avec beaucoup d'à-propos le député de Gatineau, il faudra prendre le jugement tel qu'il est rendu. Il est possible aussi que les juges s'efforcent de mettre le moins de considérants possible dans leur jugement de façon à donner le moins de prise possible aux appels.

M. BIENVENUE: Faire moins d'erreurs.

M. PINARD: Je me demande si le ministre de la Justice ne pourrait pas nous éclairer davantage sur ces recommandations faites par les juges en chef.

M. PAUL: Tout d'abord, les articles 1 et 2, s'ils ne sont pas adoptés tel que proposés, ne changent en rien la situation actuelle.

M. PINARD: Statu quo.

M. PAUL: Je disais que nous serons placés, par l'adoption de ces amendements, entre deux genres différents d'appels devant la cour d'Appel. Un genre serait automatique. Si, moi par exemple, un praticien, je reçois la visite d'un client à mon bureau; j'analyse avec lui les circonstances de l'accident, les pièces de sa réclamation et je me dis que c'est une réclamation qui pourrait être de l'ordre de $800 ou $900. Mais, je vais ajouter une incapacité partielle permanente sans m'assurer que le demandeur ou le client a subi réellement une incapacité partielle permanente.

De mon chef, en prévision d'un appel qui deviendrait automatique, je vais prendre cette réclamation et je vais la porter à $3,500. La cause se plaide, et supposons que je perde ma cause. Automatiquement, de plein droit, je m'en vais en appel, parce qu'avec l'amendement que l'on adopterait j'aurais le droit d'aller en appel en raison du montant de l'action et non en raison du montant du jugement. Tandis qu'un autre, lui, peut-être plus minutieux, après avoir eu le temps d'examiner plus en détail toute la situation financière de son client, toutes les pièces justificatives et les circonstances de l'accident, dit: Moi, je prends une action pour $900.

Au point de départ, nous verrons qu'il y a une différence entre les frais d'une action de $3,000 et une autre de $900. Encore devant la cour Provinciale, je perds ma cause. A ce moment- là, je ne pourrai pas aller en appel, à moins que je ne m'adresse devant la cour d'Appel pour obtenir la permission d'y aller.

C'est ce que créeraient les articles 1 et 2, s'ils étaient adoptés. Tandis que dans la situation actuelle, celle que nous vivons depuis le mois de septembre 1965, je crois, depuis 1965.

M. PINARD: La loi...

M. PAUL: Je passe les amendements subséquents qui ont pu être apportés à la loi générale.

M. PINARD: C'est en 1965.

M. PAUL: Là, automatiquement, je me verrais dans l'obligation d'aller devant la cour d'Appel pour porter en appel le jugement de la cour Provinciale. Cela peut créer un certain déséquilibre, parce qu'actuellement je peux aller en appel sur le montant du jugement et non sur celui de mon action. Ces recommandations, qui nous furent faites par le juge en chef de la cour d'Appel et le juge en chef de la cour Supérieure, ne m'ont pas été faites à moi personnellement, mais elles ont été dirigées vers l'un de mes sous-ministres.

Je ne sais si c'est M. Rioux ou M. Dubé qui ont reçu ses recommandations. On a attiré leur attention sur le déséquilibre qui pourrait se présenter.

Ces recommandations et ces remarques n'ont été que verbales. Malheureusement, elles ne sont pas écrites pour soutenir le retrait que je veux proposer à la Chambre de ces deux articles.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, article 3 devenu article 1?

M. PAUL: C'est une meilleure traduction, M. le Président, du texte anglais « would require such leave » plutôt que « required such leave ».

M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 4 devenu article 2?

M. PAUL: L'article 4, M. le Président, c'est là que nous portons de $1,000 à $3,000 le montant des causes sur lesquelles a juridiction la cour Provinciale.

M. CROTEAU: M. le Président, permettez-moi de faire quelques commentaires sur l'article 4, qui est devenu l'article 2. Je dois dire qu'à mon sens cet amendement apporté au code

de procédure est juste. Au début du siècle, lorsqu'on a créé les cours Provinciales, c'était pour juger suivant des montants, ou des sommes infimes, de petits montants. Je crois bien que la justice doit suivre la marche, en ce sens qu'actuellement il y a une hausse du coût de la vie. Aujourd'hui, une somme de $3,000, on peut considérer ça comme une somme infime. Je pense bien que, dans l'avenir, les avocats ne pourront pas se plaindre ou, du moins, porter cela en appel et même en cour Suprême pour discuter de la juridiction de la cour Provinciale. Alors, je crois qu'il est juste et raisonnable que ce montant soit porté de $1,000 à $3,000.

M. LE PRESIDENT: Alors, adopté? M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Article 5 devenu article 3?

M. PAUL: L'article 5, M. le Président, c'est justement par cet article que nous donnerons à la cour Provinciale de Montréal le privilège d'adopter ses propres règles de pratique.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 6 devenu article 4?

M. PAUL: Jusqu'à aujourd'hui, M. le Président, on pénalisait en quelque sorte l'avocat qui était trop expéditif. C'est parce que, si un client allait le voir avec une action qui lui était signifiée aujourd'hui, l'avocat produisait sa comparution comme demain. En vertu du texte de loi, théoriquement, il était obligé de produire sa défense dans les dix jours. Avec cet amendement, nous calculons que le délai de dix jours pour la production de sa défense ne commencera à courir qu'à l'expiration du délai accordé pour la comparution.

M. FOURNIER: En fait, ce qui arrivait, c'est que nous comparaissions avec une date postérieure. Est-ce que c'était valide? La procédure était timbrée le 5 et nous dations notre procédure du 9. De toute façon, je crois que ça clarifie la situation.

M. PAUL: Je crois, M. le Président, que cet article s'impose surtout dans un district comme Montréal où l'on suit beaucoup plus les règles de procédure — c'est sans doute de mise — que dans nos districts ruraux, alors qu'il y a une certaine condescendance pour accommoder quelquefois un confrère dans la pratique qui, pour une raison ou pour une autre, ne peut produire à temps son plaidoyer.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 7 devenu article 5?

M. CROTEAU: M. le Président, en ce qui concerne l'article 7, je ne sais pas si cela existe dans d'autres districts judiciaires, mais je sais que dans le district de Montréal ça existe. A la cour Provinciale, il n'y a pas de protonotaire, mais bien un greffier. Alors, je pose la question suivante au ministre de la Justice: Est-ce qu'on ne pourrait pas amender l'article en disant protonotaire ou greffier, selon le cas?

M. PAUL: Voici, à septièmement, c'est pour être relevé, par le protonotaire, du défaut de plaider, par exemple. Si nous n'obtenons pas le consentement de notre adversaire, nous ne pouvons être relevés du défaut que par une requête devant la cour. Mais, avec l'amendement qui nous est présenté aujourd'hui, nous demandons que le protonotaire puisse avoir ce pouvoir de relever du défaut l'avocat qui a un défaut pris contre lui. Pour ce qui est de la remarque de l'honorable député de Sainte-Marie, je lui dirai qu'à l'article 4, dans la définition du mot « protonotaire » on lit ceci: « Non seulement le protonotaire de la cour Supérieure mais aussi le greffier d'une autre cour à laquelle la disposition est applicable. » Par voie de conséquence, si le pouvoir est donné au protonotaire, nous le donnons également au greffier.

M. CROTEAU: Merci.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. Article 8 devenu 6.

M. PAUL: C'est le même privilège qui est accordé aux protonotalres d'accorder jugement sur une motion pour substitution de procureur.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. Article 9 devenu 7.

M. PAUL: C'est le jugement que peut rendre le protonotaire sur une motion pour examen au préalable.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté.

M. PAUL: Nous allons peut-être trop vite, et nous pourrions permettre à nos confrères...

M. BIENVENUE: II y en a un qui lit et qui fait rapport à l'autre. Nous sommes en retard.

M. PAUL: Nous allons aller plus lentement pour permettre à nos collègues de suivre.

M. BIENVENUE: Merci.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 10devenu 8. Adopté?

UNE VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 11devenu 9.

M. PAUL: Encore là, c'est dans le but d'éviter toutes les procédures qu'un avocat était obligé de faire lorsque, par exemple, un Juge qui avait commencé l'audition d'une cause décédait, il était prévu, avant l'amendement, que la cause tombait à la fin du rôle. Alors que maintenant, si, par exemple, la transcription des notes sténographiques se fait, le juge en chef ou le juge en chef adjoint peut ordonner que la cause soit continuée, plutôt que de recommencer toute cette partie de preuve qui peut être colligée ou ramassée ou soumise au juge par la transcription des notes sténographiques. D'ailleurs, nous trouvons la même disposition dans la Loi des tribunaux judiciaires. C'est pour avoir également une certaine concordance entre deux textes de loi. Alors, adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 12, qui est devenu article 10.

M. PAUL: C'est nouveau ça. C'est la permission qui est accordée à l'opposant d'être interrogé sur les motifs de sa saisie, et cette permission est accordée par le juge ou le protonotaire. C'est dans le cas d'un opposant à une saisie de biens meubles, pour savoir s'il s'agit d'une opposition sérieuse et non pas tout simplement futile, pour apprendre, devant la cour, le sérieux de cette opposition.

Mais, à ce moment-là, le procureur du demandeur ou du poursuivant qui aurait fait exécuter un bref de saisie « de bonis » et qui reçoit une opposition, soit de l'épouse ou d'un créancier, à ce moment-là, il pourra Immédiatement faire une procédure pour avoir l'avantage d'interroger l'opposant à sa procédure de saisie.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. L'article 14, qui est devenu l'article 12?

M. PAUL: C'est justement là, M. le Président, que nous apportons certaines modifications pour éviter que des frais inutiles soient payés par le débiteur qui s'est prévalu des dispositions de notre code concernant les dépôts volontaires. Alors, cette recommandation nous a été faite spécialement, mais non exclusivement, par la

CSN et les mouvements ouvriers. Je crois aussi qu'au point de vue de la justice morale il nous faut considérer cet aspect. Ce n'est pas parce qu'un débiteur, quelquefois, est aux prises avec de nombreux problèmes financiers — ce qui l'empêche de se payer, je dirai dans certains cas, le luxe d'aller voir un avocat — il ne faut pas non plus le plonger dans des frais additionnels inutiles pour permettre à un créancier d'être payé de sa créance en présentant tout simplement une réclamation dans une saisie où il est déjà en cause et d'être colloque au marc la livre avec le créancier saisissant et les autres créanciers réclamants.

M. FOURNIER: Relativement aux dépôts volontaires, la loi Lacombe, je crois qu'à cet article l'on pourrait, vu qu'il y a d'autres articles qui touchent au même sujet, faire certaines remarques d'intérêt général relativement aux dépôts volontaires. Cette loi, évidemment, a pour but de protéger ceux qui sont endettés et qui n'arrivent pas dans leurs affaires, de façon à éviter des saisies ou une multiplicité de saisies ou de frais. L'on dépose à un certain endroit, au palais de justice.

Cependant, en pratique, le mécanisme de cette loi n'est peut-être pas exactement ce que le législateur veut en faire. C'est une loi qui a pour but, évidemment, de protéger les personnes qui sont sous saisie. Mais qu'arrive-t-il après que les dépôts sont faits? C'est que l'on constate, premièrement, un retard assez grand avant la distribution des sommes d'argent. Si l'on veut vérifier, dans le district de Hull, on constatera que la loi Lacombe a en main presque continuellement à peu près $100,000 de non distribués; évidemment, la distribution piastre par piastre, dans des chèques, c'est peut-être un mécanisme qui est coûteux, émettre un chèque pour $3.35. Mais, d'un autre côté, il faudrait peut-être mécaniser cette chose de manière à ce que la distribution se fasse de façon plus accélérée, parce que ces sommes-là sont en dépôt et ne parviennent pas aux créanciers comme elles sont censées parvenir dans le plus bref délai.

En second lieu, je crois que les fonctionnaires dans ce service devraient avoir un peu plus de responsabilités tout en augmentant aussi leur salaire, parce qu'ils sont payés des sommes... Cela n'a pas de bon sens, les salaires payables dans ce service-là, si le ministre vérifie ce qui est payé à ces gens-là. Mais, si on leur assignait certaines responsabilités, c'est à savoir si ceci... Quand quelqu'un arrête de déposer, est-ce que l'avocat va passer son temps à aller vérifier? En pratique, ce qui arrive, c'est ceci: Les compagnies de finance, elles, ont un homme

quasiment en permanence dans ce service-là, qui fouille dans les livres et qui vérifie. Mais, je me demande s'il n'y aurait pas lieu, si on veut faire un mécanisme qui soit pratique et qui marche pour tout le monde, de forcer un peu un fonctionnaire à venir avertir les créanciers — de quelle façon je ne le sais pas — mais c'est quelque chose à penser, parce que cette loi-là, qui est dans nos statuts et qui existe depuis à peu près 1930, je crois.

UNE VOIX: La Loi Lacombe.

M. FOURNIER: La Loi Lacombe. La Loi Lecompte, comme on l'appelle en certains endroits. Eh bien, il faudrait moderniser le mécanisme de cette loi-là, parce que là les entrées, c'est un peu antique comme administration.

UNE VOIX: Il en entre plus qu'il n'en sort.

M. FOURNIER: Ce sont les remarques que je voulais faire relativement à cette loi.

M. BEAUPRE: Je voudrais simplement, sur le même sujet, appuyer les affirmations de mon collègue. Dans ma pratique, si je comptais toutes les réclamations au dépôt volontaire que j'ai faites, il y en aurait sûrement un bon nombre, mais si je comptais celles où j'ai reçu quelque chose, il y en aurait très peu. Il y en aura encore moins à l'avenir, parce que, là nous ne pourrons plus recouvrer nos frais. Nous ne serons plus intéressés à surveiller si le débiteur, après un mois ou deux de paiement de dépôts volontaires, c'est le cas de le dire, cesse d'être volontaire pour déposer. Je n'irai certainement pas en cour si ma créance est en bas de $25 ou $50. Seul celui qui aura une créance un peu élevé vous dira: Cela vaut la peine que j'aille examiner tous les dossiers. Le débiteur qui a 50 ou 100 créanciers auxquels il doit $25, $40 ou $50 s'en tirera sans que personne ne s'intéresse à son argent.

Je crois que nous devrions trouver un mécanisme — que ce soit par l'entremise du greffier ou d'un officier spécial — pour que quelqu'un représente la masse des créanciers. Je suis d'accord pour que nous empêchions le débiteur d'avoir des frais, car c'était vraiment exagéré dans certains cas. D'un autre côté, si nous voulons être justes, il faut également que la masse des créanciers soit protégée, que le créancier reçoive son argent non pas six mois, un an ou deux ans après, mais le reçoive dans les trois mois. On utilise l'expression: Lorsqu'il y a suffisamment d'argent, on doit faire un dépôt, mais le mot « suffisamment » est parfois interprété par certains comme s'appliquant à de très grosses sommes. Pendant ce temps, les créanciers se demandent si leur débiteur dépose vraiment, comme il est censé le faire.

Alors, je crois qu'il appartient au ministre de nous faire des suggestions. Tous les avocats pratiquants seraient très heureux que cela soit tiré au clair.

M. CROTEAU: M. le Président, les observations de mes honorables amis de l'Opposition sont justes. Je crois qu'en ce qui concerne le district de Montréal, vu le nombre de personnes qui se servent de la Loi Lacombe pour fuir les foudres des créanciers, souvent, on se prévaut de la Loi Lacombe; on arrête de payer, ensuite, on paie de nouveau et ainsi de suite. Alors, les créanciers sont là et attendent la distribution. Ils ne savent pas exactement où ils s'en vont. Je sais qu'ils peuvent toujours vérifier au dossier, mais imaginez certaines études d'avocats qui ont parfois 50, 100 réclamations en vertu de la Loi Lacombe. Alors, je vois mal un avocat ou un clerc aller vérifier cela. Par le fait même, en vérifiant, cela augmente encore les frais. Alors, je crois bien que le ministère de la Justice devrait étudier un moyen ou un mécanisme efficace pour avertir les créanciers lorsqu'un débiteur est déménage ou qu'il a arrêté de déposer.

Je sais qu'en vertu de la Loi de faillite, du moment qu'on ne respecte pas une proposition, immédiatement un créancier peut présenter une requête et faire annuler la proposition pour que le débiteur fasse cession de ses biens. Là encore, on a un syndic qui surveille la bonne marche du dossier, mais, dans le cas présent, à la Loi Lacombe, il ne faut pas trop en demander aux fonctionnaires qui ne peuvent surveiller chacun des dossiers. Alors, je crois qu'on devrait prévoir un mécanisme selon lequel, du moment qu'un débiteur a arrêté de payer ou est déménagé ou refuse, on avise immédiatement les créanciers.

M. PAUL: M. le Président, je m'en voudrais de ne pas faire part de la réaction vraiment favorable qu'ont eue les délégués du congrès de l'IDEF lorsqu'en septembre dernier ils ont étudié ici, aux greffes de la cour à Québec, la marche de notre système de dépôts volontaires, ce qui n'existe pas en France et, il faut le dire, dans aucun autre pays francophone,

M. René Cassin, président de l'IDEF, a été vraiment captivé par cette protection que notre loi ou nos lois accordent au débiteur qui veut

réellement payer ses créanciers mais qui se trouve momentanément incapable de faire face à toutes les exigences de ces derniers. Il n'y a aucun doute que cette Loi de dépôts volontaires est moralement bonne.

Il arrive trop souvent que les gens s'en prévalent dans l'espoir de se soustraire au paiement de leurs obligations, et également dans l'espoir que les créanciers ou les procureurs des créanciers, à cause du volume d'ouvrage que l'on a dans nos bureaux, se désintéresseront de la marche normale des dépôts de X déposants dans les dossiers où nous sommes intéressés, il est un fait reconnu que les nouveaux avocats reçoivent de nombreux réclamants sous le régime de la Loi Lacombe, ou de nombreux débiteurs qui ont l'intention de se prévaloir de ces dispositions de la Loi Lacombe.

Il est un fait, c'est qu'actuellement, comme le signalait l'honorable député de Jean-Talon et également l'honorable député de Sainte-Marie, il y a une négligence inexcusable ou inexplicable dans la distribution des dépôts sous l'empire de la Loi Lacombe. Déjà, nous avons tout mis en oeuvre pour corriger cette situation puisque, d'ici quelques mois, nous aurons des ordinatrices dans tous les bureaux de Loi Lacombe, pour que la distribution se fasse à des périodes données, soit à tous les trois mois.

Si le procureur, qui a une réclamation en vertu de la Loi Lacombe, voit qu'il retire effectivement quelque chose de la part du débiteur qui dépose, il sera nécessairement enclin à doubler de vigilance et d'attention. Et également, sans que cela commande chez lui d'efforts très soutenus, il pourra, en quelque sorte, être en mesure de sauvegarder les intérêts de ses clients.

Pour ce qui est du salaire payé aux employés des différents greffes de la Loi Lacombe, Je puis informer l'honorable député de Papineau qu'actuellement le ministère est en négociation avec la commission de la Fonction publique en vue d'une nouvelle analyse des plans de carrières, non seulement dans ce secteur du ministère de la Justice, mais dans différents autres secteurs.

Il ne faut pas oublier que nous sommes dans un domaine oft il nous faut nécessairement protéger le salaire de l'ouvrier, mais il ne faut pas non plus que cette sympathie naturelle soit au détriment de la masse des créanciers, il s'agit d'établir un équilibre entre les droits, d'une part, de ceux qui, avec raison, veulent être payés, tout en tenant compte des difficultés financières que connaissent les débiteurs, à la suite d'événements, parfois, et auxquels ils sont tout àfait étrangers. Mais il arrive trop souvent que cer- tains débiteurs se complaisent dans une situation d'ambiguïté et qui se servent de cette Loi Lacombe, pas complètement rodée et efficace, et qui ont ainsi l'espoir de se soustraire aux exigences bien légitimes de leurs crénciers. Mais avec l'introduction de ce nouveau mécanisme de distribution de dépôts à la Loi Lacombe, le débiteur se sentira, en quelque sorte, suivi, surveillé, parce que, certainement, il y aura des rappels ou il y aura des procédures prises à l'endroit des débiteurs défaillants ou négligents. C'est peut-être dans cette optique de création d'un climat plus sérieux et qui imposera aux débiteurs l'obligation de se conformer aux dispositions que leur impose la loi.

Il y a trop de débiteurs qui pensent qu'il s'agit pour eux de se prévaloir des avantages des dépôts volontaires pour oublier les obligations que commande cette même loi.

Nous verrons à l'article 15, devenu 13, que nous imposons une nouvelle obligation au débiteur, celle de décliner son adresse, ce qui n'existait pas dans le code. Alors, il arrivait assez souvent que le débiteur se présentait à la Loi Lacombe, pouvait donner un faux nom et une fausse adresse, déménageait, et, à ce moment-là, le procureur communiquait avec la Loi Lacombe pour s'informer si M. X, son débiteur, déposait régulièrement; dans trop de cas, on répondait: Il n'y a plus de dépôt; et l'avocat ou le créancier se trouvaient à la recherche de ce débiteur. Mais si nous obligeons à faire l'inscription de l'adresse, c'est peut-être un point de départ qui permettra un travail plus facile pour retracer ce débiteur.

Mais, encore là, il nous faudrait peut-être envisager, comme le soulignait l'honorable député de Jean-Talon, la nécessité d'avoir comme une espèce de chien de garde ou de greffier qui verrait à ce que les dossiers des déposants à la Loi Lacombe progressent ou que cet officier connaisse les raisons pour lesquelles un déposant ne remplirait pas les obligations que lui impose la loi et ne s'y soumettrait pas. Je sais que nous sommes dans un domaine tout à fait complexe, parce que, d'une part, les créanciers sont un peu récalcitrants devant ces mesures humanitaires qu'il nous faut nécessairement adopter pour protéger les intérêts des débiteurs. D'un autre côté, les débiteurs se sentent un peu protégés par cette bonté qu'a le législateur à leur endroit, mais une bonté qui ne doit cependant pas être au détriment de la masse de tous les créanciers.

M. BEAUPRE: Le ministre pourralt-il étudier la suggestion suivante, qu'avec l'argent, par exemple, des premiers dépôts, le greffier

ou un officier de la cour ait le devoir de faire enquête lorsque le déposant déménage? Il y a un grand nombre de locataires qui déménagent deux ou trois fois par année. Il y a une mobilité dans la main-d'oeuvre qui est beaucoup plus grande qu'on le croit dans certaines villes. Ces locataires-là disparus, même si on leur adonné l'obligation de déposer leur adresse, n'ont qu'à ne pas la donner. Qui fera les frais de les chercher? Dans certains cas, on le sait, ça coûte $15, $20 ou $25 auprès d'un bureau d'investigation pour trouver l'adresse d'un locataire, il y en a 20 parfois qui ont le même nom. C'est très difficile, c'est encore un créancier qui va prendre sur lui de faire les frais de ces recherches, payer ça de sa poche. Si sa créance n'est que de $15, $20 ou $50 dollars, est-ce Justifiable de dépenser ça pour un client?

Je crois qu'à même la masse déposée, il devrait y avoir un droit de donner au greffier ou à un officier de faire les recherches d'investigation pour savoir toujours où se trouve le débiteur qui n'a pas fini de payer ses dettes. De cette façon-là, au moins les créanciers cesseront de dépenser en double ou en triple des frais de recherche ou encore laisser à un seul l'odieux de poursuivre un débiteur qui ne veut vraiment pas payer.

Le ministre ne devrait pas oublier qu'un grand nombre des débiteurs qui se prévalent des dispositions de la Loi des dépôts volontaires le font pour ne pas payer leurs dettes; ce n'est pas pour avoir la chance de les payer, c'est pour ne pas les payer. Alors l'équilibre entre les créanciers et les débiteurs doit être donné par la loi, et il faut que la loi protège les deux. Si nous voulons éviter que les créanciers fassent des frais qu'ils ne pourront percevoir lorsqu'ils ont reçu un avis, nous devrions éviter qu'ils en fassent d'autres comme ceux de ces frais de recherche.

M. PAUL: M. e Président, il y a du bon et il y a de l'incertain dans la remarque de l'honorable député. Voici où il y a du bon, c'est quand on pourrait, par exemple, forcer un débiteur ou prendre les moyens pour vérifier l'adresse donnée par un débiteur.

Mais le greffier ne saura pas si tel débiteur respecte les engagements de dépôts à la Loi Lacombe jusqu'à ce qu'il y ait un créancier qui l'en prévienne.

M. BEAUPRE: Ce n'est pas le créancier qui reçoit directement l'argent.

M. PAUL: C'est-à-dire le créancier à la suite d'une distribution.

M. LESAGE: C'est un système électronique, et il y a une lumière rouge qui s'allume à une page du dossier, si vous voulez.

M. PAUL: Nous essayons de trouver un moyen, M. le Président, pour que la lumière ne soit pas rouge.

Encore moins verte. Bleu, ce n'est pas assez rayonnant» Peut-être, une bleu blanc rouge. Quand Je parle d'un créancier qui reçoit de l'argent, c'est à la suite d'une distribution, c'est bien évident.

M. BEAUPRE: S'il n'y en a pas, le créancier l'oublie.

M. PAUL: M. le Président, le créancier...

M. LESAGE: S'il l'oublie, c'est parce qu'il n'a pas un bon avocat.

M. PAUL: ... manque souvent d'intérêt à l'endroit de sa propre réclamation. Nous faisons là un premier pas en obligeant le déposant à donner tout changement d'adresse.

M. BEAUPRE: Quelle pénalité subira-t-il s'il ne le fait pas? A quoi rime une loi qui oblige quelqu'un, sans qu'il y ait de pénalité?

M. PAUL: Sans que cela soit coercltif... Nous avons déjà parlé de cela dans un autre projet de loi. Nous voulons tout simplement inviter les débiteurs à coopérer avec leurs créanciers pour que ceux-ci soient payés et pour que les débiteurs soient également protégés quant à la façon de s'acquitter des obligations qu'ils ont contractées assez souvent de bonne fol, mais assez souvent aussi de mauvaise foi.

Il ne faut pas oublier une chose: si on doit protéger l'ouvrier, ce ne doit pas être au détriment du créancier, du marchand ou du propriétaire qui a transigé de bonne foi avec un client souvent éventuel ou occasionnel.

M. CROTEAU: M. le Président, j'aurais quelques observations à faire. Je serai peut-être hors d'ordre. Tantôt, je me plaignais du sort qu'on réservait aux créanciers; mais il faudrait se plaindre aussi du sort que l'on réserve aux débiteurs. On peut dire que le comté que Je représente, dans une proportion de 75%, est ouvrier. Actuellement, dans 90% et même 95% des cas, lorsqu'un ouvrier ou un gagne-petit est poursuivi, c'est toujours pour perception de compte, c'est toujours une action sur compte qu'il reçoit.

Je pense bien qu'il y aurait lieu, pour le

ministère de la Justice, de faire des études sur ce qui passe en Ontario. Pour toute action prise sur compte ou sur billet en bas de $1,000, on ne fait que déposer un bref. Ensuite, lorsque le débiteur ne comparaît pas, on obtient jugement sans autre formalité, mais sans aucun frais. Ici, dans la province de Québec, lorsqu'on intente une action de $1,000 soit sur billet ou sur compte, nous déposons notre déclaration et nous faisons signifier la déclaration. Ensuite lorsque la déclaration est signifiée, produite et déposée à la cour, nous l'inscrivons pour jugement, avec affidavit et ainsi de suite.

Lorsqu'on rédige le mémoire de frais, on a des frais de timbres, cela va de soi; on a aussi des frais de préparation de déclaration et d'honoraires d'avocat. On peut accumuler des frais assez exorbitants pour une action qui n'a pas été contestée. Il en découle donc des frais de $120 ou $125 pour une action d'à peine $700 ou $800. Je suggérerais au ministère de la Justice, pour alléger le fardeau du gagne-petit, de se référer aux lois de l'Ontario et d'en étudier l'application. Je crois bien que tout le monde y gagnerait.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. Article 15 devenu 13? Adopté. Article 16 devenu 14?

M. BEAUPRE: M. le Président, à l'ancien article 14, j'aurais un amendement à proposer. On dit: « II incombe à l'employeur de prouver que l'employé a été congédié ou suspendu pour une autre cause, juste et suffisante. » Je suis d'accord sur le principe, mais il me semble que nous devrions mettre un terme à cette présomption. La Loi des compagnies, par exemple, stipule que les directeurs sont responsables pendant six mois. Il y a des délais dans des lois pour les responsabilités.

Voyez-vous si quelqu'un, par exemple, renvoie un employé après une saisie-arrêt, comme il n'y a pas de période de fixée, six mois, un an ou deux ans après on pourrait revenir et dire: Monsieur, à l'occasion d'une saisie-arrêt vous avez congédié tel employé et vous en êtes responsable. Prouvez que vous aviez une raison juste et suffisante.

Je crois que nous devrions mettre un délai de quatre mois pour cette présomption. Après cela, je considère vraiment que si quatre mois se sont écoulés et que l'employé renvoyé ne s'est pas prévalu de la loi, bien, il ne devrait pas y avoir cette menace sur la tête de l'employeur.

M. PAUL: Cette disposition nous la retrouvons telle quelle dans le code du travail, qui ne limite pas, qui n'impose pas de date quant à la prescription. Il y a également le délai de quatre mois dans le mécanisme actuel. Eya également la longueur de temps, malheureusement nécessaire ou du moins obligatoirement, imposé aux créanciers pour recevoir la distribution. Le point est le suivant: C'est que assez souvent, également, la tierce-saisie ou le tiers-saisi retarde à faire remise, au greffe de la cour, de la déduction que normalement il aurait dû faire sur le salaire de son employé. Je comprends que ce n'est pas là-dessus, mais je parle de tout...

M. BEAUPRE: Vous ne parlez pas de la même chose.

M. PAUL: Je parlais de l'article 14.

M. BEAUPRE: Je voudrais que l'employeur ne soit pas pendant plus de quatre mois tenu de prouver qu'il a renvoyé son employé pour une cause juste et suffisante, alors que la loi, ne donnant pas de délai, ça peut durer un an, deux ans. Je considère que c'est injuste qu'un employeur soit, pendant un délai aussi long, obligé un jour de prouver que son employé renvoyé l'a été pour une cause qui n'était pas juste et suffisante.

M. PAUL: Dans les quatre mois de son congédiement?

M. BEAUPRE: Oui, dans les quatre mois de son congédiement.

M. PAUL: Supposons, par exemple, qu'un employeur voit saisir le salaire de son employé pour une somme de $1,800, et il lui retient la partie saisissable de son salaire, $8, $15 par semaine. A l'expiration du paiement total de la dette de $1,800 par versements hebdomadaires à peu près égaux et consécutifs, il le remercie de ses services au bout, disons, de quatre ans ou quatre ans et demi; ça peut prendre peut-être ce temps-là pour payer le montant de la réclamation. Bien oui, je comprends, il n'a pas l'exemple qui ne...

M. BEAUPRE: Le ministre donne l'exemple d'un employeur qui saisirait sonpropre employé; ce n'est pas tous les jours que ça arrive.

M. PAUL: Pas qui saisirait son propre employé, mais qui ayant un employé dont le salaire

aurait été saisi attendrait le paiement de la dette pour le remercier de ses services.

M. BEAUPRE: Cela ne change pas grand-chose.

M. PAUL: Bien, ça change beaucoup. En mettant un délai, c'est que nous allons dire, par exemple dans le cas d'une saisie-arrêt importante, pour un montant élevé, nous allons inviter le créancier, disons... quatre mois de la saisie-arrêt. Au bout de quatre mois, il va envoyer son employé, puis là on le mettra à l'abri de toute poursuite de la part de l'employé.

Nous ne trouvons pas de telles prescriptions dans le code du travail, qui lui également crée une certaine présomption à l'endroit d'employeurs qui congédieraient un employé pour activités syndicales ou présumées syndicales. Il n'y a pas de telles prévisions.

M. BEAUPRE: L'exemple donné par le ministre, je le lui retourne et je lui donne celui-ci: Supposez un employé qui a une saisie de salaire de $20,000 et qui n'en gagne que $3,000 par année; ça va lui prendre cinq, six, sept, huit ans à venir à bout de payer cette saisie. A ce moment-là, vous voyez l'employeur, à chaque fois par exemple qu'il doit réduire son personnel, qu'il est obligé, comme on dit, de suspendre pendant quelque temps cet employé-là, il faut qu'il aille répondre, prouver que cet employé-là n'a pas été suspendu de préférence à un autre ou plutôt qu'un autre; alors, ça n'a pas de bon sens. On met sur le dos de l'employeur, pendant des années, un fardeau assez excessif.

Cela peut durer dix ans, cette obligation pour l'employeur qui a un employé qui doit un très gros montant.

M. MALTAIS (Limoilou): Si l'employé ne s'est pas prévalu de son droit, droit que lui accorde la loi, dans un délai raisonnable de quinze jours, maximum un mois, il y a de fortes présomptions qu'il ne s'en servira jamais.

M. BEAUPRE: Non, mais je prends l'exemple de l'employé qui fait des dépôts volontaires pour une somme très élevée. On voit ça parfois $20,000 ou $25,000, et ça dure des années. Par ailleurs, il a un employeur qui doit, à des époques à des périodes différentes de l'année, réduire son personnel. Chaque fois qu'il va suspendre cet employé qui a été sur le coup d'une saisie-arrêt, eh bien, il va être obligé de rendre compte de sa suspension ou de renvoi, si par exemple il a trop de personnel.

Cela va devenir même profitable d'avoir une saisie-arrêt. Je connais des gens qui vont vouloir en avoir, parce qu'ils vont être sûrs de garder un emploi. Est-ce ça, le but du législateur, le but que nous recherchons aujourd'hui? Ce n'est pas ça. Avec cet article, nous allons vraiment inciter des gens à se faire envoyer une saisie-arrêt, parce qu'on ne pourra plus les renvoyer.

M. CROTEAU: La nature de l'action prévue à l'article 14, c'est une action en dommages, et vous avez la question de prescription qui entre en jeu. Alors c'est la même chose aussi pour la présomption dans le cas d'incendie; encore là, c'est la prescription de deux ans.

M. FOURNIER: Quel est le délai de prescription, d'après le député, dans le cas présent?

M. CROTEAU: Pour le salaire?

M. FOURNIER: Non, l'action prévue à l'article 650.

M. CROTEAU: L'article 14. C'est un article que nous discutons ici. La nature de l'action, ici, c'est l'action en dommages.

M. FOURNIER: L'action prévue à l'article 650 du code de procédure civile, premier paragraphe, quel est son délai de prescription?

M. CROTEAU: Dommages-intérêts?

M. FOURNIER: Quel est-il?

M. BIENVENUE: II doit le savoir.

M. CROTEAU: S'il découle d'un salaire, selon le cas, ça peut être soit une prescription de six mois ou d'un an.

M. FOURNIER: Un an? Dans quel article?

M. CROTEAU: Cela dépend de la cause de l'action. Je n'ai pas le code civil par coeur, mais ça varie suivant un an ou deux ans.

M. BIENVENUE: A qui appartient cette action-là?

M. CROTEAU: Elle appartient au créancier, vis-à-vis de l'employeur.

M. BIENVENUE: Est-ce que la loi le dit? M. CROTEAU: C'est écrit entre les lignes.

M. BIENVENUE: Je ne voudrais pas le voir entre les lignes. On dit à 650 qu'on veut amender: « II est interdit à l'employeur sous peine de tous dommages-intérêts. » De la part de qui? De l'employé? De l'employeur? Le député de Sainte-Marie dit: De l'employeur.

M. CROTEAU: Non, mais ce que je veux dire, lorsqu'un employeur congédie un employé illégalement ou par vengeance, à ce moment-là, il devient responsable.

M. BIENVENUE: Est-ce que l'action appartient à l'employé ou si ça appartient au créancier ou aux deux?

M. CROTEAU: Actuellement, on prend l'action paulienne. Si, à ce moment-là, l'employé n'agit pas...

M. LESAGE: II n'y a pas d'action paulienne là-dedans. C'est une action en dommages-intérêts.

M. CROTEAU: Si l'employé n'agit pas...

M. LESAGE: ... qu'appartient à celui qui subit les dommages-intérêts. Si c'est le créancier, c'est le créancier, si c'est celui qui est renvoyé, c'est celui qui est renvoyé.

M. CROTEAU: Là, je réponds...

M. LESAGE: II faut établir les liens de droit, c'est tout.

M. CROTEAU: Si l'employé a une réclamation vis-à-vis son employeur et s'il n'agit pas, à ce moment-là, l'employeur va agir à la place de l'employé par l'action paulienne.

M. BEAUPRE: II n'y a pas de raison pour que l'employeur agisse à la place de l'employé ici.

M. BIENVENUE: Pourrions-nous savoir de façon certaine, là-dessus, si c'est l'action de l'employé ou du créancier ou des deux ou de qui? On dit: Sous peine d'action en dommages-intérêts, sous peine de tous dommages-intérêts et on ne dit pas qui du tout.

M. MALTAIS: La présomption existe en faveur de l'employé.

M. BIENVENUE: Je voudrais avoir l'opinion du ministre des Terres et Forêts.

M. GOSSELIN: Je ne veux pas vous mêler plus que vous ne l'êtes tous.

M. PAUL: Je m'inscris en faux à cette remarque de l'honorable ministre des Terres et Forêts.

M. BIENVENUE: Vous avez raison.

M. PAUL: On essaie de nous présenter des noeuds, mais il n'y en a pas du tout.

M. BIENVENUE: Je ne comprends pas.

M. PAUL: L'article 650 actuellement — je ne sais pas si mon honorable ami a le texte devant lui...

M. BIENVENUE: Oui.

M. PAUL: Le texte devant lui dit qu'il est interdit à l'employeur, sous peine de tous dommages-intérêts, ce sont les conséquences, c'est une action en dommages qui se prescrit par deux ans, prise par qui? Un instant: II est interdit à l'employeur, sous peine de tous dommages-intérêts, de congédier ou de suspendre son employé pour le seul motif que son salaire ou ses gages ont été saisis-arrêts. C'est bien évident que c'est de la part de son employé.

M. BIENVENUE: De l'employé?

M. PAUL: De l'employé. Nous proposons un amendement en ajoutant, non pas en remplaçant, mais en ajoutant: « Lorsqu'un employé est congédié ou suspendu alors que son salaire ou ses gages font l'objet d'une saisie-arrêt... » c'est la situation d'un employé qui est congédié pendant que son salaire est sous saisie-arrêt. Il y a présomption en sa faveur à lui, l'employé, qu'il a été congédié ou suspendu à cause de cette saisie-arrêt.

Il incombe à l'employeur de prouver que l'employé a été congédié ou suspendu pour une autre cause juste et suffisante.

M. BIENVENUE: Les créanciers, dans tout ça? J'imagine que l'employé décide, lui, pour toutes sortes de raisons possibles, de laisser faire l'action en dommages et intérêts. Il se fout de la présomption. Celui qui perd là-dedans, celui qui est réellement victime du congédiement, c'est le créancier, celui qui détient un jugement, disons, de $30,000 contre l'employé. Est-ce qu'il n'y a pas moyen de faire en sorte que la présomption lui profite à lui? Ou-

blions l'action en dommages, que la présomption lui profite à lui et qu'un recours lui soit accordé.

M. PAUL: Ce sera, M. le Président, la situation de tout individu qui subit des dommages par la faute... Ce sera l'article 1053 qui s'appliquera: qui, par sa faute, négligence, imprudence, cause du dommage à autrui.

M. BIENVENUE: Ce n'est pas une faute.

M. LESAGE: Ce n'est pas ça que le député de Matane veut dire.

M. PAUL: Oui.

M. LESAGE: Il dit qu'en vertu de l'amendement proposé à l'article 650, la présomption est créée en faveur de l'employé seulement et non en faveur du créancier qui, éventuellement, pourrait poursuivre en dommages. C'est ça que le député de Matane voulait faire remarquer au ministre de la Justice.

M. PAUL: Si on enlevait « en sa faveur »? Il y a présomption.

M. BIENVENUE: Ce serait une amélioration.

M. LESAGE: Evidemment, c'est probablement parce que cela a été copié du code du travail.

M. PAUL: Du code du travail. M. LESAGE: C'est ça.

M. BIENVENUE: Je serais en faveur que vous enleviez...

M. LESAGE : Dans le cas du code du travail, la présomption ne peut exister qu'en faveur de l'employé qui, lui, a droit à un recours, tandis qu'ici la présomption devrait exister en faveur de l'employé mais surtout en faveur du créancier puisque les dommages et intérêts, normalement, dans un cas comme celui-ci, seraient subis par le créancier.

M. PAUL: Alors, Je serais en faveur, M. le Président, qu'on raie les mots « en sa faveur ».

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, l'article 14 devient l'article 12 amendé.

M. BEAUPRE: Mais, M. le Président, le ministre n'a pas tout de même répondu à ma demande...

M. PAUL: Pensant me débarrasser du problème avec ça!

M. BEAUPRE: Non, non, je proposerais, j'espérais que le ministre le proposerait, j'aurais voulu que cette présomption-là ait un terme, une limite, il n'y en a pas. Encore une fois, je vous dis que dans un an ou deux ans, vous allez revenir ici pour dire qu'il y a des débiteurs qui vont tenter d'avoir une saisie-arrêt parce qu'après ça, on ne sera plus capable ni de les suspendre, ni de les renvoyer. La présomption est en leur faveur. Cela va arriver dans de nombreux cas. Pourquoi ne pas le corriger tout de suite?

M. PAUL: Il y en a une prescription, M. le Président, elle n'est pas écrite. Mais il y en a une. C'est une prescription de deux ans.

M. LESAGE: Quasi-délit

M. PAUL: Oui.

M. LESAGE: C'est le cas du quasi-délit.

M. PAUL: Alors, elle existe.

M. BEAUPRE: Mais elle ne s'appliquera pas si le montant que le débiteur verse pendant deux, trois ou quatre ans... C'est-à-dire que si ses dépôts volontaires durent pendant une période très longue, il n'y a pas de prescription, à ce moment-là. L'employé a toujours le droit de poursuivre son employeur qui l'a suspendu. Je suppose qu'en 1970, le 1er janvier, un déposant, avec des réclamations qui totalisent $25,000 ou $30,000, dépose $20 par semaine, il en a pour dix ou quinze ans. A ce moment-là, si son employeur le suspend ou le renvoie au cours des cinq, six, sept, huit ou dix années que cela va durer, eh bien, l'employeur est obligé toujours de répondre qu'il le fait pour une cause juste et suffisante.

M. LESAGE: Oui, mais la cause d'action naît seulement au moment où l'employé est congédié.

M. PAUL: Voici, M. le Président...

M. BEAUPRE: Le chef de l'Opposition...

M. LESAGE: L'action en dommages et intérêts naît au moment où l'employé est congédié. Et la prescription joue à partir de ce moment-là.

M. PAUL: Pendant que son salaire est saisi.

M. BEAUPRE: Pendant que son salaire est saisi. Cela peut durer dix ans.

M. LESAGE: Bien oui, mais la cause d'action en dommages et intérêts naît au moment du congédiement seulement.

M. PAUL: Oui, oui. C'est pour ça que je dis qu'il y a un recours en dommages pendant deux ans.

M. BEAUPRE: Il y a le mot « suspendu ». Voyez-vous, un employé est suspendu. Supposons qu'on est obligé de suspendre du personnel trois fois par année; le patron peut être poursuivi trois fois par année et avoir à prouver, à ses frais, qu'il l'a fait pour une cause juste et raisonnable. S'il y avait le mot « renvoi », « congédiement », seul, je dirais, c'est normal. Mais là, vous avez le mot « suspendu ». Et des suspensions, vous savez qu'il y en a beaucoup dans certaines usines de la province.

M. PAUL: Oui, mais voici là. Il y a une distinction entre la présomption juris tantum et juris de jure. Supposons, par exemple, qu'ici nous sommes en face d'une présomption jure tantum, comme en vertu de l'article 3 de la Loi du fonds d'indemnisation des victimes d'accidents d'automobiles qui était classée à l'article 53 de la Loi des véhicules automobiles.

C'était une présomption qu'il nous était toujours possible de réfuter, de rejeter, alors que, là, c'est une présomption jure tantum seulement qui a été renvoyée à cause de cela. A ce moment-là, ce ne sera pas très difficile pour l'employeur de prouver qu'il est évident — patet, comme on dit en philosophie — que, pendant telle période, il y a eu congédiement de dix employés, parce qu'une réduction de personnel s'imposait et qu'au nombre de ces employés se trouvaient une, deux ou trois saisies. A ce moment-là, il y a une présomption que le congédiement n'a pas été fait à cause de la saisie, mais tout simplement pendant une saisie.

M. BEAUPRE: Mais, le ministre admet-il, M. le Président, que les frais de cette cause seront sur les épaules de l'employeur? Est-ce que l'employeur pris entre deux employés, un bon et un moins bon — en supposant que le moins bon soit le déposant volontaire — qui est obligé de congédier deux personnes, aura vraiment le choix de congédier l'un ou l'autre? Il sera obligé de garder le moins bon parce que, si le moins bon l'actionne, il y a des frais qu'il sera nécessairement obligé de payer.

M. PAUL: Et si, M. le Président, d'un autre côté, on fixe une période de quatre ou six mois, à ce moment-là, c'est une invitation déguisée, mais combien évidente, aux employeurs de remercier leurs employés dont le salaire est saisi, après quatre ou six mois. Cela peut jouer dans les deux sens; c'est une procédure qui ne change en rien la bonne foi de l'employeur.

M. BEAUPRE: Cela peut changer beaucoup de choses. Vous amènerez vraiment les débiteurs à désirer une saisie-arrêt pour ne plus avoir à être congédiés ou suspendus.

M. PAUL: Oui, mais il leur restera toujours le fardeau de la preuve, comme dans toute autre cause. A ce moment-là, ce n'est pas parce qu'il aura été remercié de ses services qu'il aura droit à une action pénale. Il a droit à des dommages-intérêts qu'il sera toujours obligé de prouver devant les tribunaux.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté, tel que modifié, à la demande du député de Matane.

Article 15 qui est devenu 13. Adopté.

Article 16 qui est devenu 14. Adopté.

Article 17 qui est devenu 15.

M. MALTAIS (Limoilou): M. le Président, le député de Jean-Talon disait qu'il n'y avait pas de sanction pour quelqu'un qui ne donnait pas son adresse. Je pense qu'il y a, quand même, une sanction, parce qu'à ce mornent-là, s'il n'a pas donné son adresse, il ne s'est pas conformé à la loi. C'est l'équivalent d'une mauvaise déclaration, à mon point de vue, et il devient sujet à toute saisie et à tout recours.

M. BEAUPRE: Oui, mais à condition que quelqu'un prenne encore l'initiative de faire les frais. Moi, j'aurais voulu que ce soit la masse des créanciers, comme dans une faillite, par l'entremise d'un officier de cette section de la cour, qui fasse les démarches nécessaires pour trouver un débiteur et, s'il est en défaut, pour remettre cela dans l'état où les créanciers peuvent encore escompter recevoir ce qui leur est dû. Tandis que, là, il faudra encore que ce soit un créancier qui prenne l'initiative de le faire. Pour ceux qui n'ont qu'une petite réclamation — c'est souvent la majorité des cas, des réclamations de moins de $50 — ce n'est pas justifiable de faire des frais. C'est pour cela qu'on arrive avec une loi qui n'est pas un moyen pour payer les créanciers, mais qui est un moyen pour éviter de les payer.

M. MALTAIS (Limoilou): Je comprends très bien l'argumentation du député; elle se tient. Seulement, je crois que cela prendrait quand même un système de mécanisation peu ordinaire pour s'occuper de chaque débiteur. On sait qu'il y en a dans nos bureaux ici; il y en a dans tous les bureaux, il y en a une jolie quantité. Alors, il faudrait qu'à ce moment-là il y ait un service ou une personne — je pense que cela en prendrait plus qu'une — pour nous aviser que le débiteur qui devait déposer à telle date, tous les quinze jours, ne l'a pas fait et écrire au créancier, en lui disant: Tel débiteur n'a pas déposé à tel moment, il est en défaut. A ce moment-là, je pense qu'on peut peut-être y arriver par le moyen d'ordinateurs ou par la mécanisation, mais...

M. BEAUPRE: Mais, M. le Président, si, au lieu d'écrire au créancier, justement le greffier écrivait au débiteur et lui disait: Monsieur, qu'est-ce qui explique votre retard à déposer? Il n'y aurait qu'une lettre, alors que là, s'il y a cinquante créanciers, il y a cinquante lettres, il n'y en a pas un qui a une réponse.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors article 16, devenu article 14, adopté? Adopté.

Article 17 devenu article 15, adopté? Adopté.

Article 18 devenu article 16, adopté? Adopté.

Article 19 devenu article 17, adopté? Adopté. Article 20...

M. BIENVENUE: Une minute Entre les deux...

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Entre les deux?

M. BIENVENUE: Oui, le nouvel article. M. PAUL: Article 18?

M. BIENVENUE: Bien cela deviendrait une espèce de 19, après 18...

M. PAUL: Alors ce serait un amendement que vous auriez l'intention de soumettre?

M. BIENVENUE: Non, non. UNE VOIX: Un nouveau 18. M. BIENVENUE: Que je verrais d'un bon oeil dans la bouche du ministre de la Justice. Je veux lui faire une suggestion. On voit qu'à l'article 657...

M. PAUL: Article 650?

M. BIENVENUE: A l'article 657 du code de procédure civile, on volt qu'il y a une sanction pour celui qui fait défaut de déposer. Or, dans le cas de l'article 654 que l'on vient de modifier, en disant qu'il doit donner avis de son changement d'adresse, il n'y a aucune sanction. Je verrais d'un bon oeil qu'on l'amende pour faire dire à l'article 657, une chose à peu près comme ceci: Le débiteur qui fait défaut de déposer conformément aux prescriptions de l'article 652, ou qui fait défaut ou qui est en défaut de se conformer aux dispositions de l'article 654, et là, continuer l'article.

C'est parce qu'il n'y a pas de sanction à cette nouvelle exigence qu'on apporte... Mes collègues me disent que c'est une excellente suggestion que je fais. Nous sommes tous d'accord de ce côté-ci.

M. PAUL: Et nous en sommes encore tout abasourdis. C'est pourquoi nous demandons quelques minutes.

M. BIENVENUE: Je vous permets de réfléchir.

M. PAUL: Je voudrais attirer l'attention de l'honorable député de Matane sur les dispositions de l'article 652 qui, lui, nous réfère à l'article 653; et les articles 653 et 654 forment un tout.

Alors, je me demande si la suggestion de l'honorable député, au point de vue pratique, est recevable.

M. BIENVENUE: En mettant: « aux articles » au lieu de celui que j'ai nommé, M. le Président.

M. PAUL: A l'article 652?

M. BIENVENUE: A l'article 657, au lieu de nous limiter à 654, nous pourrions nous référer à tous ces articles-là, qui imposent tous des obligations.

Nous pourrions tous les énumérer: 653, 653, 654, Alouette!

M. PAUL: M. le Président, bien qu'à notre avis, ce ne soit pas nécessaire, nous serions prêts, par condescendance pour l'honorable dé-

puté et tous ses collègues, à ajouter à l'article 657, les articles 652, 653 et 654.

Voici, à ce moment, ça deviendrait un nouvel article 18 et nos légistes nous informent qu'il faut qu'ils prennent le temps de le rédiger; c'est peut-être un article simple, il faut cependant qu'il soit complet et qu'il rencontre un peu la philosophie de nos discussions et surtout du but visé...

M. BIENVENUE: En retour de la condescendance du ministre, j'offre ma confiance.

M. PAUL: C'est tout dire. Je pense que nous devrions terminer immédiatement.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, article 18 à être introduit entre 17 et 19. Article 20 qui deviendra 19.

M. PAUL: C'est-à-dire que l'ancien article 20 va devenir l'article 19.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): C'est ça. Adopté?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 21 qui devient 20, adopté.

Article 22 qui devient 21, adopté. Article 23 devenant 22, adopté. Article 24 devenu 23...

M. PAUL: Un instant, M. le Président,... il y avait déjà, M. le Président, une modification à faire, en tenant compte que les articles 1 et 2 au projet ont été, au début, rayés.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Ah bon!

M. PAUL: Il faudrait peut-être nous donner une demi-minute pour vérifier avec nos légistes quel article.

L'ancien article 24 deviendrait l'article 23; il y aurait lieu, à ce moment-là, d'apporter certains amendements et l'article pourrait se lire comme suit: « Les articles 2 et 20 à 22 ont effet à compter du 1er juillet 1970 ».

M. LESAGE: C'est-à-dire l'ancien article 4 et les anciens articles 21 à 23.

M.PAUL: C'est cela.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté avec les amendements. Article 25 devenu 24?

M. PAUL: A l'article 25 il faudrait également apporter une correction. A l'article 4, cinquième ligne, il faudrait remplacer le chiffre 4 par le chiffre 2.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Oui, d'accord.

M. PAUL: C'est l'entrée en vigueur de la nouvelle juridiction de la cour Provinciale.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté avec l'amendement.

M. BEAUPRE: Le ministre pourrait-il nous dire, à l'article 25 devenu 23, ce qui arrive, lorsque le greffier d'une cour Provinciale ne demande pas tel dossier et que personne n'est intéressé à le demander?

M. PAUL: A ce moment-là, ce sera au procureur de voir... Le transfert est automatique.

M. BEAUPRE: Si c'est automatique, cela l'aide. Si le greffier ni les parties ne le demandent, qu'est-ce qui arrive du dossier?

M. PAUL: C'est automatique, sans le recours de procédures, mais il faut que le greffier soit avisé.

M. BEAUPRE: De mémoire, le ministre pourrait-il me dire si cet amendement est de même nature que le dernier que nous avions apporté lorsque la juridiction a été portée de $500 à $1,000?

M. PAUL: Non.

M. BEAUPRE: Hier, justement à Montréal, je rencontrais des juges qui m'ont dit que la plupart des causes qui ont été en cour Supérieure et qui devaient normalement aller en cour Provinciale sont demeurées en cour Supérieure. J'entendais des avocats dire: Nous ne tenions pas à aller en cour Supérieure, nous préférions qu'elles restent à la cour d'Appel, il semble que le protonotaire ait permis que les dossiers restent devant la cour Supérieure. Si c'est la même phraséologie dans les deux projets de loi, est-ce que ce sera encore la même situation malgré qu'il me semble très clair qu'automatiquement, tout doit aller à la cour provinciale?

M. PAUL: Voici. Lors de l'entrée en vigueur du nouveau code il y a eu des dispositions transitoires dont nous n'avions pas prévu les

conséquences. L'avant-dernière fois, nous avions parlé du consentement des parties. A ce moment-là, nous savons qu'une cause est allée jusqu'en cour d'Appel. C'est pourquoi cette façon nouvelle de procéder, c'est-à-dire ce transfert de juridiction de la cour Supérieure à la cour de Magistrat, nous a été recommandée par les juges en chef de nos différentes cours, il semblerait que ce mécanisme de fonctionnement soit celui qui évitera toute procédure ou toute démarche de nature à obtenir un consentement. Le consentement n'est plus nécessaire, c'est la loi qui est substituée au consentement des parties et à la procédure pour tel transfert, comme on le prévoyait lors du premier amendement.

M. BEAUPRE: Je reviens à ma question de tout à l'heure, M. le Président. Supposons que les parties préfèrent rester en cour Supérieure et ne demandent pas le dossier, le laissent moisir là en attendant qu'on le leur permette. Est-ce que ce sera possible ou si ce sera vraiment impossible?

Parce que, là, il faut que le greffier demande le dossier pour qu'il lui soit transféré. S'il ne le demande pas, le greffier de la cour Provinciale, il doit rester en cour Supérieure, si les parties ne le demandent pas.

M. PAUL: Ils pourront laisser mourir le dossier, mais ils ne pourront plus faire de la procédure devant la cour Supérieure.

M. BEAUPRE: Cela ne sera pas possible.

M. PAUL: Bien oui, ils ne pourront plus faire la procédure en cour Supérieure, parce que ce sera un dossier qui est soustrait au juge de la cour Supérieure; mais, tout ce qui pourrait arriver, c'est qu'à un moment donné le dossier meure.

M. LESAGE: Cela arrive souvent.

M. BEAUPRE: Ils vont essayer de trouver...

M. PAUL: Une cause est rayée, par exemple, par un des juges, et les avocats l'oublient. Souvent, c'est seulement que...

M. LESAGE: Souvent volontairement.

M. PAUL: ... quinze, dix-huit mois qu'ils font une motion de réinstitution de la cause, ils réinscrivent la cause; alors, c'est...

M. BEAUPRE: Ils peuvent prétendre que l'instruction est commencée...

M. PAUL: Oui, mais c'est prévu dans la loi à ce moment-là.

M. BEAUPRE: On dit: Si l'instruction n'est pas commencée, mais ils peuvent demander un délai.

M.PAUL: M. le Président, si vous permettez, nous pourrions peut-être adopter le texte de l'article 18 sur le point soulevé par l'honorable député de Matane. L'article se lirait comme ceci: « L'article 657 dudit code est modifié en remplaçant dans la 3e ligne les mots et chiffres de l'article 652 par les mots et chiffres des articles 652 à 654.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, l'article 657 dudit code est modifié en remplaçant dans la 3e ligne les mots...

Article 26 devenu 25, adopté aussi.

M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a adopté le bill 74, avec des amendements qu'il vous prie d'agréer.

M. LE PRESIDENT (M. Lebel): L'honorable ministre de la Justice propose que les amendements soient maintenant lus et agréés. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. PAUL: Troisième lecture. Troisième lecture

M. LE PRESIDENT: De consentement unanime, l'honorable ministre de la Justice propose la troisième lecture du projet de loi. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. LESAGE: II est presque six heures. Plutôt que d'entreprendre l'étude du projet de loi suivant...

M. PAUL: Numéro 83, article 9.

M. LESAGE: ... Loi concernant le registre central des régimes matrimoniaux, je suggère que nous voyions qu'il est six heures. Sur la motion de suspension, pourrais-je suggérer au leader du gouvernement de tenter de nous obtenir, pour huit heures, ce soir, les amendements que le ministre des Affaires municipales a l'intention d'apporter au projet de loi de la Communauté urbaine de Montréal: Il n'y a pas de doute que ça pourrait nous être très utile, si nous pouvions les avoir à huit heures, ce soir. Egalement, me référant à une chose que m'a dite

le leader du gouvernement, pourrions-nous obtenir les amendements qu'a l'Intention d'apporter le ministre du Tourisme de la Chasse et de la Pêche au projet de loi de la conservation de la faune? C'est pour pouvoir mieux collaborer que je fais ces demandes.

M. PAUL: Nous recevons une demande au carré du même coup, on va extraire la racine...

M. LESAGE: Non, je ne me contenterai pas de la racine, je veux le carré.

M. PAUL: Oui. Les amendements qu'a l'intention d'apporter l'honorable ministre des Affaires municipales sont prêts, il est probable que l'honorable chef de l'Opposition pourra être satisfait vers les six heures et une ou et deux.

M. LESAGE : Très bien. Je vais les attendre.

M. PAUL: Pour ce qui est des amendements que l'honorable ministre du Tourisme de la Chasse et de la Pêche a l'Intention d'apporter à la faune, je vais essayer...

M. LESAGE: Ce n'est pas facile à amender, la faune.

M. PAUL: Ah oui, même si c'était...

M. LESAGE: La loi, peut-être, le projet de loi, oui.

M. PAUL: A huit heures, M. le Président, nous pourrons entreprendre l'étude du projet de loi numéro 83 et, ensuite, le projet de loi du ministre du Commerce et de l'Industrie.

M. LESAGE: Non, si je comprends bien, c'est le bill 83. Il ne faudrait pas priver le député de Richmond du plaisir de discuter de la Loi de la Régie des alcools. C'est ce qu'a annoncé le ministre de la Justice hier.

M. PAUL: Ah oui, c'est vrai.

M. LESAGE: Ensuite, la loi du ministre de l'Industrie et du Commerce. S'il reste du temps, quant à nous, nous serons peut-être prêts à étudier la Loi de la conservation de la faune.

M. PAUL: La conservation de la faune? M. LESAGE: Bien, oui. Ce soir.

M. PAUL: Disons, M. le Président, que nous allons être prêts à siéger jusqu'à onze heures, au moins, ce soir.

M. LESAGE: Onze heures.

M. PAUL: Alors, je vous demande la suspension des travaux jusqu'à huit heures.

M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à huit heures.

Reprise de la séance à 20 h 2

M. LEBEL (président): A l'ordre!

M. PAUL: M. le Président, la Chambre serait intéressée à entendre la déclaration que se proposait de faire l'honorable ministre des Affaires municipales en relation avec le bill 75.

M. LUSSIER: M. le Président, je n'ai pas une grosse déclaration à faire, j'ai seulement un gros paquet d'amendements, dans ce sens que, si on les additionne, c'est gros; mais, seuls, Ils ne sont pas tellement considérables. Alors, j'aimerais déposer ces amendements au bill 75 actuellement.

M. LESAGE: Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer le sens du mot « actuellement »?

M. LUSSIER: Actuellement, c'est au moment même, en fait.

M. LESAGE: Si je comprends bien, cela n'exclut pas la possibilité que le ministre ait déjà décidé de proposer d'autres modifications.

M. LUSSIER: II est possible que, lors de l'audition des maires et des deux représentants du front commun, nous apportions alors certains amendements au bill 75.

M. LESAGE: Si je comprends bien, M. le Président, je ne veux pas abuser, vous permettez, et cela est une information que je tiens du ministre, je ne veux pas avoir l'air d'un devin, parce que je n'ai pas le temps de lire les modifications proposées; si je comprends bien, les modifications dont le ministre vient de nous remettre le texte font suite aux représentations du Front commun des employés municipaux et non pas à des représentations qui auraient été reçues des autorités municipales de l'île de Montréal.

M. LUSSIER: M. le Président, M. le chef de l'Opposition a raison. Dans ces amendements sont incluses aussi certaines représentations que nous avons eues de personnes ou encore de nos légistes qui, en relisant, ont découvert certaines coquilles à l'intérieur du texte de loi.

M. LESAGE: II y a plus que des corrections de coquilles.

Bill 83 Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la deuxième lecture de la Loi concernant le registre central des régimes matrimoniaux.

L'honorable ministre de la Justice.

M. Rémi Paul

M. PAUL: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande l'étude à la Chambre.

Il s'agit d'un projet de loi qui est un corollaire ou une espèce de loi ancillalre à la loi que nous avons adoptée vendredi dernier, qui a fait l'objet de beaucoup d'études; je veux parler de la Loi concernant les régimes matrimoniaux, le bill 10. Pourquoi le présent projet de loi concernant le registre central des régimes matrimoniaux? Si nous référons au bill 10 — et il me faut nécessairement me référer à certains articles de ce projet de loi pour saisir la nécessité absolue de la présentation de ce bill 83 — c'est parce qu'il s'agit d'un mécanisme d'opération et de contrôle qui sera fait au ministère de la Justice pour permettre aux créanciers et à toute autre personne de connaître le régime matrimonial qui régit des époux. On a vu qu'à la suite de l'amendement adopté au projet de loi 10, à l'article 1264, les conventions matrimoniales — ceci n'a pas été changé — doivent être constatées avant la célébration du mariage par acte notarié portant minute.

Mais il arrive qu'avec cette nouvelle économie de notre loi, les époux pourront, dans le cours de leur mariage, changer leur régime matrimonial. Mais, pour ne pas porter atteinte au droit des créanciers, et pour exercer un certain contrôle qui nous est absolument nécessaire, il nous faut exercer une surveillance, et cette surveillance sera la conséquence des procédures qui seront prévues à l'article 1266, et spécialement à l'article 1266b) du code civil, c'est-à-dire de ce nouvel article que l'on peut lire au bill 10.

En résumé, quelqu'un qui voudra changer son régime matrimonial pourra le faire en autant que ce le soit par acte notarié, et, à ce moment-là, il faudra également en donner avis aux créanciers, en donner avis également à toutes les parties qui étaient présentes lors de la passation du premier acte de mariage, si elles sont

encore vivantes, et le tout doit être homologué par un jugement rendu par le protonotalre ou suivant le greffier du tribunal.

Ici, Je voudrais immédiatement préciser le sens du mot greffier, c'est greffier en sa qualité de greffier de la cour d'Appel et non pas greffier de la cour Provinciale.

Alors, cette requête sera entendue par la cour après que les avis auront été donnés aux créanciers, et immédiatement après, on doit faire parvenir au ministère de la Justice une copie de ce jugement d'homologation de la requête qui a été rendu.

A ce moment-là, le ministère de la Justice inscrit dans un registre, en double copie, les modifications qui sont apportées par le jugement d'homologation au régime matrimonial qui, antérieurement, régissait les relations entre époux.

Par la suite, le ministre de la Justice ou le fonctionnaire désigné à remplir telle fonction retourne l'original à celui qui le lui a fait parvenir pour qu'ensuite le ministre de la Justice puisse émettre des certificats attestant que M. X, que Mme Y se sont mariés sous tel régime de communauté ou d'exclusion de communauté ou de séparation de biens ou en vertu de la société d'acquêts.

Le ministre ou le fonctionnaire autorisé certifie ensuite sur le document original qui lui a été envoyé sous sa signature le numéro et la date de l'enregistrement et retourne cet original au dépositaire de la minute, de l'acte ou, suivant le cas, au protonotalre et au greffier du tribunal pour que les inscriptions soient faites en conséquence.

C'est donc dire, pour que le projet de loi fonctionne avec un certain contrôle et une certaine sécurité pour les tiers, il nous faut nécessairement établir un tel registre.

Eh bien, peut-être qu'avant la fin de la session l'on réalisera que c'était probablement le ministère le mieux apte, dans les circonstances, à répondre à toute demande de renseignements.

Un individu, par exemple, voulant connaître le régime matrimonial d'Arthur Labonté, n'aura qu'à communiquer au ministère de la Justice. Comme l'enregistrement et la vérification se feront au moyen de l'électronique, il nous sera facile de fournir, dans les quelques heures suivantes, ou dès le lendemain, la réponse à l'information qui est demandée par X, Y ou Z. C'est donc dire que ce n'est pas une loi complexe. Le principe est plutôt la création de ce registre qui est absolument nécessaire. C'est pourquoi j'invite mes honorables collègues à voter le principe de la deuxième lecture de ce projet de loi.

M. Jean Lesage

M. LESAGE: M. le Président, c'est le député de Deux-Montagnes qui devait être le porte-parole de l'Opposition lors de l'étude de ce projet de loi en deuxième lecture et en comité. Malheureusement, il ne peut être ici ce soir, à cause du deuil tragique qui l'a frappé. Sa mère est décédée dans un accident d'automobile, vendredi soir, près de Saint-Jérôme.

Le député de Marguerite-Bourgeoys, qui avait un engagement antérieur, m'a dit que, pour une fois — une fois n'est pas coutume — étant donné qu'il s'agit, comme l'a dit le ministre de la Justice, d'un bill qui n'est pas complexe, elle courait le risque de me laisser être le porte-parole de l'Opposition à sa place, ce soir.

Le ministre a raison, c'est un projet de loi qui découle tout naturellement des dispositions du projet de loi no 10 quia été adopté en troisième lecture, vendredi. Ce projet de loi no 83 concernant le registre central des régimes matrimoniaux est devenu, de fait, nécessaire à la suite de l'adoption du bill 10. Entre autres dispositions, le projet de loi no 10 — le ministre l'a souligné tout à l'heure — fait disparaître le principe de l'immutabilité du régime matrimonial pour le remplacer par celui de la mutabilité. Ce dernier principe est, à mon avis, très valable et assouplit toute l'économie des régimes matrimoniaux.

Depuis 1866, cette règle de l'immutabilité était impérative, parce que directement rattachée au principe de la liberté du choix du régime. La raison principale en était la protection des tiers qui contractaient avec les époux.

Etant donné qu'il y avait le choix de le faire, évidemment les méthodes de publicité n'étant pas ce qu'elles sont aujourd'hui, la liberté de choix du régime entraînait l'immutabilité. Si la mutabilité avait existé sous l'ancienne loi, c'eut été créer une terrible tentation de mettre en danger constant les droits des tiers. La mutabilité est partie intégrante de la réforme de nos régimes matrimoniaux tels que décrétés par le bill 10; et, pour éviter la fraude à l'égard des tiers, il fallait l'entourer d'un cadre solide et rigide.

C'est pourquoi l'acte qui constatera un changement de régime devra être notarié, porter minute et être contrôlé judiciairement par l'homologation. De plus, la publicité évitera la fraude possible envers les tiers que l'intimité normale qui existe entre deux époux aurait pu rendre trop facile. Un certain nombre de prohibitions limitaient la liberté contractuelle des époux entre eux, dont la défense faite à l'épouse de cautionner pour son époux et la

prohibition aux époux de se consentir des ventes, des donations ou des échanges qui existaient sous l'ancienne loi dans le but de conserver l'harmonie dans le ménage, d'un côté, et d'éviter toute fraude envers les tiers, d'autre côté.

Ces prohibitions ne sont plus nécessaires, non pas parce qu'il y a plus d'harmonie dans les ménages, mais probablement parce que le monde est devenu plus moderne; elles ne sont plus nécessaires avec l'acceptation du principe de la mutabilité. Les juristes qui ont travaillé à la réforme de nos régimes matrimoniaux ont vu plus d'avantages que d'inconvénients à la mutabilité, en autant que les tiers sont protégés contre les possibilités de fraude. Le projet de loi no 84 prévoit un mécanisme qui, à mon avis, semble assez étanche pour ne pas donner prise à la fraude ou facilement donner prise à la fraude et sans créer trop de tracasseries administratives.

Le député de Deux-Montagnes m'a fait parvenir son dossier dans lequel j'ai trouvé une note, la note d'une suggestion qu'il avait l'intention de faire au gouvernement, particulièrement au ministre de la Justice. La note se lit comme suit: « J'ai présumé que le registre des régimes matrimoniaux, cela sera la responsabilité du protonotaire. La suggestion que je veux faire serait de déposer à chacun des bureaux d'enregistrement une copie de ce registre pour plus de commodité dans la recherche du dernier régime matrimonial qui régit deux époux lorsque ces derniers transigeront avec des tiers ».

Alors, je laisse à l'attention du ministre de la Justice et du ministre de l'Education, qui est lui-même notaire, l'étude de cette suggestion dont nous pourrons peut-être reparler en comité plénier.

M. PAUL: L'honorable chef de l'Opposition m'avait fait part de l'absence forcée de l'honorable député de Deux-Montagnes et je crois que, dans les circonstances, au nom de toute l'équipe ministérielle, nous voudrions transmettre nos plus sincères et vives condoléances à l'honorable député de Deux-Montagnes pour le deuil cruel qui le frappe. J'ai transmis moi-même ce matin mes condoléances à l'honorable député de Deux-Montagnes, et je suis sûr que tous partagent les sentiments qui l'animent en ce moment parce qu'il est toujours trop tôt pour voir disparaître sa mère, même si elle a atteint un certain âge.

M. LESAGE: Elle était jeune, soixante-cinq ans.

M. PAUL: J'ai immédiatement discuté du problème soulevé par l'honorable chef de l'Opposition et, au point de vue pratique, on me signale certaines difficultés. Peut-être que je pourrais répondre immédiatement à cette question, à moins que l'honorable chef de l'Opposition préfère que je le fasse en comité plénier.

Voici. Exiger que les copies des avis enregistrés au registre central soient ultérieurement trans mises aux bureaux d'enregistrement locaux nous apparaît une réalisation quasi impossible. Cette solution avait été envisagée au départ par le comité spécial de l'Office de révision du code civil chargé de la conception du registre central. Elle avait été écartée pour les raisons que nous énumérons ci-après. Premièrement, cette solution obligerait la personne chargée de tenir le registre central à adresser une copie de chacun des avis à chacun des 82 bureaux d'enregistrement du Québec. On volt déjà le fouillis auquel cela va donner lieu. Deuxièmement, le fait d'enregistrer un avis au registre central des régimes matrimoniaux a pour effet de rendre un contrat opposable aux tiers. Si on exigeait en plus un enregistrement dans chacun des bureaux d'enregistrement locaux, cela créerait des difficultés insurmontables vu que le défaut d'un seul enregistrement rendrait un contrat non opposable aux tiers. En outre, il faut ajouter que cette procédure allongerait les délais qui s'écoulent entre le moment où un contrat est effectué et le moment où ce contrat devient opposable aux tiers.

Alors, il y a deux autres arguments, et l'Office de révision du code civil, de même que les conseillers du ministère et des légistes nous ont représenté que les amendements ou, du moins, le point soulevé par l'honorable chef de l'Opposition, point qui avait été porté à son attention par l'honorable député de Deux-Montagnes, pourrait créer des difficultés administratives de nature à occasionner de grandes erreurs dans la vérification qui s'impose.

M. CARDINAL: M. le Président..

M. LESAGE: En comité?

M. CARDINAL: Bon, comme vous le voudrez.

M. LESAGE: Je ne veux pas être à cheval sur les règlements. Le ministre de la Justice a usé de son droit de réplique; mais, c'est avec plaisir que je vais entendre...

M. CARDINAL: Ce pourrait être très bref.

M. LESAGE: Non, non, ça va très bien; je ne suis pas procédurier à ce point.

M. CARDINAL: Je n'aurais que deux remarques et elles seront brèves. Le chef de l'Opposition a rappelé un certain exercice dans le passé. L'on sait que, déjà, l'enregistrement des contrats de mariage dans les bureaux d'enregistrement, sous l'ancien système, était une procédure obligatoire d'après la loi, pour certaines fins, non pas le régime mais certaines donations. Ceci avait soulevé plusieurs difficultés d'interprétation. D'ailleurs, sans nommer personne, certains grands juristes de Québec avaient eu des problèmes au sujet de l'enregistrement. Il est toujours difficile de fixer le lieu de cet enregistrement. Dans un endroit comme Montréal, par exemple, le nombre de contrats de mariage enregistrés était tel qu'il était impossible de s'y retrouver. Comme le disait le ministre de la Justice, c'était devenu un fouillis.

Pour cette raison particulièrement, je réfuterai en quelque sorte la proposition de mon collègue, à la fois député et notaire. D'autre part, je voudrais apporter un fait qui n'est pas nouveau. Ce n'est certainement pas comme membre de l'équipe ministérielle que je ferai des difficultés vis-à-vis du projet de loi 83, mais je souligne que nous nous dirigeons vers plusieurs systèmes d'inscription ou d'enregistrement. Il existe déjà des bureaux d'enregistrement où il y a enregistrement au nom, en plus de l'enregistrement au cadastre. Il existe déjà, en vertu d'une loi adoptée par cette assemblée, un registre central des testaments qui s'applique aussi à certaines donations à cause de mort.

Nous créons présentement un registre central des contrats de mariage. Il y aura certainement lieu, à un moment ou à un autre, après rodage de ces divers registres, de centraliser ces choses qui l'ont été dans certains pays, comme la Belgique, par exemple. Alors, ce n'est pas un amendement que je propose — je m'en garde — mais c'est une suggestion que je fais pour l'avenir.

M. LESAGE: M. le Président, quant à moi, à moins que mes collègues n'aient quelque chose à ajouter, je suis fort disposé à l'adoption de la deuxième lecture, à ce que nous considérions que le bill est allé en comité et puis qu'il a été adopté en troisième lecture.

M. HYDE: Je voudrais tout simplement, si nous étions en comité, M. le Président, j'aurais peut-être... Je crois que le ministre va répondre. Le ministre exercera peut-être son deuxième droit de réplique pour répondre à cette question. Je crois qu'il a peut-être même suggéré la réponse, quand il a mentionné que nous allons comprendre la raison pour certaines choses avant la fin de la session. Est-ce que le ministre a des intentions sur un registre central qu'indiquait le ministre de l'Education? Est-ce qu'on a des projets pour un registre central, l'enregistrement des actes de mariage, de décès, de naissance? C'est très difficile, à l'heure actuelle, d'avoir des renseignements, il faut savoir la cour ou le district où on est supposé aller chercher ces choses.

M. PAUL: C'est parce qu'à un moment donné on s'est demandé si l'enregistrement devrait être centralisé au Secrétariat de la province ou au ministère de la Justice. Le ou vers le 17 octobre, à l'occasion de la réunion des avocats de province, je faisais part, à ce moment-là, aux avocats et aux juges présents que le ministère de la Justice se dirigeait de plus en plus vers l'informatique. L'Office de révision du code civil est actuellement à étudier tout ce problème, et je crois que l'honorable ministre de l'Education a déjà été sensibilisé à ce problème avant son entrée dans la vie politique, il faudra nécessairement un jour que nous ayons un système central qui pourra comprendre toutes ces informations, de façon à ce que les différents enregistrements qui peuvent affecter la vie économique, la vie sociale d'un individu puissent être contrôlés, mais ce n'est pas encore une réalisation pour l'immédiat. L'Office de révision du code civil travaille dans ce champ d'activité pour que nous puissions être saisis dans un avenir prochain, peut-être d'ici quelques années, d'un projet de loi qui, à ce moment-là, s'avérera des plus utiles pour la centralisation des Informations requises.

M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté.

Comité plénier et troisième lecture

M. LE PRESIDENT: Le comité s'est formé, le président a fait rapport et la troisième lecture a été adoptée.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Troisième lecture de ce bill. Third reading of this bill.

M. LESAGE: M. le Président, étant donné que le député de Richmond n'est pas encore arrivé, probablement parce que la discussion a été plus rapide que nous le croyions sur le projet de

loi qui vient d'être adopté, nous pourrions peut-être continuer en comité plénler l'étude du bill 71.

Je sais que le ministre ne demande pas mieux.

Bill 71

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce propose que Je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité plénler pour l'étude du bill 71. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Comité plénier M. BEAUDRY: Pardon? M. LESAGE: Mon dessin, mon plan?

M. BEAUDRY: Je vais vous l'envoyer dans une minute.

M. LESAGE: Très bien.

M. BEAUDRY: M. le Président, Je pense qu'une certaine confusion s'est introduite la semaine dernière dans le débat sur le projet de création du Conseil supérieur de la recherche scientifique. Je dirai tout d'abord qu'il s'agit là de tout autre chose que d'un centre de recherche industrielle, d'un institut de recherche de l'Université du Québec ou d'un complexe scientifique à Sainte-Foy. Le Conseil supérieur de la recherche ne sera pas un organisme destiné à administrer ou à effectuer lui-même des projets de recherche ou à diriger des laboratoires comme les nouveaux organismes dont nous avons parlé jusqu'à présent, ou comme d'autres organismes actuellement existants et qui sont engagés dans la recherche concrète, tels que les universités, les entreprises industrielles et les gouvernements eux-mêmes.

Non, le Conseil supérieur de la recherche devra être un organisme consultatif auprès du gouvernement, et dont la fonction sera de conseiller le gouvernement dans l'élaboration de sa politique en matière de recherche scientifique; de répartir certaines sommes votées par la Législature à des fins de recherche; de tenir à jour un inventaire de la recherche au Québec; d'assurer la liaison entre les divers organismes de recherche ou de toutes autres fonctions analogues.

Sur la nécessité de mettre en place un tel organisme, le gouvernement actuel a exprimé à plusieurs reprises des positions claires et précises. Les études sont actuellement en cours, qui nous permettront de préciser selon quelles modalités il y aura lieu de constituer ce conseil. L'office...

M. LESAGE: Selon ce que vient de dire le ministre, la compétence de ce conseil serait sensiblement la même que celle que nous voulions confier au Conseil de la recherche scientifique en 1966, par le bill 6?

M. BEAUDRY: Pas nécessairement.

M. LESAGE: Bien voici, le ministre disait, premièrement, deuxièmement, troisièmement. J'ai devant mol une copie du bill 6 et c'est mot à mot.

M. CARDINAL: Est-ce qu'on pourrait en avoir une copie?

M. LESAGE: C'est mot à mot. M. BEAUDRY: Oui, j'en ai une ici.

M. LESAGE: Est-ce que le ministre pourrait reconnaître son texte? Conseiller le gouvernement dans l'élaboration de sa politique en matière de recherche scientifique; collaborer avec les autres organismes de recherche existants dans la province et au Canada; assurer la liaison entre la recherche pure et la recherche appliquée et technique ainsi qu'entre les diverses disciplines; dresser et tenir à jour l'inventaire de la recherche au Québec. C'est mot à mot ce que le ministre a dit.

M. BEAUDRY: M. le Président...

M. LESAGE: Je me demande pourquoi le ministre attend pour le créer, il y avait ça tout cuit dans le bill 6.

M. BEAUDRY: M. le Président, l'Office de planification et de développement, qui vient lui-même d'être réorganisé au cours des derniers mois, a été chargé de mener ses études à terme dans le plus bref délai possible.

Il doit nécessairement faire rapport à ce sujet au conseil des ministres qui prendra alors les décisions requises pour qu'une législation appropriée soit soumise à l'Assemblée nationale. Tel que nous en avions convenu la semaine dernière, à la dernière séance du comité plénler sur le projet de loi 71, voici le schéma qui permettra au chef de l'Opposition, selon son désir, de situer exactement ce centre de recherche industrielle dans le contexte auquel il se rattachera.

Pour éviter toute équivoque à ce sujet, je rappelle que ce projet de loi à l'étude permet au centre d'établir et d'administrer des laboratoires de recherche dans l'ensemble du territoire québécois.

Il va de soi cependant que le centre ne s'engage pas dans des implantations nombreuses et dispersées à travers tout le Québec.

Au contraire, nous tenons pour acquis qu'il aménagera ses premiers laboratoires à Québec et plus précisément dans le complexe scientifique de Sainte-Foy.

Quel est donc ce complexe scientifique dont le centre de recherche industrielle sera l'un des premiers partenaires, l'un des premiers clients?

Le complexe scientifique de Salnte-Foy, comme son nom l'indique a d'abord un sens physique. C'est le regroupement dans un même ensemble, dans un même complexe, de laboratoires de divers genres qui existent déjà mais qui sont dispersés, ou d'autres laboratoires susceptibles d'être mis en place.

Parmi les laboratoires qui existent déjà, il y a ceux des ministères gouvernementaux eux-mêmes, Richesses naturelles, Agriculture, Voirie, etc. Parmi les laboratoires à créer, il y aura d'abord ceux qui sont de recherche industrielle. Il y aura également ceux de l'Institut national de la recherche scientifique de l'Université du Québec qui vient d'être créé par l'arrêté ministériel du 3 décembre 1969. Il y aura même, du moins nous l'espérons, les laboratoires de certaines entreprises privées qui pourraient être intéressées à s'installer dans le complexe.

Je n'exclus même pas qu'au lieu d'implanter certains laboratoires ailleurs, le gouvernement fédéral considère la possibilité de les joindre au complexe de Sainte-Foy. En somme, du point de vue de l'aménagement physique, le complexe scientifique de Sainte-Foy est une vaste entreprise de regroupement de laboratoires de recherche variés.

Le regroupement de ces laboratoires administrés par diverses autorités ne signifiera pas que les autorités en question devront abandonner les responsabilités administratives qui leurs sont propres en ce qui concerne les opérations de recherche proprement dite. Dans un domaine comme celui-là, il faut respecter l'autonomie nécessaire au succès même des opérations.

Voilà pourquoi les responsables des divers laboratoires installés dans le complexe continueront à administrer leurs propres projets de recherche et à diriger leur propre personnel engagé dans ces projets. Les fonctionnaires, actuellement à l'oeuvre dans les différents labo- ratoires des ministères, continueront donc de le faire comme auparavant, à titre de fonctionnaires relevant de la Loi de la fonction publique.

Les employés du centre de recherche industrielle, lorsqu'il existera, auront le statut prévu par l'article il du projet de loi 71.

Personne ne perd donc un droit acquis. Qu'il s'agisse des ministères gouvernementaux, du Centre de recherche industrielle, de l'Institut national de recherche scientifique de l'Université du Québec ou de tout autre client du complexe, tous ces partenaires conserveront l'autonomie administrative nécessaire à la poursuite de leurs travaux.

Leur présence dans le complexe, cependant, leur permettra de bénéficier de deux avantages qu'ils n'ont pas actuellement ou qu'ils n'auraient pas s'ils sont aménagés chacun pour son compte à divers endroits. Le premier de ces avantages, c'est que le regroupement, dans un même lieu physique rendra possible l'aménagement de services communs de divers genres, depuis les services les plus matériels, tels qu'une cafétéria, jusqu'à d'autres services plus proches de leurs fonctions de recherche, tels une bibliothèque commune ou un centre d'informatique conjoint.

C'est l'aménagement et la gestion de tels services communs qui entraînent la nécessité d'un organisme ad hoc. Le gouvernement a décidé que cet organisme prendra la forme d'un bureau d'aménagement et de gestion rattaché à l'Office de planification et de développement. Les modalités de fonctionnement de ce bureau seront précisées dans un arrêté ministériel qui est actuellement en voie de rédaction et qui sera adopté au cours des prochaines semaines. Mais, d'ores et déjà, il est prévu que ce bureau sera constitué d'un délégué de l'Office de planification, qui agira comme directeur du bureau, d'un représentant de chacun des partenaires installés dans le complexe et, enfin, d'un représentant des Travaux publics.

Voilà le premier avantage que procurera le complexe scientifique à ses partenaires. Le second avantage est tout aussi important, et il touche encore de plus près à la recherche elle-même. Pour assurer que le regroupement dans le complexe ne se limite pas à des économies matérielles, mais qu'il favorise effectivement les échanges entre les divers groupes de chercheurs et qu'il facilite la coordination nécessaire entre les projets de recherche eux-mêmes, un comité scientifique sera institué, dont les membres proviendront des divers partenaires du complexe, il jouera auprès de ces derniers, comme d'ailleurs auprès du Bureau d'aménagement et de gestion, un rôle consul-

tatlf dans toutes les matières de caractère scientifique.

Le schéma que j'ai remis au chef de l'Opposition montre clairement, je pense, où se placent exactement les divers éléments et les divers rouages dont je viens de parler dans le cadre du complexe scientifique de Sainte-Foy pour lequel les premiers contrats de construction ont été signés il y a quinze jours. Il s'agit là d'une entreprise d'envergure qui se réalisera forcément par étapes. La première phase des investissements prévus affecte principalement les laboratoires des ministères gouvernementaux pour lesquels il y a urgence de procéder immédiatement à un regroupement.

Au fur et à mesure que le Centre de recherche industrielle lui-même et que l'Institut national de recherche de l'Université du Québec auront précisé leur propre orientation et mis au point des projets concrets de laboratoire dans tel ou tel secteur, le Bureau d'aménagement et de gestion procédera, en liaison immédiate avec le ministère des Travaux publics, aux investissements requis. D'ailleurs, entre la phase de construction actuellement en cours et la phase ultérieure qui pourra commencer à brève échéance si le Centre de recherche industrielle et l'institut précisent rapidement leurs projets, il y aura des chevauchements.

C'est ainsi, comme je l'ai déjà souligné, que, pour éviter une rupture entre la première phase déjà engagée et celle qui suivra pour le Centre de recherche industrielle, le ministère des Travaux publics a prévu des locaux qui seront construits au cours de la première phase pour répondre, au moins provisoirement, aux besoins les plus immédiats du centre et de l'institut en ce qui concerne notamment le personnel administratif et les premières équipes de recherche.

J'espère que ces explications répondront aux points d'interrogation que le débat de la semaine dernière a pu soulever dans l'esprit du chef de l'Opposition et que nous pourrons maintenant procéder à l'adoption des articles suivant du projet de loi no 71.

M. LESAGE: Je remercie infiniment le ministre d'avoir pris la peine de faire préparer ce schéma que j'ai en main. Je voudrais suggérer, M. le Président, que le schéma soit imprimé...

M. BEAUDRY: Pardon?

M. LESAGE: ... Que le schéma soit imprimé au journal des Débats...

M. BEAUDRY: Oui, monsieur.

M. LESAGE: ... entre l'intervention du ministre de l'Industrie et du Commerce et la mienne, comme...

M. PAUL: Merci, M. le Président.

M. LESAGE: ... l'on fait lorsque l'on dépose un tableau de chiffres. C'est très facile à reproduire au journal des Débats. Autrement, il est difficile de suivre les explications du ministre de l'Industrie et du Commerce, et mon intervention ne sera pour quelqu'un qui lit le journal des Débats que du charibia, parce que j'aurai à référer au schéma que vient de déposer le ministre de l'Industrie et du Commerce.

ANNEXE Référer à la version PDF page 4774

M. LESAGE: Je parlerai très brièvement de l'aménagement physique de ce qu'on appelle le complexe scientifique. On nous avait dit que la première phase de la construction s'étendant sur une période de cinq années comporterait la construction et l'aménagement des locaux nécessaires pour loger les cinq laboratoires existants déjà, laboratoires qui sont la responsabilité de cinq ministères dont ceux de, cinq ou six...

M. RUSSELL: Six.

M. LESAGE: Six, dont ceux de la Voirie, des Richesses naturelles, des Terres et Forêts, de l'Agriculture...

M. RUSSELL: L'Industrie et Commerce, Richesses naturelles, Santé...

M. BEAUDRY: Le département des pêcheries et le Centre de recherche industrielle.

M. LESAGE: Oui, très bien. Je comprends maintenant qu'au point de vue physique cette première phase permettra de loger aussi les débuts du Centre de recherche industrielle, de même qu'il y aura des bureaux pour les membres de l'Institut national de la recherche scientifique créé par l'arrêté ministériel du 3 décembre 1969.

M. CARDINAL: C'est exact, oui.

M. LESAGE: Mais ça, ce sont des choses que nous avons apprises la semaine dernière et cette semaine. Je pense que tout le monde comprendra que nous n'étions pas au courant de l'adoption de l'arrêté ministériel du 3 décembre.

M. CARDINAL: Vous avez copie de cet arrêté, je pense.

M. LESAGE : M. le Président, ce n'est qu'au cours de la discussion, vendredi de la semaine dernière, que le premier ministre, ayant entendu la discussion entre le ministre de l'Industrie et du Commerce et le chef de l'Opposition et voyant bien qu'il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond — je n'en connaissais pas l'existence, et le ministre en parlait, alors comment vouliez-vous que je comprenne le projet de loi? — que le premier ministre s'est présenté devant le comité, m'a dévoilé qu'il y avait eu cet arrêté ministériel et en a déposé une copie dont je n'ai pu prendre connaissance qu'après, c'est-à-dire dans l'après-midi. Je ne pouvais pas deviner non plus ce que pourrait être ce bureau d'aménagement et de gestion, malgré que j'ai bien senti, comme je l'ai dit au cours d'une conversation privée avec le ministre de l'Education, qu'il s'agirait d'un bureau d'aménagement et de gestion qui coifferait le tout et qui serait la responsabilité du ministre du Plan.

Mais, revenons-en pour le moment non pas à l'organigramme, c'est-à-dire aux lignes d'autorité et de coopération, tenons-nous en à l'aspect physique et disons qu'au moins je sais ce qui va se passer, du moins je sais quoi espérer, parce que ce sont plutôt des espoirs qui sont notre partage avec le gouvernement actuel que des réalisations.

Alors, je sais ce que nous pouvons espérer. Dans cet édifice seront logés l'Institut national de la recherche scientifique, le Centre de recherche industrielle, six laboratoires relevant de six ministres différents et d'autres laboratoires éventuels. Quant à l'autorité sur ces laboratoires éventuels, évidemment, comme les laboratoires sont éventuels l'autorité est également éventuelle, ça fait qu'on ne le sait pas. Tous ces gens seront dans le même édifice. Pour retrouver la ligne d'autorité, iI faut sortir du complexe, c'est-à-dire qu'il faut cesser de parler du complexe physique pour s'en tenir aux lignes d'autorité et de coordination.

M. CARDINAL: Ce n'est pas pire que dans l'édifice du parlement.

M. LESAGE: Je n'ai pas porté de jugement. Je dis qu'il faut maintenant en revenir aux lignes d'autorité et de coordination. Je pense bien que le ministre de l'Education serait le dernier à me reprocher de vouloir agir ainsi. Si l'on veut savoir comment ça va marcher à l'Intérieur, il faut savoir où est l'autorité et quelle est la coordination possible. C'est la seule façon.

M. CARDINAL: Loin de moi de vous faire quelque reproche.

M. LESAGE: Alors, disons qu'en 1966, le Conseil de la recherche scientifique que nous voulions créer par le bill 6 devait conseiller le gouvernement dans l'élaboration de sa politique en matière de recherche scientifique, devait promouvoir la recherche par la distribution de subventions à des chercheurs individuels, à des groupes de chercheurs, à des institutions, devait collaborer avec les autres organismes de recherche existants dans la province et au Canada, devait assurer la liaison entre la recherche pure et la recherche appliquée et technique ainsi qu'entre les diverses disciplines, devait

dresser et tenir à jour l'inventaire de la recherche au Québec pour rassembler les renseignements essentiels sur le personnel engagé, le matériel et l'équipement en place et les besoins des chercheurs et les programmes de recherches en cours, compte tenu du caractère confidentiel de certains travaux. Ce conseil de la recherche scientifique devait être composé d'un certain nombre de membres, de 12 à 18, en fait, dont au moins la moitié devait être choisie parmi le personnel académique des universités.

Ce conseil devait coordonner le travail de toute la recherche qui se fait au Québec et plus particulièrement le travail du Centre de recherche industrielle qui était proposé par le bill 7, déposé en même temps que ce bill 6 dont je viens de lire des extraits, et les deux projets de loi prévoyaient que et le Conseil de la recherche scientifique et le Centre de recherche industrielle seraient sous la juridiction d'un même ministre, le ministre de l'Industrie et du Commerce, malgré qu'il y ait eu de fortes pressions pour que le Conseil de la recherche scientifique, pour des raisons que l'on nous a exposées en détail et que, sans doute, le ministre de l'Education sera tenté de me répéter tantôt, de fortes pressions pour que le Conseil de la recherche scientifique soit sous l'autorité du ministre de l'Education. Mais, ce sont des raisons que nous n'avons pas voulu admettre, malgré qu'il y en ait eu de bonnes, au profit de l'unité de décision. Nous voulions qu'il y ait parfaite coordination et que la ligne d'autorité soit unique. Je ne dis pas qu'il n'y avait pas des raisons valables pour que le Conseil de la recherche scientifique soit sous l'autorité du ministre de l'Education mais je dis que ces raisons étaient moins fortes que ce que nous considérions un besoin essentiel d'unité de direction dans toute la recherche au Québec.

Le schéma que l'on nous présente nous dit qu'il y aura un bureau d'aménagement et de gestion qui coiffera les quatre branches, telles qu'elles apparaissent ici:

Premièrement, l'Institut national de la recherche scientifique, qui relève non pas du ministre de l'Education directement mais de l'Université du Québec qui, elle, se rapporte au ministre de l'Education, deuxièmement, le Centre de recherche industriel, qui est l'objet du projet de loi à l'étude ce soir et qui relève du ministre de l'Industrie et du Commerce; troisièmement, les laboratoires existants des six ministères qui continueront de relever de chaque ministre respectivement, c'est-à-dire, cinq — j'enlève celui de l'Industrie et du Commerce puisqu'il relèvera du même ministre — et, enfin, possibilité d'un quatrièmement, d'autres la- boratoires éventuels sous l'autorité de ministres éventuels ou l'autorité éventuelle d'autres ministres.

Alors, M. le Président, tout ça sous un bureau d'aménagement et de gestion qui, nous dit le ministre, sera chargé de la coordination, qui sera assisté d'un comité scientifique consultatif. Evidemment, le bureau d'aménagement et de gestion, si je ne m'abuse, relèvera, dans le présent, si je m'en tiens aux conditions présentes, du député de Montcalm.

M. BEAUDRY: C'est ça.

M. LESAGE: L'Office du plan?

M. BEAUDRY: C'est ça.

M. LESAGE: Et le ministre de l'Education, le ministre de l'Industrie et du Commerce, les autres ministres qui ont des laboratoires, ou le ministre de l'Agriculture, le ministre de la Voirie, des Richesses naturelles, les autres, évidemment, deviendront les pupilles du député de Montcalm. Ah! que le député de Montcalm doit donc être heureux! Lui, le plus jeune des ministres est devenu le patron de ses collègues, et c'est lui qui détient la ligne d'autorité avec un nouveau sous-ministre, directeur puissant, ancien sous-ministre du ministre de l'Education qui est reconnu pour son esprit de décision, un homme d'une grande valeur. Enfin, les ministres vont se faire parler!

Je ne sais pas s'ils comprendront ou s'ils se comprendront entre eux, c'est une des questions qui m'inquiètent. Mais ma crainte, c'est que tout ça devienne un capharnaüm, une tour de Babel, parce que je crois que, si on veut réussir dans le domaine de la recherche, il faut que, pour la coordination, il y ait un conseil de la recherche scientifique qui soit chargé de coordonner la recherche, quelle qu'elle soit, au Québec. C'est ce conseil qui doit être la ligne d'autorité première et qui doit avoir les pouvoirs nécessaires pour coordonner toutes les branches de la recherche au Québec. Je crains, M. le Président, qu'on fasse fausse route, que l'on s'engage dans un labyrinthe de structures qui nous prouve, encore une fois, que le gouvernement souffre de structurite, cette maladie moderne qui fait tant de ravages.

M. CARDINAL: Ce ne serait pas le premier gouvernement qui en souffrirait!

M. LESAGE: Non, mais le gouvernement actuel en souffre terriblement.

M. BEAUDRY: M. le Président, est-ce que je peux poser une question?

M. LESAGE: ... et c'est une maladiequi fait extrêmement de ravages.

M. BEAUDRY: M. le Président, est-ce que je pourrais vous poser une question?

M. LESAGE: Ah, oui, bien sûr.

M. BEAUDRY: M. le chef de l'Opposition...

M. LESAGE: Je ne garantis pas que je répondrai.

M. BEAUDRY: Non, non, mais lorsque vous avez été premier ministre — je ne faisais pas tellement de politique — mais il me semble que vous avez adopté une loi pour la Sidbec. A ce moment-là lorsque vous avez créé Sidbec, vous ne saviez certainement pas ce qu'était pour devenir Sidbec?

M. LESAGE: Pardon?

M. BEAUDRY: Lorsque le gouvernement du temps a présenté une loi pour...

M. LESAGE : Non, je ne pouvais pas savoir ce qu'allait devenir Sidbec, je ne savais pas que le gouvernement changerait.

M. BEAUDRY: Non, non, une minute... la loi a été présentée avant même que les études soient faites. Vous avez présenté votre loi avant que les études soient terminées...

M. LESAGE: II fallait quand même faire de la dépense...

M. BEAUDRY: Bon, alors disons...

M. LESAGE: Non, excusez-moi, ce n'était pas une... au début ce n'était pas une loi, Sidbec.

M. BEAUDRY: Non? Je n'insiste pas.

M. LESAGE: C'était une compagnie formée purement et simplement en vertu de la loi des compagnies.

M. BEAUDRY: Je pensais que vous aviez présenté une loi à ce moment-là.

M. LESAGE: Non. C'était en vertu de la Loi des compagnies. Alors, de la même façon que par arrêté ministériel vous formez ici un or- ganisme qui s'appelle l'Institut national de la recherche scientifique. Par l'arrêté ministériel créant l'Institut national de la recherche scientifique, il est clair que le gouvernement ne peut pas du même coup et en vertu de l'arrêté ministériel décréter des subventions, etc., ce qui était prévu dans le bill 6.

Le grand avantage des bills 6 et 7 présentés ensemble, c'était l'unité de direction, la coordination, l'inventaire de toute la recherche au Québec. Aujourd'hui, je trouve qu'il y a trop de structures, je crains qu'on se pile sur les pieds et, je le répète, cela m'inquiète beaucoup de voir ce grand partage de responsabilités, partage qui, inévitablement, va diminuer l'efficacité. C'est cela que je crains. Il me semble qu'il y avait moyen de suivre une ligne d'autorité et de coordination qui aurait été beaucoup plus simple en prenant l'exemple sur les bills 6 et 7 présentés au mois de mars 1966 au lieu de créer toutes ces structures où pas beaucoup de gens vont s'y comprendre, à moins de faire ce que nous avons dû faire, de nous asseoir, de scruter les arrêtés ministériels, scruter les projets de loi, de constater ce qui y existe à l'heure actuelle, ce qu'on propose de faire et ensuite de bénéficier de magnifiques schémas qui nous sont fournis gracieusement par le ministre de l'Industrie et du Commerce, ce qui nous permet de comprendre un peu cet échafaudage compliqué que l'on veut mettre sur pied, échafaudage dont la complexité et la complication feront perdre l'efficacité du système.

Je pense que plus c'est complexe, plus c'est compliqué, moins c'est efficace. On a décidé d'être compliqué, c'est le privilège du gouvernement, mais ce sera pour le plus grand malheur de l'efficacité dans le domaine de la recherche au Québec. Je me demande franchement si tout ce que nous avons devant nous, particulièrement l'arrêté ministériel du 3 décembre, ces déclarations à l'effet que d'ici quelques semaines un nouvel arrêté ministériel sera adopté créant un bureau d'aménagement et de gestion, si tout cela ne révèle pas à l'intérieur du ministère une guerre de prestige.

Le ministre de l'Education ne veut pas être sous l'égide du ministre de l'Industrie et du Commerce, il ne veut pas que l'Université du Québec ait des instituts de recherche qui soient sous l'égide du ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. CARDINAL: Qui vous a dit cela?

M. LESAGE: Ecoutez, j'ai un peu d'expérience.

Je vous ai dit que je l'avais refusé en 1966.

M. CARDINAL: Ce n'était pas le même ministre de l'Education.

M. LESAGE: Ah non! mais disons que celui que j'ai devant moi... D'abord, le ministre dans le temps était un meilleur ministre et, deuxièmement, il souffrait moins de la maladie du prestige que celui qui est assis devant moi, ce soir.

M. CARDINAL: Je suis gentil, M. le Président.

M. LESAGE: Alors, M. le Président, il y aura en outre pour le sous-ministre du plan, que je vois sourire, qui est devant moi, pour le ministre de l'Industrie et du Commerce, pour le ministre de l'Education, la rivalité de cinq autres ministres avec chacun — oui, y compris le ministre des Richesses naturelles — avec chacun...

M. PAUL: Je pensais que vous me regardiez.

M. LESAGE: Avec chacun leur petit jeu de mécano, leurs petites éprouvettes, chacun leur petit projet de recherche, des petits systèmes à eux.

M. CARDINAL: Pardon, pardonl Comme diraient les « Grecs », paulo majora canamus! Relevez le ton!

M. LESAGE: Je parle assez fort.

Alors, tout cela provient d'une guerre de prestige entre les ministres. C'est comme dans cette chanson où l'on parle d'un « petit navire » en détresse. On dit: Qu'est-ce que nous allons faire dans les circonstances? Cessons de nous jalouser. Comment régler le cas? M. le Président, « le sort tomba sur le plus jeune ».

M. CARDINAL: M. le Président, le ton de bonne humeur et quelques fois d'humour qu'a utilisé le chef de l'Opposition m'induit à prendre un ton qui soit au même diapason et, bien amicalement, à échanger nos soucis et nos préoccupations au sujet de ce projet de loi.

Je voudrais indiquer un certain nombre de points qui font que la situation, aujourd'hui le 9 décembre 1969, n'est pas la même qu'en 1966, alors que les projets de loi 6 et 7 avaient été présentés. Je note, par exemple, qu'au moment où ces projets de loi avaient été présentés il n'y avait pas un conseil des universités. Il n'y avait pas une commission de la recherche faisant partie du conseil des universités. Il n'y avait pas d'Université du Québec. Il n'y avait pas, sauf quelques embryons, de laboratoires de recherche en fonction dans divers ministères. Il n'y avait pas de projet de complexe de la recherche à Sainte-Foy. La conjoncture — c'est le moins qu'on puisse dire — était donc très différente. Autre point qu'il est important de souligner, c'est que le projet de loi 6, qui, dans son article 12, indique certaines responsabilités du conseil du temps et qui sont reprises aujourd'hui ne faisait pas, cependant — et je veux le souligner — de ce conseil un organisme qui avait autorité sur la coordination. Je pense que le chef de l'Opposition ne peut être que d'accord avec moi.

M. LESAGE: C'était évidemment compris, parce que tout était sous l'égide du même ministre.

M. CARDINAL: Oui, d'accord, mais, quand même, je pense que les faits que je viens de mentionner indiquent qu'il y a...

M. LESAGE: Cela transpirait de la coréla-tion entre les deux projets de loi qui étaient la responsabilité du même ministre.

M. CARDINAL: D'accord, mais ce sont quand même des faits que j'ai mentionnés — des faits, non pas des opinions — et qui changent singulièrement la situation. Si l'on étudie l'organigramme qui a été discuté et qui fera partie du journal des Débats, l'on constate, premièrement, que cet organigramme ne crée pas, comme on le voit dans les sociétés qui s'amusent I établir des structures et qui, vite, les abandonnent — croyez-en mon expérience pour avoir vécu un certain nombre d'années dans ce monde — des lignes d'autorité, mais ce que j'appellerais des moyens de concertation, des moyens de coordination. En d'autres mots, le complexe scientifique de Sainte-Foy, d'une part, par son aspect physique, permet des économies que mon collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, a soulignées et sur lesquelles je ne reviendrai pas. Il permet en même temps des réalisations qui sont déjà en marche. Je prends, par exemple, le cas de l'Université du Québec. L'Université du Québec n'est ni sous le joug, ni sous la responsabilité directe du ministre de l'Education. Il n'en réclame que la paternité par cette loi qu'il avait déposée en décembre 1968, à peu près en même temps...

M. LESAGE: Mais l'Université du Québec fait rapport à la Chambre via le ministre.

M. CARDINAL: Oui, d'accord.

M. LESAGE: C'est ce que j'ai dit tantôt.

M. CARDINAL: Mais, ce n'est pas un organisme public La différence entre l'Université du Québec, si on veut poser cette question, et les autres, c'est qu'il y a ce rapport fait annuellement via le ministre, comme le ministère le fait, d'ailleurs...

M. LESAGE: C'est ça.

M. CARDINAL: ... et le fait que le ministre a des recommandations à faire pour la nomination de certaines personnes.

M. LESAGE: Je ne suis pas allé plus loin tout à l'heure. J'ai bien dit que cet organisme, l'Institut national de la recherche scientifique, relèverait de l'Université du Québec et indirectement du ministre.

M. CARDINAL: Oui, très indirectement et j''enchaîne avec ce que le chef de l'Opposition vient de dire, c'est qu'en matière de recherche, la planification pour ce qui est de l'Université du Québec et des autres universités... Ici, il y a une différence avec l'ancien projet de loi no 6 qui prévoyait une représentation universitaire, c'est qu'il n'y avait pas, à ce moment-là, le conseil des universités avec sa commission de la recherche qui, déjà, entre les universités, est un élément de planification et de représentation au niveau de l'Université du Québec.

Autre détail que j'apporte: Le chef de l'Opposition a fait écho tantôt, et c'est exact, à une conversation privée que nous avons eue cet après-midi et où, malheureusement, je n'ai pas eu le plaisir de discourir assez longtemps avec lui pour lui expliquer tous les points de vue sur cette question.

Il est à noter que l'Université du Québec, c'est exact, n'a pas de campus, mais un centre administratif à Québec, mais l'Université du Québec aura des locaux — on l'a indiqué tantôt — dans ce complexe scientifique, ce qui ne l'empêchera pas d'avoir de la recherche dans d'autres campus qui pourront quand même se relier aujourd'hui par les moyens techniques que l'on connaît à ce complexe scientifique de Salnte-Foy.

M. LESAGE: L'Université du Québec deviendra une pieuvre.

M. CARDINAL: Elle ne deviendra pas une pieuvre, elle deviendra un réseau d'enseigne- ment et de recherche au niveau supérieur, de même que les collèges d'enseignement général et professionnel sont devenus un réseau d'enseignement collégial public sur le territoire du Québec.

M. LESAGE: Il faut que le ministre soit prudent, parce que jusqu'à maintenant il a peut-être évité les jalousies du ministre des Travaux publics, mais, s'il va trop loin, le patron-nage va prendre le dessus.

M. CARDINAL: Si on appelle ça des pieuvres... Non, non! S'il vous plaît, pas sur ce point! Si on appelle ça des pieuvres, ce sont des pieuvres que j'accepte fort bien.

M. LESAGE: Le patronnage?

M. RUSSELL: J'ai beaucoup de leçons à prendre du chef de l'Opposition dans le patronnage.

M. LESAGE: Ah mon Dieu!

M. CARDINAL: M. le Président, pourrais-je revenir à cette très haute sphère de la recherche, qui, dans mon esprit, est loin des considérations de patronage?

J'ai donc, d'une part, indiqué non pas de lignes d'autorité Ici, et, parce qu'il n'y a pas de lignes d'autorité, il ne faut pas craindre, malgré la nature humaine, il faut d'ailleurs avoir plus confiance en la vie et être plus optimistes dans les conflits; au contraire, je puis même dire ceci de l'arrêté ministériel du 3 décembre 1969, concernant la création de l'Institut national de recherche scientifique a été le résultat de compromis amiables et rapides entre, d'une part, le bureau du plan, l'Université du Québec, les ministères concernés...

M. LESAGE: C'est bien ce que je pensais.

M. CARDINAL: ... et le ministre de l'Education. Et en très peu de temps...

M. LESAGE: Qu'en termes polis ces choses sont dites.

M. CARDINAL: Tant mieux si vous les considérez comme telles, ça n'a pas toujours été votre...

M. LESAGE: Cela a dû être plus dur que ça, quand même!

M. CARDINAL: Non, au contraire, j'en appelle à quelques-uns qui sont ici présents.

M. LESAGE: Ils n'ont pas le droit de dire la vérité.

M. CARDINAL: Pardon?

M. LESAGE : Ils n'ont pas le droit de vous contredire.

M. CARDINAL: Je ne sais pas si vous leur niez ce droit, mais dans le livre des règlements...

M. LESAGE: La solidarité ministérielle.

M. THEORET: Cela a bien changé depuis trois ans.

M. CARDINAL: Je pensais même le contraire, puisque dans les débats qui ont duré depuis une dizaine de jours sur la question des institutions privées l'on a rappelé que ce qu'un fonctionnaire dit est attribué au ministre à l'occasion d'une commission. Par conséquent, cela devient le problème du ministre et non pas celui du fonctionnaire. Il est toujours couvert par la permanence et par les traditions de la Chambre.

Ceci étant dit, M. le Président, je termine cette parenthèse pour dire qu'il ne s'agit donc pas de ligne d'autorité, mais purement d'un moyen de concertation, d'un moyen de coordination, il y a plus, c'est qu'il ne s'agit pas ici de projets théoriques, et le chef de l'Opposition s'inquiète de la réalisation. Je ne m'en inquiète pas. Déjà l'Institut national de la recherche scientifique est créé, déjà les plans du complexe scientifique de Sainte-Foy sont là, déjà certains ministères ont des laboratoires, comme ceux de la Voirie, etc. Il ne s'agit, au contraire, que de concerter des réalisations déjà existantes et d'en tirer un maximum de profits.

Lorsque nous entrons dans la recherche — et, dans la conversation que nous avons eue cet après-midi, le chef de l'Opposition lui-même a évoqué le Conseil national de la recherche — on sait que même si nous pouvons, dans l'ordre de la sémantique et de la théorie, distinguer la recherche appliquée, la recherche pure, la recherche au niveau universitaire et d'autres recherches dont j'ignore les noms ou que j'oublie, les barrages ou les séparations entre chacune de ces modalités de la recherche sont si minces que les phénomènes d'osmose que l'on retrouve en physique ou en chimie ou dans les deux jouent continuellement et que, par conséquent, tout ceci ne peut que nous amener vers une concertation de la recherche qui soit en même temps une adéquation entre des moyens que nous avons et des besoins que nous ne pouvons pas satisfaire, si nous n'établissons pas ce bu- reau d'aménagement et de gestion, qui n'est là que pour une coordination et la planification sur le plan de la gestion et non pas sur le plan de la recherche elle-même.

C'est le comité scientifique consultatif qui viendra, par sa consultation, par ses conseils et par ses expertises, aider, sur le plan de la recherche scientifique. Quant à la dernière partie de cet organigramme, ces gens ne sont pas des adversaires, ils ne sont pas des compétiteurs, ils ne sont pas des concurrents. Ils sont des partenaires, dans diverses sphères, pour une même fin, qui est l'élaboration de la recherche au Québec.

Je voudrais donc que l'on se rende compte que tout ceci, relié au Conseil supérieur de la recherche, peut paraître compliqué à première vue, c'est vrai. Cela peut paraître à première vue quelque chose qui serait, je n'aime pas le mot, un « capharnaüm » mais disons peut-être une tour de Babel.

M. LESAGE: Oui.

M. CARDINAL: D'autant plus que les chercheurs, justement, se servent habituellement des langues qui sont les leurs a ce niveau. Mais, je l'ai dit et je le répète Ici, ce n'est pas parce que l'on prévoit des difficultés, ce n'est pas parce que l'on prévoit des problèmes qu'il faut mettre de côté un plan semblable. Je pense que, d'ailleurs, l'intervention du chef de l'Opposition a été beaucoup plus présentée sous la forme d'un caveat que sous la forme d'une objection, en ce sens qu'il prévient d'avance — comme c'est le rôle de l'Opposition loyale — le gouvernement des difficultés de la mise en application de ses lois et de ses décrets.

C'est ainsi que je le prendrais, tout en lui expliquant justement que tout ceci vient — j'ai employé tantôt le mot « compromis » — d'un compromis; non pas parce qu'il y avait chicane, non pas parce qu'il y avait conflit, mais bien d'un compromis, c'est-à-dire de gens qui se sont réunis ensemble et qui, au lieu de tirer la couverte chacun de son côté, d'avoir chacun son laboratoire, d'avoir chacun son bureau d'aménagement ou de gestion pour un laboratoire donné, se sont décidés enfin à tirer ensemble dans le même sens et à doter le Québec d'un moyen de développer la recherche tant pure qu'appliquée, tant dans le domaine des universités que dans le domaine public.

Je pense que les quelques explications que je viens de donner, ne présentent pas de ligne d'autorité mais plutôt de la concertation; l'aspect physique de cette réalisation; sous l'aspect qu'il y a déjà des réalisations qu'il était nécessaire

de planifier; sur le fait que le Bureau d'aménagement ne viendra pas contrôler des ministres; sur le fait que les quatre carreaux, si vous voulez, qu'il y a au bas de ce plan ne sont que la représentation de partenaires qui ont chacun des intérêts qui coïncident plutôt que de s'opposer, indiquent que la différence avec 1966, alors que les projets 6 et 7 ont été présentés, et le fait que, depuis, il s'est établi un certain nombre de réalisations que j'ai mentionnées, changent considérablement la situation, et qu'au lieu d'avoir des craintes, nous devrions faire face à un grand optimisme.

M. LESAGE: M. le Président, je comprends les excellentes dispositions du vice-premier ministre. Quant à moi, je veux clore mon intervention en exprimant un voeu, c'est que, devant la complexité de toutes ces structures, j'espère que celui qui est à la tête de ces structures, autrement dit, que M. Arthur Tremblay sera à la recherche au Québec ce que C.-D. Howe a été au Conseil national des recherches.

M. CARDINAL: Je ne sais pas si je dois faire des commentaires. J'ai connu M. Arthur Tremblay au ministère de l'Education. Je n'ai pas eu l'expérience d'aller à Ottawa et de connaître M. C. D. Howe, mais je n'ai aucune raison de douter de l'avantage pour le Québec de la comparaison qui vient d'être faite.

M. LESAGE: Tiens!

M. BEAUDRY: Article 11 adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 11? Adopté.

M. LESAGE: Article 11, M. le Président. Si je comprends bien...

M. BEAUDRY: L'article 11...

M. LESAGE: Evidemment, c'est en posant la question: Comment pourra-t-on — si je peux me permettre l'expression — défonctionnariser les fonctionnaires? C'est la réponse à cette question qui a entraîné toute la discussion que nous avons depuis vendredi matin.

M. BEAUDRY: Exact.

M. LESAGE: Je comprends très bien qu'ils ne seront pas des fonctionnaires, mais des employés du centre de recherche. Les employés des divers ministères qui sont déjà des employés des laboratoires continueront d'être des fonctionnaires. Tout dépendra des dispositions constitutives du bureau d'aménagement et de gestion, qui nous diront si les fonctionnaires de cet organisme à venir seront des fonctionnaires ou s'ils seront dans la catégorie d'exception, comme le seront les employés du Centre de recherche industrielle du Québec.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, article 11 adopté. Article 12? Adopté. Article 13?

UNE VOIX: Adopté.

M. LESAGE: Est-ce qu'il est nommé, le directeur général?

M. BEAUDRY: Pardon?

M. LESAGE: Est-ce qu'il est nommé le directeur général du centre de recherche? Est-ce que le ministre a quelqu'un de bien en vue?

M. BEAUDRY: Pas actuellement, M. le Président.

M. LESAGE: Personne en vue?

M. RUSSELL: Est-ce que le chef de l'Opposition en aurait un?

M. LESAGE: Si j'étais un « patroneux », je pourrais aller voir le ministre...

M. PINARD: Vous n'avez pas un nommé Savard d'engagé?

M. LESAGE: Oui, Savard, vous ne savez pas quoi en faire; vous pourriez l'installer là.

M. RUSSELL: II serait assez vite sur ses patins.

M. LESAGE: Oui, il a besoin d'autres choses que d'une paire de patins pour être directeur du centre.

M. BEAUDRY: M. le Président, on me dit qu'on a actuellement trois candidats possibles.

M. LESAGE: Vous êtes à examiner leurs antécédents politiques?

M. BEAUDRY: Pardon?

M. LESAGE: Vous êtes en train de faire enquête sur leurs antécédents politiques?

M. CARDINAL: Entre autres choses!

M. BEAUDRY: Nous attendions la loi, M. le Président.

M. PINARD: M. le Président, à titre de suggestion au ministre de l'Industrie et du Commerce, est-ce que Je pourrais lui faire remarquer qu'il a une excellente candidature dans la personne de celui qui était autrefois le directeur du centre de recherche de la Canadian Celanese à Drummondville, M. Giroux, dont j'ai parlé au ministre, l'autre soir?

M. BEAUDRY: II me fera plaisir de recevoir sa candidature.

M. PINARD: Je pense qu'il est éminemment qualifié pour occuper ce poste.

M. BEAUDRY: Cela me fera plaisir de recevoir sa candidature.

M. PINARD: Je me demande si le ministre ne perd pas dans ses dossiers...

M. BEAUDRY: Nous prenons son nom et nous communiquerons avec lui.

M. PINARD: ... une correspondance faite avec lui à ce sujet ou avec son prédécesseur au ministère.

M. CARDINAL: S'il y avait des députés d'en face qui se sentiraient les capacités et qui seraient moins intéressés par la politique à l'avenir, on serait disposé aussi à accepter des suggestions.

M. LE PRESIDENT: Article 13, adopté?

M. LESAGE: Les recherches se confineraient plutôt aux sciences humaines.

M. PINARD: Vous êtes présomptueux, M. le ministre.

M. CARDINAL: Le député d'Ahuntsic paraît intéressé.

UNE VOIX: II y en a peut-être de votre côté qui sont intéressés.

M. PINARD: On recherche surtout les causes qui pourraient nous permettre de vous battre.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre I Article 13 adopté. Article 14?

M. BEAUDRY: Article 15.

M. LE PRESIDENT: Article 14, ça va? Article 15 adopté. Article 16 adopté?

M. LESAGE: Oui.

M. BEAUDRY: M. le Président, à l'article 17, j'aurais une suggestion.

M. LESAGE: Oui, j'y arrive.

M. BEAUDRY: Est-ce qu'on pourrait remplacer les mots « la recherche en sciences appliquées » par « la recherche de nature industrielle effectuée soit dans ses propres laboratoires, soit dans ceux d'autres centres de recherche ». Est-ce que l'Opposition a une objection?

M. LESAGE: Un instant. Quelle est l'objection...

M. BEAUDRY: Nous avons...

M. LESAGE: ... à l'expression « sciences appliquées ». Ce n'est pas la science pure, ça.

M. BEAUDRY: Nous avons eu un entretien avec le président de l'Université du Québec et, en ce qui regarde l'Université du Québec, il préférait que nous changions « sciences appliquées » pour « de nature industrielle ».

M. LESAGE: Pourquoi? Pour diminuer les pouvoirs du ministre. Ah non, je vais défendre le ministre à mort. J'aime mieux les mots « sciences appliquées », c'est plus large.

M. BEAUDRY: Oui, mais en sciences appliquées, là...

M. LESAGE : Oui, mais pourquoi le ministre de l'Industrie et du Commerce se ferait-il dicter la compétence de son propre centre par le président de l'Université du Québec? Le président de l'Université du Québec veut restreindre les pouvoirs du centre et c'est le ministre qui se laisse faire comme ça!

M. BEAUDRY: Non, au contraire, M. le Président, ça ne nous empêche pas de faire des recherches...

M. LESAGE: Les sciences appliquées, ça va beaucoup plus loin que la recherche purement industrielle.

M. BEAUDRY: Bien oui, mais, nous,notre

devoir, c'est de faire de la recherche industrielle, M. le Président.

M. LESAGE: A l'occasion de la recherche industrielle, vous devez, à mon sens, faire de la recherche en sciences appliquées.

M. BEAUDRY: D'accord.

M. LESAGE: Alors, pourquoi ne pas le laisser? Pourquoi diminuer vos pouvoirs? Je ne vois pas pourquoi on accepterait cet amendement. Je préfère m'en tenir au bill tel qu'il est.

M. BEAUDRY: D'accord.

M. CARDINAL: Je n'ai pas d'objection mais je pense qu'il ne faudrait pas imputer des intentions...

M. LESAGE: Je n'impute d'intentions à personne mais je dis au ministre de faire attention. Il est trop bon garçon, il se laisse faire.

M. CARDINAL: Non, M. Riverin n'est pas là pour se défendre.

M. BEAUDRY: A l'article d), pour augmenter mes pouvoirs...

M. LESAGE: N'allez pas trop loin.

M. BEAUDRY: ... est-ce que je pourrais ajouter « la mise au point de produits » au lieu de « procédés ».

M. LESAGE: Très bien.

M. BEAUDRY: De produits et de procédés.

M. LESAGE: Je pense que si vous mettez « de produits » vous n'avez pas besoin « de procédés ».

M. BEAUDRY: De produits? D'accord.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, 17, avec son amendement.

M. LESAGE: Un instant.

M. PICARD: Si vous me permettez, à l'article 17, si l'on regarde les fonctions attribuées au centre, on s'aperçoit tout à coup qu'on s'en va presque entièrement dans la recherche. Six laboratoires de différents ministères vont tomber sous l'autorité du centre de recherche?

M. BEAUDRY: Non. Les six laboratoires vont demeurer sous la juridiction de leur ministre respectif. Les six laboratoires vont demeurer sous la juridiction de leur ministère respectif.

M. PICARD (Olier): Est-ce qu'ils continueront de faire de l'analyse de qualité des produits? Je vais vous donner un exemple concret; disons qu'actuellement le laboratoire du ministère de la Voirie fait l'analyse de qualité, par exemple, du béton qui est utilisé dans la construction des routes. Maintenant que ce laboratoire sera transféré au centre de recherche, est-ce qu'on continuera encore à en faire l'analyse par le ministère?

M. RUSSELL: Le même travail va être continué par les mêmes employés dans des laboratoires...

M. BEAUDRY: Ils ne seront pas transférés au centre de recherche... Ils déménagent au centre de recherche, c'est tout, dans le complexe scientifique.

M. PICARD (Olier): Alors ils continuent...

M. BEAUDRY: Oui, de la même façon qu'ils le font actuellement.

M. PICARD (Olier): D'accord.

M. BEAUDRY: Nous insisterions pour inclure les mots « la mise au point de produits et de procédés. »

M. LESAGE : J'avais entendu la suggestion du ministre que j'ai prise en note; je me suis penché vers le président pour lui dire que je pensais que c'était préférable. C'était déjà fait, je pense même que le président l'a inscrit.

M BEAUDRY: Merci.

M. LESAGE: Un instant. Je ne sais pas si c'est à cet article-ci ou a un autre que nous pourrons traiter... Qu'arrive-t-il des inventions brevetées?

M. BEAUDRY: Un peu plus loin, nous allons arriver à cet article.

M. LESAGE: J'aurai des questions à poser, et je veux être sûr de pouvoir le faire. Je sais bien que le ministre ne me dirait pas ça, mais je ne voudrais pas me faire dire que j'aurais dû demander ça à l'article 17.

M. BEAUDRY: A l'article 23.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 17 adopté, avec son amendement. Article 18.

M. LESAGE: Pour l'immédiat, on n'entrevoit pas que le Centre de recherche industrielle soit propriétaire de l'immeuble?

M. BEAUDRY: Non.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté, article 18. Article 19.

M. TETLEY: Au sujet de l'article 19, surtout b). En vertu de cet article, le centre aura le droit de « conclure avec toute personne (et je crois que ça veut dire une université) un contrat de participation à la recherche. » Sans doute avez-vous en vue les universités Laval, du Québec, etc. et je note que si par exemple la fiducie, la fondation Ford ou la fiducie Ford fait une donation, un legs en vertu de 22, 23, ou 18, une université, celle-ci, en vertu du système qui existe à l'heure actuelle, reçoit moins du gouvernement.

Cette université, et une donation ou une subvention plus forte est donnée à d'autres universités. Je suis content que le ministre de l'Education soit présent ce soir, parce que je crois que le système de donations et de subventions aux universités est, dans ce sens, mauvais. Si une donation ou un legs par un diplômé ou par une fondation comme Ford ou Rockfeller ou n'importe sont donnés à l'université, il ne faut pas que l'université perde la subvention qu'elle doit recevoir du gouvernement. Je crois qu'en vertu de la commission Gauthier... est-ce Gauthier, M. le ministre?

M. CARDINAL: C'est-à-dire que, pendant trois ans, il a existé un comité ad hoc général présidé conjointement par le ministre des Finances et le ministre de l'Education; il y avait deux sous-comités, le sous-comité des budgets d'immobilisation et le sous-comité des budgets de fonctionnement, qui était présidé par M. Germain Gauthier, qui est maintenant président du Conseil des universités.

L'intervention du député de Notre-Dame-de-Grâce m'oblige à apporter une précision que j'ai apportée souvent: ce qu'il vient de dire est une opinion. Les faits sont les suivants: les budgets de subventions aux universités du Québec ont été jusqu'à présent des budgets d'équilibre budgétaire, il était donc normal que celle qui avait un plus grand déficit ait une plus grande subvention, puisqu'il ne s'agissait uni- quement, après normalisation des budgets et des états financiers, que de combler la différence entre ce qui était reçu et ce qui était nécessaire. Alors, je ne nie pas, si une université avait un fonds, une fondation, un « endowment fund », rapportant $3 millions par année, que, évidemment, l'université ayant un fonds en rapportant $20,000, c'était considéré dans les revenus de ces universités et que la subvention d'équilibre budgétaire en dépendait. C'est exact. Le député de Notre-Dame-de-Grâce a indiqué que c'était le système appliqué jusqu'à présent, c'est vrai. Quel sera le système appliqué à l'avenir? Je n'en sais rien, puisque, d'après la loi que nous avons adoptée en décembre 1968, il appartient maintenant au Conseil des universités, entre autres, d'aviser le ministre de l'Education sur les budgets des universités, la répartition des subventions du gouvernement aux universités.

M. TETLEY: Merci, M. le ministre. Je suis un peu content de la réponse du ministre, mais j'ai souvent demandé copie du rapport Gauthier et c'est apparemment un grand secret du ministre ou de son ministère. C'est donc difficile de répondre ou de faire des commentaires au sujet du rapport Gauthier, lorsqu'on n'en a pas de copie. Ce qui est très important, c'est que lorsque des diplômés des universités — Je sais très bien que le ministre de l'Education est diplômé de l'Université de Montréal — donnent chaque année un cadeau ou une somme d'argent, qu'ils aient...

M. CARDINAL: Oui, Je viens de payer ma souscription annuelle au fonds créé sur une base de cinq ans à l'Université de Montréal, et je sais fort bien ce qui peut arriver, s'ils sont sous le même système que l'an passé.

M. TETLEY: Oui, mais je vois que si vous doublez votre donation cette année, votre gouvernement et votre ministère vont couper la subvention du gouvernements votre université, suivant votre système. Je constate que l'université qui trouve des donations, des legs partout, est pénalisée. Je saisis donc l'occasion, au sujet de l'article 19b), de répéter encore une fois que le système est mauvais à mon avis et j'espère — le ministre a suggéré qu'il y a peut-être un autre système.

J'espère que le système sera modifié dans l'avenir.

M. CARDINAL: Evidemment, je ne sais pas comment cela se rapporte à l'article 19 b, disons que, si je n'étais pas sérieux, je pourrais

répondre comme ceci. On pourrait peut-être donner la même chose à tout le monde et, après cela, avoir un autre fonds qui s'appellerait un fonds de rattrapage pour les universités qui seraient en retard sur les autres.

M. TETLEY: M. le ministre, Je suis d'accord que l'Université du Québec doit avoir un fonds de rattrapage de même que l'Université de Sherbrooke, qui n'existe que depuis quelques années. Mais pour les donations de la part des diplômés... J'ai fait la quête pour une université, l'université Laval, et les gens m'ont répondu: « Mais cela n'aide pas l'université, parce que le gouvernement coupe les subventions. » II faut, à mon avis, que votre système soit modifié.

M. CARDINAL: J'accepte la suggestion, et je continuerai à réfléchir avec mes fonctionnaires.

M. TETLEY: Merci.

M. LE PRESIDENT (M. Léveillé): Article 19, adopté.

Article 20, adopté. Article 21, adopté. Article 22.

M. LESAGE: Article 22, cela va, c'est l'article 23.

M. LE PRESIDENT (M. Léveillé): Article 22, adopté. Article 23.

M. LESAGE: A l'article 23, est-ce que le ministre pourrait «n'expliquer ce qui arrive si une invention est faite par des chercheurs du centre où une invention est brevetée? Est-elle brevetée au nom de l'inventeur? Est-elle brevetée au nom du centre? Qui en dispose et au profit de qui?

M. CARDINAL: D'après l'article 23, le brevet appartient au centre.

M. LESAGE: Oui, j'ai compris.

M. CARDINAL: A moins que le centre n'en dispose autrement, c'est ce que dit l'article.

M. LESAGE: Au bénéfice de qui et comment? J'ai dit, lors de mon intervention de deuxième lecture, que l'expérience du Conseil national des recherches, c'est que, lorsqu'on disposait des brevets d'invention, les profits étaient très minimes la plupart du temps. Il est clair qu'un centre de recherche comme le Conseil national des recherches, même le Centre de recherche que l'on veut mettre sur pied ici, ne peut pas fonctionner à profit. Les seuls profits qu'un tel centre peut espérer retirer, ce sont des contrats d'association avec l'industrie en certains cas, contrats qui sont prévus à l'article 19.

M. CARDINAL: Des commandites.

M. LESAGE: Des commandites, c'est l'article 19. Pour ce qui est des brevets d'invention, l'expérience, c'est que les profits sur la vente des brevets sont loin d'être considérables. Lorsqu'il y a vente de brevets, les redevances elles-mêmes, à moins qu'il s'agisse de quelque chose de bien extraordinaire, sont minces.

Je comprends qu'il est entendu, qu'il est bien écrit ici que toute découverte par une personne, « les inventions, découvertes, perfectionnements, procédés et appareils réalisés par une personne dans le cadre d'un contrat de louage de service qui la lie avec le centre, sont la propriété du centre, à moins que le contrat n'en dispose autrement ». Très bien. Qu'arri-ve-t-il si le chercheur est à l'emploi du centre à temps partiel et qu'il prend à son nom un brevet pour une invention qui ne lui a été possible que grâce en partie à son travail au centre de recherche? Qu'est-ce qui se produit à ce moment-là?

M. BEAUDRY: C'est le contrat, M. le Président. C'est le contrat d'emploi du chercheur.

M. LESAGE: Oui, mais qu'arrive-t-il s'il..

M. BEAUDRY: ... travaille à temps partiel, c'est cela?

M. LESAGE: S'il travaille à temps partiel et qu'il demande un brevet en son nom et qu'il est clair qu'il a profité des recherches qu'il a faites grâce aux facilités du centre?

M. CARDINAL: Est-ce que je peux répondre d'abord indirectement, et si les experts du ministre de l'Industrie et du Commerce peuvent compléter... On sait que ce problème se pose déjà dans les universités.

M. LESAGE: Partout.

M. CARDINAL: On sait, justement, que la seule solution que l'on a, c'est le contrat.

M. LESAGE: C'est le contrat de louage de

services avec chaque individu qui doit déterminer les conditions.

M. CARDINAL: Ce qui n'a pas empêché, en de rares occasions...

M. LESAGE: Qu'il y en ait qui s'échappent.

M. CARDINAL: Oui, quelqu'un qui vend un livre et le vend à son profit, par exemple. Je comprends la question du chef de l'Opposition, mais on n'a pas encore trouvé, dans ce domaine...

M. LESAGE: ... de formule magique...

M. CARDINAL: ...une formule qui remplisse le trou.

M. LESAGE: ... qui soit complètement étanche.

M. CARDINAL: C'est ça. C'est la seule réponse que je pourrais donner, pour le moment.

M. LESAGE: C'est bien ce que je pensais que je me ferais répondre, d'ailleurs.

M. LE PRESIDENT (M. Lêveillé): Article 23? Adopté. Article 24? Adopté. Article 25? Adopté. Article 26? Adopté. Article 27? Adopté. Article 28? Adopté.

M. CARDINAL: Evidemment, on sait que la conjoncture a changé. Il me semble que les montants de millions ne sont pas les mêmes qu'avec le bill 6.

M. LESAGE: Il y a eu une augmentation considérable du coût de la vie.

M. PINARD: Augmentation du budget aussi.

M. CARDINAL: Si on s'engageait là-dessus, cela expliquerait peut-être beaucoup d'autres interventions en Chambre, mais, enfin, je voulais le souligner en passant; ce sera utile au journal des Débats.

M. LESAGEt Cela expliquerait peut-être ce qui vient de se produire pour les juges et, plus difficilement, qu'il ne se soit rien produit pour les députés.

M. CARDINAL: Etc. Ce qui ne s'est pas produit pour, les députés.

M. LESAGE: C'est ce que je viens de dire.

M. CARDINAL: Sauf que la tribune de la presse ne prend pas la présence des juges.

M. LESAGE: Tout est relatif.

M. CARDINAL: C'est ça.

M. PINARD: Ils ont l'air d'être plusieurs.

M. LESAGE: Ce soir, c'est très bien, mais il y a des fois où, à la tribune de la presse, il y a un peu d'absentéisme aussi.

M. BEAUDRY: Article 26.

M. LE PRESIDENT (M. Léveillé): Article 26, adopté. Article 27, adopté. Article 28, adopté. Article 29, adopté. Article 30, adopté. Article 31, adopté. Article 32 adopté.

M, BEAUDRY: L'article 31 est abrogé. Il a été amendé par l'article 4.

M. CARDINAL: L'article 31 disparaît. M. le chef de l'Opposition, on ne peut que vous remercier.

M. LE PRESIDENT (M. Léveillé): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que votre comité a adopté le bill 71 avec des amendements qu'il vous prie d'agréer.

M. LE PRESIDENT (M. Lebel): L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce propose que les amendements soient maintenant lus et agréés.

Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Troisième lecture

M. LE PRESIDENT: Du consentement unanime, l'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce propose la troisième lecture de ce projet de loi.

Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. PAUL: Article 10.

Bill 84 Deuxième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la deuxième lecture de la Loi modifiant de nouveau la loi de la Régie des alcools.

L'honorable ministre de la Justice.

M. Rémi Paul

M. PAUL: M. le Président, c'est un projet de loi qui ne change pas beaucoup les grands principes de la Loi générale de la Régie des alcools. Cependant, certains amendements s'imposent si nous voulons tenir compte du contexte de la vie moderne et répondre également à certaines demandes qui nous ont été maintes fois répétées aux fins de donner certains avantages ou, du moins, les mêmes que la loi actuelle accorde aux restaurateurs des grandes municipalités, telles que Montréal et Québec et tous ces grands centres régis par la Loi des cités et villes ou par charte spéciale.

M. le Président, en vertu de la loi actuelle, certains centres touristiques ou des petites villes... Vous me permettrez de citer l'exemple le plus connu pour moi, celui de ma propre ville. On pourrait répéter à des centaines d'exemplaires le même exemple. Il arrive qu'à Louise-ville, par exemple, nous avons deux conseils municipaux. Dans la ville de Louiseville, nous avons, en chiffres ronds, 4,600 habitants, et il arrive que, dans la paroisse de Saint-Antoine-de-la-Rivière-du-Loup, qui ceinture la ville de Louiseville, nous avons à peu près une population de 4,600 ce qui fait un centre communautaire d'environ 9,500 personnes, et dans aucun des deux endroits nous ne pouvons obtenir des permis en faveur des restaurateurs qui voudraient offrir les mêmes avantages que ceux que l'on retrouve dans les grands centres.

Nous pourrions citer Nicolet, nous pourrions citer les centres sur la Cote-Nord, nous pourrions citer de nombreux centres de villégiature. Si l'on tient compte des amendements beaucoup plus généreux qui furent accordés, dans le cours de l'été, en Ontario, par exemple, nous verrions que cette loi correspond à un besoin du moment.

Voilà, en résumé, les principaux amendements visés par cette loi. Il y a également deux amendements mineurs que j'ai l'intention de présenter, qui ne sont pas imprimés, dont l'un a pour effet de mettre à jour cette division qui existe au point de vue de l'administration de la Loi de la Régie des alcools, la section est ou la région de Québec, et la section ouest ou la région de Montréal.

Il arrive que la liste que nous retrouvons à l'article 3 de la loi ne correspond pas à la réalité puisqu'à la suite de la redistribution des sièges électoraux, il y a de nombreux comtés qui ne sont pas désignés dans cet article de la loi.

Il y a également un autre problème qui se soulève, c'est celui qui affecte tout le terri- toire de la basse Cote-Nord. Des juristes ont émis des opinions contraires à l'effet, par exemple, que dans ce grand territoire, il fallait tenir un référendum parce qu'en vertu d'une charte spéciale qui a créé une municipalité de la grande Cote-Nord, il faudrait, aux dires de plusieurs qu'un référendum soit nécessairement obligatoire pour faire disparaître la prohibition qui peut exister sur ce territoire.

Par contre, il y a d'autres opinions de juristes dans le sens contraire, à l'effet qu'un référendum passé dans le territoire donné d'une localité est suffisant pour permettre l'émission de permis de tous genres dans ce territoire de la Côte-Nord.

Voilà, dans les grandes lignes, ce projet de loi qui est présenté, ce soir, pour son adoption en deuxième lecture. Il y a également ce nouveau principe que l'on peut retrouver dans la loi et qui permet au public d'avoir accès à tout document contenant des objections auxquelles se réfère la loi, pour ce qui a trait à la contestation de toute demande présentée devant la régie.

Voilà, M. le Président, les grands principes de cette loi et je n'ai aucun doute que la régie, par l'office de ses fonctionnaires supérieurs, verra à éviter une prolifération des permis. Mais, d'un autre côté, il faut également que notre loi colle à la réalité du moment.

A maintes reprises, f ai toujours mentionné que toute loi devait répondre à un besoin.

Il faut reconnaître que les amendements que nous apportons correspondent à des pressions nombreuses qui nous sont parvenues de différents coins de la province. Il ne s'agit pas d'entrer en concurrence avec d'autres provinces comme l'Ontario, par exemple, province qui, dans le temps où j'y ai vécu en tant que député fédéral, avait un certain caractère de rigidité, un certain caractère de restriction dans l'application de ses lois et qui aujourd'hui connaît des législations qui correspondent justement aux besoins et aux demandes qui sont présentées aux administrateurs de cette province.

C'est un peu la même situation pour nous. Nous avons l'intention de présenter ce projet de loi dans le but d'apporter des modifications qui ne multiplieront pas les occasions de boire, mais qui, au contraire, permettront aux gourmets de bénéficier des mêmes avantages, dans les petits centres, que ceux que l'on peut trouver dans les grands centres comme nos villes. Voi là, c'est avec beaucoup de franchise que je présente ce projet de loi, soucieux que cette législation puisse correspondre à un besoin de la population. Aujourd'hui, dans nos moeurs, pren-

dre un verre de bière ou prendre un vin en mangeant est un usage reconnu.

Beaucoup de fins gourmets en voyage sont souvent déçus de ne pouvoir trouver ce service. Même si nous devons, d'un autre côté, voir que par nos législations nous puissions, en quelque sorte, combattre et lutter contre l'abus des boissons alcooliques, il ne faut pas, par contre, tomber dans le Jansénisme. Il ne faut pas non plus être mordu d'un certain scrupule qui nous empêche d'adopter des législations modernes. Voilà, M. le Président, les brèves remarques que j'avais l'Intention d'offrir au soutien du principe du bill 84, Loi modifiant de nouveau la loi de la Régie des alcools.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Charlevoix.

M. Raymond Mailloux

M. MAILLOUX: M. le Président, simplement quelques mots, d'abord pour excuser mon collègue de Richmond qui voulait parler sur ce projet de loi. Il avait une question à poser au ministre, dont je viens d'entendre la réponse. C'était la suivante: Qui avait demandé de telles améliorations à la loi? Je pense que, dans la réponse du ministre tantôt, il a dit que de très fortes pressions viennent des milieux entre 2,000 et 5,000 de population qui veulent avoir les mêmes avantages que les restaurants des villes de 5,000 à 50,000 de population.

Mes collègues et moi-mêmes aurons tantôt quelques observations à faire. Quant à moi, ce sera surtout à l'article 2. Je ne suis pas contre le projet de loi, j'ai simplement des réserves à apporter. Dans ce projet de loi, il y a quand même une amélioration assez sensible que l'on constate à l'article 3, c'est quand on permet, à ceux qui font des demandes de permis de toute sorte, de pouvoir, sans les services d'hommes de loi, prendre connaissance de ceux qui sont les plaignants.

Malgré les sourires de mes collègues qui sont hommes de loi, je dois dire que de trop nombreuses fois depuis qu'existe la Régie des alcools, pour des objections venant surtout de concurrents, il fallait, pour tous ceux qui demandaient des permis, se procurer les services d'un homme de loi et souvent dépenser quelques centaines de dollars avant de savoir si ce n'étalent pas simplement des concurrents qui cherchaient à bloquer l'émission d'un tel permis. Je comprends quand même mal la Loi de la Régie des alcools, parce que si l'on veut modifier l'article 46, je ne suis pas capable de saisir qui, à l'article 46, défendait à la régie de dire à ceux à qui on faisait objection pourquoi on cachait le nom. Rien, à l'article 46 du chapitre 44 de la Régie des alcools, ne défendait semble-t-il à la Régie des alcools de faire connaître ces objecteurs-là.

A tout événement, on semble vouloir préciser que, moyennant les frais de paperasse, il sera possible pour ceux qui feront les nouvelles réquisitions d'obtenir ces informations; je pense que c'est à leur avantage et que ça éliminera des frais.

M. le Président, quant à mol, si mes collègues n'ont pas d'autres choses à apporter en deuxième lecture, Je suis prêt à passer en comité pour la discussion.

M. Léo Pearson

M. PEARSON: M. le Président, J'aurais simplement une remarque; je me demande si ça ne serait pas l'occasion, à ce moment-ci, justement, autour du bill 84, de transférer ou de donner à la Régie des alcools la seule et unique autorité pour l'obtention des permis. Voici ce que je veux dire: Il existe certaines municipalités qui passent des règlements municipaux; le danger existe, à ce moment-là, que ces municipalités fassent un véritable chantage ou une exploitation des gens qui demandent des permis, un chantage qui peut être excessivement dangereux. A un moment donné, il se peut qu'on refuse pendant un certain nombre d'années un permis tout simplement parce qu'on bloque ou on arrête le permis; la régie ne peut pas opérer, ne peut pas donner suite à cette demande de permis tandis que, quelques centaines de pieds plus loin, quelquefois un autre peut demander un permis, tout simplement parce qu'il est dans une autre municipalité. La seule différence, ce sont quelques centaines de pieds et, à ce moment-là, il n'y a aucune objection de sa part.

Est-ce qu'on ne pourrait pas faire à la régie, par exemple, comme au ministère des Transports et Communications, et que la régie soit seul et unique juge pour les permis qui sont demandés?

M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Est.

M. Lucien Cliche

M. CLICHE: M. le Président, je désire faire quelques remarques en marge du projet de loi 84 et dire que, si les prétentions du ministre de la Justice sont bien fondées, Je ne crois pas que ce soit dans l'Intérêt particulier

du commerce de l'hôtellerie. Si l'on réduit de 5,000 à 2,000 le minimum de population requis pour l'émission de permis de restaurants, on nuit à l'hôtellerie dans la province de Québec. C'est sûrement un fait acquis que, dans nos petites villes, dans nos petites municipalités, à l'hôtel local, on a vu, par le passé et encore présentement, à organiser un service de salle à dîner fort intéressant, généralement pitores-que et l'on y donne aux voyageurs une excellente nourriture, tout ceci à la suite de cette campagne qui a été faite par le ministère du Tourisme et par l'Association des hôteliers.

On peut dire que, généralement, le service, la nourriture et la réception se sont améliorés partout dans la province chez nos hôteliers, mais je crains que, par l'adoption de cette loi-là, on vienne leur nuire, en ce sens que des demandes vont fuser de partout de la part des restaurateurs qui sont plus ou moins adéquatement équipés et installés pour servir décemment les voyageurs, ceux qui les visitent, ceux qui fréquentent leurs établissements, et ceci affectera nécessairement le commerce des hôteliers.

Je ne suis pas ici pour défendre l'hôtellerie de la province de Québec, mais je pense qu'à la suite des investissements qui ont été faits par tous les hôteliers, qui payent des taxes municipales et scolaires considérables on va affecter leur commerce encore une fois, en diminuant le minimum requis pour l'émission de permis aux restaurateurs.

Il va falloir que le ministre de la Justice ou la Régie des alcools établissent des normes assez sévères pour que ces permis ne soient pas accordés, dans les municipalités de 2,000 et plus, à tout restaurant distribuant ce qu'on peut appeler des hot dogs, des frites, etc.; je pense qu'il va falloir des normes quant à la valeur de l'établissement, quant au nombre de personnel et, disons, quant à la distinction qu'on y met pour recevoir, accueillir les voyageurs, les visiteurs, et, en même temps, quant à la façon dont on exploite l'établissement, etc.

Je pense que l'on peut aussi argumenter sur le fait que des municipalités étaient affectées par le minimum de 5,000 et que, maintenant, il descend à 2,000. Cet argument vaut à l'endroit encore de toute une série d'autres municipalités qui ont presque 2,000 de population et qui vont intervenir pour que la loi soit amendée à nouveau. Il y a constamment, régulièrement et toujours des situations difficiles, des gens qui sont frustrés, qui prétendent être atteints presque au minimum requis par loi et qui en souffrent préjudice.

On sait que dans le cas des demandes de permis d'épicerie, le minimum requis était de 2,000 âmes par municipalité, et par la suite, de notre temps à nous, la réduction a été faite à 1,000 âmes. Je suppose qu'on doit faire de nouvelles démarches pour réduire encore à un chiffre moins élevé. Alors, de 5,000 on descend à 2,000. Cela veut dire qu'il y a toute une série de permis nouveaux qui vont être émis par la Régie des alcools qui, à ce qu'on me dit, est inondée de demandes de permis. La régie n'émet pas aussi rapidement ces permis qu'elle devrait les émettre, et les requérants ont le droit de les obtenir ces permis.

C'est une difficulté administrative, mais si le gouvernement croit répondre à tous les besoins en abaissant le minimum de 5,000 à 2,000, je ne lui al pas dit qu'encore il recevra quantité de demandes. Personnellement, je ne suis pas opposé à ce que nos excellents restaurants du Québec, que ce soit d'une population de 2,000, 1,000 ou 5,000 âmes reçoivent un permis en autant que l'on établisse des normes sérieuses et que notre population en profite ainsi que les voyageurs qui fréquentent ces établissements. Ce sont là des observations, des remarques que je voulais faire, j'en ferai d'autres lorsqu'on étudiera le bill en détail.

M. PAUL: Si d'autres collègues n'ont pas l'intention de participer au débat de deuxième lecture, je pourrais faire des remarques que l'on pourrait considérer comme mon droit de réplique.

M. LE PRESIDENT: Je ferai remarquer aux honorables membres de la Chambre que l'intervention de l'honorable ministre de la Justice mettra fin au débat de deuxième lecture.

L'honorable ministre de la Justice.

M. PAUL: Je serai bref. L'honorable député de Saint-Laurent a soulevé un point qui, je crois, a besoin d'être quelque peu éclairé. Si la régie demande aux corporations municipales l'adoption d'une résolution, c'est peut-être par mesure de prudence. Il peut arriver cependant que certaines municipalités, certains officiers publics, certains maires ou conseillers aient eu des difficultés avec un requérant, et à ce moment-là, j'admets qu'il puisse se trouver parfois certains abus. De toute façon, je crois que la politique générale de la régie a pour but justement, comme le signalait l'honorable député d'Abitibi-Est, de prendre certaines informations pour que les permis ne soient pas multipliés sans aucune considération et sans appréciation à son véritable mérite du bien-fondé de la requête bien présentée.

M. PEARSON: Je veux donner justement au ministre un exemple à ce sujet sans que ce soit quelque chose de rigide. Personnellement, je considère comme un abus, par exemple, sur une île comme Montréal, qui compte 29 municipalités, la majorité des municipalités accepte que, dans les centres commerciaux, un restaurateur puisse obtenir un permis de bière, de vin ou de boissons. Dans d'autres municipalités, on le leur refuse. On passe un règlement municipal ou on passe tellement de règlements municipaux qu'il est pratiquement impossible à un individu de faire une demande à la régie sans automatiquement s'accrocher sur un règlement municipal. Le danger, à ce moment-là, c'est que l'individu est obligé de recevoir la visite d'un conseiller municipal, et une forme de chantage peut s'établir.

M. PAUL: Probablement que l'honorable député se réfère à l'article 57, là où il y a des règlements de prohibition. Cest un pouvoir qui est accordé aux municipalités. Alors, est-ce que nous devrons un jour reviser toute cette législation pour établir une seule autorité administrative en la matière?

C'est un point qui peut être considéré comme étant du domaine de la possibilité.

Pour ce qui est des remarques de l'honorable député d'Abitibi-Est, Je crois qu'en principe elles sont très bien fondées, et je partage son point de vue. Il ne faudrait pas, cependant, que tous les propriétaires de restaurant aient l'impression que nous leur donnons un blanc-seing de présenter une requête. Ils pourront toujours le faire, mais sachant avec quelle compétence les régisseurs étudient toutes les demandes qui sont présentées, je n'ai aucun doute que ce ne seront que les véritables restaurants, qui répondent aux besoins et aux normes du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, qui pourront bénéficier de ce service que l'on a l'intention de fournir au public.

D'un autre côté, il faut se rendre compte aussi qu'une certaine concurrence est peut-être de bon aloi. Ce ne sont pas tous les ouvriers qui peuvent ou osent pénétrer dans les salles à manger de nos hôtels. Ils préfèrent assez souvent un bon restaurant. Alors, il s'agira de voir à ce que la régie — je n'ai pas de compétence en la matière, mais je suis sur qu'elle agira comme elle l'a fait jusqu'ici — procède avec grande prudence pour qu'un permis ne soit donné que là où le véritable besoin ou la carence de services se fait sentir.

L'honorable député a eu raison de soulever un point particulier qui mérite d'être souligné, c'est l'investissement de nos hôteliers dans la construction d'hôtels pour répondre au public voyageur. Mais, il existe également certains hôteliers qui se fichent un peu de l'exploitation de leur salle à manger. Je ne dirai pas que c'est la majorité, au contraire, mais il arrive qu'à certains endroits cette lacune se présente. C'est dans le but de créer un certain équilibre, sans créer d'injustices flagrantes à l'endroit de ceux qui ont investi dans les hôtels, que nous croyons utile de légiférer en la matière.

M. LE PESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle adoptée? Adopté.

M. LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of this bill.

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose que je quitte maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en comité plénier pour l'étude du bill 84. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

Comité plénier

M. FRECHETTE (président du comité plénier): A l'ordre!

M. MAILLOUX: M. le Président, est-ce qu'il s'agit surtout de permis donnés par le ministère du Tourisme à des restaurants?

M. PAUL: Est-ce que l'honorable député me permettrait d'informer les membres du comité de mon intention d'apporter un amendement qui, en soi, est bien simple, mais qui peut correspondre à une véritable situation? C'est au sujet de l'article 2, aux paragraphes 22 et 23. Comme je le disais tout à l'heure, M. le Président, nous voyons, à l'article 22, une série de comtés qui sont considérés comme étant de la section de Montréal et, au paragraphe 23, nous avons une série de comtés considérés comme faisant partie de la section de Québec Cette liste que nous avons ne correspond pas à la réalité: Alors, je voudrais présenter un amendement pour que l'article 22 soit remplacé par le suivant qui donne la liste de tous les comtés situés dans la section de Montréal et que l'article 23 soit remplacé par une autre liste correspondant aux comtés qui relèvent de la section de Québec. Ce serait l'article 1 de la loi. En conséquence, il faudrait en tenir compte dans le numérotage des autres articles du projet de loi.

M. MAILLOUX: Au sujet des parcs, M. le

Président, est-ce qu'il y avait déjà des permis d'émis dans les endroits où se restaurent les visiteurs qui vont dans les parcs mentionnés à l'article 1? Est-ce qu'il y avait déjà des permis/ étant donné qu'il n'y avait pas 5,000 de population? Est-ce que cela existait déjà à l'Etape ou ailleurs, des permis de salle à manger ou de restaurant?

M. PAUL: M. le Président, on m'Informe qu'on ne pouvait exploiter de permis ailleurs que dans les endroits reconnus comme chalet central ou poste de relais de ces parcs ou chalet principal. Alors, en vertu de cet amendement, la régie pourrait être autorisée à délivrer des permis de salle à manger dans les quatre grands parcs provinciaux du Québec. Cet article prévoit qu'ils pourront être exploités dans un établissement distinct, et c'est en se référant à la loi que nous voyons ce que signifie un établissement distinct.

M. CLICHE: Je remarque qu'encore une fois on a oublié la région que je représente à l'Assemblée nationale, le parc La Vérendrye.Je demanderais au ministre de l'inclure.

M. PAUL: Certainement.

M. CLICHE: Et je l'invite à visiter le parc.

M. PAUL: Je suis déjà passé et malheureusement j'ai gardé de bien mauvais souvenirs, parce que j'avais eu trois crevaisons entre Mont-Laurier et Louvicourt.

M. CLICHE: Oui, justement.

M. PAUL: Mais, on m'a informé que la circulation était beaucoup améliorée, et je retiens l'invitation de l'honorable député.

M. CLICHE; On vous accueillera, si vous voulez l'ajouter!

M. PAUL: Alors, nous pourrions ajouter, M. le Président, après le mot « Orford », le parc La Vérendrye. Alors, faire disparaître, après Gaspésie, le mot « et » pour l'ajouter après Orford et dire: et le parc La vérendrye.

Je comprends, M. le Président, que l'article 1 deviendrait l'article 2.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): C'est cela.

M. PAUL: J'en ai discuté tout à l'heure avec l'honorable député de Charlevoix, à l'effet qu'il y aurait lieu d'amender ou d'ajouter, après le paragraphe b), le paragraphe c) pour que nous ayons une concordance ou une similitude d'amendement entre les articles 12 et 13 pour ce qui a trait aux salles à manger, où nous réduisons pour les restaurants à 5,000, pour salles à manger également à 5,000. Alors l'amendement se lirait comme ceci: en remplaçant à la sixième ligne du troisième paragraphe le mot « cinq » par le mot « deux ».

M. MAILLOUX: M. le Président, à l'article 2 dont vient de parler mon collègue d'Abitibi, j'aurais quelques remarques à faire et en mon nom et également au nom du député de Richmond. Disons d'abord que les articles 12 et 13 de l'ancienne loi dont parle l'honorable ministre de la Justice pour les permis et de restaurants et de salles à manger, la seule différence entre les articles 12 et 13 est qu'à l'article 12: permis de salles à manger, ce sont des locaux de même nature que les locaux à l'article 13, soit: permis de salle à manger doit être exploité dans un hôtel, gare, aérogare ou motel, et permis de salle à manger permet la vente de boissons alcooliques, sauf la bière en fût, tandis que le permis de restaurant, lui, permet de servir des vins et de la bière, aucune boisson alcoolique, dans les mêmes locaux à peu près.

M. le Président, à l'article 2, je suis en accord avec cet amendement-là pour la raison suivante. Je vis dans une région où les villes en province se situent entre 2,500 et 3,500 de population. Il demeure quand même que si nous espérons atteindre ce à quoi obligeait l'ancienne loi, soit 5,000 de population, pour avoir des permis de restaurants dans des endroits qui sont actuellement bien équipés et qui reçoivent les touristes de façon parfaite, je pense que ce serait utopique de penser que les permis pourraient être émis avant une période de dix ou quinze ans.

Nous avons à l'esprit certaines régions touristiques où, sur des grandes routes, la Régie des alcools ne pouvait en aucune façon émettre de tels permis, parce qu'il y avait déjà des hôtels, des auberges. La régie n'émettait ces permis aux localités de moins de 5,000 de population qu'à condition que, dans une telle localité, il n'y ait pas déjà de permis d'auberge ou d'hôtel. Alors, des endroits reconnus pour leurs spécialités étalent complètement lésés en ne servant pas boissons, bière ou vin. Souvente-fois, dans les régions rurales, c'est à 50 ou 60 milles de distance que les gens vont vers ces restaurants pour avoir une spécialité chinoise ou autre. C'est une clientèle adulte qui fréquente ces restaurants.

J'appuie, cependant, les réserves du député

d'Abitibi-Ouest, parce qu'il demeure également que, dans les villes de 2,000 et 4,000 habitants, beaucoup trop de restaurants, pour faire un commerce acceptable doivent recevoir une clientèle de mineurs. Une très forte partie des repas sont servis à des mineurs. J'espère bien que la Régie des alcools, qui fait les enquêtes sur place avec le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, agira de telle sorte que ceux qui reçoivent ces mineurs ne s'exposent pas à ce que la loi soit violée.

Est-ce que la loi n'aurait pas dû prévoir qu'en aucune façon les mineurs ne pourront avoir accès dans les endroits où sera vendue la boisson? La loi défend à des mineurs d'avoir accès dans un endroit où se vendent des bois sons, même servies au repas.

M. PAUL: Actuellement, la loi permet la présence de mineurs, c'est-à-dire, pas directement, mais des moins de 20 ans dans les salles à manger.

M. MAILLOUX: Dans les salles à manger. UNE VOIX: Avec leurs parents.

M. PAUL: Avec leurs parents. Alors, la même restriction s'appliquera ici. Le restaurateur ou le propriétaire d'une salle à manger, qui, d'une façon trop ouverte ou trop généreuse, ne se souciera pas du respect de la loi, sera exposé à des poursuites, parce qu'il ne se conformera pas aux exigences de la loi.

M. MAILLOUX: J'accepte évidemment, ce que dit le ministre, il demeure, quand même, que nous nous exposons, en émettant des permis pour les salles à manger, ou les restaurants des milieux ruraux, à des dangers extraordinaires.

Je félicite, quand même, la Régie des alcools qui, actuellement, agit avec un sens complet de l'objectivité dans l'émission des permis. J'espère qu'une plus grande prudence encore sera de mise à la Régie des alcools, parce que, depuis que l'émission des permis a été élargie dans le Québec, c'est le plus grand danger qui ait jamais existé, alors que l'on réduit de 5,000 à 2,000 le chiffre de la population. On tombe dans une catégorie de restaurateurs qui, souventefois, ont des spécialités, mais qui, à d'autres occasions, ont également une clientèle très, très jeune dont l'âge varie entre 17, 18, 19, et 20 ans. Comme la carte d'identité n'est pas obligatoire, ces propriétaires de restaurants seront souventefois pénalisés ou courront un risque avec des gens qui, réellement, n'ont pas l'âge de consommer les boissons alcooliques de la bière ou du vin, à l'occasion d'un repas.

Alors, je crois qu'il est de mise de demander à la Régie des alcools d'observer une prudence extraordinaire.

M. HAMEL: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention le député de Charlevoix, concernant l'émission de permis.

Je pense à des municipalités qui ont un village et une paroisse, et dont le village a une population de 1,700 ou 1,800 ou 1,900 personnes, qui ont une même église et dont tout le chiffre des affaires et les restaurants sont situés dans le village...

M. MAILLOUX: Ils sont couverts par la loi, si ce sont les populations religieuses des deux paroisses qui vont à la même église; s'il y a deux fois 1,000 personnes, cela fait 2,000 pour la Loi de la régie des alcools. Toutes les paroisses civiles qui vont à la même église sont couvertes par la loi. A Baie-Saint-Paul il y a trois paroisses, une de 3,000 habitants.

M. HAMEL: J'aimerais l'entendre du ministre de la Justice.

M. PAUL: Pour répondre à mon honorable ami, ce n'est pas la population communautaire, ça reste la population locale.

M. HAMEL: M. le Président...

M. MAILLOUX: Cela change quel article?

M. HAMEL: ... c'est justement le point de vue de mon intervention. Disons que, dans les villages où il y a une population de 1,760 ou 1,800 ou 1,900 personnes et où vous avez la paroisse qui, dans un tout, forme une population de 3,200 ou 3,400 âmes, à ce moment-là, selon la loi, la régie doit tenir compte de la population du village, qui est de 1,780. Il y a des cas, comme l'a dit le député de Charlevoix tantôt, il y a des milieux historiques — j'en ai i l'idée — qui ont travaillé leur affaire depuis nombre d'années. Ils ont une population de 1,500, disons, et ils ont durant l'été de nombreux touristes. Vous avez le cas de l'hôtel qui a un permis, mais qui ne se préoccupe pas beaucoup de la question des repas, de bien servir les touristes. Vous y avez un problème, parce que, selon la loi, même si vous êtes situé sur une route numérotée, si le restaurant est situé pas très loin de l'hôtel, selon la loi, vous n'avez pas le droit d'avoir un permis de salle à manger. Même si la loi donne beaucoup davan-

tages et si elle descend la limite de population de 5,000 à 2,000, encore là, ces gens-là sont pénalisés.

J'entendais tantôt l'honorable député de Charlevoix qui disait que la région était très généreuse, très ouverte. D'accord. Mais quand il s'agit de l'application de la loi, ceux qui la font, ce sont des gens de la sûreté provinciale pour qui j'ai beaucoup de respect et qui, dans certains cas, sont très jeunes. Comparons-les pour le tempérament avec chacun des 108 membres de cette honorable assemblée; ils ont chacun leur optique et, selon ce qu'ils sont, ils peuvent bien ou ne pas bien appliquer la loi. Nous avons certaines façons de faire. Je voyais, cet après-midi, ces honorables et augustes députés, membres du Barreau, qui discutaient de certaines lois. Ce sont tous des membres du Barreau, mais je voyais qu'ils avaient des opinions contraires, il y avait des ajustements à faire. Pourtant, ce sont tous des membres du Barreau, tous des avocats, ceux-là qui, en grande partie, prennent de grandes décisions sur les lois.

Alors, je pense qu'il y aurait peut-être certains amendements à apporter. Evidemment vous me direz: Avez-vous des suggestions concrètes à apporter pour que personne ne soit lésé? Je pense qu'il y aurait quelque chose à apporter pour ces populations, comme je le disais tantôt.

J'ai un exemple dans mon comté, où le village et la paroisse font ensemble 4,500 personnes de population. Si vous appliquez la loi à 2,000 personnes dans le village où sont tout le centre des affaires, les restaurants, l'hôtel, ils ne sont pas admissibles à avoir un permis de bière et de vin sans servir de repas.

La même chose se présente dans d'autres comtés.

M. PAUL: M. le Président, c'est justement là la difficulté d'apporter des amendements pratiques qu'il nous faudrait adopter.

Il arrive souvent que la population communautaire soit de beaucoup supérieure à la population locale, mais c'est introduire un principe de droit nouveau que de parler de population communautaire. Nous aurions probablement pu suggérer un amendement de façon à englober la population paroissiale. Oui.

M. LEVESQUE (Bonaventure): Le ministre me permettrait peut-être de lui signaler l'article 18 où, dans le cas d'un permis d'épicerie, on mentionne: « Pour les fins du présent article, on doit compter avec la population d'une municipalité celle d'une municipalité contigüe faisant partie de la même paroisse religieuse ». Je crois que le principe est admis dans la loi. Dans le cas des permis d'épicerie.

M. PAUL: L'honorable député voudrait-il me dire à quel paragraphe de l'article 18 il se réfère?

M. LEVESQUE (Bonaventure): Au troisième paragraphe.

M. MAILLOUX: M. le Président, j'aimerais que le ministre me dise si, dans l'esprit de la Régie des alcools, quand il s'agit de population minimum, il n'est pas toujours question de population religieuse. Non pas les municipalités civiles, mais religieuses.

M. PAUL: Comme il y a une désertion de plus en plus marquée aujourd'hui...

M. MAILLOUX: Pardon?

M. PAUL: Comme il y a une désertion de plus en plus marquée aujourd'hui...

UNE VOIX: Dans votre comté?

M. PAUL: ... de nos églises... C'est partout.

DES VOIX: Ah! Ah!

M. MAILLOUX: M. le Président, je pense que le ministre m'avait très bien compris. Je ne parlais pas de la fréquentation. Je disais que la régie ne se basait pas sur les conseils municipaux mais sur les municipalités se rattachant à la même paroisse religieuse. Je pense que le ministre avait saisi cela comme il le faut.

Il y a quand même des exemples qui nous prouvent qu'en dehors des permis d'épicerie, alors que la loi obligeait une municipalité à avoir 2,000 de population, des permis autres que d'épicerie étaient émis dans le milieu rural en se basant toujours sur la paroisse religieuse. Ce n'est pas parce que je voudrais appuyer mon collègue ministériel, mais je présume que si on a baissé le minimum de 5,000 à 2,000, tel que dit la loi actuellement, c'est déjà aller assez loin.

M. PEARSON: M. le Président, j'aurais juste une petite remarque à faire. Le député de Charlevoix, tantôt, a fait une remarque en citant l'article 12 de la Loi de la régie lequel a piqué un peu ma curiosité lorsqu'il a dit: « Le permis de salle à manger autorise à servir des boissons alcooliques, sauf la bière en fût». Est-ce que le but de cette restriction n'était pas qu'à

un certain moment cette bière en fût, il n'y avait aucun moyen de la conserver sauf dans les barils? En autant que je me souvienne, depuis une couple d'années on a réussi à trouver le moyen de conserver la bière en fût dans des bouteilles ou dans des récipients en métal comme toutes les autres bières. Cela veut dire que cette res-triction-là ne veut rien dire.

UNE VOIX: Il y a des experts de l'autre côté.

M. MAILLOUX: Au sujet de l'article 2...

M. PAUL: Si cela semble le désir unanime du comité, nous pourrions peut-être amender l'article 12.

Ce sera le même amendement pour l'article 13.

A la 5e ligne de l'article 12, on pourrait ajouter « dont la population de la paroisse ».

M. LESAGE: On ne peut pas dire « dont la population de la paroisse », en français.

M. PAUL: De la paroisse religieuse. M. LESAGE: Non, mais en français. M. PAUL: Oui.

M. LESAGE: Pensez-y. « Dont la population de la paroisse ». Pardon?

UNE VOIX: Dont la population paroissiale.

M. PAUL: C'est une nouvelle notion juridique.

M. LESAGE: Ce n'est pas une nouvelle notion juridique, c'est une nouvelle grammaire française.

M. PAUL: Nous comprenons la portée de la notion...

M. LESAGE: On ne peut pas dire « dont la population de la paroisse ou dont la population paroissiale »?

M. PAUL: Est-ce que les honorables députés accepteraient l'expression « communautaire? Dont la population communautaire est de...

M. MAILLOUX: Communautaire! Vous avez la population religieuse; ça veut dire que n'importe quelle municipalité de 500 habitants aurait un permis. Je pense qu'à partir de 5,000 jusqu'à 2,000...

M. PAUL: C'est impossible de couvrir tous les cas.

M. MAILLOUX: ... c'est déjà suffisant. M. PAUL: Bien oui.

M. MAILLOUX: Alors, pourquoi n'écrit-on pas simplement qu'il s'agit de paroisses civiles? Dans l'esprit de la régie, je pense qu'on parle toujours de paroisses religieuses.

M. PAUL: Une paroisse civile, c'est une municipalité.

M. MAILLOUX: Une municipalité, oui. Le nombre de personnes inscrites au rôle d'une municipalité.

M. THEORET: M. le Président, aux articles 12 et 13, on parle de la municipalité et tout le monde sait ce que c'est une municipalité. Je crois que pour couvrir le cas, on pourrait ajouter à la fin des articles 12 et 13, si c'est le voeu de l'Assemblée nationale, le même paragraphe que nous retrouvons à l'article 18 et qui a été signalé par le député de Bonaventure. Pour les fins du présent article, on doit compter avec la population d'une municipalité celle d'une municipalité contiguë faisant partie de la même paroisse religieuse ».

M. LESAGE: Je pense que le notaire a trouvé le...

M. PAUL: Il ne faudrait pas que l'honorable député de Rouville s'oppose.

M. HAMEL: Non, non, non. Je ne suis pas avocat et je ne suis pas notaire, mais je vois que cela a du bon sens.

M. LESAGE: Si le député de Papineau voulait relire lentement sa suggestion.

M. THEORET: C'est à l'article 18 de la loi actuelle de la Régie des alcools, la fin du paragraphe 3 qui a été cité par le député de Bonaventure.

M. LESAGE: L'alinéa 3.

M. PAUL: « Pour les fins du présent article, on doit compter avec la population d'une municipalité...

M. LESAGE: Bien oui.

M. PAUL: ... celle d'une municipalité conti-guë taisant partie de la même paroisse religieuse ». Nous avons ce principe-là.

M. LESAGE: Très bien, pour les permis d'épicerie.

M. PAUL: Pour les permis d'épicerie.

M. LESAGE: Pas en bas de 2,000, mais en bas de 5,000.

M. PAUL: Cela vous convient?

M. LESAGE: Un instant, s'il vous plaît.

M. PAUL: C'est parce que là je vous promets qu'il n'y aura plus grande restriction.

M. MAILLOUX: Je suis complètement contre le fait qu'on additionne les paroisses religieuses comme dans l'esprit de la Régie des alcools. Il ne faudrait pas que la régie émette des permis dans une localité qui a moins de 2,000 de population. Je vais vous donner un exemple. A Baie-Saint-Paul, il y a trois paroisses et une seule église. Il y en a une qui a le droit d'avoir des permis parce qu'elle a 2,000 de population, la ville même. Les deux paroisses rurales, d'après les règlements de la régie, n'ont pas ce droit. Si on met 2,000, paroisse religieuse, il y aura des permis partout. Je suis complètement contre le fait qu'on émette des permis dans une paroisse locale ou dans une municipalité qui a moins de 2,000 de population. C'est déjà considérablement réduit.

M. PAUL: Est-ce que l'honorable député convient que ce n'est pas le seul critère, la population, pour donner droit automatiquement à un permis? La régie tiendra son enquête; elle examinera le besoin et les services déjà existants. Alors, ce sont autant de facteurs dont pourront tenir compte les membres de la régie et les commissaires pour refuser ou octroyer un permis.

M. MAILLOUX: Je pense que l'argumentation que J'ai faite est dans le même esprit. J'ai cru comprendre que le ministre ne voulait pas aller encore dans une paroisse qui a moins de 2,000 de population.

M. PAUL: Le ministre est très démocrate.

M. MAILLOUX: Bien, moi, je ne veux pas aller plus loin que ça.

M. LESAGE: Je voudrais faire remarquer qu'avant de s'aventurer plus loin dans des modifications à ces articles il faudrait bien noter que l'alinéa 3 de l'article 18, dont la deuxième phrase se lit comme l'a lue tout à l'heure le député de Papineau, semble avoir été abrogé, car il n'apparaît plus dans la consolidation préparée par le ministère de la Justice ou la Régie des alcools, il faut être prudent.

M. PAUL: Je n'osais pas dire, pour ne pas être jeté dans la confusion, que j'aurais pu avoir un texte qui n'était pas à jour. Je n'osais pas dire tout à l'heure que dans mon texte ça ne figurait pas, je voulais cacher une confusion possible, mais...

M. LESAGE: C'est que le troisième alinéa de l'article dont le député de Papineau a cité une partie en se référant aux Statuts refondus de 19 64 n'apparaît plus à la consolidation préparée par la régie elle-même. C'est donc dire que depuis 1964, il y a eu un amendement au cours d'une session qui a fait disparaître le troisième alinéa tel qu'il apparaît aux statuts de 1964 ou bien il y a une erreur, comme le dit le député de Bonaventure.

M. THEORET; Je ne voudrais pas qu'ily ait méprise. Je ne me référais pas au texte de loi lui-même, c'est qu'on cherchait une formule pour ne pas dire le mot « communautaire ».

M. LESAGE: Je sais. C'est très bien.

M. THEORET: J'ai trouvé que cette formule de 1964 s'appliquait.

M. LESAGE: Cette formule ferait très bien. Je n'aurais pas d'objection, quant à mol, à la formule, mais je crois que le député de Charlevoix a des objections.

M. THEORET: C'est une question deprinci-pe.

M. LESAGE: Il y a là une question de fond et non seulement une question de forme.

M MAILLOUX: Je n'ai pas d'objections sur les termes que vous allez employer, mais voici que, de 5,000 depopulation, l'on baisse à 2,000 de population dans une localité donnée. Si tel que j'ai cru le comprendre d'un de mes collègues de l'autre côté, l'on additionne, pour les fins d'arriver à un volume de 2,000 personnes, la paroisse religieuse, à ce moment-là, on veut dire qu'on

émet des permis de restaurant dans tout le Québec, même dans des localités de 500 personnes où il n'est pas pensable que des restaurants, suivant des normes que demande le ministère du Tourisme, soient organisés. Je pense que c'est déjà une tentative assez dangereuse que l'on fait de réduire de 5,000 à 2,000, sans qu'on aille s'en prendre à de tels endroits publics. Je pense qu'on devrait d'abord tenter l'expérience de 5,000 à 2,000 avant d'élargir ça dans tout le Québec. Si mon collègue de Richmond était ici, je pense qu'il ferait une colère noire.

M. HAMEL: J'entendais tantôt le député de Charlevoix dire que la régie était très généreuse, était très ouverte...

M. MAILLOUX: J'ai dit qu'elle était très objective, je n'ai pas dit généreuse jamais.

M. HAMEL: ...donc, faisons confiance à la régie. Si vous allez de 5,000 à 2,000, et je vous expliquais que vous aviez des situations, comme dans mon comté ou dans d'autres comtés, où vous arrivez à 2,000. Vous avez une population de 1960, vous avez une seule communauté de paroisse et de village et les seules affaires se font au magasin général ou à l'hôtel ou au village. A ce moment-là, vous privez ces gens d'avoir un restaurant qui est susceptible de recevoir la visite du tourisme, chasseurs et pêcheurs, il faut avoir un permis de salle à manger et tout ce qui s'ensuit pour acceptation. Donc, à ce moment-là, donnez-leur le permis de vente de bière et vin. N'allez pas dans une façon restrictive. Si quelque chose ne marche pas, la loi sera amendée. C 'est aussi simple que ça. Il y a eu un certain temps où on disait que les permis étaient donnés à des gens par favoritisme. Donc, allez-y ouvertement. Ce n'est pas ce que vous proposez qui va enrayer l'alcoolisme au Québec.

M. PAUL: Je comprends parfaitement le point de vue de l'honorable député de Rouvllle.

Connaissant les sentiments que j'ai pour lui, il réalisera facilement qu'à ce moment-ci je suis quelque peu gêné de ne pas partager son opinion. Voici que nous partons de 5,000 et que nous descendons à 2,000. Il semble y avoir un consensus général des deux côtés. Je comprends qu'il existera encore des situations anormales qui peuvent choquer au point de vue de la concurrence dans les petits centres, mais si tous voulaient accepter ce premier pas que nous faisons, quitte à ce que nous puissions envisager une formule qui pourrait répondre à un besoin pour corriger ces situations qui peuvent se présenter.

Ce n'est pas sans consultation que nous avons présenté ce projet de loi. A prime abord, nous avions l'intention de réduire la population à 3,000, et par la suite on nous a conseillés, justement pour couvrir un certain nombre de cas qui se trouvent sur la clôture, surtout dans les grands centres touristiques, de baisser cette population jusqu'à 2,000. Dans tous les comtés des collègues de l'Assemblée nationale, nous nous trouverons en face de propriétaires de restaurant qui auraient préféré que la population soit baissée davantage ou que les conditions deviennent plus faciles. Il ne faut pas oublier cependant, comme je le disais tout à l'heure, que ce n'est pas porte ouverte, « open bar », pour tous les restaurateurs qui devront se conformer à certaines exigences bien légitimes de la régie.

Alors, je regrette, mais après avoir soumis ce projet de loi à l'acceptation de l'honorable premier ministre, je me sens très moralement lié pour aller au-delà des concessions qu'on nous avait recommandé de faire. C'est regrettable, mais dans les circonstances Je crois que c'est une législation qui va déja assez de l'avant, quitte à ce que nous puissions, peut-être à l'occasion de la prochaine session, reconsidérer tout le problème et afin de ne pas non plus créer un déséquilibre ou les occasions pour que partout dans la province le moindre petit restaurant puisse y trouver l'occasion de requérir ou de demander l'émission d'un permis sous prétexte que la population, alliée à celle de la municipalité contiguë, puisse satisfaire au minimum que nous exigeons avec les amendements, soit 2,000 de population.

M. MAILLOUX: M. le Président, une dernière observation, je pense que le ministre disait tantôt...

M. PAUL: Le comité de législation a étudié cette mesure-là.

M. MAILLOUX: Je disais que le ministre de la Justice disait tantôt que le gouvernement avait pensé au tout début de réduire de 5,000 à 3,000 plutôt que de 5,000 à 2,000. C'est un très large pas qui est actuellement fait et ceci va favoriser des centaines et des centaines de villes de 2,000 à 5,000 habitants qui, actuellement, étaient réellement spoliées dans maints endroits du Québec. Mais, je pense que la Régie des alcools devra regarder ce que donnera une telle loi, quel danger ça apportera, avant de se rendre plus loin. Quant à moi et quant à l'Opposition, nous pensons que le pas qui est actuellement franchi apportera déjà suffisamment de

soucis et à la régie et à ses officiers pour que la surveillance soit faite avec la plus grande attention possible.

M. THEORET: M. le Président, si vous me permettez, pendant que nous parlons des articles 12 et 13, seulement une remarque à l'intention du ministre de la Justice pour qu'elle soit soumise aux légistes pour future modification à la loi. A la fin de ces articles, on dit que des permis peuvent être accordés dans des établissements distincts où il n'existe pas d'hôtel ou d'auberge, et voici le membre de phrase qui attire mon attention « le long d'une route provinciale ou d'une route régionale ». Nous avons la même phrase dans l'article 13. J'ai un cas particulier, que je nommerai tout de suite, il s'agit du mont Sainte-Marie dans le comté de Gatineau. La régie s'est prévalue de ces deux articles pour refuser un permis, parce qu'il ne s'agissait pas d'une route provinciale ou régionale.

Il est très difficile de bâtir ou enfin d'exploiter des centres de ski dans le milieu des villes, il faut les exploiter là où ils se trouvent, sur les montagnes. Alors, il y a là un investissement de quelque $2 millions, et à cause de cette restriction on a voulu définir ce qu'était une route provinciale ou régionale. Je suis allé moi-même au ministère de la Voirie et j'ai essayé d'obtenir une définition de la route régionale ou obtenir une lettre du ministre à l'effet que le mont Sainte-Marie se trouvait sur une route régionale; alors je crois qu'il y a ambiguïté dans l'Interprétation de ces deux articles. J'attire l'attention du ministre sur ce fait pour que, lors de l'étude d'amendements futurs, on puisse corriger cette anomalie.

M. CLICHE: Est-ce que le permis a été accordé à l'endroit dont vous parlez?

UNE VOIX: Non.

M. THEORET: Voici, on l'a accordé, M. le Président, on a obligé de construire un motel de dix chambres. On ne pouvait pas le donner dans un endroit distinct, alors on a fait construire là un motel de dix chambres qui a coûté $50,000 et qui ne sert à personne parce qu'on ne va pas là pour passer les fins de semaine, on va dans cette région pour faire du ski. C'est malheureux de faire faire des dépenses à cause d'un texte de loi sur lequel on s'assoit pour rendre des décisions.

M. CLICHE: Le député devrait suggérer dès maintenant un amendement.

M. THEORET: Peut-être qu'on élargirait trop les portes, et je crains le député de Charlevoix dans les circonstances.

M. LOUBIER: Il parlait du ministre du Tourisme.

M. MAILLOUX: M. le Président, je n'ai pas compris l'allusion du député...

M. LOUBIER: Il faudrait régler cela de l'autre côté, la juridiction.

M. CLICHE: Cela comprend les municipalités de Bellechasse.

M. THEORET: M. le Président, c'est que je n'ai pas...

M. LESAGE: Depuis qu'il est allé à Paris.

M. LOUBIER: M. le Président, depuis quatre ans, ils vivent une période ennuyante.

M. CLICHE: Dans Bellechasse? M. LOUBIER: Oui.

M. LESAGE: Cela va bien à Paris? On ne s'est pas revus depuis le retour du ministre de Paris. Comment cela a été?

M. LOUBIER: Disons qu'on a fait de l'humour noir, là-bas.

M. LESAGE: Pas avec le député de Lévis, il m'a dit que vous l'aviez évité.

M. LOUBIER: Non.

M. LESAGE: Vous aviez peur qu'il vous surveille de trop près.

M. LOUBIER: Je l'avais invité. Mais disons qu'avec le phénomène de la francophonie moderne je me suis senti en pleine veine d'humour noir, là-bas.

M. LESAGE : Ah bon, il faudra me raconter cela.

M. LOUBIER: Avec le Gabon, etc. M. PINARD: Vous êtes dépressif. M. PAUL: Le comité, M. le Président. M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Oui.

M. THEORET: M. le Président, à la demande du député d'Abitibi-Est, je me demande ce que la suggestion peut valoir, de toute façon, on l'a peut-être discutée, on dit: Le long d'une route provinciale au lieu de dire ou d'une route régionale on pourrait mettre une virgule, d'une route régionale ou d'un centre de villégiature, si le texte peut convenir à l'Assemblée nationale.

M. MAILLOUX: Si on marque « centre de villégiature », cela va élargir terriblement.

M. THEORET: C'est Justement ce que je craignais, c'est le député de Charlevoix.

M. MAILLOUX: « Centre de villégiature », cela va nous amener dans des endroits où le ministre du Tourisme voit qu'il y a trois cent personnes, cela ouvre une porte terrible.

M. THEORET: Disons que, pour tout de suite, cela va aider, mais il ne faudrait pas qu'il se représente de nouveau.

M. LOUBIER: Cela dépend à quelle heure du jour vous me prenez.

M. PAUL: Alors, je crois, M. le Président, que nous devrions, pour le moment, retenir la suggestion de l'honorable député...

M. MAILLOUX: Pas pour les deux endroits qu'il a mentionnés.

M. PAUL: Non, non, retenir sa suggestion, je n'ai pas dit: accepter.

M. MAILLOUX: Pour plus tard, d'accord.

M. PAUL: On peut voir, M, le Président, que c'est un domaine excessivement complexe quand nous voulons couvrir toutes les possibilités et tous les endroits qui, en certaines...

M. MAILLOUX: Nous allons attendre le député de Richmond.

M. PAUL: ... circonstances devraient être gratifiés d'un permis, spécialement dans les centres touristiques.

M. MAILLOUX: Accepté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 3 accepté.

M. TETLEY: M. le Président, est-ce que le ministre me permet une suggestion? Dans plusieurs comtés, y compris Notre-Dame-de-Grâce, il y a des rues et des boulevards où les citoyens ne veulent pas de permis.

Aujourd'hui, on parle d'un permis dans un certain édifice dans le comté de Notre-Dame-de-Grâce, et, chaque jour, je lis les journaux, afin de vérifier s'il y a un avis à l'effet que le propriétaire d'un certain restaurant a fait une demande. Est-ce possible, M. le ministre, que, dans l'avenir, ou peut-être par un amendement dans l'avenir, tout député reçoive avis d'une demande de permis dans son comté? Apparemment c'était autrefois la coutume, mais depuis quelque temps, peut-être depuis quelques années, les députés ne reçoivent plus d'avis. Pour moi, ce serait un grand avantage d'avoir avis d'un permis, pas parce que je suis...

M. MAILLOUX: On n'a jamais reçu d'avis.

M, TETLEY: Apparemment, il y a dix ans ou autrefois...

M. MAILLOUX: Non, non, non!

M. TETLEY: ... avant la régie, on envoyait des avis.

M. PAUL: Je regrette de me dissocier complètement de cette idée mise de l'avant par l'honorable député, parce qu'à ce moment-là, nous inviterions les députés à s'intéresser d'une façon ou de l'autre à l'application de la Loi de la Régie des alcools...

M. MAILLOUX: On m'a assez invité!

M. PAUL: Je comprends que l'honorable député l'a fait, dégagé de cette interprétation, ce n'est pas du tout ce qu'il veut couvrir, mais ce serait créer des occasions où on pourrait par la suite, reprocher aux députés d'être intervenus alors que, souvent, ils n'auraient absolument rien fait. Et s'il fallait que le député soit avisé d'une façon automatique de chaque demande de permis dans son comté, nous créerions l'impression que les permis ne sont émis que sous l'influence ou sous la recommandation du député. Je crois que cette suggestion faite par l'honorable député, quant à moi, ne peut pas être reçue ou considérée comme étant une mesure progressive, et je regrette de m'en dissocier.

M. TETLEY: J'accepte votre raisonnement, M. le ministre, et je retire ma suggestion. Peut-être que je dois écrire directement...

M. CLICHE: L'article 3, vous donnera ce droit-là, il vous donnera le droit d'obtenir les renseignements que vous voulez avoir.

M. TETLEY: Oui, mais aussitôt que je suis au courant d'une demande. Peut-être... C'est ça, je voudrais faire des objections, mais le gros problème, c'est qu'on ne sait pas s'il y a une demande. Peut-être que je peux envoyer un avis à la régie, et c'est ce que je vais faire, parce qu'il y a eu quelques bagarres solides dans mon comté, lorsqu'il y avait des demandes que tout le monde, pas toute la population, mais la majorité voulait être contre.

Je vais donc m'occuper d'une telle formule de procédure.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors article 3, adopté. Article 4.

M. MAILLOUX: M. le Président, au nouvel article 4.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Ce n'est pas un nouvel article, c'est le même, il n'a pas changé de numéro.

M. PAUL: L'article 1, M. le Président, c'est la liste que je vous ai donnée des nouvelles municipalités. L'article 1 est devenu 2, l'article 2 est devenu 3.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): L'article 3 devient 4.

M. PAUL: L'article 3 devient 4.

M. MAILLOUX: Disons que nous sommes d'accord avec...

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): N'est pas devenu c) de...

M. PAUL: Non, non.

M. MAILLOUX: Nous sommes d'accord avec le nouvel article 4.

M. PAUL: M. le Président, c) s'ajoutait après le chapitre 201. Nous avions a)b)en ajoutant à la fin à l'alinéa suivant, et c) en remplaçant, dans la sixième ligne du troisième paragraphe, le mot cinq par le mot deux. C'était un sous-paragraphe que nous ajoutions à deux.

L'article 3, c'est là où l'on parle de l'article 13. L'article 4, c'est l'article où l'on traite du problème de la possibilité pour le public d'accéder aux dossiers.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): D'accord.

M. MAILLOUX: Disons que c'est une amélioration à la loi, malgré que, quand je regarde l'ancienne loi, à l'article 46 chapitre 44, je ne voyais rien dans cet article 46 qui défendait à la régie de faire connaître les objections qu'il y avait à une demande de permis, mais, à toutes fins, on établit désormais clairement que toute personne, même celle qui fait la demande de permis, aura le droit de connaître les objections, moyennant paiement. Je pense que c'est une amélioration.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté? M. MAILLOUX: Oui.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Alors, article 4, devenu 5, adopté?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 5, devenu 6, adopté?

M. MAILLOUX: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Article 6, devenu 7?

M. MAILLOUX: Adopté.

M. LE PRESIDENT (M. Fréchette): Adopté. Article 7, devenu 8?

M. MAILLOUX: Qu'est-ce que ça change, le mot administrateur, à la place du directeur général? Est-ce simplement un changement d'appellation du titre?

M. PAUL: Oui, c'est plutôt un article de concordance, M. le Président. C'est un changement d'appellation.

M. CLICHE: Avant que l'étude en comité ne se termine, peut-on savoir si l'amendement qui avait été apporté, réduisant de 2,000 à 1,000 la population nécessaire pour l'émission d'un permis d'épicerie est encore incorporé à la loi ou si cet amendement-là est disparu, à un moment donné, en cours de route?

M, PAUL: Pour ce qui est de la population?

M. CLICHE: Les permis d'épicerie.

M. PAUL: Je crois, M. le Président, que

nous avions, par un texte spécifique, fait disparaître le troisième paragraphe de la loi, à l'article 18, pour le remplacer par 1,000 de population.

M. CLICHE: Oui, 1,000.

M. MAILLOUX: Mais, à tout événement le 1,000 est disparu, parce que la régie, dans toute la province de Québec, a émis des permis, peu importe le chiffre de la population, 400, 500, 600. Si c'était logique, la Régie a émis les permis.

M. PAUL: Oui, c'est vrai. M. CLICHE: Je crois que...

M. PAUL: Je crois que le minimum a été amendé aussi pour ce point particulier.

M. MAILLOUX; Il n'y a pas de limitation.

M. FRECHETTE (président du comité plé-nier): M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que votre comité a adopté le bill 84 avec les amendements qu'il vous prie d'agréer.

M. LEBEL (président): L'honorable ministre de la Justice propose que les amendements soient maintenant lus et agréés. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. PAUL: Troisième lecture. Troisième lecture

M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice, du consentement unanime de la Chambre, propose la troisième lecture du bill 84. Cette motion sera-t-elle adoptée?

Adopté.

M. PAUL: M. le Président, demain, la Chambre se réunira à dix heures pour, probablement, ajourner vers dix heures trente jusqu'à jeudi matin à dix heures afin de permettre l'étude, devant la commission des Affaires municipales, du projet de loi no 75. Je crois que c'est conforme à l'entente intervenue dans le cours de l'après-midi avec l'honorable chef de l'Opposition au sujet du sous-amendement proposé par l'honorable ministre des Affaires municipales.

S'il y a lieu, jeudi matin nous verrons dans quelle voie nous nous engagerons dans l'étude de nos travaux. Demain, il est convenu que la Chambre ajournera sestravaux après la période des questions jusqu'au lendemain matin, dix heures, pour permettre aux députés d'assister au travail de la commission, en bas.

M. LESAGE: M. le Président, je voudrais souligner que j'ai constaté tout à l'heure que les modifications, que le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche et le ministre des Terres et Forêts veulent apporter au bill de la conservation de la faune, sont prêtes. Je crois que le ministre des Terres et Forêts n'en a qu'un exemplaire en main, alors je lui ai demandé de bien vouloir en distribuer des exemplaires demain matin.

La raison est que, jeudi matin, si, par hasard, nous n'avions pas terminé l'étude du projet de loi de la Communauté urbaine de Montréal à la commission des Affaires municipales, quant à nous, nous n'aurions pas d'objection à procéder en Chambre et en comité plénier à l'étude du projet de loi de la conservation de la faune.

M. PAUL: Demain ou...?

M. LESAGE: Jeudi.

M. PAUL: Jeudi, oui très bien.

M. LESAGE: Nous ne voulons pas presser les choses outre mesure. Nous voulons donner à l'étude des projets de loi toute l'attention que nous devons leur donner.

Mais, d'un autre côté, je ne dirais pas la vérité si je me cachais de notre désir de vouloir terminer les travaux de la session pour le 19 décembre.

M. GOSSELIN: M. le Président, dès demain matin, à 9 heures, je ferai parvenir à l'honorable chef de l'Opposition, ainsi qu'au député de Fabre, les copies...

M. LESAGE: Vous pourrez les déposer ici, en Chambre, à dix heures, à l'ouverture.

M. PAUL: Alors, M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à demain matin dix heures.

M. LE PRESIDENT: La Chambre s'ajourne à demain matin, dix heures.

(Fin de la séance: 22 h 56)

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