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Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le mardi 16 décembre 1975 - Vol. 16 N° 79

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quinze heures six minutes)

Lettre du Parti national populaire

M. Lavoie (président): A l'ordre, messieurs!

Permettez-moi de vous donner lecture d'une communication que j'ai reçue hier. "Monsieur le Président, suite à notre entrevue de ce jour, nous, Jérôme Choquette, député d'Outremont, et Fabien Roy, député de Beauce-Sud, vous informons que nous entendons siéger, dorénavant, à l'Assemblée nationale comme membres du Parti national populaire. Nous exercerons, respectivement, les fonctions de chef du Parti national populaire et le leader parlementaire du parti. En conséquence, nous vous demandons d'en informer la Chambre et de prendre les dispositions appropriées qui découlent de notre statut. Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs. Signé: Jérôme Choquette, Fabien Roy". En date du lundi 15 décembre 1975.

Affaires courantes.

M. Burns: Me permettez-vous de vous demander une directive? Est-ce que vous avez une décision à prendre à la suite de la lettre que vous venez de nous lire?

Le Président: Je prends acte de la lettre et, tel qu'on me l'a demandé, j'en donne lecture à l'Assemblée. Je crois qu'en vertu des règlements ou de la Loi de la Législature je n'ai pas de commentaires ou d'interprétation à faire, ni de la loi ni, en l'occurrence, des règlements.

M. Choquette: Mais, je pense, M. le Président, que nous avons quand même le droit de nous faire reconnaître comme des membres du Parti national populaire et c'est l'objectif de la lettre que je vous ai remise.

Le Président: C'est ce que j'ai fait, d'ailleurs.

M. Choquette: Je vous remercie, M. le Président, de l'avoir fait avec votre délicatesse et votre savoir-faire habituels.

Le Président: Merci.

M. Levesque: Nous n'avons pas lu le message; est-ce que ces titres de chef et de leader parlementaire étaient entre guillemets?

Le Président: J'ai lu la lettre au texte.

Affaires courantes.

Dépôt de rapports de commissions élues.

L'honorable député de Nicolet-Yamaska.

Rapport sur les projets de loi nos 251 et 259

M. Faucher: Qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente des transports, des travaux publics et de l'approvisionnement qui a étudié les projets de loi 251 et 259, article par article, qu'elle a adoptés avec des amendements.

Le Président: Rapport déposé. L'honorable député de Bellechasse.

Rapport sur le projet de loi no 64

M. Mercier: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente des finances, des comptes publics et du revenu qui a étudié le projet de loi no 64, Loi concernant les mesures anti-inflationnistes, article par article, qu'elle a adopté avec des amendements.

Le Président: Rapport déposé.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de motions non annoncées.

L'honorable député de Maisonneuve.

Changement de membre de commission

M. Burns: Je fais motion pour qu'à la commission parlementaire de l'assemblée nationale, le nom de M. Lessard soit remplacé par le nom de M. Marc-André Bédard, député de Chicoutimi.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Levesque: M. le Président, on va avoir quelque chose à faire pour lui.

M. Burns: M. le Président, à moins qu'on ait une autre occasion d'en parler.

M. Levesque: Oui, immédiatement.

M. Burns: M. le Président, je retire ma motion.

Le Président: Vous retirez votre motion ou la demande du vote?

M. Burns: La demande de vote, mais je ne retire pas ma motion.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée? M. Levesque: Adopté.

Le Président:

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. Levesque: Afin de permettre à l'honorable député de Maisonneuve de demander le vote, M. le Président, je vais demander en même temps le consentement pour que le projet de loi au nom du ministre des Affaires municipales, apparaissant en appendice, puisse être déposé immédiatement.

M. Burns: M. le Président, j'ai un petit problème, c'est qu'à ce moment-là je devrai revenir aux motions non annoncées, pour garder M. Lessard aussi.

M. Levesque: Ce n'est pas grave.

M. Burns: Non, non.

M. Léger: Le sort en est jeté, vous l'avez.

Le Président: A l'ordre, messieurs!

Projet de loi no 260 Première lecture

Le Président: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la première lecture de la Loi modifiant la charte de la ville de Québec.

L'honorable ministre des Affaires municipales.

M. Goldbloom: M. le Président, ce projet de loi qui n'a que deux articles précise les pouvoirs de la Commission de l'exposition.

Le Président: Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. Burns: Vote enregistré, M. le Président. Le Président: Qu'on appelle les députés!

Vote de première lecture

Le Président: A l'ordre, messieurs! Vote.

Que ceux qui sont en faveur de la motion de première lecture proposée par le ministre des Affaires municipales veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: MM. Bourassa, Levesque, Blank, Parent (Hull), Mailloux, Garneau, Cloutier, Phaneuf, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM. Lalonde, Tetley, Lacroix, Bienvenue, Forget, Toupin, L'Allier, Vaillancourt, Arsenault, Houde (Fabre), Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Massé, Perreault, Brown, Fortier, Kennedy, Bacon, Lamontagne, Bédard (Montmorency), Veilleux, Brisson, Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote, Fraser, Picard, Gratton, Gallienne, Assad, Carpentier, Dionne, Faucher, Saint-Germain, Harvey (Charlesbourg), Larivière, Pelletier, Shanks, Springate, Pepin, Bellemare (Rosemont), Bérard, Bonnier, Boudreault, Boutin, Chagnon, Marchand, Ostiguy, Garon, Côté, Denis, Déom, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Vallières, Verreault, Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard, Bédard (Chicoutimi), Samson, Bellemare (Johnson), Choquette, Roy.

Le Secrétaire: Pour: 93 — Contre: 0

Le Président: Cette motion est adoptée.

Est-ce que ce projet de loi doit être déféré à une commission après la première lecture? Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Déclarations ministérielles. Dépôt de documents.

L'honorable ministre d'Etat à l'Education.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Rapports annuels de corporations professionnelles

M. Lachapelle: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1974/75 de l'Ordre des denturolo-gistes du Québec, ainsi que le rapport annuel 1974/75 de la Corporation professionnelle des travailleurs sociaux du Québec.

Le Président: Questions orales des députés. L'honorable député de Chicoutimi.

QUESTIONS DES DÉPUTÉS

SAQ et CECO

M. Bédard (Chicoutimi): Ma question s'adresse au Solliciteur général. Je voudrais poser au Solliciteur général une question sur un autre aspect du rapport de la CECO au sujet de la Société des alcools. La semaine dernière, le ministre nous a dit qu'à la suite de nombreuses séances à huis clos, où plusieurs dizaines de personnes avaient été interrogées, la CECO avait remis un rapport qui, normalement, aurait pu conduire à des poursuites immédiates devant les tribunaux, mais qu'à la suite de recommandations de la part de Me François Tremblay il avait décidé de ne pas prendre ces poursuites afin de pouvoir poursuivre l'enquête sur d'autres éléments de la preuve qui étaient moins avancés.

Dans les circonstances, je voudrais simplement aborder un autre aspect de cette enquête, qui ne concerne pas directement l'enquête policière sur des offenses criminelles possibles, mais qui relève plutôt de la gestion administrative de la SAQ. J'aimerais savoir du Solliciteur général s'il est exact que l'enquête de la CECO a mis en lumière l'existence de transactions impliquant l'addition d'un intermédiaire, à savoir une compagnie, dans les achats effectués par la SAQ auprès d'un important fournisseur habituel, ce qui a permis à cet intermédiaire de réaliser des profits substantiels.

M. Lalonde: La question est assez vague. Je ne sais pas si le député a des informations précises.

Il pourrait peut-être me les apporter.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est à vous de répondre pour le moment.

M. Lalonde: II y a un tas d'informations qui sont contenues dans ce rapport qui ont été suivies par des compléments d'enquête, qui sont encore actuellement en train d'être faits. Ce que j'aimerais...

M. Burns: Bien, répondez, cela fait une semaine...

Le Président: A l'ordre! A l'ordre! Le ministre a la parole actuellement.

M. Tetley: C'est incompréhensible, votre question.

M. Lalonde: II y a un certain nombre de faits, comme je le disais, qui ont été mis en lumière dans ce rapport. La raison pour laquelle il ne peut pas être publié à ce stade-ci, c'est que des compléments d'enquête sont faits actuellement. Alors si, bribes par bribes, en répondant à des questions ici en Chambre, on se trouvait à en faire état, je pense que ce serait de nature à nuire à l'enquête. Je ne sais pas exactement, le député n'ayant pas donné de nom, à quel chapitre il se réfère, mais si par hasard cette question était reliée à une enquête, je ne pense pas que ce serait favorable à la bonne conduite de l'enquête d'en parler publiquement.

M. Bédard (Chicoutimi): ... du ministre on peut avoir une opinion différente, M. le Président, mais le ministre a dit qu'on semblait révéler bribes par bribes...

M. Levesque: Question.

M. Bédard (Chicoutimi): ... certains éléments de cette enquête. Ce que je veux savoir, c'est si ceci représente des bribes ou des éléments qui ont été mis en lumière par l'enquête sur la SAQ. Si le ministre désire que je répète ma question, j'aimerais savoir s'il est exact que l'enquête de la CECO a mis en lumière l'existence de transactions impliquant l'addition d'un intermédiaire, à savoir une compagnie, dans les achats effectués par la SAQ auprès d'un important fournisseur habituel, ce qui a permis à cet intermédiaire de réaliser des profits substantiels.

M. Lalonde: M. le Président, tout ce qui, non seulement dans le le rapport, le document de travail, mais dans les transcriptions des témoignages à huis clos, contenait des éléments de commission d'un crime et qui a été recommandé par notre conseiller juridique a fait l'objet d'un complément d'enquête. Alors, il n'est pas question d'en oublier. Tout ce qui, dans ces documents révélait des éléments de preuve a fait l'objet de complément d'enquête.

M. Bédard (Chicoutimi): Question additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre peut également vérifier, parce que sa réponse est bien vague, si les témoignages sous serment entendus par la CECO dans ce contexte d'intermédiaires, dont je viens de parler, impliquent une compagnie du nom de "Les Importations Polarin Limitée", compagnie qui a été formée quelques mois après les élections de 1970 et dont le principal actionnaire, selon nos informations, est M. Jean-Noël Richard. Ce dernier était alors secrétaire général de la Fédération libérale du Québec et il est maintenant au cabinet du ministre des Finances, à titre d'adjoint spécial chargé des relations avec le COJO.

M. Lessard: C'est clair cela.

M. Lalonde: M. le Président, ce rapport contient des dizaines et des dizaines de noms de compagnies, de distilleries, d'intermédiaires, d'importateurs, de commerçants, de détenteurs de permis. Le fait de mentionner un seul nom ici à l'Assemblée ne serait pas de nature, je crois, à éclairer qui que ce soit. Je pense que ce qu'il est important de savoir c'est que ce rapport, après avoir été remis au ministère de la Justice, a été confié immédiatement, tout d'abord, à des conseillers juridiques, de façon à en définir les coordonnées légales. Ensuite, immédiatement après il a été entièrement confié à une équipe spéciale de la Sûreté du Québec pour que les compléments d'enquête soient faits le plus tôt possible. J'aurais aimé qu'ils aient été complétés plus tôt. C'est toujours désirable. Mais dans ce cas-ci, j'ai encore eu hier une réunion avec les représentants de la Sûreté, les compléments d'enquête ne sont pas terminés; ils le seront, espérons-le en janvier. Mais aussitôt que les rapports nous seront soumis et que nos conseillers juridiques auront pu nous recommander des poursuites, le cas échéant, elles seront prises.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président... Le Président: Dernière question.

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne veux pas embarrasser le Solliciteur général avec plusieurs noms de compagnies, d'importateurs, de grossistes, etc., je pense que ma question est précise. Elle porte sur une compagnie en particulier. S'il n'est pas capable de me répondre, maintenant, est-ce que je pourrais m'attendre que le ministre me réponde demain, après avoir vérifié auprès des enquêteurs ou encore après avoir pris la peine de lire les notes des témoignages rendus à l'enquête à huis clos par la CECO?

M. Lalonde: M. le Président, la question n'est pas de savoir si je suis en mesure ou non de me souvenir d'un nom ou d'un autre. La question est de faire appel au sens des responsabilités du député.

Si tout à coup, il me demande si le nom d'une distillerie quelconque — il y en a quelques-unes au Québec — est mentionné dans le rapport et que je

me lève et, officiellement, formellement, je dise oui, quel préjudice je peux causer, tout d'abord, à cette compagnie sans savoir dans quel contexte son nom a été mentionné? Quel préjudice je pourrais causer aussi aux enquêtes qui sont conduites actuellement dans des faits où le nom de cette compagnie serait mentionné? C'est simplement pour prendre mes responsabilités et me conduire en gestionnaire, je crois, responsable que je ne peux pas répondre à cette question.

M. Burns: Une question additionnelle, M. le Président.

Le Président: L'honorable député de Maisonneuve.

M. Burns: A la suite des questions qui sont posées par le député de Chicoutimi et particulièrement à la suite de celles qui ont été posées la semaine dernière, est-ce que le Solliciteur général est en mesure, après avoir pris avis de ces questions, de nous dire exactement combien de policiers, et en particulier leurs noms, ont été chargés de la suite de l'enquête? Même s'il y a touché partiellement la semaine dernière, est-ce que maintenant le Solliciteur général est en mesure, après avoir pris avis de cette question du député de Chicoutimi, de déposer la lettre de démission de Me Keyserlingk? Finalement, est-ce qu'il est en mesure de nous faire un rapport concernant les plaintes qui ont été formulées à l'endroit de certaines personnes identifiées qui relèvent nécessairement de l'enquête à huis clos?

M. Lalonde: Je crois avoir répondu en partie la semaine dernière. Quant au nombre, à moins que ce soit à propos d'une autre enquête, je crois avoir dit environ sept personnes à temps plein dirigées, et l'incluant, par le lieutenant Chartrand de la Sûreté du Québec.

Quant à la lettre de démission, j'ai demandé, comme je l'ai rapporté aussi, au juge Jean Dutil, le président de la CECO, de me faire rapport là-dessus. Je n'ai pas reçu le rapport encore. C'est un peu compréhensible. Je crois que la CECO, actuellement, est extrêmement occupée à l'audition de témoins et termine cette semaine la dernière série d'audiences publiques.

Relativement à la troisième partie de la question, à savoir s'il y avait des recommandations précises, ce que j'ai répondu — c'est d'ailleurs à ce propos que je veux corriger un peu la question de forme affirmative du député de Chicoutimi — c'est que des parties du dossier étaient plus avancées que d'autres, ce qui est normal; donc des compléments d'enquêtes sont plus longs dans certains cas que dans d'autres.

Maintenant, je ne pense pas que, dans les communications qui ont été faites au ministère de la Justice par la CECO à ce moment-là, il y ait de recommandation précise de poursuivre un tel pour tel crime ou tel autre crime.

Dans l'ensemble, la recommandation qui émane de tout ce rapport et des communications, c'est de poursuivre des enquêtes, de donner suite aux informations qui nous étaient livrées par la CECO.

M. Lacroix: Question supplémentaire, M. le Président.

M. Burns: Additionnelle, M. le Président.

Le Président: L'honorable député des Iles-de-la-Madeleine.

M. Lacroix: M. le Président, le député de Chicoutimi, tantôt, s'est référé à une déposition d'un témoin faite à huis clos.

M. Burns: J'invoque le règlement, M. le Président.

M. Lacroix: Est-ce que le ministre pourrait nous dire...

M. Burns: J'invoque le règlement, M. le Président.

M. Lacroix: ... de quelle façon le député de Chicoutimi peut se référer à une déposition faite à huis clos?

Le Président: Une question de règlement.

M. Burns: J'invoque le règlement, M. le Président. Je ne me cache pas derrière cet aspect formel, M. le Président, mais d'une part, notre règlement est très clair dans son esprit et dans sa lettre en stipulant que c'est au ministre ou à leurs adjoints qu'on pose des questions. Mais là, il est en train de poser une question...

Le Président: II l'a corrigée. Cela a été corrigé.

M. Burns: II l'a corrigée, d'accord.

M. Lacroix: M. le Président, je voudrais revenir.

Le Président: Oui.

M. Lacroix: Je m'adresse à l'honorable Solliciteur général de la province. Si j'ai bien entendu, tantôt, le député de Chicoutimi, il a référé à des réponses qui auraient été données par un témoin lors d'une audition à huis clos. De quelle façon, M. le Solliciteur général, le député de Chicoutimi a-t-il pu obtenir des informations à cet effet-là? A ce moment-là, pourquoi le huis clos?

M. Bédard (Chicoutimi): En vertu de l'article 96...

M. Lalonde: M. le Président, je n'ai aucune connaissance que des parties du rapport ou des dépositions à huis clos aient été communiquées officiellement à quiconque n'a pas l'obligation, de

par ses fonctions, soit au ministère de la Justice, soit à la Sûreté du Québec, d'en prendre connaissance.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, en vertu de l'article 96, c'est simplement pour corriger; peut-être que ce n'est pas de mauvaise foi que le député des Iles-de-la-Madeleine m'a mal interprété. Je n'ai pas fait référence à un témoin; j'ai fait référence aux témoignages, d'une façon globale, rendus lors de l'enquête à huis clos tenue par la CECO.

Le Président: A l'ordre, messieurs!

M. Bédard (Chicoutimi): Je n'ai pas référé à un témoin en particulier.

M. Lacroix: C'est encore plus grave.

Le Président: Je crois que nous sommes à la sixième question supplémentaire. Ce sera la dernière.

M. Burns: M. le Président, c'est ma deuxième.

Le Président: II y en a eu quatre déjà. M. Burns: Je n'ai pas abusé.

Le Président: C'est la dernière sur cette question. Nous passerons à une question principale après cette dernière question additionnelle.

M. Burns: Simplement et très brièvement, M. le Président, étant donné que l'ajournement ou même la prorogation est dans l'air et qu'il est fort possible que ce soit cette semaine — je pense que je n'annonce rien à personne; il est fort possible que la session soit prorogée cette semaine — est-ce que le Solliciteur général, dans l'intérêt public, serait en mesure, au plus tard demain, de nous donner les réponses à un tas de points d'interrogation que nous soulève ce problème et qui ont été soulevés par le député de Chicoutimi tant aujourd'hui que la semaine dernière? Peut-on demander — c'est, cela ma question — au Solliciteur général de faire...

M. Levesque: Cela a été donné.

M. Bourassa: Des ballons par-dessus des ballons. Le rapport Gans, la crise d'octobre.

Le Président: A l'ordre, à l'ordre, à l'ordre, à l'ordre!

M. Burns: II y en a un qui est sorti de son terrier; c'est cela, il est sorti de son terrier. Le directeur des "public relations" du Québec.

Le Président: Posez votre question, s'il vous plaît!

M. Burns: M. le Président, ma question est très simple, elle n'est pas méchante, elle est dans l'intérêt public: Est-ce que le Solliciteur général peut, aujourd'hui nous garantir qu'au plus tard demain il nous donnera une réponse complète, totale, sur toutes ces questions?

M. Lalonde: M. le Président, je pense avoir donné des réponses à toutes les questions, réponses que je peux donner.

M. Burns: Mon Dieu Seigneur, cela n'a pas de bon sens!

M. Lalonde: L'Opposition a toujours le droit d'avoir des conceptions différentes mais ce ne sont pas les pièges qui seront posés par l'Opposition qui vont me faire dévier de la ligne de conduite que mes responsabilités m'imposent. Il reste quand même, à mon souvenir, une question extrêmement importante, d'après l'Opposition, à savoir quelles sont les raisons de la démission d'un des dizaines de procureurs qui sont passés à la CECO depuis trois ans.

J'ai demandé à M. Dutil, qui a quand même d'autres responsabilités, et j'attends une réponse de sa part. Si je l'ai demain, tant mieux, je la communiquerai aussitôt à la Chambre.

Le Président: A l'ordre!

M. Lessard: II y a du patronage derrière les...

Le Président: L'honorable député de Lafontaine et, suivant, l'honorable député de Rouyn-Noranda.

Village olympique

M. Léger: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires municipales, responsable du dossier olympique et de la régie. Est-ce que le ministre est au courant qu'il y aurait un manque important de places au Village olympique pour les athlètes? Ceci aurait comme première conséquence, entre autres, une diminution canadienne en ce qui a trait spécialement aux sports d'équipe pour participer aux Olympiques de 1976. Est-ce que le ministre est au courant?

M. Goldbloom: M. le Président, la Régie des installations olympiques n'est pas responsable du village. Je ne suis pas au courant de ce qui se passe au village; je prends avis de la question et j'essaierai de trouver la réponse.

M. Léger: M. le Président, est-ce que c'est le Solliciteur général qui est responsable du reste du dossier et le ministre des Affaires municipales responsable uniquement du Parc olympique? C'est ce que le ministre vient de me dire là? Donc, ma question aurait dû être dirigée au solliciteur: Est-ce qu'il est encore responsable du dossier olympique en ce qui a trait à l'extérieur du Parc olympique? Alors, j'adresse ma question au ministre, je ne sais pas s'il peut revenir, s'il peut laisser la CECO pour le dossier olympique. Est-ce que le ministre peut nous dire s'il est au courant — s'il ne l'est pas qu'il prenne avis — qu'il y aurait un man-

que important de places? S'il prend avis, quel est le nombre de places qui pourraient manquer — il me semble que c'est assez important — pour les athlètes au Village olympique, du fait que les différents pays membres des Jeux olympiques ont augmenté énormément leur participation? Cela va de 200 à 600 dans plusieurs pays.

M. Malouin: ... des balounes aujourd'hui.

M. Léger: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il est au courant de ce manque de places au Village olympique et est-ce qu'il entend prendre des mesures pour corriger la situation?

M. Lalonde: Je prends avis de la question, M. le Président.

M. Léger: M. le Président, je m'excuse de poser la question à deux ministres qui ont une partie de responsabilités différente. Ma troisième question au ministre responsable de la régie: Est-ce que le ministre peut nous dire à quelle date il a l'intention de convoquer la commission parlementaire pour entendre les responsables de la régie sur le dossier du Parc olympique, sur son échéancier, sur les coûts à prévoir, tel qu'il avait été promis à la commission parlementaire qui a étudié le projet de la régie et qui avait fixé cela à la mi-janvier? Je pense que c'est l'autre ministre qui avait fait cette promesse. Est-ce que le ministre peut nous dire a quelle date, en intersession, on aurait la première séance de la commission parlementaire pour éclairer la population et les députés en particulier sur le dossier olympique tel qu'il va maintenant que la régie l'a en main?

M. Goldbloom: M. le Président, je n'ai pas encore fixé de date; je voudrais dire clairement que c'est mon intention de renseigner le public aussi complètement que possible. Je dois souligner que, si nous pouvons en juger par les séances de la commission parlementaire qui ont eu lieu en janvier et en juillet, si ma mémoire est fidèle, nous avons pris plusieurs jours à chaque fois. Les membres de la régie me disent que, leur responsabilité première étant de voir à la réalisation des installations olympiques, ils ne voudraient pas être obligés de passer plusieurs jours à fournir des renseignements devant une commission parlementaire.

Je devrai les consulter à ce sujet pour savoir à quel moment il serait opportun de tenir des séances, mais l'essentiel est de compléter les installations et de tenir les Jeux. Il y a d'autres mécanismes possibles pour fournir des renseignements. Il n'est pas question de ne pas en fournir.

M. Léger: Une question supplémentaire, M. le Président.

Le Président: Question supplémentaire.

M. Léger: Est-ce que le ministre voit la différence entre une conférence de presse régulière du ministre pour donner les renseignements qu'il veut bien donner et une commission parlementaire avec les élus qui ont la responsabilité, avec le ministre, de voir à ce que tout fonctionne bien et éviter les problèmes? Est-ce que le ministre, tel qu'il l'a promis à la commission parlementaire et lors du projet de loi sur la régie, alors que nous demandions une commission parlementaire à tous les mois, va tenir sa promesse de convoquer une commission parlementaire à la mi-janvier tel qu'il l'a dit au journal des Débats?

Le Président: A l'ordrel A l'ordre!

M. Goldbloom: M. le Président, ce n'est pas moi qui ai parlé de conférence de presse. J'ai dit simplement qu'il y a d'autres moyens de fournir des informations. Je vais étudier la question et en discuter avec la régie qui se réunit assez régulièrement. Je verrai ce qui sera la chose la plus opportune à faire. Je répète qu'il n'est pas question de ne pas donner de renseignements, mais ayant la responsabilité de voir à ce que la régie réalise ce dont elle est responsable, je ne vais pas la gêner dans son travail, parce que, si je la gêne dans son travail, le résultat pourra être moins satisfaisant.

Je vais certainement considérer l'opportunité de convoquer la commission parlementaire.

M. Charron: Une question additionnelle, M. le Président. Est-ce que c'est gêner...

Le Président: C'est la dernière sur cette question. Je ferais remarquer aux honorables députés de l'Opposition officielle que nous sommes, aux deux premières questions, à 27 minutes de la période des questions.

M. Charron: M. le Président, est-ce que c'est gêner le travail de la Régie des installations olympiques et est-ce que c'est retarder la construction, même mécanique, matérielle du stade olympique et des installations olympiques que de demander aux dirigeants de la régie, nommés par l'Assemblée nationale, nommés par une loi votée par l'Assemblée nationale, à la suite d'un dossier...

Le Président: Question, sans argumentation.

M. Charron:... est-ce que c'est gêner le travail de la Régie des installations olympiques de lui demander deux jours, trois jours, pendant le mois de janvier, pour venir nous expliquer...

Le Président: A l'ordre!

M. Charron: ... le dossier tel qu'il est actuellement?

M. Lacroix: Ce ne sont pas vos affaires. Ce n'est pas vous qui gouvernez.

Le Président: A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, messieurs!

M. Goldbloom: La réponse, M. le Président, c'est possiblement oui, parce que les membres de la régie doivent être présents sur le chantier, en bonne mesure de leur temps.

Le Président: Le député de Rouyn-Noranda. A l'ordre, messieurs!

Roulottes pour les Jeux olympiques

M. Samson: M. le Président, je voudrais adresser une question au premier ministre. Je lui ai adressé une question la semaine dernière et j'attendais une réponse de lui à la suite de certaines vérifications qu'il devait faire dans l'affaire de la construction de roulottes pour la baie James et également pour les Jeux olympiques.

Je réitère, M. le Président, ma question, à savoir si le premier ministre est en mesure, aujourd'hui, de nous dire pourquoi, alors que des contrats ont été enlevés aux Industries L'Islet Limitée, par la baie James, en même temps on fait construire pour les Jeux olympiques des roulottes en Ontario à la Compagnie A.M.F. Sun Camper Trailers Ltd. Et est-ce que le premier ministre est en mesure de me dire également s'il a été saisi du fait que d'autres industries similaires au Québec sont également touchées, par la mise à pied de 40 employés à la Safeway (Quebec) Inc., à Saint-Hubert et il y a probablement d'autres problèmes à la Treco Inc., à Saint-Romuald, à la Bendix, à Saint-Jérôme et à la BMC, à Saint-Hyacinthe?

M. Bourassa: Le chef du Ralliement créditiste vient d'ajouter toute une série de compagnies. J'ai demandé un rapport, la semaine dernière. J'ai été à Montréal toute la journée hier et je vais vérifier si j'ai reçu le rapport. J'ai dit au chef parlementaire, la semaine dernière, que l'objectif était d'encourager les entreprises québécoises mais au meilleur coût possible, de manière que les frais pour, les contribuables québécois soient au minimum. Ce sont les deux objectifs qui sont recherchés, mais pour les cas particuliers, j'attends un rapport ces jours-ci.

M. Samson: La semaine dernière, le premier ministre faisant référence à des soumissions recherchant le meilleur coût possible. Est-ce que le premier ministre peut en même temps vérifier s'il y a eu effectivement demande de soumissions à tous les fabricants québécois de maisons mobiles, pour le COJO?

M. Bourassa: D'accord.

Le Président: Dernière question. Le député de Beauce-Sud.

Parc national dans la Beauce

M. Roy: Ma question s'adresse à l'honorable ministre des Affaires intergouvemementales. Le 5 novembre dernier, je recevais une réponse à une question que je posais au gouvernement: Qu'il soit déposé, sur le bureau de cette Chambre: copie de l'étude préliminaire préparée par le gouvernement fédéral relativement à l'établissement d'un parc national dans le sud-est du Québec, plus précisément dans le comté de Beauce-Sud, ainsi que copie de tous rapports, documents, correspondance échangés entre le provincial et le fédéral ainsi qu'avec la société Saint-Jean-Baptiste du comté de Beauce.

J'aimerais demander au ministre des Affaires intergouvernementales si cela veut dire que les dossiers, concernant les projets de parcs nationaux, sont maintenant sous l'autorité du ministère des Affaires intergouvernementales parce que j'ai été surpris que ce soit lui qui me réponde.

M. Cloutier: Je n'ai pas très bien compris le début de la question. Il faudrait peut-être parler un peu moins vite. On n'entend pas, dans ce secteur-là.

M. Roy: Le temps des questions est relativement court et il nous faut, évidemment, parler un peu plus vite. Je m'excuse, M. le Président.

J'aimerais demander au ministre des Affaires intergouvernementales pourquoi c'est lui qui a répondu à la question concernant un projet de parc national dans le sud-est du Québec.

M. Cloutier: C'est moi qui ai répondu?

M. Roy: M. Cloutier.

M. Cloutier: J'en suis très content.

M. Roy: Quand même! On a répondu au nom du ministre des Affaires...

Le Président: Posez votre question.

M. Roy: ... intergouvernementales et je veux savoir si cela veut dire que les dossiers, concernant le projet de parcs nationaux au Québec, sont maintenant sous la responsabilité de votre ministère.

M. Cloutier: La Loi du ministère des Affaires intergouvemementales lui donne un droit de regard et une obligation de coordination. Les dossiers restent sous la responsabilité du ministère du Tourisme, mais le ministère des Affaires intergouvernementales doit participer aux discussions et doit également approuver les ententes qui peuvent faire suite.

M. Roy: Deuxième question. J'aimerais demander au ministre des Affaires intergouvernementales pourquoi il a caché — je dis bien caché — le dossier du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche relativement à cette affaire.

M. Cloutier: Oh! Je ne savais pas que j'avais caché quelque chose non plus. Je n'ai strictement rien à cacher. Est-ce que le député pourrait poser sa question à nouveau, en expliquant un peu?

M. Roy: M. le Président, avec votre permission, je vais relire tranquillement la question qui avait été inscrite au feuilleton: "Qu'il soit déposé sur le bureau de cette Chambre copie de l'étude préliminaire préparée par le gouvernement fédéral relativement à l'établissement d'un parc national dans le sud-est du Québec, plus précisément dans le comté de Beauce-Sud, ainsi que copie de tous rapports, documents, correspondance échangés entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial et la société Saint-Jean-Baptiste de la Beauce."

M. Cloutier: Qu'est-ce au'on a caché là-dedans? C'est une accusation, M. le Président.

M. Roy: J'ai demandé au ministre, dans un premier temps, pourquoi c'était lui qui avait répondu parce que je prévoyais avoir une réponse du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche et, deuxièmement — je vais être plus clair à l'intention du ministre — la réponse a été la suivante: Ni la direction générale des relations fédérales-provinciales du ministère des Affaires intergouvemementales ni le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche ne possède de dossier sur le projet d'établissement d'un parc national dans le sud-est du Québec et plus précisément dans le comté de Beauce-Sud.

Je demande au ministre pourquoi on a donné une fausse réponse à la question que j'avais posée au feuilleton. Elle est simple, ma question.

M. Cloutier: Je vais vérifier tout cela. Je suis convaincu que le député de Beauce-Sud n'a aucune raison de s'inquiéter. Tout est parfaitement clair et s'il y a des éclaircissements à apporter, je les apporterai.

M. Roy: Je pourrais même en faire une question de privilège.

Des Voix: Oh! Oh!

M. Roy: Oui, parce qu'il s'agit d'une réponse fausse que nous avons eue du ministre des Affaires intergouvemementales. J'ai ici photocopie d'une lettre...

Le Président: Est-ce que vous posez une dernière question supplémentaire?

M. Roy: Je pose une dernière question supplémentaire, mais c'est presque une question de privilège parce qu'il s'agit de mon privilège de député...

Le Président: Posez la question de privilège.

M. Roy: ... et le privilège de la Chambre d'avoir des réponses exactes de la part du gouvernement. J'aimerais demander au ministre pourquoi on n'a pas rendu publique !a lettre qui a été adressée au président du comité de promotion du parc national de La Chaudière, en date du 4 octobre 1971, et qui est signée par l'ancien ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, Mme Casgrain. Pourquoi n'a-t-on pas voulu rendre publique ladite lettre datée du 19 juillet 1971, toujours adressée par le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche au président du comité de promotion du parc de la Chaudière et qui est signée par le ministre par intérim dans le temps, M. Claude Simard? Pourquoi n'a-t-on pas rendu publique la lettre qui vient d'un autre ministère également, du ministère des Affaires culturelles, datée du 2 avril 1971, une autre lettre datée du 15 mars 1971, et qui vient toujours du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, une autre lettre datée du 17 février 1971, qui est signée par le chef de cabinet du ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche? Et il y en aurait d'autres.

Je veux savoir pourquoi le ministère des Affaires intergouvernementales a caché le dossier du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

M. Cloutier: Je pense que le député de Beauce-Sud...

M. Roy: Est-ce qu'à la suite des autres questions qui ont été posées à l'Assemblée nationale on veut en quelque sorte jouer au plus fin dans ce dossier?

Le Président: A l'ordre! Je crois que votre question est amplement complète, jusqu'à maintenant.

M. Cloutier: Le député de Beauce-Sud exagère. Je sais qu'il essaie de donner un peu de crédit au nouveau parti auquel il appartient, mais ses efforts sont désespérés au départ et il ne faut quand même pas aller trop loin. Il a posé toute une série de questions. Je vais tenter de voir clair là-dedans et j'apporterai toutes les explications nécessaires. Il n'y a certainement pas de quoi s'inquiéter et c'est vraiment dommage que le député de Beauce-Sud ne puisse pas trouver des matières un peu plus importantes pour y donner son attention.

M. Roy: M. le Président, dernière question additionnelle.

Le Président: C'était votre dernière. A l'ordre! A l'ordre! Je vous avais prévenu, je m'excuse... A l'ordre! ... A l'ordre!

Affaires du jour.

M. Levesque: M. le Président, nous avons un rapport. Avec la permission, nous pourrions faire le rapport du député de Saint-Maurice.

Le Président: Le député de Saint-Maurice.

Rapport sur le projet de loi no 89

M. Bérard: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue

permanente des richesses naturelles et des terres et forêts qui a étudié le projet de loi no 89, Loi des droits sur les mines, qu'elle a adopté sans amendement.

Le Président: Rapport déposé.

Travaux parlementaires

M. Levesque: M. le Président, nous allons dans quelques instants faire une motion pour que vous quittiez le fauteuil, en appelant l'article 6), afin que la Chambre puisse se transformer en commission plénière pour l'étude du projet de loi no 258, ce qui explique les avis que je vais donner ou les motions que je vais faire quant aux travaux en commission.

Alors, M. le Président, je propose ce qui suit. Tout d'abord, je tiens à informer cette Chambre...

M. Burns: Est-ce que je peux vous poser une question avant que vous fassiez la motion?

M. Levesque: Certainement.

M. Burns: II serait alors impossible de vous poser cette question.

Il y a, à l'article 1) du feuilleton, une motion au nom du député de Matane. Si je ne me trompe pas, il s'agit là, M. le Président, d'une motion où vous avez déjà pris, jusqu'à un certain point, le cas en délibéré, d'une part. Deuxièmement, si jamais vous décidez que cette motion est recevable, elle est, à mon avis — en tout cas, je vous le soumets — privilégiée, selon les dispositions des articles 79 et suivants. A ce moment, je voudrais savoir à quel moment on va disposer de cette motion. Je suis particulièrement intéressé à cette motion. Je n'ai pas l'intention, à ce stade-ci, de vous dire comment je réagirai à la motion, mais je suis particulièrement intéressé à intervenir sur la motion du député de Matane. Sans me prononcer sur le mérite, je pense qu'elle valait la peine d'être déposée, cette motion. Deuxièmement, M. le Président, j'aimerais savoir où elle va se situer dans nos travaux, parce que je la trouve, en ce qui me concerne et en ce qui concerne l'Opposition, très importante.

M. Levesque: M. le Président, tout ce que je voudrais dire à ce moment-ci, c'est que je concours avec le député de Maisonneuve, pour une fois; je pense que cette motion est très importante et j'espère que nous aurons l'occasion d'en discuter. J'ai compris, cependant, M. le Président, que vous aviez d'abord à vous prononcer sur la recevabilité, si c'est le cas. J'ai cru comprendre également — maintenant, je n'ai pas d'indication finale là-dessus — que, si elle était trouvée recevable, même si elle est privilégiée, il n'en reste pas moins que l'auteur peut accepter qu'elle soit discutée à un moment donné qui pourrait se situer, à mon sens, si ma suggestion reçoit quelque faveur dans cette Assemblée, demain après-midi.

Maintenant, je suis entre les mains de la présidence quant à la recevabilité.

M. Burns: M. le Président, on se comprend beaucoup, le leader parlementaire du gouvernement et moi, parce que, dans le fond, il précède ma deuxième question. C'est que, si elle est présentée demain après-midi, cette motion, le député de Matane a parfaitement le droit de renoncer à son privilège d'être entendu de façon prioritaire. C'est bien sûr; d'ailleurs nous, on l'a fait dans le passé à certaines occasions. Mais ce qui m'intéresse, M. le Président — c'est là-dessus que je vais vous demander une directive — c'est que, demain, c'est la journée des députés. Moi, je suis parfaitement intéressé à ce que le privilège du député, s'il y renonce aujourd'hui, ne soit pas un privilège demain. C'est, dans le fond, cela, la question, M. le Président.

Parce que, demain, la journée des députés veut dire que la motion du député de Saint-Jacques revient en discussion. Elle n'est pas terminée d'ailleurs. C'est dans ce sens que je posais la question, de sorte que de façon utile pour la Chambre il m'apparaîtrait souhaitable que la motion du député de Matane — je n'ai pas à lui donner d'indications là-dessus — si vous jugez qu'elle est recevable, soit débattue aujourd'hui, qu'on en dispose aujourd'hui dans un sens ou dans l'autre, mais que demain nous ayons les travaux que le règlement prévoit pour la Chambre. C'est dans ce sens que je pose ma question, uniquement pour savoir où on s'en va exactement.

M. Bellemare (Johnson): M. le Président...

M. Levesque: J'enregistre, M. le Président, l'attitude du député de Maisonneuve.

M. Bellemare (Johnson): Je pense qu'en vertu de nos us et coutumes, il faut une motion du gouvernement pour suspendre le mercredi, journée des députés, chose qui n'a pas été faite. C'est une question très importante...

M. Levesque: Cela n'a pas été fait dans les formes; cela a été fait d'une façon que je n'ai pas voulu qualifier, il y a quelques instants, attendant de reprendre mon sang-froid.

M. Bellemare (Johnson): Je suis assuré... M. Burns: ... de session.

M. Bellemare (Johnson): Je pense que l'honorable leader de la province donne un mauvais exemple en se choquant à ce moment-ci. Il devrait conserver son sourire parce que la question qu'a soumise le député de Matane est fort importante à cause des précédents qui ont été établis dans cette Chambre, il y a déjà plusieurs années — il y en a au moins deux — où des journalistes ont été convoqués ici à la barre, et je pense que c'est très important que l'on puisse l'expliciter aussi. Je pense que les précédents, qui ont été établis ici par la province, et particulièrement dans ce Parlement, au sujet d'une motion semblable méritent d'être signalés.

Le Président: Messieurs, je n'ai pas tellement à ajouter, sauf que nous avons eu des pourparlers avec le député de Matane et avec d'autres membres de cette Assemblée. Normalement, cette motion devrait être appelée aujourd'hui, mais je crois que du consentement du député de Matane, il serait préférable de l'appeler à une autre séance, étant donné que j'ai certaines remarques sur la forme en ce qui concerne l'assignation d'une ou de deux compagnies. Les pénalités possibles ou éventuelles en vertu de notre Loi de la Législature étant l'emprisonnement, je vois difficilement comment on peut emprisonner des sociétés ou des compagnies.

M. Bellemare (Johnson): Cela a déjà...

Le Président: Je n'ai pas vidé cette question avec le député de Matane. Par contre, étant donné qu'il n'y a pas de motion de fin de session, je crois que demain, à moins qu'il y ait entente à ce contraire, de quinze heures à dix-huit heures, ce sera normalement la journée des députés. Je souhaiterais cependant qu'il y ait une rencontre entre les leaders pour décider s'il y a lieu de siéger demain matin ou demain soir pour peut-être pouvoir autant débattre la motion du député de Saint-Jacques que celle du député de Matane. Messieurs, je suis à votre disposition pour une rencontre des plus amicales entre les leaders.

M. Burns: M. le Président, malgré que mon vis-à-vis soit déjà sur la voie de bougonner, je suis prêt à dire qu'il a et, que vous avez, M. le Président, surtout vous, ma collaboration totale sur la façon d'envisager...

Le Président: Sur un rapprochement.

M. Burns: C'est cela. Le député de Bonaventure se sent choqué — je n'entrerai pas non plus dans certains détails — parce que, apparemment, il a l'impression qu'en disant ce que je viens de dire, il s'est fait tromper. Je peux vous dire publiquement qu'il n'est pas exact que le député de Bonaventure...

Le Président: On va remettre cela.

M. Burns: ... le leader du gouvernement a été trompé par cela. Je vous dis cependant en terminant que vous avez ma collaboration et je continue à l'offrir au leader parlementaire du gouvernement.

M. Bellemare (Johnson): II est de mauvaise humeur.

Le Président: Affaires du jour. Toujours dans les affaires du jour.

M. Levesque: M. le Président, la commission parlementaire de la justice n'a pas terminé ses travaux ce matin. Nous avons demandé aux requérants et aux intervenants de revenir devant la commission de la justice après avoir pris quelques minutes au cours du repas du midi et avec l'espoir qu'on aurait peut-être trouvé de nouvelles avenues. Nous allons donc nous rendre à la commission parlementaire de la justice, à la salle 91-A, pour quelques minutes, pour voir s'il y a eu progrès ou non. Ensuite, selon ce progrès, nous verrons s'il y a lieu d'ajourner.

M. Choquette: Est-ce que le leader me permettrait une observation?

M. Levesque: Oui.

M. Choquette: Cela m'a fait penser aux anciens juges de la Cour supérieure qui ne voulaient pas entendre les causes et qui disaient aux témoins et aux parties d'aller dans le couloir essayer de s'arranger.

M. Levesque: M. le Président, je considère ce commentaire comme une contribution — la première importante — du PNP.

M. le Président, immédiatement après, nous pourrons donner notre place à la commission parlementaire des affaires municipales pour que les travaux puissent continuer à la salle 91-A, immédiatement après que nous aurons pris connaissance des progrès qui auront pu être réalisés.

M. le Président, à la salle 81-A, ce sera la commission parlementaire des affaires sociales qui poursuivra l'étude article par article du projet de loi no 253, Loi visant à assurer les services de santé et les services sociaux essentiels en cas de conflit de travail. Quant à la commission des affaires municipales, elle poursuivra l'étude article par article des projets de loi nos 254, 255 et 256.

M. le Président, je fais motion pour que ces trois commissions puissent siéger même lorsque la Chambre siège, les deux commissions de la justice d'abord, à la salle 91-A, suivies immédiatement de la commission des affaires municipales.

M. Burns: M. le Président, si je comprends bien, on s'en vient en commission plénière en Chambre.

Le Président: Commission plénière.

M. Burns: Par conséquent, j'admets qu'il peut y avoir deux commissions qui siègent en même temps. J'aurais le droit, moi aussi, de bougonner à ce stade-ci parce qu'il y a deux commissions qui vont siéger en même temps dans lesquelles je suis malheureusement appelé à intervenir, c'est-à-dire la commission des affaires sociales relativement — je présume — au projet de loi no 253 sur les services essentiels et la commission parlementaire de la justice à laquelle j'ai participé toute la matinée.

Je fais, M. le Président, sans bougonner, sans me choquer, la suggestion suivante au leader parlementaire du gouvernement: s'il y a deux commissions qui doivent siéger en même temps, c'est l'une ou l'autre des deux commissions que je

viens de mentionner et la commission des affaires municipales. La suggestion que je fais est la suivante: que la commission partementaire de la justice siège en même temps que la commission parlementaire des affaires municipales — comme c'était prévu d'ailleurs hier — et, à la suite de l'ajournement de la commission parlementaire de la justice, je serai à la disposition complète de la commission des affaires sociales.

M. le Président, je dois participer à ces deux commissions. Je ne veux pas retarder les travaux de cette commission mais on va être obligé de tenir compte du fait qu'il y a, à un moment donné, un certain nombre de spécialités qui se présentent. Le deuxième député de l'Opposition qui s'occupe des affaires de la justice, pour l'Opposition officielle, est pris aux affaires municipales. Il faudrait quand même s'entendre. Je pense que ce serait injuste pour le député de Chicoutimi de se faire lancer dans un débat alors qu'on en a discuté toute une matinée et qu'on en est rendu, peut-être, à une solution, avec les parties, à la commission parlementaire de la Justice. Peut-être, je ne sais pas, mais on attend le rapport là-dessus.

C'est la suggestion que je fais. Si on demande ma collaboration, je pense que je me sens en droit — s'il y a quelqu'un qui se sent en droit de le faire, je pense bien que c'est nous autres, du côté de l'Opposition, nous sommes si peu nombreux — de demander la collaboration du leader parlementaire. Je lui demanderais, si c'est possible, de faire siéger la commission des affaires municipales et la commission de la justice en même temps et, à la fin des travaux de la commission parlementaire de la justice, je serai entièrement prêt à continuer les travaux de la commission parlementaire des affaires sociales.

M. Levesque: M. le Président, je tiens à informer cette Chambre que j'avais fait part, à l'avance, à l'honorable député de Maisonneuve, des intentions que nous avions quant à ces commissions. J'avais compris qu'il avait dit — d'ailleurs la commission de la justice ne devant siéger qu'une dizaine de minutes — qu'un autre serait là pour les dix premières minutes, mais s'il juge à propos d'intervenir de nouveau, je suis très heureux de donner suite à sa suggestion. D'ailleurs, cela va durer dix minutes. Comme je le fais d'habitude, j'essaie de trouver un compromis acceptable. Dans les circonstances, M. le Président, la commission des affaires municipales pourra siéger immédiatement, la commission des affaires sociales attendra et je prie, encore une fois, mon collègue des Affaires sociales de bien vouloir nous excuser. Nous espérons que nous pourrons commencer la commission des affaires sociales quelques minutes après le début de la commission parlementaire de la justice.

C'est donc dire que je fais les changements suivants, M. le Président: que la commission parlementaire de la justice se réunisse à la salie 91 et soit suivie, à 91, des affaires sociales. Et à la salle 81, immédiatement, les affaires municipales.

M. Burns: M. le Président, je suis prêt à voter pour cette motion. Le leader du gouvernement n'a pas à s'excuser de se rendre à ma suggestion, cela ne fait que le grandir.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Bellemare (Johnson): Troisième lecture.

M. Burns: Adopté, M. le Président.

Le Président: Adopté.

M. Levesque: Si on veut s'en tenir à la procédure, M. le Président, il faudrait retarder le départ des membres de la commission pour que nous puissions passer à des troisièmes lectures qui sont prêtes. Article 4).

Projet de loi no 84 Troisième lecture

Le Président: L'honorable ministre de la Justice propose la troisième lecture du projet de loi no 84, Loi modifiant la Loi de la commission de contrôle des permis d'alcool. Cette motion est-elle adoptée?

M. Burns: Adopté, M. le Président.

Le Président: Adopté.

M. Levesque: Article 5).

Projet de loi no 68

Troisième lecture

Le Président: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la troisième lecture du projet de loi no 68, Loi concernant la Communauté urbaine de Montréal. Cette motion est-elle adoptée?

M. Burns: Adopté. Le Président: Adopté. M. Levesque: Article 6).

Le Président: De nouveau en commission plénière.

Projet de loi no 258

Commission plénière (suite)

M. Kennedy (président de la commission plénière): A l'ordre, messieurs! La commission plénière de l'Assemblée nationale est réunie pour étudier le bill no 258, Loi concernant certaines installations d'utilité publique et modifiant la Loi d'Hydro-Québec, la Loi de la Régie de l'électricité et du gaz et la Loi de la Régie des services publics.

M. L'Allier: M. le Président, quant à l'article 1,

il définit aux fins de la loi ce que sont les installations visées par le projet de loi. Comme son titre l'indique, ce projet de loi concerne les installations d'utilité publique et l'article 1 définit ce que c'est.

J'aurais une légère modification à proposer à l'article 1. Le texte actuel se lit comme ceci: "Aux fins de la présente loi". Je proposerais, si les membres de la commission étaient d'accord, plutôt que de lire "aux fins de la présente loi", que nous lisions "dans la présente loi", pour éviter l'ambiguïté avec l'article 2 qui commence par les mêmes mots. C'est un détail technique. C'est la seule modification que j'apporterais à ce projet de loi, modification qui m'est suggérée par les juristes.

M. Charron: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Picard): Article 1, adopté. Article 2?

M. Charron: Attendez un peu. Je suis d'accord sur la modification suggérée par le ministre, cela ne veut pas dire que j'accepte l'article 1, tel qu'il est libellé, même avec la modification qui vient d'être apportée. Nous parlons de sujets qui peuvent être apportés et qui seront éventuellement apportés devant les tribunaux. Il ne faut pas se faire de secrets de polichinelle; on est dans une lutte contre la montre ou à peu près. De l'avis des conseillers légistes du ministre et de ceux qui, j'espère, travaillent à faire respecter les positions québécoises le plus intégralement possible et les intentions de la politique du gouvernement québécois que nous soutenons en cette matière probablement plus loin que le gouvernement lui-même d'ailleurs, est-ce que l'article 1 dissipe l'ambiguïté qui a très longtemps donné cours à des interprétations différentes qui pouvaient permettre que l'objectif visé par la politique des communications du Québec ne soit pas atteint? Est-ce que, de l'avis du ministre, l'article 1 dissipe l'ambiguïté ou si, demain matin, il se trouvera quelque avocat, de quelque compagnie à charte fédérale, plaidant devant un tribunal fédéral pour dire que sa compagnie ou les équipements de sa compagnie ne sont pas nommément et directement visés par ce qui s'appelle l'article 1?

Je pense, M. le Président, que, dans le langage que j'emploie, je suis clair. Est-ce que les recours de Bell Canada contre les intentions du gouvernement québécois sont à toutes fins pratiques éliminées quant à leur possibilité avec le libellé de l'article 1 actuel?

M. L'Allier: A mon avis, oui, les ambiguïtés sont levées par l'article 1 et complétées par les articles suivants, en ce sens que toutes les installations d'utilité publique à des fins de téléphone, de télégraphe et de câblodistribution seront couvertes par cette loi. L'ambiguïté dans le passé, M. le Président, a existé parce qu'on a pu plaider, et on a plaidé effectivement le fait que la Régie des services publics ne pouvait pas réglementer les instal- lations telles que décrites à l'article 1, appartenant à des sociétés elles-mêmes réglementées par le pouvoir fédéral.

Un des buts de cette législation est précisément de faire en sorte que tous les équipements, de quelque société que ce soit, puissent être réglementés par la régie, ce qui n'empêcherait pas éventuellement n'importe quel citoyen ou société de plaider que la loi, dans son ensemble, est ultra vires des pouvoirs québécois. Nous pensons sur ce point que nous pourrions très facilement gagner la cause mais, quoi qu'il en soit, nous éliminons ici les ambiguïtés de la loi actuelle.

M. Charron: D'accord. Il s'agit effectivement de deux débats, j'en conviens. La constitutionna-lité d'une loi, du pouvoir d'un niveau de juridiction d'intervenir dans un champ et, d'autre part, la clarté d'intervention dans un champ. Je parlais de la deuxième. L'autre, je ne pense pas que l'on ait besoin de répéter nos positions, qui à cet égard sont communes, je pense bien.

M. L'Allier: D'accord, M. le Président.

M. Samson: M. le Président, est-ce que je peux demander au ministre s'il y a eu, avant le dépôt de cette loi, des consultations avec un autre palier de gouvernement à l'effet que cette loi ne serait pas, avant même son adoption, déjà en préparation de contestation par un autre gouvernement?

M. L'Allier: Non, M. le Président, il n'y a pas eu de consultation avec un autre palier de gouvernement, si vous pensez au palier fédéral. Nous avons cependant, vous vous en souvenez, M. le Président, décidé dans cette Assemblée même de modifier la Loi des cités et villes pour que les municipalités soumises à la Loi des cités et villes puissent adopter des règlements leur permettant précisément d'intervenir dans l'utilisation conjointe.

Cependant il n'y a pas eu de consultation avec le palier fédéral. Nous avons eu des consultations très étroites avec l'Hydro-Québec, qui en passant est propriétaire de près de 80% des équipements qui sont visés par la présente loi. L'Hydro-Québec est d'accord avec la législation. 60%.

M. Samson: Est-ce que les différentes compagnies de téléphone agissant sur le territoire du Québec ont été prévenues de ce projet de loi et est-ce que vous êtes en mesure de nous faire part de leurs réactions?

M. L'Allier: Non, M. le Président, les compagnies de téléphone n'ont pas été prévenues et par conséquent nous ne sommes pas en mesure de vous faire part de leurs réactions. En fait, c'est peut-être le moment de préciser le but recherché par cette loi, qui est d'éviter que, sur un même territoire, à des fins inutiles, s'implantent deux ou trois ou même quatre séries de poteaux servant les uns à l'Hydro-Québec, les autres à la câblodis-

tribution et les autres à la téléphonie, éventuellement une quatrième série pour d'autres fins.

Ce que nous voulons, c'est que, lorsqu'il y a sur un poteau des espaces disponibles à d'autres fins, la Régie des services publics puisse, après avoir convoqué les parties — c'est bien prévu dans la loi — déterminer les conditions d'utilisation du même poteau à des fins multiples, autres que celles prévues par le propriétaire du poteau.

M. Samson: Et quelles sont les garanties légales qu'a prises le gouvernement avant de présenter cette loi, que cette loi ne sera pas en fin de compte, avant même son adoption, déjà en voie de contestation ailleurs?

M. L'Allier: On n'a aucune indication, M. le Président, qui nous montre que cette loi, avant même son adoption, puisse être contestée. Nous croyons finalement que cette loi devrait être respectée assez facilement par les compagnies de téléphone, puisque c'est ce dont vous parlez. A telle enseigne que les compagnies de téléphone, Bell Canada en particulier, ont déjà contesté, devant la Régie des services publics, l'utilisation conjointe de leurs poteaux par d'autres, notamment les câ-blodistributeurs.

Devant la Régie des services publics, Bell Canada a invoqué le fait que la régie ne pouvait pas la réglementer.

Bell Canada est allée, par ailleurs, devant la Commission canadienne des transports, dans le cas de Télévision Trans-Magog, et ne pouvant pas, là, invoquer la non-juridiction, elle a plaidé d'autres arguments. La Commission canadienne des transports a permis l'utilisation conjointe. Donc, de ce côté, je ne pense pas qu'il y ait, à première vue, motif valable de contestation par les compagnies de téléphone. Je ne vous dis pas qu'il n'y aura pas contestation; il est possible que pour des fins de bataille jusqu'au bout, comme on dit, il y ait contestation de Bell Canada.

M.Charron: II reste toujours la possibilité de recours, par Bell Canada, à la Cour suprême du Canada.

M. Samson: Est-ce que le gouvernement a pensé obtenir un jugement déclaratoire avant de présenter ce projet de loi?

M. L'Allier: Je peux vous dire que c'est une hypothèse que nous avons considérée pendant une courte période de temps, à un moment donné. A ma connaissance, l'hypothèse a été mise de côté pour tous les arguments que l'on invoque à l'égard de la Cour suprême quand il s'agit, précisément, d'une certaine souveraineté québécoise dans ces matières.

M. Samson: J'imagine que le gouvernement a prévu peut-être un peu ce qui pourrait arriver à la suite de l'adoption de ce projet de loi et qu'il a pris de nombreux avis juridiques.

M. L'Allier: Oui.

M. Samson: J'imagine que vous l'avez fait.

M. L'Allier: On a prévu de traverser la rivière une fois que nous serions rendus au pont, pas avant.

M. Samson: Je m'excuse, mais je n'ai pas entendu.

M. L'Allier: Nous avons prévu de traverser la rivière une fois rendus au pont, mais pas avant.

M. Samson: Ah bon! Je souhaite qu'une fois ce projet de loi adopté il n'y ait pas de problème.

M. L'Allier: L'important, finalement, dans cette loi, c'est qu'une fois cette loi adoptée, les décisions de la Régie des services publics sont exécutoires quant à l'accès à ces poteaux pour des fils de câblodistribution, ce qui permettrait donc immédiatement à des centaines de milliers de clients possibles des câblodistributeurs de bénéficier du service de câblodistribution. Sur le fond, si jamais la loi était contestée, il faudrait tous les délais requis pour aller à la Cour suprême et en attendant vous n'auriez pas quelques centaines de milliers de personnes privées du service du câble. C'est le but de la présente loi.

Le Président (M. Kennedy): Article 1, adopté. Article 2.

M. L'Allier: L'article 2 a pour but de préciser que la régie peut ordonner l'utilisation conjointe, quel que soit le propriétaire de l'installation.

Le Président (M. Kennedy): Article 2, adopté.

M. Charron: D'accord.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 3.

M. L'Allier: L'article 3 prévoit que la régie, au moment de décider de l'utilisation conjointe, doit convoquer les parties intéressées, c'est-à-dire le propriétaire des équipements et toute partie intéressée, notamment les municipalités.

Le Président (M. Kennedy): Adopté?

M. Charron: Cela me tente de tourner le fer dans la plaie pour deux minutes. Parmi les parties intéressées, est-ce qu'il peut aussi y avoir le gouvernement fédéral convoqué devant la Régie des services publics? Si on étend le pouvoir de convocation jusqu'aux édiles municipaux, est-ce que cela peut, à l'occasion... Le principal obstacle, je pense, vient plutôt d'en haut que d'en bas.

M. L'Allier: Je référerais le député à l'article 2 qui dit: "que celle-ci appartienne à un organisme d'un gouvernement, à un agent de la Couronne, à un corps public..." Alors, ce ne serait pas le gouvernement fédéral, comme tel, sauf si le gouvernement fédéral est lui-même directement proprié-

taire d'équipement, mais tous les organismes qui sont des émanations du gouvernement fédéral et qui seraient propriétaires d'équipement.

M. Charron: Comme quoi, par exemple? M. L'Allier: Comme quoi?

M. Charron: Si on prend celui qu'on a en tête, est-ce que cela veut dire un organisme...

M. L'Allier: Je peux vous en donner. L'Hydro-Québec, pour le gouvernement du Québec. Dans la mesure où le CN et le CP, le Canadien national en particulier, seraient propriétaires d'équipement, et en supposant que la Commission des télécommunications trans-marines était propriétaire de tels équipements, cela irait aussi, c'est une commission fédérale.

M. Charron: Le ministère des Communications a des antennes qu'à l'occasion il prête à des municipalités ou à des entreprises privées. Si le CRTC devenait propriétaire d'antennes, est-ce que la Régie des services publics pourrait, en vertu de l'article 2, décider de l'utilisation partagée d'une installation d'utilité publique?

M. L'Allier: La question est hypothétique et la réponse le sera aussi. Dans la mesure ou le CRTC pourrait être propriétaire d'antenne, la présente loi permettrait à la régie de convoquer le CRTC, le propriétaire de l'antenne.

M. Charron: Vous ne vous éloignez pas du débat déjà connu à ce sujet.

M. L'Allier: Non.

M. Charron: II faudrait prévoir, à ce moment, l'objectif visé par l'article 2, encore dans l'hypothèse. Mais dans le genre de guerre de fou dans laquelle on se trouve, la guerre du câble, tout est possible. On aurait donc une contestation judiciaire, encore une fois; le gouvernement fédéral, probablement, contesterait le pouvoir de cette Assemblée d'avoir édicté cet article 2 qui permettait à la Régie des services publics...

M. L'Allier: A ce moment, le gouvernement fédéral le ferait par l'entremise de sa société de la couronne.

M. Charron: Oui, d'accord, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Article 3, adopté. Article 4.

M. Charron: D'accord.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 5.

M. L'Allier: L'article 5, c'est celui qui transfère, en fait, de la Régie des services publics à la Régie du gaz. C'est l'échange de juridiction entre les deux.

Le Président (M. Kennedy): Adopté.

M. Charron: M. le Président, j'ai quand même une question d'information à cet article 5. D'où émane, d'où part cette décision de créer un comité de surveillance et d'arbitrage en matière de production, etc?

M. L'Allier: Cela existe déjà, M. le Président.

M. Charron: Oui, cela existe déjà, mais à partir de quelle constatation avez-vous jugé bon d'effectuer ce transfert, par exemple?

M. L'Allier: C'est essentiellement, M. le Président, parce que ce comité existe déjà et il est déjà prévu à l'article 2 de la Loi de la Régie de l'électricité et du gaz. C'est dans la mesure où nous voulons ajouter aux responsabilités de ladite régie la responsabilité sur la vapeur. Nous n'avons pas modifié autre chose, nous avons ajouté la vapeur. C'est pourquoi nous avons repris l'article 2 tel qu'il existe actuellement dans la Loi de la Régie de l'électricité et du gaz.

M. Charron: Vous avez inclus la vapeur? D'accord.

Le Président (M. Kennedy): Adopté l'article 5. Article 6.

M. Charron: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 7.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 8.

M. L'Allier: C'est un article de concordance.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 9.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 10.

M. Charron: Adopté.

Le Président (NI. Kennedy): Adopté. Article 11.

M. Charron: Adopté aussi.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 12.

M. L'Allier: C'est la même chose, c'est pour l'autre régie.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 13.

M. L'Allier: C'est un article de concordance.

L'article 13 indique que les ordonnances rendues par l'une ou l'autre des régies, avant l'adoption de la présente loi, sont valables et applicables dans l'une ou l'autre des régies. L'article 14, M. le Président...

Le Président (M. Kennedy): Adopté, l'article 13?

M. Charron: D'accord.

Le Président (M. Kennedy): Article 14.

M. L'Allier: L'article 14 est peut-être le plus important de ce projet de loi parce que, finalement, il comporte un certain effet rétroactif à l'effet que la présente loi vaut pour les ordonnances de la régie rendues depuis le 1er septembre 1975. Il faut se rappeler ici que la régie, depuis septembre 1975 a ou a pu rendre des décisions portant précisément sur l'interprétation de l'article qui lui donne juridiction sur les poteaux. En adoptant aujourd'hui cette loi, nous clarifions la base législative à partir de laquelle la régie a rendu ses décisions et nous faisons en sorte que les décisions rendues depuis le 1er septembre, concernant le droit d'attache, soit exécutoire en fonction de la présente loi. C'est peut-être l'article le plus important.

M. Charron: Je sais parce que tout article de loi qui comporte un effet rétroactif doit nécessairement être scruté. Je pense que c'est un accord de principe sur lequel il est facile de se rejoindre. J'aimerais que le ministre précise de quelles décisions en particulier il peut s'agir, si on a choisi le 1er septembre 1975 et qu'il a dû intervenir depuis ce temps.

M. L'Allier: Essentiellement de la décision de la Régie des services publics relative à Télécâble de Québec qui, suite à une décision de la régie, s'est vu octroyer le droit d'utiliser, aux fins de desservir la population par la câblodistribution, les poteaux de Bell Canada, lesquels avaient fait l'objet, si vous vous en souvenez, non pas d'un accord entre le câblodistributeur et Bell Canada, mais d'une utilisation conjointe. Vous vous souvenez que Bell Canada avait décroché les fils de Télécâble de ses propres poteaux.

La Régie des services publics a décidé, dans ce cas en particulier, d'autoriser l'utilisation conjointe et la décision de la régie fait l'objet d'un appel actuellement devant les tribunaux supérieurs, devant la Cour d'appel du Québec. Or, ce projet de loi aurait pour effet de confirmer, en fait, l'interprétation judiciaire de la régie de la loi existante, en disant que c'est à partir de cette loi que la régie s'est basée, loi qui lui permet de déterminer l'utilisation conjointe des installations d'une société qui ne fait pas partie de la juridiction québécoise.

M. Charron: M. le Président, c'est effectivement l'article le plus important du projet de loi. Je pense qu'il faut le remettre dans le contexte de l'ensemble du dossier des communications, ne serait -ce que pour quelques minutes, pour bien préciser ce projet de loi. En fait, ce projet de loi intervient parce qu'une des parties en cause, c'est-à-dire le gouvernement du Québec, au nom de la Régie des services publics ou se portant défenseur de sa création, la Régie des services publics, se sent pressée par le fait qu'elle a à plaider devant un tribunal supérieur face à une entreprise privée puissante, dont le "lobby" est puissant et bien connu également, et qui dispose aussi d'arguments légaux, il faut bien l'admettre. Soit par l'ambiguïté de certaines lois précédemment votées par cette Assemblée, soit par l'ambiguïté pure et simple de constitution de ce pays dans lequel nous vivons, cette compagnie peut avoir à l'occasion des arguments qui pourront ébranler l'esprit des juges devant lesquels tout cela sera plaidé et qui pourraient avoir pour effet de rendre absolument caduques, si la décision du tribunal devait aller dans le sens des demandes de l'entreprise dont nous parlons, non seulement ce projet de loi, mais également les lois précédentes les plus importantes qui ait parrainées à cette Assemblée depuis cinq ans à son ancien titre de ministre des Communications, celui qui présente le projet de loi aujourd'hui.

Autrement dit, cette Assemblée risque d'être absolument bafouée dans le pouvoir d'intervention qu'elle s'est reconnu et qu'elle s'est donné unanimement dans les lois nos 34, 35 et 36, que tout le monde se rappelle, en 1972, je crois.

M. le Président, le gouvernement du Québec intervient aujourd'hui par un projet de loi dont l'objectif — j'en conviens encore — est de remettre à la raison une compagnie qui a une attitude absolument rétrograde. Ce n'est donc pas du principe que nous discutons; d'ailleurs, nous avons adopté le principe sans même de discussions. Mais je dis que c'est en même temps pour le gouvernement, dans sa lutte pour l'obtention de principe, admettre une négligence passée. On a l'air d'un gars qui, sur le point d'aller en cour, se sent faible et, avant de se présenter en cour, profitant du fait qu'il peut, par son pouvoir de gouvernement, intervenir dans le dossier, s'ajoute un élément de force. Et il le fait à partir d'un pouvoir inhabituel et exceptionnel, celui de voter une loi avec des effets rétroactifs.

Je pense que, si on peut être d'accord avec le principe, on peut dire que, plutôt qu'une loi s'ap-pliquant rétroactivement au 1er septembre 1975, il aurait dû y en avoir une le 1er juin 1975 qui aurait clarifié la situation, qui aurait permis à la Régie des services publics d'autoriser Télécâble de Québec à procéder à ces installations sans la situation loufoque que les citoyens de la capitale nationale des Québécois ont connue et qui ferait qu'aujourd'hui on ne serait pas obligé de discuter une situation parce qu'on s'en va en Cour suprême et qu'on veut mettre toutes les chances de son bord pour gagner.

C'est un signe, je pense, de négligence, de faiblesse, de mauvaise administration qui n'est

peut-être pas absolument considérable et catastrophique, mais qui est visible. Quand un gouvernement est obligé d'intervenir avec une loi portant effet rétroactif, il y a là aveu de négligence quelque part.

Je vais voter pour cet article à cause du principe, à cause de l'objectif et parce que je veux qu'une fois pour toutes des compagnies dites d'utilité publique qui font leurs profits à partir d'un service public comme celui du téléphone ne se sentent pas, parce qu'elles disposent d'une charte fédérale, le droit d'être maître d'envoyer promener le gouvernement des Québécois. C'est clair.

Tout cela aurait dû être clair même avant. C'est exactement ce que je suis en train de dire. Aujourd'hui, je crois que c'est déjà clair dans nos lois mais cela ne l'est pas assez, semble-t-il, au point qu'une compagnie peut profiter de l'ambiguïté de nos lois pour contester devant les tribunaux supérieurs et au point que le gouvernement soit même lui-même en voie d'avouer qu'effectivement ses lois ne sont pas assez claires pour qu'il en vienne à suggérer à l'Assemblée de clarifier ses propres lois précédentes à l'aide d'un moyen législatif habituellement condamnable et injustifiable, celui de doter, dans quelque mesure que ce soit, une loi d'un pouvoir rétroactif.

Il n'y a personne qui aime cela, M. le Président, se faire dire, après avoir bénéficié de règles du jeu qui étaient peut-être inadéquates mais qui étaient celles du moment, par un gars qui a perdu ou qui risque de perdre la joute, au bout de la ligne: La joute qu'on a perdue, telle occasion qui était une infraction, qui était une illégalité, cela disparaît maintenant. Si le règlement avait été tel qu'on l'aurait voulu, cela aurait été pareil. C'est comme un gars qui a l'air d'acheter les arbitres après avoir perdu une joute. Le gouvernement du Québec a exprimé beaucoup de tolérance à l'égard d'une compagnie aussi puissante que Bell Canada. Je ne connais pas toutes les ramifications et les entrées que Bell Canada peut avoir au parti au pouvoir et au gouvernement en place mais il reste qu'elle en a largement bénéficié.

Maintenant qu'on s'aperçoit que cette compagnie se comporte chez nous comme si elle était au coeur d'une colonie sous-développée et qu'elle veut être propriétaire unique de ses installations que nous lui avons laissé construire à travers le Québec, à partir desquelles elle a fait des profits qui sont les siens et qui sont élevés, au cours des dernières années, on est obligé de procéder avec une loi rétroactive pour la mettre à la raison. C'est un aveu de négligence et d'impuissance. On les a laissés faire, on les a laissés se bâtir, on les a laissés nous envoyer promener et nous rire en pleine face tant qu'ils le voulaient. A chaque fois que Bell Canada veut augmenter ses coûts, veut augmenter ses profits en soutirant de plus en plus d'argent des poches des contribuables québécois, il faut aller plaider devant la Commission des transports, montrer bonne conscience mais revenir bredouille à chaque fois. Ils ont ri de nous autres.

Le gouvernement — je l'appuie là-dedans — décide un tant soi peu de leur dire:

Ecoutez, vos poteaux qui massacrent l'ensemble du paysage québécois, ce n'est pas rien que votre propriété mais cela va être la propriété de l'ensemble des Québécois aussi. Quand les Québécois décideront qu'ils vont servir à autre chose qu'aux lignes qui vous permettent de faire vos profits, comme entreprise privée, vous les concéderez à ceux qui seront reconnus d'utilité publique; je suis parfaitement d'accord avec cet objectif. Mais le simple fait qu'on soit obligé de donner un effet rétroactif à la loi nous indique combien on a été faible, on a été lâche, on a été mou pendant une bonne période.

M. L'Allier: M. le Président, vous me permettrez de dire quelques mots parce que finalement on touche ici à un problème d'interprétation juridique et judiciaire. Il faut qu'on se souvienne, puisqu'on parle du gouvernement, qu'en 1970, lorsque le gouvernement est arrivé pour assumer sa responsabilité, il y avait en tout et partout, au sein de l'administration publique provinciale, une personne ou deux qui s'occupaient du compte téléphonique du gouvernement. Or nous savons que c'était à ce moment-là, comme cela l'est aujourd'hui, Bell Canada qui fournissait les services téléphoniques du gouvernement, lesquels étaient évalués, de mémoire, autour de $6 millions à $7 millions par année.

Nous avons actuellement, au niveau du gouvernement, environ 40 personnes qui sont les seules responsables de déterminer les besoins de l'Etat en matière de téléphonie et de négocier avec Bell Canada. Si on se souvient, en 1970, le principal responsable de ce dossier, celui qui déterminait les besoins de l'Etat en matière de téléphonie, était non pas un fonctionnaire mais un employé en congé sans solde de Northern Electric prêté au gouvernement, lequel disait à l'Etat ce dont l'Etat avait besoin en matière de téléphonie.

C'était la société de téléphone qui nous disait ce dont nous avions besoin, qui prenait notre commande, qui se l'envoyait, par la suite, et qui y répondait.

C'est une des premières choses qui a été faite par le gouvernement en matière de téléphonie que de se doter d'un service de téléphonie. C'est ainsi que nous avons pu bâtir des dossiers qui nous ont permis d'intervenir et, j'en conviens avec le député de Saint-Jacques, avec plus ou moins de succès devant la Commission canadienne des transports. Quand je dis avec plus ou moins de succès, c'est avec moins de succès parce que, évidemment, ce que nous avons plaidé n'a pas toujours, et de loin, été retenu mais avec plus de succès lorsque l'on pense que maintenant le gouvernement fédéral en est au point où il remet lui-même en question la structure même de la Commission canadienne des transports. A tel point qu'il a lui-même renversé, au moins une fois, une décision de sa propre Commission canadienne des transports sur une question de tarifs téléphoniques.

Pour le reste, ce qui était décrit et écrit dans les lois de 1972, relativement à l'utilisation des équipements, nous apparaissait, comme aux légistes du gouvernement, comme étant suffisamment

clair et comme permettant à la Régie des services publics de réglementer l'utilisation des équipements.

J'ai moi-même, M. le Président, présenté ces lois à l'Assemblée nationale. Au moment où il a été question de ces articles, précisément, qui disaient de quelle façon la régie devait réglementer l'utilisation conjointe, je ne me souviens pas d'avoir eu de questions portant sur l'exiguïté de tel article relativement à la juridiction de la régie.

C'est donc à partir de ce principe que nous avons, en 1972 proposé à l'Assemblée l'adoption de la législation telle que nous la connaissons. S'il avait été clair, dans notre esprit, que Bell Canada ou toute autre société de téléphone aurait pu plaider afin de se soustraire à la Régie des services publics, je peux vous dire que nous n'aurions pas hésité une seule seconde à apporter, à ce moment-là, les précisions que la loi d'aujourd'hui nous permet d'apporter.

En d'autres mots, nous avons toujours voulu permettre à la régie de réglementer l'ensemble des installations servant aux fins de téléphone, etc.. tel que décrit dans les articles 1 et 2, pour pouvoir, précisément, intervenir dans la planification de l'utilisation de tels équipements.

On s'est servi de la loi existante pour la contester; il nous est apparu, ayant un choix à faire entre des plaidoyers ad nauseam devant toutes les sortes de tribunaux que vous voulez — qui n'avaient qu'un seul effet, finalement, celui de priver, à court terme, des citoyens du service de câblodistribution — il nous est apparu, dis-je, important d'apporter cette précision, de fermer cette porte à la contestation, de faire en sorte que, dans l'immédiat, le câble qui est déjà en voie d'installation sur les poteaux de Bell Canada puisse continuer de s'installer, que le service de câblodistribution puisse être fourni. Et si, éventuellement, comme n'importe qui, quelque société de téléphone que ce soit décidait de contester la validité même de la législation, cette société ou cette personne pourrait le faire sans empêcher, toutefois, à moyen et à court terme, les citoyens de bénéficier du service de câblodistribution.

Donc, le but de cette législation est en même temps de reconnaître — et j'en conviens avec le député de Saint-Jacques — une ambiguïté qui ne nous est pas apparue, je pense, ni à lui ni à nous, au moment de l'adoption des lois de 1972, mais qui nous apparaît du fait de la contestation judiciaire. Nous devons, je pense, tout en reconnaissant cette ambiguïté, essayer ensemble de la soulever, le plus rapidement possible, pour atteindre l'objectif qui a été mentionné et sur lequel nous sommes d'accord.

M. Samson: M. le Président, bien que je sois favorable au projet de loi; bien que je sois favorable au fait que nous donnions à la Régie des services publics du Québec tous les pouvoirs dont elle a besoin pour fonctionner normalement; bien que je sois également favorable à ce que, au Québec, on puisse décider par nous-mêmes de nos besoins en cette matière; bien que je sois favorable aussi, M. le Président, au fait qu'en matière de commu- nications nous prenions de plus en plus du terrain qui doit être le nôtre et même, au-delà de cela, peut-être un peu du terrain perdu; bien que je sois favorable à tout cela, il y a un grand principe à l'article 14 qui m'apparaît comme étant un principe que nous devons rejeter. Ce principe, qui est celui de la rétroactivité des lois, est un principe qui peut absolument être injuste envers quiconque dans notre société.

Aujourd'hui, il s'agit d'une disposition de l'article 14 qui fait peut-être l'affaire du gouvernement, peut-être même notre affaire dans les circonstances.

Je pense qu'il est important de se faire comprendre clairement. La rétroactivité de la loi permettant à la Régie des services publics de rendre valable, au sens de la présente loi, toute décision prise par la régie depuis le 1er septembre 1975, dans les faits, cela ferait notre affaire. Mais, M. le Président, je rappelle à votre attention que cette même Chambre a voté, au cours de la présente session, une loi no 50, Loi des droits de la personne, la charte québécoise des droits de l'homme si on préfère. Dans cette charte québécoise des droits de l'homme, si je me rappelle bien, il y a un principe qui apparaît justement à rencontre du principe de la rétroactivité des lois. Si la justice québécoise a cru bon d'inclure dans les principes fondamentaux que nous retrouvons à la loi 50, la non-rétroactivité des lois, je vois très mal que le gouvernement, même si dans le cas présent cela fait son affaire, utilise ce principe de rétroactivité des lois.

Je pense qu'il y aurait eu d'autres moyens. Il faut bien nous faire comprendre aussi; nous ne voulons pas empêcher le ministre des Affaires culturelles, qui agit aujourd'hui au nom du ministre des Communications, de régler un problème évident. Mais je pense qu'il y a quand même un reproche qui peut être fait au gouvernement, peut-être pas à des hommes mais au gouvernement dans son ensemble, c'est que puisque nous n'étions pas en session le 1er septembre, il était difficile évidemment au gouvernement d'arriver avec un projet de loi pour s'assurer que toute décision de la régie serait valable à partir du 1er septembre en fonction du principe que nous retrouvons dans le projet de loi 258.

Mais il y aurait eu au moins un autre moyen qui, je crois, n'a pas été utilisé dans les circonstances et qui aurait pu être utilisé, c'est-à-dire un avis gouvernemental de son intention de légiférer en cette matière, ce qui aurait été un avertissement aux personnes concernées. On ne peut pas aller à rencontre de la loi 50, ce que nous sommes en train de faire présentement, qui est la charte québécoise des droits de l'homme. Si on commence à la violer à partir même des lois qu'on adopte en Chambre, cela veut dire qu'on n'attache pas d'intérêt à la charte québécoise des droits de l'homme. Cette charte, si je me rappelle bien, si ma mémoire est fidèle, a été votée à l'unanimité des membres de la Chambre.

M. le Président, nous retrouvons ici une contradiction extraordinaire entre des grands principes mis dans une loi spéciale des droits de

l'homme, la loi 50 de 1975, qui se prononce contre la rétroactivité des lois et, aujourd'hui, on est en train de voter la rétroactivité dans une loi. Cela, M. le Président, je pense que c'est dangereux. C'est un précédent extrêmement dangereux parce que ce précédent-là, je vous le dis, si on le laisse passer aujourd'hui sans condition, sera utilisé à la prochaine occasion. Et la prochaine occasion pourrait bien être une loi pour mettre fin à une grève, une loi pour faire retourner au travail des salariés dans tel ou tel secteur de la société, une loi pour obliger le retour au travail des fonctionnaires, par exemple, dans telle ou telle circonstance.

Cela veut dire que ce précédent est extrêmement dangereux. Aujourd'hui, il fait notre affaire. Bien sûr, si on légiférait toujours seulement pour des choses qui font notre affaire en tant que députés, M. le Président, je pense que nous serions à côté de notre mandat. Nous passerions à côté des devoirs qui nous sont conférés par le mandat que le peuple nous a donné.

Le peuple ne nous a pas donné un mandat pour légiférer pour nous-même en tant que députés. Il nous a donné un mandat pour légiférer dans le sens du bien commun de l'ensemble de la population du Québec. Or, si on me demande si le bien commun est bien servi par le projet de loi no 258, je vous dis: Oui, à mon sens, il est bien servi par ce projet de loi. Mais le bien commun, ce n'est pas seulement dans un secteur. Cela s'applique à l'ensemble de toutes les activités économiques, sociales, culturelles, etc., au Québec.

Nous avons, à l'unanimité, voté la loi 50 qui se prononce carrément contre le principe de la rétroactivité des lois et de toutes les lois parce que le projet de loi 50, c'est un chapeau qui vient au-dessus de toutes les autres lois. Si on a voté contre la rétroactivité à ce moment-là, aujourd'hui, sous un prétexte valable — je veux bien le dire, sous un prétexte valable — on se prépare à accepter cela. Mais on se prépare, en même temps, à créer un précédent qui va rebondir contre les députés de cette Chambre dans d'autres circonstances. En effet, d'autres personnes, groupes ou associations de notre société pourront aussi réclamer une rétroactivité dans une autre sorte de loi. Là, cela ne fera peut-être pas votre affaire, mais vous serez obligés d'utiliser le précédent, parce que cela vaut dans notre droit parlementaire, M. le Président. C'est, d'ailleurs, dit justement dans les règlements de l'Assemblée nationale. On trouve cela dans les tout premiers règlements; c'est à l'article 3 du règlement qu'on voit que nous sommes régis par différents modes: "par les lois, par le règlement et par les précédents établis par suite de l'interprétation des lois et du règlement."

Or, cela c'est dans notre tradition de parlementarisme actuel de type britannique, qui est celui qui nous régit. Les précédents dans notre système parlementaire sont extrêmement importants, extrêmement pesants. Cela veut dire que nous devons éviter de créer des précédents, car, chaque fois que nous créons un précédent, nous mettons au monde peut-être un enfant docile, mais c'est possible aussi que, par l'un des précédents, on mette au monde un monstre qui, a un moment donné, grossira ou grandira tellement qu'on ne sera plus capable de l'arrêter.

C'est peut-être en termes imagés, M. le Président, mais il reste que ce précédent, qui fait notre affaire aujourd'hui, demain aura peut-être apporté des préjudices contre des associations, contre des groupements organisés, peut-être même contre l'Assemblée nationale elle-même.

C'est pourquoi, M. le Président, je ne peux pas accepter l'article 14 rédigé de cette façon. Comment peut-on juridiquement, maintenant, donner le même poids en ne créant pas de précédent? Il y a peut-être une possibilité; il y a des conseillers juridiques qui sont tout près du ministre. Il y a des conseillers qui sont près du ministre, juridiques ou autres, techniques peut-être. Ils sont peut-être capables de nous suggérer un amendement à l'article 14, qui pourrait nous donner satisfaction, tout en ne nous obligeant pas à voter la rétroactivité de la loi. M. le Président, je ne peux absolument admettre cela, parce que je sais qu'il y a d'autres lois qui s'en viennent. Il y a d'autres lois qui seront rendues nécessaires et ces autres lois qui seront rendues nécessaires, M. le Président, quand on touchera à l'article où on parlera de rétroactivité cela va être de la dynamite. Cela va être de la dynamite, mais on ne pourra pas l'éviter, parce que, cette année, en 1975, à la suite de l'adoption de la loi 50 qui se prononce contre le principe de la rétroactivité des lois, nous aurons adopté une loi ayant une fonction rétroactive.

Je pense, M. le Président, qu'on ne peut pas se permettre cela. On ne peut pas se permettre de violer immédiatement, dans la même année, durant la même session, la charte des droits de l'homme ou la loi des libertés individuelles ou des droits de la personne.

Je ne peux pas concevoir... C'est peut-être un avertissement que le gouvernement doit prendre à ce moment-ci, avant qu'il ne s'enlise trop profondément dans ce mauvais principe. Il y a que la guerre des poteaux, telle que nous la connaissons, telle que nous en avons entendu parler, n'est pas venue au monde hier. La guerre des poteaux, on connaît cela depuis déjà plusieurs mois. Cela fait déjà plusieurs mois que toute la population bien pensante de la province de Québec est d'accord avec le principe que nous retrouvons dans la loi 258 à l'effet que cela ne donne rien de planter quatre poteaux quand on peut donner le même service avec un seul. Parce que la population du Québec est intelligente, pratique, cette population s'était déjà fait une idée; je n'ai jamais entendu une personne, de la population, me dire qu'elle aimerait avoir quatre poteaux en face de sa maison alors qu'on peut avoir quatre services différents accrochés au même poteau. On est d'accord là-dessus. Mais, si c'était venu au monde hier, on comprendrait que vous n'ayez pas pu prévenir cela, mais ce n'est pas d'hier que ce problème a été soulevé. Il a été soulevé il y a déjà longtemps.

Nous connaissons les ennuis qu'a connus le ministère des Communications dans ses efforts pour régler ce problème. Il serait peut-être temps

que, lorsqu'un problème est soulevé et qu'il y a possibilité qu'on soit obligé, un jour ou l'autre, d'avoir recours à une loi pour régler le problème soulevé, le gouvernement se fasse un devoir à ce moment-là d'annoncer publiquement son intention de légiférer s'il n'y a pas règlement. A ce moment-là, il y aurait au moins un avis de législation et, là, nous pourrions comprendre, par un avis bien donné, bien publié, que le jour de l'adoption de la loi puisse faire référence au jour de l'avis public, que la loi puisse prendre effet le jour où il y a eu avis public de la part du gouvernement de son intention de légiférer en donnant les détails. Le 1er septembre, on n'était pas en session, on ne pouvait pas légiférer, le 1er septembre, à moins d'une session spéciale que plusieurs députés n'auraient peut-être pas acceptée pour un seul projet de loi, mais nous étions en session au mois de juin.

On aurait pu agir au mois de juin, parce que ce problème ne s'est pas dessiné à la dernière minute, il a été connu publiquement à un certain moment, mais il ne s'est pas dessiné à la dernière minute; il y a sûrement des conseillers du ministère qui ont vu venir ce problème avant. Puisqu'on n'était pas en session le 1er septembre, mais à la fin d'octobre, le gouvernement aurait au moins pu, dès la fin d'octobre, présenter son projet de loi. S'il y a eu des ordonnances émises par la Régie des services publics qui doivent avoir effet à partir du 1er septembre en vertu de la présente loi, s'il y avait eu au moins un avis de donné, le 1er septembre, de l'intention du gouvernement de légiférer, je pense qu'on ne pourrait pas parler d'une rétroactivité de la loi. On pourrait dire: Nous confirmons, par la loi, ce qui a été annoncé et publié, de façon qu'il n'y ait pas d'équivoque. Nous pourrions faire un spécial pour une circonstance semblable, mais je ne crois pas qu'il y ait eu ce genre d'avis public. S'il y a.eu ce genre d'avis public, j'aimerais bien que le ministre me le dise. Il se peut que je n'aie pas pris connaissance de tout ce qui a été publié, mais je ne crois pas qu'il y ait eu ce genre d'avis public.

S'il n'y a pas eu ce genre d'avis public et bien que je sois en faveur du projet de loi, bien que je sois en faveur que nous fassions reconnaître nos droits, je dis que le gouvernement a manqué son coup, je dis que le gouvernement a été trop tard, je dis que nous devons le reprocher au gouvernement. Nous ne devons pas, aujourd'hui, accepter le principe de la rétroactivité des lois.

Cela n'est pas possible, surtout après qu'on nous a convaincus — parce que c'est quand même le même gouvernement qui nous en a convaincus — au mois de juin de voter de façon unanime pour la loi 50, dans laquelle était inclus le principe de la non-rétroactivité des lois.

M. !e Président, je ne suis pas du tout d'accord sur l'article 14 tel qu'il est présenté. Je voudrais dire au ministre que nous accepterions même de ce côté-ci de la Chambre, une suspension de quelques minutes si c'est nécessaire, pour qu'il y ait consultation entre les experts qui sont présents et le ministre. Peut-être qu'il pourrait y avoir — cela arrive souvent — une petite conférence pour tenter de trouver une solution qui ne nous obligerait pas à violer le principe de la non-rétroactivité des lois et qui apporterait un résultat semblable au résultat recherché. Parce que je le souligne, encore une fois, je suis pour le résultat qui est recherché par le ministère des Communications devant le problème qui nous occupe. J'ai hâte d'entendre le point de vue du ministre là-dessus.

M. L'Allier: M. le Président, je dois dire tout de suite, au risque de mécontenter le député de Rouyn-Noranda, qu'il n'y a pas effectivement de solution qui nous permette d'éviter l'effet rétroactif de cette loi. Si je voulais être un peu méchant, je lui dirais qu'il vient de faire un plaidoyer digne des meilleurs avocats de Bell Canada. Pourtant, compte tenu des serivces de Téléphone du Nord...

M. Samson: Ce n'est pas méchant que vous me disiez cela, ils gagnent toujours.

M. L'Allier: ... sernble-t-il, d'après la correspondance que m'a adressée à l'époque le député de Rouyn-Noranda au sujet des services de Téléphone du Nord, le député de Rouyn-Noranda n'a pas de cadeau à leur faire.

M. Samson: M. le Président, est-ce que le ministre me permettrait une petite parenthèse également...

M. L'Allier: C'était juste une parenthèse.

M. Samson: ... non méchante? J'ai peut-être été mal interprété par le ministre. Je n'ai jamais eu l'intention...

M. L'Allier: C'est sur le principe.

M. Samson: ... de vous dire que je suis contre cette loi. Le résultat que vous recherchez dans cette loi est le résultat que je recherche aussi. Je pense que le ministre, qui fait référence à certaines lettres que je lui ai déjà fait parvenir, a raison de faire référence à ces letrres. Je n'ai jamais eu honte de ma signature. Quand je signe une lettre, c'est parce que je suis d'accord sur ce que j'écris, autrement je ne la signerais pas. Mais il reste que là, je voudrais bien que le ministre comprenne que ce que je veux, c'est de ne pas violer immédiatement un principe qu'on vient d'accepter. C'est cela qui me fait mal. Mais est-ce qu'il y a moyen d'atteindre le même objectif, parce que sur les principes, je suis absolument d'accord?

M. L'Allier: M. le Président, pour répondre plus sérieusement au député de Rouyn-Noranda, malgré le fait que je suis d'accord avec lui qu'en principe, une loi de l'Assemblée nationale ou de quelque Parlement ou Législature que ce soit ne doit pas comporter de rétroactivité, c'est de l'essence même de la souveraineté d'une Assemblée de permettre à l'occasion, et quand les circons-

tances et surtout quand l'intérêt public le requièrent, cette rétroactivité. C'est cela qui est en cause ici, finalement. La décision de la Régie des services publics qui serait touchée par l'approbation de la présente loi touche quelques centaines de milliers d'abonnés à la câblodistribution dans la région de Québec, Charlesbourg, Québec-Est, etc. Si, par principe, nous disons: Nous n'acceptons pas la rétroactivité, nous sauvons, bien sûr, le principe. Je pense que nous le sauvons également en acceptant la présente loi comme une exception voulue et volontaire au même principe. Ce n'est pas le principe qu'on sacrifie ici; c'est effectivement l'intérêt d'une collectivité que nous sacrifierions en faisant s'appliquer le principe d'une façon absolue. Or, la décision de la Régie des services publics veut que pour toute la région nord de Québec, du Québec métropolitain, le câblodistri-buteur, qui autrement ne pourrait pas le faire, se serve, afin de fournir son service à la population, des installations existantes. Nous avons, à ce moment, l'appui de la plupart des conseils municipaux à cette fin. Il est impensable pour les conseils municipaux, et avec raison, que se multiplie l'implantation des poteaux sur leur territoire.

A ce moment-ci, si tel article 14 n'était pas adopté, on pourrait aller jusqu'au bout, contester de toutes les façons le droit de la régie d'avoir réglementé comme elle l'a fait. Pendant trois, quatre ou cinq ans, vous auriez une population, en attendant qu'on tranche le principe, qui serait privée du service.

En adoptant l'article 14, nous touchons, dans les faits, une décision principale de la régie, celle de Télécâble de Québec. Qu'est-ce que nous faisons? Nous permettons aux citoyens de cette région de recevoir le service du câble jusqu'à ce qu'éventuellement le tribunal supérieur, le dernier tribunal, détermine si oui ou non nous avions droit de passer telle loi.

Quelle que soit l'issue en Cour suprême, je vous rappelle les deux décisions que j'ai citées au début, celle de Télécâble de Québec et celle de Télévision Trans-Magog, à Magog, de la Commission canadienne des transports, qui font que, malgré les querelles de juridiction, les deux instances de décisions en matière de juridiction et de réglementation en arrivent, dans les faits, à la même conclusion, à savoir que le propriétaire d'un poteau de téléphone, lorsqu'il est démontré qu'il y a de l'espace sur son poteau, doit laisser s'y accrocher une compagnie de câble.

Afin d'éviter — je ne porte pas de jugement de valeur sur les sociétés de téléphone quelles qu'elles soient — la tentation qui peut exister qu'une société de téléphone se serve d'ambiguïtés législatives ou juridiques pour priver une population du service de câble, aux fins, elle-même, d'en arriver à assumer ou à démontrer sa suprématie dans les équipements, nous proposons à l'Assemblée l'adoption de cet article 14. Ce n'est pas pour la modification d'un principe, mais comme une exception a un principe que tous nous devons pleinement reconnaître, à savoir: que cette Assemblée ne doit pas décider rétroactivement par lois, sauf lorsque, dans sa souveraineté, elle détermine qu'elle peut et qu'elle doit, dans l'intérêt public, le faire. C'est tout ce qui est proposé ici.

M. Samson: J'aurais une question à poser au ministre, M. le Président. L'article 14 dit: "Toute ordonnance rendue par la Régie des services publics depuis le 1er septembre 1975 en matière d'utilisation d'installations d'utilité publique au sens de la présente loi est censée avoir été rendue en exécution de ladite loi." Est-ce que les décisions qui ont été rendues, que vous voulez faire légaliser par la présente loi ou pour ajouter peut-être du poids aux décisions qui ont été rendues par ladite loi doivent prendre effet à partir du 1er septembre, ou si ces décisions qui ont été rendues avant aujourd'hui pourraient éventuellement prendre effet à partir d'aujourd'hui sans que cela ne relance tout le débat et ne cause de préjudices aux abonnés?

M. L'Allier: M. le Président, en fait, cela ne touche, pour être très clair, qu'une décision de la Régie des services publics, celle rendue par la Régie, dans le cas de Télécâble de Québec, vers le 25 ou 27 septembre dernier et qui permettait l'utilisation par télécâble des installations de Bell Canada. Cela ne touche que cette décision, laquelle est exécutoire actuellement et en appel devant la Cour d'appel.

M. Samson: Elle est exécutoire au 1er septembre.

M. L'Allier: Elle est exécutoire au 27 septembre, à la date...

M. Samson: Elle est en appel présentement.

M. L'Allier: Elle est en appel présentement devant la Cour d'appel.

Le Président (M. Kennedy): L'article 14 est adopté?

M. Samson: Attendez un peu là, n'allez pas trop vite, on va peut-être se compredre.

Si cette décision qui a été rendue était, à toutes fins pratiques, confirmée par la loi en date d'aujourd'hui, atteindriez-vous le même résultat, le même objectif que vous recherchez?

M. L'Allier: ... judiciaire ne met pas fin à la contestation judiciaire sauf qu'un des arguments principaux invoqués par Bell Canada, à savoir que la régie ne peut pas réglementer une installation de poteaux appartenant à Bell Canada, donc société réglementée par le gouvernement fédéral, cette partie de l'argumentation de Bell Canada tomberait.

Depuis le 25 septembre, date de cette décision, Télécâble procède effectivement à l'implantation de son réseau de câblodistribution.

M. Samson: A votre connaissance, ces installations sont-elles en cours ou terminées?

M. L'Allier: Elles sont en cours, elles ne sont pas terminées. Cela prend un an, au total, pour faire cela. Cela devrait être terminé vers septembre ou octobre 1976.

M. Samson: Si la régie émettait une ordonnance en date d'aujourd'hui — je m'excuse, mais je n'ai pas d'avocat près de moi pour me conseiller — la régie aurait-elle le pouvoir d'émettre une ordonnance rétroactivement à partir du moment où ce projet de loi est accepté?

M. L'Allier: A mon avis, M. le Président, non. La régie doit émettre des ordonnances à partir de la date de la demande qui lui en est faite. M faut présumer que, si la régie rendait aujourd'hui une ordonnance, elle s'appliquerait à compter d'aujourd'hui, mais que, compte tenu de l'état actuel de la législation et de la réglementation, elle ne serait pas différente de celle émise le 27.

En d'autres mots, on précise. La régie dit: Nous avons le pouvoir de réglementer les poteaux de Bell Canada. Bell conteste et la contestation de Bell peut avoir pour effet de suspendre l'implantation du service. Par une loi, nous précisons, antérieurement à la date de la décision de la régie, qu'effectivement c'était la volonté du législateur, comme je l'ai dit tout à l'heure au député de Saint-Jacques, d'assujettir à la juridiction de la régie toute forme d'installations physiques servant au téléphone, au câble, etc. C'était la volonté du législateur. Tout ce que nous faisons aujourd'hui — si vous êtes d'accord, M. le Président — c'est préciser cette volonté du législateur.

M. Samson: M. le Président, le ministre m'apporte certaines précisions que je considère d'importance. Vous dites que c'était la volonté du législateur. C'est ce que vous venez de dire. Si c'était la volonté du législateur, est-ce que cela a été dit publiquement comme tel en date du 1er septembre?

M. L'Allier: M. le Président, je fais appel à mes souvenirs et je me souviens, au moment de la présentation de cette loi, de l'avoir indiqué clairement. C'est, d'ailleurs, ce que nous avons plaidé nous-même au moment où, avec surprise...

M. Samson: La présentation de cette loi a été faite la semaine dernière.

M. L'Allier: En 1972, quand on a présenté des amendements par les projets de loi nos 35, 36 et 37, il y avait précision, insuffisante, semble-t-il, puisque nous arrivons aujourd'hui avec un projet de loi, de la juridiction de la régie en matière d'installations. C'était l'article 30. On a trouvé un cheveu là-dedans qui permettait une contestation, en disant: Vous n'avez pas juridiction sur les installations appartenant à des sociétés réglementées par le fédéral. Cela nous a surpris. Nous avons contesté devant les tribunaux cette assertion de Bell Canada en particulier et, aujourd'hui, nous venons préciser par un projet de loi quelle avait été notre intention en 1972, en précisant la juridiction de la régie pour éviter, précisément, qu'on se serve de faux-fuyants, qu'on se serve d'ambiguïtés — je le reconnais — législatives qui servent finalement à priver les citoyens du service de câ-blodistribution, mais qui ont comme but premier de continuer cette bataille qui est longue, complexe entre, d'une part, la câblodistribution et, d'autre part, la téléphonie quant aux installations.

M. Samson: Je voudrais attirer l'attention du ministre, M. le Président, sur la question de la vente — parce que le ministre était, à ce moment-là, ministre des Communications — du journal Le Soleil. Nous avons eu de nombreuses commissions parlementaires sur le sujet, le ministre se le rappellera. Le premier ministre avait, à cette occasion, participé aux débats de façon assez régulière. Si ma mémoire est fidèle, le premier ministre, au nom du gouvernement, quand il a été question de la vente du journal Le Soleil, avait fait savoir publiquement son intention de légiférer avant que la vente ne soit conclue, advenant que Power Corporation se porte acquéreur du journal Le Soleil, en utilisant l'argumentation que le gouvernement voulait empêcher absolument la concentration de la presse écrite au Québec. En ayant à l'avance annoncé son intention de légiférer particulièrement dans ce domaine advenant qu'il y ait vente à Power Corporation, je pense que le gouvernement, par ce fait, avait nettement indiqué son intention, ce qui fait que la vente n'a pas eu lieu à Power Corporation.

Il y a eu une commission parlementaire, par la suite, pour étudier la situation, pour déterminer si la vente avait bel et bien eu lieu à Power Corporation directement ou indirectement. Mais je pense que, à ce moment-là, l'annonce d'une loi à venir, advenant qu'il y a vente directe comme cela se présentait à ce moment-là, était suffisante pour empêcher Power Corporation de procéder. Je pense qu'également une déclaration officielle du gouvernement du Québec, en date du 1er septembre, manifestant ou indiquant son intention de légiférer plus clairement aurait eu le même effet. Vous auriez peut-être pu éviter, à ce moment-là, tous les problèmes que nous avons connus et adopter quand même cette loi que vous considérez comme valable parce qu'elle précise davantage les pouvoirs de la régie. Mais je me dois de reprocher, non pas au ministre, mais au gouvernement comme tel, de ne pas avoir publié une telle intention, en date du 1er septembre. C'est ce qui nous amène aujourd'hui devant une loi à portée rétroactive. Même si le ministre, dans sa savante argumentation, me mentionne qu'il est lui aussi contre le principe de la rétroactivité des lois, mais que pour des raisons spéciales et d'intérêt public il accepte la rétroactivité des lois, je souligne respectueusement que, lorsque nous avons adopté la loi 50, elle a été adoptée unanimement par les membres de cette Chambre.

Donc, nous avons unanimement voté contre le principe de la rétroactivité des lois et on a mis cela

dans une autre loi. Alors, ce que je pense, M. le Président, qui est le plus important pour le moment, c'est que dans la même année on en arrive à violer un principe qu'on a adopté unanimement. Je trouve que c'est inacceptable.

Avant les arguments du ministre, aujourd'hui, peuvent lui sembler valables pour faire adopter la rétroactivité d'une loi, parce qu'il y a la raison d'intérêt public, autant, demain, un autre ministre pourra arriver avec une autre chose qui est plus ou moins valable et nous réclamer la même chose. A quelle place, va-t-on tracer la ligne de démarcation entre l'intérêt public réel et l'intérêt public plus ou moins réel, mais manifesté par d'autres genres d'intérêt?

C'est extrêmement dangereux, M. le Président et c'est cela que je voulais souligner au ministre; c'est extrêmement dangereux... Vous me faites signe de quoi, M. le Président?

Le Président (M. Kennedy): Vous avez épuisé votre temps de parole, je pense. Cela fait au-delà de 20 minutes.

M. Samson: Non, j'ai 20 minutes à chaque fois, M. le Président. J'ai arrêté; alors, 20 minutes à chaque fois, si j'arrête à dix-neuf minutes et demie, M. le Président, je peux me reprendre pour une autre période de 20 minutes.

Le Président (M. Kennedy): Cela fait au-delà de 20 minutes que vous parlez sur l'article 14.

M. Samson: M. le Président, vous conviendrez quand même que je ne vous ai pas trop achalé sur les autres articles. J'aurais pu prendre 20 minutes sur chaque article et je ne l'ai pas fait. Mon désir n'est pas de faire un "filibuster", M. le Président, parce que j'ai consulté mes collègues et ils ne sont pas prêts à faire un "filibuster". Mon désir est d'en arriver à permettre que le ministre puisse faire adopter sa loi, tout en n'étant pas obligé d'avoir recours à la rétroactivité. C'est cela mon désir et c'est pourquoi, M. le Président, je me demande s'il n'y a pas un moyen. Peut-être que le ministre n'en a pas précisément en tête mais, s'il prenait quelques minutes avec ses conseillers et avec d'autres membres de cette Chambre qui sont d'éminents juristes, peut-être qu'il trouverait le moyen d'en arriver à ses fins, sans inclure la rétroactivité directement comme il le fait présentement.

Le Président (M. Kennedy): Article 14, adopté sur division?

M. Samson: Attendez, ne parlez pas trop vite, M. le Président.

M. L'Allier: Ce n'est pas possible, M. le Président.

M. Samson: Ce n'est pas possible? Je ne vois pas. M. le Président...

M. L'Allier: ... principe, mais demandons au député d'accepter aussi qu'il s'agit d'une exception importante à ce principe, c'est une exception.

M. Samson: M. le Président, cela ne change rien. Une exception importante, je m'excuse auprès du ministre, mais toute exception réclamée est importante, j'imagine, mais ce n'est pas du tout valable de sauter sur la première occasion. Je vais me reprendre à l'article 15 si vous voulez me couper le droit de parole à l'article 14. Il ne faut pas sauter sur l'occasion pour en arriver à faire une loi rétroactive.

Je pense aux lois qui s'en viennent; il y a d'autres lois qui s'en viennent qu'on sera peut-être obligé d'adopter. Il y aura peut-être une session spéciale en janvier, d'une journée ou deux, ou en février, d'une journée ou deux, qui posera le même principe de la rétroactivité de la loi. C'est ce que je veux prévenir. Si on accepte immédiatement de violer la charte québécoise des droits de l'homme, je pense qu'on fait aussi bien de la retirer. Cela ne donne rien, vous la violez.

M. L'Allier: On ne viole rien, M. le Président.

M. Samson: Vous violez et vous en prenez plaisir.

Le Président (M. Kennedy): Article 14, adopté. Article 15.

M. Samson: M. le Président, l'article 14 n'est pas adopté. Je regrette. L'article 14 n'est pas adopté, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Adopté sur division?

M. Samson: Sur division. Cela prendrait un vote enregistré tellement je trouve que c'est important.

Le Président (M. Kennedy): II n'est pas enregistré, c'est en commission.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Kennedy): C'est à main levée, on est en commission.

M. Samson: ... je demande que l'on enregistre ma dissidence.

Le Président (M. Kennedy): Qu'on enregistre la dissidence du député de Rouyn-Noranda.

M. Charron: Adopté.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Article 16.

M. Samson: Attendez une minute, M. le Président.

M. Kennedy (président de la commission plénière): M. le Président, la commission plénière

a étudié le bill 258 et l'a adopté avec amendements.

Le Président: Est-ce que ce rapport est agréé?

M. Charron: Oui, M. le Président. Le Président: Agréé.

M. Bienvenue: La troisième lecture à une autre séance, M. le Président.

Le Président: Cela prend le consentement. Est-ce que je pourrais demander à ces honorables visiteurs et étrangers de nous laisser seuls dans notre Chambre?

M. Samson: La chicane va prendre, M. le Président, on était gêné de se chicaner parce qu'on avait de la visite.

M. Bienvenue: M. le Président, article 13, projet de loi no 214.

Projet de loi no 214 Deuxième lecture

Le Président: L'honorable député de Matane propose la deuxième lecture du projet de loi no 214, Loi concernant la Compagnie de gestion de Matane Inc.

L'honorable député de Matane.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté: Merci, M. le Président. Le projet de traversier-rail proposé par la Compagnie de gestion de Matane Inc. a pour but de relier la Côte-Nord aux réseaux ferroviaires nord-américains à l'aide d'un bateau capable de transporter les wagons de chemin de fer entre le port de Matane, sur la rive sud, et les ports de Baie-Comeau, Port-Cartier, Sept-lles, sur la rive nord.

Ce projet de loi vise donc à fournir à la Côte-Nord un service de transport intégré de marchandises qui n'existe pas à l'heure actuelle et qui aurait l'avantage de relier sans rupture de charge les chemins de fer qui existent sur la Côte-Nord aux réseaux ferroviaires nationaux et internationaux. Il ne s'agit pas simplement de déplacer un bateau sur le fleuve qui viendra s'accoster à un quai conventionnel. Au contraire, c'est l'intégration des réseaux ferroviaires nord-américains aux réseaux existants sur la Côte-Nord. Le navire est spécialement équipé à cette fin et les rampes doivent être agencées aux navires. Ce sont des débarcadères et des infrastructures connexes dont le coût atteint $5 millions environ chacun.

Ce concept de transport nécessite une cédule qui s'ajoute au complexe actuel pour donner au public un service complet lui permettant d'utiliser les wagons des différents propriétaires transportant toutes sortes de marchandises vers tous les points du Canada et des Etats-Unis. Le concept d'un traversier-rail pour relier la Côte-Nord à la rive sud n'est pas nouveau. En effet, M. le Président, dès 1971 — à cette époque l'honorable ministre de l'Immigration était député du comté de Matane et a travaillé pour ce projet de loi — la compagnie minière Québec Cartier Mining présentait une requête devant la Régie des transports du Québec, dont l'audition eut lieu à Baie-Comeau, afin d'obtenir un permis autorisant le transport de wagons, chargés ou non, sur une barge poussée par un remorqueur entre les mêmes ports que ceux qui font l'objet du présent projet de loi.

Cette compagnie s'étant désistée à la fin de 1972, la Compagnie de gestion de Matane Inc., les Agences maritimes Inc., et la Société maritime de Baillon Inc. présentaient, devant la Régie des transports, des requêtes qui ne purent être entendues avant la formation, en 1973, de la Commission des transports du Québec, au cours d'audiences qui ont duré près d'un an. La commission a entendu la preuve des trois requérantes.

Incidemment, et ce fait revêt une importance particulière dans le contexte d'aujourd'hui, la juridiction de la Commission des transports du Québec, en matière de transport par traversier-rail, a été mise en doute dès le premier jour d'audience. L'une des requérantes, alléguant l'article 15 de la loi no 23 et le chapitre 55 des Statuts refondus du Québec 1972, a prétendu que la commission ne pouvait avoir juridiction, puisqu'il n'y avait pas de règlement en ce domaine.

Après délibération, la commission, siégeant sous la présidence du président et un banc exceptionnel de cinq membres, décida d'entendre la preuve des requérantes et de disposer de l'objection au moment de rendre sa décision sur les trois requêtes. En d'autres termes, l'octroi d'un permis n'aurait lieu que si la commission était satisfaite et si elle avait juridiction en ce domaine.

Société maritime de Baillon s'étant désistée avant la fin des audiences, les deux autres requêtes furent prises en délibéré. La commission rendit sa décision le 28 mars 1974, accordant le permis de transport par traversier-rail à la Compagnie de gestion de Matane Inc. Forte de cet appui, forte de ce permis, la Compagnie de gestion de Matane se mit immédiatement à la tâche, afin de mettre sur pied ce service et, à cet effet, à dépenser $425,000 à même ses avoirs. Il y avait eu la souscription de $700,000 par 167 actionnaires du Bas-Saint-Laurent et de la Côte-Nord.

Aujourd'hui, M. le Président, la Compagnie de gestion de Matane Inc. est tout à fait prête à donner ce service. Elle s'est dotée de tous les éléments nécessaires et en particulier, s'est assurée la possession d'un traversier-rail neuf, le Incan Saint-Laurent qui portera éventuellement le nom d'Alexandre-Lebel, qui peut transporter 31 wagons de chemin de fer à la fois.

Elle s'est également assurée les fonds nécessaires à la mise en marche du service, en s'adjoi-gnant le Canadien National comme actionnaire minoritaire. Cette décision se traduit d'abord par

la souscription d'actions additionnelles et d'infusion de capital. Le Canadien National s'est également engagé, par contre, à fournir les services d'appoint tels que les services d'engineering, études technoéconomiques, études dans le domaine de la tarification et du marketing, puisque tel que déjà mentionné, le service proposé doit, et cela est une condition essentielle, pouvoir s'inscrire dans la structure de transport par chemin de fer à l'échelle nord-américaine.

Certains éléments indispensables à la création d'un tel service mais ne relevant pas directement de la Compagnie de gestion de Matane Inc. ont également été ressemblés depuis l'octroi de ce permis. Ainsi, par exemple, il fallait qu'un bon service ferroviaire soit assuré jusqu'à Matane, endroit le plus propice comme point de départ d'un service de traversier-rail vers la Côte-Nord. Cette condition s'est récemment réalisée du fait que le Canadien National s'est porté acquéreur du chemin de fer de Matane et du Golfe et se propose d'y faire les améliorations requises.

Le chemin de fer de Matane et du Golfe est une compagnie québécoise régie par les lois du Québec. Incidemment, M. le Président, hier, le premier trajet entre Mont-Joli et Matane était effectué par le CN, ce qui concrétisait un rêve vieux de 1910 de la part des actionnaires de Matane, un chemin de fer à Lac Dulong.

D'autre part, la création d'un service de traversier-rail exige des infrastructures sous forme de débarcadères et de voies de support dans chacun des ports desservis. Les administrateurs de la Compagnie de gestion de Matane Inc. ont fait de nombreuses démarches à ce sujet dès le début. A la suite de la nomination d'une firme d'ingénieurs spécialisés par le ministère des Transports du Québec, le 30 août 1974, les plans et devis du débarcadère de Matane sont maintenant prêts ou sur le point de l'être. Ceux du débarcadère de Baie-Comeau-Hauterive le seront incessamment, à la suite de semblables nominations par le ministère des Transports le 5 juin 1975.

Le ministère des Transports est donc très avancé dans la préparation des infrastructures. Si les travaux procèdent selon le calendrier prévu, les débarcadères de Matane et de Baie-Comeau seront prêts au début de 1977, tandis que le bateau-rail sera livré à la Compagnie de gestion de Matane Inc. en janvier 1977.

En conséquence, à l'heure actuelle, tous les éléments permettant d'assurer le début du service de traversier-rail en mars 1977 sont réunis. On peut donner une idée de l'ampleur du projet et de sa dimension régionale en signalant que des investissements prévisibles, pour les seules infrastructures, sont au total d'environ $27 millions, ce qui est considérable puisqu'un capital de $700,000 souscrit par 167 actionnaires de la région et une participation gouvernementale de $6 millions auront généré des investissements de tout près de $47 millions et de $27 millions dans l'immédiat.

Je constate que mes confrères et collègues comprennent l'importance capitale du traversier-rail pour le développement économique de la Gaspésie et de la Côte-Nord et je les en remercie.

Si l'on ajoute à ces investissements en infrastructures les investissements en navires et en matériel ferroviaire, il faut parler de plus de $47 millions qui seront investis à partir d'un projet mis de l'avant par "l'entrepreneurship" régional. Il n'est pas inutile ici de rappeler que, dans le contexte d'un investissement à court terme de $47 millions, il est à prévoir qu'un peu moins de $6 millions seront investis par le gouvernement du Québec, le reste venant d'autres sources, telles Québec Cartier Mining, le CN et les villes de Baie-Comeau, Hauterive, de même que le fédéral.

Le 23 octobre 1975, un bref d'évocation était émis par la Cour supérieure du Québec mettant en doute la légalité du permis accordé par la Commission des transports, le 28 mars 1974, à la Compagnie de gestion de Matane Inc. Ce jugement s'appuyait sur le défaut de réglementation appropriée, tel que prévu à l'article 15 de la Loi des transports, chapitre 55 des Statuts refondus du Québec, 1972. Le juge de la Cour supérieure, contrairement à ce que l'ordonnance de la commission laissait entendre, en est venu à la conclusion qu'il y avait absence de réglementation; en conséquence, la cour a jugé que la commission n'avait pas le pouvoir d'émettre de permis à la Compagnie de gestion de Matane Inc. Aujourd'hui, la compagnie ne cherche pas à faire échec aux tribunaux en voulant faire valider le permis; elle veut simplement remplir une carence, un vide. Elle demande uniquement d'être autorisée à donner le service. Elle ne conteste pas la pertinence des procédures, et ne cherche pas à contourner la Loi des transports.

Elle vous dit simplement: On prétend qu'il n'y a pas de règlement adopté; or, après enquête, nous avons été choisis par l'organisme spécialement mandaté par le gouvernement du Québec pour ce faire. Donc, autorisez-nous à donner le service. Cette autorisation accordée, les procédures peuvent se poursuivre sur le litige engagé sans, pour autant, paralyser le développement de l'Est du Québec et de la Côte-Nord. C'est là la véritable perspective du problème. En effet, s'il fallait retourner devant la commission après l'adoption de réglementations appropriées ou s'il fallait continuer un débat judiciaire, les délais qui s'ensuivraient empêcheraient le commencement du service suivant le calendrier prévu et mettraient gravement en péril l'organisation d'un service de bateau-rail entre la Côte-Nord et la Côte-Sud. Il faudra compter au moins une année, sinon plusieurs, avant qu'un jugement n'intervienne et que la commission se prononce.

Qu'arrivera-t-il, alors, des engagements financiers pris par le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada, par le CN et la Compagnie de gestion de Matane Inc.? Qu'arrivera-t-il du service tant convoité et attendu du public sur la Côte-Nord? Qu'arrivera-t-il du navire Incan Saint-Laurent qui sera livré en janvier 1977, de la construction des débarcadères prévus? Qu'arrivera-t-il de la souscription de plus de $600,000 de la part du CN prévue pour le 31 janvier prochain? Pourra-t-on encore parler de cette complémentarité des deux rives, dont faisaient grand état les

études de transport de l'Est du Québec, en particulier l'étude Lalonde et Valois? Qu'arrivera-t-il, enfin, de ces 167 citoyens de l'Est du Québec et de la Côte-Nord qui ont cru en l'avenir de leur région et qui ont cru en leur développement, qui ont décidé de le faire eux-mêmes et par eux-mêmes?

Est-il possible qu'après tant d'efforts, tant de capitaux dépensés, tant de volonté de réussir le projet soit mis en échec à cause d'une réglementation qui semble inexistante? Peut-on, aujourd'hui, pénaliser la Compagnie de gestion de Matane Inc. d'avoir tout fait et tout dépensé pour se conformer à la politique générale mise de l'avant par la Législature du Québec par sa Loi des transports? Le geste que l'Assemblée nationale posera aujourd'hui est à la fois historique et essentiel dans l'intérêt du développement économique de l'Est du Québec et de la Côte-Nord. Personne n'ignore l'immense potentiel industriel et économique de la Côte-Nord.

L'Est du Québec doit participer à ce développement, et la complémentarité des deux rives est une chose, par ce projet de loi, acquise. L'un des éléments moteurs de cette complémentarité réside dans le lien structuré et fort entre ces deux régions. L'arrivée d'un service ferroviaire sur la Côte-Nord, c'est pour elle le débouché vers les marchés nationaux et internationaux. Pour l'Est du Québec, c'est un espoir de développement par la participation à celui de la rive nord. Le fleuve Saint-Laurent cesse d'être une barrière pour devenir un élément moteur de développement. L'axe des transports, autrefois d'est en ouest, est maintenant conçu du nord au sud. Il est urgent que tous les éléments mis en place, après de multiples efforts, puissent aboutir.

La Compagnie de gestion de Matane Inc. a, avec ses partenaires, conçu un projet qui est beaucoup plus qu'un navire traversant le fleuve pour aborder ses quais. C'est un complexe intégré de transport. La compagnie a travaillé de concert avec les villes, les corps intermédiaires, les conseils régionaux de développement, les gouvernements fédéral et provincial et son partenaire le CN pour tout mettre en place. Elle est aujourd'hui prête, suivant un calendrier établi, à donner le service en 1977. Tout retard dans l'autorisation de le donner compromettra indubitablement les accords intervenus comme la création de ce service lui-même, sans compter les énormes pertes financières du gouvernement et des autres parties impliquées.

Ce projet est le fruit de "l'entrepreneurship" régional. Depuis 1968, dans le cadre du plan de développement de l'Est du Québec, les gouvernements ont tenté de développer une conscience régionale et une volonté régionale de développement. Or, vous êtes aujourd'hui en présence du résultat de ces politiques de régionalisation. Vous avez là un formidable exemple "d'entrepreneur-ship" régional. Cent soixante-sept personnes, citoyens des deux rives du Saint-Laurent, ont manifesté leur volonté de réussir, en prenant en main l'un des dossiers moteurs du développement de leur région et en souscrivant près de trois quarts de million de dollars.

Nous savons maintenant qu'il appartient à l'Assemblée nationale de concrétiser cette volonté "d'entrepreneurship" qui génère des investissements de l'ordre de $47 millions à court terme. Plus encore que des millions investis, la réussite de Compagnie de gestion de Matane Inc. ne manquera pas de susciter dans notre région et au Québec d'autres projets semblables. Nous croyons qu'en votant le projet de loi no 214, l'Assemblée nationale pose un geste concret et décisif qui rendra ce projet collectif d'une réalité pour l'Est du Québec et la Côte-Nord.

Le Président suppléant (M. Houde, Limoilou):

Le député de Saguenay.

M. Lucien Lessard

M. Lessard: M. le Président, nous avons, encore une fois à nous prononcer sur une loi spéciale, une loi privée concernant une société dont on a passablement parlé, depuis quelques semaines, à savoir, la Compagnie de gestion de Matane Inc. qu'on appelle maintenant communément dans la région: COGEMA.

M. le Président, ce n'est pas la première fois que j'ai à me prononcer à l'Assemblée nationale sur la nécessité d'établir un service de traversier-rail entre les deux rives. En effet, comme le soulignait le député de Matane, cela fait passablement longtemps qu'on discute de l'instauration de ce service.

Une étude avait été préparée par la firme Lalonde et Valois qui recommandait l'instauration de ce service. Lorsqu'en 1971 a été présenté à l'Assemblée nationale le projet de loi no 5 concernant l'établissement de la Société des traversiers du Québec ou plus particulièrement la Société des traversiers Québec-Lévis, à ce moment, j'avais insisté pour que, si un tel service était instauré entre les deux rives, ce soit la Société des traversiers du Québec qui ait la responsabilité d'établir ce traver-sier.

En effet, nous avons vécu, dans le passé, passablement de mauvaises expériences avec des traversiers qui étaient gérés par des entreprises privées et je ne veux pas vous rappeler tout ce que nous avions vécu avec l'affaire du Père-Nouvel. Il était normal, je pense, que nous recommandions pour la mise en exploitation d'un tel service que ce soit la Société des traversiers du Québec qui administre un tel service.

De toute façon, il semble que le ministre ait plus particulièrement recommandé que ce ne soit pas la Société des traversiers du Québec, parce que la société n'était pas préparée à établir ce service, et que ce soit une autre société qui devait se présenter à la Commission des transports pour en réclamer le service.

Les audiences ont eu lieu devant la Commission des transports et la commission s'est basée sur un certain nombre de facteurs avant de recommander que ce service soit confié à COGEMA.

D'abord, la commission s'est demandée si ce service était nécessaire et d'intérêt public. Il a été établi devant la commission parlementaire que la

nécessité de ce service s'imposait pour l'ensemble de la région. Je voudrais simplement vous dire qu'un certain nombre de compagnies très importantes, qui font du commerce entre les deux rives, ont témoigné devant la Commission des transports et ont justement affirmé la nécessité de ce service, particulièrement, par exemple, les compagnies Shell, CIL, et Rayonnier Québec qui s'est établie ou qui fait affaires chez nous, à Port-Cartier, particulièrement depuis quelque temps et aussi des compagnies de ciment, en particulier la compagnie Ciments du Saint-Laurent. Je voudrais, M. le Président, vous signaler quelques témoignages de cette compagnie pour démontrer que ce service était nécessaire.

En effet, la compagnie Ciments du Saint-Laurent démontre que, grâce à l'instauration d'un tel service, le coût de transport du ciment va diminuer de façon assez importante sur la Côte-Nord. Par exemple, elle dit dans son témoignage: Avec le service d'un bateau-rail, Ciments du Saint-Laurent pourrait réduire ses coûts d'environ $9 à $10 la tonne et, ainsi, faire face à la concurrence qui existe sur la Côte-Nord. On sait que, particulièrement dans la région de Sept-lles, actuellement certaines compagnies sont dans l'obligation de faire venir leur ciment des provinces maritimes.

Je voudrais aussi, M. le Président, vous signaler un témoignage qui m'apparaît assez important et qui est cité aux pages 27 et 28 du rapport qui a été présenté par la Commission des transports.

Ce rapport qui est du témoin Charles A. Carrier, économiste, dit: "Avec un traversier-rail Matane-Baie-Comeau, le progrès économique, s'il en est, ne bénéficierait pas nécessairement à la Gaspésie mais à tout le Québec, voire même à tout le Canada".

M. le Président, je pense que ces différents témoignages démontrent la nécessité et l'urgence d'établir ce service. La Commission des transports a analysé aussi quels étaient les endroits les plus propices pour établir ce service et il a été démontré que, pour les régions du côté de la rive sud, Matane était l'endroit le plus propice alors que, du côté de la rive nord, trois endroits particuliers dont Baie-Comeau, Port-Cartier et Sept-lles devaient être les ports d'attache les plus importants.

Il a été aussi démontré devant cette Commission des transports que les deux compagnies qui demandaient le service, c'est-à-dire Agence maritime et COGEMA, étaient toutes deux aptes à établir ce service.

M. le Président, la commission, donc, qui siégeait pour la première fois à cinq juges, a décidé que le service devait être donné à la Compagnie de gestion de Matane Inc. En effet, on trouve à la page 53 de la décision de la Commission des transports ceci: "Pour ces motifs, la commission est d'avis que la demande de Compagnie de gestion de Matane Inc. doit être accueillie et que celle d'Agence maritime doit être rejetée".

M. le Président, il est donc normal qu'avec l'établissement de ce service il puisse se faire un certain nombre d'oppositions. Il y a un certain nombre de compagnies qui, naturellement, protestaient contre l'instauration d'un tel service. Suite à un certain nombre d'erreurs qui sont fondamentales, aui sont importantes, concernant justement l'interprétation de la loi de la Commission des Transports, ce permis accordé à COGEMA a été contesté devant les tribunaux par deux autres compagnies de transport.

Lorsque la loi nous a été présentée, elle avait comme objectif de rendre légal ce qui était considéré comme illégal.

Plus particulièrement, en présentant une loi spéciale, on voulait annuler les poursuites qui étaient déjà intentées ou, du moins, on voulait rendre légal ce qui laissait place à de la contestation judiciaire.

Vous comprendrez qu'il y a, en fait, une coutume ici à l'Assemblée nationale, prévue à l'article 99, quatrièmement, de notre règlement, qui ne permet pas aux députés de parler d'une chose qui est devant les tribunaux. Les députés devaient donc se poser un certain nombre de questions, à savoir s'il était pertinent pour l'Assemblée nationale d'intervenir dans une question judiciaire.

M. le Président, ceci nous posait un certain nombre d'interrogations. Mais comme l'expliquait, tout à l'heure, le député de Matane, il s'agit d'un service public, d'accord, exploité par une entreprise privée, mais qui a pour but, justement, de donner un service à l'ensemble de la population de la Côte-Nord comme à l'ensemble de la population de la rive sud, service qui était demandé par l'ensemble de ces populations.

Je comprends, en tout cas je souhaite que nous n'arriverons pas à nouveau avec des projets de loi spéciaux comme ceux-là et que nous allons corriger la loi. Cependant, il fallait penser aussi au développement économique d'une population, la population de la Côte-Nord comme la population de la rive sud. C'est pourquoi la loi est venue non pas, en fait — c'est là du juridique — annuler comme telles des contestations devant les tribunaux, mais on a présenté un projet de loi privé qui donnait des pouvoirs supplémentaires au ministre des Transports et lui permettait d'accorder à une compagnie privée la possibilité d'établir un service entre deux rives.

Donc, qu'est-ce que la loi venait faire? Elle venait se substituer, ou le ministre, par l'intermédiaire de la loi, venait se substituer à la Commission des transports.

Encore là, cela présente un certain nombre de problèmes à l'Assemblée nationale parce qu'il y a toute une procédure à laquelle on est habitué devant la Commission des Transports et qui n'est pas prévue dans cette loi. C'est pourqoui, comme membre de l'Opposition, j'ai eu un certain nombre de réserves devant cette loi. Par ailleurs, je pense que les juges de la Commission des transports avaient analysé de façon très pertinente toutes les possibilités de ce service et avaient donné une chance à tout le monde de se présenter devant elle pour analyser entièrement toutes les demandes. De même que ce service nous apparaissait urgent et nécessaire, nous nous rallierons à cette loi au nom de l'intérêt public, au nom d'une population qui en a besoin.

Cependant, je voudrais en terminant souligner

un certain nombre de choses ou faire quelques remarques pour la population de la Côte-Nord particulièrement. Nous avons peut-être trop tendance à chercher, comme population de la Côte-Nord, à développer nos moyens de communication rive nord-rive sud. Je ne doute pas — et cela, je suis d'accord avec le député de Matane et les autres députés de la région de la rive sud —que ce soient là des régions qui sont complémentaires et qui doivent développer des services. Mais il ne faudrait pas oublier que, si on continue constamment de développer nos services rive nord-rive sud, il nous sera impossible pour l'ensemble de la Côte-Nord d'obtenir d'autres services de transport tels, par exemple, qu'un chemin de fer puisque nous utiliserons le chemin de fer de la rive sud; il nous sera peut-être aussi difficile d'obtenir des moyens routiers satisfaisants; il nous sera peut-être aussi difficile d'en arriver à un développement économique régional.

En effet, M. le Président, c'est qu'il faut bien penser aussi que la Côte-Nord ne commence pas à Baie-Comeau, ne commence pas à Hauterive mais commence à Tadoussac, qui est l'entrée de la Côte-Nord, et qu'il faut avoir un développement régional.

Si on développe constamment nos moyens de communication rive nord-rive sud, on pourra avoir comme conséquence que toute une partie de l'ouest de la Côte-Nord demeurera sous-développée, avec des moyens de communication sous-développés parce que nous aurons oublié cette partie pour développer nos moyens de communication presque exclusivement rive nord-rive sud.

Or, M. le Président, si nous établissons ce service, il faudrait en même temps aussi — j'aurai l'occasion d'intervenir à un autre moment sur ce sujet — penser qu'il serait peut-être possible d'établir un autre service de traversier entre la ville de Rimouski, tel que demandé par le député maire de Rimouski aussi, et la ville de Forestville, afin justement de donner un service à une population qui est située plus à l'ouest.

Mais il serait important, tant pour la Côte-Nord, je pense, que pour la Gaspésie, que nous réussissions non pas à développer exclusivement nos moyens de transport rive nord — rive sud, mais que nous puissions aussi développer nos moyens de communication pour servir l'ensemble de la population de la Côte-Nord, est-ouest. Merci, M. le Président.

Le Président suppléant (M.Houde, Limoilou):

Cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 214, Loi concernant la Compagnie de gestion de Matane Inc., est-elle adoptée? Adopté.

Des Voix: Adopté.

Le Président suppléant (M. Houde, Limoilou):

Troisième lecture.

M. Lessard: M. le Président, demain.

Le Président: Oui, on peut faire les écritures de la commission plénière.

M. Lessard: D'accord.

Commission plénière

Le Président: Est-ce qu'il y a lieu de considérer le rapport de l'étude par la commission après la première lecture...?

Faites les écritures de la commission plénière. Le rapport de la commission plénière est adopté?

Une Voix: Adopté. Troisième lecture.

Le Président: Troisième lecture à la prochaine séance. Est-ce qu'il y a autre chose?

M. Bienvenue: Article 12, M. le Président.

Le Président: Reprise du débat. Le député qui exerçait la réplique n'est pas là. Qu'est-ce qu'on fait?

M. Levesque: Adopté.

Le Président: Vote. Après la suspension des travaux. Considérons qu'il est dix-huit heures et l'Assemblée suspend ses travaux. Vous n'avez pas d'objection, M. le député d'Ahuntsic?

M. Bienvenue: De Crémazie.

Le Président: De Crémazie. M. Bienvenue: Non.

Le Président: C'est dans le même bout. L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à vingt heures quinze.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

Reprise de la séance à 20 h 23

Le Vice-Président (M. Blank): A l'ordre, messieurs!

M. Bienvenue: Nous avions, en disponibilité, pour ce soir, des projets de loi. Cependant, certains de mes collègues, certains ministres et certains députés qui sont intéressés à ces projets de loi ne sont pas disponibles et, dans certains cas, ne peuvent l'être. Après consultation, pendant la période de suspension à l'heure du dîner, nous avons convenu, le gouvernement a convenu, par la voix de celui qui vous parle, de demander l'ajournement de la Chambre à demain après-midi, quinze heures.

Le Président: Un instant. J'aurais seulement une remarque à faire. La question a été soulevée ce midi. Demain, il y a une motion privilégiée qui, normalement, venait aujourd'hui devant l'Assemblée. J'ai déjà donné mon opinion à l'effet qu'on ne pouvait pas l'appeler demain étant donné que le mercredi, tant qu'il n'y a pas de motion contraire, c'est la journée des députés. Y aurait-il lieu, s'il y a consentement — moi, je ne le sais pas — qu'on puisse vider la question du député de Saint-Jacques et qu'on lui donne son droit de parole, comme si c'était un mercredi normal, entre quinze et dix-huit heures? Si la Chambre est d'accord, on siégerait demain soir pour peut-être vider la motion privilégiée.

M. Bienvenue: Avant de vous répondre et comme je ne suis que le leader adjoint du gouvernement, si vous vouliez suspendre la séance pour quelques minutes.

Le Président: J'en ai parlé avec le leader du gouvernement et il serait d'accord avec cela. Si vous voulez le consulter à votre tour, je ne voudrais pas...

M. Bienvenue: Vous lui en avez parlé à une date très récente?

Le Président: Oui, oui.

M. Bienvenue: En termes de minutes ou d'heures?

Le Président: Oui, de minutes.

M. Bienvenue: Bon, M. le Président, je prends votre parole.

Le Président: Si la Chambre est d'accord.

M. Burns: Votre suggestion, M. le Président, est de siéger demain soir.

Le Président: Disons de siéger à quinze heures demain après-midi, comme un mercredi ordinaire, où il y aurait la période des questions et où on prendrait une décision sur la motion du député de Saint-Jacques jusqu'à dix-huit heures et que la Chambre recommence à vingt heures quinze jusqu'à onze heures, jusqu'à vingt-trois heures sur la motion privilégiée du député de Matane.

M. Burns: Je m'excuse, M. le Président, je ne veux pas vous contre-interroger, mais la raison de cela, c'est quoi? Depuis cet après-midi, il y a des communications qui ne se font plus. Alors, je passe par vous pour vous demander simplement quelle est la raison de cela.

Le Président: Ecoutez! Vous comprendrez ma situation.

M. Burns: Non, M. le Président, si vous pensez que je vous mets mal à l'aise, je vous demande de ne pas répondre à ma question.

Le Président: Non, je vous...

M. Burns: Alors, je vous dis que je vous donnerai ma réponse, en ce qui me concerne, demain.

M. Bienvenue: M. le Président, avant de l'oublier, au moment où je faisais cette motion d'ajournement des travaux de la Chambre à demain, quinze heures, je voulais rappeler qu'il y a deux commissions, celle des affaires sociales et celle des affaires municipales, qui siègent actuellement, ce soir, et qui continueront de siéger demain matin, à dix heures, si leurs travaux évidemment ne sont pas terminés.

Le Président: Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée?

M. Burns: Adopté.

Le Président: L'Assemblée ajourne ses travaux à demain, quinze heures.

(Fin de la séance à 20 h 27)

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