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Version finale

31e législature, 5e session
(24 octobre 1980 au 24 octobre 1980)

Le vendredi 24 octobre 1980 - Vol. 22 N° 1

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures quinze minutes)

Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement.

La séance est suspendue pour quelques instants.

À l'ordre, s'il vous plaît!

Mesdames et messieurs, veuillez vous lever, le lieutenant-gouverneur va maintenant faire son entrée.

Allocution d'ouverture

Le lieutenant-gouverneur: Mesdames et messieurs de l'Assemblée nationale, vous avez été réunis d'urgence dans l'unique dessein d'adopter des mesures nécessaires pour assurer que les négociations entre les commissions scolaires et les syndicats d'enseignants qui se déroulent présentement à la suite de l'entente nationale conclue en mai dernier ne viennent pas mettre en danger l'année scolaire de milliers d'élèves québécois. Cette cinquième session de la 31e Législature que j'ouvre aujourd'hui sera donc, je l'espère, courte et profitable à l'ensemble de nos concitoyens, notamment à ceux qui ont des enfants à l'école.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez vous asseoir.

Je voudrais maintenant donner lecture de quelques avis qui me sont parvenus depuis la prorogation de la Chambre.

M. Serge Fontaine, leader de l'Union Nationale "Québec, le 7 juillet 1980. M. le Président, le député de Richmond, M. Yvon Brochu, m'ayant fait part de sa décision de démissionner de son poste de leader parlementaire à compter du 1er juillet 1980, je me vois dans l'obligation de désigner un remplaçant. C'est le député de Nicolet-Yamaska, Me Serge Fontaine, qui agira dorénavant comme leader parlementaire de l'Union Nationale du Québec. J'inclus, ci-joint, copie de la lettre de démission de M. Brochu. Vous remerciant de votre collaboration, je vous prie d'accepter, M. le Président, l'expression de mes sentiments distingués." Et c'est signé du chef de l'Union Nationale, Michel Le Moignan, député de Gaspé.

M. Jean Alfred, député indépendant

Un autre message: "Québec, le 29 août 1980. M. le Président, je vous avise que désormais j'entends siéger comme député indépendant à l'Assemblée nationale." Et c'est signé du député de Papineau, Jean Alfred.

Des voix: Ah!

M. Camil Samson, député libéral

Le Président: Et maintenant: "Québec, le 15 octobre 1980. M. le Président, veuillez prendre avis que dorénavant je siégerai comme député du Parti libéral du Québec.

Des voix: Ah!

Le Président: "Convaincu que vous en prendrez acte, je vous prie de croire, M. le Président, à l'expression de mes distingués sentiments." Et c'est signé du député de Rouyn-Noranda, M. Camil Samson.

Des voix: Bravo!

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: II manque quelque chose. (10h20)

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! En conséquence de ces changements, je dépose le nouveau diagramme de l'Assemblée nationale.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

Ordre des travaux

M. Charron: M. le Président, je sais qu'en vertu du règlement, à ce moment-ci, vous devriez reconnaître le premier ministre pour le message inaugural. Je voudrais, si l'Assemblée y consent, faire la proposition suivante: Que le premier ministre soit dispensé de la lecture du message inaugural; qu'il y ait plutôt immédiatement une période de questions orales de 45 minutes et que, par la suite, vous me reconnaissiez afin que je puisse présenter la motion que nous a annoncée le lieutenant-gouverneur dans son message. Je fais cette proposition à l'Assemblée, M. le Président, à la suite des consultations menées auprès des partis d'Opposition.

Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.

Auparavant, est-ce qu'il y a consentement à la motion présentée par M. le leader parlementaire du gouvernement?

Des voix: Consentement.

Le Président: II y a consentement et, en conséquence, j'en fais un ordre de la Chambre pour qu'il puisse y avoir une période de questions.

Pour la période de questions, M. le chef de l'Opposition officielle.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS La situation constitutionnelle

M. Ryan: M. le Président, nous nous réunissons, aujurd'hui, dans une atmosphère plutôt artificielle. Normalement, si le gouvernement

avait suivi la tradition solidement établie au Québec et au Canada, nous serions présentement engagés dans une période électorale qui permettrait au public, après quatre ans de gouvernement péquiste, de décider lequel des partis en présence est le plus apte à diriger le Québec au cours des prochaines années. Le gouvernement, invoquant la situation spéciale créée par les projets du gouvernement fédéral en matière constitutionnelle, a décidé de s'accrocher au pouvoir et - pour reprendre une expression ancienne du premier ministre lui-même - de vieillir au pouvoir plutôt que de courir le risque de mourir en affrontant les électeurs. Je voudrais demander au premier ministre, ce matin - il me semble que nous devons profiter de cette brève session que nous aurons aujourd'hui pour au moins faire le point sur les événements des dernières semaines et sur les événements à venir - d'abord, si nous l'avons bien compris quand il a dit que la situation constitutionnelle dont prend prétexte le gouvernement pour différer des élections qui auraient dû avoir lieu cet automne est vraiment la seule raison. Dans l'hypothèse affirmative, je voudrais que le premier ministre nous résume le point où en sont les démarches du gouvernement, à trois niveaux différents. D'abord, auprès du gouvernement fédéral, je voudrais qu'il nous dise s'il y a eu des communications avec le gouvernement fédéral, s'il y a eu de la correspondance échangée, si le gouvernement a fait des représentations au gouvernement fédéral depuis que la conférence constitutionnelle du mois de septembre s'est terminée sur un échec lamentable.

Deuxièmement, je voudrais savoir où l'on en est au point de vue de la préparation des démarches qui doivent être faites auprès des tribunaux - et dont parlaient les journaux de ce matin - à la suite d'une rencontre tenue hier à Winnipeg.

Troisièmement, je voudrais qu'on nous dise où en sont les démarches qui seraient en cours au niveau du représentant du Québec à Londres.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, c'est évident que j'avais le choix, il y a quelques jours, d'entrer en campagne selon une tradition ou de retarder. Je pense qu'on était relativement prêt, de part et d'autre - enfin, c'est l'impression que j'ai eue - pour entrer en campagne, mais puisque la décision me revenait, j'ai considéré que devant ce qui est incontestablement un coup de force d'Ottawa - avec la guillotine d'hier soir, on a même l'impression que c'est quasiment comme un coup d'Etat comme échéancier follement accéléré - j'ai eu à prendre la responsabilité de décider et j'ai cru - je crois encore - profondément que cela n'aurait pas été responsable d'avoir une vacance parlementaire pendant un mois ou un mois et demi avec ce qui nous pend au bout du nez possiblement vers le 8 ou le 9 décembre à Ottawa et de se ramasser à peu près vers le même moment quand le mal pourra voir été fait. Je crois qu'il faut faire tout ce qu'on peut pour bloquer les chambardements unilatéraux de la constitution qui sont, je crois - ce n'est pas moi qui l'ai dit le premier - une trahison de ce qu'on avait le droit d'espérer, de ce à quoi on était en droit de s'attendre après la campagne référendaire et les promesses qui avaient été faites. Il ne s'agit pas de s'accrocher au pouvoir. Je peux assurer le chef de l'Opposition et aussi nos concitoyens que cela ne durera pas...

Une voix: Ah!

M. Lévesque (Taillon): ...plus longtemps qu'il ne faut parce que vieillir au pouvoir, comme l'a dit le député d'Argenteuil, on commence à savoir ce que c'est et personne ne va s'accrocher. Démocratiquement, c'est normal qu'il y ait des élections et qu'à un moment donné on se dispute le pouvoir, chacun pensant qu'il peut mieux l'exercer. Mais une chose est certaine, c'est qu'il n'est pas question de s'y accrocher au-delà de ce qui nous paraît... Je pense que certaines réactions du chef de l'Opposition...

Une voix: La peur.

M. Lévesque (Taillon): ...entre autres, donnent l'impression que derrière cette façade qui est normale, je pense bien dans les circonstances, lui aussi considère - enfin, devrait considérer, je ne veux pas parler pour lui - qu'on est dans une situation qui peut être extrêmement dangereuse pour le Québec si on ne contre pas certains efforts qui sont faits pour chambarder le régime au lieu de le réformer et de le renouveler.

Maintenant, pour ce qui est des questions spécifiques du chef de l'Opposition, auprès du fédéral, autant que je sache, depuis soit la fin de la semaine du 8 au 12 septembre ou soit encore depuis le 2 octobre ou le 6, si vous voulez, au moment où le projet de chambardement a été présenté en public et, ensuite, à la Chambre des communes, la réponse, correspondance, échange, etc., en ce qui nous concerne, c'est zéro. Je crois que c'est la même chose d'ailleurs dans la plupart des provinces, qui forment la majorité, à la fois une majorité des provinces et une majorité de la population du Canada, qui s'opposent à la démarche du gouvernement fédéral, et tout spécialement du premier ministre fédéral. Et autant que nous sachions, les seuls "bargainings", les seules tractations qui se soient déroulées depuis le début d'octobre ont été avec - je pense que c'est bien connu - le NPD, pour voir s'il n'y avait pas moyen d'ajuster au moins un appui dans l'Ouest, en passant par M. Blakeney, qui n'a pas l'air d'être absolument convaincu jusqu'à nouvel ordre, et forcément aussi, mais là, je le dis de "confiance", entre guillemets, il a dû y en avoir avec l'Ontario, pour des raisons qu'on connaît. Mais, autant que nous sachions, du côté des provinces qui s'opposent, c'est une espèce de train express qui prétend s'en aller, guillotine comprise, vers les décisions choisies par le gouvernement fédéral.

Pour ce qui est des tribunaux, je ne peux pas ajouter. Je n'ai pas eu de rapport parce que j'étais trop pris jusqu'à assez tard hier - je pense qu'on l'imagine assez facilement - par la question qui, elle aussi, est d'urgence, qui nous réunit aujourd'hui, c'est-à-dire la question des deux commissions scolaires en particulier qui, depuis des semaines, se trouvent à mettre en danger l'année scolaire des enfants. Je n'ai pas eu de rapport de mon collègue, le ministre de la Justice, seulement je sais, comme d'ailleurs cela a été rapporté de Winnipeg, que des six provinces

qui s'opposent, et qui ont décidé de s'opposer devant les tribunaux à ce qui se passe à Ottawa, il y en a trois - je sais que nous, nous avions fait la préparation préliminaire de cette présence devant les tribunaux - dont le Québec et aussi le Manitoba et Terre-Neuve, qui prendraient l'initiative avec l'appui des trois autres.

Quant à Londres - il n'y a pas de secret là-dedans, mais je n'ai pas de rapport très précis dans l'immédiat - il y a une décision qui avait été prise à Toronto quand on s'est réuni, il y a quelques jours, et c'était qu'on mettait en commun tout ce qu'on pouvait avoir, soit de contacts ou d'appuis potentiels du côté du Parlement britannique. Cela a dû être fait hier à Winnipeg, mais là non plus je n'ai pas eu de rapport, alors je ne peux pas aller plus loin que ce que je pense que tout le monde sait déjà. On a fait notre maximum, avec la délégation à Londres, pour établir des contacts, y compris du côté des constitutionnalistes, des parlementaires, etc., et voir ce que cela peut donner.

Le Président: M. le chef de l'Opposition. (10 h 30)

M. Ryan: Si je comprends bien, M. le Président, le premier ministre et son gouvernement, depuis à peu près trois ou quatre semaines que ce projet du gouvernement fédéral est devenu public, il n'a même pas pris le téléphone pour appeler son homologue fédéral, il n'a même pas pris sa plume pour lui adresser des représentations officielles au nom du gouvernement du Québec, il n'a même pas cherché à établir des contacts au moins de manière officieuse ou indirecte. Il y a, quand même, 74 députés du Québec, il y a, quand même, un grand nombre de ministres du Québec qui siègent dans le cabinet fédéral. On nous dit qu'on est en face de la situation la plus grave qui ait existé sur le plan constitutionnel depuis très longtemps. On nous dit qu'on s'accroche au pouvoir parce qu'il y a des choses très importantes à faire. On écoute le rapport qui nous est donné à l'instant et on s'aperçoit qu'il n'y a pratiquement rien eu de fait depuis trois semaines ou un mois.

M. Levesque (Bonaventure): C'est cela.

M. Ryan: Est-ce que c'est cela que vous entendez continuer à faire au cours des prochaines semaines?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Je crois, M. le Président, que l'interlocuteur le plus indiqué du gouvernement fédéral, en particulier du premier ministre fédéral, dans les circonstances actuelles, ce n'est pas celui qui vous parle et ce n'est peut-être pas, non plus, le chef de l'Opposition. De toute façon, jusqu'à nouvel ordre...

M. Pagé: C'est qui? Qu'est-ce que vous faites, vous?

M. Lévesque (Taillon): C'est M. Davis, de l'Ontario, avec qui, je crois, le chef de l'Opposition a des relations plus intimes que moi, le long du chemin. C'est probablement aussi maintenant peut-être le NPD à Ottawa. Nous, on a fait ce qu'on pouvait et on continue de le faire, publiquement ou en privé, avec des membres de l'Opposition, en particulier à Ottawa. Je dois remarquer, avec une certaine mélancolie, que ce qui peut très dangereusement affecter les droits du Québec nous est imposé ou prétend nous être imposé par un premier ministre d'origine québécoise et que celui qui défend le mieux, jusqu'ici, ce qui correspond aux intérêts du Québec, c'est un anglophone de l'Ouest, le chef conservateur. On est obligé de le dire parce que c'est vrai.

De ce côté-là, autant qu'on peut, on maintient des relations. On n'a pas d'objection à avoir des relations - il y en a d'ailleurs - sur les plans sectoriels avec des ministres fédéraux, mais on se rend compte, même dans la façon dont, pour l'instant, une série de projets conjoints qui devraient être en marche sont bloqués littéralement par plus qu'une mauvaise volonté, par une sorte de volonté absolument précise et pernicieuse de ralentir les choses en ce qui concerne toute coopération fédérale-provinciale jusqu'à nouvel ordre, que jusqu'au début de décembre, en ce qui concerne les relations avec les libéraux fédéraux, tout est bloqué et on n'y peut rien. Les libéraux provinciaux pourraient agir et moi, je terminerais ma réponse de la façon suivante. On pourra peut-être s'entendre là-dessus beaucoup mieux si, par hasard, il arrivait, à la suite de certaines déclarations extrêmement précises, et, je crois, dans l'intérêt du Québec, qui ont été faites au moment de la commission parlementaire sur la question constitutionnelle, il y a quelques mois, et récemment depuis le coup de force qui a été effectué ou qui est en marche du côté de libéraux fédéraux, on aurait peut-être plus de chance d'agir d'une façon concrète si on pouvait se mettre ensemble pour, au moins, affirmer les intérêts du Québec, ici, à l'Assemblée nationale.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Ce qui étonne, M, le Président, c'est ce bilan d'une inaction absolument étonnant alors qu'on invoque une situation d'urgence et de nécessité pour le gouvernement de s'agripper aux commandes pour être en mesure d'agir immédiatement.

Je demande au premier ministre, en terminant, le plus simplement du monde, après un tel bilan, au cours des dernières semaines, et dans la perspective où son gouvernement va continuer de vieillir et de perdre de sa crédibilité en s'accrochant au pouvoir, comment il peut prétendre mobiliser la force qu'il faudra pour défendre les intérêts du Québec dans une situation aussi difficile, au cours des prochains mois. Envisage-t-il, si les choses ne sont pas plus encourageantes pour lui au plan électoral qu'elles le sont depuis deux ans et demi, de continuer à s'accrocher au pouvoir, même au-delà de ce que permet la constitution?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): On a assez de coups de force sur un autre plan de gouvernement, je ne pense pas qu'on s'en irait dans l'illégalité; donc, le chef de l'Opposition n'a pas à s'inquiéter. Je pense que son inquiétude est

quelque peu factice. Je laisse à l'opinion publique le soin de décider qui vieillit le plus vite et qui vieillit le mieux ou le plus mal! Ce n'est pas à moi d'en juger.

Des voix: Ah, ah, ah!

M. Lévesque (Taillon): Voici, pour ce qui est du travail qu'on veut faire pendant la période qui passe et qui est une période d'urgence. Conformément, d'ailleurs, à des conseils que nous prodiguait le chef de l'Opposition et à une idée qu'on avait eue déjà à peu près en même temps, dès le lendemain du coup de force de M. Trudeau, on a mis en marche, avec une équipe de premier plan, le travail de recours judiciaire, pour autant qu'il puisse donner des résultats et cela demande le temps que ça demande; il fallait l'amorcer le plus vite possible avec les moyens d'un gouvernement. Deuxièmement, sans entrer dans le détail, on a fait tout ce qui était possible, et on va continuer, avec les autres provinces qui s'opposent à la manoeuvre de M. Trudeau, de travailler du côté du Parlement britannique, parce que, le cas échéant, ça peut aller jusque-là. Je répète ce que j'ai dit, je crois qu'il y a un avantage à ce qu'il n'y ait pas de vacance parlementaire, dans les semaines qui passent, parce que, d'ici un mois et demi, on peut être devant une échéance finale. Et, là, je crois qu'il serait important que l'Assemblée nationale - ce sera le premier thème de notre session régulière, je l'ai dit, hier, au chef de l'Opposition - conformément à des attitudes prises au moment des commissions parlementaires et avant comme après ce projet fédéral, puisse trouver, si brièvement que ce soit, une unanimité pour affirmer la défense des droits du Québec. Mais cela reste à voir les 5 et 6 novembre prochains.

Je crois que dans les circonstances, si tout cela peut se réaliser convenablement, on défend mieux les intérêts du Québec qu'en allant, pendant les semaines qui passent - cela viendra toujours assez vite et, je le répète, on ne s'accrochera pas plus longtemps qu'il faut - dans le paysage et d'avoir un maximum de confusion suscitée par la maison mère de nos amis d'en face, les libéraux fédéraux, comme l'a dit, il y a deux jours, le premier ministre du Canada lui-même en regrettant qu'on ne puisse pas avoir des élections pour qu'il puisse venir les "confusionner" au maximum, s'en mêler et mêler les gens au mileu de tout cela.

Le Président: M. le chef de l'Opposition. Une voix: II n'est pas...

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

Des voix: Ah!

Réduction des prestations d'aide sociale

M. Samson: M. le Président, j'espère qu'ils m'applaudiront après ma question autant qu'ils m'ont applaudi tantôt, s'ils la comprennent. En l'absence du ministre des Affaires sociales, M. le Président, j'aimerais poser ma question à l'honorable premier ministre.

Nous savons que le ministère des Affaires sociales tente par plusieurs moyens, ces temps-ci, de faire signer les assistés sociaux pour qu'ils acceptent de voir réduire leurs prestations d'aide sociale pour des montants qui peuvent varier. Si les assistés sociaux n'acceptent pas le 1er novembre - c'est dans quelques jours - le ministère va d'office réduire, selon les catégories, les prestations de $5 ou $10 par mois et, le 1er janvier, encore une fois, réduire les prestations d'aide sociale de $10 ou $25 par mois pour ceux pour qui il y a des réclamations.

Je suis intervenu auprès du ministre des Affaires sociales avec un télégramme du 26 septembre. Je lui ai demandé de mettre fin à cette pratique et j'ai reçu, M. le Président, une réponse écrite qui est datée du 15 octobre. Je ne vous lirai pas toute la réponse; elle est assez longue, mais je pense qu'on peut comprendre dans quelques paragraphes quel est le sens et l'essence de cette réponse. M. le ministre des Affaires sociales dit ceci: Les assistés sociaux à qui on réclame de l'argent se classent en trois catégories; un tiers qui est composé de personnes qui sont retournées sur le marché du travail, dont on perçoit des sommes d'argent; un deuxième tiers qui se trouve dans une zone grise, la zone grise étant constituée de ceux qui sont décédés, de gens qu'on ne trouve pas ou de gens gui ont fait faillite, et le troisième tiers, ce sont ceux qu'on va "collecter". Les pauvres, ceux qui reçoivent encore des prestations d'aide sociale, ceux qui sont obligés de vivre avec les actuelles pitances de l'aide sociale sont ceux que le ministre veut "collecter". (10 h 40)

Je veux demander au premier ministre s'il a l'intention de demander au ministre des Affaires sociales de rappeler ce dossier qui constitue une honte pour une société qui se doit de prendre soin de ses démunis et de ces gens qui sont dans la misère. Est-ce que le premier ministre peut me dire s'il a l'intention d'intervenir lui-même dans ce dossier, pour qu'on n'assiste pas à ce genre de harcèlement envers les assistés sociaux?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, pour ce qui est des détails très spécifiques que pourrait vouloir obtenir le député de Rouyn-Noranda - pour aujourd'hui, numéro deux du Parti libéral, simplement pour la période de questions, bien sûr...

Des voix: ...

M. Lévesque (Taillon): ... mais tout en se permettant un instant - qu'on comprendra - de divertissement, je crois que la question du député de Rouyn-Noranda mérite une réponse plus que sérieuse, parce qu'il s'agit en effet de cas douloureux. Je prends avis de la question pour mon collègue des Affaires sociales en ce qui concerne tout ce qui peut être - je m'excuse de l'expression - la "plomberie" de ce dossier, parce que c'est lui qui en est responsable. Je dirai simplement ceci: Je crois que cette année, dans le budqet du Québec, le coût de l'assistance sociale, qui est un coût absolument essentiel -c'est évident, dans une société civilisée - va dépasser $1,000,000,000, mais, ça, on n'y peut

rien. Seulement, quand c'est rendu à ce point, on ne peut pas non plus jouer avec ça - l'argent, ce n'est pas de l'onguent - ce sont quand même des fonds publics qu'on va chercher dans la poche de ceux qui peuvent payer pour aider nos concitoyens qui ne peuvent pas réussir à tenir le coup devant la vie d'aujourd'hui. Ce qui veut dire qu'il faut l'administrer, là comme ailleurs, le mieux possible.

Je soulignerai simplement ceci - peu importe les zones grises, noires ou blanches qu'évoquait le député de Rouyn-Noranda - c'est que dans l'immense majorité des cas, sauf erreur, il s'agit de prêts, d'avances qui avaient été faites. Je donne un exemple très simple; dans le délai de carence qui peut précéder l'assurance-chômage, il est courant qu'on accorde des avances - qui sont des prêts, qui sont reconnues comme des prêts - qui sont faites à des gens en attendant l'assurance-chômage. Quand l'assurance-chômage est expirée, je suppose qu'on en arrive, si on n'a pas trouvé d'emploi, à l'assistance sociale, mais il y a quand même des prêts qui ont été consentis. Dans l'immense majorité des cas, je crois que c'est de ça qu'il s'agit.

Est-ce que c'est normal d'aller rechercher cet argent? Cela vous a paru une façon trop brutale, trop rapide, ce qui a été fait, sans même qu'on ait eu la chance de le voir cet été, quand on disait: On coupe tout de suite. Alors, on a retardé l'opération. On a averti les gens en demandant s'ils ne pouvaient pas prendre des arrangements, et on leur a demandé aussi au moins, de se donner la peine - après tout ce n'est pas la fin du monde - d'aller trouver le bureau de l'assistance sociale et de dire: Oui, je peux le faire; ou alors, sinon, voici les raisons pour lesquelles je ne peux pas le faire. On a demandé que ce soit traité de la façon la plus humaine possible, il n'y a pas d'excès possible de ce côté mais, enfin, avec le maximum d'humanité. Je ne sais pas où ça en est, mais je suis sûr que le ministre des Affaires sociales pourra répondre plus en détail au député de Rouyn-Noranda - peut-être dans l'intersession, si le député veut l'appeler - mais il n'y a pas de raison de ne pas rendre public ce qui se fait.

M. Samson: M. le Président, je pense que le premier ministre devrait nous expliquer comment on peut comprendre qu'il trouve affreux, en quelque sorte, qu'on coupe l'aide à ces gens et que, d'autre part, dans d'autres dossiers, dans des réclamations qui dépassent les $30,000,000, on règle ça, hors cour, pour $200,000...

Des voix: ...

M. Samson: ... dans le cas de la Baie James. D'autre part, dans d'autres dossiers, il y a des dépenses extravagantes. Par exemple, dans la propagande, on pourrait peut-être couper là un peu et moins couper dans le cas des assistés sociaux.

Mais, M. le Président, est-ce que le premier ministre trouve normal - parce qu'il vient de dire qu'il faut être réaliste et qu'il faut couper les dépenses - que, dans le cas des assistés sociaux... On va prendre un exemple: une veuve avec trois enfants, ça donne $451 par mois; si elle a six enfants, les trois derniers valent $2 chacun, par mois; suivant votre barème actuel, cela fait $457. Est-ce que vous trouvez normal qu'on aille amputer cette pitance de $25 par mois à des gens qui sont dans le besoin et qui sont dans la misère? Est-ce qu'on trouve cela normal, du côté du Parti québécois, ou si on ne serait pas mieux de convoquer au moins une commission parlementaire pour permettre à tous les députés de venir parler de ce problème? La, on verrait des députés du Parti québécois, comme celui d'Arthabaska, qui viendraient dire au ministre des Affaires sociales, en pleine Chambre et en public, ce qu'ils pensent de cela. Cela se fait en catimini et on coupe dans les pensions des miséreux.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): En tout cas, je reconnais un style qui ne change pas, même si les partis changent, de la part du député de Rouyn-Noranda. Cela peu avoir son efficacité à court terme. Il y a un mot dans le dictionnaire que connaît bien le député de Rouyn-Noranda. Je ne l'emploierai pas parce qu'il soulèverait une question de privilège. Mais c'est une façon de faire de la politique.

C'est évident que c'est dur et c'est douloureux pour n'importe qui de devoir...

Des voix: Ah!

M. Lévesque (Taillon): ... couper ses dépenses pour le remboursement de ce qui a été un prêt. Mais il reste ceci: c'est que, si vous faites le compte par rapport à quelqu'un qui gagne le salaire minimum et qui est devant des remboursements à faire et qui, Dieu sait, n'est pas beaucoup plus avancé que quelqu'un qui a une famille et qui bénéficie de l'assistance sociale, lui, il doit rembourser normalement quand il a emprunté. Qu'on soit riche ou qu'on soit pauvre, qu'on soit puissant ou misérable, comme disait l'autre, je pense qu'il faut rembourser quand on a emprunté. Maintenant, je le répète, c'est fait avec - j'espère que c'est vrai; si cela n'est pas vrai, on corrigera - le maximum de délais, de consultations, de chances de pouvoir dire: On ne peut pas le faire, donc de permettre d'étendre les délais. Mais je crois que le principe doit demeurer que, si on a emprunté, normalement on doit rembourser si on le peut. C'est tout.

M. Beauséjour: M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député d'Iberville.

M. Samson: Est-ce sur la même question?

Le Président: Un instant, s'il vous plaît, M. le député de Rouyn-Noranda. M. le député d'Iberville, est-ce qu'il s'agit d'une sous-question à la question du député de Rouyn-Noranda?

M. Beauséjour: Non, c'est une question principale.

Le Président: C'est une question principale. Alors, vous devrez attendre que j'aie accordé une question à l'Union Nationale. Dernière question.

M. Samson: Est-ce que je dois comprendre...

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: ... des propos du premier ministre, M. le Président, que, pour l'actuel gouvernement, on traite de façon différente ceux qui sont démunis, ceux qui n'ont pas le moyen de se défendre et ceux qui ont le moyen de se défendre, comme dans le cas des assistés sociaux versus le cas du saccage de la Baie James? Est-ce que je dois comprendre que les assistés sociaux devraient saccager quelque chose pour que le gouvernement les prenne en considération?

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, premièrement, on sait les raisons pour lesquelles le règlement est intervenu comme il est intervenu en ce qui concerne la Baie James et je n'oserai même pas qualifier le genre d'appel quasiment qu'a fait le député de Rouyn-Noranda en terminant ce qu'il appelle une question.

Une voix: Irresponsable.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, le premier ministre, dans ses réponses, laisse croire qu'il s'agit, dans ce cas, de remboursements d'emprunts, d'avances faites à des assistés sociaux qui se seraient déjà engagés à rembourser. Il devrait savoir, je crois, qu'il ne s'agit pas de façon majoritaire d'emprunts, mais de ce que l'aide sociale appelle les trop-payés, c'est-à-dire des erreurs commises soit par les fonctionnaires, soit par les assistés sociaux dans le calcul des prestations. Dans ce cas-là, ce que l'aide sociale fait, c'est pénaliser les assistés sociaux pour des montants que, autrement, on considère comme non saisissables. Le gouvernement, étant le payeur, décide de se payer de façon privilégiée...

Une voix: C'est cela.

M. Forget: ... pour des erreurs que, parfois, ses préposés ont commises. Je pense qu'il devrait corriger sa réponse en tenant compte de ce fait-la.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je dois vous dire gu'on invente facilement sur ce sujet n'importe quoi. Je sais qu'il y a eu des cas d'erreurs et, autant que je sache, les cas d'erreurs qui étaient dues à l'administration publique, on a demandé de les oublier. Ce sont non seulement de mauvaises créances, mais ce sont des erreurs qu'on n'a pas le droit de faire payer à la clientèle, et Dieu sait que ce n'est pas une clientèle qui est riche. Dans la majorité des cas - je suis sûr de cela pour la bonne et simple raison que c'est cela qu'on a pris comme décision au Conseil des ministres - on a demandé d'effacer à peu près totalement les cas qui sont des erreurs dues au gouvernement, des erreurs d'administration. Je l'ai dit tout à l'heure au député de Rouyn-Noranda, la majorité des cas, pour autant que je sache, rejoignent ce qu'on peut appeler des avances et qui étaient reconnues comme des emprunts.

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. (10 h 50)

Possibilité de moratoire au sujet de la loi 125

M. Le Moignan: Ma question s'adresse également au premier ministre, qui rencontrait, il y a quelques jours a peine, quelques milliers de représentants du monde rural. Le premier ministre a pris la parole à cette occasion.

Le premier ministre a été à même de constater l'inquiétude évidente qui règne dans le milieu rural, alors qu'on est pris avec l'application de certaines lois comme le zonage agricole, les lois sur l'environnement, la fiscalité municipale et d'autres encore. Étant donné que les municipalités régionales de comté devront fonctionner à partir du 1er janvier 1981, et étant donné aussi que les élus...

Une voix: Première erreur.

M. Le Moignan: Première erreur. Le premier ministre me corrigera sur la date, que je n'ai pas à lui indiquer.

Le premier ministre sait très bien qu'il y a certains remous, chez les élus municipaux surtout, qui craignent de ne pouvoir agir de façon autonome lorsqu'une structure régionale leur imposera un cadre de développement.

Je voudrais savoir ceci du premier ministre, étant donné que trop de questions demeurent sans solution; en plus de celles que j'ai nommées, il y a le financement, le mode de représentation et le scrutin, et, ensuite, on ne connaît pas encore les résultats des réformes municipales dans leur entier. Le premier ministre a dit qu'il ne s'agit de "bulldozer" personne, le premier ministre a dit aussi qu'on est décidé, de son côté, à prendre le temps de diriger ces changements. Entend-il se rendre au désir de l'Union des conseils de comté du Québec en déclarant un moratoire au sujet de la loi 125? Et, dans l'affirmative, de quelle sorte de moratoire s'agira-t-il dans les faits?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vais demander à mon collègue, le ministre d'État à l'Aménagement, de compléter la réponse très générale que je vais faire au départ.

Pour ce qui est des dates, le chef de l'Union Nationale s'en est rendu compte lui-même, je crois qu'il a fait une anticipation extraordinairement dramatique en parlant du 1er janvier 1981 qui s'en vient très bientôt. Cela ne s'applique pas de cette façon-là. Il a mentionné trois lois ou trois mesures. Pour la protection du territoire aricole, la loi de l'aménagement et la loi qui a aménagé un supplément de revenu important pour les municipalités, la réforme de la fiscalité municipale, il s'agit de trois gros morceaux, de changements, de réformes qui étaient demandés et souvent attendus depuis des fois dix ans, quinze ans. Je me souviens, je ne sais pas combien de fois, que dans les années qui ont précédé 1976 les municipalités, rurales ou urbaines, se sont plaintes d'une façon de plus en plus insistante, du fait qu'elles s'en allaient

littéralement dans le trou et que l'endettement, le manque de revenu étaient en train de les égorger. De la même façon, je me souviens qu'un ex-ministre de l'ancien gouvernement nous a dit publiquement - on l'a apprécié - qu'il avait essayé tant bien que mal, mais contre toutes les pressions il n'avait jamais réussi à faire adopter une mesure aussi fondamentale pour une société civilisée qui veut se respecter que le zonage agricole ou la protection du territoire agricole.

Je crois aussi que, pendant dix ans, on a attendu et passé à travers de je ne sais combien de brouillons d'une loi de l'urbanisme ou de l'aménagement qui n'a jamais réussi à aboutir. Au moins ces trois choses sont faites, ce qui ne veut pas dire, Dieu sait, qu'une fois que cela est fait cela n'a pas besoin d'être ajusté, harmonisé dans certains cas, de façon qu'il y ait une espèce de rythme de croisière qui puisse s'établir.

Maintenant, pour ce qui est de ce rythme de croisième, de questions comme la représentation dans les nouveaux conseils de comté ou les municipalités régionales qui se posent au point de vue des échéanciers, là, le député de Gaspé, le chef de l'Union Nationale, me permettra de demander à mon collègue de l'Aménagement de donner les renseignements, je pense, qui sont pertinents.

Le Président: M. le ministre d'État à l'Aménagement.

M. Léonard: M. le Président, je voudrais d'abord corriger la première assertion de M. le chef de l'Union Nationale. Il n'y a pas de date limité fixée au 1er janvier 1981. Au contraire, dans la loi, il n'y a pas de délai qui a été indiqué, sauf un délai implicite qui fait que les municipalités régionales de comté devront avoir commencé leur schéma d'aménagement le 15 avril 1983. Donc, il faut qu'elles aient leurs lettres patentes avant.

Maintenant, nous nous sommes engagés à faire une consultation pour un article de la loi 125, et nous l'avons mise en route au cours du printemps dernier, mais surtout au cours du mois d'août. Alors, cette consultation porte justement sur la délimitation des territoires des municipalités régionales de comté et les modes de représentation ainsi que d'autres éléments qui peuvent entrer dans les lettres patentes. Cette consultation est commencée; je crois qu'elle va bien, mais, encore une fois, il n'y a pas urgence quant au 1er janvier 1981.

Je voudrais simplement, par rapport à la question du chef de l'Union Nationale, dire une chose sur l'inquiétude ou l'incertitude qu'il soulève ou qu'il croit voir. Les municipalités régionales de comté proviennent en fait des conseils de comté parce qu'en ce qui concerne les matières régies par le Code municipal, les conseils de comté, qui vont devenir des municipalités régionales de comté, vont s'asseoir, ou les municipalités qui vont en faire partie vont s'asseoir autour de la même table et vont discuter, à l'exclusion des villes, de ces matières. Dans la municipalité régionale de comté, les villes et les municipalités rurales sont ensemble seulement pour les fins de l'aménagement. Il me semble que c'est un élément important.

En ce qui concerne les territoires, il me semble que c'est une première démarche qu'il faut faire. Il faut d'abord délimiter les territoires; la consultation s'engage à l'heure actuelle là-dessus. Par la suite, des modes de représentation seront fixés, mais ce sont toujours les municipalités qui font la consultation. Les comités de consultation, d'ailleurs, comprennent un représentant de l'Union des conseils de comté ou des municipalités rurales, un représentant des villes sur le territoire et le président nommé par le gouvernement. Si ces éclaircissements peuvent vous aider, tant mieux!

Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.

M. Le Moignan: Oui, une question additionnelle au ministre d'État à l'Aménagement. J'ai quelques petites questions et le ministre pourra répondre à toutes ensemble.

Premièrement, les commissions scolaires actuelles seront-elles éventuellement incorporées, de gré ou de force, aux futures municipalités régionales de comté?

Deuxièmement, comment les municipalités régionales se financeront-elles?

Troisièmement, devront-elles inventer de nouvelles sources de revenus?

Quatrièmement, qui versera les salaires des fonctionnaires des municipalités régionales de comté?

Enfin, quelles seront les structures administratives des municipalités régionales de comté? Est-ce qu'il s'agira, par exemple, d'un président élu au suffrage...?

Je ne sais pas si je suis allé trop vite, mais en tout cas...

Le Président: M. le ministre d'État à l'Aménagement.

M. Léonard: Je pense qu'il y en a une que j'ai sautée. En ce qui concerne les commissions scolaires, je rappelle que les comités de consultation, à l'heure actuelle, sont formés par des élus municipaux pour deux de leurs membres et d'un représentant nommé par le gouvernement. Les commissions scolaires vont pouvoir exposer leur point de vue au cours de la consultation, mais au conseil de la municipalité régionale de comté, il n'y a pas de représentant de commission scolaire puisque ce sont les élus, les maires de chacune des municipalités qui en feront partie, à l'exclusion de tout autre représentant. C'est ce que dit la loi. C'est aussi ce qu'il y avait dans les conseils de comté auparavant et qu'il y a même actuellement.

En ce qui concerne le financement des municipalités régionales de comté, le conseil de comté a ses propres sources de financement à l'heure actuelle, qu'il continuera d'avoir dans la municipalité régionale de comté. Là où il y a une nouvelle responsabilité, qui est celle de confectionner des schémas d'aménagement, le gouvernement a dit qu'il y pourvoirait en cours de route. Je ne peux pas vous dire ce qui arrivera dans 25 ans, quant au financement relativement à cette responsabilité, mais il reste que, pour l'instant, le gouvernement a dit qu'il donnerait aux municipalités régionales de comté les fonds nécessaires pour faire leur schéma d'aménagement. On ne parle pas de nouvelles sources de revenus autres que celle qui vient du

gouvernement, et la seule responsabilité qui est ajoutée aux municipalités régionales de comté, c'est de faire un schéma d'aménagement.

Les structures administratives font partie - il y en a déjà dans les conseils de comté actuels - des modalités qui seront prévues aux lettres patentes qui seront émises à la suite de la consultation.

Le Président: M. le député d'Iberville. (11 heures)

Les trains de Sainte-Thérèse et de Farnham

M. Beauséjour: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

Le Pacifique canadien a l'intention de cesser son service de train de banlieue entre Montréal et Sainte-Thérèse et Montréal-Farnham d'ici le 26 octobre. Dans la Presse d'hier, on disait que pour Farnham, ce serait aujourd'hui. Dans la Presse, on indique aussi que le ministre a adressé au Pacifique canadien une demande de révision de sa décision. Je voudrais savoir du ministre s'il y a d'autres démarches qui ont été faites, soit aux autorités fédérales, et quels en sont les résultats?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: M. le Président, je pense qu'il faut déplorer tout d'abord une décision, en l'occurrence celle du Pacifique canadien, dans le contexte actuel. Qu'on pense en particulier à l'importance de maintenir les services de transport en commun partout et de leur donner de l'extension là où il en existe. On doit déplorer cette décision, à cette époque-ci, de terminer des services de transport en commun entre Montréal et diverses villes de sa périphérie et en particulier en ce qui nous concerne, Farnham et Sainte-Thérèse, de l'autre côté, du côté nord.

Il faut voir dans quel contexte cette décision est prise. Il s'agit de services assumés depuis très longtemps par les compagnies de chemin de fer, qui sont de juridiction fédérale, des services qui sont réglementés, d'ailleurs, par des institutions fédérales, en particulier la Commission canadienne des transports.

Les compagnies de chemin de fer, depuis plusieurs années, s'adressent à la Commission canadienne des transports pour obtenir la permission de terminer ces services interrurbains ou de banlieue sous prétexte qu'ils sont déficitaires. Je dois dire qu'effectivement, même si ces services sont déficitaires, ils sont assumés par des entreprises qui, elles, sont souvent multimilliardaires et font des profits sous tous autres aspects. Indépendamment de ces profits, on décide d'enlever des services aux citoyens et la Commission canadienne des transports se fait, ni plus ni moins, la complice de ces décisions par une astuce juridique qui est la suivante: des services dits interurbains, du jour au lendemain, sont qualifiés de services de banlieue et on remet le bébé, à ce moment-là, entre les mains des gouvernements provinciaux et, en particulier, du gouvernement du Québec, en disant: Ce ne sont plus des services interurbains. Cela a été considéré des services interurbains depuis cent ans ou soixante-quinze ans mais, maintenant, ce sont des services de banlieue et occupez-vous-en. On nous remet le bébé! C'est un des aspects loufoques du fédéralisme dont parlait le premier ministre du Canada, il y a une couple de jours, dans cette même ville.

Qu'est-ce que j'ai devant cette décision? J'ai offert au Pacifique canadien d'étendre notre système de subventions au transport en commun, à savoir de payer une subvention de 40% des revenus que retire actuellement le Pacifique canadien de ces services de façon qu'ils soient maintenus, étant conscient, évidemment, qu'à court terme, il s'agit d'une solution du moindre mal, mais prenant cette décision dans un contexte, dans une perspective d'avenir.

Là-dessus, je veux faire remarquer qu'il y a quelques années, par exemple, il y avait un service de banlieue assuré entre la ville de Montréal-Nord et le centre-ville de Montréal via le tunnel du Canadien national. À l'époque, on a dit que ce n'était pas rentable; on a aboli ce service. Aujourd'hui, le gouvernement et la Communauté urbaine de Montréal sont en train de remettre sur pied un service moderne dans ce secteur. Je pense que nous serons en face d'une même décision dans le cas, par exemple, de Sainte-Thérèse ou de Farnham, durant les prochaines années, et qu'il est irresponsable actuellement que le gouvernement fédéral, que la Commission canadienne des transports permette d'abolir ces services. Quoiqu'il en soit, nous, nous sommes prêts à faire notre part pour tenter de les maintenir.

M. Beauséjour: M. le Président, j'aimerais que le ministre des Transports me dise s'il a eu des échos à ses démarches, soit auprès du Pacifique Canadien ou des autorités fédérales.

Le Président: Très brièvement, M. le ministre des Transports, s'il vous plaît.

M. de Belleval: Je dois dire que du côté du gouvernement fédéral nous n'avons à peu près aucune réponse depuis de nombreux mois sur la plupart de ces sujets, comme vous le savez, qu'il s'agisse du dossier de Québecair, Nordair, de l'avenir de Dorval ou de Mirabel, etc. Dans ce cas-là, je n'ai pas eu de nouvelles de la part du ministère fédéral des Transports. J'attends incessamMent la réponse du Canadien Pacifique à la lettre que je lui ai expédiée la semaine dernière, lui faisant l'offre de subvention que je viens d'indiquer.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourqeoys, vous avez le temps pour une très brève question.

Rumeurs de remaniement ministériel

M. Lalonde: M. le Président, après avoir entendu le ministre des Transports dire qu'il subventionne une entreprise milliardaire, j'aimerais poser la question suivante au premier ministre. Vous comprendrez que je ne peux pas la poser au vice-premier ministre.

Le rapport du Vérificateur général sur le trou de $500,000,000 dans les finances de l'enseignement primaire et secondaire vient de confirmer le gâchis administratif du présent gouvernement et plus particulièrement du ministre de l'Éducation et du ministre des Finances. M. le Président, à cela, il faut ajouter l'hostilité du

ministre de l'Éducation à l'égard des commissions scolaires, les interminables conflits de travail -on est ici justement pour en régler un aujourd'hui - qui sont les conséquences du règne de l'actuel ministre de l'Education.

Ma question au premier ministre est la suivante: Compte tenu de ce bilan déprimant, le premier ministre a-t-il l'intention de confier à l'actuel ministre de l'Éducation des responsabilités moins exigeantes au point de vue administratif?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je m'aperçois qu'on prépare la période des questions selon le mode antique et solennel à partir de la dernière manchette, au moins en partie. Je dois dire ceci très simplement en laissant de côté le préambule légèrement coloré du député: Quand il n'y a pas de rumeurs à propos des élections, il faut qu'il y en ait sur autre chose. Alors, là, il y en a sur autre chose. Même si c'est très difficile pour moi, c'est douloureux parce que j'ai fait...

Des voix: Ah!

M. Lévesque (Taillon): ...toute ma carrière dans ce qu'on appelle les communications, j'ai décidé qu'à partir de ces rumeurs, désormais, je ne communiquerai plus.

Le Président: Fin de la période des questions.

Des voix: Démission. Démission.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je voudrais d'abord...

Le Président: Je...

M. Charron: Oui?

Le Président: ... vous signale...

M. Charron: Je m'excuse.

Le Président: ...M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, qu'il y a eu un ordre de la Chambre qui a été donné pour céder le droit de parole à ce moment-ci au leader parlementaire du gouvernement. Je sais que vous voudriez intervenir si vous avez ce consentement unanime, mais même avec un consentement unanime, ce serait difficile.

M. Fontaine: Sur la fin de la période des questions, le député de Bellechasse avait une très brève question à poser concernant les sinistrés en Algérie. Il y a un problème particulier qu'on pourrait régler très facilement. Si on avait le consentement de la Chambre, on pourrait poser cette question, une minute seulement.

Le Président: Y a-t-il consentement?

M. Lalonde: Si j'ai une question additionnelle, M. le Président, certainement.

Le Président: Cela signifie-t-il, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, que vous ne donnez pas votre consentement à ce que M. le leader parlementaire de l'Union Nationale pose une question?

M. Levesque (Bonaventure): Voulez-vous, M. le Président, donner aussi votre consentement au député de Marguerite-Bourgeoys?

Le Président: Bon! M. le leader parlementaire du gouvernement.

Motion d'urgence

Suspension de certaines règles

M. Claude Charron

M. Charron: M. le Président, je voudrais, comme le lieutenant-gouverneur l'a laissé entendre en expliquant la raison de cette réunion de l'Assemblée, me prévaloir de l'article 78 du règlement et proposer, dans quelques instants, après avoir donné l'explication des raisons qui nous ont amenés à convoquer cette session, la motion d'urgence que je peux, d'ailleurs, si vous le souhaitez, M. le Président, faire distribuer immédiatement auprès de mes collègues responsables de ces affaires afin qu'on puisse suivre tout à l'heure à la lettre lorsque je la formulerai. (llhl0)

M. le Président, l'Assemblée est à nouveau réunie afin de se prononcer sur une loi spéciale. Je crois que tout le monde conviendra qu'il y a deux raisons pour qu'on se rende à des lois spéciales. La première, qui saute aux yeux, est celle des catastrophes, des cataclysmes. Ce n'est pas le cas. La deuxième est plus délicate et c'est pour cela qu'elle mérite plus d'attention; c'est littéralement lorsque l'exercice d'un droit, par un groupe de citoyens - droit qui leur est reconnu par les lois adoptées par cette Assemblée - ou des groupes de citoyens peut mettre en péril ce qu'on conviendra d'appeler, dans l'ensemble du Québec ou dans certains coins du Québec, l'intérêt public ou, encore plus concrètement, mettre en péril l'exercice de droits qui appartiennent à d'autres citoyens.

Or, l'opinion que nous nous sommes faite, après plusieurs heures de discussion, est que, dans le cas de deux commissions scolaires au Québec, dans celle des Vieilles Forges, dans la Mauricie, et dans celle de la région de Sorel et de Carignan, l'exercice du droit de grève, par des travailleurs de l'enseignement, met en péril, actuellement, l'année scolaire des étudiants et étudiantes de ces deux territoires du Québec, met en péril l'exercice du droit des parents à bénéficier des services scolaires et met en péril le droit des enfants - s'il est non écrit, il n'est pas moins vrai, M. le Président - à ce qu'une année de leur vie ne soit pas irrémédiablement gâchée.

Nous en sommes à une situation d'urgence, parce que, dans l'un et l'autre cas, le conflit, même s'il ne date pas du même moment, vient d'atteindre le point d'être suffisamment avancé pour que, prolonger plus longuement - d'autres de mes collègues, au cours de la discussion, développeront ce point - ferait que, si ce n'est pas toute l'année, c'est au moins une bonne partie de cette année qui serait gâchée et perdue.

En conséquence, un autre de mes collègues... Si l'Assemblée consent à suspendre un certain nombre de règles régulières et à étudier le projet de loi que présentera le ministre de l'Éducation, projet que je fais circuler à l'instant et qui est le projet de loi no 113, portant sur certains différends entre des enseignants et des commissions scolaires... Je demanderais, M. le Président, que, conformément au règlement, on le distribue immédiatement. Ce projet de loi, au nom du ministre de l'Éducation - s'il est débattu, cet après-midi, comme nous l'espérons - pourra donner l'occasion à mon collègue du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre d'expliquer que, si nous en sommes rendus à cette étape, c'est que toutes les autres prévues par nos lois, conformément à nos traditions en relations du travail, ont dûment été franchies, comme le ministre se chargera de l'expliquer à l'Assemblée.

En conséquence, M. le Président, je sollicite, très brièvement, l'Assemblée pour que, à cause de ces raisons - ou de cette raison, puisqu'elle est unique dans les deux cas - elle consente à reconnaître l'état d'urgence et à adopter le projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des enseignants et des commissions scolaires.

Et, conformément à l'article 84, paragraphe 2, du règlement, je propose que cette Assemblée suspende l'application des articles 22, paragraphe 1 - ce qui a déjà été fait par l'ordre de la Chambre en ce qui concerne le message inaugural - 23, 30, 31, 77, 87, 88, 115, 134 et 157.

Que, nonobstant les dispositions de l'article 47, paragraphe 1, du règlement, toutes les séances de l'Assemblée soient publiques;

Que, nonobstant les dispositions de l'article 121 du règlement, il n'y ait pas d'amendement en deuxième lecture;

Que, de plus, la commission plénière fasse rapport au plus tard trois heures après le début de ses travaux;

Que dix minutes avant l'expiration de ce délai, le président de la commission mette immédiatement aux voix, sans débat, les articles du projet de loi et les amendements dont la commission n'aura pas alors disposé, s'il en est;

Que le débat portant sur la troisième lecture soit limité à une intervention de 20 minutes par parti reconnu.

Que l'Assemblée puisse siéger à partir de maintenant, sans interruption sauf de l'adoption de cette motion d'urgence à 13 h 30,..."

Je quitte le texte de ma motion, M. le Président, pour expliquer que si, dans quelques minutes, comme je l'espère, l'Assemblée consent à cette motion, selon la tradition et pour que les partis politiques puissent prendre une connaissance approfondie, en groupes parlementaires, du projet de loi qui vient d'être distribué, nous suspendrons nos travaux jusqu'à 13 h 30 et nous reprendrons, à ce moment-là, au niveau de la deuxième lecture, comme il convient.

Finalement, dernier paragraphe de ma motion, M. le Président: "Que la suspension de l'application des règles ci-dessus énumérées soit en vigueur dès maintenant et jusqu'après l'adoption de la motion d'ajournement de l'Assemblée."

J'ai deux informations qui peuvent paraître superflues, mais que je me dois de dire. Il est évident - c'était dans le texte du message du lieutenant-gouverneur - que dès l'adoption de cette loi spéciale, la session ouverte ce matin sera prorogée. Finalement, je désire informer aussi, ou confirmer un engagement que le premier ministre et moi avions pris hier en rencontrant les représentants des deux partis d'Opposition. Nous avons donc des officiers du ministère de l'Education et peut-être du ministère du Travail aussi - enfin sûrement du côté du ministère de l'Éducation - qui seront à la disposition des réunions des groupes parlementaires - je crois que c'est nécessaire - pour donner toute l'information quant aux applications de la convention collective déjà signée ou quoi que ce soit qui puisse être de nature à renseigner les partis politiques, dès 11 h 30, si l'Assemblée ajourne en ce moment.

Le Président: Merci. M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous avons à ce moment-ci à étudier une motion de suspension de l'application de certaines règles de procédure, motion présentée par le leader du gouvernement. On le sait, M. le Président, notre règlement prévoit que cette motion peut être débattue pendant une période de deux heures. D'après les propos du leader parlementaire du gouvernement, ce dernier s'attend que nous disposions de cette motion dans une période beaucoup plus courte. D'ailleurs, l'indication que nous avons reçue du lieutenant-gouverneur au tout début de la séance indique également que le gouvernement voudrait bien que tout se passe d'une façon assez brève, courte et comprehensive.

Voilà, M. le Président, comment se passent les choses maintenant dans cette Assemblée nationale. Voilà comment les choses semblent contraster, du moins chez ceux qui tiennent certains propos, avec une période que nous avons connue et où ces honorables messieurs d'en face étaient beaucoup plus loquaces et prenaient non seulement les deux heures de discussion sur cette motion, mais en profitaient justement pour condamner, d'une façon presque violente, sinon irresponsable, les attitudes du gouvernement qui était alors au pouvoir. Je n'ai pas à rappeler, M. le Président, que j'avais, comme le leader parlementaire du gouvernement l'avait aujourd'hui, la tâche peut-être ingrate, si on veut, d'avoir à présenter ces motions ou ce genre de motion.

À ce moment-là, M. le Président, je pense que j'utilisais un peu le ton que vient d'utiliser le leader du gouvernement, et je ne serais pas surpris que le leader du gouvernement ait puisé dans les débats anciens certains passages de certains discours que j'ai moi-même prononcés alors que j'avais à remplir cette fonction. Moi, M. le Président, je serais porté, évidemment, à aller fouiller dans les propos tenus par le leader du gouvernement alors qu'il était dans l'Opposition. (11 h 20)

Évidemment, M. le Président, je ne me rendrai pas à cette démarche qui semble ne pas être celle du gouvernement. Mais voici que tombent justement par hasard, M. le Président, devant moi, certains passages d'un discours de M. Claude Charron; c'était en 1976, il n'y a pas tellement longtemps, c'était en avril 1976. On lit ce que disait, à ce moment-là, le leader

parlementaire du gouvernement actuel lorsqu'il avait à faire face à une motion exactement comme celle qu'il vient de déposer, et d'ailleurs dans un domaine qui ressemble fort à celui qui fait l'objet du projet de loi que nous aurons à étudier dans quelques minutes, une question dans le domaine de l'enseignement. Voici ce que disait notre ami, le leader parlementaire du gouvernement: "Nous étudierons tout à l'heure, si la Chambre dispose de cette motion, la solution bâtarde que nous présente le gouvernement après avoir laissé faire la situation pendant deux mois." On dirait que c'est exactement la même situation, M. le Président.

Une voix: Deux mois, c'est deux mois.

M. Levesque (Bonaventure): Que voulez-vous, M. le Président? Voici ce que disait le leader parlementaire du gouvernement alors qu'il siégeait dans l'Opposition.

Une voix: Charron?

M. Levesque (Bonaventure): Oui, M. Claude Charrron, en effet. "Mais, M. le Président, si l'urgence existait bien avant et si le gouvernement s'est enfin décidé à apporter sa solution magique, sa solution miracle, il faudra bien prendre le temps de l'étudier". Il disait: "S'il est un endroit où il est important pour les membres de l'Assemblée de peser le pour et le contre de chacune des interventions du gouvernement dans le monde de l'éducation, lui qui a tellement tardé, lui qui a laissé pourrir la situation avant d'arriver avec une loi, etc., c'est bien ici. Le gouvernement - continuait-il - nous invite à bousculer les horaires traditionnels de la Chambre. Plus, M. le Président - et c'est contenu dans la motion, cette règle absolument inqualifiable - les députés seront obligés d'étudier article par article le projet de loi en dedans de trois heures pour faire rapport." M. le Président, ce même monsieur vient de nous communiquer sa motion qui dit ceci: "...que, de plus, la commission plénière fasse rapport au plus tard trois heures après le début de ses travaux." Ahl Que voulez-vous? Ceux qui ont vécu ces moments ne peuvent pas laisser passer la présente heure ou demi-heure ou ces présentes courtes minutes sans évoquer, évidemment très respectueusement pour la présidence, mais très cruellement pour les amis d'en face, ces quelques propos tenus par M. Charron. On me permettra de le nommer parce qu'il est ainsi cité au journal des Débats. Il disait ceci: "II est absolument irresponsable de la part du gouvernement d'obliger les députés à étudier ce projet de loi dans des conditions anormales".

Je n'ai pas l'intention de tourner le couteau dans la plaie, mais il est intéressant de voir qu'il ne s'agit pas simplement d'une intervention, disons, qui faisait exception dans cette Opposition du temps. Malgré son absence, j'aimerais rappeler que le ministre de l'Environnement, alors qu'il siégeait de ce côté-ci...

Une voix: La pollution.

M. Levesque (Bonaventure): M. Marcel Léger, disait ceci, dans ce même débat, d'ailleurs: "Autrement dit, à quoi sert un Parlement, M. le Président, si, à chaque fois qu'on a à discuter d'une chose essentielle, on est obligé de mettre de côté les règles de procédure normales, si, à chaque fois qu'on a un problème majeur à régler, il faut suspendre les règles de procure du parlementarisme? Si c'est cela, abolissons, disait-il, le parlementarisme.

Il continuait:"Ce gouvernement a deux bâtons: le bâton du patron et le bâton législatif, d'autre part." M. Léger continuait: "On a créé une situation absolument intenable dans tout le Québec, maintenant qu'on est la cause de cette situation, de ce chaos, on veut maintenant dire: Nous sommes le sauveur."

D'autres également, dans d'autres circonstances, avaient d'excellentes interventions de ce genre. Je pense en particulier au futur ministre d'État au Développement culturel, si on en croit les manchettes, ou au vice-premier ministre d'aujourd'hui, ministre de l'Éducation. Lui, lorsqu'il intervenait sur ce genre de motion, ce n'était pas tellement les propos tenus par le député de Saint-Jacques. Lui, ce qui le préoccupait, c'est qu'il fallait se réunir pour une session spéciale, qu'il y avait des choses à régler encore plus importantes et qu'on aurait dû être convoqué avant. Pourquoi, M. le Président? Écoutons M. Jacques-Yvan Morin. "Oui, il y a des problèmes urgents au Québec et, de fait, nous devrions siéger dans cette Chambre depuis déjà plusieurs semaines pour tenter de les régler. Il y a des problèmes de fond sur l'économie québécoise auxquels nous devrions immédiatement, de toute urgence, nous attaquer. Si le gouvernement, par exemple, continuait M. Jacques-Yvan Morin, avait voulu convoquer cette session d'urgence pour traiter la hausse du coût de la vie - cela l'inquiétait, c'était la faute à Bourassa, n'oubliez pas ça dans votre esprit - avait voulu convoquer une séance d'urgence pour traiter de la hausse du coût de la vie dont j'ai pu constater, au cours de ma récente tournée, à quel point elle heurte en ce moment - écoutez, M. le Président, le premier ministre, tout à l'heure, semblait verser quelques larmes, qu'il écoute ce que disait son prédécesseur en Chambre alors qu'il disait ceci -les familles dans tout le Québec, si le gouvernement avait voulu que nous traitions de l'inflation, de la perte du pouvoir d'achat des travailleurs québécois, si c'était de cela que le gouvernement avait voulu traiter, nous serions réjouis d'être en Chambre aujourd'hui, M. le Président." Il continue à donner d'autres exemples parlant de l'indexation, des tables d'impôt. Si cela avait été pour cela, M. le Président, il y avait toutes sortes d'exemples qui méritaient que l'on se réunisse d'urgence. C'est avant le trou de $500,000,000

M. le Président, nous en avions plusieurs autres et nous pourrions continuer, mais j'ai pensé que pour donner a nos honorables collègues l'occasion d'étudier ce projet de loi qu'on vient de nous distribuer, il ne fallait pas non plus abuser du temps de cette Chambre. J'aurai sûrement l'occasion, à d'autres moments, de rappeler à ces honorables amis d'en face les propos qu'ils tenaient alors qu'ils étaient dans l'Opposition.

M. le Président, le vocabulaire a même changé. J'ai déjà parlé de vocabulaire qui changeait. Là, vous n'avez pas entendu parler de loi matraque, c'était la façon dont on parlait de ce genre de loi. On a changé de vocabulaire,

ayant changé de côté. Même le titre de la loi. On ne parle pas de loi de retour au travail, on parle de loi sur certains différends, comme si on ne savait pas trop ce qui se passait. Il devait y avoir quelque chose qui n'allait pas quelque part. On ne parle pas du maintien des cours ou du retour des enseignants à l'école: Loi sur certains différends entre des enseignants et des commissions scolaires. Est-ce précis? C'est merveilleux de précision, mais cela encore fait partie du vocabulaire de ce gouvernement.

Nous allons, non pas de gaieté de coeur, mais avec un sentiment tout de même de responsabilité qui a toujours caractérisé le Parti libéral du Québec, qu'il soit au pouvoir ou qu'il soit dans l'Opposition, nous allons donner notre consentement pour que nous puissions, dans les meilleurs délais, accepter cette motion d'urgence afin d'aborder, le plus sérieusement possible, avec le meilleur de nos énergies, entreprendre, au cours de l'après-midi, l'étude du projet de loi no 113. A cette fin, nous allons concourir à cette motion présentée par le leader parlementaire du gouvernement. (11 h 30)

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, vous avez la parole.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: Merci, M. le Président. Malgré les bons moments que nous venons de passer avec le leader de l'Opposition officielle, il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'une situation très sérieuse actuellement. Le leader du gouvernement doit sûrement être un homme très tiraillé aujourd'hui, il doit vivre des heures troublantes à ce moment-ci, lui qui, solidaire d'un gouvernement affichant un préjudice favorable envers les travailleurs, se voit dans l'obligation, pour la quatrième fois en très peu de temps, de forcer l'adoption d'une loi spéciale en vue de rétablir la paix sociale perturbée par des conflits de travail qui mettent en danger, en péril l'année scolaire de dizaines de milliers d'enfants.

Ce doit être dur de se rendre à l'évidence que son gouvernement a failli lamentablement à la tâche de reconstruction sociale qu'il s'était fixée au départ. J'aimerais rappeler ici non pas les propos du leader du gouvernement, ni ceux de députés de l'Opposition de 1973 à 1976, mais bien plutôt une déclaration du premier ministre actuel du Québec alors qu'il était en campagne électorale, en 1976, plus précisément le 24 octobre 1976. Il commentait des conflits des secteurs public et parapublic; il disait ceci: "C'est d'ailleurs vrai dans tous les domaines, les promesses, même en période électorale, ça ne vaut pas le papier sur lequel c'est écrit quand c'est formulé par des gens qui, trop souvent, ont été incapables de les tenir."

Il continuait: "Et je crois que la paix sociale et l'harmonie que tout le monde souhaite, on les verra seulement quand un gouvernement pourra s'atteler à la tâche nécessaire de créer un nouveau climat. Je devrais même dire, je m'excuse, un nouveau départ."

Le premier ministre actuel disait cela en 1976, il devait être le sauveur du Québec dans le domaine des relations du travail, il devait rétablir la paix sociale à travers le Québec dès le moment où il prendrait le pouvoir. On nous dit aujourd'hui qu'on a réalisé toutes les promesses et qu'on est maintenant prêt à affronter l'électorat. Il y a au moins une promesse que le gouvernement actuel n'a pas réalisée, celle de rétablir la paix sociale dans le Québec puisque maintenant on est encore aux prises avec beaucoup de conflits qu'on est obligé de régler par des lois spéciales. On n'a pas réussi, encore aujourd'hui, à adopter une loi qui permettra de régler ces conflits de façon définitive.

En politique, il ne faut donc jamais faire l'erreur de prendre ses rêves pour des réalités car lorsque celles-ci prennent le dessus - et, a un moment donné, elles le font toujours - c'est avec amertume, avec sûrement une certaine désillusion qu'on doit forcément admettre un échec. D'ailleurs, à voir le leader du gouvernement défendre doucereusement, presque la larme à l'oeil, tout à l'heure, la nécessité qu'il y a à mettre de côté certaines règles de procédures habituelles à cause de la situation qui prévaut particulièrement dans la région de Trois-Rivières, il devient manifeste que le député est mal à l'aise dans ce rôle de matraqueur que lui impose le gouvernement d'aujourd'hui.

Je n'ai pas l'intention de parler très lonqtemps sur le caractère d'urgence de l'intervention législative qui pousse le leader du gouvernement à nous présenter une motion de suspension des règles de procédure de cette Chambre. Après deux mois de grève des enseignants de la Commission scolaire régionale des Vieilles-Forges - aucun, et je le répète, jour de classe pour environ 40,000 élèves du secteur public - je pense qu'il est grand temps que le gouvernement bouge! À mon avis, il y a longtemps que l'urgence de la situation exigeait une intervention vigoureuse du gouvernement. C'est sans doute son préjudice favorable envers les travailleurs gui l'a empêché d'agir plus vite.

Ahl je sais bien, Mme la Présidente, qu'on me répondra qu'il y a eu conciliation, qu'il y a eu injonction, qu'il y a eu enquête, etc., mais le gouvernement sait fort bien que lorsque le climat est pourri, lorsque les rapports de force entre les parties indiquent clairement l'existence d'une guerre de tranchée, de positions quasi immuables de part et d'autre, toutes ces tentatives, louables en soi, mais peu efficaces, ne servent, en réalité, qu'à augmenter la frustration des parties en cause et à exaspérer les victimes innocentes gui servent de cobayes dans ces conflits interminables.

D'ailleurs, je l'ai dit la semaine dernière à Trois-Rivières, le gouvernement a fait preuve de laxisme indu et d'attentisme exagéré. L'urgence existe depuis plusieurs semaines. C'est évident pour les étudiants; c'est évident pour les parents et pour de nombreux citoyens de Trois-Rivières et des environs. Il est temps que le gouvernement laisse de côté ses documents de stratégie constitutionnelle et qu'il s'occupe avec plus de diligence, avec plus de sérieux, des problèmes quotidiens que vivent les citoyens dans leur milieu.

Oui, M. le Président, il y a urgence et ça presse. Mais je comprends la lassitude du leader du gouvernement. Moi non plus, je n'aime pas les lois matraques, car elles sont le signe criant, la preuve accablante que notre système de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic est déficient, a besoin d'être repensé, d'être réévalué en pro-

fondeur. Il faudra en venir là si on veut vraiment éviter la répétition de ce scénario qui devient de plus en plus loufoque à mesure qu'il se répète d'une fois à l'autre.

Quant à la motion elle-même, M. le Président, elle semble conforme à la règle qui, habituellement, dans de telles circonstances, est suivie.

Nous sommes dans une situation ridicule, mais c'est une situation qui n'est pas drôle pour ceux qui sont touchés par ces grèves. Le gouvernement a donc laissé pourrir ce conflit, surtout aux Vieilles Forges, depuis deux mois. On invoque l'urgence; ça presse, c'est urgent, on ne doit prendre que quelques heures pour discuter du projet de loi. On dirait tout à coup que le gouvernement vient de prendre conscience qu'il est encore le gouvernement. Encore là, M. le Président, on n'agit que de façon partielle, on ne pose que des cataplasmes, on ne règle que deux conflits alors qu'il y en a de nombreux qui surgissent un peu partout à travers le Québec. On nous dit: Cela ne fait pas assez longtemps. On dirait que le gouvernement veut laisser pourrir la situation dans les autres commissions scolaires, comme il l'a laissé pourrir à la commission scolaire des Vieilles Forges. Ils vont attendre que ces autres conflits soient aussi pourris que celui des Vieilles Forges pour agir. Ils ne veulent pas déplaire à leurs amis les syndicats. Le bien des enfants, le bien des parents, ça passe après.

M. le Président, nous de l'Union Nationale, notre groupe d'ici, nous aurions eu le goût ce matin de nous opposer à cette motion que le gouvernement nous demande d'adopter. Nous aurions eu le goût de nous opposer à cela, à moins que le gouvernement ne s'engage à régler en même temps tous les conflits scolaires du Québec. Mais nous savons que le gouvernement a fait son lit, Nous savons que le temps de ces discussions est limité à deux heures. Nous savons également que le rouleau compresseur du gouvernement va arriver d'une façon ou d'une autre, un peu comme on l'a fait à Ottawa, hier soir, pour d'autres raisons.

Nous nous inclinerons donc, M. le Président, et nous verrons à régler au moins les deux conflits que le gouvernement nous invite à régler. Pour le bien des enfants, pour le bien des parents qui sont touchés, nous acceptons cette motion de suspension des règles de procédure. (11 h 40)

Nous vous informons immédiatement, M. le Président, que nous collaborons avec le gouvernement pour l'adoption de cette quatrième loi spéciale en quelques mois et cela, nous le ferons dans les meilleurs délais et dans le meilleur intérêt de la population du Québec.

Le Présidents M. le leader parlementaire du gouvernement, vous avez maintenant la parole.

M. Claude Charron

M. Charron: M. le Président, je ne veux qu'ajouter mes remerciements à la collaboration qui nous a été offerte, comme le faisait si bien aussi, lorsqu'il était à ma place, le député de Bonaventure dans ces circonstances. Je veux dire au député de Bonaventure que je trouve de fort bonne guerre et tout à fait normal ce qu'il a fait ce matin. C'est parfaitement son droit. Je suis rendu à une époque où je me cherche des beaux côtés à vieillir et un des beaux côtés à vieillir, c'est précisément de constater qu'on évolue, comme m'a donné l'occasion de le faire ce matin le député de Bonaventure.

Je veux dire au député de Nicolet-Yamaska que ce n'est pas si difficile que cela, une fois que l'on a pris la décision. C'est la phase de la décision qui est plus difficile à prendre.

Je ne relèverai pas les allusions du député de Bonaventure aux critiques que nous faisions à l'époque du gouvernement Bourassa parce que je ne veux pas tourner davantage le fer dans la plaie du chef de l'Opposition. En conséquence, M. le Président, je crois que nous faisions à ce moment-là ce qu'elle fait aujourd'hui, à ce que j'ai pu entendre; nous adresser au gouvernement sans exclure aucune autre responsabilité à quelconque autre parti. Mais quand nous sommes dans cette Assemblée - je crois que c'est ce à quoi nous allons nous livrer à partir de 13. h 30 -c'est au gouvernement en particulier, parce que c'est lui qui est sur la sellette, d'expliquer ses gestes, ce que feront mes collègues de l'Éducation, du Travail et des Finances au besoin selon l'évolution de la discussion, comme nous l'avons dit hier.

Je rappelle que cette session ne portera que sur ce projet de loi. Nous aurions pu, effectivement, pour reprendre les propos qu'a cités le député de Bonaventure, nous pencher sur des questions d'ordre économique, sur des questions d'ordre social comme ces problèmes sont désormais au fil de l'évolution des sociétés. Je rappelle simplement qu'il y a une session régulière de prévue où tous ces sujets seront abondamment traités, nous l'espérons. Nous aurions même souhaité qu'elle ait lieu plus tôt que la date sur laquelle nous nous sommes entendus hier. Donc, si ces problèmes ne sont pas traités aujourd'hui, je pense que c'est avec l'agrément de tous et nous saurons donner place à ces problèmes lors de la session qui débutera le 5 novembre.

M. le Président, je propose l'adoption de ma motion, en rappelant aux députés, autant que possible, d'être présents dès la reprise à 13 h 30 pour le débat en deuxième lecture qui, lui, n'est pas limité.

Le Président: La motion du leader parlementaire du gouvernement visant à suspendre l'application de certaines règles de procédure sera-t-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté, M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Alors, je propose la suspension, M. le Président, conformément à l'ordre.

Le Président: L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 13 h 30.

Reprise de la séance à 14 h 4

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Le manuel de l'électeur

Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

J'aimerais maintenant solliciter le consentement unanime de l'Assemblée pour me permettre de déposer aujourd'hui même, à la demande du Directeur général des élections du Québec, une brochure qui est intitulée Le manuel de l'électeur. S'il y a consentement, je vais déposer ce document. Comme il y a consentement, le document, Le manuel de l'électeur, est déposé.

Le Secrétaire adjoint: Document déposé.

Projet de loi no 113

Première lecture

Le Président: J'appelle maintenant la première lecture du projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des enseignants et des commissions scolaires. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

M. Charron: Adopté. Le Président: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, même séance?

M. Charron: Oui, M. le Président.

Deuxième lecture

Le Président: J'appelle maintenant la motion de deuxième lecture, présentée par M. le ministre de l'Education, du projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des enseignants et des commissions scolaires.

M. le ministre de l'Education.

M. Jacques-Yvan Morin

M. Morin (Sauvé): M. le Président, comme on peut s'en douter, ce n'est pas de gaieté de coeur que le gouvernement a décidé de présenter ce projet de loi à l'Assemblée nationale. La situation qui règne dans le monde scolaire, particulièrement dans les régions de Trois-Rivières et de Sorel-Tracy, est telle que le gouvernement n'avait pas le choix. Bien qu'il n'ait pas été partie et ne soit pas partie actuellement aux négociations locales, dont j'expliquerai dans un instant la portée, il se devait d'intervenir. En effet, dans ces commissions scolaires, les négociations locales ont entraîné des grèves qui, au moment où nous nous parlons, mettent en péril l'année scolaire des élèves tant du primaire que du secondaire, selon le cas.

Dans le passé, on se souviendra que, lorsque les droits des jeunes à l'éducation ont été menacés de cette façon - et quelquefois de façon différente - le gouvernement n'a pas hésité à intervenir, allant même, au mois de juin dernier, jusqu'à mettre en tutelle une commission scolaire pour s'assurer que l'année scolaire des enfants ne fût pas sabordée. Or, la situation dont nous sommes saisis aujourd'hui est plus grave encore s'il est possible, puisque, dans le cas de la région de Trois-Rivières, l'année scolaire n'a même pas pu débuter! Nous en sommes maintenant à huit semaines, à deux mois de grève, tandis que, dans la région de Sorel, la grève a cours depuis le 23 septembre, c'est-à-dire qu'elle dépasse maintenant la durée d'un mois.

Les droits de l'enfant et de l'adolescent à l'éducation, vous le savez, font l'objet de plusieurs grands documents constitutionnels ou internationaux; on les trouve affirmés dans les chartes de droits et libertés. Cela ne va pas, certes, jusqu'à abolir le droit de grève, je le dirai plus loin, mais on ne peut perdre ces droits de vue lorsque le comportement d'un groupe est de nature à compromettre un droit aussi socialement fondamental que celui-là.

Que la portée du projet de loi que les députés ont sous les yeux soit donc claire. Nos lois reconnaissent le droit de grève dans les services publics et il n'est pas question d'y mettre fin. Cependant, lorsqu'un droit empiète sur celui des autres, il est temps d'intervenir, il est temps de rétablir l'équilibre entre les droits des uns et des autres. M. le Président, c'est un principe que j'ai entendu souvent évoquer en cette Assemblée: les droits des uns s'arrêtent là ou commencent les droits des autres. C'est un principe que vous connaissez bien en tant que juriste. C'est la raison pour laquelle, M. le Président, le présent projet de loi n'ordonne le retour au travail, sous peine d'amende, que dans les commissions scolaires où l'année scolaire des jeunes et des adolescents est maintenant compromise. (14 h 10)

Ce n'est pas que le gouvernement souhaite que la grève continue dans les autres commissions scolaires, on s'en doute bien, mais tout simplement parce que, au meilleur de notre jugement, nous estimons que l'année scolaire, dans deux commissions scolaires régionales et dans quelques commissions scolaires locales, est maintenant compromise. Nous n'avons pas d'autre choix que de venir à la rescousse des victimes, somme toute innocentes, de ces procédés, c'est-à-dire les enfants et les adolescents.

D'ailleurs, nous ne nous désintéressons pas des conflits qui peuvent avoir lieu ailleurs en ce moment ou qui pourraient éclater, puisque nous avons prévu des dispositions qui indiquent dans la loi qu'il n'y aura rien à gagner, soit du côté du salaire, soit du côté des effectifs par quelque moyen que ce soit, puisque ces questions ont été réglées dans la convention nationale. Nous avons voulu limiter l'intervention du Parlement aux cas où la mesure a été dépassée, où les droits des citoyens, en l'occurrence des jeunes ou des futurs citoyens, sont menacés par le comportement de certains enseignants et - je m'empresse de l'ajouter - là où il n'existe aucune espèce d'espoir de règlement.

Pour comprendre les événements qui ont mené à l'impasse dans laquelle nous nous trouvons dans les négociations locales, je pense que quelques explications sont requises. Il faut savoir, par exemple, qu'il existe deux paliers de négociation. Ce n'est sûrement pas aux députés qu'il faut apprendre cela, mais il est peut-être bon de le rappeler tout de même à l'intention de la population. Il y a donc deux paliers de négociation: le palier dit national, où nous

discutons de questions de portée nationale, de questions qui intéressent l'ensemble des 250 et quelques commissions scolaires du Québec et qui touchent tous les enseignants. Il y a également des questions d'intérêt local comme, par exemple, les cotisations syndicales, l'affichage, les locaux mis à la disposition du syndicat, les régimes complémentaires d'assurances, l'application des critères d'affectation, de mutation, etc. Il existe donc deux paliers de négociation. Et il est connu de tous, je pense, que les questions qui relèvent de ce qu'on appelle "le monétaire lourd", c'est-à-dire les salaires et les effectifs, étaient, depuis le début, destinées à être réglées au niveau national et non pas discutées ou rediscutées au niveau local.

Dans les négociations préliminaires qui ont eu lieu entre les enseignants et la partie patronale, il avait été convenu que des ententes pourraient être conclues à ces deux niveaux. Et, lorsque la partie patronale et la partie syndicale se mettaient d'accord pour qu'une matière, comme on dit, soit traitée au niveau local, le gouvernement, dans un décret, entérinait la volonté des deux parties. Lorsque les parties n'arrivaient pas à se mettre d'accord - et c'est arrivé dans au moins deux cas sur les seize matières d'intérêt local - le gouvernement a dû trancher et décider que certaines questions n'étaient pas d'intérêt local et seraient réservées à la négociation au niveau national, ou encore seraient envoyées au niveau local, de sorte que nous avons adopté au moins deux décrets par lesquels le gouvernement a fait une distinction bien nette entre ce qui devait faire l'objet d'une discussion au niveau national et les seize questions d'intérêt local ou régional. Je m'empresse de le dire parce que certaines des tables de négociation regroupent plusieurs commissions scolaires tant locales que régionales. C'est ainsi, par exemple, que bien qu'il y ait plus de 250 commissions scolaires, nous n'avions que 72 tables de négociation locales puisque les regroupements étaient non seulement permis mais encouragés même.

Le principe de la répartition, je le rappelle, est le suivant: les questions d'intérêt général et, notamment," le monétaire lourd", les effectifs, les salaires, les avantages sociaux divers, tout cela a été traité au niveau national et a fait l'objet d'une convention en bonne et due forme entre la CEQ d'une part et la partie patronale d'autre part, au mois de mai. Depuis, les négociations ont été entreprises au palier local ou régional entre les commissions scolaires, cette fois, chaque commission scolaire intéressée et chaque syndicat d'enseignants concerné. En tout, 72 tables de négociation et je devrais ajouter - ce n'est pas directement pertinent - qu'il existait également 16 tables du côté protestant. J'ajoute que, du côté protestant, toutes les conventions locales sont maintenant réglées à l'intérieur des paramètres prévus dans l'entente nationale, entièrement à l'intérieur des règles. C'est du côté catholique que les difficultés se sont accumulées et encore, pas dans l'ensemble des tables ou des commissions scolaires puisque, à l'heure actuelle, dans 36 tables, couvrant environ 150 commissions scolaires, des ententes locales ou régionales ont maintenant été conclues et même signées.

Ce n'est pas le gouvernement, je le rappelle, qui négocie au niveau local ou régional.

L'intervention que nous sommes appelés à faire en tant qu'Assemblée nationale, à laquelle se résout le gouvernement, ne tient pas au fait qu'il soit partie à ces négociations. Il tient au fait qu'il est le garant de l'ordre public, des droits des citoyens et que, dans une situation où le droit des uns a mené à des abus et empiète sur le droit des autres, en l'occurrence les jeunes citoyens, le gouvernement et cette Assemblée n'ont d'autre choix que d'intervenir et de poser les gestes qui s'imposent.

Dans 36 autres tables - la moitié des tables, en somme, exactement la moitié au moment où nous nous parlons - des ententes locales ou régionales n'ont pu être signées. Je précise que ces tables regroupent environ 70 commissions scolaires. On peut dire que la moitié des tables qui ont réglé représentent deux fois plus de commissions scolaires que celles qui n'ont pas encore réglé.

On voit à ces chiffres qu'il est possible de régler à l'intérieur des paramètres, des règles dont il avait été convenu au niveau national. On voit qu'il est possible, pour une commission scolaire et un syndicat d'enseignants, de se mettre d'accord pour conclure une entente qui respecte, dans ces grandes lignes, l'entente nationale, bien que dans certains cas - auxquels nous ne toucherons pas puisque, cette loi ne veut pas être rétroactive, il y a eu ce qu'on pourrait appeler des péchés véniels, c'est-à-dire de petits dépassements au-delà des critères, des paramètres qui permettent de déterminer le nombre d'enseignants dont une commission scolaire pourra se prévaloir pour dispenser l'enseignement. (14 h 20)

M. le Président, l'entente nationale signée entre commissions scolaires et enseignants ne saurait être remise en question au niveau local ou régional. C'est le principe même qui a inspiré le présent projet de loi. Une fois qu'on s'est entendu entre la partie syndicale, en l'occurrence la CEQ, et la partie patronale au niveau national, il n'est pas question - et le législateur ne saurait le tolérer - que ces règles soient remises en question ou contournées, au plan local ou régional, d'une manière ou d'une autre.

On sait que, lorsque des négociations se déroulent, que ce soit d'ailleurs sur le plan national ou sur le plan régional ou local, il se produit des échanges. Le gouvernement cède ou la partie patronale, dont le gouvernement fait partie cède certaines choses. On se souviendra, par exemple, qu'en matière d'avantages sociaux, le gouvernement a franchi des pas importants dans la dernière négociation. Sur d'autres questions, c'est la partie syndicale qui met de l'eau dans son vin. De la sorte, on arrive, par une série d'échanges, de trocs, devrais-je dire, à l'occasion, à se mettre d'accord sur une convention nationale. Cette convention, une fois signée, doit s'imposer aux parties.

Voilà le principe fondamental. On ne saurait admettre qu'il soit possible de revenir sur la convention nationale dans les négociations locales ou régionales. Or, c'est précisément ce que certains syndicats locaux ou régionaux, ou représentant plusieurs syndicats à certaines tables, ont tenté de faire, non pas en se contentant de contester la lettre à l'occasion, mais allant jusqu'à contester la lettre et l'esprit de la convention collective nationale.

Ce n'est un secret pour personne, je pense, qu'il existait divers mouvements au sein de la CEQ au moment de la négociation et de la signature de l'entente nationale. Je ne pense révéler aucun secret, puisque cela était public, en disant que les majorités en faveur de la signature étaient variables et qu'au sein de la CEQ même, certains éléments n'ont jamais accepté que la CEQ signe l'entente qu'elle a siqnée; mais elle l'a signée. En la signant, après avoir obtenu des votes majoritaires favorables, la CEQ engageait -c'est le principe même des lois du travail - tous les syndicats qui y sont affiliés. Certains éléments au sein de la CEQ n'ont pas accepté la chose et tentent maintenant, par le truchement des néqociations locales ou régionales, de remettre en cause ce qui a été acquis et qui a fait l'objet, disons le, de rudes négociations au plan national.

M. le Président, on ne saurait permettre que ces questions - qui ont été réglées à la suite de ces échanges au plan national, échanges dans lesquels chacun a mis un peu d'eau dans son vin -que ces ententes deviennent l'objet de nouvelles négociations, en quelque sorte, au palier local ou national. Dans le projet de loi déposé aujourd'hui devant cette Assemblée, le gouvernement a tenu à ce que cela soit dit très clairement, afin d'éviter tout malentendu. Il a tenu à préciser quelle est la portée de l'entente nationale qui touchait, entre autres choses, un certain nombre de critères, de règles comme, par exemple - c'est ce qui fait l'objet des plus vives contestations au niveau local ou régional - ce qu'on appelle le ratio maître-élèves en langage de négociation collective, c'est-à-dire la proportion maître-élèves dans chaque commission scolaire.

Dans toute négociation - dans toute négociation de bonne foi, j'entends - il y a échanges, chacun met de l'eau dans son vin, on commence avec des exigences élevées, de part et d'autre et, peu à peu, on cède ceci ou cela en échange de ceci ou cela. C'est ce qui s'est produit le printemps dernier, au moment de la négociation nationale, et c'est ce qui nous a valu la convention entre la CEQ et la partie patronale dans le domaine de l'enseignement.

De quoi avons-nous convenu? Peut-être serait-il bon que, brièvement, je montre comment cette négociation a été fructueuse du point de vue même des enseignants lesquels ont gagné, dans cette négociation, de très nombreux points. Je m'empresse d'ajouter que je reconnais très volontiers que les enseignants ont fait progresser l'éducation sur plus d'un point, depuis quelques années en obtenant des conventions collectives dans lesquelles, par exemple, le maximum d'élèves par classe était de moins en moins élevé - j'en donnerai quelques exemples dans un instant -c'est pourquoi, M. le Président, c'est vraiment lorsqu'on est devant l'abus d'un droit que le législateur doit intervenir et pas autrement.

Aux termes de l'entente nationale qui a été conclue au mois de mai, on sait peut-être que le salaire moyen des enseignants en 1980-1981 est de $23,500 - je ne parle pas du salaire de chaque enseignant, mais du salaire moyen - et cela sans compter même les bénéfices marginaux qui amènent le coût de l'enseignant moyen à travers le Québec à une trentaine de milliers de dollars au moment où nous nous parlons. Pour la même année 1980-1981 - l'année actuelle, n'est-ce pas - la tâche hebdomadaire d'un enseignant est de 23 heures au niveau primaire et au préscolaire et de 22 périodes de 50 minutes au niveau secondaire. En 1982-1983, c'est-à-dire en fin de convention, parce qu'on négocie quelquefois de manière à étaler sur la durée de la convention collective, des progrès dans les salaires et dans les critères qui servent à déterminer le nombre d'enfants par classe ou le nombre d'enseignants dans chaque commission scolaire, en fin de convention, dis-je, la tâche sera de 22 heures au primaire et au préscolaire, 22 heures par semaine. J'estime que ce n'est pas un régime outrancier. Il y a beaucoup de travailleurs dans la société québécoise qui font des heures infiniment plus longues que celles-là et dans des conditions infiniment plus pénibles, quand on sait ce que la Loi sur la santé et la sécurité du travail a tenté de corriger.

M. le Président, l'année de travail d'un enseignant, aux termes de la dernière convention, comme, d'ailleurs, aux termes de la précédente, est de 200 jours, dont 180 en présence des élèves. Il peut y avoir de 15 à 18 congés statutaires par année. On conviendra que ce sont là, somme toute, d'assez bonnes conditions de travail. En tout cas, je sais beaucoup de gens qui aimeraient en bénéficier.

En outre, la sécurité d'emploi a été considérablement améliorée dans la dernière convention collective. On peut dire qu'elle est, pour ainsi dire, absolue dès que l'enseignant a atteint la permanence, en principe après deux ans de service, et dans un rayon de 50 kilomètres de l'école où il travaillait. Dès qu'il a obtenu la permanence, l'enseignant obtient la sécurité à vie! II n'y a pas beaucoup de secteurs de la société, soit dit en passant, qui peuvent se vanter d'avoir des avantages sociaux aussi considérables.

Il faut dire que le Québec a fait de très grands efforts depuis une quinzaine d'années pour améliorer les conditions de travail dans le monde de l'enseignement. En ce qui concerne - prenons un autre exemple - le rapport maître-élèves qui était d'un enseignant pour 22 élèves en 19681969, on estime aujourd'hui, en se fondant sur l'entente nationale qui a été signée au mois de mai, qu'il sera d'un enseignant pour 16 ou 17 élèves en 1981-1982, en fin de convention, l'année prochaine. Un enseignant pour 16 ou 17 élevés, en moyenne. Il convient, je pense, de noter à ce sujet que pendant la durée des trois dernières conventions collectives, les clientèles scolaires du Québec ont diminué; le nombre d'enfants et d'adolescents dans les écoles primaires et secondaires a diminué d'à peu près 20% tandis que le nombre d'enseignants, grâce aux progrès qui ont été négociés dans chaque convention collective, a augmenté de plus de 3%. Donc, pour une diminution de l'ordre de 20%, non seulement le nombre d'enseignants est-il demeuré stable, mais il a augmenté. (14 h 30)

II est toujours bon - cela éclaire la situation - de comparer notre situation avec celle de quelques-uns de nos voisins. Prenons l'Ontario, puisque c'est souvent à cette province que nous aimons nous comparer pour voir si notre développement est aussi avancé que le leur. Si on compare la situation des enseignants québécois avec celle de leurs confrères de l'Ontario, on constate que le rapport maître-élèves était d'un enseiqnant pour 21 élèves en Ontario et d'un

enseignant pour 17 élèves au Québec, et cela en 1978-1979; ce sont les derniers chiffres dont nous disposons. Depuis lors, la situation s'est encore améliorée de par la dernière convention collective nationale au Québec. Ce ne sont pas là de mauvaises conditions de travail, que je sache.

Prenons une autre question dont il a été fait état à bien des reprises, on s'en souviendra, pendant les négociations nationales: le nombre d'élèves par groupe. On sait à quel point des enseignants, avec raison, ont fait valoir en de nombreuses occasions qu'il y avait trop d'élèves dans les classes. Noua avons, dans la dernière convention, fait des progrès assez remarquables. L'entente prévoit maintenant - et c'est obligatoire - des règles qui indiquent un maximum quant à la dimension de chacun des groupes d'élèves que rencontre un enseignant. Si, pour des raisons majeures qui sont d'ailleurs prévues à l'entente, il y a un, deux ou trois élèves de trop dans une classe, il y a compensation financière que reçoit l'enseignant ou encore compensation sous forme de temps. Evidemment, ce n'était pas le cas auparavant. Cela dure tant que dure le dépassement.

Je vais vous donner un exemple pour illustrer ces règles, qui peuvent paraître un peu abstraites. Au secondaire général, le nouveau maximum d'élèves par classe est de 33 cette année et sera de 32 l'an prochain. Pour le primaire, la règle est de 26 élèves par groupe avec un maximum absolu - cette fois, c'est un maximum absolu - de 28 élèves: 27 au premier cycle et 29 au deuxième, ce qui nous donne cette moyenne de 28. Il faut considérer que l'entente a amélioré l'ancienne convention qui ne prévoyait pas de tels crans d'arrêt, mais se limitait à ce qu'on appelait les dimensions moyennes des classes. Désormais et à chaque niveau de l'enseignement primaire, secondaire et préscolaire, il existe des maximums d'élèves par classe. Ce n'était pas le cas auparavant, sauf sous forme de moyenne.

Ces mesures, compte tenu du fait qu'elles visent des dizaines de milliers de groupes d'élèves, sont fort coûteuses; je pense que tout le monde peut le deviner. Les dépenses entraînées pour les fonds publics sont très considérables. Au total, le gouvernement aura, dans cette entente du mois de mai, au chapitre de la tâche et des groupes d'élèves, augmenté l'effectif de quelque 1500 enseignants; cela coûte actuellement et coûtera chaque année qui vient $45,000,000. Ce ne sont pas là, que je sache, de mauvaises conditions de travail. Et je ne parle même pas des effectifs supplémentaires qui sont prévus pour mettre en oeuvre le plan d'action de l'école primaire et secondaire, qui a été rendu public il y a deux ans, qui amène encore l'engagement d'un certain nombre d'autres enseignants et de personnel non enseignant.

On conviendra, M. le Président, que ces conventions collectives, notamment la toute dernière, ont permis aux enseignants de faire des progrès considérables. Lorsque nous nous comparons avec l'Ontario - je pourrais le faire sur d'autres points mais ce serait abuser de la patience de cette Chambre - le Québec se tire très bien d'affaire. Il est même, je le dirai tout de go, à l'avant-garde dans le monde de l'enseignement. Nous battons littéralement la marche, que ce soit pour les maximums d'enfants par classe, pour les salaires, pour à peu près n'importe quel aspect des conventions collectives.

Le Québec a fait de grands efforts depuis quelques années et globalement, les conditions de travail dont nous avons convenu au mois de mai 1980 nous paraissent exemplaires. Peut-être aurions-nous pu faire encore davantage si le Québec avait été une société plus riche, mais nous devons tout de même nous comparer aux autres, et nous ne sommes pas une société aussi riche que l'Ontario, par exemple, qui se développe, pour les raisons qu'on sait, quelquefois plus vite que le Québec, surtout dans le secteur manufacturier. C'est une province qui est plus riche que nous, non seulement collectivement, mais par tête d'habitant. L'enseignement au Québec, par tête, coûte plus cher qu'en Ontario et il s'agit de plusieurs centaines de dollars de différence.

M. le Président, ces conditions de travail sont de nature, à notre avis, à rendre possible une éducation de qualité dans les écoles du Québec. Nous pensons que tous les enfants du Québec ont droit à cette éducation de qualité. Nous faisons de grands efforts depuis quelques années. D'ailleurs, les gouvernements antérieurs ont aussi fait de grands efforts pour s'assurer du succès de la réforme scolaire et de ce qu'on a appelé la révolution tranquille. Malheureusement, on se rend compte quelquefois que l'argent n'y suffit pas. Il faut autre chose; des qualités pédagogiques, du dévouement, une attention à l'enfant et à l'adolescent qu'on ne trouve hélas pas aussi constamment qu'on le souhaiterait. Et cet autre droit, celui des enseignants d'avoir de bonnes conditions, est fermement consacré, je crois, par la dernière convention collective.

J'en arrive maintenant aux négociations locales intervenues dans la foulée de l'entente nationale. Vous le savez, le ratio maître-élèves, la proportion, le rapport maître-élèves, ne faisait pas partie des objets de négociation locale ou régionale. C'était, par excellence, "du monétaire lourd." On s'en rend compte quand on sait que la différence entre ce qui est revendiqué dans certaines commissions scolaires à l'heure actuelle et ce que contient la convention nationale, est de l'ordre de $60,000,000 par an. Une question comme celle-là ne pouvait pas être renvoyée à la négociation locale ou régionale.

Depuis que nous avons décidé au Québec d'organiser des négociations générales, nationales, pour traiter de ces questions, il y a maintenant de cela plusieurs années, le sort en est jeté, ces questions doivent être tranchées au plan national. Depuis la rentrée scolaire, malheureusement, des syndicats locaux ont, dans les négociations locales, utilisé divers moyens de pression dont la grève, justement pour tenter de revenir sur cette question du ratio. C'est notamment le cas dans la régionale des Vieilles-Forges, où 20,000 élèves sont privés de cours, depuis maintenant deux mois. La même situation prévaut depuis un mois, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, dans la commission scolaire Carignan qui touche Sorel et, à certains égards aussi, Tracy, selon qu'il s'agit du niveau primaire ou secondaire. C'est cette situation qui amène le gouvernement, cet après-midi, à intervenir et à présenter ce projet de loi à l'Assemblée nationale, projet de loi qui, je me permets de l'espérer, pourra rallier l'unanimité parmi les députés.

Ce projet de loi, pour être bref, a trois objectifs. Le premier, est le suivant. Le gouvernement estime que le retour immédiat des élèves en classe et des enseignants au travail est absolument nécessaire puisque l'année scolaire est déjà compromise - sûrement dans le cas des Vieilles-Forges - et risquerait de l'être irrémédiablement dans le cas des deux commissions scolaires régionales et des locales qui en dépendent dont il s'agit dans ce projet de loi.

Je ne le cacherai pas, M. le Président, dans le cas des Vieilles-Forges, les parents et les citoyens ont bien raison d'être inquiets. L'année scolaire est maintenant dans la balance, puisque déjà s'achève la première étape de l'année, qui survient à la fin du mois d'octobre; déjà les enfants, dans la plupart des commissions scolaires du Québec, ont progressé et déjà vont obtenir leur premier bulletin. Voila que, dans cette régionale des Vieilles-Forges, la rentrée n'a même pas eu lieu, les enfants sont encore à la maison ou quelquefois dans la rue. Je pense que c'est une situation qu'aucun gouvernement civilisé et, je devrais dire, qu'aucun syndicat civilisé ne devrait tolérer. (14 h 40)

Deuxième principe: II ne s'agit pas d'imposer un règlement dans les négociations au niveau local ou régional, le gouvernement laissant aux parties la possibilité de s'entendre pendant quinze jours, après quoi, s'il n'y a pas eu entente, interviendra, à la demande de l'une des parties, un arbitre.

Troisième principe. Le gouvernement entend préciser, dans son projet de loi, la portée qu'il convient de donner aux clauses contenues dans l'entente nationale signée par la centrale syndicale, celles-là mêmes qui ont fait difficulté et qu'on semble vouloir contourner ou remettre en question au niveau local ou régional.

Mais, revenons, si vous le voulez bien, pour terminer, aux fondements mêmes du projet de loi, puisque nous sommes en deuxième lecture et qu'il convient de traiter du principe même de la loi. S'il existe dans notre société, dans toute société civilisée, un droit fondamental, c'est bien celui des enfants de s'instruire. On ne saurait indûment prétendre faire obstacle à ce droit et c'est l'une des responsabilités de l'État de veiller à ce qu'il soit respecté. Certes, les enseignants ont le droit de grève et nous ne le suspendons point là où l'année n'est pas compromise. Cependant, lorsque ce droit vient en conflit avec le droit social fondamental de l'enfant ou de l'adolescent à l'éducation, il n'y a pas de doute dans mon esprit que c'est le droit de l'enfant, le droit du futur citoyen qui doit l'emporter, d'autant qu'il est parfaitement sans défense.

M. le Président, que l'on songe un instant aux adolescents du secondaire V qui doivent terminer leurs études cette année même, présenter leur dossier scolaire pour accéder au collège, ou encore le présenter pour obtenir un emploi. Quel préjudice ne risquent-ils pas de subir du fait de leurs enseignants! C'est une situation absolument intolérable et, encore une fois, je ne connais pas de société civilisée qui endurerait de pareils procédés. Ce sont les enfants qui doivent boire cette grève jusqu'à la lie...

Une voix: Que c'est beau!

M. Morin (Sauvé): Et qui doivent en porter toutes les conséquences pour leur avenir, particulièrement ceux qui terminent leurs études cette année.

Il me faut, Mme la Présidente, rappeler une réalité que trop souvent, hélas, nous avons tendance à oublier. Le système scolaire est un service. C'est un service public, qu'il s'agisse des commissions scolaires, du ministère, des enseignants. Nous sommes tous au service des enfants, des adolescents, des étudiants et de leurs parents. Nous sommes au service de la population et quand nous perdons ce principe fondamental de vue, toutes les aberrations deviennent possibles et, quelquefois, des situations qu'on n'aurait même pas osé imaginer.

Lorsqu'une année scolaire est compromise, lorsque les parents exigent que le gouvernement prenne ses responsabilités, lorsque les parties aboutissent à un cul-de-sac, lorsque les enseignants défient ouvertement les ordonnances d'un tribunal, lorsque les tribunaux n'arrivent pas à remettre de l'ordre, Mme la Présidente, je pense qu'il est temps que le gouvernement intervienne. Il doit le faire en vue de faire respecter les droits d'une partie importante de la population, en l'occurrence, plus de 20,000 élèves.

Encore une fois, le droit de grève est reconnu par la loi, encore qu'il me paraisse étonnant, en dépit de l'expérience que j'en ai, qu'il nous soit impossible d'en arriver à des ententes collectives de travail convenables sans avoir recours à des moyens de pression dont les victimes principales sont des gens qui ne peuvent se défendre, par définition.

Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce droit de grève n'est pas un droit absolu, en ce sens qu'il ne prévaut pas sur les droits de tous les citoyens. D'ailleurs, dans cette Chambre, nous avons déjà eu l'occasion de le dire et de le constater à plusieurs reprises: les jeunes Québécois de la dernière génération n'auront guère connu d'année scolaire qui n'ait été interrompue, d'une manière ou d'une autre, par des congés forcés que leur imposaient les grèves d'enseignants. Dieu seul peut mesurer les préjudices que les jeunes ont pu en subir.

M. le Président, bien que le droit de grève ne puisse être abrogé, il était temps que le gouvernement prenne ses responsabilités et il n'y avait pas d'autre choix que de mettre un terme à ces grèves qui duraient depuis deux mois, dans un cas, et un mois, dans l'autre. Tous s'entendent pour dire - dans cette Assemblée comme à l'extérieur - qu'on ne doit recourir à ce moyen extrême que pour appuyer des demandes essentielles et non d'une façon qui mette en cause l'avenir même des enfants.

Les parents, quant à eux, vous le savez, essaient de s'y retrouver tant bien que mal, ils tentent de comprendre les raisons qui peuvent expliquer de pareilles situations. Je dois dire, hélas! que ce n'est pas en lisant des textes de conventions collectives, réservés pour ainsi dire à des initiés, à des spécialistes du vocabulaire de ces conventions qu'ils pourront y comprendre quelque chose; il faut sûrement d'entrainement pour arriver à comprendre les centaines d'articles qui se trouvent dans ces conventions collectives, mais, les parents y sont tout de même intéressés et les enfants, qui ne les voient jamais, le sont également.

L'intérêt des parents pour ces questions est parfaitement légitime et, en ce qui nous concerne, je pense que le gouvernement doit tenir compte de l'inquiétude qui s'empare des parents et de certains étudiants à l'heure actuelle. Dans le cas des parents, c'est tout à fait compréhensible et je comprends l'état d'âme de ceux de Trois-Rivières en ce moment, puisqu'ils sont les premiers intéressés à l'éducation de leurs enfants. Ils se doivent de nous rappeler, si jamais on venait à l'oublier - comme c'est le cas, en ce moment, aux Vieille- Forges - que c'est l'enfant qui doit être notre principale préoccupation. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: C'est un chant du cygne que nous venons d'entendre de toute évidence, Mme la Présidente.

J'ai tenté, ce matin - à cet égard, je ne voudrais pas accabler le ministre - par une question au premier ministre, d'inviter ce dernier à défendre son ministre de l'Education. Il l'a laissé tomber lamentablement, il a refusé de dire un seul mot à son endroit et il le condamne même, comme il vient de le faire, à venir nous dire l'oraison funèbre que d'autres auraient dû faire.

Mme la Présidente, je vois le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre qui surveille de très près la performance du ministre de l'Education. Je lui suggérerais, lorsqu'il prendra la succession, de le faire sous bénéfice d'inventaire.

Nous voilà donc à la quatrième ou cinquième loi spéciale depuis que ce gouvernement aux bons préjugés est au pouvoir - quatrième ou cinquième, j'ai perdu le compte, Mme la Présidente, on en a eu tellement - en plus d'une tutelle à la Commission des écoles catholiques de Montréal, une autre tutelle dans l'Outaouais. (14 h 50)

C'est dans une perspective bien spéciale aussi que cette loi nous est proposée. Ce qu'il y a de particulier, depuis que le Parti québécois est au pouvoir, Mme la Présidente, c'est que les grèves durent plus longtemps et sur une période de temps plus longue. Savez-vous, en milieu scolaire, seulement en 1979 et en 1980, combien de jours-personne ont été perdus par les enseignants et les autres salariés au Québec dans les négociations provinciales? A la Provincial Association of Protestant Teachers, 78,000 jours; à la Laurenvale School Board, 23,200 jours; dans le secteur collégial, la grève des enseignants du 28 janvier au 15 février, 24,000 jours; pour le personnel de soutien à la CSN, 87,000 jours; pour la grève générale du 28 janvier au 12 février, à la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, 144,000 jours; pour le personnel de soutien, du 25 janvier au 19 février, 180,000 jours; à l'Alliance des professeurs de Montréal, 58,500 jours. Si vous ajoutez les PNE, les professionnels non enseignants, et quelques autres grèves, vous arrivez à 1,249,000 jours. En ajoutant encore les jours perdus en 1979, ajoutez à cela les grèves qui ne sont pas réglées au moment où on se parle. A la Commission scolaire des Vieilles-Forges, à Trois-Rivières, on est rendu à 53,200 jours perdus pour les salariés. On parlera des élèves tout à l'heure, on verra jusqu'à quel point le ministre avait l'air sincère lorsqu'il pleurnichait sur le sort des élèves. Donc, 53,200 jours à Trois-Rivières; à la Commission scolaire Carignarr, 13,320 jours; à la Commission scolaire Baldwin-Cartier, qui est absente d'ailleurs de ce projet de loi, 7,150 jours. Si vous ajoutez les jours perdus par les enseignants qui n'étaient pas en grève, mais qui n'ont pas traversé les lignes de piquetage du personnel de soutien - on se souvient - vous ajoutez encore 400,000 jours perdus, ce qui totalise plus de 2,000,000 de jours-personne perdus par le personnel enseignant depuis que le Parti québécois s'est chargé de faire le bon gouvernement dans les relations du travail dans ce domaine.

Une voix: Succès.

M. Lalonde: Si on parlait des élèves, multipliez ce chiffre par quel ratio, M. le ministre? Par 10? Par 15? Par 17? Alors, vous avez le compte. Si c'est par 17, cela veut dire que c'est incroyable. Soyons un peu plus modestes, donnons une chance au coureur. Je dirais autour de 20,000,000. Le ministre, au mois de juin, avait admis 15,000,000 lorsque nous avons étudié les crédits de son ministère. 20,000,000 ou 30,000,000, on ne sait plus, Mme la Présidente. 25,000,000, 30,000,000, 34,000,000 de jours perdus pour les élèves au Québec depuis 1979 sous le bon gouvernement du Parti québécois. C'est cela la qualité de l'enseignement, M. le ministre, que vous pérorez à gauche et à droite, partout au Québec? Quelle sorte de diplôme signez-vous, M. le ministre? Vous rendez-vous compte que votre ministère, depuis un an et demi, a fait de l'enseignement une situation chaotique qui n'a de comparable que celle de votre ministère?

Parlons de la qualité de l'enseignement. Qu'est-ce qui arrive des régimes pédagogiques? On le saura seulement en 1981. C'est facile, on remet cela à plus tard. Il y a eu quelques nouveaux programmes qu'on n'est pas en mesure de mesurer. On sait, toutefois, que le plan d'éducation physique à l'élémentaire serait sur le point d'être aboli. M. le ministre pourrait peut-être nous répondre là-dessus. Le PEP, ça vous dit quelque chose? C'est important, ça, à l'élémentaire. Est-ce que c'est pour améliorer la qualité de l'enseignement que vous l'abolissez ou si, dans les politiques de restrictions financières d'un gouvernement à demi en faillite, vous devez projeter de l'abolir? Est-ce pour améliorer la qualité de l'enseignement, ça aussi? Est-ce que c'est pour améliorer la qualité de l'enseignement que vous vous apprêtez, paraît-il, à abolir le programme de recherche et d'expérimentation? J'espère que dans votre réplique vous pourrez nous éclairer là-dessus.

Dans quel cadre se déroule ce film d'horreur? Dans un cadre d'administration qui, lui-même, tient de la légende. Nous sommes au fond d'un trou de $500,000,000 d'incurie du ministre, de l'administration. Nous sommes dans une période de centralisation. Comme réaction, justement, à son incurie, qu'est-ce qu'on voit? On voit un effort de centralisation auprès des commissions scolaires alors qu'il avait bien dit, en réponse à des questions que nous lui avons posées en juin: Nous devons contrôler davantage - et

nous sommes d'accord avec le contrôle du gouvernement pour éviter le gaspillage d'un demi-milliard qu'on a vu depuis trois ans - tout en respectant l'autonomie des commissions scolaires. M. le ministre, j'espère que vous allez nous dire dans quelle mesure, de quelle façon vous allez vous y prendre. Jusqu'à maintenant, il semble que le conflit, que vous mettez facilement sur le dos de certains intervenants, de certains agents, soit le résultat direct des restrictions financières que vous-même et le Conseil du trésor imposez actuellement aux commissions scolaires. On aimerait avoir la vérité là-dessus et on aimerait avoir la vérité aussi sur le sort que vous proposez aux commissions scolaires à l'avenir. Est-ce qu'elles seront seulement des chapitres du ministère ou si nous allons pouvoir leur conserver une mesure d'autonomie nécessaire pour l'expression locale des parents et des enseignants dans cette mission importante qu'est l'éducation?

Le cadre de cette loi comprend aussi l'affrontement nourri, carabiné du ministre avec les commissions scolaires depuis quatre ans, la méfiance viscérale que le gouvernement, par son ministre de l'Education, a nourrie pour ces instances locales extrêmement importantes et que nous, du Parti libéral, reconnaissons comme étant extrêmement importantes dans cette mission d'éducation au Québec. C'est un affrontement qui a donné lieu à des poursuites en cour. Le ministre est toujours rendu devant le tribunal. On n'entend parler que de conflits entre les commissions scolaires et le ministre de l'Education, sans parler du coup de force absolument inqualifiable que le ministre a fait à la Commission des écoles catholiques de Montréal.

La Commission des écoles catholiques de Montréal, on s'en souvient, ne voulait pas accepter un certain nombre de choses qui se négocient localement. Alors, le ministre a déclaré une tutelle, a nommé son tuteur qui, pendant la nuit, a signé la convention collective et, après, il est parti. Si ce n'est pas un coup de force, cela, M. le ministre, je me demande comment ça s'appelle. C'est cela, le respect que vous avez pour les instances locales. Ce n'est pas la dernière venue, la Commission des écoles catholiques de Montréal, c'est probablement la plus importante en nombre, en expérience, en responsabilité de notre province. Enfin, c'est le cadre d'administration qui entoure ce que le ministre nous propose aujourd'hui.

Je pourrais vous parler des promesses brisées. Pendant quatre ans, le ministre n'a su que faire de l'enseignement aux adultes. Après trois ans de tergiversations et d'hésitations, il a créé un comité. Quatre ans pour avoir une politique de financement des écoles privées et on ne l'a pas encore...

Une voix: On ne l'a pas!

M. Lalonde: ...après des promesses quasi mensuelles! C'est un véritable roman de voir les promesses du ministre de l'Education à cet égard. (15 heures)

Et la gratuité scolaire? C'est dans le programme du Parti québécois. Naturellement, Mme la Présidente, on sait que le programme du Parti québécois a deux chapitres maintenant: le chapitre des choses qu'on s'engage à ne pas faire comme la souveraineté-association et le référendum, et les choses qu'on s'engage à faire. C'est nouveau, ça. Un proqramme politique, d'habitude, ce sont les choses qu'on s'engage à faire. Maintenant, le Parti québécois invente. Alors, j'espère, M. le ministre, que vous verrez, au prochain congrès de votre parti, à recevoir l'appui pour cette gratuité scolaire que votre parti promet depuis dix ans aux Québécois et que vous avez laissée complètement de côté depuis que vous êtes au pouvoir.

Mme la Présidente, le projet de loi spécial qui nous est proposé se situe dans ce cadre que je viens de vous décrire, un cadre de faillite, d'incurie, de mauvaise administration, et maintenant on nous demande, à nous, législateurs, de bien vouloir appuyer le gouvernement. Tout d'abord, laissez-moi vous dire, Mme la Présidente, que j'ai eu beaucoup de difficulté à prendre au sérieux les larmes du ministre, tout à l'heure, lorsqu'il invoquait le sort que l'on réserve aux enfants. M. le ministre, qu'est-ce que vous avez fait jusqu'à maintenant, depuis le 2 septembre 1980 pour régler la grève aux Vieilles-Forges? Qu'a fait le ministre des Affaires culturelles, député de Trois-Rivières, qui brille par son absence ici, qui aime mieux faire des chicanes avec le juge en chef de la Cour supérieure à Montréal et parler des vieux procès que de s'occuper des affaires de son comté? Qu'a fait le ministre, sauf des grands discours somnifères sur le béton et l'acier et sur la réforme pédagogique, mais, en même temps, qu'est-ce que ça vaut, la réforme pédagogique, M. le ministre, si vous ne vous assurez pas que les écoles ouvrent? Vous vous penchez avec beaucoup d'indulgence sur le sort de ces enfants. Mais, M. le ministre, ça fait 38 jours - pas 38 heures - aujourd'hui qui ont été perdus par les élèves, par chacun des 20,000 élèves aux Vieilles-Forges. 24 jours à la Commission scolaire Carignan pour les 9000 élèves. Quand avez-vous commencé à verser des larmes, M. le ministre? Seulement aujourd'hui? Est-ce que vous avez fait autre chose que vous apitoyez? Il me semble que votre serment d'office vous engaqe à faire davantage.

Parlons de Baldwin-Cartier, ça fait 11 jours aujourd'hui que c'est fermé. Lorsque le gouvernement a décidé de convoquer la Chambre pour prendre connaissance de ce projet de loi, c'est il y a deux jours, on en était rendu à 22 jours à Carignan. Aujourd'hui, nous sommes à 11 jours perdus, fermés, à Baldwin-Cartier. Pouvez-vous nous dire, M. le ministre, quand ça devient nécessaire de faire adopter une loi? Entre 11 et 22 jours? Quand votre coeur commence-t-il à saigner pour les enfants qui perdent... On est intéressé à le savoir, ça, M. le ministre, puisque c'est absolument nécessaire aujourd'hui - et j'en conviens - c'est plus que nécessaire. Le député de Maskinongé, accompagné du député de Portneuf ont dû eux-mêmes se déplacer pour exiger cette convocation de l'Assemblée nationale. Cela fait déjà plusieurs jours. Donc, nous convenons qu'il est grand temps. Mais, M. le ministre, pourquoi pas Baldwin-Cartier? Je vous le demande. J'espère que vous nous direz quand l'année scolaire devient en péril?

M. Morin (Sauvé): Faites un amendement.

M. Lalonde: Pardon, M. le ministre, on n'a pas le droit d'amender la loi, actuellement, vous

nous l'avez défendu ce matin. Donc, si nous sommes, nous de l'Opposition libérale...

M. Rivest ... un trou de mémoire Une voix: II va de trou en trou.

M. Lalonde: II semble que ce n'est pas une trouvaille que le ministre a faite; il a eu un trou de mémoire sûrement là-dessus. Mme la Présidente, il y a deux principes dans ce projet de loi. Le premier, c'est le retour au travail des enseignants, donc, assurer l'enseignement aux enfants, et nous sommes d'accord là-dessus, 100%, nous du Parti libéral. Nous l'appuyons sans aucune hésitation - au contraire, je l'ai dit tantôt, nous l'avons exigé - et nous avons exigé du gouvernement qu'il assure l'enseignement aux enfants ici au Québec. Mais il y a un autre principe aussi. Un autre principe sur lequel le ministre a glissé un peu, quoique, vous savez, dans le langage des technocrates qui ont préparé son discours, on parle du lourd, du léger, etc. C'est très lourd pour nos taxes, M. le ministre, ce que vous payez, de toute façon. J'entendais le ministre se vanter de ce que cela coûte cher l'enseignement au Québec. Mais c'est effrayant! Il se vantait de cela. Cela coûte, ici au Québec, l'enseignement d'un enfant, $500 de plus qu'en Ontario. Vous vous vantez de cela, M. le ministrel Cela fait quatre ans que vous êtes là et vous n'avez pas réussi à mettre de la rigueur dans votre administration; ça coûte $500 de plus par année, par enfant, pour l'enseignement au Québec comparé à l'Ontario.

M. le ministre, j'aurais aimé que vous nous disiez davantage pourquoi dans l'article 11 - je sais qu'on n'étudie pas l'article maintenant - vous demandez au législateur d'intervenir dans ce qui semblait être réglé parce que c'est une question qu'on nous pose. Comment se fait-il que ce n'est pas réglé? Il me semblait qu'avant le référendum, dans la période critique préréférendaire, le gouvernement avait réglé tout cela, la question des enseignants, la question des relations du travail dans l'enseignement et dans le reste. Comment cela se fait-il? Est-ce que cela a été mal écrit, M. le ministre? Est-ce que le libellé est assez large pour donner ouverture à toutes sortes d'interprétations, de sorte que vous venez nous demander à nous, les législateurs, de sabrer dans la convention collective et de lui faire dire ce que vous pensez qu'elle devrait dire? J'espère que non. Nous l'avons examiné ce projet de loi; nous aurons des questions à vous poser à l'étude article par article et nous voulons être rassurés là-dessus. Nous croyons que si la convention collective a été signée, quels que soient les motifs du gouvernement, à ce moment-là, d'éviter tout problème à cause du référendum, le gouvernement doit respecter sa signature. Nous allons avoir des questions à vous poser à cet égard. Donc, si nous sommes, nous de l'Opposition libérale, en faveur du projet de loi spécial, c'est uniquement parce qu'il nous apparaît que cette loi spéciale est aujourd'hui le seul moyen d'assurer l'ouverture des écoles qui sont frappées par les conflits de travail.

La loi spéciale n'est sûrement pas la meilleure solution. Je pourrais citer des discours du ministre de l'Education, il y a quatre ans, que je relisais, mais on n'a pas le droit de s'amuser autant ici à l'Assemblée nationale. Ce n'est sûrement pas la meilleure, ce n'est sûrement pas la solution qui assure la paix scolaire dans les écoles - cela vous rappelle des souvenirs, M. le ministre, la paix scolaire, en 1976? - mais c'est la seule voie qui peut nous mener vers la reprise de l'enseignement dans les écoles. Nous avons le droit, nous avons le devoir de vous poser un certain nombre de questions; j'en ai posé quelques-unes. En ce qui nous concerne, dans l'Opposition, nous croyons que le ministre de l'Education est le grand responsable de la situation actuelle. En effet, si le gouvernement péquiste impose des restrictions budgétaires aux commissions scolaires qui, d'autre part, doivent appliquer la convention collective signée par ce même gouvernement, c'est qu'il y a une raison; la raison, on a le droit de la savoir. Est-ce que c'est parce que le ministre des Finances n'a pas fait ses devoirs? A-t-il mal calculé ses prévisions budgétaires? (15 h 10)

A cause de l'incertitude politique engendrée par la présence d'un parti indépendantiste au pouvoir, on le sait, M. le Président, vous le savez comme nous, l'économie du Québec ralentit. La rentrée des impôts est moins élevée que ce que prévoyait le ministre des Finances. Tout le monde le sait, le ministre des Finances a émis des directives très sévères pour tenter de colmater le bateau qui coule. Son déficit de $2,300,000,000 au mois de mars serait plus près de $2,500,000,000 aujourd'hui, M. le Président. Donc, c'est une des raisons des restrictions budgétaires imposées par le gouvernement aux commissions scolaires.

Il y a aussi une autre raison et c'est celle du fameux trou de $500,000,000 qui s'est creusé sous les yeux mêmes du ministre de l'Education sans qu'il ne le voie pendant trois ans. Naturellement, le Vérificateur général a confirmé l'incompétence et l'incurie administrative au ministère de l'Education depuis trois ans. Le ministre n'a pas su prévoir, il n'a pas su corriger le gâchis de son ministère avant le mois de novembre 1979 et là, c'est important. Pendant trois ans, le ministre de l'Education a vu des gaspillages de centaines de millions de dollars qu'il n'a pas su arrêter et ce n'est qu'en novembre 1979 - rappelez-vous cette date - qu'il en a avisé son collègue des Finances. Or, quelques semaines à peine auparavant, le ministre des Finances offrait 1,600 nouveaux postes dans la négociation de la convention collective des enseignants. Ces 1600 nouveaux postes sont maintenant dans le système ou enfin, pour la durée de la convention et ils coûtent ou coûteront au bas mot $35,000,000 à $40,000,000 par année.

Le ministre des Finances lui-même dans son discours du budget de mars 1980 admettait que s'il avait connu le coût véritable du système d'enseignement primaire et secondaire au Québec, il n'aurait jamais fait l'offre de 1600 postes. Donc, à cause de l'incompétence et de l'incurie administrative de son collègue de l'Education, le ministre des Finances admet que cela nous coûte à nous, payé à même nos taxes, de $30,000,000 à $40,000,000 de trop par année pour le seul système primaire et secondaire. Le ministre des Finances veut-il les récupérer sur le dos des enseignants, sur le dos de l'enseignement, sur le dos de la paix scolaire, sur le dos de la qualité

de l'enseignement? Impose-t-il donc des restrictions budgétaires aux commissions scolaires gui sont prises entre deux feux, comme je le disais tout à l'heure? Serait-ce la deuxième raison majeure? M. le Président, nous posons ces guestions au ministre.

Il reste - je vais terminer là-dessus - que notre appui à la loi est un appui aux parents qui s'inguiètent, à bon droit, du sort fait à leurs enfants dans ces commissions scolaires. C'est un appui à la gualité de l'enseignement gui est mise en péril comme jamais auparavant par l'incurie du gouvernement péguiste, mais c'est une condamnation, condamnation gue nous crions, M. le Président, à l'égard du gouvernement et du ministre de l'Education.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Gaspé. M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: M. le Président, lorsgu'il s'agit d'un conflit de travail gui affecte des services publics jugés essentiels pour une société, le gouvernement doit faire preuve d'un esprit de décision. Vous me direz gue c'est là une vérité de La Palice. Malheureusement, ce ne l'est pas pour tout le monde et sûrement pas pour le gouvernement actuel.

Je déplore le fait gue le gouvernement se voie dans l'obligation, pour la guatrième fois en guelgues mois seulement, d'avoir recours à une procédure gui constitue, à sa face même, l'admission d'un échec lamentable de sa part vis-à-vis de l'électorat québécois. Voilà maintenant guatre ans gue je siège en cette Chambre et je n'arrive pas à m'habituer à ce scénario de plus en plus loufogue gue nous impose le gouvernement chague fois qu'un conflit de travail met en danger un service essentiel destiné au grand public, qu'il s'agisse des services de santé ou, comme dans le cas présent, des services d'éducation.

M. le Président, loin de moi l'idée de nier le droit d'association des travailleurs; loin de moi l'idée de nier le droit de ceux-ci d'entreprendre des négociations de bonne foi, des négociations avec la partie patronale pour la conclusion de conventions collectives en vue d'établir des conditions de travail acceptables et dignes d'une société qui se veut civilisée et à la fine pointe du progrès.

Ces droits sont reconnus et il est bon qu'il en soit ainsi, mais dans les secteurs public et parapublic en particulier, il faut reconnaître, en toute responsabilité, que ces droits d'association et de négociation ne doivent pas s'ériger en absolu face à des droits aussi fondamentaux que le droit à la santé et aussi le droit à l'éducation.

Les conflits de travail gui ont provoqué la tenue de cette session spéciale illustrent bien le problème de fond auquel nous faisons face aujourd'hui et gue malheureusement, encore une fois, nous risquons d'escamoter, soit par faute de temps, soit par faute de volonté populaire d'aller vraiment au fond des choses. Cela m'apparaît beaucoup plus grave, beaucoup plus tragique.

M. le Président, nous pourrions discourir longtemps sur l'aspect technigue de ce conflit, je devrais plutôt dire sur l'aspect technocratique de ce conflit, tellement la question, qui est au coeur de ce problème qui oppose enseignants et commissions scolaires, est complexe et, en définitive, ne peut être comprise dans toute sa signification que par des experts de ce domaine.

Bien au-delà des questions d'interprétation de conventions collectives et des accusations qu'on se lance de part et d'autre pour justifier soit la grève, d'une part, soit le lock-out d'autre part, je voudrais profiter du temps qui m'est accordé pour sensibiliser les membres de cette Assemblée et, bien sûr, la population qui nous écoute, sur la nécessité pour nous, législateurs, d'aller un peu plus loin dans notre réflexion d'aujourd'hui et d'aborder franchement la question de fond, la racine du mal qui est la source de tous ces conflits qui, depuis un an au moins, nous ont forcés à siéger de manière urgente pour adopter ce qu'il est convenu d'appeler les lois matraques.

M. le Président, il ne faut pas camoufler la réalité, il ne faut pas avoir peur de dire les choses telles qu'elles sont, nous sommes ici pour refléter, dans tous ses aspects, la réalité sociale et politique du Québec. Nous devons avoir le courage de nos convictions et agir aussi en conséquence.

M. le Président, vous le savez comme moi, la population guébécoise est vraiment à bout de nerfs, elle en a soupé de ces conflits interminables et trop fréquents dans tous les secteurs publics et parapublics. La population québécoise ne veut plus que, pour des motifs de stratégie de négociations ou encore pour la défense de principes qu'un groupe peut estimer essentiels à son bien-être, on remette en cause ces droits aussi fondamentaux, des droits aussi essentiels que celui de la santé ou encore pour revenir au problème qui nous préoccupe aujourd'hui, ce droit à l'éducation.

Je suis certain que je me fais le porte-parole de l'immense majorité des citoyens en affirmant que, dans une société civilisée, il est insensé, il est inadmissible même que l'on permette à un groupe de citoyens, nonobstant les raisons qui les motivent, de mettre en péril, de nier catégoriguement à toute une population sans défense des services auxquels ces mêmes populations ont un droit fondamental. J'inclus dans cette catégorie de droits fondamentaux le droit des enfants à une éducation de qualité. (15 h 20)

D'ailleurs, on tend à oublier et trop rapidement que ce droit à une éducation de qualité, à une éducation publique accessible à tous, est consacré dans la Charte des droits et libertés de la personne adoptée par cette Assemblée. En effet, on lit à l'article 40 de cette charte, sous le titre Droits économiques et sociaux, ce qui suit: "Toute personne a droit, dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi, à l'instruction publique gratuite." Or, qu'en est-il, en réalité, de l'existence de ce droit dans les conflits actuels, particulièrement dans la région de Trois-Rivières où, depuis le début de l'année scolaire, des enfants au nombre d'au moins 20,000 n'ont jamais mis les pieds dans l'école, n'ont même pas eu une seule journée de classe? Il ne peut exister, à mon avis, une raison capable de justifier une telle situation au point de vue moral. Je sais que la loi à l'heure actuelle le permet, mais le temps n'est-il pas

venu de réévaluer cette législation qui permette à de telles situations de se produire, des situations qui, en définitive, nous enlisent dans un cul-de-sac qui mène irrémédiablement à la loi matraque?

Je l'ai constaté mercredi lors d'un passage à Trois-Rivières. A l'occasion d'une ligne ouverte, nous avons reçu des témoignages vraiment époustouflants. On sentait là-bas que le climat est pourri et les gens sont exaspérés et les parents sont excédés face à leur impuissance. On sent là-bas qu'il y a un sentiment de dégoût qui ne peut laisser personne indifférent. J'ai été frappé également par les nombreux témoignages reçus alors que j'ai passé quelques heures dans l'après-midi et dans la soirée à rencontrer des gens. C'était toujours le même raisonnement que l'on faisait: Pensez-vous que nos enfants vont enfin retourner à l'école après deux mois d'absence?

C'est un plaidoyer en faveur du bon sens, en faveur du respect des droits fondamentaux des citoyens que je fais aujourd'hui. Je demande à mes collègues de cette Assemblée et tout particulièrement à ceux qui détiennent le pouvoir et, avec ce pouvoir, la faculté de changer les règles du jeu, je demande à tous ces gens d'entendre cet appel qui ne vient pas seulement de l'Union Nationale, mais bien d'une vaste majorité de citoyens québécois dans toutes les régions du territoire.

Au cours d'une brève tournée en province que j'ai entreprise au début du mois d'octobre, j'ai eu le loisir de discuter de cette question avec de nombreux contribuables et j'ai pu constater aussi bien à Trois-Rivières où j'étais il y a deux jours, aussi bien chez les jeunes du collège d'Alma où j'étais la semaine dernière, aussi bien chez les gens de Roberval et de Chicoutimi, aussi bien à Matane, à Rimouski, à Rivière-du-Loup et à La Pocatière, que le temps est propice à une action gouvernementale qui s'attaquerait à la racine du mal, c'est-à-dire la remise en cause du droit de grève dans le secteur public.

L'Union Nationale, M. le Président, a déjà fait oeuvre de pionnier dans ce domaine. Au mois d'octobre 1979, l'Assemblée nationale du Québec adoptait à l'unanimité une motion présentée par l'Union Nationale qui se lisait comme suit: "Que cette Assemblée est d'avis que la commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre soit convoquée afin d'étudier la possibilité de remplacer le droit de grève dans les secteurs public et parapublic par une formule de négociation permanente comprenant l'arbitrage obligatoire pour le règlement des clauses normatives et l'élaboration d'une politique salariale basée sur la moyenne payée dans le secteur privé."

M. le Président, nous sommes revenus à la charge constamment depuis ce temps pour connaître, pour essayer de sonder les intentions du gouvernement face à ce voeu unanime de tous les membres de l'Assemblée nationale. Le 5 mars dernier, à peine quelques jours après mon entrée en fonction comme chef intérimaire de l'Union Nationale, je demandais au premier ministre ses intentions à ce sujet et celui-ci m'avait dit à l'époque ce qui suit:"On ne peut pas donner au nouveau chef de l'Union Nationale la date de la commission à laquelle on s'était engagé, mais une chose est certaine, c'est qu'aussitôt qu'on verra un peu plus clair, que les conflits importants, surtout celui qui affecte les professionnels du gouvernement, seront réglés et qu'on sera sorti du débat actuel, sûrement qu'on pourra discuter avec les intéressés de cet engagement qui a été pris et qui sera tenu."

Le 17 juin 1980, quelques heures à peine avant la prorogation de la dernière session, le leader parlementaire du gouvernement ajoutait à mon collègue de Richmond la précision suivante et je cite: "C'est notre voeu unanime, à l'Assemblée, de respecter l'ordre de la Chambre. En ce qui concerne la réunion sur les relations du travail dans les secteurs public et parapublic que la commission doit tenir à la suite d'un ordre de la Chambre, maintenant que les règlements sont tout à fait terminés avec tous ceux avec qui nous avions à négocier, il devient possible de nous rendre au voeu de la Chambre. Je crois simplement - on en discutera plus profondément -qu'il serait plus opportun de tenir à l'automne ce genre de consultation plutôt qu'au milieu des vacances parce que ce n'est pas simplement entre nous que nous devons tenir cette discussion mais, bien sûr, avec tous les partenaires impliqués." Le leader s'exprimait donc en ces termes le 17 juin 1980.

Nous voici déjà rendus à l'automne et on veut en discuter plus profondément, comme l'a dit lui-même le leader parlementaire. Je pense à l'importance du sujet pour tout le monde: travailleurs, parents, étudiants, malades dans les hôpitaux et centres sociaux; vraiment tout le monde exige qu'on passe à l'action et cela le plus vite possible. Je demande donc encore une fois au leader parlementaire du gouvernement de consulter ses collègues du Conseil des ministres le plus tôt possible au sujet de la convocation de cette commission parlementaire. Je tiens à lui dire tout de suite que l'Union Nationale ne voit aucune objection à élargir le cadre de cette réflexion au grand public. Nous serions très heureux que cette initiative de l'Union Nationale débouche sur une action concrète qui mènera éventuellement à une révision en profondeur des règles du jeu pour les négociations des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic.

Je demande au leader du gouvernement aujourd'hui de prendre l'engagement ferme de donner suite aux propos qu'il a tenus lui-même en cette Chambre le 17 juin dernier à l'effet que ce soit à l'automne, c'est-à-dire maintenant qu'on tienne la consultation demandée par notre formation politique et approuvée unanimement par tous les membres de cette Chambre.

Le projet de loi no 113 doit passer à l'histoire comme étant le dernier d'une série de lois matraques qui ont servi de soupapes d'urgence à trop de gouvernements pour régler des problèmes qui exigeaient une intervention beaucoup plus en profondeur, qui exigeaient, en somme, des solutions à long terme et non des cataplasmes de dernière minute dans un climat de panique et d'urgence. Je disais, au début de mon intervention, que l'existence de ce projet de loi, le quatrième présenté par ce gouvernement qui nous avait promis un nouveau départ, un nouveau climat social, est la preuve d'un échec lamentable que la population ne lui pardonnera jamais. Bien sûr, le gouvernement a failli à son engagement, il

n'a pu faire mieux que le gouvernement précédent et - il faut bien le dire - le ministre de l'Education doit également se rendre à l'évidence qu'il partage cette responsabilité d'échec de son gouvernement. (15 h 30)

Que ce soient les conflits sérieux qui ont opposé le ministre et les commissions scolaires depuis plus de trois ans, que ce soit le fouillis administratif qui a donné naissance à un trou financier de plus de $500,000,000 de l'argent des contribuables, que ce soit le recours, pour la deuxième fois, dans l'espace de quelques mois seulement, à des lois matraques pour mettre fin à des conflits de travail dans le domaine de l'éducation, je pense qu'il s'agit là d'un triste bilan pour le ministre de l'Education qui se voit aujourd'hui dans l'obligation de parrainer un projet de loi qui illustre dans les faits les difficultés qu'il a eues à imposer sa marque et à conduire à bonne fin les projets qu'il s'était initialement imposés lors de sa nomination à ce poste.

Il semble de plus en plus certain, s'il faut se fier aux rumeurs, que le ministre parrain de la loi 113 occupera bientôt de nouvelles fonctions au sein du Conseil des ministres. J'aurais préféré, pour ma part, si cette information est exacte, que ce changement se fasse dans de meilleures circonstances. M. le Président, mon collègue de Nicolet-Yamaska disait ce matin, en parlant sur la motion d'urgence, qu'il faut éviter, en politique, de prendre ses rêves pour des réalités, car, tôt ou tard, il arrive toujours que ces réalités prennent le dessus et, à ce moment-là, c'est la désillusion, l'amertume, même quelquefois le désespoir.

Nos collègues d'en face, députés du Parti québécois, sont sûrement aujourd'hui désillusionnés face au bilan très négatif du gouvernement dans le domaine des négociations des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic. Ils peuvent se réconforter car ils ne sont pas les seuls à partager cette opinion. Ils ne sont pas les seuls à partager cette désillusion. La population entière du Québec partage aujourd'hui ce sentiment et nul doute qu'aux prochaines élections générales, qui ne sauraient tarder en 1981, les députés ministériels vont récolter les fruits de cette semence et se verront sévèrement répudiés par les contribuables québécois.

M. le Président, si j'ai insisté surtout sur le problème de fond, c'est que je vais laisser à mon collègue de Mégantic-Compton le soin d'aborder le sujet dans des détails plus précis et plus techniques. Merci, M. le Président.

M. Fontaine: II est déjà élu! M. Johnson: M. le Président... Le Vice-Président: M. le ministre du Travail. M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, vous me permettrez, d'abord, une première remarque. Le sujet que nous touchons aujourd'hui est quand même d'une certaine importance pour environ 20,000 étudiants, quelque 1000 enseignants ou un peu plus même que 1000 enseignants et les populations de la région de Sorel-Tracy et de la grande région de Trois-Rivières. C'est pour ça, M. le Président, que je vous dirai que je suis convaincu que, s'il fallait que les débats à cette Assemblée se situent au niveau où le député de Marguerite-Bourgeoys les a situés tout à l'heure, cela deviendrait, M. le Président, intolérable pour les citoyens du Québec et indigne du traitement de sujets importants en cette Chambre.

M. le Président, on a demandé tout à l'heure quelle avait été l'implication des membres du gouvernement et du côté ministériel dans ce conflit. Le ministre de l'Education a eu, tout au long de l'entente nationale, à y représenter les intérêts de la collectivité à travers une série de règles qui avaient été établies par ce Parlement il y a déjà deux ans. Il a, dans les deux conflits locaux sur lesquels nous légiférons spécifiquement quant au retour au travail, eu à suivre, lors de ces semaines de grève, presque quotidiennement, le déroulement de la négociation et à s'en inquiéter et à en faire rapport à celui qui vous parle, dans la mesure où celui qui vous parle avait la responsabilité de mettre en branle les mécanismes du Code du travail au niveau local. A cet égard, je pense que son implication, je pense aussi que son souci d'homme public et d'homme respectant d'abord et avant tout le mandat qui découle des lois de ce Parlement sont tout à son honneur.

Je voudrais également souligner les interventions nombreuses et malgré tout sereines à travers ces difficultés de mon collègue de Trois-Rivières, de celui du comté de Champlain et du député de Richelieu. Ils étaient préoccupés, comme je le présume, le député de Maskinongé a dû l'être également, par ce qui se passait chez eux; ils étaient préoccupés par ce qui arrivait à des citoyens, à des jeunes, à des enseignants et à une population qu'ils connaissent.

M. le Président, il faut bien, pour mieux voir, reprendre la perspective de ce conflit et de ce qui nous a amenés ici, ce qui a amené cette notion d'une négociation à deux paliers. Le ministre de L'Education, tout à l'heure, l'a évoqué avec une assez grande précision; je reprendrai simplement brièvement ce tableau pour être bien sûr qu'on se comprend.

Historiquement, au milieu des années soixante, le Québec a connu une revalorisation ou une valorisation de l'enseignement. A cet égard, des hommes et des femmes qui avaient consacré une partie de leur vie à enseigner étaient, jusqu'au début des années soixante, sous-payés et même méprisés à certains égards par une partie de la société. Le milieu des années soixante a permis cette revalorisation et le travail accompli par les gouvernements successifs, depuis le milieu des années soixante, a fait en sorte que ces efforts qui étaient nécessaires dans notre société, sont arrivés à amener l'Etat à définir les règles du jeu en matière de négociations parce que les négociations devaient amener la dépense de fonds publics considérables. C'est ainsi que les derniers développements dans ce secteur ont amené - par les lois 55 et 59, on s'en souviendra, pour la définition du cadre des négocations des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic - à établir une règle très simple et très claire pour tout le monde, à savoir que les conséquences financières, ce qui va coûter de l'argent aux "payeurs de taxes" du Québec, cela devait se négocier au niveau québécois, c'est-à-dire dans son ensemble; c'est la

négociation dite provinciale ou nationale. Par ailleurs, d'autres sujets pouvaient faire l'objet d'ententes au niveau local entre un syndicat et une commission scolaire ou un syndicat et un conseil d'administration d'hôpital dans le secteur de la santé. Qu'est-ce qui s'est passé dans les faits? Il s'est passé dans les faits qu'il y a eu, au cours de l'hiver dernier, une entente de principe intervenue entre le gouvernement du Québec, l'Etat à travers les lois adoptées par ce Parlement, et la Centrale de l'enseignement du Québec et qu'à ce titre le ministre de l'Education est intervenu dans la signature d'un instrument, comme on le dit en droit, d'une convention collective, au mois de mai dernier. Le président de la Centrale des enseignants du Québec est également intervenu et il a signé ces documents. Or, il fallait donc que les négociations locales reprennent. Ce qui avait duré, dans certains cas, en même temps que la négociation nationale sur les grandes clauses à conséquence financière. Dans le cas, par exemple, de Carignan, Sorel-Tracy, 50 séances de négociations ont eu lieu jusqu'à ce que soit déclenchée une grève à la fin du mois de septembre. (15 h 40)

II y a eu conciliation les 24, 28 et 29 septembre, les 1er, 3, 5 et 6 octobre, et au cours de ces séances de conciliation, il y a eu certains progrès accomplis sur ce qu'on appelle les clauses locales qui, dans certains cas, peuvent toucher l'affichage, la réaffectation ou la participation des enseignants, les versements de traitement, le calendrier scolaire, etc. Et là, un point central, comme on le verra tout à l'heure dans le cas de Trois-Rivières, a achoppé, c'est-à-dire toute cette question de ce qu'on appelle le 8-6, la question des ratios et des conséquences que l'on connaît à cela.

Dans le cas des Vieilles-Forges, c'est-à-dire de toute la région de Trois-Rivières, 25 février, première rencontre entre les parties, entre l'Association des commissions scolaires catholiques des Vieilles-Forges et le Syndicat des enseignants des Vieilles-Forges. En février, mars et avril, 24 séances de négociation en direct. Le 8 avril, demande de conciliation au ministère du Travail. Le 16, nomination de M. Normand Gauthier, conciliateur au dossier. Du 22 avril au 28 mai 1980, seize séances de conciliation. Du 12 au 20 juin, offres globales et finales de la commission et rejet par les enseignants. Juillet et août, calme plat que je reproche ici aux représentants de la commission scolaire et aux représentants des enseignants, un calme plat qui est inadmissible.

Le 20 août, à la demande du conciliateur et à ma demande auprès de celui-ci, convocation des parties, l'impasse subsistant. Puis la grève, comme on le sait, le 2 septembre. 22 séances de conciliation entre le 4 et le 23 septembre. Le 1er octobre, étant donné l'impasse, nomination de l'enquêteur en vertu de l'article 111 du Code du travail et le 10 octobre, signification des procédures demandant au tribunal d'ordonner le retour au travail.

Ce qui s'est passé, à toutes fins pratiques, c'est qu'entre autres, après 40 séances de négociation et de conciliation, pas un article n'était paraphé. C'est ce qui s'est passé dans le cas des Vieilles-Forges en particulier. On a le droit de se poser des questions sur ce qui se faisait à cette table. Cela a achoppé essentiellement autour de deux grands aspects de la négociation: le thème véhiculé dans la région de Trois-Rivières, entre autres, sur la notion de droits acquis et également cette question du ratio, c'est-à-dire du nombre de professeurs qu'on voudrait voir la commission scolaire s'obliger contractuellement à embaucher.

Sur la question des droits acquis, il faut bien comprendre que dans le cadre d'une convention collective, c'est une des notions les plus répandues, les plus connues et les plus populaires, je dirais. Quand un syndicat a obtenu dans une convention collective certaines choses, il n'aime pas qu'on revienne dessus, de façon générale, et c'est normal. Il ne faut pas en être surpris, mais ce qui est différent dans le cas présent, c'est que les deux demandes syndicales, à savoir la conservation des acquis au niveau local en 1976-1977 dans certains cas, sont contradictoires avec une entente nationale signée par le représentant de la Centrale des enseignants du Québec. A cet égard, on ne peut pas parler de droits acquis dans la mesure où le président de la CEQ, en signant, a accepté de remettre en cause des dispositions qui, par ailleurs, pouvaient affecter ces enseignants à Trois-Rivières. On ne peut pas mettre non plus en cause la bonne foi ni du gouvernement, dans cela, ni des négociateurs au niveau, je présume, de la partie patronale dans la mesure où, à cet égard - et à cet égard seulement - ils se référaient à l'entente nationale, ni, évidemment, la bonne foi ni l'efficacité ni l'énergie des conciliateurs et des différents intervenants du ministère du Travail. Ce qui s'est fait au niveau national et ce qui a été échangé, peut-être, par exemple, tout le problème de la répartition des journées pédagogiques, l'a été dans un contexte qui, normalement, est un contexte de donnant, donnant, un maximum de tâches, la sécurité d'emploi sous la notion du 50 kilomètres.

On présume que quand le président de la Centrale des enseignants du Québec a signé ce document, il avait accepté, peut-être en échange, de renoncer à certaines dispositions qui, par ailleurs, avaient fait l'objet d'ententes antérieures aux Vieilles-Forges, en 1976-1977 ou même avant ça. A cet égard, il faut bien se rappeler qu'aux Vieilles-Forges, depuis dix ans, il n'y a jamais eu de convention collective authentique de signée. Le règlement, aux Vieilles-Forges, s'est toujours fait par décret ou par une espèce d'acceptation de quasi-arbitrage comme en 1976-1977; il n'y a pas une très longue tradition de signature aux Vieilles-Forges entre les parties; il faut s'en rendre compte aussi.

Evidemment, il y a toute cette question des ratios sur laquelle, je présume, mes collègues reviendront.

La négociation, à certains égards, est devenue une affaire de spécialistes. Une convention collective nationale de 223 pages, M. le Président, ç'a commencé quelque part dans les années soixante. Une convention locale de près d'une centaine de pages échangée entre le Syndicat des Vieilles-Forges en particulier - puisque je parle de ce conflit en ce moment - et la partie patronale; 150 pages de demandes ou de documents syndicaux, et à peu près l'équivalent ou un peu moins du côté patronal, c'est devenu une affaire de spécialistes.

Par exemple, sur l'affichage, pas l'affichage des postes, l'affichage pour savoir quant aux assemblées syndicales, etc., de nombreuses pages dans une convention collective; le syndicat veut faire une partie d'huîtres, c'est compliqué, quatre pages et demie à peu près de procédures pour savoir où on peut mettre ça sur un babillard. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas aux Vieilles- Forges. Et je ne suis pas sûr que ce soit seulement le syndicat qui soit responsable à cet égard. Si la partie patronale elle, de son côté veut annoncer - je ne sais pas - un tarif réduit sur les autobus pour aller à une partie des Expos, même chose: des procédures interminables, sur l'allocation des locaux, par exemple, dans la commission scolaire. Il y quelque chose qui ne va pas aux Vieilles-Forges.

A cet égard, c'est à se demander si les spécialistes de la négociation, de part et d'autre, ne sont pas devenus des obsédés de la virgule et où on présente une victoire sur une peccadille, pour le monde en vie, l'enseignant ou le commissaire ou la population ou l'enfant. On se met à ériger au niveau d'une victoire existentielle, la victoire sur une virgule. A un moment donné, il faut que ça cesse. Il faut s'apercevoir que les enjeux et les conséquences sont disproportionnés.

Les conséquences. Une fois qu'on a clarifié les questions monétaires, une fois qu'on le sait tous, comme ç'a été le cas, il y a deux ans, que ce qui est monétaire, lourd comme on dit dans le langage technique, c'est du ressort national, c'est du ressort de l'Etat dans son ensemble; une fois qu'on a clarifié que le document signé par le président de la CEQ - qui est une entente - c'est la parole d'un syndicat et c'est la parole de la Fédération des commissions scolaires et qu'il faut le respecter, une fois qu'on a conclu ça, une fois qu'on sait qu'il faut respecter ces deux choses, il reste maintenant à régler des choses sur le plan local et ces choses ne semblent pas - soit dit en passant - en voie de règlement, ni à Carignan ni aux Vieilles-Forges. C'est pour ça que cette loi, à toutes fins pratiques, est issue de la comparaison entre ce qu'on pourrait appeler les intérêts, d'une part, de l'ensemble de la population qui est affectée à Carignan ou à Trois-Rivières, aux Vieilles-Forges et, d'autre part, les intérêts que je ne pense pas qu'on puisse qualifier de vitaux dans les circonstances, ni pour la commission, ni pour les enseignants. Il faut accepter - c'est le rôle de l'Etat, c'est le rôle de cette Assemblée - de trancher dans le sens de ce qui, au meilleur de notre jugement, est le bien commun. C'est peut-être ça qui est difficile de définir. (15 h 50)

A cet égard, la loi impose donc le retour au travail et prévoit quinze jours pour les parties pour s'entendre. Si elles le désirent, elles pourront parapher des textes et, en l'absence de textes ce sera l'imposition de l'arbitrage sur ces questions, sur l'ensemble des questions à l'exception, cependant - c'est très clair dans le projet de loi - de ce qui voudrait être ou pourrait être perçu ou voulu comme détournant la règle du jeu fondamentale qui avait été posée quant aux questions financières, à savoir qu'on ne peut pas, par la voie locale ou réqionale, remettre en question des choses qui devaient faire l'objet d'une entente nationale, être réglées entre l'Etat responsable de l'ensemble des ressources fiscales, c'est-à-dire des taxes des citoyens, et le monde de l'enseignement.

A cet égard, M. le Président, je pense que cette loi était devenue inévitable, qu'elle est évidemment opportune et qu'elle est juste. Je souhaite évidemment que dans ces deux régions, comme dans toutes les autres régions où il y aura cette négociation locale sur les objets locaux, on en revienne à la normalité, celle que nous recherchons tous et celle qui est au fond de tous les êtres que je connaisse, ici et ailleurs. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de Portneuf. M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. Quatrième loi spéciale, dans des délais quand même assez brefs, déposée par le gouvernement du Québec, le gouvernement du Parti québécois. Le gouvernement doit, à la lumière du projet de loi no 113 qui est déposé aujourd'hui, reconnaître qu'il a manqué à son engagement, qu'il a manqué à ses promesses, promesses qu'il avait faites pendant la campagne électorale de 1976 notamment et aussi pendant les trois ans où il a formé l'Opposition officielle ici, à l'Assemblée nationale. Le gouvernement a manqué à l'engagement qu'il avait pris de rétablir un climat de sérénité et un climat de confiance au chapitre des relations du travail au Québec entre l'interlocuteur gouvernemental, l'interlocuteur des commissions scolaires, ou tout le secteur de ses associés, dans les négociations dans les secteurs public et parapublic. La loi no 113 d'aujourd'hui vient confirmer l'échec des mécanismes et des modifications législatives qui ont été apportées à nos lois existantes par le gouvernement, notamment lorsque celui-ci a présenté la loi no 55.

Aujourd'hui, M. le Président, on peut accepter à la rigueur le discours que vient de faire le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, qui a fait un discours de futur ministre de l'Education ou de prétendant au ministère de l'Education, parce que celui-ci n'était pas là, celui-ci n'était pas à l'Assemblée nationale entre 1973 et 1976. Mais le ministre de l'Education, lui, y était; il était chef de l'Opposition à l'époque. Tout cela nous permet aujourd'hui de constater que la population du Québec, la population de la Mauricie, la population de Trois-Rivières, du Cap-de-la-Madeleine, la population de Sorel, récolte comme état de fait, comme climat social, ce que le Parti québécois a semé pendant ces années.

Il faut se rappeler, M. le Président, que lorsque le Parti québécois était dans l'Opposition, il a adopté des attitudes qui ont été marquantes. Le Parti québécois, cela a été la caution d'à peu près toutes les causes où il y avait de l'agitation, de la contestation et où on s'en prenait au gouvernement de l'époque. Le Parti québécois dans l'Opposition et le chef de l'Opposition d'alors en tête, qui est aujourd'hui ministre de l'Education, ont cautionné des actions, des demandes formulées par des syndicats envers le gouvernement, employeur et patron, dans la dernière ronde des négociations. Qu'on se rappelle, Mme la Présidente, le préjugé favorable

aux travailleurs. Les ténors du Parti québécois de l'époque - ce qui d'ailleurs a été repris par plusieurs candidats dans la campagne de 1976 -avaient un préjugé favorable à l'égard des travailleurs, ce qui allait impliquer qu'un gouvernement formé par le Parti québécois allait non seulement régler les problèmes, mais qu'il allait en faire plus, qu'il allait en donner plus pour les travailleurs.

Rappelons-nous la position du premier ministre du Québec pendant la campagne électorale de 1976. Rappelons-nous le débat qu'il avait eu avec le premier ministre d'alors, M. Bourassa, sur une chaîne de radio ici au Québec. Celui-ci disait et je cite - c'est le premier ministre d'aujourd'hui qui parle, M. Lévesque -: "Ce n'est pas seulement un slogan quand on dit que ça ne peut plus continuer comme ça, surtout dans ce domaine des relations du travail où tout l'équilibre repose sur le respect que doivent se porter les interlocuteurs. Quand quelqu'un est brûlé, il faut le changer et ça commencera à aller mieux quand le Québec sera dirigé par un gouvernement capable de rétablir un climat de dialogue de bonne foi entre toutes les parties; un climat de paix et d'ordre social, bien sûr, mais que seul pourra amener un gouvernement qui se préoccupe aussi très clairement de la justice et dont la fermeté et la capacité de décision - pas de traîner indéfiniment - vont de pair avec le sens de l'équité."

Qu'est-ce que c'est, Mme la Présidente? Ils ne traîneraient plus, les conflits, avec eux, il y aurait du leadership moral! Je me rappelle que c'était l'expression favorite du candidat dans Taillon, qui est aujourd'hui premier ministre du Québec: du leadership moral! Il ne devait plus y avoir de conflits au Québec, il devait y en avoir moins avec eux, ils devaient établir des mécanismes qui verraient à régler ces problèmes. Cela a donné quoi? Mon collègue le député de Marguerite-Bourgeoys en a fait état tout à l'heure; on aura l'occasion d'y revenir lorsque les rondes de négociations seront terminées et on comparera les chiffres en termes de nombre de jours-homme et jours-femme perdus au Québec dans le cadre de conflits de travail dans les négociations des secteurs public et parapublic. Quand ce sera terminé, on pourra comparer la performance de ce gouvernement qui se disait si bon avant d'être placé aux guides de la société du Québec et de former le gouvernement.

On se rappellera que tout cela a créé un certain engouement, ces déclarations, ces engagements de la part des gens du Parti québécois. Rappelez-vous la position adoptée par le Parti québécois au lendemain de la prise du pouvoir. On se rappellera que des poursuites avaient été intentées en vertu de la loi 23, des poursuites par lesquelles le Procureur général du Québec avait porté plainte contre des syndicats, contre des syndiqués, contre des personnes qui n'avaient pas respecté une loi adoptée par l'Assemblée nationale du Québec. Il y a eu des poursuites, il y a eu des condamnations qui s'élevaient à un minimum de $4,240,000. Rappelez-vous ce que Marc-André Bédard, ministre de la Justice, nous disait. Le ministre de la Justice, Me Marc-André Bédard, a donné les arguments suivants pour justifier le retrait des poursuites à l'époque:"Premièrement, certaines dispositions de la loi étaient inadéquates par rapport à l'objectif de la loi. Deuxièmement, le gouvernement libéral précédent avait fait un usage abusif de ces lois en entretenant une politique de provocation dans les relations du travail par ses lois spéciales. Troisièmement, il faut s'interroger sur les effets sociaux de telles poursuites. Quatrièmement, la ligne de conduite du gouvernement doit se situer au niveau de l'intérêt général et de la paix publique. Il faut rétablir enfin un climat de confiance dans les relations du travail, ce qui est un prérequis à la paix sociale."

D'autres députés y ont ajouté, comme le député de Sainte-Marie, M. Bisaillon. M.

Lévesque, premier ministre, disait à l'égard du retrait des poursuites: "A notre avis, tout bien pensé, c'était, au point de vue de la santé sociale, de la santé législative et de la santé judiciaire du Québec, la seule décision qui pouvait être prise de façon cohérente." Santé sociale. En enlevant les infractions et en se retirant des poursuites et des plaintes, cela allait améliorer le climat social. Qu'est-ce qu'il y a eu d'amélioré avec le nombre de jours-homme et de jours-femme perdus et les millions de jours qui ont été perdus dans nos écoles au Québec depuis que le PQ est à la tête des négociations?

Cela devait améliorer la santé législative. La santé législative? Quatre lois spéciales, deux tutelles. La santé judiciaire? Les injonctions n'ont pas été respectées. L'injonction émise par le juge Larue de la Cour supérieure n'a pas été respectée, pas de poursuite intentée, ce n'est pas gravel C'est ça la santé judiciaire du premier ministre, député de Taillon. On parle de santé judiciaire alors que n'importe lequel des membres de ce gouvernement se permet de dire n'importe quoi, de bafouer la magistrature. On en a eu un exemple combien éloquent par les positions adoptées par le député de Trois-Rivières, ministre des Affaires culturelles, dans le cas de l'affaire Coffin, le ministre qui, soit dit en passant, aurait été pas mal mieux de s'occuper du conflit aux Vieilles-Forges et des travailleurs qui sont en grève depuis le 2 septembre, des parents qui voient leurs enfants dans l'incapacité de se rendre aux cours.

Tout cela a donné quoi, ces promesses, ces engagements, ce léchage de bottines de la part des péquistes? Cela a fait en sorte que des gens de bonne foi ont cru à la franchise et à l'honnêteté intellectuelle des péquistes, des gens qui forment le gouvernement du PQ. Ces gens se sont trompés. (16 heures)

Ce qui est le plus éloquent à l'appui de ce que je soutiens, c'est leur bilan depuis 1976. Les conséquences de tout ça, ce furent des rondes de négociation difficiles parce que les gens, à juste titre, je pense, s'attendaient à aller en chercher plus avec le gouvernement du PQ. Des milliers et des milliers de jours-homme perdus, des millions de jours-enfant perdus dans nos écoles, une autre aujourd'hui qui arrive pour venir régler le cas de deux commissions scolaires: celle des Vieilles-Forges et celle de Carignan, après beaucoup de tergiversations, d'attente, d'attentisme et de placotage de la part de certains responsables gouvernementaux.

Aujourd'hui, Mme la Présidente, vous savez, j'entends le ministre de l'Éducation ou encore le ministre du Travail nous dire: C'est terrible, ces

gens-là gagnent des bons salaires, l'incapacité de payer des contribuables, il met en relief le salaire minimum au Québec, ce qu'ont dû vivre et subir les parents. C'est beau, tout ça, mais ça traîne depuis le 2 septembre. Quand, par surcroît, le ministre du Travail vient nous dire que le conciliateur a été nommé le 16 avril, qu'il y a eu plusieurs séances de conciliation entre le 16 avril et le début de juin, qu'au début de juin, les enseignants et les enseignantes se sont prononcés sur les offres finales, ces gens-là savaient qu'il n'y avait aucune négociation pendant l'été. Où est-ce qu'il était, le ministre du Travail qui vient nous dire aujourd'hui: 11 faut adresser des reproches tant à la commission scolaire qu'aux enseignants? Pourquoi l'avez-vous laissé traîner pendant l'été? Pourquoi, dès le 2 septembre, voyant que les parties demeuraient polarisées sur leur position initiale, n'avez-vous pas amorcé le processus législatif? Pourquoi est-ce qu'il y a eu tout le dédale de procédures? Vous étiez obnubilé, à ce moment-là, par les élections. Vous étiez en train d'analyser les sondages et vous veniez de constater, ça vous a pris quelques semaines pour le constater, que vous alliez vous faire laver.

Mme la Présidente, vous savez, quand ces gens-là viennent nous dire: II y a deux paliers de négociation, palier de négociation provincial et palier de négociation local, c'est vrai. Mais, tout ça, c'était connu, le 2 septembre. La grève a causé des préjudices. Des milliers d'élèves ont été affectés. Aujourd'hui on se retrouve dans la situation où l'année scolaire est en péril. Le ministre de l'Éducation actuel, pour aujourd'hui, l'a confirmé tantôt. Ni le ministre de l'Éducation, ni le ministre du Travail ne nous ont fait état de la possibilité de récupération. Puis, dites-vous bien que cette situation, qui est combien difficile pour les parents, les élèves et la société en général, n'est certes pas plus facile pour les travailleurs qui sont en grève. Cela ne doit pas être drôle d'être sur une ligne de piquetage. Cela ne doit pas être drôle d'être sur une ligne de piquetage, les 22, 23 octobre, quand tu n'as pas eu de revenu depuis le 2 septembre. Il faut se dire une chose aussi: ces gens-là qui enseignent, ils en ont des enfants aussi et ils sont conscients de l'impact du geste qu'ils posent. Dites-vous bien que la position du gouvernement dans ce dossier est telle que la grève était très probablement inévitable et ce, pour deux motifs.

Premier élément, c'est que le noeud du problème, le fond du problème, ce sont les mécanismes de la convention collective qui a été signée au niveau provincial, les articles 8.2, 8.5 et 8.9 et l'interprétation à donner à ces articles. Le ministre du Travail nous a dit tantôt que le syndicat des Vieilles-Forges était probablement un des syndicats au Québec qui avaient les meilleurs contrats pour ses syndiqués. Ceux-ci plaident droits acquis. On peut tout au moins convenir que ce sont des avantages qui ont été acquis en vertu d'une négociation précédente. Le gouvernement, aujourd'hui, par l'entente nationale, par aussi un motif de restriction budgétaire - et j'y reviendrai tantôt - s'est senti l'obligation d'indiquer clairement à tous les interlocuteurs que le nombre d'élèves - le gros problème, le noeud du problème - devait être déterminé non pas en fonction de 8.9 mais en fonction de 8.2 et 8.5 de la convention nationale. Ces gens-là disent quoi?

Ces gens-là disent: on va batailler, on va se défendre, on va alléguer, on va demander et on va faire des pressions, dont le droit de grève, pour maintenir des avantages qu'on a acquis.

Par surcroît, Mme la Présidente, les syndicats qui négocient aux niveaux locaux avaient la conviction que ça pouvait se régler au niveau local parce que, dans certains cas, des choses, des avantages ont été donnés au niveau local. Quand, par surcroît, vient s'ajouter une déclaration comme celle que le ministre de l'Education a faite à la mi-septembre à Trois-Rivières... Je l'ai entendu moi-même sur les ondes de CHLN, le ministre de l'Éducation venu dire: C'est la responsabilité de la commission scolaire locale. On a eu une entente provinciale qui a été négociée. Il reste maintenant l'entente locale à régler et cette responsabilité est inhérente à la commission scolaire locale. Je ne sais pas si c'est par inadvertance, par ignorance ou encore pour se laver les mains que le ministre de l'Éducation a dit cela, mais il l'a dit. Si moi, je l'ai entendu, il y a certainement des travailleurs touchés par ce conflit qui l'ont entendu et c'est partant de là notamment, par une déclaration additionnelle comme celle-là, que les gens, dans le milieu, ont dit: Le problème va se régler au niveau local et c'est là qu'il doit se régler. Il ne peut pas se régler en fonction et en vertu de la convention provinciale et on n'est pas liés par cela parce que le mandat est strictement local. Ces questions doivent être négociées au niveau local.

L'autre côté de la médaille, ce sont les commissions scolaires; commissions scolaires qui ont eu à subir l'ingérence et le mépris du gouvernement du Québec depuis quatre ans, coup sur coup, régulièrement, de façon soutenue et continuelle. Jamais un gouvernement n'a démontré et manifesté autant de méfiance et de mépris à l'égard du monde scolaire que le gouvernement du Parti québécois, le gouvernement de M. René Lévesque l'a fait, jamais. Ces mêmes commissions scolaires se sont fait enlever de plus en plus de responsabilités, de droits et de latitude. Ces mêmes commisisions scolaires ont à vivre avec des restrictions budgétaires sans précédent actuellement avec, d'une part, la réforme de la fiscalité municipale et, d'autre part, les implications, les suites du trou de $500,000,000 où, encore une fois, le gouvernement s'est encore lavé les mains; il a rejeté le ballon et il a rejeté le petit sur les commissions scolaires. Parce que, dites-vous bien, entre parenthèses, Mme la Présidente, que ce gouvernement a toujours raison. Ce gouvernement ne fait jamais d'erreurs, selon lui. Ce gouvernement est infaillible.

Il y a un paquet de gens qui ont appris à se méfier des ténors qui venaient nous dire qu'ils avaient toujours raison. La faute en est encore aux commissions scolaires. Les commissions scolaires sont tellement limitées dans les possibilités en vertu des restrictions qui leur sont imposées, d'une part, et aussi en vertu de la loi 57 que des marges de manoeuvre, elles n'en ont pas.

On n'a qu'à se référer à la directive du sous-ministre de l'Éducation, M. Girard, en date du 4 septembre 1980, qui dit: "Les coûts additionnels résultant de toute entente locale qui serait ainsi contraire aux dispositions de l'entente négociée et agréée à l'échelle nationale - c'est là

que c'est important - seront assumés exclusivement par la commission scolaire." Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que, si vous débordez le cadre national, messieurs des commissions scolaires, peu importent les limitations que vous avez, vous irez- taxer chez vous et, si vous allez à plus de $0.25 en vertu de la réforme de la fiscalité, référendum dans le secteur. C'est cela que ça veut dire. D'une part, on a une partie syndicale qui avait peut-être des avantages acquis en vertu d'un ancien contrat et qui veut continuer à se battre - et je pense que c'est légitime, tout au moins, de le demander -et, de l'autre côté, on a une commission scolaire qui est très limitée, qui ne peut pas aller plus loin. Cela voulait dire l'impossibilité pour les commissions scolaires d'aller plus loin. Cela voulait dire que la commission scolaire est en quelque sorte prise à la gorge, les mains dans le dos et bien attachées.

Ce n'est pas facile pour les commissions scolaires, vous savez. C'est malheureux, on n'aura peut-être pas le temps d'en parler aujourd'hui, mais on pourrait en parler, des problèmes que rencontrent nos commissions scolaires.

Saviez-vous, Mme la Présidente, que les commissions scolaires sont obligées de couper sur des éléments importants de services pour payer le chauffage dans les commissions scolaires dans le moment? Ces dépenses ont été indexées de 5%; on sait comment les coûts ont augmenté depuis quelques années dans le pétrole. Qu'est-ce qui arrive avec l'impression des conventions collectives au niveau local? Normalement, lorsque c'est signé au niveau local, on envoie cela au ministère de l'Éducation, le ministère l'imprime et il retourne les copies. Ils ont eu une directive, il n'y a pas lonqtemps. On n'a plus d'argent pour payer cela. Cela vient du Conseil du trésor, on ne paie plus les coûts d'impression. Je suis convaincu que cela va se régler d'ici quelques jours.

Cela, Mme la Présidente, reflète la situation financière dans laquelle est le gouvernement du Québec, le gouvernement du PQ. Je vous dirai, avec ironie, qu'il faudrait peut-être prévoir un amendement constitutionnel pour permettre au gouvernement d'une Législature, donc au gouvernement du PQ de présenter une proposition de faillite éventuellement. Cela n'a pas de bon sens, la façon dont ça fonctionne.

Mme la Présidente, on a la loi spéciale. Par cette loi, le gouvernement, l'Assemblée nationale vient écrire une nouvelle partie de la convention. On aura deux types de conventions et de contrats: ceux qui auront signé avant le 24 octobre et qui auront réussi à aller en chercher plus au niveau local. L'autre type de convention, ce sera pour ceux qui siqneront après le 24 octobre. (16 h 10)

Cette loi vient changer une partie des règles du jeu précédemment établies. On aura l'occasion de l'étudier tantôt en commission plénière article par article. On aura des points à faire valoir et des questions à soulever, mais, dans tout ce débat, il demeurera un problème de fond même après la loi. Que les députés du Parti québécois ne partent pas avec la conviction que le problème est réglé. Les problèmes seront loin d'être réglés après l'adoption de cette loi. Il y aura encore la question de la marge de manoeuvre des commissions scolaires et - il faut le constater - le malaise au sein des enseignants. Ce n'est pas facile pour les enseignants de vivre avec une situation où certains programmes d'enseignement sont tout simplement enlevés, de vivre avec ce qu'on appelle dans le jargon le "bumping" où on dit: Toi, mon vieux, tu n'enseignes plus là parce que c'est un autre qui prend ta place, l'ancienneté, etc. Ce n'est pas facile de vivre avec le reclassement quand on dit à un enseignant, à un travailleur qui a étudié pour travailler et enseigner les mathématiques: Mon vieux, c'est fini. Madame, c'est fini. Vous allez enseigner de la physique maintenant. Il y a des situations qui ne sont pas faciles et c'est ce qui explique en bonne partie le caractère tendu des relations entre l'employeur, les commissions scolaires, le gouvernement et les syndicats.

J'aurais aimé aussi que le ministre de la Justice soit ici aujourd'hui pour nous dire ce qu'il va faire avec le problème du non-respect des injonctions. Dans le prochain discours inaugural du 5 novembre, il y aura certainement une annonce assez pompeuse que le gouvernement va venir modifier les dispositions permettant à un employeur de recourir à une injonction. Il y a eu une injonction qui a été demandée. Elle n'a pas été respectée. Qu'arrive-t-il? Que fera le gouvernement à cet égard? C'est quand même une décision d'un tribunal.

Il y a aussi un autre élément. Je me permets de le demander. Je suis convaincu, j'espère que la loi va être respectée. Au cas où la loi ne serait pas respectée, le gouvernement, par la voix du premier ministre, peut-il d'ores et déjà annoncer que, si des poursuites sont intentées en vertu de la loi 113 tel que c'est prévu, ces poursuites ne seront pas retirées ni abolies par la suite comme il l'a fait? Je suis convaincu que le gouvernement doit le regretter, doit s'arracher les cheveux d'avoir fait cela en 1977, mais il l'a fait. Il a fait son lit et il a cautionné ainsi des actions parfois irresponsables que malheureusement, aujourd'hui, on doit vivre. Le gros problème de tout cela, c'est que la population récolte aujourd'hui. La population du Québec paie le prix de l'irresponsabilité de trois ou quatre ans d'administration gouvernementale du Parti québécois. Merci.

La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires culturelles.

M. Denis Vaugeois

M. Vaugeois: Mme la Présidente, c'est une journée qui, apparemment, est plus agréable, plus drôle pour les gens de l'Opposition que pour la députation ministérielle.

Des voix: Oh!

M. Vaugeois: A entendre le député de Portneuf et le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est un grand moment de jouissance. C'est l'occasion de citer de vieux discours et d'avoir l'air, finalement, malgré des apparences qu'ils essaient de cacher, malgré une façade qu'ils essaient de camoufler, de laisser croire qu'on se rapproche d'une étape convoitée depuis longtemps et qu'on se réjouit finalement des difficultés d'une société.

Lorsque le chef intérimaire de l'Union Nationale est passé dans notre région, il a constaté une situation et aujourd'hui, honnêtement, il a su en rendre compte. Le député de Gaspé a senti le désarroi de parents, de jeunes et également - je pense qu'il faut le dire - de ceux qui sont directement impliqués dans ce conflit, les enseignants. Il n'y a personne chez nous qui pavoise actuellement. Il n'y a personne qui se réjouit des difficultés rencontrées. Il n'y a personne qui se réjouit de cette impasse qui est la nôtre dans notre milieu, qui touche le monde de l'enseignement, mais qui touche également d'autres secteurs de notre société. Nous vivons une période particulièrement difficile où les relations du travail dans d'autres entreprises ont connu des moments de difficulté sans précédent, je crois, chez nous. Je donne le crédit au député de Gaspé d'avoir reconnu tristement une situation pénible. Elle est également pénible pour les gens du gouvernement qui ont à recourir à certains moyens au nom de l'ordre public.

Les gens chez nous, au début du dernier conflit que nous vivons dans le domaine de l'enseignement se sont demandé ce qui se passait encore une fois, parce que effectivement ce n'est pas la première fois.

Pendant des générations les enseignants, au Québec, ont été silencieux, n'ont à peu près jamais rien revendiqué. Il faut voir d'ailleurs dans quelles conditions se faisait leur travail, il y a une vingtaine d'années, au moment où se laïcisaient les cadres d'enseignement, au niveau secondaire en particulier, et au moment où se créait le collégial public.

On ne s'est peut-être pas habitué suffisamment à ce que cette classe de travailleurs ait des conditions de travail décentes. Il y a des gens qui ne l'ont pas encore compris, qui ne l'ont pas encore accepté. Au début du dernier conflit, chez nous, il s'est trouvé bien des gens pour dire: Qu'est-ce qu'ils ont à se plaindre? Comme je suis un ancien enseignant et comme je le redeviendrai peut-être, et aux yeux de l'Opposition, le plus tôt serait le mieux... Messieurs de l'Opposition, croyez-moi, je n'aurais pas honte de retourner à ce métier que je respecte profondément.

Mais pour l'instant, j'aime mieux être au pouvoir, ici, que de vous voir au pouvoir à Québec. Bien des gens ont été portés, cette fois-ci comme d'autres fois précédentes, à jeter la pierre, à dire: Des vacances l'été, des vacances à Noël - je l'ai entendu, comme enseignant - des vacances, un nombre d'heures limité par semaine, 22 heures, de quoi se plaignent-ils? C'est dangereux, ce nombre de jours par année, ce nombre d'heures-semaine, ce ratio maître-élèves. Tous ceux qui ont enseigné, tous ceux qui enseignent savent fort bien que 15, 20 ou 30 élèves dans une classe, parfois 50 à certains niveaux, posent autant de cas particuliers. L'enseignant apprend à vivre avec un groupe d'élèves. Il sait fort bien que quand son groupe est trop nombreux, son rendement est moins bon. Voilà pourquoi cette question a été débattue et que des progrès importants ont été réalisés ces dernières années.

Le nombre d'heures par semaine est trompeur, le nombre d'élèves par classe est trompeur, le nombre de jours par année est trompeur.

Les gens qui sont allés dans l'enseignement n'y sont pas allés par appât du gain; ils n'y sont pas allés pour se tailler une carrière facile, pour avoir la vie facile. C'est un métier qui, au moment où il a été choisi par la majorité des enseignants, était un métier qui ne payait pas, un métier ingrat, mais un métier qui a ses satisfactions. C'est ce qui a amené dans l'enseignement des gens qui, pour autant, aujourd'hui, n'ont jamais renoncé à des conditions de travail qui font que leur enseignement est meilleur.

Cela, les gens, je pense, malgré un conflit difficile, le réalisent progressivement. Ce qui me frappe, dans ce conflit, c'est que les gens, après avoir jugé les enseignants, certains après les avoir critiqués, d'autres après leur avoir donné leur chance, se tournent, en désespoir de cause, vers le gouvernement, parce que, ces derniers jours, des pétitions nous étaient adressées. J'en ai porté comme je n'en ai jamais porté ici. J'ai vu les parents, en moins de quatre jours, réunir 18,600 signatures. Ils les ont adressées aux membres du gouvernement. Ils étaient, comme le disait le député de Gaspé, en plein désarroi. Ils ont quand même, à mes yeux, sauté un niveau de responsabilité, le niveau du patron local, le niveau de la commission scolaire. Les gens d'en face défendent cette institution. Cette institution est en place.

Je ne fais que m'étonner aujourd'hui qu'on saute si allègrement par-dessus ce niveau de responsabilité. Je crois que les règles du jeu se clarifient d'année en année, de convention en convention. Il y a des choses qui sont à négocier localement, des choses qui ont été négociées sur la plan national.

Je pense qu'il faut reconnaître que chez nous, cet été, on n'a pas négocié très intensément et je pense qu'il faut reconnaître également que la partie syndicale a été prête tout l'été à négocier. Je le sais. Je connais ces gens. Ce sont d'anciens collègues, ce sont des gens avec qui j'ai travaillé. Je sais qu'ils négocient durement. Je sais qu'ils travaillent sans arrêt, qu'ils travaillent avec acharnement au niveau de leur convention. Je leur ai dit moi-même que je trouvais que l'épaisseur des documents pour régler un certain nombre de problèmes me paraissait assez volumineuse.

Je leur ai dit ces choses. Mais je reconnais par ailleurs, publiquement, leur grand mérite et leur désintéressement total quand ils négocient.

De l'autre côté, cet été, cela a été pendant de longues semaines le silence. Est arrivée la rentrée scolaire et les enseignants ont été entraînés dans un mouvement de grève qu'ils n'avaient jamais souhaité aussi long, c'est certain. Mais les circonstances les ont défavorisés. Je pense qu'il faut en faire l'aveu, nous-mêmes, nous avons amené un élément qui a un peu brouillé les cartes. (16 h 20)

Le fait d'être à la veille possible d'une élection pouvait laisser croire à ces gens que la perspective d'une élection ou même le déclenchement d'une élection pourrait ramener un certain nombre de concessions de dernière heure parce qu'il y a des précédents à cet égard. Les gens chez nous ont la mémoire de ce qui s'est passé en 1976, par exemple, alors que des travailleurs, à la veille d'une élection... Le député de Jean-Talon vient de se faire réprimander du

regard par son chef, parce que son chef sait qu'en 1976, des concessions assez importantes ont été consenties à des travailleurs qui, je le crois bien, le méritaient, mais qui leur ont été concédées un peu rapidement, tout simplement par souci électoral. D'ailleurs, les travailleurs ont bien répondu à ces concessions un peu trop faciles, à ce moment-là. Cette fois-ci, il était légitime pour des gens en stratégie de négociation de se dire: On est à la veille d'une élection possible, cela s'est déjà passé de cette façon, on peut peut-être essayer; on peut peut-être essayer d'aller chercher des choses auxquelles on tient et sur lesquelles, moi, je ne me pose plus de questions parce que j'avoue humblement que je m'y perds à certains moments. C'est vraiment devenu, comme on l'a déjà indiqué, une affaire de spécialistes.

Il reste qu'il y a des choses générales que nous pouvons saisir, des choses importantes que les enseignants nous expliquent, des choses importantes que la partie patronale fait valoir. Je constate, par ailleurs, qu'il n'y a pas d'absolu dans ce domaine, puisque ce que revendique la partie patronale a été concédé en partie ailleurs et c'est vivable. Je prendrai pour exemple le CEGEP chez nous. A d'autres moments, j'en conviens, un ratio maître-élèves peut être discutable puisque, moi comme d'autres, nous en avons fait l'expérience et dans d'autres pays également, cela se pratique de diverses façons; les ratios sont différents et les systèmes d'éducation ne sont pas abominables pour autant. Il n'y a pas de vérité absolue, mais il y a des négociations. Il y a des négociations qui se déroulent et je pense que se réjouir des impasses, se réjouir des difficultés, ce n'est pas à l'honneur de qui que ce soit. Les parents chez nous et les enfants, quand ils ont la chance de s'exprimer - parce que ce sont des groupes qui ne sont pas organisés et qui souffrent d'autant plus de la situation actuelle - quand ils réussissent à faire entendre leur voix, ils disent: Ecoutez! il y a des problèmes; cela a bien l'air évident; il y a des problèmes à régler, mais est-ce qu'il y aurait moyen de continuer à discuter de ces choses sans pour autant compromettre l'enseignement, sans pour autant compromettre l'école. Les enseignants, gui font métier d'enseignement et qui veulent améliorer l'enseignement, sont un peu pris à leur propre jeu à ce moment-ci en compromettant même la qualité d'une année. Voilà pourquoi, à ce moment-ci, nous croyons que le gouvernement, qui ne devrait pas normalement avoir à intervenir -sa part a été faite - intervient. Sa part a été faite; elle a été faite avec la CEQ et la partie patronale.

Je pense que je ne choquerai personne en insistant sur ce que le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre a rappelé tout à l'heure et sur ce que le Nouvelliste nous rappelle encore ce matin. Il faut le dire. Avant de vous réjouir à l'excès, il faut quand même vous rendre compte de ce qui se passe et de l'enjeu. Il y a chez nous, au niveau syndical, des gens gui avaient obtenu, dans des négociations, lors d'une entente antérieure, avec un arbitre et tout, des choses qui, sur certains points, paraissaient meilleures que ce qui est obtenu dans l'ensemble actuellement. Il y a eu une contrepartie à cela et le ministre de l'Éducation l'a bien expliqué. Il reste quand même que pour les gens chez nous, c'est difficile sur certains éléments d'avoir l'air de les échanger pour autre chose qui a été négociée à un autre niveau.

Tout le monde sait, pour ceux qui ont suivi cela, qu'au début de cette année, ce qui a été accepté par une majorité de gens à la CEQ ne l'était pas chez nous, ne l'était pas par une majorité d'enseignants chez nous. Les gens sont allés très loin aux Vieilles-Forges. Ils sont allés presque aussi loin que de dénoncer l'exécutif de la CEQ. A certains moments, il y a eu rumeur même que certains d'entre eux voulaient demander la démission du président de la CEQ. Il y avait rumeur qu'on allait demander la démission de l'exécutif de la CEQ. Cette partie doit être également connue et rappelée. Ces enseignants ont momentanément contesté le vote majoritaire et la position de l'exécutif de la CEQ. Par la suite, ils se sont promis - c'était leur droit -d'essayer de reprendre un certain combat au niveau local. Ils ont profité des moindres zones grises pour essayer de reprendre certaines discussions, de reprendre certaines choses. Plutôt que de poursuivre dans la voie de dénonciation, vis-à-vis des chefs syndicaux, ils se sont ralliés. Ils ont manifesté une solidarité, mais ils ont décidé de reprendre une certaine lutte sur le plan local, et nous en sommes là.

Ce matin, un porte-parole du groupe syndical, chez nous, a mis ses cartes sur la table. Le Nouvellilste le rapporte en page 30 avec le titre suivant: "Le gouvernement pourrait s'éviter l'odieux d'une loi spéciale". Le qualificatif est de lui, et je suis d'accord; "l'odieux d'une loi spéciale", il n'y a rien de réjouissant là-dedans, sauf pour l'Opposition. Raymond Johnston le déclare avec en sous-titre: "Si le gouvernement acceptait de reconsidérer ses directives budgétaires."

L'article de la Presse canadienne commence de la façon suivante: "Selon le négociateur du Syndicat des enseignants des Vieilles-Forges, M. Raymond Johnston, le gouvernement pourrait s'éviter l'odieux d'une loi spéciale s'il acceptait seulement de reconsidérer ses directives budgétaires découlant de l'entente négociée au niveau provincial. Cette entente fixait les normes permettant de calculer le nombre d'enseignants gui serait reguis dans chacune des commissions scolaires, c'est-à-dire le ratio maître-élèves. L'entente prévoit aussi un nombre maximum d'heures de travail pour chaque enseignant ainsi que des maxima d'élèves"... Il reste donc, sur le plan local, à négocier certaines choses que je ne rappelle pas et, à un moment donné, nous lisons ceci: "Le problème se complique encore, selon M. Johnston, alors que les commissions scolaires, en vertu de la réforme de la fiscalité municipale, sont tenues de se soumettre à un référendum pour toute augmentation de taxes scolaires découlant de dépenses non subventionnées. Il n'en fallait pas davantage pour que les patrons transforment en charge minimale la charge maximale de travail prévue dans l'entente." C'est une citation qu'on attribue toujours à M. Johnston, et ainsi de suite.

M. Johnston et l'exécutif du syndicat chez nous, et les enseignants chez nous, souhaiteraient - ils le disent clairement - que le gouvernement retire les directives budgétaires qui découlent d'une entente nationale qu'eux n'ont jamais

voulue, n'ont jamais souhaitée et, momentanément, n'ont pas acceptée. C'est cela la réalité. C'est la réalité brutale de la partie patronale, également, au niveau local avec en face d'eux des négociateurs que je qualifierais à certains moments de presque impitoyables. Ceux qui les connaissent savent que ces gens-là travaillent tout le temps, avec acharnement; pour l'instant, dans leur existence, c'est la bataille qu'ils ont choisi de livrer. Je souhaiterais qu'à certains moments ils mettent autant d'énergie sur autre chose, mais, à ce moment-ci, c'est leur engagement, c'est leur bataille. Cela les a menés dans ce que nous avons convenu être une impasse. C'est faire preuve de responsabilité pour un gouvernement, à un tel moment, d'entendre la voix des parents, d'écouter, d'être attentif au drame des enfants, d'être attentif également à ce qui n'est plus que le désarroi des parents et qui devient aussi le désarroi des enseignants. Ces gens-là ont un métier d'enseignants pour enseigner. Si, pendant des années, ils ont été entraînés par des mouvements de grève, sans doute qu'il faudra se pencher là-dessus et essayer de modifier ces processus. Ce n'est pas notre propos aujourd'hui.

Notre propos, aujourd'hui, c'est, ensemble, d'essayer de sortir de ce climat très tendu alors que chacun en veut à son voisin, chacun se méfie de son voisin. Chacun vérifie à quel moment la solidarité va se fractionner; les parents surveillent d'autres groupes de parents. Il y a des appels, actuellement, dans les journaux disant: Attention à tel autre groupe de parents, ainsi de suite. Une société ne peut pas vivre comme cela. Ce qui est important, à ce moment-ci, c'est de ne pas vouloir régler tous les problèmes alors que la tension est extrême; il faut essayer de retrouver un peu de calme.

Cette loi appelle finalement, de la part du gouvernement, compte tenu justement des discours tenus par le passé, beaucoup plus de courage qu'il n'en paraît. Je peux le dire sans dévoiler nos discussions du Conseil des ministres, je peux dire que j'ai résisté, pour ma part, jusqu'à la limite, à cette démarche, et le ministre du Travail m'a offert une collaboration exceptionnelle en utilisant tous les recours possibles, toutes les étapes possibles, sauf que je voudrais bien savoir lequel, aujourd'hui, pourrait prétendre que nous ne sommes pas dans une impasse.

Qu'on nous propose d'autres moyens d'en sortir; on n'en a pas trouvé, on n'en a pas trouvé dans les discours antérieurs. Aujourd'hui, nous sommes réunis pour considérer une décision délicate à prendre. Déjà, nous pressentons, de toute façon, que le vote pourrait être unanime sur cette proposition du ministre de l'Éducation. Le résultat ne sera pas de régler tous les problèmes, mais d'éviter de compromettre tout à fait l'année scolaire d'un groupe de 20,000 étudiants. Je pense que c'est le geste que nous avons à poser et, après, de nous tourner à nouveau vers des problèmes qui nous ont amenés dans une escalade, année après année, pour essayer peut-être de changer les modalités, la façon de traiter un certain nombre de choses. (16 h 30)

Déroger à l'entente nationale, retirer les directives budgétaires, moi, comme enseignant, je voudrais bien. Je voudrais bien parce qu'il n'y a pas un groupe de travailleurs actuellement, je n'en connais pas, qui se considèrent trop payés; je n'en connais pas. Les travailleurs, les uns après les autres, devant l'inflation, souhaitent un meilleur salaire, de meilleures conditions de travail. Et les enseignants sont comme les autres travailleurs. Ils savent qu'ils pourraient encore améliorer leurs conditions. Nous savons également que, dans cette société, il y a des groupes de travailleurs qui ont des salaires passablement supérieurs aux leurs sans faire nécessairement un travail aussi important. Les parents, à ce moment-ci - et c'est peut-être un des bons côtés de la chose - sont amenés à reconnaître l'importance du travail des enseignants. Ils réclament leur retour au travail et nous allons le leur demander.

Mais, cette situation-là... Je serais d'accord pour les retirer... Je vous remercie, M. le député de Jean-Talon.

La Vice-Présidente: M. le ministre, vous devez conclure, il vous reste deux minutes.

M. Vaugeois: D'accord, je vais conclure là-dessus et je vous remercie, c'est ce que je voulais dire en terminant. Si les autres secteurs de la société, les autres secteurs dont je n'ai pas à rappeler les problèmes, dont je n'ai pas à rappeler les difficultés, étaient gavés, si la distribution de la richesse qui est la nôtre était réglée, nous pourrions peut-être, sur ce plan-là, ajouter au fardeau financier des propriétaires, ajouter au fardeau financier de celui qui paie des impôts, de celui qui paie des taxes. Mais je pense qu'à ce moment-ci, ce qui a été consenti aux enseignants n'est certainement pas excessif, mais c'est sans doute raisonnable, puisque d'ailleurs la CEQ en a convenu, pour un autre bout de chemin. Ce qu'il nous reste de faible marge de manoeuvre dans ce régime politique, je pense que nous devons le réserver à d'autres groupes de citoyens moins favorisés.

La Vice-Présidente: M. le député de Maskinongé.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Mme la Présidente, la remarque qu'a faite mon collègue de Trois-Rivières il y a quelques instants est déplacée, grotesque et insipide, celle que les gens qui trouvent ça drôle dans une journée comme celle qu'on vit aujourd'hui, ce sont les gens de l'Opposition. Il ne s'agit pas d'avoir beaucoup d'expérience en cette Chambre pour s'apercevoir que les gens qui étaient heureux lorsqu'il y avait un conflit de travail au Québec étaient bien le député de Sauvé, étaient bien son collègue, le leader parlementaire du gouvernement présentement, lorsque eux-mêmes descendaient dans la rue, lors des conflits en 1974, 1975, 1976, pour inviter des gens à ne pas lâcher, pour dire aux gens: Lorsque vous manifestez en avant, nous, on va aller s'amuser avec le gouvernement d'en face. C'est ça exactement. Je trouve grotesque la remarque du député de Trois-Rivières. Il y aurait eu bien d'autres choses à faire dans le conflit que de faire ce qu'il vient de faire.

Mme la Présidente, on est en face d'un gouvernement que j'appellerai un valseur à deux

têtes. Vous venez d'avoir, plus respectueusement, mon collègue de Trois-Rivières, ministre par surcroît, qui vient de dire tout simplement: Ce n'est pas drôle d'être professeur, Mme la Présidente, c'est exigeant, ça demande beaucoup de choses, ça exige que les gars soient obligés de se recycler. Vous avez eu le côté où on disait: Ces pauvres enseignants, aujourd'hui, on est obligé de leur passer la matraque sur la tête par une loi spéciale. C'était le côté du député de Trois-Rivières, valseur à une tête.

Vous avez l'autre valseur qui est le ministre de l'Éducation, le grand député de Sauvé qui se sauve devant ses responsabilités plus souvent qu'à son tour. Vous avez cet autre valseur qui lui... Voulez-vous demander au mythomane de Lévis, s'il vous plaît, de se tenir tranquille? Vous regarderez ce que c'est qu'un gars qui souffre de mythomanie.

Mme la Présidente, je n'ai dérangé personne pendant que les autres ont parlé et je ne tiens pas à ce qu'on me déranqe. Mme la Présidente, cet autre valseur, qui s'appelle le député de Sauvé, vice-premier ministre par surcroît... Justement, s'il peut y avoir un remaniement ministériel pour qu'on le place en arrière de son collègue de Chauveau, ça va être une bonne chose pour les Québécois. Ce grand valseur, ministre de l'Éducation, est venu dire, lui: Vous savez, les enseignants, il ne faut pas se pâmer là-dessus, ils travaillent à peu près 180 jours par année. Ils travaillent à peu près 180 jours par année et la personne intelligente qui regarde cela à la télévision, elle se dit: 180; 365 jours par année, divisés par deux, ces gens travaillent seulement six mois par année. C'est ce que le député de Sauvé est venu dire. Avec des salaires, Mme la Présidente, assez phénoménaux.

Présentement, dans la Mauricie, on a une situation où les parents sont alarmés et avec raison, d'ailleurs, et où les parents malheureusement font porter le blâme uniquement sur les enseignants. Et ce grand valseur de Sauvé vient dire aux parents: Vous savez, ils ne travaillent pas, ces gars; seulement six mois par année. Ils gagnent cher et ils ont seulement 17 élèves dans les classes. C'est cela que le grand valseur de Sauvé vient faire. Le gouvernement a deux têtes. Dans le cas présent, je pense qu'il n'en a pas du tout. C'est cela qu'on a à faire présentement, Mme la Présidente, au moment où on est appelés à adopter une loi spéciale.

Moi, Mme la Présidente, je vais vous dire une chose: Je veux d'abord féliciter le ministre du Travail qui a daigné répondre à un de mes télégrammes dans lequel je lui demandais d'intervenir et avec qui j'ai eu une conversation d'ailleurs à une heure tardive le soir; il travaillait encore à son bureau, je veux le féliciter pour cela. Mais je ne peux pas féliciter le premier ministre du Québec. Lundi, je lui ai envoyé un télégramme. Vous savez, le premier ministre du Québec, il y a beaucoup de gens qui travaillent alentour de lui mais, présentement, ils ont bien plus souvent l'esprit à Ottawa et bien plus souvent l'esprit en Angleterre, alors, les conflits de la Mauricie, cela ne les intéresse pas. Le premier ministre n'a même pas eu le temps de faire parvenir un accusé de réception en réponse à mon télégramme de lundi, lui demandant de convoquer l'Assemblée nationale.

Une voix: Elle est convoquée!

M. Picotte: Oui, elle est convoquée, mais il aurait quand même pu communiquer avec nous pour savoir exactement ce qu'on voulait. Je lui dis aujourd'hui ce qu'on aurait aimé parce que cela va peut-être clarifier ce que le ministre du Travail, tantôt, a mentionné. Le ministre du Travail est, lui aussi, un petit peu abasourdi par ce conflit. II a jeté le blâme sur les commissions scolaires et il a jeté le blâme sur les enseignants; il a dit que cela faisait dix ans qu'il n'y avait pas eu d'entente signée, chose qui est vraie. Il dit: On ne sait pas pourquoi on n'est pas capable de s'ajuster là-dedans. Si j'avais eu l'occasion de discuter avec ces honorables amis d'en face lorsque j'ai fait ma demande de convocation de l'Assemblée nationale, j'aurais aimé qu'avant qu'on amène une loi spéciale, on puisse demander à la commission parlementaire de l'Assemblée nationale de se réunir hier ou avant-hier. J'ai demandé cela lundi. J'ai donné un délai de 48 heures, ce qui allait à peu près à mercredi vers deux heures, normalement, pour respecter les 48 heures. On aurait pu, hier, prendre une journée pour écouter et demander aux gens qui, présentement, ne s'entendent pas le pourquoi de la mésentente. Moi, je connais les deux parties. Je suis persuadé à l'avance que les deux parties sont de bonne foi. Moi aussi, je suis resté estomaqué lorsque, entre autres, on a dit, de la part des commissions scolaires, au mois de juin: Nous autres, on ne négocie plus. Les offres finales sont sur la table et on ne reviendra pas là-dessus.

Le président du syndicat a envoyé une lettre, le 20 juin, demandant à M. André Gauthier, qui était responsable des négociations, de bien vouloir reprendre les négociations, disant qu'il était prêt à négocier durant les mois de juillet et août. Le 1er juillet, la commission scolaire a répondu qu'il n'en était plus question, que les offres finales étaient sur la table et qu'on ne discutait plus. C'est ce qui s'est passé exactement.

Jusque-là, ce n'était pas urgent, ce conflit. Mais normalement, si quelqu'un avait été de bonne foi dans ce gouvernement, il y a une petite lumière qui aurait dû s'allumer et dire: On va avoir tantôt un conflit pas mal plus grave, étant donné que les négociations sont rompues. C'est sûr qu'on est dans un état d'urgence, Mme la Présidente, présentement, parce qu'il y a l'année scolaire de nos enfants, et quand je dis nos enfants, ce sont les enfants de tous les gens de la Mauricie, y compris les enfants des professeurs, y compris eux. (16 h 40)

Cela veut dire, que les professeurs qui étaient sur une ligne de piquetage n'étaient sûrement pas là de gaieté de coeur. Eux aussi, normalement, ont le souci de l'éducation de leurs enfants. Ce n'est pas réservé au grand député de Sauvé, le souci de l'éducation. Tout citoyen bien pensant au Québec est intéressé, lui aussi, à l'éducation de son enfant et cela vaut pour les professeurs. Je connais des professeurs qui ont des enfants et, pour eux aussi, cela vaut, mais il y avait quelque chose qui empêchait de négocier.

A cette commission parlementaire qu'on aurait pu avoir hier de 10 heures à minuit, on aurait pu entendre les commissions scolaires du

territoire, le Syndicat des enseignants des Vieilles-Forges, le ministre aussi, évidemment, et le premier ministre pour voir exactement où était le litige, ce qui accrochait. On aurait pu dans le même délai, dans le même temps, voyant qu'il n'y avait aucune possibilité d'entente, préparer ce matin la même loi, puisqu'elle était déjà pensée dans l'esprit des gens d'en face. On l'aurait étudiée, la même chose, mais au moins on aurait su de quoi on parlait. On n'aurait pas lancé à tort et à travers des conneries comme certains des gens d'en face en ont lancé tantôt. On aurait vu exactement ce qui ne fonctionnait pas dans le dossier.

Le vrai responsable, Mme la Présidente -c'est malheureux, on discute de cela, mais, depuis le début, il n'est pas ici - c'est le ministre des Finances du Québec. C'est lui, le vrai responsable avec les normes budgétaires qu'il a imposées aux commissions scolaires. Où est le ministre des Finances présentement? On ne le sait pas. De toute façon, je ne sais pas où il est est, mais je sais que le conflit vient de là. Si on ne veut pas parler au niveau de la commission scolaire, si on n'est pas capable de s'entendre au niveau des négociations locales, c'est parce que les gens de la commission scolaire disent: Nous n'avons pas le droit d'aller plus loin que cela. J'ai même eu l'occasion de discuter avec un représentant du ministère de l'Education qui a dit: Vous savez, la commission scolaire régionale des Vieilles-Forges et ses constituantes sont au maximum de la taxation, tout près de $0.25. Dépassé cela, elles vont être obligées d'aller en référendum. Ce n'est pas surprenant et, face à cette situation, c'est sûr que les gars de la commission scolaire ne peuvent pas s'asseoir pour négocier.

Par contre, de l'autre côté, il y a le Syndicat des enseignants des Vieilles-Forges qui a obtenu, à la dernière convention collective, à la dernière entente, des traitements de faveur, à ce que ces gens d'en face ont dit, la meilleure convention du Québec. Je regrette, mais c'est à la suite de négociations, à force d'avoir discuté et parlé ensemble qu'on en est venu à avoir une belle convention. Ces gens se voient aujourd'hui tout simplement retirer certains droits acquis qu'ils possédaient. J'ai entendu cela souvent en cette Chambre, du leader du gouvernement actuel, que des droits acquis, messieurs, cela se respectait, cela ne s'enlevait pas, les droits acquis. J'ai entendu charrier cela souvent de 1973 à 1976. Mon collègue de Sainte-Marie doit probablement avoir la même opinion que moi là-dessus. Le whip du gouvernement a peut-être aussi la même opinion, sauf qu'il ne le dira pas. Il a un poste, alors, il ne le dira pas. Mais, je suis pas mal certain que ces gars et d'autres gars d'en face sont du même avis que moi. C'est ce qui est la nature du conflit, mais avec les normes émises et édictées par le ministre des Finances...

Vous allez dire: II y a eu une signature. Oui, il y a eu une signature, une signature qu'on ne qualifiera pas. Nous allons qualifier cela, de ce côté-ci, d'entente préréférendaire acceptable pour faire aller la tête des enseignants du bord d'en bas, c'est-à-dire leur faire dire un oui. Cela a peut-être été ainsi. Je vais vous rappeler à ce sujet, à juste titre, un article que j'ai lu dans la Presse du 18 octobre 1980. C'est signé par Jean-Guy Dubuc. Cet article s'intitule: "Le même conflit qui se réanime". Il est question d'une quarantaine de mille enseignants, c'est-à-dire les enseignants des Vieilles-Forges, plus d'autres commissions scolaires dont il est fait mention et d'autres qui ne font pas partie du même projet de loi. L'article dit ceci: Mais déjà, à ce moment-là, on pouvait prévoir que la latitude que laissait l'interprétation de certaines clauses pouvait conduire à de nouvelles difficultés d'entente au plan local. Quand on regarde cela comme il faut, il y a tellement de latitude dans cette entente, c'est tellement flou. On voulait tellement ne pas déplaire à personne durant la période du référendum que maintenant on se relève et on dit: C'est tellement flou que personne n'est capable de se retrouver là-dedans. On a des étudiants qui ont perdu, jusqu'à maintenant, près d'une quarantaine de journées d'école. On a des enseignants qui ont un manque à qagner au moins depuis 40 jours et là on dit: Nous allons nous ériger en juge et partie. Et vous allez vous rappeler certaines paroles de nos honorables collègues d'en face qui n'étaient pas nombreux, ils étaient six, mais ils doivent trouver qu'à six ils en ont encore trop dit. Ces six disaient: Le gouvernement est à la fois juge et partie. Il est partie à une négociation et après cela il vient juger; quand le feu est bien pris, il assomme les gars qui font partie du syndicat. C'est ce qu'on disait dans le temps. La même situation, avec un peu plus de journées de grève, avec un peu plus de complexes, se reflète quatre ans plus tard.

C'est le député de Nicolet-Yamaska qui disait que le 24 octobre 1976, dans le temps qu'on était en élection, le premier ministre du Québec se promenait et parlait de la paix sociale. C'est cela la paix sociale qu'on vit présentement? Mon collègue, le député de Marguerite-Bourgeoys, l'a souligné tantôt, le nombre de jours-élève perdus: entre 20,000,000 et 35,000,000. C'est cela la paix sociale qu'on crachait partout à la face du Québec le 24 octobre, il y a quatre ans, jour pour jour, lors d'une élection provinciale. Cela nous amène aujourd'hui à voter une loi spéciale contre les mêmes syndiqués. Cela nous amène à voter une loi spéciale mais avec quel préjugé favorable aux travailleurs? Le député de Sauvé, du temps où il était chef de l'Opposition, est tombé dans le même trou que son budget. Le préjugé favorable est en dessous du trou. On n'a plus de préjugé favorable, parce qu'on dit: Les enfants, nos enfants, c'est grave, le droit de l'enfant. Le ministre le sait, si on avait fait une commission parlementaire, Mme la Présidente, on aurait pu savoir que, dans le cas des Vieilles-Forges il y a trois points principaux qui accrochent: la notion de capacité, le chapitre quatre qui parle de la participation, du perfectionnement, le conseil d'école et, troisièmement, la tâche des enseignants, le ratio maître-élèves. On aurait pu en savoir davantage sur ces trois points, hier, en commission parlementaire.

Quand j'entends le député de Sauvé venir nous parler du bien de l'enfant, j'aimerais, à l'intérieur de ce projet de loi... Le bien de l'enfant est le seul bien qu'on va faire avec cette loi lorsqu'elle sera adoptée, c'est qu'ils retournent à l'école, c'est déjà beaucoup. C'était cela l'ultime but et c'est pour cela que nous, de l'Opposition, on va voter pour faire entrer les enfants à l'école, mais c'est le seul point qui

traite du bien de l'enfant là-dedans. Le bien de l'enfant, dans les négociations entre la commission scolaire et les enseignants, où est-il? Qu'est-ce qu'on en fait? Est-ce que le député de Sauvé a ouvert la trappe pour en parler dix minutes de temps tantôt? Il avait droit, dans son discours, d'envelopper cela durant une heure. Il pouvait nous en parler, du bien de l'enfant. Il aurait pu être au courant que le bien de l'enfant peut être endommagé s'il avait écouté les parties en cause hier. Ce n'est pas cela qu'on a voulu faire. On a voulu faire comme tous les autres gouvernements qui ont gouverné auparavant, on a voulu faire une loi spéciale pour dire: Le feu est pris et, avant que la bâtisse soit toute brûlée, on essaie de ménager au moins une partie des bâtiments. C'est ce qu'on a fait.

Je dis, comme d'autres l'ont dit avant moi, que ce n'est pas la meilleure façon de régler des conflits au Québec. Elle n'est pas unique d'ailleurs, il y en a eu quatre. J'espère qu'il n'y en aura pas d'autres et je ne suis pas certain qu'avec ce projet de loi qui crée, encore une fois, comme l'a dit mon collègue de Portneuf, deux régimes différents de négociation locale, cela ne reviendra pas, et je ne suis pas certain que la Chambre ne sera pas obligée de se réunir à nouveau pour étudier un autre conflit qui va dégénérer en conflagration. (16 h 50)

Mme la Présidente, c'est avec regret que nous, de l'Opposition, participons aujourd'hui - pas avec joie, comme l'a laissé entendre le député de Trois-Rivières, mais avec regret - à l'adoption de cette loi spéciale, tout d'abord pour les enfants, pour que nos enfants retournent à l'école, en espérant... Je fais appel aux enseignants des Vieilles-Forges, je fais appel à eux pour leur dire: Messieurs, vous allez peut-être entrer à quatre pattes avec cette loi, mais entrez donc. Faites votre travail à la perfection comme vous l'avez toujours fait, du moins dans la région de la Mauricie, pour respecter cette loi qu'aura été appelé à voter le Parlement, en espérant que dans les prochains quinze jours, la négociation qui est proposée dans le projet de loi va porter des fruits, en espérant que pour le mieux-être de toute la collectivité, une fois pour toutes, ce conflit soit réglé à la satisfaction des deux parties. Merci.

La Vice-Présidente: M. le député de Richelieu.

M. Maurice Martel

M. Martel: Mme la Présidente, heureusement que mes enfants ne sont pas entre les mains d'éducateurs qui ont la qualité de l'ex-professeur, député de Maskinongé. Je pense que son seul avantage, c'est de ne plus être dans l'enseignement.

Comme député de Richelieu, qui comprend la régionale Carignan et la commission scolaire de 5orel, ce n'est pas de gaieté de coeur que je voterai ce projet de loi. Mais étant donné que le gouvernement a donné toute la chance aux processus de négociation qui, malheureusement, n'ont pas produit les résultats escomptés, il s'agit maintenant d'assurer à nos enfants l'éducation à laquelle ils ont droit.

Lorsqu'il se présente un conflit, il y a inévitablement négociation entre les parties. Il y a, à l'intérieur du gouvernement, un ministère qui met à la disposition des parties des mécanismes pour en venir à une entente. Comme le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre l'a expliqué ce matin, il y a eu, dans le comté de Richelieu, à la régionale Carignan, au-delà de 50 séances de négociation. Il y a eu des séances de conciliation également. Malgré tout cela, malgré tous ces efforts, nous n'avons obtenu aucun résultat. La situation est que, présentement, les professeurs et la commission scolaire sont véritablement dans un cul-de-sac et que l'année scolaire de nos enfants est sérieusement compromise.

En ce qui concerne le député de Richelieu, j'ai rencontré les représentants des enseignants, les représentants de la commission scolaire régionale. J'ai également rencontré les représentants des parents, afin de remplir mon travail de député, c'est-à-dire de connaître les différentes versions. Non pas d'agir comme négociateur au conflit, mais d'être en mesure d'apporter un certain jugement auprès de mon collègue, le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Mais, encore là, malgré toutes ces rencontres que nous avons eues, malgré tous ces déplacements que les parents ont effectués auprès de la commission scolaire, auprès du corps enseignant, du syndicat de la régionale Carignan, il n'y a eu, malheureusement, aucun aboutissement positif à leurs démarches.

Etant donné que l'année scolaire est compromise, tant pour les gens de la Mauricie que pour les gens de Richelieu, parce que chez nous, nous en sommes maintenant rendus à presque un mois de conflit, étant donné également que tous les mécanismes ont été mis à contribution, comme il s'agit évidemment d'implications économiques à long terme également, parce que tous ces enfants entreront sur le marché du travail avec une année de retard, si nous n'intervenons pas a ce moment-ci, nous avons, comme gouvernement, le devoir d'assurer le droit à l'éducation de ces milliers d'enfants. Dans le présent projet de loi, il s'agit de demander aux professeurs, aux commissions scolaires de faire reprendre les cours à partir du 27 octobre prochain. Il s'agit également de demander aux commissions scolaires locales, de même qu'au syndicat des enseignants, d'essayer de s'entendre durant les prochains quinze jours, sinon, de se soumettre, comme je vais le suggérer moi-même aux deux parties concernées dans le comté de Richelieu, aux décisions d'un arbitre. Cette suggestion, je l'avais formulée. J'avais demandé à la partie syndicale et à la partie patronale de se soumettre d'avance aux décisions gu'un arbitre pourrait rendre dans le conflit qui sévit chez nous. Malheureusement, cela a été refusé. A ce moment, cela aurait sans doute été une solution qu'aujourd'hui nous sommes obligés de mettre dans une loi qui prévoit que, d'ici quinze jours, les deux parties concernées seront obligées de se soumettre à la décision de cet arbitre.

Il va de soi que, dès l'entrée en vigueur de ce projet de loi et dès la reprise des cours, lundi prochain, les deux parties devront accepter l'entente qui a eu lieu au niveau national. C'est la priorité du présent projet de loi. Il reste à espérer que la négociation qui va se faire durant

la prochaine quinzaine, ou bien l'arbitrage qui sera imposé, apportera une solution juste et équitable tant pour les professeurs que pour les commissions scolaires et que l'amélioration de l'enseignement à nos enfants pourra se faire dans le meilleur climat possible. Merci.

La Présidente: M. le leader de l'Union Nationale.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: Mme la Présidente, je voudrais, en tant que député situé au milieu de ce conflit, mais qui n'a pas a en subir les conséquences, apporter un point de vue qui, en l'occurrence, peut être un peu plus impartial. Il y a un mot que le député de Trois-Rivières, entre autres, a répété à plusieurs reprises, en disant que nous sommes maintenant dans une impasse. Nous sommes dans un cul-de-sac, comme vient de le répéter également le député de Richelieu, et, le gouvernement, face à cette impasse, à ce cul-de-sac, doit maintenant agir.

Mme la Présidente, j'aimerais vous dire que, d'après moi, le gouvernement du Parti québécois savait depuis très longtemps que cette impasse que nous sommes forcés de constater aujourd'hui existait. Je vais vous dire pourquoi.

Déjà, avant le 26 mai 1980, avant même que l'entente nationale ne soit signée entre les représentants patronaux, les représenteants du gouvernement et les représentants de la CEQ, les observateurs de la scène syndicale avaient été à même de constater qu'au sein même de la CEQ, certains syndicats n'acceptaient pas certains points de l'entente nationale et, entre autres, le syndicat des Vieilles-Forges. Les dirigeants de ce syndicat et plus particulièrement M. Raymond Johnston, qui était leur représentant étaient intervenus auprès de la direction de la CEQ pour demander à M. Gaulin de ne pas signer l'entente nationale parce que, selon eux, on leur enlevait des droits acquis. Je pense que c'était leur droit à ce moment-là de demander à leur représentant de ne pas signer cette entente-là parce qu'ils perdaient des choses qui leur étaient acquises. (17 heures)

Malgré cette opposition farouche du syndicat de Trois-Rivières et plus particulièrement de M. Johnston, les représentants de la CEQ, M. Gaulin, ont quand même signé l'entente nationale pour des raisons que je n'ai pas à juger aujourd'hui. Suite à cette signature, nous savions d'ores et déjà qu'il y avait une scission au sein de la CEQ, qu'il y avait une guerre de tranchées et qu'il y aurait des choses qui se passeraient au niveau local pour faire reviser l'entente nationale. C'était tellement fort, que M. Gaulin lui-même a été obligé de reviser ses positions et de revenir dans la région de Trois-Rivières pour défendre le syndicat des Vieilles-Forges et renier la signature qu'il avait lui-même apposée au bas de l'entente nationale. Déjà, en date du 26 mai 1980, lorsque la signature de l'entente a été paraphée, le ministre de l'Éducation, le Conseil des ministres, le gouvernement savaient qu'il y aurait des problèmes de négociation au niveau local.

De plus, Mme la Présidente, en juin 1980, si je ne me trompe, alors que les discussions sur l'interprétation de certaines clauses de l'entente nationale ont été connues, alors que la CEQ a avisé le gouvernement, le ministère de l'Éducation plus particulièrement, qu'il y avait un problème d'interprétation de certaines clauses de l'entente nationale, il y a eu une entente entre la CEQ et le gouvernement, et le ministère de l'Éducation pour essayer de voir comment est-ce qu'on interprétait certaines clauses de l'entente nationale qui sont au centre du conflit actuel. A ce moment-là, le gouvernement a donné son interprétation de la clause, la CEQ a dit au gouvernement qu'elle n'était pas d'accord avec l'interprétation du gouvernement et, d'ores et déjà on savait qu'il y aurait des conflits graves suite à une mésentente sur l'interprétation de l'entente nationale.

Dans ces conditions, Mme la Présidente, déjà, en juin, le ministre de l'Education savait que des conflits surgiraient sur une question d'interprétation d'entente nationale. Pourquoi, le gouvernement, le ministre de l'Éducation n'a-t-il pas, à ce moment-là, en juin, demandé à l'Assemblée nationale de se prononcer, d'écrire l'interprétation que le gouvernement donnait à cette entente pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de mésentente au niveau local? Il aurait réglé tout le problème des conflits au niveau local. Le gouvernement n'a pas pris ses responsabilités à temps et il est aujourd'hui responsable du fait que des élèves, dans différentes régions du Québec, sont en train de perdre leur année, si ce n'est pas déjà fait.

Mme la Présidente, nous tenons le gouvernement responsable de ne pas avoir agi alors qu'il connaissait les faits, d'autant plus que le ministre de l'Éducation, alors que le conflit commençait à Trois-Rivières, venait visiter la région et comme l'a dit le député de Portneuf tout à l'heure, remettait la responsabilité de cette négociation sur le dos de la commission scolaire locale. Il disait, à ce moment-là, que la solution au problème relevait de la commission scolaire locale et cela, alors même qu'il savait que, par l'entremise de son sous-ministre, il avait envoyé une directive à toutes les commissions scolaires du Québec à savoir que si elles dépassaient ce qui était contenu dans l'entente locale, ce seraient les commissions scolaires locales qui devraient en payer le coût.

Mme la Présidente, j'aimerais vous citer la lettre que le sous-ministre, M. Jacques Girard, a envoyée aux commissions scolaires locales et aux commissions scolaires régionales en date du 4 septembre 1980, avant même que le ministre ne daigne se déplacer pour aller à Trois-Rivières: "Monsieur, Madame, le ministre de l'Education a pris connaissance des ententes locales qui ont été négociées et agréées à cette date par plusieurs commissions scolaires. Suite à cette première analyse, il semble que certaines de ces ententes locales seraient contraires aux dispositions négociées et agréées à l'échelle nationale et ne respecteraient pas le partage des matières définies par l'arrêté en conseil 262-79 et modifié par les arrêtés en conseil 2015-79 et 2601-79. "Les coûts additionnels résultant de toute entente locale qui serait ainsi contraire aux dispositions de l'entente négociée et agréée à l'échelle nationale ou qui irait au-delà de la juridiction prévue par le partage des matières, seront assumés exclusivement par la commission scolaire."

Mme la Présidente, en date du 4 septembre

1980, le ministre de l'Éducation savait que, s'il y avait des dépassements à l'entente nationale, ce seraient les commissions scolaires locales qui devraient en assumer le coût et que déjà ces commissions scolaires locales, les contribuables de ces commissions scolaires locales sont surchargés de taxes, alors que le gouvernement a coupé son budget, à la suite d'une lettre, entre autres, du 26 septembre 1980.

Mme la Présidente, malgré qu'on ait passé toutes les étapes pour essayer d'en arriver à une convention collective, conciliateurs... On a envoyé deux personnes qui voulaient, semble-t-il, proposer des solutions, M. Yvan Blain et M. Raymond Désilets. On a également nommé un enquêteur spécial qui est encore en fonction alors même que le gouvernement savait qu'il devait faire adopter une loi spéciale. On a eu une demande d'injonction, injonction qui n'a pas été respectée. Je pense que le gouvernement a été jusqu'au bout de la limite et on se voit aujourd'hui face à un conflit que nous devons régler si nous voulons que les enfants puissent recevoir l'éducation à laquelle ils ont droit.

Mais le ministère de l'Éducation, le gouvernement actuel, ne prend même pas la peine de régler en même temps les autres conflits qui persistent dans d'autres régions du Québec. Pourquoi ne pas régler ces autres conflits? La raison qu'on nous donne, c'est: ça ne fait pas assez longtemps. Imaginez-vous quelle sorte de raison cela peut faire! Ce n'est pas assez pourri. Cela ne fait pas assez longtemps. On n'agit pas. On attend que ce soit aussi pourri que dans la région de Trois-Rivières ou dans la région de Sorel avant d'intervenir, alors qu'on sait déjà qu'il n'y aura pas d'entente, que ça va faire la même chose que dans les commissions scolaires pour lesquelles nous adoptons une loi actuellement.

Les parents, entre autres, de la Commission scolaire Baldwin-Cartier ont envoyé aujourd'hui même au chef de l'Union Nationale, au chef du gouvernement, au chef de l'Opposition officielle un télégramme leur demandant d'intervenir immédiatement pour régler ce conflit, et je vous le lis, Mme la Présidente:" Nous vous informons de ce qui suit: Attendu que les parties négociantes sont unanimes à admettre l'impasse " - on revient au même mot que celui que le député de Trois-Rivières a employé tantôt - " de la situation et que les parents veulent éviter une guerre d'usure; attendu que cette impasse se situe au niveau d'un principe déclaré non négociable par les deux parties, à savoir l'intervention ou non d'un arbitre dans l'évaluation des habiletés et aptitudes des enseignants; attendu que les enfants subissent pour la deuxième année consécutive les préjudices d'un conflit de travail; attendu que les enfants n'ont pas à subir un fardeau supplémentaire à cause de l'intérêt stratégique des deux parties en cause; attendu que les parents de la Commission scolaire Baldwin-Cartier nous prient d'intervenir afin que les enfants réintègrent leurs écoles de façon régulière le plus tôt possible; attendu que les parents n'ont pas à se poser en juge; en conséquence, nous demandons à l'Assemblée nationale de régler immédiatement le conflit de la Commission scolaire Baldwin-Cartier au moyen d'une loi spéciale."

Je me fais le porte-parole de ces parents pour demander au ministre de l'Éducation, au chef du gouvernement, de modifier son projet de loi et d'y inclure le règlement de la Commission scolaire Baldwin-Cartier également. (17 h 10)

Je pense que ces enfants ont également droit à l'éducation. Ce n'est pas parce que ça ne fait qu'un mois qu'ils sont en grève ou en lock-out qu'on doit dire: II faut laisser pourrir le conflit encore plus longtemps avant d'intervenir. Mme la Présidente, si le ministre de l'Éducation veut faire cet amendement, nous, nous ne pouvons pas le faire parce que les règles de procédure ont été limitées ce matin. Alors, c'est au gouvernement à proposer des modifications qui seront sûrement acceptées de part et d'autre de l'Assemblée nationale.

Il y a ces conflits-là. Nous devons les régler. Mais au-delà de cela, il y a, bien sûr, le problème de fond, que l'Union Nationale a soulevé à plusieurs reprises devant cette Assemblée nationale. Nous devons, les parlementaires, ensemble, devant une commission parlementaire, nous réunir le plus rapidement possible afin de trouver une solution à ces conflits permanents, non pas une négociation permanente à laquelle nous avons à faire face actuellement, mais plutôt aux conflits permanents qui subsistent dans le domaine de l'éducation et dans le domaine hospitalier également.

Nous devrons trouver une solution à ce problème. C'est le principe même du droit de grève qui est mis en cause. L'Union Nationale a proposé des choses à cet effet et je pense que le gouvernement devrait agir le plus rapidement possible. Nous devons en arriver à une négociation permanente dans les secteurs public et parapublic qui sont jugés essentiels.

Mme la Présidente, il y a une grande différence entre les travailleurs des services parapublic et public et ceux de l'entreprise privée. L'embouteilleur de Coke qui fait la grève, ce n'est pas trop trop grave, on peut s'acheter du Kik à la place. Mais, quand on arrive dans le domaine hospitalier ou dans le domaine de l'enseignement où c'est le gouvernement du Québec qui est responsable, par l'entremise de nos taxes, à ce moment-là, ce n'est plus la même chose. Nous ne pouvons pas faire appel à un autre service à côté, il n'y a pas de service parallèle. D'autant plus que le gouvernement actuel limite considérablement les commissions scolaires privées. Alors, nous sommes dans une impasse quand nous arrivons dans une situation comme celle que nous vivons aujourd'hui et il faut trouver des solutions permanentes à ces conflits.

Nous avons le sentiment, Mme la Présidente, que les travailleurs qui sont eux-mêmes affectés par ces conflits sont insatisfaits des mécanismes actuels et seraient d'accord pour essayer de trouver des solutions permanentes pour faire en sorte que nos enfants puissent recevoir l'éducation à laquelle ils ont droit présentement.

Je fais appel, Mme la Présidente, également aux syndicats, leur demandant d'être plus imaginatifs dans les moyens de pression qu'ils font contre le gouvernement, qu'ils devraient faire contre le gouvernement et non pas contre les enfants, et non pas contre les parents. C'est contre le gouvernement qu'on doit manifester notre désaccord quand il y a des problèmes. Qu'on dise qu'on ne remplit plus les fiches d'évaluation, qu'on ne fait plus les fiches de

présence, qu'on ne fait plus les bulletins, qu'on ne fera plus de rapport pédagogique, qu'on assiste aux séances des commissions scolaires en masse pour dire aux commissions scolaires notre insatisfaction, qu'on bloque la machine gouvernementale, d'accord, mais qu'on empêche les étudiants d'aller à l'école, de recevoir l'éducation, je pense que nous nous devons de demander aux syndicats d'être plus imaginatifs dans les moyens de pression qu'ils exercent.

En terminant, Mme la Présidente, je leur demande également, malgré que ce ne soit pas satisfaisant pour eux, je pense, le fait d'être obligé de retourner à leur travail à cause d'une loi spéciale, je leur demande de respecter cette loi puisqu'elle est la volonté de la population qui nous a élus. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Sainte-Marie. Je reconnaîtrai Mme la députée de L'Acadie immédiatement après.

M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: Mme la Présidente, je voudrais faire porter mon intervention principalement sur trois points: d'abord la situation vécue sur le territoire des commissions scolaires concernées par le projet de loi. Dans un deuxième temps, une analyse rapide des principes contenus dans la loi, de même que leurs effets, et troisièmement, terminer avec des considérations générales sur la situation des enseignants actuellement au Québec. (17 h 20)

Après avoir écouté mes collègues de l'Assemblée nationale nous expliquer quelle était la situation dans leur milieu, sachant aussi que le Code du travail, dans son esprit, depuis les tout débuts, indique qu'il peut y avoir des cas particuliers dans les secteurs public et parapublic, il est évident qu'on ne peut pas être actuellement contre le fait qu'il faille prendre des mesures particulières pour assurer l'année scolaire des élèves sur le territoire des commissions scolaires concernées.

Ce premier principe étant acquis, M. le Président, il semble, cependant, qu'on ne peut pas aller au-delà et se servir d'une loi qui pourrait dans ses effets ou dans son application répondre aux problèmes en en créant d'autres ou en allant au-delà de ce qu'on veut faire. Si on regarde attentivement les principes qui sont énoncés dans cette loi, il y en a deux. Le premier: assurer la reprise de l'enseignement sur le territoire des commissions scolaires. Là-dessus, tout le monde est d'accord. Deuxième principe: elle prévoit, de plus, que l'entente intervenue le 26 mai, la convention collective signée au plan national entre les parties doit s'appliquer.

Est-ce qu'on a besoin d'une loi, M. le Président, pour affirmer qu'une convention collective négociée entre les parties doit s'appliquer? Mais, plus loin, on dit: "précise la portée de cette entente en ce qui concerne les règles de répartition des fonctions et responsabilités entre enseignants." Selon moi, il est clair que, dans le deuxième principe que cette loi veut appliquer, on va au-delà de ce qu'on peut faire comme État, comme Assemblée nationale. On se substitue à ce qu'on a déjà fait auparavant. On porte un jugement sur les gestes qu'on a posés autrefois. On a, comme gouvernement, comme Assemblée nationale, approuvé une convention collective entre des parties: les enseignants et les commissions scolaires, et le gouvernement du Québec. Cette convention collective peut effectivement être difficile à interpréter. Mais, dans notre façon de fonctionner, quand on a un problème d'interprétation d'une clause, de deux clauses ou de certaines clauses de la convention collective, il est habituellement compris qu'on fait examiner la position de chaque partie par un tribunal d'arbitrage.

Or, actuellement, M. le Président, que faisons-nous? Nous prenons la convention collective qu'on a signée; nous ajoutons dans la loi 113 l'interprétation que l'on veut bien nous-mêmes donner à la clause qui a été convenue entre les parties. Il me semble que cet aspect de la loi ne correspond pas; il ne vise pas à régler, non plus, le problème du retour en classe des étudiants des commissions scolaires concernées par le projet de loi actuel. Il me semble que, ce faisant, on devient effectivement juqe et partie.

Pour rappeler au député de Maskinongé que je demeure convaincu que l'État et que l'Assemblée nationale comme telle n'a pas le droit en aucun temps d'être juge et partie, M. le Président, je suis porté à examiner plus particulièrement comment s'est créée cette situation. On a convenu d'une convention collective qui, dans un de ses aspects, prévoyait ce qu'il est convenu d'appeler dans le milieu un plancher d'emploi, c'est-à-dire qu'en prévoyant un nombre maximal d'heures d'enseignement pour les enseignants, de même qu'un nombre maximal d'élèves dans chacune des classes, on établissait ce qu'il est convenu d'appeler le plancher, c'est-à-dire le minimum d'enseignants ou de personnel requis pour effectuer le travail, c'est-à-dire remplir le nombre d'heures qu'il faut remplir, plus donner l'enseignement à l'ensemble des élèves.

Or, la convention collective prévoyait aussi autre chose qu'un plancher; appelons ça un frein. Elle prévoyait que les commissions scolaires et que les syndicats ne pouvaient pas aller au-delà d'un certain nombre d'enseignants, ce nombre étant déterminé par dix pages de calculs qui nous amènent à établir ce qu'on appelait tantôt le ratio maître-élèves. Appelons l'autre partie, la deuxième partie, le plafond. Autrement dit, on a convenu dans une convention collective qu'il y aurait un plancher, c'est-à-dire un minimum en bas duquel on ne descendrait jamais, et un plafond au-dessus duquel on ne pourrait jamais aller, non plus. (17 h 20)

La position du gouvernement et son interprétation de cette clause, c'est de dire: Le plafond n'est pas arbitrable. Comme il n'est pas arbitrable, sauf pour deux questions, sauf quand il s'agit de sécurité d'emploi et quand il s'agit d'enfance inadaptée, comme le plafond n'est pas arbitrable, il n'est pas applicable non plus. Je prétends, M. le Président, que sur un certain nombre de commissions scolaires et de syndicats qui ont déjà négocié et convenu de leur entente locale, 36, treize d'entre elles sont allées entre le plancher et le plafond.

Dans plusieurs conventions collectives, on ne

se contente que d'indiquer le plancher d'emploi, ce qu'on appelle le plancher. Lorsqu'on ne met que le plancher, tout le monde convient que c'est le seul nombre auquel on est tenu. Mais quand on pense aller plus loin un peu, quand on donne la possibilité de monter en haut, on doit convenir qu'il est peut-être possible que cela se situe entre les deux. Or, après la conclusion de la convention collective, il y a eu des règles budgétaires émises par le gouvernement aux commissions scolaires. Ces règles disaient quoi finalement? Elles disaient aux commissions scolaires: Ce que nous allons subventionner quant au salaire des enseignants, cela va être ce qui va correspondre au plancher d'emploi, au minimum requis par des clauses d'heures de travail et de maximum d'élèves. Ce faisant, on prévenait nos partenaires que tout ce qui dépasserait, tout ce qui serait entre le plancher et le plafond serait à leurs frais.

Je me pose la question, M. le Président; au moment où on était en négociation, il y a quelques mois, si a ce moment-là on avait prévenu les commissions scolaires qu'effectivement on ne subventionnerait que le plancher, est-ce que les commissions scolaires auraient consenti à inscrire un plafond dans la convention collective? Il me semble qu'à partir du moment où intervient quelque chose d'autre, il y a un certain nombre de conditions qui sont modifiées. M. le Président, ces conditions étant modifiées, on se sent maintenant obligé de prendre l'interprétation qu'on donne de la convention, probablement à raison; probablement qu'on aurait raison de donner l'interprétation qu'on donne à la clause de la convention collective. Ce que je dis, c'est qu'on n'a pas le droit de le mettre dans la loi. Il me semble que l'interprétation, on devrait la faire arbitrer comme n'importe quelle autre difficulté d'interprétation des conventions collectives.

Le deuxième point, M. le Président, me semble être aussi une question de principe qui est dangereuse. La loi prévoit, dans la section VI, des sanctions au cas où, évidemment, elle ne serait pas respectée. Dans les clauses 13, 14, 15, et 16, on parle des pénalités financières qui vont s'appliquer aux individus, aux groupes ou aux administrateurs scolaires, mais, aux articles 18, 19 et 20, on parle d'un autre type de pénalités, c'est-à-dire que, si au jugement du gouvernement le gouvernement est d'avis que moins de 70% des enseignants ne respectent pas la loi, il peut ordonner que cesse l'obligation de verser les cotisations syndicales. Dès qu'il a avisé une commission scolaire de son jugement, la commission scolaire est tenue de ne pas percevoir les cotisations syndicales. Je voudrais bien qu'on comprenne, M. le Président, que ce que je veux défendre ici, ce n'est pas le fond de la question: Est-ce qu'on devrait ou pas percevoir des cotisations syndicales? Ce que je veux dire c'est que, quant aux autres pénalités, on dit: Les gens seront poursuivis - c'est l'article 17 - une poursuite est intentée suivant la Loi des poursuites sommaires, donc soumise à un tiers. On ne dira pas à un enseignant ou à un administrateur scolaire ou à un syndicat: Tu es pénalisé pour $100 par jour. On va, en plus de cela, devoir se présenter devant un juge puisqu'on fait une poursuite selon la Loi des poursuites sommaires, on va devoir faire arbitrer notre chose par un juge, par un tiers. Pourquoi, dans l'autre cas, ne fait-on pas aussi arbitrer par un tiers le jugement qu'on a porté sur le pourcentage d'enseignants qui respectent ou ne respectent pas la loi? Est-ce qu'il ne serait pas normal et est-ce que ce n'est pas un droit fondamental reconnu dans à peu près toutes les chartes des droits de la personne dans le monde qu'un individu a droit à une défense juste et équitable? Pourquoi, dans ce cas-là, se limite-t-on uniquement au jugement du gouvernement? Il me semble que c'est un deuxième principe, M. le Président, qu'on devrait analyser de plus près au moment où on fera l'étude article par article. J'espère que le gouvernement, là-dessus, pourrait, par exemple, soumettre les quelques cas qu'il pourrait y avoir au jugement du Tribunal du travail, faire au moins confirmer sa position par le Tribunal du travail.

Le troisième élément, M. le Président, ce sont les effets, les effets sur l'ensemble des autres syndicats ou des autres organisations syndicales et des autres commissions soclaires, qui ne sont pas visés par le projet de loi. Dans un article, on prévoit que tout ce qui a été réglé avant l'adoption de cette loi, peu importe que ce soit au plancher, au plafond, ou entre le plancher et le plafond, cela sera reconnu, pour autant que l'entente aura été signée avant le 24, donc avant l'adoption de la loi.

Mais les autres syndicats, M. le Président, à partir du moment où on place notre interprétation dans la loi, même si on ne les nomme pas, même si on ne les implique pas dans la loi, est-ce que, par voie de conséquence, ils ne sont pas tout autant visés que les syndicats ou les commissions scolaires visés par le projet de loi actuel?

Il me semble que si, dans la loi, on met l'interprétation d'une clause, cette interprétation va valoir pour l'ensemble des autres négociations qui se déroulent. Quelle peut être l'attitude des autres commissions scolaires et des autres organisations syndicales?

Dans un premier temps, si le problème repose là-dessus, elles jugeront que le problème a été réglé unilatéralement par l'Assemblée nationale. Si c'est d'autres types de problèmes, les négociations vont devoir se poursuivre. Et si les négociations se poursuivent, il se pourrait éventuellement, dans ces cas-là, qu'il y ait aussi des arrêts de travail.

Il faudrait comprendre que cette loi ne vise qu'un groupe particulier et ne règle pas l'ensemble du problème.

Le dernier élément, M. le Président, c'est que dans les autres cas, dans ceux qui ont été traités avant, qui l'ont fait de bonne foi, comme ceux qui le font actuellement le font probablement de bonne foi aussi, pourquoi reconnaît-on ceux du passé et ne reconnaîtrait-on pas demain ceux qui le feraient de bonne foi, en l'appliquant dans leur milieu? L'objectif des négociations locales, c'était d'appliquer un pattern national, de l'appliquer aux conditions particulières d'un milieu, d'une région. Cela devrait s'appliquer sur l'ensemble. Et si l'on prétend que cela ne s'applique pas, il me semble qu'il faudrait qu'on le fasse au moins confirmer par un tiers plutôt que, d'autorité, l'imposer par l'Assemblée nationale.

En terminant, M. le Président, plusieurs commentaires aujourd'hui ont été faits sur le

statut des enseignants et sur leurs conditions de travail particulièrement intéressantes. Le député de Trois-Rivières a souligné dans son intervention qu'il y a une vingtaine d'années, le travail des enseignants était assez difficile. Je voudrais le corriger, M. le Président. Ce n'est pas il y a une vingtaine d'années, c'est il y a une dizaine d'années. Il y a encore douze ans, les conditions salariales et les conditions de travail des enseignants étaient pitoyables. C'est seulement depuis douze ans que cette catégorie de travailleurs a réussi à avoir des conditions de travail convenables. Il me semble que si on a des discussions à faire avec eux, si on veut faire la discussion sur le fait que dans notre société il y a des groupes plus démunis qu'eux et que ces groupes, pour que le gouvernement puisse les assister, pour que l'État puisse les assister, il va falloir que l'État ait des fonds, il me semble que si on voulait faire cette discussion, c'est au moment des négociations qu'il nous aurait fallu la faire.

Il est un peu "démagogique" d'utiliser aujourd'hui l'amélioration qu'un groupe de travailleurs a réussi à obtenir dans ses conditions de travail et dans la qualité de vie pour les retourner contre les autres. Notre objectif, M. le Président, c'est d'améliorer le sort de chaque Québécois. Et a partir du moment où on aura les fonds, on pourra améliorer le sort de chaque Québécois. Cela va prendre la collaboration de l'ensemble des travailleurs, y compris du groupe des enseignants. Mais cette discussion, si on ne l'a pas faite au moment où on devait faire la négociation, ce n'est pas aujourd'hui qu'on doit leur reprocher des conditions qu'à cette époque on leur a consenties, parce qu'on trouvait qu'elles étaient justes et équitables. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Sainte-Marie.

Mme la députée de L'Acadie, vous avez maintenant la parole. (17 h 30)

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Avant de commencer, je voudrais remercier le député de Sainte-Marie pour la façon très claire dont il a posé le problème. Je pense qu'on doit à sa franchise de bien situer la où se trouve le conflit qui a finalement pris les proportions que nous connaissons dans plusieurs endroits de la province.

Sans vouloir trop accabler le ministre de l'Éducation, je voudrais quand même lui rappeler que, lorsque l'étude des crédits du ministère de l'Éducation, en juin dernier, relativement aux négociations, il se réjouissait du grand succès que son gouvernement avait eu dans ces négociations. Il ajoutait: les débrayages de 1980 ont été moins néfastes que ceux de 1975, puisqu'ils sont intervenus à l'intérieur de quatre semaines, alors qu'en 1975, les difficultés et débrayages de toutes sortes ont duré six mois.

Je sais que ce que vit le ministre de l'Éducation n'est pas facile, mais je pense qu'il faut toujours être très modeste dans ce type d'affirmation, parce que, si je compte bien, les débrayages au niveau scolaire ont débuté en janvier et nous approchons d'un autre mois de janvier. C'est novembre la semaine prochaine.

M. le Président, j'ai entendu le ministre de l'Éducation, faire fort élégamment, comme il sait le faire d'ailleurs, cette différence entre les deux niveaux de négociation, le niveau national ou provincial et le niveau local, en disant: Ecoutez, nous ne sommes pas partie aux négociations locales. Mais je regrette, cela aurait été le cas, n'eût été l'objet du litige qui a créé les conflits que nous connaissons. Le député de Sainte-Marie vient de l'expliquer fort bien. On a laissé, compte tenu peut-être de la trop grande rapidité avec laquelle on a voulu - je ne l'utiliserai pas, je devrais peut-être utiliser le terme - bâcler, d'une certaine façon, les dernières négociations dans le monde de l'enseignement, parce qu'on était évidemment très près du référendum. C'est d'ailleurs ce qui explique en partie la rapidité avec laquelle on a déterminé, en mai dernier, que l'année scolaire des étudiants ou des élèves de la CECM était en danger après onze jours de grève, alors que là, il a fallu attendre 38 jours pour décider que c'était périlleux. J'entends tout de suite le ministre de l'Éducation rétorquer: Ah oui! mais c'étaient les examens, leur année était en péril. Je lui ferai remarquer que les examens du ministère valaient pour quelques cours du secondaire IV et secondaire V et que, déjà en d'autres occasions, les examens de fin d'année de la CECM n'avaient pas coïncidé avec ceux de l'ensemble de la province. Mais, à ce moment, il y avait l'échéance du référendum, on était en pleine campagne référendaire, si ma mémoire est bonne. On a alors jugé selon d'autres critères que ceux qu'on a utilisés aujourd'hui, ce qui est tout à coup périlleux pour les élèves.

Peut-être que le ministre de l'Éducation, dans sa réponse, pourrait nous dire selon quels critères il détermine qu'une année scolaire est en jeu.

Je vous ferai remarquer ceci. Il était fort clair, dès que la directive - plusieurs l'ont mentionné avant moi - du sous-ministre de l'Education eut été envoyée aux commissions scolaires, le 4 septembre, et qu'on connaissait l'objet exact du litige qui était relié à cette interprétation très ambiguë de la convention nationale et qu'on essayait de ranimer, comme le disait un éditorialiste, au niveau local, qu'on ne pouvait rien régler.

M. le Président, je voudrais brièvement parler des inconvénients pour les étudiants et pour les élèves en particulier. Pour ce qui est des parents, je pense qu'à peu près tout le monde ici, dans l'Assemblée nationale, est un parent dont les enfants sont encore à l'école, dont les enfants s'apprêtent à entrer à l'école, ou sont sortis de l'école il n'y a pas tellement longtemps. Je pense donc que l'intérêt des parents pour l'éducation de leurs enfants, on n'a pas besoin de se gargariser de grands mots et de faire du pathos, tout le monde le sait.

Mais, exactement, qu'est-ce que ça représente pour les élèves? On n'a peut-être pas assez insisté sur ceci. Il faut rappeler que vous avez des élèves qui entraient pour la première fois à l'école cette année. Au niveau maternel, ils peuvent peut-être attendre, mais il y en avait qui accédaient à la première année et un retard de deux mois, c'est considérable pour ces enfants-là qui ont une période d'attente, somme

toute, de quatre mois avant d'entrer à l'école. On sait fort bien que la récupération, pour ces enfants du premier cycle de l'élémentaire, n'est pas chose facile parce qu'on ne peut pas accélérer ou leur imposer un rattrapage qu'ils ne pourraient pas absorber, comte tenu de leur âge.

Pour ce qui est des autres enfants, on sait fort bien que les mois les plus fructueux du point de vue de l'apprentissage scolaire durant une année scolaire et je pense que là-dessus, le ministre de l'Éducation sera probablement d'accord avec moi - ce sont les mois d'octobre et de novembre. Les deux premières semaines de septembre aussi, bien que cette année, l'année scolaire ait débuté plus tôt qu'à l'accoutumée, compte tenu de la date de la Fête du travail. Les deux premières semaines, j'admets qu'il y a organisatin et qu'on procède lentement avec les élèves, mais octobre et novembre sont les deux mois les plus importants de toute l'année scolaire pour l'apprentissage. Ce sont là des mois extrêmement fructueux.

On se retrouve maintenant avec des élèves de l'élémentaire qui vont devoir faire cette période d'organisation scolaire en novembre et déjà pointe en décembre Noël, avec le climat que cela crée, le climat de vacances, le climat de vouloir arriver aux Fêtes, comme on dit. Ceci veut dire que le premier semestre de ces élèves est compromis. Mais on peut espérer que des élèves de l'élémentaire ou du primaire pourront, s'ils n'ont pas trop d'accrocs ou s'ils ne connaissent pas trop de grèves, faire un rattrapage raisonnable.

Qu'en est-il des élèves des secondaire III, IV et V? Evidemment, le ministre a fait allusion aux élèves du secondaire V qui devaient passer des examens et qui voudront accéder à des études supérieures ou entrer sur le marché du travail. Mais ce qui arrive, peut-être pas volontairement, mais qui, à mon point de vue, est l'aspect le plus important, c'est la démotivation des élèves de ce niveau à l'égard de l'école. Les élèves de cet âge-là utilisent souyent, quand il y a une grève, ce prétexte pour décrocher de l'école.

Ce serait peut-être intéressant que le ministre de l'Éducation demande à la régionale des Vieilles-Forges - ils avaient quand même fait les inscriptions en mai ou en juin - de faire le suivi et voir combien de ces jeunes de secondaire III, IV ou V auront décroché. Ceux-là, ce sera peut-être bien difficile non seulement de leur faire faire du rattrapage, mais de les rattraper dans un système d'éducation qu'ils auraient normalement suivi si les circonstances avaient été plus propices.

J'aurais trois questions à poser aux membres du gouvernement. La première, et là-dessus, encore une fois, le ministre a été absolument muet: Quelles sont les mesures de récupération qui seront prises pour assurer que les élèves soient le moins possible pénalisés? Je ne voudrais pas que le ministre me donne à nouveau cette assurance qu'il m'a souvent donnée à l'occasion de l'étude des crédits au sujet de la récupération au niveau collégial. On s'en souviendra, la récupération s'était fort bien faite et quand je lui ai demandé où on avait récupéré, il ne connaissait même pas le nom des collèges et on savait fort bien que la récupération avait été plus que boiteuse, même là où il y en avait eu.

La deuxième question, qui peut-être s'adresse davantage au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre: Quelles sont les intentions du gouvernement touchant la révision des mécanismes de négociation? On se souviendra qu'en janvier dernier il y a eu un colloque organisé, si je me souviens bien, par le département des relations de travail de l'Université de Montréal et le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, à ce moment-là - cela portait davantage sur les services essentiels dans les hôpitaux - avait dit: Je compte bien et j'espère qu'en juin - c'était presque un engagement, je voudrais quand même vérifier avant de l'affirmer d'une façon absolue -on aura une commission parlementaire qui se penchera justement sur tout ce problème de négociation et la façon dont ça touchait le monde de la santé. Je pense qu'on pourrait y ajouter le monde de l'enseignement. Cela me semble urgent, parce que la convention actuelle sera terminée en décembre 1982. Cela semble loin, mais c'est très proche. On le sait par expérience. (17 h 40)

Je voudrais également vous suggérer ceci: N'y aurait-il pas lieu d'alléger le contenu de ces conventions collectives, par exemple celle des enseignants? Je ne tiendrai pas le gouvernement actuel responsable de l'épaisseur de cette convention collective. Je pense que c'est devenu presque historique, si on peut dire, mais il y a une chose certaine: quand il n'y a plus personne qui se comprend dans une convention collective et même pas les enseignants au premier titre, il y a quelque chose qui ne marche pas. Je pense que c'est beaucoup plus difficile de dialoguer, à ce moment-là, avec les enseignants.

Une dernière question et celle-ci, je l'adresse au ministre de l'Éducation: Qu'a fait le ministre de l'Éducation pour revaloriser le rôle de l'enseignant? On sait fort bien qu'il s'est exercé, pendant les quatre années qu'il a occupé ce poste on dit qu'il doit le quitter bientôt - à déprécier, dans l'opinion publique, le plus possible, les administrateurs scolaires locaux qui sont quand même des gens élus. Si au moins, en contrepartie, il avait réussi ou tenté d'établir un dialogue avec les enseignants, je me dirais: Tout compte fait, dans le fond, ce sont les enseignants qui sont auprès des élèves; j'aurais trouvé que c'était un échange qui en valait peut-être la peine, mais c'est que, dans les deux cas, il a raté son coup.

Si on se trouve présentement devant des problèmes aussi aigus que ceux que nous connaissons dans le monde scolaire, je dois dire que le ministre de l'Éducation n'y est pas étranger.

Je voudrais, en terminant, simplement lire -et cela, le ministre de l'Éducation l'avait reçu à titre de ministre de l'Éducation - une opinion du Conseil supérieur de l'éducation dans son rapport annuel de 1976-1977 qui, à ce moment, faisait le post mortem des négociation précédentes. Je pense que c'est une conclusion qui résume ce que je voulais communiquer. Le Conseil supérieur de l'éducation dit - et je dois vous dire que je suis totalement d'accord - "On ne saurait minimiser un constat qui se révèle finalement très négatif. On ne peut fermer périodiquement les écoles durant des jours, des semaines et des mois, sans encourir des conséquences graves pour l'école publique et pour le développement de la société québécoise. Nous y croyons, nous aussi, au développement de la société québécoise. Il reste

d'ailleurs tant à faire pour consolider une réforme scolaire qui a besoin d'un second souffle". Je vois immédiatement le ministre se dire: Cela fait quatre ans que je veux donner un second souffle. J'ai pourtant tenté de l'appuyer dans ses efforts de donner un second souffle, mais, quand on voit ce qui se passe présentement, quand on voit que les efforts mis au livre vert, au livre orangé, restent presque lettre morte, il faut bien le reconnaître, le ministre pourrait peut-être nous en dire davantage sur ce qui arrive à l'intégration des exceptionnels, qui était prévue dans le livre orangé, et sur les régimes pédagogiques qui ne sont pas encore en place, sur la révision des programmes qui a été commencée d'ailleurs avant son arrivée, mais qui, elle aussi, est lente à se concrétiser. Et je continue. Le Conseil supérieur de l'éducation ajoute: "Toutes les campagnes en faveur de la revalorisation de l'école publique et tous les millions dépensés pour améliorer la qualité de l'éducation demeureront pratiquement vains si les parties en cause ne consentent à réviser en profondeur leurs aptitudes et leurs modes d'intervention dans le processus de la négociation. Ce serait une supercherie de dire que l'on travaille pour la protection de la forêt si on allait se permettre tous les quatre ans un ravage éhonté. Il sera impossible de revitaliser l'école si les parties ne s'efforcent d'éviter à tout prix l'hémorragie périodique. C'est bien en vain - je sais que là-dessus, le ministre de l'Éducation sera sensible - que devant une école publique saignée, l'on maudira alors la santé de l'école privée. Ces prévisions concernent - je pense qu'il n'y a pas personne dans cette Assemblée qui peut s'abstenir d'une certaine restriction là-dessus - au premier chef les gouvernants, les administrateurs scolaires et les dirigeants syndicaux, mais elles regardent aussi toutes les personnes intéressées à l'éducation, enseignants, parents, élèves.

S'il est vrai que l'école publique n'est la propriété d'aucun plan et doit appartenir au peuple, chacun a sa part à faire pour qu'au moment des négociations, l'école ne soit à la merci d'un ou de quelques groupes en particulier. Il n'en demeure pas moins que le gouvernement a un râle d'initiative et de leadership à jouer dans la révision des mécanismes de négociation.

En terminant, M. le Président, je souhaite seulement que le gouvernement - c'est de bonne guerre - essaie de se cacher vis-à-vis ce fameux principe ou cette réalité des deux niveaux de négociation. Dire qu'il n'avait rien à faire dans la négociation locale, mais ce qu'il ne faut pas oublier, c'est lui qui a mis en place et qui a signé cette convention nationale, qui a créé le conflit principal, c'est-à-dire cette ambiguïté dans l'interprétation des clauses de l'entente nationale. Le résultat, nous le connaissons aujourd'hui. II ne faut pas chercher ailleurs le responsable. Cette convention nationale a peut-être été signée trop vite sans vraiment peser la portée de toutes les clauses qui y étaient incluses. Merci, M. le Président.

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Carte électorale du Québec

Le Président: Merci, Mme la députée de L'Acadie. Maintenant, je voudrais, une fois de plus aujourd'hui, solliciter le consentement unanime de la Chambre à la requête de la Commission de la représentation pour déposer le rapport de cette dernière pour l'année 1980, qui n'est rien d'autre que la carte électorale du Québec. Avec votre consentement, je voudrais déposer ce document.

Des voix: Consentement.

Le Président: II y a consentement. M. le député de Joliete-Montcalm, vous avez maintenant la parole.

Projet de loi no 113

Deuxième lecture (suite)

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, j'aurais aimé que le député de Maskinongé soit présent, puisqu'il demandait, à toutes fins utiles, que s'expriment les membres de l'Assemblée nationale qui jadis ont oeuvré dans le monde syndical.

J'aurais voulu lui rappeler, au tout début, que si c'est vrai qu'il y a eu de beaux discours en 1976, c'étaient sans doute ces beaux discours qui avaient amené M. Claude Ryan, alors éditorialiste au Devoir, dans un editorial du 13 ou du 14 novembre, à inciter les Québécois à voter pour le Parti québécois.

Le Président: À l'ordre!

M. Chevrette: M. le Président, ce n'est sans doute pas la seule erreur qu'il a faite, parce que, le 11 novembre de la même année 1976, le même éditorialiste écrivait qu'à toutes fins utiles, à part la couleur du député de Rouyn-Noranda, il n'y avait pas grand-chose là. Donc, si on veut parler d'erreur, on va lui en rappeler souvent.

M. le Président, appelé à me prononcer sur une loi d'exception... Quand on parle de vous, c'est vrai, M. le député de Rouyn-Noranda, on manque de matière.

Le Président: M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Bien sûr, M. le Président. C'est parce que je voulais aiguiser leur appétit pour qu'ils m'écoutent comme il faut. Donc, M. le Président, appelé à voter sur une loi d'exception, je vous avoue que, personnellement, cela me répugne. Chaque fois - cela fait quatre fois - c'est même un cauchemar. On n'est pas encore rendu à la douzaine comme le Parti libéral, mais cela s'en vient bien. C'est fort ennuyeux, c'est vrai.

Il y a des choses, Mme la Présidente -puisque vous avez changé maintenant - que je ne comprends pas absolument et que je voudrais exprimer en cette Assemblée. En particulier à compter de 1967, où j'ai vraiment été de plain-pied dans le syndicalisme enseignant, on se battait contre les mesures administratives qui devenaient, à toutes fins pratiques, le seul critère pour définir des tâches, pour définir des nombres d'élèves par groupe. Je me souviens qu'en 1972, en particulier, à la convention de 1971-1972, on s'est battu d'arrache-pied pour bannir et honnir les ratios des conventions collectives en

prétextant que ces mêmes ratios créaient de la discrimination totale, en ce sens que là où il y avait des concentrations urbaines fortes, on pouvait avoir des tâches relativement réduites et des nombres d'élèves relativement intéressants par groupe, alors que nous, des milieux éloignés, des milieux semi-ruraux et semi-urbains, il y avait des petits centres où on devait composer des groupes minimes. Cela nous forçait, dans des concentrations un peu plus fortes, à grossir le nombre d'étudiants et à se ramasser avec 35, 40 et 42 étudiants pour permettre à Saint-Michel-des-Saints, par exemple, dans le comté de Berthier, d'avoir son groupe de treize étudiants qu'on ne voulait pas voir déplacer. C'est cela les ratios. (17 h 50)

On ne voulait pas que le ratio maître-élèves devienne la norme qui détermine les conditions de travail et qui fasse en sorte que, dans une forte concentration urbaine, on pouvait bénéficier de 18 périodes et d'un nombre d'élèves normal, soit 30, 31 ou 28, alors que dans les centres où la concentration était moins forte, on se ramassait avec 22 périodes et des petits groupes, dans certains coins, parce qu'on ne voulait pas faire voyager les étudiants, et d'immenses groupes, dans d'autres coins, parce que la concentration le permettait, mais pour sauver toujours l'équilibre du ratio maître-élèves. C'était cela qu'on avait dans les conventions collectives antérieures.

Pour une première fois dans la convention collective actuelle, on a une tâche maximale, un nombre maximum de périodes par enseignant, quel que soit l'endroit où l'enseignant oeuvre. Qu'il soit dans une forte concentration urbaine ou qu'il soit dans un petit centre défavorisé, il y a une tâche maximale d'assurée à chaque enseignant du Québec. Pour une première fois aussi, que tu sois dans une forte concentration urbaine ou que tu sois dans une petite municipalité, tu as le droit d'avoir un nombre maximum, sinon tu as une compensation en temps ou en argent, et c'est dûment signé dans la convention collective. Pour une première fois également, il y a une sécurité d'emploi qui ressemble à une sécurité d'emploi, contrairement à ce qu'on avait antérieurement, parce que, avant, il s'agissait d'affecter le professeur à 50, 60 ou 75 milles et, s'il refusait, il était banni de la liste. Pour une première fois, tu as au moins une sécurité d'emploi.

C'est un peu ma surprise parce que j'ai essayé, j'ai vraiment - et de bonne foi - tenté d'avoir des réponses. Comment il se fait qu'après avoir combattu pendant dix ans, douze ans, une norme administrative qui faisait l'objet de la détermination même des conditions de travail cette fois-ci c'est le rappel de la norme administrative qui est un objet de litige? Moi, je ne le comprends vraiment pas. J'ai posé des questions à des gens qui oeuvrent dans le monde syndical et ils disent que c'est une façon, pour eux, d'atténuer là où il y a de gros groupes.

Là-dessus, je les comprends, parce qu'il y a vraiment des commissions scolaires, - je vais le dire - qui, à l'intérieur d'une même école, ne sont même pas capables d'équilibrer les groupes d'étudiants. On se retrouve avec dix groupes de quarante élèves et dix groupes de vingt, au lieu d'avoir vingt groupes de trente. Mais ça, ce n'est pas dû à la norme administrative, ce n'est pas dû au fait qu'il y a une subvention qui est rattachée à ça.

On s'est battu tellement lonqtemps comme enseignants du Québec contre le fait qu'une norme administrative devienne le seul critère pour déterminer une tâche, je ne comprends pas qu'on se batte pour le rappel d'une norme administrative; mais je comprends que ça serait dans les circonstances, cependant, une soupape pour pallier à l'incompétence dans la distribution; ça, je le comprends. A mon avis, ce n'est pas aux citoyens du Québec de payer pour cette incompétence. Qu'on prévoie des mécanismes d'arbitrage prioritaire, qu'on prévoie la rectification de certains tirs là où il y a vraiment de l'incompétence marquée, là où, à l'intérieur d'une même école ou dans deux écoles dans une même ville, on fait face à une disproportion totale à l'intérieur des groupes. Mais je pense qu'on ne doit pas s'attaquer à des mesures administratives et qu'on ne doit pas tenter d'aller chercher les deniers de l'État d'une façon plus substantielle pour essayer de corriger, dans les circonstances, une certaine forme d'incompétence administrative. Je pense que tous les parlementaires devraient comprendre cette situation-là.

Si c'était là un seul des points, mais il y a plus que cela. Il y a plus que cela, parce que même les professeurs en disponibilité sont affectés à des écoles et ils peuvent passer des matinées et des après-midi à ne rien faire, plutôt que d'être affectés dans le cadre de la diminution de certains groupes. Je comprends certaines réactions de certains syndicats, mais, d'après moi, ce n'est pas en voulant siphonner les deniers de l'État dans les circonstances qu'ils régleraient une situation. Je sais que certaines commissions scolaires ne donnent même pas accès à l'informatique aux syndicats, pour qu'on puisse leur aider, comme syndicats d'enseignants, à distribuer, d'une façon plus intelligente, le nombre d'enseignants.

Mais si on veut, par exemple, pour corriger, à un certain niveau, une certaine forme d'incompétence, aller chercher X millions de dollars qui privent de certains programmes gouvernementaux d'autres groupes de citoyens, je ne marche pas. On ne doit pas, par des millions de dollars, camoufler l'incompétence de certains milieux administratifs. On se doit, je pense, de prendre le taureau par les cornes et corriger les problèmes là où ils sont. Et, à mon sens, ce n'est pas en débloquant des millions. Quand tu as compris, comme travailleur, que ce qui t'importe, c'est de négocier une tâche maximale de travail, de négocier les nombres maximaux par groupe et d'obtenir une sécurité d'emploi et que tu l'obtiens, tu dois faire porter ta bagarre là exactement où est le bobo et non pas, à mon sens, prendre un moyen détourné pour camoufler certaines incompétences à certains niveaux administratifs pour dire: Voici, dans notre milieu, on a tant de groupes de 40, on a tant de groupes de 35. Si vous débloquiez la norme administrative, on pourrait peut-être corriger certains groupes-normes. Ce n'est pas là la méthode.

J'aurais voulu répondre à la députée de L'Acadie, qui s'est retirée. Il n'y a pas une commission scolaire qui est pénalisée sur le plan administratif quand elle veut respecter la tâche maximale, les maxima d'élèves et la sécurité

d'emploi. Les commissions scolaires ne sont nullement exploitées de ce côté-là, ne sont nullement pénalisées sur le plan administratif. Vous voulez les défendre à tout prix, les commissions scolaires? Si vous voulez les défendre à tout prix, ce n'est pas en débloquant des millions de dollars et faire en sorte - parce que vous avez parlé du trou de $500 millions, vous vous êtes accrochés à cela quand cela a passé, comme parti de l'Opposition. Vous avez dit: N'est-ce pas effrayant? - de découvrir que cela remonte à seize ans en arrière, vos normes administratives. Et il a fallu les corriger justement parce que les millions n'y allaient même pas pour corriger des aberrations et améliorer la qualité de l'acte pédagogique. Absolument pas. Ces millions de dollars allaient, les trois quarts du temps, dans l'administration, et le bois de rose, et le tapis mur à mur, dans les commissions scolaires.

Ne nous leurrons pas là-dessus. On l'a corrigé, le montant de $500 millions. Il y a des mesures serrées. Mais qu'on fasse respecter à la lettre les conditions obtenues, la sécurité d'emploi, la tâche maximale et le nombre d'élèves par groupe, et qu'on donne une priorité aux griefs; là où les commissions scolaires useraient de discrimination entre des groupes de professeurs, à l'intérieur d'une même école ou dans deux ou trois écoles, on pourrait corriger la situation. Mais ne demandons pas aux citoyens du Québec de se serrer la ceinture pour corriger des incompétences administratives. Merci.

La Vice-Présidente: M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Mme la Présidente, nous avons écouté avec intérêt M. le député de Joliette nous défiler des refrains bien connus. Tout ce qu'il a dit n'empêche pas qu'il n'infirme en aucune manière le fait que nous sommes aujourd'hui à l'examen de la quatrième loi d'exception présentée devant cette Chambre par le gouvernement actuel dans ce domaine des conflits du travail où il prétendait naguère avoir une sorte de science infuse ou de compétence privilégiée, sans parler des cas également très importants où l'on a recouru à la tutelle, à la manière d'un véritable coup de force, contre des commissions scolaires qui avaient parfaitement le droit et la capacité de vaquer elles-mêmes à leurs affaires. Nous n'avons pas parlé aujourd'hui des nombreux conflits de travail dans le secteur privé que le gouvernement actuel laisse pourrir avec une impuissance extrêmement déplorable, parce que le sujet ne s'y prêtait guère. Je pense en particulier au conflit de la Reynolds, au conflit de Canron, dans la même région, qui durent depuis des mois et des mois. Combien d'autres conflits dans le secteur privé ont duré et perduré sans que jamais l'on entende les fameux ténors des droits syndicaux, qui se manifestaient continuellement autrefois, faire valoir leur dépit ou leurs revendications à l'endroit du gouvernement actuel.

Le député de Joliette a rappelé tantôt un fait intéressant dans mon humble cheminement politique et social. Il a rappelé qu'en 1976, j'avais recommandé aux électeurs de voter pour le candidat du Parti québécois là où il se révélerait supérieur au candidat libéral, mais il n'a pas cité l'article au complet. En cela, il a été très typique de son maître, le chef du gouvernement, et d'autres ministres qui ont très souvent pratiqué ce jeu dégoûtant de la distorsion intellectuelle. S'il avait lu ou cité l'article au complet, il se serait souvenu très bien qu'un des arguments que j'avais invoqués pour justifier mon attitude, c'est que ces gens s'étaient montrés tellement irresponsables dans l'Opposition qu'avant qu'ils soient devenus tout à fait irrécupérables, il fallait leur donner une fois au moins dans leur vie l'expérience des responsabilités pour qu'ils sachent ce que cela voulait dire. fl8 heures)

Nous les avons vus à l'oeuvre depuis quatre ans. Je pense qu'ils ont d'abord démontré qu'ils avaient été joliment naïfs et que la performance a été considérablement en deçà des rêves que l'on nourrissait quand on vivait en chapelle, dans les jours heureux ou malheureux de l'Opposition. Ils ont montré - par l'obligation où ils se sont trouvés de recourir à des lois d'exception contre leurs amis d'hier et d'aujourd'hui - que les abus du pouvoir syndical, dans plusieurs secteurs de notre société, sont devenus tellement évidents et tellement nocifs pour le bien général, qu'il faut absolument, contrairement aux convictions qu'ils professaient naguère, y réagir par des interventions extraordinaires du législateur.

Nous sommes en train de faire la preuve, très facilement d'ailleurs, que le bilan du gouvernement actuel, en matière de relations du travail, malgré tous ces liens privilégiés qu'il prétendait avoir, sera finalement encore plus défavorable qu'avait pu sembler l'être le bilan du gouvernement précédent, lequel s'était accumulé dans des conditions joliment plus difficiles.

Encore une fois, je l'ai déjà dit dans cette Chambre, c'est très heureux que l'expérience des responsabilités ait été donnée pour un temps limité à ces messieurs, et on comprend, devant le bilan qu'ils ont accumulé, qu'ils soient si peu empressés de revenir franchement devant le peuple pour demander le jugement qui serait normal et régulier, après quatre ans.

Le principe du projet de loi ne nous crée pas de difficultés spéciales. Dans les deux commissions scolaires principales, qui sont visées par le projet de loi, il est évident que la situation des écoles, la violation du droit de l'enfant à une instruction de qualité, a atteint un point tel qu'il faut absolument une intervention exceptionnelle du pouvoir législatif, les autres pouvoirs ayant fait la preuve de leur impuissance dans ce conflit.

S'il y avait un reproche à adresser au gouvernement, ce serait un reproche que nous avons entendu à maintes reprises cet après-midi, et que je reprends à mon compte: Cette intervention vient trop tard. On a invoqué jusqu'à maintenant, du côté ministériel, le principe voulant que ce soit l'année scolaire menacée qui doive dicter le moment où intervient la mesure d'exception. À y penser comme il faut, je pense qu'il faudrait raffiner ce principe et en venir à affirmer clairement que le droit véritable qui est en cause ici est celui de l'enfant à une année scolaire normale, à une année normale de formation.

Quand une année a été amputée de deux

mois, une année d'environ huit ou neuf mois, compte tenu des périodes de congé qui interviennent pendant cette année-là et compte tenu de la qualité toute spéciale des deux premiers mois dans le bilan général de l'année, je pense que c'est une mesure qu'il faudra réviser sérieusement. Il faudrait l'écourter sensiblement si on veut vraiment que le premier principe passe avant le deuxième, c'est-à-dire que le droit de l'enfant à une année scolaire normale passe avant le droit d'un syndicat d'enseignants à exercer un arrêt de travail qui lui permette de faire valoir ses revendications.

Nous avons, au cours des dernières années, connu de nombreux abus de ce côté. Je pense que l'équilibre a été rompu en faveur de l'exercice souvent excessif du droit de grève. Il faut revenir à un équilibre qui mettra au premier plan, dans le domaine scolaire, le droit des jeunes à une éducation normale, à une formation régulière, à une formation qui ne soit pas entrecoupée constamment, de ces arrêts de travail qui sèment la perturbation psychologique chez les enfants et qui compromettent très sérieusement leur cheminement intellectuel.

Je déplore à ce sujet, comme on l'a fait avant moi, que certains cas déjà aigus aient été ignorés par le législateur, par le gouvernement. Je pense en particulier au cas de la Commission scolaire Baldwin-Cartier; le cas de la Commission scolaire Les Manoirs, si je comprends bien, c'est le même problème qui est impliqué. On en reparlera tantôt. Si je comprends bien, c'est le même problème. Est-ce qu'on va les laisser aller en grève juste pour le plaisir de leur dire dans un mois: Venez au travail, messieurs, on vous l'avait dit il y a un mois. Il me semble que si la raison qu'on invoque aujourd'hui pour ramener au travail les enseignants des commissions scolaires visées par le projet de loi est bonne et valable, il faudrait également qu'elle s'applique pour ceux qui sont en grève pour la même raison; autrement, on est, je ne sais pas, dans un régime où c'est très difficile de voir la logique qui anime les gestes du gouvernement.

En conséquence, au sujet du principe même du projet de loi, moyennant les réserves que je viens de formuler, je suis d'accord, le parti de l'Opposition officielle est d'accord également et nous allons continuer de collaborer aujourd'hui en vue de l'acheminer le plus tôt possible vers l'adoption définitive et surtout la mise en oeuvre.

Avant de le faire, cependant, je pense qu'il est bon de s'arrêter quelques minutes à la source du problème. Il me semble que la source du problème a fait l'objet de beaucoup de développements cet après-midi mais qu'on n'a pas tout dit, qu'on a laissé de côté des aspects importants. La source principale du problème que nous sommes appelés à résoudre par une mesure d'exception aujourd'hui, il me semble que ce fut la confusion, le tâtonnement et la politique gouvernementale.

Le ministre de l'Éducation a invoqué des interprétations différentes de l'article 8-9.0 de la convention signée au niveau provincial. Je pense que cette explication est un petit peu sommaire. Et je vais adresser au ministre une série de questions à ce sujet, auxquelles je lui serais reconnaissant de nous apporter des réponses quand il fera sa réplique, à la fin du débat.

D'abord, une chose me frappe. Je n'étais pas au courant; je suis comme bien d'autres députés de cette Chambre, je ne suis pas un expert dans les conventions collectives des enseignants. Elles sont beaucoup trop touffues, beaucoup trop complexes, beaucoup trop détaillées, pour que plusieurs d'entre nous puissent prétendre les interpréter avec une expertise sûre. On m'a signalé que, dans la convention antérieure, on avait exactement la même disposition qui donne lieu aujourd'hui au litige avec lequel nous sommes aux prises, avec cette exception: c'est qu'au cours de la dernière négociation, on a ajouté la disposition voulant que cette clause ne soit pas matière à grief.

Mais, indépendamment de ceci, tout l'article a fait l'objet d'application au cours de la période qui a marqué la convention antérieure. Il n'a pas été question de ces interprétations ou de ces règlements unilatéraux dont nous sommes témoins maintenant.

S'il est vrai qu'il y eut une entente claire entre les deux parties à l'entente provinciale, je remarque que, de la dernière convention à la convention d'aujourd'hui, on est passé de la convention provinciale à la convention nationale. C'est une petite déformation qu'on remarquait souvent à cette époque. Il faut dire que la rédaction a probablement été faite avant le référendum, on vivait déjà en pleine république. J'espère qu'on va moins se gaver de mots et de réthorique à l'avenir pour reqarder davantage le contenu. De toute manière, ce ne sont pas des choses qui nous impressionnent beaucoup.

M. Morin (Sauvé): Est-ce que vous désavouez l'expression "l'Assemblée nationale"?

M. Lalonde: ...mais le ministre de l'Éducation aussi.

M. Ryan: Mme la Présidente, si l'entente fut conclue aussi nettement entre les deux parties, lorsque fut signée cette entente provinciale - je crois que c'est au mois de mai ou au mois de juin; on verra la date tantôt -comment expliquer le silence de la partie syndicale, comment expliquer que les deux parties ne soient pas venues nous dire: C'est cela que nous avons voulu dire? C'est clair, c'est cela. Vous pourrez nous l'expliquer tantôt. M. Gaulin, le président de la CEQ, on a coutume de l'entendre avant les référendums, on a coutume de l'entendre se plaindre de ce qu'il ne peut pas exhorter ses gens à voter pour la souveraineté-association. Peut-être pourrait-il aujourd'hui nous dire qu'il a compris cette clause de la même manière que son homologue le ministre de l'Éducation, le ministre des Finances ou le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre! (18 h 101

Comment expliquer qu'il ait fallu attendre jusqu'au 4 septembre pour qu'une directive claire du sous-ministre, M. Jacques Girard, soit adressée aux commissions scolaires alors que la convention provinciale fut signée en mai 1980? Juin, juillet, août; vous avez laissé s'écouler trois mois avant de donner une directive claire aux commissions scolaires. Vous les avez laissées s'engager dans des négociations. Vous avez laissé plusieurs d'entre elles signer des conventions qui donnent à cet article de l'entente provinciale une interprétation différente.

Comment expliquer que vous soyez entrés en scène seulement le 4 septembre par le truchement d'une directive du sous-ministre, dont je n'ai pas connaissance qu'elle ait fait l'objet d'une interprétation réciproque préalable avec la partie syndicale? Peut-être me trompai-je là-dessus! On pourra me corriger si on le veut. Mais j'ai l'impression que les consultations avec la partie syndicale ont eu lieu à la dernière minute, il y a dix ou quinze jours, et là ils se sont dit, chacun étant pris dans ses problèmes de petite politique interne: On ne se souvient pas de cela. Comment expliquer cette incurie, cette période d'inaction, de non-intervention qui a duré trois mois et pendant laquelle on a laissé s'empêtrer un grand nombre de commission scolaires et d'orqanisations syndicales dans la recherche de voies qui devaient s'avérer ensuite par un diktat autoritaire du gouvernement, sans issue? Comment expliquer que des commissions scolaires sérieuses et responsables aient éprouvé le besoin de demander au gouvernement, aussi tard que le 15 octobre, le 16 octobre, le 18 octobre et le 20 octobre, une interprétation claire et nette de cette partie de l'entente dont le ministre nous disait qu'elle était parfaitement claire au début du débat actuel?

Je voudrais vous citer à ce sujet, par acquit de conscience, des messages qui m'ont été adressés par des commissions scolaires. D'abord, je voudrais citer la commission scolaire Jean-Talon, commisssion scolaire régionale de la région urbaine de Québec, dirigée par des personnes très compétentes, qui nous dit ceci: "Considérant que la Commission régionale Jean-Talon doit respecter les règles budgétaires établies par le ministère en regard des effectifs en personnel enseignant; considérant que la Commission régionale Jean-Talon doit respecter l'entente nationale établie entre les parties, ministère de l'Éducation et CEQ; considérant que la Commission régionale Jean-Talon estime ambiguës les interprétations faites à l'article 8-9.0; considérant l'importance et l'urgence de procéder à la signature de l'entente locale laquelle se heurte à des interprétations fort divergentes en cete matière, il est proposé, etc., que la Commissionn régionale Jean-Talon demande aux parties à l'entente nationale de rédiger une interprétation commune de l'article 8-9.0 en regard du calcul du nombre d'enseignants dans une commission scolaire et ce, dans les meilleurs délais; et, deuxièmement, demande à M. Jacques Parizeau, ministre des Finances, d'adapter des paramètres relatifs aux effectifs enseignants à l'interprétation faite par les parties.

Ensuite une autre commission scolaire, la Commission scolaire d'Orléans, dans la région de Beauport, familière au président de cette Chambre, a adopté une résolution entérinant ou prenant à son compte la résolution qui avait été adoptée par la Commission scolaire régionale Jean-Talon. La Commission scolaire régionale Carignan visée par le présent projet de loi a, elle aussi, adressé au comité patronal de négociations des commissions scolaires et au ministre des Finances, une requête présentant sensiblement la même demande. Est-ce que tout ce monde-là, est-ce que toutes ces commissions scolaires, Mme la Présidente, sont dirigées par des imbéciles, par des imcompétents, par des gens qui ne savent pas lire, par des gens qui seraient de mauvaise foi et qui n'auraient pas compris ces choses dont l'on nous dit qu'elles auraient dû être évidentes pour tout le monde?

Je conclus de tout ceci que la confusion et les tâtonnements de la politique gouvernementale ont été la source principale du problème auquel nous sommes obligés de remédier aujourd'hui par l'adoption d'une loi d'exception.

Je termine par quelques commentaires sur le projet de loi lui-même. Je souscris entièrement à l'opinion qui a été émise par le député de Maskinongé et suivant laquelle, avant d'adopter une loi d'exception comme celle-ci, nous y gagnerions tous à avoir l'occasion d'entendre les parties une dernière fois. On nous demande d'intervenir comme juges ultimes d'un différend. On nous fait entendre seulement le point de vue de l'une des deux parties impliquées, c'est-à-dire la partie gouvernementale. Il me semble qu'il serait juste et équitable, simple et possible, d'inviter les deux parties à se faire entendre une dernière fois avant que tombe la guillotine de la loi d'exception. Je demande au ministre de nous indiquer quelle politique il entend suivre dans le cas des commissions scolaires de Baldwin-Cartier et Les Manoirs. Je lui demande, en particulier, de nous dire s'il est satisfait de ce critère de l'année scolaire menacée ou s'il ne trouve pas qu'il y aurait lieu de l'approfondir davantage afin d'en venir à un critère qui serait beaucoup plus proche du droit de l'enfant à une année scolaire normale.

Est-ce que le projet de loi présente des garanties contre des arrêts de travail dans des commissions scolaires visées par l'article 12, mais où le syndicat déciderait de faire la grève quand même? Il semble que le projet de loi ne comporte pas de garanties de ce point de vue-là et qu'on pourrait se retrouver avec des arrêts de travail dans d'autres commissions scolaires. Tout en créant une obligation pour les commissions scolaires de ne pas accepter l'engagement qui découlerait de l'article 8-9.0 de la convention collective, on ne crée aucune obligation à ce sujet pour les syndicats d'enseignants de ne pas faire de grève pour des motifs qui seraient entièrement futiles. On nous dira que les syndicats comprendront très bien cela par eux-mêmes. Je pense qu'on a la preuve, aujourd'hui, que c'est une affirmation naïve et fausse. Il faut que les choses soient dites clairement. Si on applique ce régime et ce traitement aux syndicats des commissions scolaires visées par le projet de loi, il me semble qu'on doit aller plus loin.

Soulignons aussi que la loi crée deux régimes différents de négociations et de conditions locales de travail, avant et après le 24 octobre 1980. En conséquence, et encore une fois, je l'attribue à l'impéritie du gouvernement. Deux catégories différentes: ceux qui ont eu l'avantage de négocier et de régler avant que parvienne la directive du 4 septembre dernier et ceux qui ont eu l'avantage de régler avant que n'intervienne la loi spéciale d'exception que nous sommes appelés à voter aujourd'hui.

Je termine ici cette intervention, Mme la Présidente. Je crois que nous avons été témoins, une fois de plus, dans ce conflit, d'un geste absolument inacceptable dans une société démocratique. Je le dis sans aucune espèce d'amertume ou de rancoeur contre qui que ce soit. Le syndicat des Vieilles-Forges a refusé

d'obéir à une injonction émise par un tribunal dûment saisi du problème grave qui se posait dans la région trifluvienne. Je ne sais pas ce que le gouvernement entend faire à ce sujet. Je n'ai pas souvenance que les porte-parole gouvernementaux aient précisé les interventions que prévoit ou qu'aurait déjà instituées le gouvernement à cet égard, mais je pense qu'avant que ne se termine le débat sur ce projet de loi, il est très important que le gouvernement nous dise clairement la politique qu'il entend suivre, où il en est devant ce fait qui est de notoriété publique et qui vient s'ajouter à une liste déjà trop longue de gestes semblables posés dans le passé.

Je n'ai pas de leçon à faire à qui que ce soit, mais je pense qu'il est important que nous réalisions que la connivence qui nous permet d'exister ensemble dans une paix relative repose sur le respect de certains principes élémentaires qui doivent être communs à tous. Et quand ce principe du respect des tribunaux est violé ouvertement et systématiquement pour des motifs dont le gouvernement nous dit qu'ils sont passablement secondaires, qui ne violent en rien des droits ou des revendications essentiels, je pense que le devoir des élus du peuple c'est au moins de dire très fort, très fermement qu'on ne peut pas vivre dans un climat comme celui-là et qu'une société qui accepterait que ses institutions les plus essentielles soient bafouées de cette manière est une société qui inviterait ses membres à l'anarchie tôt ou tard.

Alors, mon parti est favorable à cette loi, malgré les critiques de détails qu'il en fait et les responsabilités qu'il faut imputer au gouvernement quant à l'origine du conflit. Mais autant nous sommes favorables au principe du projet de loi, autant nous collaborerons de toutes les manières possibles, surtout par une action responsable auprès de l'opinion publique, à l'application exacte, précise, loyale et fidèle des dispositions du projet de loi. Il me semble que la démocratie est à ce prix. (18 h 20)

Je signale, en terminant, que, chaque fois que dans cette Chambre nous avons été saisis d'un projet de loi d'exception, nous n'avons fait aucune espèce d'obstruction, nous n'avons cherché en aucune manière à empêcher le règlement d'intervenir, nous n'avons cherché en aucune manière à pactiser avec qui que ce soit en vue de chercher à porter obstacle à la réalisation d'un but qui nous apparaissait légitime. J'invite nos amis d'en face, dès qu'ils auront le courage de se présenter devant le peuple pour recevoir le verdict que leur ont mérité leurs quatre années de séjour au gouvernement, à retenir cette leçon et à se rappeler qu'il vaut toujours mieux, quand on est dans l'Opposition, agir comme si on était au gouvernement. Cela empêche beaucoup de démagogie et cela aide une société à se mettre plus vite sur la voie de la responsabilité qui est la seule durable.

La Vice-Présidente: M. le ministre des Finances.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: Mme la Présidente, j'ai l'intention d'examiner certains des aspects de la loi que nous avons devant nous, plutôt que d'essayer d'en faire le tour. Je voudrais, en particulier, parler fort peu de ces dispositions qui prévoient le retour au travail dans les deux régions mentionnées dans cette loi, non pas parce que cela n'a pas d'importance, mais parce que, je pense, l'urgence d'une telle mesure a été soulignée des deux côtés de la Chambre.

Il y a, cependant, quelque chose dont nous discutons depuis quelques heures qui me semble encore chargé de beaucoup d'ambiguïté et j'aimerais, si on me le permet, essayer de clarifier cela. Il s'agit essentiellement de cette disposition du projet de loi qui, en pratique, interdit de discuter des clauses monétaires ou d'effectifs au niveau local. Je vais essayer d'expliquer cela de la façon suivante: 90%, à l'heure actuelle, les 9/10 de toutes les dépenses des commissions scolaires sont des salaires, des effectifs. Le trou de $500,000,000 dont nous avons abondamment parlé, qu'est-ce que c'est? Des effectifs, du personnel. Ce n'est pas de l'argent qui a été dépensé ou jeté par les fenêtres; c'est essentiellement du personnel.

Lorsque nous disons qu'au Québec, le coût par élève de l'enseignement est de $500 supérieur au coût par élève en Ontario, de quoi parlons-nous? De personnel. Mme la Présidente, si on pense vraiment que la qualité de l'enseignement au Québec est mesurée par la quantité de personnel, vraiment la qualité de l'enseignement au Québec doit être tout à fait remarquable. Mais là ce qu'on nous dit - je reviens à l'intervention du chef de l'Opposition officielle à cet égard - depuis quelque temps, depuis quelques mois, c'est qu'il en faut encore davantage, de personnel. Pourtant, au printemps dernier...

M. Ryan: Ce n'est pas nous autres.

M. Parizeau: ... on s'était entendu sur essentiellement un partage entre deux niveaux de négociation. On disait: Ce qui concerne les salaires et ce qui concerne les effectifs, c'est national ou, si le chef de l'Opposition officielle y tient absolument, c'est provincial. Au contraire, les règles de gestion interne des commissions scolaires quant à leur personnel, c'est local. Tous ceux qui ont participé à ces discussions, l'hiver et le printemps dernier, aussi bien du côté patronal que du côté syndical, savent très bien qu'il n'y a jamais eu la moindre ambiguïté à ce sujet, pas la moindre. Les règles de gestion interne du personnel dans les commissions scolaires: local; tout ce qui a trait à la détermination des effectifs et des salaires: national. Il était hors de question qu'il y ait une sorte de match-revanche après la négociation nationale. Cela avait été confirmé, d'ailleurs, par un décret du gouvernement, dont le ministre de l'Éducation a expliqué la genèse un peu plus tôt aujourd'hui. C'était clair pour tous.

Qu'est-ce qui a été établi au niveau national? Je ne pense pas, en termes d'effectifs, qu'on puisse présenter ça valablement comme le député de Sainte-Marie, par exemple, l'a fait un peu plus tôt. Il n'y avait pas un plancher et un plafond. Il y avait, comme le disait le député de Joliette, pour la première fois, la détermination de tâche d'enseignement. Pour la première fois, il y avait des limites données dans chaque école et dans chaque classe, dans chaque classe, plutôt. Les règles budgétaires dont on parle ont été

établies sur cette base. Mais il y avait une autre façon traditionnelle depuis une quinzaine d'années d'établir les besoins réels ou appréhendés d'une commission scolaire, c'était le rapport maître-élèves.

Comme le disait le député de Joliette, les enseignants se sont battus pendant dix ans pour faire disparaître ces ratios, ces rapports maître-élèves. Nous les avons gardés dans la convention nationale à deux fins bien spécifiques: d'une part, déterminer dans quelles conditions un professeur peut être mis en disponibilité - c'était quand même important pour assurer leur sécurité d'emploi à vie comme on l'a établi pour la première fois - et, d'autre part, pour l'enfance en difficulté, où ça causait des problèmes spécifiques. Pour tout le reste, il est indiqué très clairement que ce n'est pas arbitrable, cette deuxième mesure. Va-t-on s'étonner alors qu'on ait établi des règles budgétaires à partir des tâches d'enseignants telles qu'établies dans la convention collective nationale? Cela faisait dix ans que les enseignants nous demandaient ça et c'est exactement ce qu'ils ont.

Il n'y a pas un plancher ou un plafond, il y a des additions de tâches qui donnent des budgets. Il n'en reste pas moins que si on croit que c'est ambigu, comme l'a dit le chef de l'Opposition officielle ou comme d'autres membres de son parti l'ont souligné cet après-midi, si on croit que des dispositions de l'entente nationale ne sont pas claires, qu'est-ce qu'on doit faire? Aller en arbitrage, invoquer le jugement d'un tiers, bien sûr, mais pas amener ça au niveau local. Il a toujours été clairement entendu que ça n'allait pas au niveau local. Si la convention nationale n'est pas claire, qu'un arbitre la clarifie. Mais qu'on ne cherche pas à clarifier la convention nationale en l'amenant, comme on l'a fait depuis quelque temps, au niveau local parce que ça, ça rompt toutes les ententes que nous avions tous entre nous. Au niveau local, on discute de la gestion du personnel.

On comprend bien pourquoi, néanmoins, il y a eu des tentatives d'amener des discussions pareilles sur les effectifs au niveau local depuis quelque temps. Entre ce que l'ancien mode de calcul aurait donné et les additions de tâches dont je parlais tout à l'heure, il y a, pour l'ensemble des commissions scolaires, à peu près une soixantaine de millions de dollars. C'est à peu près ça que ça représente par année. On comprend que les syndicats locaux se disent: On préférerait avoir ces $60,000,000 par année pour ajouter du personnel enseignant. On peut comprendre aussi que certaines commissions scolaires se disent: Si nous avions les $60,000,000 par année, on ajouterait du personnel non enseignant et peut-être d'autres dépenses. Le gouvernement dit clairement, et ça découle de l'entente nationale: Ces $60,000,000, ils appartiennent aux contribuables. Du personnel enseignant, compte tenu de la convention nationale que nous avons, il y en a suffisamment comme ça. Les $60,000,000 retournent aux contribuables. On ne va pas maintenant ajouter encore du personnel à celui qui est là et qui est suffisamment nombreux pour faire en sorte que d'éduquer un élève au Québec, ça coûte $500 de plus par année qu'en Ontario.

Dans un premier temps, on a effectivement envoyé une lettre du sous-ministre de l'Éducation disant: Quelque dépassement que ce soit sur le plan du personnel qui serait négocié localement, le gouvernement ne paiera pas un sou.

Néanmoins, l'effervescence au niveau local qui n'aurait pas dû être là continuait. Pourquoi? Parce qu'on s'est dit: Dans la mesure où le gouvernement prend la position que je viens d'exprimer, Mme la Présidente, on pourrait peut-être néanmoins faire des ententes sur le plan local et ne pas faire financer ça par le gouvernement; il ne veut pas et c'est contraire à l'entente nationale. Mais peut-être gue faire financer ça par le contribuable local, on lui ajouterait quelques cents de taxe inadmissible, il y a des chances peut-être qu'il ne le voie pas. (18 h 30)

Mais, Mme la Présidente, on ne peut pas accepter cela. Le fardeau fiscal des Québécois est déjà assez élevé comme cela pour fournir les services d'éducation au Québec. Et le contribuable qui paie des impôts au gouvernement du Québec, c'est le même contribuable qui paie des impôts locaux à la commission scolaire. On ne peut tout de même pas faire en sorte que, parce qu'une partie voudrait avoir $60,000,000 pour avoir davantage d'enseignants et qu'une autre partie voudrait avoir $60,000,000 pour avoir davantage de non-enseignants ou des tapis mur à mur ou autre chose, ils s'entendent entre eux, en dehors de la convention nationale et passent la facture, non pas au gouvernement du Québec qui ne veut pas la payer, mais sur le dos des contribuables locaux.

Cela est contraire, encore une fois, à toutes les ententes que nous avons depuis le début. On ne devait pas discuter d'effectifs ou de salaires dans les ententes locales. C'était clair. Je comprends qu'à l'intérieur de la CEQ, il y a un certain nombre de syndicats qui n'ont pas vraiment accepté la convention nationale. Mais qu'est-ce que vous voulez, quand nous signons avec la CEQ, nous pensons signer avec un organisme responsable.

Je reconnais que dans certaines commissions scolaires, on s'est dit: Plutôt que d'avoir une grève, ajoutons des effectifs. Le contribuable local les paiera. Je peux les comprendre, ces braves gens. Qu'est-ce que vous voulez? Personne n'embarque dans une grève quand il peut l'éviter.

Mais il reste que nous, comme gouvernement, nous avons la responsabilité de faire observer la convention nationale, d'une part, et le fardeau fiscal qui a été établi pour payer l'éducation, d'autre part.

C'est dans ce sens, Mme la Présidente, qu'il y a effectivement deux éléments dans le document que nous avons devant nous, dans le texte de loi que nous avons devant nous.

Est-ce que deux éléments constituent une sorte de loi matraque, comme on l'a dit cet après-midi? Non, ce n'est pas une loi matraque, dans la mesure où l'année scolaire est en péril dans deux commissions scolaires. Dire: Vous rentrez, par une loi, c'est simplement observer quelque chose qui existe dans nos lois depuis fort longtemps. C'est-à-dire par injonction, mais a fortiori, si l'injonction est violée, par loi, on intervient quand l'année scolaire des enfants est en péril. Il n'y a rien là-dedans qui soit particulièrement matraque. Les gouvernements qui nous ont précédés et, j'imagine, les gouvernements qui nous suivront devront toujours

garder dans leurs lois des dispositions en vertu desquelles, quand l'année scolaire est en péril, il faut faire quelque chose. On peut chercher à faire porter le stigmate d'une loi spéciale. Mais ce n'est pas plus non plus. On peut faire porter le stigmate d'une injonction. Mais le fond de la question, c'est qu'aucun gouvernement responsable ne peut permettre que les élèves perdent leur année. Ce n'est pas nier un droit de grève que de faire cela. C'est simplement assurer l'intérêt public bien compris.

Deuxièmement, nous affirmons et nous réaffirmons dans cette loi les dispositions de la convention nationale. Si la convention nationale n'est pas claire, qu'on la fasse clarifier par des tiers - et je répète ce que je disais tout à l'heure - mais ce n'est pas parce que certains se demandent si la convention nationale est claire ou non qu'on doit commencer ou laisser discuter de questions monétaires ou de questions d'effectifs, au niveau local, ce qui n'a jamais été accepté par qui que ce soit, au départ.

Voilà, Mme la Présidente, ce que j'avais à dire. Je pense que c'est une loi qui, effectivement, rectifie un certain nombre de choses. Nous ne l'adopterons pas avec le sourire aux lèvres. On aurait bien voulu s'en passer, mais il arrive un moment donné où, lorsque les choses ont atteint l'état qu'elles ont atteint, il est important que le gouvernement gouverne. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Chauveau.

M. Louis O'Neill

M. O'Neill: Mme la Présidente, le ministre des Finances vient de dire que c'est une loi que nous n'adopterons pas avec joie. Je pense bien que c'est une loi qui ne réjouit personne. Cela ne réjouit pas le gouvernement lui-même, cela rappelle quelques mauvais souvenirs à l'Opposition, je crois et cela rappelle peut-être aussi quelques souvenirs ambigus à ceux qui jadis faisaient partie de l'Opposition. Mais toujours est-il que nous sommes là.

Quant à moi, Mme la Présidente, mon embarras ne vient pas simplement du fait d'avoir à adopter une loi spéciale, puisque je pense que ce qu'on a invoqué comme motifs pour présenter cette loi sont des motifs suffisants et importants, majeurs, qui emportent l'adhésion de la plupart de ceux qui sont ici. Mon malaise vient du fait même de me trouver ici pour discuter de cette loi, c'est-à-dire d'avoir à constater que nous sommes devant non pas l'échec d'un gouvernement, mais le signe d'un échec d'une société, du fait qu'on aurait pu, quand on regarde tous les éléments dans le dossier, me semble-t-il, éviter de verser dans une telle disproportion entre les objectifs et les moyens utilisés et, finalement, arriver à un accord entre les parties.

Je dirais ceci, qui a l'air un peu brutal: Nous sommes obligés, finalement, d'adopter cette loi, parce que le bon sens n'a pas réussi à prendre le dessus. Il y a un paradoxe dans le fait même que nous soyons ici tous ensemble pour discuter d'une telle loi. Le paradoxe, c'est qu'en fait nous aurions pu être ici pour discuter de choses beaucoup plus importantes. Mon collègue, tout à l'heure, le député de Sainte-Marie, disait:

Vous savez, il ne faudrait pas ici formuler des critiques trop sévères envers certaines catégories de travailleurs, sous prétexte que d'autres sont beaucoup plus défavorisés, ce n'est pas ce qu'on enlèvera aux uns qui nous permettra de le donner aux autres. Mais il reste que, dans les faits, il y a des gens qui, dans une société, cherchent un peu à défoncer un plafond et d'autres, qui sont en retard, n'ont pas encore réussi à accéder au plancher. Ceux-là devraient retenir notre attention. Ceux d'entre nous qui reçoivent des gens à leur bureau de comté, qui reçoivent des délégations, qui vont visiter des groupes de citoyens savent que, actuellement, quand même, les problèmes majeurs du travail, quels sont-ils? Ce sont les jeunes de 18 à 25 ans, qui ne réussissent pas à entrer sur le marché du travail; ce sont les gens qui, tout à coup, sont mis à pied dans des circonstances très particulières - je pense, à Québec, aux employés de Vaillancourt qui ne réussissent pas à se replacer - ce sont les gens qui ont été mis à pied entre 40, 45 et 50 ans, qui ne trouvent plus d'emploi; ce sont les travailleurs non spécialisés, pour qui il est extrêmement difficile de trouver un emploi; ce sont les femmes au foyer, qui tentent en vain de retourner sur le marché du travail; ce sont des gens comme les handicapés. Je voyais, hier, quelqu'un qui nous rapportait le problème de ces handicapés qui, au Québec, essaient d'obtenir de meilleurs services, mais encore là, cela va coûter de l'argent. À chaque fois qu'un gouvernement, qu'une administration prend la décision d'accorder telle ou telle somme d'argent, cette administration doit en même temps se demander si, par le fait même, elle n'est pas en train d'en priver une autre catégorie. Il y a là des problèmes qui devront, un jour, retenir notre attention. Il arrive, et c'est peut-être inévitable, et c'est regrettable, qu'aujourd'hui, ce ne sont pas ces catégories de citoyens qui retiennent notre attention.

Il y a aussi des problèmes plus grands. Je vous avoue que cela me fait quelque chose d'étrange d'être ici aujourd'hui à débattre cette question, encore une fois, dont je ne sous-estime pas l'urgence et la gravité, alors qu'il y a des questions présentement qui concernent la société québécoise comme telle, et son avenir, qui doivent retenir notre attention, alors qu'en fait le Québec est en danger. Le Québec est menacé par la dangereuse utopie d'un prince déphasé qui est en recherche de la célébrité, qui a décidé d'ajuster le pays à sa théorie. Il est en danger, alors que nous sommes obligés, en un sens, de ne plus parler de souveraineté pour parler de résistance et de survivance. Voilà où nous sommes rendus présentement, où les gens devraient se regrouper et être solidaires, parce que c'est une collectivité, c'est une société qui est placée devant un grave défi. Nous sommes obligés de mettre cette question de côté, pour nous occuper d'une autre question qui, toute proportion gardée, n'aurait pas dû revêtir cette importance, si on y avait mis la bonne volonté nécessaire, si on y avait mis, je dirais, le civisme nécessaire. C'est cela qui fait que nous sommes ici aujourd'hui.

Toujours est-il que nous y sommes, mais je souhaite que la prochaine fois que le ministre de l'Éducation nous convoquera, ce sera pour faire autre chose que cette tâche-pompier inévitable, que ce sera pour aborder les grands problèmes de

l'éducation au Québec, auxquels il faudra mettre beaucoup plus de temps, je dirais: y aller avec une certaine hauteur dans nos préoccupations. Il y a l'avenir d'un système d'éducation au Québec. Il y a des problèmes de concertation entre enseignants et parents. Il y a une remise à jour d'un système d'éducation qui est cloisonné, qui est dépassé, qui devrait être de plus en plus ouvert à toutes les cultures et devenir un instrument de cohésion nationale. Voilà ce dont il faudrait parler en éducation un de ces jours. (18 h 40)

Je ne peux pas croire que ce qui est majeur en éducation ait toujours, de près ou de loin, un rapport avec une convention collective. J'ai hâte aussi d'une école où les enseignants, au lieu d'avoir à se contenter d'être des exécutants convenablement, me semble-t-il, payés, mais enfin des exécutants, auront le sentiment d'être des participants, d'être des responsables, de travailler en équipe, entre autres, avec les parents, où ils auront le sentiment que l'école aussi leur appartient et qu'ils n'aient pas, je dirais, à affronter des administrateurs qui, eux, s'érigent ou se conduisent en propriétaires. Une école où des jeunes auront le sentiment d'être vraiment pris en charge par des adultes et non pas d'être au centre d'adultes qui s'affrontent et qui se querellent sans arrêt. Une école qui soit un lieu d'apprentissage, de civilisation et de vie communautaire et non le théâtre d'affrontements interminables qui, parfois, frôlent le ridicule.

Vous allez dire que c'est un rêve, que c'est loin de la réalité. Cela peut devenir la réalité. Je dois vous dire que dans une journée comme aujourd'hui, je pense qu'il n'est pas mauvais de rêver un petit peu. Cela nous permet quand même de croire encore qu'il y a des choses possibles en éducation. Je ne suis pas fier plus que d'autres de cette loi qui est nécessaire. Il n'y a sans doute pas lieu de s'en vanter, mais c'est un remède partiel, c'est un remède nécessaire. Il faudra, un jour, aller au fond du malaise.

Remarquez qu'un système d'éducation traverse, à l'occasion, une crise. Qu'un lieu d'enseignement soit, à l'occasion, un lieu d'affrontement, je pense qu'il n'y a rien de catastrophique dans tout cela. Il arrive assez souvent qu'une tension sociale, une crise sociale, soit le point de départ d'un changement, d'une amélioration. Mais quand le malaise devient permanent, je pense que cela devient autre chose. A ce moment-là, je crois que c'est un malaise qui est celui de toute une société. Nous rêvons tous d'une société, d'un pays à nous. Je pense que nous rêvons d'une société, d'un pays qui soit en santé et la santé de ce pays, c'est d'abord garanti par la santé de son régime, de son système d'éducation.

M. le Président, je pense qu'elle est très évidente l'humilité de ce gouvernement qui est obligé de recourir à un tel moyen d'exception. Je pense qu'il y a aussi sans doute cette humilité de l'Opposition qui, là-dessus, se rappelle des souvenirs pas très joyeux. Je souhaite la même humilité et le commencement d'un examen de conscience chez ceux qui ont rendu inévitable un tel recours. Merci.

Le Vice-Président: M. le député de Robert Baldwin.

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: M. le Président, je voudrais que le ministre me dise très clairement dans sa réplique les raisons pour lesquelles la Commission scolaire Baldwin Cartier n'est pas incluse dans cette loi. Je suis sûr qu'il est conscient qu'il y a aussi une grève à cette commission qui affecte 11,300 élèves et que cette grève dure depuis onze jours. On commencera la troisième semaine de la grève lundi, le 27. Les enfants, après onze jours d'absence de l'école, sont aussi en péril que les autres enfants des autres commissions scolaires qui sont traitées dans cette loi. C'est extrêmement important surtout d'être conscients du fait qu'au secondaire V, il y a une perte d'environ 20% des jeunes qui sont des "dropouts" à ce niveau-là. Si cette grève continue encore deux semaines, on risque de perdre plus d'enfants que le taux normal. Je voudrais savoir du ministre quand il va traiter de ce cas-là et pourquoi ne pas l'inclure immédiatement dans la loi? Merci.

Le Vice-Président: M. le ministre de l'Education.

M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: M. le Président, j'aimerais vous demander une directive avant que le ministre de l'Éducation exerce son droit de réplique. Un comté est aussi particulièrement touché dans le conflit de la régionale des Vieilles-Forges, c'est le comté de Champlain. Peut-être que le député de Champlain qui était ici tantôt pourrait apporter un éclairage additionnel...

Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaîtl Je reconnais le ministre de l'Éducation, s'il n'y a pas d'autres orateurs qui veulent prendre la parole en deuxième lecture. M. le ministre de l'Éducation.

M. Jacques-Yvan Morin

M. Morin (Sauvé): M. le Président, en dépit de leurs discours, dans lesquels les députés de l'Opposition, notamment, ont tenté de faire peser la responsabilité de la situation actuelle sur le seul gouvernement, ils ont annoncé qu'ils appuieraient la mesure. C'est ce que je retiendrai d'abord de leurs discours. Après nous avoir quelque peu taquinés, ils finissaient par admettre, comme nous, que le gouvernement devait intervenir, parce que la situation a maintenant atteint un degré tel de difficulté que nous n'avons pas d'autre choix que celui-là.

Bien qu'il me paraisse utile de souligner que le gouvernement n'est pas mêlé aux négociations locales ou régionales, je dirai qu'il devait assumer la responsabilité, au point où en étaient les choses. Notre tâche, notre tâche principale en tant que gouvernement, nous avons tenté de la remplir au mieux de notre compétence, le printemps dernier, au moment où se négociait l'entente nationale. Je pense que cette entente -en dépit des lacunes qui caractérisent toutes les conventions collectives, qui comportent des centaines d'articles - somme toute, n'était mauvaise ni pour les enseignants, ni du point de vue de l'administration de la chose scolaire.

Cette convention nationale, nous avons

réussi à la signer. Nous avons réussi - c'est l'une des premières fois que cela se passe - à signer une convention nationale complète, sans avoir recours à des décrets ou à de la législation, une convention nationale librement acceptée par les parties, la CEQ, d'un côté; la partie patronale, commissions scolaires et gouvernement, de l'autre. Notre devoir, donc, nous l'avons accompli l'année dernière et, normalement, nous n'aurions pas eu à être mêlés à ces nouvelles négociations au plan local et au plan régional, parce que celles-ci portent sur des objets qui ne sont pas d'intérêt national. Cependant, il a fallu assumer la responsabilité de ces conflits, parce qu'ils avaient complètement dégénéré au plan local. Ce n'est pas de gaieté de coeur - de nombreux intervenants, de ce côté-ci de la Chambre, l'ont souligné - mais nous n'avions pas le choix; quand l'année scolaire des enfants est menacée, en péril, un gouvernement manque à son devoir s'il n'intervient pas.

Je sais bien que l'Opposition a intérêt à faire croire que le gouvernement est responsable de la situation dans les régions de Trois-Rivières et de Sorel; c'est de bonne guerre, mais la vérité conserve tout de même ses droits. La vérité, c'est que nous avons jugé qu'il fallait assumer la responsabilité, au point où nous en étions, mais cela ne signifie pas que nous étions responsables du bon ou du mauvais déroulement des négociations locales. (18 h 50)

Quand nous avons constaté, cependant, qu'il y avait une impasse au plan local et qu'il était impossible d'aboutir à des accords, nous sommes intervenus. D'ailleurs, il faut bien constater que le rôle de l'Opposition dans cette affaire consiste à nous faire des reproches, si nous n'intervenons pas, et à nous en faire encore si nous intervenons. Autrement dit, nous avons tort, quoi que nous fassions, aux yeux de l'Opposition. Mais je pense que la population, elle, peut juger; elle comprend sans doute, surtout celle qui est directement concernée, la nature des difficultés et elle sait très bien qu'il était temps que le gouvernement, sans pour autant être responsable de l'échec local, intervienne de façon décisive. La réalité, donc, c'est que nous avons assumé, parce que nous sommes le gouvernement, la responsabilité d'une situation où d'autres n'ont pas pris leurs responsabilités devant les droits des enfants et des parents.

Je me tourne maintenant vers quelques-unes des interventions que nous avons entendues cet après-midi dans cette Assemblée. Je suis habitué aux petites perfidies du député de Marguerite-Bourgeoys, mais je dois avouer que je ne puis m'habituer à ses petits mensonges. Il a dit que le ministère a l'intention ou est sur le point d'abolir le programme d'éducation physique. Je ne sais où le député a pris cette fausseté, quelle mauvaise source de renseignements il peut posséder qui l'amène à induire la Chambre en erreur de cette façon. La réalité, M. le Président, c'est qu'en 1976-1977, on consacrait $3,100,000 à ce programme, à ce PEP, tandis que cette année, on y consacre $1,000,000 de plus. Ce programme ne sera pas aboli et il n'a jamais été question de l'abolir. Aussi, je m'attendrais, à un moment ou à un autre, à ce que le député de Marguerite-Bourgeoys rectifie les paroles qu'il a prononcées, cet après-midi, dans cette Chambre.

Ce n'est pas, d'ailleurs, la seule fausseté dont il s'est rendu coupable. Il nous dit que le gouvernement a l'intention de mettre fin au programme "recherche et innovation". Encore là, c'est parfaitement faux. Non seulement ce programme n'est-il pas aboli, mais le budget vient d'augmenter cette année de quelque $2,000,000, de près de $2,000,000 par rapport à l'année dernière.

M. le Président, je regrette d'avoir à consacrer du temps à rectifier les propos du député de Marguerite-Bourgeoys, mais si je les avais laissé passer, il y a de nombreux enseignants ou parents qui l'auraient peut-être cru sur parole et qui, demain, seraient venus nous demander au ministère: Est-ce vrai que vous avez aboli le programme d'éducation physique, que vous abolissez "recherche et innovation"? Qu'ils se rassurent, c'est faux.

Je me tourne vers quelques propos du chef de l'Opposition. J'aurais aimé qu'il fût là parce que j'ai quelques observations à faire au sujet de certains arguments gu'il a fait valoir. Le chef de l'Opposition nous dit, dans un bel élan: "Les enfants ont droit à une année scolaire normale". M. le Président, on ne peut pas en disconvenir, mais le chef de l'Opposition ne nous dit pas ce qu'il entend par "une année scolaire normale". Qu'est-ce que cela signifie, de façon précise? Il se réfugie dans une sorte de flou fort éloigné de la rigueur intellectuelle, de ce que nous appellerions, dans cette Assemblée, la rigueur intellectuelle.

Est-ce que le droit de grève doit être suspendu après deux jours, après dix jours, après deux semaines peut-être? Le chef de l'Oppositioin n'a pas parlé de cela. Il se contente de belles généralités qui ne veulent rien dire. C'est très beau de dire que l'enfant a droit à une année scolaire normale. Tout le monde est d'accord; c'est pour cela que nous intervenons aujourd'hui. Mais qu'il soit plus précis et qu'il nous dise après combien de jours ou après combien de semaines il serait intervenu, lui. Je serais très intéressé à connaître sa réponse un jour ou l'autre, si tant est qu'il se pique de rigueur intellectuelle.

Je voudrais faire un autre commentaire et constater que la convention nationale prévoit que les proportions maître-élèves ont été négociées au niveau national et ne sont pas "arbitrables". Qu'est-ce que cela signifie, M. le Président? On joue beaucoup sur les mots, ces temps-ci. Ce ne serait pas "arbitrable", mais cela pourrait être "applicable". Pour quiconque connaît le vocabulaire un peu technique des négociations dans le domaine de l'éducation, quand ce n'est pas arbitrable, cela signifie qu'il n'y a pas droit de grief, donc qu'il n'y a pas de recours contre la décision d'une commission scolaire et, à plus forte raison, qu'il n'y a pas de recours contre les règles prévues dans la convention nationale. Voilà ce que cela signifie! Qu'on ne vienne pas jouer sur les mots, comme le faisait le chef de l'Opposition, tout à l'heure, et nous dire: Ce n'était peut-être pas arbitrable, mais c'était peut-être applicable. Quicongue s'est frotté aux négociations dans le secteur de l'éducation sait très bien ce que cela veut dire.

La preuve, M. le Président, c'est qu'il y a eu lutte très âpre autour de cette question de l'arbitrabilité des proportions maître-élèves, lutte

qui a duré des semaines, voire même des mois. La CEQ a décidé, sur ce point précis et en échange, sans doute, d'avantages qui lui ont été concédés sur d'autres points, de céder et elle a signé la convention. Ce n'est pas le gouvernement qui a forcé M. Gaulin ou l'état-major de la CEQ à signer la convention. C'est librement qu'ils l'ont fait. Et c'est, je pense, normal de leur demander maintenant de respecter leur signature et de ne pas profiter des négociations locales et surtout de la lutte menée par des gens qui leur tenaient tête au moment de la signature, au moment où ils débattaient, dans leurs divers organismes, les clauses de la convention collective nationale. C'est une attitude étrange que d'utiliser des gens qui, à ce moment-là, voulaient les empêcher de signer pour maintenant les faire passer à l'assaut d'une convention conclue en bonne et due forme. Si cette question de l'arbitrabilité n'avait eu qu'un sens superficiel ou, si elle n'avait pas porté à conséquence, je puis vous assurer, M. le Président, que jamais il n'y aurait eu autour de cette question une lutte aussi âpre.

Mme le député de L'Acadie a fait une intervention que j'ai trouvée infiniment plus sérieuse et sereine que plusieurs autres, dont celle du député de Marguerite-Bourgeoys, par exemple, qui était un chef-d'oeuvre du genre. Mme le député de L'Acadie a posé deux questions sérieuses auxquelles, je pense, il faut tenter de répondre. Elle nous dit: Le gouvernement a-t-il prévu des mesures de récupération à la suite de cette grève? Effectivement, le ministère de l'Éducation s'en soucie, seulement - nous en avons déjà parlé, de ces questions - il faut se rendre compte que la récupération est effectuée d'abord et avant tout par les enseignants. On peut les aider, on peut encadrer la chose, on peut convenir avec le syndicat de journées de rattrapage, mais on ne peut se substituer à l'enseignant, à sa motivation, on ne peut pas faire en sorte que la qualité de sa pédagogie soit meilleure que celle dont il veut bien faire preuve de sorte que, comme toujours, dans ces questions de récupération, les enfants sont à la merci des enseignants, comme ils le sont durant la grève, d'ailleurs. Nous allons, du côté gouvernemental, tout faire pour encourager la récupération la plus efficace possible, mais, évidemment, il ne faut pas se faire d'illusions. Si les enseignants ne veulent pas la faire et surtout s'ils se mettent à exiger, en compensation, qu'on les paie pour les jours de grève, eh bien! nous ne pourrons pas trouver de terrain d'entente, c'est bien évident.

Qu'avons-nous fait, demande le député de L'Acadie, pour motiver les enseignants? Eh bien! M. le Président, de très nombreuses choses que je voudrais rappeler, en terminant. Depuis deux ou trois ans, en fait, depuis le livre vert, nous sommes en train, en ce moment même, de revoir les programmes d'enseignement avec les enseignants.

Nous sommes à faire en sorte que les enseignants rédigent enfin des manuels et je dois dire, d'après les premiers résultats, que ce sont d'excellents manuels québécois à l'intention des jeunes. (19 heures)

J'ai, pour ma part, renoué contact avec le Conseil interdisciplinaire des enseignants et avec leurs associations professionnelles: professeurs de français, d'histoire, de mathématiques et ainsi de suite. C'est l'intention du gouvernement de continuer à miser sur des rapports étroits, au sens professionnel du mot, avec les enseignants en vue d'améliorer sans cesse la qualité de l'enseignement.

Qu'avons-nous fait encore? Nous avons - on doit le répéter - en dépit des difficultés de la négociation locale ou régionale, consenti aux enseignants de très nombreux avantages au cours de la dernière négociation. On l'a rappelé cet après-midi, c'est la première fois, en vertu de la convention de mai dernier, que les enseignants vont se voir reconnaître le droit à une sécurité à vie, sécurité d'emploi complète après deux ans, lorsqu'ils auront obtenu leur permanence.

M. le Président, je pense que ces avantages, de même que les conditions de travail très favorables qui ont été concédées aux enseignants dans la négociation - qu'ils ont obtenus de haute lutte, d'ailleurs, il faut bien le reconnaître - de même que les avantages sociaux sans précédent qui ont été octroyés, tout cela démontre la volonté du qouvernement de nouer le dialogue avec les enseignants, de faire en sorte que la pédagogie soit d'abord et avant tout leur premier souci. C'est à eux que nous avons fait appel, combien de fois, pour les programmes, pour le régime pédagogique. Nous les consultons à l'heure actuelle, nous sommes à consulter la CEQ elle-même. Je ne pense pas que le gouvernement antérieur puisse se vanter d'avoir procédé à de telles consultations avant de changer les régimes pédagogiques; d'ailleurs, il n'a rien changé aux régimes.

Que le député de L'Acadie se rassure. Elle mettait en doute notre volonté de mettre à jour, de rendre publics les régimes pédagogiques. Ce sera chose faite d'ici quelques semaines. Les régimes pédagogiques du primaire et du secondaire viennent tout juste de nous revenir du Conseil supérieur de l'éducation à qui je les avais soumis. En vertu de la loi, c'était mon devoir de leur soumettre ces régimes. Le régime pédagogique des collèges se trouve devant le Conseil des collèges à l'heure actuelle. J'attends d'ici guelques mois, sans doute à la fin de l'année courante ou au début de l'année suivante, un avis circonstancié du conseil sur le régime pédagogique des collèges.

M. le Président, vous me faites siqne que mon temps est près d'expirer. Je vais donc en venir à mes conclusions. Je voudrais simplement vous dire, de même qu'aux parents qui sont aux prises avec les difficultés actuelles dans la région de Trois-Rivières et à tous les parents qui se trouvent dans des commissions scolaires où il n'y a pas de difficultés - elles sont tout de même nombreuses - que nous devons persister à avoir confiance dans l'école québécoise. Je crois que celle-ci peut être améliorée. Je pense qu'elle a commencé de s'améliorer depuis quelque temps.

Il y a quelques jours à peine, je participais à un débat télévisé avec le député de Marguerite-Bourgeoys. Il fallait voir sa tête à la fin de l'émission. On demandait aux gens - c'était un débat avec interpellation du public "Etes-vous satisfaits, oui ou non, de l'enseignement au Québec, de l'enseignement qui est dispensé à vos enfants?" L'animateur rappelait, au début de l'émission, qu'en 1976 ou 1977 les sondages révélaient que 68% des gens étaient insatisfaits de l'enseignement au Québec. Or, ce soir-là, il y a eu 900 appels téléphoniques

et la proportion - j'étais très heureux de le constater - s'est renversée; 63% ou 64% des parents québécois disaient être satisfaits de l'enseignement dispensé dans les écoles du Québec. La proportion était renversée! Il fallait voir la tête du député de Marguerite-Bourgeoys! A la fin, il n'avait plus qu'une ressource, c'était de convenir que nos politiques n'étaient pas si mauvaises.

Nous allons continuer dans la même veine, avec acharnement. Nous allons y travailler. L'école québécoise peut encore progresser, à condition qu'on y travaille sans relâche. Merci, M. le Président.

M. Lalonde: M. le Président, en vertu de l'article 96...

Le Vice-Président: Très brièvement.

M. Lalonde: Très brièvement, M. le Président. C'est parce qu'il y a certaines divergences d'opinions, parfois, entre le ministre de l'Éducation et votre serviteur. Si ce n'était que cela, je ne prendrais pas le temps de la Chambre mais il m'a accusé d'avoir menti, d'avoir dit des mensonges. J'aurais espéré qu'il vérifie le texte de mon discours, où je posais la question, sous forme interrogative: On sait toutefois que le plan d'éducation physique serait sur le point d'être aboli; M. le ministre pourrait peut-être me répondre là-dessus. Je posais la question au ministre.

Un peu plus tard: Est-ce que c'est pour améliorer la qualité de l'enseignement que vous vous apprêtez, paraît-il, à abolir le programme de recherche et d'expérimentation? J'espère que, dans votre réplique, vous pourrez nous éclairer là-dessus.

M. le Président, je dis au ministre, tout d'abord, que son petit sondage de vendredi dernier, c'était 55-45.

Le Vice-Président: S'il vous plaît!

M. Lalonde: Je dis au ministre: Qu'il se rassure. Nous le surveillons de près. S'il s'accroche au pouvoir encore jusqu'au printemps, nous vérifierons avec lui les budgets de l'an prochain.

M. Morin (Sauvé): M. le Président... Le Vice-Président: M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): ...je ne veux pas lier de querelle avec le député de Marguerite-Bourgeoys mais j'ai la transcription de son intervention sous les yeux et cela dit bien: Est-ce que c'est pour améliorer la qualité de l'enseignement que vous l'abolissez?

M. Lalonde: Ah oui, mais lisez tout! Lisez tout.

Le Vice-Président: Est-ce que la motion de deuxième lecture du projet de loi no 113 sera adoptée?

M. Lalonde: Vote enregistré.

Le Vice-Président: Qu'on appelle les députés!

Le Président: J'appelle maintenant le vote sur la motion de deuxième lecture du projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des enseignants et des commisisons scolaires.

Je demande à ceux et celles qui sont en faveur de cette motion de deuxième lecture de bien vouloir se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire-adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Mme Cuerrier, MM. Bédard, Morin (Sauvé), Parizeau, Landry, Léonard, Vaugeois, Mme Ouellette, MM. Vaillancourt (Jonquière), Johnson, Chevrette, Duhaime, Tardif, O'Neill, Martel, Gagnon, Marcoux, Bertrand, Fallu, Proulx, Laberge, Guay, Laplante, Mme LeBlanc-Bantey, MM. de Bellefeuille, Dussault, Marquis, Ouellette, Perron, Gosselin, Jolivet, Brassard, Beauséjour, Lavigne, Boucher, Desbiens, Baril, Bordeleau, Mercier...

Le Président: M. le secrétaire général associé.

Le Secrétaire adjoint: MM. Desbiens, Baril, Bordeleau, Gravel, Lévesgue (Kamouraska-Témiscouata), Lacoste, Ryan, Levesque (Bonaventure), Caron, Forget, Lavoie, Mailloux, Lalonde, Picotte, Mme Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Rivest, Mme Chaput-Rolland, MM. Samson, O'Gallagher, Dubois, Pagé, Verreault, Springate, Lalande, Le Moignan, Fontaine, Goulet, Cordeau.

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette motion de deuxième lecture veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: M. Bisaillon.

Le Président: Que ceux et celles qui désirent s'abstenir veuillent bien se lever.

Le Secrétaire: Pour: 68 - Contre: 1 - Abstentions: 0

Le Président: La motion est adoptée. M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Je veux simplement demander, vu l'absence du ministre de la Justice au cours de la journée, si ce dernier serait disposé à demeurer au cours de la commission plénière.

M. Bédard: Je dois malheureusement partir, M. le Président. S'il y a des questions précises, elles peuvent m'être adressées.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, avec le consentement de la Chambre, ce serait simplement pour savoir où en sont rendues les procédures d'outrage au tribunal.

M. Bédard: Les requêtes ont été présentées hier au tribunal et les causes seront entendues le 30 octobre. Le délai a été fixé par le tribunal.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: Conformément à la motion adoptée ce matin, je propose que, pour les trois prochaines heures, l'Assemblée étudie article par article le projet de loi qui vient d'être adopté en deuxième lecture.

Le Président: Si je comprends bien, vous me proposez de quitter mon fauteuil.

M. Charron: Je vous propose donc de quitter le fauteuil et que cette Chambre se transforme en commission plénière.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Commission plénière

M. Vaillancourt, Jonquière (Président de la commission plénière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Chicoutimi, s'il vous plaît!

Nous allons étudier, article par article, le projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des enseignants et des commissions scolaires et j'appelle l'article 1, du projet de loi.

M. Lalonde: M. le Président...

M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je attirer votre attention, une seconde, sur un fait qui me paraît important? En effet, je ne serai pas le seul à exposer les motifs du gouvernement à l'endroit de ce projet de loi et j'aimerais vous faire savoir que le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, qui a été associé de très près au projet de loi et à sa rédaction, participera également à l'échange au sein de la commission plénière. Peut-être, même, par moments, comme cela se fait à l'occasion, d'autres collègues voudront-ils intervenir; peut-être le ministre des Finances, à l'occasion, s'il y a des aspects financiers d'évoqués. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le règlement permet à tous les députés d'intervenir en commission plénière.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, le ministre de l'Éducation est bien généreux. J'aimerais savoir, tout d'abord, comme le ministre du Travail me l'a indiqué tout à l'heure, s'il y a des papillons qui auraient été préparés, j'aimerais qu'on nous les distribue immédiatement pour qu'on en prenne connaissance, si c'est possible.

M. Johnson: Je n'ai pas d'objection. Il y a trois papillons, en fait, qu'on va distribuer aux représentants de l'Opposition. Il y en a un qui semble assez long mais qui reprend simplement l'essence et la substance de certains articles, mais dans un vocabulaire juridique qui apparaît plus adéquat, compte tenu de la complexité des textes qui sont en jeu.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'appelle l'article 1.

M. Johnson: M. le Président, si vous me le permettez, avant que mon collègue commence, il y aura peut-être deux ou trois petits amendements oraux en cours de route qui sont sur des détails d'écriture. Le premier, à l'article 1, il faut lire 23 octobre et non pas 24 octobre. A l'article 1, donc, après le mot "enseignant", à la ligne suivante: "qui le 23 octobre 1980"; même chose à la ligne qui suit "association de salariés".

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord. M. le ministre de l'Education. (19 h 30)

M. Morin (Sauvé): M. le Président, l'article premier est sans doute celui qui offre le moins de difficultés, quel que soit le côté de la Chambre où l'on se trouve, puisque ce sont des définitions, puisqu'il consiste en un certain nombre de définitions. En effet, on y trouve le sens et la portée d'expressions qui seront utilisées dans la loi par la suite, comme le mot "enseignant", l'expression "association de salariés" ou encore le vocable "commission scolaire", ou encore "convention collective", "différend", "grève", "lock-out", "salarié". Je tiens à vous faire observer qu'il se peut que le contexte indique un sens différent de celui qui est prévu dans l'article premier; si on se reporte, par exemple, à l'article 11, on pourra constater que le contexte indique que, lorsqu'on parle d'une commission scolaire, on ne parle pas seulement des commissions qui sont mentionnées à l'article premier, mais de l'ensemble des commissions scolaires du Québec.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord. Oui?

M. Lalonde: M. le Président, je pense qu'on va commencer par l'article premier avant l'article 11; on verra la signification des termes à ce moment-là. Pour l'article premier, si je comprends bien, dans la définition d"'enseignant" et d'"association de salariés", on change le 24 pour le 23, c'est tout. Je n'ai pas de difficultés pour ces deux premiers alinéas; à la définition de "commission scolaire", j'aurais des questions à poser.

M. Morin (Sauvé): Posez-les.

M. Lalonde: Est-ce que le ministre a considéré d'inclure d'autres commissions scolaires dans sa définition, comme le lui a demandé le député de Robert Baldwin?

M. Morin (Sauvé): M. le Président, effectivement, cette option a été longuement étudiée non seulement par le ministère de l'Éducation, mais par le gouvernement, et la décision qui a été prise par le gouvernement était de n'inclure, dans la définition de la commission scolaire de l'article premier, que les commissions de la région de Trois-Rivières, la grande région de Trois-Rivières, et de celle de Sorel-Tracy. En

d'autres termes, le gouvernement a décidé, étant donné le caractère d'urgence et les motifs qui expliquent ce projet de loi, d'exclure des commissions scolaires comme Les Manoirs ou Baldwin-Cartier.

M. Lalonde: Est-ce que le ministre se rend compte du fait qu'aujourd'hui, le 24 octobre, nous sommes à la 11e journée d'absence d'enseignement dans cette commission scolaire et qu'à moins d'une autre session spéciale avant la session normale, avant la reprise de nos travaux le 5 novembre, il va se passer deux autres semaines? Est-ce que le gouvernement est prêt, autrement dit, à imposer, dans l'hypothèse qu'il n'y aurait pas de règlement, cette situation déplorable aux parents de la commission scolaire pour deux autres semaines? Quand commence-t-il à s'inquiéter de la qualité de l'enseignement pour l'année scolaire actuelle?

M. Morin (Sauvé): II va de soi, M. le Président, que nous nous en inquiétons d'ores et déjà et que nous faisons tout ce qu'il est possible d'accomplir pour que les négociations aboutissent dans ces deux autres commissions scolaires. Toutefois, la situation nous paraît différente et nous pensons que cette loi, ce projet de loi numéro 113, par son seul effet, pourra faire réfléchir les syndicats d'enseignants de ces autres commissions scolaires qui sont en grève ou encore en lock-out actuellement, puisque je dois rappeler au député de Marguerite-Bourgeoys que, dans le cas de la Commission scolaire Baldwin-Cartier, il s'agit d'un lock-out.

M. Lalonde: Le résultat est le même, M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Nous sommes bien conscients de cela, mais je tenais quand même à ce que ce soit mentionné.

M. Lalonde: Alors, si je comprends bien, le gouvernement refuse d'inclure dans la définition de "commission scolaire", c'est-à-dire de soumettre à cette loi spéciale, la Commission scolaire Baldwin-Cartier qui en sera rendue à peut-être une vingtaine de jours perdus lors de la reprise de nos travaux.

M. Morin (Sauvé): Je n'admets pas du tout que le député de Marguerite-Bourgeoys tire de telles conclusions, M. le Président. Au contraire, nous pensons, comme je l'ai indiqué il y a un instant, qu'il y a des chances que ces conflits se règlent dans la foulée du projet de loi actuel.

M. Lalonde: M. le Président, si le gouvernement refuse de couvrir cette situation et d'assurer le retour au travail dans cette commission scolaire, j'aimerais qu'on appelle le vote sur l'article 1, alinéa par alinéa.

M. Morin (Sauvé): Nous n'avons pas d'objection, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): "Enseignant"?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. "Association de salariés"?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. "Commission scolaire"?

M. Morin (Sauvé): Adopté.

M. Lalonde: Sur division.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté sur division. "Convention collective, différend, grève, lock-out et salarié".

M. Morin (Sauvé): Adopté. M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 1? Sur division?

M. Lalonde: Adopté sur division.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'appelle l'article 2.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, je demanderai à mon collègue, le ministre du Travail, de faire quelques commentaires, si la chose paraît nécessaire.

M. Johnson: Oui. Il s'agit essentiellement du dispositif, quant au retour au travail, où en vertu des dispositions des articles 2, 3 et 4 les salariés à l'emploi des commissions scolaires décrites doivent se soumettre à l'obligation d'entrer en classe à compter du 27 octobre, en fonction de leur horaire.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Concernant l'article 2, tantôt le ministre de l'Éducation a eu certaines questions de la part de mon collègue de L'Acadie concernant la récupération, devoir attaché à ses fonctions quand on parle de l'enseignant. Le ministre de l'Éducation a fait réponse que tout dépendra des exigences des enseignants, etc. Etant donné que cela va prendre de la récupération, peut-être pas à tous les niveaux, mais il y a au moins une chose certaine, c'est que la dernière année, avant le passage au secondaire, est une année importante, qui méritera, à mon avis, la récupération - secondaires III, IV et V, plus précisément V, mériteront aussi la récupération - n'y aurait-il pas lieu que directement à l'intérieur du projet de loi, à l'article 2, on insère l'obligation à la récupération, quitte à ce que, si les parties ne s'entendent pas, cela se fasse par ce que le projet de loi dit dans tout l'ensemble: l'arbitre nommé, si jamais on n'est pas capable de s'entendre, verra aussi à trancher cette question de récupération qui, à mon avis, est importante et nécessaire avec les 40 jours perdus pour les étudiants?

M. Morin (Sauvé): Je conviens avec le député de Maskinongé que la question de la

récupération est très importante. Pour les élèves qui ont perdu deux mois de classe, c'est même une question cruciale. Les parents ont bien raison de s'en soucier. Jamais dans le passé - je crois bien que l'avenir sera au même effet - on n'a prévu dans la loi, ni la nécessité, ni l'obligation de récupérer. Ce serait évidemment mettre à la disposition de tout le monde un nid à chicanes terrible. C'est pourquoi nous ne pouvons nous autoriser d'aucun précédent. Même s'il y avait des précédents, je pense qu'ils seraient malheureux et qu'ils auraient abouti à des impasses, de sorte que je ne pense pas qu'il soit opportun de parler de récupération dans la loi. Cela ne veut pas dire qu'il ne pourra pas en être question, bien sûr.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, j'imagine que le ministre de l'Éducation doit certainement avoir un plan en tête quant à la récupération pour les jours perdus. On sait, entre autres, qu'il y a des budgets affectés aux commissions scolaires avec lesquels ils peuvent faire de la récupération. Cependant, on sait également que ces budgets ne sont pas prévus pour un tel cas et que, sûrement, les budgets en question seront épuisés très rapidement. On peut également penser à récupérer des journées pédagogigues et les utiliser à de l'enseignement. A ce moment, je sais que par le passé, les professeurs étaient payés à temps double lorsqu'ils avaient à effectuer des journées d'enseignement pendant les journées pédagogiques. Est-ce que le ministre de l'Éducation peut nous dire, premièrement, s'il y a un plan de prévu concernant la récupération et nous en donner les détails? Quels sont les budgets supplémentaires qu'il peut affecter à la récupération? Est-ce que les journées pédagogiques peuvent être employées pour faire de la récupération? Combien en reste-t-il de journées? (19 h 40)

M. Morin (Sauvé): Au moment où nous nous parlons, M. le Président, bien sûr que le ministère de l'Éducation se soucie de cette question mais, comme on le sait, elle se traite chaque fois au niveau local. C'est une question locale par essence, en quelque sorte.

Bien sûr, nous intervenons, en ce sens que nous encourageons les parties à traiter de la chose, mais je dois dire qu'il n'y a aucun budget qui soit prévu aux crédits du ministère de l'Éducation pour une question pareille.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Le ministre nous dit qu'il n'y a pas de crédits prévus au budget du ministère de l'Éducation. On sait cependant que le ministre des Finances va certainement déposer un budget supplémentaire d'ici le mois de décembre. Est-ce que le ministre de l'Éducation peut s'engager à demander au ministre des Finances un budget supplémentaire à ce sujet-là?

M. Morin (Sauvé): Non, je ne peux certainement pas prendre un engagement de cette sorte, M. le Président.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Maskinongé.

Ce ne sera pas long, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, j'arrive.

M. Picotte: Le ministre a admis tantôt qu'il y aurait nécessité de récupération sans doute pour un groupe d'étudiants donné. J'ai bien peur que, de la façon dont nous sommes partis, on parle encore de budget, ce qui va arriver, lorsqu'il sera question, au niveau local, de récupération, la commission scolaire va dire: On n'a pas de budget qui permette qu'on fasse de la récupération. Et à ce moment-là, ce sera un peu l'exemple du chien qui court après sa queue et qui ne la rattrape jamais. La commission scolaire va donner exactement les mêmes raisons que le ministre vient d'invoquer à l'effet qu'elle non plus n'a pas de budget pour faire de la récupération et qu'elle est exposée aux normes établies dans une autre entente. Que va-t-il se passer? Il n'y aura pas de récupération? Tout le monde est d'accord que ça va en prendre une, mais on ne pourra pas en donner aux étudiants.

M. Morin (Sauvé): Cela va dépendre, bien sûr, de la bonne volonté des parties au niveau local, et je ne peux certainement pas me substituer aux parties.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je trouve absolument inacceptable l'attitude du ministre de l'Éducation à l'égard de la récupération et de la demande qui a été faite par le député de Maskinongé. Je lui demande de réfléchir quelques minutes. Il fait de beaux discours sur la qualité de l'enseignement à qui veut l'entendre, ad nauseam, comme il le dit. Et pourtant, lorsqu'arrive l'occasion de prendre une décision concrète concernant la récupération, il s'en remet à des voeux pieux du bout des lèvres. Le ministère se soucie, dit-il, de la récupération, nous encouragerons la récupération. Mais le ministre se rend-il compte que la récupération, dans ce cas-ci comme dans d'autres, est rattachée directement à la qualité de l'enseignement pour l'année de ces élèves? Il s'en remet au passé, mais dans le passé, est-ce que le ministre est satisfait de la récupération qui a été faite dans tous les cas? Je ne pense pas. Et s'il est satisfait, il est le seul parce qu'il sait très bien qu'au niveau collégial, par exemple, la récupération se fait à la maison, dans beaucoup de cas.

Il me semble que le législateur ne ferait que son devoir en incluant, dans les fonctions qui sont décrites ici à l'article 2, les fonctions tout à fait spéciales, la récupération dont ces enfants-là ont absolument besoin, si le ministre veut être en mesure de signer le diplôme à la fin de l'année. Je ne comprends par l'insouciance du ministre à cet égard, lui gui aime tellement parler de la qualité de l'enseignement.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, le député de Marguerite-Bourgeoys fait de la politique avec une question pédagogique. C'est au plan pédagogique que ces questions-là doivent être traitées. Effectivement, il le sait fort bien, dans le passé, les expériences de soi-disant récupération aboutissaient à des échecs complets. Certains syndicats prenaient des engagements de faire de la récupération et, en fait, au moment où il fallait la faire, se refusaient tout net à mettre en oeuvre les engagements qu'ils avaient pris. C'est donc une question fort délicate et que je n'ai pas l'intention de trancher sur le parquet de cette Chambre.

M. Lalonde: M. le Président... M. Picotte: M. le Président...

M. Lalonde: ...si vous permettez, M. le député de Maskinongé. Le ministre vient d'avouer que lorsqu'on laisse à la bonne volonté des gens le soin de faire de la récupération, cela ne se fait pas. Il refuse de confier ici à la loi...

M. Morin (Sauvé): Le député se trompe.

M. Lalonde: C'est ce que vous venez de dire.

M. Morin (Sauvé): Le député se trompe. Ce n'était pas laissé à la bonne volonté des gens. Cela faisait l'objet d'ententes locales entre certains syndicats et certaines commissions scolaires. Au moment de s'exécuter, la chose n'était pas accomplie, bien que de l'argent ait été versé pour obtenir ces services supplémentaires. C'est donc avec beaucoup de circonspection qu'il faut approcher des questions comme celle-là. Le député de

Marguerite-Bourgeoys, qui connaît tout de même un petit peu ces questions - il ne les connaît pas à fond, malheureusement - sait qu'il essaie en ce moment de m'entraîner à prendre des positions qui seraient par la suite inacceptables.

M. Lalonde: M. le Président, je rappellerais au ministre qu'il fait de la politique actuellement. Au cas où il l'aurait oublié, il est encore ministre de l'Éducation. Lorsqu'il propose un projet de loi à l'Assemblée nationale, il fait de la politique, pas de la pédagogie. Il devrait, quand même, se rendre compte que la récupération, dans ce cas, c'est extrêmement important. Il ne devrait pas laisser cela simplement à des voeux pieux. Si, dans le passé, des ententes n'ont pas donné les résultats escomptés, des résultats satisfaisants, raison de plus de l'inclure dans la loi, de ne pas laisser la question simplement à des ententes qui n'auraient pas donné de résultats satisfaisants. Peut-être que le ministre de l'Éducation est dans ses derniers milles. Peut-être qu'au fond il se fout un peu de toutes ces questions, étant donné qu'il ne sera peut-être pas là encore longtemps.

M. Morin (Sauvé): Encore de la politique:

M. Lalonde: Je vais demander au prochain ministre de l'Éducation, par exemple, de s'inquiéter et de proposer un amendement au deuxième article qui ferait de la récupération une obligation légale.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): M. le Président, il n'est pas question d'en faire une obligation légale qui serait, évidemment, un fardeau à porter par les enseignants et qui nous mènerait probablement, étant donné qu'il s'agirait d'une obligation juridique consacrée par une loi, à des difficultés nouvelles, pour ne pas dire des chicanes à n'en plus finir. Je puis vous assurer que tout va être fait pour que les élèves aient à souffrir le moins possible des difficultés dont ces commissions scolaires ont été le théâtre, mais il n'est pas question d'inscrire cela dans la loi.

M. Lalonde: Si le ministre nous dit que tout va être fait - enfin, il vient de nous assurer cela de son siège de ministre à l'Assemblée nationale - qu'est-ce que c'est, tout ce qui sera fait? Qu'il nous donne des détails!

M. Morin (Sauvé): Le ministère fera tout ce qu'il est possible de faire, grâce à son expérience de la chose et compte tenu du bon sens, pour faire en sorte que les élèves aient le moins possible à souffrir de ces événements.

M. Lalonde: Qu'est-ce que c'est?

M. Morin (Sauvé): II n'est pas question de faire de cela une obligation juridique qui ne ferait, tout simplement, qu'ajouter aux difficultés existantes. Au fond, ce que le député de Marguerite-Bourgeoys tente de faire - il devrait avoir la franchise de l'admettre - c'est nous compliquer la tâche. Il sait très bien que ces questions ne sont pas politiques. Ce sont des questions pédagogiques.

M. Lalonde: Une question de privilège, M. le Président. J'ai droit à une question de privilège en commission plénière. On n'est pas en commission parlementaire, là.

M. Morin (Sauvé): II voudrait transformer des questions pédagogiques en questions politiques. Je trouve le manège du député de Marguerite-Bourgeoys inqualifiable.

M. Lalonde: Non, je ne peux pas laisser passer cela, quand même. Il me prête des intentions indignes, ce qui est défendu par le règlement. Je n'ai rien à faire pour rendre sa tâche difficile. Le ministre fait cela tout seul, très bien à part cela, jusqu'à des montants de $500,000,000. On n'y est pour rien. Il fait cela parfaitement seul. Je réprouve, par exemple, ses propos quand il dit que c'est à des fins strictement malicieuses que je m'inquiète de la récupération. Il sait très bien que la récupération dans le passé ne s'est pas faite partout de façon satisfaisante. Il sait très bien que, s'il laisse cela à la volonté locale ou aux moyens locaux, les chances qu'elle se fasse sont minces. Je réprouve le laisser-aller et la négligence du ministre qui ressemble à sa négligence administrative.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, les deux

ministres qui sont en face de nous sont en train de me faire regretter d'avoir voté en faveur de la loi. Comme le disait l'ancien député de Johnson, l'enfer est pavé de bonnes intentions. Le ministre nous dit aujourd'hui qu'il est prêt à faire tout en son pouvoir pour qu'il y ait de la récupération, mais il ne met pas de sous à côté. (19 h 50)

Si on veut faire de la récupération dans ces commissions scolaires, il faut absolument mettre de l'argent, parce que cela correspond à de l'argent. Et le ministre de l'Éducation nous dit qu'il n'y en a pas et qu'il ne veut pas en mettre non plus. Quand bien même il mettrait tout ce qu'il voudra dans la loi, s'il ne met pas de l'argent en même temps, il ne réussira pas à faire de la récupération.

J'aimerais qu'il nous dise également si, après 40 jours perdus, les enfants ont perdu leur année, sans récupération.

M. Morin (Sauvé): Cela dépendra évidemment. Le député a certainement une certaine expérience de la vie, des choses, et sait très bien que, dans ce domaine de l'école, dans le domaine de la pédagogie, les choses ne se tranchent pas au couteau. Les choses ne peuvent pas être noir ou blanc. Ce serait trop simple. Il suffirait d'additionner des jours de classe et on aurait le résultat au bout. De bonnes journées de classe peuvent donner de bons diplômes, des enfants qui posèdent une bonne instruction. De mauvaises journées de classe, elles auront beau être aussi nombreuses que les bonnes journées, elles aboutiront à un résultat tout autre et l'enfant sortira peut-être de la classe sans s'être vraiment instruit. De sorte que ce n'est pas une question quantitative, c'est, dans une large mesure, une question qualitative; de même d'ailleurs, le député le sait bien, que les rapports qu'il doit connaître entre un père et ses enfants. Ce n'est pas une question quantitative, ce n'est pas le nombre d'heures qu'il passe avec eux, c'est la qualité de sa présence. C'est la même chose pour les enseignants.

Donc, on ne peut pas trancher cela au couteau et dire: S'il n'y a pas tant de jours de récupération, l'année est fichue. Cela dépend comment le reste de l'année se déroule. Cela dépend de la motivation des enseignants, cela dépend de leur compétence, cela dépend de leur dévouement. Si tout cela manque, on aura beau ajouter 50 jours, cela ne vaudra rien, comme c'est le cas de nombreux précédents dont on pourrait s'inspirer.

M. Fontaine: M. le Président, le ministre me permettra de le reprendre un peu là-dessus. Ce n'est pas pour rien non plus qu'on dit qu'il y a 200 jours de classe. On vient d'en faire tomber 40.

M. Lalonde: C'était 180 à un moment donné, à cause des congés. Nous sommes rendus à 140.

M. Fontaine: II n'en reste pas beaucoup. Il y a quand même une question de quantité, même s'il y a une question de qualité.

M. Morin (Sauvé): Le député n'a pas vraiment à nous apprendre cela. Nous le savons.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: II y a déjà 40 jours de perdus. On s'entend tout le monde pour dire que cela va nécessiter une récupération. On entreprend la période hivernale. Il ne faut pas avoir été lonqtemps dans le domaine scolaire pour savoir que généralement, dans un hiver normal, les étudiants perdent cinq ou six jours de classe annuellement, dû à des tempêtes de neige, ce qui vient ajouter au nombre de jours perdus jusqu'à maintenant, dans un secteur donné, au niveau de la régionale des Vieilles-Forges.

Je sais que le ministre va être inflexible à notre demande et d'ailleurs, avec la majorité qu'il possède en Chambre, il n'y a pas de problème, il ne s'en passera pas. Mais on lui donnait une bonne occasion de nous prouver ce qu'il nous a dit tantôt, qu'il se souciait du bien de l'enfant.

Là, on vient de vous demander une chose qui prouve que le bien de l'enfant passe au-dessus de toutes les questions financières. Le bien de l'enfant, c'est justement qu'il y ait une récupération pour être capable de réussir son année scolaire au niveau de certains secondaires. On demande au ministre de l'inclure à l'intérieur, pour que ce soit discuté, au cas où les deux parties ne s'entendraient pas. Il refuse cela.

Alors, ne venez plus nous parler du bien de l'enfant; autrement, vous ne connaissez pas cela.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): Le député de Maskinongé, je pense, a bien fait de laisser le monde de l'enseignement. Il devrait savoir que les questions de pédaqogie, cela ne se légifère pas. La bonne et la mauvaise pédagogie, une bonne année scolaire et une mauvaise année scolaire, cela ne se légifère pas.

Avant de décider quoi que ce soit, il va falloir que la rentrée s'effectue, qu'on constate dans quel état d'esprit elle s'effectue, il va falloir que les choses se tassent, il va falloir que les gens se parlent, il va falloir que les gens évaluent la situation. Cela ne se fait pas dans un projet de loi. Et, s'il ne sait pas cela, je m'étonne qu'il ait occupé des fonctions dans l'enseignement.

M. Picotte: Mais je sais une chose, M. le ministre de l'Éducation. Avec votre système, présentement, on va se retrouver dans le même cul-de-sac que celui auquel nous faisons face présentement. La commission scolaire dira aux enseignants que cela dépend du ministre de l'Éducation, le ministre de l'Éducation dira que cela dépend de la commission scolaire. Ensuite, on passe la balle au ministre des Finances, on passe la balle au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et, quand on en a fait tout le tour, le bien de l'enfant, on l'a vous savez où. C'est cela.

M. Morin (Sauvé): Je ne sais pas où vous l'avez, M. le député.

M. Picotte: Mais moi je sais où vous l'avez, de la façon dont vous nous répondez depuis tantôt.

M. Morin (Sauvé): M. le Président...

Le Président (M.Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Morin (Sauvé): ... je ne sais pas si l'ancien enseignant qu'est le député de

Maskinongé utilisait ce vocabulaire quand il enseignait, mais je pense que ce n'est...

M. Picotte: ... donner une précision.

Le Président (M.Vaillancourt, Jonquière): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Morin (Sauvé): ... pas digne de cette Assemblée.

M. Picotte: Est-ce que j'ai donné une précision quelconque?

Le Président (M.Vaillancourt, Jonquière): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Picotte: C'est vous qui, par déduction...

M. Morin (Sauvé): Je dirai simplement, M. le Président, qu'on ne légifère pas la pédagogie. C'est une affaire qui se règle à un tout autre niveau par le dialogue, par les tentatives de compréhension de part et d'autre, et ça, ça se fait très localement, dans chaque école, pour ne pas dire dans chaque classe.

Le Président (M.Vaillancourt, Jonquière): L'article 2 sera-t-il adopté?

M. Lalonde: Sur division.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté sur division. Article 3.

M. Johnson: Adopté, M. le Président.

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 4, adopté?

M. Lalonde: Oui, adopté.

M. Johnson: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 5.

M. Lalonde: A l'article 5, j'aurais une question à poser. J'aimerais savoir qu'est-ce que ça ajoute à la réalité juridique de dire que les conditions de travail sont applicables aux enseignants, alors que la convention collective est applicable actuellement.

M. Johnson: Non, c'est qu'elle ne l'est pas en ce moment, techniquement, en vertu du Code du travail.

M. Lalonde: Ah, bon!

M. Johnson: L'entente nationale qui a été adoptée, c'est en fait le coeur battant, si on veut, sur le plan monétaire, et même, sous certains aspects, des conditions de travail des enseignants. Mais ça ne devient une convention collective qu'au moment où cette entente est intégrée dans ce qui, normalement, doit être négocié localement. Le tout est ratifié, cependant, en deux volets au niveau du syndicat local, en vertu du Code du travail.

Donc, l'effet très concret de l'article 5, c'est de permettre aux enseignants des Vieilles-Forges et de Carignan - quand je dis: Vieilles-Forges et Carignan, j'entends l'ensemble des commissions scolaires dont il est question -de bénéficier des conditions de salaire ou de l'ensemble des conditions qu'ils ont obtenues dans l'entente nationale, même si la convention collective locale n'est pas signée et même si la sentence arbitrale n'est pas encore arrivée. Alors, ils auront droit à leur rétroactivité, ils auront droit à l'ensemble des conditions qui ont été négociées par leur centrale au niveau national.

M. Lalonde: Cela va, je vous remercie; adopté en ce qui nous concerne.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 5, adopté. Article 6.

M. Johnson: M. le Président, l'article 6 dit essentiellement qu'à partir de l'adoption de cette loi, les syndicats impliqués et les commissions scolaires décrites dans l'article 1 - c'est-à-dire dans les régions de Trois-Rivières et de Sorel-Tracy - peuvent conclure, dans les quinze jours, une convention collective. C'est peut-être là un espoir assez mince, quand on regarde la tradition, dans le cas en tout cas de Trois-Rivières, cependant, c'est également l'ouverture - comme on le verra un peu plus loin aux articles 7 et 8 - la possibilité pour les parties de parapher des textes sur des choses, par exemple, si on a réussi à s'entendre. Comme cela a été le cas à Carignan et également à Trois-Rivières, sur une série de chapitres locaux, et ce fut paraphé. Ce qu'on dira plus loin c'est que l'arbitrage devra tenir compte obligatoirement de ce sur quoi les parties se sont entendues, dans les secteurs qui sont de juridiction locale et qui ne seront pas exclus par l'article 11.

M. Lalonde: Je vous remercie. J'aimerais simplement savoir quel est le ministre qui est décrit au dernier mot de l'article 6? Il n'est pas défini dans la loi et je ne vois pas de référence à d'autres lois. Est-ce que c'est le ministre du Travail ou le ministre de l'Éducation?

M. Johnson: II s'agit - comme il est nommé après, je pense que le député comprendra bien, puisqu'il est juriste... "...sur demande écrite adressée au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre par la commission scolaire ou l'association de salariés, être soumis à un arbitre nommé par le ministre." Donc, c'est le ministre du Travail.

M. Lalonde: D'accord, je m'excuse, ça m'avait échappé. On pourrait l'adopter.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 6 est adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. Article 7, adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 8.

M. Johnson: II y a papillon à l'article 8, M. le Président. Il s'agit de changer "... toute stipulation ayant fait l'objet..." pour "... toute stipulation faisant l'objet...". J'explique la portée du papillon; il s'agit de ne pas interdire, dans les cas de Trois-Rivières et de Carignan, l'intervention d'ententes entre les parties sur certains objets qu'elles pourraient signer, et l'arbitre, à ce moment, serait lié par ces objets. (20 heures)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que la motion d'amendement est adoptée?

M. Lalonde: Pour l'amendement,oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

M. Johnson: Pour l'article?

M. Lalonde: Pour l'article, pour le premier alinéa...

M. Johnson: Je m'excuse. Est-ce qu'on pourrait voir tout le papillon? Il y a un autre amendement aussi au même article; cette fois-ci, à la première ligne du deuxième alinéa, remplacer les mots "la teneur de l'accord" par les mots "cette stipulation". Encore une fois, c'est strictement une question de précision ici.

M. Lalonde: Comment... Là, c'est une question de fond.

M. Johnson: Est-ce que l'amendement est adopté, M. le Président?

M. Lalonde: Oui. On l'a adopté, pas de problème.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté.

M. Johnson: Le troisième papillon, toujours au même article, à la deuxième ligne du deuxième alinéa, remplacer les mots "pour rendre compatibles" par les mots "pour la rendre compatible" évidemment, en concordance avec le précédent. Adopté, M. le Président?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté.

M. Lalonde: Adopté pour les amendements. Maintenant, j'aimerais poser une question de fond. On sait qu'on a deux régimes comme conséquence de cette loi: les conventions locales, qui ont été adoptées, qui ont été acceptées avant le 24 octobre, demeurent. En vertu de l'article 12, l'article 11 que l'on propose se trouve à s'appliquer pour toutes les conventions collectives à venir.

M. Johnson: Je m'excuse. On se comprend bien. Quand le député parle des conventions collectives, il parle de celles en dehors de Sorel-Tracy et de Trois-Rivières.

M. Lalonde: Oui.

M. Johnson: D'accord, on se comprend bien. C'est parce que la notion "les commissions", il faut bien se rendre compte qu'à Sorel et à Trois-Rivières, il y a plusieurs commissions scolaires, parce que c'est une régionale.

M. Lalonde: Je parle de deux régimes. Jusqu'à maintenant, il y a à peu près les deux tiers des commissions scolaires - pas dans le sens de la loi - qui ont réqlé leur affaire et souvent -je dirais peut-être la majorité des cas conformément à l'article 11.

M. Johnson: II y a des conventions qui, effectivement, sont intervenues et qui ne respecteraient pas les dispositions de l'article 11. Je ne crois pas, d'après ce qu'ont pu en dire les gens à l'Éducation, qu'il s'agisse de la majorité, bien au contraire. Mais dans certains cas, effectivement...

M. Lalonde: Disons qu'il y en a.

M. Johnson: Bon. C'est cela. Il y en a.

M. Lalonde: Et on dit que c'est une espèce de droit acquis; ils se sont entendus...

M. Johnson: C'est cela. Il n'y a pas de caractère rétroactif de la loi à cet égard.

M. Lalonde: Non, il n'y a pas de caractère rétroactif de la loi. Les gens se sont entendus au niveau local. On respecte cela...

M. Johnson: C'est cela.

M. Lalonde: ... même si ce n'est pas conforme à l'interprétation de l'article 11.

M. Johnson: C'est cela.

M. Lalonde: Maintenant, à l'article 8, on dit: "Toute stipulation faisant l'objet d'un accord écrit..."

M. Johnson: Oui.

M. Lalonde: Alors, dans ce cas, même si c'est un accord qui a été écrit et paraphé, on se trouve à l'assujettir à l'interprétation arbitrale. Comment se fait-il que ce qui est déjà signé n'est pas bon pour tout le monde?

M. Johnson: C'est que 8 ne vise que Carignan et Trois-Rivières.

M. Lalonde: Oui, mais ce qui est déjà...

M. Johnson: On veut faire en sorte qu'à Carignan et à Trois-Rivières, par exemple, s'il y a eu une entente sur l'affichage, s'il y a eu une entente sur un problème de la participation des

enseignants, s'il y a eu une entente sur une des 16 matières, à l'exclusion de cette question du 8.6, il n'y a rien qui interdit qu'interviennent des ententes à cet égard. Par ailleurs, toute entente à l'égard de la question des ratios, etc., devra être celle qui est prévue dans cette loi; c'est vrai pour Carignan, Trois-Rivières et ce sera vrai pour l'ensemble des commissions scolaires au Québec où n'est pas encore intervenue une entente.

M. Lalonde: Je regrette, mais je ne comprends pas comment le ministre peut respecter ou nous suggérer de respecter les accords écrits pour toutes les autres commissions scolaires, mais pas nécessairement pour celles de Carignan et de Trois-Rivières.

M. Johnson: Oui, oui. Ce qu'on respecte ailleurs...

M. Lalonde: Mais non, vous dites: "Toute stipulation..."

M. Johnson: ... ce ne sont que les conventions collectives complètes. Or, il n'y a pas de convention collective complète à Carignan et à Trois-Rivières. Dieu sait qu'on le sait.

M. Lalonde: D'accord! Mais ce n'est pas une question de savoir si la convention est complète ou non. C'est la question de savoir sur quoi vous vous êtes entendus. Vous l'avez écrit, vous l'avez paraphé, c'est un contrat; on respecte cela.

M. Johnson: D'accord. Parce qu'il s'agit de savoir ce qui fait l'objet d'une négociation en vertu du Code du travail et de nos lois. Ce qui fait l'objet d'une négociation de convention collective, que ce soit dans le public, le parapublic ou ailleurs, c'est un ensemble de conditions de travail. Or, l'autre principe qu'on retient, c'est la non-rétroactivité de nos lois. À cet égard, on dit que, si une entente sur l'ensemble des conditions de travail est intervenue entre une association de salariés et une commission scolaire, même si elle n'est pas encore ratifiée par l'assemblée, tel que l'exige le Code du travail pour devenir une convention collective, nous allons respecter cet échange de volontés qui est la base, on le sait, de notre régime de droit du travail, sauf quand on est dans des situations exceptionnelles.

À cet égard, ce qu'on dit, c'est que toute convention collective conclue va être respectée, c'est-à-dire lorsqu'il y a eu une entente de principe, qu'elle est allée en assemblée, qu'elle a été ratifiée par un vote, qu'il y a eu signature par la suite de la part de la commission locale et de la part du syndicat local. Également, seront exclus de l'application des dispositions de l'article 11 - on verra dans sa reformulation tout à l'heure qu'il deviendra l'article 12 pour les fins des articles qu'on considère - les endroits où un syndicat et une commission scolaire se sont entendus sur l'ensemble des conditions de travail, mais où il y a une étape qui manque, c'est-à-dire où la ratification par l'assemblée générale n'est pas encore intervenue. On dit: II y a quand même eu échange de volontés de part et d'autre et, à cet égard, on va considérer exceptionnellement, par respect des traditions juridiques et par respect des parties, qu'à toutes fins pratiques c'est une convention, évidemment, à moins que l'assemblée ne la rejette. À ce moment-là, si l'assemblée la rejette, on retourne au sens d'une convention qui est en négociation, donc les dispositions vont s'appliquer.

M. Lalonde: Pour revenir à ce qu'on dit dans l'article 8: "Toute stipulation ayant fait l'objet d'un accord écrit - cela, c'est le critère -entre les parties au cours de la négociation est consignée dans la sentence arbitale." L'arbitre n'a pas le choix, il faut qu'il la prenne dans sa sentence. Cela est conforme au principe que ce qui a été entendu, on le garde. "Dans la mesure où cette stipulation est conforme à l'entente"; c'est cela qui me fait tiquer. Qu'est-ce que c'est, la conformité à l'entente? En vertu de quels critères, en vertu de quelles normes cette conformité est-elle décidée par l'arbitre? Quand on parle de l'entente mentionnée a l'article 5, c'est-à-dire la convention collective provinciale.

M. Johnson: La notion de conformité, c'est une notion de logique, finalement. Je comprends que cela devient juridique dans la mesure où on le consigne ici, mais il est bien évident qu'un arbitre... On dit: L'arbitre va être obligé de tenir compte du consentement des parties. Ce n'est pas pour rien qu'on nomme un arbitre, c'est qu'il n'y a pas eu de consentement sur certaines choses. Et on dit: Comme on impose à l'arbitre de consigner dans sa sentence les ententes intervenues entre les parties, il faut bien, par ailleurs, que l'arbitre s'assure que, si, lui, comme arbitre, avait eu à juger non pas du bien-fondé, mais de la conformité de ces dispositions avec l'ensemble des lois qui existent ou avec l'entente nationale, il en aurait tenu compte. Donc, on dit: À la rigueur, à cet égard, il pourrait modifier une stipulation comme si lui écrit la sentence, mais le principe de base demeure qu'il doit respecter l'entente intervenue entre les parties.

M. Lalonde: On peut présumer, par exemple, que cette conformité a été respectée par la partie patronale et par la partie syndicale lors de l'entente écrite, parce qu'il y a un écrit là-dessus.

M. Johnson: Oui.

M. Lalonde: Alors...

M. Johnson: Pas nécessairement.

M. Lalonde: Non, l'arbitre peut changer cela.

M. Johnson: D'ailleurs, je dois vous dire - je pense que le ministre de l'Éducation et le ministre des Finances en ont parlé assez longuement tout à l'heure - qu'une bonne partie du problème qui s'est posé dans certaines des commissions scolaires, semble-t-il, c'est que, d'une part et de l'autre, pour des motifs sur lesquels on pourra s'étendre tant qu'on le voudra, du c6té des commissions scolaires comme du côté de certains syndicats, on a décidé de ne respecter ni l'esprit, ni la lettre de l'entente nationale.

M. Lalonde: Vous voulez parler des articles

8 et 9?

M. Johnson: Et cela ne les a pas empêchés de signer.

M. Lalonde: Vous voulez parler des articles 8 et 9?

M. Johnson: Je parle de toute la question des articles 8 et 9, entre autres.

M. Lalonde: On va voir cela dans l'article 11.

M. Johnson: Oui, on y reviendra tout à l'heure, aux articles 11 et 12.

M. Lalonde: D'accord.

M. Johnson: Est-ce que l'article 8 est adopté, M. le Président?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 8 est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 8 adopté, tel qu'amendé. L'article 9, adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 10, adopté?

M. Lalonde: Est-ce qu'on pourrait élaborer un peu sur ces références?

M. Johnson: Oui, il s'agit essentiellement de dispositions du Code du travail qui touchent à l'arbitrage de différends. En d'autres termes, ce qu'on dit, c'est que l'arbitre qui sera nommé pour Trois-Rivières et Sorel-Tracy, ou les arbitres, selon le cas, devront respecter l'ensemble des dispositions du Code du travail qui touchent aux tribunaux d'arbitrage de différends. (20 h 10)

On sait qu'il y a deux sortes d'arbitrage de différends qui sont prévues dans le Code du travail: d'une part, l'arbitrage d'une convention collective dans le cas de ceux qui n'ont pas le droit de grève, comme les policiers et les pompiers, et, d'autre part, l'arbitrage auquel ont consenti les parties décidant de s'en remettre à un arbitre. Or, ces articles du Code du travail prévoient la façon de procéder de ce tribunal d'arbitrage et également les pouvoirs de l'arbitre. Alors, on se réfère aux articles du Code du travail et, encore une fois, en étant cohérent avec l'ensemble des dispositions du code.

M. Lalonde: Ce sont tous des articles qui ont trait au tribunal d'arbitrage, c'est-à-dire à l'arbitrage.

M. Johnson: C'est ça; exactement, sans aucune exception.

M. Lalonde: D'accord.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'article 10 est adopté? M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. J'appelle l'article 11.

M. Johnson: Papillon, M. le Président. Il s'agit du papillon no 2, intitulé article 11. Dans un premier temps, il faudrait d'abord ajouter, après les mots "dans la clause 8-9.01E" dans la deuxième ligne du deuxième alinéa, les mots "de cette entente". En d'autres termes, c'est strictement une question de précision. Est-ce que l'amendement est adopté, M. le Président?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté.

M. Johnson: D'accord. Premièrement, l'amendement suivant consiste simplement à dire que l'article 11 tel que nous venons de l'amender se termine après le mot "entente". Les deux alinéas qui suivent et qui sont actuellement dans la version de l'article 11 deviennent l'article 12. C'est simplement une renumérotation et je m'explique. L'article 11 se lirait maintenant comme suit: "Les stipulations négociées et agréées à l'échelle locale ou régionale doivent être conformes aux stipulations déjà agréées à l'échelle nationale et prévues à l'entente mentionnée à l'article 5." C'est l'article 11. D'accord?

M. Lalonde: Ah bon; l'article 12 commence à "Une commission".

M. Johnson: C'est ça.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que le nouvel article 11 sera adopté?

M. Lalonde: Écoutez, on a déjà dit ça à l'article 8, ce qu'on dit à l'article 11.

M. Johnson: C'est-à-dire qu'il s'agit ici d'une disposition d'application générale, contrairement à ce qu'il y a dans l'article 8 qui est une disposition qui s'applique dans le cas de 5orel-Tracy et Trois-Rivières. Il s'agit de reprendre les notions qu'on retrouve dans l'article 8 et de les formuler dans la section V du projet de loi au titre des dispositions générales. L'article 11 serait un article de portée générale sur les stipulations quant à leur nécessité d'être conformes à l'entente nationale.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le nouvel article 11 est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

M. Johnson: Si vous me le permettez, M. le Président, je sais que le député de Marguerite-Bourgeoys a de nombreuses questions sur ce qui s'appelait l'article 11 auparavant, mais, dans le fond, les questions qu'il veut soulever, j'en suis sûr, concernent ce qui va devenir l'article 12, à toutes fins utiles, quant à l'application de l'article 8-9.00 et le reste.

M. Lalonde: Oui, quoique j'aimerais peut-être - je ne sais pas s'il y a d'autres députés qui se posent des questions là-dessus -que le ministre nous démontre la nécessité de légiférer dans ce sens-là, à savoir est-ce qu'en principe les stipulations négociées, agréées à l'échelle locale ou régionale, ne doivent pas être conformes aux stipulations déjà agréées à l'échelle nationale? Alors, pourquoi le dire dans la loi? Est-ce que cela ne va pas sans dire? Quel en est le besoin?

M. Johnson: J'ajouterais: Mais c'est mieux en le disant.

M. Fontaine: Si vous voulez qu'elles soient conformes à l'interprétation que vous en donnez.

M. Johnson: Écoutez, c'est la racine du problème dans peut-être quinze ou vingt commissions scolaires.

M. Lalonde: D'accord. Alors, l'article 11...

M. Johnson: Et, à cet égard, l'article 11 affirme clairement, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, que, dans toutes les commissions scolaires du Québec où n'est pas encore intervenue ou une convention collective ou une entente de principe... Cela réaffirme ce qui a toujours été dit depuis deux ans et ce qui a toujours été l'objet du partage des matières au niveau national et au niveau local, c'est-à-dire que les dispositions d'une convention collective locale ne peuvent pas contrevenir aux dispositions de l'entente nationale.

Et on comprendra que, sur le plan juridique, c'est un peu spécial, dans la mesure où toute la notion de ce qu'est une convention collective en vertu du Code du travail a été soulevée par toute cette question des deux paliers depuis une quinzaine d'années au Québec et que, si on arrive un peu à des textes bâtards depuis quinze ans, c'est parce que c'est le Code du travail qui, de façon générale, s'applique. Il s'applique même à l'enseignement et même dans le cas des hôpitaux où on sait qu'en pratique la négociation sur ce qui, dans bien des cas, est considéré comme l'essentiel, par exemple, le monétaire, ne se fait pas au niveau des associations accréditées, ce qui a fait qu'on a une série de dispositions dans nos lois du travail qui touchent le secteur public et parapublic qui sont, en fait, des choses qui sont un peu en conformité avec le Code du travail, qui s'y réfèrent et, de temps en temps, ne s'y réfèrent pas.

Étant donné que, dans la loi 55 ou 59 sur le partage des matières au niveau national et au niveau local dans tout le public et parapublic, on référait à la notion des deux paliers et étant donné que le Code du travail, par ailleurs, lui, ne prévoit pas ça, ici il est peut-être très bon de le dire et peut-être que la démonstration qu'on a eue au niveau de ces deux endroits et d'autres commissions scolaires nous démontre qu'il faut le faire; il faut peut-être le préciser carrément dans un texte qui, dans le fond, est du droit administratif, qui n'est pas le Code du travail comme tel.

M. Lalonde: Sur le nouvel article 11, en ce qui me concerne, je n'ai aucune objection. C'est l'article 12 qui soulève des problèmes.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, est-ce que ça veut dire que vous voulez, dans le fond, que les ententes soient conformes à l'interprétation que le gouvernement a donnée à l'entente nationale?

M. Johnson: Bien que je n'accepterais pas tout à fait la formulation qu'en donne le député de Nicolet-Yamaska parce que je pense qu'il y a un petit peu plus qu'une affirmation dedans, disons que cette question qu'il veut soulever, c'est vraiment dans l'article 12; ce n'est pas dans l'article 11. Dans l'article 11, c'est le principe général qui, malheureusement, est absent de nos droits, est absent du Code du travail et qu'il faut peut-être mettre ici pour que ce soit clair. D'accord?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, le nouvel article 11 adopté?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 12?

M. Johnson: Alors, l'article 12, M. le Président, est composé des deux alinéas qu'on retrouvait à l'article 11 et qui formaient le deuxième et le troisième paragraphes. J'en ferai lecture juste pour que ce soit bien clair. L'article 12, M. le Président, pour les fins du journal des Débats, se lira comme suit: "Une commission scolaire ne peut sous réserve des dispositions sujettes à l'arbitrage dans la clause 8-9.01E de cette entente s'obliqer à engager un nombre d'enseignants basé sur les règles prévues à l'article 8-9.00, mais elle doit respecter l'application des règles de formation des groupes d'élèves prévues à l'article 8-5.00 et celles de la charge d'enseignement prévues à l'article 8-2.00."

Deuxième alinéa de l'article 12: "La commission scolaire peut toutefois convenir de règles prévoyant des modalités de rappel d'enseignants mis en disponibilité ou non rengagés pour surplus de personnel et ce jusqu'à concurrence du nombre total d'enseignants obtenu par l'application de l'article 8-9.00 de l'entente. Ces règles doivent respecter les dispositions des paragraphes 1 et 4 de la clause 5-3.18 de l'entente. Toutefois, par l'effet de ces règles, la commission scolaire ne peut être tenue de procéder à de nouveaux engagements."

M. Lalonde: M. le Président, le premier alinéa du nouvel article 12, je pense, mérite qu'on se pose des questions. Cela sulève le deuxième principe important, je pense, de ce projet de loi. En effet, on retrouve dans cet article l'interprétation qui est prévilégiée par le gouvernement dans la convention collective. C'est en vertu de cette clause 8-9.00 que les syndicats locaux exigent des commissions scolaires l'engagement d'un nombre d'enseignants qui pourrait dépasser le nombre qui serait calculé simplement en vertu des clauses 8-5.00 concernant la formation des groupes d'élèves et 8-2.00 concernant la charge d'enseignement

prévue à cet article. (20 h 20)

J'avoue que cela me crée un certain problème. J'ai entendu le député de Sainte-Marie, ce soir, exprimer aussi des hésitations, des appréhensions. J'espère que le ministre pourra nous répondre et éliminer nos appréhensions, mais il m'apparaît, à première vue, que - c'est certainement au coeur du conflit actuel - c'est une différence d'interprétation de ces articles qui a amené le conflit que l'on connaît. Pourquoi demander à l'Assemblée nationale de changer le contrat? On dira: C'est pour préciser. Si la précision n'est pas une modification, on n'a pas besoin d'adopter une loi pour le faire. J'avoue que je me demande jusqu'à quel point c'est notre rôle ici de changer une convention collective unilatéralement, alors qu'à l'article 8 ou 9, au troisième alinéa - je vais le retrouver - on dit bien que ce sont les parties à cette convention qui peuvent s'entendre, qui doivent s'entendre, qui doivent se parler pour en déterminer l'application. Il semble qu'on se soit parlé, mais qu'on ne se soit pas entendu. On dit: Si on ne s'est pas entendu, on va aller voir l'Assemblée nationale et on va légiférer. Le ministre pourrait-il répondre à ces questions?

M. Johnson: M. le Président, je sais que mes deux collègues auront des choses à dire sur cette question. Ils ont déjà évoqué, je pense, au cours du débat de deuxième lecture, certaines de ces choses-là. Je voudrais simplement, d'entrée, sur le plan purement technique, encore une fois, puisque c'est mon rôle ici à côté de mon collègue de l'Éducation, sur le plan de la loi telle quelle et sur le plan de l'interprétation juridique, rappeler au député de Marguerite-Bourgeoys qu'il y a deux paliers. Il y a une entente. Cette entente est normalement intégrée au texte d'une autre entente qui est conclue localement et forme la convention collective. Dans cette entente nationale, il y a l'engagement, à toutes fins pratiques, d'un des partenaires majeurs dans notre société, et cette entente, disons-nous, comme premier principe, doit être respectée et ne peut être mise en question sur le plan local.

Vient la question de l'interprétation de l'entente nationale. C'est ce que pose le député de Marguerite-Bourgeoys à qui je rappellerai qu'en droit du travail - il le sait très bien - les principes d'interprétation, bien qu'ils demeurent les mêmes que sous n'importe quel autre régime de droit dans notre société, sont des principes qui s'appliquent sur des ensembles juridiques et contractuels qui sont fort différents du droit civil, puisque la résultante de ce qui va devant, par exemple, un arbitre de griefs ou un arbitre de différends, c'est la résultante d'une négociation qui, par définition, implique des consentements qui, dans certains cas, font l'objet ou bien d'un échange où les parties, assez fréquemment - je ne parle pas ici de ce contexte, mais de façon générale en droit du travail; j'en ai vu quelques-unes depuis trois ans, comme le député de Marguerite-Bourgeoys a eu l'occasion d'en voir aussi - d'une certaine façon, à l'occasion, s'accommodent fort bien de certaines ambiguïtés. C'est cela la différence fondamentale entre le droit du travail qui est un droit collectif et le droit civil, par exemple, chez nous, qui s'appuie sur des textes clairs et où il y a échange de consentement et présomption que ce consentement s'est fait dans un contexte de totale liberté, etc., sans nécessairement les pressions ou les tensions qu'on retrouve dans l'application du Code du travail, c'est-à-dire dans l'application d'une notion de rapport de force. Je pense qu'il faut bien noter cela quand on parle d'interprétation en droit du travail.

Deuxièmement, il y a, à l'égard du jeu de référence dans l'entente nationale, non seulement l'entente elle-même qui est extrêmement complexe, mais également la volonté très claire qu'ont affirmée les parties sur le plan national de régler les problèmes de fond, monétaires, sur le plan national et, finalement, une zone qui, sur le plan juridique - et le député de Marguerite-Bourgeoys va y consentir contrairement à ce que disait le chef de l'Opposition au cours de son discours de deuxième lecture, fait que, par définition, en droit, il peut y avoir ultimement, sauf dans les cas du droit pénal, et encore, quelqu'un qui invoque toujours qu'une chose est "questionnable", entre guillemets. Sans cela, il n'y aurait pas d'avocats, ce qui serait peut-être un bienfait pour la société à certains égards, mais on ne vivrait pas dans la société dans laquelle on vit. Or, je peux vous dire, pour avoir travaillé sur ces textes pendant de nombreux jours avec les gens du comité de législation, que je suis personnellement convaincu qu'effectivement le droit réside dans ces dispositions.

À cet égard, on pourrait citer, par exemple, la jurisprudence de la Cour d'appel, dans un cas qui interprétait les dispositions de l'entente nationale de 1976, où on a référé, entre autres, à ce qui est aujourd'hui, dans l'entente nationale, 8-11.02. On y dit: "Les dispositions de l'article 8-9 ne constituent pas un mode d'organistion scolaire, ni des règles de distribution d'enseignants." La grande différence entre ce texte et celui de 1976, c'est qu'en 1976 on prévoyait au même texte les mots: "mais une obligation d'engager". Les mots "mais une obligation d'engager" étant supprimés, il me paraît évident qu'il y avait une intention de les supprimer. À cet égard, c'est l'interprétation sur le plan technique que je donnerais, mais il y a beaucoup d'autres arguments qui militent en faveur de cela. Je n'irai pas plus loin dans ce qui me paraît être une démonstration, finalement, technique et juridique.

Quant aux autres questions de fond que pose le député de Marguerite-Bourgeoys, je pense que le ministre des Finances veut intervenir, et le ministre de l'Éducation également.

M. Lalonde: Avant que les autres ministres n'interviennent, parce que, au fond, c'est la question qui a été expliquée par le ministre du Travail qui m'inquiète, j'avoue que je n'ai pas trouvé une clarté étincelante dans ses propos. Que ce soit le droit du travail, que ce soit le droit civil, un contrat est un contrat. La façon d'interpréter, la façon d'appliquer un contrat, si ce n'est pas prévu, par exemple, que c'est l'arbitrage, on peut avoir toutes sortes de dispositions à l'intérieur d'un contrat à savoir comment on va faire en sorte qu'il soit interprété à chaque cas qui est présenté. À ce moment, si ce n'est pas prévu, il y a les cours de justice qui sont là pour déterminer la signification et

l'application d'un contrat. C'est pour cela que je n'ai pas suivi très facilement la démonstration du ministre du Travail en ce qui concerne la différence entre le droit du travail et le droit civil.

M. Fontaine: Même en droit constitutionnel.

M. Lalonde: Je sais que c'est complexe. J'ai lu et relu ces articles avec beaucoup d'intérêt. J'avoue qu'on pourrait passer la nuit ici à discuter à savoir si on doit appliquer 8-9 en conformité avec 8-2, plus 8-5, etc., et personne n'y comprendrait rien. Mais il y a une chose que je lis et tout le monde peut lire cela facilement. Si vous le permettez, c'est le troisième alinéa de B-9, à la page 129: "Seules les parties à l'entente nationale ont juridiction pour discuter et adopter les solutions qui s'imposent advenant toute difficulté relative à l'application des dispositions du présent article et ce, uniquement dans le cadre de la clause 9-4.02." (20 h 30)

On dit que ce sont seulement les parties. Qui sont les parties? Ce n'est pas seulement le gouvernement. Ce n'est surtout pas l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale n'est pas partie à cette convention. Si les parties s'entendent pour dire: On va appliquer l'article 8-9 d'une telle façon, je suis parfaitement d'accord. Je présume même que le gouvernement ou que la Fédération des commissions scolaires et la CEQ ont eu des échanges de vues là-dessus et ont tenté de s'entendre. Mais, ne s'entendant pas, ce n'est pas à l'Assemblée nationale de trancher. Est-ce qu'on devrait, chaque fois que vous ne vous entendez pas avec la CEQ ou avec un autre partenaire, venir à l'Assemblée nationale et dire: Nous, on pensait vouloir dire telle chose, on va demander à l'Assemblée nationale de dire que c'est cela que cela voulait dire? C'est l'impression que j'ai actuellement.

M. Parizeau: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: ...je pense qu'effectivement le député de Marguerite-Bourgeoys approche du fond des choses. Nous avons établi une distinction dans nos lois entre les matières nationales, c'est-à-dire d'importance nationale et les matières locales; nous sommes liés par les dispositions de la loi 55. Cette loi 55 indique, entre autres choses, que, sur le plan local, il y a des négociations quant aux matières qui sont locales et, d'autre part, a abouti à un décret du gouvernement, en fait à deux décrets du gouvernement dont je vais citer celui du 11 juillet. C'est le 2018-79. Et ce décret, qui indique ce qui sera négocié sur le plan local, se termine par un article 3 que je tiendrais à lire et qui est le suivant: "En cas de contradiction entre une stipulation négociée et agréée à l'échelle locale ou régionale en vertu de l'article 2 des présentes - l'article 2 des présentes indique les matières locales - et une stipulation négociée et agréée à l'échelle nationale en vertu de l'article 1 des présentes -qui indique les matières nationales - cette dernière a priorité."

Or, qu'est-ce que dit la convention nationale? Elle dit très clairement que, sauf dans deux cas, les ratios ne sont pas arbitrables, ne peuvent pas donner lieu à un grief. C'est le paragraphe que vient de citer le député de Marguerite-Bourgeoys. La convention nationale dit: Sauf dans deux cas, les ratios ne sont pas arbitrables et ne peuvent pas donner lieu à un grief des parties. Et je souligne "des parties", parce que je reviendrai tout à l'heure sur ce qu'on entend par les parties. Tout à coup, ils veulent s'entendre au niveau local pour rendre les ratios arbitrables dans tous les cas, parce que c'est cela qui s'est produit et c'est cela le débat à l'heure actuelle, dans un certain nombre de commissions scolaires, dans leurs négociations avec les syndicats. On veut faire en sorte que, dans tous les cas, les ratios soient arbitrables et donnent lieu à un grief. Il y a donc clairement contradiction. En vertu même du décret dont je viens de parler, il y a clairement contradiction entre les matières nationales et les matières locales. Au niveau national, on dit: Sauf dans deux cas, les ratios ne sont pas arbitrables. Et nous avons maintenant des parties qui disent: Au niveau local, on va rendre cela arbitrable. Il y a contradiction absolue. Et que dit le décret? Il dit: Dans ce cas-là, c'est la convention nationale qui a préséance.

Pourquoi une situation comme celle-là est-elle apparue? Elle est apparue, là encore, en violation, mais qu'on comprend, du troisième paragraphe que citait le député de Marguerite-Bourgeoys. Il disait: "Seules les parties à l'entente nationale ont juridiction pour discuter et adopter les solutions qui s'imposent advenant toute difficulté relative à l'application du présent article." C'est là qu'on voyait la volonté de toutes les parties de faire en sorte que les salaires et les effectifs, c'est au niveau national, ce n'est jamais au niveau local.

On dit: "Seules les parties à l'entente nationale". Qui étaient les parties à l'entente nationale? La CEQ et la Fédération des commissions scolaires. C'étaient les parties. Quand tout à coup des négociations sur les effectifs sont arrivées au niveau local, ce n'est plus la CEQ qui négocie; c'est le syndicat des Vieilles-Forges. Ce n'est plus la Fédération des commissions scolaires qui négocie; c'est la commission scolaire locale.

Mais cela est en contradiction totale de ce que à la fois nos décrets et la convention nationale disent. Des parties sont apparues qui n'ont rien à voir avec les parties nationales et qui se sont arrogé le droit, en contradiction aussi bien de la convention nationale que des décrets, de dire: Nous sommes des parties pour négocier des effectifs. C'est cela qui est à l'origine. De fausses parties veulent négocier de fausses conventions collectives applicables à des choses où clairement elles n'ont pas le droit d'intervenir. Mais, néanmoins, cela se fait. Ceci démontre, peut-être, d'ailleurs, soit dit en passant, le désordre incroyable dans lequel ces rapports de force se sont développés dans notre société où des parties qui n'existent pas en vertu des conventions collectives négocient des dispositions qu'elles n'ont pas le droit de négocier, en contradiction avec des décrets et des lois.

Qu'est-ce que nous faisons dans l'article 12? Nous ne disons pas: On va interdire à la Fédération des commissions scolaires ou à la CEQ

de s'entendre sur d'autres dispositions de la convention nationale. Nous interdisons à une commission scolaire, à une commission scolaire qui n'a jamais été visée par l'entente nationale -elle n'était pas une partie en vertu de l'entente nationale, c'est très clair - de prendre certains engagements à l'égard d'un syndicat qui n'a jamais été partie à l'entente nationale. En somme, nous faisons simplement en sorte que la loi respecte à la fois nos ententes, nos décrets et nos conventions, et nous voulons éviter que de fausses parties ne s'érigent en vraies parties pour négocier des choses qui littéralement et d'après tous nos textes n'ont jamais été des dispositions qu'elles pouvaient négocier. C'est dans ce sens-là que nous n'interprétons rien. Nous utilisons les possibilités de la loi pour faire en sorte que des gens qui ne sont pas partie au débat continuent de ne pas être partie au débat.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Mme la Présidente, si vous me le permettez, je remercie le ministre des Finances des précisions qu'il nous a données. J'ai tenté de le suivre. Je comprends qu'il y a des difficultés de complexité des parties enqagées là-dedans. Il y a la CEQ qui signe l'entente nationale, mais ce sont les syndicats locaux qui négocient les ententes locales. C'est la même chose pour les commissions scolaires et la Fédération des commissions scolaires. Le ministre pourrait-il me dire - je présume que la Fédération des commissions scolaires est d'accord avec le nouvel article 12; enfin, on me corrigera si je fais erreur - si la CEQ, qui est une partie à l'entente nationale, est d'accord avec l'interprétation que le gouvernement nous propose au nouvel article 12, à savoir que l'article 8-9.00 ne doit pas être la norme, mais qu'on doit respecter l'application des rèqles de formation des groupes d'élèves prévues à l'article 8-5.00 et celles de la charge d'enseignement prévues à l'article 8-2.00? La CEQ est-elle d'accord avec l'article 12?

M. Parizeau: Mme la Présidente, il m'est très difficile de me mettre à la place des autorités de la CEQ pour savoir ce qu'elles pensent. Il y a eu un certain nombre de réunions. On s'est rendu compte qu'elles n'étaient pas exactement de bonne humeur, mais je les comprends. Ici, la raison pour laquelle elles ne sont pas de bonne humeur, ce n'est peut-être pas dû essentiellement ou exclusivement - comment dire? - à leurs rapports avec le gouvernement, mais possiblement à des rapports internes que le ministre de l'Education décrivait plus tôt aujourd'hui et sur lesquels je ne reviendrai pas. Je ferai remarquer au député de Marguerite-Bourgeoys que, dans la publicité même faite dans les journaux par la CEQ, jamais elle n'a demandé au gouvernement de respecter la lettre de la convention nationale, mais ce qu'elle appelait son esprit. Curieux! Moi, je n'en ai jamais vu. (20 h 40)

M. Morin (Sauvé): Pour l'information du député de Marguerite-Bourgeoys, je serais bien étonné que la CEQ fût d'accord avec l'article 12 puisque, pour une plus grande sûreté, nous tranchons un débat au sujet duquel elle n'était pas d'accord avec l'interprétation gouvernementale. Je serais bien étonné que la CEQ fût d'accord.

M. Lalonde: J'interprète ces propos prudents de la façon suivante: la CEQ n'est pas d'accord avec cela. D'accord, on peut présumer cela ici.

M. Morin (Sauvé): Le député pourrait le lui demander.

M. Lalonde: D'ailleurs, le ministre des Finances dit que la CEQ est de mauvaise humeur. C'est peut-être pour d'autres raisons. Il ne peut pas se mettre dans la tête de la CEQ pour savoir si elle est d'accord. Le ministre de l'Education nous dit qu'il serait étonné si la CEQ était d'accord. Il me semble qu'il y a eu des consultations.

M. Morin (Sauvé): II n'y a pas eu de consultations au sujet de l'article 12 avec la CEQ.

M. Lalonde: Écoutez, vous changez le contrat, vous demandez à l'Assemblée nationale de changer la convention collective et vous n'avez même pas consulté vos partenaires.

M. Morin (Sauvé): II y a eu consultations avec la CEQ au sujet de l'interprétation qu'il convenait de donner au calcul du nombre d'enseignants, ce qu'on appelle les proportions maître-élèves, de l'article 8-9.00. On s'est certainement aussi entretenu de l'article 8-5 et de l'article 8-2, bien sûr, mais pour constater que nous n'arrivions pas a des conclusions communes.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Je reviens encore sur ce que je disais tout à l'heure. La CEQ, comme partie nationale, non pas un syndicat des Vieilles Forges, au sens de l'entente qu'elle ait le goût ou pas d'être d'accord avec l'article 12, il est difficile de sonder les reins et les coeurs, mais on n'écrit pas les projets de loi en se demandant si les parties visées vont nécessairement être d'accord ou non. Une chose est claire, cependant, ce que l'article 12 fait, ce n'est pas interpréter la convention nationale. Encore une fois, si nous ne nous entendons pas sur la portée de la convention nationale, les parties nationales peuvent aller en arbitrage ou faire des griefs en vertu des pouvoirs normaux. Les parties nationales gardent tous les recours communs, normaux et évidents d'interpréter la convention nationale. Ce n'est pas de cela que nous parlons; c'est du fait qu'un syndicat de la CEQ qui n'est pas une partie nationale et une commission scolaire qui n'est pas une partie nationale décident de discuter d'une matière qui, en vertu des décrets et de la loi 55, n'est pas de leur compétence et pensent échapper à tout contrôle, à la fois de nos lois et de nos budgets, en disant: On va faire payer le contribuable local; lui, il ne peut pas nous échapper. C'est le sens de l'article 12. Nous disons que cette opération ne doit pas se faire. Ce n'est pas interpréter l'entente nationale; c'est déterminer que des parties qui n'ont pas le droit

en vertu non pas de la convention nationale, mais en vertu de la loi et des décrets de transiger ce genre de matières, qu'elles ne les transigent pas.

M. Lalonde: Mme la Présidente, je regrette, mais on aura beau faire toutes les distinctions du monde, il reste que cette entente dite nationale contient un troisième paragraphe ici où on dit: "Seules les parties à l'entente nationale ont juridiction pour discuter et adopter des solutions qui s'imposent advenant toute difficulté relative à l'application de la disposition "justement de cet article. Et on me dit que la CEQ, qui est une partie, n'est pas d'accord. Enfin, on présume; on serait étonné que la CEQ soit d'accord.

Ce qui m'étonne, c'est qu'elle n'a pas été consultée, alors qu'on demande aux législateurs -avec tout le respect que j'ai pour le ministre des Finances - de privilégier une interprétation. Je regrette, vous n'êtes peut-être pas devant le bon forum; c'est peut-être devant la Cour d'appel que vous devriez aller. Vous nous demandez, à nous les députés, d'interpréter cela; on est dans une discussion juridique à savoir si 12 est une interprétation.

Lorsqu'on dit qu'une commission scolaire ne peut s'obliger "à engager un nombre d'enseignants basé sur les règles prévues à l'article 8-9.00", cela veut dire que, dans l'article 8-9.00, il y a des règles qui prévoient l'engagement d'un nombre d'enseignants, `qa moins que vous n'ayez mal rédigé votre projet de loi!

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: II s'agit de l'établissement d'un nombre et non pas de l'engagement d'un nombre.

M. Lalonde: C'est votre loi, je sais que c'est difficile à rédiger, je ne veux pas compliquer les choses inutilement, mais vous dites: "Une commission scolaire ne peut s'obliger à engager un nombre d'enseignants basé sur les règles prévues à l'article 8-9.00." Même sans avoir lu l'article 8-9.00, je pourrais présumer que l'article 8-9.00 contient des règles concernant ou qui peuvent influer sur le nombre d'enseignants engagés. Écoutez, vous dites que ça contient des règles concernant l'engagement; c'est ça que ça dit. À ce moment-là, retournez à votre table de travail.

M. Johnson: Je m'excuse, sur le plan technique, c'est concernant les règles et l'établissement d'un nombre pour des fins très spécifiques, comme l'ont dit mes collègues. On va calculer combien il y a d'enseignants pour ce qu'on appelle la période de rappel, je crois, de l'automne, pour les fins de la sécurité d'emploi.

M. Lalonde: D'accord. Alors, est-ce que... M. Johnson: Ce n'est pas l'engagement...

M. Lalonde: ... l'article 8-9.00 - je l'ai devant moi, je pourrais vous le lire, mais ce serait long - contient des règles concernant le nombre d'enseignants?

M. Parizeau: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des Finances.

M. Lalonde: Vous allez me permettre de répéter peut-être autrement ma question. Est-ce que l'article 8-9.00 contient des règles dont l'application peut nous amener à un nombre d'enseignants? En chiffre, 100, 200, 1000 ou 95.

M. Parizeau: Oui, à une seule condition, c'est que les parties à l'entente nationale, c'est-à-dire CEQ, fédération et gouvernement, dans le comité prévu à l'annexe 17, puissent amener un résultat comme celui-là. Il est très clair qu'il faut que ce soient les parties nationales, à partir, par exemple, du comité prévu à l'annexe 17 et sur le plan national.

Il n'y a aucun moyen pour le député de Marguerite-Bourgeoys de faire passer une commission scolaire comme étant une partie à l'entente nationale dans l'article 8-9.00. Une commission scolaire n'est pas une partie à l'entente nationale.

M. Lalonde: Ce n'est pas ce que je prétends faire, Dieu m'en garde, mais il reste...

M. Parizeau: Pourquoi s'occupe-t-elle de ça?

M. Lalonde: ... que nous... nous sommes d'humbles législateurs; nous ne connaissons pas par coeur tous les grands livres que vous connaissez et que vous avez négociés et vous nous dites qu'il faudrait, comme législateurs, dire qu'une commission scolaire ne peut pas s'obliger à engager un nombre d'enseignants basé sur les règles prévues à l'article 8-9.00, mais qu'elle doit respecter l'application des règles de formation. Aucun problème pour le respect de l'application des règles de l'article 8-2.00 et de l'article 8-5.00. Mais si vous devez empêcher une commission scolaire d'atteindre le nombre qu'elle pourrait atteindre en appliquant les règles de l'article 8-9.00, c'est peut-être parce qu'elle pense avoir le droit d'atteindre ce nombre-là. Et cela n'est pas inventer quoi que ce soit puisqu'il y a justement un conflit là-dessus.

M. Parizeau: Mme la Présidente, quand l'entente nationale entre les parties nationales indique spécifiquement que, sauf à deux fins, le ratio ne peut pas donner lieu à des griefs et que les parties qui ne sont pas prévues à l'entente nationale s'arrogent le droit, sur les mêmes matières, de rendre ça arbitrable, c'est contraire aux lois et aux règlements. Nous voyons apparaître, encore une fois, des parties qui n'étaient à l'origine dans aucune des ententes. Dans ces conditions, puisque ces parties, qui n'ont pas le droit, en vertu des lois et des décrets existants, de procéder à quelque entente que ce soit en vertu de l'entente nationale, cherchent en dehors, par contrats privés, si vous voulez, entre elles, à prévoir à la fois davantage d'effectifs et davantage de taxes, ce qu'aucun texte ne leur permettrait de faire, il ne faut pas s'étonner que, par une loi, le gouvernement ferme cela. (20 h 50)

M. Lalonde: Mme la Présidente, je ne veux pas perpétuer le débat, on est limité à trois heures. Je regrette que les brillants exposés - je suis généreux - des ministres n'aient pas clarifié

la situation. Si le gouvernement sent le besoin de demander aux législateurs de faire une loi concernant l'application de trois articles d'une convention collective signée formellement par des organismes dont l'accord n'a pas été démontré ici, y compris la CEQ en particulier, à ce moment, je ne marche pas. C'est une responsabilité très grande que le gouvernement prend actuellement. Peut-être qu'il pourra démontrer, après avoir plaidé pendant des semaines devant une cour de justice, qu'il ne s'agit pas d'une interprétation, mais la présomption est très grande. Là-dessus, il m'apparaît qu'un contrat est sacré. Si c'était si évident qu'il fallait avoir une loi dans ce sens, il aurait fallu que les parties au contrat soient d'accord. On n'a pas démontré l'accord des autres parties.

Mme la Présidente, si le gouvernement veut adopter l'article 12, ce sera sur division.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté sur division.

M. Johnson: Mme la Présidente, au moment de l'adoption de l'article 12, je voudrais simplement rappeler, parce que le député de Marguerite-Bourgeoys avait fait une remarque à ce sujet au début, que c'est cela, la notion paradoxale d'un droit qui est collectif. C'est la volonté de l'expression d'un droit collectif, dans une partie patronale ou syndicale qui est un regroupement, qui est génératrice d'ambiguïté. À certains égards, je pense que le ministre des Finances a bien démontré que, dans certains cas, c'étaient les parties dites locales, mais qui ne sont pas des parties à l'entente nationale au sens des regroupements, qui ont décidé des grandes choses sur le plan financier, qui ont décidé de remettre en cause - des commissions scolaires en signant et des syndicats en demandant que cela soit fait dans certains cas - ce qui a été décidé par les parties reconnues en vertu de la loi 55. C'est cela que le gouvernement vient simplement faire. Il n'interprète pas un contenu, il faut bien le comprendre; il affirme clairement, il réaffirme simplement que la loi 55 doit s'appliquer.

M. Lalonde: Mme la Présidente, on ne peut pas laisser passer cela. Que ce soient des "droits collectifs" ou des droits individuels, lorsqu'il y a un contrat, il y a un échange de consentements. Que cet échange de consentements ait été accepté par des organismes qui représentent des collectivités, comme la CEQ, comme le gouvernement, comme la Fédération des commissions scolaires, c'est la même chose. Le contrat, c'est la loi des parties. Cela ne se change que par le consentement des parties. Cela ne s'interprète que par la cour de justice. Je regrette.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Comme dernière intervention là-dessus, je dirais simplement ceci. Je suis parfaitement d'accord avec le député de Marguerite-Bourgeoys. La loi des parties ne s'interprète que par des tiers entre les parties. Ce que nous faisons par cette loi, c'est empêcher ceux qui ne sont pas parties et qui voudraient y être de modifier les contenus. La loi 113 s'applique à des groupes qui, en vertu de cette entente nationale, ne sont pas des parties, n'ont jamais été des parties. Ce que nous disons par cet article de loi, c'est que ceux qui ne sont pas parties à l'entente n'ont pas le droit de la modifier. Cela devrait aller de soi, mais cela va mieux en le disant.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 12 est-il adopté?

M. Lalonde: Sur division.

La Présidente (Mme Cuerrier): Tel qu'amendé alors. Adopté sur division tel qu'amendé. Sur l'article 13, M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: A l'article 13, le papillon a été distribué, il s'agit, d'une part, de rénuméroter l'article 12 qui figure au projet de loi, qui devient l'article 13 et qui est remplacé par le suivant.

M. Lalonde: C'est écrit 12.

M. Johnson: 13. L'article 12 devient l'article 13 et est remplacé par le suivant:

M. Lalonde: D'accord.

M. Johnson: Et l'article 13 se lit comme suit: "L'article 12 s'applique à une commission scolaire mentionnée à l'article 1."

Deuxième alinéa: "II s'applique également à une commission scolaire locale ou régionale qui n'est pas mentionnée à l'article 1 et qui conclura, après le 23 octobre, une convention collective actuellement en négociation avec une association de salariés non visée par l'article 1 qui est accréditée à l'égard de cette commission scolaire pour représenter des enseignants et qui adhère, appartient ou est affiliée à la Centrale de l'enseignement du Québec le 23 octobre.

L'alinéa suivant: "Toutefois, il ne s'applique pas à une commission scolaire visée dans le deuxième alinéa si la convention collective, conclue après le 23 octobre, est la ratification d'une entente écrite portant sur l'ensemble des conditions de travail intervenue avant le 24 octobre. Dans le cas où l'article 12 s'applique à une commission scolaire, une sentence arbitrale rendue selon la section IV de la présente loi ou selon la section I du chapitre 4 du Code du travail ne peut contenir une conclusion contraire à l'article 11."

Essentiellement, il s'agit d'une reformulation, comme l'a vu le député de Marguerite-Bourgeoys, de ce qui était l'article 12. Cela a l'air bien long, mais, dans le fond, je pense que le lanqage utilisé dans le nouveau 13 est beaucoup plus clair que l'article précédent. C'est le même contenu, essentiellement - on peut peut-être le résumer - sauf pour la question de la sentence. Si jamais des parties localement décident de référer leur conflit, leur différend sur le plan local - je ne parle pas des conflits dans le cas de Trois-Rivières et de Sorel-Tracy, mais d'autres - à l'arbitrage volontairement, en vertu du Code du travail, on dit que les dispositions devront s'appliquer quant au respect des ententes nationales, etc., et du partage des matières.

Le premier alinéa affirme que l'article 12, dont nous avons parlé si longuement, s'applique à une commission scolaire visée à l'article 1 du projet de loi, c'est-à-dire région Sorel-Tracy et région Trois-Rivières. Deuxièmement, il s'applique également à toute autre commission scolaire régionale ou locale qui n'est pas mentionnée à l'article 1, qui est actuellement en négociation et avec qui une association de salariés qui n'est pas visée à l'article 1 conclut des négociations.

Finalement, les dispositions en question ne s'appliquent pas dans tous les cas où est intervenue - disons en langage laïque - une entente de principe qui sera ratifiée par les voies normales du Code du travail ou encore une convention collective dûment conclue, c'est-à-dire une entente de principe déjà ratifiée par voie du Code du travail, le tout ayant été fait avant le 24 octobre.

M. Lalonde: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ...on consacre ici le régime, au nom des droits acquis, de deux poids, deux mesures. Étant donné qu'on vient de nous remettre ce papillon et qu'on a la guillotine, quand même, suspendue au-dessus de nos têtes pour terminer ça dans les trois heures, je ne pourrai pas me rendre responsable du libellé de cet article. J'aimerais quand même attirer l'attention sur certaines choses. J'imagine que ce serait bon de mettre 1980, au 23 octobre 1980.

M. Johnson: Pardon?

M. Lalonde: 1980, ce serait peut-être bon de l'ajouter.

M. Johnson: Oui, 1980.

M. Lalonde: Parce qu'il ne faudrait tout de même pas que ce soit perpétuel.

M. Johnson: Pardon?

M. Lalonde: On va arrêter ça, comme votre gouvernement, un jour?

M. Lévesque (Bonaventure): C'est un article qui accroche.

M. Lalonde: Oui.

La Présidente (Mme Cuerrier): Alors, il s'agirait d'un amendement qui serait adopté. Ajouter "1980" après 23 octobre. Adopté?

M. Johnson: Trois fois, Mme la Présidente.

M. Lalonde: Pour l'amendement, il arrive à deux endroits.

M. Johnson: Partout où figure l'expression "23 octobre" ou "24 octobre", ajouter "1980", à côté.

M. Lalonde: Si vous avez le texte que j'ai eu, Mme la Présidente, il faudrait faire attention, il y a quelques fautes d'orthographe. "Il s'appliquent", au pluriel.

La Présidente (Mme Cuerrier): Oui, nous tenterons de corriger cela, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, comme nous tenterons de faire la concordance. C'est adopté?

M. Lalonde: Sur division.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Lévesque (Bonaventure): Autrefois, Mme la Présidente, il n'y avait pas de fautes d'orthographe.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 12 sera renuméroté 13. (21 heures)

M. Lalonde: II faudrait faire faire un peu de récupération au ministre de l'Éducation qui a écrit ça, hein?

M. Levesque (Bonaventure): Ce n'est pas sa faute!

M. Johnson: Je dois dire, à la décharge du ministre de l'Éducation...

M. Lalonde: C'est quand même lui qui est parrain.

M. Johnson: ... que, sur cette phrase, les papillons ont été faits, comme je le disais au député tout à l'heure, par les fonctionnaires du comité de législation. Nous avons procédé à la photocopie et le blanc, malheureusement, n'a pas effacé les lettres "nt" qui donnent un pluriel. Ce n'est pas une faute d'orthographe, c'est une erreur.

M. Lalonde: Je vais me porter à la défense des légistes qui ne sont pas ici pour se défendre. Le ministre parrain porte toutes les responsabilités, même des fautes d'orthographe. Mais quand je parle du ministre de l'Éducation, je ne sais plus auquel je m'adresse.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 12 sera donc renuméroté 13. Est-ce adopté?

M. Lalonde: Sur division. Je ne veux pas toucher à ça.

La Présidente (Mme Cuerrier): C'était seulement la numérotation, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Johnson: L'article 13 devient 14, Mme la Présidente, comme tous les autres.

La Présidente (Mme Cuerrier): Le nouvel article 13 est adopté?

M. Lalonde: Adopté sur division.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté sur division. Article 13 devenu 14. M. le ministre.

M. Johnson: Mme la Présidente, les concordances; l'article 13 devient l'article 14 et, à l'intérieur de l'article 13, au dernier alinéa, à

l'avant-dernière ligne, il y a une référence à un article qui, lui-même, a été changé dans la numérotation. Donc, il faut lire "alinéa de l'article 15", au lieu de "alinéa de l'article 14".

M. Lalonde: J'aurais seulement deux questions.

M. Johnson: Voulez-vous qu'on fasse l'ensemble du chapitre des sanctions là-dessus?

M. Lalonde: Non, on va les passer une par une.

M. Johnson: D'accord.

M. Lalonde: Au nouvel article 14, les sanctions de $5000 à $50,000 se comparent de quelle façon avec les nombreuses lois spéciales que le gouvernement actuel a imposées à la population?

M. Johnson: Sans prendre à mon compte le préambule du député de Marguerite-Bourgeoys, les précédents ont été respectés à cet égard et les sanctions à l'égard des regroupements sont celles qui sont prévues dans d'autres lois de ce type.

M. Lalonde: II y a une particularité et peut-être le ministre pourrait-il l'expliquer. La façon dont on décrit la période d'application; on la commence à l'entrée en vigueur de la présente loi et on la termine à la date d'expiration de la convention collective qui est le 31 décembre 1982. Une fois qu'il y a une convention collective - supposons qu'il y ait un autre problème dans un an - vous vous trouvez à enlever le droit de grève pour deux ans.

M. Johnson: Je suis sûr que le député de Marguerite-Bourgeoys a fait un lapsus, puisqu'il sait très bien que la conclusion d'une convention collective ou d'une sentence arbitrale équivalant à une convention collective, par définition, amène la suppression, pour la durée de la convention collective, du droit de grève. Le droit de grève existe chez nous, mais il n'existe qu'au moment de l'expiration d'une convention collective. Donc, à partir du moment où on en conclut une, on ne supprime pas le droit de grève; c'est le Code du travail qui s'applique, tout simplement.

La Présidente (Mme Cuerrier): A l'article 14, on n'a pas fait adopter l'amendement. A l'avant-dernière ligne, il fallait remplacer "14" par "15". Est-ce que c'est adopté?

M. Lalonde: Pour ça, oui.

La Présidente (Mme Cuerrier); Le nouvel article 14 est-il adopté tel qu'amendé?

M. Lalonde: Est-ce que le régime normal du Code du travail prévoit des sanctions de $5000 à $50,000 pour chaque jour ou partie de jour où une association de salariés contreviendrait à son obligation de se présenter au travail?

M. Johnson: Je n'ai pas saisi le début de la question; je n'ai pas entendu, je m'excuse.

M. Lalonde: C'est que votre article 14 crée une sanction pour toute contravention à l'article 2; l'article 2 demande de se présenter au travail à compter de une minute le 27 octobre 1980.

M. Johnson: C'est ça.

M. Lalonde: C'est jusqu'à la fin de la convention collective.

M. Johnson: Oui.

M. Lalonde: S'il y a une contravention, les amendes sont de $5000 à $50,000.

M. Johnson: Oui.

M. Lalonde: Dans les régimes normaux, est-ce que ce sont les mêmes amendes?

M. Johnson: Non, effectivement il y aurait un effet aggravant...

M. Lalonde: C'est là que je voulais dire qu'il y a un deuxième...

M. Johnson: II aurait un effet aggravant. Oui, mais il ne supprime pas le droit de grève, qu'on se comprenne bien. A partir du moment où il y a une sentence arbitrale ou une convention collective, on ne vit pas dans un régime de droit de grève permanent au Québec. On n'a jamais vécu là-dedans, non plus. On vit dans un régime où c'est encadré. Ceci dit, cependant, une entreprise qui déciderait de procéder par lock-out ou un syndicat par grève pendant la durée d'une convention collective, effectivement, en vertu du Code du travail se rend passible de sanctions par le Tribunal du travail. Dans le fond, ce que suggère le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est qu'on devrait faire en sorte que les sanctions à l'égard des dispositions de cette loi cessent à partir du jour où est conclue la convention collective et où la sentence arbitrale est rendue, et que...

M. Lalonde: II me semble...

M. Johnson: ...après cela, ce soient les dispositions du Code du travail qui s'appliquent. En soi, je n'ai pas d'objection à cela.

M. Lalonde: C'est important parce que c'est un caractère exceptionnel. Cette loi crée une situation exceptionnelle. Les enseignants et les commissions scolaires, pour prendre l'article 14 -on arrivera au même problème aux articles suivants - se trouvent assujettis à un régime beaucoup plus sévère - c'est pour cela que je posais la question au ministre, à savoir quel serait le régime normal - jusqu'à la fin de la convention collective.

M. Johnson: D'accord. Le régime normal prévoirait, effectivement, dans le cas d'une grève dite illégale au sens du Code du travail, des sanctions qu'on retrouve aux articles 120 et quelques; avec la nouvelle numérotation, c'est 140 ou quelque chose comme cela.

M. Lalonde: C'est parce que je ne me souviens pas des sanctions que je vous pose la question.

M. Johnson: Ah bien, les sanctions sont de $100 à $1,000 au lieu de $5,000 à $50,000. Ecoutez, il s'agirait simplement de changer les mots "date d'expiration" par "date d'entrée en vigueur" et on vient de régler le problème.

M. Lalonde: Ah bon!

M. Johnson: Mme la Présidente, à la septième ligne du premier alinéa de l'article 14, changer le mot "expiration" par les mots "entrée en vigueur".

La Présidente (Mme Cuerrier): L'amendement est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. Le nouvel article 14 est-il adopté tel qu'amendé?

M. Lalonde: Adopté.

M. Johnson: A l'article 14, Mme la Présidente, il y a deux choses. D'abord, il devient 15 et, deuxièmement, la référence à l'article 13 qu'on retrouve à deux reprises, il faut lire 14 plutôt que 13.

M. Lalonde: A trois reprises.

M. Johnson: Je m'excuse.

M. Lalonde: A quatre reprises.

M. Johnson: Au premier alinéa à deux reprises.

M. Lalonde: D'accord.

M. Johnson: Dans le deuxième alinéa, une fois.

M. Lalonde: Deux fois.

M. Johnson: Deux fois. Donc, à quatre reprises, remplacer le chiffre 13 par le chiffre 14.

M. Lalonde: Simplement une question de prudence. On se réfère au premier alinéa de l'article 13 qui devient 14. Est-ce que c'est toujours valide?

M. Johnson: Oui, cela n'a pas changé.

M. Lalonde: Est-ce qu'on pourrait avoir le même amendement? Ah non. La période visée par le premier alinéa. Alors, la référence, c'est correct.

La Présidente (Mme Cuerrier): Cet amendement est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. Le nouvel article 15 est-il adopté tel qu'amendé?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Johnson: L'article 15, Mme la Présidente, devient l'article 16, tout d'abord. En second lieu, il faudrait changer la référence à l'article 13 par une référence à l'article 14, à la troisième ligne.

La Présidente (Mme Cuerrier): Cet amendement est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

M. Johnson: Est-ce que l'article est adopté, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Cuerrier): Le nouvel article 16 est-il adopté tel qu'amendé?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre du Travail.

M. Johnson: L'article 16, Mme la Présidente, devient l'article 17 et la référence à l'article 13, qu'on retrouve à la quatrième ligne, devient l'article 14.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Johnson: L'article 17 devient l'article 18, Mme la Présidente.

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Un instant. Le nouvel article 17 est-il adopté tel qu'amendé?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: L'article 17, Mme la Présidente, devient l'article 18.

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Johnson: Est-ce que l'article 18 est adopté, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Cuerrier): Le nouvel article 18 est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Johnson: L'article 18, Mme la Présidente, devient l'article 19.

La Présidente (Mme Cuerrier): Le nouvel article 19 sera-t-il adopté tel qu'amendé?

M. Lalonde: Un instant! Pour la numérotation, d'accord, mais on a des questions à poser sur l'article 19.

La Présidente (Mme Cuerrier): Alors, adopté pour la numérotation.

M. Bisaillon: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Pendant mon intervention en deuxième lecture, Mme la Présidente, j'avais posé une question au ministre concernant les articles 18, 19 et 20, mais je peux poser immédiatement ma question à l'article 18. (21 h 10)

Comment se fait-il que, contrairement aux autres pénalités qui sont prévues dans la loi et pour lesquelles on utilise la Loi des poursuites sommaires pour juger de l'infraction, il n'y a pas de mécanisme, à l'article 18 pour évaluer le jugement porté par le gouvernement?

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: Pour deux raisons. La première, c'est qu'il s'agit de sanctions d'une nature collective et que ces sanctions de nature collective amènent à considérer des ensembles. Si on référait cela, par exemple, à la cour des poursuites sommaires, des problèmes de règles de preuve pourraient amender des situations un peu aberrantes. Il s'agit de donner la responsabilité et ce que cela représente pour le gouvernement, le cas échéant, de trancher sur cette question, c'est-à-dire de l'évaluer et ensuite de procéder à la sanction qui consiste, comme on le sait, sur le plan du contenu, à dire que, pour chaque journée d'infraction, il peut y avoir une suspension des cotisations syndicales, non pas une confiscation, mais une aboliton de la perception à la source, de l'équivalent de deux mois de cotisation.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le leader de l'Union Nationale, je vous entends mal.

M. Fontaine: Si vous me donnez la parole, vous allez m'entendre. Ils n'ont pas ouvert le micro.

La Présidente (Mme Cuerrier): Vous avez la parole, M. le député.

M. Fontaine: II me semble un peu aberrant, comme le disait le député de Sainte-Marie en deuxième lecture, que le gouvernement soit à la fois juge et partie, qu'il décide lui-même si les enseignants en question ne respectent les 70%.

M. Johnson: ...il est juge.

M. Fontaine: II est en même temps partie à l'entente.

M. Johnson: Mais non. Le gouvernement n'est pas partie à la loi. Il est, à la rigueur, partie à l'entente 9.02e, etc., et tout ce qu'on veut. Le gouvernement n'est pas partie à la loi. Le gouvernement ne peut pas faire une infraction à cette loi. Les personnes qui peuvent faire une infraction à la loi, ce sont les commissions scolaires, si elles faisaient un lock-out, et les syndicats, s'ils ne respectaient pas les dispositions de la loi.

M. Fontaine: D'accord, mais moi, il me semble que normalement, quand le gouvernement a quelque chose à décider, on peut contester cette décision devant les tribunaux. Là, je ne vois aucun mécanisme - et je ne pense pas qu'il y en ait de prévu dans le Code du travail - à l'effet de permettre au syndicat de contester la décision du gouvernement.

M. Johnson: Effectivement, mais c'est de la nature même de ce qui est, dans notre législation, une sanction collective à l'égard du syndicat en tant qu'institution et non pas de ses officiers, et non pas des individus.

M. Fontaine: Mais il existe une règle, en droit, la règle audi alterem partem, qu'avant de condamner quelqu'un, habituellement, on entend ses...

M. Johnson: Les recours devant les tribunaux de droit commun existent toujours, si le gouvernement faisait une erreur grossière et manifeste.

M. Lalonde: Cela pourrait être contesté en cour.

M. Johnson: En vertu même de la loi.

M. Lalonde: Chaque fois. Je ne suis pas d'accord avec...

M. Johnson: Eventuellement, si jamais le gouvernement ne respectait pas les dispositions qu'il a lui-même adoptées, il est bien évident qu'il est susceptible d'être sanctionné par les tribunaux.

M. Fontaine: II faudrait qu'il y ait un excès de juridiction. A ce moment-là, on va devant la Cour supérieure avec un bref.

M. Johnson: Justement.

M. Lalonde: Même pas un excès de juridiction.

M. Morin (Sauvé): Mme la Présidente, puis-je ajouter un mot?

Le député de Sainte-Marie avait fait une suggestion à laquelle j'ai réfléchi avec d'autres. Il s'était demandé, si ma mémoire est bonne, s'il n'y aurait pas lieu, par exemple, de faire appel à un tribunal comme le Tribunal du travail. Cela m'a paru une suggestion qui valait au moins la peine d'être explorée.

Mais, en y pensant bien, cela serait littéralement s'enfoncer dans des procédures qui pourraient durer des mois, sinon davantage, alors qu'il s'agit vraiment d'un type de sanction qui est de nature administrative et collective. On ne s'en prend pas aux individus. Je pense que le député de Sainte-Marie a compris cela d'ailleurs. On ne s'en prend pas aux personnes parce que là, si c'était le cas, je pense qu'il faudrait s'en référer aux tribunaux de droit commun.

M. Bisaillon: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Le seul fait que j'ai voulu soulever, c'est que, dans la procédure, le gouvernement portait un jugement. Or, personne n'était appelé à se prononcer sur l'exactitude du jugement porté par le gouvernement. Je suggérais de référer cela au Tribunal du travail. Je n'y tiens pas mordicus. A partir du moment où on me dit qu'effectivement l'application des articles 18, 19 et 20 tels qu'ils sont est contestable devant les tribunaux, cela en est un recours, mais il faudrait qu'on me dise qu'effectivement il y a un recours devant les tribunaux, si on juge que les articles ont été mal utilisés.

M. Johnson: S'il y avait une erreur, en effet, effectivement une partie intéressée ou tout intéressé - et, en l'occurrence ici, le seul intéressé serait le syndicat, la structure syndicale -pourrait contester cette décision d'avoir mis fin à la perception à la source, donner ordre à la commission scolaire de cesser la perception des cotisations syndicales à la source.

M. Lalonde: On n'est pas ici pour donner des avis juridiques, il y en a d'autres qui le font mieux, mais il n'y a aucun doute qu'un juge ne pourrait pas dire que le gouvernement a pris une mauvaise décision, qu'il n'aurait pas dû prendre cette décision-là. Tout ce qui pourrait être soumis au juge, c'est que les 70% dans les faits étaient inexacts, quelque chose comme cela. Autrement dit, sur l'à-propos de la décision du gouvernement, un juge ne peut pas se prononcer. Enfin, je serais prêt à l'adopter.

M. Johnson: Vous savez, c'est un peu le même type de responsabilité qu'encourt le gouvernement tous les jours quand le Procureur général dépose des plaintes. A un moment donné, il faut que ce soit inscrit quelque part au processus.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article...

M. Johnson: Ce l'est par le Procureur général s'il dépose une plainte contre un individu qui a commis une infraction à une loi.

M. Lalonde: Mais il y a quand même un petit problème, le problème de la majorité qui est un problème de démocratie. Un syndicat, à 60%, décide de rentrer. Les 40% qui votent contre ne rentrent pas. On coupe les vivres au syndicat.

M. Johnson: Je n'ai pas à spéculer sur ce qui arrivera.

M. Lalonde: Vos 70% créent un problème.

M. Johnson: C'est pourtant ce que l'ancien Solliciteur général avait utilisé dans une loi de 1976, et je pense que c'était le député de Marguerite-Bourgeoys...

M. Levesque (Bonaventure): Qui n'avait pas reçu votre approbation enthousiaste.

M. Lalonde: Quelle loi?

M. Johnson: C'était le chapitre 29 du 24 juillet 1976, à l'article 16. "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut, s'il est d'avis que moins que 70% des personnes à l'égard desquelles une association de salariés est accréditée..."

M. Lalonde: Non, je veux dire que vous avez mis en cause l'ancien Solliciteur général. Je n'étais pas parrain de cette loi-là.

M. Johnson: Pardon?

M. Lalonde: Je n'étais pas parrain de cette loi-là.

M. Johnson: Non, mais vous étiez au Conseil des ministres.

M. Lalonde: Ah oui!

M. Johnson: Vous étiez solidaire?

M. Lalonde: A notre corps défendant, naturellement.

M. Johnson: Ah bon! Je voulais seulement être sûr.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 18 renuméroté article 19 est-il adopté?

Une voix: Oui.

M. Lalonde: Pas tellement.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 19 renuméroté article 20. M. le ministre.

M. Johnson: L'article 20, donc...

La Présidente (Mme Cuerrier): Non. Alors, automatiquement, nous renumérotons l'article 19...

M. Johnson: Oui.

La Présidente (Mme Cuerrier): ...qui devient...

M. Lalonde: L'article 20.

La Présidente (Mme Cuerrier): ...l'article 20.

M. Johnson: Oui. Adopté?

La Présidente (Mme Cuerrier): Est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Johnson: L'article 20, Mme la Présidente, qui devient l'article 21.

La Présidente (Mme Cuerrier): Oui.

M. Johnson: II y a deux références. A la deuxième ligne de l'article, les mots "prévue à l'article 18" deviennent "prévue à l'article 19" et, au bout de cette même ligne, les mots "prévue à l'article 19" deviennent les mots "prévue à l'article 20". Le nouvel article 21 est-il adopté,

Mme la Présidente? Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Les deux amendements sont adoptés?

M. Lalonde: Oui, l'article est adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. L'article 20 renuméroté article 21 est adopté tel qu'amendé? Adopté?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Johnson: L'article 21, Mme la Présidente, devient l'article 22. A l'intérieur de l'article 22, Mme la Présidente, à la troisième ligne, la référence à l'article 19 devient 20 et, à la quatrième ligne, la référence à l'article 16 devient 17. Les amendements sont-ils adoptés, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Cuerrier): Les amendements sont adoptés?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.

M. Johnson: Merci.

Le nouvel article 22 est-il adopté, Mme la Présidente?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Tel qu'amendé?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté, tel qu'amendé.

M. Johnson: Section VII, Mme la Présidente. L'article 22 devient l'article 23.

M. Fontaine: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 22 renuméroté article 23 est-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. L'article 23 est renuméroté article 24, sans doute.

M. Johnson: C'est cela, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): Sera-t-il adopté?

M. Lalonde: Adopté.

M. Fontaine: Adopté.

Une voix: On ne peut rien vous cacher.

La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. (21 h 20)

M. Johnson: Mme la Présidente, je sug- gérerai maintenant... Doit-on considérer que les travaux du comité plénier sont terminés, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Cuerrier): Oui.

M. Lalonde: Oui, le ministre de l'Éducation peut disposer.

M. Johnson: Je vous demanderai donc, Mme la Présidente, de céder votre siège au président afin que nous retournions en Assemblée.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre, j'ai l'intention de faire rapport immédiatement.

Des voix: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

Mme Cuerrier (Présidente de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que la commission plénière a étudié le projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des enseignants et des commissions scolaires et qu'elle l'a adopté avec des amendements.

Le Vice-Président: Est-ce que ce rapport sera adopté?

Des voix: Adopté.

Troisième lecture

Le Vice-Président: La troisième lecture du projet de loi no 113...

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté? Adopté.

Le journal des Débats va inscrire le même vote qu'en deuxième lecture. D'accord. M. le leader adjoint du gouvernement.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, l'Assemblée suspend...

M. Levesque (Bonaventure): Pour combien de temps, M. le Président? Parce que ce serait important pour nous de le savoir.

Le Président: L'Assemblée suspend ses travaux, selon l'expression consacrée, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle, jusqu'à loisir du lieutenant-gouverneur.

Comme il appartient au lieutenant— gouverneur de proroger cette session, il faut suspendre jusqu'à bon loisir du lieutenant-gouverneur. Alors, en conséquence, je suspends les travaux de l'Assemblée jusqu'à loisir, M. le leader parlementaire de l'Opposition officielle.

Reprise de la séance à 22 h 11

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mesdames et messieurs, veuillez vous lever, le lieutenant-gouverneur va maintenant faire son entrée.

Prorogation de la session

Le lieutenant-gouverneur: Mesdames et messieurs de l'Assemblée nationale, re-bonjour. En prorogeant cette cinquième session de la trente et unième Législature, session spéciale qu'a imposée l'urgence de la situation dans certaines commissions scolaires, j'exprime le souhait que vos travaux pourront résoudre les conflits qui mettent en danger l'année scolaire de milliers d'élèves et faciliter la tâche et la conclusion des conventions locales qui restent en négociation.

Je suis certain que celles et ceux qui sont visés par la loi que vous avez adoptée voudront s'y conformer par respect pour votre Assemblée qui, parce qu'elle est démocratiquement élue, représente la nation et en exprime l'intérêt supérieur.

Le Président: Veuillez vous asseoir. À l'ordre, s'il vous plaît!

C'est la volonté de Son Excellence le lieutenant-gouverneur que cette session soit prorogée sine die et, en conséquence, elle est prorogée sine die.

Au revoir à tous.

(Fin de la séance à 22 h 11)

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