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Version finale

32e législature, 1re session
(19 mai 1981 au 18 juin 1981)

Le mercredi 10 juin 1981 - Vol. 24 N° 12

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures douze minutes)

Le Président: À l'ordre, mesdames et messieurs!

Un moment de recueillement.

Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Entente-cadre au sujet

de la pêche au saumon

chez les Amérindiens

M. Lucien Lessard

M. Lessard: M. le Président, j'ai le plaisir d'informer cette Assemblée que, suivant le mandat que m'a confié le Conseil des ministres, je viens de conclure une entente-cadre avec le Conseil Attikamek-Montagnais qui agit au nom des cinq bandes montagnaises sur la Côte-Nord, au sujet de la pêche au saumon par ces Amérindiens.

Cette entente-cadre ouvre la porte à la conclusion d'ententes bilatérales entre mon ministère et chacune des cinq bandes pour la pêche au saumon, pour fins d'alimentation par les membres de ces bandes.

Une entente de même nature sera signée prochainement avec la bande de Sept-Îles. Le gouvernement du Québec reconnaît aux Indiens, résidant sur son territoire, l'exercice du droit de pêche au saumon aux fins d'alimentation, là où la ressource le permet, et signe avec les divers conseils de bande concernés des ententes à cette fin.

Ces ententes établissent et assurent un équilibre entre la récolte de cette espèce et son partage équitable entre les différents utilisateurs. Ces ententes garantissent enfin la survie de cette espèce dont les intéressés savent la très grande fragilité.

Cependant, depuis 1975, et particulièrement depuis 1978, certaines de ces ententes se sont avérées de plus en plus aléatoires, puisqu'un nombre grandissant d'incidents sont venus remettre en cause le sens même de ces ententes. Soulignons en particulier, M. le Président, le barrage et l'occupation du pont Interprovincial entre le Québec et le Nouveau-Brunswick par les bandes de Restigouche durant plusieurs jours, à l'été 1980. Tandis que sur la Côte-Nord, aucun désaccord sérieux n'est à entrevoir pour la saison, la situation a malheureusement atteint un point critique à Maria et à Restigouche dans la Baie des Chaleurs.

À la suite d'analyses de la situation étalées sur plusieurs semaines, nous croyons donc avoir atteint un point critique car l'intransigeance des positions de ces deux bandes de la Baie des Chaleurs n'a jamais permis de véritables négociations avec le gouvernement du Québec. De plus, M. le Président, pendant ces pourparlers, les deux bandes n'ont cessé d'augmenter le nombre de filets tendus illégalement dans les rivières Restigouche et Grande-Cascapédia.

En conséquence, en vertu des responsabilités ministérielles dont j'ai à m'acquitter, je n'ai, pour le moment, aucun autre choix que de donner aux conseils de bande de Restigouche et de Maria l'avertissement solennel de cesser toute pêche au filet et de retirer tous les filets actuellement tendus dans les rivières mentionnées avant minuit, ce soir, ce mercredi 10 juin 1981.

Cet avertissement solennel que je lance est contenu dans un télégramme que j'ai déjà expédié aux intéressés et que je dépose ici, M. le Président, à l'Assemblée nationale, si on me le permet. À l'expiration du délai, si la situation n'a pas été corrigée, j'aurai atteint la limite des pouvoirs que la loi me confère et je devrai en référer au ministre de la Justice.

Le Président: Merci, M. le ministre. M. le leader de l'Opposition.

M. Gérard-D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous venons d'entendre une déclaration ministérielle qui, d'une part, nous indique qu'il y a eu certaines ententes de conclues, particulièrement sur la Côte-Nord, et qui, en même temps, constitue un constat d'échec quant aux négociations qui ont pu avoir lieu entre le gouvernement et deux groupes qui se situent dans le comté de Bonaventure, que j'ai l'honneur de représenter ici à l'Assemblée nationale. Il s'agit, évidemment, d'une question fort délicate qui n'est pas d'aujourd'hui, mais qui a, depuis quelque temps, pris des proportions relativement inquiétantes.

M. le Président, je crois qu'il est important de souligner, à ce moment-ci, les droits historiques des Indiens. Nous l'avons nous-mêmes reconnu d'une façon très concrète lorsque nous avons négocié toute l'entente de la Baie-James. J'en profite, encore une fois, aujourd'hui, pour rendre hommage à mon collègue - vous me le permettrez - le député de Mont-Royal qui a travaillé d'une façon très ferme, très vigoureuse, d'une manière efficace pour en arriver à la conclusion

d'une entente avec les Indiens de la Baie-James et également avec les Inuits.

Je dois dire cependant - nous devons le constater - que les relations entre le gouvernement actuel et les peuples autochtones semblent se détériorer. D'ailleurs, les réactions que nous avons de part et d'autre du Québec semblent confirmer cette constatation, mais là n'est pas mon propos ce matin. Je voudrais m'en tenir à la question soulevée par la déclaration ministérielle du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Je comprends qu'il y a eu des négociations. J'aurais aimé que le ministre explicite un peu plus afin que cette Chambre puisse voir réellement si le ministre, son ministère et le gouvernement ont épuisé tous les moyens de négociation. Je pense qu'il n'y a qu'un paragraphe qui dit qu'il y a eu des négociations et qu'elles aboutissent à un échec; j'aurais aimé voir quels sont les efforts véritables que le gouvernement a pu faire pour que nous soyons bien saisis du fait que le gouvernement, autrement dit, aurait fait tout ce qui est humainement possible pour en arriver à une entente. (10 h 20)

Je pense que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ne devrait pas être le seul qui soit réellement préoccupé par cette question. Je ne pense pas que la question se situe uniquement dans le domaine du saumon; je pense que la question des relations avec le monde autochtone est une question beaucoup plus vaste. Il y a peut-être d'autres raisons qui font qu'on est rendu à cette situation, particulièrement à Restigouche et maintenant à Maria. Je me demande, encore une fois, si le gouvernement devrait situer ce problème à l'intérieur d'un problème plus vaste de relations du gouvernement avec les aborigènes.

Je voudrais, à ce moment-ci, encore une fois rappeler l'importance de l'industrie du saumon, que ce soit du côté de l'alimentation, par exemple pour les Indiens, que ce soit du côté des pêches commerciales ou des pêches sportives, de l'importance de la ressource pour toute la région. Donc, évidemment, M. le Président, je pense bien qu'il faut en arriver à une solution. Autrement, on mettrait en péril cette ressource extrêmement importante pour tout l'Est du Québec et l'ensemble du Québec.

Je voudrais cependant, M. le Président, avant de terminer, faire un appel et au gouvernement et à mes concitoyens, les Indiens du comté de Bonaventure, en particulier, pour qu'à la suite de cet appel du ministre, on en arrive le plus tôt possible à un modus vivendi, à une entente qui serait de nature à respecter les droits de chacun. Il faut faire en sorte que le climat social, qui a été perturbé à quelques reprises, depuis quelques années, puisse demeurer aussi sain que possible. Je ne veux pas être alarmiste, mais il s'agit ici d'une question explosive, inquiétante. J'espère qu'on y mettra toute la bonne volonté de part et d'autre, que les moyens employés tiendront compte de l'importance de maintenir, encore une fois, un climat qui soit respirable et qu'on évite toute violence de part et d'autre.

Prenant conscience des responsabilités qui sont les miennes ce matin, je demande, encore une fois, au gouvernement et aux populations autochtones du comté de Bonaventure, en particulier, qui sont directement impliquées, de faire en sorte que nous puissions en arriver à une entente et à une entente qui tienne compte, encore une fois, des droits de chacun. M. le Président, je voudrais rappeler l'importance - et cela, je pense bien que, de part et d'autre, on doit s'en rendre compte - de la protection de cette ressource, de la conservation de cette ressource, mais, en même temps, tenir compte des droits de chacun, et ces droits, évidemment, pour les mettre de l'avant, doivent tenir compte des droits de chacun. Je vous remercie infiniment, M. le Président.

Le Président: Merci. M. le ministre. M. Lucien Lessard

M. Lessard: Très brièvement, M. le Président. Je voudrais d'abord remercier le député de Bonaventure pour son excellente collaboration et le sens de ses responsabilités. Je pense que le député de Bonaventure, qui a eu justement à s'occuper de la pêche commerciale et de la pêche au saumon, connaît très bien ce problème délicat des relations entre les autochtones, l'ensemble des Blancs et le gouvernement du Québec.

Concernant les négociations, M. le Président, il serait certainement trop long d'énumérer l'ensemble des négociations qui ont eu lieu depuis plusieurs semaines avec les deux bandes concernées. Ce que je dois dire, cependant, c'est que nous avons tenté l'impossible pour en arriver à une solution puisque - nos négociations avec d'autres bandes l'ont démontré - nous avons réussi à avoir des ententes avec les bandes particulièrement celles de la rive nord. Les négociations en ce qui concerne Restigouche se sont faites, d'abord, sur un quota déterminé, soit d'augmenter le quota de 25 000 livres qu'il était l'an dernier à 35 000 livres. Nous étions d'accord pour augmenter ce quota à 35 000 livres.

Cependant, là où les négociations ont achoppé, c'est lorsque nous avons voulu désigner un nombre de jours définis, délimités, pour la pêche au saumon. On comprendra qu'il est impossible de permettre pendant une période de sept jours, 24 heures par jour, qu'il y ait un nombre illimité de

filets à l'embouchure d'une rivière, puisque cela empêche le saumon, particulièrement le géniteur, de monter la rivière, et cela risque de mettre en cause la reproduction. Tout cela est dans l'intérêt même des autochtones, c'est-à-dire d'assurer la pérennité de l'espèce et la reproduction. Or, on sait que l'an dernier, même si on a négocié, nous n'avons pas réussi à empêcher l'augmentation du nombre de filets; même dans certaines rivières on pouvait calculer une centaine de filets tendus sept jours par semaine, 24 heures par jour, ce qui a certainement eu des conséquences sur la pêche au saumon. C'est sur ce point que les négociations ont achoppé.

En terminant, M. le Président, soyez convaincu - j'assure le leader de l'Opposition - que si, au cours de ce délai que nous avons fixé, des négociations de bonne foi pouvaient s'ouvrir, j'accepterai d'y participer.

Le Président: Merci.

Dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

M. le leader du gouvernement.

Rapport sur le projet de loi no 255

M. Charron: M. le Président, j'aimerais communiquer à l'Assemblée les notes du greffier en loi qui concernent le projet de loi no 255 concernant la ville de Gatineau. Plus de six mois se sont écoulés depuis la publication des avis; je dois donc, pour qu'on puisse étudier ce projet de loi, solliciter le consentement et faire motion pour que cette dérogation soit permise au dépôt du projet de loi.

Le Président: Cette motion de dérogation sera-t-elle adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Président: Adopté.

M. Charron: Je voudrais donner tout de suite avis, pendant que j'y suis, que lorsque ce projet de loi sera déposé tout à l'heure, ainsi que les autres de même nature, c'est-à-dire les projets de loi privés qui ont été déférés à la commission des affaires municipales - ils sont au nombre de quatre ou cinq, je crois - dès aujourd'hui, par télégramme, les autorités municipales concernées seront convoquées à une commission parlementaire à ce sujet le mercredi 17 juin, vers 11 h 30.

Le Président: Merci.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

M. Charron: Je dois d'abord solliciter le consentement pour déposer le projet de loi conernant la ville de Gatineau qui apparaît en appendice au feuilleton aujourd'hui.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement unanime?

M. Levesque (Bonaventure): Consentement.

Le Président: Consentement.

M. Charron: Je vous prierais d'appeler ce projet de loi, M. le Président.

Projet de loi no 255 Première lecture

Le Président: M. le député de Gatineau propose la première lecture du projet de loi privé no 255, Loi concernant la ville de Gatineau. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté. Le Président: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: M. le Président, je propose de déférer ce projet de loi à la commission des affaires municipales.

Le Président: Est-ce que cette motion de déférence sera adoptée? Adopté. Questions orales des députés. M. le chef de l'Opposition.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Les anomalies relevées par le Vérificateur général

M. Ryan: M. le Président, le rapport du Vérificateur général des comptes, qui a été rendu public ces jours derniers, contient une abondance assez extraordinaire de renseignements sur les méthodes administratives du gouvernement, sur la qualité des conventions comptables qui président à l'inscription des données dans les livres rendus publics à la fin de l'année. Cela soulève évidemment une foule de questions, il y en a pour des jours, et même des semaines, et pourtant le Vérificateur

général dispose d'un mandat très limité comparativement à celui qui est donné au vérificateur au plan fédéral et dans d'autres provinces. Il vérifie seulement l'exactitude des transactions, il n'est pas appelé à se prononcer sur la qualité de la gestion. Cette fois-ci, c'a été plus fort que lui, dans bien des départements ou ministères, il a été obligé de laisser percer des opinions sur la qualité de la gestion parce que le dossier était trop évident.

Pour ce matin, je voudrais m'en tenir à un point qui me semble assez fondamental et qui a été soulevé à maintes reprises dans cette Chambre et sur lequel il est important que nous ayons tous des précisions. Le ministre des Finances, dans un discours sur le budget antérieur, nous avait déjà prévenus qu'un trou de quelque 500 000 000 $ avait été trouvé un peu soudainement au ministère de l'Éducation. Ce trou, comme on s'en souvient, consistait en des paiements différés qui devaient être versés aux commissions scolaires et qui n'avaient pas été enregistrés dans les livres du gouvernement à la clôture de l'exercice parce que le gouvernement n'était pas au courant des obligations qu'il avait accumulées au cours des mois précédents et parfois des années précédentes. (10 h 30)

Cela a été discuté. On pensait que tout était clarifié, mais le rapport du vérificateur nous montre que le problème avait peut-être encore plus d'ampleur qu'on ne nous l'avait révélé à l'époque et je voudrais que le ministre des Finances, ce matin, nous donne des précisions sur la situation comme elle lui apparaît actuellement au point de vue des problèmes suivants qui sont soulevés par le vérificateur.

D'abord, au déficit de 500 000 000 $ qui s'était accumulé dans le secteur des commissions scolaires, il faut ajouter une somme d'au moins 100 000 000 $ qui consiste en des paiements de même nature qui devaient être versés à d'autres institutions d'enseignement, ce qui fait que le trou dans le secteur de l'enseignement, au lieu d'être de 500 000 000 $, était plutôt de 625 000 000 $ à la fin de l'exercice 1979-1980. Je pense que le ministre conviendra de ça, c'est a la page 5 du rapport.

Maintenant, en plus, une politique était pratiquée par le gouvernement et cette politique consistait à obliger les institutions hospitalières à accumuler des déficits au plan de leur budget de fonctionnement sans que ces déficits soient inscrits dans les états financiers du gouvernement du Québec. À la fin de l'exercice 1979-1980, il y en avait pour 101 000 000 $; 101 000 000 $ de déficits de nos institutions hospitalières, en particulier, qui n'étaient comptabilisés nulle part, comme nous le dit le vérificateur: À cet égard, aucun passif n'avait été inscrit aux états financiers du ministère des

Affaires sociales en date du 31 mars 1980. De plus, il y avait des comptes payables pour une valeur de 106 000 000 $.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: 1 000 000 000 $, c'est un trou!

M. Ryan: En plus, au chapitre des régimes de retraite à propos desquels nous croyions, après avoir entendu le ministre se vanter à maintes reprises des actions prises par le gouvernement dans ce secteur, que la situation avait été réglée, on s'aperçoit que la situation était extrêmement critique au moment où ce rapport a été rédigé en ce qui touche le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, le RREGOP. Il y avait même les frais d'intérêts qui n'étaient pas couverts.

Le montant mentionné au rapport ne couvrait pas 174 000 000 $ d'intérêts non comptabilisés au 31 mars 1980 et ne couvrait pas non plus un passif établi à 480 000 000 $ au 31 décembre 1978 et qui s'est accru depuis.

Quant aux autres régimes de retraite, on sait que les entrées aux livres étaient bien inférieures...

Des voix: Question.

Le Président: Question, s'il vous plaît.

M. Ryan: Très bien. Je comprends que le gouvernement n'a pas d'intérêt à ce qu'on joue trop avec ces chiffres, je le comprends très bien.

Des voix: Question.

M. Ryan: Si on veut me permettre de formuler la question, je vais l'adresser au ministre des Finances.

Des voix: Ah, ah!

M. Ryan: Ce qui nous intéresse, c'est de savoir où nous en sommes aujourd'hui. Est-ce que le ministre des Finances peut nous donner une idée précise, à propos de chacun des principaux montants qui ont été mentionnés, de la situation où nous en sommes aujourd'hui?

En lisant le rapport du Vérificateur général, nous constatons qu'il y avait à peu près 1 000 000 000 $ de dépenses qui auraient dû être imputées à l'exercice terminé le 31 mars 1980 et qui ne l'ont pas été. Est-ce qu'on doit s'attendre à la même chose pour l'exercice qui s'est terminé le 31 mars dernier? Quelles sont les perspectives de ce côté?

Le Président: M. le ministre des

Finances.

M. Parizeau: M. le Président, le nombre de questions, en fait, de points soulevés par le chef de l'Opposition est suffisant, je pense, pour qu'on me donne quelques minutes pour y répondre, comment dire, aussi longuement, parce que effectivement, il y a une formidable ambiguïté qui est en train d'apparaître au sujet du rapport du Vérificateur général entretenue, je pense, par un premier article de journal, il y a deux jours, reprise ce matin par un autre quotidien et que je soulève essentiellement pour la raison suivante: le chef de l'Opposition utilise justement des termes qui ne paraissent pas du tout dans le rapport du Vérificateur général, mais qui paraissent dans ces articles.

Est-ce qu'effectivement, il y aurait un trou, puisqu'il parlait de trou, supérieur aux 500 000 000 $ de l'Éducation? Bien non, pas du tout. Il ne s'agit pas du tout de la même chose. Quand on a constaté - et le chef de l'Opposition en faisait état - qu'il y avait effectivement des dépenses des commissions scolaires qui avaient donné lieu à des emprunts bancaires, je l'ai révélé immédiatement à l'occasion d'un discours sur le budget et j'ai annoncé les mesures correctrices que nous allions prendre. Ce dont le Vérificateur général parle maintenant n'a rien du tout à voir avec cela.

Je vais essayer de le montrer à la lumière de certaines des choses que vient de dire le chef de l'Opposition et qui, en un certain sens, représentent exactement le genre de confusion qu'on voit paraître dans les journaux à l'heure actuelle. Prenons, par exemple, ce que le chef de l'Opposition disait, c'est-à-dire que des dépenses, soi-disant à la suite du rapport du Vérificateur général, ne seraient pas inscrites aux états financiers du gouvernement. Je pense que je cite le chef de l'Opposition à peu près au texte. Ce n'est pas cela que dit le Vérificateur général. Ce que le Vérificateur général dit et que le chef de l'Opposition ne semble pas tout à fait saisir - je ne le blâme pas parce qu'à la suite de l'avalanche d'articles de journaux, on comprend très bien qu'on passe de l'un à l'autre; il n'a jamais dit cela - c'est qu'un certain nombre de dépenses ne sont pas inscrites aux livres des ministères, mais elles le sont aux états financiers du gouvernement, avec une note aux états financiers du gouvernement qui indique spécifiquement à chaque programme les montants de comptes à payer.

Pour les références, voudriez-vous regarder les comptes publics à la page 19 et la nomenclature des comptes à payer à la page 5-93. Qu'on ne vienne pas dire que ce sont des dépenses cachées ou non inscrites. Ce que le Vérificateur général dit, c'est que ces comptes à payer devraient être inscrits dans les livres des ministères et non pas seulement sur les états consolidés du gouvernement avec des notes explicatives au bilan. C'est-à-dire que ce dont le Vérificateur général parle, c'est de pratiques comptables. Voici ce que dit essentiellement le Vérificateur général: Nous pensons que les pratiques comptables du gouvernement devraient être modifiées pour que ces comptes à payer soient inscrits aux livres des ministères. C'est tout à fait autre chose. Cela peut se discuter.

M. Ryan: Question de privilège, M. le Président.

Une voix: Voilà.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Le ministre me reproche d'avoir mal lu ou mal compris le rapport du Vérificateur général. Je veux dire que je crois l'avoir lu comme il faut...

Le Président: M. le chef de l'Opposition, je pense qu'à ce stade-ci, vous pourriez procéder à une question additionnelle.

M. Ryan: Mais le ministre est en train de compléter. Je le ferai à la question additionnelle, si vous me le permettez.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, quand le chef de l'Opposition officielle disait tout à l'heure qu'il semblerait qu'au-delà des engagements des commissions scolaires pour les années antérieures, c'est-à-dire le trou de 500 000 000 $, enfin 486 700 000 $, il y aurait une centaine de millions de dollars à inscrire auprès d'autres institutions d'enseignement. D'où tire-t-il cela? Il tire cela du rapport du Vérificateur général et il pourrait le tirer, s'il le désirait, de la page 5-93 des comptes publics du gouvernement du Québec. Cela apparaît aux deux endroits. Donc, le gouvernement ne les cache pas. Ce que le Vérificateur général dit, c'est: Passez-le à la page 5-93, si vous voulez, mais, d'autre part, il faudrait que vous inscriviez cela aux livres de chaque ministère. Je ne disconviens pas qu'on puisse avoir une discussion très intéressante là-dessus, mais ne charrions pas. Ne commençons pas à dire que le gouvernement cache quoi que ce soit. Disons simplement que, sur le plan des conventions comptables, le Vérificateur général nous fait une série de recommandations en disant: Effectivement, vous devriez, pour chacun des ministères, mieux révéler la situation, individuellement,

ministère par ministère, plutôt que de passer cela en annexe aux états financiers. Bon, je veux bien. (10 h 40)

La deuxième question concerne les fonds de retraite. Je répète ici brièvement que quand nous sommes arrivés au pouvoir, rien n'était fait à l'égard de deux grands fonds de retraite du gouvernement, c'est-à-dire le fonds de retraite des enseignants et celui des fonctionnaires. Au contraire, pour le RREGOP, le précédent gouvernement s'était fort bien conduit, mais il avait laissé deux trous béants sur les deux plus gros déficits actuariels que nous ayons, c'est-à-dire le fonds de retraite des enseignants et le fonds de retraite des fonctionnaires. J'ai commencé, à partir de 1978, avec les moyens dont on disposait, à pallier ce trou -parce que, là, parlons de trou justement -que nous avait laissé l'ancien gouvernement, un déficit actuariel qui, déjà, à ce moment-là, atteignait 6 000 000 000 $ et pour lequel aucune somme n'avait jamais été vraiment mise de côté pour pallier ce trou, pour le réduire et, au moins, le plafonner. À partir de 1978, et avec les moyens dont nous disposions - cela, le Vérificateur le reconnaît, d'ailleurs - nous avons commencé à rectifier la situation. Ce que le Vérificateur nous dit aujourd'hui, c'est que nous ne l'avons pas rectifié complètement. Oui, en effet, M. le Président. Je ne pense pas, en trois ans, avoir réussi à rectifier complètement des dizaines d'années d'incurie précédente. Merci.

Le Président: M. le chef de l'Opposition

M. Ryan: Tout d'abord, le ministre des Finances a laissé entendre tantôt que j'aurais mal lu ou mal compris le rapport du Vérificateur général. Je vais le citer pour que ce soit bien clair pour tout le monde. À la page 5, il dit en toutes lettres: "Au 31 mars 1980, les dépenses de transferts non imputées aux dépenses du gouvernement pour des frais de fonctionnement encourus avant le 1er avril 1980 s'établissaient à environ 762 000 000 $, soit 625 000 000 $ pour le secteur des commissions scolaires et des institutions d'enseignement et 101 000 000 $..."

Plus loin, à la page 27, il nous dit en toutes lettres, au sujet de ce fameux montant de 486 000 000 $: "Ce passif n'est pas inscrit aux livres du ministère à cette date". C'est clair, aux livres du ministère.

Des voix: Ministère!

M. Ryan: Oui, c'est ça. Mais, à la page 5, il dit que ce n'est pas inscrit dans les comptes du gouvernement. Il le dit clairement, c'est ce qui est dit à la page 5.

Ce que je voudrais surtout savoir, c'est où nous en sommes à la fin du dernier exercice, les perspectives que nous devons envisager.

Le Président: M. le ministre des Finances, brièvement, s'il vous plaît.

M. Parizeau: Brièvement, M. le Président, je vais essayer. On me cite la page 5 et la page 26. D'abord, éliminons la page 26 car c'est clair, dans la page 26, que c'est l'inscription dans les comptes du ministère. Je reviens à ce que je disais tout à l'heure et je ne veux pas reprendre cela.

À la page 5, il ne s'agit pas de cela, il s'agit des dépenses de transferts. C'est-à-dire que nous payons à chacun des organismes des subventions, des transferts chaque année. Ces transferts se font selon des formules qui varient d'une institution à l'autre, mais prenons les commissions scolaires. Nous payons 15% des dépenses d'il y a deux ans, 15% des dépenses d'il y a un an, 70% des dépenses de l'année courante. Dans d'autres cas, c'est 10%-90%. Donc, au cours de chacune des années, quand nous votons les crédits en Chambre, nous votons les montants nécessaires pour assurer une partie des dépenses antérieures et une majeure partie des dépenses de l'année courante avec une partie, donc, des dépenses de transferts qui s'appliquent l'année suivante. C'est ce qu'il veut dire, le Vérificateur. Bien oui, c'est ça, effectivement.

C'est une pratique comptable que nous suivons. Nous l'avons fait varier dans le temps, d'un gouvernement à l'autre; cela fait très longtemps que le gouvernement de Québec fonctionne de cette façon. Le Vérificateur dit: II faudrait peut-être réviser cette façon de penser les choses. C'est un débat que nous pouvons avoir, c'est une discussion intéressante, mais encore une fois nous ne cachons rien. La formule 70-15-15 pour les commissions scolaires est connue de tout le monde, elle est publique. Je pense que dans les cégeps, sauf erreur, c'est 90-10; 10% de l'année antérieure et 90% de l'année courante. Tout le monde est au courant qu'il y a des conventions comme celle-là. Cela donne comme résultat, cependant, que dans une année donnée, il y a des transferts qui auront lieu l'année suivante. Il en fait état et il n'y a pas à s'en étonner outre mesure.

Quant aux perspectives, la deuxième partie de la question, les perspectives n'ont pas à être modifiées sur la base des états financiers du gouvernement dans la mesure où ils sont complets. Quand on inscrit dans le passif du gouvernement un certain nombre de comptes à payer et qu'on en donne la nomenclature, qu'on ne dit pas quelles sont les perspectives, c'est ça. C'est parfaitement véridique. Il y a, à l'heure actuelle, des comptes à recevoir du gouvernement et des comptes à payer. Dans les comptes à payer,

cela correspond à ce qui est inscrit aux livres. Y en aura-t-il plus que ça en 1979-1980? Non, il n'y en aura pas plus que ça pour 1979-1980, les livres sont fermés. Il n'y a pas de perspectives sur le passé. Sur 1980-1981, ainsi que j'ai eu l'occasion de le dire, je pense, je crois que c'était le chef de l'Opposition officielle qui posait cette question, non, excusez-moi, je pense que c'était le député de Notre-Dame-de-Grâce qui posait une question quant à savoir quand paraîtrait la dernière révision des comptes pour 1980-1981, je lui ai indiqué que le contrôleur des finances était au travail et que j'aurais à indiquer à un moment donné quand la dernière synthèse de l'année passerait pour donner un certain nombre d'indications à ce sujet.

L'état des travaux est le suivant: les livres sont fermés partout, le contrôleur des finances est en train de faire une vérification qénérale comme il le fait chaque année, et, normalement, d'ici à quelques semaines, la synthèse paraîtra. La première impression que nous avons, à l'heure actuelle, c'est que la situation réelle est à peu près celle que j'avais annoncée dans le discours sur le budqet, et peut-être, mais cela, je ne le garantis pas, j'ai eu l'occasion de le dire en commission parlementaire, un peu meilleure.

Le Président: Question principale, M. le député de Nelligan.

Le projet Stablex à Blainville

M. Lincoln: Je voudrais poser une question au ministre de l'Environnement sur le projet de l'usine pour contrôler les mauvaises odeurs, le projet Stablex. Aujourd'hui, on va parler un petit peu des faveurs. L'autre jour, j'avais dit que j'avais demandé au ministre s'il ne pensait pas qu'il y avait un conflit d'intérêts très malsain dans le fait que celui qui a proposé la motion au conseil municipal pour installer l'usine à Blainville, M. Claude Vallée, était à la fois conseiller municipal, gros contractuel du ministère, ami du ministre, organisateur politique du Parti québécois, etc. M. le ministre, n'est-il pas vrai que, le 26 juillet 1979, M. Claude Vallée, sous l'égide de la société de consultants Claude Vallée et associés Inc., aurait obtenu un contrat sans soumissions de 61 050 $...

M. Léger: Sans soumissions!

M. Lincoln: ...puis, dans l'espace de seulement six mois et plus, peut-être sept mois, février 1980, un autre contrat sans soumissions, celui-là pas pour 100 000 $, remarquez, comme Steinberg et Eaton, 99 909,37 $. Car 100 000 $, ce n'est pas trop joli. Deux contrats, dans l'espace de quelques mois seulement, au total de 160 959,37 $, sans soumissions.

Une voix: Cela ne se peut pas!

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Léger: M. le Président, j'aimerais vérifier les affirmations du député. Nécessairement, il donne des dates, des chiffres. On va aller voir ça, parce que c'est bien important de replacer les choses dans leur contexte et, M. le Président, je remercie le député de me permettre de répondre à des parties de questions, ce que je n'ai pas pu faire hier, dans le même dossier. J'aimerais déposer ici une lettre du conseil municipal de Blainville, où il y a des paragraphes qui expliquent exactement le style de relations que M. Claude Vallée a pu avoir avec le conseil municipal et je citerai un passage ici, où le maire de la municipalité dit: "Je me dois de témoigner que, dans son rôle de conseiller municipal, M. Vallée a toujours poussé jusqu'au scrupule le souci de ne tirer aucun avantage personnel de son mandat. Par ailleurs, sa compétence professionnelle...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Vous pouvez continuer, M. le ministre.

Une voix: Un autre "lazy boy"... (10 h 50)

M. Léger: "Par ailleurs, sa compétence professionnelle et son souci passionné du bien public font de lui un membre éminent de notre conseil de ville. Puis-je exprimer le voeu que la passion politique en Chambre n'ait pas pour effet de nuire à la réputation de cet homme intègre et compétent?"

Deuxièmement, M. le Président, pour dégonfler un peu plus la balloune du député de Nelligan, je dois ajouter que, dans cette lettre que je dépose, on fait mention de la fameuse pétition sur laquelle repose toute la plaidoirie du député de Nelligan, qui dit être pour le principe du projet Stablex, mais ne pas être pour le site, que la pétition - et le maire l'explique dans sa lettre - a toujours été accompagnée d'un dépliant qui faussait complètement le débat et manipulait l'opinion publique, puisque, tout le long, on disait aux citoyens: "Ensemble, il faut empêcher la venue du dépotoir." On ne parlait pas d'une usine de traitement et de transformation de déchets, on parlait d'un dépotoir. Toutes les pages parlaient continuellement d'un dépotoir: "Non, au dépotoir. Le dépotoir doit être éloigné, etc." C'est de la fausse représentation et c'est avec cela qu'on est allé chercher une pétition.

M. le Président, si le député de Nelligan ne veut sortir que des ragots, ne

veut pas trouver de fondement à ses affirmations, je dois dire qu'il commence mal sa carrière...

Des voix: Oh!

M. Léger: ...et sa crédibilité comme défenseur de l'environnement va être en cause. J'aimerais, M. le Président, déposer...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: II est mieux de la commencer ainsi que de la finir comme...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Léger: M. le Président, je dois même dire qu'on a essayé de pousser la peur des citoyens, la panique, jusqu'à mentionner l'exemple de Love Canal, du dépotoir d'Elizabeth Town, de Mississauga, Ontario, pour créer un climat de peur. C'est entendu; moi-même, après avoir lu cela, j'aurais signé! Je vais déposer ce document, M. le Président. Je vais déposer aussi le rapport qui a servi de base - c'est le rapport final, global de l'ensemble du ministère de l'Environnement qui a permis au Conseil des ministres de prendre sa décision - et je vais déposer le rapport du bureau d'audiences publiques en mentionnant au député de Nelligan de bien lire les mesures 542, 542.4, 545, 547, 552, 561, 555, 564 et 565 qui démontreront que le Conseil des ministres a posé onze conditions à l'obtention du permis qui correspondent aux demandes du bureau d'audiences publiques.

Je voudrais terminer en disant que M. Claude Vallée n'a jamais touché, à l'intérieur du ministère, au dossier de Stablex. Il est au service d'assainissement des eaux comme contractuel. Il n'est pas au service qui s'occupe des déchets toxiques. Il n'a jamais participé au processus de décision et je ne l'ai jamais consulté pour ce projet. Je dépose ces documents, M. le Président, et j'invite même le député - qui ne remarque peut-être pas que c'est une décision très importante, l'installation d'une usine de traitement des déchets toxiques pour l'ensemble du Québec, en tenant compte des particularités de la région - puisque je ne puis pas déposer les 42 rapports, je l'invite, sous le sceau de la confidentialité, pour prouver jusqu'à quel point il est responsable, à venir voir les 42 dossiers que j'ai à mon bureau; à ce moment-là, s'il juge que ce n'était pas la bonne décision, il pourra le dire, mais je lui demande la confidentialité. C'est impensable qu'on puisse mettre des professionnels dans un ministère pour combattre un autre professionnel et qu'ils aient chacun des opinions différentes; à ce moment-là, la carrière des professionnels d'un ministère serait de courte durée. Il faut que le député démontre plus de responsabilité, sinon, je pourrais dire qu'il pensait se promener en "Lincoln", mais qu'il s'est fait charrier sur un camion de vidanges par des gens qui ont des intérêts à Blainville.

Des voix: Bravo!

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Nelligan.

Une voix: Question confidentielle.

M. Lincoln: Je remercie le ministre pour sa courte réponse, sa courte non-réponse à ma question. Comme d'habitude, il a évité la réponse pour faire un discours sur le projet Stablex.

Est-ce que le ministre peut nous dire, après nous avoir fourni la réponse quant aux deux contrats sans soumissions obtenus par M. Vallée pour la somme de 160 000 $, s'il est vrai qu'il a eu des discussions au sujet de Stablex avant la proposition de M. Vallée au conseil municipal le 8 septembre 1980?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Léger: M. le Président, c'est entendu qu'à l'intérieur de mon ministère, la plupart des personnes qui y travaillent se parlent entre elles. Est-ce que je peux dire si, le 8 septembre, j'ai parlé à M. Vallée? Je ne le sais pas. Le député passe son temps à dire que je ne réponds pas à sa question. Comme je l'ai dit tantôt, je vais vérifier ses allégations et j'apporterai une réponse. Tout ce que je peux vous dire, c'est que le Conseil du trésor a déjà autorisé un contrat de deux ans, le 1er avril 1980, dans le but d'engager un professionnel contractuel. Si c'est là-dessus qu'il se base, je vais vérifier, j'apporterai les réponses à cet égard, et tout sera clair. J'espère que le député va recouvrer sa crédibilité, parce qu'il est en train de la perdre.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Je vous ai demandé bien clairement, M. le ministre, s'il est vrai que vous avez discuté du projet Stablex avec M. Vallée avant le 8 septembre 1980, date à laquelle il a fait sa proposition au conseil municipal. C'est là ma question.

Des voix: Répondez.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Léger: M. le Président, je ne sais

pas quelles sont les dates où j'en ai parlé, j'en ai parlé avec beaucoup de gens, il se peut que j'en aie parlé avec le député. Que voulez-vous que je vous réponde? Est-ce que je lui en ai parlé à cette date? Je ne le sais pas.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Groulx.

M. Fallu: M. le Président, il semble évident qu'on est en train de passer à côté de l'objet essentiel, c'est-à-dire la création d'une première entreprise industrielle de dépollution, une installation industrielle basée sur onze exigences très techniques et qui, de plus, sera l'usine la plus propre du Québec.

Tout à l'heure, le député de Nelligan a laissé entendre - ma question s'adresse au ministre - sous la forme d'une mauvaise blague peut-être, qu'il s'aqissait d'une usine de mauvaise odeur, laissant donc ainsi croire à la population qu'il s'agissait d'un dépotoir.

Le Président: Question, s'il vous plaît.

M. Fallu: M. le Président, le ministre peut-il nous dire s'il s'agit d'un dépotoir ou d'une usine propre, de bonne odeur?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Léger: M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Léger: M. le Président, le besoin du Québec d'avoir une usine de traitement des déchets industriels qui sont actuellement stockés dans la plupart des 5000 usines du Québec est un besoin essentiel. Il s'agit d'une usine de dépollution qui devra d'abord respecter les normes de l'environnement, puisque le ministère de l'Environnement sera aussi propriétaire du terrain. C'est donc un besoin essentiel.

C'est un dossier qui demande une décision courageuse de la part du gouvernement parce que c'est sûr que tous les citoyens sont d'accord; comme le député l'a dit très gentiment, il est d'accord sur le principe de l'usine Stablex, sauf sur le choix de l'emplacement. C'est entendu que jamais tous les citoyens, à 100%, seront d'accord sur le choix de l'emplacement. C'est pourquoi il y aura toujours des opposants. Mais cette usine va respecter toutes les normes de l'environnement et elle correspond au besoin exprimé par les citoyens qui sont venus aux audiences publiques. C'est un atout, un avantage pour la municipalité.

Le Président: Question principale, M. le député...

M. Fallu: Question additionnelle...

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Groulx.

M. Fallu: M. le Président, on vient de nous dire à l'instant que personne ne veut de cette usine. Or, il s'agit d'une usine propre. Est-ce qu'il s'agit uniquement des ragots du député...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Question additionnelle, très brièvement, M. le député de Groulx. (11 heures)

M. Fallu: M. le Président, j'aimerais savoir du ministre s'il s'agit de simples ragots, colportés par une Opposition en mal de sujets de questions ce matin, ou s'il s'agit d'une usine qui peut être installée avec sécurité n'importe où, y compris dans votre cour ou dans ma cour.

M. Léger: C'est bien certain que c'est un dossier que nous avons étudié en long et en large. Toutes les mesures que nous avons prises tiennent compte de la protection de l'environnement et, au départ, de la protection de tout le Québec, parce que c'est un besoin. Deuxièmement, elles tiennent compte des besoins de qualité d'environnement des gens de Blainville. D'ailleurs, les onze recommandations qui appuient ce permis correspondent aux demandes des citoyens. Il y a donc des avantages pour les citoyens aussi.

Le Président: Question principale, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture. Malheureusement, je dois déplorer son absence. Je l'ai informé à deux reprises que j'avais une question non seulement urgente, mais très importante à lui poser. Peut-être que je n'aurais pas dû l'en informer. Est-ce que je peux poser la question à l'adjoint parlementaire?

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, quand on sait le bonheur et le plaisir que ressent le ministre de l'Agriculture à répondre aux questions de l'Opposition, je doute qu'il soit absent ce matin pour une raison autre que très sérieuse. Dans les circonstances, si le député préférait attendre à demain, on pourra vérifier entre-temps si le ministre sera présent ou non.

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton.

Transferts de quotas de lait

M. Bélanger: Avec votre permission, je vais poser ma question au premier ministre. J'ai l'intention de mener ma question à bon port, mais je vous rassure, M. le premier ministre, il ne s'agit pas du tout du porc. Il s'agit plutôt de transferts très douteux de quotas laitiers au Québec. Nous savons que l'Office des producteurs de lait du Québec interdit le transfert de quotas laitiers sauf lorsqu'un détenteur transfère son exploitation à son fils, à un membre immédiat de la famille ou vend la ferme tout entière, y compris le troupeau.

Je voudrais savoir, M. le premier ministre, si vous êtes informé actuellement que, tout au moins dans la région de l'Estrie, certains commerçants ont trouvé des façons assez douteuses de contourner la loi tout simplement en faisant deux transactions simultanées, c'est-à-dire, d'une part, on achète la ferme tout entière, avec le troupeau, et on fait immédiatement, dans le même bureau et avec le même notaire, une autre transaction où on revend la ferme sauf le quota laitier.

Il n'est pas surprenant, M. le Président, que de cette façon le nombre des producteurs laitiers au Québec ait diminué, de 1976 à 1980, de 8500. J'espère, M. le premier ministre, que vous pourrez nous donner plus d'éclaircissements sur cette question.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, de façon très efficace, sauf qu'il devra quand même attendre à demain, le député vient de donner préavis au ministre de l'Agriculture qui pourra préparer soigneusement, comme d'habitude, sa réponse que, fort probablement, le député obtiendra demain.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: II y a quelque chose qui se passe au Conseil des ministres. Je crois qu'on ne se parle pas beaucoup.

Le Président: Question additionnelle.

M. Bélanger: M. le Président, j'y arrive. La Sûreté du Québec enquête présentement sur ces transactions, mais ce qui est le plus alarmant, c'est qu'elle n'enquête pas pour le ministère de l'Agriculture mais pour le ministère du Revenu, afin de tenter de récupérer quelques dollars qu'auraient acquis maladroitement ou malhonnêtement certains commerçants.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): On vient de m'aviser que, s'il peut arriver avant la fin de la période des questions - il reste encore combien de temps?

Le Président: II reste environ dix minutes.

M. Lévesque (Taillon): Probablement que ç'a stimulé le ministre de l'Agriculture, il est en route et le député obtiendra, je pense, toutes les réponses et peut-être plus qu'il n'en désire.

Le Président: M. le député de Rousseau.

Grève à la compagnie d'autobus Gilber

M. Blouin: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ou à son adjoint parlementaire.

Je rappelle à cette Assemblée, M. le Président, que depuis le 17 février 1981 les autobus qui appartiennent à la compagnie Gilber ont cessé de fonctionner et que, conséquemment, plus de 2000 étudiants sont privés de transport scolaire dans le comté de Rousseau. En plus de priver les étudiants du transport scolaire, cette situation est un fardeau pécuniaire supplémentaire pour les parents qui doivent souvent débourser des dizaines de dollars par semaine pour assurer le transport des enfants depuis leur domicile jusqu'à l'école.

Je rappelle aussi, M. le Président, que cette situation empêche certains élèves de se rendre à leurs cours et que cela peut, dans certains cas, retarder leur évolution pédagoqique. Le 26 mai dernier, le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu me précisait qu'il allait demander à son conciliateur de convoquer de façon péremptoire les parties afin d'essayer de rapprocher ces parties. Des citoyens m'ont informé qu'effectivement le conciliateur aurait convoqué les parties et qu'elles se seraient rencontrées jeudi dernier, le 4 juin.

Ce que je demande au ministre ou à son adjoint, c'est d'abord de me confirmer la tenue de cette rencontre de conciliation et, deuxièmement, de m'indiquer si, effectivement, des progrès substantiels ont été réalisés afin de contribuer au règlement de ce conflit.

Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

Règlement de la grève au Devoir

M. Dean: M. le Président, si vous me permettez, avant de répondre à la question

du député de Rousseau, il me fait plaisir d'annoncer à cette Chambre, pour son information, et pour ceux ou celles qui ne seraient pas déjà au courant, le règlement du conflit du Devoir.

L'assemblée syndicale des journalistes a ratifié hier soir une entente de principe. Les journalistes sont au travail aujourd'hui et, selon nos renseignements, le Devoir paraîtra à compter de vendredi matin.

Grève à la compagnie d'autobus Gilber (suite)

Maintenant, pour ce qui est de la question du député de Rousseau, à la suite de sa question en Chambre, le ministre a effectivement demandé au conciliateur de convoquer les parties. À ce moment, il y avait un écart important entre les deux parties dans ce conflit. La rencontre a eu lieu et il s'est fait énormément de progrès dans le dossier, à tel point qu'une entente de principe entre les parties a été recommandée par l'exécutif syndical à une assemblée des membres, le 4 juin.

Malheureusement, les syndiqués ont rejeté le projet d'entente de principe à une majorité de 57%. Le conciliateur demeure à la disposition des parties. Mon expérience syndicale me dit que, dans une situation du genre, il y a quand même de fortes chances de reprise prochaine des négociations et de règlement. On n'a pas à juger la sagesse des membres du syndicat, c'est leur droit démocratique, ils ont voté le rejet à 57%. Nous espérons que, très bientôt, avec un peu de bonne volonté de part et d'autre, le conflit se réglera dans les plus brefs délais.

M. Gratton: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, puisqu'on discute du problème des grèves dans le secteur du transport d'écoliers, pourrais-je demander, soit au ministre, soit à son adjoint parlementaire, quelle est la position du ministère dans le conflit qui prive certains étudiants dans l'Outaouais de transport scolaire depuis...

Le Président: À ce stade-ci, je déclare qu'il ne s'agit pas d'une question additionnelle. Par contre, je permettrai au député de Mégantic-Compton de reprendre sa question pour le ministre de l'Agriculture, qui est maintenant arrivé.

M. Gratton: Est-ce qu'il s'occupe de mes étudiants?

Le Président: M. le député de

Mégantic-Compton.

Transferts de quotas de lait (suite)

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je déplorais tout à l'heure votre absence, M. le ministre. Je suis très rassuré de voir que vous êtes revenu.

Ma question concerne le transfert douteux de quotas laitiers. Vous savez que l'Office des producteurs de lait du Québec interdit le transfert de quotas laitiers, sauf à un membre immédiat de la famille du producteur ou avec la vente complète de la ferme, du troupeau, etc., etc.

Je voudrais savoir si vous êtes informé de certaines transactions plus que douteuses, tout au moins dans la région de l'Estrie, où des commerçants ont trouvé une façon de contourner cette loi en faisant simplement deux transactions simultanées. C'est-à-dire que, d'une part, on achète la ferme entière, le troupeau, et, dans le même bureau, avec le même notaire, l'acquéreur revend au vendeur la ferme, sauf le quota laitier. Ce qui m'inquiète, M. le Président, c'est le nombre de producteurs laitiers qui sont disparus au Québec depuis 1976 et qui s'élève à plus de 8500. Je voudrais savoir si le ministre peut nous éclairer un peu sur ce sujet.

Le Président: M. le ministre.

M. Garon: Si on parle de la diminution du nombre des producteurs laitiers, M. le Président, on peut remonter à 1960, car il en est disparu 40 000 depuis 1960. Il y avait 60 000 producteurs laitiers et, aujourd'hui, il y en a environ 21 000. C'est évident que les fermes ont tendance à se consolider parce que, aujourd'hui, l'équipement est plus mécanisé. Un cultivateur, qui gagnait sa vie et qui faisait vivre une famille avec une dizaine de vaches et un peu d'agriculture diversifiée, pouvait vivre il y a 40 ans. Mais aujourd'hui il ne vivrait pas. En 1981, voir l'agriculture comme on la voyait il y a 40 ans, c'est une erreur. On ne retournera pas à la voiture à cheval, on ne retournera pas à ce temps-là.

Deuxièmement, concernant les transferts de quotas, si des règlements de transferts de quotas, des règlements concernant les quotas sont adoptés au cours d'assemblées générales de producteurs, ils doivent aller à la Régie des marchés agricoles pour être acceptés ou approuvés et, ensuite, ils sont administrés par la Régie des marchés agricoles. S'il y a quelque chose qu'on pense incorrect, on peut simplement porter plainte à la Régie des marchés agricoles qui va faire enquête et qui va réagir immédiatement s'il y a quelque chose

d'incorrect. Pour autant que je sache, je n'ai pas entendu parler de ce dont vous parlez. Occasionnellement, j'entends dire une chose ou l'autre, mais sous forme de rumeur. Chaque fois qu'il y a eu quelque chose qui m'a été fourni, un minimum de données, j'ai demandé un rapport à la Régie des marchés agricoles.

Vous me donnez cela d'une façon un peu générale. Il faudrait savoir d'abord s'il s'agit de transferts de quotas de lait nature ou de lait industriel. Dans le cas du lait industriel, il s'agit d'encans mensuels, où aucun producteur ne peut acheter plus de 500 livres de quotas...

Une voix: Matières grasses.

M. Garon: ...de matières grasses par mois. Ce n'est pas la même réglementation. Il faudrait savoir de quoi il s'agit, au fond.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: M. le Président, le ministre a tout simplement évité de répondre à ma question. Je vais l'éclairer davantage. La Sûreté du Québec enquête présentement sur ces transactions douteuses. Mais ce qui me fait le plus de peine, ce n'est pas pour protéger les agriculteurs. C'est tout simplement pour remplir les coffres du ministre du Revenu parce qu'on tente de récupérer une certaine somme d'impôt que ces commerçants n'auraient pas payée.

Maintenant, dans la Gazette officielle du 3 décembre 1980, on dit qu'il est interdit de transférer un quota sauf avec la vente, comme je vous l'ai mentionné. Alors, je demande au ministre s'il est prêt à faire enquête, mais, cette fois-ci, pour les agriculteurs et d'informer cette Chambre dans le plus bref délai possible.

Le Président: M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, j'ai répondu clairement. Je ne sais pas s'il est au courant des institutions, mais il y a une Régie des marchés agricoles qui administre tous les règlements concernant ces matières-là. Ces réglementations sont adoptées en vertu de la Loi sur les produits agricoles. À ce moment-là, s'il y a une plainte à formuler, qu'on la fasse à la Régie des marchés agricoles qui est l'institution mandatée pour surveiller l'application de ces règlements.

Le Président: Fin de la période des questions.

Une voix: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Fin de la période des questions, malheureusement.

M. Léger: M. le Président. Le Président: Motions non annoncées. Le projet Stablex (suite)

M. Léger: Je voudrais donner un complément de réponse à une question qui a été posée tantôt. J'ai maintenant la réponse.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour que le ministre donne un complément de réponse...

Une voix: Oui.

Le Président: ...avec une question additionnelle? M. le ministre.

Une voix: ...dossier confidentiel...

M. Léger: Non, ce n'est pas confidentiel. C'est pour répondre à la question un peu insinuante du député de Nelligan afin d'enlever tout doute. Je dois dire que le premier chiffre dont le député a parlé tantôt concerne un contrat de 59 325 $ qui a été signé pour les honoraires du contractuel Claude Vallée, du 18 avril 1979 au 30 novembre 1980. Donc, c'était le contrat pour cette partie de ses services au niveau de l'assainissement des eaux. La deuxième question concerne un contrat de quelque 99 000 $, dont 93 000 $ d'honoraires pour un an et demi, du 1er avril 1980 au 30 septembre 1981. Contrairement à ce que vous avez dit, c'était à la demande du Conseil du trésor, autorisé par le Trésor; donc, tout est régulier. Essayez de fouiller dans d'autres poubelles, ailleurs, car il n'y a pas d'autres choses.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Donc, les chiffres, à 2000 $ près, sont corrects, n'est-ce pas? Mais pouvez-vous me dire s'il y a eu des appels d'offres?

Le Président: M. le ministre.

M. Léger: J'ai l'impression que le député n'écoute jamais les réponses. Il passe son temps à dire que je n'ai pas répondu. Je viens de lui dire que c'est sur l'autorisation du Conseil du trésor et à la demande même du Conseil du trésor.

Des voix: Ce n'est pas ça. Soumissions, appels d'offres.

M. Léger: Peut-être que le député va apprendre son rôle. Quand on engage des

contractuels pour faire des tâches précises, demandant une compétence précise et qu'on ne veut pas augmenter la fonction publique pour ne pas avoir trop de fonctionnaires selon les normes de la sécurité d'emploi, c'est la procédure normale. J'espère que le député de Nelligan va être satisfait, mais il continuera encore a fouiller dans les poubelles, demain.

Le Président: Fin de la période des questions.

Motions non annoncées.

Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Avis à la Chambre.

M. le leader du gouvernement.

Avis à la Chambre

M. Charron: Voici le tout premier avis que je veux donner à l'Assemblée. Le projet de loi, actuellement en discussion devant la Chambre, au nom du ministre des Finances, devrait connaître son aboutissement en deuxième lecture au cours de la journée. J'inviterais donc chacun des députés à mettre à son horaire un vote possible sur la deuxième lecture du projet de loi vers la fin de l'après-midi.

Je donne tout de suite avis que, ce soir, il y aura étude en commission parlementaire de ce même projet de loi article par article qui se tiendra à la salle 91-A. À la salle 81-A, ce soir, ce sera l'étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales. Au salon rouge, ce soir, ce sera l'étude des crédits du ministère du Travail. Donc, trois commissions parlementaires ce soir. Après le vote, vers 17 h 45 ou 17 h 50, la Chambre ajournera ses travaux jusqu'à demain matin.

Cet après-midi, je fais motion pour que, pendant que la Chambre s'adonnera à l'étude du projet de loi no 11, puissent siéger, de 15 heures à 18 heures, au salon rouge, la commission du travail et, à 81-A, la commission des affaires intergouvernementales.

Ce matin, de 11 h 15 à 13 heures, la commission du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu commence l'étude de ses crédits.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que ces motions sont adoptées?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Recours à l'article 34

Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 34, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: M. le Président, j'ai une question à poser au leader du gouvernement. J'ai reçu une demande de la part des autorités du Séminaire de Saint-Georges-de-Beauce qui voudraient se faire entendre brièvement à l'occasion de la commission parlementaire de jeudi soir relativement au problème de l'enseignement privé. Je me permettrais d'insister pour que ma demande soit acceptée, s'il y a possibilité.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je regrette, M. le Président, la consultation à ce sujet a été très ouverte, elle a eu lieu d'une manière publique depuis que ces auditions sont annoncées. Nous n'accepterons pas d'exception à la liste déjà complète qui a été présentée.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Sans faire d'exception, comme le dit le leader parlementaire du gouvernement, n'y aurait-il pas lieu de permettre à cette institution, au moins, d'être présente et s'il restait - le député a dit que ce serait fait brièvement -trois, quatre ou cinq minutes, de pouvoir s'exprimer?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je laisserai la commission parlementaire, lors de sa séance de demain, décider elle-même, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Les affaires du jour.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je propose que vous rappeliez le projet de loi inscrit au feuilleton. Auparavant, à moins que l'Assemblée n'ait d'objection, je proposerais la considération d'un certain nombre de rapports qui sont entrés depuis quelques jours, ce qui nous permettrait d'avancer notre menu législatif.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition. (11 h 20)

M. Levesque (Bonaventure): Si on voulait faire exception pour 8 et 11, on pourrait peut-être disposer de 9, 10 et 12.

M. Charron: À l'article 8, aucun amendement n'a été annoncé depuis le dépôt

du rapport. Le seul rapport qui a subi des amendements, c'est le rapport concernant la loi 10, celui qui apparaît à l'article 11 du feuilleton d'aujourd'hui. Je ne vois pas pourquoi on ne ferait pas la prise en considération de la Loi sur la fonction publique.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je suis d'accord avec le leader parlementaire du gouvernement qu'il n'y a pas eu d'amendement de déposé à la suite du rapport. Cependant, il est possible que nous ayons une brève intervention à ce moment. Comme il s'agit aujourd'hui d'un menu préparé et annoncé, d'ailleurs, par le leader parlementaire du gouvernement, je pense que dès demain matin nous pourrions coopérer pour passer cet article, mais nous préférons attendre un renseignement qui nous arrivera incessamment. C'est pour cela que je suggère que nous disposions des articles 9, 11 et 12, quitte à brièvement disposer des deux autres à la prochaine occasion.

M. Charron: M. le Président, j'indique tout de suite, en me rendant à cette demande, que la prise en considération de ce rapport concernant cette loi aura lieu demain et que sa troisième lecture aura lieu vendredi matin.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Parfait. Il y est donc question de l'article 11 et de l'article 8, si je comprends bien.

M. Charron: Je vous prierais d'abord d'appeler l'article 12 du feuilleton.

Prise en considération de rapports de commissions parlementaires

Étude du projet de loi no 14

Le Vice-Président (M. Jolivet): L'article 12, prise en considération du rapport de la commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution qui a étudié le projet de loi no 14, Loi concernant le recensement des électeurs pour l'année 1981 et modifiant la Loi sur la consultation populaire. Est-ce que ce rapport est adopté?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté. Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: Je vous prierais d'appeler l'article 9.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture, prochaine séance.

M. Charron: Est-ce qu'on a des objections à la troisième lecture?

M. Levesque (Bonaventure): Aucune objection, M. le Président, dans un esprit de grande collaboration.

M. Charron: Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, est-ce qu'il y a consentement pour que la troisième lecture soit faite?

M. Levesque (Bonaventure): Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: L'article 9 du feuilleton, M. le Président.

Étude du projet de loi no 2

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prise en considération du rapport de la commission permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme qui a étudié le projet de loi no 2, Loi sur la Société du Palais des congrès de Montréal. Ce rapport est-il adopté?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Troisième lecture, prochaine séance?

M. Levesque (Bonaventure): Prochaine séance. Ou séance subséquente.

M. Charron: L'article 10 du feuilleton, s'il vous plaît, M. le Président.

Étude du projet de loi no 8

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prise en considération du rapport de la commission permanente de la protection de l'environnement qui a étudié le projet de loi no 8, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. Le rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Troisième lecture, prochaine séance ou séance subséquente? M. le leader.

M. Charron: L'article 11 du feuilleton, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): L'article 11. Prise en considération du rapport de la commission...

M. Charron: Oui, mais ce n'est pas long. Un amendement. Alors, demain?

Une voix: Demain.

M. Charron: Demain.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader. Un instant.

M. Charron: Je voudrais tout de suite indiquer, M. le Président - je m'excuse -avant de vraiment entrer dans le menu du jour, que si nous terminons le programme tel que prévu aujourd'hui, la journée de demain sera consacrée au discours sur le budget. Donc, les députés qui s'étaient préparés pour intervenir aujourd'hui, conformément à la première organisation des travaux de la semaine, doivent prévoir que demain, la journée entière, au moins jusqu'à 18 heures, en tout cas, sera consacrée au débat sur le discours sur le budget. Je vous prierais d'appeler l'article 3 du feuilleton.

Reprise du débat sur la deuxième lecture du projet de loi no 11

Le Vice-Président (M. Jolivet): Article 3. Reprise du débat sur la motion de M. Parizeau proposant que le projet de loi no 11, Loi modifiant certaines dispositions législatives pour donner suite à la politique budgétaire du gouvernement pour l'exercice 1981-1982, soit maintenant lu la deuxième fois. Au moment de l'ajournement du débat nous étions au député de Hull.

M. le député de Hull.

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Cela fait suite aux discussions que nous avons eues hier soir concernant le projet de loi no 11 et plus particulièrement en ce qui touche les écoles privées au Québec, mais le projet de loi no 11 contient plusieurs modifications à plusieurs lois qui ont une certaine importance dans plusieurs domaines et, dans le domaine des municipalités, entre autres, M. le Président, il y a énormément de particularités que vient toucher le projet de loi no 11.

Avant de commencer mon exposé, M. le Président, j'aimerais mentionner à cette Chambre que le gouvernement actuel était un bon gouvernement ou était possiblement un bon gouvernement. Du 15 novembre 1976 au 13 avril 1981, le gouvernement du Québec s'est contenté de donner des bonbons à la population du Québec. Depuis le 13 avril 1981, on commence à retirer les bonbons aux citoyens du Québec. La loi sur la fiscalité, adoptée en 1979, devait donner aux municipalités du Québec une autonomie dans leur propre gestion; elle devait leur donner un pouvoir de gestion à l'intérieur de l'impôt foncier municipal, impôt foncier qui venait d'être donné au gouvernement municipal, c'est-à-dire l'impôt foncier scolaire. En 1979, le ministre du temps, M. Tardif, et le ministre des Finances, M. Parizeau, informaient l'Union des municipalités du Québec qu'ils allaient, dans les années à venir, honorer à 100% les subventions que devait accorder le gouvernement aux municipalités dans le domaine du réseau de l'éducation et du réseau des affaires sociales.

Dans le discours sur le budget de M. Parizeau et dans le projet de loi no 11, on ne voit pas d'allégements ni de subventions additionnelles aux municipalités. Au contraire, M. le Président, on n'en parle pas du tout. De plus, on vient chercher en 1982 chez les municipalités 17 000 000 $ qui vont s'appliquer au Régime d'assurance-maladie du Québec pour lequel les Québécois ne reçoivent rien de plus. C'est 17 000 000 $ en 1982 et 11 000 000 $ pour les quatre prochaines années, M. le Président. Dans le même projet de loi no 11, afin d'encourager les PME - petites et moyennes entreprises -il y a une augmentation de la taxe sur le capital. Je pense, M. le Président, que, tenant compte du fait que le Régime d'assurance-maladie du Québec touche non seulement les municipalités, non seulement les commissions scolaires, non seulement le réseau social, mais touche aussi l'entreprise privée, c'est aller chercher des profits additionnels pour le gouvernement, tout en sachant que l'entreprise au Québec connaît actuellement des difficultés particulières. (11 h 30)

En ce qui concerne plus particulièrement ce dont on a parlé hier soir et ce que cela laissait dénoter de l'autre côté de la Chambre on y avait l'air de vierges offensées, M. le Président, de vierges offensées, parce qu'on osait prendre parti pour l'école privée au Québec. On s'est fait accuser de faire profiter encore une fois les riches, de faire profiter l'entreprise privée. Au contraire, M. le Président, l'enseignement privé est actuellement accessible à tous et plusieurs parents au Québec font même des efforts importants pour envoyer leurs enfants à l'école privée. Avec l'adoption du projet de loi no 11, ce qui va arriver, c'est que l'école privée va être réservée aux riches. Si c'est cela, votre social-démocratie, je pense qu'elle fait défaut actuellement, et le présent gouvernement devrait réviser ses positions, surtout si c'est simplement pour corriger certaines erreurs que le gouvernement a commises l'an dernier, quelques mois avant le référendum, alors qu'il signait une convention dans le domaine scolaire, plus particulièrement avec les enseignants. L'irresponsabilité avec laquelle le gouvernement a signé sa convention collective l'oblige aujourd'hui à couper des crédits au ministère de l'Éducation, oblige les commissions scolaires à réviser leurs positions et, dans plusieurs cas, même à fermer des écoles. Je donne comme exemple le cas du comté de Hull où, en septembre

1982, il y aura exactement trois écoles de fermées.

M. le Président, si on tient compte des engagements du gouvernement face à l'école privée... Hier soir, on mentionnait justement des engagements que le premier ministre, M. Lévesque, avait pris et qu'il ne semble pas vouloir tenir aujourd'hui, alors qu'il a été réélu le 13 avril dernier. Dans le domaine de l'éducation, je pense qu'il est relativement important de considérer que l'école privée appartient aux valeurs des Québécois, au patrimoine et qu'elle doit continuer d'être active au Québec, sans pour autant créer des problèmes particuliers et des coûts additionnels aux parents qui, actuellement, utilisent l'école privée pour toutes sortes de bonnes raisons. Je considère qu'actuellement l'école privée au Québec agit aussi comme maintien de l'équilibre à l'école publique, et c'est un facteur très important.

Le ministre des Affaires municipales nous annonçait, il y a quelques jours, que l'augmentation apportée, pour les municipalités, au Régime d'assurance-maladie du Québec de 1,5% à 3% ne créait pas de nouvelles responsabilités pour les municipalités. Je n'ai pas compris cette intervention du ministre des Affaires municipales puisque ça créera des responsabilités additionnelles de 17 000 000 $ en 1982. Dans le réseau scolaire et le réseau des affaires sociales, c'est le gouvernement lui-même qui absorbe, pour les employés, l'augmentation de 1,5% à 3%. Le gouvernement, depuis le 13 avril, semble vouloir rejeter totalement ou en quasi-totalité sa mauvaise gestion des quatre dernières années sur le dos des organismes telles les municipalités. J'ose souhaiter que l'Union des municipalités du Québec, l'Union des conseils de comté feront des représentations au gouvernement du Québec pour qu'il respecte les engagements que le ministre des Affaires municipales avait pris lors des rencontres avec le comité Québec-municipalités concernant la loi sur la fiscalité municipale, c'est-à-dire la loi 57.

Le ministre des Affaires municipales semble dire que la loi 57 a réglé tous les problèmes et tous les bobos que les municipalités du Québec ont et auront pour les prochaines années. La loi 57 a soulagé les municipalités de leur fardeau fiscal et de l'impôt foncier des citoyens, et ce pour quelques années, c'est-à-dire l'année 1980 et l'année 1981. Si le gouvernement continue d'imposer de nouveaux fardeaux par le biais de modifications à certaines de ses lois, à ce moment-là, je pense que c'est fausser le jeu, je pense que c'est rejeter sur le dos des municipalités les responsabilités du gouvernement du Québec. Plus particulièrement quand on prend connaissance d'un document important, ce rapport que le Vérificateur général déposait hier, on peut se poser énormément de questions sur la gestion que le gouvernement du Québec a donnée aux Québécois et aux Québécoises au cours des quatre dernières années. Cela m'inquiète d'autant plus, M. le Président, que l'on tente aujourd'hui de combler les trous du gouvernement en allant imposer et en utilisant les fonds publics des municipalités, les crédits des municipalités, pour les financer.

En passant, je tiens à souligner un autre point qui touche de très près la fiscalité. C'est l'assainissement des eaux. J'y ai fait allusion l'autre jour. Le ministre de l'Environnement a laissé sous-entendre que le gouvernement du Québec subventionnait 90% des coûts. Je pense que c'est faux. Nous aurons sûrement l'occasion d'y revenir dans les prochaines semaines. Mais le ministre de l'Environnement semble avoir suffisamment de difficultés actuellement à se débattre sur d'autres points.

En terminant, M. le Président, je tiens à mentionner que je suis tout à fait déçu des agissements du gouvernement, surtout au début d'une nouvelle session, au début d'un nouveau mandat, alors que les Québécois et les Québécoises ont été choyés par certaines lois au cours des quatre dernières années. Au début de ce nouveau mandat, on semble commencer à retirer plusieurs de ces privilèges. On semble vouloir imputer le coût et les responsabilités à d'autres paliers de gouvernement, entre autres, aux commissions scolaires et aux municipalités. J'ose souhaiter que le gouvernement révisera, dans les plus brefs délais ses positions étant donné qu'il ne donne plus aux Québécois et aux Québécoises l'administration qu'ils attendent de sa part.

Je trouve d'autant plus malheureux qu'on n'ait pas eu le rapport du vérificateur il y a quelques mois ou qu'on n'ait pas attendu quelques mois pour déclencher l'élection. On a caché à la population du Québec les erreurs véhiculées par le gouvernement actuel et on tente aujourd'hui de les faire avaler par les autres. Je trouve que c'est totalement malheureux. Sûrement que la transparence du gouvernement aurait besoin d'être lavée, parce que cette politique, ces engagements que le gouvernement a pris dans le passé ne sont plus transparents.

En terminant, j'ose espérer que le gouvernement va modifier sa politique en tenant compte de l'école privée et qu'il va aussi modifier sa politique en tenant compte du Régime d'assurance-maladie du Québec. Je l'ai mentionné tantôt, c'est une nouvelle taxe aux municipalités, c'est un nouveau coût aux municipalités. Les municipalités, dans leur budget de 1982, ne pourront pas se permettre d'imposer davantage leurs contribuables.

M. le Président, je vous remercie. J'ose souhaiter que, avant ce soir, avant l'heure du vote, le gouvernement pourra apporter

certains amendements à la loi telle que déposée.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missiquoi.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: M. le Président, j'ai attendu vainement que quelqu'un de l'autre côté de la Chambre manifeste son intérêt envers les coupures draconiennes dont la population est victime. Malheureusement, il semble que pendant ce deuxième mandat, ces gens du gouvernement soient plus occupés ailleurs que dans cette Assemblée à défendre les intérêts de la population.

M. le Président, nous en sommes à l'étude d'une loi très importante. Nous en sommes à l'étude du projet de loi no 11 qui s'intitule: Loi modifiant certaines dispositions législatives pour donner suite à la politique budgétaire du gouvernement pour l'exercice financier 1981-1982. Cette politique budgétaire du gouvernement va affecter chacun des Québécois et des Québécoises dans ses activités quotidiennes. (11 h 40)

Suivant les notes explicatives qu'on nous a transmises, ce projet de loi donne suite au discours sur le budget du 10 mars 1981 et contient la plupart des mesures annoncées concernant les lois suivantes - et cela n'intéresse pas les gens de l'autre côté - la Loi sur les impôts, la Loi sur les stimulants fiscaux au développement industriel, la Loi sur le remboursement d'impôts fonciers, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail, la Loi concernant l'impôt sur le tabac - je penserais que de l'autre côté, il y aurait au moins quelques protestations là-dessus - la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec et la Loi sur la fiscalité municipale et modifiant certaines dispositions législatives.

C'est là que cela devient intéressant, parce que jusqu'à maintenant il s'agit de modifications mineures et tout à fait inoffensives. Voyons maintenant ce que vise vraiment ce projet de loi. Il contient également, nous dit le ministre des Finances, certaines mesures annoncées dans la déclaration ministérielle du ministre des Finances du 12 décembre 1980, relativement à la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail ainsi que des modifications à la Loi sur l'enseignement privé et la Loi sur l'aide sociale.

Donc, on modifie substantiellement des lois qui touchent le domaine de l'éducation et le domaine de l'aide sociale au Québec à travers un discours sur le budget. Le ministre des Finances a été suffisamment conscient de l'importance de ces modifications pour donner, à l'occasion de l'introduction de cette loi en Chambre, un droit de parole privilégié, pour céder son droit de parole au ministre de l'Éducation. Cela fait des années, cela fait maintenant cinq ans que ce gouvernement nous promet une politique de l'éducation. Son ministre de l'Éducation ayant abdiqué ses responsabilités, c'est le ministre des Finances qui nous en fournit une politique de l'éducation. Quelle est-elle cette politique de l'éducation qui est contenue dans le projet de loi no 11?

Comme toutes les politiques de ce gouvernement c'est une politique de division. Après avoir divisé dans cette province les anglophones et les francophones, après avoir divisé les locateurs et les locataires, après avoir divisé les employés et les employeurs, on tente maintenant de diviser, à l'intérieur du système scolaire, les institutions privées et les institutions publiques. On n'a pas compris que francophones comme anglophones comme allophones sont tous des Québécois. On n'a pas compris que les locateurs et les locataires sont tous des gens qui doivent bénéficier d'une politique d'habitation saine pour l'ensemble. On n'a pas compris qu'employeurs et employés sont les générateurs de notre économie, ceux qui nous permettent de vivre et de manger tous les jours. On n'a pas compris non plus de l'autre côté de la Chambre qu'au niveau éducation, qu'un enfant soit dans le système scolaire qu'on appelle privé, mais qu'on qualifie également d'intérêt public, ou qu'il soit dans le système public, il est cette matière première dont le Québec a besoin pour justement assurer son resplendissement dans les années qui vont venir. C'est cette matière première qui va bâtir le Québec.

Non, au lieu de tenter d'améliorer ce système scolaire, au lieu de tenter d'analyser au mérite le système scolaire du Québec, on tente plutôt de le diviser. On coupe partout, on coupe le secteur public, on coupe le secteur privé. Là, on dit: Oui, mais les gens de l'Opposition, qu'est-ce que vous avez? Vous vous opposez strictement aux coupures dans le système privé. Pour qu'on se comprenne un peu mieux, et on comprendra peut-être le premier ministre, on va essayer d'analyser ces coupures. Les coupures dans le secteur privé et les coupures dans le secteur public, c'est un peu comme si on disait au ministre des Finances, M. Parizeau: On va vous mettre au régime, on va vous enlever 50 livres. Il y a peut-être des gens qui nous diraient: Vous coupez dans le gras. Les coupures dans le secteur privé, c'est un peu comme si on prenait le président du Conseil du trésor, M. Bérubé, et qu'on lui disait: On va vous enlever 100 livres. Il y a des gens, de l'autre côté, qui penseraient qu'on se propose d'assassiner littéralement, de détruire, d'anéantir le président du Conseil du trésor.

M. le Président, je vous soumets que

certaines coupures effectuées dans le domaine de l'éducation sont des coupures qui, effectivement, ont été effectuées dans le gras. Ce que l'Opposition dénonce, ce sont les coupures qui sont effectuées dans des parties vitales de notre système, des coupures qui vont faire en sorte que les parents de mon comté, le comté de Brome-Missisquoi, comme d'autres comtés, qui réussissent, à titre de travailleurs, à titre de salariés, salariés syndiqués dans certains cas, à envoyer leurs enfants dans des écoles privées au même titre que les médecins, les ministres, les adjoints parlementaires, ces parents-là qui réussissent, à force de sacrifices, à envoyer leurs enfants dans ces institutions privées, n'y auront plus l'accès.

Ce que le gouvernement tente de faire, c'est de créer des collèges privés que seulement une classe d'élite, une classe qui est issue de parents qui sont plus fortunés, pourra fréquenter. Ce que l'Opposition réclame, M. le Président, c'est un statut égal pour le domaine privé et pour le domaine public, pour que tous et chacun des Québécois puissent choisir d'envoyer leurs enfants dans le système de leur choix. On demande au gouvernement d'avoir confiance dans le jugement des parents. Est-ce trop vous demander que d'avoir confiance dans le jugement des parents du Québec ou si vous tenez à tout prix à réserver l'école privée à une élite? Peut-être que vous vous proposez de rester au gouvernement assez longtemps pour que seuls les enfants des ministres aillent là. Mais moi, je veux que mes enfants y allent aussi et je veux que les enfants des travailleurs du comté de Brome-Missisquoi et du reste de la province puissent y avoir accès, si c'est mon choix et si c'est le choix de ces parents. C'est cela qu'on vous demande.

Il y a pire, M. le Président, parce que ce n'est pas pour des raisons d'économie qu'on nous présente un tel projet de loi. Si les députés d'en face s'étaient attardés à vérifier ce que coûte l'enseignement à un enfant dans une institution privée ou dans une institution publique, ils auraient découvert qu'au niveau collégial général, le coût moyen annuel d'un étudiant au secteur public est de 4400 $, que le coût moyen d'un étudiant au secteur privé est de 2680 $. Donc, au collégial, il y a une différence de 39,1%, M. le député de Rosemont. Au secondaire, le coût est de 3600 $ au secteur public et 2100 $ au secteur privé, une différence de 41%; au primaire, 2400 $ au secteur public et 1145 $ au secteur privé, une différence de 40,8%. Au bout de tout cela, pas de trou de 500 000 000 $. Qu'est-ce qu'on a à reprocher à ces gens-là qui administrent le secteur privé? Finalement, la différence entre le secteur privé et le secteur public, c'est tout simplement un mode d'incorporation, c'est tout simplement un mode de gestion. Ce qui est important au niveau gouvernemental - et c'est le rôle de tous les députés qui ont été élus en cette Chambre - c'est d'assurer que tous les citoyens du Québec aient le libre choix entre ces institutions.

Mais ce que les parlementaires de l'autre côté de la Chambre n'ont pas compris, c'est que ce projet de loi va vraiment dans ce qu'il y a à peu près de plus atroce dans notre société. Pour un gouvernement qui était censé avoir un préjugé favorable envers les plus démunis, qu'est-ce qu'il a fait ou qu'est-ce qu'il tente de faire avec ce projet de loi? II tente tout simplement de fermer onze institutions privées spécialisées en enfance inadaptée. Est-ce qu'il y a des citoyens qui ont plus besoin de notre protection pour cette Chambre que cette enfance inadaptée? Lorsque vous voterez sur ce projet de loi, je veux que vous pensiez, vous, les députés de l'autre côté de la Chambre, à ce que vous faites. (11 h 50)

Ces institutions privées, est-ce que vous vous êtes interrogés sur les raisons pour lesquelles elles existaient et fonctionnaient dans notre société et demandé d'où venaient les enfants qui fréquentaient ces institutions pour l'enfance inadaptée. Ils viennent de tous les milieux, messieurs de l'autre côté de la Chambre, et ils sont référés à ces institutions privées pour l'enfance inadaptée par une foule de gens: premièrement, par nos commissions scolaires publiques qui sont incapables de dispenser les services spécialisés requis par ces enfants; ils sont référés aussi par des hôpitaux; ils sont référés par nos directeurs de la protection de la jeunesse; ils sont référés par nos travailleurs sociaux; ils sont référés par nos centres de services sociaux.

Vous aurez à voter pour assurer l'abolition de ces onze centres de services pour l'enfance inadaptée. À ce moment-là, je vais surveiller attentivement la réaction des députés de l'autre côté, des régions de l'Estrie et de la rive sud. Surtout mes voisins. Je vais surveiller très attentivement les votes du député de Shefford et du député d'Iberville. Je vais voir quelle réponse ils vont donner à ces milliers de parents des comtés avoisinants et de mon comté qui nous ont adressé une lettre commune; ils vont voir d'où vient l'action, finalement, lorsque l'intérêt de la population compte et qu'on coupe dans le vif.

Ces parents ont adressé une lettre à Jacques Beauséjour, comté d'Iberville, Pierre Paradis, comté de Brome-Missisquoi, et Roger Paré, comté de Shefford. Ils ont tout simplement procédé par ordre alphabétique, c'était apolitique. Et puis, ils ont attiré l'attention des députés dans cette Chambre sur les points suivants. Ils ont dit que le

secteur privé accepte, comme tes autres secteurs, de supporter les coupures budgétaires nécessaires. On ne peut pas les accuser d'être des irresponsables, comme on pourra peut-être le faire, si ce gouvernement adopte cette loi, pour ceux qui voteront pour.

Ils ont également mentionné dans cette lettre: Nous ne voulons pas être coupés plus que les autres car cela nous empêcherait de survivre. Ce qu'ils ont demandé, c'est que les coupures, qui s'appliquent finalement au secteur public, soient les mêmes coupures qui s'appliquent au secteur privé, de façon que ce ne soit pas le gouvernement qui choisisse pour les parents et pour les enfants quel régime d'éducation ils auront mais que ce soient les parents de la province de Québec qui puissent choisir pour leurs enfants.

Ils ont ajouté: Nous acceptons mal le fait que le ministre se serve de la conjoncture actuelle pour changer les règles du jeu et ce, sans consulter les institutions impliquées. Les ministériels vont nous répondre: II va y avoir consultation. Oui, une heure et demie de consultation quand il s'agit de l'avenir des enfants de l'ensemble de la population du Québec. On est gâté par ce bon gouvernement! Une heure et demie de consultation sur l'avenir de mon enfant, sur l'avenir de vos enfants, messieurs, de l'autre côté de la Chambre, et sur l'avenir des enfants de tous ceux qui nous ont élus ici. Je pense que l'éclairage qui sera apporté par ces gens, par l'attitude que vous allez adopter dans le dossier de l'éducation, va faire en sorte que, la prochaine fois que vous vous présenterez devant eux, ils auront peut-être un jugement sévère à porter.

Vous n'avez pas besoin de réserver les écoles privées à des classes d'élite si vous voulez abolir les institutions privées au Québec. Vous n'avez pas besoin de procéder par étapes comme vous le faites dans beaucoup de dossiers; annoncez donc aujourd'hui que vous ne voulez qu'un seul système d'éducation au Québec. Si c'est ce que vous pensez, si c'est ce que vous préconisez de l'autre côté de la Chambre, levez-vous et dites-le: II n'est plus question de subventionner du tout le secteur privé d'intérêt public. Avez-vous le courage de vos opinions, de l'autre côté de la Chambre? À ce moment-là, on saura que vous voulez un seul système, que vous avez peur qu'avec deux systèmes, il y ait une certaine émulation qui fasse en sorte que l'éducation progresse, que l'éducation avance, que l'éducation se dirige vers ce degré d'excellence qui, seul, va pouvoir permettre a nos enfants de devenir des citoyens à part entière et de bâtir un Québec dont on rêve tous dans cette Assemblée nationale.

Ayez le courage de vos convictions et dites: On ne veut plus du secteur privé. Mais ne venez pas, dans cette Chambre, dire à la population du Québec que vous voulez un secteur privé strictement pour les élites, strictement pour vos petits amis bourgeois parce qu'à ce moment-là, du côté de l'Opposition, on va se lever et on va réclamer la possibilité pour les parents de choisir ce qu'ils jugent être le meilleur système pour leur enfant.

En terminant, avant qu'on condamne à mort le système privé et les écoles qui accueillent de jeunes inadaptés, j'aimerais rappeler à cette Chambre que la mort d'une école jugée mauvaise n'a rien d'une tragédie, mais la mort d'une école jugée bonne appauvrit au contraire le système dans son ensemble. À cet égard, ceux de l'autre côté de la Chambre qui décréteront la disparition de bonnes écoles signeront du même coup la mort de l'école tout court et auront à vivre avec les conséquences. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Arthabaska.

M. Jacques Baril

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, il y a bientôt cinq heures que nous discutons ici du projet de loi no 11, ce projet de loi qui a différentes incidences financières sur divers ministères. Ce projet de loi est la suite réaliste du discours sur le budget prononcé en cette même Chambre au mois de mars. Ce discours sur le budget qui a été annoncé au mois de mars dernier avait été jugé par la majorité des commentateurs, comme un budget réaliste, un budget prudent dans les circonstances actuelles. C'est évident que nous-mêmes aurions préféré avoir une marge de manoeuvre assez large pour ne faire aucune coupure dans aucun ministère et même augmenter considérablement les services ou l'aide, que ce soit aux municipalités, aux entreprises ou aux individus. Mais, si nous en sommes rendus là, si nous sommes obligés d'imposer certaines restrictions, c'est à cause d'abord des conséquences d'une administration qui nous a précédés, d'une administration qui a été juqée par la population en 1976, dont nous avons fait mention à plusieurs reprises ici dans cette Chambre.

Le ministre des Finances, a fait allusion ce matin encore en parlant de l'administration du Parti libéral, des années avant 1976, qui nous avait laissé un déficit de 5 000 000 000 $ à 6 000 000 000 $ dans les fonds de retraite administrés par le gouvernement. C'est quand même quelque chose, 5 000 000 000 $ à 6 000 000 000 $ dans seulement un domaine. Il y avait également 400 000 000 $ à 500 000 000 $ qui manquaient au niveau des commissions scolaires, mais que ces gens ne déclaraient pas, parce qu'on considérait cette somme

comme des comptes à percevoir. Donc, cela ne faisait pas un trou. Également, on pourrait ajouter les Jeux olympiques et tout le coulage de fonds qu'il y avait dans l'administration gouvernementale comme telle. Également, il faut regarder les conséquences des politiques du gouvernement fédéral depuis quelques années face aux provinces et, entre autres, face au Québec.

On nous annonçait, tout à l'heure, en parlant du député de Beauce-Sud au niveau de l'agriculture, qu'il y avait des coupures rigoureuses de l'aide à la main-d'oeuvre agricole. Quant au programme d'aide à la main-d'oeuvre agricole, cette année, les seules restrictions qui ont été imposées, c'est que les personnes bénéficiant actuellement de l'assurance-chômage ne sont plus admissibles à l'aide à la main-d'oeuvre agricole. Pourquoi ne sont-elles plus admissibles? C'est évident qu'avec nos propres moyens, il faut toujours se souvenir que dans les circonstances actuelles, les Québécois et les Québécoises envoient encore à Ottawa 50% de leurs taxes et de leurs impôts. (12 heures)

Sur ce point, l'aide à la main-d'oeuvre agricole, en embauchant un chômeur, il est évident qu'on enlève un fardeau au gouvernement fédéral et que ce sont les Québécois et les Québécoises qui en prennent la responsabilité. J'invite les agriculteurs à oublier cette vieille mentalité disant qu'un assisté social, ce n'est pas un bon travailleur, ce n'est pas une personne fiable, c'est un gars qui ne veut pas travailler, parce que avec les coupures que le gouvernement fédéral fait dans l'assurance-chômage, beaucoup d'anciens chômeurs se retrouvent des assistés sociaux. Donc, le mythe qui dit que les assistés sociaux ne veulent pas travailler, il faudrait l'ajouter également aux chômeurs parce que, de plus en plus, il y a des anciens ou des exchômeurs ou des personnes qui bénéficiaient de l'assurance-chômage qui n'y sont plus admissibles à cause des restrictions budgétaires du gouvernement fédéral et ces personnes tombent sous la responsabilité des Québécois.

On parlait également de coupures draconiennes au niveau des politiques du drainage des travaux mécanisés. C'est complètement faux. Il n'y a aucune coupure au niveau de ces deux programmes. Ces deux programmes existent tels qu'ils étaient les années précédentes. Il faut dire également que le gouvernement fédéral, dans le domaine des pêcheries, s'est pratiquement retiré de l'aide à la construction de notre flotte de pêche. Avant, le gouvernement fédéral finançait à 35% le coût de construction de nos bateaux de pêche; il a diminué cette participation à 15% et on ne sait pas, d'un mois à l'autre, s'il ne se retirera pas complètement. Malgré cela, les citoyens et citoyennes n'ont eu aucune diminution d'impôt, de taxes d'Ottawa. Pourtant, nous sommes obligés de payer plus cher.

Une autre preuve: au niveau du nouveau programme d'aide aux producteurs de porc annoncé dernièrement par le gouvernement fédéral, on accuse le gouvernement du Québec de ne pas accorder assez aux producteurs de porc, mais c'est évident que nous avons un choix à faire. Avec le programme annoncé par le ministre Whelan, le ministre de l'Agriculture au fédéral, plus le Québec donnera, moins Ottawa donnera. Donc, encore une fois, cela nous coûtera encore plus cher.

L'an dernier, il y a eu 76 000 000 $ de prêtés aux agriculteurs québécois par le biais de la Société du crédit agricole à un taux d'intérêt d'environ 14,75%. Sur ces 14,75%, on sait que le gouvernement du Québec compense pour les premiers 150 000 $ le remboursement du taux d'intérêt entre 8% et 14%. L'Office du crédit agricole du Québec a prêté à lui seul 500 000 000 $ l'an dernier à un taux de 8%. Avec l'augmentation du taux d'intérêt que nous connaissons actuellement, ce programme va coûter cette année environ 100 000 000 $ au gouvernement du Québec. Que fait Ottawa là-dedans? Il ne fait rien. Nos impôts et nos taxes restent toujours les mêmes quand ils n'augmentent pas. L'agriculture est le secteur économique le plus important, où il y a eu le plus d'investissements. C'est celui qui crée le plus d'emplois.

Il y avait un programme l'an dernier, une entente fédérale-provinciale sur le programme d'aide aux équipements communautaires. C'est un programme qui fut très populaire. Plusieurs municipalités ont bénéficié de ce programme pour améliorer leur bâtisse à intérêt communautaire. On sait que, vers la fin de l'année dernière, le gouvernement fédéral a encore annoncé dans ce même programme qu'il se retirait complètement. Donc, c'est un autre programme qui est coupé et, seul encore, le Québec doit assumer ses responsabilités en ayant toujours seulement la moitié de ses moyens financiers.

Il y a un autre dossier qui traîne depuis bientôt trois ans et c'est la décision du gouvernement fédéral de couper la construction du chantier La Prade à Gentilly. C'est un dossier qu'on nous dit bien politique. C'est un dossier qui a été mené au début par le ministre de l'injustice... excusez! le ministre fédéral de la Justice avec les conséquences qu'on connaît pour toute la région 04: nous avons perdu 1500 emplois dans le domaine de la construction et 450 emplois permanents qui auraient pu être assurés lors de l'étape

finale de ce projet, de ce dossier.

Pourtant, différents intervenants ont contesté cette décision du fédéral de couper ce projet, mais, ce qui me surprend toujours, chaque fois que le fédéral effectue des coupures, c'est que, dans la population, la contestation n'est pas aussi forte que lorsque c'est le gouvernement du Québec qui coupe quelque chose. Dans mon comté, comme dans toute la région 04, la coupure dans le projet de La Prade a eu des conséquences économiques extraordinaires en créant du chômage pour des périodes indéfinies pour les personnes qui travaillaient là et qui espéraient faire partie des 450 postes permanents que ce chantier devait créer lors de l'étape finale, après sa construction, pour le fonctionnement.

On se lance la balle continuellement, on nous dit que le Québec n'a pas de projet à présenter pour récupérer les 200 000 000 $ qui nous seraient alloués selon une entente qui a été signée, et ça fait trois ans que ce dossier traîne en longueur et pourrit. J'ose croire que nous pourrons arriver à un règlement final dans l'intérêt des Québécois et des Québécoises au cours des semaines qui viendront.

Il y avait un autre dossier sur lequel on dit que le gouvernement fédéral se penche -il doit être rendu pas mal bas - c'est celui concernant les ententes avec les autres pays pour l'importation du textile. On sait que tout le domaine du textile connaît actuellement une période difficile. Le gouvernement du Québec a un programme d'investissements pour la modernisation de nos entreprises, mais, encore là, si le fédéral ne renouvelle pas les ententes avec les autres pays, ce qui aurait comme conséquence que le textile entrerait au Canada comme n'importe qui peut entrer dans une grange, toutes nos politiques de modernisation, toutes les sommes que le gouvernement du Québec aurait investies dans ce programme ce serait à peu près comme jeter de l'argent à l'eau.

Il faut se souvenir également, de la chicane qu'il y avait eu lors de l'abolition de la taxe de vente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement d'Ottawa. On retrouve encore ici ce défenseur des Canadiens français, ce cher M. Chrétien, ministre fédéral de la Justice qui, pour essayer de sauver la face, a décidé d'envoyer à chaque Québécois qui avait déjà payé de l'impôt une somme de 85 $, ce qui veut dire que les personnes moins nanties et qui ne paient pas d'impôt n'ont pas bénéficié de ces 85 $. Cela a eu comme conséquence un manque à gagner pour le gouvernement du Québec d'environ 200 000 000 t.

Avec l'augmentation du taux d'intérêt, qui est maintenant de plus de 20% et le fédéral ne semble avoir aucune tentation de remédier à la situation - c'est évident que les investissements ont diminué de beaucoup. Je connais chez moi plusieurs industriels et hommes d'affaires, que j'approuve, d'ailleurs, qui retardent à faire leurs investissements parce que, vous savez, quelqu'un qui investit 200 000 000 $ à 20% d'intérêt, ça fait 40 000 $ à rembourser avant que ça lui rapporte 0,01 $ et avant d'avoir diminué son capital. Donc, c'est évident que la rentabilité de l'entreprise est mise en cause, et je sais que, ces jours-ci, deux ministres fédéraux rencontrent les banques pour connaître les conséquences que cela peut avoir pour les PME, ils semblent encore l'ignorer. (12 h 10)

Au niveau de l'augmentation du coût du pétrole, c'est un peu extraordinaire de voir que le gouvernement de M. Clark avait été remercié, dénoncé par le Parti libéral fédéral, parce qu'il s'était engagé à augmenter d'environ 0,18 $, pas plus que 0,18 $, le prix du pétrole pour la première année. Il y a un peu plus d'un an que le gouvernement de M. Trudeau est retourné au pouvoir et nous en sommes rendus à subir une hausse du pétrole de plus de 0,50 $ le gallon. Pourtant, à 0,18 $, on a renversé l'autre, c'était pratiquement la fin du monde; maintenant, tout le monde va à la pompe, paie et tu n'entends pratiquement pas de mécontentement. Les gens parlent entre eux, mais il n'y a pas de mouvement de contestation.

Donc, on s'en va au niveau fédéral. Il ne semble y avoir aucune planification avec des retombées désastreuses sur les provinces et ça va un peu à la va-comme-je-te-pousse; l'augmentation du coût des transports, il est évident qu'il y a une grande répercussion au niveau des transports, au niveau du chauffage de différentes bâtisses, et tout ça n'est rien pour aider à remonter l'économie du Québec. Avec les moyens financiers, toujours la moitié des moyens financiers dont le Québec dispose, nous essayons d'aider les industries de différentes façons et d'aider les citoyens en gardant ici, au Québec, une politique sociale, une politique économique à la hauteur, au moins, de nos besoins.

Il est évident que ce n'est pas en finançant ou en aidant au financement de Massey-Ferguson que le gouvernement fédéral va remonter l'économie. Une autre chose qui est un peu surprenante, c'est que le seul pays qui a osé aider Massey-Ferguson, c'est le gouvernement du Canada. Quand on sait que seulement 17% de la main-d'oeuvre de Massey-Ferguson travaille au Canada, le Canada a cru bon d'aider cette multinationale qui est implantée dans tous les pays du monde et qu'aucun pays n'a voulu aider financièrement. De bon gré, le gouvernement fédéral a décidé de l'aider parce que cette pauvre est établie en Ontario.

Ottawa nous annonce actuellement que, pour diminuer son déficit d'environ

15 000 000 000 $, il doit absolument couper dans les montants qui sont retournés aux provinces. Si on recule un peu, au 20 mai 1980, souvenons-nous de toute cette publicité qu'on a faite lors du référendum. On appelait ça la péréquation. Comme c'était avantageux de rester dans ce beau grand pays, avec les sommes d'argent qui nous revenaient en tant que Canadiensi Bien, voilà que ces sommes, qui ont toujours été dénoncées d'ailleurs de ce côté-ci de la Chambre, voilà que ces sommes diminuent maintenant de plus en plus et, sur les prochaines ententes qu'il y aura, le gouvernement fédéral veut couper 1 500 000 000 $ pour les deux prochaines années. Il ne parle absolument pas ici de diminuer les impôts, de diminuer les taxes. Mais il va encore couper les revenus des provinces et le Québec souffrira encore d'un manque à gagner d'environ 1 500 000 000 $.

Les raisons pour lesquelles le fédéral coupe ce revenu qui nous est dû, parce que ce sont nos taxes et nos impôts qui vont là, c'est parce qu'à son dire, à l'intérieur des programmes à participation financière, le gouvernement central ne tire aucun profit politique, parce que c'est de l'argent administré par le gouvernement du Québec et que nous en disposons selon des ententes, selon des programmes qui sont donnés. Mais il est évident que le gouvernement fédéral, lors de la construction ou lors de l'émission des chèques, ne met pas le petit drapeau à feuille d'érable dans le coin gauche.

Donc, il est évident qu'ils se soucient toujours plus de l'intérêt politique que de l'intérêt économique du Québec. Vous savez, depuis toujours, Ottawa enlève des pouvoirs législatifs, enlève des pouvoirs financiers et on s'apprête maintenant, avec le rapatriement unilatéral de la constitution, à enlever à peu près tous les pouvoirs qui appartenaient jadis aux gouvernements des provinces. Au printemps 1980, le peuple québécois a manqué une belle occasion d'affirmer son mécontentement au fédéral et, comme je l'ai toujours dit, la colère gronde maintenant beaucoup plus dans l'Ouest que dans l'Est, parce qu'il y a au moins une chose que j'ai apprise des provinces anglophones, c'est que, lorsqu'elles en ont un pouce, n'allons pas leur en enlever une ligne, parce que c'est à elles et c'est acquis. Nous, les gens du Québec, les Québécois et Québécoises, avons toujours été habitués - on est modérateur - de plier, d'en céder un peu et d'en concéder un peu. Dans toute l'histoire, ce sont toujours les anglophones, ici au Canada, qui ont devancé les francophones. Ce sont toujours eux qui nous ont tracé le chemin.

Encore une fois, dans ce même dossier du rapatriement de la constitution, vous verrez si je n'ai pas raison, ce seront encore les anglophones - je suis fier pour eux, je le dis - qui nous montreront à nous,

Québécois... qui nous feront regretter le geste que nous avons posé le 20 mai. Dans l'Ouest, actuellement, il y a un mouvement indépendantiste qui grandit de plus en plus. Probablement, que les provinces de l'Ouest se dissocieront de cette Confédération avant le Québec.

En terminant, M. le Président, j'aimerais dire que si au moins ces restrictions budgétaires pouvaient servir à revaloriser l'efficacité des travailleurs parce que dans le contexte actuel, nous étions habitués à un laisser-aller au niveau des travailleurs, au niveau des cadres, au niveau des personnes dirigeantes - pouvaient nous permettre de se redéfinir en tant que citoyens et de participer au nouveau mode de fonctionnement qui nous attend dans les années à venir, ce serait déjà une grande étape de franchie. Il fallait avoir le courage de le faire, et c'est encore le gouvernement du Parti québécois qui en a eu le courage. Nous appliquons ce qui avait été annoncé dans le discours sur le budget et aujourd'hui, nous le concrétisons dans une loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Maskinongé.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, on trouve que les applaudissements ne sont pas forts, c'est que nous, nous attendons que les gens aient quelque chose à dire et qu'ils l'aient dit pour applaudir, non pas avant qu'ils soient vides de sens, comme certains discours que nous entendons.

M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): ...provocation.

M. Picotte: Les mélodies à saveur western du député d'Arthabaska ne sont sans doute guère intéressantes à écouter de la part des milliers d'auditeurs qui auront ou qui ont dû entendre en direct son discours. Cet important discours fort érudit et fort recherché du député d'Arthabaska prouve hors de tout doute qu'il s'agit bien d'un bill omnibus.

Lorsqu'on regarde le projet de loi que nous avons à étudier, le projet de loi no 11, force nous est donnée de reconnaître la marque de commerce de ce gouvernement qui, depuis son accession au pouvoir, a réussi à camoufler les vrais problèmes en les enrobant de toutes sortes d'autres mesures, mesures qui, dans certains cas, sont anodines, mais qui, par la suite, lorsque le projet de loi est adopté, y ont caché des choses fort importantes pour l'avenir.

Il s'agit - des gens l'ont dit avant moi - de la Loi modifiant certaines dispositions législatives pour donner suite à la politique

budgétaire du gouvernement pour l'exercice 1981-1982. Comme titre, ce n'est vraiment pas impressionnant et cela ne semble pas dommageable non plus. Vous savez que le ministre des Finances légifère à l'Assemblée nationale quelques mois après avoir annoncé qu'il y a eu une augmentation de taxes sur les cigarettes. Tout le monde en cette Chambre trouve cela normal qu'on légifère là-dessus et qu'on inscrive à l'intérieur d'un projet de loi cette hausse de taxe. (12 h 20)

Que le ministre des Finances nous dise qu'il s'agit tout simplement de rendre légale la loi sur le remboursement d'impôts fonciers, encore là, il n'y a pas tellement de problème. Cela a été annoncé dans le discours sur le budget. La Loi concernant l'impôt sur la vente en détail, c'est la même chose. Mais il ne faut pas que les gens s'y méprennent parce que, dans ce projet de loi, il y a beaucoup d'autres choses qui nous invitent à dire à cette population: Voici ce que va donner comme résultat l'adoption de ce projet de loi qui paraît inoffensif, mais qui, en réalité, dans six mois, huit mois, un an, va démontrer hors de tout doute qu'on est embarqué dans un engrenage qui va faire en sorte que vont disparaître certaines choses non pas au bout de six mois et de huit mois, mais au bout de quatre ou cinq ans.

Ces choses-là sont appelées à disparaître ou devront disparaître obligatoirement parce qu'on aura adopté une mesure, il y a trois ou quatre ans, à cette Assemblée nationale, et on l'aura adoptée bien innocemment. Cela arrive tellement souvent. Plusieurs de mes collègues, des deux côtés de la Chambre, seront d'accord avec moi. Combien de fois sommes-nous appelés à faire du bureau de comté et, pour ceux qui en font - vous-même, parce que vous êtes dans ma région - à profusion et qui reçoivent bien leurs électeurs, combien de fois sommes-nous confrontés à des problèmes? On dit: Regarde donc cela, la loi qu'on a adopté fait en sorte que ces citoyens-là sont lésés. On dit: Ce n'est pas cela qu'on avait dans l'esprit quand on a adoptée la loi. C'était caché dans le projet de loi et on n'a pas vu cela parce que, évidemment, on a une foule de projets de loi à voter. Les nouveaux voient cela depuis qu'ils sont entrés à l'Assemblée nationale; c'est à profusion, de 10 heures à minuit, qu'on vote des lois.

Vous savez que c'est quand même un genre de mini-session dans le sens qu'elle est courte et qu'on adopte seulement l'essentiel, mais attendez l'automne, où on aura des dizaines de projets de loi et que cela défoulera. On va voter ces projets de loi tellement rapidement, M. le Président, et tellement innocemment, dans certains cas, que dans deux ans des citoyens viendront nous dire: Voici, la loi que vous avez votée nous a donné cela. Ce n'est pas cela qu'on voulait comme législature. On efface. Je ne sais pas si c'est sciemment ou inconsciemment-et je ne veux prêter d'intention à personne - mais je vous dis que, face à ce projet de loi, il y a des dangers et je vais vous en énumérer.

Commençons par les coupures budgétaires dans le secteur public, puisque cela fait plus plaisir à nos amis d'en face de parler du secteur public; ensuite, on pourra parler du secteur privé d'intérêt public. Il est aussi important de dire qu'il y a un secteur privé d'intérêt public. Mais parlons du secteur public.

Le gouvernement a décidé - c'était son choix - de procéder à des coupures budgétaires dans deux domaines précis qui s'appellent la santé des citoyens et l'éducation des enfants de ces mêmes citoyens. C'était un choix politique de procéder de cette façon et je ne le discute pas. Le ministre des Finances a le droit de procéder comme il l'entend. Intelligemment parlant, les ministères concernés, le ministère des Affaires sociales et le ministère de l'Éducation, sont les deux ministères qui ramassent, qui aspirent - pour prendre l'exemple du leader du gouvernement avec sa balayeuse - le plus de deniers, les deniers principaux de tout l'ensemble budgétaire du gouvernement, et il est bien évident qu'on ne peut pas procéder à des coupures sans toucher au ministère des Affaires sociales et au ministère de l'Éducation. Mais vous savez, il y a plusieurs façons de couper dans un budget. Un individu peut couper dans son panier de provisions, pour autant qu'il coupe les choses les moins intéressantes, les moins dommageables à sa survie et à la survie de sa famille; c'est officiel. Le gouvernement, le ministre des Finances peut faire exactement la même chose. Est-ce qu'il doit couper dans les services de nos enfants à l'école? J'imagine que non. Pour avoir vécu et travaillé à l'intérieur d'écoles polyvalentes au Québec, je peux vous dire qu'il y a bien autre chose à couper au niveau du ministère de l'Éducation que les services à nos enfants. Je peux vous dire cela. Il y a une foule de dépenses inutiles, il y a une foule de dépenses qui, si elles ne sont pas inutiles, peuvent être enrayées momentanément ou sur une période X pour aider à la compression des dépenses budgétaires sans affecter l'éducation de mon enfant et de vos enfants.

Oui, ce sont des commissions scolaires et c'est très facile, de la façon que vous gérez, avec le "tordage" de bras que vous faites depuis que vous êtes au pouvoir, de rencontrer les commissions scolaires. Le ministre des Finances est un gars qui a beaucoup de responsabilités et qui donne des ordres sévères comme il en a donné dans le

passé. C'est facile. Il dit aux commissions scolaires: C'est maintenant ça, point final, à la ligne. C'est comme cela qu'il a fait avec son premier ministre au sujet du président du Conseil du trésor. Ce ne sera pas ça, René, ça sera ça. S'il est capable de faire ça avec son premier ministre, il devrait être capable de le faire avec les commissions scolaires du Québec.

Là, on va couper une foule de dépenses on en serait surpris - sans toucher nécessairement à l'éducation ou aux services offerts à nos enfants. Dans les affaires sociales, c'est sensiblement la même chose, quand on regarde cela objectivement. Il y a une foule de choses qu'on peut couper au niveau des hôpitaux, dans l'administration. Oui, dans l'administration. C'est du parapublic et il suffit que le ministre des Finances se foute le nez là-dedans comme il se fout le nez dans toutes les poches du citoyen depuis qu'il est là en disant: C'est ça. Quand on le fait pour le citoyen, on ne lui donne pas de choix. On le fait et ça vient de s'éteindre. Qu'on le fasse aussi pour le parapublic, pour les administrations parapubliques; c'est aussi simple que ça.

Le ministre des Finances, ce grand gars de la finance, du temps qu'il conseillait les autres gouvernements, n'avait aucune solution. Maintenant, il est capable de faire tourner la terre dans sa petite poche depuis qu'il est ministre des Finances; il devrait avoir les pouvoirs de le faire, j'imagine. Ce grand financier, ce grand gérant des finances publiques aurait les moyens de faire cela.

Il y aurait moyen aussi... Il me semble que ce serait bon comme saveur auprès des citoyens si on disait: On va maintenant couper du côté de tout ce qui s'appelle la publicité du gouvernement. Vous allez dire: C'est tellement minime dans le budget de la province. Écoutez, 3 000 000 $ ou 4 000 000 $ ici, 5 000 000 $ ou 6 000 000 $ là... Quand j'ai décidé de couper dans mon budget personnel au sujet de l'épicerie, si j'ai coupé tel d'article, même si c'est seulement 0,38 $, j'ai déjà effectué une coupure qui me permettra d'être plus à l'aise. Je ne peux pas couper seulement sur les choses que j'achète et qui coûtent 5 $ et plus, il faut que je coupe des choses...

Qu'on coupe, qu'on coupe encore une fois des choses comme il ne faut pas se faire avoir" et autres du genre. Si on procédait à des coupures là-dedans, quelques millions ici et quelques millions là en services de moins, on serait peut-être surpris, on n'aurait peut-être pas besoin de procéder à ce qu'on fait présentement, à la Régionale des Vieilles Forges. C'est malheureux, mais c'est vrai que mon ami le député de Trois-Rivières est fort affairé de ce temps-là à la revalorisation du rôle du député, et je l'en félicite. C'est sûrement un travail plus accaparant que celui qu'il effectuait avant les élections de 1976. Tout le monde a hâte d'en connaître l'issue et tout le monde veut aussi collaborer avec le député de Trois-Rivières. Je lui offre donc mes meilleurs voeux. (12 h 30)

Le député de Trois-Rivières aurait peut-être le temps, malgré ses nombreux travaux, de venir dire à cette Chambre que les coupures annoncées par M. Parizeau, le ministre des Finances, qui a dit qu'elles ne dépasseront pas 3% et 4% et, dans certains cas, 7% et 8%... Il faudrait, par exemple, qu'on dise que, dans la régionale des Vieilles-Forges vous allez dire que je parle de la régionale où les étudiants, où les enfants de mes électeurs vont à l'école - dans la régionale des Vieilles-Forges, entre autres, les coupures chez les enseignants, c'est 20%. Pas 3% et 4% comme peuvent le laisser prévoir ou peuvent le laisser dire certaines personnes dans cette Chambre; 20%. Ce n'est pas 20% coupé sur du tapis ou bien sur certaines choses qui sont du mobilier à l'intérieur d'une école polyvalente, c'est sur les enseignants. C'est du personnel directement affecté à l'éducation de mon enfant et des vôtres. 20%, M. le Président, pour les employés du service public, soutien scolaire, qu'on appelle. L'Association des professionnels non enseignants du Québec, c'est quand même assez important d'avoir des professionnels à l'intérieur de nos polyvalentes, là, on coupe chez nous seulement de 47%; c'est-à-dire que je vous dis tout de suite que, quand on parle de 4%, déplacez le point, ajoutez un 7, cela fait 47%. Le député de Trois-Rivières... J'allais dire encore le ministre des Affaires culturelles. Mon Dieu parfois, chassez le naturel et il revient au galop, que, quand je vois la performance du ministre de l'Environnement, j'ai quasiment le goût de dire au premier ministre: Envoyez le ministre de l'Environnement à la revalorisation du rôle du député et amenez-nous le député de Trois-Rivières à l'Environnement. J'ai quasiment l'idée de dire cela quand on voit ce qui se déroule à la période des questions et le genre d'administration du ministre de l'Environnement. En tout cas, 47% chez nous, M. le Président. Les professionnels des services éducatifs, maintenant, 50%.

Ce qui fait que, chez nous, quand on additionne cela, dans la régionale des Vieilles-Forges, cela fait des coupures non pas de 4%, ni de 5% ou 7%, ce n'est pas 10% comme étant une commission scolaire vraiment touchée, cela fait 22%. C'est ça que ça fait. Qu'on ne vienne pas faire accroire à la population que c'est minime. Ce ne sont pas des coupures, vous savez, pour modifier des travaux de menuiserie dans une polyvalente ou changer un escalier de place ou faire un bureau à l'intérieur. Ce

sont des coupures de personnel touchant directement l'éducation de mon enfant. C'est pareil dans le domaine social, vous viendrez voir dans nos hôpitaux. Sortez un peu, venez faire un tour. Allez sur place voir ce qui se passe. Je ne vous demande pas d'être malade, je vous demande d'aller voir dans les hôpitaux. Ne vous montrez pas trop, de peur qu'ils prétendent que vous êtes malades, avec certaines choses que vous faites, mais allez voir dans les hôpitaux ce qui se passe.

Je vais parler quelque peu, M. le Président, en terminant, du secteur que les gens d'en face se plaisent à appeler privé, mais qui s'appelle le secteur privé d'intérêt public. Je vais prendre une seule école et le député de Trois-Rivières pourrait venir me donner un coup de main là-dedans, il y en a plusieurs dans son comté. Il y en a plusieurs pour lesquelles d'ailleurs il s'est déjà prononcé favorablement. C'est peut-être pour cela d'ailleurs, parce qu'il s'est déjà prononcé favorablement, ce qui fait que maintenant il revalorise son propre rôle. C'est peut-être pour ça. En tout cas, j'aimerais cela que le député de Trois-Rivières nous dise ici dans cette Chambre exactement ce qu'il pense des écoles privées; il y en a tellement. Ce qu'il dit aux directeurs de ces écoles privées en privé, qu'il vienne le dire ici en public, a l'Assemblée nationale; c'est un excellent forum.

M. le Président, mon collègue de Brome-Missisquoi, à juste titre, a parlé... Vous savez, on fête l'année des handicapés, nous autres, au Parlement. On va faire en sorte qu'avec les coupures budgétaires, onze institutions privées spécialisées pour les handicapés vont fermer leurs portes. Cela s'appelle fêter l'année des handicapés, québécoisement vôtre. C'est comme ça que ça s'appelle. C'est de même qu'on fête cela, M. le Président, l'année des handicapés. Ce n'est pas de la science fiction, c'est de la réalité. Cela veut dire quoi? Je prendrai le cas, en terminant, d'une école de mon comté qui est une école privée d'intérêt public. Cela veut dire ceci. Le coût de base de la subvention, M. le Président, était de 2424 $. L'indexation au coût de la vie, avec la loi 56 pour vous faire une comparaison, était de 11,59%, ce qui faisait 2809,11 $ plus 199 $ de frais, valeur locative. On donnait 80% de cela, ce qui faisait 2406,72 $ multipliés par l'école de mon comté qui avait 150 élèves environ, cela donnait environ 350 000 $. Avec la loi no 11, inoffensive, que l'on va adopter hypocritement dans ce bill omnibus qui va parler de la boucane, du tabac et de la hausse de taxe sur le tabac, à l'intérieur de cela, ils vont passer des restrictions budgétaires au niveau de l'enseignement... ce qui va faire qu'avec la loi no 11, on a dit: Désormais, on fixe cela à 2000 $. On ne donne pas d'indexation. On donne 199 $ de valeur locative et cela fait 2199 $, une différence tout simplement d'environ 250 $. Ah, ce n'est pas grand-chose, 250 $. Comme le disait hier un député, cela fait 25 $ par mois. Ce n'est pas grave, seulement 25 $ par mois. Mais l'an prochain, par exemple, on aura calculé avec la loi 56 un pourcentage d'indexation sur 2406 $ ce qui approche les 3000 $, tandis que là, on va toujours revenir à 2000 $, ce qui fait que l'écart entre cette année qui est seulement de 35 000 $ pour une école privée va être l'année prochaine de 55 000 $, et dans trois ans, de 75 000 $ possiblement. Là, on va voir les gens d'en face venir chanter la chanson habituelle parce qu'il y a seulement dans cette école, des riches qui vont pouvoir se payer cet enseignement d'école privée d'intérêt public. Là, on viendra nous dire: Ce sont tous des riches qui envoient leurs enfants à l'école privée et c'est ce qu'on reproche, nous, à ce gouvernement social-démocrate. C'est ce qu'on va venir nous dire.

M. le Président, et je vous connais comme représentant de la Mauricie et je vous regarde agir depuis un certain bout de temps. Vous êtes assez intelligent pour savoir que l'adoption du projet de loi no 11, par l'Assemblée nationale, si inoffensif soit-il, si insignifiant soit-il, voté par des gens paraissant si innocents, va faire en sorte, qu'on sonne le glas et qu'on enterre certaines écoles privées d'intérêt public. Il va faire en sorte que dans mon propre milieu, ma propre fille, vos propres enfants -pensez-y donc, à part ceux qui n'en ont pas - vont avoir des services...

Une voix: ...

M. Picotte: Vous devez être content que je vous dise publiquement que vous n'en avez pas.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, en terminant.

M. Picotte: Va faire en sorte que vos propres enfants vont amoindrir les services qu'ils sont en droit d'avoir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de Chomedey.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: Merci, M. le Président.

Depuis quelque temps, nous avons été témoins dans cette Chambre du peu de respect du parti ministériel pour le parlementarisme québécois. Nous avons aussi été témoins du peu de respect du parti gouvernemental pour la démocratie.

Nous avons reçu un mandat de la

population et nous avons l'intention de jouer pleinement notre rôle d'Opposition vigilante en faisant un travail acharné et constructif. Personnellement, M. le Président, je n'ai pas l'intention d'ajuster mes préoccupations et les préoccupations des commettants de la région et de mon comté aux désirs du parti ministériel.

Quand on a à blâmer quelqu'un pour les faiblesses du présent gouvernement, on trouve immédiatement le Parti libéral fédéral, le gouvernement fédéral; et aussi, on trouve le moyen, après tant d'années de gouvernement et tant d'années d'exercice des pouvoirs du gouvernement, de blâmer l'ancien gouvernement. Quand je pense aux gens qui sont assis sur les banquettes...

Une voix: II n'y en a pas beaucoup. (12 h 40)

Mme Bacon: ... aujourd'hui, il n'y en a pas tellement, mais il y en a quelques-uns sur ces banquettes qui étaient auparavant des conseillers du gouvernement précédent, à la place de quelques nouveaux députés qui se servent de cet argument, j'y penserais deux fois avant de commencer à trouver de telles stupidités et de se servir de ces stupidités pour camoufler ou changer un peu les faiblesses du gouvernement actuel. Est-ce que les gens qui servaient de conseillers au précédent gouvernement ont tenté de saboter ce gouvernement par goût du pouvoir, au lieu du goût du Québec? Il y a quand même des questions. Je m'interroge sur le bien-fondé de ces accusations qu'on nous sert chaque jour - j'essaie d'être aussi présente que possible à ces travaux parlementaires - et je pense qu'il faudra cesser et prendre ses propres responsabilités comme gouvernement, comme gens exerçant un pouvoir depuis déjà quatre ans et demi ou cinq ans. Je serais même tentée de dire que j'aime mes adversaires, M. le Président, parce que ces adversaires me font sortir le meilleur de moi-même, et j'ai l'intention de continuer à le faire.

Comme bien des députés de cette Chambre, j'ai reçu de nombreuses communications de la part des électeurs de mon comté, me demandant d'intervenir et d'exercer toute la pression nécessaire sur le gouvernement au titre de l'enseignement privé. On sait que, par son programme, le Parti québécois s'est engagé à faire disparaître graduellement l'enseignement privé au Québec. Par ailleurs, le premier ministre, à plusieurs reprises - on n'a qu'à retourner en 1976 - a dit que, contrairement au programme du Parti québécois, le gouvernement n'entendait pas faire disparaître l'enseignement privé et qu'il allait préparer une politique de relance de l'enseignement privé. Cette politique de relance, nous l'attendons toujours en 1981.

Il est vrai que ce gouvernement nous a presque habitués à toutes ces paroles et ces gestes contradictoires. Croyez-moi, je le déplore tout autant que bien des concitoyens. S'il y a des conflits à l'intérieur du Conseil des ministres ou entre les ministres sur l'existence même de l'enseignement privé au Québec - ce que je présume et c'est ce qui, j'imagine, a causé des retards, dans la mesure où le programme du Parti québécois propose la disparition de l'enseignement privé - il y a sûrement un arrimage qui est un peu difficile à faire.

Est-il besoin de signaler que tout délai dans la prise de décisions cause un tort considérable aux maisons d'enseignement privées et les parents des enfants qui fréquentent ces institutions sont inquiets. Dans la population, il y a une demande au titre de la participation financière que le gouvernement pourrait apporter dans le domaine de l'enseignement privé.

Malheureusement, pour répondre à cette attente, tout ce que le gouvernement péquiste a trouvé comme solution, c'est de couper ses dépenses de façon draconienne, affectant gravement tout le secteur de l'enseignement privé au Québec.

M. le Président, cette situation est un net recul à tous les points de vue puisque, à moyen terme, les institutions privées n'auront d'autre recours que d'accroître exagérément la contribution des parents ou de fermer purement et simplement leurs portes, ce qui aurait pour effet d'augmenter singulièrement les dépenses du secteur public.

Nous aurions aimé que le ministre des Finances reconnaisse la nécessité de réduire les dépenses gouvernementales au cours des dernières années en tenant compte de la performance administrative passée des secteurs devant être soumis aux coupures budgétaires. Ceci l'aurait empêché de prendre des décisions antisociales et foncièrement injustes.

Je m'interroge aussi, M. le Président, quant aux véritables intentions de ce gouvernement. A-t-il décidé d'intégrer progessivement le secteur privé au secteur public? A-t-il décidé de forcer les institutions privées à accroître la contribution des parents d'une façon tellement exagérée en augmentant ou en doublant les frais de scolarité? A-t-il décidé, ce même gouvernement, de créer de toutes pièces une école pour les riches, pour une classe de privilégiés?

M. le Président, il est clair que la situation actuelle est tout autre. On sait que 75% des élèves fréquentant les institutions privées proviennent de familles à revenu moyen, des parents se saignant à blanc, trimant dur, acceptant de faire d'énormes sacrifices pour permettre à leurs enfants de recevoir une éducation qui peut répondre à leurs convictions et à leurs préférences. Il me semble que ceci est un droit sacré dans

une société qu'on veut encore appeler une société démocratique.

L'émulation entre le secteur public et le secteur privé est une source de qualité. Il est inacceptable pour la population de voir le gouvernement tenter subtilement d'étouffer le secteur privé. C'est comme si on voulait changer les règles du jeu pendant la partie. De plus, ces changements sont imposés par un ministre qui n'est même pas responsable du dossier de l'éducation.

M. le Président, les institutions privées d'enseignement ont pendant longtemps assuré seules la formation de la jeunesse québécoise. En ce sens, elles font partie de notre patrimoine culturel et de notre patrimoine social. Malgré le développement et la qualité grandissante du secteur public, bien des parents québécois choisissent toujours l'école privée parce qu'ils la croient mieux adaptée aux besoins de leurs enfants ou parce qu'elle correspond mieux à leurs croyances ou à leurs convictions. L'on ne saurait nier, par ailleurs, l'effet d'émulation extrêmement bénéfique créé par la présence concurrente de deux réseaux d'enseignement: privé et public. Dans l'optique libérale, l'accessibilité à l'école publique et le développement de la qualité de ses services pédagogiques et d'encadrement demeurent prioritaires. Ceci ne doit cependant pas empêcher le soutien et le développement d'un secteur privé concurrentiel pour autant que cette vie parallèle corresponde à une bonne gestion des fonds et des édifices publics et que ces écoles privées soient accessibles à l'ensemble de la population.

En présentant son projet de loi no 11, le gouvernement change d'une façon draconienne, de dernière heure, des règles du jeu du mode de financement de l'enseignement privé. Il brime effectivement le droit des personnes et des groupes. Il force les maisons d'enseignement privé à ne pas respecter des engagements déjà pris à l'endroit de leur personnel et de leurs étudiants pour 1981-1982. Il compromet aussi sérieusement l'existence et le développement de l'enseignement privé au Québec. Il détruit une valeur culturelle indispensable du patrimoine québécois.

Le projet de loi no 11 remet aussi en cause l'existence même des institutions spécialisées. Ma collègue de Jacques-Cartier a plaidé la cause de ces institutions d'une façon intelligente et bien plus éloquente que je ne pourrais le faire. Il est de notre devoir de sensibiliser le public québécois à cette difficile et délicate question. Les onze institutions privées qui, au Québec, sont spécialisées en enfance inadaptée reçoivent au total environ 1500 enfants et adolescents qui tous présentent, à des degrés divers, des troubles d'apprentissage ou des troubles de comportement. Pourquoi sont-ils regroupés dans ces institutions? Pourquoi ces enfants ne sont-ils pas accueillis au secteur public? La réponse est tragiquement simple. L'immense majorité de ces enfants est envoyée à ces institutions par des organismes de toutes sortes, organismes généralement publics, commissions scolaires incapables de dispenser les services spécialisés, hôpitaux, direction de la protection de la jeunesse, travailleurs sociaux, centres de services sociaux. (12 h 50)

On peut donc constater que l'existence même de ces onze institutions, loin d'être un luxe, constitue un service public absolument irremplaçable au sein de la société québécoise. Le gouvernement du Québec, en gelant à toutes fins utiles les ressources de ce secteur à moins de 11 000 000 $, en profite également pour geler automatiquement la clientèle de ces institutions, mais il va encore plus loin. Le ministère de l'Éducation gèle aussi les ratios maître-élèves comme s'il décidait à l'avance du type de services et d'encadrement dont ces enfants ont besoin.

Mais le gouvernement ne s'arrête pas en si bon chemin. Plusieurs de ces institutions, au cours des années, ont réussi à mettre sur pied des fondations grâce auxquelles elles devenaient en mesure d'améliorer quelque peu les services dispensés à ces enfants et sans qu'il en coûte un sou de plus aux finances publiques. Par exemple, une institution qui pouvait engager à mi-temps un spécialiste additionnel grâce à sa fondation avait la possibilité de le faire; dorénavant, cela sera interdit aux institutions spécialisées en enfance handicapée.

Il s'agit là de mesures aberrantes et surtout de la part d'un gouvernement qui parle du même souffle de frais modérateurs pour réduire la consommation des services gouvernementaux. Nous constatons donc que, non seulement le gouvernement gèle et diminue dans les faits les sommes qu'il contrôle, mais qu'en plus, au nom des sacro-saintes normes et aussi d'un égalitarisme absurde entre le privé et le public, ce même gouvernement étend son emprise sur des sommes qui ne sont pas à lui et qui sont le fruit de l'altruisme et de la générosité des citoyens.

Au nom des 1500 enfants parmi les plus démunis de tous les enfants du Québec, au nom de centaines d'enfants tout aussi démunis qui ne pourront recevoir les services spécialisés auxquels ils ont droit, dans toute société civilisée, parce qu'ils ne pourront être admis dans ces institutions, je demande au gouvernement du Québec de revoir ses positions, le plus rapidement possible sur les coupures budgétaires dans le secteur de l'enfance inadaptée.

M. le Président, ce serait mal jouer notre rôle que de taire de tels besoins. Comme je le disais au début de mes

remarques, comme Opposition représentant 46% des gens qui nous ont témoigné leur respect et leur confiance, qui nous ont désignés ici pour les représenter, malgré les railleries du parti ministériel, malgré leur incapacité d'accepter une Opposition comme la nôtre, j'ai l'intention de continuer comme mes collègues à faire part à cette Chambre des besoins de la population et de traduire ici, au nom des citoyens, au nom des citoyennes, les besoins et les aspirations de cette population. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le député de Limoilou.

M. Gravel: Est-ce que je peux vous demander, vu l'heure avancée, M. le Président, de suspendre le débat?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de suspension est-elle adoptée.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 54)

(Reprise de la séance à 15 h 10)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Assoyez-vous.

Reprise du débat sur la motion de M. Parizeau proposant que le projet de loi no 11 soit lu à nouveau.

La parole était à M. le député de Limoilou.

M. Raymond Gravel

M. Gravel: Merci, M. le Président. Puisqu'il s'agit de la première occasion qui s'offre à moi de prendre la parole en cette Assemblée depuis ma réélection comme député de Limoilou, permettez-moi d'abord de remercier publiquement l'équipe de bénévoles de mon organisation qui ont accompli un magnifique travail durant ces derniers mois, de même que les électrices et les électeurs de mon comté qui ont bien voulu m'accorder leur confiance pour un second mandat. Je puis vous assurer que je ferai tout ce qui est humainement possible pour être à la hauteur de cette confiance et je continuerai d'être disponible et d'être à l'écoute des travailleurs de mon comté.

Depuis quelques années, il y a des oiseaux de malheur qui aimeraient nous faire croire que l'économie du Québec est mal en point par rapport à celle des autres provinces canadiennes. Que ce soit par des manoeuvres politiques ou en raison de leur mentalité de colonisés, ces gens voudraient, semble-t-il, nous faire croire qu'un Québec administré par des Québécois et pour des Québécois, ça ne peut pas fonctionner rondement. Pourtant, les faits prouvent le contraire. Au cours du premier mandat du gouvernement du Parti québécois, l'économie du Québec, loin de se détériorer, a pris du mieux.

M. le Président, permettez-moi de vous référer, entre autres, à un article du journaliste Richard Daigneault qui citait, le 20 mai dernier, dans le journal Le Soleil, des extraits de la revue L'investisseur étranger publiée, soit dit en passant, par l'Agence d'examen de l'investissement étranger du gouvernement fédéral. Cela, c'est sérieux! On y mentionne notamment que dans un rapport publié récemment, le Conseil économique du Canada note que le Québec est, avec l'Alberta, la seule province canadienne où la productivité n'a pas fléchi au cours des six dernières années. On mentionne aussi - et je cite - que "malgré la persistance du chômage élevé, l'industrie et le gouvernement ont créé pas moins de 180 000 emplois au cours des trois dernières années.

Au niveau de l'agriculture, on indigue qu'à première vue on ne s'attendait pas que le Québec réalise des progrès aussi spectaculaires puisque le gel se montre durant 200 nuits par année. Néanmoins, le degré d'autosuffisance en matière de produits alimentaires a grimpé de 51% à 60% au cours des cinq dernières années.

L'économie québécoise n'est donc pas si mal en point, M. le Président. Bien au contraire, elle est de plus en plus saine et ce n'est pas par hasard. Depuis 1976, ce gouvernement a multiplié les mesures afin d'utiliser au maximum les leviers dont nous disposons pour améliorer les choses.

M. le Président, le point de départ de cette série de mesures était peut-être l'abolition des caisses électorales secrètes. Pour la première fois, en effet, un gouvernement prenait à Québec des décisions sans être lié aux intérêts des compagnies et des bailleurs de fonds. Pour la première fois, un gouvernement pouvait se permettre de légiférer dans l'intérêt supérieur de la collectivité, sans être pris au piège d'une caisse électorale secrète garnie par des financiers.

Avant 1976, M. le Président, lorsqu'un parti politique était élu, c'étaient les bâilleurs de fonds qui contrôlaient le pouvoir. Ce sont eux qui intervenaient dans les prises de décisions relatives à l'économie de la province et, bien sûr, ils s'organisaient pour que les actions gouvernementales n'affectent pas leurs intérêts. Quand le Parti québécois a formé le gouvernement en 1976, il n'avait à répondre que devant les électeurs québécois et non devant les compagnies.

Pourquoi? Parce que le Parti québécois s'est toujours financé par ses membres.

Qu'on songe, par exemple, à la Loi sur la protection des terres agricoles, législation essentielle pour sauvegarder la vocation première de nos bonnes terres. Grâce à cette loi et aux autres mesures du gouvernement en matière d'agriculture et d'alimentation, nous pouvons, dans les années à venir, accroître substantiellement notre autosuffisance en ce domaine. Les investissements sur les fermes ont d'ailleurs pratiquement doublé depuis 1976.

On parlait de cette mesure essentielle depuis des années et des années dans les milieux gouvernementaux, mais jamais aucun gouvernement n'avait eu le courage d'intervenir dans ce domaine. Est-il utile de se demander pourquoi, M. le Président? Comment les gouvernements précédents auraient-ils pu s'attaquer directement aux intérêts des spéculateurs fonciers qui faisaient de véritables fortunes en spéculant sur les terres agricoles du Québec? La même situation prévaut dans le secteur de l'amiante où nous pourrons bientôt, avec l'acquisition d'autres mines, orienter l'exploitation de cette richesse naturelle pour le plus grand profit des Québécois. Ce n'est pas d'hier que tous les Québécois sont au courant de l'exploitation abusive de ces richesses naturelles de chez nous. Les compagnies faisaient l'extraction ici et la transformation ailleurs. Pourtant, les gouvernements précédents n'ont jamais osé intervenir dans ce domaine. M. le Président, on ne mord pas la main qui nous nourrit et les politiciens ne s'attaquent pas à leurs bailleurs de fonds. L'intervention de notre gouvernement dans le domaine de l'amiante sera une autre mesure génératrice d'emplois chez nous.

Par ailleurs, avec la politique d'achat au Québec, la part d'achats gouvernementaux effectués auprès de manufacturiers québécois est passée de 55% à plus de 75%. Cet accroissement représente quelque 400 000 000 $ réinjectés dans l'économie du Québec. Une telle politique aurait été difficile d'application pour un gouvernement qui est obligé de favoriser dans ses achats les compagnies qui garnissent sa. caisse électorale. C'est encore une mesure de notre gouvernement qui va engendrer plus d'emplois chez nous. Dans le cadre des différents projets OSE, des millions de dollars ont été investis dans la petite et moyenne entreprise depuis 1976 et des milliers d'emplois permanents ont été créés. Dans le domaine de l'environnement, un véritable ministère a enfin été créé en 1979 et des sommes importantes ont été consenties pour accélérer l'épuration des eaux tout en créant des emplois. Dans la seule région de Québec, une entente récente avec la Communauté urbaine de Québec va permettre des investissements de quelque 36 000 000 $, dont 30 000 000 $ provenant des coffres du gouvernement. Il s'agit d'un investissement nécessaire qui va, lui aussi, être générateur d'emplois.

Les gouvernements précédents, liés à des caisses électorales secrètes garnies par les grandes compagnies, auraient-ils osé imposer des mesures adéquates aux industriels pour empêcher la pollution éhontée de notre environnement? Ils ne l'ont pas fait et on comprend facilement pourquoi.

Voilà peut-être pourquoi, dans l'article que je mentionnais tout à l'heure, on affirme que l'économie du Québec est à l'aube d'une ère nouvelle dans les années quatre-vingt. C'est l'effet de l'administration honnête d'un gouvernement qui n'était pas lié à des intérêts financiers particuliers et qui a eu le courage de mettre en oeuvre les réformes qui s'imposent. Une nouvelle série de mesures énoncées dans le présent budget va poursuivre et consolider cette approche du développement économique québécois. Avec un programme comme celui favorisant l'accession à la propriété, par exemple, nous répondons directement à un besoin de nos concitoyens tout en stimulant l'économie.

M. le Président, malgré les oiseaux de malheur et les gens qui voudraient nous faire croire que tout va mal chez nous, l'économie du Québec a subi un sérieux redressement au cours du premier mandat du gouvernement du Parti québécois, et ce, tout en permettant de diminuer les impôts, ce qui représente une excellente performance. En poursuivant cette gestion des fonds publics avec des méthodes saines et innovatrices, nous allons effectivement vers une ère nouvelle, et ce, pour le mieux-être des Québécois. Tout ce que je souhaite personnellement, c'est que, dans un avenir rapproché, les Québécois nous donnent le mandat clair d'administrer nous-mêmes tous les leviers qui nous permettraient d'assurer notre développement dans notre intérêt, sans ingérence extérieure et sans les contraintes d'un palier supérieur de gouvernement, soumis aux impératifs d'une autre nation.

M. le Président, nous avons mis résolument le cap sur l'avenir et cet avenir, j'en suis persuadé, est très prometteur pour les Québécois. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, je me serais bien adressé à MM. les ministres, mais comme il n'y en a pas un seul présent...

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le whip.

M. Chevrette: Le député devrait savoir que le mercredi, il y a une réunion du Conseil des ministres; ce qu'il dit est même mesquin.

M. Vaugeois: De plus, M. le Président, il n'a qu'à regarder les gens en face de lui, la qualité est ici.

M. Bissonnet: Ce n'est pas une question de règlement. Je voudrais quand même saluer mes deux collègues qui sont d'anciens ministres...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député, vous avez la parole. M. le député de Jeanne-Mance, s'il vous plaît.

M. Bissonnet: Je voudrais faire quelques remarques sur le projet de loi no 11. À l'intérieur de ce projet, M. le Président, il y a des dispositions relatives à une taxe sur la vente en détail du tabac, soit 45%. Depuis que je suis député dans cette Assemblée, j'ai remarqué que, parmi mes amis d'en face, il y en a un qui connaît le tabac, il s'agit du ministre M. Parizeau, ancien conseiller du gouvernement sous l'Union Nationale et ancien conseiller du gouvernement libéral. Aujourd'hui, M. Parizeau, à la période des questions, lorsqu'on parlait d'un trou de 1 000 000 000 $, implique le gouvernement du Parti libéral, avant 1976.

M. Parizeau était le conseiller...

M. Vaugeois: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: Je ne suis pas très fort concernant le règlement, mais je vais me forcer, étant adjoint au leader aujourd'hui. Je sais que l'article 99 de notre règlement, au sixième point, précise: "II est interdit à un député qui a la parole de désigner le président ou un député par son nom."

En l'occurrence, je pense qu'il faudrait parler de M. le ministre des Finances.

M. Bissonnet: Très bien.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Bissonnet: Je remercie, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Picotte: M. le Président, avant que mon collègue de Trois-Rivières quitte, j'aimerais lui souligner que j'espère que ce n'est pas la seule réforme parlementaire à laquelle il va s'attaquer.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Jeanne-Mance, vous avez la parole.

M. Bissonnet: M. le Président, j'ai remarqué la brillante intervention du député de Trois-Rivières, mais j'ai l'impression qu'il devrait plutôt s'occuper de la Commission scolaire régionale des Vieilles-Forges. Je pense que cela serait peut-être plus profitable pour ses concitoyens dans son comté.

Dans ce projet de loi, on retrouve des dispositions variables en ce qui a trait à l'enseignement privé, relativement à une augmentation de 1,5% à 3% de la contribution des employeurs et des municipalités à la Régie de l'assurance-maladie. En ce qui concerne l'assurance-maladie, on constate que dans ce projet de loi, une augmentation de 100% force les employeurs à donner au gouvernement 100% du montant donné l'année dernière.

Nous assistons à une réorientation peut-être vers l'automatisation dans certaines entreprises, parce qu'une entreprise qui a un chiffre d'affaires de 6 000 000 $ pour des employés devra payer un montant de 90 000 $ additionnels au gouvernement. C'est une moyenne de cinq à six employés.

Concernant la Commission municipale du Québec, le ministre nous a dit: "Je pense que les élus municipaux doivent expliquer a la population, et les gens doivent s'attendre a ça, s'il y a un taux d'inflation de 12% et qu'on veut garder les mêmes services, que le compte de taxes devrait suivre d'une augmentation de 12%, comme le coût des services municipaux va suivre à 12%, et il faut l'expliquer."

Ce que je veux dire, M. le Président, c'est que les municipalités ont subi une réforme fiscale en 1979. La plupart des municipalités se sont servies d'une disposition que le gouvernement a adoptée à la fin de 1980, pour permettre, par la loi 12, aux municipalités de permettre à leurs concitoyens une réduction de taxes d'environ 10% pour 1981, et de 5% pour 1982.

Il faut considérer que les municipalités qui ont donné cet allégement du fardeau fiscal à leurs contribuables devront le diminuer de 5% d'un taux qui était de 10%. À la suite de l'augmentation du coût d'inflation, certaines municipalités au Québec se sont servies de ce crédit d'impôt pour favoriser toujours le petit contribuable. Nous assisterons, M. le Président, à une augmentation prochaine, pour 1981, du coût d'évaluation, qui est normale, selon le ministre des Affaires municipales, et à une

diminution de taxes de 5% au lieu de 10%. Il faut donc présumer d'une augmentation possible de 17% sur les taxes municipales dans la Communauté urbaine de Montréal.

Je veux souligner que l'augmentation de 1,5% à 3% du montant que les municipalités devront payer au gouvernement du Québec est une augmentation d'impôt directe que les municipalités devront faire subir à leurs contribuables.

En ce qui a trait à l'enseignement privé au Québec, je voudrais, dans les quelques minutes qui suivent, parler de la façon dont le Parti québécois a agi dans ce dossier.

Nous avons une loi et on nous fait actuellement beaucoup de représentations. Moi, j'en ai beaucoup du collège Marie-Victorin, dont plusieurs étudiants résident dans mon comté et qui sont de classe moyenne, dont les parents ont des revenus moyens; j'en ai beaucoup aussi qui sont au collège des Eudistes.

En 1976, dans le programme du Parti québécois, on lit ceci: "Un gouvernement du Parti québécois s'engage à consacrer aux seules institutions publiques les sommes actuellement dépensées pour l'enseignement élémentaire, secondaire et colléqial." En 1977, le Parti québécois modifie l'article 4, paragraphe 16, du chapitre Vie culturelle du programme du Parti québécois et le nouvel article se lit comme suit, M. le Président: "Un gouvernement du Parti québécois s'engage à élaborer, dans les plus brefs délais possible, une planification financière et pédagogique dans les secteurs public et privé et des normes d'admission qui éliminent toute forme de discrimination sociale, à réaliser cette planification dans une perspective d'intégration progressive du secteur privé au secteur public, dans le respect du choix libre garanti par la diversité des écoles et, en ce sens, adopter une loi de l'enseignement privé qui instaure un contrôle rigoureux de l'émission des permis, de la qualité des services offerts et de la fréquentation réelle des institutions et qui soumettent les institutions privées à des normes identiques à celles qui régissent les institutions publiques, et réduire progressivement les subventions de l'État aux écoles privées non intégrées sur une période de cinq ans."

Un moratoire suspend l'émission de nouveaux permis d'écoles privées d'enseignement général et professionnel au niveau primaire, secondaire ou collégial. Il n'autorise pas de nouveaux enseignants, au général ou au professionnel, aux écoles qui détenaient déjà un statut dans les niveaux mentionnés ci-haut. Le gouvernement du Québec crée une commission d'étude ayant pour mandat d'étudier la situation de l'enseignement privé depuis l'année 1968. On parle de 1976 et 1977, M. le Président. Une pétition de 546 097 signatures de parents est remise au premier ministre du Québec. Elle demande à l'État de respecter la liberté des parents d'envoyer leurs enfants à l'école de leur choix.

Depuis 1977, le gouvernement du Québec retarde d'année en année l'annonce de sa politique à l'égard de l'enseignement privé. On attend encore, M. le Président, mais on arrive avec un projet de loi sur des mesures de dispositions budgétaires et on implique, en profondeur, la question relative au système de l'enseignement privé. (15 h 30)

En 1977, le 19 mai, le ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, répondait à mon collègue, le député de Bonaventure, et affirmait: "D'autre part, j'ai l'intention, au cours des semaines qui viennent - nous sommes le 19 mai 1977, M. le Président - de déposer devant cette Chambre un rapport sur l'avenir de l'école privée au Québec, lequel a fait l'objet de longues études dans mon ministère depuis déjà quelques mois, document qui pourra pleinement renseigner le chef de l'Opposition - M. le député de Bonaventure était le chef de l'Opposition à l'époque - et servir de fondement à un débat."

Le 8 décembre 1977, M. le Président, le ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, répondait à notre ex-collègue, le député de Beauce-Sud, M. Fabien Roy, et affirmait: "La politique à cet égard sera sans doute annoncée au printemps." On est en 1977. On va vite au Parti québécois, vous allez voir ça, M. le Président. Le 18 mai 1978, le ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, répondait encore au député de Beauce-Sud, notre ex-collègue M. Fabien Roy, et affirmait: "Cette politique est discutée non seulement chez les fonctionnaires, mais au niveau des ministres et des députés. Demain matin, j'aurai l'occasion, à la commission parlementaire, qui doit se pencher sur l'enseignement privé, à la demande du député de Gaspé, de donner des indications plus précises sur l'état de ce dossier."

Le 19 mai 1978, à la même commission parlementaire, le ministre de l'Éducation répondait au député de Gaspé, notre excollègue M. Le Moignan - que nous saluons cet après-midi - et affirmait ce qui suit: "Effectivement, comme l'a mentionné le député, une étude en profondeur a été effectuée depuis plus d'un an maintenant et se trouve en ce moment sur le point d'aboutir - cela s'en vient, M. le Président -devant le comité ministériel de développement culturel et devant le Conseil des ministres. Au terme des études en cour9 et des conclusions du groupe chargé du dossier, qui vont nous être transmises au début de juin, le gouvernement a l'intention de faire connaître sa politique. Ce sera

vraisemblablement dans le courant de juin 1978."

Le 15 décembre 1978, le premier ministre, M. Lévesque, député du comté de Taillon, pour faire plaisir à mon collègue le député de Trois-Rivières, répondait à la place du ministre de l'Éducation - quand ça n'avance pas vite, le premier ministre vient toujours à la charge - au député de Gaspé, M. Le Moignan: "Une chose est certaine, le plus vite possible, en 1979, je l'espère à temps pour que des projets légitimes puissent se réaliser, il y aura des éclaircissements." On attend encore.

M. Fortier: On vient de les avoir.

M. Bissonnet: Le 14 février 1979, le ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, répondait encore au député de Gaspé: "Je n'ai rien à ajouter pour l'instant." On est rendu au 14 février 1979. La réponse que donnait le premier ministre au député de Gaspé au mois de décembre; du moins, il se rappelait ça. "Je puis simplement informer le député de Gaspé que la rédaction du document faisant état de la nouvelle politique du gouvernement à l'égard de l'enseignement privé est sur le point d'être terminée. Mon collègue, le ministre d'État au Développement culturel, qui est également partie à ce dossier et que je viens de consulter à l'instant, me dit que dans une dizaine de jours nous aurons devant nous un document qui suivra le cheminement qu'ont connu, par exemple, le livre vert sur l'enseignement primaire et secondaire ainsi que l'énoncé de politique sur les collèges. Nous devrions certainement aboutir avec un document qui serait rendu public dans le cours du printemps."

M. Fortier: À la naissance...

M. Bissonnet: Bien oui. Le 25 avril 1979, le ministre de l'Éducation répondait toujours au député de Gaspé: Nous croyons être en mesure, d'ici quelques semaines, de déposer devant cette Chambre l'énoncé politique, qu'on a aujourd'hui... les gens ne peuvent pas tous venir nous parler - parce qu'on est là pour parler avec nos concitoyens - pour nous dire le malaise qu'ils ressentent à la suite de cette disposition.

Je reviens au 25 avril. Ces gens-là attendent depuis cinq ans. Quelles sont les règles du jeu? Toujours au mois d'avril 1979, quelles sont les règles du jeu et quelles seront les modalités de financement de l'enseignement privé? Le 30 mai 1979, le ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, député du comté de Sauvé - là, il s'est sauvé à Londres - répondait au député de Jean-Talon - on y reviendra, là-dessus, M. le député - notre collègue, M. Rivest: "Je n'ai pas l'intention de donner une date précise parce qu'à l'heure actuelle je ne sais pas combien de temps il faudra pour procéder à ces simulations et à ces consultations. Je puis assurer cette Chambre d'une chose, c'est qu'aussitôt que la politique sera prête et qu'elle aura fait l'objet d'un débat au Conseil des ministres - il commence à être temps que cela arrive là, M. le Président - elle sera rendue publique."

Le 17 octobre 1979, le ministre de l'Éducation répondait à M. le député de Gaspé: "Le député me demande où nous en sommes. À l'heure actuelle, le texte est presque prêt." Le député n'aurait certainement pas fait un bon maire, parce qu'il faut toujours être prêt à répondre à nos concitoyens, M. le Président. Alors je répète. "Le député me demande où nous en sommes. À l'heure actuelle, le texte est presque prêt. Je compte aller devant le comité ministériel du développement culturel, présidé par mon collègue le Dr Laurin, député du comté de Bourget, d'ici deux ou trois semaines au maximum. Après quoi, le dossier prendra le chemin du Conseil des ministres, puis il aboutira sans doute devant cette Chambre et devant la population."

Franchement, M. le Président, on arrive aujourd'hui avec un projet de loi no 11, on va faire une commission parlementaire à laquelle on limite l'accès parce qu'il y a des ententes et que cette Chambre doit terminer ses travaux pour la fin de juin, le 19 juin. Tous les députés veulent aller en vacances, ils viennent d'être élus, on a passé une dure élection, et ils veulent aller en vacances, mais ces gens ont un droit légitime, comme Québécois, de se faire entendre par nous qui sommes leurs représentants.

J'insiste pour que ce projet de loi qui a trait à l'enseignement privé soit reporté et j'espère que le ministre de l'Éducation et le ministre des Finances sont assez conscients de leurs actes et de leurs gestes, M. le Président, pour reporter et scinder ce projet de loi au niveau de l'enseignement privé, afin de permettre à tous nos commettants qui sont impliqués, les milliers et les milliers de parents - j'en ai beaucoup dans mon comté et je pense qu'il y en a dans la plupart des comtés des députés qui sont ici -d'être entendus dans un temps minimal. Je retourne à mon dossier qui est inquiétant.

M. le Président, je suis rendu au mois de décembre 1979. Le ministre de l'Éducation affirmait à M. le député de Gaspé: "L'essentiel de la politique relative à l'enseignement privé et à son financement est maintenant prêt. La politique a été acheminée à l'état de projet au comité permanent interministériel de développement culturel depuis maintenant deux ou trois semaines. Après en avoir débattu au sein du comité interministériel, il y a des retouches à apporter au dossier. Une fois prêt, il ira directement au Conseil des ministres.

J'imagine que ce sera au cours des semaines qui viennent."

Le 31 mars 1980, M. le Président, le ministre des Finances, député du comté de L'Assomption, répondait au député de Jean-Talon: "Ce n'est pas à moi que doit s'adresser sa question pour savoir quand le document en question sera déposé. Je n'ai rien à ajouter à ce que le ministre de l'Éducation et le premier ministre ont déjà dit à ce sujet les années antérieures, M. le Président. Je voudrais simplement donner les renseignements les plus récents que je viens d'avoir sur l'état de la nouvelle politique d'enseignement privé. On me dit qu'elle a été présentée au comité ministériel du développement culturel qui a demandé au ministre de l'Éducation d'approfondir certaines de ses hypothèses de financement avant de se prononcer. Donc, il faut que le comité ministériel pour le développement culturel se prononce sur ce dossier une fois que le ministre de l'Éducation aura procédé à certaines révisions. Le ministre de l'Éducation est en train de travailler là-dessus et c'est dans quelques semaines que la question viendra devant le Conseil des ministres."

Quand je vois tout cela, M. le Président, une réponse du ministre des Finances comme ça, je comprends très bien qu'il y ait, à un moment donné, dans le rapport du Vérificateur général des lacunes administratives. On s'envoie le dossier d'une place à l'autre, M. le Président. Je pense qu'il faut arrêter au Québec de jouer avec les citoyens. (15 h 40)

Le 5 juin 1980, M. le Président, le ministre de l'Éducation, en réponse au député de Jean-Talon affirmait: "Au cours des derniers mois, le dossier n'a pas progressé beaucoup. Depuis six mois en particulier, nous avons, personnellement, ainsi que les sous-ministres, été fort accaparés par les négociations. Le dossier est resté longtemps au CMPDC - je vous avoue humblement que je ne sais pas ce que cela veut dire - où on l'a examiné." Ce doit être le conseil interministériel. "On a fait un premier tour de table et certains des principes sont déjà acquis, mais nous nous sommes heurtés à des difficultés, pour ce qui est des formules de financement, parce qu'il existe au moins cinq solutions possibles dans le financement et le CMPDC et le gouvernement m'ont fait savoir que l'état du dossier sur ce point laissait à désirer. "Quand nous aurons terminé au ministère les études qui s'imposent, je devrai retourner devant le CMPDC, qui m'a demandé de lui présenter un nouveau rapport plus complet, plus circonstancié, surtout sur le plan financier, parce que je dois dire que, sur les orientations générales, l'accord est à peu près acquis. C'est le financement, ce sont les formules de financement qui sont très complexes. Est-ce qu'on doit tenir compte du coût des salaires moyens, du public? Pour les investissements, comment doit-on procéder pour ce qu'on appelle la valeur locative? Est-ce que les formules retenues jusqu'ici sont satisfaisantes? Autrement dit, ce n'est pas au point financièrement."

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Jeanne-Mance, le temps qui vous était alloué est épuisé.

M. Bissonnet: J'ai terminé, M. le Président. J'aurais pu continuer pendant une heure. La prochaine fois, j'y reviendrai.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous pouvez terminer. Vous pouvez terminer, s'il vous plaît!

M. Bissonnet: Je peux conclure, M. le Président? Je vais conclure.

En ce qui a trait à l'enseignement privé d'intérêt public au Québec, c'est nécessaire à l'épanouissement de tous les Québécois de permettre aux parents un libre choix de l'institution qu'ils préfèrent. L'analyse que je vous ai exposée dans les 20 dernières minutes nous éclaire bien sur les agissements du gouvernement péquiste, sur le temps qu'il a pris à s'envoyer, M. le Président, le rapport de ministre à "interministre", à comité interministériel, au Conseil des ministres, au CMPDC. Je crois, M. le Président, que les parents, que les collèges privés ont droit à être tous entendus sur ce projet de loi, à l'intérieur d'un projet de loi où il y a plusieurs dispositions financières qui touchent plusieurs dossiers.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: M. le Président...

M. Levesque (Bonaventure): Excusez-moi, M. le Président. Je m'excuse auprès de mon collègue, le député de Saint-Henri, mais je comprends mal les protestations de nos amis d'en face tout à l'heure, qui surveillaient l'horloge pour s'assurer que notre collègue ne dépasse pas le temps mis à sa disposition. J'aurais cru, à ce moment-là, qu'on était pressé d'intervenir de l'autre côté, mais, devant le silence des ministériels qui se perpétue, M. le Président, j'en prends simplement note.

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Chevrette: M. le Président, vous savez pertinemment que l'Opposition a choisi de faire son spectacle. C'est agréable de la laisser aller. Je pense que le député de Rosemont, en tout cas, a bel et bien répondu aux allégations de l'Opposition et, en temps et lieu, on rivera les clous qui s'imposent.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader, je vous ferais remarquer que j'ai personnellement avisé le député, sans aucune demande d'aucune part, que son temps était terminé, que le temps alloué était bien terminé.

M. le député de Saint-Henri.

M. Roma Hains

M. Hains: M. le Président, mon intervention sera brève, mais, comme professeur et directeur d'école, je veux unir ma voix au tollé de protestations qui s'élève au sujet des coupures budgétaires dans le domaine de l'école privée, mais d'intérêt public. Déjà, mes collègues ont dévoilé toutes les facettes décevantes et arbitraires de ce projet de loi no 11 qui brime et étrangle le secteur privé de l'enseignement.

J'interviens, M. le Président, pour défendre toutes ces institutions menacées de mort lente, mais sûre, institutions fréquentées par la classe moyenne de notre société. J'interviens surtout pour défendre un collège en particulier, le Collège Sainte-Anne, situé dans le comté de Marquette, mais qui reçoit beaucoup d'étudiantes de mon comté de Saint-Henri, surtout dans les secteurs de Côté Saint-Paul et de Ville Émard. C'est une institution qui compte 120 ans d'existence et qui a été fréquentée par des milliers d'étudiantes. Elle est dirigée avec expérience, compétence et dévouement par des religieuses et des professeurs qui enseignent encore les vraies valeurs de l'éducation. Ces valeurs s'enracinent dans un passé plus que séculaire, mais elles s'adaptent très bien à la vie moderne et elles sont ouvertes sur l'avenir.

Lors du dernier gala, la semaine dernière, des 141 finissantes de cette institution, la directrice disait à son auditoire: "Ce soir, je vous parle avec une certaine angoisse. Sans doute avez-vous pris connaissance du projet de loi no 11 déposé à l'Assemblée nationale, projet de loi qui tend à modifier la loi 56 de l'enseignement privé pour donner suite, souligne-t-on, à la coupure budgétaire du gouvernement. Permettez-moi de vous dire que les modalités de financement prévues sont tout à fait inacceptables parce qu'elles fixent d'une façon arbitraire, antidémocratique, un montant de base qui signifierait des coupures non seulement au niveau des services auxiliaires, mais aussi au niveau des services pédagogiques. Un tel projet de loi menace directement l'existence de l'enseignement privé. Nous laisserons-nous étrangler? Je vous demande de réagir et de défendre les droits fondamentaux du libre choix de l'école, de nous appuyer dans la défense de l'enseignement privé en posant des gestes concrets contre ce projet de loi. La cause de l'enseignement privé, c'est notre cause à tous, car nous croyons aux libertés fondamentales. Dans un pays démocratique, c'est une cause gagnée d'avance, pourvu qu'elle soit défendue avec courage et détermination."

C'est pour répondre à cet appel que j'ai voulu intervenir brièvement dans ce dossier, demandant aux ministres des Finances et de l'Éducation d'apporter des amendements à cette loi qui étranglera tôt ou tard l'enseignement privé, lequel, pourtant, ne demande qu'à être traité comme les autres. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, un débat sur un projet de loi comme le projet de loi no 11, lequel comporte diverses mesures sur divers sujets, est fort intéressant parce que c'est l'occasion, en quelque sorte, pour les partis politiques de révéler leurs priorités, de mettre en évidence leurs centres d'intérêts ou, tout simplement, leurs intérêts tout court, de faire ressortir leurs préoccupations. C'est ainsi que, si on se bornait à entendre les discours de l'Opposition, on en arriverait très vite à la conclusion qu'il n'y a dans ce projet de loi que deux mesures importantes: celle qui concerne le financement des écoles privées et celle qui porte sur la contribution des entreprises au financement des services de santé. À entendre les derniers intervenants de l'Opposition, on se rend compte que le projet de loi no 11 ne semble comporter qu'une seule mesure, celle portant sur l'enseignement privé. (15 h 50)

Or, à propos des écoles privées, je ne veux pas m'y étendre très longuement, mais je me permettrais quand même de constater que le Parti libéral du Québec n'a pas changé. L'élection du 13 avril ne lui a fait subir aucun changement. Comme dans le cas, on se le rappellera, de l'assurance automobile, comme dans le cas de la Loi sur la protection du territoire agricole, on se rend compte aujourd'hui que, dans le cas des écoles privées, le Parti libéral du Québec fait la même chose, se comporte de la même façon qu'autrefois, il s'efforce, je dirais, de perpétuer l'injustice. Parce qu'il serait injuste, je dis bien: II serait injuste, au moment même où on impose certaines restrictions, certaines compressions

budgétaires au secteur scolaire public, de ne pas astreindre à des mesures similaires le secteur privé.

Ce ne sont donc pas les mesures contenues dans le projet de loi no 11 qui sont injustes, comme le prétendent les députés de l'Opposition. Ce qui serait injuste, ce serait que le secteur privé soit exclu de l'opération compressions budgétaires qui s'effectue présentement dans le secteur public. C'est cela qui serait injuste. Le Parti libéral du Québec, je me rends compte, n'a pas changé. Il continue de vouloir perpétuer l'injustice en voulant, dans le cas présent, soustraire l'école privée aux compressions budgétaires, aux restrictions budgétaires. Il est donc contre le principe équitable, en admettant qu'on puisse discuter des modalités, mais il est contre - c'est du moins ce qui ressort des interventions de l'Opposition - le principe éminemment équitable qui veut que le secteur privé participe lui aussi au mouvement de restrictions budgétaires mis en branle par le gouvernement.

De même - rappelons-le-nous - il a été contre le principe fort équitable de la mise en place du Régime d'assurance automobile au Québec et contre le principe fort équitable aussi de la protection du territoire agricole. Le Parti libéral du Québec n'a pas changé, et le 13 avril, il semble bien, ne l'a pas fait changer non plus.

On les voit encore, comme c'était le cas dans le débat sur l'assurance automobile ou dans le débat de la Loi sur la protection du territoire agricole, faire diversion, essayer de faire croire à la population que le gouvernement s'apprête à faire disparaître les écoles privées ou s'apprête à supprimer carrément et complètement les subventions gouvernementales au secteur privé, ce qui est tout à fait faux. Ce qu'on s'apprête simplement à faire, c'est que le secteur privé lui aussi s'impose des restrictions budgétaires que nous imposons à juste titre au secteur public.

Cela dit, il faut dire aussi, dans le cadre de ce débat sur le projet de loi no 11, ce que les libéraux, par aveuglement partisan sans doute, se refusent à dire au sujet de ce projet de loi, et qui est pourtant essentiel, fondamental, c'est même un des grands principes du projet de loi no 11. On n'en entend pas parler du tout du côté de l'Opposition. Ce projet de loi, il faut le dire, vise à poursuivre l'opération réduction du fardeau fiscal du contribuable québécois. C'est un des principes de base de ce projet de loi. On n'en parle pas du tout de ce côté-là. Je me permets donc d'en parler quelque peu. Car il faut le reconnaître - je comprends que les libéraux soient muets sur ce sujet - ce projet de loi s'inscrit dans la politique générale d'allégement fiscal que le gouvernement du Parti québécois applique depuis maintenant plus de quatre ans. C'est cela dont il faut se rendre compte. Il serait utile de le rappeler; il serait utile de rappeler que, pour la première fois, un gouvernement du Québec baisse les impôts quatre fois d'affilée en quatre ans. C'était notre priorité, au départ, ce l'est demeuré, et on l'a fait. Pour la première fois, un gouvernement du Québec a mis en oeuvre une politique systématique d'abolition sélective de la taxe de vente. On a vu, par exemple, en 1978, abolition de la taxe de vente sur les vêtements et sur les chaussures. En 1980, abolition de la taxe de vente sur les meubles et le textile. En 1981, abolition de la taxe de vente sur les réfrigérateurs et les cuisinières. Pour la première fois, un gouvernement du Québec baisse systématiquement l'impôt sur le revenu des particuliers. En 1980, baisse générale du taux d'imposition de 3%. Le premier janvier prochain, une autre baisse générale du taux d'imposition de 2%; c'est l'article 10 du projet de loi no 11, M. le Président, baisse générale du taux d'imposition de 2%, au 1er janvier 1982. L'article 10, l'a-t-on lu de l'autre côté? C'est un des principes de base de ce projet de loi.

On pourrait également ajouter que, pour la première fois, un gouvernement du Québec a indexé les exemptions personnelles à plusieurs reprises et on va le refaire de nouveau au 1er janvier 1982 pour 7,5%. Les résultats, la population les connaît; les résultats sont que, par rapport au système libéral d'avant 1976, chaque contribuable québécois, en 1981, paie 600 $ de moins sous forme d'impôt et de taxes de vente; c'est ça le résultat. En 1982, ça va se traduire par 778 $ de moins pour chaque contribuable québécois. Au total, pour 1981, c'est une économie de 1 600 000 000 $ pour les Québécois et, en 1982, ça va se traduire par 2 177 000 000 $ d'économie, donc d'accroissement du pouvoir d'achat du citoyen québécois.

Pour la première fois, un contribuable marié avec deux enfants et gagnant moins de 23 000 $ au Québec paiera moins d'impôt qu'en Ontario. Pour la première fois, un couple de personnes âgées ayant des revenus de moins de 14 460 $ ne paiera pas d'impôt. C'est ça la politique d'allégement fiscal du gouvernement du Québec.

Les résultats sont là, les conclusions s'imposent aussi. Si nous avions conservé les structures fiscales que nous ont léguées les libéraux en 1976, c'est, pour 1981, 1 600 000 000 $ de plus d'impôt que paieraient les contribuables québécois et, l'an prochain, c'est 2 177 000 000 $ d'impôt de plus que paieraient les contribuables québécois. Je pense que c'est important de le souligner, M. le Président. C'est donc un pouvoir d'achat moindre, si on avait perpétué

les structures fiscales que nous ont léguées les libéraux; les contribuables québécois auraient un pouvoir d'achat nettement moindre. C'est à cause de cette politique d'allégement du fardeau fiscal du contribuable québécois, associée à d'autres politiques économiques également. Je pense au programme de modernisation de l'industrie des pâtes et papiers, à la politique de relance des secteurs traditionnels, au programme OSE, à l'ensemble des politiques économiques du Québec. C'est à cause de cette politique d'allégement fiscal, associée aux autres politiques économiques du gouvernement du Québec, que l'on peut constater que depuis trois ans la performance économique du Québec est relativement bonne, compte tenu du contexte nord-américain et international.

C'est important de souligner, je pense, ce qu'il y a derrière la phraséologie du projet de loi. Quand on lit le projet de loi, on peut bien parler de phraséologie assez compliquée, on peut même parler de jargon juridique. Personnellement, je ne suis pas très habitué à ce jargon, il a fallu que je gratte un peu pour trouver l'essentiel mais, derrière ce jargon juridique que l'on retrouve dans le projet de loi no 11, il y a la volonté politique ferme, inébranlable et constante du gouvernement du Québec de réduire substantiellement le fardeau fiscal des contribuables québécois. (16 heures)

L'autre aspect, il me semble, important de ce projet de loi, c'est, comme le soulignait le ministre des Finances, une réforme de la fiscalité des entreprises. C'est un élément important du discours sur le budget et on le retrouve forcément dans ce projet de loi no 11. Là, on voit les libéraux faire vraiment ce qu'on peut appeler de la démagogie facile en isolant les augmentations de taxes de cette fiscalité des entreprises et en ignorant, volontairement, bien sûr, les baisses d'impôt que comporte cette réforme de la fiscalité des entreprises. Car, s'il est vrai que ce projet de loi et que cette réforme de la fiscalité des entreprises comportent une hausse de 1,5% à 3% de la contribution des entreprises au nouveau fonds des services de santé, il faut aussi, pour être honnête, ajouter que le taux de l'impôt sur les profits des PME, des petites et moyennes entreprises, sera réduit de 13% à 3%. Quant aux grandes entreprises, elles bénéficieront d'un crédit d'impôt de 5% au 1er janvier 1982. Autrement dit, il faut examiner tous les volets, tous les éléments de cette réforme de la fiscalité des entreprises.

Bien sûr, comme le soulignait le ministre des Finances récemment, cela permet au Québec de tirer davantage d'argent des entreprises, des corporations. Mais, comme une bonne part de ces charges additionnelles sont déductibles de l'impôt fédéral, c'est, tout compte fait et dans l'ensemble, car c'est l'ensemble qu'il faut considérer, bien sûr, l'ensemble des charges assumées par l'entreprise, avantageux pour les corporations, avantageux pour les entreprises.

Le Québec y gagne, il a plus d'argent. Les entreprises y gagnent, elles paient moins. C'est le fédéral, admettons-le, qui y perd dans l'opération. Cela ne nous attriste pas beaucoup, je dois vous dire, et ce n'est que juste, M. le Président, que le fédéral y perde dans cette opération. Quand on considère, par exemple, que le resserrement des règles d'accès à l'assurance-chômage, on se le rappellera, a eu pour effet de gonfler substantiellement le budget de l'aide sociale, qui dépasse maintenant 1 000 000 000 $ -on sait les effets que cette réforme de l'assurance-chômage au niveau fédéral a eus - quand on considère, de plus, que le taux de croissance des transferts fédéraux, qui constituent quand même près de 30% des revenus du Québec, ne fut que de 3,8% en 1980-1981 et sera sensiblement le même en 1981-1982, moins de 4%, alors que le taux d'inflation, comme tout le monde le sait, dépasse les 10%, dans ce cas, en particulier, le Québec y perd très nettement avec le fédéral, dans le cas de l'assurance-chômage et au chapitre des transferts de ressources.

En 1980-1981, si on avait ajusté, si l'on veut, le taux de croissance des transferts fédéraux au taux d'inflation, le Québec aurait obtenu en plus 230 000 000 $ et, en 1981-1982, c'est 460 000 000 $ qu'il aurait obtenus de plus, mais qu'il n'a pas, parce que le taux de croissance des transferts fédéraux est nettement inférieur au taux d'inflation. Je dis donc, M. le Président, qu'il n'est que juste que, dans le cas de la réforme de la fiscalité des entreprises, le Québec y gagne. Je félicite le ministre des Finances d'avoir su mettre au point une pareille politique. C'est tout à son honneur.

Je terminerai, M. le Président, en disant que le budget a été déposé, comme on le sait, quelques jours avant le décret électoral, quelques jours avant le début de la campagne électorale; on avait à peine amorcé à ce moment-là le débat sur le discours sur le budget. De plus, les mesures qui y sont contenues ont fait l'objet de discussions et de débats - je pense que tout le monde en conviendra et s'en souviendra -au cours de la campagne électorale. Cela a été un des thèmes de la campagne électorale. Compte tenu de ces faits, je pense qu'on doit et qu'on peut légitimement considérer que, le 13 avril dernier, la population du Québec, en reportant au pouvoir le Parti québécois, a du même coup approuvé implicitement le budqet du ministre des Finances, le budget du gouvernement et les mesures qui en découlent.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Avant d'aborder les trois points dont je discuterai en relation avec la loi 11, je voudrais prendre peut-être deux minutes pour au moins corriger ce que, pour être très indulgente, j'appellerai les demi-vérités du député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Du royaume du Saguenay.

Mme Lavoie-Roux: Oui, de Lac-Saint-Jean. Non seulement celles du député de Lac-Saint-Jean, mais aussi celles du député qui l'a précédé, peut-être celui de Limoilou. On répète à satiété que l'économie du Québec est florissante, qu'il n'y a pas de problème, elle n'a jamais si bien été. Savez-vous ce qui intéresse les gens quand ils discutent de l'économie? Les gens qui doivent apporter le pain et le beurre à la maison, savez-vous ce qui les intéresse? C'est d'avoir un emploi. Pourtant, les statistiques sont sorties pas plus tard qu'il y a trois jours et la seule province où le chômage augmente, alors que partout ailleurs le chômage descend, c'est le Québec.

Vous avez beau dire aux jeunes: On est à l'avant-garde dans l'économie, compte tenu du contexte économique actuel. Quand vous savez qu'il y a au moins 250 000 jeunes de 16 ans à 25 ans qui se cherchent de l'emploi, je voudrais qu'on me fasse la démonstration que l'économie du Québec est aussi florissante que le répètent à satiété les députés du côté ministériel. Je suis même à me demander si on est vraiment responsable. On entend toujours répéter: L'économie va bien, l'économie va bien! Pourtant, l'économie va bien quand les gens travaillent.

En Alberta, il y a un chômage de 3,2%. Je pense qu'en Alberta les gens sont en droit de dire que l'économie va bien, mais, quand le plus haut taux de chômage du Canada se trouve au Québec, qu'il est de 10% et qu'il est à la hausse alors que partout ailleurs il descend, je serais un peu moins arrogante vis-à-vis de la santé de l'économie au Québec.

J'ai entendu le député de Lac-Saint-Jean dire tout ce qu'ils ont fait: Nous avons indexé les exemptions personnelles pour l'impôt. Ce gouvernement, alors qu'il était dans l'Opposition, condamnait le gouvernement libéral du temps parce qu'il n'indexait pas les impôts. Pourtant, ce que le gouvernement actuel fait, c'est simplement d'indexer les exemptions personnelles, il n'indexe jamais les tables d'impôts. Ceci fait une grande différence entre la formule utilisée par le gouvernement du Québec et celle utilisée par le gouvernement fédéral ou les autres gouvernements provinciaux. Je pense que la vérité a ses droits et il me faudrait prendre une heure - ce à quoi je n'ai pas droit - pour réfuter toutes les erreurs ou les demi-vérités que le député de Lac-Saint-Jean a dites. J'aurai l'occasion de revenir sur d'autres. Ce n'est pas l'objet de mes propos, mais on ne peut pas laisser indéfiniment les gens dire des choses qui sont inexactes.

Il y a trois points particuliers que je veux toucher, forcément d'une façon brève, dans ce projet de loi. Le premier point touche l'augmentation de la contribution de l'employeur au fonds des programmes de santé. Encore une fois, le député de Lac-Saint-Jean s'en réjouit fort bien parce que, de toute façon, c'est le fédéral qui, dans une certaine mesure, va assumer ces tâches puisqu'il y a une partie qui sera déductible de l'impôt fédéral pour les corporations; c'est exact, mais ce qu'il ne dit pas, c'est qu'il va également y avoir une partie que les corporations du Québec vont devoir assumer. Qu'on le veuille ou non, cela va se refléter dans les prix. (16 h 10)

Quand les prix augmentent, c'est l'effet de certains facteurs. Celui-là en est un, entre autres. Quand on va chercher des taxes de cette sorte, les prix augmentent. C'est assez drôle, quand on parle de toutes les bontés de ce gouvernement, on tait bien soigneusement le fait qu'il y a beaucoup de taxes indirectes, dont les contribuables sont plus ou moins conscients, et on parle continuellement de cette soi-disant charge fiscale qui demeure très lourde au Québec comparativement à l'ensemble du Canada. On n'entend pas souvent, de l'autre côté de la Chambre, dire que depuis 1976, les taux d'électricité que tout le monde doit payer, les petits, les plus riches et les très riches ont augmenté de 77%. C'était peut-être justifié, mais qu'on ne vienne pas nous faire accroire que ce gouvernement ne fait que de bonnes choses.

Puisqu'on veut faire de la petite histoire, en remontant en 1978, on a enlevé la taxe sur les vêtements et les chaussures. Je suis d'accord, c'est excellent. Je me réjouis; qu'on l'enlève aussi sur les fournitures scolaires, c'est excellent. Mais si on veut faire de la petite histoire, on peut peut-être rappeler aussi que le ministre des Finances, dans le temps, a appris à ses dépens qu'il ne fallait pas mettre de taxe sur les vêtements d'enfants. Vous souvenez-vous de la taxe des enfants, comme on l'appelait dans le temps? Si on veut faire le panégyrique du gouvernement du Parti québécois, il faudrait peut-être donner tous les éléments et pas seulement ceux qui font notre affaire.

Mais quant à cette question de l'augmentation de la contribution de l'employeur à ce fonds de santé, il pourrait

être justifié, mis à part les éléments économiques dont mes collègues plus versés dans ce domaine parleront tout à l'heure, si au moins on était convaincu qu'ils serviront à améliorer les programmes de santé et les programmes de services sociaux.

Mais, au même moment où on commence à prélever cette taxe, parce qu'elle sera prélevée - je me demande si elle n'est pas déjà prélevée, d'ailleurs, depuis le 1er avril, en tout cas, elle le sera sûrement au moment de l'adoption de la loi d'ici la fin juin - on commence à récupérer des sommes supplémentaires, parce que ce n'est pas la Régie de l'assurance-maladie qui a besoin de cet argent. On sait qu'elle n'a même pas de déficit. Cette année, elle en a un de 45 000 000 $ à la suite d'une obligation supplémentaire que le gouvernement lui a imposée. Normalement, elle aurait même un surplus. C'est 648 000 000 $ qu'on va aller prélever par le biais de cette taxe. À quoi vont servir ces 648 000 000 $? Certainement pas pour l'année en cours, pour améliorer les services de santé et les services sociaux puisqu'on y coupe d'une façon arbitraire. On n'a même pas été capable, hier, à l'étude des crédits des Affaires sociales, de donner les critères selon lesquels on avait décidé de couper dans un domaine plutôt que dans l'autre.

On connaît aussi les difficultés auxquelles les centres hospitaliers ont à faire face. Le ministre des Affaires sociales l'a admis, l'augmentation qui était prévue pour le fonctionnement des centres hospitaliers ne correspond même pas aux nouvelles obligations qui leur sont créées par l'inflation. Tout au plus, elle couvre les frais des conventions collectives que, j'espère, le gouvernement doit respecter et assumer.

M. le Président, si le gouvernement prélève ces 648 000 000 $ puisque c'est ainsi qu'on l'évalue pour cette année, j'aimerais au moins qu'il révise certaines décisions arbitraires qu'il a prises au sujet de coupures dans le domaine des affaires sociales et des services de santé. On n'a aucune indication dans ce sens. Faut-il en conclure que ce que l'on prélève au nom d'une amélioration des soins de santé et des services sociaux, va simplement être redistribué dans le fonds consolidé de la province pour couvrir des dépenses de tous ordres?

Voilà pour le premier point. Quant au deuxième, il touche la fameuse question de l'école privée. Je suis heureuse d'en parler. Je ne veux pas revenir sur tous les détails qu'on a donnés tout à l'heure, mais je dois vous dire que la soi-disant transparence du gouvernement en prend pour son rhume quand ce gouvernement tente de poursuivre des objectifs idéologiques qui sont bien davantage ceux des militants du Parti québécois que ceux de la majorité de la population.

Tout à l'heure, le député de Lac-Saint-Jean disait: Le Parti libéral n'a rien appris, laissant entendre qu'on s'était peut-être fait battre parce qu'on était pour l'école privée, enfin parce qu'on n'était pas contre l'école privée. M. le Président, vous savez fort bien, comme moi, que cela n'a jamais fait l'objet d'un débat durant la campagne électorale et que le Parti québécois s'est bien gardé d'en parler, comme le mentionnaient d'ailleurs tout à l'heure mes collègues qui m'ont précédée. Nous avons là un autre exemple de la transparence du gouvernement. 11 a tardé pendant cinq ans à faire connaître sa politique sur l'enseignement privé, et aujourd'hui, il ne la fait pas connaître davantage mais, par un biais qui est celui de la restriction budgétaire, on ne sait pas où il s'en va.

Cela dit, M. le Président, je voudrais quand même vous dire exactement quelle est ma position quant à l'école privée. Je souhaiterais que les gens de l'autre côté puissent se lever, ceux qui sont contre l'école privée et ceux qui sont pour, mais ne craignez point, on n'a pas voulu en parler durant la campagne électorale et je doute fort que vous sachiez quelle est aujourd'hui leur position. Pour ma part, M. le Président - et je pense que la population le sait - j'ai été à la tête d'une administration scolaire, la plus grande au Québec et au Canada. À tous ces moments-là, et même depuis que je suis à l'Assemblée nationale, j'ai toujours dit que la priorité devait être accordée à l'école publique. Pourquoi je le dis? C'est que je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté. J'aimerais que les gens de l'autre côté aussi, au lieu d'errer et de procéder par des manoeuvres vraiment peu transparentes, nous disent quel est leur point de vue.

Par contre, je pense que l'école privée a aussi le droit d'exister. Notre Charte des droits et libertés de la personne la prévoit. Nous savons également qu'elle répond aux désirs, quelles que soient les raisons, d'un grand nombre de parents. On a fait beaucoup état, par exemple, de la pétition de Solidarité-Québec qui avait réuni 700 000 signatures. On fait peu état dans cette Chambre d'une autre pétition qui nous est parvenue de parents qui se prononçaient en faveur de l'école privée et qui, elle, contenait 500 000 signatures, M. le Président.

Ce qui est encore plus grave, c'est que devant ce désir affirmé par quand même une partie importante de la population, si on compte le nombre d'élèves qui sont dans les institutions privées, si on compte le nombre de personnes qui ont signé cette pétition, on s'étonne vraiment que le gouvernement n'ait pas prévu... Ce soir, probablement entre deux articles, on va trouver du temps pour tout à coup entendre quelques institutions et les institutions, j'en suis, mais avec ce

gouvernement qui nous parle de la participation des parents à tout moment, à tout instant, où seront-ils, ces parents, ce soir pour se faire entendre? Où seront-ils, ces parents? Ils n'y seront pas. On fait fi de toutes ces considérations quand il s'agit de faire passer sa propre idéologie et qu'on est loin d'être certain qu'elle soit celle de la population.

M. le Président, si ce soir on nous fait la démonstration que la diminution que devront subir les écoles privées est identique à celle que doit subir le secteur public, j'appuierai le gouvernement de tout coeur, parce que je pense qu'il ne doit pas, dans un contexte de restrictions budgétaires, y avoir deux poids deux mesures, particulièrement quand il s'agit de l'école publique. Je veux que ce soit très clair. Le député de Lac-Saint-Jean lance des accusations absolument non fondées et dit: Vous n'avez rien compris. Vous êtes contre l'école publique. Nous ne sommes pas contre l'école publique, M. le Président, je le répète. Je suis pour l'école publique, mais je ne suis pas contre l'école privée, parce qu'elle répond aux désirs d'un grand nombre de parents. Mais je me suis toujours assurée, à l'Assemblée nationale et là où j'étais avant, que jamais le développement de l'école privée ne se ferait au détriment de l'école publique et je tiens à le répéter. (16 h 20)

M. le Président, un dernier mot sur le troisième volet que je veux aborder, celui de l'aide sociale. II y a dans cette loi des dispositions qui viennent modifier la Loi de l'aide sociale, et elles m'apparaissent extrêmement importantes, même si j'ai entendu peu de personnes en parler; peut-être en a-t-on parlé hier. Je suis d'accord, et j'ai eu l'occasion de le dire au mois d'août l'an dernier, quand le gouvernement a dit: Nous allons tenter de récupérer des sommes qui ont été acquises frauduleusement à même des prestations d'aide sociale. Je le répète, je suis pour cela. Mais on se souviendra qu'au mois d'août, l'an dernier, on avait agi unilatéralement.

Je pense qu'au moins, aujourd'hui, c'est plus clair, on agit d'une façon plus ouverte, et je pense que les erreurs, dans certains cas, assez dramatiques que l'action unilatérale du ministère des Affaires sociales avait occasionnées l'été dernier ne se répéteront pas ici aujourd'hui. Mais je voudrais quand même attirer votre attention sur un point. On prévoit, quand on propose ces modifications à l'aide sociale, que, par exemple, certains règlements...

M. Picotte: Je m'excuse auprès de ma collègue. Y a-t-il moyen de demander au gouvernement, s'il veut tenir un caucus, de se déplacer à la salle 91 ou 81?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Votre question de règlement est pertinente, M. le député; je devais en faire la demande, mais je pense que ça va se rétablir.

Mme la députée de L'Acadie, vous avez la parole.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ce qui est prévu dans le projet de loi no 11 vient modifier la Loi de l'aide sociale, ce sont des changements importants à la réglementation. J'espère que vous ne m'en voudrez pas, M. le Président, si je lis un seul petit paragraphe d'un article, même si on n'y a pas droit: "Le mode de remboursement de l'aide sociale, le montant minimum des versements réclamés, les conditions, cas et circonstances dans lesquels ce montant est augmenté et l'époque à laquelle le remboursement commence"... Enfin, il y a une réglementation nouvelle qui sera préparée afin de répondre à ces exigences.

J'aimerais faire une proposition au gouvernement, puisqu'il ne semble pas clair que ceci sera mis en oeuvre. On dit que la présente loi entre en vigueur le jour de sa sanction, et les règlements se trouvent à l'intérieur de la Loi de l'aide sociale. Je voudrais demander au gouvernement qu'il y ait une prépublication de ces règlements? On fait une prépublication dans la Gazette officielle quand une loi ou des règlements touchent un grand nombre de personnes. Dans le cas précis qui nous occupe, ça touche au moins 300 000 personnes, et même davantage. Si on compte les enfants, ça va toucher les 500 000 personnes. J'aimerais bien que le parti ministériel prenne cette demande en considération, parce qu'on éviterait les erreurs et les heurts vraiment très durs qu'on a commis l'été dernier lorsqu'on a procédé de la façon qu'on connaît. Je pense qu'il est important que ces gens ou ceux qui les représentent aient l'occasion de se faire entendre.

M. le Président, en terminant, je veux simplement poser trois questions au gouvernement. La première: Qu'entend-il faire avec les 648 000 000 $ qu'il ira chercher cette année à titre de contribution aux programmes de santé et de services sociaux, alors que le budget qui a été adopté et qui sera en vigueur prévoit des coupures qui feront mal à la population en termes de services de santé et de services sociaux? La deuxième question, c'est: Pourquoi ne montre-t-il pas plus de transparence à l'endroit de ces modifications qui affecteront le réseau du secteur privé? Ou encore, peut-il nous donner l'assurance que les restrictions qui seront imposées au secteur privé seront identiques à celles imposées au secteur public? Si tel n'est pas le cas, il faudra finalement que le gouvernement dévoile son jeu. Veut-il, à plus ou moins long terme, par

des détours pour le moins sinueux, arriver à contrer la volonté, ce qui me paraît être encore la volonté d'un qrand nombre de parents, y compris un grand nombre d'éducateurs qui sont dans le secteur public et qui envoient leurs enfants à l'école privée? On tentera peut-être de nous dire: Les qens du secteur public sont totalement contre l'école privée. Je Dense qu'à ce moment, il faudrait qu'ils nuancent leurs paroles.

Finalement, je rappelle au gouvernement qu'il y a eu des erreurs importantes commises dans le cas de la perception des trop-versés en matière d'aide sociale et qu'il doit s'assurer qu'il prend toutes les mesures nécessaires pour que ces erreurs ne se répètent pas. Je pense qu'à ce moment-ci, ce projet de loi - et je n'ai même pas touché à toute la partie qui est vraiment plus économique - touche probablement plusieurs millions de citoyens du Québec. Je pense qu'on ne saurait ménager les efforts pour s'assurer qu'il s'applique dans les meilleures conditions possible et en respectant le plus possible la volonté de tous et chacun des citoyens et citoyennes du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, à écouter l'Opposition depuis une journée et demie, on croirait que ces gens ignorent le contenu du projet de loi. On a l'impression qu'ils n'ont absolument pas compris le contenu de ce projet de loi qui vise d'abord et avant tout à répondre à un de leurs objectifs les plus chers, la réduction du déficit. J'ai entendu cette même formation politique, pendant deux ou trois mois, parler d'énormité du déficit, parler de trou béant, revenir à la charge, faire campagne électorale, se faire battre avec des arguments quétaines, bien sûr, mais essayer de dramatiser au maximum l'état des finances publiques.

Au moment où le ministre des Finances apporte des correctifs, présente un projet de loi qui vise essentiellement à restreindre les dépenses, à comprimer le rythme des dépenses, ces gens prennent une voie d'évitement. Les voilà partis avec beaucoup de partisanerie politique sur l'école privée. Là, c'est-y épouvantable, le gouvernement va faire disparaître les écoles privées, parce que, disent-ils, on coupe, on comprime les dépenses dans le secteur privé. Ils oublient de comparer, bien sûr, les compressions budgétaires du secteur privé par rapport aux compressions budgétaires du secteur public. Mais, personnellement, si j'ai les moyens comme individu, comme père de famille d'envoyer mes enfants dans une école privée, je dois en assumer la facture. C'est ma conception, si vous voulez et je vais me démasquer. Je ne me gênerai pas pour vous dire que c'est inconcevable que l'État paie pour un système parallèle qui ne fait que dispenser exactement le même programme que celui du secteur public. Ce sera la position que je tiendrai au sein de mon caucus en temps et lieu. On aura le couraqe aussi, MM. de l'Opposition, de demander aux parents du secteur public et du secteur privé de venir s'exprimer en commission parlementaire, lorsque viendra le temps de déterminer carrément et définitivement notre politique sur l'enseignement privé. Il ne faut pas avoir honte de le dire. Je n'ai pas honte de l'affirmer. Ce n'est pas au petit travailleur de la Gypsum à 210 $ par semaine, comme ce n'est pas au travailleur de Firestone ou des papiers Scott dans mon comté, comme ce n'est pas au travailleur de Ciment indépendant ou à des mères de famille qui travaillent à peine au salaire minimum dans les usines de couture, à payer un système parallèle.

Je ne dirais pas la même chose, je ne tiendrais pas les mêmes propos si vous me parliez d'écoles privées qui assument une certaine complémentarité au secteur public. Là, par exemple, je dirais non seulement: On doit les subventionner à 80%, mais on doit les subventionner, à mon avis, à 100%. Qu'on pense, par exemple, aux troubles auditifs. Peu d'écoles sont spécialisées dans ce domaine. À ce moment, je pense que l'État doit subventionner, et ce à 100%, ce type d'écoles qui assument une complémentarité au secteur public. Mais de là, par exemple, à se payer le luxe de subventionner en parallèle deux systèmes qui dispensent exactement les mêmes programmes, c'est trop coûteux pour une population qui est déjà surcharqée de taxes. (16 h 30)

Voilà ma conviction bien personnelle. On devra intégrer ces écoles au réseau du système public. Nous, comme gouvernants, qui que nous soyons, de l'Opposition ou du gouvernement, notre premier souci est d'améliorer d'abord et avant tout la qualité de l'enseignement dans le secteur public, non pas nous faire les défenseurs à tout prix et inconsidérés de l'école privée. Cela m'apparaît tout à fait aberrant comme situation et comme propos que vous tenez depuis le début des discussions sur le projet de loi no 11.

De grâce, tachez de réaliser qu'on est déjà dans une province où l'école privée, par rapport aux autres provinces canadiennes, assume le plus de responsabilités dans ce domaine. Qu'on pense qu'on a 5,7% de nos effectifs étudiants au niveau des écoles privées, alors qu'en Ontario - on aime les comparaisons - 2,5% de la population

étudiante se retrouvent dans les écoles privées et aucune subvention n'est accordée aux écoles privées dans la province d'Ontario. Il n'y a que l'Alberta et la Saskatchewan qui donnent certaines formes de subventions aux écoles privées, toutes les autres provinces canadiennes, aucune subvention. La moyenne canadienne est de 3,1%, alors que celle qui nous approche le plus, au Manitoba, indique 2,8% de clientèle scolaire qui fréquente les écoles privées.

Donc, cessons de faire de la démagogie là-dessus. Il n'est pas question de faire disparaître l'école privée, ce n'est pas ça qui est dit dans la loi; on parle de compressions budgétaires. Le jour viendra où le gouvernement déposera sa politique sur l'enseignement privé et vous verrez ce qu'elle sera, mais vous ne pouvez pas présumer présentement. Ce que vous faites, c'est de la présomption; vous présumez que nous allons faire disparaître l'école privée, c'est de la pure et simple démagogie. Vous vous êtes liés à des clientèles, j'ignore lesquelles, vous pourriez nous le dire, si vous voulez qu'on se démasque, ce n'est pas gênant de se démasquer. Personnellement, mes deux garçons vont à l'école publique présentement. S'ils vont à l'école privée en septembre, je suis prêt à en assumer la note. Mais, comme responsable public, comme élu du peuple, je ne peux pas demander à un citoyen qui gagne 200 $ ou 250 $ par semaine de payer une surtaxe, de payer des impôts additionnels pour me payer un luxe spécial, moi, individu. Non. Ce n'est pas ça du collectivisme.

Dans une société, qu'on veut tout au moins la plus égalitaire possible, on veut au moins donner chance égale à tout le monde. Chance égale, il me semble que vous devriez y réfléchir un peu, MM. de l'Opposition, et penser qu'au Québec, il y a 94,7% de la clientèle qui va à l'école publique. Le gouvernement doit se soucier, d'abord et avant tout, de la qualité de l'enseignement dans nos écoles publiques. Dieu sait si on est obligé de comprimer cette année même, au niveau de l'enseignement. Les écoles publiques ont connu la dénatalité, ont connu tous les problèmes de fermeture d'options, parce qu'il n'y avait pas assez de clientèle pour offrir tel type d'option professionnelle. Au privé, c'est le contraire qui s'est produit. En 1970, vous aviez 3,7% d'étudiants québécois dans le secteur privé; en 1979, on se retrouve avec 7%. Au contraire, ils ont réussi, dans un courant inverse, à améliorer leur situation. Grâce à qui? Grâce à l'insouciance gouvernementale. Il est temps qu'un gouvernement pense à une politique vraiment globale sur l'enseignement public et privé à la fois.

En ce qui me concerne, chaque fois qu'on pourra me démontrer qu'il y a une forme de complémentarité, qu'il y a une forme de qualité supérieure, à cause de tel facteur, ou de telle condition, j'y adhérerai, mais non pas en partie, en totalité. Mais qu'on ne vienne pas me dire que les petits et les moyens salariés peuvent se payer le luxe de payer pour deux systèmes parallèles.

La loi 11 ne parle pas de politique quant à l'enseignement privé et à l'enseignement public, elle ne parle que de compressions budgétaires. Si on a l'audace, comme gouvernement, de couper dans le secteur public, on doit avoir le même culot de couper dans le secteur privé. Merci,

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Nelligan.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: M. le Président, dans son discours inaugural, le grand thème de M. Lévesque était la transparence. Nous nous sommes demandé si c'était la transparence des années passées, qui avait été très opaque, ou s'il y avait un nouveau thème, un renouveau dans le Parti québécois et qu'on chercherait la transparence pour les années futures. La transparence, selon moi, c'est échanger, c'est partager avec les citoyens, c'est dire les choses comme elles sont, c'est expliquer, c'est exprimer, c'est échanger. La transparence, ce n'est pas tout cacher. La transparence, c'est ne pas mettre ses convictions en veilleuse. C'est ne pas mettre ses convictions sous le tapis, les balayer comme la poussière. Le député qui m'a précédé, le député de Joliette, a parlé de ses convictions personnelles concernant l'enseignement privé. Pourtant, ses propres chefs n'ont pas eu autant de courage depuis cing ans. Le député de Jeanne Mance, tout à l'heure, nous a expliqué que, depuis cinq ans, les ministres se sont lancé la balle et personne, aucun d'eux n'a voulu proclamer ses vues profondes, ses convictions sur l'enseignement privé. Le premier ministre lui-même a fait des déclarations en disant que l'enseignement privé comptait pour le Parti québécois et qu'il ne serait jamais brimé et jamais désavantagé. Les chefs n'ont jamais eu le courage d'exprimer leurs convictions comme l'a fait, aujourd'hui, le député de Joliette. Est-ce cela la transparence?

En fait, c'est une tactique bien connue. Lors du référendum, la guestion qui a été posée aux citoyens avait été conçue de façon qu'elle soit le plus floue possible, afin de les emberlificoter dans un langage qui serait le plus confus possible, espérant qu'ils n'en retiendraient pas le message principal.

L'autre jour, nous avons discuté ici du projet de loi sur l'accès à la propriété. Comme on ne nous avait jamais présenté le projet de loi, on a fait une espèce de petit détournement. On nous a dit: Bon, on va

vous présenter un projet de loi, adoptez-le et, plus tard, on vous dira ce que cette loi veut dire. On va donner à la Société d'habitation du Québec le pouvoir d'exprimer ce que la loi aurait dû exprimer en premier lieu.

Pendant la période électorale dont le député de Joliette a fait état, certes, le Parti québécois qui a gagné, mais il a gagné, encore une fois, en cachant ses couleurs. Le parti souverainiste qui se targue d'être fier de la souveraineté du Québec future, de l'indépendance, du séparatisme, etc., ne s'est jamais affiché. Il a eu peur de ses convictions encore une fois.

Cette fois-ci, qu'est-ce qu'on fait? On nous présente un projet de loi qui est censé être un projet de loi fiscal qui englobe toutes sortes de mesures. Au milieu de cela, on fait un changement idéologique du point de vue de l'enseignement privé. Les députés ministériels veulent nous persuader que toute la question repose sur l'enseignement privé, du point de vue des libéraux, et que nous défendons purement l'enseignement privé contre l'enseignement public. Or, comme Mme la députée de L'Acadie l'a si bien exprimé, nous sommes prioritairement, à 100%, pour l'enseignement public, mais en même temps nous réalisons qu'il y a un secteur de l'école privée qui est là depuis des centaines d'années. Ce qu'on dit: Revoyons toute la question ensemble, revoyons toute la question avant que nous adoptions une loi qui, soi-disant, sous le couvert d'une mesure fiscale, va rendre la vie de ces écoles privées si difficile qu'en fait elles vont pratiquement disparaître. Nous disons que s'il faut une discussion idéologique sur ce point, nous sommes d'accord, mais que nous le fassions de façon ouverte, que nous le fassions, d'accord, avec les gens qui sont eux-mêmes concernés, les parents dont les enfants vont à l'école privée, les enseignants de ce secteur privé. (16 h 40)

M. le Président, pourriez-vous demander à ces gens de tenir leur caucus ailleurs, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Allez, M. le député.

M. Lincoln: Ils sont tellement ouverts aux idées que nous les écoutons en silence, mais eux ne nous font pas la même politesse. Ils sont tellement ouverts aux nouvelles idées, justement!

Je dis au député de Joliette que je ne suis pas principalement pour l'école privée ou l'école publique, je suis 100% pour la priorité des écoles publiques, mais je dis que si on fait une mesure qui va affecter les écoles privées, qu'on les consulte avant le coup, qu'on ne fasse pas une espèce de loi, une loi subterfuge avec un petit article dedans.

Ensuite, quand la loi aura été adoptée en deuxième lecture, on va aller en commission parlementaire, quand tout aura été fait, sachant qu'on a une grosse majorité, de toute façon, et que la loi sera adoptée telle quelle. Ce n'est pas la façon de consulter les gens, ce n'est pas la façon d'aller près du peuple, ce n'est pas la façon d'être transparent.

Le fait même que cette loi a pour un de ses articles fondamentaux et principaux un changement de direction par rapport aux écoles du secteur privé d'intérêt public démontre que le ministre des Finances lui-même a passé la balle à son collègue de l'Éducation pour parler de cette question. Je comprends très bien que cette loi ne concerne pas seulement le secteur de l'école privée. Je veux parler du principe qui veut qu'on nous passe des choses fondamentales, idéologiques, sous le couvert d'autres choses. On fait croire au public que c'est une loi d'intérêt fiscal, que c'est une mesure fiscale; quand, vraiment, ce qu'on vise dans cette loi, c'est le changement du système d'écoles privées.

On dit: Les écoles privées, on ne veut pas les éliminer. Nous sommes d'accord, la loi ne dit pas ça, mais si vous les grevez de réductions de subventions à un tel point qu'elles ne peuvent plus fonctionner, évidemment, c'est sûr qu'à la longue elles vont s'éteindre. Comme l'a souligné la députée de L'Acadie, on doit faire une comparaison entre les réductions qui se font au secteur public et les réductions qui vont se faire au secteur privé. Si les réductions sont comparables, nous sommes d'accord; mais, justement, nous mettons le gouvernement au défi de nous prouver que les réductions qui vont affecter le secteur privé ne seront pas beaucoup plus sévères que celles qui vont affecter le secteur public.

Le député de Joliette a apporté cet argument: Je ne suis pas pour l'école privée, on ne peut pas tenir deux secteurs parallèles en même temps, ça nous coûte beaucoup trop cher. D'abord, l'école privée coûte 40% moins cher que l'école publique. Deuxièmement, pour tous ces enfants qui seront déversés à l'école publique, est-ce qu'il n'y a pas un ratio du nombre d'élèves par professeur? Qu'est-ce qu'on va faire? Est-ce que l'école publique ne va pas avoir justement à assumer les charges qui sont maintenant assumées par le secteur privé? Est-ce que le député de Joliette est assez naïf pour penser que si demain matin on fermait toutes ces écoles, les écoles publiques continueraient comme par le passé, sans aucune dépense additionnelle? Il faudra qu'il repense ses chiffres.

Dans la tradition péquiste, on nomme l'Ontario, l'Alberta, la Saskatchewan surtout quand les comparaisons sont favorables au

Québec, ce qui n'arrive pas souvent. Mais quand il faut regarder les choses qui sont tout à fait défavorables, à ce moment-là, on dit: Écoutez, vous êtes toujours à citer l'Ontario, l'Alberta. En fait, le député de Lac-Saint-Jean a fait toute une péroraison sur notre paradis fiscal. Il a félicité le ministre des Finances, il faut croire, pour nous avoir donné le plus fort déficit de toutes les provinces canadiennes depuis la Confédération; une accumulation de déficits de 10 000 000 000 $, qui va passer à 14 000 000 000 $ l'année prochaine, et on le félicitel II nous dit: Nous avons fait tellement de mesures formidables: on a enlevé la taxe indirecte sur les chaussures, on a enlevé la taxe indirecte sur ceci et sur cela.

L'autre jour, je voyais dans les journaux - il y a quelques jours de cela seulement -une comparaison. En fait, c'est Revenu-Québec et Revenu-Canada; alors, on ne peut pas accuser le gouvernement fédéral encore une fois, et cela disait: Une personne avec un salaire imposable de 10 000 $, au Québec, paie en impôt 3006 $. En Ontario, dans la province justement où on ne donne pas de subventions à l'école privée, peut-être qu'il n'y a pas besoin d'en donner puisque là, les parents paient des taxes de 2278 $. Le Québec est de beaucoup, pour une personne au salaire imposable de 10 000 $, non pas une personne très fortunée justement, la province où on paie le plus de taxes, plus qu'à Terre-Neuve, plus que dans toutes les autres provinces du Canada. Que monsieur ne vienne pas me dire justement quel gouvernement fantastique nous avons eu depuis les derniers quatre ans.

Ce que nous regrettons, dans ce projet de loi, M. le Président, c'est la façon détournée, la façon peureuse, la peur de s'afficher qui se perçoit encore dans ce projet de loi comme dans le projet de loi sur l'habitation et l'accès à la propriété, peur qui a régné pendant la période électorale au sujet de la souveraineté ou dans la question si floue qu'on a présentée au référendum; c'est la marque de fabrique du Parti québécois. Ils ont peur de s'afficher. Si le député de Joliette veut s'afficher, pourquoi ne fait-on pas une consultation populaire sur cette question? Pourquoi n'a-t-on pas parlé de cela à l'élection? Nous, on n'a pas eu peur de s'afficher dans notre programme électoral; on a dit: On est pour l'enseignement public prioritairement, mais, tout de même, nous pensons que le secteur privé a droit d'existence, il est reconnu par les droits universels de l'homme, il a un droit d'existence, il faut qu'il continue d'une façon équitable. S'il y a des coupures au secteur public, qu'il y ait des coupures semblables et parallèles au secteur privé, mais pas des coupures beaucoup plus fortes et beaucoup plus lourdes.

Le député de Joliette a aussi parlé des écoles spécialisées, des écoles pour les enfants qui ont des problèmes auditifs, des écoles pour les enfants inadaptés. Mais, ce qu'il n'a pas dit dans son discours, c'est comment il s'attaquera à ce projet de loi qui englobe ces onze écoles et plus qui justement se spécialisent dans ce travail. Cette loi ne fait pas de distinction. Cette loi ne fait pas de distinction non plus comme le député, mon confrère, l'a dit l'autre jour, pour les gens plus âgés qui vont suivre un système éducatif le soir après le travail et qui seront aidés justement d'un système d'écoles privées qui donnent ces possibilités. Cette loi ne fait aucune distinction. Si donc le député de Joliette voulait vraiment qu'une distinction se fasse pour que ces écoles soient subventionnées à 100%, que le gouvernement le dise. J'ai travaillé à un comité de parents d'une école privée, je n'en rougis pas du tout. J'ai travaillé à un comité de parents d'une école privée où toutes les races, toutes les classes se rencontraient. Ce n'était pas une école de snobs, une école distinctive. C'était une école comme toutes les écoles. Certains parents cherchent ces écoles pour justement revoir des mesures peut-être plus disciplinaires, peut-être un accent plus grand sur certaines questions religieuses, morales ou quoi que ce soit.

Mais c'est leur droit fondamental de le faire. Si, par exemple, on pense que les écoles privées ne sont pas assez démocratiques, si on pense que les écoles privées sont trop restrictives, qu'on examine cette question à fond. Cela, je le veux bien. Qu'on fasse une consultation avec ce secteur, avec les parents dont les enfants appartiennent à ces écoles. Mais qu'on le fasse avant qu'on nous présente des projets de loi détournés. Un des députés a dit, du côté libéral, qu'il luttait contre la façon dont ce projet de loi était présenté. On nous a dit qu'on faisait un spectacle. Alors, maintenant, essayer comme Opposition de dire nos vues, de nous opposer aux principes, aux mesures sur lesquelles nous ne sommes pas d'accord, c'est donner un spectacle. Mais pourquoi est-ce qu'on est ici, nous? (16 h 50)

Ils nous disent qu'on a peur de s'afficher. Je n'ai pas peur de m'afficher. Mes collègues n'ont pas peur de s'afficher, mais peut-être ont-ils, eux, peur de s'afficher, parce que je remarque ici que pour deux libéraux qui parlent, il n'y a qu'un seul péquiste qui a le courage de se lever pour dire ses convictions. Ah, cela vous fait rire. C'est le cynisme qui a voulu, justement, que le projet de loi sur l'habitation soit présenté d'une façon détournée et qu'aujourd'hui, on ne sache pas ce qui se passe. C'est le cynisme qui veut que cette même loi englobant soi-disant des mesures fiscales, fasse un détournement idéologique

du point de vue de la scolarité et c'est pour cela qu'on se bat ici. J'espère que le gouvernement aura le courage de ses convictions, pour la première fois depuis que je suis ici, laissera ce projet de loi tomber et fera une consultation générale avec les parties impliquées pour qu'on revoie toute la question en profondeur. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, il me fait plaisir de participer, cet après-midi, a ce débat traitant du projet de loi no 11 qui est le sommaire, le condensé de toutes les mesures budgétaires annoncées par le ministre des Finances dans le discours sur le budget du 10 mars dernier. On peut se poser plusieurs questions sur ce projet de loi qui est très complexe. Les mesures proposées sont-elles acceptables et équitables? Sont-elles adéquates en fonction des besoins de l'État? Comme on le sait, M. le Président, le budget, cette année, atteindra quelque 20 000 000 000 $, c'est-à-dire quelque 12 000 $ par famille et les besoins de l'État sont quasiment un gouffre.

Les mesures proposées sont-elles adéquates en fonction des besoins du citoyen et de sa capacité de payer? Sont-elles adéquates en fonction de la conjoncture économique, c'est-à-dire vis-à-vis de la situation économique du Québec? Le ministre des Finances, il y a deux jours, nous a dit oui. Nous, de l'Opposition, disons: Nous ne sommes pas si sûrs. Certaines mesures, en effet, seront néfastes pour l'entreprise et pour les individus. On peut se poser la question à savoir si les mesures budgétaires appellent de nouvelles politiques ou de nouvelles orientations. Ont-elles été discutées en public? Plusieurs de mes collègues ont tenté de répondre à ces questions.

Pour ma part, M. le Président, je traiterai brièvement de deux de ces dernières questions, à savoir si les mesures proposées sont adéquates en fonction de la conjoncture économique et si ces mesures budgétaires appellent des politiques qui ne sont pas déclarées ouvertement. Cette dernière question appelle la transparence du pouvoir. Si on se limitait à des coupures qui ont été bien discutées et bien proposées, je ne crois pas que l'Opposition serait en mesure aujourd'hui de prononcer autant d'allocutions et de s'opposer à certaines de ces coupures. Mais, de fait, je ne crois pas que le ministre des Finances ou le gouvernement ait voulu suivre les directives qui ont été données par le premier ministre lui-même lors du discours inaugural. Je voudrais le citer, M. le Président. Dans le discours inaugural du 19 mai dernier, M. Lévesque nous disait ceci: "II va donc falloir naviguer avec beaucoup de précaution sur ces eaux traîtresses des années quatre-vingt." Et il continuait en disant: "On devra aussi choisir désormais avec le plus grand soin chacun de nos programmes nouveaux et plus que jamais, ces choix parfois douloureux devront être transparents, clairement établis et expliqués et justifiés. C'est à cette condition seulement, qu'une société démocratique peut consentir à une telle discipline, si nécessaire soit-elle."

C'est là qu'est le débat. Le pouvoir est-il transparent dans ce débat? De la part du premier ministre, ce furent de belles paroles, parce qu'il était bien conscient du projet de loi no 11 que le ministre des Finances devait nous proposer. Plusieurs de mes collègues ont donné plusieurs exemples à cet égard. Le premier exemple touche les institutions privées d'enseignement. Je ne voudrais pas répéter ici ce que plusieurs ont dit à ce sujet. Comme on l'a noté, le député de Jeanne-Mance en a fait état, compte tenu du fait que le ministre de l'Éducation avait proposé à plusieurs reprises une politique touchant les institutions du secteur privé, on peut se poser la question: Pourquoi le gouvernement tente-t-il de faire un coup de force alors même qu'il n'a pas eu le courage de déposer sa politique sur ce sujet? C'est une parodie de la démocratie et je crois qu'il faut la dénoncer.

Ce gouvernement, qui n'est pas capable de transparence, apporte des changements profonds aussi dans d'autres domaines. J'aurai l'occasion d'y revenir demain, ou après demain, dans une allocution que je ferai concernant le discours sur le budget parce qu'il y a des changements profonds qui seront apportés touchant Hydro-Québec et la politique énergétique du Québec. Le ministre de l'Énergie, pourtant, nous avait dit en commission parlementaire, au mois de février, qu'il n'y avait pas de changement important dans le domaine énergétique, qu'il n'y avait pas de changement dans la politique énergétique. Les journalistes avaient alors fait état d'un changement de politique qui aurait permis à Hydro-Québec ou au gouvernement d'augmenter la tarification rapidement pour faire en sorte que, éventuellement, l'État puisse se servir dans les coffres d'Hydro-Québec. Pourtant, à ce moment-là, le ministre de l'Énergie avait dit qu'il n'en était pas question. Voilà maintenant que, dans le discours sur le budqet on fait état de mesures très importantes qui feront en sorte que la politique visant à produire l'électricité et la vendre à un meilleur coût sera modifiée à l'avenir.

Nous comprenons bien sûr les raisons qui motivent le gouvernement et le ministre des Finances à agir ainsi. Ces besoins étant ce qu'ils sont, la conjoncture financière du

gouvernement étant ce qu'elle est, il faut qu'il aille chercher l'argent là où il se trouve. J'aurai quand même l'occasion d'y revenir parce que cette mesure, en particulier, aura des répercussions considérables, et pour l'entreprise, et pour les individus.

J'aimerais aujourd'hui dénoncer une communication qu'a faite le ministre des Finances à la presse dernièrement, dans laquelle il disait, à peu de mots près, que les tarifs d'Hydro-Québec suivraient l'inflation, comme ils ont suivi l'inflation dans les quatre ou cinq dernières années. Pour être plus précis, j'aimerais faire état de quelques chiffres. De 1977 jusqu'à la fin de 1981, l'inflation, à Montréal, aura augmenté de quelque 54%. Pourtant, durant ces mêmes années, l'augmentation de la tarification de l'électricité a augmenté de quelque 75%. La question que nous allons poser au ministre des Finances est celle-ci: Est-ce que les tarifs d'Hydro-Québec, à l'avenir, vont suivre l'inflation ou s'ils vont suivre la marche ascendante qu'ils ont suivie depuis quatre ou cinq ans? Ces deux exemples, je crois, illustrent très bien le manque de transparence du gouvernement dans des politiques cachées qui se retrouvent dans le projet de loi no 11 et dans le discours sur le budget et qui n'ont pas eu l'occasion d'être discutées en public.

L'autre question - j'en traiterai très brièvement, M. le Président - tient aux mesures budgétaires et fiscales qui ont été annoncées. La question est celle-ci: Est-ce qu'elles sont adéquates en fonction de la situation économique présente? La situation économique du Canada, et du Québec dans l'ensemble, n'est pas très bonne présentement, et il est vrai que la conjoncture nationale et internationale, nord-américaine, est loin d'être bonne également. Mais nous sommes quand même en droit de demander et d'exiger, je crois, que la position économique du Québec soit aussi bonne que la moyenne canadienne. Si on examine quelques indicateurs, on se rend bien compte, malgré ce que nous disent nos amis d'en face, que l'économie du Québec tire de l'arrière. Le produit intérieur brut au Canada, de 1976 à 1980, a augmenté en moyenne de 10,8%; au Québec, il n'a augmenté que de 10,4%. Les immobilisations totales au Canada, en moyenne, ont augmenté de 10,9%; au Québec, ce n'était que de 6,6%. (17 heures)

La population, bien sûr, n'a pas augmenté beaucoup, il y a eu une saignée qui a fait en sorte qu'au Canada, la population a augmenté de 1%, alors que la population québécoise n'a augmenté que de 0,3%. Quant à l'emploi, il a augmenté, au Canada, de 3%, alors qu'au Québec, il n'était que de 2,1%. Bien sûr, ces chiffres, tout le monde les connaît indirectement, nous en faisons l'expérience chaque jour, et ils dénotent une conjoncture extrêmement difficile pour le Québec présentement. Nous savons que la faiblesse dans l'emploi vient du fait qu'il y a une faiblesse des investissements. C'est un autre championnat pour le Québec.

Les immobilisations, c'est-à-dire les nouveaux investissements, ont connu un rythme d'augmentation très en deçà du rythme canadien depuis 1976. Plus que jamais, le Québec est tributaire des investissements publics alors que les investissements privés sont nettement insuffisants. À ce moment, je vous citerai quelques chiffres dans l'évolution des immobilisations au Canada. Au Canada, de 1976 à 1980, comme je le disais tantôt, elles augmentaient de 10,9%, c'est-à-dire 11,8% dans le secteur privé et 8,5% dans le secteur public, alors qu'au Québec elles n'augmentaient que de 6% de 1976 à 1980, c'est-à-dire de 4,5% dans le secteur privé seulement comparé à 11,8% pour le Canada en moyenne, et de 9,9% pour le secteur public, comparé au chiffre de 8,5% dans le secteur public en moyenne au Canada.

Quant au chômage, il est néfaste. Il y avait au Québec, en avril dernier, quelque 118 000 chômeurs de moins de 25 ans, soit un taux de chômage de 16,3%. De ce nombre, la moitié étaient sans emploi depuis plus de 14 semaines. Toujours en avril 1981, 128 000 autres jeunes Québécois ont déclaré qu'ils n'étaient pas présentement à la recherche d'un emploi puisque, ayant cherché en vain, ils avaient décidé de faire autre chose ou d'attendre patiemment des jours meilleurs.

Pour décrire cette conjoncture, il faudrait évoquer en plus le dernier rapport du Vérificateur général qui, tout au long 250 pages, dénote des déficiences dans l'administration du gouvernement de la province de Québec. Il n'est donc pas surprenant aujourd'hui que l'on fasse face à une situation difficile. C'est une situation que le gouvernement a créée lui-même dans une très grande mesure en ce qui concerne la dette de la province.

Parlons-en de cette dette. L'intérêt sur la dette publique directe du gouvernement provincial, qui était de 11 600 000 000 $ au 28 février 1981, deviendra de 14 000 000 000 $ à la fin de l'exercice 1981-1982, sera d'environ 1 575 000 000 $ cette année, c'est donc environ 1000 $ par famille.

On peut également dire que le gouvernement doit dépenser un peu plus de 4 000 000 $ par jour seulement pour faire face au paiement de la dette. Devant cette conjoncture économique, devant cette situation financière du gouvernement, qu'est-ce que le ministre des Finances nous

propose? Il nous propose ce projet de loi no 11 et, sans vouloir en résumer toutes les modalités, j'aimerais attirer l'attention sur deux ou trois de ses aspects. Il y a des taxes régressives, j'en ai mentionné quelques-unes, dont la tarification d'Hydro-Québec, qui deviendra une taxe indirecte avant très longtemps et que comme l'a dit lui-même le ministre des Finances, il aura le bonheur d'apporter dans les coffres de l'État environ 300 000 000 $ dans un an ou deux.

Mais ce qu'il y a de plus néfaste, je crois que c'est la taxe sur la main-d'oeuvre. Vous savez, la taxe pour payer supposément les services de santé augmentera de 1,5% à 3%. Plusieurs de mes collègues ont fait état du fait que cette taxe pénalisera justement la main-d'oeuvre, parce que les employeurs à l'avenir verront à diminuer autant que faire se peut la quantité de la main-d'oeuvre dont ils auront besoin de façon à minimiser le paiement de cette taxe.

En plus de cela, il faudrait rappeler la taxe sur l'essence qui a été décrétée, pas cette fois-ci, mais l'an dernier, qui est maintenant proportionnelle à l'augmentation du coût de l'essence et qui fera en sorte que, désormais, comme l'a dit le ministre des Finances, nous sommes dans l'ascenseur. Aussitôt que le gouvernement fédéral ou que les fournisseurs de pétrole augmentent leurs prix, la taxe sur l'essence et sur le pétrole augmente automatiquement.

Il faut donc en conclure que, parmi les mesures annoncées que je viens d'expliciter, il y en a plusieurs, quelques-unes, en tout cas, qui auront des effets néfastes sur la santé de l'économie du Québec. À ce sujet, j'aimerais ajouter qu'en plus, le ministre des Finances ne se contente pas d'annoncer des mesures comme celle-là, mais il se prend des mesures administratives qui, dans une très grande mesure, vont nuire à l'exportation.

Mon collègue, le député de Vaudreuil-Soulanges, a posé une question au ministre des Finances, l'autre jour, à savoir pourquoi le ministre des Finances avait décidé de modifier les règles administratives et de pénaliser les gens qui sont impliqués dans l'exportation?

Personnellement, M. le Président, ayant été impliqué pendant plusieurs années dans l'exportation de services à l'extérieur du Québec et du Canada, j'ai beaucoup de difficulté à comprendre la pénalité que le ministre des Finances tente d'imposer à cette industrie.

Je voudrais invoquer ici un mémoire sur la fiscalité canadienne et québécoise, qui a été présenté au ministre du Revenu et au ministre des Finances, en mars dernier, mémoire présenté par l'Association des ingénieurs-conseils du Québec et qui faisait état du fait que cette décision administrative avait un impact extrêmement négatif. Je peux vous en citer quelques lignes: "Comme effet secondaire, l'impact de ces interférences et de la législation prévue est, en premier lieu, de décourager la main-d'oeuvre disposée à travailler à l'étranger. Comme effets secondaires, on peut identifier la perte de représentants sur les marchés internationaux et, par la suite, une perte de présence du Québec; la perte d'emplois directs et indirects; le freinage d'acquisitions technologiques; une contribution diminuée dans l'équilibre de la balance des paiements et un effet d'entraînement réduit dans la vente des biens d'équipements."

Il faut se rappeler, M. le Président, que l'ensemble des bureaux de génie-conseil - et on ajoute à ça tous les bureaux qui fournissent des services de toutes sortes -ont un effet très bénéfique sur l'économie du Québec. J'ai voulu donner cet exemple simplement pour indiquer qu'il faudrait bien que le ministre des Finances s'arrête et qu'il pense un peu à aider les gens qui cherchent à développer l'économie.

Si vous prenez le secteur du génie-conseil, de 1967 à 1976, il y a une valeur de 8 500 000 000 $ de matériaux et d'équipements qui ont été produits au Québec, pour des projets réalisés par l'entremise des ingénieurs-conseils. De ce total une valeur de 2 600 000 000 $ de matériaux et d'équipements ont été produits directement ou indirectement au Québec pour des projets réalisés à l'étranger, par l'entremise de consultants québécois.

Je crois que ces quelques chiffres dénotent la raison pour laquelle, nous de l'Opposition, nous avons beaucoup de réserves vis-à-vis du projet de loi no 11 et pour laquelle nous avons dénoncé le manque de transparence du gouvernement qui, contrairement à ce que disait justement le premier ministre, René Lévesque, dans le discours inaugural... Il disait que, lorsque l'État fera des choix décisifs, il faudra bien qu'il les explique à la population. Nous disons que c'est un budget qui manque de transparence et nous disons également que c'est un budget qui nuira à l'économie du Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Trois-Rivières.

M. Denis Vaugeois

M. Vaugeois: Merci, M. le Président. J'avais pensé d'abord faire un peu le point en réaction à certains propos tenus dans cette Chambre, ce matin, sur l'avenir de l'école privée, mais, auparavant, j'aimerais réagir aux propos du député d'Outremont et de son prédécesseur, le député de Nelligan.

Le député d'Outremont nous a signalé d'abord ce qu'on savait déjà, c'est-à-dire que le projet de loi no 11 est assez complexe. Effectivement, il est assez complexe et

d'ailleurs les discours que l'on entend sur ce projet de loi montrent la complexité, la difficulté peut-être de saisir certains aspects de la loi qui est devant nous, mais il n'en reste pas moins que les contradictions sont nombreuses. On voudrait qu'on réduise le déficit, on voudrait réduire le service de la dette, on voudrait réduire les dépenses, mais, en même temps, on voudrait en mettre un peu plus ici et là.

Le député d'Outremont vient d'insister sur l'endettement des Québécois à partir du service de la dette qui est le nôtre, depuis le budget qui est présenté ou l'ancien budget. Bien sûr, on évite de parler de l'augmentation des dépenses du Québec dans les années 1970 à 1976, mais on retient surtout - c'est ce qui est susceptible de frapper l'imagination des gens l'endettement par tête d'habitant ou par famille ou par unité familiale. Je ne veux pas m'étendre là-dessus, mais j'aimerais bien rappeler aux gens d'en face que ces chiffres, on peut les mettre à côté de ceux du gouvernement fédéral, on peut montrer le degré d'endettement du Québec par rapport à celui d'Ottawa et on voit qu'un peu partout, c'est le double. S'ils nous disent, avec leur façon de calculer, que c'est 1000 $ par tête; avec Ottawa, c'est 2000 $ par tête. S'ils nous disent que c'est 1500 $, 2000 $ ou 2500 $ par famille ou par regroupement, ce sera exactement ou à peu près le double pour Ottawa. Le service de la dette pour le Québec doit être rendu actuellement à environ 10%. C'est le double à Ottawa. Alors s'il y a quelqu'un qui nous endette de façon dangereuse, de façon inquiétante, de façon troublante, c'est bien le gouvernement fédéral, et pour des services que nous n'avons pas toujours, d'ailleurs. Au moins, il y a une chose qui est certaine: avec les dépenses québécoises, c'est pour nous autres, cela nous sert, tandis que quand on regarde aller l'argent du gouvernement fédéral, on n'est pas toujours certain que cela nous revient. (17 h 10)

Le député de Nelligan nous a reproché un certain nombre de choses, entre autres, de ne pas l'écouter quand il parlait. C'est ce qu'il fait à ce moment-ci, il est en intense conversation avec son voisin d'en arrière. Ah! II vient d'enlever ses lunettes, peut-être qu'il va me comprendre, M. le Président.

Une voix: Ce sont des lunettes auditives.

M. Vaugeois: Le député de Nelligan, qui est un nouveau venu et qui n'a pas assisté à tous nos discours et qui, peut-être, se désintéressait de la politique québécoise il n'y a pas tellement longtemps, nous faisait le reproche d'avoir souvent fait des comparaisons avec les autres provinces, mais toujours quand elles étaient à notre avantage. Je lui en veux un peu d'avoir manqué un certain nombre de mes discours. J'ai été un de ceux à qui on peut reprocher de fréquentes comparaisons avec d'autres provinces et particulièrement avec l'Ontario parce que, dans les domaines dont j'étais responsable, la comparaison était à l'avantage de l'Ontario. J'ai aimé souvent comparer les institutions culturelles de Toronto, par exemple, pour constater nos retards du côté des musées, du côté des bibliothèques, du côté des équipements culturels en général. Pour des Québécois qui se croyaient à l'avant-garde du développement culturel en Amérique du Nord, dans le monde atlantique, sinon dans l'univers entier, je pense que c'est une bonne leçon que de constater l'effort fait et les résultats obtenus par nos voisins de l'Ontario.

Un autre domaine dans lequel les gens de l'Ontario nous donnent encore, à mon avis, un exemple qu'il faudra suivre bientôt, c'est du côté de l'aménagement, du côté du développement urbain, du côté de la densification urbaine. Le projet de loi que nous avons devant nous propose des modifications à nombre de petites lois, par exemple la Loi sur les stimulants fiscaux au développement industriel. J'aurais aimé lire, en fait, Loi sur les stimulants fiscaux au développement culturel. J'espère qu'un jour ou l'autre, le ministre des Finances pensera à des stimulants fiscaux au développement culturel.

On nous parle de remboursement d'impôts fonciers. On nous parle de la Loi sur la fiscalité municipale. Cette Chambre a travaillé pendant des mois à la réforme de la fiscalité municipale. On a concédé aux municipalités l'intégrité de la taxe foncière. On a concédé aux municipalités l'exclusivité de la taxe foncière. À ce moment-ci, on constate ensemble qu'il faut comprimer les dépenses, qu'il faut faire attention, mais qu'il faut, dans ce contexte, respecter l'autonomie des élus municipaux. Nous leur avons donné une certaine autonomie financière à partir de cette réforme sur la fiscalité municipalité. L'étape à venir, à mon avis, c'est d'accroître la valeur foncière, d'améliorer l'assiette fiscale des municipalités.

L'exemple viendra peut-être encore de l'Ontario. L'Ontario a mis au point, ces derniers mois - ils ont repris un vieux programme qu'ils avaient - un programme d'intervention dans les centre-ville. Le gouvernement de l'Ontario prête aux municipalités des sommes d'argent à de bonnes conditions, leur permet de faire des regroupements de terrains parce que, très souvent, ceux qui s'installent le font dans les banlieues où les terrains sont regroupés et ils sont facilement négociables. Mais au même moment, vous avez un phénomène

d'étalement qui nous coûte de plus en plus cher. Nous le vivons actuellement à Québec même. Alors que Eaton, à Toronto, s'est installée au centre-ville, alors que M. Eaton, à Montréal, a décidé d'investir dans le centre-ville, ici, à Québec, on s'en va à l'extrémité de la ville, aux limites de la ville. Alors que nous n'avons pas d'arqent pour des choses élémentaires, nous en avons pour raccorder par des égouts et des aqueducs, des bretelles, des petits bouts d'autoroute, nous en avons pour accorder des centres commerciaux. À cet égard, mon point de vue, c'est qu'il faudrait peut-être tendre l'oreille aux propos du président du Conseil exécutif de Montréal, M. Lamarre, et du maire de Québec, M. Pelletier, qui ont demandé un moratoire là-dessus.

Actuellement, nous sommes un peu coincés. Il y a des choses qu'on n'a pas pu faire, mais peut-être qu'on pourrait faire. Cela me fait plaisir de dire au député de Nelligan que cela ne me gêne pas que l'exemple nous vienne de l'Ontario. L'Ontario s'est ressaisi, on y favorise la densification urbaine, l'aménagement urbain; on se bat contre l'étalement urbain qui est extrêmement coûteux, tandis que nous, on hésite encore. C'est un discours que je n'entends jamais, des gens d'en face. S'il y a un endroit où nous pourrions comprimer les dépenses, s'il y a un endroit où on pourrait économiser de l'argent et améliorer en même temps la qualité de vie, je pense que c'est par des politiques d'aménagement. Chaque fois qu'on est venu dans cette Chambre avec des lois sur l'aménagement, que ce soit la loi du zonage agricole, que ce soit la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, cela a été vivement combattu par les gens d'en face au nom d'une certaine liberté, une liberté à laquelle on adhère, mais quand c'est une liberté qui nous fait faire des dépenses un peu folles, qui brise nos villes, qui étire notre territoire, qui gâche l'ensemble de notre développement, il faut savoir réagir. Un gouvernement et des élus doivent prendre leurs responsabilités.

À venir, donc, au niveau de la réforme de la fiscalité municipale, pour moi, il y a une politique d'aménagement urbain, il y a des politiques pour favoriser une densification, un resserrement, une qualité de vie. Je le répète: Pour ma part, je serais favorable au moratoire demandé par le président de l'exécutif de Montréal et le maire de Québec et par plusieurs élus municipaux. Je pense qu'il faut se préoccuper des centre-ville.

C'est là que je trouve la porte d'entrée pour parler pendant quelques minutes de l'enseignement privé. L'enseignement privé pour nous, aujourd'hui, d'après ce que nous propose le ministre des Finances, semble devoir faire l'objet de petites compressions budgétaires qui me paraissent, pour le peu que j'en ai, comme vous, sous les yeux, moins graves, moins odieuses que ce que nous avons demandé au secteur public. Mais il n'en reste pas moins que les gens sont inquiets et ils se demandent quelles sont les volontés du gouvernement. Pourquoi les gens sont-ils inquiets? Pourquoi y a-t-il des gens qui tiennent à l'école privée?

La question, bien sûr, on se l'est souvent posée. Plusieurs d'entre nous, plusieurs d'entre vous sont le produit de l'école privée. Ceux de mon âge, par exemple, ne pouvaient pas aller à un certain niveau d'études sans passer par l'école privée. Sommes-nous des ingrats? Est-ce qu'aujourd'hui nous méprisons l'école privée ou crachons sur elle? Est-ce que nous voulons la fermer? Pas du tout, sauf que nous nous sommes préoccupés de développer le secteur public, celui qui est d'abord accessible à tout le monde, celui qui a été réformé par les libéraux au début des années soixante pour s'ouvrir, pour l'ensemble de la population, vers les niveaux supérieurs, le niveau collégial, le niveau universitaire. Cette réforme qui est la vôtre, nous n'avons jamais voulu la remettre en question, nous avons toujours cherché à l'améliorer et, aujourd'hui, notre principal problème demeure l'amélioration du système public.

Si vous nous faites reproche aujourd'hui d'avoir tardé à clarifier nos positions sur le rapprochement que nous souhaitons entre l'école privée et l'école publique, c'est justement devant les difficultés d'améliorer le système public. L'explication est là, finalement; l'école privée se défend assez bien, elle fait preuve d'une qualité qui est assez remarquable. Souvent, l'école publique, d'ailleurs, peut tenir la comparaison, absolument, sauf qu'il reste que l'ensemble du système demande à être ajusté, à être soutenu.

Le ministre de l'Éducation qui a précédé l'actuel ministre a proposé un certain nombre de choses parfois très coûteuses; il va falloir apprendre à proposer des réformes moins coûteuses. Parmi les facteurs d'appréciation des parents, il y a, à mon avis, la stabilité de l'école privée, stabilité souvent tout simplement physique. Il y a des parents dans mon comté qui ont choisi l'école privée - je l'ai choisie, à un certain moment, pour mes enfants parce que c'était l'école la plus près de la maison que j'habitais; je l'ai choisie ici, à Québec, pour les mêmes raisons, à cause de sa localisation et de sa stabilité. Dans mon comté, des enfants de l'élémentaire ont changé six fois d'école. Quand le deuxième ou le troisième commençait son école élémentaire, les parents avaient leur leçon. Ils se tournaient vers l'école privée pour y inscrire leur enfant avec la certitude qu'il serait là pendant six ans.

Est-ce que l'école est nécessairement

meilleure? Parfois, mais pas nécessairement. Elle est parfois moins bonne, mais au moins elle est toujours à la même place, elle a toujours les mêmes méthodes, avec une stabilité - j'ai envie de le dire et d'ouvrir une parenthèse là-dessus - qui, parfois, est centenaire ou plusieurs fois centenaire. Cela me plaît de rappeler que ces institutions d'enseignement sont très souvent nées avec la Nouvelle-France, avec le Québec a ses origines. Chez nous, ces institutions privées sont celles des Franciscains, autrefois les Récollets, qui sont arrivés avec les premiers habitants, accueillis par nos Amérindiens. Même le séminaire, à l'origine, est là au tout début de la colonie. Les Filles de Jésus sont arrivées au début du siècle et ont formé des générations très importantes.

On a eu, l'autre jour, une réunion à Trois-Rivières - on soulignait un événement que je ne rappellerai pas aujourd'hui - et on s'est rendu compte que le maire, le curé de la cathédrale, l'ancien évêque et ainsi de suite étaient tous des gens qui étaient passés par le Jardin de l'enfance et, bien sûr, par le séminaire. Donc, les Filles de Jésus, les Ursulines, les prêtres du séminaire, les Franciscains ou les Récollets, autant d'institutions privées dont nous avons hérité, qui ont formé des générations de Québécois et qu'aujourd'hui on ne veut pas remettre en question. (17 h 20)

Nous avons dans notre programme une position là-dessus. Nous ne nous sommes jamais écartés de cette position. Nous voulons rapprocher les écoles privées des écoles publiques. À ce moment-ci, nous travaillons intensément à améliorer la qualité de l'école publique. Je vois arriver le ministre de l'Éducation et je le vois acquiescer à cette préoccupation qui est la nôtre d'améliorer l'école publique, de la rendre compétitive, quand elle ne l'est pas, parce que, encore une fois, souvent elle l'est. Donc, M. le Président, nous sommes en face d'écoles extrêmement méritantes des Québécois. Si, un jour, nous pouvons vraiment réaliser cette partie du programme qui consisterait à un rapprochement des deux systèmes, qui consisterait à une accessibilité pour tous selon leur choix à ces différentes écoles, à une complémentarité que souhaitait le député de Joliette, nous en sommes tous.

D'ailleurs, je suis de ceux qui souhaiteraient, le plus tôt possible, pour l'école privée, des subventions à 100%. Je sais que je ne suis pas le seul à souhaiter cette chose. À 100%. Je sais que certaines écoles n'en veulent pas. À ce moment, par exemple, il faut se poser la question: Pourquoi ces écoles n'en veulent-elles pas? C'est à ce moment, je pense, que la Chambre va se diviser. Les raisons pour lesquelles on ne veut pas de la subvention à 100%, c'est parce actuellement il y a un élément de discrimination. Là il y a des choix de faits. Ce n'est pas dans ce débat que je voudrais entrer aujourd'hui. Je dis, M. le Président, que nous avons une position là-dessus qui passe par le maintien de l'école privée aussi longtemps que nous n'aurons pas réussi à rapprocher ces écoles privées des écoles publiques et à donner à tous les parents l'accès aux écoles de leur choix parce que, finalement, c'est l'argument principal. On veut protéger le choix de tout le monde. Je dis, encore une fois, que très souvent le choix est simplement un choix physique. Une école qui est là et qui restera à cet endroit.

C'est assez dramatique ce qui nous arrive. J'ai fait allusion tout à l'heure au coût de l'étalement urbain. Au niveau scolaire, le coût de l'étalement urbain, c'est des écoles encore neuves, des polyvalentes construites dans le champ, construites loin du monde. Des écoles qui sont à peine terminées tellement on a eu à taponner sur certains éléments de la construction, on est à la veille de les fermer. On les a mises un peu partout. Des écoles élémentaires, on en a ouvert un peu partout. On en ouvre encore un peu partout. On n'a pas de politique d'aménagement de territoire. Les enfants sont loin des écoles et les écoles sont loin des enfants. Peu importe, de toute façon, cela nous coûte quelque chose comme 250 000 000 $.

Cela, on ne le dit pas assez souvent dans cette Chambre. À mon avis, là encore, il y a une action à entreprendre assez rapidement sur le coût du transport scolaire, sur la localisation des écoles, sur l'aménagement des quartiers, sur l'aménagement et le réaménagement des villes. C'est là que sont les économies à faire, M. le Président. Des économies à faire pour le pétrole, des économies à faire pour la distance à parcourir, pour toutes sortes de choses. Quand on autorise un nouveau centre commercial, à tous les jours, tous les contribuables s'endettent un peu plus pour permettre cette circulation d'automobiles, au niveau des égouts, au niveau des aqueducs, au niveau du réseau routier, mais au niveau aussi de la subvention sur l'essence.

Le député d'Outremont a insisté sur notre taxe qui montait avec celle du fédéral. On ne peut pas nous reprocher de toute façon d'être à l'origine de la hausse. La hausse vient de là-bas. Nous, on a eu l'intelligence de se placer dans l'ascenseur. Je pense que c'est un des bons coups du ministre des Finances. Il reste que l'essence est subventionnée. À chaque fois qu'on en brûle, à chaque fois qu'on en consomme, et à chaque fois qu'on demande un rallongement routier on se coûte à soi-même une petite fortune. Au niveau de l'école, je pense qu'il faut savoir maintenant se poser la question. Le ministre de l'Éducation ne sera pas

surpris de m'entendre tenir ces propos parce que je me bats sans compter actuellement pour le maintien des dernières écoles. À Outremont, vieille ville de Montréal, M. le député d'Outremont, à Sillery, vieille ville de Québec, à Trois-Rivières, deuxième plus vieille ville au Québec, au Canada - j'allais dire en Amérique du Nord, mais ce n'est pas tout a fait exact, deuxième plus vieille ville au Canada - nous sommes en train de voir fermer nos dernières écoles.

Par le phénomène de l'étalement urbain; par le fait que des gens se sont déplacés vers Trois-Rivières-Ouest, vers Pointe-du-Lac, où on leur donne de nouvelles écoles, nous, on est en train de voir fermer nos dernières écoles. La population élémentaire est passée de 9000 à 3000 jeunes. La population secondaire, pour une énorme régionale, est passée de 15 000 à 9000. Nous sommes en chute libre à cet égard. Et les dernières écoles qu'on a des chances de conserver sont celles de la banlieue, celles où les enfants des villes auront demain à se rendre en autobus jaune, M. le Président. Ce sera bientôt le cas dans Outremont, si on ne fait pas attention. Ce sera bientôt le cas dans Sillery, si on ne fait pas attention. Ce sera bientôt le cas dans Trois-Rivières, si on ne fait pas attention.

Qu'est-ce qui restera à Trois-Rivières? À ce titre, M. le Président, je ne serai pas gêné de prendre la défense des écoles privées, parce que bientôt dans Trois-Rivières, si on ne fait pas attention, les dernières écoles accessibles pour les Trifluviens et les dernières écoles accessibles pour moi, là où j'habite dans Trois-Rivières, ce sont des écoles privées. Il n'y a plus pour mes enfants à Trois-Rivières d'écoles publiques accessibles à pied. Et j'habite le centre-ville! Je suis prêt à défendre les dernières écoles de quartier. Je suis prêt à défendre les dernières écoles élémentaires et secondaires de nos vieilles villes et de nos vieux quartiers. Il faut aussi savoir placer le débat là-dessus et si, momentanément, les écoles privées jouent ce rôle, je suis un de leurs défenseurs. Mais à ce moment-ci, il ne faut pas dramatiser outre mesure notre situation. Nous en sommes quand même à des compressions budgétaires qui touchent tout le monde, qui font mal partout. Font-elles plus mal aux écoles privées à ce moment-ci qu'au secteur public? Je ne crois pas. Là-dessus, je suis obligé de faire confiance au ministre de l'Éducation et au ministre des Finances. Le ministre de l'Éducation me dit bien que, finalement, le traitement est égal. Le traitement est égal, mais l'avenir des choses, c'est se préoccuper davantage d'aménagement, de la localisation de ces écoles, des choix à faire et du maintien d'une concurrence entre les deux types d'école. C'est le plaidoyer que font les gens d'en face. Nous sommes prêts à les suivre là-dessus, mais non pas sur une base de discrimination.

Les écoles privées ont su s'ouvrir et, dans la mesure où elles continueront de vouloir s'ouvrir, le gouvernement du Québec sera fier de les soutenir.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Merci, M. le Président. Je ne sais pas si les gens d'en face sont pour l'école privée, l'école publique ou les deux, mais une chose est certaine. Une fois sortis de l'école, les gens sont devant la nécessité de trouver de l'emploi. Cependant les quelques minutes qui sont mises à ma disposition, j'aimerais parler avec plus de détails du changement fondamental proposé par le ministre des Finances dans la fiscalité des entreprises.

Ces mesures, jusqu'à maintenant, n'étaient pas assez comprises par la population et surtout, par les chefs syndicaux et par les chefs d'entreprises. J'aimerais expliquer les intentions du ministre avec un peu plus de détails qu'il ne l'a fait lui-même pendant son discours sur le budget et poser quelques questions auxquelles j'espère il répondra.

Le ministre a dit dans le discours sur le budget que c'était un changement fondamental dans la Loi des corporations. Il a dit ceci: "C'est une refonte en profondeur de la fiscalité des entreprises."

Effectivement, il y a trois volets. Premièrement, il y a une augmentation importante de la contribution des employeurs au fonds de l'assurance-maladie. En effet, c'est une augmentation de 100%. Deuxièmement, il y a une augmentation importante de la taxe sur le capital des entreprises, une augmentation de 50%. Finalement, il y a une baisse dans l'impôt sur les profits de ces mêmes entreprises qui varie selon l'envergure des profits. Pourquoi cette réforme? Dans son discours, le ministre n'a mentionné qu'une seule raison. Il n'était pas question d'équité. Il n'était pas question de stimuler l'investissement. Il a proposé cette réforme en profondeur essentiellement parce que c'était une façon plus facile pour lui de percevoir des revenus. Il a dit ceci: "La taxation des profits par chaque gouvernement provincial présente des problèmes considérables. La déclaration des profits attribuable à chaque province individuellement n'a guère de signification." Il veut rendre plus facile la recherche impitoyable des gouvernements auprès des entreprises québécoises.

Avant de poser quelques questions, je veux passer très vite à travers ces trois éléments. Premièrement, le 1er avril, cette

année, la contribution des employeurs passera de 1,5% à 3% de la feuille de paie. Cela va augmenter les revenus du gouvernement de 508 000 000 $ par année. Une compagnie d'une centaine d'employés va payer environ 25 000 $ de plus par année. Deuxièmement, la taxe sur le capital va augmenter de 0,03% à 0,45%. Les chiffres ne semblent pas être très importants en pourcentage, mais effectivement, c'est un autre montant de 156 000 000 $ de prévu pour la caisse gouvernementale. Finalement, on propose une baisse des impôts qui sont maintenant à un niveau de 13%, à 3% pour les petites et moyennes entreprises dès le 1er juillet de cette année et, pour les plus grandes entreprises, à 8% l'an prochain seulement et, pour la troisième année, à 5,5%. (17 h 30)

Je voudrais faire quelques observations, et j'espère que le ministre pourra me renseigner dans sa réplique. Premièrement, c'est clair que cette réforme de la fiscalité va augmenter le fardeau fiscal des entreprises québécoises. Si vous prenez les chiffres du ministre lui-même, vous avez une augmentation des recettes gouvernementales, cette année, de 523 000 000 $, l'an prochain, de 328 000 000 $ et, pour la troisième année, de 230 000 000 $. Même pour la troisième année, quand le système sera en marche complètement, l'augmentation du fardeau fiscal des entreprises québécoises sera de l'ordre de 250 000 $, en dollars de 1981. Plusieurs députés ont proposé que le gouvernement fédéral paie peut-être la note parce que ces dépenses sont déductibles pour les fins de l'impôt fédéral. C'est vrai, mais si vous faites le calcul, vous verrez très vite que l'impôt fédéral, pour les petites et moyennes entreprises, du moins, est de 25%. Alors, ces entreprises vont payer 1 $ de plus au gouvernement du Québec et elles vont épargner 0,25 $ quant à l'impôt fédéral. Ce n'est pas le fédéral qui va payer toute la note, loin de là.

Avant de passer à la deuxième observation que je voulais faire, je veux répéter qu'au moment où on doit tout faire pour amener les entreprises à s'installer ici et à créer de l'emploi, ce projet du ministre aura l'effet contraire. Je veux souligner en passant le taux de chômage au Québec. Les chiffres les plus récents ont été publiés durant la fin de semaine dernière et, comme vous l'avez peut-être vu, le taux de chômage au Québec est grimpé à 302 000 personnes. Les performances de ces derniers mois sont de loin les pires de tout le Canada. De plus, au Québec, le nombre de personnes qui ont terminé leurs études cette année et qui se déclarent incapables de trouver un emploi est de 30%. 30% des étudiants ayant terminé leurs études cette année se déclarent incapables de trouver un emploi, comparativement à 13% en Ontario. Cette question de création d'emplois est importante.

Pour en revenir à mes observations, le ministre a dit: Je veux changer ce système parce que l'autre sera plus facile. Je veux lui rappeler qu'il existe, depuis quelques années maintenant, un système d'allocation au revenu pour fins d'impôt entre les provinces dans nos lois et dans les lois des autres provinces. C'est la moyenne en pourcentage des ventes réalisées au Québec comparativement à celles du Canada et le montant des salaires versés au Québec en comparaison de ceux versés au Canada. Par exemple, si une compagnie réalise 20% de ses ventes au Québec et y verse 30% de ses salaires, elle paiera la moyenne, soit 25% de ses impôts, au gouvernement du Québec.

Ce n'est pas un système qui a été créé par des fous, M. le ministre, c'est un système qui existe depuis longtemps. J'admets que, dans certains cas, il est possible de le contourner, mais, en qénéral, c'est un système qui est basé sur les profits des compagnies, qui peuvent varier, et les compagnies qui ont les moyens de payer sont obligées de le faire. Je veux souligner au ministre que ce système est le même que celui en vigueur pour les fins du calcul de la taxe sur le capital; le ministre n'a pas l'intention de le changer. Effectivement, pour les fins du calcul de cette taxe sur le capital qu'il propose d'augmenter, il utilisera exactement la même formule que celle utilisée pour le système qu'il vient de laisser tomber. Pour prouver que c'est la vérité, il a donné comme exemple les raffineries de Montréal qui ne payaient pas de taxes. Si ce système a vraiment pour effet de corriger cette situation, je propose au ministre qu'il enlève la taxe qu'il a mise sur les raffineries l'an passé, parce que les deux ne seront pas nécessaires, si sa réforme est vraiment justifiée.

Troisièmement, l'augmentation du fardeau des impôts qui aura lieu sera très difficile pour les compagnies qui ne font pas de profits, les compagnies marginales quant aux profits seront obligées de payer des frais extrêmement plus lourds. Je cite l'exemple de Paquet-Syndicat, un magasin de Québec qui est menacé par la faillite et qui a 1000 employés. Si les 1000 employés de Paquet-Syndicat gagnent en moyenne 15 000 $ par année, je pense que ce n'est pas excessif, d'après mes calculs cette année, cette compagnie va recevoir une facture du ministre des Finances d'à peu près 225 000 $ de plus que celle qu'elle a reçue l'an passé. Le ministre des Finances va dire: Écoutez, oui, la facture pour l'assurance-maladie est plus élevée de 250 000 $, mais vous avez une baisse dans vos impôts sur les profits. Ce n'est pas très drôle. Comme vous le savez, Paquet-Syndicat n'a pas fait de profits. Je demande au député de Taschereau

- c'est dans son comté - de poser cette question au ministre. De plus, il va certainement y avoir une taxe sur le capital de Paquet-Syndicat, une compagnie qui n'a pas les moyens de payer.

Ce n'est peut-être pas un bon exemple, parce que c'est une compagnie au bord de la faillite. Il y a beaucoup de petites et moyennes entreprises aujourd'hui qui ne font pas beaucoup de profits, qui n'auront guère d'incitation à en faire et qui seront aux prises avec des coûts administratifs liés directement au nombre de leurs employés et à des investissements qu'elles ne sont pas capables de payer pendant la première année, parce qu'elles n'ont pas de profits.

On peut dire à tout le monde, je pense, que c'est une taxe régressive. Normalement, on a une règle bien établie selon laquelle les impôts doivent être payés par ceux qui font des profits, ceux qui ont le moyen de payer plus doivent payer plus. Mais ce système doit exiger très souvent de ceux qui ne font pas de profits de payer sur la base de leur coût d'exploitation.

Le quatrième et avant-dernier point que je veux soulever, c'est que, par ce système, les compagnies qui emploient beaucoup de travailleurs, par rapport à leurs investissements, seront les plus pénalisées. Dans sa déclaration, le ministre a dit: C'est bon, parce que ce sera une incitation à la modernisation, au remplacement des gens par des machines, pour fins de productivité.

Je pense que, dans le contexte actuel au Québec, c'est un peu dangereux de jouer avec cette passion pour la productivité quand nous avons 302 000 chômeurs et quand nous avons 30% de nos jeunes qui sont incapables de trouver un emploi. Je ne dis pas qu'à long terme ce n'est pas une bonne idée, mais, franchement, c'est très délicat ces jours-ci.

Deuxièmement, il y a beaucoup d'industries de pointe, d'autres technologies qui emploient beaucoup de main-d'oeuvre, de matière grise et ont très peu d'investissements. Comme d'autres de mes collègues l'ont soulevé, ce projet de loi va avoir pour effet de décourager l'installation ici de compagnies qui dépendent surtout de la matière grise plus que de l'investissement.

Je vais terminer, mais je veux soulever un dernier point. Le ministre a développé dans son texte un argument pour la baisse des impôts à 3% pour les petites et moyennes entreprises. Quand il est arrivé aux autres compagnies, la baisse n'est pas en accord avec la cohérence de son système. Il a dit tout simplement: Si je donne la même baisse aux compagnies qui gagnent au-dessus de 50 000 $ qui ne sont pas des petites et moyennes entreprises, d'après la loi, cela fera un peu riche, parce que cela va leur donner une épargne de 185 000 000 $ par année. Mais si 185 000 000 $ par année c'est de la richesse, c'est sûr que les 600 000 000 $ qu'elles sont obligées de verser de plus, c'est de l'opulence beaucoup plus que de la richesse. Je pense que les arguments du ministre pour ne pas donner le même bénéfice aux grandes compagnies québécoises manque un peu de rigueur intellectuelle. (17 h 40)

En terminant, je n'ai pas le temps d'analyser ce projet de loi plus en profondeur, mais je propose fortement au ministre que les chefs syndicaux, que les chefs d'entreprise, que les chambres de commerce regardent de très près ce projet de loi et ses conséquences. J'ai l'impression que, depuis le dépôt du budget, ça n'a pas été fait et je pense que c'est essentiel qu'avant que cette loi soit adoptée le ministre s'assure auprès et des syndicats et des entrepreneurs que cet aspect de ce projet de loi n'aura pas pour effet de réduire davantage les chances de création d'emplois, ici, au Québec.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, votre droit de réplique.

M. Jacques Parizeau (réplique)

M. Parizeau: M. le Président, je comprends que, dans l'échelonnement des travaux de cette Chambre, au fur et à mesure que nous nous rapprochons de la fin de la session, des ententes interviennent quant à la façon de conduire nos travaux et que nous devons prendre le vote en deuxième lecture sur ce projet de loi avant six heures. On me permettra donc, en réplique, de ne dire que quelques mots, compte tenu de l'heure qu'il est.

Je vais donc me contenter d'un certain nombre de généralités, mais qui me semblent être utiles au point où nous en sommes dans notre débat.

Les mesures qui sont prévues par le projet de loi no 11 s'inscrivent dans un cadre général qu'on me permettra de tracer, puisqu'on y a fait souvent allusion pendant le débat en deuxième lecture.

Dans un premier temps, beaucoup de ces mesures poursuivent - comme j'ai eu l'occasion de le dire au moment de l'ouverture du débat - cette politique du gouvernement de chercher à réduire les impôts des particuliers. Cela veut dire que, bien sûr, pour reprendre les argumentations que nous avons souvent entendues, le déficit du Québec actuellement pourrait facilement être plus bas. Il y aurait une façon élémentaire de faire disparaître la quasi-totalité du déficit actuel: ça consisterait tout simplement à revenir à la structure d'impôts que nos amis d'en face nous avaient laissée. On enlèverait, d'un seul coup, plus de la moitié du déficit, bien sûr.

d'impôts que nos amis d'en face nous avaient laissée. On enlèverait, d'un seul coup, plus de la moitié du déficit, bien sûr.

Il y aurait une deuxième façon de réduire encore le déficit et de le faire presque complètement disparaître, en reliant ça à la première mesure. Cela consisterait à faire ce que mon collègue, le ministre des Finances à Ottawa, a annoncé, lui qui est pris avec un déficit bien plus considérable que le nôtre, non pas seulement en dollars, mais en proportion. Il nous disait récemment: Pour être capable de réduire mon déficit, moi, ministre fédéral des Finances, je vais couper les transferts ou les subventions que nous payons aux provinces, dans une première année, de 500 000 000 $, de façon que, dans une deuxième année, on atteigne 1 500 000 000 $.

Je pourrais faire cela avec les municipalités au Québec. Je pourrais fort bien réduire le déficit en faisant en sorte simplement d'annuler les effets de la réforme fiscale municipale que nous avons entreprise et qui a canalisé vers les municipalités un transfert net de l'ordre de 500 000 000 $. Je pourrais l'annuler. Si je revenais à la structure des impôts que nos amis d'en face nous ont laissée, si j'agissais comme le ministre fédéral des Finances nous indique qu'il voudrait agir à l'égard des municipalités, le déficit au Québec serait ridiculement bas. Il disparaîtrait presque. Nous ne le faisons pas parce que notre objectif a été, pendant plusieurs années, de faire en sorte que les impôts des particuliers baissent. Cela a été pendant plusieurs années de régler des problèmes dans la fiscalité des municipalités qui traînaient depuis des années. À cet égard, oui, effectivement, le projet de loi no 11, par un certain nombre de ses aspects, prolonge cette politique que nous pratiquons depuis fort longtemps. (17 h 45)

On y ajoute un certain nombre de dispositions à l'égard de la fiscalité des entreprises dont je suis, comme je l'ai dit, un peu étonné de constater qu'on en ait si peu parlé pendant si longtemps. À la suite de mon invite au début de ce débat d'en parler davantage, je vois qu'un certain nombre de nos collègues en ont parlé. Grâce au ciel, il était temps. J'étais un peu étonné de voir que quelque chose d'aussi fondamental que cette réforme de la fiscalité des entreprises prenne autant de temps à lever de terre, mais, enfin, nous avons eu un débat, intéressant d'ailleurs. Ce n'est pas certain que je sois d'accord avec tout ce qui s'est dit. Il me paraît un peu étonnant de voir, par exemple, que l'on hésite à reconnaître que toute mesure destinée à encourager l'augmentation de productivité de l'industrie au Québec peut être dommageable à l'égard du chômage. J'ai toujours pensé, avec une certaine candeur, mais, j'imagine, que la plupart des hommes d'affaires comprennent bien, que l'augmentation de la productivité des entreprises au Québec joue dans le sens d'une réduction graduelle du chômage et qu'aucune société n'a un intérêt quelconque à restreindre l'augmentation de la productivité. C'est un peu le débat qui existe dans toutes les sociétés depuis fort lontemps. J'ai été un peu étonné de voir ce débat réapparaître chez nos amis d'en face.

Tout à l'heure, le député de Notre-Dame-de-Grâce m'incitait à consulter des hommes d'affaires à ce sujet. J'ai presque le goût de lui renvoyer la balle. Il serait peut-être mieux de consulter, effectivement, des hommes d'affaires - et, Dieu sait, j'imagine, qu'il en connaît beaucoup - pour leur demander si, vraiment, ils sont d'accord avec ce genre de thèse, à savoir qu'une fiscalité qui encourage les entreprises à se mécaniser, à accroître leur degré d'efficacité par davantage, constamment davantage d'équipements de façon à augmenter la productivité, cela leur fait mal. Moi, j'avais toujours pensé le contraire.

Non, effectivement, les mesures que nous avons prises et dont un bon nombre se retrouvent dans le projet de loi no 11 correspondent à un certain nombre d'objectifs que nous avons en tête depuis déjà un certain temps.

Il y a d'autres dispositions du projet de loi no 11 qui s'adressent plus spécifiquement à ce qu'on appelle généralement maintenant des compressions budgétaires et, dans certains cas, essentiellement au contrôle des dépenses, à un meilleur contrôle des dépenses. Il s'en faut de beaucoup, d'ailleurs, que le projet de loi no 11 couvre l'ensemble des compressions budgétaires. Cela ne l'aborde que par un certain nombre d'aspects, peu nombreux d'ailleurs, par rapport à l'ensemble de l'opération.

Mais certains des commentaires qui ont été faits en cette Chambre, je pense, appellent, de ma part, en réplique, un certain nombre de commentaires aussi. Plusieurs des mesures qui sont prévues par ce projet de loi sont destinées à assurer un meilleur contrôle administratif, et Dieu sait s'il est important, dans toute espèce de domaine, à faire en sorte que ces monstres que sont devenus les gouvernements améliorent la façon de contrôler à la fois la manière dont les dépenses se font et les montants des dépenses, et à s'assurer que ceux qui ont accès à certains programmes, par exemple, sont vraiment admissibles à ces programmes.

Deuxièmement, on a beaucoup fait état et je pense à juste titre - des compressions budgétaires qui s'appliquent à l'enseignement privé; on en a même fait une sorte de débat de fond et, évidemment, je crois que c'était l'occasion d'en faire une

l'enseignement privé depuis deux jours a été finalement assez élevé dans son ton. Je voudrais simplement faire remarquer ceci, comme ministre des Finances. Il me paraît normal et raisonnable que, demandant à toute espèce d'institutions publiques, aussi bien dans le domaine de l'éducation que dans le domaine des services de santé, de surveiller de très près l'augmentation de leurs dépenses, nous nous tournions vers un autre groupe, celui des institutions privées d'enseignement, en disant: Chacun fait sa part, faites-la aussi.

Ce que nous demandons, de la part de ces organismes qui sont des ministères, comme contrôle sur l'expansion des dépenses, ce que nous demandons des commissions scolaires, ce que nous demandons des hôpitaux, ce que nous demandons de chacun des organismes de réseau, comme on les appelle dans notre société, vous, comme organisme privé d'enseignement, on vous demande ce même genre d'effort. Et pourquoi on demande ce même genre d'effort? Parce que je crois que les Québécois en sont rendus au point de comprendre que le Québec est jusqu'à un certain point menacé de vivre au-delà de ses moyens. Dans ces conditions, l'expansion des dépenses au Québec doit se ralentir.

Je voudrais dire quelques mots à ce sujet, et en terminant, de l'expansion des dépenses du gouvernement de Québec, depuis un certain nombre d'années. J'ai toujours l'impression que, par une sorte de phénomène d'amnésie de quelques mois en quelques mois, on oublie l'évolution du rythme des dépenses au Québec, depuis un certain nombre d'années. Au cours des années qui ont précédé l'arrivée du présent gouvernement au pouvoir, l'augmentation moyenne des dépenses du gouvernement de Québec était de 21% par an. Cela a développé un peu partout, évidemment et très normalement, dans la population en général, des appétits. On ne se paie pas le luxe d'augmenter les dépenses d'un gouvernement de 21% par année sans développer des tas d'expectatives dans le public.

Nous sommes arrivés au pouvoir et l'une des premières tâches à laquelle nous nous sommes attelés a été de réduire l'expansion des dépenses à un rythme très inférieur. C'est ainsi que, pendant trois ans, nous avons réussi à maintenir un rythme d'augmentation des dépenses annuelles pas de 21%, pas de 19%, pas de 17%, mais dans les environs de 12%. On voit à quel point la société dans laquelle nous vivons, comme n'importe quelle société d'ailleurs, est assez fragile sur le plan psychologique, à cet égard.

L'an dernier, parce que le chômage avait augmenté assez rapidement, et pour satisfaire un certain nombre d'ajustements budgétaires qu'il fallait faire, on a laissé les dépenses augmenter non pas à 21%, comme c'était le cas autrefois, mais dans une moyenne de 12% à 16%. Déjà cette simple augmentation a créé à nouveau des expectatives. Dans le présent budget, on ramène le rythme de progression des dépenses au Québec à 13%, et à 13% d'augmentation des dépenses, on nous dit: compressions, coupures. Nous disons aussi: compressions, coupures, inévitablement, par rapport aux expectatives qu'on a, par rapport à certaines structures qui se sont établies, par rapport à des rythmes de croissance qui se sont installés. Mais, quand on en arrive à considérer, dans une société, des compressions ou des coupures comme étant dramatiques quand les dépenses augmentent encore de 13%, je pense qu'il est temps d'y voir et qu'il est temps, comme tout gouvernement responsable, de rappeler, dans la société dans laquelle nous vivons, qu'on ne peut pas vivre au-delà de ses moyens et qu'il faut assurer un rythme d'expansion des dépenses raisonnable.

Voilà un peu l'état d'esprit qui sous-tend beaucoup des mesures qui apparaissent dans le projet de loi no 11. En terminant, je fais motion pour que ce projet de loi soit lu une deuxième fois et j'indique que l'honorable lieutenant-gouverneur en a pris connaissance et qu'il en recommande l'adoption.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de deuxième lecture est-elle adoptée?

M. Lévesque (Bonaventure): Vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Qu'on appelle les députés.

(Suspension de la séance à 17 h 54)

(Reprise de la séance à 18 h 2)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Vachonî S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Charlesbourg, s'il vous plaît!

Je mets aux voix la motion proposant la deuxième lecture du projet de loi no 11, Loi modifiant certaines dispositions législatives pour donner suite à la politique budgétaire du gouvernement pour l'exercice 1981-1982. Que ceux et celles qui veulent voter pour se lèvent, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Laurin, Bérubé, Landry, Lazure, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Marcoux, Godin, Rancourt, Léger, Clair, Richard, Chevrette, Bertrand, Marois, Duhaime, Tardif, Ouellette, Dussault, Gagnon,

Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, de Belleval, Proulx, de Bellefeuille, Guay, Baril (Arthabaska), Dean, Fallu, Mme Juneau, MM. Leduc, Marquis, Boucher, Lavigne, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gauthier, Blais, Lemay, Desbiens, Perron, Bordeleau, Gravel, Brassard, Laplante, Charbonneau, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Blouin, Rochefort, Brouillet, Champagne, Rodrigue, Payne, Tremblay, Beaumier, LeBlanc, Lafrenière, Lachance, Paré, Dupré.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Bourbeau, Blank, Caron, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Scowen, Picotte, Pagé, Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau, Bissonnet, Polak, Dauphin, Cusano, Hains, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Middlemiss.

Le Secrétaire: Pour: 66

Contre: 35

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette deuxième lecture est donc adoptée.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

Renvoi à la commission des finances

M. Charron: M. le Président, je propose que ce projet de loi soit déféré à la commission parlementaire des finances.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, sur la motion du leader parlementaire du gouvernement, puis-je vous demander une directive, tout en faisant une suggestion au leader parlementaire du gouvernement, et peut-être au parrain du projet de loi? Il s'agit, comme je l'ai dit il y a quelques jours, d'un projet de loi omnibus. Ce projet de loi - c'est une des premières fois à ma connaissance - contient différentes dispositions qui auraient dû faire l'objet de projets de loi différents. Tout en demandant une directive, est-ce qu'il ne serait pas possible, même à ce moment-ci, de songer à diviser ce projet de loi au lieu de l'avoir présenté comme un projet de loi omnibus? Il y a sans doute, dans ce projet de loi, certaines choses que nous aurions pu approuver, d'autres que nous ne pouvons pas approuver.

M. le Président, si on ne peut pas le faire cette fois-ci, j'espère que c'est la dernière fois que le ministre des Finances présente un projet de loi comme celui-là où il y a toute une série des pommes et d'oranges, si vous voulez, et même des pommes un peu trop mûres, ce qui nous force à discuter, comme nous allons le faire en commission ce soir, pièce par pièce. Mais comme il s'agit d'un bill omnibus, nous devrons voter contre certaines dispositions. Je pense que c'est une mauvaise tactique législative, je le soumets respectueusement et je vous demande une directive. Puisque, en deuxième lecture, nous n'avons pas le droit d'apporter d'autres amendements que le report du projet de loi...

Nous avons déjà demandé cela à votre précédesseur, M. le Président, et nous n'avons pas reçu de réponse satisfaisante, parce que le règlement n'est pas tellement clair sur la division permise en deuxième lecture. Si l'ancien président veut intervenir, je lui permettrai d'intervenir, nous allons lui donner le consentement. Je vois que le leader parlementaire du gouvernement n'est pas d'accord, je le comprends.

Ceci étant dit, nous allons voter pour la motion pour déférer ce projet de loi à une bonne étude en commission parlementaire.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je crois que le député de Bonaventure s'est un peu répondu en disant que, s'il y a des aspects du projet de loi sur lesquels les députés du Parti libéral ont choisi de s'opposer, l'appel article par article du projet de loi leur permettra de manifester cette opposition. Si, par ailleurs, ils sont d'accord avec certaines autres modalités comprises dans le projet de loi, l'appel article par article leur permettra également d'en faire part. C'est la sagesse de notre gouvernement qui a permis, dans des situations un peu confuses comme celle dans laquelle se trouve l'Opposition actuellement, de quand même avoir un minimum de clarté.

Avis à la Chambre (suite)

Je veux indiquer également que, sachant que ce projet de loi effectivement est un peu omnibus, comme on dit dans notre vocabulaire législatif habituel, c'est-à-dire qu'il couvre plusieurs terrains, je me suis assuré que, dans l'organisation de la commission ce soir, les ministres sectoriels impliqués seraient présents, ce qui fait que -j'en donnerai avis immédiatement - puisque l'Opposition a consenti - je l'en remercie - à nous permettre d'ajuster notre calendrier, en particulier celui du ministre des Finances, et d'avoir une séance à des heures un peu irrégulières, cette dite commission des

finances qui se réunira à la salle 91-A le fera à 19 h 30 et non pas 20 heures, mais s'arrêtera à 22 heures plutôt qu'à minuit. Nous avons convenu de commencer par les articles du projet de loi qui concernent le ministre des Affaires municipales et le ministre des Affaires sociales; donc, l'un et l'autre devraient normalement être présents à cette commission ce soir, et évidemment le parrain du projet, le ministre des Finances, jusqu'à 22 heures, à la salle 91-A.

Au salon rouge, ce sera la suite et la fin de l'étude des crédits du ministère du Travail, et à la salle 81-A, suite et fin de l'étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales.

Je voudrais donner avis aussi que, dès cet après-midi, nous avons fait parvenir convocation par télégramme aux différents intéressés à certains projets de loi privés pour mercredi prochain le 17. Je donne tout de suite avis que, mercredi prochain le 17, après la période des questions, vers 11 heures ou 11 h 15, au salon rouge, il y aura l'étude des projets de loi privés qui concernent le ministère de la Justice, et ce, jusqu'à midi, puisqu'il n'y en a qu'un ou deux. À midi, ce sera la commission des institutions financières qui veillera aux projets de loi privés qui relèvent de son domaine. À 15 heures, ce seront les projets de loi qui concernent les Affaires municipales. Sur ce, à moins qu'il n'y ait d'autres questions de la part de mon homologue, de mon vis-à-vis, je propose l'ajournement de la Chambre à demain, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, avant de vous permettre cette motion d'ajournement, il faudrait d'abord adopter la motion de déférence en commission parlementaire en disant qu'à la demande de directives du leader de l'Opposition, nous nous fierons à ce qui a été la jurisprudence du passé, en suggérant peut-être qu'à ce niveau, entre les représentants de chaque parti de cette Assemblée, on puisse discuter d'une autre façon de présenter ces projets de loi.

Donc, la directive étant donnée, cette motion d'ajournement des travaux à demain, 10 heures, est-elle adoptée? Adopté.

La Chambre ajourne ses travaux à demain 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 12)

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