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Version finale

32e législature, 1re session
(19 mai 1981 au 18 juin 1981)

Le mardi 16 juin 1981 - Vol. 24 N° 15

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures douze minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir. Affaires courantes. Déclarations ministérielles. Dépôt de documents.

Rapport annuel du directeur général de la représentation

Je voudrais déposer le rapport annuel 1980 du directeur général de la représentation et ce, en deux exemplaires.

M. le ministre de l'Éducation.

M. Charron: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

Rapport annuel du Conseil interprofessionnel du Québec

M. Charron: ... au nom du ministre de l'Éducation, je voudrais déposer le rapport annuel 1980-1981 du Conseil interprofessionnel du Québec.

Le Président: Rapport déposé. M. le ministre des Transports.

Rapport annuel de la Régie de l'assurance automobile

M. Clair: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport d'activité 1980- 1981 de la Régie de l'assurance automobile du Québec...

Le Président: Rapport déposé.

Rapport annuel de la Commission des transports du Québec

M. Clair: ...de même que le rapport annuel 1980-1981 de la Commission des transports du Québec.

Le Président: Rapport déposé.

M. le député de Joliette, au dépôt de rapports de commissions élues, au nom du député de Beauharnois.

Étude du projet de loi no 3

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais déposer, conformément aux dispositions de notre règlement, le rapport de la commission élue permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu qui a siégé le mardi 9 juin 1981 aux fins d'entendre les groupes relativement au projet de loi no 3, Loi sur le fonds minier.

Le Président: Rapport déposé. Au nom du député de Saint-Hyacinthe maintenant.

Étude du projet de loi no 7

M. Chevrette: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'habitation et de la protection du consommateur qui a siégé le 11 juin 1981 aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 7, Loi sur le ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur, et l'a adopté avec amendements.

Le Président: Rapport déposé. Encore au nom du député de Saint-Hyacinthe.

Étude du projet de loi no 1

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Cette fois-ci, il s'agit du projet de loi no 1, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec. La commission l'a adopté avec amendements.

Le Président: Rapport déposé. Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

M. le leader du gouvernement.

Rapports sur les projets de loi nos 213, 219 et 220

M. Charron: M. le Président, je voudrais d'abord déposer ce rapport du greffier en loi qui concerne le projet de loi qui porterait le no 213 concernant Dumont Nickel Corporation. Le projet de loi ayant été déposé au Secrétariat des commissions après le jour d'ouverture de la session et deux avis restant à paraître dans les journaux et les avis à la Gazette officielle du Québec devant paraître à compter de samedi le 3 juin - donc, certains doivent déjà être parus - il y aurait lieu de suspendre les règles de pratique à cet égard et j'en fais motion, M. le Président.

Le Président: Est-ce que cette motion de suspension sera adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader.

M. Charron: Un projet de loi qui porterait le no 219, qui concerne la Société Québecair; ce projet de loi a été déposé au secrétariat après le jour d'ouverture de la session, deux avis restent à paraître dans les journaux et quatre restent à paraître dans la Gazette officielle. Je crois qu'il y a lieu de suspendre les règles de pratique à cet égard et j'en fais également motion, M. le Président.

Le Président: Cette motion sera-t-elle adoptée? Adopté. M. le leader.

M. Charron: Finalement, un projet de loi autorisant la ville de Montréal à vendre un terrain, le projet de loi no 220, qui connaît aussi les mêmes obligations de dérogation, c'est-à-dire qu'il a été déposé après le jour d'ouverture de la session et je propose qu'il y ait lieu de suspendre les règles de pratique à cet égard, M. le Président.

Le Président: Est-ce que cette motion du leader sera adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Président: Adopté. Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je vous prierais d'appeler le projet de loi qui paraît à l'article e) du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 17 Première lecture

Le Président: M. le ministre de la Justice propose la première lecture du projet de loi no 17, Loi modifiant certaines lois relatives à l'administration de la justice.

M. le ministre de la Justice.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, ce projet de loi modifie plusieurs dispositions législatives, ces modifications sont de nature technique et ont pour but de faciliter l'administration des lois visées. Le projet de loi modifie le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur les bureaux d'enregistrement, la Loi sur le Conseil consultatif de la justice, la Loi sur les fabriques, la Loi d'interprétation, la Loi sur les jurés, la Loi favorisant la libération conditionnelle des détenus, la Loi sur les loteries, les courses, les concours publicitaires et les appareils d'amusement, la Loi sur les poursuites sommaires, la Loi sur la probation et les établissements de détention, la Loi sur les tribunaux judiciaires, la Loi modifiant le Code civil et la Loi des déclarations des compagnies et sociétés, la Loi sur les permis d'alcool, la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques au chapitre C-33.

Le Président: Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté. Le Président: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: L'article c) du feuilleton, s'il vous plaît, M. le Président.

Projet de loi no 213 Première lecture

Le Président: M. le député d'Abitibi-Est propose la première lecture du projet de loi privé no 213, Loi concernant Dumont Nickel Corporation. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté. Le Président: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

M. Charron: Avant la déférence, je proposerais qu'un autre projet de loi soit appelé, celui qui paraît à l'article g) du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 219 Première lecture

Le Président: M. le député de Beauce-Nord propose la première lecture du projet de loi privé no 219, Loi concernant Québecair - Air Québec. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture

de ce projet de loi.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je voudrais solliciter le consentement de l'Assemblée pour pouvoir déposer le projet de loi no 220 qui n'apparaît pas là où il doit être au feuilleton actuellement, qui est celui dont je viens de faire la lecture quant aux notes du greffier en loi, qui autorise la ville de Montréal à vendre un terrain sur son territoire.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement unanime?

Des voix: Consentement.

Projet de loi no 220 Première lecture

Le Président: Consentement. M. le député de Bourassa propose la première lecture du projet de loi privé no 220, Loi autorisant la ville de Montréal à vendre un terrain. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Adopté.

Renvoi à la commission des

institutions financières

et coopératives

M. Charron: Je proposerais que les deux premiers projets de loi qui viennent d'être déposés, au nom des députés d'Abitibi-Est et de Beauce-Nord, soient déférés à la commission des institutions financières.

Le Président: Est-ce que cette motion de déférence sera adoptée?

Des voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Celui concernant la ville de Montréal, je propose qu'il soit déféré à la commission des affaires municipales.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Président: Adopté.

Période de questions orales des députés.

M. le chef de l'Opposition.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Fédéralisme et souveraineté

M. Ryan: M. le Président, le premier ministre est le chef d'un gouvernement qui a été réélu le 13 avril après s'être engagé à respecter activement la volonté exprimée par les Québécois le 20 mai 1980 en faveur du maintien et du renouvellement du fédéralisme canadien. Le premier ministre est en même temps le chef d'un parti qui vient de réaffirmer avec force à son conseil national de fin de semaine son engagement immédiat et inconditionnel en faveur de l'indépendance politique du Québec. (14 h 20)

Les collègues du premier ministre au cabinet de même que les membres de la députation péquiste, ainsi qu'ils viennent de l'illustrer par leurs applaudissements, sont placés dans la même situation contradictoire et profondément équivoque. Le premier ministre pourrait-il dire à cette Assemblée et à la population du Québec comment lui-même et ses collègues du gouvernement entendent réaliser dans leurs actes et leurs décisions au cours des prochains mois cet incroyable dédoublement de rôle et de personnalité que leur impose leur double statut de bons serviteurs du fédéralisme et de loyaux militants de l'indépendance du Québec?

Comment pourrons-nous savoir, quand ils parleront et agiront en notre nom, laquelle des deux casquettes chacun portera? Quelles garanties le premier ministre peut-il offrir que la ligne de conduite et les actions du gouvernement dans les négociations en vue du renouvellement du fédéralisme canadien ne seront pas teintées et inspirées par l'objectif de l'indépendance plutôt que par la volonté référendaire du peuple québécois, laquelle s'est clairement exprimée en faveur du maintien et du renouvellement du fédéralisme.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je dois, avec toute la courtoisie possible, faire remarquer au chef de l'Opposition que pour ce qui est des équivoques ou de l'ambiguïté, - et c'est ainsi que les citoyens, je crois, en ont jugé le 13 avril - c'est beaucoup plus grave du côté de l'Opposition du Parti libéral que cela peut l'être du nôtre. Je crois que s'il y a des clarifications - je le dis encore une fois presque comme une suggestion très courtoise - qui sont nécessaires dans l'attitude des partis au Québec, des deux qui sont représentés ici,

c'est plutôt chez nos amis d'en face qu'on s'attendrait qu'il y ait un effort consistant pour essayer de voir clair et de dire clair ce qui en est de leur côté.

On dirait qu'après chacun de nos conseils nationaux - c'est toujours une découverte, c'est comme si on découvrait le monde - où il est question de notre option, les libéraux découvrent que le Parti québécois demeure un parti souverainiste.

Une voix: Ce n'est pas vrai, ça!

M. Lévesque (Taillon): Mais oui! Je ferai remarquer qu'en préparation d'un congrès qui viendra en décembre prochain et qui est démocratiquement ouvert à toutes les discussions, il est normal qu'on trace, comme on l'a fait en fin de semaine et comme on aura l'occasion de le faire probablement de nouveau au début de l'automne, les axes de la réflexion qu'on doit s'imposer. Je ne vois pas en quoi le conseil national de la fin de semaine et ce que j'ai pu y dire pouvait contredire d'aucune façon le conseil national très spécial, très solennel qu'on avait eu -Dieu sait qu'il a eu de la publicité -l'automne dernier, il y a quelques mois. Cela ne contredit aucunement non plus les positions qui ont été prises pendant la campagne électorale où il n'y avait pas de cachette non plus.

Des voix: ...

M. Lévesque (Taillon): Non. C'est un fait. Cela a été publié. Cela a été distribué partout. Cela a inspiré, le cas échéant, certains de nos discours et cela disait ceci, à la page 33, où je prends ce passaqe: "Puisque la volonté majoritaire de la population s'est exprimée il y a moins d'un an, le gouvernement s'engage à ne pas tenir de référendum sur la souveraineté-association au cours d'un deuxième mandat." C'est clair? Cette position a été définie démocratiquement par notre conseil national l'automne dernier, c'est-à-dire l'automne 1980. Nous la respecterons comme nous avons honnêtement respecté le résultat de mai 1980, contrairement à ce qu'ont fait les libéraux, qu'ils soient d'Ottawa ou de Québec. Je suis obligé de dire que c'est ce que nous pensons. Ensuite, on enchaînait en disant ceci: "Nous n'avons pas à cacher qu'à notre avis seule une formule comme la souveraineté-association - évidemment, il y a de l'évolution dans la plomberie, comme on dit souvent, mais l'essentiel de l'objectif est là, il est clair quant à nous - pourra résoudre complètement nos problèmes constitutionnels en assurant vraiment notre avenir national. D'ailleurs - c'est peut-être une chose qu'on devrait tous remarquer - les récentes projections - le recensement vient d'avoir lieu - concernant la prochaine redistribution des sièges aux Communes indiquent que le poids relatif du Québec diminuera à nouveau et nous montrent que c'est aussi, à notre avis, la seule direction susceptible de nous assurer même le simple minimum vital de sécurité collective."

C'est notre opinion, elle n'a pas changé. De la même façon qu'on peut respecter et que, je pense, on respecte en pratique l'opinion de ceux qui, continuellement, se portent, même parfois dans des circonstances discutables, sans cesse à la défense du fédéralisme, il me semble qu'on pourrait cesser de chercher des chiures de mouche continuellement autour d'une option qui est claire, qui est démocratique et qui n'a pas à s'excuser d'exister. D'une certaine façon, nous le croyons - et, dans un sens, ça rejoint ce que disait le chef de l'Opposition pendant la campagne électorale -les citoyens, sachant qu'elle était toujours au coeur de nos convictions, il me semble, ont signifié qu'ils ne voulaient pas qu'elle disparaisse le 13 avril.

D'une part, ils ne voulaient pas accepter la direction qu'on proposait en juin 1980. On a accepté de bonne foi et on travaille en fonction de cela pour l'autonomie du Québec, la défense de ses intérêts. D'autre part, le 13 avril, en même temps qu'une réponse à l'ensemble libéral, que ce soit d'Ottawa ou de Québec - une réponse assez brutale, je crois - il y avait aussi, nous semble-t-il, le goût de maintenir, comme une des voies possibles de l'avenir, qui est respectable autant que les autres, une option qui représente quand même à peu près 50% du Québec français, si je prends les résultats du référendum, et au-delà de 40% de la population totale.

Je sais bien qu'on gonfle toujours les choses en période électorale, mais le chef de l'Opposition lui-même, vers la fin de mars, en pleine campagne électorale, disait, entre autres, une chose qui a été rapportée par la Gazette, et il y a des propos du même genre qui ont été véhiculés: S'ils votaient pour le Parti québécois le 13 avril, les Québécois se trouveraient à annuler ce qu'ils ont exprimé au moment du référendum. Je n'essaierai pas de me servir de cela parce que c'est évident que cela allait beaucoup plus loin que ce que nous oserions dire.

Mais comment pourrait-on logiquement nous demander d'être des fédéralistes inconditionnels quand le fédéralisme, tel qu'il évolue entre les mains du premier ministre fédéral actuel et de son entourage à Ottawa, quand le fédéralisme actuel, tel qu'il évolue, ou qu'il prétend évoluer, met en danger, d'une façon qui, quant à nous, est absolument inacceptable, qui est un péril pour tout l'avenir de notre peuple, les intérêts et les droits du Québec? Il n'y a pas moyen d'être inconditionnel dans ces conditions. On peut être de bonne foi,

chercher à renouveler la constitution si jamais il y a un changement d'idée, parce qu'il n'y a pas d'absolu là-dedans, mais une chose certaine, c'est qu'il n'y a rien nulle part qui puisse prétendre qu'on doit renoncer à nos convictions, à une option qui a été clairement exposée, sans hypocrisie, de nouveau pendant la campagne électorale et qui mérite d'être respectée autant que n'importe quelle attitude fédéraliste.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: M. le Président, je voudrais tout d'abord rappeler au premier ministre que, si notre programme n'a peut-être pas reçu l'approbation de la majorité de la population, au moins il n'y en avait rien qu'un, il n'y en avait pas deux: un pour les élections et un pour le lendemain des élections.

Deuxièmement, notre programme est le même sur toute la ligne, il est consigné dans un document officiel et, si le premier ministre veut en prendre connaissance, c'est bien facile pour lui de procéder aux vérifications nécessaires.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ryan: Deuxièmement, M. le Président, le premier ministre a cité un extrait d'une déclaration que je faisais a la fin de mars. J'annonçais justement à la population que, si le Parti québécois allait être élu, tout de suite après il reviendrait à son option. C'est cela qui se réalise. Il n'y a pas de problème là-dedans.

Maintenant, je voudrais poser une question additionnelle au premier ministre. On me rapportait un fait en fin de semaine. Il y a des ministres qui vont représenter le gouvernement et l'ensemble de la population à des réunions officielles, ils sont appelés à faire des discours et il y en a qui ont déjà commencé à parler comme si on avait pris la décision, le 13 avril, de voguer allègrement vers l'indépendance. Ils sont dans des fonctions officielles, ils parlent déjà et invitent la population à s'embarquer dans la construction de ce pays qui s'en vient, etc. Je voudrais demander au premier ministre s'il a donné ou s'il entend donner des directives à ses collègues pour assurer que leur mandat de membres du gouvernement s'exercera jusqu'à ce qu'une nouvelle consultation populaire en ait décidé autrement - si ce changement devait s'effectuer - de manière que leur fonction s'exerce dans le plein respect de la volonté exprimée par le peuple québécois lors du référendum. (14 h 30)

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): J'aurais presque pu faire une question de privilège, M. le Président, sur le deuxième préambule du chef de l'Opposition: un programme pour les élections et un programme pour le lendemain des élections.

Je répète ce que j'ai dit, c'est que ce programme, ce résumé, ce sommaire de notre programme disait clairement ce qu'il en était et il continue, quant à nous, d'être quelque chose qu'on peut respecter et dans lequel on a respecté aussi nos concitoyens.

Je dirai simplement ceci; juste après le passage que je citais tout à l'heure, ça disait ceci: "Mais le résultat du référendum ne nous permet pas d'amorcer la démarche vers ce changement fondamental. Nous croyons qu'un peuple adulte ne se décide pas à la légère et qu'il se donne un temps de réflexion avant de changer d'avis. Nous nous emploierons donc à promouvoir les intérêts du peuple québécois. C'est un impératif que la volonté centralisante d'Ottawa, aidée par la mollesse de nos députés fédéraux et la complicité - enfin, on est obligé de le dire -au moins implicite des libéraux provinciaux de M. Ryan, rend plus pressant que jamais. Dans ces conditions, c'est sur le gouvernement du Parti québécois que repose la responsabilité de mobiliser toutes nos forces pour que soit au moins conservé l'acquis du passé." C'est ce qu'on doit faire dans l'immédiat; ce que mes collègues - au moins cinq ou six d'entre eux qui ont terminé leurs crédits - vont se permettre de faire pendant les quelques jours qui viennent et qu'on fera plus intensément après l'ajournement. C'est du travail de tournée, essentiellement axé sur le projet constitutionnel d'Ottawa, comment il faut juger, le cas échéant, ce que seraient les implications pour le Québec, et elles sont très graves.

Partant de ça, qui est vraiment notre rôle comme gouvernement - et ça fait partie complètement du mandat qui nous a été accordé le 13 avril - certains de mes collègues, à l'occasion, soulignent justement le danger et les culs-de-sac vers lesquels nous mène la façon dont évolue actuellement le fédéralisme; mais on peut quand même -on a le droit, tout en respectant nos engagements - parler du fait qu'il y a une autre voie pour l'avenir. De la même façon que le chef de l'Opposition et les autres ne se gêneront pas pour aller faire les fédéralistes inconditionnels dans tous les coins, je ne vois pas pourquoi, nous, nos concitoyens auraient quelque chose à nous reprocher si, en même temps qu'on défend l'autonomie, autant que possible, qu'on a dans le régime actuel, on se permet à l'occasion - et on ne se gênera pas pour le faire - de dire: II y a une voie de l'avenir qui serait meilleure.

Le Président: Puis-je demander, s'il

vous plaît, aux gens qui sont dans les galeries de ne manifester d'aucune façon? M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le Président, j'ai écouté avec attention les réponses de ce qui était peut-être davantage le chef du Parti québécois. Ma question s'adresse au premier ministre, à l'autre facette de la personnalité du premier ministre.

Une voix: L'autre chapeau.

M. Rivest: Le premier ministre, à titre de premier ministre du Québec, et, par là, représentant tous les Québécois, a signé, dans le cadre des problèmes inhérents au rapatriement de la constitution, un document avec d'autres premiers ministres qui, eux, endossent et reconnaissent le principe du fédéralisme canadien. Quand le premier ministre évoque la démarche de son gouvernement de défendre l'autonomie et les intérêts légitimes du Québec, chose tout à fait raisonnable et normale, il reste qu'il y a plus que cela parce que non seulement le chef du Parti québécois, évidemment, ne peut pas prendre cet engagement dans la mesure où son option, c'est la souveraineté et l'indépendance politique du Québec, mais le premier ministre du Québec s'engage à plus. Au paragraphe 3 de cette entente qu'il a signée lui-même, qui porte la signature d'un certain René Lévesque - cette fois-là, c'est le premier ministre du Québec et non pas le chef du Parti québécois - il s'engage dans des négociations intensives portant sur le renouvellement de la constitution canadienne.

Une voix: Qui dit mieux?

M. Rivest: Ce que je demande au premier ministre - cette constitution est de type fédéral - c'est ceci. En signant un tel document, le premier ministre n'a-t-il pas le sentiment - je pense qu'il pourra donner son interprétation, mais il me semble qu'à ce moment-là le premier ministre endosse le régime fédéral - qu'il s'engage avec ses collègues à travailler au renouvellement de la fédération? Plus que cela, il y a même un délai. Au moins pendant trois ans, le chef du Parti québécois devrait éviter de parler de la souveraineté politique puisque le même René Lévesque signe un document dans lequel il s'engage à renouveler la fédération. C'est un document que le premier ministre a siqné. Alors, on est pris...

Le Président: Votre question, s'il vous plaît:

M. Rivest: ...un peu, comme le chef de l'Opposition l'indiquait, entre les deux personnages. Lequel va se lever? On va le savoir dans quelques minutes. Des voix: Ah!

Le Président: M. le premier ministre. Une voix: Les deux.

M. Lévesque (Taillon): C'est un peu les deux en même temps, oui.

Des voix: Ah!

M. Lévesque (Taillon): Pourtant, il y a une chose qui me... Encore une fois, si nos amis d'en face essayaient de se débarrasser de leurs équivoques, de leurs ambiguïtés...

Des voix: ...

M. Lévesque (Taillon): Non, ils en auront...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:

M. Lévesque (Taillon): ...peut-être l'occasion très bientôt et on verra, encore une fois, à quel point ils sont capables, éventuellement, d'être clairs et de se tenir debout quand il s'aqit des intérêts du Québec. Cela peut revenir comme occasion. Entre-temps, je me sens très à l'aise dans le sens suivant. En 1976, on a...

Une voix: ...

M. Lévesque (Taillon): Ce n'est pas de l'acrobatie. C'est la réconciliation de deux choses qui sont à peu près l'équivalent de ceci. On a parfaitement - je pense que c'est logigue et tous les gouvernements ont essayé depuis assez longtemps - non seulement le droit, mais le devoir d'essayer d'aménager un peu mieux - tiens, cela va rappeler un des sujets favoris du député de Marguerite-Bourgeoys et de quelques autres, M. Ciaccia, le député de Mont-Royal pardon - de développer le mieux possible la réfection de ce vieil édifice à dix pièces en propriété indivise qu'on essaie de rendre habitable en cours de route, et cela ne nous empêche pas...

M. Rivest: Question de règlement, M. le Président.

M. Lévesque (Taillon): ...même, de penser qu'on pourrait, un jour, ...

M. Rivest: M. le Président, question de règlement.

M. Lévesque (Taillon): ...définir notre propriété.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lévesque (Taillon): Pardon, M. le Président!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je comprends que vous voulez soulever une question de...

M. Rivest: Oui, M. le Président, je soulève une question de règlement parce que j'ai posé une question précise au premier ministre sur la base d'un document et il est rendu qu'il me parle de la propriété indivise.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Le député de Jean-Talon peut essayer de jouer, mais quand même! Quand on fait un petit discours et un plaidoyer, il faut quand même s'attendre qu'on ait la latitude minimale pour donner la réponse qui nous paraît indiquée.

Cela étant dit, je ne vois pas de contradiction. Depuis 1976, chaque fois qu'on a rencontré les autres gouvernements, y compris aux réunions des premiers ministres - je me souviens, en particulier, de Regina, il y a deux ou trois ans - on a réaffirmé très clairement dans les communiqués - et ça ne dérangeait pas nos collègues des autres provinces - que nos convictions étaient souverainistes, mais que, dans la période qui passe et qui durera aussi longtemps que les citoyens du Québec le voudront démocratiquement, on a à défendre l'autonomie, comme les autres provinces - et de plus en plus, on est d'accord là-dessus -les pouvoirs, et les augmenter si possible, des gouvernements provinciaux et singulièrement du Québec.

On a signé un accord et cet accord est conditionnel parce qu'il ne peut s'appliquer que si Ottawa - c'est peut-être rêver en couleur, mais en tout cas - et, bien sûr, deux autres provinces qui, actuellement, ne sont pas avec les huit du front uni, du front commun, acceptaient de s'y rallier. Déjà, on sait qu'Ottawa l'a rejeté du revers de la main, mais on sait aussi que les jours se suivent et ne se ressemblent pas toujours, les années non plus.

Cet accord prévoit le rapatriement et une formule d'amendement. On peut la critiquer. Nous, elle nous a paru valable; il y a même une ouverture à ce qu'on peut appeler le statut particulier auquel le Québec et d'autres ont rêvé depuis longtemps, avec une formule de retrait et pleine compensation. Il est prévu qu'il y aurait ensuite - évidemment, si les gens sont tous d'accord - négociations intensives, comme il y en a eu entre 1976 et 1981, pour voir jusqu'à quel point on peut renouveler, mais dans le sens d'une nouvelle répartition des pouvoirs, dans le sens d'une augmentation des pouvoirs, le vieux tissu fédéral. Je ne vois rien de contradictoire là-dedans, cela peut se faire de bonne foi.

M. Rivest: Est-ce que le premier ministre me permet une courte question?

Le Président: Question principale, M. le député de Mont-Royal.

Demande d'enquête à la SHQ

M. Ciaccia: M. le Président... M. Picotte: Sauvé par le président!

M. Ciaccia: ... ma question s'adresse au premier ministre. Le ministre de l'Habitation a déclaré en commission parlementaire qu'il a entendu parler d'une tentative de chantage et que cette tentative était dirigée contre lui. Il a dit aussi qu'il a informé le ministre de la Justice. Mais ici, ce n'est pas clair; on ne sait pas s'il a informé le ministre de la Justice sur la tentative de chantage ou sur d'autres faits. Dans la demande d'enquête du ministre de la Justice à la Sûreté du Québec, un M. Yvan Latouche est celui à qui on offrait un montant de 50 000 $ d'après les réponses du ministre de la Justice alors que, dans la version du ministre de l'Habitation, le même M. Latouche serait le demandeur d'un montant de 50 000 $. Dans un cas, il est l'accusé; dans l'autre cas, il est la victime. Ce sont deux situations complètement différentes. (16 h 40)

Le premier ministre est conscient de la gravité des situations exposées; le ministre de l'Habitation a nommé le chef de cabinet du premier ministre, l'ex-conseiller spécial du ministre de l'Habitation et un M. Ronald Perreault. Le premier ministre sait, en plus, que des cas de cette gravité ne peuvent être convenablement traités à la période des questions ou en commission parlementaire.

Devant le rapport du Vérificateur général, le premier ministre n'a pas écarté la possibilité d'une enquête publique, mais a dit: Attendons la commission parlementaire et on va vérifier le rapport du Vérificateur général. La commission parlementaire a eu lieu. Des faits nouveaux sont portés à l'attention du public. Le premier ministre ne croit-il pas que, dans les circonstances, dans l'intérêt tant du gouvernement que des individus mentionnés, n'y aurait-il pas lieu de tenir une enquête publique indépendante et complète sur l'administration de la Société d'habitation du Québec, et plus particulièrement sur la division des réparations majeures, et sur les présumées offres de pots-de-vin ou les situations de chantage?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Le député de Mont-Royal dit qu'il est arrivé des faits nouveaux. Il insiste toujours - j'ai remarqué cela depuis quelques jours - sur des faits, quand il parle de rumeurs, de ragots de bas étage. Il n'est pas arrivé de faits nouveaux. Les faits nouveaux, c'est le rapport du Vérificateur général sur des irrégularités qui d'aucune façon ne semblent entacher d'illégalité, mais il y a eu des irrégularités. On pourrait aller au fond, comme je l'ai dit, quand on aura l'occasion d'éplucher autant qu'on le voudra le rapport du Vérificateur général. Toutes ces rumeurs autour de pots-de-vin qui ont commencé d'ailleurs avant même, bien avant la campagne électorale, en décembre 1980 ou quelque part par là, sous l'égide éclairée du député de Marguerite-Bourgeoys, tout ça était relié et l'est encore à un dénommé Latouche, qui s'appelle, sauf erreur, Yvan Latouche. Moi, je dirai simplement ceci, et je suis malheureux d'être obligé de le dire parce qu'il est devenu, semble-t-il, un des conseillers experts en matière d'habitation pour nos amis d'en face, ce personnage, c'est, comme on dit en anglais, quelqu'un que je ne toucherais pas avec une pôle de dix pieds.

Et tant que cela tourne autour d'un personnage de ce calibre, les rumeurs et les ragots, non seulement ne méritent même pas une enquête, mais ils ne méritent même pas d'être entendus, c'est simple.

Le Président: M. le député de Mont-Royal, question additionnelle.

M. Ciaccia: II y a eu au moins un fait nouveau, M. le premier ministre, et c'est l'affirmation du ministre de l'Habitation en commission parlementaire, à savoir qu'à la troisième fois qu'il a entendu parler du dossier, c'était dans le genre suivant: On me donne 50 000 $ ou bien j'ai des renseignements. Citation directe du ministre de l'Habitation. Plus tard, il dit: Ce que j'ai perçu comme étant du chantage. Alors, il y a au moins ces faits nouveaux en plus des autres qui ont ressorti en commission parlementaire. Mais, devant l'attitude du premier ministre, je me dois de demander... Est-ce que le ministre de l'Habitation est ici? Il était ici il y a quelques instants.

M. Lévesque (Taillon): Je pense que je pourrais presque en faire une question de privilège pour le ministre de l'Habitation. Quand même...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: C'est parce que je l'avais vu...

Le Président: Question additionnelle.

M. Ciaccia: ... à son siège, c'est pour cela que j'ai ajouté la question supplémentaire au ministre de l'Habitation. Devant l'attitude du premier ministre, je me dois de demander au ministre de l'Habitation s'il voudrait bien communiquer à l'Assemblée nationale le contenu de la conversation qu'il a eue avec M. Foisy, son conseiller spécial, concernant la présumée situation de chantage.

Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

M. Tardif: M. le Président, je pense avoir été clair sur cette question. Un membre de mon cabinet m'a rapporté des rumeurs, M. le Président, et j'ai dit et je répète encore une fois que, tant et aussi longtemps que des faits précis n'auront pas été portés à mon attention - et cela a été le cas, notamment, dans l'histoire des fausses factures, auquel cas j'en ai saisi immédiatement le ministre de la Justice -que tout le reste, M. le Président, étaient des rumeurs. Or, on n'administre pas, on ne gouverne pas par rumeurs, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le ministre de l'Habitation a affirmé en commission parlementaire, immédiatement après que je lui ai posé la question sur ces soi-disant rumeurs: J'ai transmis par écrit dans les heures qui ont suivi au ministre de la Justice des renseignements qui, je pense, pouvaient justifier à ce moment-là une enquête, le priant de le faire. Le ministre de l'Habitation pourrait-il déposer en cette Chambre l'avis qu'il a donné au ministre de la Justice?

Le Président: M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, ce qui a été transmis au ministre de la Justice, ce ne sont pas les rumeurs qui étaient d'ailleurs colportées par l'Opposition également, mais les faits qui ont été portés à mon attention. Ce dossier a été transmis au ministre de la Justice. S'il veut en faire état, il peut le faire.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, ces faits qui m'ont été transmis par le ministre de l'Habitation ont été immédiatement transmis à la Sûreté du Québec qui a fait enquête. À la suite de cette enquête, les procureurs de la couronne ont analysé le dossier et en sont venus à la conclusion qu'il n'y avait

absolument aucune plainte à porter.

M. Ciaccia: Est-ce que les faits que le ministre a portés à notre...

Le Président: M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Est-ce que les faits dont vous venez de parler, c'est Rescobec ou est-ce la question de chantage de la part de M. Latouche vis-à-vis du ministre? De quelle enquête parlez-vous?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: Je pense que M. le député fait des efforts pour ne pas comprendre...

Des voix: Ah! Ah!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: ...parce qu'on a toujours été très clair ici en cette Chambre concernant le ministère de la Justice. Le 18 décembre, j'ai informé la Chambre que des documents m'avaient été acheminés par le ministre délégué à l'Habitation et que ces documents avaient été transférés immédiatement à la Sûreté du Québec pour enquête. L'enquête s'est avérée négative. Il y a quand même un bout à continuer de véhiculer des ragots qui peuvent entacher des réputations.

Le Président: Question principale, M. le député de Laurier.

Le cas Julie Dion et la protection de l'enfance

M. Sirros: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre d'État au Développement social. Il y a quelques jours -jeudi passé pour être plus précis - nous avons adopté la loi 10, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse. Lors de l'étude de cette loi, nous, de ce côté-ci, avions présenté un amendement qui aurait permis à une personne intéressée au bien-être de l'enfant de saisir le tribunal de son désaccord à la suite d'une décision, entre autres, du DPJ et de la personne déléguée du ministre de la Justice.

Cet amendement a été rejeté par le gouvernement au nom de la déjudiciarisation des cas de protection. On n'a peut-être pas été assez éloquents, M. le Président, dans nos plaidoyers pour convaincre le ministre de sortir de son approche rigide et de sa confiance totale dans le système et dans les mécanismes en place et ainsi ajouter un élément supplémentaire de protection face à l'enfant. Ma question est la suivante: II y a eu un reportage dans la Presse de samedi dernier concernant le cas concret de Julie Dion, une fillette de 21 mois qui est décédée à la suite de mauvais traitements et à la suite de l'inaction complète de plusieurs instances dans le mécanisme prévu; est-ce qu'à la suite de ce reportage - parce que le ministre nous avait demandé de lui présenter un cas concret et c'est très malheureux d'avoir à le rapporter aujourd'hui - le ministre serait prêt à reconsidérer ce genre d'amendement qu'il a rejeté, ce qui, dans ce cas concret, par exemple, aurait permis à la marraine, entre autres, aux médecins qui ont saisi les gens de saisir directement le tribunal et peut-être ainsi sauver cette vie? À mon humble avis, une vie humaine de ce genre a beaucoup plus de valeur qu'une défense inconditionnelle de la déjudiciarisation, M. le Président.

Le Président: M. le ministre d'État au Développement social.

M. Lazure: M. le Président, j'arrive mal à comprendre que le député de Laurier se serve d'un incident malheureux où la vie d'une jeune enfant a été mise en cause, à la suite de mauvais traitements et où, semble-t-il, il y aurait eu négligence de la part de certains professionnels à qui on a rapporté le cas et qui n'ont pas agi avec célérité. M. le Président, je ne pense pas que de donner à toute personne le droit de s'adresser à un Tribunal de la jeunesse aurait pu, en soi, sauver la vie de cette enfant. Je pense qu'il faut verser dans la démagogie...

Des voix: Oh!

(14 h 50)

M. Lazure: ...facile pour insinuer une telle chose.

Une voix: Combien cela va prendre de...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. Lazure: M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, je répète encore une fois qu'il est malheureux que le député de Laurier se serve d'un incident tragique, comme il en arrive malheureusement trop souvent, pour essayer de revenir sur une bataille un peu futile que lui et l'Opposition ont menée en commission parlementaire et en troisième lecture sur un amendement qui a été refusé pour des raisons valables. Je pense qu'il n'y a aucun rapport de cause à effet entre l'incident malheureux qui est survenu dans le Nord-Ouest québécois et la tentative de ramener

cette demande d'amendement.

Je demanderai à mon collègue des Affaires sociales d'ajouter un complément de réponse.

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): À cet égard, M. le Président, pour s'assurer, comme l'évogue mon collègue, qu'on ne confonde pas les allégations avec les faits, j'ai demandé aux responsables du ministère de me fournir un rapport à la suite des questions qu'ils auront posées et de l'enquête qu'ils mèneront et d'établir quel est l'état réel de la situation.

M. Grégoire: M. le Président...

Le Président: M. le député de Laurier, question additionnelle.

M. Sirros: M. le Président, j'aimerais d'abord souligner au ministre d'État au Développement social qu'il ne s'agit pas d'un cas malheureux, mais qu'il s'agit surtout d'un cas très tragique, qu'il n'y a aucunement intention, du côté de l'Opposition, de faire de la démagogie, mais plutôt d'assurer que ce genre de cas soit bien protégé.

Des voix: Question!

M. Sirros: La question est la suivante. Est-ce que le ministre veut dire qu'il accepte qu'un certain nombre d'enfants puissent subir ce genre de traitements à cause de défauts dans le système de protection qui existe? J'ai énormément de difficulté à accepter ce genre de complaisance face au système.

Le Président: M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, c'est un peu comme si on voulait essayer de résoudre des accidents ou des incidents malheureux en permettant à toute personne d'aller à un tribunal, que ce soit un tribunal de la jeunesse ou un tribunal pour adultes, dans le cas d'accidentés qui ne reçoivent pas les soins aussi rapidement et aussi pleinement qu'ils devraient les recevoir.

M. le Président, je voudrais simplement ajouter encore une fois que cela permettrait le recours au tribunal de façon intempestive. Ce qui arriverait si on ouvrait la porte, dans la Loi sur la protection de la jeunesse, de manière telle que n'importe qui pourrait se rendre devant un juge d'enfant et dénoncer telle ou telle personne, c'est que nous aurions affaire à un abus de recours au tribunal. La réponse au problème présenté par ce jeune enfant et les adultes qui l'ont brutalisé, dans la très grande majorité des cas, ce n'est pas une réponse judiciaire, mais une réponse de services de santé ou de services sociaux.

M. Grégoire: M. le Président...

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Laurier.

M. Sirros: Est-ce que le ministre d'État au Développement social veut prétendre, d'une part, qu'avec tous les experts qui existent, il n'y a pas moyen de trouver un amendement à la loi qui permettrait d'assurer que ce genre de cas ne se reproduira pas? Deuxièmement, est-ce qu'il y aura une enquête publique sur cette affaire pour qu'on voie publiquement les failles du système dans ce genre de cas?

Le Président: M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, très rapidement, je ne connais aucun texte de loi, aucun article de loi qui va nous donner la pleine assurance que chaque individu, qu'il soit policier, juge, médecin, infirmière ou travailleur social, fera adéquatement son travail.

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: M. le Président...

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, sur la deuxième partie de la question du député de Laurier, l'enquête que j'ai demandée à mon sous-ministre de faire effectuer par nos services est celle qu'il peut faire en vertu de la loi constituante du ministère. Nous n'avons rien à cacher, nous tentons de découvrir les faits. Effectivement, il s'agit d'une situation dont le dénouement est absolument tragique, qui reste une situation inadmissible. Reste à savoir si ce sont les lois qui peuvent empêcher que de telles situations se produisent; je n'en suis pas convaincu. S'il s'agit de la responsabilité d'individus, s'il s'agit du fonctionnement ou de la piètre qualité des relations entre les différents intervenants, je ne pense pas qu'il faudrait présumer au départ que c'est par défaillance des lois, mais parfois par défaillance de la nature humaine.

Le Président: M. le député de Frontenac.

Expropriation de la Société Asbestos

M. Grégoire: M. le Président, j'aurais une question à poser au premier ministre

concernant la Société Asbestos Ltée et, les mines d'amiante de la région de Thetford. Cela fait déjà trois mois que la Cour suprême a donné raison au gouvernement actuel et a permis l'expropriation de la société Asbestos Limitée par le gouvernement. J'aimerais savoir si c'est toujours la décision ferme et irrévocable du gouvernement actuel de faire l'acquisition, soit de gré à gré, soit par expropriation, de la société Asbestos Limitée. J'aimerais savoir également s'il y a un échéancier de prévu. Comme on le sait, cela va faire quatre ans au mois d'octobre 1977 que le premier ministre est venu annoncer à Thetford l'achat de la société Asbestos et, cela va faire trois mois que la Cour suprême a rendu une décision finale. La population de la région de l'Amiante aimerait savoir s'il y a un échéancier de prévu et quelle est la date limite à laquelle on peut s'attendre à ce qu'enfin ce geste soit posé.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, c'est vrai que cela fait trois mois qu'il y a eu ce déblocage au niveau juridique. Mais il y a quand même des négociations qui se poursuivent, je dois le dire pour le député de Frontenac et pour l'information de la Chambre, qui sont des pourparlers assez complexes. Il ne serait sûrement pas d'intérêt public d'entrer là-dedans. Cela se déroule présentement. Cela va peut-être se dérouler encore quelque temps. C'est en quelque sorte une ultime tentative pour en arriver, comme on le souhaite depuis le début, à un règlement à l'amiable.

Mais, quelle que soit l'issue des pourparlers, pour répondre à la question directe du député de Frontenac, que ce soit par un tel règlement à l'amiable ou que ce soit, le cas échéant, par une expropriation prévue par une loi qui a été votée ici à l'Assemblée nationale, la volonté du gouvernement - la politique de l'amiante est axée là-dessus - n'a pas changé et il est absolument entendu qu'il faudra la prise de contrôle qui est prévue.

Je dois souligner que cette politique se justifie d'autant mieux que le résultat, pour la première année, de la compagnie qui a été achetée, elle, en cours de route, parce qu'on a essayé de faire des étapes, est de 8 000 000 $ de profits nets. C'est une compagnie de taille relativement mineure comparée à Asbestos Corporation. Non seulement il y a une rentabilité dans cette politique, mais il y a aussi une promesse de développement à partir d'une ressource stratégique comme l'amiante qu'on n'a absolument pas l'intention de laisser aller.

Pour répondre à la dernière partie de la question du député de Frontenac, au plus tard à l'automne 1981, cela devra être réglé d'une façon ou de l'autre.

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton.

Transferts de quotas de lait

M. Bélanger: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Malheureusement, je constate qu'il n'est pas ici présentement.

Avec votre permission, M. le Président, je vais l'attendre.

Ma question s'adresse au ministre de la Justice et vous comprendrez que je me limiterai à une seule question principale, bien conscient du caractère particulier de ma question qui porte sur l'administration de la justice au Québec. J'aimerais donc savoir du ministre s'il peut indiquer à cette Chambre si une enquête est en cours par la Sûreté du Québec portant sur l'aspect douteux de transferts de quotas laitiers. Dans l'affirmative, dans quel délai entend-il faire rapport à cette Chambre?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: Je m'excuse, M. le Président. Est-ce que je pourrais demander au député de répéter sa question, étant arrivé à la dernière minute?

Le Président: M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: Avec plaisir, M. le Président. Ma question, comme je l'ai mentionné, s'adresse au ministre de la Justice. Je vais tenter de ne poser qu'une question principale, étant donné que je connais le caractère particulier de la question. Cela concerne l'administration de la justice au Québec. J'aimerais savoir du ministre s'il peut indiquer à cette Chambre si une enquête est menée par la Sûreté du Québec en ce qui concerne le transfert douteux de quotas laitiers. Dans l'affirmative, dans quel délai entend-il faire rapport à cette Chambre?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, il n'y a pas d'enquête, tel qu'exprimé par le député, concernant les transferts de quotas qui est faite par la Sûreté du Québec à la demande du ministère du Revenu ou de quelque ministère que ce soit. Il y a effectivement, cependant, une enquête qui est faite concernant la préoccupation qu'a évoquée le député, mais cette enquête est faite à la suite d'une plainte qui a été portée par un agriculteur.

Le Président: M. le député de Berthier.

Grève à la traverse de Sorel

M. Houde: M. le Président, ma question s'adresse au ministre du Travail. Étant donné qu'il n'est pas à son siège, je l'adresserai à son adjoint parlementaire.

Juste au moment d'entrer en cette Chambre, j'apprenais à nouveau que le service de traversiers Sorel-Saint-Ignace était interrompu en raison d'un conflit de travail opposant les treize marins qui assurent le service et la Société des traversiers du Québec. (15 heures)

J'aimerais savoir du ministre du Travail ou de son adjoint, d'abord, s'il est au courant de ce conflit et, ensuite, s'il a l'intention de proposer l'aide de son ministère pour aider à résoudre ce conflit qui paralyse un service essentiel pour cette région et qui, outre le comté de Berthier, touche le comté de Maskinongé et le comté de Richelieu.

Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail.

M. Dean: J'apprends de la bouche du député de Berthier cette information. Nous allons prendre note de la question, je vais en parler au ministre et nous vous donnerons une réponse dans les plus brefs délais.

D'après mon expérience, j'ai déjà fait le trajet Sorel-Berthier, j'apprécie pleinement le rôle essentiel de ce traversier dans la vie de la région et je peux assurer le député, M. le Président, que le ministère va s'occuper du dossier le plus rapidement possible.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Berthier.

M. Houde: Merci, M. le Président. C'est depuis vendredi passé que le traversier est arrêté.

En question supplémentaire, je me permets d'insister auprès du ministre du Travail, parce qu'en plus de la population, il y a un transport de marchandises qui est aussi affecté à la saison touristique qui s'amorce à peine. D'ailleurs, à ce sujet, en période estivale, deux traversiers sont nécessaires pour répondre à l'achalandage. De plus...

Le Président: Question, s'il vous plaît.

M. Houde: Oui. La convention collective est maintenant échue depuis juin 1980. Il semble qu'un des éléments du litige serait la remise en question de certains droits déjà acquis à l'occasion d'une autre négociation.

Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail.

M. Dean: Je ne peux que répéter que j'ai noté les commentaires additionnels du député de Berthier et que le ministère va s'occuper du dossier le plus rapidement possible.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: J'aimerais savoir - tout en reconnaissant que l'adjoint parlementaire prend note de la question - s'il y a eu demande de conciliation. Si oui, à quel moment le ministère entend-il nommer un conciliateur? Deuxièmement, j'aimerais savoir - puisqu'il y a eu prétention qu'il y avait perte de droits acquis - s'il n'y a pas là également, d'autre part, une question de respect de la politique salariale du gouvernement.

Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail.

M. Dean: M. le Président, je prends note des questions et je vais essayer d'avoir les réponses le plus rapidement possible.

Le Président: Dernière question, sans question additionnelle, M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: M. le Président...

M. Clair: Un complément de réponse.

Le Président: En complément de réponse, M. le ministre des Transports.

M. Clair: M. le Président, je veux simplement indiquer au député de Berthier que pour autant que le ministère des Transports et la Société des traversiers du Ouébec sont concernés, les offres qui ont été faites s'inspirent des offres retenues aux tables centrales par les autres syndiqués au Québec et que, d'autre part, en ce qui concerne ce que le député appelle des droits acquis, peut-être veut-il signifier que les treize marins en question demandent, par exemple, le maintien d'un bureau d'embauche, alors qu'ils sont affiliés à la CSN et que la CSN a déjà eu l'occasion, en 1975, devant la commission Cliche, de se prononcer contre de tels bureaux d'embauche. Peut-être que ce sont là les droits acquis dont le député de Berthier veut faire part à cette Chambre, mais je pense que c'est important de le souligner.

M. Picotte: M. le Président, une courte question.

Le Président: Oui, il faudrait qu'elle

soit très courte, il reste une minute à la période de questions. Question principale très courte, sans additionnelle et une réponse très courte du ministre, s'il vous plaît. M. le député de Maskinongé.

Enquête sur le service de récréation de Shawinigan

M. Picotte: Merci, M. le Président. Il y a quelques mois, il y a des gens qui avaient émis de sérieux doutes concernant le service de récréation de Shawinigan. On avait alors demandé au ministre des Affaires municipales du temps de procéder à une enquête concernant ce service de récréation.

Effectivement, M. Routhier, du ministère, avait été désigné pour faire une enquête, enquête qui fut faite et dont le rapport a été remis au ministre des Affaires municipales. J'aimerais savoir, dans un premier temps, si le ministre a pris connaissance de ce rapport qui a été fait par M. Routhier. Quand entend-il le rendre public pour les fins autant des gens du service de récréation que pour la population de Shawinigan?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: Sous réserve de vérification, effectivement, l'enquête est terminée, le rapport a été remis il y a déjà plusieurs semaines, sinon plusieurs mois, et je crois savoir qu'il a été convenu qu'on n'irait pas plus loin dans ce cas. Cependant, je demande au député de vérifier le dossier et, s'il y a des modifications à ce que je dis aujourd'hui, je reviendrai demain.

Le Président: Fin de la période des questions.

Motions non annoncées. M. le premier ministre.

M. Rhéal Châtelain, Vérificateur général

M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, j'aurais trois motions concernant des postes extrêmement importants qui sont reliés à une décision de l'Assemblée nationale. Il s'agit de postes qui dépendent du vote, normalement, des deux tiers de l'Assemblée nationale. Après les consultations d'usage avec l'Opposition officielle, je pourrais faire trois motions concernant un plus grand nombre de personnes, mais trois motions qui s'adressent à trois secteurs stratégiques de l'administration publique et qui sont sous la responsabilité de l'Assemblée nationale.

D'abord, cela a été évoqué il y a quelques jours, il y a le départ du

Vérificateur général, M. Gérard Larose, à propos duquel je dois proposer la nomination de son successeur qui serait, si l'Assemblée nationale est d'accord, M. Rhéal Châtelain, qui est actuellement premier Sous-Vérificateur général du Canada. L'arrière-plan de cette nomination est relativement simple. C'est que le mandat de dix ans du Vérificateur général, M. Larose, s'est terminé le 1er avril dernier et M. Larose nous a indiqué que, pour des raisons de santé, il ne désire pas que son mandat soit renouvelé.

Je voudrais profiter de l'occasion, très rapidement, d'abord pour remercier M. Larose, au nom de toute l'Assemblée nationale, j'en suis sûr, pour la façon exemplaire dont il a rempli son mandat qui est l'un des plus importants et des plus délicats en même temps de toute l'administration publique. Exerçant une surveillance constante sur l'activité du gouvernement, il n'a pas hésité à attirer publiquement depuis qu'il était là l'attention sur les points qui, à son avis, devaient être corrigés, ce qui est absolument indispensable - on le sait tous - même si c'est parfois douloureux pour les gouvernements. Je suis donc très heureux que M. Larose ait quand même accepté de continuer, pour quelques années, ce qui permettra - comme on l'a assuré à nos collègues de l'Opposition -l'examen détaillé, si on veut, de son dernier rapport comme Vérificateur général. Donc, M. Larose continuerait pour quelques années - il a accepté - à servir le Québec en remplissant les mandats spéciaux qui pourraient lui être confiés à titre de conseiller cadre au bureau du Vérificateur général.

Quant à M. Rhéal Châtelain, il s'agit pour lui d'un retour à Québec après un séjour de quelques années à Ottawa. Il est bien connu chez nous partout dans les rouages de l'administration parce qu'il a déjà été contrôleur de la trésorerie, contrôleur des finances et sous-ministre de la Fonction publique. Il apporte donc à ses nouvelles fonctions tout un bagage de connaissances et une expérience aussi complète qu'il est possible d'acquérir de la fonction publique et de toute l'administration publique. Donc, un bagage de connaissances qui lui permettra, nous en sommes sûr, de remplir son devoir avec toute la compétence et l'honnêteté requises.

Je fais donc motion, M. le Président, pour que M. Rhéal Châtelain soit nommé Vérificateur général du Québec à compter du 1er août 1981 et que le traitement de M. Châtelain soit fixé au taux supérieur des salaires des sous-ministres, soit 72 000 $.

Si on permet - j'en ai dit un mot au chef de l'Opposition et il était d'accord -c'est un traitement, c'est le seul de ceux que je vais proposer, qui est fixé lui aussi, à cause de la loi, par l'Assemblée nationale. Il

y a eu des incidents assez déplaisants déjà à ce propos. J'avais fait la suggestion - je comprends très bien que le chef de l'Opposition me dise: On doit y réfléchir encore; c'est quand même une question de fond - que peut-être, vu qu'il s'agit d'un traitement qui est relié à celui des autres sous-ministres, on pourrait tout simplement dire que, désormais, il serait indexé, le cas échéant, ou changé de la même façon que les autres. Chaque fois que cela revient - il y a quelques cas comme cela - en Chambre, il y a souvent des incidents déplaisants dans le genre: Est-ce qu'ils valent leur salaire, etc.? Cependant il y en a beaucoup d'autres qui sont au même taux, qui sont des taux normaux dans la fonction publique, dont on ne parle jamais. Or, tout cela est quand même dans les livres des crédits ou dans les comptes publics.

Cela étant dit, puisque le chef de l'Opposition, de façon très compréhensible, préfère qu'on puisse examiner cela plus longtemps, je reprends la formule traditionnelle et je demande donc que le traitement de M. Châtelain soit fixé au taux que j'ai annoncé. (15 h 10)

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je veux tout d'abord confirmer que des consultations ont été faites par le gouvernement auprès de l'Opposition et que nous nous sommes ralliés, après enquête de notre côté, à la proposition concernant la nomination de M. Châtelain, comme le Vérificateur général des comptes, avec beaucoup de plaisir.

J'ai personnellement procédé à des enquêtes en particulier dans les milieux de la profession comptable, et j'ai obtenu l'assurance que M. Châtelain est une des figures les plus respectées de sa profession. Il a laissé un excellent souvenir à Québec, pendant les années où il a servi ici, et au gouvernement fédéral, où il a également fait un travail de première qualité. Par conséquent, je suis très heureux d'appuyer cette motion et de vous assurer de mon approbation à cette nomination.

Je voudrais également dire à M. Larose, au moment où il est à la veille de quitter le service, que tous ses concitoyens du Québec ont beaucoup apprécié la qualité de son travail. Dans son dernier rapport en particulier - j'en parlais l'autre jour dans cette Chambre - il s'est révélé d'une vigueur qui est peut-être le privilège de ceux qui vont partir, il était d'une verdeur, d'une clarté, d'une franchise remarquable. Je pense qu'il nous a donné de la matière pour plusieurs mois à venir. Au moment de son départ, je pense que le meilleur hommage à lui rendre serait peut-être de souhaiter que certains voeux qu'il a eu l'occasion d'émettre à plusieurs reprises se réalisent dans les meilleurs délais.

Il a demandé, par exemple, que la Loi sur l'administration financière soit révisée de manière que les fonctions du Vérificateur général soient définies de façon plus large afin de comprendre aussi la vérification des qualités d'économie, d'efficience et d'efficacité dans le fonctionnement du gouvernement. J'espère que le gouvernement sera prêt, dans des délais rapprochés, a prendre des engagement de ce côté. Il a émis un voeu à l'intention du ministre des Finances concernant la revue des conventions comptables qui ont donné lieu soit à des malentendus, soit a des trous au cours des dernières années. Je pense qu'il y a une suggestion extrêmement intéressante, de ce côté-là aussi, que nous avons tous intérêt, des deux côtés de la Chambre, à réaliser dans les meilleurs délais.

Enfin, le vérificateur, M. Larose, exprimait dans son dernier rapport le voeu que la commission des comptes publics soit convoquée après ne l'avoir point été pendant de très nombreuses années. Nous sommes contents, du côté de l'Opposition, de voir que le gouvernement acquiesce à cette suggestion du vérificateur et nous souhaitons que M. Larose, comme c'est envisagé, puisse être disponible à titre de témoin pour ces réunions qui auront lieu, je l'espère, dans les meilleurs délais.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: Avec l'indulgence de cette Chambre, j'aimerais dire quelques mots à l'occasion du départ de M. Gérard Larose comme Vérificateur général, en ce sens que la Loi sur l'administration financière fait du ministre des Finances celui qui doit appliquer la loi en question, dont un des chapitres porte sur le Vérificateur général et ses pouvoirs. J'ai donc eu avec M. Gérard Larose plusieurs contacts de caractère essentiellement administratif puisque, en fait, pour son travail il relève de l'Assemblée nationale et non pas de moi.

J'ai donc été en mesure de côtoyer cet homme, qui maintenant cesse d'être Vérificateur général, ou qui cessera le 1er août, et d'admirer ses qualités. Je voudrais simplement dire ceci. M. Larose est entré dans la fonction publique en 1963, au ministère de l'Éducation, dans le service des finances scolaires. En 1966, il est devenu sous-ministre adjoint à l'administration au ministère de la Justice et, comme le premier ministre le disait tout à l'heure, il est devenu, en avril 1971, Vérificateur général

du Québec.

Après autant d'années passées au service de l'État du Québec et depuis dix ans au service de l'Assemblée nationale, je pense pouvoir, au nom de l'Assemblée nationale, exprimer l'admiration que nous avons pour l'intégrité, le remarquable travail et l'intelligence profonde apportés par M. Larose dans l'exercice de ses fonctions.

Le Président: Est-ce que cette motion de M. le premier ministre sera adoptée?

M. Charron: Vote enregistré, M. le Président.

Le Président: Qu'on appelle les députés. (Suspension de la séance à 15 h 15)

(Reprise de la séance à 15 h 20)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Pour ceux qui ne pouvaient peut-être pas être présents, la motion du premier ministre se lisait comme suit: "Que M. Rhéal Châtelain soit nommé Vérificateur général du Québec à compter du 1er août 1981, que le traitement de M. Châtelain soit fixé au taux supérieur des salaires des sous-ministres, soit 72 000 $". Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever?

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Jolivet, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Morin (Sauvé), Morin (Louis-Hébert), Laurin, Bérubé, Lazure, Gendron, Lessard, Marcoux, Biron, Léger, Clair, Johnson (Anjou), Chevrette, Marois, Garon, Tardif, Léonard, Fréchette, Martel, Dussault, Gagnon, Mme Harel, Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Paquette, Proulx, Guay, Baril (Arthabaska), Dean, Fallu, Grégoire, Bisaillon, Mme Juneau, MM. Leduc, Marquis, Boucher, Lavigne, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gauthier, Blais, Le May, Desbiens, Perron, Bordeleau, Gravel, Brassard, Laplante, Charbonneau, Blouin, Rochefort, Brouillet, Champagne, Rodrigue, Payne, Tremblay, Beaumier, LeBlanc, Lafrenière, Lachance, Paré, Ryan, Levesque (Bonaventure), Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Bourbeau, Blank, Vallières, Dubois, Picotte, Pagé, Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau, Polak, Maciocia, Dauphin, Cusano, Hains, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Ceux qui sont contre? Est-ce qu'il y a consentement?

Le Secrétaire adjoint: M. Lincoln et M. Mathieu.

Le Secrétaire: Pour: 101

Contre: 0

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion est adoptée. M. le premier ministre.

Nominations à la Commission des droits de la personne

M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, j'ai maintenant une motion à faire concernant un certain nombre de nominations à la Commission des droits de la personne, c'est-à-dire un autre secteur extrêmement stratégique de notre société auquel, je pense, certains événements courants donnent une dramatisation particulière. Je demanderais le consentement de la Chambre très rapidement pour situer quand même ces nominations. L'article 58 de la Charte des droits et libertés de la personne prévoit que la commission est composée d'au moins sept membres dont le président et le vice-président. Ils sont nommés par l'Assemblée nationale sur la proposition du premier ministre pour un mandat n'excédant pas dix ans. Ces nominations doivent être approuvées, comme celles qui ont précédé, par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale.

Avant certaines démissions et une expiration de mandat, la commission était composée - je pense que cela a été à peu près cela depuis le début - de onze membres, ce qui paraît donner un équilibre, une représentativité raisonnable et en même temps de ne pas trop alourdir le total. Or, il y a eu trois démissions et une expiration de mandat au cours des derniers mois. D'abord, le poste de président de la commission est vacant depuis le 15 décembre 1980 à la suite de la nomination de Me René Hurtubise, qui était président, comme juge à la Cour supérieure. Par ailleurs, le mandat de Mme Lucille Delaney-Caron comme membre de la commission expirait le 18 décembre dernier. Enfin, M. Jean-Louis Roy et Me Michel Rivest, qui avaient été nommés membres de la commission en juin 1980 pour une durée de trois ans, ont démissionné à compter du 31 décembre 1980 et du 5 janvier 1981 respectivement. M. Roy, comme on le sait, a été nommé directeur du Devoir et Me Rivest, juge au Tribunal de la jeunesse.

La commission est donc composée présentement des personnes suivantes: Mme Francine Fournier qui a été nommée membre et vice-présidente en décembre 1978 et dont

le mandat a été fixé à cinq ans à compter de la date de sa nomination. Je dois dire que, depuis quelque six mois maintenant, Mme Fournier agit non seulement avec compétence, mais avec un dévouement exemplaire, parce que le travail est harassant, comme présidente par intérim. Les autres membres survivants, si on veut, de la commission sont les suivants: Me Michael Cain, dont le mandat court jusqu'en juin 1982; M. Michael Yarosky, jusqu'en 1983; M. Luc André, jusqu'en juin 1983; M. Vauqhan Dowie, jusqu'en 1982; Me Margaret Cuddihy-Martin, jusqu'en juin 1982 et Mme Armande Saint-Jean, également jusqu'en juin 1982.

Partant de cette situation, je fais donc la motion suivante:

Que l'Assemblée nationale nomme, comme présidente de la Commission des droits de la personne, Mme Francine Fournier, jusqu'à la fin du mandat préalablement fixé à son endroit comme vice-présidente. Que l'Assemblée nationale nomme, comme membre et vice-présidente de la Commission des droits de la personne, pour une durée de trois ans, Me Nicole Trudeau-Bérard, actuellement secrétaire adjointe de l'Université de Montréal, et que l'Assemblée nationale nomme, comme membres de la Commission des droits de la personne, pour une durée de trois ans aussi, les personnes suivantes: Me Gisèle Côté-Harper, professeur agrégé de la faculté de droit de l'Université Laval, Me André Morel, professeur titulaire à la faculté de droit de l'Université de Montréal, et M. Raymond Sliger, coordonnateur régional du Syndicat des métallos.

Le Président: M. le député de D'Arcy McGee.

M. Herbert Marx

M. Marx: Comme c'est la coutume, il y a eu effectivement des consultations entre le bureau du premier ministre et le bureau du chef de l'Opposition, et nous sommes d'accord, de notre côté, pour voter pour la nomination de ces personnes. J'aimerais seulement faire quelques remarques. Je connais bien Mme Fournier, étant donné que j'ai été moi-même commissaire à la Commission des droits de la personne pendant quatre ans. Il s'agit d'une promotion interne à la commission parce que Mme Fournier était déjà directrice du service de recherche à la commission et, comme le premier ministre l'a souligné, elle est actuellement vice-présidente. Je suis sûr que, par sa formation, par son expérience et par sa compétence, Mme Fournier sera une excellente présidente, et nous sommes tout à fait d'accord qu'elle soit nommée présidente de la commission.

En ce qui concerne les autres nominations, le professeur Morel est présentement professeur des libertés publiques à l'Université de Montréal. Il est expert dans ce domaine, un expert bien connu au Québec et au Canada à cause de son enseignement à l'Université de Montréal et aussi à cause de ses ouvrages dans le domaine du droit. Je suis sûr qu'il fournira un apport précieux à cette commission.

J'aimerais souligner aussi la nomination, comme vice-présidente, de Me Trudeau-Bérard qui est actuellement secrétaire générale adjointe à l'Université de Montréal et qui est aussi avocate. Par son expérience en administration et par ses connaissances en droit, je suis convaincu qu'elle remplira très bien la fonction de vice-présidente. (15 h 30)

Finalement, il faut mentionner la nomination de M. Sliger qui est syndicaliste. La Commission des droits de la personne fait face à beaucoup de problèmes qui impliquent des syndicalistes et des syndicats et je pense que cela sera vraiment essentiel d'avoir quelqu'un qui a une bonne connaissance dans ce domaine.

En terminant, M. le Président, ce sont des nominations de très haute qualité. Il va sans dire que ces personnes vont bien défendre les droits et libertés de tous les Québécois. Merci.

Le Président: Est-ce que la motion de M. le premier ministre sera adoptée?

M. Charron: M. le Président, je propose qu'on ait le même vote enregistré que tout à l'heure.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à ce que le même vote soit enregistré?

M. Levesque (Bonaventure): Consentement, M. le Président.

Le Président: Consentement au même vote.

M. Levesque (Bonaventure): Un instant, M. le Président. Un vote enregistré, M. le Président. Pour être sûrs...

Le Président: Qu'on appelle les députés.

Est-ce que vous avez la motion, s'il vous plaît?

Est-ce que la motion de M. le premier ministre sera adoptée pour que l'Assemblée nationale nomme comme présidente de la Commission des droits de la personne Mme Francine Fournier, jusqu'à la fin du mandat préalablement fixé à titre de vice-présidente, que l'Assemblée nationale nomme comme membre et vice-présidente de la Commission des droits de la personne, pour une durée de trois ans, Me Nicole Trudeau-Bérard,

secrétaire adjointe de l'Université de Montréal, que l'Assemblée nationale nomme comme membres de la Commission des droits de la personne, pour une durée de trois ans, les personnes suivantes: Me Gisèle Côté-Harper, professeur agrégé de la faculté de droit de l'Université Laval; Me André Morel, professeur titulaire à la faculté de droit de l'Université de Montréal et, enfin, M. Raymond Sliger, coordonnateur régional du Syndicat des métallos.

Que celles et ceux qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon)...

M. Marx: M. le Président, juste un mot, j'ai oublié de mentionner le nom de Me Côté-Harper, qui est professeur à l'Université Laval; je connais bien Me Côté-Harper, qui a fait du travail très intéressant en milieu défavorisé et ce sera un apport très sûr pour la commission.

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Charron, Jolivet, Mme Marois, MM. Bédard, Morin (Sauvé), Morin (Louis-Hébert), Laurin, Bérubé, Lazure, Gendron, Lessard, Marcoux, Léger, Clair, Johnson (Anjou), Chevrette, Marois, Garon, Tardif, Léonard, Fréchette, Martel, Dussault, Gagnon, Mmes Harel, Lachapelle, MM. Vaugeois, Paquette, Proulx, Guay, Baril (Arthabaska), Dean, Fallu, Grégoire, Bisaillon, Mme Juneau, MM. Leduc, Marquis, Boucher, Lavigne, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gauthier, Blais, Le May, Desbiens, Perron, Bordeleau, Gravel, Brassard, Laplante, Charbonneau, Blouin, Rochefort, Brouillet, Champagne, Rodrigue, Payne, Tremblay, Beaumier, LeBlanc, Lafrenière, Lachance, Paré, Ryan, Levesque (Bonaventure), Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Bourbeau, Blank, Mathieu, Vallières, Dubois, Picotte, Pagé, Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau, Polak, Maciocia, Dauphin, Cusano, Hains, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss.

Le Président: Que celles et ceux qui sont contre veuillent bien se lever? Abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 97

Contre: 0

Abstentions: 0

Le Président: La motion est adoptée. M. le premier ministre.

M. Gaston Lefebvre, membre de la Commission de la fonction publique

M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, la troisième et dernière motion que je voudrais proposer à l'Assemblée nationale, c'est en vue du remplacement de M. Raymond Gérin, un vieux serviteur remarquable de l'État qui a dû prendre sa retraite comme membre de la Commission de la fonction publique il y a quelque temps, à la place de qui je vais proposer la nomination de M. Gaston Lefebvre qui est actuellement sous-ministre de la Fonction publique. Nous croyons qu'après plusieurs années passées soit dans le travail du personnel ou dans la fonction publique elle-même, sous-ministre en titre depuis trois ans environ, cette nomination serait dans la ligne de développement la plus naturelle de la carrière de M. Lefebvre qui, ai-je besoin de l'ajouter, est d'accord et qu'elle répondrait bien aussi au besoin de la commission, étant donné qu'il s'agit de remplacer un homme, M. Gérin, qui lui aussi avait l'expérience concrète de la gestion du personnel.

M. Lefebvre, qui est diplômé en relations industrielles et en administration publique, a travaillé dans le domaine de la gestion du personnel autant dans l'entreprise privée d'ailleurs, au début, que dans le secteur public. Il a participé activement à l'élaboration - cela n'a pas été facile - de la loi no 50 et aussi à sa mise en oeuvre au ministère de la Fonction publique. Il a rempli toutes ces tâches, y compris les plus exigeantes, avec compétence et je crois qu'on peut dire que c'est un homme qui s'est dévoué corps et âme. C'est pourquoi, au nom de l'administration publique, je profite de l'occasion pour le remercier de façon toute spéciale.

Donc, je propose, M. le Président, que M. Gaston Lefebvre, actuellement sous-ministre de la Fonction publique, soit nommé membre de la Commission de la fonction publique en vertu de la Loi sur la fonction publique, à compter du 1er juillet 1981.

Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Lévesque (Bonaventure): M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Gérard D. Lévesque

M. Lévesque (Bonaventure): Qu'il me soit permis de donner, au nom de notre formation politique, notre appui à cette motion du premier ministre relativement à la nomination de M. Gaston Lefebvre comme

membre de la Commission de la fonction publique. Cela me fait d'autant plus plaisir que j'ai eu l'occasion de travailler avec M. Gaston Lefebvre, particulièrement alors que j'étais titulaire du ministère de l'Industrie et du Commerce et que M. Lefebvre en était le directeur du personnel.

Je me joins au premier ministre pour remercier M. Lefebvre de ses excellents services et nous lui formulons nos meilleurs voeux pour l'avenir.

Le Président: Est-ce que le vote sera enregistré?

Une voix: Non.

M. Levesque (Bonaventure): II le faut bien.

Une voix: Non, même vote.

M. Levesque (Bonaventure): On n'a pas le choix.

Le Président: J'appelle donc aux voix la motion...

M. Levesque (Bonaventure): À moins qu'on ne prenne le premier vote. On est prêt à accorder...

Une voix: D'accord.

Une voix: Cela va.

M. Charron: On va prendre le premier vote.

Le Président: II y a consentement unanime, à savoir que le premier vote qui a été enregistré cet après-midi...

Une voix: Très bien.

Le Président: ...à savoir la nomination du nouveau Vérificateur général, soit, à toutes fins que de droit, reproduit en ce qui concerne la nomination de M. Lefebvre. Consentement? Alors, le consentement est constaté et la motion est adoptée.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

Condoléances à la famille de M. Glendon Brown

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): Puis-je, dans le contexte des motions non annoncées, faire motion pour que cette Assemblée offre ses plus vives condoléances à la famille de M. Glendon Brown qui est décédé il y a deux jours et qui a été inhumé cet après-midi? Quelques-uns de nos collègues ont assisté aux funérailles et ont eu l'occasion de communiquer les condoléances de notre formation politique à la famille.

Je pense bien que tout le monde a apprécié les qualités de coeur et d'esprit de Glen Brown. C'est un homme qui a siégé en cette Assemblée pendant 20 ans, de 1956 à 1976. Il a représenté le comté de Brome et, ensuite, le comté qui est devenu celui de Brome-Missisquoi. Il a été un homme qui a consacré les meilleures années de sa vie à la politique du Québec et il s'est également illustré dans le domaine du sport et dans le domaine de l'éducation.

C'est avec émotion que je me remémore son souvenir et j'espère que cette motion nous rappellera les années que Glen a passées avec nous. (15 h 40)

Encore une fois, nous voulons souligner que Glen était un grand Québécois, un anglophone mais qui avait ses racines profondément ancrées dans le sol du Québec. À sa famille, encore une fois, nos plus vives condoléances.

Le Président: Merci.

M. le leader du gouvernement.

M. Claude Charron

M. Charron: M. le Président, au nom de la majorité ministérielle, je veux me joindre à cette motion du leader de l'Opposition. J'ai connu M. Brown quand je suis arrivé ici, avec d'autres de mes collègues; il était certainement un des personnages les plus sympathiques à l'époque, avec lequel il était très agréable d'avoir les relations que ce Parlement nous donne l'occasion d'avoir. Je veux aussi offrir nos condoléances à sa famille.

Le Président: Motion du leader. M. le député de Saint-Louis.

M. Harry Blank

M. Blank: Je veux juste ajouter quelques mots.

I would like to add just one item to the memory of Glen Brown. What the Leader of the House, perhaps, forgot is that Glen, sitting here as a Member, contributed to the democracy of this province in the sense that it took him in order that the protected counties be eliminated from the map of Québec. Glen Brown, although perhaps under the pressure of his voters, understood the reality of Québec and gave his consent in those years so that we may have a democratic electoral map of this province

and that, perhaps, is one of his greatest contributions to the history of this province.

Le Président: Merci. Est-ce que cette motion du leader de l'Opposition sera adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Président: Adopté. Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Avis à la Chambre.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: M. le Président, je voudrais donner un aperçu...

Le Président: Excusez-moi, en vertu de l'article 34, M. le député de Mont-Royal.

Avis à la Chambre

M. Charron: Me permettriez-vous, si je peux le demender au député, de donner les avis, ils sont un peu compliqués. Vous me soumettrez votre question tout de suite après. Pendant que les députés sont attentifs, nous sommes dans la dernière semaine et ceux qui connaissent ces fins de session savent qu'il faut, à certaines occasions, modifier un peu nos habitudes de travail; c'est pour cela que je solliciterais une attention particulière pour le programme que j'ai à indiguer.

D'abord, il nous reste à peu près 6 h 30 de débats à tenir ensemble sur le discours sur le budget, c'est-à-dire 6 heures ouvertes à tous les députés, la dernière demi-heure devrait être normalement réservée, comme le règlement l'indigue, à la répligue du ministre des Finances. Ces 6 h 30 seront partagées de la façon suivante: Nous en ferons 3 h 30 ce soir, entre 20 heures et 23 h 30, et les 3 h 30 qui restent, donc la fin du débat sur le discours sur le budget et le vote, sur le budget devront intervenir demain après-midi entre 15 heures et 18 heures. Il faudrait que les députés s'attendent à être convoqués à un vote vers 18 heures demain sur la politique budgétaire du gouvernement.

Il reste peu de projets de loi, ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas y consacrer l'attention qu'ils méritent. Cet après-midi, dans l'ordre, les projets de loi nos 4 et 5 au nom du ministre des Finances et le projet de loi no 6, qui est à mon nom, seront appelés en deuxième lecture avant d'être déférés en commission parlementaire.

La commission des transports, qui recevra, par suite d'un vote de la Chambre, les projets de loi nos 4 et 5, se réunira dès ce soir, mais à 21 heures seulement. De 21 heures à 24 heures, à la salle 81, il y aura réunion de la commission des transports.

Demain matin - j'ai déjà indiqué le menu de demain après-midi, fin du débat sur le discours sur le budget - il y aura la prise en considération des projets de loi nos 1 et 7 dont le rapport nous a été soumis, la troisième lecture des projets de loi nos 2, sur le Palais des congrès, et 8, sur la gualité de l'environnement, de même que la deuxième lecture du projet de loi abolissant la discrimination dans l'âge de la retraite. Je rappelle qu'il n'est pas question de faire l'étude article par article de ce projet de loi mais bien, au cours de cette session, que la deuxième lecture, demain matin, entre 11 h 30 et 13 heures.

Le reste du programme: II s'agit d'accueillir les rapports des commissions, les troisièmes lectures telles qu'elles viendront avant la fin de la semaine.

Je voudrais faire motion, M. le Président, pour que cet après-midi, pendant que la Chambre s'adonnera au menu que je viens d'indiquer, à la salle 81-A se réunisse la commission des finances et des comptes publics pour poursuivre et finir, si possible, l'étude article par article du projet de loi no 11. Si jamais, à 18 heures, cette commission n'avait pas fini l'étude article par article du projet de loi no 11, elle disposera de 20 heures à 21 heures pour le faire. Et si jamais, à 21 heures, ce n'est pas fait, comme elle doit céder sa place à la commission des transports, elle s'ajournera sine die et nous aviserons en conséquence. À mon avis, cela est suffisamment avancé pour que cela soit fini au plus tard à 21 heures, ce soir.

Je fais motion aussi dans ma motion pour que la commission de la présidence du conseil et de la constitution se réunisse tout de suite jusqu'à 18 heures et ce soir de 20 heures à 24 heures pour étudier les crédits non seulement du premier ministre, mais de tous les ministres d'État qui sont rattachés au Conseil exécutif et qui, selon un ordre qui a été indiqué à l'Opposition pour l'organisation des travaux, que je n'ai pas besoin de donner ici, se succéderont à tour de rôle pour répondre aux questions des députés de l'Opposition en vue de l'adoption. Au salon rouge, oui.

J'ose l'indiquer et le souhaiter vivement, il s'agit de la fin de l'étude des crédits à 24 heures, ce soir. Demain, une commission sera réservée aux bills privés; les citoyens et citoyennes intéressés ont déjà été convoqués. Une autre sera réservée aux engagements financiers, ce qui devrait nous permettre, demain soir, d'avoir le débat final prévu de cinq heures - mais qui ne doit pas obligatoirement durer cing heures - sur l'ensemble des rapports des commissions qui ont été mandatées pour étudier les crédits. Là, j'avance un peu trop dans le menu de demain et je me contente de soumettre cette motion pour aujourd'hui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion du leader parlementaire est adoptée?

Des voix: Adopté.

Recours à l'article 34

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Adopté. En vertu de 34...

M. Ciaccia: M. le Président, M. le leader, le ministre délégué à l'Habitation et à la Protection du consommateur s'est engagé, jeudi dernier...

M. Charron: M. le Président, je n'entends pas la question qu'est en train de poser le député. Ce n'est pas du tout de sa faute. C'est de la faute de ceux qui quittent l'Assemblée.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Si ceux qui doivent se rendre en commission parlementaire le font, qu'ils le fassent avec le plus de silence possible pour permettre justement la question en vertu de l'article 34.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Le ministre délégué à l'Habitation et à la Protection du consommateur s'est engagé, jeudi dernier, en commission parlementaire, à fournir les documents suivants: le document donnant les détails et les coûts des travaux supplémentaires; le nom des personnes qui ont reçu les 22 000 $ de salaire versés dans le dossier de la Grande Passe, la lettre demandant l'abandon des poursuites dans le dossier Montmagny, la facturation de Luc Cyr pour l'usage de son avion, la demande d'enquête que le ministre délégué à l'Habitation a fait parvenir au ministre de la Justice - il avait accepté en principe cet aspect, sujet à certaines vérifications. L'analyse du conflit d'intérêts dans le dossier Montmagny et finalement, les huit études demandées par le ministre, regroupées en cinq volumes et concernant les réclamations et l'administration de la SHQ.

Est-ce que le leader du gouvernement peut nous dire quand ces documents seront mis à notre disposition?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.

M. Charron: M. le Président, la question du député nous permettra, sans aucun doute, d'avoir une liste complète de ce qui a été demandé et promis. Ce que je peux m'engager à faire, c'est de vérifier avec le ministre et son équipe pour que les documents qui sont disponibles dans les plus brefs délais, c'est-à-dire demain, soient déposés et que ceux qui viendront en cours de route le soient aussi. Je me fie aux propos du député, s'ils ont été promis, la marchandise sera livrée.

M. Ciaccia: Je voudrais seulement demander au leader s'il serait possible, vu la prorogation possible de la Chambre, jeudi ou vendredi, d'avoir ces documents avant pour les examiner et si nécessaire poser certaines questions au ministre.

M. Charron: Aussitôt que possible, M. le Président, dans la journée d'aujourd'hui, on colligera les documents disponibles. Demain, seront déposés ceux que nous aurons, sinon, ce sera un petit peu plus tard. M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 5 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi no 4 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Article 5, deuxième lecture du projet de loi no 4, Code de la sécurité routière. M. le ministre.

M. Michel Clair

M. Clair: M. le Président, c'est avec plaisir que je propose pour la dernière fois, je l'espère, au nom de l'Assemblée, l'adoption en deuxième lecture du projet de loi no 4 intitulé le Code de la sécurité routière. (15 h 50)

Je m'en voudrais de commencer mes propos sans souligner les efforts de tous ceux qui, depuis quelques années, m'ont précédé et qui sont intervenus dans le processus d'élaboration et d'adoption de cette législation considérable. Il s'agit, tout d'abord, du député de Charlevoix, M. Raymond Mailloux, sous la direction duquel les travaux de réforme du Code de la route ont été entrepris. J'aimerais également souligner la participation active du député de Saguenay, M. Lucien Lessard, ancien ministre des Transports qui a présidé à l'élaboration de l'avant-projet de loi du Code de la route, avant-projet de loi qui a fait l'objet, d'ailleurs, sous sa direction d'une commission parlementaire. Je ne veux pas passer sous silence, non plus, la grande contribution apportée par mon prédécesseur immédiat, M. Denis de Belleval, député de Charlesbourg, qui a présidé à l'élaboration finale du projet de loi.

Je n'ai pas l'intention, M. le Président, de reprendre en détail tous les éléments de la philosophie qui est à la base des dispositions que l'on retrouve dans le projet de loi no 4. Ces éléments ont été abondamment énoncés et discutés en cette Chambre depuis le début du processus

d'adoption de ce projet, il y a déjà plusieurs années. Qu'il me suffise de rappeler que l'objectif principal du gouvernement est l'amélioration de la performance du Québec en matière de sécurité routière. Bien sûr, cette amélioration ne passe pas uniquement par l'adoption d'un projet ou d'un Code de la sécurité routière, car il ne faut pas seulement améliorer le comportement des conducteurs, mais aussi la sécurité des véhicules et aussi agir sur d'autres facteurs. Ainsi, beaucoup d'efforts ont été consacrés dans le passé à l'amélioration de notre réseau routier principal qui a déjà atteint un niveau de fort bonne qualité. Cependant, comme je l'ai déjà souligné lors de mon entrée en fonction comme ministre des Transports, il faut poursuivre et accentuer en particulier le réaménagement de notre réseau routier secondaire pour des fins de sécurité. C'est à cette tâche que j'ai déjà commencé à m'attaquer, M. le Président.

Le projet de loi no 4, quant à lui, contient certaines mesures qui ont trait au comportement des conducteurs et d'autres qui concernent le degré de sécurité des véhicules automobiles. Le projet de loi no 4 constitue donc un rajeunissement, si je puis dire, des règles qui régissent le comportement des conducteurs. Ce rajeunissement était vivement souhaité étant donné que le Code de la route n'avait pas fait l'objet d'une refonte globale depuis son adoption en 1924. Le projet de loi constitue donc, sous ce rapport, une adaptation des règles à l'évolution qui s'est produite dans le comportement des conducteurs. Certaines règles légaliseront donc des pratiques qui ne sont ni dangereuses, ni répréhensibles, mais qui sont à l'heure actuelle interdites. Je pense, par exemple, au dépassement à droite en milieu urbain. D'autres comportements, par contre, n'étaient pas strictement régis par l'ancien code ou, en tout cas, n'étaient pas couverts de façon adéquate. Par exemple, le louvoiement sera maintenant nommément interdit par le Code de la sécurité routière. On tâchera aussi de réprimer de façon plus sévère certaines pratiques répréhensibles régies dans l'ancien code par des dispositions qui n'étaient pas suffisamment observées, notamment en matière d'excès de vitesse. Enfin, de nouvelles règles de comportement ont été introduites dans le but d'inculquer aux conducteurs certaines attitudes nouvelles. La priorité donnée aux piétons en est un exemple.

Parmi les principales innovations proposées par le Code de la sécurité routière dans le but d'influencer de façon positive le comportement des conducteurs, il y a tout d'abord l'institutionnalisation du cours de conduite qui devient ainsi un prérequis à l'obtention d'un nouveau permis de conduire. En deuxième lieu, le projet de loi prévoit le remplacement de l'ancien régime de suspension des permis de conduire par celui de leur révocation. Les deux principaux motifs de révocation des permis de conduire sont, comme pour le cas d'une suspension à l'heure actuelle, l'accumulation de points de démérite et la condamnation pour une infraction relevant du Code criminel, comme la conduite dangereuse et la conduite en état d'ébriété. Cette révocation entraînera la nullité du permis de conduire, de sorte que la personne qui en est l'objet devra obtenir un nouveau permis après s'être conformée aux exigences prévues par le règlement. Des cours de conduite préventive devraient notamment être imposés aux conducteurs qui désirent un nouveau permis après révocation.

Il est utile de noter que nous avons apporté, à l'égard de la révocation dans l'actuel projet de loi, une modification par rapport au texte de projet antérieurement déposé. Alors que ce projet prévoyait qu'une première révocation ne donnait lieu à aucun délai fixe d'attente pour la réobtention d'un nouveau permis, nous avons introduit un délai minimum de trois mois. D'ailleurs, aujourd'hui, les permis sont suspendus pour une durée minimale de trois mois. Nous voulions ainsi nous assurer que les individus touchés par une révocation ne bénéficient pas d'un traitement différent selon la région qu'ils habitent et les délais administratifs qui pourraient varier d'une région à une autre pour l'obtention d'un nouveau permis de conduire.

Cependant, le projet de loi no 4 remédie à ce qui pouvait être considéré comme une injustice en étendant le principe du permis restreint. En effet, d'après le code actuel, les gens qui sont condamnés pour avoir conduit en état d'ébriété peuvent bénéficier d'un permis restreint pour fins de travail, alors que ceux dont le permis est suspendu à la suite de l'accumulation de points de démérite se voient refuser ce privilège. Le projet de loi a aplani ces inéquités. Toutes les personnes qui verront leur permis révoqué pourront dorénavant demander un permis restreint, à la condition qu'elles aient besoin de conduire un véhicule dans l'exécution de leur principal travail.

Une autre mesure nouvelle par rapport à l'ancien code est la création d'une nouvelle catégorie de permis pour les jeunes qui circulent au moyen d'un cyclomoteur, c'est-à-dire une mobylette ou un vélosolex. Même si nous n'avons pas voulu leur imposer toutes les formalités du processus d'obtention d'un permis de conduire régulier, nous avons quand même voulu nous assurer qu'un minimum de contrôle serait exercé à l'égard de la capacité de conduire de tels véhicules à moteur. Ainsi, le projet de loi prévoit la nécessité d'obtenir un certificat de compétence qui sera délivré par des organismes désignés par règlement du

gouvernement. Ces organismes seront, pour la plupart, des commissions scolaires qui dispenseront l'enseignement des règles de circulation et de conduite applicables à ces cyclomoteurs.

Le projet de loi prévoit également l'obligation du port du casque protecteur pour les conducteurs de cyclomoteurs. En ce qui concerne la ceinture de sécurité, le projet de loi prévoit l'élargissement de l'obligation de la porter aux véhicules de police, aux véhicules loués, de même qu'aux véhicules taxis lorsqu'ils sont utilisés à des fins personnelles. Le projet de loi étend l'application des règles prévues dans le cas des véhicules affectés au transport des écoliers. En effet, la définition de ces véhicules comprendra dorénavant les véhicules affectés au transport des enfants qui vont en garderie et les véhicules affectés au transport des écoliers en dehors des activités scolaires normales.

D'autre part, les règles nouvelles introduites dans le projet de loi de même que les règles qui proviennent de l'ancien code ne peuvent assurer à elles seules la réalisation des objectifs du législateur. Il faut qu'elles trouvent leur corollaire dans des amendes dosées de façon adéquate. Ainsi, toutes les amendes reliées au non-respect des règles prévues au code ont été haussées pour tenir compte de l'inflation et de la gravité relative des infractions, elles n'avaient pas été revues, dans bien des cas, depuis les années vingt.

De façon plus particulière, étant donné que la vitesse excessive a toujours été considérée comme une des causes les plus importantes d'accidents, les amendes prévues par le projet de loi à cet égard ont été graduées selon l'importance de l'excès de vitesse. Ainsi, dans le cas d'une zone de 90 km/h, un conducteur roulant à 105 km/h s'exposerait à une amende de 35 % tandis qu'un autre conducteur qui roulerait, dans la même zone de 90 km/h, à 150 km/h pourrait encourir une amende de 140 $. Je tiens aussi à souligner une nouveauté par rapport au projet de loi adopté en deuxième lecture il y a quelques mois, dans le domaine des amendes. Il s'agit de l'amende pour le dépassement des autobus scolaires dont le minimum passera de 100 $ à 200 $. (16 heures)

Comme je l'ai indigué plus haut, le bon état mécanique des véhicules utilisés est un autre aspect de la sécurité routière. À cet égard, le projet de loi renferme des dispositions nouvelles. Il s'agit essentiellement de normes touchant la vérification mécanigue des véhicules automobiles. Ainsi, le gouvernement pourra, à l'égard des véhicules de plus de cinq ans décréter par règlement l'obligation d'être titulaire d'un certificat de vérification mécanique, lors du renouvellement de l'immatriculation. De plus, le ministre des Transports pourra ordonner la vérification de tous les véhicules d'une même marque, d'une même série ou d'une même année.

Enfin, tout agent de la paix pourra exiger la vérification mécanique d'un véhicule qui lui paraît dangereux pour la sécurité publique. Un tel véhicule ne pourra être remis en circulation à moins que la preuve ne soit faite que les réparations ont été apportées. Le gouvernement pourra de plus décréter par règlement que certains véhicules, par exemple les autobus scolaires, devront être munis d'appareils ou d'équipements spéciaux afin de respecter le niveau de sécurité qu'exigent de tels véhicules.

Le projet de loi no 4 constitue certainement un instrument essentiel en matière de sécurité routière. Cependant, il ne peut assurer a lui seul la pleine réalisation de l'objectif que doit se fixer notre société, c'est-à-dire l'amélioration de la situation au plan de la sécurité routière.

Comme je l'ai souligné plus haut, il y a l'amélioration de notre réseau routier, mais il y a également tous les efforts à consentir pour que ce code soit appliqué de façon adéquate. En effet, tous les gens impliqués devront manifester de façon soutenue une volonté ferme vis-à-vis du respect des dispositions du code, qu'il s'aqisse des policiers de la Sûreté du Québec, des surveillants routiers du ministère des Transports ou des policiers municipaux. Déjà une volonté politigue en ce sens a commencé à se manifester par la mise sur pied en 1979 du Conseil interministériel de la sécurité routière. Ce comité est formé de tous les ministères qui sont impliqués dans les diverses facettes de la politique de sécurité routière que le gouvernement veut mettre en oeuvre. Il s'agit des ministres des Affaires municipales, des Affaires sociales, de l'Éducation, de la Justice et évidemment des Transports.

De nombreux efforts ont été entrepris, également, pour rejoindre la population de tous les âges. Qu'il me suffise de mentionner les programmes d'éducation routière dispensés dans nos écoles, les programmes de publicité axés sur la prévention routière qui s'adressent à toute la population, etc.

Mais tous ces efforts déployés par l'appareil gouvernemental, que ce soit au niveau législatif, au plan de l'application de la loi ou de la mise en oeuvre des politiques de sécurité, ne pourront jamais suffire par eux-mêmes à atteindre complètement le but visé sur le plan de la sécurité routière. L'appareil gouvernemental, le Parlement peut faire adopter des lois et déployer toutes les énergies voulues pour qu'elles soient appliquées. Il peut également tenter par tous les moyens disponibles de sensibiliser ou d'éduquer la population dans le sens de

l'amélioration de la sécurité routière. Mais tous ces éléments de politique ne suffiront jamais à assurer le niveau de sécurité souhaité si les individus composant notre société ne font pas eux-mêmes leur part dans ce sens, si les individus qui composent la société ne sont pas conscients de ces problèmes.

Il faudrait que les gens comprennent mieux le fait que ces problèmes comportent beaucoup plus que des dimensions strictement individuelles. Que l'on pense aux drames familiaux que les accidents entraînent et aux coûts sociaux très élevés qui en résultent. Je ne peux me résigner à croire, M. le Président, que des individus qui sont normalement assoiffés de sécurité au plan économique, au plan social, au plan du travail ou face à la criminalité ressentent si peu ce besoin de sécurité lorsqu'ils conduisent un véhicule automobile.

Il y a malheureusement encore trop de gens qui pensent que les tragédies routières n'arrivent qu'aux autres ou constituent une possibilité trop lointaine pour qu'il vaille la peine de s'en préoccuper activement.

Pour ma part, je souhaite que de façon incitative plutôt que coercitive les mesures proposées par le projet de loi no 4, de même que les mesures complémentaires qui s'y rattachent produisent l'effet positif tant recherché au niveau du changement de cette attitude.

En terminant, M. le Président, je tiens à assurer tous les citoyens québécois que l'entrée en vigueur du nouveau Code de la sécurité routière se fera de façon progressive et sur une période de plusieurs mois. Afin de changer véritablement nos habitudes de conduite, il est important que chacun des nouveaux points inclus dans le projet de loi no 4 soit d'abord bien compris par l'ensemble des conducteurs québécois. À cette fin, les différents règlements du Code de la sécurité routière seront peu à peu mis en vigueur et appuyés par une campagne d'information et de publicité.

L'application de la loi comme telle sera introduite en même temps que des efforts de conscientisation par le biais d'une coordination entre l'entrée en vigueur de la loi et l'information relative aux différentes dispositions.

Ainsi dosé, l'avènement du nouveau Code de la sécurité routière ne devrait prendre personne dans une trappe ou au dépourvu et chacun saura à quoi s'attendre à mesure que les changements seront appliqués.

Ainsi, nous l'espérons, M. le Président, le nouveau Code de la sécurité routière pourra mieux contribuer à améliorer notre situation collective de conducteurs québécois. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laprairie.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, vous me permettrez de vous corriger et de bien signifier à la population que je suis le député de Laporte et non pas le député de Laprairie.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Je vous remercie, M. le Président.

Nous en sommes aujourd'hui au débat sur la motion de deuxième lecture du projet de loi no 4, intitulé Code de la sécurité routière.

Je voudrais vous faire part d'un certain nombre de considérations qui préoccupent au plus haut point non seulement les citoyens du comté de Laporte, M. le Président, mais aussi ceux de l'ensemble du Québec.

Ce projet de loi, qui ne diffère pas en substance de celui qui fut présenté devant cette Assemblée à la fin de l'année 1980, a pour but, bien sûr, de moderniser des dispositions législatives qui correspondaient plus ou moins à la réalité, mais il vise surtout à mettre un terme à ce que le ministre des Transports d'alors avait qualifié de fléau, c'est-à-dire le triste championnat du Québec quant au nombre de victimes de la route au Canada.

M. le Président, selon moi, il ne s'agit pas seulement d'un fléau, mais d'une tare qu'une société comme la nôtre est indigne de porter et dont le Québec doit absolument se débarrasser.

Il a été dit aussi à plusieurs reprises que ce n'est pas tout d'adopter une nouvelle loi sur la sécurité routière pour que notre bilan déplorable de victimes de la route en soit réduit d'autant.

Tous reconnaissent que les voies de solution reposent en grande partie sur l'attitude, le degré de responsabilité et, par voie de conséquence, le degré de civisme de l'ensemble des automobilistes du Québec. Il y en a trop parmi eux qui croient que les règlements de la circulation sont faits pour d'autres. Une proportion trop importante d'automobilistes ne se sentent pas concernés, même lorsqu'ils écoutent la radio le lundi matin, en se rendant au travail, alors qu'on y lit le bilan toujours trop lourd des tragédies routières de la fin de semaine qui vient tout juste de se terminer.

En février dernier, mon collègue, le député de Gatineau, avait, avec beaucoup d'à-propos, souligné le manque de rigueur que l'on observe dans l'application du Code de la route au Québec. D'ailleurs, pour mieux illustrer cette affirmation, n'a-t-on pas vu récemment les agents de la Sûreté du Québec utiliser des méthodes qui, c'est le moins qu'on puisse dire, étaient loin d'aller

dans le sens de l'objectif que l'on cherche tous à atteindre. Si les policiers peuvent eux-mêmes agir avec autant de laxisme à l'égard de leurs responsabilités, comment ne pas s'étonner, alors que les automobilistes québécois paraissent plus ou moins réceptifs à ces efforts qui visent à réduire le plus possible le nombre de morts sur nos routes?

M. le Président, l'Opposition souscrit, dans l'ensemble, au projet de loi qui est devant nous, parce qu'il constitue un premier pas vers ce changement de mentalité, vers cette prise de conscience collective des automobilistes québécois, non seulement en vue d'agir avec plus de prudence sur nos routes, mais surtout afin d'atteindre un degré d'autodiscipline indispensable si nous devons réaliser un jour des progrès substantiels.

Cependant, il nous faut, encore une fois, exprimer d'importantes réserves à l'égard de l'article 523 de ce projet de loi qui obligerait les médecins et optométristes du Québec à dévoiler à la régie toute information dont ils disposeraient sur l'incapacité d'un individu de conduire son véhicule. J'aimerais, M. le Président, faire lecture d'une partie de l'article 523 qui commence comme ceci: "Malgré l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne, un médecin doit faire rapport, etc.", et, au deuxième paragraphe, "l'obligation prévue au premier alinéa s'applique également à un optométriste dans l'exercice de ses fonctions."

M. le Président, nous ne pouvons pas souscrire à pareille disposition, parce qu'elle aurait pour effet d'institutionnaliser une forme de délation inacceptable. L'Ordre des médecins et l'Ordre des optométristes d'ailleurs, est-il nécessaire de le rappeler, ont fait valoir que cet article 523 va à l'encontre d'un principe universellement reconnu, soit celui de la confidentialité des rapports entre ces professionnels de la santé et leurs patients.

Je crois que, pour peu que le gouvernement fasse preuve d'imagination et de volonté politique, d'autres solutions plus honorables, devrait-on dire, pourraient être trouvées dans le but de réduire les accidents mortels sur nos routes et dont les causes principales sont bien la vitesse et l'ivresse. L'ancien ministre des Transports, l'actuel député de Charlevoix, l'ancien ministre des Transports, l'actuel député de Charlesbourg, ainsi que l'actuel ministre des Transports en conviennent et toutes les études sérieuses le démontrent.

Avec l'article 523, nous sommes bien loin de ce que mes collègues de Gatineau et de Charlevoix suggéraient en décembre dernier, c'est-à-dire une véritable politique nationale de la sécurité routière. D'ailleurs, à ce sujet, M. Mailloux, qui fut déjà titulaire du ministère des Transports, avait cité un passage du mémoire présenté par la Régie de l'assurance automobile à l'occasion de la commission parlementaire des transports sur la réforme du Code de la route qui a eu lieu l'an dernier. On y lit que "L'insuccès chronique du Québec en matière de prévention routière ne s'explique pas autrement que par l'absence d'une politique nationale."

Pourtant, au même moment, le gouvernement avait fait connaître, par la voix de son ministre des Transports de l'époque, quelques projets dont on n'a pas entendu parler depuis. À ce moment-là, M. de Belleval avait déclaré: "Nous avons d'ailleurs l'intention de réunir bientôt toutes les forces policières, non seulement la Sûreté du Québec, mais aussi les forces municipales qui ont un rôle extrêmement important à jouer dans le domaine, d'autant plus que la grande majorité des accidents surviennent en milieu urbain et non pas en milieu interurbain." Plus loin, le ministre ajoutait: "Par conséquent, le rôle des sûretés municipales est encore plus important que celui de la Sûreté du Québec en cette matière."

M. le Président, nous croyons que ce serait peut-être là une bonne façon de déclencher ce mécanisme de prise de conscience dont nous parlons tous. Si les forces policières doivent d'abord prendre conscience du rôle qu'elles ont à jouer en matière de sécurité routière, rôle qui dépasse de loin la simple dimension de coller des contraventions, le gouvernement qui a multiplié les rencontres au sommet, ces dernières années, devrait saisir l'occasion, le plus tôt possible, pour donner suite à cette idée, de réunir toutes les forces policières du Québec, de façon à manifester une véritable volonté politique de redresser une situation qu'on n'en finit plus de déplorer. Sans doute est-il trop tard maintenant, mais une réunion semblable, à cette date-ci, aurait certainement contribué à réduire de 10%, 15% et peut-être même de 20% le nombre de victimes de la route que nous connaîtrons cet été. Nous savons tous que le taux des accidents mortels est toujours plus élevé en cette saison.

Ceci pour dire qu'en matière de sécurité routière, chaque minute compte. On compare souvent le nombre des victimes de la route à celui de la dernière grande guerre ou encore au nombre de décès causés par les maladies cardiaques. Encore une fois, ceci prouve qu'il faut agir le plus rapidement possible auprès de l'ensemble de la population et ce, avec un maximum d'énergie, pour créer un climat psychologique essentiel à toute prise de conscience à l'égard de ce problème grave au Québec.

Dans notre critique du projet de loi no 4, nous essayons de démontrer que nous tenons réellement à nous doter du meilleur Code de la sécurité routière possible. Nous

cherchons aussi à faire en sorte que le citoyen, conducteur ou propriétaire d'un véhicule automobile, obtienne les meilleurs services possible au meilleur coût possible, et surtout qu'il puisse obtenir justice.

Aujourd'hui, le ministre nous propose d'abolir le Tribunal des transports comme lieu d'appel des décisions de la Réqie de l'assurance automobile et des décisions de la Commission des transports du Québec pour le remplacer tout simplement par la technique d'appel à la Cour provinciale. Nous ne comprenons pas cette position. Jusqu'à maintenant, les appels de la décision de la Régie de l'assurance automobile, c'est-à-dire des appels qui, à toutes fins utiles, se limitent à des décisions de suspension de permis de conduire, étaient entendus au Tribunal des transports.

Le ministre nous propose maintenant l'abolition de cet organisme. Sa justification? Que la Cour suprême du Canada, dans le jugement Farrah de 1978, a jugé inconstitutionnel que le tribunal entende les appels des décisions de la Commission des transports du Québec et que le tribunal n'a donc juridiction que pour entendre les appels des décisions touchant la suspension des permis de conduire.

Je me permettrai de toucher cet aspect de la constitutionnalité du tribunal un peu plus tard. Pour les prochaines minutes, j'aimerais parler de la justification de l'abolition du tribunal. Est-ce que l'abolition du Tribunal des transports apportera plus de justice aux citoyens? Est-ce que l'abolition du Tribunal des transports rendra plus efficace la procédure d'appel? Les faits m'obligent à répondre non à ces deux questions. Il y a, au minimum, 100 appels de suspension de permis par semaine, soit 5000 par année et ce, selon des statistiques datant déjà de 1977, ce qui n'a fait sans doute qu'augmenter depuis cette date.

Est-ce que la Cour provinciale pourrait, aussi efficacement, fournir les services requis dans des délais raisonnables? Dans les faits, la Cour provinciale est débordée, dans la plupart des régions. Comme un appel ne suspend pas l'exécution de la décision qui fait l'objet de l'appel et qu'une suspension normale est de trois mois, il faudra que l'appel se fasse vite et qu'on procède rapidement. Or, la procédure et le volume des causes inscrites à la Cour provinciale font en sorte qu'il sera impossible d'entendre la cause à court terme. En conséquence, le citoyen sera déjà lésé dans la mesure où l'exercice de son droit d'appel aurait pu faire renverser la décision de la régie. (16 h 20)

II serait aussi possible que la Cour provinciale soit tentée d'invoquer l'article qui permet de suspendre l'exécution de la décision jusqu'à ce que la cause soit entendue. Avec une telle procédure, le système de points de démérite ne vaudra plus rien. Ce qui est primordial, M. le Président, c'est que le citoyen dont le permis de conduire est suspendu par la régie et qui croit avoir des raisons suffisantes de faire appel de cette décision puisse se faire entendre le plus rapidement et le plus facilement possible. L'abolition du Tribunal des transports va à l'encontre de cette justice et de cette efficacité nécessaires. Nous ne croyons pas qu'il soit suffisant d'invoquer comme raison pour abolir le Tribunal des transports que la Cour suprême ait jugé inconstitutionnels tous les appels des décisions de la Commission des transports sauf ceux qui touchent la suspension des permis de conduire. De toute manière, il y aurait moyen pour le gouvernement de modifier la Loi sur les transports afin de permettre de nouveau les appels au Tribunal des transports.

Le problème de la constitutionnalité du tribunal pourrait être facilement réglé, nous sommes tous d'avis qu'un appel est nécessaire. Nous de l'Opposition croyons que cet appel doit être entendu dans les plus courts délais pour que justice soit faite. La Cour provinciale est surchargée. Réglons donc le problème de la constitutionnalité du tribunal. Ce problème peut se régler assez facilement. Cela ne requiert qu'un peu de coopération et de négociations avec le gouvernement fédéral qui, lui, s'est déjà prononcé sur sa volonté de négocier une solution à ce problème. J'espère, M. le Président, que dans ce cas le gouvernement prendra à coeur les intérêts de tous les Québécois en leur permettant de recevoir la justice qui leur est due dans les plus courts délais et ce, en négociant de bonne foi avec le gouvernement fédéral des arrangements administratifs pour modifier et non pas abolir le Tribunal des transports.

S'il avait été logique, le gouvernement aurait dû choisir de tenter d'abolir le Tribunal des transports au moyen de la loi 5, loi qui amende justement la Loi sur les transports, une loi qui sera adoptée en même temps que le présent Code de la sécurité routière et dont la deuxième lecture suivra celle-ci. Cela aurait eu l'avantage de la cohérence puisque le Tribunal des transports a été créé et existe justement en vertu de la Loi sur les transports. Le gouvernement a plutôt préféré abolir le Tribunal des transports dans la loi qui promulgue le Code de la sécurité routière.

Si nous n'approuvons pas l'abolition du Tribunal des transports pour les raisons que j'ai énoncées précédemment, nous souscrivons par contre aux mesures qui visent à améliorer la sécurité routière de sorte que le gouvernement nous place dans une position difficile nous obligeant à collaborer bien malgré nous à l'abolition du Tribunal des transports. Cette technique qui consiste à

camoufler le venin dans le breuvage est répréhensible et je laisse à la population le soin de l'apprécier et de porter les jugements qui s'imposent.

En conclusion, M. le Président, et mise à part la guestion de l'abolition du Tribunal des transports, nous sommes d'avis que c'est seulement par le biais d'une véritable politigue d'ensemble, ce que l'on a appelé une politique nationale de la sécurité routière, que le gouvernement trouvera les moyens les plus efficaces pour faire en sorte que l'on reste en vie sur les routes du Québec. Sans vouloir revenir sur un passé récent, j'ajouterais que c'est sûrement une des premières façons par lesquelles nous pourrons rester forts au Québec et surtout vivants. M. le Président, dans la mesure où le gouvernement manifestera une volonté d'agir en ce sens, l'Opposition officielle appuiera cette démarche. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: M. le Président, même si on n'a pas eu trop de temps pour étudier toute la nouvelle législation qui nous est présentée et le travail des commissions parlementaires, j'ose tout de même faire guelgues remargues sur cette loi. La raison est que je connais très bien la loi présente, le régime sous lequel on vit actuellement, parce qu'ayant été pendant dix ans juge municipal dans une banlieue de Montréal, j'ai appliqué le Code de la route et j'ai vu devant moi les problèmes que cette loi a soulevés. D'ailleurs, il faut que je dise tout de suite que je suis totalement en faveur du principe du projet de loi. Toute une refonte de la loi, comme le ministre l'a dit, cela a pris longtemps pour en arriver à ce point, et je suis d'accord avec le principe y énoncé.

Tout de même, je suis très heureux de voir que le ministre est ici. J'ai quelques remarques à faire sur quelques points en particulier et j'espère qu'il en prendra note pour faire les corrections nécessaires. On parle dans le projet de loi, à l'article 95, du devoir du juge de révoquer le permis dans le cas de certaines offenses commises contre le Code criminel. Sans aller trop dans les détails, j'indique ici qu'il s'agit des offenses et des délits suivants: la négligence criminelle dans la mise en service d'un véhicule automobile, le délit de fuite, la conduite dangereuse, la conduite avec facultés affaiblies et le défaut ou refus de fournir un échantillon. Ce sont tout de même des délits assez graves, prévus dans le Code criminel. On en parle maintenant à l'article 95 en disant que le juge doit révoquer le permis et, ensuite, en ordonner la confiscation.

Plus loin, à l'article 104, on parle maintenant du permis restreint. Le changement dans la loi, c'est qu'auparavant on avait la suspension pure et simple du permis comme une pénalité et que maintenant on donne le droit d'avoir un permis restreint. Je suis tout à fait d'accord sur l'amélioration d'avoir un permis restreint. L'article 104 parle encore de cas, par exemple, où il y a une violation du Code criminel. Le juge, donc, a d'abord révogué le permis et, ensuite, l'article 104 dit que ce même juge peut, sur reguête du titulaire du permis, ordonner à la régie de délivrer un permis restreint si la personne démontre "qu'elle doit conduire un véhicule routier dans l'exécution du principal travail dont elle tire sa subsistance". Évidemment, l'idée derrière cela, c'est que quelqu'un ne doit pas perdre la possibilité de gagner sa vie, et je suis tout à fait en faveur de cela. J'indigue tout de suite que guand on lit l'article 61 du projet de loi, qui donne la définition des mots "permis restreint", on n'utilise pas les mêmes mots, l'article 61 parlant de l'exécution d'un travail. Donc, l'article 61 est beaucoup plus large dans son texte que l'article 104. Je suggère respectueusement qu'il faudrait changer l'article 61 pour que le texte soit identigue à celui de l'article 104, parce que, tout de même, dans l'article 104, on parle du principal travail dont la personne tire sa subsistance. C'est une exception qu'il faut accorder. Je suis bien d'accord avec cela, mais quand on se réfère à l'article 61, quelqu'un pourrait dire: Moi, j'ai besoin d'avoir une automobile et d'un permis restreint parce que c'est pour l'exécution d'un travail. C'est très vague. C'est sans doute une erreur de rédaction, mais je souligne qu'il faut changer l'article 61 pour en faire concorder le texte avec celui de l'article 104.

Il y a une autre chose à l'article 104. L'article dit que le juge peut ordonner de délivrer un permis restreint, mais il n'y a aucune obligation pour le juge de le faire. Qu'arrive-t-il si le juge interprète durement les offenses? Le juge a parfaitement le droit de dire: Moi, je n'accéderai pas à cette demande de donner un permis restreint, parce qu'à l'article 104, le texte de loi dit "peut". "Le juge peut". On ne dit pas: "Le juge doit". J'ai même pensé dire: Peut-être que le juge doit, à moins de circonstances exceptionnelles, parce qu'en laissant le texte tel quel, "le juge peut", il peut arriver, si à un moment donné il y a une interprétation assez stricte, que les juges en général disent: Nous, on n'accordera pas cette demande. (16 h 30)

Si les juges interprètent l'article de telle manière, l'objectif du permis restreint sera défait. On retombe exactement dans la même situation où on était, c'est-à-dire que la révocation devient simplement une

suspension. Je me pose sérieusement des questions, et je suggère au ministre de regarder le texte de l'article 104 et, au lieu de dire "peut", de dire "doit". Je comprends que, quand on dit "doit", il n'y a pas d'exception. Alors, on pourrait peut-être dire "doit, à moins de circonstances exceptionnelles", de sorte qu'on établisse clairement le devoir du tribunal, et qu'on dise: Vous, M. le juge, vous êtes obligé d'accéder à la demande de permis restreint si, évidemment, la personne a besoin de son automobile "dans l'exécution du principal travail dont elle tire sa subsistance."

D'ailleurs, le législateur semble avoir pensé dans cette direction parce qu'à l'article 107 on lit: "Aucune ordonnance de délivrer un permis restreint ne peut être rendue dans le cas où quelqu'un a été condamné dans les deux ans qui précèdent la demande." Je suis totalement d'accord avec cela. Dans un tel cas, on ne peut pas avoir un permis restreint. En ayant une exception à l'article 107, pourquoi ne dit-on pas, à l'article 104: Le juge doit, à moins de circonstances exceptionnelles? Je pense que ce serait une amélioration pour forcer le tribunal à suivre ce nouveau système pour les permis restreints parce que, autrement, il y a une forte possibilité que la cour rende un jugement qui, à toutes fins utiles, va annuler cette toute nouvelle idée d'un permis restreint.

Comme le député de Laporte vient de le dire, M. le Président, il y a un article assez important, l'article 184, qui stipule qu'un appel ne suspend pas l'exécution de la décision. Évidemment, connaissant les délais devant les tribunaux, il est donc fort possible que quelqu'un aille en appel et qu'au moment où sa cause sera entendue les trois mois soient déjà expirés et, qu'à toutes fins utiles son appel soit futile. Il faut revoir cela et prendre des mesures pour que l'appel soit entendu immédiatement, peut-être par un juge spécialisé dans ces affaires ou devant un juge en charge de la Cour provinciale pour que celui qui a été trouvé coupable puisse aller en appel tout de suite sans perdre de temps.

Il y a un autre point dans la loi que je veux souligner; c'est dans la section qui traite des excès de vitesse, à l'article 373. J'ai noté que l'article dit, au septième paragraphe: est prohibée "une vitesse excédant 50 km/h dans les zones scolaires lors de l'entrée ou de la sortie des élèves." Nous savons tous qu'il y a actuellement beaucoup d'accidents subis par des écoliers, partout, en ville, dans la campagne. Je trouve étonnant qu'on permette, dans la loi, une vitesse de 50 km/h dans une zone scolaire lors de l'entrée ou de la sortie des élèves. Ce sont les moments les plus dangereux où les enfants sont sujets aux accidents. Vraiment, 50 km/h, c'est beaucoup trop. Je soumets respectueusement, M. le Président, que le ministre devrait prendre en considération qu'il doit être beaucoup plus dur dans cette section qui traite des zones scolaires. J'en ai l'expérience, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, pas seulement comme ancien juge municipal où j'avais devant moi des cas d'accidents dus à un excès de vitesse dans les zones scolaires, et une vitesse de 50 km/h est certainement trop. On n'a pas le contrôle du véhicule si un enfant sort ou entre à l'école. Il faut amender cet article substantiellement.

D'ailleurs, quand on voit la pénalité pour quelqu'un qui roule à 50 km/h dans une zone scolaire, à l'article 473, il y a une amende de 20 $. On paie 20 $ pour faire 50 km/h dans une zone scolaire. Je crois qu'il s'agit d'une erreur, que la vie des enfants est trop chère et qu'il faut, justement, ici, être beaucoup plus dur et ne pas accepter une vitesse de 50 km/h. C'est vrai que le projet de loi prévoit la possibilité pour des municipalités d'avoir leur propre réglementation et, dans plusieurs municipalités, évidemment, il y a une vitesse moindre que 50 kilomètres. Tout de même, on se base souvent, dans les municipalités, sur la liqne de conduite indiquée dans le code qui règle évidemment leur existence au point de vue de la sécurité routière et, quand on parle de 50 kilomètres, on donne une possibilité aux municipalités d'aller beaucoup trop loin. Ce n'est pas une manière, selon moi, d'éviter des accidents graves qui impliquent des enfants.

La dernière remarque que je voudrais faire, c'est sur l'application du système au point de vue de la procédure. Je parle ici de l'article 480, parce que ce qu'on voit maintenant, c'est qu'on commence à avoir de la justice par ordinateur. C'est bien beau d'avoir des billets d'infraction, un avis; vous le recevez, vous le payez, vous ne voyez jamais une cour, jamais un juqe et l'affaire est finie. Vous faites de la vitesse dans une zone d'école, à 50 kilomètres ou un peu plus, vous payez 20 $ ou 25 $ et l'histoire est finie. Je crois, tout de même, et j'ai vécu cette expérience, que, très souvent, c'est très important pour le contribuable de comparaître devant un tribunal. Je crois qu'il faut laisser la latitude au tribunal de dire, à un moment donné: Cet individu ne peut pas simplement payer un billet de 25 $ ou 30 $, je veux que cette personne soit sommée de venir devant moi et qu'elle explique comment cela s'est produit, cette vitesse, cette contravention. Très souvent, je crois qu'en parlant devant la cour, en expliquant la situation, le juge imposera une pénalité et on aura beaucoup plus de résultats que d'aller payer 20 $ ou 25 $ et c'est la fin de l'histoire.

Je ne vois rien, dans le texte du chapitre 9, au point de vue de la procédure,

qui prévoit même cette méthode. Il faut laisser la latitude à la cour de dire: J'exiqe que cette personne se présente devant moi; après tout, les juges municipaux sont là pour cela, ils siègent le soir et ils ont tout le temps de s'en occuper. Que tous les contribuables qui doivent comparaître devant lui à cause de la gravité de l'offense... Il ne faut pas éviter ce système et remplacer par un système de justice par ordinateur, il faut laisser de la latitude pour que la cour puisse dire: Je veux que cette personne comparaisse devant moi pour que je juge comment le délit est grave.

Ce sont les remarques que je voulais faire et je ne suis pas là du tout pour critiquer, comme je vous l'ai dit. Je suis pour le principe de la loi, je trouve que cela est bien fait, sauf pour les quelques remarques. J'espère que le ministre sera positif et qu'il fera des changements aux quelques arcticles dont j'ai discuté. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Charlevoix.

M. Raymond Mailloux

M. Mailloux: M. le Président, comme cela fait déjà au-delà de dix ans que je parle de sécurité routière, mes propos seront brefs. Je pense qu'il appartient à d'autres de prendre la relève dans un secteur d'activité aussi important.

Je constate quand même qu'à la toute fin de la session, on arrive devant cette Chambre avec un projet de loi dont l'importance est telle, quand on en regarde les conséquences, que le gouvernement aurait dû profiter de beaucoup plus de temps, profiter également de la télévision, profiter de l'ensemble des médias d'information pour faire en sorte qu'on fasse comprendre aux quelque 6 000 000 de Québécois quelles sont les conséquences de ce projet de loi, qu'on leur dise que, si chacun des Québécois doit être préoccupé par les conséquences de la conduite automobile, alors qu'au-delà de 600 lits d'hôpitaux sont occupés presque annuellement par les accidents routiers, alors que 55 000 blessés et 2000 de nos Québécois, et principalement les plus jeunes, trouvent la mort sur les routes du Québec. Je pense qu'on aurait dû profiter de tous ces moyens pour faire prendre une conscience nationale comme en parlait d'ailleurs dans le temps de la Régie de l'assurance automobile. (16 h 40)

M. le Président, je voudrais souhaiter les meilleurs résultats possible aux conclusions des études qui se sont poursuivies pendant des années sur l'ensemble de la problématique de la conduite des véhicules automobiles et des conséquences que cela entraîne.

Je veux souhaiter au ministre les meilleurs résultats possible. Cependant, je voudrais lui faire une observation, au tout début de ces quelques remarques. Quelles que soient les améliorations qui pourront être apportées au Code de la sécurité routière, tant et aussi longtemps qu'une volonté politique bien clairement définie, bien articulée ne sera pas à l'arrière du ministre des Transports, de la Régie de l'assurance automobile du Québec et de tous les corps de police, tous les intervenants dans le domaine de la conduite automobile, dans le domaine de la sécurité routière, tant et aussi longtemps qu'on ne retrouvera pas une volonté politique bien articulée, on aura les résultats malheureux et désastreux qu'on connaît maintenant.

Je n'en fais pas reproche au ministre actuel, mais il ressort que depuis les six années que j'ai quitté ce ministère... J'avais moi-même fait face au plus triste record, presque, qu'on pouvait afficher dans le monde entier, le triste record que détenait le Québec à ce moment. J'avais réussi à convaincre le milieu politique des correctifs qu'il fallait apporter, quelles que soient les conséquences que ça entraînerait sur un parti politique qui imposerait des correctifs assez draconiens. Ce fut difficile dans le temps pour celui qui vous parle, M. le Président, ça sera extrêmement pénible pour celui qui est aujourd'hui titulaire de ce ministère.

On a fait des campagnes de publicité dans le but de réduire ce triste fléau, l'annihiler, en tout cas l'amenuiser, des campagnes prônant des mesures correctives dans le domaine de la sécurité, à la radio, à la télévision, par des circulaires. Quel que soit l'argent qu'on ait dépensé, il reste - et le ministre pourra me contredire tantôt -que le triste record que j'affrontais en 1973-1974 et auquel j'ai voulu apporter une certaine correction... Après l'adoption de la loi 13 à l'Assemblée, loi qui semblait assez impopulaire, on avait quand même réduit de 11 000 le nombre de blessés dans le Québec et, la première année, de 2000 on avait réduit à un peu plus de 1600 le nombre des victimes.

La première année où le Parti québécois a été au pouvoir, des résultats semblables ont été obtenus. Le ministre pourra regarder les statistiques du Bureau des véhicules automobiles, qui, dans le temps, faisait la compilation de l'ensemble de ces statistiques, et il constatera les gains qu'on avait faits, à ce moment, avec une volonté politique bien arrêtée et avec l'appui de tous les corps de police qui sentaient cette volonté, à tous les niveaux. Mais on constatera que depuis un an ou deux, malgré que le nombre de véhicules circulant sur les routes ait diminué de peut-être 10%, on est revenu au même triste record qu'a toujours

affiché le Québec dans le monde entier.

M. le Président, devant de tels résultats - je ne blâme personne là-dedans -devant d'aussi tristes résultats qu'on continue à afficher et devant les restrictions économiques qu'on connaît maintenant, alors qu'on coupe partout, je pense qu'il est temps que le gouvernement prenne l'ensemble de sa responsabilité. Quel que soit l'impact politique que ça pourra entraîner, qu'on fasse entendre raison à tous ceux qui ne veulent pas prendre leurs responsabilités dans le réseau routier du Québec, par des moyens dont d'autres provinces et d'autres États se sont servis et qui ont donné des résultats concrets.

On craint toujours, dans le Québec, de mécontenter des gens. On a dans ce projet de loi - et j'en félicite le ministre - des peines qui sont plus onéreuses pour le contrevenant; il y a également quantité de correctifs qui sont apportés dans tous les secteurs. J'appuierai forcément moi-même tout ce que pourra faire le ministre dans le but de faire en sorte que ce record soit réduit d'autant.

M. le Président, je voudrais faire quelques observations sur des points dont un de mes prédécesseurs, le député de Laporte je pense, a parlé tantôt. Je reste également moi-même opposé à l'obligation qu'on fait aux médecins et aux optométristes... On a enlevé la pénalité advenant qu'ils ne fassent pas la délation requise. Je reste opposé à ce qu'on oblige l'ensemble de la profession médicale à rapporter la possibilité que telle personne n'ait pas l'aptitude requise pour conduire un véhicule automobile. Voici la raison pour laquelle je dis que cela ne devrait pas exister dans la loi. On connaît assez profondément les causes des accidents d'automobile dans tous les pays et, principalement, au Québec, soit que 76% des accidents ont comme cause première l'état d'ébriété. Il y a forcément des points noirs qui amènent quelques autres problèmes; il y a, évidemment, les intersections. Le ministre sait pertinemment que quant aux problèmes de santé dont pourrait souffrir un conducteur, c'est moins de 1% de la cause d'un accident. Une personne qui aurait fait un infarctus au volant, qui, pour toutes sortes d'autres raisons, va faire une crise nerveuse de quelque type que ce soit, c'est moins de 1% la raison même d'un accident. Dans le projet de loi, il n'y a pas un homme public, un politicien qui obligerait tous les tenanciers de tous les débits de boisson qui se conforment à la loi... Est-ce qu'on obligerait ou est-ce qu'on penserait obliger un tenancier d'un débit d'alcool, à minuit, à une heure ou à deux heures du matin, d'arrêter un individu qui a pris deux verres de trop, qui a pris deux ou trois bouteilles de trop, et dont le comportement est à peu près synonyme de quelqu'un qui n'a pas sa raison et à qui on donnerait une carabine chargée en l'envoyant dans le public? C'est aussi bête que cela, M. le Président. Personne n'est capable de déceler si une personne ne va pas prendre un peu trop de boisson à une certaine heure de la nuit ou de la soirée. Pourtant, on continue de l'envoyer partout sur le réseau routier et on constate que 76% de tous les accidents ont comme cause première la boisson. J'accepte que tout le monde puisse en prendre, mais en prendre dans des conditions que certains, évidemment, ne respectent pas.

M. le Président, on fait obligation aux médecins de rapporter à la Régie de l'assurance automobile toute personne qui souffre d'une maladie qui pourrait influencer son comportement au volant. Il va falloir qu'à un moment donné les gouvernements, quels qu'ils soient - je ne fais pas de politique à ce moment-ci - comprennent notre responsabilité collective, qu'on la prenne comme il faut, et que la personne qui abuse sans cesse du réseau routier dans un état d'ébriété qui ne permet pas une conduite sérieuse au volant, où il y a des dépassements inacceptables, des excès de vitesse qui dépendent, pour la plupart des cas, d'une ébriété déjà avancée, c'est là qu'on rejoint presque l'ensemble des accidents, les causes des accidents.

M. le Président, les Québécois, quels qu'ils soient, devront comprendre que ce n'est pas un droit exclusif qu'ils ont de circuler sur l'ensemble du réseau routier; ce n'est pas un droit exclusif parce que leur liberté est conditionnée par la liberté des autres de circuler dans des conditions normales. Tantôt, on disait qu'à chaque fin de semaine, on est rendu au point où c'est un fait divers de retrouver 12, 15 ou 20 jeunes victimes de 15, 16, 17, 18 ou 20 ans pour qui l'État, évidemment, a fourni tous les degrés académiques requis pour qu'ils servent la population. C'est devenu un fait divers. S'il en meurt six dans un incendie, cela devient dramatique. S'il en meurt 20 sur une route du Québec, c'est le lot qu'il faut payer pour conduire un véhicule automobile et se servir du réseau routier.

Ce sont des anomalies, M. le Président, et il faudra que le public, tantôt, fasse la différence entre les correctifs qu'il faut apporter dans un domaine d'activité qui coûte cher à notre jeunesse, qui coûte cher en soins de santé et en blessures qui durent éternellement. (16 h 50)

Je voudrais également dire deux mots du transport scolaire. On a parlé tantôt de certains articles concernant le transport scolaire. J'ai été récemment estomaqué par l'aventu d'une membre de ma famille qui a reçu une infraction avec perte de neuf points. Ayant passé près d'un véhicule scolaire, on l'accusait de n'avoir pas arrêté.

En deux mots, quand on regarde les articles qui couvrent le transport scolaire, on constate que, si plusieurs véhicules scolaires sont arrêtés, le dernier doit avoir les feux de signalisation requis. Forcément, la personne dont je parle est passée parce que le dernier n'avait aucun feu d'allumé.

Je pense que le ministre devrait faire en sorte que l'ensemble des chauffeurs d'autobus scolaires soient davantage sensibilisés, d'abord, à la responsabilité qu'ils ont de transporter des enfants qui ne sont pas en mesure de se défendre eux-mêmes, ensuite aux problèmes qui se posent alors que chaque conducteur peut les dépasser si eux ne prennent pas toutes les précautions requises. Je m'explique. Je vois parfois des accidents malheureux dans certains rangs ou sur certaines routes secondaires du Québec où, pendant des dizaines de minutes, on voit des transporteurs scolaires qui ne feraient pas le premier geste pour éviter qu'à la suite d'un autobus il n'y ait une accumulation constante de véhicules. Ils vont attendre parfois des milles et des milles avant de libérer la circulation.

Quand on a un tel comportement comme conducteur, parce qu'on peut arrêter tout le monde, à un moment donné, en allumant ses feux, il peut y avoir une personne à l'arrière qui va s'irriter d'être bloquée sur une trop longue distance. Il faudrait au moins que les conducteurs scolaires prennent conscience également des problèmes qu'ont les autres conducteurs qui les suivent et qu'ils permettent des dépassements quand il y a des surlargeurs qui leur permettent d'évacuer la route.

En faisant référence à cela, je voulais surtout faire l'observation suivante. Je discutais récemment avec un conseiller juridique du ministère d'une telle infraction et, j'ai été surpris d'apprendre, comme ancien titulaire des Transports, que, si vous dépassez un autobus scolaire arrêté, qui n'a aucun feu allumé, vous êtes également passible de perdre neuf points si la porte du véhicule est ouverte et qu'un enfant peut en descendre. Alors qu'il n'y a aucun feu, si vous dépassez ce véhicule, vous pouvez perdre neuf points. J'ai été estomaqué d'apprendre que, pour un véhicule scolaire immobilisé, sans aucun feu, qui était arrêté alors que personne n'en descendait, la même pénalité pouvait s'appliquer si l'officier de circulation veut aller carrément au fond de la loi.

Je ne voudrais pas aller plus loin dans l'étude de cette loi. Je pense que certains amendements qu'apporte le ministre à la suite des nombreuses études qui ont été complétées depuis quelques années devraient, si le gouvernement en fait la publicité requise, apporter certaines améliorations à la conduite automobile au Québec.

Je profite de la circonstance qui m'est offerte pour dire à tous mes concitoyens québécois qu'ayant été moi-même responsable de cette activité pendant un certain temps je me mets à la place du ministre des Transports actuel. Chaque fois qu'on ouvre les journaux de fin de semaine et qu'on voit de si nombreuses tragédies, on se sent une certaine responsabilité comme ministre des Transports. Mais il n'appartient pas seulement au ministre des Transports, il n'appartient pas seulement au gouvernement, il appartient aux 3 000 000 de conducteurs qui sont sur le réseau routier d'apporter leur contribution à cette loi, si bonne soit-elle. Tant et aussi longtemps que chacun ne prendra pas ses responsabilités, comme on les a prises en Suède, comme on les a prises en Norvège, comme on les a prises aux États-Unis, en Ontario et partout ailleurs - c'est presque seulement au Québec ou au Mexique où chacun est roi et maître d'un réseau routier - on aura malheureusement les conséquences qu'on a connues depuis les 20 dernières années tant et aussi longtemps que chaque individu n'aura pas pris conscience de la gravité du geste qu'il pose quand il viole les lois de la circulation et tous les Québécois en feront les frais. Qu'on ne s'attende pas que l'assurance automobile va diminuer si le comportement de chacun ne s'améliore pas. Cela ira, monsieur, en augmentant considérablement. M. le Président, je formule le voeu que le projet de loi qui est présenté devant nous, en Chambre, le projet de loi no 4, fasse comprendre aux Québécois que s'il y a des correctifs d'apportés, c'est pour le mieux-être de chacun et pour éviter qu'on assiste chaque semaine à de trop nombreuses tragédies. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Le droit de réplique de M. le ministre.

M. Michel Clair (réplique)

M. Clair: M. le Président, je voudrais, dans un premier temps, remercier mes trois collègues pour l'appui qu'ils ont témoigné au projet de loi dans son ensemble. Je l'ai moi-même dit dans mon allocution d'introduction au projet de loi no 4, en deuxième lecture, il s'agit là d'une question, la sécurité routière, qui concerne tous les Québécois. Comme le disait le député de Charlevoix, en terminant, il est certain que le ministre des Transports, la Sûreté du Québec ou l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale ou qui que ce soit ne peut seul régler ce problème de la sécurité routière au Québec. Pourtant, M. le Président, il y a un paradoxe assez bizarre dans la société québécoise. Alors que les Québécois réclament tant de sécurité au point de vue social, au point de vue de la sécurité au travail, au point de vue de la sécurité dans

tous les sens, par rapport à la criminalité, les Québécois, quand ils font face au dossier du conducteur québécois, font preuve, à ce moment, d'une témérité, voire d'une insouciance qui n'est peut-être pas la plus dangereuse au monde, mais qui n'est certainement pas reluisante pour l'ensemble des Québécois.

M. le Président, le député de Charlevoix disait dans son allocution, au début, qu'il aurait souhaité que le gouvernement prenne plus de temps pour étudier ce projet de loi à cette étape-ci. Je lui répondrai que je pense qu'il ne faut pas seulement parler d'un nouveau Code de la sécurité routière, mais qu'il est devenu pressant, après trois, quatre, cinq ans d'études, de révision de l'ancien Code de la route, de le mettre en application dans les meilleurs délais, d'autant plus que l'ensemble des députés y est favorable à quelques exceptions près. Je pense qu'au contraire, il ne faut pas prendre plus de temps pour adopter le projet de loi. Mais il est important que les dispositions que le gouvernement aura à prendre quant aux règlements, à l'information publique, soient mises en marche le plus rapidement possible.

Dans ce sens, je pense que l'adoption même d'un nouveau Code de la sécurité routière permettra à l'ensemble de la collectivité québécoise, et c'est en particulier la responsabilité qui incombe au ministre des Transports et à la Régie de l'assurance automobile du Québec, d'essayer de franchir un nouveau pas dans le domaine de la sécurité routière. Je l'ai dit précédemment, je veux qu'on mette en parallèle l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions du nouveau Code de la route avec une campagne d'information publique et de publicité, afin d'éviter de prendre dans un piège les conducteurs québécois qui ignoreraient un trop grand nombre des nouvelles dispositions, mais également dans le but de bien marquer le pas, de faire en sorte que progressivement la population conductrice du Québec en vienne à changer son comportement dans les meilleurs délais possible. Combien de drames personnels, combien de drames familiaux on pourrait éviter, M. le Président, si on améliorait un tant soit peu notre dossier de conducteur!

Je ne veux pas faire de politique avec les statistiques en matière de victimes d'accidents de la route, M. le Président, mais je pense que tantôt le député de Charlevoix exagérait un peu quand il disait que, depuis l'arrivée du Parti québécois, la sécurité routière s'était considérablement affaiblie au Québec. Mais, somme toute, c'est peu important de savoir qu'il y a eu 2000, 1800, 1500 ou 1400 morts au Québec sur les routes, qu'il y a eu 51 000, 40 000 ou 62 000 blessés sur les routes. L'important, M. le Président, c'est que ces chiffres sont astronomiques et peuvent être corrigés par un changement de comportement. Même si on a fait des efforts sous tous les gouvernements pour améliorer notre dossier de conducteur, ils n'ont pas suffisamment portés fruit et il faut travailler encore à l'amélioration de notre dossier sécurité routière au Québec. (17 heures)

Quant aux statistiques, de façon plus précise, le député de Charlevoix avait raison de dire qu'au cours des années 1972-1973 le dossier québécois était à son plus noir avec, en 1973, 2209 morts sur les routes au Québec et avec un chiffre de blessés qui dépassait les 50 000. M. le Président, 2000 personnes tuées sur les routes en 1972, c'est l'équivalent de la population totale de combien de nos villes, de nos villages ou de nos campagnes au Québec? 2000 morts par année, c'est l'équivalent de mon village natal. 50 000 blessés par année sur les routes du Québec, c'est l'équivalent de la population de villes comme Granby, Victoriaville, même la vôtre, M. le Président, la ville de Sherbrooke, avec des chiffres comme 60 000. Je pense qu'effectivement il faut faire des efforts et le gouvernement actuel en a fait. Le privilège ou la vertu d'avoir essayé de combattre les accidents routiers ne revient pas seulement à nos prédécesseurs, puisque le gouvernement, en créant le Comité interministériel de sécurité routière, en faisant avancer l'adoption jusqu'à l'étape où nous en sommes rendus d'un nouveau Code de la sécurité routière, a lui-même manifesté une préoccupation qui a, elle aussi, porté ses fruits.

Contrairement à ce que le député de Charlevoix affirmait, l'année qu'on vient de passer, l'année 1980, n'est pas l'année record au point de vue des morts sur les routes. L'année record, c'est l'année 1973 avec 2209 morts sur les routes, alors qu'après 1975 le chiffre a baissé pour atteindre 1589 en 1976 et la meilleure des dix dernières années pour la sécurité routière a été l'année 1980 avec 1481 décès dans 1292 accidents mortels, soit une diminution de 17% par rapport à l'année précédente, où il y en avait eu 1558 . Mais, encore une fois, ce sont là des statistiques, M. le Président, qui demeurent encore trop élevées au niveau de la sécurité routière.

En ce qui concerne les autres points qui ont été soulevés par le député de Charlevoix concernant une volonté politique fermement arrêtée et clairement articulée du ministre des Transports et du gouvernement du Québec, je voudrais assurer mes collègues qu'effectivement l'ensemble des décisions qui seront prises par le ministre des Transports du Québec, que ce soit en matière de construction de routes, que ce soit en matière de sévérité des amendes, de demandes aux corps policiers de faire

respecter tel ou tel secteur du Code de la sécurité routière, seront toujours guidées par une plus grande sécurité routière au Québec. Je pense que le gouvernement actuel a déjà fait montre d'une volonté qui s'est traduite dans des chiffres un peu mieux que ce que le prétendait le député de Charlevoix tantôt, mais qui, comme je le disais également, demeurent encore nettement insatisfaisants.

En ce qui concerne les propos du député de Laporte, du député de Charlevoix et du député de Sainte-Anne concernant l'alcool au volant, je pense qu'ils ont également raison là-dessus. C'est pour cette raison qu'on a modifié le système de suspension des permis de conduire pour le remplacer plutôt par la révocation des permis de conduire afin de forcer le conducteur téméraire qui conduit en état d'ébriété d'avoir à subir des conséquences plus lourdes que celles qu'il avait à subir précédemment. Là encore, je pense que ce sera une des principales réformes qu'amènera le Code de la sécurité routière en rendant plus sévères les dispositions concernant la conduite en état d'ébriété.

Je voudrais parler sommairement maintenant d'un certain nombre de points qui ont été soulevés par des collègues, premièrement, en ce qui concerne l'article 523 du Code de la sécurité routière qui impose au médecin qui reçoit dans son cabinet une personne qu'il juge inapte à conduire un véhicule automobile de faire rapport à la Régie de l'assurance automobile du Québec. Là-dessus, je pense que mes collègues font un peu de démagogie parce que, d'abord, il faut bien voir de quoi il s'agit. Il s'agit de l'obligation du médecin qui reçoit une personne dans son cabinet de faire rapport à la régie du nom et de l'adresse de tout patient de 16 ans et plus qu'il juge inapte sur le plan médical à conduire un véhicule routier. Selon la prétention de nos amis d'en face, cette obligation est contraire aux droits et libertés de la personne et ne devrait pas être retenue dans le Code de la sécurité routière. Je pense que si c'est important de sauver une vie - c'est l'approehe qu'on doit avoir - en matière d'accidents d'automobile, il faut prendre les moyens pour permettre de sauver cette vie.

Là où il y a exagération de la part des députés de l'Opposition, c'est que, premièrement, le texte qu'on retrouve dans le Code de la sécurité routière a été adopté en 1972 par le gouvernement précédent. Ce n'est donc pas une nouveauté qu'on introduit, si ce n'est que de demander aux optométristes de faire de même, de se soumettre à cette même disposition légale. C'est un texte qui a été adopté en 1972. À la demande de qui a-t-il été adopté? Il a été adopté, selon mes informations, à la demande de celui qui, aujourd'hui même, dans le journal, dénonce cet article, à savoir le président du Collège des médecins, le Dr Augustin Roy, à l'époque où il était secrétaire général du Collège des médecins. À l'époque, en 1972, le gouvernement a jugé bon de retenir cette obligation à la suggestion même d'un organisme qui, aujourd'hui, voudrait qu'on la retire. Il y a eu toutes sortes de pourparlers en commission parlementaire et, finalement, afin d'être bien certain de ne pas dépasser les intentions de cet auguste personnage, on a retenu exactement le libellé qui avait été proposé en 1972.

Troisièmement, les deux textes de 1972 et de 1981, sauf pour les mots de concordance, sont exactement les mêmes. Je pense qu'il ne faut pas exagérer cette obligation des médecins puisqu'elle existe déjà, par exemple, me dit-on, en matière de maladies contagieuses. C'est au nom de la santé et de la sécurité publique que de telles dispositions se retrouvent dans nos lois, et il ne faut pas en exagérer l'introduction, si on veut, d'un médecin qui se rend compte qu'une personne est inapte à conduire; c'est à lui de porter le jugement. Je pense que ce n'est pas exagéré de demander à un médecin, dans de telles circonstances, de rapporter le fait à la Régie de l'assurance automobile du Québec pour les seules fins de l'émission d'un permis de conduire. D'ailleurs, une des preuves que c'est raisonnable, c'est que cela avait été demandé à l'époque par ceux-là mêmes qui, aujourd'hui, pour des raisons inconnues, voudraient qu'on ne retienne pas cet article.

En ce qui concerne l'abolition du Tribunal des transports, j'accueille avec plaisir la proposition de mon collègue, le député de Laporte, d'essayer de renégocier avec le gouvernement fédéral des arrangements administratifs qui permettraient de maintenir le Tribunal des transports pour les fins des appels de la Commission des transports du Québec. Je voudrais lui souligner que cet arrangement administratif aurait comme inconvenance, si on veut, de nous obliger à faire nommer par le gouvernement fédéral les juges qui présideraient le Tribunal des transports dans ce cas. Ce sont des arrangements qui pourraient toujours se négocier, mais je pense qu'il n'était pas nécessaire d'aller dans cette direction puisque, de toute façon, la Cour suprême ayant déjà déclaré inconstitutionnel le Tribunal des transports du Québec, il n'y avait guère plus de matière qui pouvait aller valablement devant le Tribunal des transports.

Mais le député de Laporte soulève un autre argument. Il dit: Oui, mais dans la situation où le conducteur québécois qui avait accumulé douze points de démérite désirait contester devant le Tribunal des transports, il en sera privé, il devra dorénavant aller devant la Cour provinciale.

C'est tout à fait exact, mais ce que le député de Laporte oublie de mentionner, c'est que le Tribunal des transports siégeait à Québec et à Montréal, alors que la Cour provinciale du Québec est présente dans 39 ou 40 districts à travers le Québec. La procédure qui est retenue pour aller en appel des décisions de la Régie de l'assurance automobile du Québec en matière de points de démérite est beaucoup plus simple et s'apparente beaucoup à celle qui est prévue devant la Cour des petites créances, ce qui permettra à tout conducteur québécois qui désire en appeler d'une décision de la Régie de l'assurance automobile de s'adresser rapidement par une requête sommaire devant la Cour provinciale du Québec et dans le district judiciaire le plus proche de son domicile et d'avoir une décision rapide, une décision qui pourra être rendue partout sur le territoire québécois. (17 h 10)

Je vois le député de Laporte qui fait signe que non. Je suis tenté de lui dire, à ce point de vue, qu'il n'y a pas seulement des conducteurs à Montréal et à Québec, qu'il y en a en Gaspésie, en Abitibi, sur la Côte-Nord et qu'ils sont mieux desservis au point de vue de la justice par la Cour provinciale que par des tribunaux spécialisés qui ne siègent qu'à Québec et à Montréal.

En ce qui concerne l'abolition du Tribunal des transports, la volonté du gouvernement est fermement arrêtée sur ce point. Je crois que les dispositions du Code de la sécurité routière seront avantageuses pour l'ensemble des citoyens et ne constitueront nullement, comme on a pu le laisser entendre, un désavantage.

D'autre part, en ce qui concerne les déclarations du député de Sainte-Anne relativement à la révocation du permis de conduire, je voudrais lui dire qu'on aura l'occasion en commission parlementaire d'examiner de façon plus adéquate la relation à établir entre l'article 61 et l'article 104. Peut-être y aurait-il lieu effectivement d'employer exactement les mêmes mots afin d'éviter des recours juridiques pour tester ces articles.

Cependant, en ce qui concerne la révocation des permis de conduire à l'article 104, je pense qu'il était sage que le législateur propose un "peut" pour le tribunal qui entend une cause où il peut effectivement ordonner la remise d'un permis restreint dont le conducteur aurait besoin dans l'exécution de son travail. Je pense, M. le Président, en toute déférence envers les tribunaux, que les tribunaux, sont capables effectivement d'administrer un "peut". Il faut qu'ils aient le pouvoir, la discrétion, selon l'importance du cas, et non pas qu'on introduise une obligation pour le juge d'émettre un permis restreint. Si on met dans la loi l'obligation d'émettre un permis restreint, à ce moment, il pourrait très bien se produire que quelqu'un ait commis un acte criminel aussi grave que la négligence criminelle avec un véhicule automobile et que la jurisprudence se développe dans le sens que le juqe soit dans l'obligation d'émettre un permis restreint. Je pense qu'il était sage qu'on laisse la discrétion au tribunal qui entend la cause ou qui a à se prononcer sur la sentence.

En terminant, je voudrais indiquer - je vois que l'heure passe rapidement et je pense qu'on avait convenu d'étudier le projet de loi no 5 en deuxième lecture avant la suspension à 6 heures - que j'aurais eu plusieurs autres réponses aux questions ou aux interrogations des collègues de l'Opposition, mais je pense que ce sont les principales questions qui avaient été soulevées. Nous aurons l'occasion en commission parlementaire éventuellement de fournir d'autres renseignements si les députés de l'Opposition ou les collègues ministériels en réclament.

Il me fait donc plaisir de proposer la deuxième lecture du projet de loi no 4, Code de la sécurité routière.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 4, Code de la sécurité routière, sera adoptée?

M. Picotte: Adopté, M. le Président.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des transports

M. Charron: Je propose le renvoi de ce projet de loi à la commission des transports.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté?

M. Picotte: Adopté.

M. Charron: Je vous prierais d'appeler maintenant l'article 6 du feuilleton.

Projet de loi no 5 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 5, Loi modifiant la Loi sur les transports et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.

M. Michel Clair

M. Clair: M. le Président, les modifications proposées à la Loi sur les transports dans le projet de loi no 5 sont le résultat d'une démarche entreprise depuis quelques années en vue de réformer le système de régulation applicable dans le domaine des transports. Cette démarche a commencé par la réalisation d'une étude confiée à la firme CEGIR dont le rapport a d'ailleurs fait l'objet d'une commission parlementaire en 1979. Après avoir analysé les témoignages rendus par les divers intervenants au cours de cette commission parlementaire, il est apparu urgent de donner suite à certaines recommandations qui ont été formulées par la firme CEGIR.

Une autre commission parlementaire, à l'été 1980, sur le transport des matières en vrac a fait ressortir de façon encore plus aiguë certains problèmes vécus par les transporteurs d'à peu près tous les secteurs.

Cependant, la réforme en profondeur à réaliser, par suite du rapport CEGIR, constitue un travail d'envergure qui doit s'échelonner sur plusieurs années. Pour moi, le projet de loi no 5 s'inscrit donc comme une première étape dans la réalisation de cet objectif. Il s'attaque aux problèmes les plus urgents.

Le projet de loi que nous étudions aujourd'hui en deuxième lecture fut mis de l'avant par mes prédécesseurs, le député de Saguenay, M. Lucien Lessard, et le député de Charlesbourg, M. de Belleval. En effet, nos efforts visant à assurer la croissance de l'industrie du transport au Québec et la protection du public nous a amenés à réfléchir sur les différents problèmes d'application de la loi. Essentiellement, ces problèmes se situent au niveau de l'élimination du transport illégal, qui vient concurrencer de façon déloyale les entreprises qui respectent nos lois et nos règlements et qui compromet par le fait même non seulement leur proqrès, mais même souvent leur existence.

La toile de fond du projet de loi modifiant la Loi sur les transports et d'autres dispositions législatives, c'est donc la lutte au transport illégal, mais c'est aussi l'assouplissement des règles du jeu pour favoriser une efficacité et un dynamisme accrus des entreprises de transport.

Je résumerais comme suit les principaux éléments de la réforme proposée comme première étape. Tout d'abord, en ce qui concerne l'assouplissement des règles, vous constaterez, M. le Président, que le projet de loi dénote un effort sérieux de déjudiciarisation quant à l'organisation et au fonctionnement de la Commission des transports du Québec.

En effet, pour assurer une amélioration du déroulement des causes, le projet de loi prévoit qu'un membre seul de la commission peut siéger en audience publique et qu'un commissaire-enquêteur peut recueillir des témoignages qui font partie de la preuve de la même manière que s'ils avaient été rendus en audience publique. Pour éviter cependant que des justiciables ne soient pénalisés par une procédure plus expéditive, le projet de loi prévoit un mécanisme de révision des décisions rendues par un membre seul.

De plus, le projet de loi prévoit la création et la publication d'un bulletin comme organe d'information privilégié relativement aux affaires de la commission. Cela permettra de soulager la Gazette officielle et d'éliminer bon nombre de délais préjudiciables à l'industrie.

En ce qui concerne toujours l'assouplissement des règles, le projet de loi prévoit l'introduction possible, dans certains secteurs de transport, d'une procédure de dépôt des tarifs qui viendrait remplacer la procédure rigide de la fixation des tarifs. Un régime de dépôt des tarifs permettrait, dans certains cas, aux entreprises de transport d'adapter plus rapidement leurs services aux conditions du marché. Cela conserverait aussi intact le contrôle de la Commission des transports du Québec sur les tarifs, afin d'assurer la protection du public.

Enfin, le projet de loi permet aussi au gouvernement de soustraire les organismes régionaux de transport en commun à l'application totale ou partielle des règlements adoptés en vertu de la Loi sur les transports. En effet, l'expérience des dernières années démontre que certains organismes régionaux de transport en commun respectent des standards plus élevés que ceux que nos règlements veulent imposer aux entreprises de transport en commun.

En ce qui concerne la lutte que le gouvernement entend faire au transport illégal, la série de mesures mises de l'avant par le projet de loi devrait décourager sérieusement les opérations illégales de transport, ce que la loi actuelle ne peut faire, comme l'ont d'ailleurs démontré les nombreux témoignages recueillis.

En premier lieu, le projet de loi confie à la Commission des transports du Québec des responsabilités et des pouvoirs accrus. Ainsi, la commission serait appelée à exercer un véritable contrôle sur les permis qu'elle émet. Le projet de loi lui donne le pouvoir de révoquer des permis et d'ordonner le retrait de la plaque et du certificat d'immatriculation de tout véhicule servant à faire du transport illégal.

Cette nouvelle juridiction sur les plaques est également étendue aux non-détenteurs de permis, qui sont les plus nombreux à commettre des infractions à la loi et aux règlements édictés en matière de transport. (17 h 20)

Des pouvoirs accrus sont aussi accordés à nos surveillants routiers, notamment en

matière de saisie de véhicules et d'inspection ou de vérification de marchandises transportées. Pour éviter, toutefois, que ces pouvoirs ne donnent lieu à des abus, le projet de loi prévoit l'intervention de nos tribunaux, qui peuvent autoriser la libération avec ou sans cautionnement de ce qui a été saisi. Le projet de loi prévoit également l'extension des pouvoirs d'enquête de la commission et des enquêteurs du ministère aux établissements des expéditeurs et des consignataires alors que la loi actuelle les limite aux établissements des transporteurs. Cela permettra, dans bien des cas, la cueillette de preuves suffisantes à des poursuites pour infraction à la loi et aux règlements.

Le projet de loi assure aussi le raffermissement des sanctions pénales par une hausse des amendes particulièrement en cas de récidive. L'amende pour transport sans permis et pour fixation de tarif en bas des taux peut maintenant atteindre 5000 $ dans le cas d'une personne normale qui récidive dans les deux ans qui suivent la commission d'une première infraction.

Par ailleurs, pour éviter que la plus grande sévérité des sanctions n'ait pour effet de pénaliser outre mesure ceux qui se rendent coupables d'infractions mineures, le projet de loi introduit le régime que l'on connaît des avis de 48 heures sous le Code de la route avec la variante, toutefois, que ce délai de 48 heures, normalement prévu pour permettre à un contrevenant de remédier à la situation, soit porté à 72 heures dans le cas d'infractions mineures à la Loi sur les transports et aux règlements.

Au surplus, le projet de loi vise les parties aux infractions, c'est-à-dire ceux qui, bien souvent, ne laissent pas le choix à un transporteur de contrevenir ou non à la loi pour survivre. Encore là, cependant, le projet de loi prend bien soin d'éviter qu'un expéditeur qui a agi de bonne foi soit incapable de se soustraire à une condamnation par les tribunaux.

Enfin, vous trouverez dans le projet de loi un nouveau mécanisme d'appel des décisions de la Commission des transports du Québec. Comme on le disait tantôt, à la suite de la décision de la Cour suprême dans l'arrêt Farrah, les décisions de la Commission des transports du Québec ne peuvent plus être contestées devant le Tribunal des transports auquel avait été conférée la juridiction d'appel sur les questions de droit. Le mécanisme prévu en remplacement consiste en un droit d'appel à la Cour d'appel du Québec sur des questions de droit ou de compétence avec la permission d'un juge de cette cour. Ce mécanisme d'appel à la Cour d'appel s'avère, en effet, le plus simple et le plus en mesure d'assurer le respect des droits des parties sans pour cela permettre la multiplication indue des appels, ce que n'aurait pas manqué de faire un mécanisme d'appel portant à la fois sur les questions de droit et sur les questions de fait. Le système prévu répond donc aux besoins des justiciables et évite toute duplication avec la juridiction de la Commission des transports du Québec. Cette solution était d'ailleurs préconisée par les auteurs du rapport CEGIR.

En résumé, M. le Président, le projet de loi modifiant la Loi sur les transports et d'autres dispositions législatives veut apporter d'importantes corrections à la loi actuelle visant surtout une plus grande sévérité et un régime administratif plus souple et mieux adapté à l'évolution de l'industrie. Beaucoup de ces modifications sont réclamées depuis un certain temps déjà et si le gouvernement a acquiescé à ces demandes, notamment au plan de la sévérité des sanctions, le projet de loi traduit bien, toutefois, son souci de ne pas sacrifier la justice à l'efficacité. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laporte.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, le débat en deuxième lecture du projet de loi no 5, qui a pour objet de modifier la Loi sur les transports et d'autres dispositions législatives, nous amène à nous pencher sur deux questions cruciales dont les répercussions se feront sentir sur un nombre important de citoyens.

Il s'agit d'abord des dispositions relatives au camionnage en vrac et celles prévoyant des procédures d'appel des décisions de la Commission des transports du Québec devant la Cour d'appel du Québec.

C'est en 1976 que les problèmes découlant de la situation des camionneurs artisans ont commencé à se poser. Il a fallu une manifestation mémorable tout autour de l'Assemblée nationale pour que les camionneurs artisans obtiennent des amendements au règlement no 12 adopté en 1972. Malgré ces modifications, qui datent de 1977, il existe encore des problèmes tout aussi cruciaux que ceux qu'on a tenté de résoudre il y a quatre ans. Voici qu'on tente encore une fois de régler des problèmes qui existent maintenant depuis plusieurs années. Certes, il est difficile de satisfaire la majorité des 11 500 camionneurs en vrac du Québec, d'autant plus qu'une partie d'entre eux exigent une réglementation plus étendue et que d'autres demandent tout bonnement de l'atténuer le plus possible, sinon de la faire disparaître.

Il est évident qu'il n'y a pas de solution miracle pour corriger cette situation. Nous ne pouvons qu'espérer que le gouvernement ait agi avec sagesse en

modifiant les règlements régissant le transport en vrac au Québec. D'ailleurs, il semble que les camionneurs eux-mêmes fondent beaucoup d'espoir sur ces nouveaux règlements.

Quant à l'autre aspect de ce projet de loi qui nous préoccupe de façon particulière, il s'agit de l'article 51 par lequel on entend confier à la Cour d'appel du Québec le mandat d'entendre les appels qui pourraient être interjetés à la suite des décisions de la Commission des transports.

Nous avons dit tout à l'heure combien nous sommes étonnés de la façon avec laquelle le gouvernement a procédé pour faire disparaître le Tribunal des transports. Plutôt que de modifier ses mécanismes, comme on pourrait s'y attendre, par le projet de loi no 5 qui amende justement la Loi sur les transports, le gouvernement a préféré utiliser la porte de derrière pour toucher une question importante. En effet, c'est par le projet de loi no 4, dont on a fait l'adoption tout à l'heure en deuxième lecture et qui porte sur la sécurité routière, qu'il a choisi d'abolir le Tribunal des transports. C'est une façon habile de faire avaler une pilule. On ne peut tout de même pas s'opposer a un projet de loi qui améliore sensiblement les conditions de sécurité sur nos routes en vue de diminuer le nombre de pertes de vie simplement parce qu'une disposition de ce projet de loi fait disparaître le Tribunal des transports. Il aurait été plus courageux de la part du gouvernement d'apporter ces changements par le biais du projet de loi no 5 qui est celui qui modifie la Loi sur les transports et qui institue un nouveau mécanisme d'appel des décisions de la Commission des transports justement devant la Cour d'appel du Québec. L'Opposition a déjà exprimé clairement son point de vue sur l'abolition du Tribunal des transports. Nous ne croyons pas qu'il s'agisse là d'une décision judicieuse de la part du gouvernement.

Il s'agit cette fois des appels des décisions de la Commission des transports, décisions qui traitent surtout de questions concernant les permis de camionnage, etc. La Cour d'appel peut accepter ou refuser d'entendre une cause comme celle-là. Il est donc possible que la cour refuse d'entendre un nombre important de causes. À ce propos, je cite un passage de ce qu'écrivait le président de l'Association du camionnage du Québec, M. Claude Gosselin, dans une lettre qu'il faisait parvenir au ministre des Transports le 18 février dernier: "La jurisprudence des dernières années de la Cour d'appel nous porte à croire que la majorité des problèmes qui pourraient être soulevés en appel des décisions de la commission n'aurait pas, aux yeux de la Cour d'appel, une importance suffisante pour permettre des appels à cette cour et, par conséquent, la procédure d'appel des décisions de la Cour d'appel serait plus ou moins illusoire".

Reste enfin l'aspect constitutionnel de cette question. La décision récente de la Cour suprême concernant la Régie des loyers de l'Ontario a jugé inconstitutionnels les tribunaux administratifs des provinces malgré le fait qu'ils n'aient juridiction que sur des compétences provinciales. Je me demande si, avant de crier à la dépossession de nos pouvoirs à cause de la constitution canadienne, le gouvernement tentera d'en arriver, comme je le disais plus tôt aujourd'hui, à certains arrangements administratifs qu'Ottawa semble disposé à faire pour maintenir les structures dont le Québec s'est doté et non sans raison. Il serait triste, M. le Président, de voir le gouvernement livrer une bataille à la Don Quichotte pendant que des milliers de personnes risquent de subir les conséquences d'une décision qui aurait été prise tout simplement parce qu'en apparence elle sert les fins politiques du gouvernement. Je vous remercie. (17 h 30)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Michel Clair (réplique)

M. Clair: M. le Président, ma réplique sera assez brève. Je voudrais simplement, dans un premier temps, relever l'affirmation du député de Laporte qui est encore une exagération, soit que les problèmes auraient commencé dans l'industrie du camionnage en vrac avec l'arrivée du Parti québécois en 1976. Je ne me souviens pas de l'année, M. le Président, mais mon collègue, le ministre des Finances, député de L'Assomption, a lui-même, à l'époque où il était fonctionnaire, il y a de ça probablement une dizaine d'années, procédé à une étude sur le camionnage en vrac alors que le parti auquel appartient le député de Laporte était, si ma mémoire est fidèle, au pouvoir.

L'industrie du camionnage en vrac a connu depuis le début des années soixante, M. le Président, des difficultés structurelles et conjoncturelles à l'occasion. C'est justement pour tenter d'apporter une solution à un bon nombre de problèmes soulevés par l'industrie du camionnage en vrac que le gouvernement a décidé de proposer l'adoption du projet de loi no 5. Le député de Laporte sait ou devrait savoir que le plus grand adversaire d'un camionneur, qu'il soit camionneur en vrac ou qu'il fasse du transport général, c'est le transport illégal. Dans ce sens, les camionneurs en vrac en particulier mettent beaucoup d'espoir dans l'adoption du projet de loi no 5 qui permettra à la Commission des transports du Québec non seulement d'émettre des permis, mais d'être en mesure de les contrôler une

fois qu'ils sont émis. Pour une fois, on aura une loi qui a des dents dans le domaine du transport illégal. Cela, M. le Président, c'est loin d'être quelque chose qui déçoit les camionneurs et en particulier l'industrie du camionnage en vrac, mais bien au contraire, c'est une chose sur laquelle ils comptaient.

En ce qui concerne le Tribunal des transports, je voudrais rassurer le député de Laporte. Si le gouvernement a proposé l'abolition dans le projet de loi no 4 du Tribunal des transports plutôt que dans le projet de loi no 5, je n'en tiens pas rigueur au député de Laporte, mais c'est dû au fait que, sous l'ancienne Législature - il l'ignore probablement - le gouvernement a présenté, l'un après l'autre, les deux projets de loi et non pas en même temps, et qu'on pensait que le projet de loi no 4 pourrait être adopté plus rapidement. C'est la raison pour laquelle il avait été inclus dans le projet de loi no 4 et non pas dans le projet de loi no 5.

À ce point de vue, M. le Président, il n'y avait pas de jeu de cachette. C'est simplement qu'il fallait réagir à la suite des décisions de la Cour suprême du Canada et que la première occasion c'était, semble-t-il, à l'époque, de procéder par le projet de loi no 4. Je voudrais dire au député de Laporte également, qui met en cause l'efficacité réelle d'un appel devant la Cour d'appel du Québec, que les décisions de la Commission des transports du Québec, sauf erreur, n'étaient appelables devant le Tribunal des transports que sur des questions de droit. La nouvelle procédure qui est retenue dans les projets de loi actuels, c'est, encore une fois, de permettre l'appel sur des questions de droit seulement, mais devant la Cour d'appel du Québec. La réforme de la commission permettra à un membre d'entendre seul des causes. Ces décisions, pourront selon une procédure qu'on pourra examiner tantôt en commission parlementaire, être révisées. Je pense que l'un des plus grands dangers qui guetteraient l'industrie du camionnage et du transport des marchandises, ce serait de permettre trop facilement les appels parce que, s'il y avait appel, par exemple, sur les questions de fait devant un autre tribunal, on risquerait d'en venir à une multiplication des appels. Moi, je n'ai rien contre les avocats; je suis moi-même avocat de profession. Cependant, M. le Président, on ne réglera pas les problèmes de régulation économique du domaine des transports par une judiciarisation exorbitante, par des appels devant les tribunaux qui font en sorte que, dans certains secteurs de l'industrie du camionnage, au moment où on se parle, le plus clair des revenus de certaines associations est consacré à plaider devant les tribunaux. Je pense, M. le Président, que la Commission des transports du Québec doit devenir de plus en plus un tribunal de régulation économique et non pas un endroit où on donne comme bonbons aux camionneurs le droit de se poursuivre, d'en appeler et d'en appeler de nouveau indéfiniment. Je pense que c'est davantage par des lois et des règlements adéquats qui permettront à la Commission des transports du Québec de contrer le transport illégal, de jouer son rôle de régulateur, de tribunal de régulation économique qu'on pourra le mieux servir l'industrie du camionnage.

M. le Président, je termine en disant que j'ai eu l'occasion de prendre connaissance des nombreux mémoires qui avaient été soumis à mon prédécesseur. Je comprends très bien ce qui se retrouve derrière ces mémoires et c'est quelque chose de très légitime pour l'industrie du camionnage que de vouloir maintenir un tribunal des transports tel qu'il existait, mais, quant à nous, M. le Président, quant au gouvernement, après avoir bien examiné la situation, nous sommes convaincus moralement que ce n'est pas l'avenue qui est proposée par le député de Laporte qui est la meilleure pour assurer la prospérité et la rentabilité de l'industrie du camionnage, tout en maintenant un niveau de justice fort respectable. C'est quand même la Cour d'appel du Québec qui va entendre les appels. Nous pensons, M. le Président, que le moyen que nous proposons est plus susceptible de bien servir les intérêts de l'industrie et des consommateurs que celui que propose le député de Laporte. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 5, Loi modifiant la Loi sur les transports et d'autres dispositions législatives, est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission des transports

M. Charron: Je propose de déférer ce projet de loi à la commission des transports, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.

M. Charron: Je vous prierais d'appeler l'article 7) du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 6

Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Deuxième lecture du projet de loi no 6, Loi concernant certains ministères. M. le leader.

M. Claude Charron

M. Charron: M. le Président, c'est la deuxième fois depuis que je suis ici que j'ai l'occasion de présenter un projet de loi de cette nature et c'est toujours dans les mêmes circonstances.

À la suite d'un remaniement ministériel qui ne fait pas, à l'occasion, que changer les titulaires de certains ministères, il arrive que le chef de l'Exécutif, le premier ministre du Québec, choisisse, à ces occasions priviléqiées que sont les remaniements ministériels, de toucher également à l'administration publique du Québec. Je veux dire que des secteurs de responsabilités que l'État québécois assume depuis très longtemps ou depuis très récemment se voient regroupés dans des familles où l'évolution nous a permis de penser que la coordination générale par le même homme et par la même coiffure dans l'administration publique serait à l'avantage des citoyens du Québec. Je donne l'exemple que nous vivons maintenant. Depuis quelque temps, les pêcheries, par exemple, sont rattachées au ministère de l'Agriculture, parce que, pour l'évolution moderne du secteur agro-alimentaire québécois - cela n'aurait peut-être pas été le cas, cela ne sautait peut-être pas aux yeux il y a quelque temps, mais cela est devenu ainsi avec le temps - on a pensé que l'un et l'autre pouvaient fort bien aller ensemble puisqu'il était, en fin de compte, le ministère rattaché à cet important secteur de la vie économique québécoise.

Or, le projet de loi no 6 que je présente au nom du gouvernement à ce moment-ci est de la même nature. Il s'agit de demander à l'Assemblée nationale de ratifier, jusque dans les textes de loi qui font nommément appel à ces ministères, la décision de rattachement administratif de deux ministères qui existaient auparavant au Québec, mais qui se voient dotés d'une responsabilité nouvelle. D'abord, celui du ministère de l'Immigration qui, selon ce projet de loi no 6, porterait désormais le titre de ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration. (17 h 40)

Je vais vous dire brièvement pourquoi, parce que j'ai l'impression qu'il s'agit d'évidences. Le ministère de l'Immigration, par son développement depuis qu'il existe -et je crois qu'il a été fondé en 1968 ou 1969 - n'est pas seulement devenu le ministère qui, dans des ententes fédérales-provinciales, par exemple, a la responsabilité de choisir, parmi ceux qui en font la demande, les citoyens et citoyennes du monde entier qui veulent venir s'établir et bâtir le Québec avec nous. Mais aussi la force des choses a fait que ce ministère, après s'être acquitté de sa fonction première, d'être la porte d'accueil des différents citoyens du monde entier, demeurait, aux yeux de ces citoyens mêmes, le lien privilégié de communication avec le gouvernement du Québec. C'est-à-dire qu'une fois devenus les bâtisseurs du Québec avec nous, qu'ils aient ou non la citoyenneté canadienne, après qu'ils eurent connu les services du ministère de l'Immigration ce ministère demeurait à leurs yeux le plus accueillant pour les différentes revendications qu'ils pouvaient avoir.

En ce sens, ce que nous nous trouvons à demander aujourd'hui à l'Assemblée, c'est de ratifier l'évolution du ministère de l'Immigration jusque dans son nom. Le ministère de l'Immigration est devenu, au fil des années, le ministère des Communautés culturelles. Quand celles-ci ont une revendication spéciale, un problème particulier qui concerne soit leur pays d'origine ou leur vie comme communauté ici, le lien qu'elles ont toujours choisi de retrouver, c'est celui du ministère de l'Immigration. Je crois qu'un des tournants dans cette nouvelle vocation, je dirais cette amplification de la vocation du ministère de l'Immigration, c'est l'ancien député de Saint-Henri et ancien titulaire du ministère de l'Immigration qui, mieux que quiconque, l'a inspirée. Jacques Couture a laissé, lors de son passage à l'Immigration, la marque et l'identité de ce ministère qui est vraiment devenu le ministère des Communautés culturelles.

Aujourd'hui, le député de Mercier, qui assume cette responsabilité, comme je l'ai lui-même entendu le dire aux membres de la commission de l'immigration lors de l'étude des crédits, est plus que volontaire, pour ne pas dire très engagé, dans cette évolution nouvelle. L'évolution des temps et la personnalité d'un homme remarquable qui en a été le titulaire pendant un certain temps ont fait que ce ministère soit, comme la loi 6 l'incite à le devenir, non seulement le ministère de l'Immigration, mais le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration.

En ce sens, le ministère des Communautés culturelles veut dire qu'un certain nombre de programmes qui se sont développés dans différents ministères au fil des années et qui ont directement rapport aux communautés culturelles du Québec seront désormais rattachés à ce ministère; certains relevaient jusqu'à ce jour du ministère de l'Éducation, d'autres du Conseil exécutif, d'autres du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et tous, dans la

mesure où les lois modifiées l'indiquent, devraient se retrouver désormais sous la juridiction de ce ministère.

La deuxième modification fait d'une pierre deux coups. L'évolution du ministère des Affaires sociales créé par cette Assemblée en 1970 ou en 1971 a prouvé que ce ministère, à cause de ses responsabilités et à cause de son budget particulièrement immense, devenait un ministère - je le dis entre guillemets - "beaucoup trop gros" pour l'ensemble de la clientèle qu'il devait servir. L'analyse faite des dernières années, je dirais l'évolution du ministère des Affaires sociales au cours des dix dernières années a amené le premier ministre à prendre la décision de retirer du ministère des Affaires sociales une partie des responsabilités dont ce ministère s'acquittait depuis 1971.

La partie retirée n'est pas celle qui nous permet de revenir à l'époque du ministère du Bien-Être et de la Famille et du ministère de la Santé, mais bien au contraire, adaptée à l'évolution de 1981, c'est cette partie du ministère des Affaires sociales dont la responsabilité était effectivement la sécurité du revenu des citoyens qui se trouve, par le projet de loi no 6, appelée à se retrouver avec le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Le ministère des Affaires sociales devient donc dans ce sens responsable et conserve la responsabilité de tous les autres programmes qu'on lui reconnaissait à l'exception désormais des programmes de l'aide sociale, des allocations familiales, du supplément au revenu de travail, de tout ce qui s'ajoute, selon les lois votées au cours des dix dernières années qui viennent de s'écouler, en supplément au revenu des citoyens du Québec.

Donc, d'une pierre deux coups. Après avoir soulagé le ministère des Affaires sociales et autant que possible le ministre des Affaires sociales d'une trop large responsabilité, pourquoi le rattachement au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre? Parce que s'il y avait un ministère au Québec qui avait déjà, je dirais au moins dans l'esprit sinon dans la lettre, la responsabilité de la sécurité du revenu c'est bien le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. C'est-à-dire que la première façon d'avoir un revenu au Québec et d'avoir un revenu en toute sécurité c'est évidemment par le travail. Le ministère va aussi s'occuper, selon les responsabilités anciennes de ce ministère, là où il y a conflit, là où il y a problème dans les relations du travail, de travailler à guérir ces situations afin que la sécurité du revenu par le travail soit constamment assurée aux citoyens du Québec.

La sécurité du revenu permet donc au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre d'accueillir ces nouvelles responsabilités qui permettront d'avoir au seul et même endroit toutes les mêmes responsabilités, c'est-à-dire Commission des accidents du travail qui est une autre source de revenu pour les citoyens du Québec, dans les cas les plus malheureux, peu importe, il s'agit d'une source de sécurité de revenu; l'aide sociale, qui nous permettra de faire plus facilement, du fait que ce sera le même titulaire, la même machine administrative, le passage de l'aide sociale, avec les programmes de retour, au travail des assistés sociaux dont s'acguittait déjà le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Enfin tout le bassin de la main-d'oeuvre dont a déjà la responsabilité ce ministère se trouvera désormais, selon la décision du chef de l'Exécutif, au même foyer que celui du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Les autres articles de ce projet de loi ne font qu'ajuster cette décision en conséquence, c'est-à-dire toutes les autres lois. Ce projet de loi se trouve à modifier 16 lois différentes du Québec, parce qu'il est bien évident que là où la responsabilité était au ministère du Travail, on dira maintenant: II faut modifier les lois en conséquence. Car c'est maintenant le ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu; de même certains organismes qui relevaient d'un ministère sont appelés à relever désormais de l'autre et suivent la responsabilité ministérielle.

Voilà donc le sens du projet de loi no 6 que je soumets à l'Assemblée au nom du gouvernement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous venons d'entendre le leader parlementaire du gouvernement qui a essayé, pendant quelques instants, de faire durer son discours parce que, finalement, nous n'avons devant nous qu'un projet de loi de concordance, qui ne contient réellement rien d'original, sauf qu'il veut donner suite à un remaniement. C'est en quelque sorte un projet de loi de concordance.

Ce n'est pas nouveau, il y en a toujours eu dans tous les changements de gouvernement et même lorsqu'un gouvernement demeure au pouvoir, il sent le besoin de faire un peu de cosmétique une fois qu'on doit recommencer une nouvelle administration. On a vu ça dans le passé, même dans des sociétés d'État; à un moment donné, ça s'appelle une régie. Un autre gouvernement arrive et dit: Non, une régie ce n'est pas correct, on appelle ça un office et, à la suite de la dénomination d'un office, on pense que c'est mieux de revenir au mot société. Finalement, il y a de ces

changements qui ne changent pas tellement les choses.

Nous avons une situation où, avant l'élection, nous avions un premier ministre et 25 ministres. Après l'élection, nous en arrivons à un premier ministre et 27 ministres. Alors, il y a deux ministres de plus qu'avant. Probablement que les choses vont se perpétuer, continuer pour quelque temps. Il y a, évidemment, des coûts qui s'additionnent, mais ce gouvernement ne semble pas être effrayé par les coûts.

Le ministre a parlé de l'immigration et des communautés culturelles et a rendu hommage à un ancien ministre, M. Jacques Couture. Je suis prêt à appuyer le leader parlementaire, mais j'aimerais également ajouter d'autres de ses prédécesseurs qui avaient donné un essor considérable dans le domaine des communautés culturelles. Puis-je rappeler, entre autres, le ministre Jean Bienvenue et, particulièrement, celle qui est à ma gauche présentement, la nouvelle députée du comté de Chomedey? Je pense bien que et M. Bienvenue et Mme Bacon ont fait un travail qu'il convient de signaler d'une façon particulière à ce moment-ci. (17 h 50)

M. le Président, on a parlé également des Affaires sociales dont une partie du budget va s'en aller au ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. J'espère que la population ne sera pas jetée dans la confusion à la suite de ces changements. Si on prend le budget, par exemple, le premier qui a été déposé avant les élections, on trouve, sous les Affaires sociales, l'ensemble du budget de la santé, du bien-être, des affaires sociales, de l'aide sociale, etc. Maintenant, lorsqu'on voit les modifications apportées à la suite de ces réaffectations, même si cela a été envoyé, si cela a été remis à l'autre ministère, le ministère du Travail, de la Main d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, on trouve encore aux Affaires sociales: régime de compensation du revenu; soutien du revenu familial, 16 000 000 $; aide sociale, 296 000 000 $; assistance-maladie, 11 000 000 $.

Si on va maintenant du côté du Travail, de la Main d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu on retrouve présentement les mêmes titres, si l'on veut. Sous Travail, Main-d'Oeuvre et Sécurité du revenu, on trouve soutien du revenu familial, 178 000 000 $; aide sociale, 890 000 000 $; assistance maladie, 58 000 000 $. Évidemment, M. le Président, pour quelqu'un qui n'est pas tellement averti - je suis parmi ceux-là en ce domaine - je me demande si, à un moment donné, on veut parler d'aide sociale, si on devra aller à deux ministères. Si on veut parler de soutien du revenu familial, deux ministères différents; assistance maladie, deux ministères différents. J'imagine que le ministre a une réponse à cela et que je devrais moi-même le savoir. Mais, comme je parle au nom de tous les citoyens qui n'ont pas eu l'avantage d'être informés, je dis que, présentement, cela peut créer une certaine confusion, du moins pour quelqu'un qui regarde le budget pour la première fois.

M. le Président, même dans le projet de loi, c'est assez curieux. On voit, dans la loi actuelle sur le Conseil des affaires sociales et de la famille, que le conseil doit, pour agir, obtenir l'approbation du ministre des Affaires sociales et doit faire rapport ou donner son avis au même ministre. Avant que nous adoptions le présent projet de loi, c'est ce qui existe. Maintenant, avec la nouvelle loi, voici ce qui arrive. Dorénavant, le même Conseil des affaires sociales et de la famille aura le choix entre le ministre des Affaires sociales et celui du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je vois que cela semble surprendre le ministre, mais, lorsqu'on regarde le projet de loi no 6, on doit convenir qu'à l'article 10... Je ne suis pas censé, vous le savez bien, commencer à citer des articles à ce stade-ci de la procédure mais, vu l'hésitation du ministre, j'aimerais bien citer ceci à l'article 10: "Le conseil peut, avec l'approbation du ministre des Affaires sociales ou du ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, selon le cas..." Évidemment, on dit: Ces gens-là sauront bien lequel des ministres va le mieux correspondre au sujet qui doit recevoir son approbation. Mais c'est curieux comme technique législative, M. le Président, et cela permet au conseil de choisir le ministre, sauf qu'à la fin, il y a un rapport qui est fait aux deux ministres. Encore là, cela peut possiblement être sujet de confusion. J'espère que non. J'espère que ce n'est qu'une impression que nous pouvons recueillir à lire le projet de loi d'une façon superficielle. Tout de même, j'attire l'attention du ministre, au cas où il voudrait faire des clarifications en commission parlementaire.

Quant aux autres domaines, des consommateurs, coopératives et institutions financières, encore là, on transfère, si on veut, la responsabilité, quant aux consommateurs, au ministre de l'Habitation et les institutions financières et coopératives demeurent le lot présentement du ministre des Finances qui est en même temps le ministre des Institutions financières et des Coopératives. Voilà.

Quant aux autres questions, Travail, Main-d'Oeuvre et Sécurité du revenu, c'est un ministère qui reçoit, comme dirait le ministre des Finances, le gras ou je ne sais quoi. Il fallait changer ça, il fallait diminuer la grosseur du ministère des Affaires sociales, passer 1 000 000 000 $ au ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Dans tout cela il

n'y aura peut-être aucun changement apparent, il n'y aura peut-être absolument rien de changé; mais, s'il y avait des changements, j'espère que ce sera à l'avantage des citoyens qui sont intéressés. Tout le reste, tout le cosmétique, tous les changements de noms, les transferts de certaines parties du budget d'un ministère à l'autre, cela prend aujourd'hui un projet de loi pour consacrer cela.

C'est le voeu que je formule en terminant, j'espère au moins que cela ne fasse pas mal aux citoyens qui s'attendent à avoir des services de ces ministères-là et j'espère qu'il n'y aura aucune confusion. Si on a besoin d'éclaircissements, j'espère bien que le leader parlementaire du gouvernement qui, comme moi, n'est pas particulièrement versé, si on veut, dans tous les domaines que comporte la Loi de l'exécutif et toutes les responsabilités qui relèvent de chacun des ministres... Je comprends cela, mais j'ai voulu, à ce moment-ci, attirer son attention sur ce qui nous paraît avoir besoin de clarification.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.

M. Charron: J'essaierai de fournir les clarifications qu'a demandées le député de Bonaventure lors de l'étude article par article de ce document.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 6, Loi concernant certains ministères, est adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

M. Charron: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

Renvoi à la commission de l'Assemblée nationale

M. Charron: M. le Président, je propose la déférence de ce projet de loi à la commission parlementaire de l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Rancourt): La motion sera-t-elle adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Un instant, M. le Président. J'aimerais simplement avoir une précision de la part du ministre sur cette motion qu'il vient de faire. Peut-être que c'est par souci d'efficacité parce que la commission de l'Assemblée nationale doit possiblement être convoquée pour d'autres fins. Il a pensé peut-être! On va en passer une vite. Mais, M. le Président, est-ce que je puis demander au leader parlementaire du gouvernement si normalement ce projet de loi n'aurait pas dû être déféré à la commission de la présidence du conseil et de la constitution?

M. Charron: Je crois que l'un et l'autre se pouvaient, M. le Président, mais comme je présente ce projet de loi comme ministre délégué aux Affaires parlementaires et qu'effectivement la rumeur court qu'il y aura réunion de la commission parlementaire de l'Assemblée nationale jeudi matin, j'ai voulu faire d'une pierre trois coups.

M. Levesque (Bonaventure): Je dois protester, pas avec une vigueur dont je suis capable à certains moments, car nous sommes à ce moment-ci témoins, M. le Président, d'une dérogation technique et je vais vous expliquer en deux mots pourquoi. La commission de l'Assemblée nationale est reliée au législatif, la commission de la présidence du conseil à l'exécutif. Or, il n'y a pas de projet de loi qui soit plus relié à l'exécutif que le projet de loi no 6, Loi concernant certains ministères. M. le Président, comme je dis je ne ferai pas de tempête, je ne m'élèverai pas contre cette motion avec impatience ou agressivité - je remercie le député de Sainte-Marie - mais cependant je trouve cela illogique que l'on fasse cela, M. le Président, et peut-être que vous-même vous devriez intervenir pour que cela ne se fasse pas. Même si le whip donne des conseils à la présidence à ce moment-ci, je pense, M. le Président, que vous devriez vous inquiéter que ce projet de loi qui n'a trait qu'à l'exécutif soit déféré à la commission de l'Assemblée nationale.

Deuxièmement, M. le Président, je crois que les membres de la commission parlementaire de la présidence du conseil et de la constitution pourraient être frustrés en apprenant qu'un projet de loi qui leur était destiné a été déféré à la commission de l'Assemblée nationale. Comme je l'ai dit, je ne ferai pas de bataille là-dessus vu que le projet de loi n'a pas d'autre signification qu'une concordance, mais cependant je devrai, lorsque le vote sur cette motion sera appelé, suggérer que cette motion du leader parlementaire du gouvernement soit adoptée sur division.

M. Charron: Je vous demande de proposer l'adoption sur division, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette deuxième lecture est-elle adoptée?

Des voix: Sur division.

M. Levesque (Bonaventure): Non, non!

Ce n'est pas la deuxième lecture, M. le Président. Elle a été adoptée, la deuxième lecture.

M. Charron: Non, pas la deuxième lecture. C'est la motion de renvoi à la commission de l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion est-elle adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Sur division, M. le Président.

M. Charron: Ah! Ah!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.

M. Charron: Je propose la suspension des travaux jusqu'à 20 heures. Je rappelle qu'à 20 heures nous reprendrons le débat sur le discours sur le budget jusque vers 23 h 30.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Suspension de nos travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 03)

(Reprise de la séance à 20 h 08)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

M. Chevrette: M. le Président, à la suite d'une entente intervenue avec le whip de l'Opposition, le député de Saint-Hyacinthe, sans perdre son tour, laisserait son droit de parole au député d'Iberville.

Reprise du débat sur le discours sur le budget

Le Vice-Président (M. Rancourt):

D'accord. Reprise du débat sur la motion de M. Parizeau proposant que l'Assemblée approuve la politique budqétaire du gouvernement.

M. le député d'Iberville.

M. Jacques Beauséjour

M. Beauséjour: M. le Président, en ce début de deuxième mandat, vous me permettrez de remercier tous les militants et militantes du comté d'Iberville et tous les électeurs et électrices qui m'ont fait confiance pour un deuxième mandat. Je voudrais remercier, entre autres, des militants créditistes qui m'ont manifesté leur appui au cours de la campagne électorale et, je dirais, les anciens bleus qui sont venus rejoindre les nouveaux bleus du Parti québécois, ainsi que plusieurs militants libéraux qui m'ont témoigné leur confiance. Bien sûr, une élection, ça se fait ordinairement, comme on dit communément, avec des adversaires. Je les remercie de la lutte des plus honnêtes qu'ils ont menée dans mon comté. Je m'adresserai aussi à tous ceux et celles qui n'ont adhéré à aucun parti politique et qui m'ont appuyé et aussi à tous ceux et celles des autres partis qui, au cours de l'élection, sont venus joindre nos rangs comme membres du Parti québécois.

Juste avant la campagne de financement dans le comté d'Iberville, nous comptions 2420 membres dans le comté. Avec la campagne de financement, nous avons eu l'apport de 696 nouveaux membres pour un total de 3116 membres dans le comté d'Iberville. J'invite tous ceux et celles qui croient à un parti politique, à un parti du peuple, à venir joindre nos rangs et à travailler avec nous aussi bien dans le comté d'Iberville que dans les autres comtés du Québec.

Comme députés et aussi comme gouvernement, nous avons voulu donner l'exemple dans à peu près tous les domaines. Je pense aussi bien à la jeunesse, qui a besoin d'idéal, qu'à toutes les autres personnes dans le comté; ce dont ils ont besoin, c'est un gouvernement qui donne l'exemple. Je ne prendrai comme exemple que la Loi régissant le financement des partis politiques, qui a été pour moi et pour bien des citoyens une des plus importantes réalisations de ce gouvernement.

Vous savez, M. le Président, quand je dis qu'il est important que le gouvernement donne l'exemple, qu'aujourd'hui, dans notre société, c'est un peu différent d'autrefois. Je n'ai pas un âge très avancé... Il reste qu'il est venu entre autres, dans nos familles, un quatrième personnage qui a d'une certaine façon bouleversé la vie familiale et qui a même collaboré à changer les valeurs, à les transformer et même à les diminuer par rapport à ce que l'on connaissait autrefois.

Ce quatrième personnage, il nous sert aujourd'hui dans un certain sens à informer les citoyens, c'est la télévision. Si on regarde les valeurs que porte ce quatrième personnage, bien sûr qu'il y en a de bonnes pour l'information des citoyens, mais il faudrait aussi que chacun réfléchisse sur certains aspects de ce que cela a apporté dans notre société. Autrefois, il était très facile entre voisins d'échanger et je dirais même de s'aider. Aujourd'hui, on va chez un voisin et, au lieu de discuter et d'échanger entre nous, souvent chacun est assis et regarde la télévision.

Il y a un autre aspect sur lequel il est bon de réfléchir. C'est l'aspect de la violence qui peut exister dans ce moyen de communication. Juste par expérience, on pourrait faire une journée de non-violence

annuelle inviter les citoyens lorsqu'il y a des scènes de violence ou des films de violence, à tout simplement changer d'émission, et je pense que souvent on passerait toute la soirée à changer de poste à la télévision.

Tout ça, M. le Président, je crois qu'il est bon qu'on s'en rende compte; ça fait partie maintenant de notre vie et c'est peut-être bon d'en prendre conscience pour essayer de ne pas toujours aller dans le sens de ce que les programmes nous offrent. Je le dis parce que dans le sens des valeurs dont je parlais tantôt et qui existaient autrefois et des valeurs de notre société aujourd'hui, le Parti québécois, dans un contexte quand même de modernisme, porte des valeurs pour lesquelles il est bon d'avoir un gouvernement qui travaille comme il le fait actuellement.

J'ai parlé tantôt du financement des partis politiques. On pourrait prendre des exemples dans différents domaines. Aussi bien, au niveau du domaine agricole, quand on parle des heures de "bull", les gens savent ce que ça veut dire, ce qui a été changé à ce niveau.

M. le Président, je me suis posé un point d'interrogation quand j'ai vu dans le Devoir de vendredi dernier: "L'été s'annonce nuageux pour le Parti libéral du Québec". Au troisième paragraphe on disait: "Or, il ne reste en caisse que la maigre somme de 750 000 $." Je me suis dit: Probablement qu'ils ont eu des remords et ils ont gardé ça dans le but de le remettre au gouvernement, ce qui viendrait combler ce qu'on a connu des fonds olympiques. Si c'était ça, je les invite à le retourner au gouvernement, compte tenu des circonstances économiques que nous connaissons actuellement.

M. le Président, dans le comté d'Iberville, nous allons continuer à travailler dans le sens d'un gouvernement qui reste propre et dans le sens aussi d'un gouvernement qui travaille pour l'ensemble des citoyens. Je ne donnerai qu'un exemple de la façon dont j'ai voulu travailler dans ce comté et c'est dans ce sens que je continuerai à y travailler. Je prendrai l'exemple de la route 231, Saint-Damase-Saint-Hyacinthe, qui a été promise pendant 36 ans par mes prédécesseurs et qui n'a jamais été réalisée. En 1976, je ne la promettais pas, mais une fois rendu au gouvernement j'ai considéré que c'était important et je l'ai mise en priorité. Le contrat a été donné l'automne dernier et les travaux, à ce qu'on m'a dit au début de la semaine, devraient commencer demain. Pour comble, M. le Président, j'ai laissé en héritage à mon collègue, le député de Saint-Hyacinthe, la réalisation de ces travaux. Je dirai que c'est dans ce sens-là que je veux continuer à travailler pour l'ensemble des citoyens de mon comté et aussi pour l'ensemble des citoyens du Québec.

M. le Président, dans le comté d'Iberville, on a une curieuse carte électorale et aussi de curieux services administratifs. Je dirai que le comté d'Iberville est difficile à planifier dans son ensemble puisque ce n'est pas un tout. Pour ceux qui ne connaîtraient pas tellement bien cette région, je donnerai quelques exemples pour illustrer le problème que nous recontrons. Saint-Pie, qui était autrefois dans le comté de Bagot, a tous ses services dans la ville de Saint-Hyacinthe. Si je vais dans la région de Saint-Césaire et Rougemont, la plupart des services vont vers Granby. Si je m'en vais dans la région de Marieville et Saint-Jean-Baptiste, la plupart des services vont vers Saint-Jean ou vers Longueuil. Si je vais dans la région de Farnham et, ensuite, dans le sud du comté, Clarenceville, Venise-en-Québec et Noyan, les gens doivent aller, pour leurs services, du côté de Bedford ou de Cowansville. Dans le reste du comté, qui est l'ancien comté d'Iberville, avec la ville d'Iberville jusqu'au mont Saint-Grégoire et à Saint-Sébastien, tous les services se dirigent vers Saint-Jean. Je crois qu'après la réforme au niveau des conseils municipaux et la formation des nouvelles municipalités régionales de comté il faudra s'attarder à restructurer les services administratifs de façon qu'on puisse trouver une unité plus grande pour le comté d'Iberville.

Si j'ai illustré, M. le Président, ce problème, je sais qu'il existe dans plusieurs autres comtés à grande superficie au Québec et je sais que mes collègues, aussi bien de l'Opposition que du gouvernement, sont au courant, comme députés, des problèmes que cela occasionne quand on veut planifier et développer un milieu. C'est ce qui arrive, dans un certain sens, pour mon comté, le comté d'Iberville. C'est assez difficile d'avoir un plan d'ensemble pour le comté puisque je dirais que l'on retrouve cinq comtés dans un. (20 h 20)

Pour illustrer une autre façon de fonctionner de notre gouvernement, je prendrai l'aspect de l'environnement. Le député de Brome-Missisquoi signalait l'autre jour que j'aurais de la difficulté à me baigner dans la rivière Yamaska. C'est vrai, mais ce qu'il a oublié d'indiquer, c'est que je me souviens qu'en 1965, je pense, j'étais à Saint-Césaire, et déjà on parlait de la dépollution de la rivière Yamaska. Je sais qu'il y a déjà eu, durant très peu de temps après 1965, la mission Yamaska. Je crois que c'était du temps des libéraux. Je dirais qu'il n'y a eu aucune réalisation concrète depuis la mission Yamaska. Quand le député de Brome-Missisquoi disait que le ministre de l'Environnement avait indiqué qu'au bout de quatre ans, on pourrait se baigner dans la Yamaska, bien sûr, mais si je prends, entre autres, la ville de Farnham à partir du moment où le protocole d'entente a été

signé après quatre ans, cela donne 1983, ce qui veut dire que, si toutes les échéances sont bien suivies, en 1983, peut-être qu'on ne pourra pas se baigner encore dans la Yamaska, cela dépend de ceux qui nous polluent en amont, mais déjà, il y aura un grand pas de fait au niveau de la dépollution de la rivière Yamaska. J'en rends hommage au ministre de l'Environnement parce qu'en réalité, au moins, il se fait quelque chose et les travaux avancent.

Je pourrais prendre un autre exemple, le ruisseau Saint-Louis à Marieville, où le protocole d'entente a été signé le 2 avril dernier. Si on allait voir ce qui s'est passé dans les journaux - j'en prends un du 30 mai 1960 - il y avait des élections; M. François Boulais qui était candidat libéral voulait déloger un M. Barré. Tout le monde l'a certainement connu. Il indiquait ceci et je cite: "La pollution des eaux est un grave problème pour l'Union Nationale et l'Union Nationale n'a pas voulu s'en occuper. Je m'engage à continuer, M. Boulais, d'enlever cette anomalie que vous avez dans votre ville et que ce soit le problème numéro un dans Marieville." C'était en 1960. Je dirais qu'il a passé de l'eau et toutes sortes de choses depuis ce temps-là. Une chose est certaine, c'est que, depuis le 2 avril dernier, il y a un protocole d'entente de signé avec la ville de Marieville, et là je suis assuré que ce sont des réalisations qui vont se faire puisqu'il y a un échéancier de prévu pour ce projet. Alors, au niveau des travaux d'environnement qui doivent être exécutés dans le comté d'Iberville, M. le Président, je veux bien croire qu'il y a des compressions budgétaires, mais il y a des urgences; il faudra s'assurer que ces travaux s'accomplissent dans les délais impartis de telle façon qu'on redonne l'eau et aussi les rives aux citoyens.

Dans le cadre des problèmes d'environnement qu'on peut retrouver dans le comté d'Iberville, ce que je trouve de positif c'est entre autres la formation de comités de citoyens qui se préoccupent de l'environnement dans leurs milieux. C'est beau de mettre des millions pour dépolluer, mais la conscience sociale de tous les citoyens ne coûte pas très cher; je suis sûr que c'est un des moyens efficaces pour régler beaucoup d'aspects de l'environnement. Dans ce sens, M. le Président, je fais appel à tous les citoyens et entre autres à ceux de mon comté, que ce soit du domaine industriel, municipal, du côté des particuliers, des agriculteurs, de telle façon qu'ensemble on puisse faire les efforts nécessaires pour ne pas aggraver des situations de pollution dans notre milieu. On sait que la rivière Yamaska fait partie d'une des trois zones au sujet desquelles le ministre de l'Environnement a décrété un moratoire dans le domaine des porcheries.

M. le Président, pour faire suite à cet aspect de l'environnement, Venise-en-Québec, il y a environ trois ans, s'est vue, je ne dirais pas octroyer, mais accorder 4 000 000 $ pour aménager une plage municipale. Venise-en-Québec est sur la baie Missisquoi à quelque distance des lignes américaines; ainsi les gens, au lieu d'aller se promener à Plattsburg, restent au Québec dans un des très beaux coins et je dirais un des coins encore plus beaux s'ils réussissent à bien l'aménager. Le 4 000 000 $, comme de raison, est encore au niveau des études pour la réalisation de ce projet, mais ce que je souhaite, c'est que ce soit réalisé puisque l'argent est déjà là. Maintenant, encore là, il faudra s'assurer que la plage municipale qui pourrait être développée ne sera pas polluée parce que, après avoir mis 4 000 000 $ pour développer une plage municipale, si ensuite on ne peut pas aller à l'eau parce que l'eau est polluée, cela n'avancerait pas à grand-chose.

M. le Président, je ne pourrais pas parler du comté d'Iberville en passant à côté de l'agriculture. Lors de l'élection de 1976, je me souviens qu'on pouvait ramasser des feuilles d'encan. En 1980-1981, à l'élection, ce ne sont pas des feuilles d'encan que je pouvais ramasser dans le comté d'Iberville, mais c'étaient des projets qui s'étaient réalisés. D'un budget de 3 500 000 $ environ en 1976, il y a eu une augmentation de 105% pour arriver à un budget de 7 034 000 $, de telle façon que le budget qui a été octroyé dans le comté d'Iberville pour le développement de l'agriculture a certainement aidé d'une façon incomparable, par rapport à tous les autres gouvernements, le développement de l'agriculture dans mon comté. Bien sûr qu'il y a des compressions budgétaires dans tous les domaines, compte tenu de la situation économique, mais, M. le Président, j'ai dit que je mettrais en priorité l'agriculture et j'ai bien l'intention de voir à ce que l'agriculture dans le comté d'Iberville continue à se développer; si ce n'est pas au même rythme, du moins, qu'elle continue à se développer d'une façon normale.

D'ailleurs, le comté d'Iberville est dynamique au point de vue agricole et j'en donnerai comme preuve que c'est dans le comté d'Iberville qu'il y a eu le premier syndicat de gestion agricole au Québec.

Une voix: Ah!...

M. Beauséjour: Non, je ne veux pas m'attribuer le mérite de la formation de ce syndicat. C'était arrivé avant moi, mais un syndicat de gestion où les producteurs qui en font partie peuvent mieux gérer leur ferme est, je crois, une grande valeur dans un comté pour l'agriculture et les agriculteurs eux-mêmes. C'est pour cette raison que je

m'étais mis à "achaller" au niveau du ministère et du ministre pour qu'on développe d'autres syndicats de gestion et, en 1980-1981, nous étions rendus à 29 syndicats de gestion au Québec. M. le ministre de l'Agriculture nous a indiqué, en commission parlementaire, qu'en 1981-1982 ça pourrait aller jusqu'à 34 syndicats de gestion. Je crois que c'est bon pour l'agriculture et que les syndicats de gestion, dans notre milieu, vont apporter à la longue une nouvelle façon de penser en agriculture.

M. le Président, dans le comté d'Iberville, bien sûr, on pourrait parler aussi bien de la betterave à sucre dans le nord du comté que des pommes à Rougemont et à Saint-Paul-d'Abbotsford, avec leur problème de gelée, comme on en a entendu parler hier pour la première fois; on pourrait parler de l'industrie laitière. Si on se déplace vers L'Ange-Gardien, on pourrait parler de l'industrie porcine ou de l'industrie céréalière. Le comté d'Iberville, c'est un comté idéal pour l'agriculture et j'ai bien l'intention qu'il conserve sa vocation principale qui est une vocation d'abord agricole. (20 h 30)

Cela n'empêche pas nos petites et moyennes entreprises du comté d'être dynamiques, et de s'être développées. Je me souviens que, durant la campagne électorale, j'étais à Saint-Pie qui fait partie de mon comté, et un propriétaire d'industrie me disait que le gouvernement, par son programme OSE, il le trouvait important, le gouvernement avait fait de la promotion et avait apporté une aide financière pour que nos industries puissent aller du côté de l'exportation. Il trouvait que le programme, dans ce sens, leur rendait un grand service.

M. le Président, j'ai dit qu'il y avait plusieurs petites et moyennes entreprises dans le comté d'Iberville. Comme de raison, je ne les nommerai pas toutes ce soir, mais je signalerai, entre autres, les Filaments Yamaska qui, lors du concours de la Chambre de commerce provinciale, se sont vu attribuer le Mercure pour l'industrie novatrice de l'année; c'est une industrie dans le domaine du textile. Ce que j'ai découvert aussi, c'est que l'industrie Lajoie, dont les employés sont maintenant propriétaires à 49%, fonctionne très bien et qu'il règne un bon climat au niveau des employés dans cette industrie.

J'ai visité plusieurs industries et souvent ce qu'on nous dit, c'est que le taux d'absentéisme des employés est assez fort. Parfois, je me dis qu'il faudrait peut-être trouver d'autres formules pour amener les employés à s'intéresser au travail qui se fait dans l'industrie. Comme je l'ai dit tantôt au début de mon intervention, bien sûr, au Québec, peut-être à cause du quatrième personnage qui nous invite à voyager aujourd'hui et à payer plus tard, on est un peu gâtés. Parfois, on peut dire que, contrairement à nos pères qui étaient habitués à trimer dur, le travail nous fait un peu peur. Ce n'est pas vrai partout, ce n'est pas vrai dans toutes les industries. Il y en a beaucoup où on a du coeur au ventre, parce que j'ai visité beaucoup d'industries dans mon comté, et il y en a qui ont à coeur que leur travail réussisse et ils aiment leur travail. Je dirais que les employés dans une industrie y sont pour beaucoup et, quand ils aiment leur travail et qu'ils apportent quelque chose de positif à l'industrie, ils l'apportent aussi à l'ensemble de la société.

M. le Président, je voudrais aussi dire un mot au sujet des municipalités de mon comté. Ce serait curieux de ne pas en parler puisque j'en ai 30. Avant l'élection, j'en avais 32, mais maintenant j'en ai 30. Je pense que c'est quand même un nombre assez grand. Je dirais que, dans l'ensemble, depuis 1976, j'ai une très bonne collaboration de leur part. Je pense que c'est important d'avoir la collaboration des municipalités, parce que aujourd'hui, cela devient un gouvernement près des citoyens qui devient de plus en plus important. Qu'on pense simplement en termes de réforme de la fiscalité municipale où les budgets des municipalités croissent de plus en plus et aussi en termes des obligations qu'ont les municipalités.

J'ai souvent insisté aussi sur le rôle des municipalités concernant les citoyens des municipalités. Je crois qu'il y a encore beaucoup de choses à développer, les relations des citoyens avec leurs municipalités ou bien des municipalités avec les citoyens. Moi, je crois qu'une administration qui est ouverte envers les citoyens et qui est de nature à mieux renseigner les citoyens est la meilleure façon d'administrer. Bien sûr que nos dirigeants municipaux n'ont pas toujours de loisirs, souvent il y a une partie de bénévolat dans ce travail, mais je crois que, dans la mesure où nos dirigeants municipaux s'approchent des citoyens, pas simplement aux élections, il faut faire la même chose comme députés. C'est ce que j'ai essayé de faire, c'est ce que j'ai l'intention de continuer de faire. Mais aussi, au niveau des citoyens, c'est de nature à mieux aider au développement des municipalités.

M. le Président, vous me faites signe qu'il reste très peu de temps, je vais être obligé d'en couper une partie... Je voudrais signaler une chose, c'est que cet après-midi, à la période des questions, il y a le député d'Argenteuil, chef de l'Opposition, et je pense que c'est le député de Jean-Talon qui sont revenus sur la question nationale; ils se posent des questions. Je trouve que c'est bon; cela ne me surprendrait pas qu'un jour, s'ils nous posent des questions comme celles-

là, c'est parce qu'ils veulent finir par adhérer à notre parti. On ne sait jamais. Ils réfléchissent assez qu'on ne sait jamais; un jour, peut-être qu'ils voudront adhérer au parti des Québécois.

Du moins, si le parti des rouges qui est ici n'y adhère pas, ceux qui y ont adhéré jusqu'ici, les libéraux qui ont adhéré à notre parti, j'en suis fier et ceux qui voudront y adhérer, ils sont les bienvenus. Il y en a plus que vous pensez.

Je peux vous dire qu'il y en a au moins une vingtaine, durant la campagne, qui m'ont dit qu'ils étaient libéraux et qu'ils votaient pour nous autres. Mais, juste pour préciser l'aspect national, souvent on parle de l'objectif fondamental du Parti québécois qui est la souveraineté et la souveraineté-association comme projet. Mais c'est que le parti rouge qui est ici a oublié de lire un article de notre programme et j'aimerais lui rappeler que ça existe: "Promouvoir le plus possible l'autonomie du Québec au cours de la période restant à passer sous le régime politique actuel". C'est là, c'est ce que le premier ministre fait, c'est ce qu'il a fait aux conférences fédérales-provinciales et c'est ce qu'il va continuer à faire jusqu'au moment où les Québécois diront: Je suis d'accord que le Québec ait les pouvoirs nécessaires pour se développer normalement.

M. le Président, pour moi, dans un certain sens, promouvoir la souveraineté-association, c'est être respectueux de ce que mes ancêtres m'ont laissé comme héritage et je ne voudrais pas les diminuer; c'est un Québec qui a ses pouvoirs, qui a plus de pouvoirs et qui est ouvert sur le monde -c'est en ayant des pouvoirs qu'il peut être le plus ouvert sur le monde - qui peut le mieux se développer. C'est dans ce sens que je veux travailler et c'est dans ce sens que j'invite mes concitoyens, entre autres les libéraux, les rouges qui sont ici, à y penser. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: M. le Président, je voudrais premièrement remercier mes concitoyens et mes concitoyennes du comté de Hull pour m'avoir permis de relever ce nouveau défi et de siéger à l'Assemblée nationale du Québec, afin de tenter de trouver des solutions aux problèmes qui nous préoccupent actuellement.

Je voudrais aussi remercier mon organisation politique et les 2500 membres de l'Association libérale du comté de Hull, tout en incitant les gens à adhérer en grand nombre à notre association, c'est à dire l'association du Parti libéral, le pouvoir de demain.

(20 h 401

Je ne peux passer sous silence la collaboration que j'ai toujours eue de mes collègues du conseil municipal de Hull. La collaboration que j'ai toujours eue de la gérance de la ville de Hull, alors que j'étais maire et conseiller municipal, les sept années qui ont précédé. La collaboration que j'ai toujours eue des directeurs de service et de tous les employés de la municipalité. Je les incite à continuer à bien gérer la ville de Hull, comme ils l'ont toujours fait, et à ne pas suivre l'exemple de leurs grands frères de Québec, c'est-à-dire ceux qui occupent actuellement le pouvoir et qui se permettent de gérer le Québec à la bonne franquette.

En retour, M. le Président, je veux réaffirmer ma volonté de participer activement au dynamisme du milieu et j'offre toute ma collaboration aux organismes, aux associations, à tous mes concitoyens, indépendamment de leur allégeance politique, car je suis à leur service.

J'ai accepté, M. le Président, plusieurs responsabilités à l'intérieur de mes nouvelles fonctions, entre autres, je suis responsable et porte-parole dans le domaine municipal. C'est un domaine qui me convient très bien et pour lequel j'ai énormément de préoccupations pour les années à venir. D'autant plus de préoccupations que j'ai eu l'occasion, au cours des derniers jours, d'assister - et d'y faire une critique constructive - à la commission parlementaire des affaires municipales. Cela paraît, aujourd'hui, que les élections du 13 avril sont passées. Les bonbons que le Parti québécois a lancés à l'ensemble du Québec au cours des quatre dernières années, c'est fini. On s'est fait dire en commission parlementaire, par le ministre des Affaires municipales, M. Léonard, que la loi no 57 avait, semblait-il, réglé la quasi-totalité des problèmes des municipalités.

Je trouve malheureux que le ministre des Affaires municipales semble s'asseoir sur une loi qui a été adoptée par son prédécesseur, une loi qui a apporté certains correctifs, mais qui a laissé aussi des maux à venir. Je trouve malheureux que lors de l'étude de ces crédits, on nous ait dit carrément que les subventions aux municipalités dans le domaine de l'alimentation en eau potable, c'était fini. On nous a dit, M. le Président, que les engagements passés, tant des gouvernements qui ont précédé que du gouvernement antérieur... Je suis heureux que, ce soir, l'ex-ministre des Affaires municipales, le nouveau ministre délégué à l'Habitation, soit ici en cette Chambre. Le ministre de l'époque s'était engagé avec sa collègue, la ministre des Travaux publics et de l'Approvisionnement, l'ex-députée du comté de Hull, à défrayer une partie importante

des coûts de l'usine de filtration des eaux dans l'Outaouais québécois, plus particulièrement dans la ville de Gatineau, où on devait payer, d'après les dires de l'ex-députée, la totalité des coûts de l'usine de filtration. Un correctif a été apporté par la suite par le ministre des Affaires municipales alors qu'il prévoyait défrayer approximativement 50% des coûts. Lors de l'étude des crédits, le ministre des Affaires municipales nous a informés que c'est fini les subventions depuis la loi no 57. Je regrette, M. le Président, nous allons devoir, plus particulièrement ceux qui sont plus préoccupés par l'Outaouais, revendiquer constamment auprès du gouvernement et auprès de ses ministres concernés. Nous aurons peut-être même à consulter notre nouveau parrain. Apparemment, le premier ministre du Québec a nommé... On est habitué d'avoir des parrains dans l'Outaouais. On a eu, d'après les péquistes, M. Parent, et, d'après nous, on avait l'ex-députée et ministre des Travaux publics et de l'Approvisionnement, Mme Ouellette, qui se fourrait le nez à peu près dans tout du point de vue de la région et maintenant on a le ministre d'Etat au Développement économique, M. Bernard Landry. J'ose espérer que, si c'est uniquement pour la question de patronage, on laisse cela à d'autres ministres qui sont plus habitués, soit à celui de l'Environnement ou à celui de l'Habitation.

En parlant de patronage...

Une voix: Ils ont la touche!

M. Rocheleau: ... je pense qu'ils ont sûrement la touche depuis quelques jours. Je trouve malheureux que le rapport du vérificateur, qui démontre un trou additionnel d'au-delà de 600 000 000 $, n'ait pas été connu antérieurement au 13 avril. J'ose souhaiter que M. Larose, qui est le Vérificateur général de la province, ne quitte pas son emploi parce qu'il aurait été trop franc à l'intérieur du rapport qu'il a fait.

Des voix: C'est épouvantable! Une voix: La pureté de Hull!

M. Rocheleau: II n'y a absolument rien d'épouvantable parce que nos collègues d'en face n'ont à peu près rien entendu jusqu'à présent. Nous sommes actuellement en période d'adaptation; ce ne sont que des pratiques que nous faisons actuellement et on vous en réserve de meilleures pour plus tard. Vous n'avez absolument rien à perdre, les "boys"!

On a parlé de la loi 57 et de son adoption; je pense qu'il va falloir parler aujourd'hui de certaines modifications qui devront être apportées à la loi 57. Nous avons adopté la loi 125 sur l'aménagement du territoire et nous parlons actuellement de la création de MRC. Il faudrait savoir qui va financer les MRC et à quel coût on va les financer. Il va falloir connaître les responsabilités que nous allons donner aux MRC et savoir aussi, qui va, par la suite, en défrayer les coûts. Actuellement, on se rend compte que le gouvernement s'amuse à passer la balle aux municipalités. Exemple: le Régime d'assurance maladie du Québec qui est passé de 1,5% à 3%. On a doublé la participation du coût aux municipalités; en 1982, cela va coûter 17 000 000 $ aux municipalités, 17 000 000 $ qu'on va chercher dans la poche du petit contribuable par le biais du gouvernement. Même chose dans d'autres domaines.

On vient à peine d'étudier la loi 11. On coupe dans l'enseignement privé. On va permettre l'enseignement privé uniquement aux riches. C'est cela, un gouvernement social-démocrate, c'est cela, le gouvernement déguisé actuel, c'est cela qui sert les Québécois et les Québécoises, actuellement. On ne commence qu'à lever le voile qui va démontrer l'hypocrisie, le mensonge que le gouvernement actuel, depuis 1976, laisse sous-entendre aux citoyens du Québec.

Pas longtemps avant les élections du 13 avril, on mettait en veilleuse l'indépendance, on respectait le référendum parce que les citoyens du Québec s'étaient prononcés à 60% pour le maintien du Québec à l'intérieur de la fédération. Aujourd'hui, on vient de "réveiller" la veilleuse et on recommence à nous parler des sornettes de l'indépendance. Ils nous montrent leur vrai visage.

Une voix: Vous avez peur.

M. Rocheleau: Ne vous en faites pas, on n'a pas peur. La seule chose que je souhaite, c'est que le gouvernement actuel ait la décence... Ils nous disent souvent: II n'y aura pas d'autre référendum durant notre mandat. Faites-en une, élection sur la séparation, et dépêchez-vous, mais pas avec une grande question d'une page complète que personne n'a comprise ou à peu près personne. Vous allez arrêter de prendre les Québécois et les Québécoises pour des dupes et vous allez administrer le Québec à l'intérieur des volontés des Québécois et des Québécoises.

Mesdames et messieurs d'en face...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! (20 h 50)

M. Rocheleau: ... quand on vous dit la vérité, ça vous choque. Apprenez à connaître la vérité parce qu'au cours des prochains mois vous allez être souvent choqués. Il est malheureux d'utiliser le peuple québécois actuellement pour faire passer les idées d'un

parti séparatiste, un parti qui a toujours été reconnu comme séparatiste, mais, quand il arrive une élection, M. le Président, on "veille" un peu. On met ça en veilleuse. On met ça de côté. On fait accroire aux Québécois que là, on va être un bon gouvernement. Mais en plus de ça, M. le Président, à la suite du 13 avril, on a appris quoi? Un trou additionnel. En plus du trou au point de vue de l'éducation de l'an passé, on apprend des vérificateurs du gouvernement qu'il y a un nouveau trou. Le ministre Parizeau, l'autre jour... Vous savez, c'est un type qui est capable de communiquer, mais il ne sera pas toujours capable de cacher à la population du Québec l'endettement actuel: vous êtes en train de nous faire faire faillite, messieurs et mesdames de l'autre côté.

Quand on a parlé de 14 000 000 000 $ de déficits opérationnels au cours des quatre dernières années, on aurait dû dire aux Québécois et aux Québécoises qui travaillent, parce qu'il y a 28% des Québécois et Québécoises qui travaillent, on aurait dû leur dire qu'en se levant le matin, cela leur coûtait 5 $ uniquement en intérêts pour payer vos folies furieuses, les dépenses éhontées que vous avez faites au cours des quatre dernières années. On aura sûrement l'occasion de vous en parler très bientôt et nous allons avoir énormément de plaisir à le faire au cours de l'automne.

Je voudrais aussi, M. le Président, mentionner à cette Chambre et à mes collègues, et plus particulièrement aux citoyens, qu'on m'a aussi confié la responsabilité de critique à la commission parlementaire des affaires intergouvernementales en ce qui touche plus particulièrement la région de la capitale nationale. Il faut dire, M. le Président, qu'au cours des quatre dernières années...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Picotte: M. le Président, vous comprenez sans doute que je m'apprête à vous demander de faire respecter le droit de parole de mon collègue de Hull. Même le député de Johnson se permet d'être indiscipliné, ce qui me surprend beaucoup. M. le Président, faites donc respecter les règlements.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Chevrette: On peut toujours empêcher les gens de parler, mais sûrement pas de rire.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je demanderais la collaboration des deux côtés de l'Assemblée pour permettre au député de

Hull de continuer son discours.

M. Rocheleau: M. le Président, je dois avouer candidement que, quand on parle de vérité, qu'on regarde nos collègues d'en face et qu'on examine le genre de gestion et le genre de politiques qu'on a données aux Québécois et aux Québécoises au cours des dernières années, on peut comprendre que l'on tente de couper la parole à celui qui parle. Mais ne vous en faites pas, M. le Président, les Québécois et les Québécoises, au cours des prochains mois, des prochaines années, auront l'occasion de répudier à tout jamais le Parti québécois pour le mal qu'il fait aux Québécois actuellement.

M. le Président, je constate aussi, et je pense que c'est important, je viens de le mentionner, que la région de la capitale nationale a été privée, au cours des quatre dernières années, de programmes importants à frais partagés avec le gouvernement fédéral. Uniquement dans le but de bloquer certains de ces programmes, on a bloqué en même temps la construction, on a empêché la création de nouveaux emplois et on a empêché aussi de nouveaux revenus à la ville de Hull, afin de donner de meilleurs services à ses citoyens et afin de maintenir un taux de taxes abordable pour les citoyens. C'est ça que le député ou l'ex-député a fait au cours des quatre dernières années. On s'amuse ici à l'encenser.

M. le Président, j'ose souhaiter, et j'ai même eu la collaboration du ministre des Affaires intergouvernementales en commission parlementaire l'autre jour, à savoir sur les problèmes particuliers de la région de la capitale nationale, qui m'accordera une oreille attentive afin de discuter de ces problèmes et afin d'éviter tout retard dans des programmes de construction à venir.

M. le Président, je ne peux terminer sans dire combien je suis inquiet pour les jeunes qui actuellement sont à l'école, au cégep et à l'université, les jeunes qui se sont fait promettre au cours de l'élection des salaires, des jeunes qui demain seront des chômeurs instruits. En parlant de chômeurs, M. le Président, on a le championnat au Québec pour le taux de chômage et je trouve malheureux que l'on semble abrier continuellement la mauvaise administration que l'on donne à notre province. Je suis préoccupé aussi, M. le Président, par les personnes âgées qui ont besoin de logements additionnels. Nous avions recommandé, la ville de Hull, alors que j'étais maire, des programmes d'allocations au logement afin de permettre aux gens de demeurer dans leur propre logement. Nous avons recommandé d'accorder une subvention sur les lieux pour leur permettre de conserver leur milieu de vie, leur entourage et leur vie sociale. On ne l'a pas encore eu, M. le Président, et j'ose espérer que, par l'entremise du nouveau

ministre de l'Habitation, on l'aura bientôt.

En terminant, M. le Président, je voudrais demander à cette Chambre, à l'ensemble de ceux qui établissent les politiques pour le Québec d'être sincères dans les prochains mois, d'arrêter de jouer avec les Québécois et les Québécoises sur la question de l'indépendance du Québec, d'arrêter de jouer sur la question de la constitution et d'arrêter de faire passer le gouvernement fédéral pour responsable de tous les péchés du monde. Si on disait, M. le Président, avec honnêteté, la participation du gouvernement fédéral dans tous les programmes. C'est vrai qu'il n'est pas parfait, le gouvernement fédéral, mais c'est à nous autres ce pays, M. le Président. De ce côté-ci de la Chambre, on va continuer à le défendre, notre pays, envers et contre tous et surtout envers les péquistes en face nous. J'espère que vous serez assez honnêtes la prochaine fois pour dire à l'ensemble des citoyens du Québec le sentiment que vous avez réellement dans le coeur, que c'est la séparation du Québec que vous voulez. Nous voulons demeurer dans le Canada, dans un Canada amélioré à l'intérieur d'une nouvelle constitution. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, depuis le début des discours en réponse au discours sur le budget, je vous avoue que j'en perds mon latin à écouter l'Opposition. Ils sont contre les compressions et contre le déficit. Il va falloir qu'il y en ait un dans leur groupe qui nous explique la logique de leurs propos. Mais, si je me lève à ce moment-ci, c'est d'abord, M. le Président, pour riposter un peu au précédent intervenant. Je comprends qu'il ne manque pas de culot, mais je ne peux pas laisser insulter une des mes collègues qui a siégé avec nous pendant quatre ans, laisser passer des affirmations aussi grossières que celles proférées par le député actuel de Hull quand on sait jusqu'à quel point Mme Jocelyne Ouellette s'est battue pendant quatre ans et ce, en toute sincérité, on doit le dire, parce que les "clippings" de presse, cela existe régulièrement. On doit vous dire, M. le Président, que Mme Ouellette s'est battue avec acharnement pendant quatre ans et ce, en ayant des bois dans les roues d'une façon systématique par un maire d'une grosse ville qui ne s'est pas gêné, systématiquement, d'une façon partisane, pour bloquer l'ensemble des dossiers qu'elle voulait mettre de l'avant pour le comté de Hull.

Qu'on pense à l'accent que Mme Ouellette mettait sur le Palais des congrès, aux efforts qu'elle a faits pour le développement de la Haute-Gatineau, aux efforts qu'elle a faits pour les personnes âgées et ce, au niveau des quartiers de la ville de Hull. Si elle avait eu toute la collaboration dont elle était en droit d'attendre d'un maire qui se dit représentant de toutes les classes de la société, des personnes âgées... Je l'écoutais tantôt avec une voix quasi mielleuse: mes préoccupations, les personnes âgées. Si c'était cela, M. le maire de Hull, M. l'ex-maire de Hull, pourquoi n'avez-vous pas appuyé les efforts de notre consoeur, Mme Ouellette, qui se dévouait corps et âme pour développer votre coin de pays? Je vous avoue très honnêtement qu'on peut rester froid et calme devant certains discours, on comprend qu'il y a peut-être une notion de spectacle, à un moment donné, au niveau de certains discours en Chambre, mais quand on pousse le culot jusqu'à l'indécence, il faut s'attendre à se faire retrousser une fois de temps en temps, et c'est ce que j'entendais vous faire, M. le maire de Hull.

Une voix: Ex-maire.

M. Chevrette: L'ex-maire, oui, au grand bonheur de ses concitoyens.

M. le Président, on parle de budget. On ne s'est pas caché pour tout mettre dans le budget, nous. J'écoutais ces pauvres gens s'inquiéter de l'état alarmant des finances publiques. Mais il n'y a pas eu de cachettes dans le budget, on n'a pas camouflé des déficits olympiques dans ce budget; on a tout mis dedans, y compris les cachettes que vous faisiez au niveau du fonds de retraite, messieurs les libéraux. Quand on est arrivé, il y en avait, tenez-vous bien, seulement pour 4 000 000 000 $ de cachettes, ce qui fait 6 000 000 000 $ aujourd'hui, si on compte l'accumulation. On n'a pas caché non plus le fruit de vos fameuses politiques au niveau de l'administration en éducation, ce qui a provoqué un immense trou que vous avez dramatisé et qu'on doit payer, mais on l'a mis dans le budget, on ne s'est pas gêné pour le mettre dans le budget. Si vous enleviez uniquement le résultat de votre mauvaise administration, vous pourriez couper le déficit d'au-delà de 1 000 000 000 $. Encore là, vous trouveriez que c'est dramatique, bien sûr. Bien sûr que c'est dramatique: vous comparez 2 000 000 000 $ en 1981 à 2 000 000 000 $ en 1973, mais, pour vous, il n'y avait rien là dans le temps, avec vos nombreuses cachettes en plus.

Je pense, M. le Président, qu'il faut faire un appel spécial, à ce moment-ci, aux groupes structurés de notre société qui ont la chance de bénéficier de structures de pression et d'évoluer normalement, selon le rythme du coût de la vie. J'avoue très honnêtement, après avoir pataugé des deux côtés de la clôture, comme diraient certains

de nos amis d'en face, que je me rends compte qu'on a la mémoire trop courte, bien souvent, et qu'on a une capacité d'analyse trop faible. Quand le gouvernement décide de réduire les impôts, il réduit les impôts des groupes structurés tout autant que des groupes non structurés qui n'ont pas la chance de vivre l'évolution normale des salaires ou de bénéficier des indexations normales dont les autres bénéficient.

Je fais appel aux groupes structurés de notre société, en particulier du secteur public, pour bien regarder jusqu'à quel point les mesures gouvernementales qui s'appliquent également à eux viennent renchérir leur statut. Bien souvent, ou l'oublie. Je jasais dernièrement avec des leaders syndicaux qui me disaient: On a eu seulement 7,5% d'augmentation dans la fonction publique, et ce n'est pas beaucoup. Je leur disais: Oui, mais comptez-vous également le remboursement d'impôt qu'on donne depuis des années? Depuis qu'on est là, quatre baisses d'impôt successives! Cela fait partie de l'amélioration de votre statut. Il y a des groupes dans la société qui sont encore au salaire minimum et qui n'ont que les programmes gouvernementaux généraux qui s'appliquent à eux. Encore là, vous êtes choyés, vous êtes des privilégiés.

C'est un peu ce message, au niveau du discours sur le budget, que je voulais transmettre pour faire en sorte que nos concitoyens qui ont la chance de bénéficier de structures de pression, qui ont la chance de bénéficier des avantages d'une négociation de convention collective soient aussi compréhensifs, dans une période de récession économique, vis-à-vis d'autres groupes de la société qui, eux, n'ont pas ces avantages. J'ai voulu davantage, au tout début de mon bref exposé, répondre à ce qui me semble de l'ingratitude parlementaire après avoir entendu le député de Hull. J'ose espérer que les députés de l'Opposition qui ont défait des candidats qui ont travaillé de bonne foi pendant quatre ans et qui ont trimé dur au niveau de cette Assemblée nationale pour améliorer le sort des gens de leur comté ne prendront pas l'attitude ni l'habitude de faire ce que le député de Hull fait chaque fois qu'il se lève. Il semble qu'il craigne énormément les prochaines élections puisqu'il tente déjà de terrasser l'éventuelle adversaire qui, cette fois-ci, n'aura pas de misère à le trimer après l'avoir entendu pendant quatre ans. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Nelligan.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: M. le Président, il était une fois un territoire qui était beaucoup plus petit que le Québec, mais dont la population était beaucoup plus grande que celle du Québec, 10 000 000 d'âmes, soit peut-être plus d'une fois et demie celle du Québec. Il y a plusieurs années de cela, ce territoire avait un chef qui n'avait pas de panache, pas d'apparat, qui ne parlait pas si bien en public, qui ne savait pas sourire aux foules. Quelques années après, cette population de 10 000 000 d'âmes fit une nouvelle élection, elle élit un nouveau chef qui, lui, savait sourire aux foules, qui était joli garçon, qui faisait de très beaux discours, qui avait du panache, qui avait du charisme. Et soudain ce fut l'euphorie, ce fut la grande gloire publique; soudain, dans ce territoire, les grands parcs publics devenaient des foires où les lumières s'allumaient pendant l'été. On donnait des concerts en public, beaucoup d'argent était dépensé, tout allait bien, c'était le grand bonheur. Cela dura cinq, six, sept années et, ensuite, le successeur de ce chef si populaire continua dans la même voie. On continua justement tout ce grand faste, cette grande gloriole, les drapeaux flottaient et, pendant ce temps, beaucoup de citoyens étaient en chômage. On connaissait un chômage beaucoup plus grand que dans les territoires avoisinants, mais on ne se tracassait pas beaucoup pour cela. Il y avait beaucoup d'argent, tout avait l'air de rouler très bien et soudain, d'un coup, en 1975, ce territoire, qui avait connu tellement de beaux jours pendant ces deux administrations, déclara d'un jour à l'autre qu'il faisait presque faillite.

Cela n'est pas une histoire rêvée, ce n'est pas un conte de fée; c'est l'histoire qui a été vécue par la ville de New York, qui, maintenant, est vécue par Philadelphie, par Détroit, par Cleveland, par beaucoup de villes aux États-Unis.

On dira: Ce n'est pas la même chose. Mais c'est exactement la même chose, parce qu'on a dépensé à gogo pendant des années. On ne s'est pas préoccupé de penser que les recettes doivent excéder les dépenses d'année en année, que, si ce n'est pas le cas, d'un jour à l'autre, les déficits vont s'accumuler, le coût du service de la dette va devenir tellement grand qu'on ne pourra plus fonctionner. C'est cela qui est arrivé à New York. C'est cela qui arrive aujourd'hui à tellement de grandes villes américaines. C'est cela qui arrive à l'Angleterre. C'est cela qui arrive à tellement d'endroits qui ont vécu au-delà de leurs moyens. C'est cela qui arrive aujourd'hui au Québec. Il ne faut pas se leurrer, c'est cela qui se passe.

Que nous arrive-t-il au Québec? Le fait est bien simple. Si on prend un indice de 100 par tête d'habitant, qu'en est-il dans chaque province du Canada? Dans l'Alberta, on dépense 118 par habitant pour un indice de 100, au Québec, 108, c'est la province qui dépense le plus après l'Alberta. Dans la Colombie britannique, province riche qui a

des recettes qui excèdent les dépenses, l'indice est 100. Dans l'Ontario, 94. Pourtant, notre capacité fiscale par habitant, nos recettes par habitant, en Alberta, pour un indice de 100, sont de 192, c'est-à-dire que pour 192 $ qu'ils retiennent ils dépensent 118 $. En Colombie britannique pour 104 $ qu'ils retiennent par tête d'habitant, ils dépensent 100 $. Au Québec, nous recevons 92 $ et nous dépensons 108 $. Dans l'Ontario - le déficit, c'est sûr, il est là -ils reçoivent 88 $ et ils dépensent 94 $. Mais ici au Québec la marqe entre nos recettes et nos dépenses est la plus qrande qu'il y ait dans toutes les provinces du Canada. C'est cela le problème, le problème est aussi simple que cela. (21 h 10)

Si, dans une famille, on dépense beaucoup trop, on dépense beaucoup plus qu'on ne gagne, on se trouve avec des prêts en banque, on utilise la Master Charge, on utilise la Visa, on consolide des comptes en banque et bientôt les intérêts sont tellement forts qu'on ne peut plus vivre, on ne peut plus continuer. C'est ça qui nous arrive aujourd'hui; alors, soudain on a découvert qu'on dépensait trop.

Au Québec, si on veut mettre ça en chiffres, par habitant, on dépense 2721 $ pour notre poids gouvernemental. Au Canada entier, en moyenne, c'est 2350 $; en Ontario, moins de 2000 $. La chose est simple, on dépense trop d'argent et on n'en gagne pas assez.

Dans tous les éléments, dans tous les barèmes, selon tous les facteurs qu'on peut comparer, le produit intérieur brut, les immobilisations, le taux de fabrication, partout nos indices sont défavorables par rapport à ceux du Canada, en moyenne, par rapport à ceux des autres provinces.

Pour ce qui est de notre chômage, ce qui affecte le plus les gens, notre chômage est un chômage record, chômage record chez les adultes, chômage superrecord chez les jeunes; 17% des jeunes sont en chômage; dans certains secteurs, 30% des jeunes sont en chômage. C'est ça, notre bilan d'aujourd'hui.

Alors, qu'est-ce qu'on fait? On décide soudainement qu'il faut changer les choses, on décide soudainement qu'il faut que ça cesse; d'un jour à l'autre, on fait des coupures. Dans quoi coupe-t-on? On coupe dans les secteurs qui sont la raison d'être d'un gouvernement, sa raison d'exister: l'éducation, les affaires sociales; c'est là qu'on commence par couper.

Et pourtant, est-ce que c'est là qu'on devrait vraiment couper comme on l'a fait, d'un jour à l'autre, soudainement, sans rime ni raison parfois, sans même que nous ayons des barèmes, sans même que nous sachions où ces budgets sont coupés?

Pendant ce temps, il y a une élection, il y a deux ou trois mois de cela; et on faisait tant de promesses, combien de promesses! On disait: Nous allons bâtir de nouvelles salles d'urgence, sept ou huit par-ci par-là, nous allons donner ceci, cela, de nouvelles routes, des promesses interminables, dans l'habitation, dans les affaires sociales, dans l'éducation, un nouveau campus pour le Collège Dawson, etc.

Pendant qu'on faisait toutes ces promesses, il n'y a même pas deux mois, aujourd'hui, on a décidé que, dans ces mêmes secteurs de l'éducation et des affaires sociales, on fait des coupures intransigeantes, on fait des coupures radicales.

Il faut se poser des questions. L'autre jour, j'ai reçu deux petits paquets avec une lettre du ministre des Communications disant: Cette année, ce sont des coupures, ce sont des compressions, on n'a pas pu vous donner beaucoup de drapeaux, on a eu à limiter le chiffre à environ 270 $ par député. Si on multiplie ce chiffre par 122 députés, ça faisait bien près de 30 000 $ en petits drapeaux, en grands drapeaux, en petits boutons, en grands boutons, en toutes sortes de petites décorations, en glorioles inutiles.

Quand on regarde le faste qui se fait autour de nous, tous ces bureaux, tous ces grands travaux qui ne finissent pas de jour en jour, ces améliorations continues, où sont les coupures, où sent-on les coupures dans cette gloriole, dans ce décor inutile?

Notre présence internationale. J'ai voyagé beaucoup dans le monde; partout où j'ai été, il y a un drapeau du Québec, sans jamais de drapeau du Canada, naturellement, à Grosvenor Street, à Paris, à Milan et ailleurs. À Paris, nous avons une délégation qui, me dit-on, est encore plus grande que l'ambassade du Canada. Ah oui, il faut une grande présence internationale, mais là, est-ce qu'on fait des coupures? Est-ce qu'on a dit: On va réduire le personnel de 100 personnes à Paris, que sais-je, de 10, 15 ou 20? C'est censé être une déléqation d'économie et de commerce, mais surtout ils font de la politique. Ce sont les ambassades de demain. Est-ce qu'on a coupé là avant de couper dans le secteur des affaires sociales, avant de couper dans le secteur des écoles, de l'enseignement privé et de l'enseignement public? Mais non. Les pensions des députés, est-ce que j'ai entendu un seul député de l'autre côté dire: Écoutez! s'il faut couper, commençons par regarder cela? Ce sont des pensions qui sont beaucoup plus élevées que la pension de n'importe quel travailleur au Québec. C'est cela qu'il faudrait dire. C'est cela qu'il faudrait revoir, toutes nos priorités. Ce grand faste, ces dépenses innombrables qu'on fait ici: on ne pense jamais à couper ici.

Notre fonction publique coûte beaucoup plus que celle de l'Ontario. On va me dire

que ces chiffres-là sont des chiffres qui ne veulent rien dire. Mais cela veut dire quelque chose. Peut-être qu'on ne veut pas entendre, mais cela veut dire quelque chose. Il y a dix ans, l'écart qu'il y avait entre la fonction publique de l'Ontario et celle du Québec, c'était un écart de 18%. Maintenant, en 1980, les derniers chiffres que nous avons indiquent un écart de seulement 8%. Notre fonction publique augmente et augmente. On dit qu'on a coupé dans la fonction publique. Mais on crée toutes sortes d'offices, l'office de ceci, l'office de cela, l'office d'une troisième chose où, bien souvent, les amis de nos amis deviennent de hauts fonctionnaires gagnant beaucoup d'argent. On crée des bureaucraties, on crée des emplois - ce ne sont peut-être pas des emplois directs du gouvernement, ce sont certainement des emplois indirects - et je ne vois pas beaucoup de coupures.

Cela m'a beaucoup intéressé, en commission parlementaire où j'ai participé, de voir que dans les programmes eux-mêmes on a beaucoup coupé, mais quand il s'agit de l'administration elle-même... On a fait un relevé bien intéressant; pour certains des fonctionnaires, les salaires avaient augmenté d'une façon assez conséguente pendant que les services directs avaient diminué. C'est cela qu'il faut revoir.

On a parlé de taxes. On a dit l'autre jour que les impôts, on ne les avait jamais autant diminués, mais pourtant les statistiques disent le contraire. Je citais, l'autre jour, des chiffres qui montraient que même quelqu'un avec un revenu imposable de 10 000 $, le commun des mortels, la personne au revenu moyen, paie beaucoup plus d'impôt ici qu'à Terre-Neuve ou dans n'importe quelle des provinces défavorisées. Les taxes indirectes, que ce soit la taxe d'Hydro-Québec, que ce soit la taxe sur l'essence, que ce soit le nouveau 1,5% qui va aller à la Régie de l'assurance-maladie et qui ira indirectement au trésor, retomberont sur les consommateurs. On dit qu'on a réduit les impôts, mais on a augmenté comme jamais auparavant les taxes indirectes.

Je sais qu'on dira que l'exode, c'est de la frime, cela n'existe pas. CIL, ce n'est pas parti; CAE, ce n'est pas parti; Northern Electric, ça n'a jamais parti, etc. On dira que, même s'ils sont partis, cela se passe ailleurs. C'est le mouvement normal vers l'Ouest. Mais je n'ai jamais vu aucun siège social américain sortir de New York pour aller à Phildelphie. Peut-être qu'il va déménager en Californie, d'accord, mais on ne sort pas de Montréal pour aller à Toronto, à 350 milles seulement. Il faut qu'il y ait une raison pour cela. La raison est très simple. C'est une raison d'attitude. Comment voulez-vous attirer des affaires? Comment voulez-vous attirer une économie nouvelle? Comment voulez-vous attirer des investissements, des immobilisations, si un homme d'affaires a écouté le discours d'aujourd'hui du premier ministre, s'il a écouté pendant le week-end les discours du premier ministre, du ministre d'État au Développement économique qui disait: Mais non, on n'a même plus besoin de l'association avec le Canada; on cherche une association continentale. Nous sommes tellement grands et tellement forts; on cherche une association continentale, quand nous ne pouvons pas gérer notre investissement et réaliser assez de revenus pour payer nos dépenses. On cherche un investissement continental pendant que nous, on perd une firme après l'autre, un siège social après l'autre. On dira: Mais cela, ce sont des "blokes", ce sont des étrangers, ce sont des Anglais. ... Ciba-Geigy, une firme suisse, elle aussi est partie pour l'Ontario. Pourquoi l'a-t-on perdue? (21 h 20)

Ce qu'il faut, c'est un changement d'attitude, un changement de direction, un changement positif qui ne voudra pas qu'Oswald Parent - je ne le connais pas du tout, je n'en sais rien - un francophone aille passer des tests inutiles à l'Office de la langue française et qu'on fasse une publicité inutile. Il y a toutes sortes de bureaucrates qui passent des jours sur une histoire tellement ridicule! II ne faudrait pas qu'il y ait des Mrs Lorey qui, après avoir travaillé vingt ans dans une firme avec des francophones sans jamais avoir de problèmes, à cause d'un règlement ridicule, a quitté cet emploi. C'est cela que les investisseurs lisent dans les journaux, c'est à cela qu'ils réfléchissent et c'est pour ça qu'ils nous quittent. C'est cette attitude de mesquinerie, de chinoiserie, cette attitude qui voudrait qu'on construise autour de nous des murs au lieu de bâtir des liens entre les qens, au lieu de bâtir des ponts avec les autres provinces et les autres pays, cette attitude de petite république, cette petite gloriole de drapeaux de 232$, les petits drapeaux et les grands drapeaux, les petits boutons et les grands boutons! Que ce soit le drapeau à feuille d'érable ou le drapeau du Québec, tout cela, pour moi, c'est de la frime. Je veux bien qu'on ait un drapeau, je veux bien qu'on ait des symboles, mais tout ce faste, toute cette dépense inutile, toute cette gloriole, que ce soit la feuille d'érable ou la fleur de lis, ça ne me dit rien, je trouve cela ridicule.

Ce qu'il nous faut ici, c'est de revoir nos priorités. Ce qu'il nous faut d'abord, c'est de garder ici l'économie que nous avons, c'est essayer de garder ici les sociétés, les sièges sociaux et les firmes qui sont déjà ici, ne pas les laisser quitter. Les meilleurs clients, ceux qui bâtissent au Québec, sont ceux qui sont déjà ici. Il faut que nous soyons d'accord que l'industrie privée, les immobilisations du secteur privé,

ce n'est pas un péché mortel. Si aujourd'hui General Motors, Pratt & Whitney ou une autre firme semblable emploie 7000, 10 000 ou 12 000 Québécois, est-ce que ce n'est pas un apport très positif? Alors, il faut les garder au lieu de garder les chômeurs.

Il faut parler aussi de notre attitude comme celle d'une province qui a décidé, l'année dernière, de rester dans le Canada. On reste dans le Canada sans jamais profiter justement de cette présence dans le Canada, de cet apport fédéral qui nous aiderait à obtenir toutes sortes d'accords fiscaux, toutes sortes de contributions fédérales qui sont tout à fait négligées. Quand on voit, dans un meeting, dans un sommet à Montréal qu'on exclut la présence fédérale qui produit quelque chose comme 73 000 emplois, les plus grosses sociétés d'État ici - Air Canada, Canadien national et aujourd'hui Pétrofina -il faut les garder, il faut entretenir cette présence au lieu de faire comme si elles n'existaient pas, comme des autruches.

J'espère que demain on aura un Québec ouvert aux autres, ouvert aux investisseurs, quels qu'ils soient, ouvert à un échange réel avec les autres provinces. J'espère que Montréal redeviendra le coeur même de notre économie, un Montréal qui aura une vocation internationale, une vocation qui profitera de l'apport fédéral. Il faut profiter au maximum de cette présence fédérale ici. J'espère qu'on va remettre le cap sur l'avenir dont parlait le premier ministre, mais un avenir différent, pas un avenir de petite république, de petite gloriole, de bureaucratie, de paperasse, de petite république. Il faudrait un avenir beaucoup plus ouvert, un avenir qui voudra justement accepter qu'on vive dans un continent, un immense pays qui peut nous apporter beaucoup de support, qui peut nous apporter des ouvertures économiques, des ouvertures fiscales, des ouvertures d'investissements. Alors, il faudra qu'on change notre attitude, qu'on mette le cap sur un réel avenir, qu'on remette les pieds sur terre. Comme New York, il faudra revoir nos priorités. On dépense trop d'argent pour ce qu'on a. Il faudra vivre selon nos moyens.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Michel Gauthier

M. Gauthier: M. le Président, depuis le début de ce débat sur le discours sur le budget, également lors du débat sur la loi 11 qui était très proche, on s'en souviendra, de toutes ces questions budgétaires, je dois vous dire ma grande déception face aux propos qui sont véhiculés constamment par l'ensemble des députés de l'Opposition qui siègent en face de nous en cette Chambre. En effet, M. le Président, bien naïvement, comme néophyte à l'Assemblée nationale, j'aurais cru que le rôle des députés de l'Opposition, comme celui des députés ministériels d'ailleurs, eût été un rôle constructif. J'avais pensé bien naïvement, je le répète, qu'ils avaient comme nous une responsabilité face aux gens qui les ont élus et qu'ils avaient le respect de la gestion des deniers publics. À la place de ce discours qui m'aurait semblé tout à fait justifié, je dois vous dire qu'on a assisté depuis quelques jours à un exercice collectif de basse démagogie et l'intervention du député de Nelligan qui vient de précéder en est un exemple frappant.

M. le Président, on a crié sur tous les toits: les pauvres institutions privées du Québec! On a essayé de faire croire à toute la population du Québec que le gouvernement péquiste, le méchant gouvernement péquiste, avait carrément balayé les institutions privées du paysage de l'éducation au Québec. C'est ce qu'on a essayé de faire croire, mais on s'est bien gardé, M. le Président, d'expliquer à la population du Québec -heureusement, certains de mes collègues l'ont fait avant moi - que les institutions privées du Québec ont été gâtées et sont toujours gâtées beaucoup plus qu'on ne les gâte dans les autres provinces canadiennes.

Également, on a crié que les pauvres assistés sociaux étaient victimes de toutes les coupures imaginables. Mais on s'est bien gardé de rappeler que ces mêmes députés de l'Opposition, voilà pas si longtemps, en période électorale, ont condamné systématiquement le programme OSE, l'opération solidarité économique, qui avait pour but, entre autres choses, d'aider par des subventions les personnes qui avaient quitté le marché du travail depuis assez longtemps à redevenir productives pour l'ensemble de notre société. Cela, on s'est bien gardé de le rappeler, M. le Président.

Également, on a crié sur tous les toits que le Parti québécois en voulait aux handicapés du Québec. On a osé le faire, M. le Président, alors même qu'on présentait la loi 12 pour éviter la discrimination, entre autres, chez les handicapés. On a évité d'en parler, M. le Président. On a parlé de quelques restrictions budgétaires qui risquaient d'incommoder certaines personnes qui appartiennent à cette catégorie. Eqalement, on a évité bien soigneusement, il faut le dire, de dire à toute la population du Québec que les investissements dans le domaine des immobilisations pour faciliter l'accès aux édifices publics ont été infiniment plus nombreux depuis quelques années, grâce à la bonne gouverne des gens du Parti québécois, qu'ils ne l'avaient été en d'autres temps dans l'histoire du Québec.

Également, on a fait de la démagogie avec les pauvres personnes âgées du Québec qui étaient si mal traitées par les méchants

péquistes. Mais on a omis de dire, M. le Président, que le gouvernement du Parti québécois, dans un geste responsable lors du dernier mandat, avait augmenté d'une façon considérable l'ensemble des lits dans les centres d'accueil pour les personnes âgées. (21 h 30)

On a omis de dire également, lorsqu'on criait à la défense des personnes âgées, que le gouvernement du Parti québécois avait fait énormément pour le maintien de ces personnes dans leur milieu naturel par Logirente, entre autres, et par d'autres mesures au moyen des CLSC, mesures qui étaient destinées à garder ces gens chez eux et c'est ce qu'ils désiraient qu'on fasse. On a omis de dire également qu'on leur avait donné la gratuité des médicaments. On a utilisé, M. le Président, dans cette Chambre, au cours de ces débats, les plus démunis de la société pour faire un exercice de basse démagogie, mais on s'est toujours gardé de dire à l'ensemble de la population du Québec comme à l'ensemble des députés de cette Chambre comment - et c'est la question que je posais au Parti libéral la semaine dernière, lors du débat sur la loi 11 - on pouvait concilier une position comme la leur, qui consistait à condamner littéralement le déficit du Québec et qui, en même temps, condamne systématiquement tout ce qu'on fait de restrictions budgétaires pour tâcher de garder le budget du Québec dans des proportions raisonnables et acceptables par la population.

Si le gouvernement aujourd'hui, M. le Président, est placé dans la situation où il doit apporter certaines restrictions budgétaires dans l'accroissement des dépenses, il importe de savoir qu'avant ce présent gouvernement, il y a eu un mandat qui a été exercé par un gouvernement du Parti libéral, un gouvernement composé de gens comme ceux-là qui n'avaient pas plus de programme, d'idées et de façons de gérer le Québec, les deniers du Québec, que ne semblent en avoir nos amis d'en face. En effet, le gouvernement du Parti québécois a hérité - c'est triste à dire, mais je pense qu'il convient à ce moment-ci de le soulever probablement de la plus mauvaise administration qu'on ait connue depuis fort longtemps au Québec, les années 1970-1976.

En effet, on fait état très largement et on ne se gêne pas dans l'Opposition pour nous rappeler constamment le déficit budgétaire de l'éducation, le trou dans le domaine de l'éducation, mais ce qu'on ne dit pas, M. le Président, c'est que ce déficit budgétaire a été occasionné de toutes pièces par la faiblesse des mécanismes de contrôle qu'avait mis sur pied le précédent gouvernement qui était composé de certains de ces députés qui, aujourd'hui, crient au scandale pour le trou de 500 000 000 $. Ce qu'on a oublié de dire, c'est que le déficit budgétaire a été causé par le fait que, dans une commission scolaire, les états financiers étaient produits quelque huit mois à un an, dans l'ancien système, après que l'année financière eut été effectivement close et, deuxièmement, l'analyse qui en résultait, évidemment, survenait beaucoup plus tard. Ce qui fait qu'un gouvernement du Parti québécois a hérité, en 1976, de la plus grave lacune de contrôle qu'un gouvernement avait pu mettre sur pied auparavant et c'est cette même lacune de contrôle que les gens du cabinet et les députés du Parti québécois se sont appliqués à corriger en restructurant toute la fiscalité municipale et scolaire. On condamne encore, du côté de l'Opposition, cette mesure éminemment souhaitable qui, probablement non seulement probablement, évitera très certainement au gouvernement dans les prochaines années, de ne plus avoir le contrôle des dépenses dans le domaine de l'éducation. Le déficit de 500 000 000 $, si j'étais de l'Opposition, je n'en parlerais pas trop, parce qu'il a été causé par une faiblesse de leurs règles de contrôle.

Également, M. le Président - et le député de Joliette en a fait mention tout à l'heure - on avait camouflé auparavant, on avait toujours camouflé le déficit qui s'accumulait constamment à partir des caisses de retraite des employés des systèmes public et parapublic. On avait toujours laissé de côté, dans les finances gouvernementales, ces sommes d'argent assez impressionnantes, parce que, quand le gouvernement perçoit des cotisations, évidemment, il contracte des obligations envers les gens qui paient ces cotisations. Mais on se fiait sur le fait qu'il y avait plus de cotisants que de personnes à la retraite et tout fonctionnait normalement. Mais il y avait un déficit actuariel qui s'accumulait et qu'on n'avait jamais considéré dans aucun budqet du Québec. Le présent gouvernement a au moins le mérite, M. le Président, d'avoir pris ses responsabilités, d'avoir pris en charge ce déficit et d'avoir versé enfin ce que l'État devait verser, sa juste part, dans ce système de retraite.

Tout à l'heure, on faisait état de l'accroissement du nombre de fonctionnaires. Je pense bien que, s'il y a un gouvernement qui a montré de la modération dans tout cet accroissement de l'appareil administratif, c'est bien le gouvernement du Parti québécois, qui en est arrivé non pas à une croissance zéro, mais bien à une décroissance du nombre de ses fonctionnaires. On s'est bien gardé de dire à la population du Québec que sous le précédent gouvernement du Parti libéral, bien sûr, on a observé pendant quatre années une hausse moyenne des dépenses de l'État d'environ 21% par année. On s'est bien gardé de dire que le gouvernement du Parti québécois avait ramené, d'une façon

consciente et responsable, cet accroissement des dépenses à un taux d'environ 16% l'an dernier et de 13% cette année. Je pense qu'il s'agit là d'un taux d'accroissement tout à fait raisonnable et qui fait preuve du sens des responsabilités du gouvernement, ce qui démontre à la population de tout le Québec que notre gouvernement est conscient des dangers que constitue une croissance trop rapide de tout notre appareil gouvernemental.

Enfin, on s'est bien gardé de dire, dans l'Opposition, que le précédent gouvernement, formé de ces gens, nous a laissé le déficit olympique de 2 000 000 000 $, lequel déficit, d'ailleurs, notre gouvernement a dû refinancer pour penser un jour éteindre cette dette qui n'aurait jamais été éteinte et qui aurait hypothéqué l'avenir des générations futures. On s'est bien gardé d'en parler lorsqu'on s'est exclamé à hauts cris que le gouvernement du Parti québécois gérait mal l'argent des contribuables.

On nous cite souvent, comme exemple, la Confédération, le Canada, mais on oublie de dire à la population du Québec que, si le déficit du Québec a atteint des proportions relativement restreignantes, le déficit du Canada - et l'ensemble des chiffres le prouve - est deux fois plus élevé compte tenu des revenus dont dispose le gouvernement fédéral par rapport aux revenus dont dispose le gouvernement du Québec. On s'est bien gardé d'en parler.

Tout à l'heure, on parlait de certains sièges sociaux, qui pourraient éventuellement, quitter la ville de Montréal. Je pense que les premiers responsables de ce manque de confiance dont on fait état parfois, ce sont nos adversaires qui ne se gênent pas et qui ne se sont jamais gênés, surtout en période électorale, pour véhiculer toutes sortes de peurs parmi les citoyens du Québec, qu'ils soient corporatifs ou que ce soient des individus. Enfin, je rappellerai qu'on a fait état largement, voilà quelque temps, du coup de la Brink's; on avait déjà parlé également - et je me permets d'en reparler ici - des peurs qu'on a faites aux vieillards à la veille du référendum. Je pense que les marchands de peur, ceux qui s'appliquent systématiquement, en ne faisant preuve d'aucun sens des responsabilités, à semer la peur au Québec, ceux qui s'appliquent à faire craindre certains investisseurs au Québec, ce sont nos amis d'en face qui n'en finissent plus de faire de la basse politique sur une question d'intérêt national pour laquelle on devrait avoir une cohésion de tous les instants.

Notre gouvernement a apporté un certain nombre de mesures. Notre gouvernement, au trou de 500 000 000 $ qui a été créé par le précédent gouvernement libéral, a opposé une réforme de la fiscalité et un contrôle beaucoup plus serré des dépenses de l'éducation. Devant un déficit d'une caisse de retraite qu'on s'efforçait par tous les moyens de camoufler, notre gouvernement a versé depuis quelques années les redevances qu'il avait envers ce fonds de retraite. Devant l'accroissement faramineux des fonctionnaires sous le précédent régime, notre gouvernement a atteint une décroissance. Devant une hausse des dépenses de 21% du précédent régime, notre gouvernement a su maintenir une moyenne de quelque 13%. (21 h 40)

Enfin, le déficit olympique qui ne se serait jamais payé, notre gouvernement l'a refinancé et on sait qu'à un moment donné on va voir le bout de cette histoire. Les citoyens du Québec sont beaucoup plus responsables et beaucoup plus éclairés qu'on ne le pense. Ils ne se seront pas laissés tromper par la basse démagogie, je le répète, qui a été faite par les membres de l'Opposition, lors de ces débats. Je pense que les citoyens du Québec sont bien conscients que notre gouvernement, dans un premier temps, a d'abord réduit systématiquement les impôts des contribuables afin de leur permettre de faire face à toute cette période économiquement difficile qu'on s'apprêtait à traverser. Et de un, c'est fait.

Deuxièmement, le gouvernement du Québec comprend, et les citoyens le comprennent également, que des restrictions dans nos dépenses sont absolument nécessaires. Dans un geste responsable, le gouvernement du Québec prend ses responsabilités et accepte de faire ces coupures budgétaires qui s'imposent, même si parfois cela fait mal à chacun d'entre nous et à l'ensemble des citoyens du Québec, mais on n'a pu en aucun moment, M. le Président, lors de toutes les interventions qui ont été faites par les députés de l'Opposition, compter sur des suggestions valables qui nous auraient permis d'épargner certains citoyens du Québec, s'il arrive qu'on en ait tassé quelques-uns un peu plus qu'on ne l'aurait voulu.

Mais les gens du Québec sont inquiets et avec raison; ils sont inquiets de la situation économique difficile que l'on traverse, mais ils savent, ils nous l'ont prouvé et le mandat a été clair, que dans une situation difficile - et nous sommes tous inquiets de cette situation difficile - il y avait un seul gouvernement qui pouvait reprendre les rênes en main, il y avait un seul gouvernement qui était capable, qui avait le courage et qui l'a prouvé, bien avant la campagne électorale, en annonçant ses restrictions budgétaires, ils savaient, dis-je, que le gouvernement du Parti québécois était le seul qui pouvait les sortir de ce mauvais pas. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président.

Après le discours qu'on vient d'entendre, j'ai presque le goût de dire: Mon Dieu que c'est facile de se lever, parler fort, gonfler la poitrine et dire qu'on est "smart", qu'on est fin, qu'on est merveilleux! Il est pourtant, je pense, un peu plus difficile de voir les choses avec un oeil un peu plus critique et de regarder de près ce qui se passe ici.

Je voudrais parler aujourd'hui, en réponse au discours sur le budget, M. le Président, de certaines contradictions que je vois entre le langage du gouvernement du Parti québécois et les gestes qu'il pose. Plus j'assiste aux travaux de cette Chambre, plus je reste incrédule face aux actes de funambulisme verbal que je vois quotidiennement dans cette Chambre.

Nous avons eu en fin de semaine passée une autre exhibition extraordinaire de cette capacité que démontre le Parti québécois de dire une chose et d'en faire une autre sans que l'on ait l'air de déranger qui que ce soit. Ce n'est pourtant pas de cette fin de semaine que je veux parler ici aujourd'hui. Cela fait un mois à peu près que nous avons entrepris nos travaux ici à l'Assemblée nationale et je constate - que ce soit à la période des questions, que ce soit en commission parlementaire - que les membres du gouvernement, les ministres en particulier doivent de plus en plus faire appel à leur talent d'acrobate verbale pour maintenir une apparence de cohérence entre paroles et gestes.

Si nous regardons dans son ensemble le comportement financier de ce gouvernement depuis 1976, quoigue disent les gens sur l'héritage qu'ils ont reçu après cinq ans, je pense qu'il est temps qu'on assume les responsabilités. S'il y a eu des erreurs commises avant cela, la population s'est prononcée en 1976. Il est temps d'arrêter d'éviter ainsi les responsabilités et de les assumer. Si on trouve qu'aujourd'hui, dans son rapport, le Vérificateur général, cinq ans plus tard, constate qu'il y a des irrégularités dans les méthodes comptables etc., cinq ans plus tard, je pense qu'il est trop tard pour dire que cela traîne encore après cinq ans de soi-disant bon gouvernement. Tout le temps voulu était là pour corriger ces incohérences si elles existaient.

Alors, si nous regardons ce comportement financier dans son ensemble depuis 1976, nous avons assisté à un accroissement très rapide des dépenses publiques, ce qui a entraîné en grande partie le déficit spectaculaire et record qu'on connaît tous. On aurait dit qu'on se trouvait dans une autre conjoncture économique que celle qu'on a vécue dans les cinq dernières années. Pourtant, tout au long de cette période de dépenses hâtives, le gouvernement nous disait continuellement qu'il n'y avait rien là, que les finances du Québec étaient en bon état et que, finalement, il n'y a pas à s'effrayer avec le déficit. On vient d'entendre: Ce n'est pas grave, le gouvernement fédéral en a un plus grand.

Voilà qu'aujourd'hui ce même gouvernement se sent un peu effrayé par ses gestes antérieurs et se trouve dans l'obligation de freiner, de couper, de ralentir l'accroissement, comme on dit maintenant, de comprimer.

On fait appel aujourd'hui au sens des responsabilités, au besoin de vivre à l'intérieur de nos moyens et on cherche à trouver ces nouveaux modes de compression, de ralentissement de l'accroissement pour finalement faire accepter et définir ce qui, en langage clair et simple, ne sont que des coupures à la suite de quatre ans de dépenses trop hâtives sans égard aux responsabilités financières que le gouvernement aurait dû avoir.

On crée une situation nouvelle et aujourd'hui on vient nous dire qu'il faut arrêter ça. En pensant à tout ça, j'ai eu l'image d'un groupe de compagnons au collège qui se disaient: On a eu une bonne rigolade pendant un bon bout de temps. Maintenant, c'est le temps de devenir sérieux avant que les gens nous découvrent. Voilà qu'on assiste maintenant à des efforts pour prendre des airs sérieux, responsables, réconfortants, pendant qu'on applique le couteau, sinon la hache, tout en disant doucement: N'ayez pas peur, ça ne va pas faire mal.

La vérité pourtant, M. le Président, demeure que, si les mesures draconiennes qu'on voit aujourd'hui sont nécessaires, c'est largement à cause du comportement antérieur de ce même gouvernement. L'irresponsabilité de ce gouvernement ne vient pas seulement du fait que le ministre des Finances utilise ce que le Vérificateur général qualifie comme des méthodes comptables douteuses qui font ressortir des trous ici et là pour aboutir à un trou d'un diamètre de 1 000 000 000 $. À mes yeux, ce qui fausse le plus les choses et détermine les priorités de dépenses du gouvernement est le fait que ce gouvernement ait décidé d'utiliser l'appareil gouvernemental et de gérer ses finances en fonction de son option constitutionnelle.

Le 20 mai dernier, on aurait cru qu'on avait mis fin aux dégâts que cause cette manière d'agir. Depuis la fin de semaine dernière, on peut s'attendre à reprendre ce genre de processus. Très habilement, je dois l'avouer, le gouvernement opère ce que je peux qualifier d'une approche de grand bal; maintenant on monte, maintenant on descend, quelques pas en avant, quelques coupures comme dessert. Ceci est particulièrement

vrai dans deux secteurs, l'Éducation et les Affaires sociales. Si nous regardons de plus près ce qui se passe aux Affaires sociales, par exemple, on peut bien se poser des questions sur le sérieux de l'intérêt qu'a ce gouvernement face aux couches de la population qui sont le plus dans le besoin et le plus mal défendues. Nous pouvons peut-être tirer quelques conclusions par rapport aux expériences qu'on a vécues ici en Chambre et en commission parlementaire.

Nous avons, par exemple, d'un côté, le ministre des Communautés culturelles qui nous assure que le gouvernement donnera leur place légitime à ces communautés, et je n'ai aucune raison de ne pas le croire. D'un autre côté, nous avons le ministre des Affaires sociales qui, dès qu'on soulève une question concernant les besoins sociaux de ces mêmes communautés, nous dit: Ce n'est pas la place ici, référez-vous au ministère de l'Immigration.

Pourtant, c'est ce même gouvernement qui, le 3 mars dernier, publiait un document qui parlait de ces soucis que supposément l'ensemble du gouvernement avait. Je suggère, M. le Président, que ces deux collègues devraient peut-être suivre l'exemple du ministre des Finances et du président du Conseil du trésor et aller dîner ensemble pour se parler un peu.

Nous avons également un ministère de la Condition féminine dont la titulaire dit vouloir promouvoir et valoriser le travail des femmes sur le marché du travail. Au même moment, le ministre des Finances entreprend des mesures qui dévalorisent financièrement ces mêmes femmes qui veulent travailler a l'extérieur de la maison. Peut-être Mme la ministre pourrait-elle, elle aussi, inviter le ministre des Finances à aller dîner. Je suis certain d'une chose il trouverait probablement sa compagnie beaucoup plus plaisante que celle du président du Conseil du trésor!

Si je vous dis tout ça, ce n'est que pour démontrer que nous voyons trop souvent des incongruités de ce genre entre les voeux, les paroles et les gestes. (21 h 50)

Depuis le début de l'étude des crédits, on entend, par exemple, les mots "justice" et "humanité" pour décrire les critères avec lesquels on va appliquer les coupures dans le domaine des affaires sociales. On a essayé pourtant d'avoir quelque précision sur ces critères qui ont servi, soi-disant à déterminer où vont s'effectuer les coupures, dans quels services des différents programmes, pour que nous puissions aussi voir ces éléments de justice et d'humanité et les comprendre. Nous avons eu, à la place, des beaux discours, des discours qui ne portaient aucunement sur le sujet et qui noyaient finalement la question dans une inondation verbale de première classe, je dois l'avouer.

J'ai presque eu l'impression, M. le Président, sans vouloir attribuer un tel motif aux responsables, qu'il s'agissait de tuer le temps, de finir les douze heures d'étude des crédits sans trop en dire, de crainte que ce qu'on dirait embarrasserait celui qui l'aurait dit. Si on croit qu'on a fait son possible et qu'on est convaincu de ce qu'on a fait, on n'hésite pas à le mettre sur la table, à la lumière du jour, pour démontrer ainsi sa transparence, sa consistance et sa cohérence. Pourtant, on n'a rien eu de cela.

Nous verrons une coupure de l'ordre de 14 000 000 $ uniquement dans le réseau des centres des services sociaux, les CSS. Pourtant, nous n'avons eu aucune indication précise, aucune précision sur la façon dont ces coupures vont être appliquées. Qui va absorber les effets de ces coupures? Le ministre nous a fait part de sa confiance, comme il a dit, en l'imagination des dirigeants des établissements du réseau des affaires sociales pour trouver des moyens très Imaginatifs afin d'amoindrir les effets de ces coupures. C'est parfait cela. Je suis sûr que ces dirigeants ont de l'imagination, mais où se trouve la responsabilité du ministre des Affaires sociales à ce sujet?

Nous avons également interrogé le ministre sur les centres de jour qui étaient censés fonctionner dans tout nouveau centre d'accueil qui serait construit. C'est un programme qui a fait l'objet de suffisamment de publicité il y a quelques mois et, après plusieurs tentatives d'éviter de répondre clairement à la question, le ministre a avoué que, probablement ou peut-être - je ne me souviens pas exactement - les crédits pour ce programme seraient périmés. Cela s'est passé dans la tranquillité, sans trop parler, tandis qu'avant on avait annoncé avec de grands éclats des journaux qu'on allait maintenant avoir des centres de jour tout nouvellement équipés dans chaque centre d'accueil qui serait construit au Québec.

Nous avons également questionné le ministre sur les garderies et les promesses d'un tas de nouvelles places pour les garderies. Cette année, il n'y a aucune augmentation prévue à ce programme qui corresponde à une promesse électorale. Inutile de vous dire également qu'avec l'inflation et l'augmentation des coûts fixes auxquels feront face plusieurs garderies, elles se trouveront dans des situations très difficiles. Le ministre nous a dit que la promesse s'échelonnerait sur cinq ans. En anglais, on dirait peut-être "vote now, get later, maybe".

Il y a une certaine incohérence quand on est en train de restreindre et de couper et que, du même souffle, on fait miroiter des bonbons, mais pour plus tard. Il faut que nous apprenions tous, je pense, que ce n'est qu'en ménageant avec ce qu'on a aujourd'hui qu'on peut déterminer ce qu'on aura demain.

II est trop facile et simpliste de remettre la solution à nos problèmes d'aujourd'hui à demain ou après-demain.

C'est vrai qu'on est dans une période économique très difficile et c'est vrai que le gouvernement du Québec ne peut pas résoudre miraculeusement le problème de l'inflation ou du chômage. Nous ne sommes pas les seuls à avoir ces problèmes; ce sont des problèmes qui, peut-être, échappent au contrôle complet de la plupart des gouvernements aujourd'hui.

Il n'est pas vrai pourtant qu'on ne pourrait pas faire beaucoup mieux avec ce qu'on a. Il n'est pas vrai que nous devons simplement nous fier à l'imagination des fonctionnaires. C'est presque une contradiction en soi.

Je lisais, hier, aussi, que le ministre de l'Éducation disait que ses mains étaient liées par rapport à l'endroit où il peut appliquer les coupures dans le secteur de l'éducation à cause, dit-il, des conventions collectives. Il l'a probablement dit avec cet air d'aplomb qu'on lui connaît, froidement, calmement, comme si c'était la chose la plus normale. Mais j'ai quand même sursauté, M. le Président, parce que si ma mémoire est bonne, c'est ce même gouvernement qui a négocié et imposé cette même convention collective au sujet de laquelle, aujourd'hui, le ministre dit que ses mains sont liées et qu'il ne peut rien faire. On se lie les mains, on crie a l'impuissance. Est-ce qu'on se rappelle de l'affaire de la tutelle éclair de la CECM, juste le temps nécessaire pour faire signer cette convention collective que la CECM refusait de signer parce qu'elle trouvait que cela liait trop les mains des dirigeants. Aujourd'hui, on dit simplement qu'on ne peut rien faire, qu'on est coïncé, mais on ne dit pas par quoi. On est coïncé, finalement, par ce que ce même gouvernement a fait pendant les cinq dernières années. Il doit certainement y avoir une logique là-dedans et peut-être que les députés ministériels pourraient la trouver pour moi. Moi, vraiment, je ne la vois pas.

Ce que je vois, pourtant, c'est un manque de respect envers la population, un comportement dont la sincérité est complètement absente et un aveuglement par rapport aux besoins de notre société réelle. Nous avons besoin, aujourd'hui plus que jamais, d'une réexamination au fond de nos priorités sociales. Dans un contexte difficile au point de vue économique, ce sont trop souvent ceux qui ne peuvent pas crier assez fort, ceux qui sont les moins défendus qui souffrent davantage. Il faut, à mon point de vue, qu'on réexamine de près la manière avec laquelle on livre les services, pour lesquels l'État a une responsabilité. Il y a lieu, je crois, de réexaminer la manière dont nos services sociaux en particulier, services qui prennent le tiers du budget de l'État, sont organisés et distribués. Il y a certainement lieu de trouver un ensemble moins complexe, avec moins de dédoublements et avec plus de rapprochements envers le citoyen. Il y a lieu de mettre sur pied des mesures qui encourageront la prise en charge par les citoyens locaux et les communautés locales de leur situation et de leur problématique.

Si on peut se fier à l'imagination des fonctionnaires et des dirigeants des établissements, on peut certainement se fier sur les communautés locales pour résoudre un peu leurs propres problèmes en leur faisant confiance. Ce ne sont pas toujours les grands penseurs qui cherchent le modèle parfait et idéal qui arrivent à résoudre des problèmes que d'autres vivent dans le quotidien. Le bon sens ordinaire, cela coûte moins cher et cela va souvent plus loin. On est en train de vraiment se faire avoir, mais pour de vrai cette fois-ci, parce que les gestes que ce gouvernement pose manquent de consistance et ne véhiculent que des objectifs a court terme avec une arrière-pensée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Gilles Baril

M. Baril (Rouyn-Noranda-

Témiscamingue): M. le Président, permettez-moi tout d'abord d'expliquer le présent budget, mais par rapport à un contexte économique international. Depuis la fin de la dernière guerre mondiale, les démocraties occidentales dont nous faisons partie se sont habituées, qrâce à la conjoncture économique favorable, à vivre dans l'opulence et malheureusement trop souvent dans le gaspillaqe. Comme dans bien d'autres domaines, celui de l'économie est touché et ce temps de la surabondance est définitivement révolu.

Bien sûr, l'énergie devenue si rapidement très chère ne doit pas être un prétexte à toutes sortes de coupures. Bien sûr, les taux d'intérêt couvrant les emprunts gouvernementaux ne sont et ne doivent pas être le bouc émissaire des coupures budgétaires que nous vivons actuellement, mais il y a un temps où le mot "économie" prend son véritable sens, soit celui de l'épargne. Notre société vit actuellement une phase de mutation économique, une phase de transformation technologique et les causes en sont nombreuses. Il va falloir en assurer pleinement et efficacement les effets de façon à tirer le meilleur parti des sommes allouées à tel ou tel secteur de notre économie québécoise.

Comme chacun le sait, de nombreux outils économiques sont ailleurs que dans les mains des responsables de l'économie

québécoise. La tenue du dollar canadien, par exemple, par rapport au dollar américain, la mauvaise performance de l'industrie automobile américaine, la récession en général que subit l'économie américaine, voilà des facteurs qui influent sur l'économie québécoise tout entière et contre lesquels nous ne pouvons pas grand-chose. Nous sommes donc dans une phase économique de mutation et même de profonde transformation pour les décennies à venir et les jeunes sont et seront les héritiers de ce nouvel ordre économique. Si, par la force des choses, ils en sont les héritiers, ils devront, par le fait même, en assumer les bienfaits et les méfaits. Donc, ils doivent dès maintenant participer à l'élaboration de cette économie du futur car l'avenir leur appartient. Le Japon, M. le Président, est devenu en quelques années la première puissance économique mondiale non pas grâce à ses ressources énergétiques qui sont nulles, mais parce que les Japonais ont su faire travailler leur cerveau. Le Japon de l'après-guerre était une ruine gigantesque. Le Japon d'aujourd'hui est le plus moderne des pays du monde. (22 heures)

Nous avons au Québec, M. le Président, tous les atouts du Japon. La jeunesse de nos citoyens, la jeunesse de notre industrie, mais en plus, nous ne sommes pas démunis de matières premières car nous en sommes riches d'énergie renouvelable. Bref, presque toutes les conditions dans notre système actuel du Québec sont réunies. Dans un dialogue économique qui s'engage, celles et ceux qui feront fi des aspirations, des soucis et des exigences de notre génération, c'est-à-dire de la jeunesse, devront assumer seuls les responsabilités d'une telle erreur. La société de demain sera faite pour les jeunes et elle doit être élaborée avec ceux-ci. En ce sens, les engagements électoraux de la récente campagne de notre parti, c'est-à-dire le programme d'accès à la propriété, le prêt en agriculture en ce qui concerne les jeunes, la politique d'indexation des prêts-bourses doivent être tenus et réalisés pour atteindre pleinement cet objectif de première préoccupation toute particulière de notre gouvernement envers la jeunesse.

M. le Président, depuis une vingtaine d'années environ, la place accordée aux jeunes dans le secteur de l'économie devient de plus en plus importante. Au fur et à mesure que notre société québécoise évolue vers une prise en main de ses richesses, la jeunesse s'implique, tout à faite consciente que l'avenir passe d'abord et avant tout par l'exploitation au Québec, par des Québécois, du produit de notre sous-sol, des matières premières et de notre sous-sol. En ce sens, M. le Président, je voudrais démontrer à quel point le présent gouvernement s'est préoccupé d'une région qui, sur le plan économique, s'est développée de façon sans précédent au cours des quatre dernières années; je parle de la région de l'Abitibi-Témiscamingue. Notre région, M. le Président, a pris un essor économique invraisemblable, depuis quatre ans, grâce à une participation du gouvernement par l'entremise des sociétés d'État, et nous y croyons en Abitibi-Témiscamingue aux sociétés d'État. Pourquoi? Parce qu'elles ont permis de revitaliser l'économie et de donner de l'emploi à l'ensemble de la population de notre région.

J'entendais tantôt des amis d'en face parler de l'interventionnisme de l'État. Je dois vous dire, M. le Président, qu'il n'y a jamais eu de participation gouvernementale aussi civilisée dans le domaine du développement économique chez nous au niveau des ressources. Que ce soit au niveau de la forêt et des mines, les sociétés d'État - l'intervention de l'État - y sont allées quand l'entreprise privée avait peur d'y aller et elles l'ont fait dans une perspective de concertation, M. le Président. Je dois vous dire que les sociétés d'État depuis l'arrivée de notre gouvernement au pouvoir en 1976, ont été rendues rentables, ce qu'elles n'étaient pas avant 1976.

Avant les années soixante, M. le Président, le pouvoir d'achat de la jeunesse était au Québec très en dessous de la moyenne des revenus et son implication économique était alors nulle. Ce qu'on peut dire, c'est que depuis quatre ans notre présent gouvernement, le gouvernement du Parti québécois, a permis de mettre sur pied de puissants incitatifs promotionnels qui ont permis à la jeunesse d'acquérir un pouvoir d'achat très important et de se trouver de l'emploi un peu partout au Québec. M. le Président, la force du Parti québécois pour les années à venir, c'est d'avoir déjà préparé la relève. Le Parti québécois est un outil important pour se faire entendre et la dynamique est telle que nos adversaires échouent dans leur tentative de créer à leur bénéfice un quelconque regroupement des forces vives de la jeunesse. Cela m'apparaît tout à fait curieux, M. le Président, que, depuis le début de cette Législature, nous entendions les libéraux comme jamais parler de la jeunesse du Québec. Je me rappelle qu'il n'y a pas longtemps il y a eu une campagne électorale au Québec, M. le Président, pour permettre aux partis politiques en cause de faire connaître leur programme politique et plus particulièrement en matière économique. M. le Président, malheureusement, je n'ai pas vu d'incitatifs promotionnels, d'engagements électoraux vis-à-vis des jeunes et, par ce fait même, je trouve tout à fait curieux d'entendre aujourd'hui nos amis d'en face parler de la jeunesse du Québec et de l'emploi, alors qu'il y a peu de temps ils ont eu la chance de

faire connaître leur programme dans ce domaine vis-à-vis des jeunes.

Dans ce nouvel ordre économique dont nous parlions tantôt, les éléments, les idées et les solutions que pourrait apporter la jeunesse comme contribution sont immenses. Le contexte se prête alors à l'organisation et à la mise sur pied d'un sommet québécois sur la jeunesse, sommet à l'intérieur duquel la dimension économique aurait une place prépondérante comme élément de réflexion sur le devenir de notre société jeune, mais fragile, bien sûr, sur le plan économique trop concentré, en effet, dans les mains de quelques individus. L'électricité nous appartient, l'amiante aussi. Les ressources du sous-sol et du sol sont avant tout un bien collectif et national et non pas le privilège de quelques individus. Un tel sommet, M. le Président, en ce qui concerne la jeunesse, devrait permettre à différents courants de pensée de s'exprimer et il devrait être, par ailleurs, un forum au bout duquel un chemin se tracerait vers l'aboutissement d'une vraie solution d'avenir.

M. le Président, depuis l'automne 1976, le gouvernement du Québec a réalisé sur le plan économique des miracles compte tenu de la conjoncture économique actuelle et compte tenu aussi des pouvoirs dont il disposait. M. le Président, le défi économique des années quatre-vingt réside dans la participation de nos 80 députés du Parti québécois qui feront place à la créativité et à l'imagination sur le plan économique du Québec lors des prochaines années. Ce sera aussi le moment privilégié de définir quelle sorte de société notre parti voudra offrir en matière économique a l'ensemble de la collectivité québécoise. Là-dessus, M. le Président, je pense que le prochain congrès du Parti québécois sera un moyen ultime, privilégié pour définir une telle politique.

Je voudrais, M. le Président, rappeler, en terminant, l'importance que revêtirait un sommet québécois sur la jeunesse. L'objectif est de taille. Prenons les moyens d'atteindre nos buts et de créer une société équilibrée qui ne fera plus référence à tel ou tel modèle, mais qui, enfin, aura trouvé l'équilibre de son développement et qui répondra au maximum aux aspirations des gens qui la composent. Plus nous nous sentirons en sécurité et moins nous aurons peur d'aller de l'avant vers nos propres destinées qui nous attendent tous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laprairie.

M. Jean-Pierre Saintonge

M. Saintonge: M. le Président, comme il s'agit de ma première intervention en cette Chambre, qu'il me soit permis, suivant une coutume très honorable, de remercier sincèrement les électeurs de ma circonscription électorale du mandat qu'ils m'ont confié. Je voudrais également leur renouveler ici mon entier dévouement et les assurer de ma complète disponibilité dans la défense de leurs intérêts et de ceux de la collectivité québécoise.

Comme le permet notre règlement et vu que je ne suis pas intervenu sur le discours inaugural, je ferai porter mes premiers propos sur le comté de Laprairie. À la suite du nouveau découpage de la carte électorale, le comté de Laprairie comprend maintenant les villes de Brossard, LaPrairie, Candiac et la municipalité de Saint-Philippe. (22 h 10)

Une des priorités dans le comté de Laprairie est le réseau routier. Je me réfère particulièrement ici à la question de l'autoroute 30. Pour toute la région, il y a nécessité de prolonger et de compléter cette voie de ceinture importante pour toute la rive sud de Montréal, laquelle région n'a pas bénéficié outre mesure des largesses du gouvernement en matière d'implantation d'infrastructures. Cette autoroute 30 était une des priorités du dernier gouvernement libéral. Le gouvernement précédent a procédé à sa prolongation partielle. Il est maintenant important d'assurer sa continuité et d'en compléter la mise en place pour assurer l'essor économique complet de la région.

Cette infrastructure est tellement essentielle au développement économique de la région qu'elle a même fait l'objet d'une promesse électorale du parti ministériel. Sa nécessité a d'ailleurs été soulignée unanimement au cours des deux dernières années par les administrations municipales en place, lesquelles ont fait parvenir une résolution unanime au gouvernement requérant le parachèvement de cette autoroute 30. Également, les divers corps intermédiaires intéressés au développement économique de la réqion ont souhaité et requis formellement le prolongement et le parachèvement de cette autoroute.

Quels seront les effets de cette autoroute 30? Elle assurera le développement souhaité des divers parcs industriels des municipalités le long du réseau, ce qui aura un effet bénéfique au niveau de la fiscalité municipale en raison de la taxation. Également, cela encouragera les municipalités à la mise en oeuvre de leur dynamisme pour solliciter, développer et attirer les investissements privés sur leur territoire.

Toujours au niveau du réseau routier, il y a nécessité pour le gouvernement de voir à donner sa juste part à une partie importante du comté de Laprairie qui n'a pu bénéficier, au cours des années précédentes, des largesses du gouvernement en matière d'entretien et de construction de routes. Je veux parler ici de la municipalité de Saint-

Philippe, dont le réseau routier est dans un état lamentable.

Un autre dossier majeur qui occupe une place importante dans les préoccupations et revendications des citoyens et des administrations municipales du comté de Laprairie, c'est celui de la question de l'épuration des eaux, l'épuration du bassin de LaPrairie. Dans un battage de publicité assez important, le gouvernement précédent avait promis la dépollution du bassin de LaPrairie. On en faisait un Plattsburg québécois pour le début des années guatre-vingt. On a renouvelé cette promesse lors de la récente campagne électorale. Il est du devoir du gouvernement de remplir ses promesses à cet égard. Certes, les travaux préliminaires ont été effectués à ce jour, mais la population du comté de Laprairie mérite bien, et elle y a droit, qu'on la soulage des inconvénients odorants que cela lui apporte, qu'on la soulage également des malaises et des atteintes à son bien-être physique que cela peut occasionner et ainsi, qu'on puisse lui assurer un accès valable au fleuve et à un bassin nautique propice à un sain divertissement.

Toutefois, comme certains de mes confrères libéraux l'ont souligné en cette Chambre et lors de commissions parlementaires, il serait souhaitable que le gouvernement manifeste une transparence certaine à l'égard du financement des travaux qu'engendre la question de l'assainissement des eaux. Il nous apparaît inconcevable, et nous le répétons, qu'en cette matière les municipalités soient obligées de financer les emprunts nécessaires pour les travaux requis. Cela désavantage nettement les municipalités en raison des immobilisations nécessaires qu'elles doivent assumer, ce qui diminue et réduit en conséquence la marge de leur pouvoir d'emprunt, sans compter que le coût des emprunts qu'elles subissent taxent en quelque sorte, de façon indirecte, les subventions dont elles peuvent bénéficier à cet égard.

Demeurant dans le dossier de la fiscalité municipale, je sollicite en cette Chambre la compréhension et l'action rapide du ministre des Affaires municipales relativement à un problème sérieux occupant une partie importante de citoyens de la ville de LaPrairie ainsi que du comté de LaPrairie même. Il s'agit des citoyens du domaine La Citière, lesquels font face à de sérieuses difficultés en regard des taxes d'amélioration locale applicables au secteur de leur développement. En fait, après la refonte de la fiscalité municipale et le dépôt par la ville d'un nouveau rôle d'évaluation y faisant suite, les propriétaires concernés ont subi une augmentation d'évaluation de leur propriété et, par effet direct, le montant de leurs taxes d'amélioration locale, qui sont basées sur l'évaluation foncière dans ce cas, a augmenté de tout autant. Il s'agit d'un cas exceptionnel, car les taxes d'amélioration locale sont basées sur l'évaluation foncière au lieu du frontage ou de la superficie, comme c'est ordinairement le cas.

Les propriétaires sont ainsi fortement touchés et, comme tout le débat met également en cause la ville de Laprairie, le constructeur, le promoteur et jusqu'à un certain point la Commission municipale du Québec, les propriétaires ont sollicité l'intervention du gouvernement pour régler cette difficulté. Cette intervention a été sollicitée il y a déjà deux ans. Une demande personnelle a été adressée au ministre des Affaires municipales pour amener tous les intéressés à une solution satisfaisante et équitable pour les citoyens.

Après un tel temps, il est urgent que le ministre fasse connaître la position du gouvernement dans les meilleurs délais afin de faire cesser l'incertitude et les craintes des propriétaires en regard du fardeau que leur impose ce régime de taxation.

Un des derniers points relativement aux priorités de mon comté que j'aimerais soulever regarde la question du transport en commun. Il sera important de se pencher sur les divers problèmes auxquels la population de la rive sud a à faire face en matière de transport en commun, les problèmes administratifs au niveau de la régie interne de la commission de transport: les contribuables paient des taxes importantes et désirent au plus haut point un service correspondant à ce qu'ils paient. De nombreuses grèves, des arrêts de travail soudains et imprévus pour toutes sortes de raisons farfelues ne cessent de troubler le service donné aux usagers.

Il est donc important que le gouvernement s'apprête à régler dans les meilleurs délais les problèmes de régie interne à la Commission de transport de la rive sud. Ce que les gens veulent, ce sont des autobus qui roulent et, pour que ces autobus roulent facilement, cela prend une certaine concertation au niveau des personnes concernées.

Il y a également lieu de favoriser et de réaliser une intégration du transport en commun, transport intermodal et interzonal. Il faudrait éliminer la double taxation par l'implantation, dans les meilleurs délais, d'une passe interrive.

Finalement, il y aurait lieu de donner un service adéquat aux municipalités de Laprairie et de Candiac qui, elles, ne sont pas incluses dans le territoire de la Commission de transport de la rive sud. Ces citoyens ont droit à un service adéquat au meilleur coût, après consultation avec les gouvernements locaux pour trouver la meilleure solution efficace.

M. Dussault: M. le Président, est-ce

que le député de Laprairie me permettrait une question?

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que vous permettez une question?

M. Saintonge: Après mon intervention. M. Dussault: D'accord.

M. Saintonge: Avant de terminer mon intervention, puisque nous sommes au stade du discours sur le budget, je voudrais relever ici une des carences fondamentales que je déplore au plus haut point parmi les politiques du gouvernement péquiste. Il s'agit de la question du chômage chez les jeunes. Un taux de chômage de 16,3% en avril dernier, chez les personnes de moins de 25 ans, 118 000 chômeurs. C'est un constat d'échec vis-à-vis de toute cette nouvelle génération de travailleurs qui ne peut en tirer que frustration et désoeuvrement. À cet égard, on ne peut que déplorer certaines mesures du gouvernement qui s'avèrent dommageables à l'emploi chez les jeunes. Je parle ici du boni de chômage annoncé durant la campagne et applicable aux diplômés d'études secondaires qui auront été en chômage pour une période de six mois, une prime de 3000 $ accordée aux employeurs. Que veut-on assurer aux jeunes travailleurs dans ces circonstances? Veut-on leur assurer un minimum de six mois de chômage avant d'intégrer le marché du travail? Quelle permanence veut-on accorder à ces jeunes travailleurs? L'obligation de l'employeur ne sera que de garder à son emploi le nouveau travailleur pour une période d'un an. Est-ce qu'après l'employeur pourra bénéficier d'un autre boni en engageant un autre travailleur et en licenciant le premier?

Une autre mesure néfaste également est le règlement de placement dans la construction qui, à toutes fins utiles, empêche les jeunes travailleurs d'accumuler le nombre d'heures de travail qui leur permettrait une certaine sécurité d'emploi.

Finalement, les coupures dans l'éducation aux adultes viennent toucher directement la classe des jeunes travailleurs qui, à cet égard, doit être considérée comme une des classes les moins favorisées et les moins privilégiées dans le secteur de l'éducation. Une politique éclairée en matière d'éducation devrait plutôt conserver les avantages actuels en matière d'éducation des adultes et même favoriser davantage ce secteur pour les jeunes. La commission Jean mentionnait qu'environ 40% des jeunes ne complètent pas leurs études secondaires. C'est donc important d'assurer un accès facile pour ces jeunes à l'éducation des adultes afin qu'ils puissent compléter leur formation et réorienter leur carrière.

En terminant, M. le Président, je souhaite sincèrement que le Parti ministériel verra à prêter une oreille attentive à l'Opposition, dont les 42 députés ont recueilli 46% des suffrages exprimés. La démocratie, la mise en oeuvre d'une vraie démocratie, exige du respect et de l'ouverture d'esprit par le gouvernement pour l'Opposition représentant une partie aussi importante de la population du Québec. Vous pouvez être assurés de notre collaboration la plus entière dans les meilleurs intérêts du Québec.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay ayant utilisé l'article 100 pour poser une question au député de Laprairie, il a la parole.

M. Dussault: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier le député de Laprairie d'avoir accepté que je lui pose une question.

On sait que la CTRSM avait accepté de donner le service de transport à Laprairie et à Candiac. Il y a eu un référendum à Laprairie et les citoyens de Laprairie ont refusé le service de transport, ce qui a évidemment bloqué un service possible aux gens de Candiac ainsi qu'à certaines villes de mon comté comme Sainte-Catherine, Delson et Saint-Constant. Je voudrais savoir du député de Laprairie s'il a des indications que les citoyens de Laprairie seraient prêts à changer d'idée là-dessus, ce qui permettrait évidemment d'élargir le service?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: À cette question du député de Châteauguay, j'aimerais répondre qu'au niveau du transport il est vrai que les citoyens de Laprairie ont refusé l'intégration à la CTRS. Ce que je veux souligner ici dans mon intervention, c'est la nécessité de planifier un moyen de transport en commun, pas nécessairement au niveau de la CTRSM, mais un autre moyen qui pourrait être en vigueur suivant le rapport SECOR, ce qui permettrait entre autres l'utilisation d'un transport plus efficace, plus rapide et plus accessible, non seulement pour Laprairie mais pour Candiac et les villes du comté de mon confrère.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député. Maintenant, la parole est au député de Bourassa.

M. Patrice Laplante

M. Laplante: Merci, M. le Président. Je ne parlerai pas trop longtemps. Il y a seulement une chose que je voudrais relever dans la courte allocution du député de Laprairie, qui a parlé du chômage de 118 000 jeunes au Québec. C'est vrai, M. le Président, que c'est un chiffre astronomique,

mais il y a une raison à tout cela. Cette raison-là, pour la découvrir il faut retourner en arrière, il faut retourner dans les années 1965 de l'opération 55, ce qu'on a appelé l'opération Gérin-Lajoie. À ce moment-là, le gouvernement avait décidé de construire des polyvalentes, à des coûts astronomiques, partout en province. Ces écoles, par leurs commissions scolaires, voulaient chacune un monopole dans le secteur des métiers, si bien qu'on a développé dans ces écoles des métiers tels que la menuiserie, la tôlerie et même la coiffure, d'autres dans certaines offraient le cours de tailleur, et différents autres métiers. On a aussi décidé, à ce moment-là, pour les jeunes qui continuaient leurs études soit au niveau collégial ou au niveau universitaire, de développer des spécialités chez les professeurs. On a rempli le marché de ce genre de travailleurs, si bien qu'aujourd'hui, aucune de ces écoles n'a voulu se recycler. Par exemple, on va prendre le secteur des électriciens dans l'éducation aux adultes. On a formé, à l'éducation aux adultes et chez les jeunes près de 8000 personnes, alors qu'on savait que, dans une année, il y avait de la place pour 120. Il serait temps, je crois, de faire une révision complète avec les commissions scolaires, de jouer un rôle à l'intérieur des polyvalentes, des cégeps, et de repenser tout le secteur professionnel, de l'adapter à la réalité d'aujourd'hui.

C'est anormal qu'aujourd'hui, dans une ville comme Montréal, on forme environ 160 machinistes dans une année et qu'on soit obligé d'en importer près de 1800, quand on sait que Canadair et Pratt & Whitney ont besoin de cette main-d'oeuvre. C'est pour cela qu'il y a du chômage chez nos jeunes aujourd'hui. On leur a fait accroire que, dans les métiers qu'ils apprendraient, ils auraient des bonnes "jobs" en sortant. La vérité a été tout autre. On ne peut pas refaire en quatre ans un système d'éducation qui a été faussé au départ, parce qu'il manquait de statistiques pour l'avenir sur les métiers qui pourraient se développer au Québec. Aujourd'hui, on paie le prix d'une mauvaise planification. On sait qu'il manque aujourd'hui environ 5000 travailleurs seulement dans le secteur de l'aéronautique. Qu'est-ce qu'on fait pour cela? Aucune école encore n'y a pensé par ses programmes, par les commissions scolaires. Lorsqu'on parle d'autonomie des commissions scolaires, on devrait inventorier des programmes pour justement développer cette catégorie d'emplois.

M. le Président, il n'est pas facile pour nous, comme députés ministériels, de parler de budget, lorsqu'on a un programme social-démocrate et qu'aujourd'hui, on est obligé de dire aux citoyens qu'on doit mettre un frein dans les dépenses publiques. Dans ce budget, nous avons eu à choisir entre des compressions budgétaires et augmenter un déficit, ou augmenter les impôts. Le gouvernement a donc choisi la solution qui était la compression budgétaire, ce qui veut dire, en somme, le ralentissement des programmes existants et la suppression de nouveaux programmes. Cela signifie aussi que l'expansion des services sera encore au ralenti pour toute l'année.

Comme je vous le disais au début, nous avions un choix à faire et nous l'avons fait. Nous n'avons pas hésité à déposer un budget une semaine avant le déclenchement des élections pour qu'il puisse être discuté sur la place publique avec tous les partis politiques, avec tous les organismes intéressés que les restrictions budgétaires pouvaient toucher. On a eu la réponse le 13 avril. Mais il serait trop facile pour moi de m'appuyer sur ce résultat du 13 avril pour expliquer le budget actuel. Mais là où il faudrait s'en tenir, c'est de faire un petit retour en arrière, dans les années 1970 à 1976, au temps de l'abondance, au temps où ce gouvernement prenait les impôts complets du Québec sans indexation, au temps où on faisait des budgets très larges avec augmentation des dépenses de 18% à 25%, sans s'occuper du citoyen au point de vue de dégrèvement d'impôt. On n'a jamais fait cela. Si bien que ces budgets ont amené des programmes nouveaux. Cela a amené aussi le grossissement de la fonction publique. J'entendais le député de Jean-Talon nous dire: Nous autres, le plein emploi au Québec existait parmi les finissants des universités; on les engageait tous au gouvernement. C'est vrai qu'on les engageait tous, si bien qu'aujourd'hui la fonction publique s'en ressent. Comme seul exemple, prenons le ministère de l'Éducation. Les autres ministères, si on les compare au ministère de l'Éducation, je suis certain qu'il y a un équilibre qui peut se faire. Lorsqu'on dit qu'il y a environ 2800 employés pour administrer l'éducation au Québec, au niveau gouvernemental seulement, lorsqu'on se compare à la Belgique qui, avec une population de près de 12 000 000 d'habitants, n'a que 328 personnes pour administrer l'éducation, c'est à faire réfléchir. On se demande ce qui se passe dans les gouvernements d'aujourd'hui quant aux dépenses et à l'engagement du personnel. Quel que soit le gouvernement, il faut qu'on y réfléchisse et qu'on analyse la situation. Aucun gouvernement ne peut actuellement suffire à de telles dépenses. (22 h 30)

Allons dans le domaine des écoles. On va comparer les infrastructures de la ville de Montréal, parce que j'y habite, au point de vue scolaire. On a construit des écoles, des écoles de 17 et 20 ans aujourd'hui, que nous sommes dans l'obligation de fermer à cause d'un manque de population. Il n'y a pas que

l'aspect de la dénatalité qui a joué là-dedans, il y a aussi tout ce que les citoyens ont laissé quand ils ont fait l'exode de la ville de Montréal pour aller vivre en banlieue; il existait des milliards d'infrastructures. Aujourd'hui, on ferme une école à Montréal pour en reconstruire une autre à Repentigny, pour en reconstruire une autre à Mascouche, en reconstruire une autre à Longueuil.

Mais les établissements qu'on a actuellement sur le territoire de Montréal, qu'est-ce qu'on en fait? On les ferme tout bonnement pour aller dépenser 3 000 000 $, 4 000 000 $, 5 000 000 $; aujourd'hui, une polyvalente peut facilement coûter jusqu'à 20 000 000 $ et 30 000 000 $. Il faudra réfléchir au problème des gens qui quittent ces grands centres comme Montréal et comme Québec; ne serait-il pas préférable de laisser ces écoles ouvertes et d'établir un transport scolaire? Souventefois, les distances sont minimes, ce peut être un mille, deux milles, trois milles de ces établissements. Combien de millions pourraient être épargnés à ce moment-là? Il faudra que la population comprenne à un moment donné que tous les services que d'autres générations ont payés dans des grands centres comme Montréal doivent servir un jour. II faudra absolument vivre selon nos moyens. Si on se paie encore des millions et des millions d'investissements dans ces infrastructures, dans les banlieues où on ira, les municipalités seront obligées d'augmenter les impôts, les villes seront obligées d'augmenter les impôts elles aussi et cela aura une suite dans la vie quotidienne à partir du transport, à partir du logement.

Lorsqu'une ville est prête, en infrastructures, à recevoir 2 000 000 d'habitants et qu'elle n'en reçoit que 800 000 pour y habiter, les structures sont là, il faudra les employer. C'est dans ce sens qu'on parle de repeupler toutes ces grandes villes; mais pour ce faire, il faudra aussi leur donner le goût d'y vivre, il faudra développer les parcs de ces villes, il faudra dépolluer nos cours d'eau, il faudra redonner à Montréal et sa banlieue les plages auxquelles elles ont droit, il faudrait les rouvrir, à un moment donné. C'est un autre sacrifice qui sera demandé encore une fois à la population. Par contre, par la rénovation des logements qui est commencée et qui va très bien depuis quelques années, nous espérons en venir justement à ces objectifs.

J'entends déjà l'Opposition dire au gouvernement: Qu'est-ce que vous avez fait dans les années passées avec tout cet argent? C'est sûr, elle a le droit de se poser des questions, mais on a aussi le droit de dire à la population que les impôts ont baissé, qu'il y a eu beaucoup de programmes qui ont été faits au niveau des personnes âgées à partir des ambulances gratuites jusqu'à Logirente. Vous avez eu l'abolition de la taxe de vente. Vous avez, en plus des ambulances, les médicaments gratuits. Vous avez eu, après ça, les suppléments au logement et combien d'autres programmes encore qui ont été donnés à la population. Cela représente sûrement les 3 000 000 000 $ de déficit qu'aujourd'hui on cite. Mais il faudra que l'Opposition, par exemple, sache ce qu'elle veut dans un budget, absolument. On ne peut pas continuer à discuter d'un bord à l'autre de la Chambre alors que l'Opposition nous dit: Mais, vous comprimez trop, dépensez là, dépensez ici. Tel programme, vous devriez le mettre en marche. On critique à peu près sur toutes les coupures qu'il peut y avoir. Mais, par contre, on nous dit aussi: Votre budget, votre déficit de 3 000 000 000 $, c'est épouvantable. Mais il va falloir qu'ils accordent leurs violons, à un moment donné, et nous dire ce qu'ils préfèrent.

En même temps, on ne veut pas qu'on augmente les impôts. C'est une tour de Babel pour eux autres. Il va falloir qu'ils nous disent aussi pourquoi le budget du Québec, aujourd'hui en 1981, prend 52% des dépenses du Québec en salaires. Ce sont des dépenses du Québec, mais lorsqu'on parle des revenus du Québec, par exemple, c'est 61% des revenus qui passent en salaires. II faudra leur poser la question: Qui a acheté, en 1976, la paix publique dans les négociations avec des augmentations de salaires de 30%? Il faudra revenir sur ça aussi. Lorsqu'on veut parler de l'économie du Québec, on ne peut pas parler de l'économie, nous autres, à partir de 1976. Il faut faire un retour. Souvenez-vous, M. le Président, qu'en 1976, lorsque M. Parizeau a été assermenté comme ministre des Finances, la première chose, le premier acte officiel qu'il a posé a été d'aller emprunter 50 000 000 $ dans les fonds de retraite des employés. Ce n'est pas loin, 1976. C'est lorsqu'on est arrivé là.

Il faut dire aussi que M. Parizeau, lorsqu'il a pris connaissance des comptes publics du Québec en 1976, deuxième grande action qu'il a faite, a découvert qu'il restait sur la table 500 000 000 $ de comptes non payés, de factures. Il faut dire ces choses là aussi. Ce sont les raisons du budget qu'on a aujourd'hui. C'est pour cela qu'on est obligé aujourd'hui de restreindre les dépenses un peu partout, d'essayer de se serrer la ceinture. C'est pourquoi notre programme à nous autres, social-démocrates, connaît un ralentissement aujourd'hui. C'est avec peine qu'on l'a fait. On espère qu'avec les années, un an, deux ans, trois ans dans le plus, on pourra prendre cet élan, nous autres, qu'on s'était donné: un Québec meilleur pour chacun des citoyens, que chaque citoyen puisse trouver sa part à l'intérieur de ce Québec, où il ferait bon vivre avec sa famille.

On essaie de développer des

programmes de la revalorisation de cette famille aujourd'hui. Pas un seul parti politique, même le nôtre au début, n'en parlait. Si je regarde depuis 1970 où je lis, le journal des Débats, jamais il n'était question de la famille, de la revalorisation de la famille. Pour une fois, vous avez un gouvernement qui s'occupe de la famille, qui s'en occupe actuellement. Mais l'Opposition essaie de tourner cela en ridicule. Ses députés essaient de tourner cela en ridicule parce qu'ils n'y croient peut-être plus, à cette famille, eux autres, parce que, sous leur régime à eux, il n'y a jamais eu de politique familiale. La seule qu'ils auraient pu sortir, à un moment donné, cela aurait été dans les garderies. Mme la députée de Chomedey avait une politique cohérente pour les garderies, mais cela a été refusé, par exemple, par ses collègues. C'est ce qui est arrivé. C'est le seul élan qu'il aurait pu y avoir à ce moment. (22 h 40)

Pour toutes ces raisons, M. le Président, on fait appel, nous, à chaque Québécois, à la conscience de chacun de ces Québécois, d'essayer tant au point de vue de visites de médecins, tant au point de vue du médecin professionnel lui-même, arriver... Un exemple que personne n'a été capable de nier. Je m'en suis servi à plusieurs reprises. Lorsqu'une personne âgée va voir son médecin, le médecin l'examine et dit: Oui. Il lui fait une ordonnance de 60 pilules de telle sorte. Il lui dit: Va-t-en chez vous. Tu me rappelles dans trois jours pour voir quel effet peuvent faire tes médicaments. Trois jours après, la personne âgée appelle son médecin et lui dit: J'ai des problèmes avec cela, des troubles de vision, il me semble que cela ne fonctionne pas, ces médicaments. Il lui répond tout bonnement: Prends ta bouteille, verse-la dans l'évier et j'appelle ton pharmacien pour t'en donner une autre sorte. Ce sont des millions qui partent comme cela. Il faut faire appel actuellement à chacune des classes sociales du Québec pour essayer de comprendre que le gaspillage a ses limites. On est rendu à cette limite-là actuellement. Je serais même, M. le Président, à aller jusqu'à proposer le carnet médical. Je serais prêt à aller jusque-là. Dans le carnet médical, on pourrait avoir la date de la visite de tel médecin, la date d'une telle prescription, pas des maladies, mais seulement faire suivre, en somme, les dépenses qu'il peut y avoir au niveau d'une société là-dedans. Je serais prêt à aller jusque-là pour essayer d'avoir un contrôle.

Lorsque le président de la Régie de l'assurance-maladie dit à un moment donné: II n'y a rien là, quelques étrangers qui viennent se faire soigner ici. Un nous dit que cela coûte 50 000 000 $ et un autre nous dit que cela coûte 30 000 000 $. Il n'y a rien là, mais on en est rendu à ce niveau, dire qu'il n'y a rien là, on parle de millions de deniers publics, il n'y a rien là sur l'abus des médicaments, il n'y a rien là sur le doublement des visites au médecin, parce que je connais des gens qui sont allés voir cinq médecins dans une semaine.

Monsieur, c'est sérieux ce dont je parle. Dans Mégantic-Compton, vous n'avez pas ces problèmes? Vous êtes chanceux, parce que quand on parle de dépense des deniers publics, vous apprendrez, M. le député, que c'est important à ce moment-ci.

C'est là-dessus que je proposerais, M. le Président, ce carnet médical. Je souhaite ardemment que la population du Québec soit sensibilisée chaque fois qu'elle prend un médicament, chaque fois qu'elle rend visite au médecin, chaque fois qu'elle va au service d'urgence dans un hôpital, pour essayer de se rationner elle-même avant que l'État, à un moment donné, soit obligé d'imposer des restrictions, ce qui n'est pas toujours plaisant. C'est avec ces souhaits que je termine et j'espère qu'avec le prochain budget nous continuerons notre politique social-démocrate. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: M. le Président, avant de vous entretenir du budget 1981-1982 du gouvernement du Québec, avant de vous entretenir de ce budget que le ministre Parizeau aurait facilement pu titrer L'indépendance à crédit, j'aimerais vous faire part si, de l'autre côté de la Chambre, on peut en revenir à des choses sérieuses, de la raison de mon absence en Chambre aujourd'hui.

Comme vous le savez sans doute, M. Glendon Brown, qui a représenté le comté de Brome et par la suite le comté de Brome-Missisquoi dans cette Chambre pendant 20 ans, est décédé samedi dernier. Il a été enterré cet après-midi. Je me suis déplacé pour me rendre au service funéraire pour dire à la famille la sympathie qu'éprouvent la présidence de cette Chambre de même que tous les collègues qui l'ont connu de l'autre côté de la Chambre comme de ce côté-ci. Tous ceux qui ont siégé dans cette Chambre peuvent comprendre ce que représentent vingt ans d'efforts et de dévouement au service d'une population, au service d'un comté. M. Brown a rendu ces services de façon impressionnante et, aujourd'hui, c'est la population de l'ensemble du Québec qui se joint à celle de Brome-Missisquoi pour offrir à cette famille éprouvée ses sympathies les plus sincères et les plus profondes.

M. le Président, pour revenir au budget pour 1981-1982 que nous a présenté le

ministre des Finances un peu à la sauvette, à la veille des élections, sans donner le temps à cette Chambre d'en discuter, sans permettre à l'Opposition d'apporter, par l'intermédiaire de cette Chambre, toutes les lumières requises sur ce budget, il est important d'en souligner - je sais que vous apprécierez la teneur de ces arguments parce que vous venez vous-même d'une région rurale - les principaux aspects qui atteignent ces régions rurales au plus vif. Ce sont des coupures qu'on a imposées dans ces régions et elles n'ont pas été limitées au gras.

Pendant qu'on en parle, j'aimerais parler du ministère de l'Agriculture et de son titulaire. Au ministère de l'Agriculture, on a entendu, au cours des quatre dernières années, le ministre Garon nous déclarer qu'il fallait investir en agriculture pour l'autosuffisance alimentaire du Québec. On va même voir le ministre lancer dans quelques semaines, à grand renfort de propagande, comme c'est l'habitude de ce gouvernement, un volume qui va s'appeler Nourrir le Québec. Pendant que le ministre va nous parler de Nourrir le Québec, pendant qu'on va faire de la propagande, on va s'attarder quelques instants sur ce qui va arriver aux agriculteurs sur nos fermes au cours de l'année qui vient, au cours du mandat de ce ministre.

On va regarder le budget de 1981-1982 du ministère de l'Agriculture, au programme Aide à la production agricole, on va se demander ce qu'est le développement pour le ministre de l'Agriculture et que veut dire le mot investissement. Pour se placer dans le contexte, l'an passé, on avait un budget, à l'aide à la production agricole, de 132 947 600 $. Cette année, on a un budget de 121 647 500 $, une diminution de 11 300 100 $. C'est cela, cheminer vers l'autosuffisance agro-alimentaire; c'est cela, investir dans la production agricole.

Le ministre, en coupant 11 300 000 $ à l'aide à la production, a été logique avec lui-même. Si on doit diminuer la production, on est aussi bien, en même temps, de couper dans l'aide à la commercialisation. Si on n'a plus de produits, on n'a plus besoin de gens pour les vendre. Il a été conséquent. D'un budget de 47 807 700 $ en 1980-1981, cette année, 1981-1982, on tombe à 46 955 700 $, une diminution de 852 000 $. Moins de production, moins de commercialisation, et un ministre qui nous dit: Plus d'autosuffisance. Il doit certainement y avoir une contradiction quelque part dans ce gouvernement.

M. le Président, si vous pouvez retenir le caquetage, des poules de l'autre côté, on va pouvoir continuer et voir, au niveau de l'aide à la production, quels sont les principaux éléments qui sont coupés. Les principaux éléments, tout le programme des silos à la ferme. Le ministre va nous déclarer: Écoutez, c'est le fédéral qui a coupé cela. Tout au long de l'année dernière, il disait à cette Chambre: Regardez tous les silos que j'aide à construire. (22 h 50)

Le ministre, encore une fois, devrait être un peu conséquent avec lui-même. Ce qui va arriver aux agriculteurs cette année, c'est qu'ils n'auront pas de programme d'aide à la construction de silos de ferme. Quant à continuer dans les coupures, quant à couper dans ce que le ministre appelle encore le "gros" et qu'on se plaît à appeler le "gras" de l'autre côté, on a aboli la subvention au creusage de puits. Cela ne crée pas de gras chez personne, le creusage de puits. Pour faire fonctionner une ferme, cela prend de l'eau, et pour avoir de l'eau, à la campagne, parce qu'on n'a pas d'aqueducs municipaux subventionnés à 90% par le gouvernement, cela prend un puits; creuser un puits, cela coûte cher et, quand on abolit la subvention, on coupe dans ce qu'il y a de plus élémentaire, on coupe dans l'eau sur la ferme.

On a également coupé, quant à couper, sur la chaux. On a coupé dans le drainage agricole. On se souviendra des représentations que le ministre a faites dans cette Chambre au moment où il a introduit sa fameuse Loi sur le zonage agricole. Plusieurs personnes réclamaient, même des députés de l'autre côté de la Chambre, des indemnisations pour les agriculteurs à qui on enlevait le droit de disposer librement de leur propriété. Mais on s'est dit: Ils vont obtenir des indemnisations collectivement, on va augmenter les subventions, on va les aider à drainer les terres, on va leur creuser des puits. Les cultivateurs, les agriculteurs du Québec sont à même de constater, dans ce budget, qu'il s'agissait, encore une fois, d'un emballage, d'une envolée "aratoire" du ministre de l'Agriculture et que, comme conséquence, ils ont récolté, dans tous ces postes budgétaires, des coupures dans le plus vif.

M. le Président, le député et porte-parole de l'Opposition en matière d'agriculture, le député de Beauce-Sud, a soulevé les problèmes au fur et à mesure qu'ils sont survenus dans cette première session. Cela ne fait pas tellement longtemps qu'on siège depuis les élections. On a entendu dire que cela allait mal dans le sirop d'érable au Québec. On a entendu dire que le ministre, d'une façon complètement insensée, a, sans aucune planification, incité les producteurs à investir dans la tubulure. Ils se ramassent maintenant avec des surplus impressionnants. Le ministre n'a pas vu - on serait porté à dire plus loin que son nez, mais, dans son cas, on va lui donner une marge de vision plus grande - plus loin que son tour de taille. Il n'a pas vu qu'après la production, il fallait vendre. Il n'a rien prévu

au niveau de la mise en marché. Et aujourd'hui, ce sont les producteurs qui supportent ces inventaires avec des taux d'intérêts, comme vous le savez, à plus de 20%. Ils reçoivent présentement ou ils vont recevoir dans les prochains jours une subvention du fédéral pour les aider au niveau de ces entreposages.

M. le Président, le député de Beauce-Sud s'est levé en Chambre et a dénoncé la situation dans laquelle se trouvaient les producteurs de porcs au Québec, qui ont été incités par le ministre, par la Société du crédit aqricole, par les représentants du gouvernement, à investir massivement dans des moyens de production. Les travailleurs agricoles ont fait confiance à ce gouvernement. Lorsque les problèmes de marché sont arrivés, il n'était plus là. Le ministre était parti. Il n'y avait pas de problème, il venait nous dire en Chambre que tout allait bien. N'eût été de l'intervention du gouvernement fédéral, l'an passé, dans le dossier du porc - j'entends des rires de péquistes, le député d'Iberville...

M. Beauséjour: M. le Président, une question de privilège.

Si le député de Brome-Missisquoi n'a pas ses lunettes, qu'il vérifie, je ne riais absolument pas.

M. Paradis: Cela me rassure.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Cela me rassure qu'il ne trouve pas cela drôle. Il y en avait un, dans son entourage, qui trouvait cela drôle, qu'il le renseigne. L'an passé, le fédéral a donné 4,36 $ le porc aux finisseurs et 1 $ aux naisseurs, et cette année, il donne 8,96 $ aux finisseurs. Qu'a fait le ministre de l'Agriculture de l'autre côté? Hier, à l'étude, en commission parlementaire, des crédits du ministère de l'Agriculture, on lui a demandé: Quand allez-vous arrêter de vous chicaner? Quand allez-vous arrêter de passer des programmes qui peuvent créer la chicane entre les deux niveaux de gouvernement? Quand allez-vous cesser d'imaginer un programme provincial qui déduit le fédéral pour provoquer le fédéral à concevoir un programme fédéral qui déduit le provincial et à jouer sur le dos des agriculteurs du Québec? Quand allez-vous finalement aller à Ottawa vous asseoir sérieusement et négocier pour le bien-être des producteurs du Québec un programme provincial complémentaire au programme fédéral? Quand allez-vous avoir l'honnêteté de faire cela? Le ministre nous a dit que peut-être cet été, peut-être à la prochaine conférence fédérale-provinciale, il en parlera peut-être. J'invite les producteurs agricoles, j'invite les députés des comtés ruraux de l'autre côté à s'assurer, pour le bien-être des producteurs agricoles, que le ministre fasse ces démarches dans le sens d'avoir des programmes complémentaires. Au lieu d'avoir des chèques qui se déchirent en deux sur le dos des producteurs, avoir des chèques complémentaires du fédéral et du provincial pour les producteurs.

M. le Président, le ministre de l'Agriculture nous dit: Tout va bien dans cette Chambre, tout va bien. Hier soir, lors de l'étude de ses crédits, il y avait une cinguantaine de producteurs de pommes, des représentants de la Fédération des producteurs de pommes du Québec. Le ministre ne nous en avait pas parlé. On pensait que cela allait bien, nous aussi, dans les pommes. Mais on s'est aperçu que le ministre était à la fois dans les pommes et dans les patates, parce qu'il n'y a rien qui marchait et il n'y a rien qui fonctionnait. Les producteurs de pommes se sont fait prendre au piège par le ministre, spécialement ceux de la région de Franklin-Centre dans le comté de Huntingdon.

Sur la foi de l'implication de SOQUIA, la Société québécoise d'initiative agro-alimentaire, avec une compagnie privée, ils ont fait confiance à cette entreprise, ils ont fait confiance à la société, ils ont fait confiance au ministre et ils ont livré leur récolte à la fin de l'année pour se rendre compte, au cours de l'hiver, que Leahy et Fils - c'est le nom de cette compagnie -était en liquidation et qu'ils ne recevraient pas de paiement pour leurs pommes. La confiance aveugle qu'ils avaient mise dans le ministre de l'Agriculture a été trahie. Jamais, ces producteurs n'ont été informés par le ministre ou par la société d'État qu'il y avait danger de liquidation. Pour un producteur de pommes...

M. Laplante: M. le Président. Est-ce que je dois comprendre que le député de Beauce-Sud a perdu les dossiers de l'agriculture?

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse; le député de Brome-Missisquoi, s'il vous plaît.

M. Paradis: M. le Président, vous me permettrez brièvement de conseiller à mon confrère de vérifier son carnet de visites chez le médecin et de s'en prévoir une immédiatement. Vous comprendrez facilement, M. le Président, que les producteurs agricoles et les fermes familiales qui sont allés livrer leur production pour des montants de l'importance suivante - je peux donner des noms: Verger Allard, 19 362 $; Jacques Bastien, 33 514 $; Réal Caron, 26 134,50 $; Denis Roy, 16 298 $, Arthur Dauphinais, 11 160 $ etc. - se sont retrouvés, dès cette année-là, dans une

situation financière précaire à cause de l'incurie du ministre de l'Agriculture. Vous comprendrez également, parce que vous êtes un agriculteur de la région de Sherbrooke, que le marché des pommes l'an passé n'a pas rapporté aux producteurs des revenus suffisants pour leur permettre d'en assumer le coût de production. Vous comprendrez qu'à la suite de cette année, ils se sont retrouvés dans une situation de liquidité incroyable. Ils se sont retrouvés serrés à la gorge par les institutions financières et, encore une fois, le ministre n'est pas intervenu malgré les nombreux mémoires déposés par la fédération.

Mais, il y a pire, M. le Président. Il y a pire parce qu'avec l'hiver, avec les gels qu'on a connus au cours du mois de janvier, l'ensemble des pommiers du Québec - et on sait combien on est autosuffisants dans la production des fruits au Québec - a été attaqué par la gelée. Les 17 et 18 mai de cette année, alors qu'ils étaient en floraison, une autre gelée s'en est prise à ces pommiers et 90% de la récolte de cette année est compromise. Ce gel a également attaqué les arbres et, présentement, à peu près 15% des arbres, des pommiers du Québec sont morts et, au cours des prochaines années, à la suite de ces gels, il en mourra davantage. Ce que ces producteurs demandent au ministre de l'Agriculture, c'est d'avoir le coeur à la bonne place et d'intervenir. La seule réponse qu'ils ont pu obtenir du ministre de l'Agriculture, hier soir, lors de l'étude des crédits, c'est qu'il y a une assurance agricole qui existe, une assurance sur les revenus. (23 heures)

M. le Président, lorsqu'on a demandé au ministre combien de producteurs étaient assurés, il a été obligé d'admettre qu'à peine 10%, soit 115 des 1100 pomiculteurs du Québec, étaient couverts par cette assurance. On lui a alors demandé d'enquêter pour savoir si les polices d'assurance qu'il offrait aux producteurs agricoles n'étaient pas valables, si c'étaient ses fonctionnaires vendeurs d'assurances qui avaient mal fait leur travail ou si c'étaient de mauvais pomiculteurs qu'on avait dans la province de Québec. Devant le refus de répondre du ministre, on a été obligé d'ajouter un quatrième considérant. On a été obligé de demander quel genre de ministre de l'Agriculture on avait.

M. le Président, je réclame au nom de l'Opposition l'intervention du ministre de l'Agriculture dans ce dossier pour l'ensemble des pomiculteurs du Québec et j'ose croire que les coupures tellement vantées par le parti ministériel ne feront pas en sorte qu'au niveau de la pomiculture, on perde ce qu'on a dans cette province, qu'on perde nos 1100 fermes qui en produisent, parce que je ne pense pas qu'on se dirigerait vers une autosuffisance dans ce dossier si le ministre abandonnait cruellement ces producteurs.

Il y a davantage, M. le ministre. Chaque fois qu'on se lance dans une campagne électorale, à chacun des programmes de chacune des formations politiques, on retrouve, en tête de liste, la relève agricole. On retrouve la relève agricole comme l'élément qu'on va privilégier. Ce qui m'inquiète, M. le ministre - M. le Président, excusez-moi... Cela vient de celui qui a passé proche de... Non.

Je m'excuse, M. le Président. Ce qui m'inquiète, M. le Président, c'est de constater que, dans des productions agricoles où on n'a pas encore atteint l'autosuffisance, surtout la production des oeufs au Québec, on a à peine 3% de relève agricole suivant les relevés de l'Office du crédit agricole. Je me demande s'il y a un lien entre les déclarations ministérielles qu'on entend en cette Chambre et la pratique qui se vit dans le champ.

M. le Président, non seulement a-t-on abandonné du côté ministériel l'objectif de l'autosuffisance agricole, non seulement a-ton coupé de façon draconienne dans les budgets d'aide à la production et à la commercialisation des produits agricoles, mais il y a davantage. On a stoppé dans des domaines de production toute évolution pour les années à venir et on parle du domaine de la production du porc dans les régions où cela fonctionnait bien. Le ministre de l'Environnement, devant un constat d'échec des politiques de son ministère, a décidé de décréter un moratoire de trois ans à l'établissement de nouvelles porcheries. On s'en va encore une fois vers l'autosuffisance, mais à reculons. Où va-t-on aboutir avec cela?

Le ministre de l'Environnement a déclaré un moratoire afin de protéger les cours d'eau du Québec. L'Opposition partage son désir de conservation des cours d'eau du Québec, mais ne comprend pas qu'en même temps qu'il déclare ce moratoire, tout ce qu'il trouve à consacrer à la recherche d'une solution technique pour le traitement du purin, ce soit une somme de 675 000 $ répartie sur trois ans. Ce que le ministre fait à ce moment-là, sans doute en complicité avec le ministre de l'Agriculture, c'est de mettre tout simplement un frein à l'évolution de la production agricole vers laquelle 22% de la relève s'est dirigée l'an dernier. Où va se diriger cette relève cette année avec le moratoire du ministre de l'Environnement qui, au lieu d'investir dans la recherche de techniques qui permettraient de préserver nos cours d'eau, choisit de mettre un frein, de nommer plus d'inspecteurs à coups de bâton... C'est là que les budgets s'en vont, on passe les budgets de la recherche à l'engagement de fonctionnaires et d'inspecteurs pour contrer

la production.

Dans une région rurale, bien sûr, il y a l'agriculture, mais il y a aussi tout le réseau routier. Provenant vous-même d'un comté rural, M. le Président, vous savez combien les coupures draconiennes imposées par ce gouvernement au niveau du réseau routier vont affecter nos régions rurales. 26 505 300 $ de coupures au niveau de nos routes principales, de nos routes régionales et de la construction d'autres routes. Une légère augmentation dans la construction d'autoroutes. J'ai un petit message pour le ministre des Transports. Si, à partir de nos régions rurales, on veut se rendre à l'autoroute, ça nous prend des chemins; on lui demande bien simplement de consacrer les budgets nécessaires à la construction de ces routes régionales et locales.

Dans mon propre comté, au cours du mois de février et du mois de mars - sans doute est-ce arrivé dans votre comté aussi -j'ai été témoin de la saison du dégel et des conséquences qu'ont dû vivre les gens qui demeurent sur les routes rurales. Vous avez dû, comme moi, constater l'état de défoncement de ces routes. Cela n'a jamais été vu depuis le début du siècle, même au temps où on se promenait en calèche. Les routes étaient dans un tel état que les gens n'avaient plus accès à leur propriété. Les camions de moulée ne pouvaient plus se rendre sur les fermes pour livrer le grain, les camions qui ramassent le lait ne pouvaient plus aller le chercher; en cas de calamité, les services d'incendie n'avaient plus accès à ces propriétés; en cas de maladie, les services ambulanciers n'avaient plus accès à ces endroits.

Lorsqu'on coupe dans le circuit routier et qu'on coupe dans des routes qui deviennent impraticables durant certaines saisons de l'année, on ne coupe pas dans le gras, on coupe dans ce qu'il y a de plus vital dans notre économie.

On coupe dans le transport, on coupe également dans l'éducation. Cela fait trois semaines qu'on est ici et ça fait trois ou quatre manifestations qu'on a devant cette Assemblée nationale: le secteur public de l'éducation est venu manifester, les services ambulanciers sont venus manifester devant cette Assemblée nationale - et il fallait être sourd pour ne pas les entendre - et, la semaine dernière et au cours de cette semaine, c'étaient les parents et les enfants qui fréquentent les écoles privées. Ces gens sont venus réclamer du gouvernement un libre choix pour envoyer leurs enfants à l'école de leur choix et que ce choix soit accessible à l'ensemble de la population, aux travailleurs non syndiqués, aux travailleurs syndiqués, aux médecins, aux ministres, aux députés, à tout le monde. La réponse qu'on a du gouvernement à ce jour, c'est qu'on veut faire de l'école privée une école accessible strictement aux gens qui ont de l'argent, à une élite, à nos petits amis de l'autre côté. On ne lâchera pas ce dossier non plus, M. le Président.

Lorsqu'on a coupé dans ce qu'on appelle le gras, on a coupé également onze écoles privées d'enseignement à l'enfance inadaptée, sans se demander pourquoi ces écoles existaient, sans se demander qui référait ces enfants aux écoles privées d'enseignement à l'enfance inadaptée. Ces enfants sont envoyés par le système scolaire public qui ne peut les accueillir, qui n'a pas les moyens, qui n'a pas les cadres pour les accueillir. Ces enfants sont également dirigés à ces écoles par les travailleurs sociaux, par le Protecteur du citoyen, ils sont dirigés par des gens qui s'occupent de l'enfance inadaptée. Lorsqu'on en est rendu à couper pour s'attaquer aux plus démunis de la société, je me demande où s'en va cette pseudo-social-démocratie.

M. Laplante: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilèqe.

M. Laplante: M. le député induit la Chambre en erreur parce que c'est le seul secteur où il n'y a pas eu de compressions budgétaires. Il faut dire ces choses, il ne faut pas être démagogue comme l'est le député de Brome-Missisquoi actuellement.

M. Paradis: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Paradis: Si le député de Bourassa veut intervenir, il peut utiliser l'article 100. Il ne s'agit pas d'une question de privilège. Je pensais que, depuis le temps qu'il était ici, il connaissait son règlement. S'il ne connaît pas plus les faits que son règlement, on sait pourquoi il ne comprend pas.

Le Vice-Président (M. Rancourt): J'aimerais solliciter la collaboration des deux côtés de la Chambre pour permettre au député de Brome-Missisquoi de terminer son intervention, s'il vous plaît. (23 h 10)

M. Paradis: Très juste décision, M. le Président, dont je vous remercie, sur l'interprétation du règlement de la Chambre.

Il y a un élément dont j'ai parlé dès ma réplique sur le discours inaugural en cette Chambre et c'était la fameuse taxe sur les chèques de paie des employés imposée par le budget Parizeau, une nouvelle méthode de taxation des travailleurs des usines du Québec. Le gouvernement a tellement peu confiance que l'entreprise évolue dans le climat économique qu'il a

créé au cours des quatre dernières années dans cette province qu'il ne veut plus taxer les profits. Il veut taxer les "payrolls", comme on les appelle dans les entreprises, les chèques de paie, les listes de paie. Il fait passer de 1,5% a 3% la retenue de l'employeur sur le chèque de paie de l'employé. Qu'est-ce que cela a comme conséquence sur les PME et sur les entreprises de nos comtés? Pour une entreprise, une PME de 11 employés, cela a comme conséquence d'imposer 187 $ par mois additionnels ou 2244 $ par année. Pour une entreprise de 42 employés - vous en avez plusieurs dans votre comté, M. le Président - cela veut dire 1200 $ par mois additionnels, soit 14 400 $ par année. Pour une entreprise de 500 employés - on en a tous quelques-unes dans nos comtés - cela veut dire 11 000 $ par mois, 132 000 $ par année.

Cela veut dire que ces entreprises, parce qu'on taxe le chèque de paie de l'employé, vont être incitées à s'automatiser, vont être incitées à laisser tomber une main-d'oeuvre travaillante qui est taxée, pour aller se mécaniser et déduire de l'impôt la machinerie qu'elles achètent. Avec 302 000 chômeurs au Québec, combien va-t-on en avoir après que le gouvernement aura mis en application cette mesure de taxation des chèques de paie des employés, des travailleurs du Québec?

Je savais, M. le Président, qu'il me restait au moins deux minutes. Le miracle de ce budget, c'est d'avoir en même temps augmenté le déficit et coupé dans les services essentiels. Cela relève du fantastique. Si on me disait: Écoutez, on a coupé les dépenses, on a coupé dans le gras pour diminuer le déficit, je pourrais peut-être comprendre qu'il y a quelqu'un qui s'est servi de ce qu'on appelle un jugement de l'autre côté de la Chambre. Mais on me dit: Écoute, toi, le député de Brome-Missisquoi, tu vas voter sur un budget où à la fois on augmente le déficit et on coupe les dépenses, on coupe dans les services essentiels. M. le Président, jusque-là, je ne suis pas trop incité à voter en faveur, mais il y a davantage, c'est le rapport du Vérificateur général du Québec. En plus d'augmenter le déficit, de couper les dépenses, on nous cache l'état réel de la situation.

Je vais conclure, M. le Président, tout simplement pour répondre aux ah! de l'autre côté de la Chambre qui s'amusent et qui complotent avec le ministre pour cacher aux électeurs de chacun de leurs comtés la véritable situation financière de la province de Québec en vous citant un article de la Presse de Montréal, du vendredi 12 juin 1981. C'est de l'éditorialiste Ivan Guay: "Tout est dans la manière de le faire. Comme dit M. Parizeau, le gouvernement ne ca- che rien, ou si peu. Il éparpille les renseignements financiers dans les comptes publics, les divers états financiers et leurs annexes de telle sorte que seuls des comptables puissent s'y retrouver en consacrant beaucoup de temps à rassembler cette information. C'est ce que M. Parizeau appelle par euphémisme "les pratiques comptables du gouvernement." Celles-ci ont pour effet pratique de camoufler une partie des dépenses, d'en reporter la comptabilisation et de faire apparaître les déficits moins importants qu'ils le sont en réalité. À quoi servent les budgets de l'État, sinon à dévoiler aux contribuables, comme actionnaires de cet État, la situation des dépenses et des revenus du gouvernement pour l'année fiscale? Tout ce qui fausse ce bilan doit forcément être considéré comme un camouflage de la réalité. C'est le pire des sophismes de faire passer ce camouflage pour une pratique comptable tout à fait injustifiable. Les élégants sophismes de M. Parizeau sont peut-être rassurants pour un grand nombre de citoyens, mais le ministre a peur de trop miser sur la tradition d'ignorance des Québécois. La conservation du patrimoine ne doit pas être poussée jusque-là et la confiance aveugle des citoyens n'est pas éternelle. À la prochaine."

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Trois-Rivières.

M. Denis Vaugeois

M. Vaugeois: M. le Président, heureusement qu'il me reste quelques collègues dans cette Chambre. Je pense bien que ceux qui avaient décidé de regarder les débats à la télévision nous ont quittés depuis un certain moment. Si nous n'avions pas été de service ici, pour ma part, je serais parti. C'est incroyable, M. le Président. Finalement, le député de Brome-Missisquoi a fait ce soir, involontairement, un hommage réel à Glen Brown. Pour ma part, il me l'a fait regretter. J'ai eu l'occasion de le connaître en dehors de cette Chambre. J'ai eu l'occasion de le fréquenter à Cowansville où j'ai des parents et des amis. C'était un homme affable, un homme respectueux de cette Chambre, un homme respectueux de ses collègues, un homme respectueux de la vérité. L'actuel député de Brome-Missisquoi se moque de tout, nous prend pour des imbéciles et, je pense bien, prend également ceux qui nous regardent à la télévision pour des imbéciles. Il dit n'importe quoi.

J'avais autre chose à dire ce soir, M. le Président. Je ne prendrai pas les quelques minutes qui me restent et que des collègues ont la patience d'endurer pour aller plus loin. Encore que je tiendrais à dire au député d'en face que le ministre de l'Agriculture ne cherche pas à augmenter ses subventions aux

agriculteurs. Sa politique depuis des années est d'augmenter les profits des agriculteurs et de les rendre indépendants vis-à-vis du gouvernement et des gouvernements quels qu'ils soient.

Des voix: Bravo!

M. Vaugeois: M. le Président, la ligne de forces de notre parti, ce n'est pas la dépendance. Ce n'est pas la dépendance des citoyens vis-à-vis de l'État. La ligne de forces de notre parti, M. le Président, ce n'est pas la dépendance des agriculteurs vis-à-vis des subventions du ministre de l'Agriculture. La ligne de forces de notre parti, notre ligne de forces comme hommes politiques, c'est l'indépendance tout le temps.

Des voix: Bravo!

M. Vaugeois: Celle des agriculteurs, M. le Président, nous sommes en train de la réaliser et l'autre, elle viendra en son temps, celle qui fait peur au député de Brome-Missisquoi.

Pour l'instant, M. le Président, j'avais l'intention de tenir un discours que les gens de l'Opposition ne savent pas tenir. J'ai envie momentanément, M. le Président, de traverser la Chambre, d'être d'un esprit libéral, authentiquement libéral et de dire au gouvernement où on pourrait peut-être faire des compressions, au lieu de chercher à les faire à des endroits où il faut en mettre plus finalement, parce que c'est le discours que les gens d'en face nous tiennent; ils nous disent qu'il faut couper pour réduire le déficit, pour réduire le service de la dette, mais, en même temps, ils voudraient qu'on en mette plus là, plus là et plus là. À quel endroit nous disent-ils d'en réduire un peu? Jamais! Mais il faudrait que le total soit moindre que la réalité actuelle. Franchement, M. le Président, heureusement qu'on est au pouvoir! Donc, je vais tenir momentanément le discours que je ferais si j'étais de l'autre côté. Il y a des endroits, effectivement, où nous devrons apprendre à réduire les dépenses. Nous devrons apprendre lentement, progressivement à faire des économies, à avoir des politiques un peu plus réalistes, moins coûteuses et qui tiendront davantage compte de nos moyens.

J'avais l'intention dans le peu de temps que j'ai, M. le Président, d'aborder cet aspect sous deux angles: l'angle de l'aménagement du territoire, puisque, depuis quelques années, c'était l'absence totale d'aménagement de territoire; malheureusement, ces gens, quand ils étaient au gouvernement, ont négligé de nous donner une loi d'urbanisme, une loi d'aménagement. Mais, lorsque nous sommes arrivés dans cette Chambre avec une loi de protection des terres arables, quand nous sommes arrivés dans cette Chambre avec une loi sur la réforme de la fiscalité municipale, lorsque nous sommes arrivés avec une loi sur l'aménagement du territoire, ils ont été contre. Ils nous ont tenu des discours interminables pour être contre. Si on avait eu cette loi plus tôt, on aurait réalisé des économies. Je suis content, ce soir, de trouver dans cette Chambre le député de Maskinongé, la députée de Chomedey, qui est une ancienne résidente de Trois-Rivières, le député de Nicolet, en banlieue de Trois-Rivières, et j'aimerais, par l'exemple de Trois-Rivières, illustrer un peu nos problèmes d'aménagement.

Mais, comme mon temps est limité, j'aimerais auparavant être certain de pouvoir aborder cette question et parler d'une question qui surprendra peut-être nos amis d'en face, celle du droit d'auteur ou du respect dû aux créateurs. Cela peut paraître baroque qu'à l'occasion d'un discours sur le budget, on aborde ce propos. Soit dit en passant, je pense que jamais ceux d'en face n'ont parlé des droits des créateurs, de la juste part des créateurs; c'est un discours qu'ils ne sauraient tenir. Quant à moi, ce soir, j'ai l'intention d'en parler au titre de l'indépendance des créateurs vis-à-vis de l'État. Nous vivons depuis des années une situation qui est devenue inacceptable. Le gouvernement actuel a eu d'abord le courage de publier un petit ouvrage qui s'appelle "La juste part des créateurs". En introduction, vous trouvez une citation du directeur général de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle qui se lit comme suit: "L'expérience prouve que l'enrichissement du patrimoine culturel national dépend directement du niveau de la protection accordée aux oeuvres littéraires et artistiques. Plus ce niveau est élevé, plus les auteurs sont encouragés à créer. Plus il y a de création intellectuelle, plus s'élargit le rayonnement du pays. Plus il y a de productions dans le domaine littéraire et artistique, plus s'accroît l'importance des auxiliaires de ces productions que sont les industries du spectacle, du disque et du livre. En fin de compte, l'encouragement à la création intellectuelle constitue l'une des conditions premières de toute promotion sociale, économique et culturelle."

Le gouvernement du Québec a beaucoup tardé à intervenir dans ce domaine. D'abord, sur le plan constitutionnel, apparemment, nous ne serions pas compétents, encore que la question de la propriété nous concerne, mais celle du copyright nous échappe. Donc, avec ce prétexte, les gouvernements qui nous ont précédés ont négligé de traiter de la question des droits des auteurs et des créateurs. Nous sommes finalement arrivés à un énoncé de politique là-dessus. Mais si j'étais dans l'Opposition, j'aurais cité à ce gouvernement une directive du gouvernement

de l'Ontario, du sous-ministre adjoint à l'Éducation en Ontario, qui rappelle aux institutions scolaires de sa province le respect dû aux créateurs concernant la copie ou la polycopie des textes à la lumière des dispositions de la Loi sur les droits d'auteur qui, malgré tout, existe depuis 1924.

Permettez-moi de lire quelques extraits de cette lettre du sous-ministre adjoint de l'Ontario. J'aimerais la citer au complet - si, demain, on me demande de la déposer, je la déposerai avec plaisir, M. le Président - mais je m'en tiendrai à trois ou quatre paragraphes. "La présente note rappelle que le ministère n'admet pas la reproduction de matériel protégé par le droit d'auteur et prévient que les sommes payées par les conseils scolaires pour frais d'avocat et dommages-intérêts dans l'éventualité d'une violation du droit d'auteur ne sont pas des dépenses admissibles pour fins de subvention. "Les conseils sont invités par ailleurs à établir des comparaisons entre l'achat de manuels et la reproduction d'imprimés. Les frais de reproduction étant de trois à sept fois plus élevés que les frais d'impression par page, on peut se questionner sur les prétendues épargnes réalisées par la reproduction d'imprimés plutôt que par l'achat de textes originaux. L'évaluation réelle des frais de reproduction d'imprimés doit inclure non seulement le coût du papier, mais aussi les dépenses de location ou d'amortissement et d'entretien de l'équipement ainsi que le temps qu'on doit y consacrer. Là où il s'agit d'un grand nombre de pages, il ne fait pas de doute qu'un tel travail coûte relativement cher."

La note se termine ainsi: "II s'impose de porter ces points à l'attention du personnel des conseils scolaires et des écoles afin de s'assurer que la reproduction d'imprimés protégés par le droit d'auteur se limite rigoureusement aux cas permis par la loi. Autrement, l'abstention est de rigueur à moins d'obtenir l'autorisation du détenteur du droit d'auteur."

M. le Président, j'aimerais citer cette note au complet, j'aimerais la commenter abondamment. Je me contenterai ce soir de poser quelques questions aux gens des commissions scolaires, aux gens des collèges, aux gens des universités. J'aimerais que, dans les prochaines semaines, on y réponde. Actuellement, un groupe de producteurs regroupés avec la SADA a intenté une poursuite devant les tribunaux concernant pour l'instant 14 cégeps. Cette poursuite risque de s'élargir à d'autres institutions subventionnées par l'État: les institutions qui ont de vastes laboratoires, qui ont des équipements considérables, qui ont du personnel affecté à quoi? À la reproduction, à la copie, à la polycopie, au mépris des droits du créateur. Alors qu'on discute des crédits du ministère de l'Éducation, des budgets des institutions d'enseignement, on pourrait se demander quelle part de ces budgets sert à léser les créateurs de leurs droits.

La question que je pose, M. le Président, ce soir est: Combien d'appareils trouve-t-on dans nos cégeps, dans nos universités, dans nos écoles secondaires et autres, pour reproduire des films 16 millimètres en rubans magnétoscopiques? Combien de télécinés? Combien de personnes qui travaillent sur des télécinés dont la seule fonction est de reproduire des films qui, très souvent, n'ont même pas été achetés, qui ont été empruntés par le cégep qui a fait la dépense? Et là, on reproduit. On fait la même chose au niveau des diapositives. Il existe des appareils, des Repronar dont la fonction est de reproduire des diapositives. Il y a du personnel dont la fonction est de reproduire des diapositives sur lesquelles il y a des droits d'auteur. Il y a des appareils de magnétoscopie, des magnétophones qui servent a d'autre chose, mais qu'on utilise abondamment également pour faire des copies.

Le coût des appareils, le coût au pied carré des espaces réservés à ces travaux de reproduction, le personnel attaché à ces tâches de reproduction, combien cela nous coûte-t-il au total? Quant au produit lui-même qui est photocopié? À partir du moment où, comme éditeur, vous savez qu'un marché de 10 000 exemplaires vous attend plutôt qu'un marché de 1000 exemplaires, cela vous amène à produire votre exemplaire à un coût plus ou moins élevé. J'ai été moi-même éditeur, je savais fort bien que, si je devais m'attendre à un marché de 10 000, je pouvais baisser mon prix et que, si j'étais obligé de faire un tirage à une quantité de 1000, j'étais obligé d'amortir tous mes frais sur une quantité de 1000. Le produit lui-même est plus cher pour l'institution qui l'achète. D'ailleurs, le produit lui-même est plus cher pour l'individu qui l'achète. Finalement, le produit est plus cher et l'État paie des sommes considérables pour entretenir des pieds carrés, pour entretenir des équipements, pour entretenir du personnel qui, au total, privent les créateurs de leurs droits légitimes.

En 1979, une enquête a été menée par l'IQOP, une enquête qui n'a jamais été rendue publique. Si j'étais dans l'Opposition, ce soir, je demanderais au gouvernement de dévoiler ce document, cette enquête de l'IQOP, qui nous montre l'importance de la reproduction d'ouvrages protégés par les droits d'auteur dans nos institutions d'enseignement.

M. le Président, je suis dérangé par l'ombre du député de Maskinongé. Donc, il y a un certain nombre de questions comme celles-là qu'il faudrait poser maintenant. II y a des économies à faire. Il y a des

compressions à faire. Mais est-ce qu'on ne pourrait pas d'abord les faire en réduisant le coût du matériel d'enseignement, en réduisant le coût de toute cette production de matériel dû à nos créateurs, dans le respect de leurs droits et également dans le respect de l'entreprise privée? Parce que, très souvent, ces institutions sont mieux équipées que certaines entreprises dont la fonction serait, justement, de reproduire ces ouvrages avec les autorisations des créateurs, des éditeurs, des producteurs. Voilà toute une question qui n'a pas été tellement débattue dans cette Chambre et, je crois, qu'elle devrait nous préoccuper. La question des droits fondamentaux de nos auteurs et de nos créateurs devrait nous préoccuper, d'autant plus que, dans une perspective de compression des dépenses, il se trouve là des sommes considérables à épargner à l'État.

L'autre question que j'aurais aimé aborder - je me demande si j'en ai le temps; on va dépasser un peu 23 h 30 - c'est la question de l'étalement urbain. Je m'en tiendrai à cinq ou six minutes. Je prendrai l'exemple de Trois-Rivières. Trois-Rivières était une ville de 60 000 habitants qui a vu naître, tout autour d'elle, des petits villages ou des banlieues qui se sont développées rapidement parce que la ville était devenue inconfortable, parce qu'on l'avait négligée, parce qu'on l'avait laissée se polluer. Progressivement, on assiste à un exode urbain. La population quitte pour aller à un endroit où les services sont rendus, où les équipements sont rendus. Elle quitte pour Trois-Rivières-Ouest, elle quitte pour Pointe-du-Lac, et malheureusement, M. le Président, et je n'y comprends rien, elle quitte le beau comté de Trois-Rivières pour celui de mon collègue de Maskinongé. Bien sûr que le comté de Maskinongé a ses qualités, a ses beautés, mais le coût à payer pour ainsi suivre les populations avec les services, avec le réseau routier, avec le service d'éqout et d'aqueduc, montre bien les conséquences d'un tel phénomène. (23 h 30)

Trois-Rivières-Ouest, par exemple, est une ville endettée trois fois plus que le gouvernement du Québec. On fait grand état dans cette Chambre du service de la dette du gouvernement actuel qui est de l'ordre de 10%, mais une municipalité comme Trois-Rivières-Ouest doit cette année, consacrer 33% de son budget au service de la dette. Dans le cas de Pointe-du-Lac, vous assisterez rapidement au même phénomène. Pour l'instant, il faut faire des dépenses considérables pour les rattraper toujours.

Si j'étais dans l'Opposition, je proposerais à ce gouvernement d'accélérer ses interventions pour densifier nos villes, pour construire les villes en ville, là où sont les équipements, là où sont les services. Le phénomène que j'ai décrit du côté de Trois-

Rivières-Ouest, on l'a, en quelque sorte, du côté de Nicolet. Le député de Nicolet gagne sa vie à Trois-Rivières, il habite le beau comté de Nicolet et, maintenant, il gagne sa vie à l'Assemblée nationale. C'est beaucoup dire, gagner sa vie, mais, de toute façon, vous avez ce même phénomène d'étalement urbain vers la rive sud, vous l'avez également vers le comté de Champlain.

Je pense qu'il faudra avant longtemps, très sérieusement, au niveau de cette Assemblée nationale, s'interroger, avec des chiffres, sur le coût de cette absence d'aménagement du territoire, sur cet étalement urbain qui nous coûte de l'argent, du temps, au niveau des réseaux routiers, au niveau de l'énergie consommée, du temps que les gens mettent à se déplacer, des risques d'accidents et des accidents qui ont effectivement lieu et qui coûtent à tous nos services de santé des sommes considérables.

C'est une autre avenue que j'aimerais exploiter en temps et lieu, mais je ne veux pas abuser du temps de mes collègues ce soir. Je me contente d'énoncer cette deuxième avenue comme en étant une qui pourrait nous permettre éventuellement de faire des compressions de dépenses qui ne léseraient aucun citoyen, qui pourraient probablement nous permettre d'avoir un milieu de vie plus agréable, qui pourraient nous amener à avoir des budgets mieux équilibrés.

Un seul exemple pour démontrer l'importance de cette deuxième question au niveau de l'énergie. Les gens savent ou ne savent pas que le pétrole est subventionné. Chaque gallon de pétrole est subventionné actuellement à quelque chose comme 0,45 $; autrement, nous en serions au prix international. Pour ne pas être au prix international et pour ne pas léser les gens de l'Alberta outre mesure, le gouvernement fédéral, depuis quelques années, maintient le prix de l'essence ou le prix du pétrole à un niveau inférieur au prix international, sauf que, cette année, cette subvention à l'essence et au pétrole coûtera sans doute au gouvernement fédéral, pour le Québec seul, quelque chose comme 3 000 000 000 $.

J'aimerais mieux qu'on ait des villes mieux organisées, plus densifiées, plus agréables à vivre également, dont on s'occuperait, mais avec des distances moins grandes, avec des services plus nombreux et mieux placés, grâce à des politiques d'aménagement urbain. Il y a toutes sortes de politiques qui pourraient nous permettre de réduire la consommation d'énergie. Nous en avons quelques-unes en marche actuellement, mais c'est là que sont les vraies économies à réaliser, c'est là qu'est la qualité de la vie, c'est là qu'est l'avenir du développement de notre territoire. C'est le genre de discours qu'on n'entend jamais en face, c'est le genre de discours que je n'ai

jamais entendu en face, mais peut-être bien que le député de Jean-Talon finira par nous parler de ces choses.

Pour l'instant, c'est à nous de tenir ce discours, c'est à nous de pousser un peu sur le gouvernement pour que, le plus rapidement possible, on ait des politiques d'intervention dans les villes et dans les centre-ville. Pour l'instant, il faut se contenter de discours du genre de celui du député de Brome-Missisquoi qui nous reproche de ne pas faire des petits bouts de route partout où quelqu'un est allé bâtir sa cabane. Nous proposons aux gens de vivre ensemble et non pas de vivre isolés.

M. Paradis: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Paradis: Je demande la permission au député de Trois-Rivières pour intervenir immédiatement; sinon, en vertu de l'article 100, j'interviendrai à la fin de son discours pour rétablir les faits et pour l'inviter à venir visiter le genre de cabanes qu'on a dans notre comté.

M. Chevrette: Non, non, pas de consentement. "Come on, let us go"!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: M. le Président, malgré les avis de mon whip bien-aimé, j'autorise le député de Brome-Missisquoi à y aller de sa question lumineuse.

M. Chevrette: Non, il n'est pas lumineux.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Brome-Missisquoi, en vertu de l'article 100.

M. Paradis: M. le Président, en vertu de l'article 100, je veux reprendre les affirmations du député de Trois-Rivières qui dit que ce n'est pas important de faire des petits bouts de route où il y a des cabanes. Je n'ai jamais mentionné des petits bouts de route où il y avait des cabanes. S'il avait écouté attentivement le discours que j'ai tenu, il saurait que j'ai mentionné qu'il était important de construire des routes rurales -avec la permission du député, M. le Président - des routes où il y avait des installations de fermes auxquelles on n'avait pas accès pendant les périodes de dégel, que c'était important de donner l'accès aux camions de moulée, aux "trucks" à lait, à ces fermes-là. S'il pense que cela n'est pas important, qu'il vienne le dire dans le comté de Brome-Missisquoi et on va encore voter libéral.

M. Vaugeois: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: J'avais bien raison de le laisser parler.

Je vais terminer là-dessus en invitant le député à se promener un peu, à regarder d'autres pays qui ont des politiques d'aménagement du territoire, à regarder comment cela se passe, par exemple, dans les pays européens et comment réagissent actuellement d'autres provinces qu'on sert souvent en exemple en face. Qu'on regarde actuellement les politiques de l'Ontario. Qu'on regarde comment réagissent les États américains devant ces problèmes d'étalement de nos villes et d'aménagement du territoire.

M. le Président, je termine ici en rappelant le premier de mes propos: la juste part des créateurs, le droit des auteurs. J'invite les membres de cette Chambre, pendant la période des vacances qui va suivre bientôt, à observer autour d'eux ce que l'État consent à des institutions pour léser finalement les créateurs de leur juste part. Je les invite, quand ils visiteront des institutions, quelles qu'elles soient, des institutions que nous subventionnons, à observer ces appareils, ces gens et ces espaces qui, finalement, servent trop souvent à une seule chose: c'est reproduire, photocopier, léser les créateurs. Je crois qu'il y a là des économies importantes à réaliser, redonner aux créateurs leur part et amener les gens dans nos institutions d'enseignement non pas à être des gens qui reproduisent, mais des gens qui produisent et qui créent du matériel original. Il y a là un débat à tenir. Ce n'est pas ce soir, à 23 h 30, que nous en ferons le tour, que nous le réglerons. J'avais l'envie, ce soir, M. le Président, au-delà du temps, en cette fin de session, de dire aux créateurs du Québec qu'il se trouve en cette Chambre, de ce côté-ci de cette Chambre tout au moins, des gens qui participent à leur inquiétude et qui sont décidés, résolus à défendre leur part.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Richmond.

M. Vallières: M. le Président, j'ai l'honneur de vous demander l'ajournement de cet intéressant débat.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Nous sommes d'accord, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, nos travaux...

M. Charron: M. le Président, je propose l'ajournement de la Chambre à demain matin, dix heures.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont ajournés.

M. Charron: Je peux donner, avant que tout le monde s'en aille, un aperçu de demain.

Une voix: Qui veut avoir cela?

M. Charron: Nous finirons le débat sur le discours sur le budget demain après-midi. Demain matin, nous étudierons des projets de loi qui en sont à l'étape de la prise en considération, de la troisième lecture, de même que la deuxième lecture du projet de loi no 15 qui concerne la retraite. En commission parlementaire, il y aura, toute la journée, les engagements financiers jusqu'à demain soir, minuit. Par ailleurs, successivement, ce sera l'étude des projets de loi privés qui relèvent du ministère des Institutions financières et Coopératives, demain matin, et les Affaires municipales demain après-midi. Demain soir, il y aura peut-être encore la commission des transports qui siégera si elle n'a pas terminé son travail ce soir. Ici, en Chambre, ce sera le débat prévu de cinq heures, mais je signale tout de suite à l'Opposition que ce n'est pas obligatoire qu'il dure cinq heures, sur le rapport de l'étude des crédits des différents ministères puisque tout sera terminé demain.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont ajournés à demain matin, dix heures.

(Fin de la séance à 23 h 39)

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