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Version finale

34e législature, 3e session
(17 mars 1994 au 17 juin 1994)

Le mardi 14 juin 1994 - Vol. 33 N° 37

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures trois minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous allons procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.


Dépôt de documents

Dépôt de documents.

M. le ministre des Finances.


Rapports annuels de l'Inspecteur général des institutions financières sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne, et sur les caisses d'épargne et de crédit, et rapport annuel du Fonds d'indemnisation du courtage immobilier

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer les rapports annuels 1993 de l'Inspecteur général des institutions financières sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne, les caisses d'épargne et de crédit et, également, j'ai l'honneur de déposer, M. le Président, le rapport annuel 1993-1994 du Fonds d'indemnisation du courtage immobilier.

Le Président: Je vous remercie, M. le ministre. Ces documents sont déposés. Alors, je vais solliciter l'attention des collègues, s'il vous plaît.

Toujours au dépôt de documents, je vais reconnaître M. le leader du gouvernement, au nom du ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.


Rapports annuels de la Société du parc industriel et portuaire Québec-Sud et du Conseil de la science et de la technologie

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Au nom du ministre et conformément au règlement, je dépose les rapports annuels 1993-1994 de la Société du parc industriel et portuaire Québec-Sud, ainsi que du Conseil de la science et de la technologie.

Le Président: Ces rapports sont donc déposés. Maintenant, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Rapports annuels de la Régie de l'assurance-maladie et du Conseil médical du Québec

Mme Robillard: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1993-1994 de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, de même que le rapport annuel 1993-1994 du Conseil médical du Québec.

Le Président: Alors, ces rapports sont déposés. Maintenant, M. le ministre des Transports.


Rapport annuel de la Commission des transports du Québec

M. Cherry: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1993-1994 de la Commission des transports du Québec.

Le Président: Ce rapport est déposé. Maintenant, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


Rapports annuels de la Société de financement agricole et de SOQUIA

M. Picotte: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1993-1994 de la Société de financement agricole, et également, M. le Président, le rapport annuel 1993-1994 de la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires. Merci, M. le Président.

Le Président: Je vous remercie. Ces rapports sont déposés. Maintenant, M. le ministre des Ressources naturelles ou M. le leader du gouvernement, au nom du ministre des Ressources naturelles.


Rapport annuel de REXFOR

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Au nom du ministre des Ressources naturelles, qui vient de se joindre à nous, je dépose le rapport annuel 1994 de la Société de récupération, d'exploitation et de développement forestiers du Québec.

Le Président: Je vous remercie. Ce document est donc déposé.

(10 h 10)


Dépôt de rapports de commissions

Maintenant, dépôt de rapports de commissions. Mme la Présidente de la commission des affaires sociales et députée de Taillon.


Consultation générale sur la mise en oeuvre de la Loi sur le Conseil de la famille

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales, qui a siégé le 31 mai 1994, afin de procéder à une consultation générale et tenir des auditions publiques dans le cadre de l'étude du rapport du Conseil de la famille sur la mise en oeuvre de la Loi sur le Conseil de la famille, le tout conformément à l'article 29 de cette loi.

Le Président: Je vous remercie. Ce rapport est donc déposé.


Dépôt de pétitions

Maintenant, dépôt de pétitions. M. le député de Gouin.


Empêcher la fermeture de l'établissement Les Foufounes électriques

M. Boisclair: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 13 351 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec.

Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant l'apport des Foufounes électriques aux niveaux culturel, social, économique et touristique;

«Considérant que, malgré la présence et l'intervention régulière de la police de la CUM à cet endroit, seulement 80 personnes sur 250 000, annuellement, ont été accusées, soit 0,032 %;

«Considérant qu'aucune plainte n'a été déposée contre l'institution de la part d'une ou d'un citoyen;

«Considérant que des mesures ont été entreprises pour répondre aux plaintes de la police de la Communauté urbaine de Montréal et que l'établissement est disposé à continuer cette coopération;»

L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, prions l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre de la Sécurité publique afin qu'il intervienne auprès de la Régie des alcools, des courses et des jeux pour empêcher la fermeture temporaire ou définitive des Foufounes électriques.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Votre pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.


Questions et réponses orales

Nous allons donc procéder à la période de questions et réponses orales. Je reconnais, en première question principale, M. le chef de l'Opposition.


Impact des compressions budgétaires sur les services hospitaliers

M. Parizeau: M. le Président, pour le réseau de la santé et des services sociaux, le gouvernement a commandé 875 000 000 $ de coupures en trois ans – espérons qu'il ne se rendra pas jusque-là – dont 225 000 000 $ pour l'année en cours. Trois mois sont déjà écoulés dans l'année financière et, donc, les hôpitaux devront absorber ces commandes de coupures sur neuf mois. Cela va vouloir dire, entre autres, la fermeture d'au moins 1600 lits dans la région de Montréal, de juin à septembre – peut-être 2000 lits, disent certains hôpitaux.

Comment le premier ministre peut-il imposer de telles coupures dans les services de santé alors que, déjà, on sait – il a été établi en cette Chambre – que 30 000 personnes au Québec attendent une hospitalisation, dont 14 000 une chirurgie, y compris 3000 enfants à l'hôpital Sainte-Justine, et que 5000 personnes âgées attendent une place en centre d'accueil? Comment le premier ministre peut-il en être rendu à faire des choses comme celles-là? Est-ce qu'il s'imagine que des coupures de lits sur une échelle pareille vont permettre de faire en sorte que ceux qui attendent une chirurgie vont pouvoir la subir dans des conditions correctes?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Johnson: M. le Président, d'abord, je constate que nous avons droit, de la part du chef de l'Opposition, à des questions recyclées du député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue. La députée de Chambly et ministre de la Santé et des Services sociaux a été extrêmement claire, extrêmement limpide à ce sujet-là, la semaine dernière notamment, à deux reprises différentes.

Ce que je fais remarquer au chef de l'Opposition qui feint de l'ignorer, c'est que, dans la mesure où nous avons la chance de maintenir un service de santé public, d'hospitalisation qui est universel, accessible et gratuit... Dans n'importe quel système, si on veut se débarrasser des files d'attente, on doit ajouter des ressources ou, alors, on doit accepter que des gens n'auront jamais de services. Je m'explique, et le chef de l'Opposition le sait, aux États-Unis, dans les États limitrophes, il n'y a pas vraiment de longues files d'attente dans les hôpitaux, en matière de chirurgie, à tel point que, dans certaines régions, des Canadiens, s'ils en ont les moyens – et c'est ça qui est le mot clé: s'ils en ont les moyens – vont se faire opérer à très grands frais dans des hôpitaux américains frontaliers.

Nous avons décidé, ici, au Canada, d'avoir un système universel. Nous n'échappons pas, dans la gestion de tous les jours, aux choix que les médecins, les administrations peuvent faire. Pour faire en sorte que les bénéficiaires soient davantage rassurés sur les listes d'attente, nous avons à ajouter des ressources ou à faire mieux avec ce que nous avons. Les choix sont clairs, ils sont uniques; ce sont ces deux seuls choix qui existent: ou bien nous faisons mieux avec ce que nous avons, nous rationalisons davantage et tentons d'orienter nos ressources vers la diminution des files d'attente, ou alors nous en ajoutons. Et, à mon sens, pour en ajouter, M. le Président, il s'agit d'assurer la prospérité économique du Québec, de continuer à créer des emplois. C'est de cette façon qu'on peut ajouter des ressources, pas autrement.

Le Président: En question complémentaire.

M. Parizeau: Est-ce que le premier ministre va faire relever ce qu'il vient de dire en Chambre puis l'expédier aux parents des 3000 enfants qui attendent d'entrer à l'hôpital Sainte-Justine? Est-ce qu'il pourrait faire ça? Ça serait intéressant de voir la réaction de ces parents de se faire dire que, aux États-Unis, c'est comme ci et comme ça et que les parents n'ont qu'à attendre pour les 3000 enfants ou...

Le Président: M. le chef de l'Opposition...

M. Parizeau: ...aux 14 000 personnes qui attendent une chirurgie. Est-ce que le premier ministre a l'intention de leur expédier ce qu'il vient de dire en Chambre?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Johnson: M. le Président, on peut bien faire de la démagogie. Le chef de l'Opposition sait exactement quels sont les enjeux. Le chef de l'Opposition sait parfaitement que, dans un système tel qu'il existe aujourd'hui, dans la mesure où les besoins sont illimités et que les ressources financières ne le sont pas, le frottement et, je dirais, les tensions qui existent dans le système vont se traduire en files d'attente. Ce que nous tentons de faire et ce que la ministre a expliqué à deux reprises, la semaine dernière – en présence ou en l'absence du chef de l'Opposition, je n'en sais rien, mais, à tout le moins, elle l'a expliqué deux fois au député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue – c'est que nous avons à changer nos façons de faire. Ou bien on fait un ajout de ressources substantielles que l'économie du Québec, aujourd'hui, ne peut pas supporter, d'où l'importance qu'il y a de susciter du développement économique et de la création d'emplois et d'appuyer la reprise si nous voulons des ressources additionnelles, ou alors – et je l'ai dit, et, ça aussi, les parents peuvent le savoir, ça me fera plaisir de le leur expédier – on change la façon dont le système est administré: on concentre davantage sur les chirurgies d'un jour; on concentre davantage sur la productivité; on concentre davantage sur les modifications à la pratique médicale, qu'il s'agisse de la chirurgie ou des médicaments. C'est ça qu'on doit changer et c'est ce que la ministre a dit, et je l'appuie dans ses objectifs de faire en sorte que les parents et les enfants et les gens qui sont malades au Québec sachent que le système existe, qu'il va durer et qu'il va s'occuper d'eux.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, pour une question principale, maintenant. M. le chef de l'Opposition, en question principale.

M. Chevrette: Qu'ils attendent! La morale, c'est: Qu'ils attendent!

M. Parizeau: C'est dommage qu'on n'ait pas pu prendre une photo comme ça, M. le Président, et l'envoyer aux gens dont je parlais tout à l'heure.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: ...

M. Chevrette: Ils sont fiers de ça!


Statistiques sur la création d'emplois au Québec

M. Parizeau: Justement, quant à la création d'emplois et au retour de la prospérité dont parlait le premier ministre, je me suis appuyé sur ce que le ministre de l'Emploi disait, vendredi, pour apprécier la performance du gouvernement en termes d'emplois, depuis le début de l'année – une performance dont il était si fier – et, sur la base de ces chiffres, il est clairement établi que 27 000 emplois sont apparus, au Québec, sur 171 000 au Canada, ce qui fait 16 %. Le ministre de l'Emploi était très fier; le premier ministre l'était aussi, avec d'autres chiffres – ils pourront se réconcilier. Mais, aussi, il faut noter le ralentissement qui s'est produit depuis deux mois. En avril, 1000 emplois sont apparus, au Québec. En mai, 3000 sur 56 000 au Canada. À peine plus de 5 % des emplois canadiens qui sont apparus au Canada sont apparus au Québec – à peine plus de 5 %.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Je demande la collaboration des collègues, s'il vous plaît. Alors, M. le chef de l'Opposition, votre question, s'il vous plaît.

(10 h 20)

M. Parizeau: Remettons alors les choses en perspective. Est-ce que le premier ministre peut nous confirmer que, depuis le début de la récession, en date de maintenant, il y a 69 000 emplois de moins au Québec qu'il y a quatre ans à pareille date – au moment où la récession commence? Est-ce qu'il peut nous confirmer qu'il y a 116 000 chômeurs de plus qu'au début de la récession, au moment où on se parle? Est-ce qu'il peut nous confirmer que, dans la même période de temps, le nombre des assistés sociaux a augmenté de 250 000?

Une voix: Voilà!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Johnson: M. le Président, à moi d'envoyer une photo maintenant aux 250 000 assistés sociaux de plus, démontrant les applaudissements effervescents de l'Opposition devant ce constat extrêmement déroutant pour toutes les économies occidentales. Se réjouir qu'il y ait plus d'assistés sociaux, il faut le faire! Nous travaillons plutôt sur l'augmentation du nombre d'emplois. Nous travaillons sur l'augmentation du nombre d'emplois.

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant, M. le premier ministre. S'il vous plaît! Alors, M. le premier ministre.

M. Johnson: M. le Président, le chef de l'Opposition tente de tirer avantage du fait qu'au Canada, et au Québec notamment, il y aurait un ralentissement statistique de création d'emplois. D'abord, entendons-nous sur les chiffres. Depuis le début de l'année, ce n'est pas 27 000, c'est 50 000 emplois qui ont été créés, au Québec, sur 132 000 emplois qui ont été créés au Canada. Ce sont les chiffres...

Le Président: Nous allons suspendre les travaux quelques instants. Donc, les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 10 h 23)

(Reprise à 10 h 50)

Le Président: Mmes, MM. les députés, veuillez prendre place, s'il vous plaît. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Mmes, MM. les députés, nous reprenons les travaux, suite à ce contretemps pour un bris matériel. Il reste 34 minutes à la période des questions. Nous avons suspendu pendant 28 minutes. Alors, de consentement, nous allons reprendre ces 28 minutes à compter de 13 heures; la séance se poursuivra donc jusqu'à 13 h 28, pour poursuivre le programme de ce matin. À 13 h 28, nous suspendrons les travaux jusqu'à 15 heures, tel qu'on le fait habituellement.

Nous allons donc poursuivre la période des questions. La parole était au premier ministre. Oui, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Il y a également consentement pour le nouvel organigramme temporaire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Oui, d'accord. Très bien. Certains députés ont été relocalisés pour aujourd'hui. Alors, je cède donc la parole à M. le premier ministre.

M. Johnson: Oui, M. le Président. M. le Président, oui, il faudra peut-être parler moins fort ici.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: En nous réjouissant qu'aucun de nos collègues n'ait été, évidemment, blessé par ce bris d'une section du plafond de l'Assemblée nationale.

M. le Président, j'en étais à déplorer les applaudissements des membres de l'Opposition, qui semblaient se réjouir – c'est de bonne guerre, pensent-ils – se réjouir du nombre d'assistés sociaux qu'il y a au Québec. Avec mon gouvernement, je préfère, et de loin, me concentrer sur les mécanismes de création d'emplois; nous réjouir ensemble pour tous les Québécois qui retrouvent confiance. Qu'il y ait maintenant 50 000 emplois de plus au Québec qu'il y en avait au 1er janvier, ça, c'est clair. Ça, c'est absolument clair. Depuis le 31 janvier, je le concède... Je concède au chef de l'Opposition que, depuis le 31 janvier, il y a 27 000 emplois de plus. Mais, si on parle de l'année 1994, si on veut que le mois d'avril, le mois de mai, le mois de février et le mois de mars comptent au complet en 1994... Je rappelle au chef de l'Opposition qu'il y a un mois de janvier. J'ignore s'il est en train d'inventer un nouveau calendrier républicain, mais, même dans le calendrier républicain, il y avait 12 mois.

Des voix: Bravo!

M. Johnson: Il y avait 12 mois.

M. le Président, ce qui est important, c'est de constater qu'il y a, partout au Québec, des occasions de création d'emplois, que nous avons la responsabilité de soutenir. Qu'il s'agisse, comme je l'ai fait hier dans le comté de Trois-Rivières, de souligner un investissement additionnel de la firme Schlumberger: plus d'une centaine d'emplois, 150 emplois ou à peu près sont maintenus, consolidés ou nouvellement créés; 150 emplois dans une région du Québec, qui en a besoin.

Ça, M. le Président, 150 emplois, c'est plus que le nombre de partisans qui ont accueilli le chef de l'Opposition en Gatineau, mais c'est moindre que le nombre de chaises vides qu'il y avait dans la même salle.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, en question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: On vient de le constater, M. le Président, il y a certaines énormités qui font tomber les plâtres. Alors, ce n'est pas...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Parizeau: Est-ce que le premier ministre conviendra – j'imagine qu'il va en convenir, tout le monde est d'accord là-dessus – que, de toutes les récessions qu'on a connues depuis la Deuxième Guerre mondiale, depuis 50 ans, c'est la reprise la plus lente qu'on ait jamais vue, et au Québec? Bon. Que cette lente reprise – encore une fois, 3000 emplois le mois dernier, sur 56 000 au Canada – est-ce que le premier ministre va convenir que c'est dû aux politiques de son gouvernement? Qu'au cours des quatre dernières années de reprise, ce gouvernement-là a augmenté les impôts de 4 200 000 000 $, pour donner quelque chose comme ça dans le dernier budget? Est-ce que le premier ministre convient qu'une des raisons pour lesquelles la reprise est tellement lente et qu'il reste encore tellement de chômeurs et d'assistés sociaux, c'est que, dans le dernier budget, il n'y avait pas – tout le monde en a convenu – une seule mesure pour l'emploi? Pas une!

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: Alors, M. le premier ministre.

M. Johnson: M. le Président, si on se lance dans un concours d'énormités, je déclare forfait tout de suite et je donne la palme au chef de l'Opposition.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: Sur les deux points que le chef de l'Opposition a mentionnés, d'abord quant à la vitesse à laquelle nous sortons de la récession, depuis le creux, en novembre 1992, le Québec a retrouvé près de 60 % des emplois qui avaient été perdus. C'est un des taux les plus élevés au Canada, qui se compare avec celui de l'Ontario, qui est de 44 %. Je ne veux pas me réjouir de la lenteur de ce qui se passe en Ontario. Je remarque que nous avons reconquis 60 % des emplois perdus par opposition et par rapport à novembre 1992. En 18 mois, ce n'est pas rien. Et nous avons à continuer dans ce sens.

Deuxièmement, nous appuyons la reprise, et le discours sur le budget du 12 mai dernier... Contrairement à ce que vient d'affirmer le chef de l'Opposition et répété continuellement par les gens de l'Opposition, il y avait dans le budget – il s'agit d'aller voir les chiffres aux pages pertinentes lorsqu'on connaît ces choses-là – pour plus de 400 000 000 $ de crédits derrière les programmes de création d'emplois du gouvernement du Québec – 402 000 000 $ plus précisément – dans toutes les régions du Québec. C'est ça, la création d'emplois, c'est ça, soutenir la reprise économique.

Le Président: En question principale, M. le député de Bertrand.


Rôle du fédéral dans le litige opposant le Québec et les États-Unis en matière d'exportation du bois d'oeuvre

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Lors de l'étude des crédits du ministère des Affaires internationales, j'interrogeais le ministre pour savoir si le gouvernement fédéral avait appuyé la démarche québécoise dans le dossier du bois d'oeuvre, qui était d'apparenter le Québec à un pays au sens de la loi américaine, afin d'exclure l'industrie québécoise des droits compensateurs imposés par les Américains. Le ministre m'avait répondu à ce moment-là, et je cite: «Oui, dans les premières phases, le gouvernement fédéral a appuyé cet argument légal.» Or, selon l'ancien conseiller juridique du Québec à Washington, Me Elliot Feldman, le gouvernement fédéral n'a pas défendu les intérêts du Québec dans de multiples dossiers, dont celui du bois d'oeuvre. Il soulignait, dans une entrevue donnée et publiée en fin de semaine dans le journal Le Devoir, que le gouvernement fédéral n'a jamais appuyé cette proposition, sauf à la dernière minute, quand il était trop tard.

Ma question au ministre des Affaires internationales: Comment le ministre peut-il concilier l'opinion émise par M. Feldman avec les affirmations qu'il faisait lors de l'étude des crédits?

Le Président: M. le ministre des Affaires internationales.

M. Ciaccia: M. le Président, il faut comprendre d'où viennent les critiques qui ont été rapportées dans un article de journal et qui ont été reprises par le député de Bertrand ce matin. En 1991-1992, Me Elliot Feldman a reçu 2 000 000 $ d'honoraires professionnels du gouvernement du Québec. En 1992-1993, son bureau a reçu un autre 2 850 000 $, en plus des 720 000 $ qu'il avait déjà reçus avant ces deux années. Malheureusement, malgré ces énormes frais juridiques, on ne recevait pas les résultats attendus. Quand il est arrivé sur un dossier majeur, le magnésium, il était en train de mettre en danger, par sa stratégie, toute la stratégie industrielle du gouvernement du Québec. Alors, on a changé de bureau, en conséquence, au fur et à mesure que ses causes finissaient. Et, aujourd'hui, M. le Président, un avocat qui a reçu de telles sommes d'argent se permet de critiquer le gouvernement qui l'avait engagé, et ça, dans le but de discréditer le gouvernement et dans l'espoir – et c'est seulement un espoir – qu'en agissant de la sorte et advenant un changement de gouvernement il va être réengagé.

(11 heures)

M. le Président, il faut se méfier des opinions d'un avocat qui n'a pas d'éthique professionnelle et qui dirait...

Des voix: Oh!

M. Ciaccia: ...ou ferait n'importe quoi pour des motifs bassement pécuniaires.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Beaulne: Oui, M. le Président. Est-ce que je pourrais demander au ministre pourquoi, dans sa réponse, il omet de citer les différents plaidoyers que Me Feldman a gagnés au nom du Québec, entre autres, dans les dossiers du porc vivant? Est-ce qu'il peut également nous confirmer ou nous infirmer si le ministère du commerce américain a refusé une lettre d'Ottawa allant dans le sens de la spécificité du Québec parce qu'elle était arrivée trop tard? Et peut-il nous déposer cette lettre?

Le Président: M. le ministre.

M. Ciaccia: Les propos de l'article en question sont strictement politiques, mais l'enjeu dans lequel il prétend s'inscrire est trop sérieux pour être traité de façon aussi vulgaire. Il y a des énormités... L'article, je parle...

Le Président: Excusez-moi. Un instant, s'il vous plaît. Ça va. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, je pense que mon collègue à l'Assemblée nationale traite le sujet très sérieusement.

Une voix: Oui.

M. Chevrette: Et quand on a versé 4 800 000 $ avant de se réveiller, on ne doit pas parler du sérieux des autres.

Une voix: Oui, oui.

Le Président: Alors, je pense que chacun doit traiter le sujet avec sérieux. C'est ce que le critique de l'Opposition et le ministre doivent faire, et c'est ce qu'ils font, je pense. Alors, M. le ministre.

M. Ciaccia: M. le Président, je parlais de l'article, je ne parlais pas des propos du député de Bertrand.

Une voix: Bien non. C'est bien clair.

M. Ciaccia: Il y a des mensonges dans cet article. Premièrement, par exemple, quand on dit que le gouvernement fédéral n'a pas défendu le Québec dans le dossier de la bière, c'est absolument faux. Moi-même, j'ai entrepris et conclu les négociations avec l'appui du gouvernement fédéral, et les intérêts du Québec ont été protégés.

Quand on dit qu'aujourd'hui il n'y a plus de défense des intérêts du Québec à Washington, c'est absolument faux. Nous avons un bureau d'avocats, il y a 250 avocats, qui est internationalement reconnu, qui défend les intérêts du Québec. Et, au sujet du bois d'oeuvre, je pourrais citer une lettre de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec, en date du mois d'avril, adressée au ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles. Et je cite: «L'ouverture que vous nous avez démontrée ainsi que les engagement pris nous confirment votre intérêt à tout mettre en oeuvre pour en arriver à un règlement du litige qui nous oppose aux Américains dans le dossier de l'enquête américaine sur les exportations de bois d'oeuvre. Votre attitude nous rassure et nous sécurise et nous reconnaissons en vous et en votre équipe de véritables alliés.»

Des voix: Ah!

M. Beaulne: M. le Président...

Le Président: Alors, pour une autre question complémentaire.

M. Beaulne: ...est-ce que je dois conclure de la réponse du ministre qu'il n'existe aucune preuve de l'appui que le gouvernement fédéral a donné au Québec dans le dossier du bois d'oeuvre, puisqu'il refuse de la déposer, d'une part? Et est-ce qu'il peut nous confirmer qui défend les intérêts du Québec à Washington, si ce n'est un ancien chef de cabinet du ministre de la Sécurité publique, qui, au moment de la crise d'Oka, était en fonction au ministère et un bureau d'avocats qui n'est même pas spécialisé en droit international?

Le Président: M. le ministre.

M. Ciaccia: M. le Président, les propos du député de Bertrand, qui reprend les propos d'Elliot Feldman, démontrent, sans aucune doute, que c'est évidemment un article politique qui n'est pas basé sur les faits légaux, sur les positions légales qui ont été prises par le gouvernement du Québec. C'est absolument faux, ce que vous dites dans les propos. Nous avons appuyé... Le gouvernement fédéral a appuyé les positions du gouvernement du Québec dans le bois d'oeuvre. La preuve? Au moment où on se parle, M. le Président, nous avons gagné la cause du bois d'oeuvre.

Une voix: Bon.

M. Ciaccia: Il y a 0 % de droits compensateurs qui sont payables par les industriels québécois. Qu'est-ce que vous voulez de plus? Ça prouve que, l'article, c'est strictement un article politique, un article qui a d'autres buts et qui ne dit pas la vérité. Si vous voulez que je vous dépose une lettre, je peux vous déposer la lettre du 13 avril de l'Association des manufacturiers du bois de sciage du Québec adressée au ministre, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement au dépôt du document?

Des voix: Consentement.


Document déposé

Le Président: Consentement. Donc, le document est déposé. Maintenant... S'il vous plaît. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, pour une question principale, M. le député de Portneuf.


Impact des compressions budgétaires sur le personnel occasionnel

M. Bertrand: C'est bien celui qui vous parle, M. le Président. Hier, nous demandions à la présidente du Conseil du trésor si elle pouvait nous dire combien il y aurait de pertes d'emplois, suite aux nouvelles compressions annoncées dans le dernier budget. À cette question, la présidente répondait, au fond, qu'elle n'en savait rien. Même chose quant à savoir dans quelle mesure les différentes régions seraient touchées.

C'est dire à quel point ces compressions ont été annoncées dans l'improvisation, sans plan d'ensemble et en ne sachant même pas quels impacts ces décisions auront, tant sur les services que sur l'emploi à travers le Québec. Alors que des centaines d'occasionnels vivent actuellement dans la crainte de perdre leur emploi, la présidente du Conseil du trésor ne trouverait-elle pas normal et humain d'indiquer à cette Chambre quels impacts ces compressions auront sur le personnel occasionnel?

Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, on sait fort bien que, quand on doit faire des compressions d'effectifs, bien sûr, les premières personnes, compte tenu de nos conventions collectives, à être remerciées de leurs services, ce sont les occasionnels qui ont des contrats pour une durée limitée, qui ne sont pas à temps complet.

Bien sûr, il y a tout un mécanisme, en vertu des conventions collectives, qui fait que, si certaines personnes sont mises en disponibilité, elles ont le choix de prendre le poste de quelqu'un d'autre. Cependant, quand on dit que je ne suis pas au fait du nombre de personnes qui pourraient être mises en disponibilité... Écoutez, hier, j'en ai fait mention – et c'est bien mentionné aussi dans les crédits aussi bien que dans le budget – en 1994-1995, c'est 2397 équivalents temps complet qu'on va devoir diminuer et, compte tenu de la commande du dernier budget de 2 %, c'est 750 de plus. Alors, je pense que c'est facile de faire l'addition.

Cependant, M. le Président, bien sûr que ce n'est pas à moi à dire à quel endroit, parce que chaque ministère doit faire son travail. Chaque ministère doit livrer ses compressions et c'est à chaque ministère de décider, par exemple, tel poste plutôt qu'un autre poste. Mais, déjà, on avait commencé l'exercice en 1993-1994 et on n'a pas vu de mises à pied massives; par contre, on a constaté beaucoup de réaffectations. Mais je ne suis pas en mesure de dire exactement dans quels postes, par exemple, les personnes seront mises en disponibilité.

Le Président: En question complémentaire.

M. Bertrand: M. le Président, puisqu'il s'agit ici d'additionner les pertes de postes ou d'emplois, est-ce que la ministre reconnaît que l'essentiel des 30 % de compressions sur les autres dépenses risque fort de se traduire, dans la réalité, par d'autres abolitions de postes sur les occasionnels, par-dessus celles qui sont déjà prévues au discours sur le budget?

Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, il pourrait arriver que, si un ministère, pour toutes sortes de raisons, ne peut pas livrer ses compressions au niveau des dépenses administratives, on doive aller un peu plus rapidement au niveau des compressions de l'effectif. Oui, il se pourrait. Cependant, je dois vous dire que, jusqu'à maintenant... Encore ce matin, j'avais un rapport de Carrefour-transit et nous avions environ 160 personnes en disponibilité – que ce soit en recyclage ou que nous encadrons actuellement – que nous recevons et que nous encadrons, et que nous essayons de réaffecter ailleurs.

Donc, M. le Président, nous essayons de gérer avec le plus de parcimonie possible afin que ces personnes-là puissent être réaffectées à d'autres postes, mais, comme je le mentionnais, il appartient à chacun des ministères d'identifier les postes qui doivent être coupés.

(11 h 10)

Le Président: En question principale, Mme la députée de Terrebonne.


Gestion du réseau d'aide juridique

Mme Caron: Merci, M. le Président. Le réseau d'aide juridique est le seul organisme gouvernemental en concurrence directe et immédiate avec le secteur privé. La réduction de personnel, la fermeture de bureaux ou, même, l'augmentation de délais d'attente ne peuvent être considérées comme des économies nettes à l'aide juridique puisque toute coupure dans le réseau permanent n'a aucun effet sur la demande et que celle-ci est directement transférée au secteur privé, lequel, il faut le rappeler, dispose d'un budget ouvert. Il n'y a là aucune économie, au contraire. D'ailleurs, M. le Président, le 21e rapport annuel de la Commission des services juridiques est très clair: les coupures du gouvernement libéral de 1992, de 3 700 000 $ dans le secteur public, se sont traduites par des augmentations dans le secteur privé de 14 200 000 $, ce qui fait, M. le Président, que la gestion libérale qui voulait couper les dépenses à l'aide juridique s'est traduite par une augmentation totale des coûts de l'aide juridique, pour l'État, de 10 500 000 $, M. le Président. Et je voudrais déposer ce rapport.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement au dépôt du document?

Des voix: Consentement.


Document déposé

Le Président: Il y a consentement. Donc, le document est déposé. Et votre question, Mme la députée.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Puisque la loi est claire que, lorsqu'une personne est éligible, il faut lui donner un mandat, est-ce que le ministre de la Justice reconnaît que toute coupure de mandat au niveau du secteur public se traduit par une augmentation au niveau du secteur privé?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Lefebvre: M. le Président, la députée de Terrebonne a la mauvaise habitude de faire des équations trop faciles, et à son avantage, évidemment. Ce que je reconnais, M. le Président, c'est qu'on a, au Québec, le système d'aide juridique, lorsqu'on le compare à ce qui se passe au Canada, le plus généreux quant à l'ensemble des services qu'on donne. Et j'ai donné, M. le Président, la semaine dernière, des chiffres qui nous indiquent que, par rapport au produit intérieur brut, la somme d'argent consacrée à l'aide juridique, soit 108 000 000 $ par rapport au budget total du ministère de la Justice, c'est le plus performant au Canada après l'Ontario. Et ce que j'ajoute également, M. le Président, c'est que, lorsqu'un justiciable est admissible à l'aide juridique en regard des revenus, des seuils d'admissibilité, on a, effectivement, l'obligation de donner ces services d'aide juridique, que ce soit avec des avocats permanents à l'intérieur du régime d'aide juridique ou encore, M. le Président, avec un avocat de pratique privée, si le justiciable le décide, parce qu'on a le libre choix, au Québec. Et j'ai toujours indiqué que le principe du libre choix serait maintenu.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Caron: Est-ce que le ministre peut comprendre, M. le Président, que ses coupures de l'an dernier, son budget de 105 000 000 $, finalement, à l'État, parce que les mandats ont été donnés, finalement, dans le secteur privé, ça ne nous a pas coûté 105 000 000 $, ça nous a coûté 116 000 000 $? Est-ce que c'est ça qu'il veut refaire cette année, que ces coupures au public se traduisent par des augmentations au privé?

Une voix: C'est ça!

Le Président: M. le ministre.

M. Lefebvre: M. le Président, la députée de Terrebonne devrait profiter de l'occasion pour féliciter le gouvernement quant à son ouverture d'esprit. Elle a raison. Elle a raison. Le système est bâti de telle sorte, M. le Président, qu'à partir du moment où on est admissible à l'aide juridique, au Québec, on a droit aux services d'aide juridique 12 mois par année, même si on en est rendu à l'avant-dernière semaine de l'année d'opération ou de l'année fiscale, si on veut. Et ça peut provoquer, dans certaines circonstances, et j'oserais dire presque d'année en année, un débordement sur les budgets qui avaient été prévus, sauf...

Une voix: Voyons donc!

M. Lefebvre: Le député de Jonquière, M. le Président...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Lefebvre: ...il doit connaître ça, l'aide juridique, lui!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, en conclusion. En conclusion, M. le ministre.

M. Lefebvre: La députée a raison, M. le Président. Oui, il arrive que certaines années nous obligent, effectivement, à déborder sur les crédits qui avaient été alloués à l'aide juridique, et on le fait à l'aide de certaines mécaniques qui existent au gouvernement du Québec et, entre autres, le Fonds de suppléance. Et ce qui est fondamental, ce qui doit être bien compris, c'est que le justiciable, en tout temps, à partir du moment où il est admissible à l'aide juridique, en regard de son revenu, il a le libre choix de l'avocat – de pratique privée ou permanent de l'aide juridique – et, s'il est admissible, on lui donne le service, peu importe qu'on soit en début d'année ou à la toute fin de l'année, M. le Président.

Le Président: Pour une autre question complémentaire, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: M. le Président, est-ce qu'un gouvernement qui veut faire de la bonne gestion peut comprendre que, quand on coupe dans un budget fermé et que ça se traduit par des augmentations dans le budget ouvert, c'est de la mauvaise gestion?

Des voix: Oui, oui.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Lefebvre: M. le Président, de la mauvaise gestion, ce serait, comme gouvernement, de décider qu'on épargnerait la Commission des services juridiques de l'exercice que cet organisme doit faire, comme tous les autres organismes qui dépendent du ministère de la Justice, et comme le ministère de la Justice doit le faire lui-même et l'ensemble des ministères du gouvernement du Québec. De la mauvaise gestion, ce serait de renoncer, de décider qu'on fait globalement de l'activité de l'aide juridique un cas d'exception. Alors, ce que j'ai indiqué, M. le Président, c'est que la Commission des services juridiques devait se plier à un exercice de rigueur, comme tous les autres organismes qui dépendent du ministère de la Justice, tenir en compte, cependant, certains éléments soulevés au cours des derniers jours par le président de la Commission des services juridiques, éléments sur lesquels je me penche. Mais, sur l'essentiel, et particulièrement quant aux dépenses d'opération, la Commission des services juridiques devra, comme tous les autres organismes, faire son propre examen de conscience et vérifier s'il n'y a pas moyen de récupérer des sous à l'intérieur du régime, comme on le fait ailleurs dans tous les organismes du ministère de la Justice et dans tous les ministères du gouvernement du Québec, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le député de Duplessis.


Mesures pour mettre fin au climat de violence à Kanesatake

M. Perron: Merci, M. le Président. Des Mohawks de Kanesatake en ont assez de la terreur qui sévit sur leur territoire, à un point tel que, vendredi dernier, près de 200 personnes, hommes, femmes et enfants, sont descendues dans la rue pendant plus de deux heures pour signifier à tout le monde qu'elles n'endureraient plus en silence la vie qu'elles mènent depuis déjà plusieurs mois, pour ne pas dire plusieurs années.

Ma question au ministre délégué aux Affaires autochtones: Le ministre peut-il nous indiquer si son gouvernement va, un jour ou l'autre, finir par agir concrètement pour mettre fin à ce climat de violence qui perdure depuis déjà trop longtemps afin qu'on puisse entreprendre, le plus rapidement possible et le plus sereinement possible, des négociations réellement fructueuses avec les Mohawks de Kanesatake?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires autochtones.

M. Sirros: M. le Président, moi, comme d'autres, ai vu et accueilli avec satisfaction l'expression que les gens ont manifestée dans les rues de Kanesatake, de l'intérieur de la communauté également, en liaison aussi avec des gens de l'extérieur avoisinant, d'affirmer la nécessité de suivre ce qu'on a toujours dit ici, M. le Président: il faut que les communautés autochtones et non autochtones apprennent à vivre ensemble dans la paix.

Kanesatake, vous le savez fort bien, est une situation particulière, délicate, sur laquelle il y a actuellement des discussions entre un négociateur du gouvernement fédéral, un médiateur et le Conseil de bande. Quant au gouvernement du Québec, nous avons indiqué que nous sommes prêts à entamer ces négociations avec un esprit d'ouverture, de volonté d'avancer, en autant que ces négociations puissent se dérouler, justement, dans le calme et le respect de l'ordre que réclamaient également les manifestants. C'est dans ce contexte-là que nous sommes prêts à agir, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire.

M. Perron: M. le Président, parlant du gouvernement fédéral, qu'est-ce que le ministre et son gouvernement attendent pour exercer un véritable leadership dans ce dossier au lieu de subir constamment les états d'âme du fédéral, alors qu'on se trouve actuellement dans une période de relative accalmie?

Le Président: M. le ministre.

M. Sirros: M. le Président, pour exercer un véritable leadership dans un dossier, il faut s'appuyer sur des choses qui relèvent de nous. Nous nous appuyons, justement, sur le leadership que nous voulons exercer afin de mener à bien les items qui relèvent de la juridiction du gouvernement du Québec. Il ne s'agira pas de foncer sur des terrains qui, manifestement, à l'heure actuelle, ne nous appartiennent pas, mais nous exigeons et nous demandons sérieusement au gouvernement fédéral, constamment, qu'eux aussi prennent les responsabilités qui leur reviennent, de la même façon et avec la même rigueur, pour un retour à une situation de normalité, M. le Président.

(11 h 20)

Le Président: En question principale, M. le leader de l'Opposition.


Projets de cogénération à Hydro-Québec

M. Chevrette: M. le Président, on sait que le BAPE vient de produire son rapport suite aux audiences du projet Polsky, à Québec, concernant un projet de cogénération. On sait, M. le Président, que, dans ce rapport, on peut y lire que c'est un projet qui, économiquement, est fort valable. Mises à part quelques modifications au projet que demande le BAPE, on sait que, déjà, le promoteur est prêt à corriger dans le sens des indications du BAPE.

Ma question au ministre des Ressources naturelles est la suivante: Est-ce que le ministre, qui, avec le premier ministre, ont annoncé que les projets de cogénération seraient annoncés par le gouvernement et seraient étudiés, un après l'autre... Devant un constat aussi positif, est-ce que le ministre des Ressources naturelles entend dicter à Hydro-Québec la ligne de conduite à prendre face à ce projet précis?

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Sirros: Non, M. le Président, pas à ce stade-ci, étant donné que nous sommes devant une situation où effectivement il y a des surplus qui sont clairement démontrés. Il y a une proposition de remise, pendant deux ans, de la filière cogénération avec la réduction qui se joignait au nombre de mégawatts qu'Hydro-Québec aurait besoin... Et c'est dans ce contexte-là qu'Hydro-Québec discute actuellement avec les différents promoteurs afin de remettre, y inclus celui auquel le député fait référence, un échéancier différent de celui qui avait été prévu initialement, M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président: En question complémentaire.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre voudrait faire le point sur tous les projets de cogénération en cette Chambre et dire combien Hydro-Québec doit verser en millions parce qu'elle ne donne pas suite au projet? Et nous dire également, en seconde question, M. le Président, dans le cas d'un projet qui, environnementalement parlant, est un «plus» dans un programme de création d'emplois, en particulier dans la vieille capitale, si le gouvernement ne pourrait pas prendre pour acquis que ce projet est un «plus» environnemental et l'accorder?

Le Président: M. le ministre.

M. Sirros: Premièrement, pour le premier point du député, concernant les compensations, en quelque sorte, il ne faut pas voir ça comme des coûts, M. le Président. C'est l'équivalent. C'est l'équivalent de ce qu'Hydro-Québec fait normalement quand elle fait des études de faisabilité, dans les projets, par exemple, hydroélectriques qui ne voient pas le jour immédiatement. Alors, dans les contrats de cogénération, il y a des clauses de retrait, si vous voulez. Advenant, effectivement, que la comparaison se tienne, à un moment donné, il faut remettre ces choses-là.

Quant au deuxième point, M. le Président, il s'agit, oui, de créer des emplois, oui, de faire face aux points de vue qui touchent à l'environnement, de façon positive mais, aussi, il faut faire tout ça de façon responsable. Alors, dans le contexte où nous sommes, qui est celui d'un surplus d'énergie, il ne s'agirait pas, à moins que ce soit le programme de création d'emplois qu'aurait un éventuel gouvernement péquiste, de creuser des trous pour les remplir après.

Nous sommes dans une situation, M. le Président, où il y a un surplus d'énergie. Les projets de cogénération sont retenus. On voit ça, dans le temps, parce que ces choses-là évoluent et, effectivement, avec la révision de l'offre et de la demande qui sera faite, nous serons en mesure, d'ici quelques mois, de revoir les chiffres qu'Hydro-Québec nous présente.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre peut déposer en cette Chambre le montant des pénalités que doit payer Hydro-Québec à ces compagnies qui ont fait de la recherche, qui ont dépensé de gros sous, effectivement? Combien Hydro-Québec doit-elle payer en pénalités, sans créer aucun emploi?

Le Président: M. le ministre.

M. Sirros: M. le Président, le député aime choisir les mots qui, pense-t-il, vont faire réagir les gens. Et je répète qu'il s'agit de clauses qui correspondent aux études de faisabilité. Les montants varient selon l'état d'avancement de chacun des projets. Les projets, je pourrais bien déposer, M. le Président, informer le député du processus de calcul. C'est tant du kilowattheure, par exemple, si le projet est arrivé à tel stade d'avancement, etc.

Donc, dans ce cadre-là, M. le Président, je disais que c'est dans les opérations normales, en quelque sorte, de toute entreprise comme Hydro-Québec de faire des études de faisabilité ou, dans ce cas-ci, de prévoir qu'elle ne se ferait pas lier par des exigences qui ne correspondraient pas aux besoins.

Je sais que, des fois, les opposants en face ignorent ce que c'est que de réagir de façon responsable, M. le Président.

Le Président: Pour une question principale, M. le député de Montmorency.


Perception de la TVQ sur les véhicules usagés

M. Filion: Merci, M. le Président. Concernant la TVQ applicable à la vente de véhicules routiers usagés, le dernier budget nous indique que la TVQ doit être perçue sur la valeur déterminée dans le Canadian Red Book, seule référence indiquée au dernier budget, M. le Président. Un communiqué de presse du 31 mai 1994 du ministre du Revenu ajoute une autre référence pour déterminer la valeur des camions usagés, soit celle indiquée dans le Truck Blue Book, M. le Président, lequel comporte des valeurs en dollars américains, une référence qui complique la vie des détaillants d'automobiles et de camions, qui, en plus de calculer la taxe, doivent à chaque jour tenir compte du taux de change américain.

Alors, ma question au ministre du Revenu, M. le Président: Pourquoi le ministre a-t-il ajouté cette nouvelle référence qui est en dollars américains et qui complique la vie de tous les détaillants d'automobiles et de camions au Québec, M. le Président?

Le Président: M. le ministre du Revenu.

M. Vallerand: M. le Président, le gouvernement, dans ses efforts pour améliorer ses relations avec ses clientèles, a rendu publiques une série de mesures – je l'ai fait en présence du premier ministre, il y a quelque temps; mon collègue, le ministre des Finances, en a annoncé lors du discours sur le budget... Dans cet esprit-là, de vouloir davantage améliorer nos relations avec nos clientèles, ce que je peux dire au député de Montmorency, c'est que, dans un premier temps, la référence pour les voitures usagées, communément appelée la référence du livre rouge – ou Red Book – a été une demande qui nous a été adressée par l'association des détaillants de voitures usagées du Québec, au ministère du Revenu, pour leur faciliter la tâche. En ce qui a trait à sa référence sur la vente de camions, dans l'esprit qui nous anime de tenter d'harmoniser nos relations avec nos clientèles, ce que je pourrais proposer, c'est de rencontrer le plus rapidement possible les détaillants en question et de voir avec les gens du ministère de quelle façon on ne pourrait pas leur faciliter la tâche si, comme le député le prétend, M. le Président, ça leur pose problème.

Le Président: C'est la fin de la période de questions.

Il n'y a pas de votes reportés.


Motions sans préavis

Motions sans préavis. M. le vice-président de l'Assemblée nationale et député de Jeanne-Mance.


Souligner le 30e anniversaire du Journal des débats

M. Bissonnet: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale souligne le 30e anniversaire du Journal des débats et félicite ses artisans d'hier et d'aujourd'hui pour leur professionnalisme dans la réalisation de ce travail essentiel au bon fonctionnement de l'institution parlementaire et à la connaissance de son histoire.»

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: Je constate qu'il y a consentement à la présentation de cette motion.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Je vais donc céder la parole au vice-président de l'Assemblée et député de Jeanne-Mance.


M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, c'est avec plaisir et grand honneur que je veux souligner en cette Chambre le 30e anniversaire du Journal des débats . En effet, M. le Président, l'Assemblée nationale compte sur un allié fidèle, qui a publié, bon an mal an, plus de 450 000 pages et plus de 320 volumes. M. le Président, vous me permettrez, puisqu'on parle d'impression, de vous impressionner quelque peu en vous disant que, si nous mettions bout à bout les pages concernant les propos des élus de l'Assemblée nationale, on aurait à parcourir 3500 km de pages.

J'aimerais, en cette année du 30e anniversaire, rappeler brièvement l'historique du Journal des débats . Comme vous le savez, M. le Président, la première parution officielle du fascicule du Journal des débats a eu lieu en janvier 1964, sous l'habile direction de M. Benoît Massicotte. De 1979 à 1981, M. Jean-Jacques Saintonge assura l'intérim, sous la responsabilité du directeur général des communications, M. André Beaulieu. En 1981, M. Jean-Jacques Saintonge fut nommé directeur du Journal des débats , poste qu'il occupa jusqu'en 1988.

De septembre 1988 à février 1994, près de 25 ans après sa fondation, le Journal des débats peut compter cette fois sur une femme, Mme Yvette Roberge, pour en assumer la direction. Depuis, la direction est assumée par une pionnière du Journal des débats , Mme Lise Grondin. La Direction générale de l'information relève, depuis 1983, de M. André Lavoie. Si vous me le permettez, M. le Président, j'aimerais souligner la présence, dans nos galeries, de ces dirigeants qui ont oeuvré, au fil de ces 30 ans, au Journal des débats .

(11 h 30)

Depuis ses débuts, M. le Président, le Journal des débats reste, d'abord et avant tout, un outil de travail essentiel à l'usage des parlementaires, des différents paliers de l'administration gouvernementale et de la presse. Aujourd'hui, le Journal des débats demeure essentiel au bon fonctionnement de la vie parlementaire. À ce titre, M. le Président, on peut dire que notre journal des débats est reconnu par plusieurs jeunes démocraties tiers-mondistes qui sont venues et qui viennent consulter les experts de l'Assemblée nationale du Québec pour reproduire dans leurs assemblées délibérantes le modèle québécois.

Je me rappelle, M. le Président, en 1970, le maire de Montréal, à l'époque Me Jean Drapeau, me déléguait pour faire une étude du Journal des débats , car il était de l'intention, à l'époque, du conseil de la ville de Montréal d'entreprendre la parution d'un journal des débats. Donc, à ce moment-là, j'ai rencontré M. Benoît Massicotte, et je n'aurais jamais pensé, M. le Président, que, quelque 20 ans plus tard, j'aurais à présenter une motion pour souligner le 30e anniversaire du Journal des débats .

Des voix: Bravo!

M. Bissonnet: Alors, M. le Président, à l'aube des années 2000, le Journal des débats n'a pas fait exception et s'est inscrit à l'heure de l'informatique pour assurer une impression non révisée, qui répond, dans de très courts délais, aux besoins des députés et autres usagers qui en font la demande.

M. le Président, le Journal des débats est devenu une institution au fil de ces 30 années. Il est, sans conteste, un document essentiel de travail, utile aux parlementaires, au personnel de recherche et à la presse en général. Il est également une référence indispensable pour l'histoire du parlementarisme québécois.

En terminant, M. le Président, saluons le 30e anniversaire, en cette année 1994, et permettez-moi de rappeler le travail exceptionnel de ces ouvrières et ouvriers qui, depuis 30 ans, nous écoutent – et, des fois, difficilement – et nous transcrivent fidèlement. À chacun et à chacune de tout ce personnel, au nom de tous les parlementaires qui ont siégé à cette Assemblée nationale du Québec depuis 30 ans, un grand merci. Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le vice-président. Est-ce que cette motion soulignant le 30e anniversaire du Journal des débats est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Alors, toujours aux motions sans préavis, Mme la députée de Johnson.


Souligner les 50 ans d'ordination presbytérale de l'archevêque de Sherbrooke, Mgr Jean-Marie Fortier

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. «Que cette Assemblée souligne les 50 ans d'ordination presbytérale de l'archevêque de Sherbrooke, Mgr Jean-Marie Fortier, et lui rende hommage pour l'ensemble de son oeuvre tant sur le plan matériel que sur le plan spirituel.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à ce que nous débattions de cette motion?

Une voix: Consentement.

Le Président: Il y a consentement? Donc, consentement. Donc, vous avez la parole, Mme la députée de Johnson.


Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, quelques dates importantes dans la vie de Mgr Fortier. Sa naissance, bien sûr, le 1er juillet 1920, dans la paroisse Saint-Jean-Baptiste, de Québec, où Mgr Fortier a fait ses premières tentatives en tant que servant de messe, comme tous les autres enfants, pour pratiquer une messe, qu'il dira plus tard. Le 16 juin 1944, donc, il a été ordonné prêtre.

Puis l'Estrie, le diocèse de Sherbrooke a tenu à souligner son 50e anniversaire de prêtrise en fin de semaine, dimanche, chez nous, en la cathédrale de Sherbrooke. J'ai tenu à faire cette motion ici, à l'Assemblée nationale, M. le Président, pour vous dire que, dans notre diocèse, ce ministre du bon Dieu a donné de sa personne pendant... Maintenant, ça fait 26 ans qu'il est à Sherbrooke. Donc, il a fait plus que le quart de sa vie d'archevêque à Sherbrooke, et nous en sommes très fiers.

Mgr Fortier a été nommé évêque le 23 janvier 1961, à Sainte-Anne-de-la-Pocatière, par Mgr Sebastiano Baggio, qui était délégué apostolique au Canada, et, le 21 janvier 1965, Mgr Fortier est nommé évêque de Gaspé. Il fait bâtir la cathédrale de Gaspé du 14 septembre au 8 décembre 1965 et il participe, pour une seconde fois en deux ans, à la quatrième session et à la clôture du Concile de Vatican II. Le 23 avril 1968, Mgr Fortier est nommé archevêque de Sherbrooke. Il devient, la même année, chancelier de l'Université de Sherbrooke.

M. le Président, un jeune abbé, à l'époque, qui venait d'apprendre la nomination de Mgr Fortier dans notre diocèse, l'abbé Michel Naud, écrivait, le 27 avril 1968, sur les qualités de notre jeune archevêque qui s'en venait dans notre diocèse. Il disait: «La politesse et la courtoisie habitent chez lui sans effort. Cette noblesse naturelle est loin de le rendre pincé et froid. Il allie à la distinction une simplicité remarquable. Celle-ci le rend très sociable, voire populaire. Il ne s'entiche pas du protocole et il ne met pas sa valeur dans les signes honorifiques. Il a de l'entregent et il ne souffre pas de timidité.»

M. le Président, 26 ans après, nous pouvons dire que les propos de ce jeune abbé sont tout à fait ce que nous connaissons de Mgr Fortier. Jamais Mgr Fortier ne s'est embarqué dans du protocole jusqu'aux oreilles. Mgr Fortier est un homme simple et d'une grande bonté. Il accueille tout le monde avec chaleur et donne la place à tout le monde afin de lui parler et d'intervenir de la façon dont il le veut. Il est d'une simplicité remarquable, M. le Président. Et, lorsqu'il a été élu évêque de Gaspé, il avait souligné en cette façon ce qu'il devenait. Il disait: «L'amitié se nourrit d'un incessant échange. C'est pourquoi l'évêché sera considéré comme la maison du père où il fait toujours bon revenir quand l'âme du fils déborde de joie ou qu'elle est momentanément meurtrie. Je rêve de multiplier les visites personnelles, dépouillées de tout protocole, à l'occasion desquelles, dans l'intimité du presbytère, au fil des conversations, il nous sera permis de goûter la douceur du psaume. Oh! qu'il est agréable pour des frères d'habiter sous un même toit.»

Donc, pendant toutes ces années, M. le Président, Mgr Fortier a témoigné de cet amour envers les siens, et, aujourd'hui, l'Assemblée nationale se joint aux gens de notre diocèse pour lui dire: Bravo! Mgr Fortier, pour ces 50 ans de vie sacerdotale. Et nous voulons vous souhaiter aussi une longue vie et beaucoup de santé. Merci.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, Mme la députée. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Sherbrooke.


M. André J. Hamel

M. Hamel: M. le Président, merci. C'est évidemment avec plaisir que j'interviens pour appuyer cette motion relative au 50e anniversaire de prêtrise de l'archevêque de Sherbrooke, Mgr Jean-Marie Fortier. Mgr Fortier s'est fait connaître toute sa vie pour sa persévérance, sa ténacité et sa détermination à oeuvrer au sein du clergé, et son engagement de tous les instants envers sa communauté m'apparaît être un fidèle portrait de sa personnalité.

Mgr Fortier possède une force de persuasion remarquable, et son rôle d'évangélisation prouve jusqu'à quel point l'archevêque de Sherbrooke a su édifier une oeuvre considérable au cours de ces 50 années. Mgr Fortier a toujours été près de ses diocésains, les écoutant avec patience et compréhension, et surtout, il sait porter le jugement approprié à toute misère humaine ou difficulté qui se présente à nous. Mieux que personne, il est à même de comprendre le pouvoir et les limites de la condition humaine. Mgr Fortier a toujours témoigné d'un profond respect de la nature humaine par cette qualité d'amour christique qu'il a toujours exercée avec sagesse et humilité. Mgr Fortier fut un témoin privilégié de l'évolution de la société québécoise et un acteur important des belles et grandes choses qui ont marqué cette évolution vers un Québec moderne. Mgr Fortier, félicitations pour vos 50 années d'engagement sacerdotal, de partage et de dévouement. Merci, M. le Président.

(11 h 40)

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Maintenant, je suis prêt à reconnaître un autre intervenant, M. le député d'Argenteuil et ministre des Affaires municipales. M. le ministre.


M. Claude Ryan

M. Ryan: Oui. J'apprenais justement ce matin qu'une fête a eu lieu ces jours derniers en l'honneur de Mgr Fortier. Mgr Fortier est un vieil ami de ma famille. Il était un ami très proche de ma femme. Il était venu prononcer l'homélie, d'ailleurs, aux funérailles de ma femme. Je l'ai connu tout jeune, quand il était à Québec. Et ce qu'a dit la députée de Johnson est profondément juste: c'est un homme d'Église au sens le plus plénier du terme, un homme doux qui a les plus belles qualités de l'esprit de Québec. Son père était gérant de caisse populaire à Québec et il avait l'esprit de Québec dans tout ce qu'il a de doux, de raffiné, de délicat qui enrichit tout le Québec. Ensuite, il est allé à Gaspé, comme l'a dit la députée de Johnson tantôt, et il y a laissé un souvenir magnifique. Et, à Sherbrooke, ça a été le couronnement de sa longue carrière.

J'ai été content de le retrouver ce matin, lors d'un bref échange téléphonique, en parfaite santé, d'une grande sérénité. Il y a un point que nous partageons en commun, dont nous avons commencé à discuter – j'espère que c'est seulement le début – c'est des projets de retraite. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, ceci met fin au débat. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Elle est adoptée. Très bien.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. J'avise donc cette Assemblée qu'aujourd'hui – et, compte tenu du retard causé par l'incident de ce matin, je demanderais aux parlementaires d'être attentifs – après les affaires courantes jusqu'à 13 h 30, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi 211, Loi concernant la municipalité régionale de comté du Haut-Richelieu; le projet de loi 237, Loi concernant la ville de Saint-Romuald; le projet de loi 299, Loi concernant certaines exploitations agricoles dans le territoire de la ville de Laval; le projet de loi 286, Loi concernant certains immeubles du cadastre de la paroisse de L'Ancienne-Lorette.

Après les affaires courantes jusqu'à 13 h 30 et de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 23, Loi sur la Société du tourisme du Québec. De 20 heures à 24 heures, à la même salle, la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Après les affaires courantes jusqu'à 13 h 30 et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission du budget et de l'administration entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi 274, Loi modifiant la Loi constituant en corporation Les Oblates Franciscaines de Saint-Joseph; le projet de loi 298, Loi concernant Compagnie Montréal Trust; le projet de loi 302, Loi modifiant la Loi concernant le Mouvement des caisses Desjardins. De 20 heures à 24 heures, à la même salle, ladite commission poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le leader du gouvernement. Comme il y a dépassement de l'heure, ça nous prendrait le consentement de cette Assemblée...

M. Garon: Pourquoi?

Le Vice-Président (M. Tremblay): Parce qu'on dépasse jusqu'à 13 h 30; c'est-à-dire qu'habituellement on arrête les travaux à 13 heures; là, on va jusqu'à 13 h 30, compte tenu des problèmes qu'on a eus ce matin.

M. Garon: Ça vaut seulement pour l'Assemblée?

Le Vice-Président (M. Tremblay): Pour les commissions également?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça vaut également pour les commissions. J'ai eu l'occasion d'en discuter avec le leader de l'Opposition officielle ainsi qu'avec les députés indépendants.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Donc, est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Très bien.

Alors, renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Il n'y en a pas.

Alors, les affaires du jour.

Une voix: Non, non, non.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui? Excusez-moi, madame. Mme la députée de Terrebonne. Mme la députée.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, nous devions nous retrouver en commission parlementaire pour étudier le projet de loi 140, au moins en soirée. Qu'est-ce qui justifie que le projet de loi 140 n'apparaît plus au menu?

Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Comme Mme la députée de Terrebonne l'aura sans doute remarqué, c'est le projet de loi 15 sur lequel se pencheront les députés de cette commission parlementaire au cours de la soirée. Dès que nous aurons disposé de ce projet de loi, nous serons en mesure de donner les avis, suite à des consultations avec l'Opposition qui s'imposeront alors.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Est-ce que ça va pour les renseignements? Ça va. Très bien.


Affaires du jour

Alors, nous allons passer aux affaires du jour. Aux affaires du jour, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Il s'agit simplement d'appeler l'article 3 du feuilleton.


Affaires prioritaires


Motion de censure proposant que l'Assemblée blâme le gouvernement pour son manquement à défendre et à promouvoir l'unité canadienne et pour sa réticence à contrer les attaques dont elle est l'objet

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Alors, aux affaires prioritaires, M. le député de D'Arcy-McGee propose la motion de censure qui suit: «Que l'Assemblée nationale blâme le gouvernement pour son manquement à défendre et à promouvoir avec cohérence et rigueur l'unité canadienne et pour sa réticence à contrer agressivement les différentes attaques dont elle est l'objet et qui menacent d'entraîner de sérieuses conséquences économiques pour les Québécois.»

Avant que le débat sur cette motion de censure s'engage, je vous informe de la répartition du temps de parole établie pour la discussion: 20 minutes seront allouées à l'auteur de la motion pour son intervention et 10 minutes pour la réplique. Les autres députés indépendants disposeront ensemble d'une période de 10 minutes. De plus, un premier bloc de 30 minutes sera réservé au groupe parlementaire formant le gouvernement. Le reste du temps sera partagé également entre les groupes parlementaires, et, nécessairement, dans le cadre de cette disposition, aucune limite n'est allouée.

Alors, je suis prêt à entendre le premier intervenant, M. le proposeur de la motion, M. le député de D'Arcy-McGee, pour 20 minutes. M. le député de D'Arcy-McGee.


M. Robert Libman

M. Libman: Merci, M. le Président. M. le Président, la motion de censure de ce matin blâme le gouvernement libéral de ne pas être suffisamment fort et efficace dans sa défense de l'unité canadienne et pour son manquement à défendre et à promouvoir l'unité canadienne avec cohérence et rigueur. Elle blâme également le gouvernement pour sa réticence à répondre agressivement aux diverses attaques et critiques dont l'unité canadienne a été l'objet depuis de nombreux mois, alors que les Québécois se préparent pour une très importante élection et possiblement pour un référendum plus tard sur la séparation du Québec.

Ces attaques, M. le Président, proviennent de ceux qui prônent la sécession du Québec du Canada et se sont intensifiées en importance et en fréquence depuis que le Bloc québécois a fait élire 54 membres à la Chambre des communes d'Ottawa, devenant l'Opposition officielle.

But, the intent of the motion this morning is that, despite some recent signs of life, the governing liberals have to be pushed harder and they have to be pushed further to attack the substance of the separatist threat and the separatist argument. I believe that the credibility of the separatist movement, and the Parti québécois opposition in particular, must be put into serious question, not only to ensure victory for federalists in an eventual referendum, but to aid in defeating the Parti québécois in the upcoming election. And the solution, M. le Président, is the PQ's own program, which provides the blueprint for an independent Québec, a blurred vision, which is very vulnerable to attack, yet has gone, for the most part, unchallenged.

Unfortunately, there are only two political formations that have a chance of forming the next government: the governing Liberals, whose defence of Canadian unity seems to consist of blandly promoting the benefits of a Canadian economic market and warning against its disruption, and the Official Opposition PQ, who would tear apart the Canadian economic market only to try to patch it up later through negotiations.

The Official Opposition promises to hold a referendum on the separation of Québec within a year of the election if they accede to power. Their political program is built around the illusion that a smooth transition from Canadian province to independent sovereign state will take place once a simple majority of Quebeckers vote in a referendum in favour of Québec sovereignty, which remains a concept that is still poorly understood by many Quebeckers. Much of the political program of the PQ is based on this hypothesis, which many Quebeckers unfortunately believe is actually possible, is actually «doable».

And the greatest danger, M. le Président, the greatest threat to Canadian unity is the misguided belief by many Quebeckers that Québec's accession to independent statehood will be simple and will be painless. This is why the governing Liberals must be more vocal in clearly helping Quebeckers understand the specific consequences and the ramifications of this debate, enough to intelligently sift through what is right and what is wrong.

(11 h 50)

The separatist forces have dominated much of the discussion and debate up until now. The leader of the Bloc québécois has been trotting around the globe. The leader of the Parti québécois has been creating waves by making predictions, making bold predictions and threats here at home. They in fact have drawn many Canadians into the fray, and they have created a great deal of anxiety among Canadians and especially among federalists in this province. This concern and much of the frustration among Québec federalists has been due in part to the feeling that there is a void on the political spectrum in this province, that the governing Liberals, and the premier in particular, have been hesitant for much of the past few months to go on the attack or to carefully dissect the PQ program as part of a global strategy. The PQ programme attempts to pull the wool over the eyes of the population of Québec. This must be exposed with a structured and systematic degree of regularity. The premier's interventions often seemed improvised, sporadic, and, at many times, ambiguous. Canada cannot afford for this ambiguity, for this lack of coherence to continue from the so-called leader of the federalist party in Québec.

This past week, the Government has shown signs of moving in the right direction and going on the offensive. The premier has dramatically shifted gears. He has shifted his focus for the coming election campaign from jobs and the economy to a debate on sovereignty. The premier, in fact, has been very critical in the past few weeks of the leader of the Official Opposition, going so far as to call him a dictator, and he has even warned that the PQ is set to torment Canada.

However, his warnings will continue to ring hollow, set within the present electoral context, and continue to fall on deaf ears if made in the absence of a coherent defence of Canadian unity, and if he does not explain to Quebeckers in substantive terms why they should not support Québec sovereignty, what the inherent contradictions are, what the costs are, what the dangers are and what the myths are.

The premier has gone to great lengths to remind Quebeckers that the PQ is a sovereignist party, that the PQ program calls for a mandate to negotiate sovereignty with the rest of Canada. This is not a surprise to Quebeckers. Quebeckers have known this. In fact, polls show that over 70 % of Quebeckers know that a PQ government will bring in a referendum on sovereignty within the first year of its mandate. But in his zeal to remind Quebeckers, he even made the surprisingly risky affirmation that a vote for the PQ is equivalent to a yes vote in the 1980 referendum. This is an irresponsible manoeuvre, that could legitimize something that is illegitimate, that could very easily be made to backfire for the premier later on.

Quebeckers may very well vote against the Liberal Party for a number of reasons, whether it is Bill 26 on the surtax or the Government's lax environmental record or the image of the Government being a spent force after nine years of power, many of those years having been very difficult economically. There are a whole number of reasons that Quebeckers – that federalist Quebeckers – may vote against the governing Liberal Party, and that vote against the governing Liberal Party cannot be interpreted as support for sovereignty or support for a mandate to negotiate sovereignty-association with the rest of Canada. And this is the risky nature of the commentary of the premier over the past few days, by equating an election win for the PQ with a mandate to negotiate sovereignty-association.

By confirming to Quebeckers that if the PQ wins the election they will have in their pockets this muchcoveted yes vote from René Levesque's 1980 referendum, he is playing a very dangerous game with the future of Québec and has put the short-term interests of his political formation ahead of the overall good of the province and of the country.

The premier could very easily create the atmosphere that he wants for a referendum-style election by constantly harping on the PQ separatist platform. The value of reminding Quebeckers that this vote is about sovereignty is in itself suspect if he is not going to clear up the confusion that exists as to what the implications of sovereignty really are. The PQ's platform, the nuts and bolts, the hows and whys of the separatist ideology is their Achille's heel, and it must be focused on once and for all. The Government must focus and pinpoint all the inherent contradictions and problems that are right there, right there written out in the PQ platform, for everyone to see. And it is about time that those who threaten to break up Canada are challenged. It is about time that a premier of Québec stands up and passionately speaks about why Canada should remain united. It is time for the premier to tell Quebeckers why the PQ programme, why the PQ separatist plans would lead to Québec's economic ruin. Instead, he has chosen to speak in vague terms about maintaining the Canadian economic space, about how an election of the Opposition will weaken Canada. But the premier must tell Quebeckers why, he must tell them why, consistently and coherently; he must not hold back, he must not hedge in this debate. The truth is the greatest weapon that the federalists have in their possession, it is the greatest asset we have about the future of Québec in Canada, about the constitutional debate, about the debate about Canadian union. It is our greatest asset, our greatest weapon; it must be used to maximum advantage.

Quebeckers have to be told clearly and unequivocally why they should not support a party with such a dangerous programme, and the premier must be the first, he must be the first to wave the PQ programme in the air, on a daily basis, and to dissect it consistently, harshly and systematically.

Quebeckers have to understand the meaning of a yes vote, that once Quebeckers vote in favour of sovereignty in a referendum, they have to sit down at a negotiating table with the rest of Canada, and they have to try to negotiate to reobtain all the advantages they had before by being a partner in the Canadian Federation. In order for the sovereignty process to even be successful, to be meaningful, they must be able to negotiate all these benefits, all these privileges for a customs union, for an economic union, to continue the free circulation of goods, services, people and capital; to maintain their territory. How could anyone in their right mind believe that the rest of Canada, that Canadians would be willing to sit down with an independent Québec, with a Québec that has just slammed the door to the rest of Canada, and give them back all the goodies they enjoyed by being part of the Canadian Federation?

If you think the constitutional negotiations were difficult, just wait till Québec pulls the plug on the rest of Canada. The negotiations during Meech and Charlottetown, the objective of these negotiations had a positive incentive, had a positive objective, that being bringing Québec back into the constitutional family and securing Québec's signature on the Canadian Constitution. We saw the difficulty of these negotiations; even those negotiations failed. Imagine once Quebeckers went out: there will no longer be an incentive for the rest of Canada to negotiate with Québec, to accede to Québec's demands.

Quebeckers have to understand that sovereignty or the concept of having association with sovereignty is nothing but a decoy to fool Quebeckers into believing that this process is possible, and it is only afterwards they will realize that the association was not part of the deal, that they could justifiably vote for secession, for independence, democratically, but they cannot force Canada's hand in accepting an economic association, which is vital to make the sovereignty even the least bit feasible.

Quebeckers have to understand the debt burden involved with going out on its own. Québec already is the most heavily taxed corner in North America. Québec already has a tax-supported debt of over $ 80 000 000 000. Add to that the share of the federal debt that belongs to Québec, so that Year One of Québec's independence, of this new country called Québec, Québec will have to support on its shoulders a debt of over $ 200 000 000 000, which is $ 30 000 for every man, woman and child in this province. Try to explain how Québec will be able to afford to establish the programmes that it presently enjoys, how Quebeckers will be able to continue to enjoy the standard of living that they are accustomed to, having to shoulder such an enormous debt burden.

(12 heures)

The Official Opposition confidently says that Québec will just sit down and merely enter into a free trade negotiation, a free trade agreement with the United States. Picture this, M. le Président: the United States sitting down at a negotiating table with this independent country of Québec with a population the size of metropolitan Chicago. How could anyone in Québec believe that we will be able to extract any advantageous trade position from these negotiations?

Another point that Quebeckers have to recognize, and have to accept, and have to realize is a fundamental part of this debate is the question of territory. And despite the angry or the emotional nature of this debate about territory, despite the fact that this premier and his predecessor spoke about the fact that Québec's territory is indivisible, Quebeckers have to understand that, in any negotiation, this question will be on the table: the question of the land that was ceded to Québec in 1898 and 1912 will be part of discussions. But Quebeckers have to understand that if there is this inherent right to self-determination for a defined geographical entity, with a specific language and culture within Québec, and this collectivity goes before international authorities and international tribunals to recognize the legitimacy of this accession or this right to self-determination, it must be understood that other collectivities within Québec may very well have this same right to self-determination, and that the domino effect that is unleashed with the breakup of a country is impossible to predict. There is no way that anyone in this House can say, with any degree of certainty, that the question of boundaries and territories is not one for discussion, is not one for acrimonious, difficult and emotional debate.

Even the question of the protection of the French language and culture, M. le Président, will be threatened in an independent Québec. Right now, much of the justification for language legislation is the fact that Québec is surrounded by a sea of 250 000 000 English-speaking North Americans. If Québec becomes independent, the rest of Canada will have very little reason to remain an officially bilingual country. So, the buffer of a bilingual country to the East of us and to the West of us will disappear in no time, and, therefore, that feeling of being surrounded by a sea of English will only intensify, and there will be even greater warnings about the threat to the French language and culture once Québec really becomes this island in this North-American sea of English.

The question of federal civil servants being transfered to Québec city is completely ridiculous. It is ludicrous to think this transfer will happen easily.

M. le Président, les Québécois doivent comprendre dans quoi ils s'embarquent. Un sondage CROP, tenu en mars 1992 auprès de 1008 Québécois, demandait quelle était leur perception de la souveraineté. Les résultats ont été extraordinairement révélateurs. Parmi ceux qui avaient une opinion, 54 % croyaient qu'un Québec souverain continuerait d'utiliser le dollar canadien; 56 % croyaient que l'armée canadienne continuerait à protéger le Québec; 33 % croyaient qu'un Québec souverain n'émettrait pas son propre passeport; 25 % croyaient qu'un Québec souverain continuerait d'élire des députés à Ottawa; 48 % croyaient que, dans un Québec souverain, les Québécois garderaient leur citoyenneté canadienne et, finalement, M. le Président, si le Québec devenait souverain, 36 % croyaient que le Québec continuerait de faire partie du Canada. Alors, qu'est-ce que ça nous montre, M. le Président?

The results of this poll reveal an important dynamic: on the one hand, separatist leaders have been successful at confusing Quebeckers, leading them to believe that sovereignty is possible, that Quebeckers could have their cake and eat it, that we flick a switch: Québec becomes sovereign and life will go on as it was before. This is completely false.

But, at the same time, M. le Président, this poll also shows that the Government has not got the message out clearly enough to Quebeckers, that there is a void, that the Government has been timid in painting in black and white the true consequences of separation and has not defended Canadian unity, has not promoted the greatest nation in the world sufficiently enough. And it is time for this Government to be severely reprimanded and redirected in a more effective cogent and forceful direction, which is the intent of the motion of censure this morning.

This premier must not allow himself to be locked in the same electoral political game as his predecessor, who never allowed himself to go to far to sound federalist, for fear of offending the nationalist movement in Québec. It is by doing so, by dissecting the PQ programme, by exposing to Quebeckers that the basis of the Official Opposition's political existence is nothing but an illusion, that this Government will have success and will the future of Canada be brighter and more prosperous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Pour la gouverne de ces travaux, permettez-moi de vous signaler que la formation du gouvernement, le Parti libéral, aura 45 minutes à sa disposition, que le Parti québécois, il lui reste 15 minutes, et les indépendants, 10 minutes.

Alors, je suis prêt à reconnaître maintenant un député de la formation ministérielle. M. le député de Rousseau.


M. Robert Thérien

M. Thérien: Merci beaucoup, M. le Président. Ça me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur la motion de censure du député de D'Arcy-McGee. Avant de donner mon opinion sur la motion de censure, j'aimerais qu'on la relise ensemble, et on va s'apercevoir que peut-être le député de D'Arcy-McGee n'a pas utilisé les bons mots. Parce que je pense que le député de D'Arcy-McGee souhaite que le Québec reste au Canada, la même chose que la formation ministérielle, sauf que les termes employés et la méthode diffèrent énormément, M. le Président. Je la lis avec vous.

«Que l'Assemblée nationale blâme le gouvernement pour son manquement à défendre...». M. le Président, est-ce que le député de D'Arcy-McGee a suivi le premier ministre du Québec, les ministres du Québec, le gouvernement du Québec? Depuis des mois, on dit qu'on veut l'unité canadienne, on veut un fédéralisme en mouvement, on veut négocier de façon à ce que les Québécois aient le plus d'atouts possible, qu'il y ait un Québec fort dans un Canada. Donc, son «manquement à défendre», je pense que le député de D'Arcy-McGee n'a pas lu, n'a pas suivi ce que les gens du gouvernement ont fait.

Et je continue, je continue, M. le Président, la motion: «...et à promouvoir avec cohérence et rigueur l'unité canadienne...». M. le Président, je ne vous les lirai pas, mais j'ai amené toutes les ententes depuis 1989 – j'en ai un cahier complet, et j'aurais pu amener les ententes de 1985 à 1989 – toutes les ententes que le gouvernement du Québec a réussi à négocier avec le gouvernement canadien. C'est quoi, ça, «promouvoir avec cohérence»? Être cohérent, c'est négocier et obtenir pour les citoyens du Québec des valeurs sûres. Et je continue: «...et pour sa réticence à contrer agressivement...». Et c'est là que j'arrête, M. le Président. C'est la méthode. Comment on va s'y prendre pour défendre l'unité canadienne? Je connais très bien le député de D'Arcy-McGee. Je ne voudrais pas qu'il soit l'un de ceux qui veulent composer le Québec et le Canada sans les francophones. Je ne voudrais pas qu'il soit de ceux-là. Je ne voudrais pas qu'il soit extrémiste. Je sais qu'il ne l'est pas, mais il a des tendances, il a des tendances. Mais je ne voudrais pas, non plus, qu'il soit un peu comme le Parti québécois, qu'il veuille séparer totalement le Québec du Canada. Il ne faudrait pas se retrouver avec deux pôles complètement extrémistes. Je n'emploie pas ce mot-là pour le député de D'Arcy-McGee parce que je sais qu'il est capable de beaucoup plus de modération, mais il ne l'a pas démontré dans sa motion de censure.

Nous, le Parti libéral, le gouvernement, on veut gérer le Québec et le Canada dans l'unité, la modération, le respect, et je pense qu'on l'a démontré. Lorsque le député de D'Arcy-McGee dit «sa réticence à contrer agressivement les différentes attaques dont elle est l'objet et qui menacent d'entraîner de sérieuses conséquences économiques pour les Québécois», ça, on est d'accord. On sait très bien que, s'il y a une rupture au Québec, il y a des conséquences énormes pour les Québécois. On est parfaitement d'accord. C'est dans les moyens. Le Parti québécois, présentement, son jeu est clair: il veut séparer le Québec sans connaître pour autant les désavantages. Puis on ne connaît même pas les avantages. Puis on ne nous parle surtout pas des désavantages.

C'est pour ça, M. le Président, qu'on ne peut pas être d'accord avec la motion de censure de la façon qu'elle est écrite, mais on est d'accord avec les enjeux. L'enjeu, c'est de défendre le Québec dans sa totalité, dans son intégrité, et d'obtenir le plus possible de pouvoirs, mais à l'intérieur du Canada. Et ça, c'est fort important.

M. le Président, c'est pour ça que, quand on parle de «manquement à défendre», je pense qu'il n'a pas suivi le Conseil général de la fin de semaine où le premier ministre a été clair, clair là-dessus.

Une voix: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, un moment, s'il vous plaît. M. le député de Pointe-aux-Trembles, vous avez une question de règlement?

M. Bourdon: Est-ce que vous pourriez vérifier si on a quorum?

(12 h 10)

Le Vice-Président (M. Tremblay): Je vais vérifier ça pour vous, ce ne sera pas long.

Alors, je constate qu'il y a quorum parce qu'il nous faut 11 députés. Alors, malheureusement, M. le député de Pointe-aux-Trembles, vous êtes hors d'ordre.

M. le député de Rousseau, continuez votre intervention, s'il vous plaît.

M. Thérien: Je ne sais pas, M. le Président, si c'est une technique pour me faire perdre l'idée un peu ou si c'est le député qui ne sait pas compter, mais ça m'inquiète énormément pour l'avenir parce que, s'il n'est pas capable de compter le nombre de députés, imaginez-vous le budget de la province. Imaginez-vous le budget de la province! Mais je sais qu'il n'a pas fait ça de façon malicieuse.

Donc, M. le Président, je disais tout simplement que le député de D'Arcy-McGee n'a sûrement pas suivi le Conseil général qui a démontré une fois de plus que le premier ministre du Québec entend défendre bien les Québécois, avec toute l'énergie qu'on lui connaît, mais particulièrement aussi défendre le Québec dans la Fédération canadienne. Et je m'engage à lui communiquer, à lui transmettre dès cet après-midi le texte du discours du chef du Parti libéral, et il pourra le lire attentivement, je pense, M. le Président.

Mais je veux surtout, suite à cette motion qui nous fait parler de l'unité canadienne, qui nous fait parler de l'importance aussi et des dangers auxquels les Québécois vont être confrontés très bientôt, lui faire remarquer que le Parti libéral et le gouvernement du Québec ont deux objectifs. Le premier, c'est de démontrer les avantages de l'unité canadienne – et, ça, c'est important; c'est un côté positif, M. le Président – et aussi de dénoncer ceux qui veulent briser l'unité canadienne. Et je pense qu'on le fait avec des moyens que peut-être que le député de D'Arcy-McGee ne trouvent pas assez agressifs, mais je peux vous dire que, plus le temps va venir, plus l'échéance électorale va venir, je pense que les moyens vont être clairs. Sans être agressifs, ils vont être clairs pour démontrer aux Québécois qu'il y a un danger à suivre les politiques du Parti québécois, et particulièrement à écouter le Bloc québécois à Ottawa.

Mais on met de l'avant, face aux Québécois et aux Québécoises, la particularité des avantages d'être dans l'unité canadienne, et ça, à partir des différentes ententes. Et je commencerai par une première entente, qui, je pense, a démontré que les deux gouvernements peuvent être efficaces, c'est le litige sur le tabac, la taxe. Vous savez, on vivait au Québec une situation difficile, pénible, où les gens défiaient la loi parce que, justement, il y avait une réserve indienne qui était sur trois territoires, où le gouvernement du Québec ne pouvait pas intervenir seul parce que le territoire était québécois, ontarien et américain. Et, M. le Président, lorsqu'on a demandé au gouvernement canadien d'intervenir – parce qu'au-delà de la difficulté de percevoir la taxation il y avait une question de moralité là-dedans, M. le Président – en peu de temps, on est arrivé à une entente avec le gouvernement fédéral. Et dites-moi si, présentement, on parle de fraudes au niveau du tabac. On n'en parle plus du tout, M. le Président, dû à l'efficacité de l'entente. Une efficacité qui était essentielle. Le gouvernement du Québec ne pouvait pas solutionner seul ce problème parce qu'il y avait une question de complexité du territoire.

C'est ça aussi que le gouvernement, le Parti libéral veut mettre de l'avant. Il veut dire aux Québécois qu'il y a des avantages à faire partie de la Fédération canadienne. Et, parmi l'un de ceux que je veux utiliser en campagne électorale, M. le Président: l'ONU nous déclare – déclare le Canada, le Québec étant à l'intérieur du Canada – premier au monde. Qu'est-ce que nous propose le Parti québécois? De tomber sixième, septième? On est premier. Le député de Pointe-aux-Trembles dit vingtième. J'espère qu'il va le répéter en campagne électorale, mais on est premier, M. le Président. Lorsqu'on est premier, qu'est-ce qu'on fait? On améliore pour rester premier, on ne détruit pas, on n'élimine pas ça. Et, ça, là, je peux vous dire, M. le Président, il faut le dire à nos Québécois, Québécoises de n'importe quelle langue, de n'importe quelle ethnie: Vous avez la chance de vivre au Québec, dans le meilleur pays au monde, et le gouvernement libéral vous propose de rester premier.

Le gouvernement du Parti québécois vous suggère quel rang? Quel rang? On ne peut pas monter plus que premier, M. le Président, sauf qu'on peut s'améliorer. Et c'est dans cet esprit-là que le gouvernement du Parti libéral, le gouvernement du premier ministre Johnson, voit la possibilité de négocier avec le fédéral et d'améliorer, mais tout en voulant rester premier. Ça, c'est fort important. Important dans le sens que, lorsqu'on est en haut de la pyramide, on ne détruit pas. C'est ce qu'on dit au député de D'Arcy-McGee: on travaille dans cet esprit-là, essayer de démontrer les avantages, puis on n'a pas de difficulté à les démontrer, M. le Président.

Je vous parlais du conflit qu'on a eu au niveau du tabac, qu'on a solutionné rapidement avec l'entente du fédéral. Mais, tout à fait récemment, le programme des infrastructures, on a même ajouté un autre palier qui est le palier municipal, un palier super important au Québec, des décideurs de la base, des décideurs qui connaissent les besoins et les difficultés des citoyens. En peu de temps, on a négocié une entente qui va créer 20 000 emplois, qui a été dénoncée par le Bloc québécois durant la campagne. On a ridiculisé M. Chrétien, le premier ministre du Canada, pour dire: Des promesses à l'ancienne. Et même, le Parti québécois est allé dans l'autre sens, il a dit: Les villes, on va mettre une pression supplémentaire, elles n'en veulent pas. Eh bien, j'ai été obligé d'ajouter une secrétaire parce que les demandes affluent à mon bureau, tellement les municipalités souhaitent un programme. Puis, elles n'appliquent pas juste au volet 1, elles appliquent au volet 2, au niveau de la nouvelle technologie des centres-villes, puis elles appliquent au volet 4. Et le Parti québécois parlait, supposément, au nom des villes.

Je vais vous conter une petite expérience qui démontre un peu l'image de ce parti-là. Récemment, certaines municipalités dans les régions de Lanaudière et des Laurentides ont bénéficié justement des ententes d'infrastructures. Moi, au nom du gouvernement du Québec, j'ai fait cette annonce sans inviter le Bloc québécois et le Parti québécois – puis, je vous le dis, M. le Président, puis il n'y a pas de politique là-dessus – sans les inviter, parce que des gens qui sont contre ne bénéficieront pas de la photo... Écoutez, c'est des gens de même. Même la députée, que je ne nommerai pas, a dit: J'étais pour. Quand j'ai reçu le feuillet, le formulaire, je l'ai envoyé. Eh bien, là, si on a besoin de postiers supplémentaires, M. le Président... Moi, je dis aux Québécois et aux Québécoises qu'il y a des ententes possibles, qu'il y a du positif possible. C'est rentable, ça se démontre, et c'est des partis politiques qui mettent ça de l'avant. Il va falloir que les gens du Québec sentent très bien quel est le parti, quels sont les partis qui les défendent le mieux. Il n'y a pas de politique là-dedans, M. le Président. La politique, c'est de démontrer aux gens qu'on était d'accord quand on ne l'était pas, d'accord. C'est ça, M. le Président.

Donc, je dis au député de D'Arcy-McGee que, par l'entente qu'on a eue au niveau des infrastructures, on a démontré, puis on a défendu le Québec au sein de la Fédération canadienne pour dire qu'on veut notre part. C'est ça, M. le Président. Quand je parlais de l'entente du tabac, n'oubliez pas que le gouvernement fédéral a légiféré un peu au détriment d'autres provinces parce qu'il savait que le Québec était aux prises avec un tel handicap. Donc, M. le Président, on a des ententes, on les négocie, c'est progressif, et plus on va dans le temps, plus on réussit à récupérer des pouvoirs administratifs, dans un premier temps, pour qu'on puisse faire bénéficier nos Québécois et nos Québécoises.

Donc, dans la motion de censure du député, lorsqu'on dit qu'on manque à défendre, non, on dénonce, d'une part, puis, d'autre part, on négocie. Je veux juste vous parler de l'harmonisation de la TVQ et de la TPS qu'on administre depuis 1992. Il n'a pas fallu séparer le Québec pour qu'on puisse administrer notre propre taxation. Il a fallu s'entendre, et on administre la taxation. Il y a même des gens qui nous répètent: Ah! le projet du Parti québécois, on va payer une taxe de moins. On ne paiera pas une taxe de moins; on en paie une, présentement, au niveau des achats. Je pense que le prochain rendez-vous électoral, ça va être – et je pense que le député de D'Arcy-McGee, par sa motion, a soulevé ça – l'occasion rêvée pour démontrer aux Québécois quel est le programme de chaque parti qui fait en sorte que le Québec va être le mieux défendu, et, pour nous, c'est à l'intérieur de l'unité canadienne. C'est pour cette raison qu'on invoque, puis on dit aux Québécois: Lisez le programme du Parti québécois. Lisez-le! Et, même s'il est très volumineux, on va leur suggérer des pages; des pages, sinon une synthèse. Mais on préfère qu'ils lisent le document original. On préfère ça.

(12 h 20)

Donc, vous m'indiquez qu'il me reste trois minutes. J'aurais beaucoup d'autres ententes à vous mettre de l'avant, M. le Président, mais je vous répète puis je veux rassurer, même si on est contre la motion de censure du député de D'Arcy-McGee, on est contre le projet du Parti québécois qui veut séparer, qui veut créer une rupture, qui est un projet flou, pas quantifié. Le projet libéral, c'est un projet d'unité, un programme solide, quantifié, identifié avec un chef dynamique. C'est pour ça, M. le Président, que le Québec va connaître ses enjeux bientôt. Ce n'est pas une critique qu'on veut simplement faire – puis c'est la dernière parole que je dis au député de D'Arcy-McGee, M. le Président, par votre intermédiaire – on veut dénoncer, critiquer, informer les gens, mais on veut aussi mettre de l'avant les ententes qui ont été profitables.

Donc, M. le Président, ça me fait grandement plaisir de parler de l'unité canadienne à partir d'une motion de censure contre laquelle on sera, mais que je pense le député de D'Arcy-McGee pourra voter aussi sur notre côté, peut-être en modifiant sa motion de censure. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député de Rousseau. Je vais maintenant reconnaître un député indépendant pour une période de 10 minutes. M. le député de Jacques-Cartier.


M. Neil Cameron

M. Cameron: Merci, M. le Président. M. le Président, il faut parfois nous rappeler la célèbre phrase cynique: Cet animal est méchant; quand on l'attaque, il se défend. Il faut aussi nous rappeler que l'animal attaqué depuis quelques années n'est ni le Québec ni les Franco-Québécois, mais le Canada lui-même.

It is not only those who clearly identify themselves as separatists who still refuse to admit what they are doing. Consider the recent open letter of Jean Allaire, summarized in Le Devoir of last weekend. The newspaper headed the story: «Allaire craint la violence si les souverainistes perdent le référendum». Here is the core of their argument: «On est en train de perdre le référendum. On va être humiliés encore une fois [...]. Imaginez ceux qui sont plus jeunes que moi et qui vont réaliser qu'on perd le référendum à cause d'une certaine partie de la population, celle du West Island [...]. Que ça tourne à la violence. J'ai peur de cela [...]. Le désespoir pourrait s'installer. Je crains que les gens se disent que la démocratie, ça ne suffit pas.»

He follows this with a quite different complaint: «Les anglophones ne sont pas mieux, ils font appel à l'armée. Ce sont des déclarations complètement "crackpot". C'est un appel à la violence. Et c'est tellement méprisant que c'est révoltant.»

I want to deal with this second argument, first. To begin with, M. Allaire does not seem to notice he has just contradicted his own position. I know of no Anglophone, inside or outside politics, who has called for intervention by the Canadian Army to protect him from the consequences of a separatist defeat in a future referendum. I would suggest this is because we have more confidence in the tolerance and good sense of Quebeckers of all backgrounds than he does. I do not even know of any Anglophone or other federalist Quebeckers who have called for the intervention of the army in the event of some kind of victory for the separatists in a future referendum. However, how critical and uncertain in its meaning, if such a victory were then followed by some kind of legal constitutional negotiation on the future status of Québec, the results of such negotiations might wind up making both Francophones and Anglophones, federalists and separatists very unhappy, but it would still give no grounds for appealing to force.

But it is quite true, there are two possible scenarios for the future which could lead to Québec federalists, whether or not they are Anglophones and West Islanders, correctly, legitimately, and I am tempted to say inevitably calling on the Canadian Government to carry out its responsibility to its own citizens to provide protection, at worst by military means. The first is that a future separatist government, whatever result was yielded by a referendum, would surrender to the temptation to proclaim a unilateral declaration of independence, both M. Bouchard and M. Parizeau having already said more than once that they would be justified in doing so. M. Parizeau, greatly to his credit and with an unusual honesty for a political leader in charge of a movement that depends for its whole career on a certain amount of confusion, has recently admitted that he was mistaken in his belief that various authorities on international law had given him a license to do so, but neither he nor M. Bouchard have been willing to flatly renounce the idea that a UDI might be attempted anyway. I cannot stress too strongly that such an action is illegal and highly dangerous in terms of both the Canadian Constitution and international law, more important still, in terms of its likely practical effects.

The second scenario which could lead to Québec federalist calls for the protection of the Canadian State is less likely, but not impossible, so long as Québec political thought is represented by such confused minds as M. Allaire. That is, he and others will do such a good job of helping «ceux qui sont plus jeunes [...] réaliser qu'on perd le référendum à cause d'une certaine partie de la population», that they call into existence a degree of intimidation and terrorism beyond the power of Québec juridical and police powers to control. As I have already noted, I think this quite unlikely, but it is not a possibility that can be dismissed. Even so, I have seen no anticipatory requests, including from my own political party. We have merely pointed out the implications of UDI, as these are recognized throughout the world. It is surely far better that as many Quebeckers of all backgrounds and all political views are familiar with these implications well in advance of any referendum or any temptation to impose UDI. If there is any future danger of violence in Québec, the greatest responsibility for its outbreak will not fall on either federalists or separatists as such, but on all influential public figures who refuse even to think about it clearly until catastrophe arrives; maybe not even then.

M. Allaire is either one of those who is incapable of thinking clearly about this topic, or else he is being intellectually dishonest. He might have said, with some justification, merely that he feared the possible violence of young and disappointed separatists – even those of us who reject separatism could understand such a reaction – but he does not stop there. He aims them at a target. If the referendum is lost, it will be because of the Anglophones, or even the West Island. This is a far more morally reprehensible stance than that taken by even the most intemperate defenders of federalism, and it is also factually ridiculous. A referendum for separatism will be lost if over half the population of Québec votes in favour of Canada, and their language, parentage and geographical location should be irrelevant.

In fact, surely we all realize that a vote that split almost evenly, no matter which position got a few more per cent than the other, would have unhappy social and economic consequences for both Québec and for Canada as a whole. Certainly, it would be a bad day for separatism, even if the vote was slightly in its favour. In fact, whatever the division of opinion in Québec, what separatists propose would have an effect on Canada roughly similar to an invasion by a major foreign power, cutting out a huge section of the country and splitting it in two. Yet, their apologists continue to try to persuade themselves and others that the hostility of a few hundred thousand non-Francophones is all that stands between them and the fulfilment of their dreams. This is a kind of madness, and it is not a madness that most threatens the minority population, unhappy as it makes us: it threatens the entire population. If M. Allaire imagines that «ceux qui sont plus jeunes» would be angered and disappointed by a referendum defeat, what on earth does he think they will do if they find the utopia they have been promised can provide them with nothing to do?

(12 h 30)

M. le Président, this Assembly and the people of Québec should be reminded that M. Allaire is still identified by Le Devoir as M. Bourassa's constitutional advisor; that his own separatism-without-the-label was formally adopted by the Liberal Party in convention; that a Liberal government and Assembly majority, largely composed of the same individuals still present, made almost no protest against this unhappy adventure; that the new premier and his cabinet colleagues apparently believe that a mere shift in rhetorical stance is enough to show them as valiant defenders of federalism. M. le Président, it is not enough. Furthermore, to claim that the coming provincial election must be treated as a referendum on sovereignty is a policy of desperation, in some ways even worse than betting on an uncertain economic recovery for the Liberals to boast about.

Québec has actually achieved a sort of semisovereign status of a kind ever since the late 1960s, in the sense that every provincial election, for almost 30 years, has now become a double event: a provincial election as that is normally understood in all parts of Canada and an invariably confusing and immensely irritating test of the survival of Canada as a federal state. I greatly fear that many of my colleagues, and many ordinary citizens, however they plan to vote, do not fully realize just how angry this has gradually made the people of Canada, not Francophones or ill-informed centralists in regions remote from here, but Canadians in general.

It is true that many of these Canadians, even if they think of themselves as tolerant and well-disposed in the past to Québec, greatly underestimate the immense practical difficulties of balancing the linguistic and cultural distinctiveness of Québec with its full participation in the modern North American economy. For all the moral and practical objections that many of us have to Bill 101, we can still testify to the fact that many of the less coercive aspects of Québec Government are carried out with intelligence and sensitivity. But we are growing angrier anyway, with justification, and for reasons that owe as much to the Québec Liberty Party as to the Parti québécois.

Une voix: Your time is over.

M. Cameron: It appears... O.K., I will finish. It appears to be that what the Liberals propose is no more than this. That is why it still makes sense for real Québec federalists to vote for the Equality Party.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Vous avez dépassé d'à peu près 20 secondes le temps alloué. Alors, je suis maintenant prêt à reconnaître un député de l'Opposition officielle. M. le député du Parti québécois, le député de Lac-Saint-Jean, pour une période de 15 minutes. M. le député.

M. Brassard: Combien?

Le Vice-Président (M. Tremblay): Quinze minutes.

M. Brassard: On m'avait dit 20, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, le partage du temps est ainsi fait, M. le député. Je ne suis pas... Ce qu'on m'a remis comme temps partagé, c'est 15 minutes pour votre formation politique.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, voilà une motion qui nous révèle publiquement une petite querelle entre fédéralistes orthodoxes bon teint, pour savoir lequel est le plus inconditionnel défenseur du régime fédéral. En somme, une petite chicane de famille, M. le Président.

Nous, de l'Opposition, nous avons, et vous l'apprendrez cette semaine, de multiples raisons de blâmer le gouvernement et de le censurer, mais nous n'avons pas celle-là. Nous ne sommes pas d'accord avec le député de D'Arcy-McGee parce que, en face de nous, nous avons le gouvernement le plus soumis au statu quo de l'histoire du Québec. Nous avons en face de nous le gouvernement le plus docile aux directives et aux volontés d'Ottawa. Nous avons en face de nous le gouvernement le plus impuissant devant les offensives et les ingérences du gouvernement fédéral. On ne voit pas pourquoi les fédéralistes le blâmeraient. Le rideau est tombé, M. le Président. Le voile s'est déchiré, et la réalité est apparue sans parures et sans colifichets. Ce gouvernement adhère avec conviction au statu quo, au régime fédéral tel qu'il est, et on l'a vu, il a suffi d'entendre le représentant des ministériels, tout à l'heure.

Il faut dire que, pendant des années, ce fut la tricherie, la supercherie. Pas besoin de vous référer au «Tricheur», l'ancien premier ministre, qui a arnaqué à peu près tout le monde, qui a trompé, floué tout le monde, y compris son propre parti, sa Commission-Jeunesse. C'était, disait-il, et Gil Rémillard, son ministre, allait dans le même sens, le renouvellement en profondeur du régime fédéral ou la souveraineté. Mais il n'était évidemment pas question de statu quo. Le statu quo, pour eux, publiquement, officiellement, c'était l'horreur – c'était l'horreur. Je signale qu'on le savait, nous, du Parti québécois, que cet échafaudage était fondé sur la tromperie et le double langage. Et on s'en rend compte à la lecture du livre de Lisée, quand on imagine que le premier ministre d'alors a exigé un avis juridique pour apposer sa signature au bas du rapport Bélanger-Campeau; il a fallu qu'on lui dise et qu'on l'assure que sa signature ne valait rien, n'avait aucune valeur, pour qu'il signe. C'est raconté en toutes lettres dans le livre de Jean-François Lisée. L'auteur conclut, d'ailleurs, en disant que M. Bourassa a atteint, à ce moment-là, le degré zéro de la dignité. C'était ça, la grande tricherie.

Et le gouvernement qui est en face de nous, il faut quand même le rappeler, a été partie prenante de cette vaste tricherie, de cette vaste tromperie. Ils ne se sont pas dissociés de ça du tout. Il était partie prenante de ça. Puis, après, ce fut le naufrage. Deuxième tome, «Le Naufrageur». Après, ce fut le naufrage. Le gouvernement s'est carrément effondré, écrasé avec Charlottetown. Un écrasement et un effondrement honteux. Ça a été la capitulation désolante et, encore une fois, le gouvernement qu'on a en face de nous a été partie prenante de cette capitulation. Il faut quand même se le rappeler.

Je me permets de citer le tome 2 de Jean-François Lisée: «Séance du Conseil des ministres – de ce gouvernement, pas d'un autre là, pas d'un qui a existé il y a 30 ou 20 ans, celui-là qui est en face de nous – le dernier obstacle est franchi. Tout le monde a dit oui, a acquiescé à l'emmanchure de Charlottetown. Tout le monde s'aligne derrière le chef. Celui qui a promis une réforme en profondeur ou la souveraineté – c'était ça, semble-t-il, la doctrine officielle, l'option, le projet – ne livre ni l'une ni l'autre et conserve 30 ministres sur 30.» On comprend qu'il trouve la chose extraordinaire. Bien, je comprends donc! Tout ce gouvernement-là qu'on a en face de nous a été partie prenante de cette reddition et de cette capitulation.

Maintenant, où sont-ils, les renouveleurs de la Fédération canadienne? Où sont-ils, les réformateurs de la Fédération canadienne, ceux qui souhaitaient puis qui voulaient la transformation en profondeur? Où sont-ils? On les cherche. Il n'y en a plus du tout; disparus, évaporés, disparus dans le paysage. Ce qui reste maintenant, c'est un gouvernement à l'image de son chef, c'est-à-dire un premier ministre qui adhère au statu quo, un premier ministre qui n'a aucune revendication de pouvoirs – il est prêt même à en perdre encore, et ça ne le dérange pas. Ça a été le cas avec la téléphonie en communications; il a perdu le pouvoir, ça a été décrété par les tribunaux, puis ça ne l'a pas dérangé du tout. Il a accepté ça sans maugréer. Non seulement il ne revendique pas de pouvoirs, mais il en perd, et ça ne le dérange pas – et qui considère que l'expérience canadienne est une expérience extraordinaire, merveilleuse, que le système fédéral, au fond, ne mérite pas de changements en profondeur. Peut-être quelques petites transformations bien anodines et bien superficielles, mais une adhésion franche et sincère au statu quo. C'est vrai que c'est un peu différent d'il y a quelques années où sévissait le tricheur, avec toute sa supercherie qu'il avait montée. C'est un peu différent. Mais, là, c'est l'adhésion pleine et entière au statu quo.

Le premier ministre est devenu un gérant de succursale et il est content de l'être. C'est ça, la réalité maintenant. Le premier ministre du Québec est devenu un gérant de district et il en est satisfait. Il en est satisfait. Il est carrément provincial, premier ministre provincial, dans le plein sens et dans le pire sens du terme, c'est-à-dire qui apprécie la petitesse et la minceur, la maigreur de son rôle. C'est ça maintenant qu'on a en face de nous comme premier ministre.

(12 h 40)

Alors, M. le député de D'Arcy-McGee, je ne comprends pas votre blâme. Regardez-le aller, ce gouvernement, regardez-le ne rien faire devant le gouvernement Chrétien qui fait, lui, tout ce qu'il veut, sans vergogne, sans être arrêté, sans aucune résistance de la part du gouvernement québécois. C'est ça, la réalité. Je ne comprends pas que vous le blâmiez. Le gouvernement fédéral ferme le Collège militaire de Saint-Jean. Le premier ministre acquiesce. Puis, quand il voit la pression du milieu, bien, là, il réagit un peu plus vigoureusement, pour la galerie. Mais ça n'a pas duré longtemps. Vous savez qu'il est rentré dans le rang à propos du Collège militaire de Saint-Jean. Et le ministre de l'Éducation, M. Chagnon, n'a tout simplement que le mandat de signer la reddition, sans que ça fasse trop de bruit et sans que ça fasse trop de dégâts pour la cote du gouvernement, qui est déjà passablement basse.

En matière de main-d'oeuvre, je n'ai pas besoin de faire l'historique, hein, c'est la débandade. C'est la débandade. Le gouvernement fédéral nous envoie paître, envoie paître le gouvernement. Et je pourrais utiliser, évidemment, une expression un peu plus vulgaire. Je vais garder celle-là: il nous envoie paître. Et tout le monde prend son trou, à commencer par le ministre de l'Emploi. Le premier ministre aussi, forcément. Tout le monde prend son trou en matière de main-d'oeuvre. Pourquoi? Parce qu'il ne faut pas faire de vagues, il ne faut pas faire de remous, hein. Il ne faut pas que les Québécois puissent s'imaginer que le régime fédéral a quelques petits défauts. Il ne faut surtout pas! Alors, on se résigne, on courbe l'échine, on rentre dans le rang.

En matière d'éducation, de santé et de communications, les invasions et les ingérences se multiplient, M. le Président, et le gouvernement est silencieux. Il fait mine de rien, comme si rien ne se passait. Il regarde ailleurs. Il regarde ailleurs pour ne pas avoir à opposer une certaine résistance. C'est assez triste comme spectacle. Et je ne vois pas pourquoi le député de D'Arcy-McGee blâme le gouvernement. Il «peut-u» y avoir un gouvernement plus fédéraliste que ça? Je ne comprends pas, là. Je ne comprends pas. Être plus fédéraliste que ça, là, ce serait la honte. Ce serait la honte. C'est déjà assez honteux comme ça. Le zèle du gouvernement en matière de défense du régime fédéral est tellement évident qu'il en devient extrêmement dangereux pour la défense des intérêts du Québec.

M. le Président, on aurait dû blâmer le gouvernement pour son acharnement à s'accrocher au pouvoir et à s'inscrire comme le gouvernement le plus long de l'histoire du Québec depuis les années trente. Le blâmer pour se lancer dans une coûteuse campagne publicitaire qui n'a qu'un seul but, faire oublier aux Québécoises et Québécois ses neuf années de pouvoir marquées par l'inaction à l'égard de l'emploi, quatre années de récession et de chômage, des hausses de taxes spectaculaires qui ont amplifié l'effet de cette récession, des coupures, des restrictions qui, trop souvent, se sont faites sur le dos des plus démunis et des personnes les plus vulnérables de notre société. C'est ça, le bilan de ce gouvernement. Là, on aurait pu le blâmer. Et, nous, on va le faire, on va le blâmer pour ça, pour les neuf ans de gouvernement, pour les deux mandats qui sont les siens, pour ne pas que ça s'oublie.

Et je suis convaincu que les Québécoises et les Québécois ne l'oublient pas et comprennent très bien l'enjeu de la prochaine élection, parce que c'est ça, l'enjeu principal de la prochaine élection. C'est les deux mandats de ce gouvernement et le triste bilan, le bilan lamentable de ce gouvernement, particulièrement en matière économique, en matière de lutte au chômage et en matière de développement régional. Le Parti libéral le sait bien, d'ailleurs. Il sait bien que c'est ça, l'enjeu. Et c'est pour ça qu'il s'accroche, et c'est pour ça aussi qu'il essaie d'escamoter ce triste bilan. C'est pour ça que, devant une population qui s'apprête à porter un jugement sévère sur leur action, une population qui comprend très bien que toutes leurs paroles creuses pour l'emploi sont contredites par l'action des neuf dernières années, c'est pour cette raison que le gouvernement libéral a actuellement choisi la voie de la confusion et qu'on a choisi de vendre la confusion.

Et c'est pour cette raison qu'on s'acharne à défigurer et à dénaturer l'option du Parti québécois, c'est-à-dire la souveraineté, en recourant, par exemple, aux vieilles recettes du terrorisme économique. On sait que l'histoire du catastrophisme économique est longue, M. le Président; ça fait 30 ans que ça dure. Ça fait 30 ans que ça dure. Et c'est ce qu'on s'apprête à faire, essayer encore une fois de faire croire à la population que la souveraineté aura des conséquences économiques désastreuses. C'est devenu presque un dogme. En certains milieux, on n'ose même pas remettre en question ce dogme. Pourtant, M. le Président, il n'est pas inutile de citer encore à nouveau le rapport de la firme de courtage Salomon Brothers, qui n'est pas la dernière venue en cette matière; c'est une des plus grandes firmes de courtage au monde. Et le paragraphe convient d'être cité et recité à maintes reprises. Je le cite de nouveau, M. le Président, ce ne sera pas la première fois. Salomon Brothers dit: «À la différence des débats politiques passés, l'élection de 1994, ou le référendum subséquent, conduira vraisemblablement à une résolution de la question du séparatisme québécois. En outre, contrairement à la rhétorique présente, la fin du débat sera bénéfique pour le Canada et pour le Québec, qu'ils restent ensemble ou qu'ils se séparent.» C'est la situation actuelle qui a des conséquences désastreuses sur le plan économique. Le catastrophisme économique, M. le Président, c'est actuellement qu'on le constate. La réalité économique est actuellement désastreuse pour les Québécois. Pas celle qui viendra, celle qui existe actuellement. Des taux de chômage effarants, scandaleux, des régions qui sont aux abois, des entreprises qui ferment, des mises à pied qui se multiplient: c'est ça, la réalité. La catastrophe économique, elle n'est pas à venir, elle est là sous nous yeux, présente actuellement, M. le Président.

Alors, évidemment, le gouvernement libéral cherche à nous distraire et à faire dévier le débat, mais sans succès. Et je pense que le député de D'Arcy-McGee a tort de blâmer ce gouvernement pour son adhésion franche, convaincue, entière au régime fédéral. Nous sommes passés de la tricherie, du double langage, du mauvais bluff du temps de M. Bourassa au naufrage et à l'effondrement à l'époque de Charlottetown; nous sommes maintenant passés à la vénération, à la vénération totale du statu quo. On a eu droit au fin finaud, M. le Président, en la personne de M. Bourassa, et au capitulard, au naufrageur, en la personne du même monsieur, du même premier ministre. Maintenant, nous avons le gérant de succursale, le gérant de district, servile, docile à l'égard du gouvernement fédéral.

C'est pour cette raison qu'il n'y a pas de blâme en cette matière. Les blâmes sont ailleurs. Ils vont venir, d'ailleurs, mais sûrement pas en cette matière.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Je vous remercie, M. le député. Très bien. Je vais maintenant reconnaître Mme la députée de Matane. Mme la députée de Matane, vous avez 15 minutes à votre disposition.


Mme Claire-Hélène Hovington

Mme Hovington: Merci, M. le Président. Par le biais de cette motion, le député de D'Arcy-McGee blâme le gouvernement du Québec supposément pour son manquement à défendre et à promouvoir avec cohérence et rigueur l'unité canadienne. Et si j'ai bien compris l'essentiel de cette motion, le député nous reproche de ne pas contrer de façon agressive les différentes attaques dont l'union canadienne ou l'unité canadienne est l'objet et qui menacent d'entraîner de sérieuses conséquences économiques pour les Québécois et les Québécoises. M. le Président, il est évident que le député de D'Arcy-McGee n'a pas bien saisi l'ampleur de notre démarche. Il est pourtant clair que notre gouvernement a toujours défendu et continuera de défendre les intérêts du Québec dans l'ensemble canadien.

Il est triste, je dirais, de constater que certains individus n'ont pas encore compris que notre premier ministre défend l'expérience canadienne, qui a permis aux Québécois de connaître un niveau de vie sans précédent, une expérience canadienne qui nous a également permis d'avoir les pouvoirs nécessaires pour effecteur des investissements dans notre gouvernement, dans nos sociétés d'État, dans le soutien à notre culture, nos régions, notre système de santé. Pour nous, il est clair que nous sommes Québécois dans tous les sens du terme et que ce sentiment nous habite profondément et constamment.

Mais, comme le précisait il n'y a pas si longtemps le premier ministre du Québec, M. Johnson, il y a également cette conscience que nous sommes Canadiens et que nous assumons avec calme, avec sérénité le fait d'être Canadiens, en sachant que la route de notre meilleur intérêt s'y trouve.

M. le Président, vous comprendrez qu'il est tout à fait déplorable qu'une telle motion de censure soit débattue aujourd'hui en cette Chambre. Accuser notre gouvernement de ne pas défendre assez vigoureusement l'unité canadienne constitue un affront, à mon avis, que, pour ma part, je ne peux accepter. Cette motion aurait dû, au contraire, porter sur les intentions du chef de l'Opposition officielle et sur ce qu'il entend faire du Québec. À mon avis, le député de D'Arcy-McGee s'est trompé de cible, c'est sûr.

(12 h 50)

Les membres de l'Opposition officielle, pour leur part, ne veulent pas être élus pour être un bon gouvernement, M. le Président. Tout ce qu'ils veulent, c'est forcer l'ensemble de la population du Québec, l'entraîner dans une direction qu'elle ne veut pas prendre. La différence entre notre gouvernement et les adversaires d'en face est pourtant bien évidente. Notre gouvernement favorise l'union économique canadienne tandis que nos adversaires veulent disloquer le pays, veulent séparer le pays. C'est le divorce qu'ils cherchent, M. le Président. Voilà la grande différence, la séparation.

Or, M. le Président, permettez-moi de vous souligner immédiatement que la majorité de la population n'empruntera pas la voie séparatiste sans que le chef de l'Opposition officielle démontre clairement et hors de tout doute qu'il est dans l'intérêt des Québécois et des Québécoises d'avoir un pays souverain. Jusqu'à présent, force est de constater qu'il n'y est pas arrivé. Il a tout au plus démontré sa capacité d'effrayer les gens, et je m'explique.

Le chef de l'Opposition officielle, dans ses sorties – des sorties qu'il voudrait grandioses, éloquentes – démontre que le gouvernement qu'il aimerait diriger serait intolérant, irrespectueux et même arrogant envers la population. Par ses faits et gestes, tout autant que par ses propos, le chef de l'Opposition officielle démontre parfaitement bien le fanatisme – je dis bien «fanatisme» – qui caractériserait un gouvernement issu du Parti québécois.

N'est-ce pas, M. le Président, le whip de l'Opposition officielle qui vient de prendre la parole tout à l'heure, le député de Lac-Saint-Jean, qui déclarait récemment que le gouvernement d'un Québec souverain, le gouvernement d'un Parti québécois, pourrait avoir recours aux forces de l'ordre pour imposer son autorité sur les autochtones ou d'autres groupes dissidents? M. le Président, les propos du député de Lac-Saint-Jean démontrent bien l'absence d'ouverture d'esprit pourtant nécessaire au fonctionnement d'un bon gouvernement qui agit dans l'intérêt de ses citoyens et de ses citoyennes.

Je vous rappellerai également l'appel au boycott de la Banque de Montréal, lancé il y a quelques jours par le chef de l'Opposition officielle. En agissant ainsi, il démontre deux choses, M. le Président. Premièrement, il envoie un message dangereux aux investisseurs étrangers, en traitant ainsi les banques qui lancent un avertissement au sujet d'une éventuelle séparation du Québec. Et deuxièmement, M. le Président, il est en train d'indiquer le genre de gouvernement qu'il veut diriger, c'est-à-dire un gouvernement qui n'aura aucun respect pour les individus, un gouvernement qui rabroue tous ceux et celles qui ne sont pas en accord avec lui.

Il devrait pourtant savoir que les Québécois et les Québécoises n'accepteront pas d'être traités de cette façon. On ne peut gouverner en faisant des déclarations irresponsables, en proférant des menaces évidentes envers ceux qui ne pensent pas comme nous. Il n'y a pourtant rien d'étonnant, comme le soulignait il y a quelques jours un éditorialiste, à ce que les marchés financiers manifestent une certaine nervosité devant la perspective de l'indépendance du Québec. Une inquiétude qui s'amplifiera sans doute à mesure que les échéances se rapprochent. Cet éditorialiste a également ajouté que le chef de l'Opposition se comporte non pas comme un homme qui veut bâtir l'indépendance dans l'harmonie, mais comme quelqu'un qui cherche par tous les moyens à créer une crise de toute espèce. En y allant de ces propos, le chef de l'Opposition officielle démontre qu'il est capable d'intolérance et, dans une démocratie, surtout au Québec, M. le Président, l'intolérance n'a pas sa place.

Voilà qui distingue bien l'Opposition officielle du gouvernement actuel. Plutôt que de vouloir amener le Québec dans une voie dont on ne connaît pas l'issue, l'objectif de notre gouvernement consiste à garder le Québec ouvert et à développer encore davantage les rapports économiques entre nous et le reste du Canada. Nous désirons, nous du Parti libéral, établir un dialogue permanent sur nos points de divergence et éviter d'enclencher un processus dont on ne connaît ni les coûts ni les conséquences, sinon une instabilité politique et économique garantie. C'est la seule garantie qu'ils offrent: une instabilité politique et économique.

M. le Président, depuis plus de trois décennies, les divers gouvernements qui se sont succédé ici à l'Assemblée nationale ont pressé leurs interlocuteurs fédéraux et les autres provinces d'agir sur un certain nombre de préoccupations visant à améliorer le fonctionnement du fédéralisme canadien. Nous n'avons pas fait défaut, nous, à cette tradition, puisque notre priorité est et sera l'amélioration du fonctionnement de l'union économique canadienne, de façon à en tirer les plus grands bénéfices. D'ailleurs, vous savez que notre gouvernement encourage l'avènement d'un libre-échange étendu à l'intérieur du Canada. Et les récents accord commerciaux, d'ailleurs conclus entre l'Ontario et le Nouveau-Brunswick, confirment cette approche et l'intérêt de nos partenaires canadiens.

Notre gouvernement endosse également les accords de libre-échange qui repoussent nos frontières économiques à l'échelle du continent. Notre gouvernement veut relever le défi de la relance économique basée sur une participation active au marché canadien, et ce, tout en conservant les acquis indispensables à l'évolution de la société québécoise.

La motion inscrite par le député de D'Arcy-McGee est donc inappropriée parce qu'elle poursuit un objectif contraire à celui de notre gouvernement. Et, en ce sens, elle est donc inexacte, et je voterai contre cette motion, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, Mme la députée. Alors, je vais maintenant reconnaître M. le député de Saint-Maurice. Il reste à votre formation politique environ 15 minutes. Alors, je vais vous entendre, M. le député de Saint-Maurice.


M. Yvon Lemire

M. Lemire: Merci beaucoup, M. le Président. La motion de censure présentée par le député de D'Arcy-McGee, portant sur la défense et la promotion de l'unité canadienne, nous laisse perplexes, M. le Président. En effet, le député accuse le gouvernement libéral de ne pas défendre assez et avec vigueur l'unité canadienne. De plus, cette motion de censure indique que nous aurions une réticence à contrer agressivement les différentes attaques dont l'unité canadienne est l'objet. Cette réticence, toujours selon le député de D'Arcy-McGee, aurait pour effet de menacer l'économie pour tous les Québécois.

Pourtant, M. le Président, le programme du Parti libéral du Québec est très clair là-dessus. Dans le document d'orientation politique qui a été rendu public au mois de mars dernier, nous retrouvons la réaffirmation de la vision libérale de l'identité québécoise. Pour un prochain mandat, le gouvernement s'est donné comme priorité de réaffirmer l'option fédéraliste qui a toujours été la sienne, c'est-à-dire le développement de l'identité québécoise au sein de l'espace géopolitique canadien. En effet, nous sommes convaincus que l'option fédéraliste est la véritable solution en mesure de servir tous les intérêts du Québec. Compte tenu des objectifs de ce projet, notre gouvernement continuera de défendre de manière rigoureuse et énergique les intérêts du Québec sur la scène canadienne. De plus, nous jugeons prioritaire le règlement final d'ententes administratives en cours de négociation. Le dossier de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu illustre de façon parfaite cette volonté d'en arriver à une solution négociée entre les niveaux de gouvernement. Dans un dossier aussi précis que celui-là, le Québec tient à ce que sa juridiction soit protégée, mais nous comprenons également que certaines règles doivent prévaloir à l'échelle canadienne.

Enfin, le Parti libéral du Québec verra à s'assurer que tous les Québécois et Québécoises, sans égard à leur origine, leur rang, leur langue ou leur race, pourront donner leur pleine mesure à l'enrichissement de notre identité, de notre économie et de notre culture.

(13 heures)

Et c'est cela que le député de D'Arcy-McGee qualifie d'incohérence, notre manière de défendre les intérêts du Québec? Pourtant, nous avons été jusqu'à maintenant très précis sur les objectifs que nous devons atteindre. Nous reconnaissons, par exemple, que le Québec est la seule société majoritairement francophone en Amérique du Nord, un berceau et un point d'ancrage de la francophonie sur tout ce continent. Le Québec bénéficie d'une spécificité culturelle et linguistique que nous devons non seulement défendre mais promouvoir parce que son affirmation et son enrichissement lui incombent au sein de la Fédération canadienne.

Pour notre Parti, M. le Président, les revendications historiques du Québec quant au fonctionnement des institutions fédérales et au partage des compétences législatives n'ont rien perdu de leur pertinence. Bien sûr, nous tirons des leçons des tentatives de réforme constitutionnelle dans lesquelles le Québec fut engagé de 1981 à 1992. Les conditions ne sont pas réunies pour réussir la négociation que nécessiterait la sécession du Québec. Loin de là, M. le Président, puisque nous trouvons toujours notre compte au sein de la Fédération canadienne.

Les enjeux concrets auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui, nous les répétons depuis plusieurs mois. Il s'agit de la création d'emplois, cette condition qui est essentielle et nécessaire pour que l'individu puisse atteindre sa pleine souveraineté. C'est pour cela que notre gouvernement consacre tant d'efforts et de ressources financières pour créer des emplois au Québec. Quant au prochain mandat, il sera toujours temps de négocier de nouvelles ententes administratives avec le gouvernement fédéral.

Parlant de constitution, il est impossible, M. le Président, de ne pas aborder le problème de la souveraineté. J'ai bien dit le problème, puisque élire le Parti québécois, c'est choisir la souveraineté, et c'est le chef de l'Opposition officielle qui l'a répété dans plusieurs entrevues. On aura beau, de l'autre côté de la Chambre, essayer de noyer le poisson, rien n'y fera, puisqu'il est clair que le Parti québécois a l'intention d'enclencher la souveraineté du Québec aussitôt élu. Et je me demande d'ailleurs s'il n'a pas essayé de déclencher ça avant même d'avoir été élu. Ce serait le comble de l'illusion, bien sûr, mais c'est un rêve inachevé pour les militants du Parti québécois.

Ce à quoi les Québécois rêvent, M. le Président, c'est d'abord et avant tout de stabilité politique et de croissance économique. Cette assurance, c'est seulement un gouvernement libéral qui va le leur donner. La vision du Parti libéral du Québec est claire, aussi bien en ce qui a trait à la Constitution canadienne qu'en ce qui concerne les priorités à accorder dans toutes les régions du Québec.

De notre côté, quand on parle de constitution ou de fédéralisme canadien, nous parlons, entre autres choses, d'ententes administratives. Nous voulons également rapatrier au Québec toutes les ressources et tous les outils de décision nécessaires à la pleine réalisation de nos objectifs. Un gouvernement libéral est guidé dans cet exercice par une analyse rigoureuse des avantages et des coûts découlant d'une prise en charge de services actuellement dispensés par le gouvernement fédéral. C'est pourquoi nous sommes désireux d'en arriver à des ententes avec nos partenaires canadiens, comme celle visant l'élimination d'une large partie des entraves à la libre circulation des biens et des services, des travailleurs et des capitaux à l'intérieur de l'espace économique canadien.

M. le Président, quand on parle des avantages et des désavantages de vivre au sein de la Fédération canadienne, nous devons aussi regarder de près les alternatives qui sont proposées aux Québécoises et aux Québécois. La séparation du Québec du reste du Canada constitue une alternative qui est proposée par nos amis d'en face. Or, les analyses de coûts demeurent, bien sûr, d'après la commission Bélanger-Campeau, des hypothèses. Puis, immédiatement, ce qu'on regarde quand on fait les analyses, on arrive à la valse des milliards, fortement sentie, pour décrire le déficit qu'aurait à assumer le Québec s'il se séparait du reste du Canada. Et, aujourd'hui, on voudrait nous faire croire que la séparation du reste du Canada constitue une sorte de mine d'or. Bien, M. le Président, les Québécois et les Québécoises ne seront pas dupes de telles affirmations. Ils savent très bien où se logent les intérêts de tous les Québécois dans le cadre de la Fédération canadienne. Bien sûr, il y aura toujours des discussions difficiles au sein du cadre fédéral. C'est cet esprit de concertation qui fait en sorte que nous en arrivons à des ententes satisfaisantes pour le Québec. J'en prendrai pour exemple la signature, comme le disait mon collègue, de l'entente fédérale-provinciale en ce qui concerne les travaux d'infrastructures. On parle ici d'une somme de 1 500 000 000 $ qui affectera la vie de 20 000 travailleurs québécois. Déjà, plusieurs annonces ont été faites dans les différentes régions du Québec relatives à ces travaux d'infrastructures.

Bien sûr, quand le Parti québécois souligne ou démontre la menace souvent proférée selon laquelle continuer de vivre dans un fédéralisme canadien nuit à la francophonie, on me permettra, M. le Président, de ramener un tel jugement dans sa juste perspective. Des Québécois qui se sont établis sur notre sol au fil des années et ont formé peu à peu une société distincte, parce qu'elle est majoritairement francophone, mais différente aussi de beaucoup d'autres par sa persévérance, par sa culture, par sa tolérance à la culture des autres... Cette société qui est la nôtre, M. le Président, possède toutes les caractéristiques fondamentales d'un État moderne, libre, démocratique et aussi tous les outils pour y demeurer. Ces deux dernières phrases sont issues du message inaugural prononcé à l'Assemblée nationale le 17 mars dernier par le premier ministre du Québec. Il nous a dit que, pour les prochains mois, des défis réels, comme celui de redonner aux Québécois le goût d'agir et l'occasion de travailler, constituaient notre priorité. Il nous a dit aussi, au sujet de la Constitution, qu'il invitait tous les Québécoises et les Québécois au dépassement qui permet à chacun de mesurer sa liberté et son indépendance et qui contribue aussi au dépassement du peuple que nous formons. M. le Président, comme l'affirmait le premier ministre, toujours dans le cadre de son discours inaugural, le Québec détient déjà la liberté, les pouvoirs et les moyens qui lui donnent une maîtrise sur son avenir et sur son développement.

Le gouvernement, M. le Président, continuera d'agir pour le Québec qui sera fort du travail de ses concitoyennes et de ses concitoyens. C'est pour ça, M. le Président, que nous devons rejeter cette motion de censure présentée par le député de D'Arcy-McGee, qui ne tient pas compte des efforts et de la vision libérale, aussi bien en matière constitutionnelle qu'en matière économique, sociale, culturelle et politique. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître M. le député de D'Arcy-McGee pour une réplique de 10 minutes. M. le député de D'Arcy-McGee.


M. Robert Libman (réplique)

M. Libman: Merci, M. le Président. M. le Président, à ce stade de la session parlementaire, la motion de censure est effectivement le seul outil disponible aux membres de l'Opposition pour provoquer un débat sur certains sujets spécifiques.

And I believe that the motion today has a certain significance and has importance, if not to reinforce, in the governing Liberal Party, a commitment to Canadian federalism... Because the history of the governing Liberal Party is one that has often wavered back and forth between its defence of federalism and, at times, taking a much more nationalist line. Many Members of the Liberal Party, as we have seen today in this debate, agree with the substance of the motion, with the intent of the motion, but cannot vote in favour of it because it is a motion of censure. So, I can only hope, therefore, that if this motion goes down to defeat, that it will convince the Liberal Government that an attack on the substance of the PQ programme, an attack on the substance of the separatist plans is the most rational and effective approach to swinging Quebeckers in an election, in undermining their confidence and trust in the Official Opposition and their plans for the election, and also, and more importantly, to guarantee future stability for the province by consolidating the federalist vote.

(13 h 10)

It is almost surreal what has been going on for the past several months. The PQ programme, the programme of a political party which could very possibly win the election and form the next Government, the PQ programme is an illusion, it is a pure fantasy, yet the level of scrutiny and analysis of exactly what they are proposing has been virtually nonexistent. The Liberal Government has attacked the messenger, has attacked the peripheral elements of the debate by reminding Quebeckers that the Official Opposition is a party that wants to hold a referendum on sovereignty. The Government has been warning about confusion and the dangers of the PQ Government and about the breakup of the country, yet they have stayed away from actually attacking the plumbing. They have stayed away from attacking the greatest weakness of the sovereignist argument, which can all be found in the PQ programme, and the structural deficiencies in the separatist movement that show that the quest for sovereignty is impossible. Why has the premier not picked apart and dissected the PQ programme, which is very clearly inadequate, contradictory, weak and, in fact, the Achilles' heel of the sovereignist movement itself? And even today, the Official Opposition, in the debate today, has completely turned the tables on this debate.

C'est typique du débat souverainiste, M. le Président. Le député de Lac-Saint-Jean aujourd'hui a attaqué le régime fédéral, a complètement attaqué le régime fédéral sans pour une minute défendre l'option que son parti veut présenter aux Québécois. Il parle d'une catastrophe, de la catastrophe présente que ce pays, cette Fédération canadienne nous donne. C'est un peu drôle d'entendre les attaques contre la Fédération canadienne quand on vient d'apprendre, la semaine passée, que le Canada a été choisi, encore une fois, parmi 173 pays dans le monde, comme étant le meilleur pays dans le monde où vivre. Ça, c'est le pays où nous vivons. Ça, c'est l'objet des attaques de l'Opposition officielle, ce matin. Alors, imaginez, M. le Président, la vie dans les autres pays qui n'ont pas été choisis comme le meilleur pays dans le monde, si le Canada offre une catastrophe, si le Canada est vraiment la place que l'Opposition officielle a attaquée ce matin.

It's hard to imagine what it's like living in other countries in the world if Canada, the number one country, can really be attacked as it was by the Official Opposition this morning, continuously, relentlessly attacked in the Canadian Federation without for one second saying why their option, their sovereignist option is better. And this underlines itself the dishonesty in the debate.

I see the Member for Westmount, here, M. le Président. You know, as we were approaching the Meech Lake Accord, I remember very vividly the Member for Westmount attacking the sovereignists, attacking the separatists, tearing out his hair about how they could possibly say some of these things about his beloved Canada. And I remember, before the Meech Lake Accord failed, the Member for Westmount suggested that when Meech fails, maybe it would be a good strategic move for the Equality Party to change its name to «Le Parti canadien», The Canadian Party, which he felt, at that time, would really be able to garner significant support and give greater success to the Equality Party at the time. The great defender of Canada at that time, perhaps for reasons of convenience which I do not want to go into, is now sitting and supporting the separatist cause, sitting and supporting his friends and participating in this dishonest debate about Québec's future.

M. le Président, we have to start showing Quebeckers what the dangers are. It is the premier of Québec's obligation not to hold back. It is his obligation to unlock for Quebeckers the truth, to relentlessly undermine the forces that want to break this great nation apart, not to allow them to have free rein to undermine our country. Canada is the greatest country in the world. Canada is the country that combines all the ingredients to be the model country for the rest of the world, to be the model country for the next century, that everyone else in the rest of the world looks at with envy. Canada is a country that combines the social justice of Europe, with the rights and freedoms of the United States, with the richness of multiculturalism; it combines beauty with a sense of security and stability for its citizens: the model country for the next century. We must keep this country together. We must attack those that want to undermine this country. Because what the Parti québécois, what the Official Opposition is trying to do is to sell Quebeckers the illusion that they can vote in favour of undermining this country, of tearing apart this country and then we will enter into negotiations to bring this country back together again, to try to reobtain all the advantages we enjoyed by being part of the Canadian Federation.

The premier of the province, the Government of Québec has to help Quebeckers understand that their promises, that their plans for the future are an illusion, are a fantasy, and they must not be hoodwinked into believing that it is possible. The premier of Québec has that specific obligation, as the leader of this province, to tell Quebeckers what the reality of the situation is and, on a regular basis, to attack the substance of their argumentation, something he has failed to do so far, and he has several weeks to do so as the debate approaches.

The député for Rousseau mentioned that as «les enjeux se clarifient», as the election campaign heats up, the premier of Québec will go forward and will undertake his responsibilities to defend Canadian federalism. I can only hope that this is true. I can only hope that he can paint a clear picture for Quebeckers that what the Official Opposition, what the Bloc québécois is trying to sell them is a lie, is a fantasy, and it must be exposed with vigour, with coherence, systematically, by the premier of Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Ceci met fin au débat. Alors, je suis prêt à mettre aux voix ladite motion. M. le leader du gouvernement.


Vote reporté

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Comme convenu, nous faisons une motion pour que le vote soit reporté à demain, à l'occasion de la période des affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Très bien.

Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi. Alors, les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 13 h 17)

(Reprise à 15 h 10)

Le Vice-Président (M. Tremblay): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous allons reprendre nos travaux.

Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Oui. Merci, M. le Président. Vous voudrez bien, s'il vous plaît, appeler l'article 34.


Projet de loi 191


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le leader adjoint. Alors, M. le député de Beauharnois-Huntingdon propose l'adoption du principe du projet de loi 191, Loi concernant la ville de Salaberry-de-Valleyfield et la paroisse de Saint-Stanislas-de-Kostka. Alors, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant, M. le député de Beauharnois-Huntingdon.


M. André Chenail

M. Chenail: M. le Président, le projet de loi 191 vise à assurer le partage de l'actif et du passif relatifs au territoire de la ville de Salaberry-de-Valleyfield, dont une partie a été annexée par la paroisse de Saint-Stanislas-de-Kostka en 1988.

Ce projet de loi rend applicables à cette annexion les dispositions générales de la Loi sur l'organisation territoriale municipale relatives au partage de l'actif et du passif du territoire annexé.

Le 21 août 1986, la paroisse de Saint-Stanislas-de-Kostka adoptait le règlement relatif à l'annexion du territoire concerné, en vertu des dispositions applicables du Code municipal de l'époque. Selon ces dispositions, la ville de Salaberry-de-Valleyfield pouvait imposer des taxes aux contribuables du territoire annexé pour rembourser ses différents règlements d'emprunt contractés avant l'annexion.

Avant la transmission des comptes de taxes par la ville, le régime juridique en matière d'annexion a complètement été modifié le 1er janvier 1989 par l'entrée en vigueur de la Loi sur l'organisation territoriale municipale. L'article 246 de cette loi a abrogé les dispositions du Code municipal qui concernaient les annexions.

En conséquence, il existe maintenant un vide juridique et un doute sur les pouvoirs de la ville pour continuer à percevoir des taxes sur les territoires de la paroisse de Saint-Stanislas-de-Kostka ou d'y récupérer les sommes d'argent nécessaires pour payer des dettes contractées avant l'annexion. D'autre part, la Loi sur l'organisation territoriale municipale ne contient aucune disposition territoriale pouvant s'appliquer à l'annexion en question.

Le projet de loi 191 vise donc à corriger cette situation en rendant applicables à ladite annexion les dispositions des articles 156 à 160 de la Loi sur l'organisation territoriale municipale. Il consacre la priorité de la ville de Salaberry-de-Valleyfield quant à l'aérodrome situé sur le territoire annexé en autorisant la paroisse de Saint-Stanislas-de-Kostka à répartir toutes taxes qu'elle devra imposer pour pourvoir au paiement des montants résultant d'un accord sur le partage des actifs et du passif de ce territoire en se basant sur les valeurs des immeubles imposables, telle qu'elle apparaissait au rôle d'évaluation en vigueur lors de l'indexation.

Finalement, la loi empêche tout recours non intenté au 8 mars 1994 pour assurer la stabilité économique des municipalités de la ville de Salaberry-de-Valleyfield et de la paroisse de Saint-Stanislas-de-Kostka. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître M. le critique de l'Opposition officielle en cette matière, M. le député d'Abitibi-Est...

M. Gendron: Ouest.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Ouest.

M. Gendron: À votre choix!

Le Vice-Président (M. Tremblay): Ouest, d'Abitibi-Ouest. Alors, M. le député, vous avez à votre disposition une heure.


M. François Gendron

M. Gendron: Oui, et on va prendre 45 minutes. Non, M. le Président, je veux tout simplement dire quelques phrases sur ce projet de loi là parce que c'est un projet de loi qui est présenté comme un projet de loi public, même si sa nature est privée, et on veut le traiter en commission parlementaire comme un projet de loi privé.

Essentiellement, le député parrain du projet de loi, c'est-à-dire le député de Beauharnois-Huntingdon, a assez correctement et succinctement présenté de quoi il s'agit, peut-être en mots plus simples plutôt qu'en texte continu. Il s'agit tout simplement qu'en 1980 la municipalité de Valleyfield a annexé un territoire à la ville, le territoire de Hungry Bay, qui était un secteur isolé, et, en l'intégrant à la ville de Valleyfield, Saint-Stanislas-de-Kostka a continué à exiger un paiement de taxes des citoyens comme si c'était également son territoire. Alors, en termes concrets, c'est arrivé que des citoyens ont été doublement taxés: les citoyens ont été taxés par la municipalité de Kostka et les mêmes citoyens ont été taxés également par la municipalité de Valleyfield. Donc, on connaît le niveau des taxes au Québec, on sait également le niveau des taxes dans les municipalités; je ne connais pas beaucoup de citoyens qui souhaitent être taxés en double pour l'imposition foncière.

Donc, c'est évident qu'il fallait corriger le problème et, comme ceci s'est produit antérieurement à ce qu'il existe des dispositions, actuellement, dans la loi générale de l'organisation des territoires municipaux, bien, à ce moment-là... Si ça s'était passé postérieurement, nous n'aurions point eu besoin d'un projet de loi privé parce que les dispositions du projet de loi prévoient de telles situations, comme celle-là, en termes de gestion. Ce n'est pas le cas présentement, donc il faut régulariser la situation.

Mais, entretemps, la municipalité de Valleyfield, elle, prétend qu'elle a fait des interventions sur le territoire annexé, elle a fait des choses sur le territoire annexé, donc elle veut avoir des compensations. Elle veut bien retourner aux citoyens les taxes qui ont été payées en double, mais elle veut avoir une compensation pour les travaux exécutés sur le territoire annexé.

Tout ça pour vous dire, M. le Président, que c'est évident que, ce qu'on a à apprécier aujourd'hui, c'est le résultat d'une négociation qui va exiger, bien sûr, le travail d'un médiateur pour finaliser le tout. Mais, pour finaliser le tout sur la base des discussions, il faut une espèce d'assise porteuse ou une assise juridique pour recevoir et officialiser concrètement, en termes de droit, ces éléments-là pour chacun des citoyens.

Alors, voilà la nature du projet de loi privé, même s'il est présenté sur caractère public. Et c'est évident que, en ce qui nous concerne, on a l'habitude de... Moi, j'ai toujours... J'en profite pour expliquer à nouveau la seule philosophie qui nous anime là-dedans: c'est toujours de voir si, dans le bill privé, l'intérêt public est protégé ou sauvegardé. Sans être des connaisseurs de tout, il nous apparaît ici que, effectivement, le législateur a essayé de conserver et de protéger l'intérêt public des parties. Et, comme l'intérêt public des parties est protégé, nous allons souscrire au principe du projet de loi et nous allons contribuer, dans ses phases ultérieures, à ce qu'il soit adopté le plus rapidement possible, pour mettre fin à une situation qui a créé des difficultés pour lesquelles il y a lieu, aujourd'hui, d'arriver à un règlement définitif qui permettrait de corriger les inconvénients que les citoyens payeurs de taxes ont eu à subir, mais pour lesquels, d'aucune façon, ils ont quelque degré de responsabilité que ce soit. Donc, c'est pour ça que nous sommes d'accord avec l'adoption du principe du projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Alors, ceci met fin au débat sur l'adoption du principe du projet de loi 191, n'ayant plus d'intervenants.


Mise aux voix

Alors, est-ce que le principe du projet de loi 191, Loi concernant la ville de Salaberry-de-Valleyfield et la paroisse de Saint-Stanislas-de-Kostka, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Doyon: Alors, M. le Président, je fais maintenant motion pour que ledit projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée et pour que le ministre des Affaires municipales soit membre de cette commission.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté. Très bien. Alors...

M. Doyon: Pourriez-vous suspendre une minute, s'il vous plaît, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Tremblay): Vous demandez une suspension? Très bien. Nous allons suspendre les travaux pour une minute. Très bien.

(Suspension de la séance à 15 h 20)

(Reprise à 15 h 25)

Le Vice-Président (M. Tremblay): Mmes et MM. les députés, si vous voulez vous asseoir, nous allons reprendre nos travaux. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Oui, M. le Président. Vous voudrez bien, maintenant, appeler l'article 4 du feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi 22


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le leader adjoint. M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du principe du projet de loi 22, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons alcooliques et d'appareils de loterie vidéo. Je suis prêt à reconnaître un premier intervenant, M. le ministre. M. le ministre.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. M. le Président, nous abordons aujourd'hui l'étude du projet de loi 22, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons alcooliques et d'appareils de loterie vidéo.

Le 12 mai dernier, lors de son discours sur le budget, le ministre des Finances soulignait l'impérieuse nécessité, pour tout citoyen, commerce ou entreprise, de s'acquitter de ses obligations fiscales envers le gouvernement. C'est une condition essentielle pour que notre système fiscal joue pleinement son rôle qui est de redistribuer la richesse collective. Afin de réaliser cet objectif, il affirmait l'intention de notre gouvernement d'agir rapidement et vigoureusement afin d'enrayer le commerce illégal des boissons alcooliques.

Le projet de loi dont nous abordons l'étude aujourd'hui vise essentiellement à donner suite à cette volonté en augmentant le montant de certaines amendes imposées aux contrevenants et en instaurant des contrôles plus serrés. Le projet de loi comporte également une disposition concernant les frais payables lorsqu'un propriétaire de bar, taverne ou brasserie désire exploiter un ou des appareils de loterie vidéo.

M. le Président, je traiterai rapidement de la contrebande d'alcool et j'expliquerai ensuite en détail les modifications contenues dans le projet de loi.

Contrebande d'alcool. Au cours des dernières années, le commerce illégal des boissons alcooliques s'est malheureusement développé de façon importante. Selon des estimés de la Société des alcools du Québec, une bouteille sur deux de spiritueux en circulation, au Québec, proviendrait de la contrebande, entraînant un manque à gagner de l'ordre de 300 000 000 $ à 400 000 000 $ pour l'État. Par ailleurs, selon des relevés des livres de la Société des alcools du Québec, certains propriétaires d'établissements détenteurs de permis d'alcool omettraient systématiquement de s'approvisionner auprès de la Société des alcools du Québec, préférant recourir au marché noir. En agissant de cette manière, ils omettent de payer non seulement des redevances supplémentaires applicables aux détenteurs de permis, mais également de remettre au ministère du Revenu la TPS et la TVQ qu'ils collectent lorsqu'ils revendent les boissons alcooliques à leurs clients.

M. le Président, la contrebande est un fléau pour la société, peu importe le produit visé. Chaque fois qu'un citoyen se livre à de la contrebande ou tire profit d'une activité de contrebande, il porte préjudice à ses concitoyens. La contrebande met en péril l'existence des commerces et des entreprises qui se font un devoir de respecter les lois. Elle prive l'État de revenus qui lui sont indispensables pour fournir à la population les services qu'elle s'attend à recevoir du gouvernement. Enfin, la contrebande favorise et encourage le développement du crime organisé, entraînant des dépenses supplémentaires par les gouvernements pour les opérations policières. Ne nous faisons pas d'illusions, la contrebande profite à une minorité d'individus, mais elle appauvrit l'ensemble de la société et contribue de façon importante à la dégradation du tissu social. J'expliquerai maintenant les modifications proposées par le projet de loi dont nous entreprenons l'étude et qui ont pour but de combattre ce fléau social.

(15 h 30)

Les modifications proposées en matière de boissons alcooliques. Le projet de loi vise, d'une part, à augmenter le montant des amendes qui seront imposées aux personnes trouvées coupables de s'être livrées au commerce illégal de boissons alcooliques. D'autre part, il instaure des mesures pour faciliter le contrôle du commerce des boissons alcooliques et la perception des droits et des taxes sur ces boissons. Les modifications prévues touchent trois lois, soit la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi sur les permis d'alcool, la Loi sur la Société des alcools du Québec.

La Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques prévoit diverses amendes pour la personne qui possède, garde, livre, transporte ou vend illégalement des boissons alcooliques sans respecter les conditions prévues par la loi. Par exemple, le fait de vendre des boissons alcooliques sans permis peut entraîner une amende allant de 1125 $ à 24 300 $. De même, le détenteur de permis d'alcool qui a en sa possession des bouteilles sur lesquelles n'est pas apposé le timbre de la Société des alcools du Québec peut se voir condamné à une amende dont le montant varie de 700 $ à 2800 $.

Le projet de loi vient donc d'abord hausser les amendes prévues par la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques lorsqu'il s'agit de boissons alcooliques fabriquées illégalement au Québec, par contrebande. En effet, lorsque la preuve révélera que des boissons alcooliques possédées, gardées, livrées, transportées ou vendues illégalement sont des boissons alcooliques que la SAQ, la Société des alcools du Québec, ne commercialise pas et qui ne sont pas fabriquées, embouteillées ou livrées conformément à un permis délivré en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec, l'amende sera haussée d'un montant de 25 $ par litre ou, lorsqu'il s'agira de bière ou de cidre, d'un montant de 3 $ par litre.

Le projet de loi introduit la même disposition dans la Loi sur la Société des alcools du Québec. De plus, lorsqu'une personne munie d'un permis pour consommation sur place aura dans son établissement un contenant de boissons alcooliques autres que la bière et le cidre acquis de la Société des alcools du Québec et sur lequel n'est pas apposé le timbre prouvant que le contenant a bien été acquis auprès de la Société des alcools du Québec, l'amende sera haussée de 25 $ par contenant de boissons alcooliques.

Le projet de loi précise ensuite les pouvoirs des agents de la paix lorsqu'ils ont des motifs raisonnables de croire que des boissons alcooliques se trouvent dans un véhicule. Dans ces circonstances, un agent de la paix pourra: exiger du conducteur qu'il immobilise son véhicule; vérifier l'identification des contenants des boissons alcooliques transportées; examiner les documents indiquant l'origine et la destination de ces contenants.

Par ailleurs, M. le Président, lorsqu'on saisira plusieurs contenants de boissons de format et de marque identiques en même temps, la poursuite pourra fournir en preuve un certificat d'analyse de la boisson provenant d'un seul des contenants saisis.

De plus, comme la Loi sur la Société des alcools prévoit présentement que, lors d'une inspection d'un établissement, il puisse y avoir prise d'échantillon, une disposition semblable sera introduite dans la Loi sur les permis d'alcool.

En matière de commerce d'alcool, le projet de loi ajoute enfin des dispositions concernant la perception aux frontières de la majoration de la Société des alcools du Québec. C'est ainsi qu'il permettra qu'une nouvelle entente soit conclue avec le gouvernement fédéral pour percevoir le montant de la majoration établie par la Société des alcools pour les boissons alcooliques apportées au Québec par un voyageur en provenance de l'étranger. La majoration est un montant que la Société des alcools ajoute au prix qu'elle a payé pour se procurer ses boissons et qui représente, M. le Président, globalement sa marge de profit. La Loi sur la Société des alcools du Québec sera donc modifiée afin que les personnes travaillant à un bureau de douanes situé au Québec puissent, au nom de la Société des alcools du Québec, percevoir la majoration qu'elle a établie et, si les voyageurs refusent de payer cette majoration, confisquer les boissons et les remettre à la Société des alcools du Québec.

Modifications proposées en matière d'appareils de loterie vidéo. Finalement, M. le Président, le projet de loi apporte des modifications concernant la tarification des appareils de loterie vidéo. En juin 1993, le gouvernement du Québec a confié à la Société des loteries du Québec l'exploitation des appareils de loterie vidéo. Ces appareils ne pourront être installés que dans les bars, tavernes ou brasseries dont les propriétaires en feront la demande.

Pour avoir le droit d'opérer un ou des appareils de loterie vidéo, les propriétaires d'établissements doivent obtenir de la Régie des alcools, des courses et des jeux une licence d'exploitant de site. Le gouvernement avait prévu que les personnes qui désireraient obtenir une licence d'exploitant de site devraient payer des droits variant de 550 $ à 750 $, selon le nombre d'appareils, le maximum étant de cinq. Ils devraient également débourser un montant de 84 $ pour les frais d'étude de la demande de licence. Cependant, afin de faciliter l'implantation du système de loterie vidéo, les exploitants de site n'auront pas à payer les droits et frais mentionnés précédemment, jusqu'à ce que le gouvernement en décide autrement par la voix d'un décret. Cette suspension des droits et des frais s'appliquera autant pour l'émission d'une licence d'exploitant de site que pour son renouvellement.

En conclusion, M. le Président. Voilà donc l'essentiel du projet de loi qui est devant nous. Je suis convaincu que les dispositions qu'il comporte nous permettront de lutter encore plus efficacement contre la contrebande d'alcool et de nous assurer que les droits fiscaux qui reviennent au gouvernement seront perçus.

J'écouterai attentivement les commentaires du député de l'Opposition, et il me fera plaisir ensuite de poursuivre la discussion en commission. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le ministre. Avant d'entendre le député de l'Opposition officielle, vous me permettrez de demander le consentement de cette Assemblée pour déroger à l'article 237 du règlement, compte tenu qu'on n'était pas dans les délais requis pour l'étude du projet de loi. Il y a consentement, je présume. Très bien.

Alors, je vais maintenant reconnaître M. le député de l'Opposition officielle et critique en cette matière, M. le député de Jonquière. M. le député de Jonquière.


M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Il est devenu de coutume qu'à chaque fin de session le gouvernement nous présente des projets de loi à la dernière minute, ce qui a pour effet que ces projets de loi, règle générale, sont passés un peu à la sauvette, un peu comme si on avait des choses à cacher, ou qu'il y a une urgence nationale qui est à l'évidence devant nous. Et, Dieu sait pourtant que, au point de vue de la loto vidéo, depuis que la loi a été passée – la loi 84 – c'est la troisième fois qu'on va légiférer sur la loto vidéo. Et, sur l'alcool, à chaque fin de session, il y a toujours une loi qui vient essayer de corriger des lacunes ou pas.

Il faut examiner, bien sûr, au mérite ce que le gouvernement nous présente. Nous, on n'a pas l'agenda gouvernemental. On est ici pour examiner si les textes ou les lois proposés ont des incidences sur le comportement des individus et si ça a pour effet d'améliorer quelque peu le fonctionnement des organismes, ou des sociétés, ou des comportements généraux de la société. En ce qui nous préoccupe, bien sûr, au point de vue de la contrebande d'alcool, on l'a dénoncée à maintes et maintes reprises, surtout lorsqu'on parlait de la contrebande du tabac, qui a fait les choux et les raves de beaucoup d'intervenants et qui a permis d'établir que, au Québec, il y avait deux sortes de justice: une justice pour les Blancs et une justice pour les autochtones. Et le gouvernement, après beaucoup de tergiversations, a fini par établir qu'on va baisser les taxes sur le tabac, ce qui a pour effet de diminuer la contrebande, mais ce qui a pour effet de faire baisser les revenus des taxes d'une façon désordonnée et éhontée, surtout pour un gouvernement qui a besoin de financement, qui a besoin de revenus. Et, en même temps, c'est un mauvais message qu'on donne à toute la population, à l'effet que seuls les gens qui affrontent les lois ont raison dans notre société.

(15 h 40)

C'est dangereux d'agir comme ça. On l'a dénoncé. Et le gouvernement, contrairement à ce qu'on aurait pu croire, essaie de passer pour un bon gouvernement, lorsqu'il vient nous dire ouvertement: Voyez comme on est bons, comment on a bien réussi dans la contrebande du tabac, excepté qu'on a perdu des centaines de millions – pour ne pas dire des milliards – en taxes. Et, ce qui s'est passé dans le tabac, se reconduit exactement dans le même fonctionnement avec l'alcool. Parce que, pour l'alcool, la même chose, il y a de la contrebande, qu'on dénonce aussi. Il n'y a pas moyen de contrôler ça, et ce n'est pas une question de taxation; c'est parce qu'il y a un manque de volonté politique, de la part du gouvernement, d'exercer ses prérogatives ou d'appliquer ses propres lois.

Voici ce qu'il nous propose, en un mot, dans ce projet qui nous concerne et qui nous préoccupe. Il nous dit: On pourra arrêter des intervenants à vue. Rappelons-nous, lorsqu'on a eu, à plusieurs reprises, avec l'ex-ministre de la Sécurité publique, le ministre Ryan, des discussions et, en même temps, des questionnements ici, à l'Assemblée nationale, il disait: M. le député de Jonquière, est-ce que vous avez des suggestions à nous proposer? On disait, à ce moment-là: Bien oui! Si on n'est pas capables de contrôler la contrebande à la source, contrôlons-la à la sortie. Mais vous ne présentez rien.

De quelle façon on pourrait faire ça? En fait, comme les autochtones demeurent sur des territoires déterminés, il est beaucoup plus facile de surveiller les sorties. Et, à ce moment-là, la Cour suprême avait donné un message, avait donné un jugement très clair, à l'effet, lorsqu'il y a des doutes raisonnables pour des policiers de croire que des gens sont en état d'ébriété, de les arrêter à vue ou de faire une fouille dans leur automobile. La Cour suprême a reconnu ce droit-là. Mais il a fallu non pas les pressions du critique ou porte-parole de l'Opposition officielle pour faire comprendre au gouvernement que c'était la façon de le faire, mais ce même gouvernement a attendu l'Ontario. Parce qu'on suit. Ce gouvernement-là, c'est un gouvernement de suiveux, ce n'est pas un gouvernement d'action. Ils ont décidé de suivre l'Ontario qui a passé des lois dans le même sens qu'on s'apprête à le faire, à l'effet qu'on pourrait, sur des doutes raisonnables, fouiller des automobiles ou des automobilistes s'il y a un doute raisonnable que ces gens-là peuvent être en contravention avec nos lois.

On pourrait bien argumenter pendant des mois et des mois à l'effet que ce n'est pas correct, ce qu'on se prépare à faire concernant la fouille à vue. Je ne suis pas un partisan inconditionnel de cette action-là, mais, devant le fléau que la contrebande a pris, parce qu'on parle d'une bouteille sur deux qui est en contrebande ici, au Québec, il n'y a pas beaucoup d'autres moyens qu'on peut appliquer, mais à la condition que ce ne soit pas pour se donner bonne conscience, à la condition que le ministre ne dise pas, en se promenant avec son projet de loi: Vous voyez, nous, on se promène avec des choses et voyez ce qu'on dit, c'est correct et c'est raisonnable. Il faut que le ministre ait aussi la volonté de l'appliquer, cette loi-là. Et je souhaite, si on la prend ou qu'on l'adopte, qu'elle soit appliquée, mais avec modération et avec jugement.

Il y a toujours un danger d'abus. Quand on propose des projets de loi, il y a toujours un danger que quelqu'un en prenne une habitude ou s'en serve. Parce que, quand on fait un projet de loi, c'est justement pour que des personnes s'en servent, mais il y a toujours une façon de s'en servir, c'est avec jugement et modération. J'espère que, lorsque le projet de loi sera adopté ou lorsqu'on l'aura examiné article par article, le ministre pourra donner des directives, ou la Sûreté du Québec pourra donner des directives à l'effet qu'on doit utiliser, pas ces armes, mais ces moyens qu'on met à la disposition de l'appareil judiciaire pour qu'ils puissent s'en servir avec modération.

Ça me permet d'ouvrir un autre front, M. le Président, où il y a un danger latent. Je ne connais pas la position du ministre, mais on entend parler beaucoup de la privatisation de la Société des alcools. On entend parler beaucoup de la contrebande, mais il y a des moyens que jamais on n'a mis en marche; il y a des moyens qu'on n'a jamais utilisés, parce qu'il faut penser que la Société des alcools du Québec appartient à l'État. C'est une société qui appartient à l'État – ce n'est pas comme la Société de l'assurance automobile où tous les revenus reviennent à l'État – et où on n'a pas utilisé, malheureusement, les moyens qu'on avait pour contrer la contrebande. Parce qu'il faut bien penser qu'il y a des gens qui vendent de l'alcool, il y a des gens qui en achètent et on a un contrôle sur eux, à la Société des alcools du Québec, où les gens, les hôteliers, les tenanciers de bars achètent régulièrement à la Société des alcools du Québec. Lorsque ces gens-là, semaine après semaine, diminuent leurs achats, on est en droit de penser, M. le Président, qu'il y a des fuites quelque part. Il y a des fuites, des montants importants qu'on ne contrôle plus. On perd de la taxe de vente, la TPS; on perd aussi les revenus de ventes de la Société des alcools, comme on perd les revenus de taxation.

Je ne suis pas convaincu, le gouvernement ne m'a pas convaincu que, ces moyens-là, on les a utilisés et on les a appliqués. Et, là, avec le gouvernement qu'on a en face de nous, qui parle, des fois, des deux côtés de la bouche en même temps, qui pense ou qui croit que la privatisation peut amener des travaux ou du travail supplémentaires à des employés, qui peut laisser penser au monde... Parce que, avoir un discours libéral, ça fait plaisir aux gens d'affaires. Comme c'est les plus grands souscripteurs à nos caisses électorales, ça peut sembler intéressant. Mais on oublie une chose, ce sont des moyens de développement qu'on a, qui nous appartiennent.

Le jour où on ne contrôle plus la Société des alcools du Québec, on ne contrôle plus la publicité sur l'alcool. Autrement dit, on ne pourra pas contrôler non plus la consommation. On sera obligé de faire des campagnes qui apeurent à peu près tout le monde, qui dérangent tout le monde. Et je me demande si, décemment, philosophiquement, même, ou moralement, c'est correct. Moi, je vous dis que la publicité qu'on fait actuellement sur la conduite automobile, avec la petite fille qui crie au meurtre, son père qui se fait arrêter, puis sa mère, je ne sais pas si elle est morte ou à moitié morte, on n'a pas de suite, parce qu'on veut contrer l'abus de l'alcool au volant, je me demande si cette publicité-là, moralement, est acceptable. Parce que, dans une société, il y a des moyens... Surtout quand c'est répété à plusieurs reprises dans la même soirée, c'est de nature à déranger du monde, même ceux qui ne boivent pas. Des cris d'enfants, M. le Président, c'est toujours poignant. Des scènes de violence – parce que c'est des scènes de violence – je me demande si on peut contrôler ou si on pourra obtenir des grands, grands effets. Je ne sais pas pourquoi la Société de l'assurance automobile continue dans ce domaine-là, mais ça touche tout le temps la question de l'alcool. Le jour où la Société ne contrôle plus les achats ou les ventes, parce que c'est de ça qu'on parle... Aussi, la Régie, c'est un peut tout poigné ensemble. Donc, il y a des conditions économiques ou des problèmes socio-économiques qui sont reliés à ça.

La privatisation, pour moi, n'est pas une réponse correcte. On pourra nous rappeler que, bien oui, en Alberta, il y a eu de la création d'emplois, mais c'est des créations d'emplois qui ont fait que le même montant d'argent est divisé en deux. Vous savez, on peut bien créer des emplois. Des gens qui travaillent à 20 $ l'heure, ça prend une personne à 20 $ l'heure. Si on en engage deux à 10 $, ça crée deux emplois. Ça crée un emploi supplémentaire, mais il n'y a pas plus d'argent en circulation. C'est ça qui m'inquiète beaucoup.

Je veux juste rappeler, sur cette question-là, au ministre de la Sécurité publique que, lui aussi, il fait partie du débat de la privatisation de la Société des alcools du Québec, qu'il a certainement un mot à dire. S'il en a un, moi, je veux juste lui rappeler que la privatisation n'est pas une réponse aux maux qui nous préoccupent.

Ce n'est surtout pas une réponse à la contrebande à laquelle on est confrontés. La contrebande, le jour où tout le monde va avoir la main dans le sac, pour ne pas faire de jeux de mots – la SAQ, la main dans le sac – pour distribuer ces boissons, ce sera beaucoup plus difficile de contrôler la provenance. Parce que, contrôler 20 000 ou 30 000 dépanneurs, c'est plus compliqué que de contrôler des centrales ou des endroits où la SAQ vend de l'alcool. Ça, il me semble que c'est élémentaire, c'est beaucoup plus facile. Lorsqu'on a moins de lieux de distribution, il est beaucoup plus facile de contrôler ce qui entre et ce qui sort que si on laisse ça partout à travers le Québec, d'autant plus que ce sont des profits qui appartiennent à la société québécoise, à ce qu'on sache. On n'a jamais prouvé qu'il y avait de la mauvaise administration à la Société des alcools du Québec. Donc, à ce moment-là, il faudra peut-être y penser deux fois avant d'accepter de démanteler puis de rapetisser l'État à un moignon d'État. Moi, je pense que c'est important de respecter ça et de surveiller ce qui se passe dans nos sociétés.

(15 h 50)

En ce qui concerne l'autre point aussi qui nous préoccupe, puisque la loto vidéo, ça fait trois fois qu'on légifère là-dessus, moi, je veux juste rappeler que, lorsqu'on a passé la loi 84, on avait vu un certain nombre d'embûches et un certain nombre de problèmes dont le ministre semblait non pas ignorant, mais ça lui passait trois pieds par-dessus la tête. Il n'avait pas l'air d'être préoccupé. Je ne parle pas du ministre actuel, mais, comme les ministres sont responsables au point de vue gouvernemental, il faut bien penser que je m'adresse au ministre actuel, l'autre n'y étant pas. Il faut bien que ça se passe, M. le Vice-Président de l'Assemblée.

Je veux juste vous rappeler que, cette loi-là, il y avait des embûches: d'abord, un, la fabrication des appareils loto vidéo, qui représentait une embûche de taille; le nombre d'intervenants dans le dossier et, aussi, le contrôle qu'on aurait à exercer. Dans un premier temps, on a déclaré que tous les appareils en service étaient illégaux, mais il n'y a pas de moyen d'appliquer la loi. Donc, on dit que c'est illégal, qu'il y a illégalité, mais on ne peut pas appliquer la loi. Parce qu'il y a eu des causes déjà, puis on n'a pas été capable de montrer l'illégalité, ce qui fait que le gouvernement a toujours émis des licences, mais il n'a jamais donné de permis d'opérer. Un problème de taille. Et il y en a 15 000 à 20 000, peut-être 25 000 appareils sur le territoire du Québec.

Vous voyez que ce n'est pas facile à contrôler, d'autant plus que, moi, je connais au moins ce qui se passe dans ma région, puis ça doit ressembler à peu près à partout. Il y a quelques individus qui contrôlent ça, et il y a beaucoup d'argent qui circule, 800 000 000 $ à 900 000 000 $, selon ce qu'on a dit en commission parlementaire voilà deux ans, et ces montants-là sont divisés 50-50 entre celui qui possède l'appareil, le propriétaire de l'appareil, et celui qui l'opère. Donc, l'opérateur, à 50-50, avec le projet de loi, il a une difficulté, parce que le gouvernement lui propose un partage de profits de 20 % au lieu de 50 %. Je n'ai pas à vous dire ni à vous faire une grande démonstration pour que vous constatiez qu'il y a des difficultés majeures, bien sûr.

Mais une des difficultés qu'on doit dénoncer, c'est que le ministre de la Sécurité publique du temps, M. Ryan, s'était engagé en commission parlementaire à tenir une table avec les intervenants pour pouvoir discuter ouvertement des problèmes qu'ils rencontraient. À ce qu'on sache, la table n'a jamais siégé. Les représentants des opérateurs ont tenté de mettre sur pied cette table, mais le gouvernement a toujours répondu par son absence, le corps policier n'a jamais participé à ces tables-là, et on a vu ce que ça a donné sur le terrain: un appel au boycott pour demander aux propriétaires d'établissements de refuser de mettre, dans leurs établissements, ces appareils-là.

Le gouvernement a ignoré ces menaces, à tort ou à raison, mais on peut dire que, avec le temps, c'est à tort. Parce que, aujourd'hui, après des appels d'offres, au lieu de 15 000 appareils qu'on s'attendait de placer dans l'immédiat pour le gouvernement, il y a seulement 800 appareils de placés dans tout le territoire, ce qui démontre, hors de tout doute, que l'appel au boycott a été fructueux et que les propriétaires des établissements ont refusé la mise en place de leurs appareils. Ils étaient chez eux, puis ils avaient le droit de refuser ou de prendre. Ils ont refusé, et le gouvernement, par son projet de loi, qu'est-ce qu'il fait? Il essaie de dorer un peu la pilule en disant: Si vous acceptez et si vous faites une demande d'appareils – parce que, là, il s'aperçoit qu'il n'y a pas foule aux balcons, il n'y a pas foule aux portes pour obtenir des appareils – ça ne va rien vous coûter, on ne vous chargera pas de licence, jusqu'au temps qu'on décide autrement. Bien, dans le fond, ça confirme un peu ce que j'ai dit au départ pour la boisson ou pour n'importe quoi, pour le tabac: Quand on est capable d'être assez fort pour affronter le gouvernement, le gouvernement finit par plier.

Le gouvernement n'a pas saisi d'appareils. Les 25 000 appareils qui opèrent sur le territoire du Québec, ils n'ont pas été saisis. À ce que je sache, ils fonctionnent encore, puis il y a des difficultés dans la loi. Moi, je ne sais pas comment, cette loi-là, elle est applicable. Parce qu'on dit: Pour que quelqu'un puisse avoir un appareil, il faut qu'il soit en accord avec les lois, puis quelqu'un qui a un appareil, actuellement, qui n'est pas immatriculé au nom de la Société des loteries du Québec, est illégal. Pour obtenir un permis, il ne faut pas être illégal, donc il ne faut pas avoir d'appareil. Puis, si vous avez un appareil, vous n'avez pas le droit de le transporter et vous n'avez pas le droit de l'avoir en main. Je ne vois pas comment on peut faire le lien entre, quelqu'un qui a un appareil et qui en veut un nouveau, quand il est légal et quand il ne l'est pas, puis comment il fait pour se débarrasser de cet appareil-là. Parce que, s'il part avec et qu'il se promène sur le territoire, il est poigné, il est illégal; il n'a pas le droit de le transporter, il n'a pas le droit de l'avoir chez lui. Ça fait que je ne sais pas à quel point, là... s'il y a un temps de grâce quelque part, ce n'est pas prouvé. Dans la loi, ce n'est pas marqué qu'il y a un temps de grâce. On ne dit pas: Vous avez 10 jours, cinq jours pour vous en débarrasser. Là, j'ai comme l'impression que, par un tour de magie, Houdini arrive, fait une passe, et, l'appareil, il faut qu'il disparaisse. Je ne sais pas comment; je ne sais pas si c'est en haut, en bas, à côté, je n'ai aucune idée.

C'est ça que la loi dit. Et j'invite, bien sûr, ceux qui m'écoutent à lire le projet de loi. C'est impressionnant. C'est des législateurs qui ont fait cette loi-là. Et, là, aujourd'hui, pour réparer les pots cassés, ça fait deux fois qu'on revient avec le même projet de loi qu'on essaie de faire cheminer. Ça aurait été si facile, M. le Président, de rencontrer les intervenants, d'abord. Au moins, on aurait l'impression qu'on aurait accepté d'être transparent. On aurait aussi l'impression – non seulement l'impression, mais la certitude – que... Les intervenants, on aurait pu ne pas les écouter, mais, au moins, on les aurait rencontrés, on aurait accepté. Parce qu'on n'est pas à une contradiction près avec le gouvernement qu'on a en face de nous. Les commissions parlementaires qu'on fait depuis plusieurs années, ça n'a pas influencé beaucoup les législations, ça, ni les législateurs, malheureusement. Parce que, quand on regarde ce qui se passe dans beaucoup de projets de loi, on se demande pourquoi on a fait une parade en commission parlementaire. Moi, je trouve que ç'a été souvent, et malheureusement, un manque de respect envers la population et envers nos intervenants, puisque, faire venir des gens de bonne foi, en commission parlementaire, qui ont préparé des mémoires et qu'on n'en tient pas compte, pour moi, c'est un manque de respect envers nos interlocuteurs. C'est malheureux.

Lorsqu'un ministre s'engage à rencontrer des intervenants, après l'adoption d'un projet de loi, ce n'est pas pour leur fermer la boîte ni pour gagner du temps. C'est pour leur dire: J'ai le goût de discuter avec vous autres. Surtout que le gouvernement n'a pas d'expertise en loto vidéo. On aura beau dire que, depuis 25, 30 ans, ça se promène, puis ça fonctionne sur le territoire du Québec, on peut bien dire qu'il y a des problèmes qui existent, mais le gouvernement du Québec, ni la Société des loteries du Québec, n'a administré ce système-là. Donc, on ne l'a pas fait, on ne peut pas dire qu'on connaissait ça. On n'avait pas d'expertise et l'expertise policière n'était pas suffisante, à mon point de vue, pour convaincre les différents intervenants.

En tout cas, il y a une chose certaine, c'est que le gouvernement est pris avec un petit sur les bras. Il a accepté, par des soumissions publiques, que des intervenants construisent des appareils. Et, au moment où on parle, ces appareils-là, ayant déjà prouvé, malgré tous les systèmes qu'on avait, que ça pouvait être à l'épreuve des balles, de n'importe quoi, là, qu'il n'y avait pas de danger, qu'on ne pouvait pas les fausser, on a déjà démontré – et c'est vrai – par ce qui s'est passé au Casino, que, ces appareils-là, on pouvait même fausser les résultats. Ça s'est produit! Les puces, l'histoire des puces, là, c'en était un, cas patent. Le ministre des Finances n'a pas voulu l'admettre immédiatement, mais c'est vrai. Donc, le système qu'on voulait qu'ils mettent en place, sécuritaire à 100 %, on n'a pas réussi à le mettre en place. Est-ce que c'est mieux actuellement? Je ne le sais pas. Il y a une chose certaine, c'est qu'on est pris avec des appareils et qu'il faut les placer, il faut avoir aussi l'accord des distributeurs, c'est-à-dire des opérateurs, parce que, s'ils ne veulent pas les avoir dans leur commerce, ça va mal à la shop, hein? Ça va mal!

(16 heures)

Donc, le gouvernement, c'est quoi, le principe du projet de loi? C'est d'essayer de les entrer dans les commerces, ces appareils-là. Est-ce qu'on peut espérer que ça va donner des résultats? Moi, je n'ai aucune idée. Je n'ai pas rencontré ces gens-là dernièrement, je ne sais pas leur philosophie. Je ne sais pas si le ministre a l'intention de les rencontrer pour discuter des coûts, de ce que pourrait être le partage des coûts. Il ne semble pas qu'il y ait eu des concessions, à venir jusqu'à maintenant. J'ai comme l'impression que le partage des coûts est une pierre dans le jardin gouvernemental. Ça empêche les opérateurs de vouloir accepter ces appareils-là.

Est-ce que le ministre actuel, par intérim presque, aura le courage, la volonté de régler le problème? Je ne le sais pas. En tout cas, si ce n'est pas lui, ça sera d'autres, ça sera des successeurs. Je pense que c'est ça qu'il faut se dire.

Donc, pour conclure, M. le Président, j'ai essayé au moins d'attirer l'attention sur les difficultés qu'on veut corriger au point de vue de la contrebande, où j'émets certains doutes, parce que je ne connais pas la volonté du ministre. Jusqu'à maintenant, on a légiféré beaucoup. Malgré les prétentions gouvernementales à l'effet de légiférer mieux et moins, on a légiféré plus et avec moins de résultats. Je ne connais pas la volonté du ministre. C'est un moyen que l'Opposition va concourir, bien sûr, à mettre en place.

Quant aux appareils de loto vidéo, encore là j'émets certains doutes, mais je ne veux surtout pas que le ministre retienne que, la contrebande, elle va arrêter juste avec ce projet de loi là. S'il n'y a pas de volonté gouvernementale, s'il n'y a pas un meilleur contrôle d'exercé, tout ce qu'on fait n'est que futilité. Et, si le législateur parle pour ne rien dire, moi, je dois dire que je regretterai, à ce moment-là, d'avoir donné mon accord à ce gouvernement. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Alors, comme il n'y a pas d'autre intervenant au sujet de cette motion, ou ce projet de loi, est-ce que le principe du projet de loi 22, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de boissons alcooliques et d'appareils de loterie vidéo, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des institutions

M. Doyon: Oui. Je voudrais faire maintenant motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Oui. Vous voudrez bien, maintenant, M. le Président, appeler l'article 16 de notre feuilleton.


Projet de loi 4


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le leader adjoint. Je vais appeler l'article 16. Alors, à l'article 16, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 4, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Énergie et des Ressources et d'autres dispositions législatives. Alors, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant, M. le ministre...

M. Doyon: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Tremblay): Un moment.

M. Doyon: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le leader adjoint.

M. Doyon: ...j'ai omis de demander que le ministre fasse partie de ladite commission que je viens d'annoncer. Est-ce qu'il y a consentement pour que ce soit fait?

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui. Je pense que votre proposition ou votre motion est superflue parce que, de fait, le ministre fait partie de la commission. Ça va? Très bien.

M. Doyon: Alors, c'est d'accord. Merci. Alors, nous sommes donc à l'article...

Le Vice-Président (M. Tremblay): Il y a consentement? Alors, ça ne fait qu'ajouter à la motion.

Une voix: Trop fort ne casse pas.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui. Très bien. Alors, je suis maintenant prêt à reconnaître M. le ministre des Affaires...

Une voix: Des Ressources.

Le Vice-Président (M. Tremblay): ...des Ressources naturelles. Alors, au sujet du projet de loi 4, M. le ministre des Affaires naturelles, des Ressources naturelles.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Ha, ha, ha! Merci, M. le Président. Le projet de loi 4 que nous allons prendre en considération, qui a franchi, donc, les étapes de l'adoption du principe ainsi que de l'étude article par article en commission parlementaire, est le projet de loi qui vise à permettre la fusion des ministères des Forêts et de l'Énergie et des Ressources pour qu'on puisse, dans un ensemble bien structuré et bien organisé, gérer l'ensemble des ressources naturelles au Québec.

Je dois dire que l'Opposition a participé avec moi à l'étude article par article et que, même si, avec le député de Laviolette, nous n'avons pas toujours pu nous entendre, il va de soi que l'objectif visé par le projet de loi permettra, comme je le disais, de nous donner un ensemble qui inclura à la fois le secteur de l'énergie, les forêts, les terres, les mines, donc l'ensemble des ressources naturelles du Québec, et c'est dans ce contexte-là, M. le Président, que je suis heureux de proposer l'adoption par cette Assemblée de ce rapport qui vient de la commission. Merci.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le ministre. Alors, il n'y pas d'autre intervenant sur l'adoption du rapport de la commission de l'économie et du travail.


Mise aux voix du rapport

Par conséquent, est-ce que le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi 4, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Énergie et des Ressources et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Perron: Sur division.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Il est adopté sur division. Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Vous voudrez bien, maintenant, appeler l'article 19 du feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi 12


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le leader. L'article 19. Alors, à l'article 19, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 12, Loi modifiant la Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la Baie James et du Nouveau-Québec. Alors, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant, M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Encore une fois, après avoir franchi l'étape de la commission parlementaire, laquelle a procédé à l'étude de chacun des articles du projet de loi, le projet de loi qui modifie la Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la Baie James et du Nouveau-Québec, je propose aujourd'hui, M. le Président, d'adopter ce projet de loi pour permettre aux Inuit, au Cris, aux Naskapis de pratiquer la chasse commerciale du caribou, du tétras des Savanes, du lagopède et du lièvre et de garder en captivité ou d'élever ces mêmes espèces et le boeuf musqué.

M. le Président, lors de la commission parlementaire, je crois qu'avec le député de Duplessis on a eu un bon échange et des discussions. Je crois avoir apporté une réponse satisfaisante aux questions soulevées de la part de l'Opposition qui avait d'ailleurs accepté le principe de ce projet de loi le 1er juin dernier.

Et j'en profite, M. le Président, pour souligner l'approche positive et constructive développée par le député de Duplessis au regard du projet de loi que nous avons devant nous. Lui comme nous, de ce côté-ci, constatons que ce projet, qui fait suite aux conventions complémentaires qui furent conclues avec les Inuit, les Cris et les Naskapis, permettra à ces mêmes groupes de personnes de pratiquer de façon exclusive, pendant une période de 30 ans, la chasse commerciale des espèces que je mentionnais ainsi que l'élevage en captivité, s'il le faut, et ceci, M. le Président, afin de donner l'occasion à ces communautés de développer une activité économique qui produira des emplois, générera des revenus pour ces groupes, en fonction aussi des activités traditionnelles qui caractérisent un mode de vie qui, tout en étant en évolution, demeure encore largement basé, sur ces territoires, sur des activités traditionnelles.

Alors, le projet de loi que nous avons devant nous, après des années, finalement, de discussions et de négociations, aboutit à des amendements à la Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la Baie James et du Nouveau-Québec afin de permettre aux Inuit, aux Cris et aux Naskapis de faire ici ce qui se fait déjà dans d'autres territoires, en particulier au Labrador. Parce que, vous savez, M. le Président, en se promenant, des fois, ici, sur la Grande Allée, et en allant dans les restaurants ici, on peut voir sur les menus, par exemple, la viande de caribou ou d'autres espèces sauvages, mais jamais jusqu'à maintenant on n'aurait pu trouver dans ces restaurants de la viande qui provenait du Québec, M. le Président. Alors, pour la première fois, suite à l'adoption de ce projet de loi et avec la mise en oeuvre, tranquillement, des objectifs que vise le projet de loi, les Inuit en particulier, parce que c'est eux qui ont beaucoup poussé pour avoir ce projet de loi et qui sont le plus prêts à commercialiser le caribou et à entreprendre ces activités, M. le Président, pourront dorénavant fournir aux restaurants et aux autres établissements hôteliers la viande des espèces que j'ai mentionnées.

En ce qui concerne les troupeaux de caribous qui sont concernés, nous sommes devant une situation où il y a un très grand nombre de bêtes qui sont là et donc des grandes marges de disponibilité au niveau de la cueillette, M. le Président. Les biologistes parlent même de la possibilité d'abattage d'au-delà de 70 000 animaux. Et, à l'heure actuelle, la chasse sportive et la chasse commerciale, en tout et partout, ce qui est projeté à l'heure actuelle, on parle de 38 000 animaux.

Et il faut aussi tenir compte du fait qu'en aucun temps la chasse commerciale ne viendra déstabiliser, ou débalancer, ou empêcher la chasse sportive, parce qu'il y a un certain ordre hiérarchique qu'on a établi. Le premier principe est d'assurer toujours la pérennité de l'espèce. Celui qui vient en deuxième lieu, après cette activité de préservation de l'espèce, M. le Président, est la chasse de subsistance des autochtones, suivie de la chasse sportive. Et ce n'est qu'après, selon les disponibilités, que la chasse commerciale entre en ligne de compte.

(16 h 10)

Alors, M. le Président, je rappelle à cette Assemblée que les autochtones, qui ont, pendant 30 ans, une période d'exclusivité pour développer cette commercialisation des viandes sauvages, peuvent aussi, durant ce même temps, s'associer, s'adjoindre à des non-autochtones. Et, certainement, le fait que, à partir du moment où on fait la chasse jusqu'au moment où on trouve la viande dans les restaurants, il y a toute une chaîne d'activités qu'il faudrait mettre en place, il y a certainement de la place pour beaucoup de partenariat, des entreprises conjointes possiblement avec les autochtones et des non-autochtones. Pris dans son ensemble, ce projet de loi permettra, à travers ces activités, de rapprocher davantage les groupes concernés par les activités de développement économique, tout en faisant le lien entre les activités traditionnelles qui les caractérisent, comme je le disais encore, et les activités de type plus commercial et plus économique.

Tout ça, pour le plus grand bénéfice des groupes concernés, étant donné que les retombées économiques immédiates seront dévolues à ces communautés, que ce soit au niveau des revenus que les activités généreront, que ce soit au niveau des emplois. Quand on sait qu'il y a un grand nombre de jeunes, M. le Président, qui vivent dans ces communautés – au-delà de 50 % de la population chez les Inuit, chez les Cris et chez les Naskapis se trouvent à avoir moins de 25 ans – c'est un débouché intéressant qui permettra, avec le temps et dans la mesure où on va pouvoir faire une plus grande entrée dans les marchés de ces viandes, qui permettra, donc, une activité économique qui devrait permettre à ces mêmes jeunes, tout en restant au sein de leur communauté, de bénéficier de ces activités. Finalement, je suis heureux de constater, comme je le soulignais, que l'Opposition est d'accord avec ce projet de loi et que le projet de loi devrait donc trouver un assentiment unanime au niveau de cette Chambre, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le ministre. Alors, je suis prêt à reconnaître un autre intervenant du parti de l'Opposition officielle, au sujet de la prise en considération du projet de loi 12. M. le député de Duplessis.


M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. M. le Président, c'est clair dans notre esprit à nous que, le projet de loi 12, qui a été discuté en commission parlementaire et dont nous avons, au moment où on se parle, à discuter lors de la prise en considération du rapport, l'Opposition est parfaitement d'accord avec ce projet de loi, pour différentes raisons.

C'est clair dans notre esprit – en tous les cas, de notre côté – que ça entre même à l'intérieur de différents aspects politiques qui se sont passés ici, en Chambre, et à l'extérieur de la Chambre au cours des dernières années, en particulier depuis 1983. On a seulement à se rappeler les 15 principes de 1983, à se rappeler la motion de M. Lévesque, en 1985, et aussi à se rappeler le programme du Parti québécois. Effectivement, ce projet de loi entre exactement dans le cadre du programme de mon parti politique.

Bien sûr que, ce projet de loi, il est extrêmement intéressant sous différents aspects. Premièrement, il y a une question de responsabilisation de la part de l'ensemble des Blancs et de l'ensemble des autochtones du Québec – en particulier des Blancs qui vont participer à l'avenir de ce projet de loi – pour la mise en marche de certains aspects qui vont être mis en place au cours des prochains mois et des prochaines années. Donc, responsabilisation chez les Blancs, mais aussi, en particulier, responsabilisation au niveau des nations autochtones que le ministre a mentionnées tout à l'heure, c'est-à-dire les Cris, les Naskapis et les Inuit.

Bien sûr que les retombées économiques qui vont découler de ce projet de loi ont un caractère extrêmement important, comme le mentionnait le ministre tout à l'heure. Ça va effectivement créer des emplois, peut-être à l'année, parce que cette chasse peut se faire, dépendamment du territoire, pour une période tout de même assez longue. Donc, il y a des retombées économiques chez les Inuit, chez les Naskapis et les Cris par rapport à l'abattage, par rapport à l'empaquetage et par rapport aussi à la mise en marché. Ça, c'est clair dans notre esprit.

Bien sûr que, lorsqu'on parle d'un produit de base – le ministre a énuméré, tout à l'heure, l'ensemble des espèces qui sont touchées par ce projet de loi, soit au niveau de l'abattage ou encore au niveau de la production – à ce moment-là, on considère toujours comme le gros marché potentiel la question du caribou par rapport au cheptel qu'il y a dans le Nord québécois, dans le Nouveau-Québec.

Bien sûr, dans l'ensemble de tout ça, si on arrive avec un projet de loi comme celui-ci, qui a été discuté au cours de plusieurs années, c'est qu'il y a eu, d'abord et avant tout, des négociations. Il y a deux ententes de signées, soit la convention 12 par rapport aux Cris et aux Inuit et il y a aussi eu l'entente avec les Naskapis, qui est la convention no 1. Et, tout ça, ça va permettre la mise en marche d'une production en partant du cheptel de caribous, qui est le plus gros au monde, et bien sûr qu'il va falloir que le gouvernement et les autochtones assurent le suivi de ces deux ententes-là et de la loi elle-même.

M. le Président, en ce qui nous concerne, c'est d'abord et avant tout un exemple probant, suite à des discussions de base et faites de bonne foi entre les gouvernements et les nations autochtones, qu'on en arrive à des ententes comme celles-ci qui sont extrêmement fructueuses pour toutes les parties et qui peuvent être même conçues sur le terrain de chacun des territoires donnés.

Et, moi, je me rappelle, en ce qui me concerne, que la première étude que j'ai vu en rapport avec le caribou, c'est une étude qui remonte au début des années quatre-vingt et où il était question d'abattage, il était question de mise en marché. C'est une étude qui avait été faite par l'OPDQ dans le temps. Mais, par contre, c'est clair qu'il y a des négociations qui ont été entreprises à partir de 1985, et on peut voir comment les négociations sont délicates et les signatures d'ententes sont aussi délicates, parce que, si on regarde ça, c'est depuis 1985 que ça se discute. On arrive en 1994, presque 10 ans plus tard, et on a signé une entente. Alors, tout ça pour vous dire qu'il arrive parfois que, à cause du contenu de ces ententes-là, ça peut être extrêmement long à négocier, mais, d'autre part, c'est qu'on pourrait être un peu plus rapide si, des deux côtés, on avait une volonté politique d'y arriver.

M. le Président, je pense qu'un autre facteur important c'est que, pour les gens qui demeurent dans le Nouveau-Québec, en particulier pour les autochtones, pour les nations autochtones, c'est clair que c'est une voie vers l'avenir, c'est une voie vers une meilleure économie et c'est une voie où on peut développer cette économie directement dans chacun des milieux. Et, l'intéressant, aussi, dans tout ça, c'est que, effectivement, lorsqu'on regarde les Cris, lorsqu'on regarde les Naskapis, lorsqu'on regarde les Inuit, en particulier, sans exclure les Cris, mais en particulier chez les Inuit et chez les Naskapis, ces gens-là ont toujours pratiqué la chasse de subsistance dans leur territoire, et en particulier au niveau du caribou. Donc, il y a une expertise qui a été créée au cours de toutes ces années de chasse et de toutes ces années en rapport avec la préparation de la viande de caribou, se rapportant à la situation chez ces nations autochtones.

Mais il reste quand même que, en ce qui nous concerne, si on a été d'accord avec le projet de loi, c'est par souci écologique et c'est aussi par souci environnemental, encore plus que par souci économique, parce qu'on sait très bien que, au niveau du caribou, c'est qu'il faut absolument qu'il y ait un contrôle du cheptel de caribous, qui est actuellement beaucoup trop élevé. Et pourquoi ne pas s'en servir justement pour créer des emplois et faire en sorte que la situation économique, chez les nations autochtones et aussi chez certains Blancs, soit encore meilleure?

Alors, tout ça pour vous dire, M. le Président, qu'il est extrêmement important que tout ça soit mis en marche dans les plus courts délais possible. Et il est extrêmement important aussi que ça se fasse dans les règles de l'art. Le ministre en a parlé quelque peu en commission parlementaire, mais je voudrais ici rappeler devant les membres de cette Chambre qu'il est extrêmement important que les règles de l'art soient appliquées dans le cas de l'abattage, dans le cas de l'empaquetage, dans le cas de la mise en marché, afin que les consommateurs et les consommatrices aient une protection maximum par le biais de la réglementation du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, qui doit être respectée dans son ensemble. Et je sais que, de par la définition elle-même du projet de loi et la signature des deux conventions, la convention no 1 et la convention no 12, les gens qui ont signé cette entente sont prêts à accepter, justement, qu'il y ait, effectivement, comme résultat une grande protection par rapport aux consommateurs et consommatrices.

M. le Président, en conclusion, le plus grand souhait que je puisse avoir et que, je pense, tous les membres de cette Chambre, ici, ont en rapport avec ce projet de loi là, c'est que ça se fasse, dans un premier temps, rapidement pour permettre, justement, un redressement économique de la situation des nations concernées, c'est-à-dire les Cris, les Inuit et les Naskapis, et que ça se fasse dans le plus court délai, donc au plus vite.

(16 h 20)

Et je pense qu'on est en train, actuellement, d'embarquer dans la bonne façon de faire les choses, ce qui, pour moi, est un synonyme de réussite. Et vous me permettrez, au nom de l'Opposition, d'endosser entièrement ce projet de loi, en espérant que l'avenir va confirmer que c'est un bien pour l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes autochtones et, aussi, pour l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Alors, ceci met fin au débat.


Mise aux voix du rapport

Alors, est-ce que le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 12, Loi modifiant la Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la Baie James et du Nouveau-Québec, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, à ce moment-ci, je vous demanderais, M. le Président, d'appeler l'article 18 du feuilleton.


Projet de loi 9


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le leader. Alors, à l'article 18, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 9, Loi sur le ministère de l'Environnement et de la Faune et modifiant diverses dispositions législatives. Alors, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. M. le ministre.


M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, brièvement, M. le Président. Est-il nécessaire de rappeler à cette Assemblée que, le 11 janvier dernier, plusieurs modifications importantes sont survenues dans l'organisation de l'appareil administratif québécois. Un nouveau ministère a été créé et son titulaire, le ministre de l'Environnement et de la Faune, s'est alors retrouvé avec la responsabilité des fonctions auparavant dévolues au ministre de l'Environnement, d'une part, et au ministre de la Chasse et de la Pêche, d'autre part. Le présent projet de loi vient concrétiser ce changement au plan législatif, en créant le ministère de l'Environnement et de la Faune, dont la double mission est de voir à la protection de la qualité de l'environnement et d'assurer la conservation et la mise en valeur de la faune.

À toutes fins utiles, le projet de loi 9 vise le remplacement des lois constituantes du ministère de l'Environnement et du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Ce projet de loi contient également des dispositions relatives à l'organisation du ministère de l'Environnement et de la Faune, de même que des dispositions de concordance, indispensables à son insertion dans l'ensemble de la législation.

Je sollicite donc le consentement de tous les membres de cette Chambre, qui auront compris les avantages d'un tel projet de loi, pour adopter le rapport de la commission, une étape essentielle pour mener à terme l'adoption dudit projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le ministre. Alors, sur la prise en considération du rapport du projet de loi 9, je suis prêt à reconnaître un député de l'Opposition officielle, M. le critique en cette matière, M. le député de Dubuc.


M. Gérard R. Morin

M. Morin: Alors, merci, M. le Président. Lors de mon intervention sur l'adoption de principe du projet de loi 9, qui a finalement pour but d'éliminer ou de démanteler l'ancien ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en plus de référer au ministère des Affaires municipales le volet loisirs, j'ai tenté, avec une multitude d'exemples, de démontrer que, quant à l'objectif recherché par le gouvernement, soit l'économie appliquée par la fusion d'un certain nombre de ministères, évidemment, la preuve de ces économies était encore à faire.

L'autre volet que j'ai soulevé touchait, bien sûr, l'absence de légitimité, de la part du gouvernement, d'opérer un tel virage dans le dernier tournant de son mandat, une opération qui, finalement, est loin de faire consensus dans le milieu, quand on connaît la clientèle du monde relié aux activités de la faune, de la chasse, de la pêche et du piégeage, clientèle particulière qui avait développé un sentiment d'appartenance envers le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, à un point tel, M. le Président – et je le répète – que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche était un des rares ministères à pouvoir revendiquer cette fierté, que les utilisateurs ou les adeptes de la chasse et de la pêche et tous les intervenants interpellaient le ministère du Loisir comme étant leur ministère.

Alors, je pense que ce que le ministre considère comme une simple formalité ou une simple démarche économique est fondamentalement une erreur, de la part du présent gouvernement, d'opérer un tel changement, qui est loin d'obtenir le consensus du milieu, et cela, à la fin de son mandat. Et, aussi, M. le Président, j'ai tenté de démontrer, avec preuves à l'appui, que, quant à cette croyance qui voulait que les ressources fauniques seraient mieux protégées sous la tutelle du ministère de l'Environnement, je pense que, depuis trois mois, ce ne sont pas les exemples qui manquent qui démontrent que c'est loin d'être le cas, que les ressources fauniques étaient mieux gérées, en respect pour les utilisateurs, que ce que nous pouvons vivre depuis trois mois, et je ne répéterai pas les exemples, M. le Président. Je pense que j'y suis allé peut-être de 15 à 20 exemples lors de l'adoption de principe. Donc, il s'agit là d'un mythe de croire que, pour que les ressources fauniques soient bien protégées, il faut qu'elles soient sous la tutelle du ministère de l'Environnement.

Alors, M. le Président, revenons à la commission parlementaire. Le ministre, d'ailleurs, n'a pas tenté de me convaincre du contraire. Il a été même très expéditif. Il savait à qui il avait affaire, donc il n'a pas voulu perdre de temps à vouloir changer mes profondes convictions là-dessus. Alors, M. le Président, nous avons dû nous opposer vivement, particulièrement aux articles 10 à 15 qui, finalement, touchent les nouvelles fonctions et les pouvoirs du ministre en ce qui concerne, bien sûr, les volets reliés à la question des ressources fauniques.

Pour ce qui est du reste, les 50 ou 60 articles, le ministre en a fait mention tout à l'heure, il s'agit d'une multitude de cohérences ou de concordances avec les différentes lois, parce que faut-il rappeler que ce projet de loi 9 a pour effet de toucher environ 38 lois – c'est peu de chose – en plus, bien sûr, des deux lois du ministère de l'Environnement et de l'ancien ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Donc, évidemment, lorsqu'une loi affecte une trentaine d'autres lois, ça constitue une multitude de petits articles mais qui n'ont, pour toutes fins utiles, qu'un but de concordance. Alors, évidemment, il a fallu, bien sûr, approuver ces quelques articles.

Mais, ceci dit, M. le Président, considérant qu'en commission parlementaire, suite à l'étude de ces articles-là, avec peut-être un amendement ou deux qui n'ont rien changé au fond même du projet de loi, mes convictions sont demeurées les mêmes, à savoir que le gouvernement commet une erreur dans un but purement financier où les économies sont loin d'être démontrées et qu'il développe de plus en plus une confrontation, où, finalement, la concertation qui existait avec l'ancien ministère fait davantage place à la confrontation, et c'est bien malheureux de dire que l'avenir nous réserve de très mauvaises surprises, c'est pour toutes ces raisons, M. le Président, que ma formation politique se doit de voter contre le présent projet de loi, malgré l'étude article par article en commission parlementaire. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Alors, ceci met fin au débat sur la prise en considération du rapport du projet de loi 9.


Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi 9, Loi sur le ministère de l'Environnement et de la Faune et modifiant diverses dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

M. Morin: Sur division.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté sur division. Très bien. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je vous demanderais d'appeler l'article 26 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Article 26?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président.


Projet de loi 151


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 151, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives. Je suis prêt à reconnaître un premier intervenant, M. le ministre de l'Environnement. M. le ministre.

M. Perron: M. le Président, est-ce que vous pourriez constater le quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député, je vais le vérifier pour vous.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Constater l'absence du quorum!

Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, je constate que nous n'avons pas le quorum. Alors qu'on appelle les députés, s'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On ne peut pas constater le quorum, mais l'absence!

Le Vice-Président (M. Tremblay): L'absence de quorum!

(16 h 29 – 16 h 30)

Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, mesdames, messieurs, si vous voulez prendre place, s'il vous plaît, vous asseoir. Je constate que le quorum est établi. Alors, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune, sur la prise en considération du projet de loi 151. M. le ministre.


M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je poursuis donc, M. le Président. Nous en sommes rendus à cette autre étape importante du processus législatif que constitue l'adoption du rapport de la commission parlementaire qui s'est penchée sur le projet de loi 151, intitulé, comme vous l'avez si bien dit, M. le Président, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives.

Ce projet de loi vient modifier, de façon substantielle, la Loi sur la qualité de l'environnement en y introduisant les mesures légales qui permettent des modifications, en conformité au Protocole national sur l'emballage dont le Québec est un des principaux adhérents. D'autre part, le projet de loi introduit des dispositions permettant au gouvernement de rendre les normes d'implantation et d'exploitation d'un lieu d'enfouissement sanitaire plus sévères et d'assurer un meilleur contrôle des nuisances dues aux activités d'élimination des déchets solides. Cette législation, lorsque adoptée, permettra donc au gouvernement de renforcer les critères d'implantation et d'exploitation des lieux d'élimination des déchets.

Il est également proposé de soustraire au contrôle de la Commission municipale du Québec la fixation de tarifs exigés par les exploitants privés de lieux d'élimination des déchets. À la suite d'un jugement rendu en 1990, il s'est avéré nécessaire de rétablir l'équité entre les exploitants privés et publics de lieux d'enfouissement sanitaire, quant à l'établissement des tarifs.

Enfin, je rappellerai brièvement que c'est dans le but d'encourager, voire d'inciter des méthodes autres que l'enfouissement en matière de gestion des déchets que le gouvernement du Québec va de l'avant avec cette nouvelle législation, issue de sa politique de gestion intégrée, de gestion des déchets solides. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le ministre. Je vais maintenant reconnaître Mme la députée de l'Opposition officielle en cette matière et critique de l'Opposition officielle, au sujet de la prise en considération du projet de loi 151, Mme la députée de Taillon. Mme la députée.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, nous en sommes, effectivement, à l'adoption du rapport de la commission parlementaire qui a siégé pendant un long moment sur le projet de loi 151. D'ailleurs, j'aurai l'occasion, lors de mon intervention, d'expliquer pourquoi nous avons siégé pendant un long moment. Parce que nous croyons que le ministre aurait dû procéder autrement qu'il ne le fait maintenant. Je l'expliquerai dans mon intervention.

En fait, le projet de loi a été déposé en décembre 1993, à la suite de consultations officieuses menées par le ministère de l'Environnement et de la Faune auprès de différents groupes intéressés. Effectivement, ce projet de loi doit permettre de mettre fin au régime transitoire, qui a été imposé par la loi spéciale qui a été adoptée en juin 1992. Cette loi portait sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets. Souvenons-nous que, par cette loi, l'établissement et l'agrandissement de dépôts de matériaux secs et de lieux d'enfouissement sanitaire doivent être soumis à la procédure d'évaluation et aux audiences publiques du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, le BAPE.

Ce projet, dont nous étudions le rapport de la commission, M. le Président, s'inscrit dans une démarche du ministère de l'Environnement et de la Faune, qui consiste à réformer et à actualiser l'actuel Règlement sur les déchets solides, un règlement qui a été adopté en 1981, M. le Président, et qui, jusqu'à maintenant, n'avait connu que quelques modifications mineures. On comprendra que, si ce règlement était intéressant, valable en 1981, il puisse y avoir, 13 ans plus tard, nécessité de revoir ce règlement, de le moderniser, de l'actualiser.

Par la suite, on doit rappeler que ce projet de loi s'inscrit dans la foulée de la politique sur la gestion des déchets solides, qui a été publiée par le gouvernement en 1989. Ce projet de loi devrait donc permettre de réduire ou d'atteindre l'objectif qu'on s'était fixé, qui était de réduire de 50 % la quantité de déchets que nous devrons éliminer d'ici l'an 2000. Et, en outre, cette loi devrait permettre la mise en oeuvre du Protocole national sur l'emballage, protocole ou entente conclue en 1989 par le Conseil canadien des ministres de l'Environnement, qui, là encore, vise essentiellement à modifier les règles en ce qui concerne l'emballage, de telle sorte qu'on réduise à la source les déchets produits qui s'en vont soit à l'élimination par incinération ou par enfouissement dans les sites d'enfouissement.

Si on s'en tient à la démarche qui a conduit le gouvernement à proposer ce projet de loi, on serait portés à croire, M. le Président, que c'est justifié, que c'est positif. Mais je vous dirai que c'est conclure trop rapidement, compte tenu de ce que nous connaissons de l'attitude du ministre et du gouvernement à cet égard. Ce serait d'ailleurs mal traduire et trahir, en ce sens, la demande de tous les groupes intéressés par cette question, qu'il s'agisse des municipalités, qu'il s'agisse des groupes environnementaux, qui ont demandé que le gouvernement s'abstienne de proposer des modifications profondes à la loi actuelle sans qu'au préalable le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement ne soit mandaté par le ministre et par le gouvernement afin de procéder à une vaste enquête publique sur la gestion des déchets au Québec, M. le Président.

Cette demande d'enquête est sur la table du ministre depuis plus de deux ans sans que celui-ci n'ait daigné y donner suite. Il nous disait et il nous dit toujours que c'est une question d'urgence, qu'il devait agir rapidement. Il a, pour ce faire, adopté la loi 101 en juin 1993; il nous propose, aujourd'hui, la loi 151, huit mois plus tard. Il se sera tout de même écoulé, au total, deux ans, même s'il y avait matière à urgence. Et, même si nous adoptons cette loi aujourd'hui, le ministre sait pertinemment qu'il devra mettre entre cinq mois à un an avant que les règlements ne soient adoptés.

Alors, le ministre avait amplement le temps de procéder à cette audience publique et à cette enquête publique, surtout que cette enquête est justifiée, M. le Président, si on tient compte de la situation actuelle qui prévaut au Québec, confirmée par les déclarations du ministre. C'est d'ailleurs assez inquiétant quand un ministre responsable de la gestion d'un système de valorisation des matières, d'un système d'élimination des déchets, au Québec, nous dit que 80 % des lieux d'enfouissement sanitaire, au Québec, sont en infraction. C'est inquiétant quand ça vient de la bouche du ministre et que, par ailleurs, il n'a pas procédé ni à demander des corrections ni à demander une enquête publique, comme le souhaitaient les organismes et les représentants des municipalités.

C'est inquiétant aussi si on se rappelle que les objectifs de la politique adoptée en 1989 sont loin d'être atteints. En fait, en 1991, de façon à assurer à l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec un environnement de qualité, les moyens d'élimination des déchets devaient être adéquats et sécuritaires, puisque c'est au cours de ces années, entre 1989 et 1991, qu'on a fixé un certain nombre d'objectifs, qu'on a adopté un début de politique – je n'ose l'appeler une politique. En fait, on constate que le résultat de cette politique, c'est ce que je viens de mentionner: 80 % des sites sont en infraction.

D'autre part, ce fameux objectif qui vise à réduire de 50 % la quantité de déchets enfouis d'ici l'an 2000, qu'en est-il? En 1989, on générait 6,5 millions de tonnes de déchets; en 1990, notre production était de 7,2 millions de tonnes. Jusque-là, entre 1989 et 1990, je ne crois pas qu'on ait baissé la production de déchets au Québec. Au contraire, on l'a augmentée, et de façon significative. Donc, l'objectif de réduction que l'on se fixe ne risque pas d'être atteint, puisque, bon an, mal an, on continue, malheureusement, d'augmenter le nombre de déchets produits. Or, 80 % de ces déchets vont vers l'élimination.

(16 h 40)

Alors, l'enquête que nous demandons, elle est justifiée aussi à cet égard-là. Elle est justifiée, dans la mesure où la plus grande agglomération urbaine du Québec, l'île de Montréal, est actuellement engagée dans l'élaboration d'une politique de gestion des déchets. C'est presque la moitié de la population du Québec qui est concernée. En fait, quand on se ramène à l'île de Montréal, évidemment, on parle de 25 %, de 30 % de la population du Québec qui est concernée. On a déjà investi des sommes énormes en ce qui a trait à la préparation de certains projets. Je pense à la Régie intermunicipale de gestion des déchets, M. le Président. L'île de Montréal est donc en train de réfléchir à la question de la gestion des déchets. Or, l'enquête n'a toujours pas eu lieu.

Une enquête qui est justifiée aussi, M. le Président, puisqu'on connaît mal les besoins de chacune des régions du Québec, sans compter le fait que l'on connaît un peu partout des débats qui déchirent souvent les citoyennes et les citoyens d'une même région quand vient le moment d'arrêter les lieux destinés à l'établissement d'un système d'élimination des déchets.

Une enquête justifiée, M. le Président, puisque Collecte sélective Québec – organisme à but non lucratif, créé en 1989 – n'a pas atteint ses objectifs. Rappelons, parce que je crois que c'est utile de le faire, que cet organisme avait pour mandat d'amasser, auprès des entreprises productrices de biens de courte durée, des cotisations qui devaient ensuite être retournées aux municipalités sous forme de subventions. Ces subventions, évidemment, qu'est-ce qu'elles font? Elles permettent aux municipalités d'acheter des bacs de récupération ou de construire des centres de tri. On a vu, d'ailleurs, dernièrement, que Québec s'était prévalue, que la grande région de Québec s'était prévalue de cette possibilité. On a procédé cette semaine à l'ouverture d'un centre de tri.

En décembre 1993, Collecte sélective Québec avait amassé 12 400 000 $; 8 300 000 $ sont retournés aux municipalités. Or, lorsqu'on a créé Collecte sélective Québec, on souhaitait amasser 100 000 000 $, M. le Président. 100 000 000 $, en sept ans! 100 000 000 $ en sept ans, par rapport aux 12 400 000 $ amassés depuis quatre ans, on est bien loin de l'objectif, bien en deçà de ce que l'on s'était fixé, on va en convenir, malgré que Collecte sélective Québec ait demandé, à trois reprises au moins, au ministre de l'Environnement de faire en sorte que les producteurs de produits de courte vie soient obligés de contribuer à Collecte sélective plutôt qu'ils ne procèdent sur une base volontaire, comme c'est le cas maintenant.

Une enquête est aussi justifiée, M. le Président, puisque RECYC-QUÉBEC, organisme public créé en 1990, dont le mandat consiste à structurer et trouver des marchés pour les matières récupérées et dont le mandat consiste aussi à administrer le fonds de la consigne, est peu connu et ne remplit pas, à notre point de vue, son mandat adéquatement. D'ailleurs, on peut se demander pourquoi le gouvernement a créé cet organisme.

Nous croyons aussi qu'une enquête est justifiée, puisque les députés membres de la commission de l'aménagement et des équipements l'ont unanimement recommandée, dans un rapport qu'ils ont déposé ici même, devant vous, M. le Président, à l'Assemblée nationale, au printemps de 1992. Déjà, le ministre avait en main une analyse faite par la commission de l'aménagement et des équipements, qui souhaitait que cette enquête publique ait lieu. L'analyse justifiait justement le fait que cette enquête ait lieu.

Une enquête qui est justifiée, puisque le ministre s'est engagé formellement à procéder en adoptant un amendement à cet effet. Le ministre lui-même a été tellement convaincu qu'il était utile et nécessaire de procéder à une enquête publique que, sur notre suggestion, il a introduit, au niveau de la loi 101, un article prévoyant la tenue d'une enquête publique. Évidemment, malheureusement, et ça se trouve à être l'habitude du ministre, il n'a pas mis encore en application sa loi, de telle sorte que l'article est toujours pendant en ce qui a trait à l'enquête publique, même s'il a contribué à l'introduire au niveau de la loi 101, en juin 1993. Il avait donc le loisir, M. le Président, d'engager le processus dès l'été dernier et, maintenant, un an plus tard, nous disposerions d'outils utiles nous permettant d'adopter une loi avec toutes les informations utiles à sa bonification, et surtout à ce qu'elle réponde véritablement aux besoins identifiés en matière de gestion des déchets ou de valorisation des ressources, M. le Président.

Une enquête publique est justifiée aussi dans la mesure où on souhaite apporter des modifications à la loi, je le mentionnais, mais aussi au Règlement sur les déchets solides. Or, tout le monde l'a dit, il y a unanimité à cet égard, il faut qu'avant que nous ne procédions comme le ministre le souhaiterait maintenant nous puissions avoir en main toutes les informations utiles, et l'enquête publique nous permettrait d'aller chercher cette information.

D'ailleurs, il y a un autre sujet d'inquiétude de notre côté de la Chambre, M. le Président. Je crois qu'il faut, de notre côté, se questionner sur les réalisations du ministre de l'Environnement et de la Faune, particulièrement en ce qui concerne les principales réformes qu'il a proposées depuis 1989. Et je dois dire que le bilan n'est pas très reluisant. Je vais rappeler, M. le Président, qu'en 1990 on a adopté le projet de loi 65, la loi pollueur-payeur sur les sols contaminés. Une partie à peine de ce projet de loi a été promulguée. Les articles qui sont actuellement en vigueur permettent au ministre d'agir lorsqu'il connaît les responsables d'une contamination. Dans le cas où il y a contamination sans qu'on connaisse le responsable, le gouvernement ne peut requérir du propriétaire du terrain qu'il le remette en état, les articles de loi permettant ce type d'intervention n'étant pas en vigueur, M. le Président.

Autre projet resté sur la table, à certains égards, le projet de loi 143, adopté en 1990, quatre ans plus tard. C'est une loi qui concerne le Programme de réduction des rejets industriels. En fait, on est venu modifier des articles de la Loi sur la qualité de l'environnement qui n'avaient jamais été promulgués, et cette loi n'est actuellement en vigueur que pour un secteur, alors qu'on prévoyait couvrir cinq secteurs industriels. On prévoyait couvrir la chimie, la métallurgie, les mines, les revêtements de surface ainsi que les pâtes et papiers. Or, on n'a soumis à la loi que les industries du secteur des pâtes et papiers. Pourtant, l'ancien ministre de l'Environnement qui avait lancé la première fois l'opération, le député de Nelligan, présentait cette réforme comme une véritable révolution dans le domaine de l'environnement. Cinq ans plus tard, nous pouvons dire que rien n'a vraiment changé.

Projet de loi 405, loi sur les matières dangereuses; des modifications ont été apportées en vue de modifier la définition de «déchets dangereux». On les a rebaptisés «matières dangereuses», en vue de faciliter leur gestion. La loi n'est pas en vigueur puisque le règlement n'est pas promulgué, M. le Président.

Le projet de loi 61, c'est celui auquel je faisais référence tout à l'heure lorsque je disais que le ministre avait accepté d'y introduire une modification permettant la tenue d'une enquête publique. Le projet de loi a été adopté en catastrophe en 1992, en suspendant les règles de l'Assemblée nationale, M. le Président, en ne suivant pas le processus normal parce qu'il y avait urgence d'intervenir. C'était en matière d'évaluation environnementale. Deux ans plus tard, M. le Président, un an et trois quarts plus tard, il n'y a toujours pas de règlement de retenu. La loi n'est toujours pas en vigueur.

Quand il nous propose aujourd'hui que nous adoptions le projet de loi 151 et qu'il sait qu'une série de règlements... Parce que, la loi 151, ce qu'elle fait, c'est qu'elle donne un pouvoir réglementaire au ministre en matière de valorisation des matières, en matière d'élimination des déchets, de gestion des sites, de protocole sur l'emballage; c'est un pouvoir réglementaire que se donne le ministre. Quand on connaît, donc, la performance du ministre en matière d'adoption et d'application des règlements, on pense que quelques mois de réflexion de plus, par la tenue d'une enquête publique, vont permettre de répondre à un certain nombre de questions qui ont été soulevées, d'ailleurs, par des intervenants qui ont voulu faire entendre leur point de vue devant les membres de la commission. Nous avons réussi, M. le Président, à faire adopter une motion permettant que les deux unions de municipalités puissent venir faire entendre leur point de vue, mais d'autres groupes auraient souhaité aussi être entendus et nous n'avons pu le faire.

(16 h 50)

En fait, le Barreau du Québec, les deux unions municipales, le Centre québécois du droit de l'environnement, le Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets ont manifesté leur désaccord à un moment ou l'autre du projet de loi. Tous sont unanimes: la consultation a été insuffisante et il y a nécessité d'enquête publique. Certains éléments précis de ce projet sont contestés. Le ministre a rappelé l'un de ceux-là tout à l'heure: l'abolition du contrôle de la Commission municipale du Québec sur les tarifs exigés par les propriétaires et gestionnaires d'installations d'élimination.

Selon la prétention des unions, le principe du libre marché, comme le propose le ministre, pourra conduire à la création de monopoles régionaux, faisant en sorte que certaines régions seront prisonnières et devront assumer, éventuellement, des coûts disproportionnés pour l'élimination de leurs déchets. Sur la question du fonds de suivi pour la fermeture et la gestion des lieux d'élimination des déchets, il est manifeste que le gouvernement ne sait pas où il s'en va. Nous avons, à cet égard, réclamé, de la part du ministre, qu'il dépose un projet de règlement, ce qu'il a fait, M. le Président. Cependant, les trois quarts de ce projet de règlement n'étaient pas écrits. Une partie minimale nous a été présentée, des éléments minimaux nous ont été présentés et, pour ce qui nous était présenté, il s'agissait de principes flous.

Autre élément susceptible d'être précisé, M. le Président, on fait disparaître de la loi la définition du mot «déchets». Or, selon les experts, on craint un flot de contestations judiciaires. On sait qu'à cet égard le ministre a aussi une longue expérience de décrets contestés, de règlements contestés. Il me semble qu'il y aurait eu matière à être sensible aux propositions que nous faisions de réentendre le ministre sur une définition de la notion de «déchets», puisqu'on garde le terme, cependant, dans la loi. On le garde au niveau de la question de l'élimination. On parle de «déchets» lorsqu'il s'agit d'élimination. Sinon, évidemment, on parle de valorisation de matières.

D'ailleurs, cela aussi nous a inquiétés, M. le Président. On crée une section sur l'élimination des déchets, mais on traite de la valorisation de matières, de manière générale, sans en faire une section particulière de la loi. Or, l'objectif de la loi, c'est de faire en sorte qu'on introduise un système de valorisation des matières qui soit un peu plus costaud que celui qu'on connaît maintenant. Pourquoi ne pas voir apparaître, au coeur même de la loi, un chapitre qui porterait sur la valorisation des déchets?

L'Opposition est favorable au principe de ce projet de loi. Les circonstances actuelles, cependant, nous commandent la prudence et obligent l'Opposition à voter contre cette loi, et pour plusieurs raisons. D'une part, je le rappelle, le ministre procède sans avoir tenu une enquête publique sur la gestion des déchets, malgré les demandes répétées des groupes auxquels j'ai fait référence tout à l'heure et malgré l'appui en ce sens de l'Opposition. Le ministre de l'Environnement et de la Faune a la mauvaise habitude de ne pas compléter ses dossiers. Il fait voter des lois qui ne sont pas promulguées, ce qui, souvent, engendre laxisme et perte de crédibilité. Il me semble qu'à ce moment-ci nous n'en avons pas besoin. Nous ne croyons pas que l'Opposition puisse se permettre de lui faire à nouveau confiance, M. le Président.

En ce qui a trait à la gestion des déchets, un ministre de l'Environnement jouit déjà de nombreux pouvoirs qui lui ont été acquis grâce à l'adoption de la loi 101, en juin 1993, M. le Président. La réforme actuelle est trop importante pour que nous nous privions collectivement d'une consultation large et ouverte. Le ministre de l'Environnement et de la Faune, s'il souhaite être crédible, doit procéder à cette consultation avant la mise en oeuvre de cette réforme. L'Opposition officielle croit en cette consultation, et c'est pour cette raison que nous croyons que le ministre, actuellement, est en train de mettre la charrue devant les boeufs et qu'il devrait être plus attentif, plus sensible aux attentes des personnes, des groupes, des associations, des unions de municipalités, des personnes impliquées dans le quotidien au niveau de la gestion des déchets, au niveau de la valorisation des matières, qu'il devrait entendre ces personnes, procéder à une audience publique, à une enquête publique, M. le Président et, après cela, proposer les modifications utiles et pertinentes. Et c'est en ce sens, M. le Président, que nous voterons contre le projet de loi qui est devant nous.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Taillon. Est-ce que M. le ministre désire intervenir suite à l'intervention de Mme la députée de Taillon? Et je lui indique qu'il a un maximum de cinq...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non? Ça va? Alors, le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi 151, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Oui, merci, M. le Président. Vous voudrez bien maintenant, s'il vous plaît, appeler l'article 17 de notre feuilleton.


Projet de loi 7


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 17, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 7, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires internationales, la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration et d'autres dispositions législatives. M. le ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles.

Des voix: Bravo!


M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Alors, M. le Président, permettez-moi de profiter de la prise en considération du rapport de la commission des institutions, qui a étudié le projet de loi 7 la semaine dernière, pour, d'abord, remercier ma collègue vice-première ministre et présidente du Conseil du trésor, Mme Gagnon-Tremblay, qui a accepté de me remplacer au pied levé aux travaux de la commission.

Je sais que les députés de l'Opposition s'interrogeaient pourquoi le ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles n'était pas présent pour faire l'étude article par article du projet de loi. Je vais leur donner la raison. La raison de mon absence, la semaine dernière, M. le Président, était motivée par une mission en Chine, plus précisément à Chengdu, dans la province de Szu-ch'uan, où, à la demande de la compagnie Dominion Bridge et de son chef de direction, j'ai accompagné et participé à une importante négociation qui a amené à une lettre d'intention avec la ville de Chengdu sur la réalisation de trois projets d'infrastructures totalisant plus de 710 000 000 $ américains, ce qui veut dire près de 1 000 000 000 $ canadiens. Il s'agit...

Une voix: Bravo!

M. Ciaccia: Il s'agit de la construction d'un métro, de la construction et la gérance d'un réservoir hydroélectrique et d'une autoroute de 50 km.

M. le Président, vous connaissez l'importance qu'accorde le gouvernement à l'emploi. Le projet de Dominion Bridge créera entre 300 et 400 emplois au sein de cette entreprise, et la plupart ici même, au Québec, à Lachine. Alors, vous comprendrez pourquoi il était très important de faire tout en mon pouvoir pour faciliter ces échanges et de m'assurer le plus possible d'augmenter les chances pour Dominion Bridge d'obtenir cette lettre d'intention, sans compter les immenses retombées possibles pour le Québec de continuer à pénétrer le marché gigantesque de la Chine.

J'ai pris connaissance, M. le Président, de la transcription des débats de la commission. Cette lecture m'a permis de constater que les représentants de l'Opposition ont souhaité pouvoir reprendre le débat avec moi lors du dépôt du rapport ou de l'adoption du projet de loi en troisième lecture. Alors, M. le Président, je suis tout à fait disposé, dans le respect de nos règles de procédure, à poursuivre le débat.

(17 heures)

Je constate toutefois, à la lecture des débats en commission parlementaire, que nos collègues de l'Opposition ont réitéré les interventions qu'ils avaient faites lors de l'adoption du principe du projet de loi. Je me permettrai donc simplement de formuler très brièvement ce que j'ai dit et ce qui me semble constituer une réponse aux observations formulées.

Le projet de loi 7 intègre au sein du ministère des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles les mandats et les ressources des deux ministères antérieurs. Ces mandats ne sont pas modifiés et chacun sera assumé pleinement. Il n'y a pas absorption de l'un par l'autre. De même, les politiques adoptées par le gouvernement en matière d'affaires internationales et en matière d'immigration et de communautés culturelles continueront d'être mises en oeuvre, puisqu'elles restent tout à fait valables. La fusion va favoriser des synergies entre certains aspects de la mission et de l'organisation, ce qui est appréciable dans le contexte budgétaire actuel.

Quand je dis que le mandat du nouveau ministère poursuit ceux des deux ministères qu'il fusionne, cela s'applique également à la conduite de la politique d'affaires internationales qui couvre évidemment la francophonie multilatérale. La responsabilité confiée au ministère de la Culture et des Communications s'exercera en conformité avec la Loi sur le ministère des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles et dans le cadre de la politique d'affaires internationales, comme je l'ai indiqué lors de l'adoption du principe.

Je veux remercier les députés de l'Opposition et mes collègues, les députés ministériels, pour leur collaboration durant la commission parlementaire et je me réjouis de constater que nous pourrons procéder à l'adoption de ce projet de loi qui permettra de continuer à assumer deux volets très importants de l'action du gouvernement en faveur du développement du Québec moderne. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des Affaires internationales. Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission des institutions concernant le projet de loi 7. Je cède la parole à M. le député de Pointe-aux-Trembles. M. le député, la parole est à vous.


M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, je voudrais d'abord dire au ministre que je me réjouis de le voir parmi nous. C'est vrai que, la semaine dernière, le ministre s'était fait remplacer par la présidente du Conseil du trésor et vice-première ministre, et c'est vrai aussi qu'on savait déjà, la semaine passée, que le ministre se trouvait en Chine par affaires. Là, il nous dit être revenu avec des possibilités de contrats qui créeraient de 400 à 500 emplois et, si ça se matérialise, évidemment qu'on va s'en réjouir.

M. le Président, la loi constitutive du ministère est en train d'être remaniée d'une façon qui, à notre avis, va être néfaste pour les affaires internationales, pour l'immigration et pour les communautés culturelles. Je ne comprends pas, M. le Président, que le ministre n'ait pas saisi encore qu'il y a quelque chose d'un peu inconvenant à inclure, dans le ministère des Affaires internationales, les communautés culturelles du Québec. Il s'agit de citoyens Québécois à part entière, il s'agit de citoyens qui ont des droits au Québec, et, là, le ministère qui s'occupe de ces groupes ethnoculturels ou des communautés culturelles, c'est d'abord le ministère des Affaires internationales. Les communautés culturelles contribuent au développement du Québec, elles contribuent au dynamisme et à la diversité ethnique du Québec. Le Québec n'est pas composé des seuls Québécois d'origine française, il est composé de personnes issues de toutes les parties du monde et qui viennent enrichir et embellir notre patrimoine.

Il est sans doute révélateur, M. le Président, aussi, que le ministre a mentionné les deux volets de l'action de son nouveau ministère, les affaires internationales incluant les relations multilatérales avec les pays de la francophonie et il a mentionné l'immigration. Il n'a pas touché un seul mot des communautés culturelles qui, pourtant, voient nombre des leurs siéger au Conseil des communautés culturelles qui est placé sous la responsabilité du ministre.

M. le Président, nous avons été contre le projet de loi lors de son adoption de principe, nous avons été contre le projet de loi en commission parlementaire – et nous avons pu expliquer nos raisons à la vice-première ministre et présidente du Conseil du trésor – puis on est encore contre aujourd'hui.

Je n'ai pas encore compris comment va se faire le tri, pour ce qui est des relations avec les pays de la francophonie, entre la ministre de la Culture et le ministre des Affaires internationales. Comment fait-on, M. le Président, en matière d'affaires internationales, pour distinguer chaque fois et toujours ce qui est multilatéral de ce qui est bilatéral? Supposons un sommet de la francophonie. C'est sûr qu'un sommet de la francophonie – le premier s'est tenu à Québec – c'est multilatéral. Mais, à l'occasion d'une rencontre ou d'un sommet, M. le Président, il y a ces rencontres multilatérales qui se tiennent et il y a aussi les rencontres bilatérales qui se tiennent à l'occasion d'une rencontre. Est-ce que ça veut dire que la ministre de la Culture et le ministre des Affaires internationales vont faire la paire quand ils vont aller à des rencontres multilatérales qui pourraient être l'occasion de rencontres bilatérales? Et qui va trancher? Parce que, M. le Président, il y a un illogisme assez fondamental à donner au ministère de la Culture les questions de la francophonie qui, à notre point de vue, devraient relever du ministère des Affaires internationales.

Bien sûr, quand on entend le ministre parler d'affaires internationales, il semble ne vouloir jamais donner l'impression qu'il s'occupe d'affaires internationales. Le ministre semble se définir plutôt comme un ministre du commerce extérieur que comme un ministre des Affaires internationales. Ça tient peut-être à ce que, pour lui, il ne faudrait donner d'aucune façon l'impression que le Québec, que la société québécoise, que le peuple québécois peut entretenir des relations d'État à État avec d'autres États, M. le Président. Et pourtant, l'État du Québec existe. Les relations avec la francophonie ne sont pas que culturelles, elles sont aussi économiques. Quand Bombardier a acquis les brevets pour fabriquer au Québec, pour toute l'Amérique du Nord, les TGV, ce n'était pas un acte essentiellement culturel. On le sait, M. le Président, que le TGV au Québec, au Canada et en Amérique du Nord, c'est une question économique importante à laquelle les différents gouvernements consacrent des études depuis nombre d'années.

Donc, à cet égard-là, M. le Président, le ministre des Affaires internationales, en vertu du projet de loi 7 qui est devant nous, ne s'occupera pas de toutes les affaires internationales. Il va s'occuper principalement, je pense, du commerce extérieur, puis, pour ce qui est de la francophonie, ce sera une responsabilité partagée avec sa collègue de la Culture. Pourquoi? Les affaires internationales sont économiques, bien sûr, et l'économie est importante. Si le ministre est revenu avec 500 emplois, ça illustre que ce ministère-là doit s'occuper d'économie. Mais ce n'est pas que des questions économiques qui constituent les affaires internationales. La culture en est une, question, aussi. Et, avec les pays de la francophonie, les pays entièrement ou partiellement de langue française, M. le Président, on parle de 47 pays; 47 pays, ça doit bien, ensemble, constituer un domaine d'affaires internationales. Et le ministre va s'en occuper dans le bilatéral, je crois comprendre, et sa collègue de la Culture va s'en occuper dans le multilatéral. Bilatéral, multilatéral, commercial, qui va démêler ça? Le premier ministre, s'il a le temps? Quand le ministre va partir pour Paris, est-ce que sa collègue de la Culture va l'accompagner pour toucher toutes les affaires internationales francophones? Parce que Paris, c'est la capitale du monde francophone, d'une certaine manière.

(17 h 10)

Et, M. le Président, j'attends toujours du ministre une explication sensée de pourquoi l'immigration devrait être avec les affaires internationales. Les nouveaux arrivants qu'il faut intégrer au Québec... Et ça, le gouvernement l'a bien expliqué dans son Énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration, dont le ministre a hérité, cet énoncé de politique, en devenant ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles. Dans cet énoncé de politique, on dit bien à plusieurs endroits que l'accueil de personnes immigrantes d'origine francophone ou de pays francophones doit être une priorité du ministère. Mais, l'immigration et les affaires internationales, M. le Président, ce sont deux choses. Les nouveaux arrivants, dès le moment où ils mettent le pied au Québec, deviennent, quant à moi, des participants à la société québécoise, ils ne sont pas des affaires internationales. Et comment le ministre va concilier ça?

À cet égard-là, les gens des deux ministères, principalement, que le ministre va intégrer sous sa houlette dans le nouveau ministère dont on nous propose la création aujourd'hui, les gens des deux ministères ont des inquiétudes. Quand le sous-ministre du nouveau ministère se trouve à Québec, où se concentrent les fonctionnaires des Affaires internationales, les fonctionnaires de l'Immigration et des Communautés culturelles, à Montréal, se demandent s'il n'est pas un peu loin d'eux; et inversement, quand le sous-ministre se trouve à Montréal où il y avait, où il y a encore, parce que la loi n'est pas encore adoptée, le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, les gens des Affaires internationales, à Québec, trouvent le sous-ministre loin d'eux. Quant au ministre, quand il se trouve l'autre bord de la terre, en Chine, il est loin de tout le monde. Alors, à cet égard-là, il n'y a pas de difficultés entre les deux ministères qu'il est maintenant chargé de coiffer.

C'est évident, M. le Président, que le ministre du commerce extérieur doit aller à l'extérieur. Comme les mots «commerce extérieur» l'indiquent, ça se passe avec l'extérieur. Mais le ministre de l'Immigration, lui, qu'est-ce qu'il faisait la semaine passée? Le ministre de l'Immigration nous avait promis de déposer, au cours du mois de mai, la synthèse des mémoires qu'il a reçus à huis clos sur les organismes intéressés par l'établissement du seuil d'immigration pour 1995, 1996 et 1997. Ce n'est pas fait encore. Ce n'est pas de la faute du ministre, je pense bien, il était en Chine. Sa fonction de ministre des Affaires internationales l'amenait très normalement en Chine, mais, au Québec, dans ce Parlement, on nous avait promis un document synthèse sur les mémoires qu'on ne peut pas lire parce que le ministre les a entendus à huis clos puis il ne les a jamais rendus publics. Le seul qui a été public, c'est celui du Conseil scolaire de l'île, parce que l'Opposition l'a déposé en Chambre. Pour le reste, ça s'est tout fait en secret et à huis clos. Puis, là, bien, comme le ministre, en vertu de l'entente Gagnon-Tremblay–McDougall, doit faire savoir au fédéral ce que sera le niveau projeté d'immigration pour 1995, 1996 et 1997, bien, il nous tarde, nous avons hâte que le ministre trouve le temps, entre ses deux ministères et le Conseil des communautés culturelles, de nous déposer au moins une synthèse des mémoires dont il nous refuse la lecture. Et, M. le Président, c'est avant la fin de juin que le Québec doit établir le niveau projeté d'immigration. Or, quand le ministre va-t-il enfin déposer le document qu'il a promis? Il l'a promis pour la mi-mai, puis, là, bien, on est arrivé à la mi-juin. L'été est presque engagé, M. le Président, le ministre doit s'en rendre compte, puis le document qu'il a promis, il ne l'a pas encore déposé.

L'autre document qui nous manque, M. le Président... Puis ça vient de ce que le ministre est ministre de plusieurs ministères en même temps et que le ministre ne peut pas être partout à la fois. À moins de se trouver un sosie, mais ce n'est pas permis par le règlement qu'un ministre se fasse remplacer par un sosie. Alors, il nous manque l'avis du Conseil des communautés culturelles et de l'immigration sur le niveau d'immigration. Le ministre avait dit que, ça, ça serait déposé pas longtemps, avons-nous compris, après le rapport synthèse des mémoires que le ministre a entendus à huis clos.

À cet égard-là, M. le Président, je voudrais aussi rappeler que le ministre a dit, en commission parlementaire, lors de l'étude des crédits, que la raison pour laquelle, dans une des consultations à huis clos, il était l'orateur avec une députée fédérale, c'est que le fédéral ne ferait pas de consultations sur l'immigration au Québec. Bien, apparemment, le fédéral n'a pas entendu l'explication du ministre, parce que son homologue fédéral, M. Marchi, faisait une séance de consultation au Québec hier soir. C'est dans le Devoir d'aujourd'hui, sous le titre «Marchi promet d'être à l'écoute des priorités du Québec. Le ministre fédéral donne à Montréal le coup d'envoi des discussions.» Alors, le ministre nous avait dit qu'il se faisait accompagner d'une députée fédérale parce que le fédéral ne ferait pas, comme tel, de consultations sur l'immigration au Québec. Évidemment, le ministre ne pouvait pas être accompagné de son adjoint parlementaire, il n'en a pas. Et, quand on a une question à lui poser puis qu'il est en voyage, M. le Président, on ne peut pas poser la question à son adjoint parlementaire, il n'y en a pas dans ce Parlement-ci. Mais, pour une des rencontres, il s'était trouvé une adjointe parlementaire de la Chambre des communes. Il y a comme une confusion de parlements, là, chez le ministre.

Et, par ailleurs, M. le Président, le gouvernement fédéral ne réévalue pas, n'évalue pas, ne consulte pas uniquement sur le niveau d'immigration par les temps qui courent. J'ai un communiqué en main, je ne sais pas si le ministre l'a lu, du 2 juin, qui vient de Citoyenneté et Immigration Canada et qui s'intitule «Le ministre annonce un examen du programme d'immigration des gens d'affaires». Ça, ça intéresse le ministre, les gens d'affaires, c'est sous la responsabilité de son ministère de l'Immigration, les gens d'affaires. Et dans quel délai la consultation fédérale va se faire sur les gens d'affaires, M. le Président? Ils ne niaiseront pas avec la «puck», pardonnez l'anglicisme; ils vont faire une grande consultation sur l'immigration de gens d'affaires dans les deux prochains mois. Vous voyez ça, M. le Président, on est à la mi-juin; d'ici la mi-août, le fédéral aura consulté sur les gens d'affaires. Ça regarde le ministre, ça. J'aimerais ça qu'il nous dise comment il voit cette consultation parce que, ce qui a été rendu public à Ottawa, ça laisse une drôle d'impression, M. le Président.

Structures du programme. On parle du programme fédéral en rapport avec les immigrants investisseurs. C'est contenu dans la fiche documentaire qui accompagnait le communiqué de son homologue fédéral, et il est dit, dans cette fiche documentaire, parmi les questions qui vont être étudiées: Le rôle des provinces et des autres ministères fédéraux et organismes doit-il être redéfini de façon à accroître les retombées économiques du programme? Le rôle des provinces. Le Québec en est encore une, le ministre est encore ministre de l'Immigration du Québec et, à cet égard-là, ça devrait le concerner. Est-ce qu'il a eu des contacts avec son vis-à-vis fédéral à cet égard-là?

Parce que le ministre fédéral... Dans le communiqué, on dit que M. Marchi a annoncé: Nous consulterons, entre autres, les provinces – on va être dans le «entre autres», M. le Président – les intervenants du domaine de l'immigration, des gens d'affaires ainsi que d'autres ministères et organismes gouvernementaux. Est-ce à dire que le fédéral se prépare à changer les règles du jeu quant aux immigrants investisseurs? M. le Président, on peut le penser. Ils disent qu'ils se donnent deux mois pour redéfinir leur programme au complet. Et puis ils sont bons, par exemple, ils sont bons pour nous. Ils disent que les provinces vont être consultées. J'espère bien que le ministre va participer à la consultation fédérale ou que le Québec va se faire entendre de quelque manière.

(17 h 20)

Dans les fiches documentaires rendues publiques le 2 juin, on dit aussi, en parlant des immigrants investisseurs: La répartition des gens d'affaires immigrants par province doit-elle se faire en fonction de la restriction du nombre de visas par province? Alors, là, M. le Président, ça devrait éveiller l'attention du ministre. Parce qu'on parle, dans le fond, entre les lignes, dans le document du fédéral, de quotas par province pour les immigrants investisseurs. Et c'est bien connu, M. le Président, que le Québec a plus d'immigrants investisseurs que bien d'autres provinces canadiennes. Ça «veut-u» dire, M. le Président – parce qu'on parle de le faire en fonction de la restriction du nombre de visas par province – qu'il va y avoir des restrictions au nombre de visas qui pourraient être émis pour le Québec, pour des immigrants investisseurs? Ce sont toutes des questions qui restent sans réponses.

Et, M. le Président, on a l'habitude de ne pas avoir de réponses aux questions du ministre, parce que, d'abord, il n'est pas toujours là. Il faut le comprendre, il s'occupe du commerce extérieur, il faut qu'il aille en Chine; il est revenu de Chine, là, il est en Chambre. Et, à cet égard-là, le ministre doit répondre à nos questions: Les immigrants investisseurs, est-ce à dire que, d'ici deux mois, les règles du jeu vont changer? Est-ce que le Québec va être associé à ça? Quel est le point de vue du Québec là-dessus? La restriction du nombre de visas par province, ça n'annonce pas quelque chose qui pourrait être dangereux pour le Québec?

On le sait que le Québec, à l'heure actuelle, fait la sélection des immigrants investisseurs, mais on sait aussi que, pour venir au Canada – tant que le Québec est dans le Canada – il faut avoir un visa. Et son homologue fédéral, qui a déjà parlé du contenu des cours dans les COFI, M. le Président, il faudrait le rappeler au ministre... Vous savez que l'homologue fédéral du ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles a déjà dit qu'il se préoccupait du contenu des cours des COFI, qui dépendent du ministère. Et il l'avait fait parce qu'il y avait été sensibilisé avec une personne, M. le Président. Je l'ai vue à la télévision, cette personne-là, qui a dit que, dans les cours des COFI, le mot «Québec» était utilisé. Vous vous rendez compte, M. le Président? Les COFI du Québec parlent du Québec. Ça préoccupait le vis-à-vis fédéral du ministre. Et la personne, avec l'indignation dans la voix, disait que, dans les COFI, on parle même de citoyens du Québec. Alors, que disait-elle? Nous sommes citoyens du Canada! Mais les COFI à Montréal, puis dans la région de Montréal, se trouvent au Québec, puis ce n'est pas un mot obscène, le mot «Québec».

Le ministre est un ministre du gouvernement du Québec et il demeure que le même ministre s'occupe, en même temps, des affaires internationales, puis, pour lui, c'est surtout le commerce extérieur; le reste, ça l'intéresse peu. Et, M. le Président, il y a un exemple d'il y a quelques mois qui prouvait que les vraies affaires internationales intéressent peu le ministre. Dans le cas du bois d'oeuvre, il ne voulait pas que l'avocat du Québec, en vertu de l'Accord de libre-échange avec les États-Unis, utilise comme argumentation un article de la loi américaine qui dit que, dans un pays fédéral comme le nôtre – pour un temps – le gouvernement qui exerce un pouvoir, au sens de la loi américaine, ça peut être considéré comme un pays qui utiliserait ce pouvoir-là.

Alors, ça, le ministre n'a pas voulu l'utiliser. Parce que, si, pour la linguiste qui a influencé son vis-à-vis fédéral, le mot «Québec» était quelque chose à proscrire, je soupçonne le ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles, d'avoir une aversion pour le mot «pays». Puis, ça, son aversion, il a bien le droit de l'avoir, mais il ne faut pas que ça nuise à nos relations commerciales et qu'on proscrive tellement l'usage du mot «pays» qu'on ne veuille pas se servir d'un article d'une loi de notre voisin du Sud, qui dit qu'un gouvernement qui exerce un pouvoir comme celui du Québec en matière de forêts ça peut être assimilé aux décisions du gouvernement d'un pays.

Or, M. le Président, le ministre nous soumet un projet de loi qui va faire en sorte qu'on va mêler ensemble, artificiellement, les affaires internationales, mais pas toutes. La ministre de la Culture va en avoir et le ministre va en avoir. Ils vont gérer ensemble le bilatéral et le multilatéral, et, quand, dans la même réunion, il y a d'abord une rencontre multilatérale et ensuite ou pendant, en même temps, des rencontres bilatérales, bien, comme une seule personne ne peut pas se diviser en deux, on peut penser que les deux ministres vont voyager ensemble pour aller à des rencontres où il y aura à la fois des relations multilatérales et bilatérales.

Ça n'a pas de sens, M. le Président, de dire que la francophonie ne fait pas partie, de plein droit, qu'elle n'est pas une des affaires internationales dont le ministre des Affaires internationales devrait s'occuper. Pourquoi pas, puisque le ministère des Affaires internationales va dorénavant inclure l'immigration et les communautés culturelles? Pourquoi le ministre des Affaires internationales ne ferait-il pas toutes les affaires internationales? Je vois très bien le ministre aller représenter le Québec en France, aller le représenter au Mexique ou aux États-Unis. Les affaires internationales, ce sont les affaires internationales. Ça ne se définit pas comme des affaires internationales francophones ou pas francophones. Il y a les affaires internationales. Le ministre les entend surtout comme le commerce extérieur. Ça en fait partie, le commerce extérieur, mais on ne peut pas tout disséquer. La ministre de la Culture, quand elle traite de coproduction avec la France, elle traite d'une question culturelle évidente mais aussi d'une affaire économique évidente.

Dans ce sens-là, quelle est l'idée d'avoir aboli la fonction de ministre responsable de la Francophonie et de ne pas donner à un seul ministre toutes les affaires internationales? Les affaires internationales, M. le Président, c'est tout ce qui concerne les relations du Québec avec quelque autre pays que ce soit, et il nous apparaîtrait logique, dans un projet de loi, de concentrer les affaires internationales dans le même ministère.

M. le Président, je vous pose la question. Il y a des questions d'éducation qu'on est parfois amené à discuter avec le Mexique, les États-Unis ou la France. Est-ce que ça devrait être le ministre de l'Éducation qui s'occupe des relations internationales éducatives? Bien, poser la question, c'est quasiment y répondre. On a un ministre des Affaires internationales, il devrait s'occuper très logiquement de toutes les affaires internationales, y compris la francophonie, parce que la francophonie, ça concerne, ça touche et ça regroupe à peu près 47 pays, nous dit-on, à travers le monde. Donc, la francophonie fait partie des affaires internationales.

Et, M. le Président, quand le ministre met son chapeau de ministre de l'Immigration, il doit s'occuper notamment des personnes qui revendiquent un statut de réfugié. Est-ce que, ça, c'est facilement compatible avec son rôle de ministre du commerce extérieur? Parce qu'on peut prendre des décisions, en matière d'accueil de personnes réfugiées, qui peuvent indisposer le pays d'origine, puis le pays d'origine, on a peut-être des relations économiques, commerciales, avec lui.

(17 h 30)

Et je cherche encore, M. le Président, une seule ligne d'un seul document gouvernemental qui nous expliquerait pourquoi, les affaires internationales, ça coiffe maintenant les communautés culturelles du Québec. Il me semble qu'il n'y a pas de logique là-dedans. Les Québécois issus des groupes ethnoculturels, les Québécois qui appartiennent à une communauté culturelle sont une partie de nous-mêmes, sont une partie de notre société. Ils ne constituent d'aucune manière, M. le Président, des affaires internationales. Et, à cet égard-là, donc, nous étions contre le projet de loi en première lecture, nous étions contre le projet de loi à l'étude article par article en commission – et on a pu l'expliquer à la vice-première ministre et présidente du Conseil du trésor qui représentait le ministre à la commission – puis on est toujours contre le projet de loi.

Le député de Portneuf l'a déjà dit, et il a bien raison, quand on quitte un appartement, on ne refait pas la peinture à la grandeur pour le locataire qui nous succédera, on doit se préoccuper des choix de couleur du prochain locataire, et ce gouvernement-là, qui n'a pas de menu législatif sérieux à nous proposer, nous propose des lois pour fusionner des ministères parce que le premier ministre a réduit le nombre de ministres. On a déjà eu, M. le Président, un seul ministre qui était titulaire de plusieurs ministères. On n'a pas besoin de mettre la hache dans les Communautés culturelles et l'Immigration ou dans les Affaires internationales pour confier à la même personne, à l'approche d'une élection, plusieurs ministères. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles, de votre intervention. Alors, M. le ministre, en vertu du règlement, vous avez droit à une intervention de cinq minutes après l'intervention de M. le député de Pointe-aux-Trembles. Je vous reconnais de ce fait, M. le ministre.


M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, comme vous le mentionnez, dans une courte intervention de cinq minutes, je n'aurai pas le temps de soulever tous les arguments contre la diatribe du député de Pointe-aux-Trembles qui a fait un méli-mélo, une macédoine de propos; vraiment, il a fait un mélange immangeable de toutes sortes de discussions, certaines qui n'ont même rien à faire avec ce projet de loi.

Je vais me limiter seulement à réitérer, M. le Président, le bien-fondé de la fusion. La fusion comporte des bénéfices sur les plans administratif et budgétaire. Par exemple, elle permet une réduction des effectifs consacrés à l'administration sans pour autant réduire les services ou amenuiser les rôles exercés, tant en matière d'affaires internationales qu'à l'égard de l'immigration et des communautés culturelles. Et la fusion, M. le Président, permettra de développer une synergie entre les programmes du ministère des Affaires internationales et ceux de l'ancien ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration. Par exemple, les immigrants investisseurs ont développé un réseau dans leur pays d'origine, ce qui peut favoriser le développement de nos exportations. C'est seulement quelques exemples.

En ce qui concerne la francophonie, M. le Président, la loi n'en est en rien modifiée à l'égard des questions relatives à la francophonie. Le député de Pointe-aux-Trembles ne semble pas vouloir comprendre ça. Son rôle ici, qu'il s'est donné, c'est de semer la confusion. Le ministère des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles, c'est un ministère maintenant, ce n'est pas trois ministères. Il est bon de rappeler qu'auparavant les dossiers, quand je parle de la francophonie, étaient sous la responsabilité d'un ministre délégué, responsable de la Francophonie. Maintenant, c'est la ministre de la Culture et des Communications qui est responsable de la Francophonie. Il n'y a rien de changé.

Par exemple, j'ai été en Côte d'Ivoire. J'ai discuté sur tous les aspects que le député a soulevés, en question de commerce, ou même en question d'ententes institutionnelles, ou en question d'ententes éducatives, et on a invité le Forum francophone des affaires à venir au Québec. Ils vont venir au Québec et, subséquemment, il va y avoir une mission du Forum francophone des affaires qui va aller en Côte d'Ivoire.

Alors, on essaie de semer la confusion, M. le Président, mais il n'y en a pas. C'est clair, le rôle du ministère des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles. En plus de ça, c'est quasiment une affaire de routine de la part des députés de l'Opposition d'essayer de semer la confusion, la confrontation entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec. Il n'y en a pas, ni en affaires internationales, ni en immigration, ni dans tous les aspects qu'on pourrait avoir en commun sur les communautés culturelles.

Alors, M. le Président, c'est un bon projet de loi. C'est un projet de loi qui va nous permettre vraiment de faire face à l'avenir, aux problèmes qui existent, à tous les niveaux, dans le domaine international, de faire une synergie entre l'Immigration, les Communautés culturelles, le ministère des Affaires internationales et de le faire dans le meilleur intérêt non seulement de l'administration du gouvernement, mais aussi dans le meilleur intérêt de la population, parce qu'elle va avoir le meilleur service possible. On va répondre à ses attentes dans tous les domaines, comme on l'a fait dans le passé. Et on voit, dans ces domaines, la présence du Québec dans les institutions, dans le secteur éducatif, dans le secteur culturel, dans le secteur technologique, tous sous la coordination du ministère des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles.

Ce projet de loi, M. le Président, va nous aider à donner un meilleur service encore que nous avions donné à la population du Québec. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 7, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires internationales, la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Je vous demanderais maintenant de bien vouloir appeler l'article 30 du feuilleton.


Projet de loi 14


Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 30. Mme la ministre de la Culture et des Communications propose l'adoption du projet de loi 14, Loi sur la Société de développement des entreprises culturelles. Y a-t-il des interventions sur l'adoption de ce projet de loi? Mme la ministre.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Alors, voici un projet de loi important, quoi qu'en disent les intervenants, ou l'intervenant de l'Opposition avant moi. On disait que le menu législatif était mince, ce qui est complètement faux. Mais en voici un, d'ailleurs, qui est attendu par le milieu, et ce, depuis longtemps.

Nous votons, aujourd'hui, l'adoption du projet de loi 14 visant à créer la Société de développement des entreprises culturelles. Cette nouvelle Société remplacera l'actuelle Société générale des industries culturelles, de même que l'Institut québécois du cinéma. De plus, elle gérera certains programmes d'aide dans les domaines du disque et du spectacle de variétés, du livre, de l'édition spécialisée, actuellement sous la responsabilité du ministère de la Culture et des Communications.

Les objectifs visés par le projet de loi 14 sont de plusieurs ordres: il propose un nouveau mode de fonctionnement qui allie l'expertise du milieu professionnel aux exigences d'une saine gestion des fonds publics; il favorise une meilleure cohérence, aussi, de l'ensemble de l'action gouvernementale auprès des industries culturelles, et ce, dans le respect des caractéristiques particulières de chacun des secteurs; enfin, il fait en sorte que le ministre de la Culture et des Communications est désormais responsable de la nouvelle Société. La définition des grandes orientations et des objectifs de la Société permettra de garantir une cohérence des actions entre la Société et l'ensemble des sociétés d'État. De même, elle assure une cohérence avec la politique culturelle qui mise sur l'autonomie de la création et la liberté des choix artistiques.

Lors des consultations de la commission de la culture, l'accueil fait au projet de loi 14 a été enthousiaste de la part des associations concernées par les activités de la nouvelle Société. À cet égard, M. le Président, vous me permettrez de rappeler à cette Chambre certains témoignages qui ont été exprimés.

L'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo le qualifie d'excellent dans l'ensemble, car il répond aux attentes et préoccupations des producteurs indépendants québécois de disques et de spectacles de variétés. L'Association nationale des éditeurs de livres parle d'un projet intéressant et stimulant, tant du point de vue de son organisation que de la dynamique qui pourra en découler. Le Conseil des métiers d'art du Québec appuie la vision d'ensemble qui s'y dégage et indique qu'elle s'inscrit dans la logique de la politique culturelle qui reconnaît les métiers d'art comme une industrie culturelle à part entière. Enfin, l'Institut québécois du cinéma l'appuie parce qu'il permet de revoir le cadre d'intervention de manière à ce que les énergies s'additionnent au lieu de se neutraliser, comme c'est le cas dans les structures actuelles.

Les industries culturelles québécoises ont atteint un niveau appréciable de maturité et de développement. Elles font face à des défis nouveaux dans un contexte économique national et international en pleine évolution. Les outils dont elles disposent aujourd'hui ont besoin d'être révisés et adaptés.

Les intervenants de chacun des secteurs, bien qu'ils affirment leurs spécificités et leur caractère distinctif propre, reconnaissent que l'ensemble des industries culturelles du Québec partagent des problématiques communes. En se regroupant au sein d'une même entité, elles sont plus à même de bénéficier de leurs expériences respectives.

(17 h 40)

La création de la SODEC s'inscrit donc dans cette perspective. La multiplication des organismes publics agissant auprès des industries culturelles n'est pas une avenue souhaitable. Le principe du guichet unique favorise la réduction du poids administratif et bureaucratique, tout en améliorant la qualité des services offerts à la clientèle.

De plus, le guichet unique permet d'atteindre une meilleure cohérence globale et sectorielle des interventions, en plus d'éviter tout dédoublement possible.

Un avantage supplémentaire du regroupement est de créer une synergie entre les secteurs au sein de la Société, et ce, au-delà des concurrences.

En somme, si je devais résumer en quelques mots les réactions des associations, il ne serait pas excessif de dire qu'elles appuient largement le changement et qu'elles souhaitent que l'on amorce au plus tôt le virage proposé. Il en ressort un consensus autant sur les principes qui animent le projet de loi que sur l'essentiel de l'architecture et du mode de fonctionnement du nouvel organisme. Je dis «nouvel organisme» parce que les témoignages que nous avons entendus pendant les deux jours de consultation en commission parlementaire auront clairement démontré qu'il s'agit d'un projet de loi qui vient redéfinir en profondeur la nature des rapports que l'ensemble des domaines d'activité reliés aux industries culturelles entretiendront avec la société d'État chargée de leur apporter l'aide financière gouvernementale.

Le mandat confié à la SODEC est de promouvoir et de soutenir, dans toutes les régions du Québec, l'implantation et le développement des entreprises culturelles, y compris les médias. Elle sera aussi appelée à accroître la qualité des produits et services que produisent les entreprises québécoises et à améliorer leur compétitivité au Québec, au Canada et à l'étranger.

Donc, pour exercer son mandat, la Société interviendra de deux manières différentes mais disposera, pour ce faire, d'un large éventail de moyens. Le premier volet de son intervention concerne le financement des entreprises, donc question bancaire. Le deuxième volet de l'action de la SODEC est celui des programmes d'aide, donc question des subventions. Dans le cadre des programmes d'aide, la Société pourra soutenir les organismes et entreprises au moyen de subventions, de prêts de faveur ou d'aide remboursable.

Autre changement, M. le Président, en terminant, il s'agit d'un conseil d'administration considérablement changé, qui sera composé de 11 membres, incluant le président nommé par le gouvernement – sur proposition du ministère de la Culture et des Communications – après consultation d'organismes qu'il considère comme représentatifs des milieux concernés par les activités de la Société. Ce conseil d'administration sera nommé dès que le projet de loi entrera en vigueur.

Maintenant, M. le Président, cela dit, je dois remercier la commission de la culture pour sa collaboration. Comme c'est le dernier projet de loi du ministère de la Culture – il y aura l'autre, Culture et Communications – mais le dernier projet de loi du ministère de la Culture, en ce dernier mandat ou cette dernière Législature, je voudrais remercier les gens qui ont participé à l'élaboration de ce projet de loi, ainsi que tous ceux qui ont participé aux projets de loi soumis par le ministère de la Culture, autant ceux qui découlent de la politique culturelle que celui des conservatoires et que celui-ci, M. le Président. Ça a toujours été dans une grande collaboration que nous avons eu à débattre ces projets de loi. De part et d'autre, nous avons essayé d'améliorer – le souci que nous avions en commun, les membres de la commission de la culture – notre service auprès de notre clientèle.

M. le Président, je voudrais faire aussi une mention toute spéciale au critique de l'Opposition en matière de culture, cette fois-ci, qui a toujours collaboré de façon extraordinaire. Il a toujours essayé, avec nous, de trouver les bonnes solutions.

Alors, cela dit, M. le Président, je propose que l'on adopte le projet de loi 14 sur la SODEC.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que le projet de loi est adopté? M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Ne vous inquiétez pas si je me lève du siège du député de Lévis, mais c'est bien parce qu'on a condamné nos sièges derrière, pour les raisons que vous savez, pour des questions de sécurité.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): On va s'occuper de ça cette nuit, M. le député. Ça va être réglé demain.


M. André Boisclair

M. Boisclair: Alors, je veux tout simplement vous remercier de me permettre d'enfreindre le règlement et de me lever du siège du député de Lévis, que j'ai choisi, d'ailleurs, à propos. Mais, ne vous inquiétez pas de mon propos, il sera bref et ira d'ailleurs dans le sens de celui de la ministre.

Je dois dire que c'est toujours un peu ingrat d'avoir à parler en second lorsqu'il s'agit d'un projet de loi sur lequel l'ensemble des membres d'une commission font consensus et s'entendent pour le suggérer aux membres de l'Assemblée nationale. Je me permettrai, à mon tour, de rappeler, cependant, qu'effectivement ce projet de loi est un projet de loi attendu depuis longtemps. Nous nous réjouissons, de ce côté-ci de cette Chambre, de voir que, rapidement, le leader du gouvernement a permis de donner suite au consensus établi à la fois à la commission de la culture, mais à la fois dans le milieu de la culture, pour faire en sorte que ce projet de loi soit adopté avant les échéances qu'on connaît, non seulement la fin de la session, mais bien sûr les élections générales que nous attendons avec impatience. Donc, remerciements d'usage aux gens qui nous permettent aujourd'hui de débattre pour l'adoption finale de ce projet de loi.

Je me permettrai de rappeler, donc, que ce projet de loi, bien sûr, avait été annoncé au moment du dépôt de la politique culturelle par la ministre de la Culture et des Communications, projet de loi qui était longuement attendu, non seulement parce qu'il y avait eu plusieurs ajouts de mandats successifs à l'ancienne SOGIC que nous nous trouvons à remplacer, par le projet de loi 14, par une nouvelle société qui s'appellera dorénavant la Société de développement des entreprises culturelles, qui sera sans doute mieux connue sous l'appellation de SODEC, mais certainement parce que le fonctionnement même de l'ancienne Société était un fonctionnement lourd, qui nous conduisait directement à un dédoublement des différentes fonctions et qui, certainement, alourdissait le traitement des dossiers et les relations avec la clientèle.

Il nous apparaissait aussi opportun d'appuyer ce projet de loi parce qu'il permet certainement une révision des relations avec les organismes consultatifs, que ce soit le Conseil consultatif de la lecture et du livre, que ce soit l'Institut québécois du cinéma; il permet de revoir les liens qu'entretiennent les organismes consultatifs autant avec le ministre qu'avec le nouveau conseil d'administration de cette Société.

Donc, il était important de revoir ce projet de loi. Et je crois que tout le processus parlementaire nous aura permis certainement de l'améliorer considérablement. Je pense, entre autres, aux auditions particulières que la commission de la culture a tenues sous la présidence du député de Louis-Hébert. Je pense aussi aux travaux que nous avons faits en commission parlementaire, où nous avons étudié le projet de loi article par article. Cette étude en commission nous a permis, encore là, de bonifier considérablement le projet de loi en faisant en sorte, d'ailleurs, de donner suite à un voeu unanime et consensuel qui avait été émis par les différents organismes qui sont venus témoigner devant la commission parlementaire mais qui, essentiellement, consistait à s'assurer que ce projet de loi soit aussi l'occasion de procéder à la nomination de nouveaux membres du conseil d'administration.

Il nous apparaissait illusoire, en effet, de créer une nouvelle société et, du même souffle, de reconduire l'ensemble des membres du conseil d'administration de l'ancienne Société. Donc, si véritablement nous voulions, avec des nouveaux objets, une nouvelle mission, une nouvelle fonction, revoir le fonctionnement de cette Société qui appuie les industries culturelles, il fallait, bien sûr, revoir la composition du conseil d'administration pour s'assurer que cette nouvelle philosophie puisse s'incarner à travers de nouveaux personnages.

Je me réjouis donc de voir que la ministre, à la recommandation de l'Opposition et des gens qui sont venus témoigner en commission parlementaire, a accepté cet amendement. Il s'agit d'un amendement majeur qui sera sans doute garant de l'avenir de ce projet de loi. Je me permets tout simplement, en conclusion, M. le Président, d'espérer que ce sera d'autres choses que des considérations partisanes qui dicteront le choix, par le gouvernement, des éventuels membres du conseil d'administration de la Société. On sait que ça n'a pas toujours été le cas, particulièrement lorsqu'est venu le temps de nommer l'ancien président-directeur général de la SOGIC, M. Charles Denis, qui est un protégé... C'est un secret de polichinelle de rappeler que M. Denis est un protégé du premier ministre Bourassa, un protégé du Parti libéral, ce qui a considérablement nui au fonctionnement de la Société générale des industries culturelles, et ça a sans doute été un lieu d'achoppement de cette Société, un facteur d'achoppement de cette Société. Donc, j'espère que ce sera d'autres choses que des considérations partisanes qui dicteront l'attitude du gouvernement et de la ministre dans le choix des membres du conseil d'administration.

Je me permets, même si je fais cette mise en garde, de rappeler cependant que, si la ministre témoigne des mêmes préoccupations dont elle a témoigné dans le passé lorsqu'est venu le temps de nommer des administrateurs à d'autres sociétés – je pense au Conseil des arts et des lettres – je pense qu'il n'y a pas lieu de manifester d'inquiétude outre mesure, mais en comprenant bien que la ministre n'est pas seule dans ce gouvernement et qu'il peut y avoir toutes sortes de tractations, surtout lorsque l'on voit qu'il est possible que l'ancien président-directeur général de la Société de développement industriel risque de se retrouver à la direction générale de la Place des Arts, alors que ce personnage ne détient aucune compétence pour assumer la direction artistique de la Place des Arts. Il serait malheureux que ce même genre de pression soit exercé auprès de la ministre de la Culture.

(17 h 50)

Donc, ce que je tentais tout simplement d'illustrer, M. le Président, c'est qu'au-delà des structures que ce projet de loi permet de mettre sur pied il y a tout ce facteur qui a trait essentiellement à la personnalité des individus qui auront à animer cette structure. C'est sur eux beaucoup plus que sur la nouvelle structure et les nouveaux projets de loi que reposeront les succès de cette Société. Je tiens donc à souhaiter bonne chance à ceux et celles qui oeuvreront dans cette nouvelle Société.

Je tiens aussi à mon tour à remercier la ministre pour son ouverture d'esprit et à remercier aussi les officiers de son ministère et de son cabinet qui nous ont très bien informés et qui nous ont transmis moult informations pour faire l'étude de ce projet de loi, et à souligner aussi à ma façon l'engagement remarquable des officiers du ministère de la Culture, que ce soit l'équipe sous-ministérielle ou les autres fonctionnaires, les gens du contentieux qui ont participé avec beaucoup d'enthousiasme et de professionnalisme aux travaux de la commission de la culture. Je pense que c'est tout à l'honneur du processus parlementaire et du parlementarisme de voir des gens travailler dans un esprit de franche collaboration, malgré le fait que ces débats soient parfois aussi l'occasion d'exprimer des divergences. Mais je tiens à souligner la collaboration de l'ensemble des partenaires, à remercier la ministre. C'est sans doute le dernier acte législatif officiel que j'aurai à poser comme membre de l'Opposition, certainement comme député de Gouin critique de l'Opposition. C'est là le souhait que j'émets pour moi. Bien sûr, la beauté de la chose, c'est que les Québécois, en bout de course, auront à choisir. Mais je tiens, M. le Président, à vous remercier, aussi, de vos bons conseils et de la façon dont vous nous avez permis de participer aux débats parlementaires.

Puisque je sais mon collègue de Sainte-Marie–Saint-Jacques pressé de tenir ces mêmes propos à l'endroit de la ministre de la Culture, j'arrête ici, M. le Président, et je vous remercie de m'avoir cédé la parole.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Gouin, de votre intervention. Le projet de loi 14, Loi sur la Société de développement des entreprises culturelles, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Oui, M. le Président, vous voudrez bien maintenant appeler l'article 27 du feuilleton.


Projet de loi 6


Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 27, la ministre de la Culture et des Communications propose l'adoption du projet de loi 6, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Culture et d'autres dispositions législatives. Mme la ministre de la Culture.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Il me fait plaisir, M. le Président, de proposer l'adoption du projet de loi 6 qui modifie la Loi sur le ministère de la Culture et d'autres dispositions législatives. Ainsi, nous adaptons la législation québécoise aux changements effectués depuis le 11 janvier dernier au sein du nouveau ministère de la Culture et des Communications.

M. le Président, je pense qu'il n'est pas une coïncidence que nous déposions ce projet de loi immédiatement, puisque ayant été ministre des Communications au début du mandat, ensuite de la Culture et maintenant de la Culture et des Communications, c'est comme si la boucle se fermait. On sait que cette fusion de ministères était attendue depuis très longtemps; même dans le livre vert déposé par Jean-Paul L'Allier en 1975, on en parlait. C'est une proposition de la politique culturelle et, effectivement, je dois dire même, enfin les deux ministères sont réunis.

Pourquoi c'est si important? Parce qu'à partir du moment où le même ministère s'occupe de culture et de communications on est aussi en droit de s'attendre que la perspective culturelle soit prise en compte dans les dossiers clés aux Communications. Inversement, il est certain que la réalité propre aux médias ou aux télécommunications sera mieux intégrée lors de l'analyse des dossiers culturels impliquant ces dimensions. Le ministère de la Culture s'était donc réorganisé pour mener à bien les orientations de la politique culturelle, mais c'est à partir du moment où il est devenu ministère de la Culture et des Communications que le ministère s'est véritablement outillé pour donner à ses orientations leur plein envol. Ce qui ne veut pas dire, M. le Président, que l'un et l'autre sont traités différemment, mais ils sont traités de façon intégrée.

Hier, j'entendais le critique en matière de Communications, ex-critique en matière de Culture, qui s'inquiétait au niveau de l'autoroute électronique, par exemple. Il me fait plaisir de vous dire, M. le Président, que, compte tenu de la décision d'attribuer 50 000 000 $ au développement de l'autoroute électronique, par exemple, dans le dernier budget, à la ministre de la Culture et des Communications et au ministre de l'Industrie et du Commerce, M. le Président, nous avons envoyé par communiqué de presse, nous avons fait savoir partout et à toute l'industrie les modalités pertinentes, par exemple, aux 50 000 000 $ et les industries qui peuvent justement appliquer et demander l'aide gouvernementale en termes d'autoroute électronique.

On a parlé beaucoup de la quincaillerie en se disant: Voici le contenant, il n'y a pas de contenu. Dans les modalités mêmes des 50 000 000 $, oui, on fait appel au contenant, puisque ça prend aussi la structure pour véhiculer le contenu. Mais il y a une modalité aussi de 16 000 000 $, qui est supérieure même à la modernisation des infrastructures, entre autres pour aider les entreprises, justement, à développer le contenu, en plus d'avoir des modalités pour aider les entreprises de recherche, soit en éducation, soit en santé, M. le Président, pour développer aussi cette science si importante au niveau de l'autoroute de l'information. Il y aura aussi des provisions pour s'occuper des produits ou, enfin, développer des produits dans une culture qui nous est propre, c'est-à-dire la culture francophone, donc en français. Et j'ai eu, aujourd'hui même, une conversation avec le ministre Jacques Toubon, qui était de passage à New York et qui m'a téléphoné, juste avant même la période de questions, pour m'assurer que, quand je serai de passage aux Jeux de la francophonie, au mois de juillet, nous allons nous asseoir pour regarder, de façon tangible, comment utiliser les 5 000 000 $ dans nos industries respectives pour développer ce contenant francophone. Ce sont des choses, M. le Président, dont le ministre de la Culture et des Communications aura la responsabilité, sachant que l'autoroute de l'information est, évidemment, le sujet de l'avenir et ce que l'on appelle, aussi, le moteur premier de l'économie nouvelle.

Cela dit, M. le Président, je voudrais remercier tous les intervenants de la commission de la culture d'avoir, d'ailleurs, si bien travaillé, si bien collaboré dans tous les projets que nous avons déposés, notamment le projet de loi 6, entre autres. Et je voudrais faire un aparté, M. le Président, puisque c'est effectivement le dernier projet de loi que je présente dans cette session-ci, et ne serait-ce que de cette Législature, pour remercier d'abord les membres du personnel de mon cabinet, qui m'ont toujours appuyée et qui étaient avec moi du départ, c'est-à-dire quand j'étais ministre des Communications, et qui ont été des gens d'une fidélité extraordinaire.

Je voudrais remercier aussi les gens du ministère, comme le député de Gouin le disait tantôt, que ce soit les gens du contentieux ou que ce soit les artisans du ministère, qui nous ont appuyés dans tout ce que l'on a fait, à partir de la politique culturelle, de son élaboration, sachant que ce changement-là était pour créer, même chez eux, des changements professionnels, aussi, importants. Ils ont collaboré à 100 % et nous ont soutenus durant tout le processus d'élaboration, durant l'implantation, et ils nous ont donné un appui indéfectible. Et, évidemment, je veux souligner cette collaboration toute particulière de ma sous-ministre, Mme Michelle Courchesne, et de ses deux sous-ministres adjoints, qui ont été là du début à la fin de tout ce processus de changements qu'a subi le ministère des Affaires culturelles, qui est maintenant le ministère de la Culture.

Je veux aussi, M. le Président, rapidement remercier mon critique de l'Opposition, celui qui était là du début, au ministère de la Culture, qui est maintenant aux Communications, le critique de l'Opposition, qui nous a fait rire, qui a fait sortir en moi le côté peut-être un peu démonstratif, le côté un peu passionnel, le critique de l'Opposition avec lequel, veux veux pas, M. le Président, malgré nos opinions divergentes sur certains points de vue, et souvent même fondamentales je dois dire, moi et les membres de mon cabinet avons développé aussi une sincère amitié.

Merci, M. le Président, et je suggère l'adoption du projet de loi 6.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il est maintenant 18 heures. Est-ce qu'il y a un consentement pour permettre au député d'intervenir, car il est 18 heures?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il y a consentement? Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, vous avez un consentement de poursuivre, et je vous écoute.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, vous remarquerez que je m'adresse de mon fauteuil, puisque rien ne semble atteindre le porte-parole de l'Opposition pour les communications. Et cela est tout à fait naturel, M. le Président, puisque le nom de ma circonscription est, en soi, une protection divine: Sainte-Marie–Saint-Jacques. Inévitablement, le plafond ne va pas me tomber sur la tête à moi aussi. J'en fais un peu d'humour, quoique ça aurait pu être tragique, M. le Président, cet incident de cet après-midi.

(18 heures)

Je ne vais pas répéter tous les arguments que la ministre a déjà entendus mais que j'espère que la ministre a retenus comme tels. Nous sommes en faveur de la fusion du ministère de la Culture avec le ministère des Communications. Je lui répète quand même de nouveau, nous l'avions inscrit au programme de notre formation politique déjà depuis quand même quelques années. Tout au long de cette commission parlementaire sur une politique culturelle que nous avons tenue, j'ai insisté, voire même martelé le clou en disant: Devons-nous dissocier les deux? Et, de l'unanimité, tous étaient d'accord que les deux devaient faire une jonction et qu'il devait s'établir, pour employer un mot à la mode, une synergie entre les deux.

La ministre, M. le Président, tantôt, a fait allusion au livre vert qui avait été déposé par l'actuel maire de Québec et ministre des Communications de l'époque, M. Jean-Paul L'Allier. Il faut se rappeler qu'au même moment le juge Côté, qui était sans doute un grand visionnaire, parlait des communications en disant que cela était la voirie de l'intelligence. C'est d'autant plus vrai que nous parlons de l'autoroute informatique, donc de la circulation d'idées, d'idées neuves et d'idées belles.

Alors, forcément, M. le Président, j'ose espérer que la ministre aura retenu qu'effectivement, si le véhicule est très important, ce que nous allons inclure dans le véhicule, c'est-à-dire ce que nous allons y mettre comme contenu, est très important pour la société québécoise. Quelle que soit l'option ou l'orientation politique que nous pouvons partager ici, dans cette Chambre, il y va de l'intérêt supérieur de la nation. Et, pour reprendre cette phrase qu'avait faite la vice-première ministre et première ministre de la Culture de ce gouvernement, Mme Bacon, qui l'empruntait à Mme Bonaparte... Pourquoi, Mme Bonaparte? Mais, enfin, peut-être parce qu'elle avait enfanté de Napoléon, mais elle disait: Malheur à ceux dont les intérêts ne sont pas les intérêts supérieurs de la nation. Je ne dis pas que c'est un avertissement que je lance à la ministre. Je sais qu'elle a l'intérêt du Québec; du moins, elle m'en donne tous les jours l'image. Je lui fais l'honneur de la croire. Il reste à elle, M. le Président, demain, dans l'élaboration du contenant, de voir à ce que le contenu soit présent.

Donc, M. le Président, nous voterons en faveur de cette loi. Vous permettrez à celui qui est le doyen de la commission de la culture, jeune doyen – je vous vois murmurer, M. le Président – mais doyen quand même de cette commission, puisque ça fait déjà presque neuf années consécutives que j'y siège... La commission de la culture n'a jamais été une commission comme les autres. Ce n'est pas faire injure aux autres que de dire la chose, mais c'est une commission qui a toujours siégé dans un climat, une atmosphère et un esprit tout à fait exceptionnels, une commission où Opposition et parti ministériel sont allés souvent jusqu'à la complicité. Mais, complicité... Le mot est beau, M. le Président, puisque nous avions la ferme conviction qu'à ce moment-là nous nous enlevions du dos des habits partisans qui pouvaient gêner quelque chose de fondamental pour notre société, qui est son développement culturel.

Nous avons tenté de rapprocher nos positions pour en arriver à un consensus. C'est la raison pour laquelle, sans aucun doute, on pourra un jour faire un décompte et s'apercevoir que c'est la commission qui a adopté à l'unanimité le plus grand nombre de lois en cette Assemblée nationale. Je pense que c'est à l'honneur de tous ceux et celles qui y ont participé, les saluant, M. le Président, me rappelant les interventions de nos collègues qui y étaient au début, qui, malheureusement, n'y sont plus, en pensant à ceux qui y sont, ceux qui nous quitteront, puisque je sais que notre collègue, le député de Saint-Hyacinthe, qui a toujours été très actif au niveau des dossiers de la commission de la culture, ne sollicitera pas de nouveau mandat. Je l'ai déjà, d'ailleurs, informé... enfin, pas informé, mais je lui ai déjà offert mes voeux les meilleurs pour ce qui est de ses entreprises futures.

Donc, M. le Président, je termine là-dessus en saluant, moi aussi, la ministre... l'ancienne ministre de la Culture et, forcément, d'ici l'acte officiel, la nouvelle ministre de la Culture et des Communications. La ministre a fait allusion à son personnel. Son personnel a toujours été d'une très grande délicatesse et d'une grande collaboration lorsqu'il s'est agi, pour l'Opposition, de demander des renseignements. Alors, je crois que je me dois de rendre hommage à son personnel, à qui – j'espère que la ministre ne m'en voudra pas – j'ai fait des offres très sérieuses, tantôt, qu'ils ont d'ailleurs acceptées, sachant la sincérité avec laquelle je les faisais. Auraient-ils pu faire autrement, puisque je reconnaissais leur compétence? Je me souviens de cette phrase de mon grand-père qui disait qu'un ministre n'était pas une compétence; un ministre, c'était une autorité. Sa seule compétence lui venait du choix des gens qui l'entouraient. Alors, on pourrait probablement dire que la ministre est compétente, M. le Président, puisqu'elle a su s'entourer de gens compétents, en espérant que je n'oublierai pas, si, un jour, mon tour arrive – on ne sait jamais – cette phrase que mon grand-père maternel m'enseignait, de m'entourer de gens compétents, puisque c'est cela qui fera ma compétence. Je ne serai, en fin de compte, si je deviens ministre, qu'une autorité, parce que nous ne sommes que des autorités. Nous ne pouvons pas être spécialistes en tout.

Alors, voilà, M. le Président, je conclus là-dessus, en remerciant le personnel administratif de la commission, notamment la première secrétaire de la commission, Mme Tanguay, qui, malheureusement, nous a – je la taquine – trahi en passant à une autre commission; donc, elle nous a bien manqué. Mais, par contre, ceux qui ont poursuivi ont fait un travail d'appui très soutenu envers les membres de la commission. Et je salue ma vis-à-vis, Mme la ministre de la Culture et des Communications, en lui disant que, mon Dieu, quel que soit le côté de la Chambre où elle sera – ce côté-là étant dangereux par les temps qui courent – j'ose espérer que nous aurons toujours des moments de complicité lorsqu'il s'agira de parler de la culture et des communications. Puisque, comme je l'ai dit souvent, la politique étant très souvent conflictuelle, pourquoi se priver, M. le Président, d'avoir des moments consensuels?

Je vous remercie. Je remercie mes collègues du parti ministériel d'avoir donné un consentement de prolonger le temps de cette Chambre de façon à ce que je puisse répliquer au projet de loi de la ministre. Et, encore une fois, merci! Et souhaitons-nous bonne chance dans ce dossier, mais souhaitons-nous, d'abord, les pleins pouvoirs dans ce dossier. Merci!


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Le projet de loi 6, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Culture et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Compte tenu de l'heure, et conformément au règlement de l'Assemblée nationale, les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 7)

(Reprise à 20 h 4)

Le Vice-Président (M. Tremblay): Mmes et MM. les députés, si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. Nous allons poursuivre nos travaux. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Je vous demanderais de bien vouloir appeler l'article 28 de notre feuilleton.


Projet de loi 8


Adoption

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le leader adjoint. Alors, l'article 28. M. le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie propose l'adoption du projet de loi 8, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie et d'autres dispositions législatives. Je suis prêt à entendre un premier intervenant. M. le ministre.


M. Gérald Tremblay

M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup, M. le Président. Nous procédons aujourd'hui à l'adoption du projet de loi 8, lequel modifie la Loi sur le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie afin de remplacer le nom de ce ministère par celui du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie et d'intégrer à cette loi certaines dispositions de la Loi sur le ministère de l'Éducation et de la Science relatives aux fonctions confiées au ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie en matière de science.

Ce projet de loi modifie, par conséquent, la Loi sur le ministère de l'Éducation et de la Science, qui devient la Loi sur le ministère de l'Éducation.

Par ailleurs, ce projet de loi abroge la Loi sur le ministère du Tourisme et intègre à la Loi sur le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie les dispositions relatives aux fonctions qui étaient assumées par le ministère du Tourisme. Ce projet de loi contient également des dispositions de concordance.

Le projet de loi 8 a été étudié et adopté sans amendement par la commission parlementaire qui a siégé le 18 mai dernier. Ce projet de loi donne suite au remaniement ministériel de janvier dernier et s'inscrit dans la démarche de réalignement de l'appareil gouvernemental visant à accroître son efficacité. Il prévoit la réunion de la science et de la technologie au sein du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Cette intégration apporte quelques modifications qui ont pour objet d'améliorer le soutien qu'apporte le gouvernement à la science et à la technologie. Elle permettra ainsi une plus grande coordination de ces deux volets complémentaires que sont la science et la technologie. Cette intégration facilitera également la gestion de certains dossiers, comme celui des centres de liaison et de transfert, et, plus généralement, celui des liens entre les milieux de la recherche et les entreprises. Elle permettra, enfin, une représentation adéquate du gouvernement, soit auprès du gouvernement fédéral, soit dans les forums interprovinciaux ou internationaux.

La responsabilité de la science et de la technologie a été confiée au ministère de l'Industrie pour plusieurs raisons, M. le Président. C'est d'abord un ministère qui a une vocation très large, qui a, notamment, élaboré la stratégie économique du gouvernement et qui est chargé d'en coordonner la mise en oeuvre. La science et la technologie sont très importantes pour le succès de cette stratégie. C'est aussi un ministère qui, par vocation, doit s'harmoniser avec un grand nombre de partenaires, particulièrement dans la mise en oeuvre de la stratégie économique dont j'ai parlé. On doit d'ailleurs constater que d'autres gouvernements, le gouvernement de l'Ontario et celui du Canada, par exemple, ont confié la responsabilité de la science et de la technologie au ministère chargé de l'industrie, plus précisément le ministère du Développement économique et du Commerce, en Ontario, et le ministère de l'Industrie au gouvernement fédéral.

M. le Président, j'aimerais revenir sur un aspect qui a été soulevé lors des débats précédents, concernant la recherche fondamentale, et, plus généralement, la science. Je rappelle que la responsabilité de subventionner la recherche universitaire et collégiale continue de relever du ministère de l'Éducation, par l'entremise du Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche. Il existe également un mécanisme semblable dans le domaine de la santé, le Fonds de la recherche en santé du Québec, qui relève du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Les responsabilités additionnelles que ce projet de loi confie au ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie sont bien circonscrites et touchent principalement à la promotion et à la diffusion de la science. À cet égard, je tiens à rappeler que le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie n'a aucunement l'intention de cesser de se préoccuper de ce volet de son mandat. Il prend très au sérieux le mandat d'éveiller la population aux grands enjeux d'aujourd'hui et de demain, en matière de science et de technologie, et de préparer ainsi l'avenir.

Voici d'ailleurs les principales orientations que le ministère entend mettre en oeuvre: convaincre les décideurs de leurs responsabilités capitales de renforcer la culture scientifique et technologique; accroître le nombre de carrières scientifiques et technologiques de qualité, sans oublier les métiers techniques; améliorer le traitement de l'information scientifique dans les réseaux informels, comme les magazines ou les émissions de télévision, entre autres, afin qu'ils adoptent une formule de traitement interrogative, afin de cultiver le doute scientifique; étendre le réseau des acteurs en amenant davantage d'organismes communautaires et locaux à intégrer ces préoccupations; faire ressortir l'excellence en science et en technologie par la valorisation des succès de scientifiques, de chercheurs, de développeurs et d'entrepreneurs; renforcer la culture scientifique et technologique des entreprises.

Des réalisations récentes montrent, d'ailleurs, l'intérêt que porte le MICT pour la culture scientifique et technologique: Complexe d'accueil multifonctionnel du Jardin botanique de Montréal, 2 500 000 $; Centre d'interprétation de l'industrie de Shawinigan, 1 200 000 $; musée Armand-Frappier, 100 000 $; Cosmodôme, 1 000 000 $; reconduction du support financier à diverses revues de vulgarisation scientifique, dont Québec Science , Les débrouillards , Franc- Nord , Interface ; soutien technique et financier au colloque international «Quand la science se fait culture»; support à l'émission «Les débrouillards», le Festival international du film scientifique du Québec, «Omni Science», et, finalement, M. le Président, soutien dans le programme Étalez votre science, des manuels ou trousses permettant de mieux comprendre certains phénomènes.

(20 h 10)

J'aimerais conclure en affirmant que je compte exercer les nouvelles responsabilités que me confie le projet de loi 8 avec un grand intérêt, parce que je crois que les modifications proposées amélioreront le soutien qu'apporte le gouvernement du Québec à la science et à la technologie. Ces modifications permettront une meilleure coordination des divers programmes et interventions dans des secteurs clés de la société.

Voilà en bref, M. le Président, les objectifs visés par le projet de loi 8, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie et d'autres dispositions législatives, et auxquels, j'en suis persuadé, adhéreront les membres de cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le ministre. Je suis prêt à reconnaître un autre intervenant de la formation de l'Opposition officielle, M. le député de Bertrand.


M. François Beaulne

M. Beaulne: Oui, merci, M. le Président. Je demande la parole simplement pour dire que nous n'avons pas d'intervention à faire sur ce projet de loi. Nous voterons, cependant, contre parce que nous avons d'autres projets concernant le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Drummond, député indépendant.


M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Merci, M. le Président. M. le Président, à ce moment-ci de nos travaux et avancés comme nous le sommes dans cette session intensive, ceci sera probablement la dernière intervention d'importance que je ferai dans cette Assemblée avant le grand rendez-vous des examens que tout député a à passer au moins à tous les quatre ans ou quatre ans et demi. Nous avons devant nous, ce soir, M. le Président, l'adoption du projet de loi 8, qui va dans la foulée de la réorganisation ministérielle dont nous avons pris connaissance le 11 janvier 1994.

D'entrée de jeu, à ce moment-ci, M. le Président, j'aimerais utiliser les paroles de M. le député d'Outremont et ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, qui dit que l'art de la pédagogie est de répéter, et de répéter, et de répéter. Mais ne voulant pas l'embarrasser, M. le Président, j'aimerais mieux plutôt citer André Gide, qui disait: «Tout ce que je vais vous dire ce soir a déjà été dit, mais personne n'a écouté, si bien qu'il est nécessaire de le redire de nouveau.»

M. le Président, à cette dernière intervention, j'attacherai mes remarques non sur le fond et l'ensemble du projet de loi 8, mais surtout à ce que ce projet-là, au même titre que les nombreux projets que nous avons adoptés dans cette Trente-quatrième Législature, n'a jamais compris. Ils nous ont laissés, nous, les parlementaires, en commission parlementaire, devant des grands vides, à essayer de faire des projets de loi qui guident la vie de chacun et chacune de nos citoyens et de nos citoyennes au cours des différentes activités de leur vie sans avoir les matières nécessaires.

M. le Président, 85 lois du Québec ont été modifiées et seront modifiées dans quelques minutes par le projet de loi 8. J'ai toujours maintenu et c'est ici que je vais répéter, M. le Président, qu'un projet de loi, lorsqu'on nous présente un projet de loi, il devrait contenir les impacts sur les ressources humaines. Dans le peu de temps que nous avons eu à consacrer à ce projet de loi là en commission parlementaire, nous avons appris, M. le Président, que simplement le transfert de la section en recherche et développement au ministère de l'Industrie et du Commerce, ça va affecter 39 à 45 de nos travailleuses et travailleurs. Ça va impliquer un transfert de 20 000 000 $ du budget, M. le Président, et ça, c'est à même les quelques minutes que nous avons eues! J'ai toujours maintenu qu'un projet de loi devrait avoir aussi des impacts sur les finances publiques. Il devrait aussi contenir les objectifs que recherchent les projets de loi.

Ça me fait plaisir, ce soir, d'entendre, dans les remarques de M. le ministre, l'élaboration de ce qu'il entend faire avec les millions qui ont été consacrés aux différents projets d'activité. On n'en a pas eu la chance, lorsqu'on l'a regardé article par article. Mais, ce que j'ai entendu ce soir en remarques de conclusion aurait dû être les objectifs et les orientations que contient un projet de loi. Or, ça me fait plaisir de les savoir, parce que je voterai en faveur avec moins de pincements au coeur et moins d'inconnues depuis que j'ai entendu ces choses-là. Je crois que ça devrait être inclus dans un projet de loi.

M. le Président, lorsqu'on a un projet de loi qui modifie d'une façon sensible 85 lois du Québec, je pense qu'il était normal d'avoir une clause crépusculaire. Vous allez me permettre de déplorer le manque d'audace, de courage et de détermination qu'on reconnaît normalement au ministre de l'Industrie. Dans une perspective d'approche de qualité totale, le ministre nous a toujours habitués à être à l'avant-garde. J'ai offert, M. le Président, au ministre de l'Industrie et du Commerce d'être à l'avant-garde, de mettre une clause crépusculaire qui aurait dit que nous devrions revenir ici tous les trois ans regarder les impacts de cette réorganisation.

Je vais vous citer, M. le Président, ce que M. le ministre m'a répondu. Je vais vous dire ce que j'en ai déduit, après ça. Il m'a répondu: «Alors, M. le Président, c'est une question très pertinente, d'ailleurs, qui a été demandée à tous les ministres responsables de leur loi. Je pense que la réponse qui est venue de tous les autres ministres, c'était qu'on ne pouvait pas donner suite à l'attente légitime du député de Drummond. Pour ne pas créer de précédent, je pense qu'on doit suivre la même ligne gouvernementale sur ce point-là.»

M. le Président, vous allez me permettre, dans cette dernière allocution, dernière allocution avant le prochain scrutin, M. le Président, il faut bien s'entendre... L'énoncé des quatre points que devrait contenir notre projet de loi et la réponse que M. le ministre m'a faite en commission parlementaire m'ouvrent la porte, de plein fouet, sur une chose, c'est qu'il va falloir qu'un jour, dans cette Assemblée, si, nous, les parlementaires, nous voulons être les vrais mandataires de nos citoyens, être leur porte-parole, on regarde et reconsidère la fameuse ligne de parti, M. le Président. À la réponse, il en va de même que... Si M. le ministre de l'Industrie, et surtout le député d'Outremont, n'avait pas été lié par une ligne de parti qui le lie, on aurait eu, dans ce projet de loi, une clause crépusculaire, qui aurait fait en sorte que, nous, les parlementaires, nous puissions revenir à intervalles réguliers, voir et adopter nos lois en vertu de la vitesse des changements qu'il y a dans notre société.

Dans la même foulée de ce projet de loi, on a fait une étude ici, M. le Président, en commission parlementaire, la commission de l'économie et du travail, sur la loi des décrets. Cette loi-là datait de 1934, M. le Président. Elle n'avait jamais été révisée, de sorte que, hier – vous étiez ici, vous avez présidé – nous avons été obligés de suspendre nos règles et de faire un débat d'urgence pour faire une loi pour régler des problèmes.

M. le Président, si cette loi-là, en 1934, avait inclus une clause crépusculaire, qui pourrait être de trois à six ans dans chacune des lois, bien, on aurait pu éviter énormément d'abus et surtout, M. le Président, de directions fausses qu'on donne à nos citoyens. Parce que, la nature humaine étant ce qu'elle est, si on donne un pouce, on est tolérant, ce sera deux pouces, ce sera trois pouces. Et le plus bel exemple, M. le Président... Vous voyagez vous-même sur l'autoroute 20, l'autoroute Jean-Lesage. La limite de vitesse est pourtant indiquée à 100 km, et je vous mets au défi de me trouver, entre Montréal et Québec et entre Montréal et la Gaspésie, quelqu'un qui va se maintenir à 100 km. On va conduire maintenant à 100 km, 110 km, 115 km et 120 km parce qu'on a été tolérant. C'est la nature humaine, M. le Président, et on n'est pas capable de faire autrement.

Alors, c'est pour ça qu'il serait important, et j'espère que, lors de la Trente-cinquième Législature, lorsqu'on sera ici, le gouvernement qui sera élu, M. le Président... Je ne serai pas membre du gouvernement, je serai ici comme député indépendant de Drummond et je m'assurerai, M. le Président, que, lorsque nous débuterons cette Trente-cinquième Législature, nous pussions avoir, dans les projets de loi, ces clauses des impacts sur les ressources humaines, sur les finances publiques, les grandes orientations et les objectifs qu'on reçoit et qu'on perçoit avec ces projets de loi là, et surtout, M. le Président, une clause crépusculaire pour faire en sorte que les législateurs ne navigueront plus dans le brouillard et au pifomètre mais seront en mesure de revoir les effets, avec l'usure du temps, des législations.

Et, sur ceci, M. le Président, je vais conclure. Vous me faites signe qu'il me reste très peu de temps, qu'il me reste une minute. La dernière chose que j'aimerais ajouter, en ce qui concerne ce projet de loi là, c'est qu'on a manqué aussi une belle opportunité, à l'article 7.2, de mettre une clause qui détermine l'éthique des transferts par lettres patentes que le gouvernement pourra délivrer sous le grand sceau constitué des personnes morales qui aura pour objet le développement de la recherche et de la technologie. J'aurais espéré que, en commission parlementaire, nous puissions inclure un code de déontologie. M. le ministre nous a dit que, à l'intérieur de cette procédure-là, il regarderait ça, que, lorsqu'on fera les publications, probablement qu'il serait temps de regarder ça, mais je pense que c'est une autre chose qu'il va être important, surtout lorsqu'on crée des personnes morales, d'avoir, ces codes de déontologie, et je n'ai pas l'intention de revenir, à ce moment-ci, sur les derniers effets qu'on a connus.

Or, sur ceci, M. le Président, je vous remercie de m'avoir laissé dépasser mon temps de quelques secondes, et je peux assurer M. le ministre que je vais contribuer à l'adoption de ce projet de loi. Parce que, dans l'ensemble, c'est bien, mais il aurait été encore doublement meilleur avec une clause crépusculaire.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député, très bien. M. le ministre, vous avez un temps de réplique. Non? Ça va? Très bien.


Mise aux voix

Alors, le projet de loi 8, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Il est adopté sur division. Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Vous voudrez bien, maintenant, M. le Président, appeler l'article 22.


Projet de loi 27


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le leader adjoint. Alors, à l'article 22, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 27, Loi modifiant la Loi sur la Société de développement industriel du Québec. Je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.


M. Gérald Tremblay

M. Tremblay (Outremont): Merci, M. le Président. Nous procédons aujourd'hui à la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 27. Dans le cadre de son plan d'action visant à soutenir l'économie et à stimuler la création d'emplois, le gouvernement annonçait, le 30 novembre 1993, la création de deux sociétés mixtes – privée, publique – de capital de risque: l'une vouée au financement des entreprises dans le développement de leurs activités à l'extérieur du Québec, la Société d'investissement au commerce international, et l'autre vouée au financement et à la capitalisation des petites et moyennes entreprises technologiques québécoises, le Fonds d'investissement technologique en entreprises québécoises. Il s'agit de deux organismes semblables de capital de risque voués à des finalités différentes, financés majoritairement par le secteur privé, le gouvernement se réservant seulement une participation minoritaire. D'où l'idée de fusionner les deux projets et de l'étendre, éventuellement, à d'autres secteurs.

(20 h 20)

En effet, si, à l'heure actuelle, nous avons identifié les besoins pressants dans seulement deux secteurs, il est possible que la réalisation d'autres mesures semblables puisse, dans l'avenir, être jugée souhaitable par le gouvernement. Il pourrait s'agir de sociétés de capital de risque dans des secteurs spécifiques, comme, par exemple, les biotechnologies. En limitant la portée de la future société de capitaux à l'un ou l'autre des secteurs visés, le gouvernement se priverait d'un outil flexible de financement à certains secteurs pointus, mais névralgiques pour l'économie québécoise. C'est la raison pour laquelle il a été jugé opportun de prévoir un mécanisme qui ne limite pas sa portée au seul financement des entreprises dans le développement de leurs activités à l'extérieur du Québec. Dans ce sens, le gouvernement se doit donc de doter la Société de développement industriel du Québec d'un pouvoir habilitant plus large, parce que c'est une formule qui pourrait, éventuellement, s'appliquer à plusieurs secteurs.

Par ailleurs, comme il s'agit d'une formule mixte – privée, publique – où le gouvernement sera un partenaire minoritaire, il peut difficilement définir a priori un cadre légal, les modalités de fonctionnement, tels la structure du Fonds, les critères de placement, les véhicules, les projets à privilégier. Ceci doit se faire à l'intérieur de conventions d'actionnaires qui doivent, normalement, être élaborées entre partenaires.

Cependant, le gouvernement entend orienter la mission de la nouvelle société pour favoriser une formule qui s'adresse principalement à la petite et moyenne entreprise exploitant dans les secteurs manufacturiers et tertiaires moteurs, requérant un apport en capital complémentaire à leur propre investissement à l'extérieur du Québec, de démarrage ou d'expansion d'entreprises technologiques prometteuses ou, encore, à certains secteurs très pointus. Le respect de ces critères sera lié à la participation du gouvernement dans cette future société.

Il apparaît, cependant, primordial que les petites et moyennes entreprises qui seront considérées aux fins de placement démontrent un palmarès de rentabilité bien établie. Ce projet, tel que présenté, n'est en fait que la continuité du projet original de la Société d'investissement au commerce international à d'autres secteurs névralgiques pour l'économie, dont principalement celui du démarrage et de l'expansion d'entreprises technologiques.

En s'associant au secteur privé, le gouvernement s'assure également que la philosophie d'intervention et la flexibilité des normes et des critères adoptés conjointement permettront aux analystes de la future société d'aborder une demande d'assistance selon une perspective d'entreprise. Ainsi, l'appréciation du risque assumé majoritairement par le secteur privé sera faite en fonction de la viabilité de l'ensemble de l'entreprise à moyen et à long terme.

Voilà, en bref, M. le Président, les objectifs visés par le projet de loi 27, Loi modifiant la Loi sur la Société de développement industriel du Québec, auquel, j'en suis persuadé, adhéreront les membres de cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le ministre. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Bertrand, critique de l'Opposition officielle en cette matière. M. le député de Bertrand.


M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Mes premières paroles iront du côté des braves qui, ce soir, par une soirée de grande finale de la coupe Stanley, sont encore à l'écoute et à mes collègues qui sont ici présents dans cette salle et qui, soit par acquit de conscience ou par instructions du whip, sont également présents.

Le projet de loi 27 est un projet de loi très court; en fait, il comporte deux articles. Il comporte deux articles, mais qui ont quand même une certaine portée. J'aimerais souligner, dans un premier temps, que les échanges que nous avons eus en commission parlementaire ont été des plus constructifs. Je profite de l'occasion également, puisque nos débats achèvent et que cette Trente-quatrième Législature également tire à sa fin, pour féliciter le ministre de l'Industrie et du Commerce qui a collaboré de façon constructive dans les différents dossiers auxquels j'ai eu à participer avec lui et, également, pour souligner les échanges très positifs que nous avons eus autour de ce projet de loi, en commission parlementaire, même si nous avions des réserves de part et d'autre.

La discussion a surtout porté sur la Société d'investissement au commerce international, au commerce extérieur, et c'est la raison pour laquelle nos remarques ont surtout porté dans ce secteur. Il est ressorti de nos discussions en commission que nous avions effectivement un consensus, qu'il existait un consensus au niveau, par exemple, de la nécessité d'augmenter le nombre de petites et moyennes entreprises qui exportent, au Québec, puisque cette activité représente 40 % de l'ensemble de l'activité économique au Québec, qu'également l'augmentation et la facilitation des exportations de la part des petites et moyennes entreprises contribuaient de façon significative à la création d'emplois au Québec et que, finalement, la projet de loi 27 visait, comme objectif, à élargir les pouvoirs de la SDI de façon à augmenter au Québec la création d'emplois, entre autres en facilitant les exportations à nos petites et moyennes entreprises.

Ceci étant dit, M. le Président, je dois avouer que, malgré les échanges très positifs que nous avons eus de part et d'autre, le ministre ne m'a guère convaincu de la nécessité d'introduire ce projet de loi. J'ai même eu l'impression, à certains moments, à mesure que nos échanges avançaient, que le ministre aurait même peut-être été tenté de retirer ce projet de loi et de le réviser de façon à prendre en considération certains éléments que nous lui apportions. Au fond, le projet de loi, pour nous de l'Opposition, n'a pas sa raison d'être. Il n'a pas sa raison d'être, d'abord, parce qu'il n'ajoute pas grand-chose aux pouvoirs actuels de la SDI. Sommairement, le projet de loi 27 permet à la SDI de devenir actionnaire minoritaire d'une société qui, elle, peut investir dans une société d'investissement dotée ou non de personnalité juridique.

Le ministre a convenu que, parmi ces sociétés à personnalité juridique ou non juridique, il pouvait y avoir, par exemple, certaines formes de consortiums, des sociétés en commandite, des regroupements d'entreprises. Or, l'article 8.1 de la SDI permet déjà à la société d'État de le faire soit sous forme de prêts participatifs ou de garanties de prêts. Le ministre a également mentionné, pour étoffer son argumentation, l'importance de la capitalisation dans la structure financière des entreprises, surtout lorsqu'il s'agit d'augmenter leur capacité concurrentielle sur les marchés nord-américains, les marchés internationaux, de même qu'en matière de recherche et de développement technologique. C'est vrai. Mais, de notre côté, nous pensons que l'objectif que vise cet élargissement de mandat de la SDI peut très bien se réaliser par d'autres moyens dont la SDI dispose à l'heure actuelle et qui permettront à nos entreprises d'augmenter leur capitalisation, entre autres en leur assurant une rentabilité accrue.

Il y a deux façons d'augmenter la capitalisation des industries: ou bien on injecte directement des fonds dans l'avoir des actionnaires, ce que propose le ministre par le projet de loi 27, ou bien on assure aux entreprises une rentabilité de manière à ce que les surplus accumulés viennent d'eux-mêmes enrichir et renforcer la capitalisation des entreprises. C'est plutôt l'approche que nous préconisions.

Nous sommes d'accord pour que le gouvernement développe des outils additionnels pour permettre aux entreprises d'augmenter et de rentabiliser leurs activités, en particulier dans le secteur du commerce extérieur et des exportations, mais nous pensons que, à l'heure actuelle, la SDI dispose des outils qui lui permettent, soit sous forme de garanties de prêts ou par investissement, par une participation quelconque, de doter les entreprises de muscles et de reins suffisamment solides pour leur permettre d'atteindre ce seuil de capitalisation essentiel à leur performance sur les marchés extérieurs et même sur les marchés domestiques.

Nous pensons également que ce projet de loi ne répond pas aux demandes du milieu de regrouper les services qui sont présentement offerts aux intervenants dans le milieu des exportations et dans le secteur du commerce international. Au contraire, nous pensons que ce projet de loi perpétue et consacre, jusqu'à un certain point, l'éparpillement des ressources qui existent présentement au sein des différents ministères et des différentes agences du gouvernement du Québec pour faciliter l'exportation à nos petites et moyennes entreprises.

(20 h 30)

Nous pensons, par exemple, que les programmes qui sont présentement gérés par le ministère des Affaires internationales, qu'on appelle communément APEX et qui, de l'aveu même de plusieurs exportateurs et de plusieurs propriétaires d'entreprises, ne représentent que des grenailles par rapport aux besoins de l'industrie, mériteraient d'être regroupés sous un même parapluie. De la même façon, les activités qui sont présentement sous l'égide du ministère de l'Agriculture et qui visent, particulièrement, le secteur agroalimentaire en matière d'exportation devraient également être regroupées sous un même chapeau.

À cet effet, j'aimerais rappeler que, effectivement, en matière agroalimentaire, des marchés intéressants pour nos entreprises sont en train de se développer, en particulier à nos propres frontières, dans l'État de New York et au Mexique qui fait désormais partie de cet espace commercial nord-américain qu'on appelle l'ALENA. Il existe également certaines facilités qui sont mises à la disposition des entreprises qui relèvent du ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, particulièrement via la SDI. D'ailleurs, lors de nos échanges, le ministre nous confirmait qu'environ 25 % des activités de la SDI touchent le secteur international et le secteur extérieur.

Alors, je me dis, M. le Président, que, si le concept du guichet unique est bon pour la formation de la main-d'oeuvre et pour d'autres secteurs d'activité au Québec, pourquoi ne serait-il pas bon également en matière de commerce extérieur et en matière de promotion de nos exportations? Or, le projet de loi 27 va complètement à l'encontre de ce concept de guichet unique et de regroupement des services aux exportateurs sous un même chapeau.

Nous pensons également que les partenaires privés qui ont été approchés pour investir dans la Société d'investissement au commerce international, en particulier ceux que le ministre a nommés – et je les rappelle à ceux qui nous écoutent: la Banque Nationale, la Caisse de dépôt, le Fonds de solidarité, les Investissements Novacap et la SEE – n'ont pas encore donné d'engagement ferme; ils ont seulement exprimé un intérêt. Le ministre nous répondait, en commission parlementaire, que ces engagements fermes viendraient après l'adoption du projet de loi. Il m'aurait semblé plus naturel et peut-être plus incitatif si des engagements plus fermes de la part de ces futurs partenaires ou de ces partenaires potentiels avaient été confirmés avant l'étude du projet de loi. Donc, M. le Président, pour ces trois raisons essentielles, nous pensons que le projet de loi 27 n'a pas sa raison d'être dans la conjoncture actuelle.

J'aimerais également souligner, par contre, que le ministre, lors de l'étude en commission, a apporté certaines assurances et certaines clarifications qui nous rassurent dont j'aimerais répéter ici la teneur. D'abord, le ministre nous a assurés que le contenu québécois et que la création d'emplois feraient partie des critères d'éligibilité de la participation de la SDI aux futurs partenaires qui deviendraient éligibles selon ce projet de loi. Il a également indiqué que ces critères feront partie des règlements qui découleront du projet de loi et seront insérés dans les protocoles d'entente avec les autres partenaires, puisque, dans ces partenariats, la SDI sera appelée à être minoritaire.

On sait tous que, lorsqu'une entreprise est minoritaire, dans nos lois qui régissent le fonctionnement des entreprises, il est important de prévoir, par protocole d'entente, quels seront les modes de fonctionnement, puisque, dans une situation de minoritaire, il est difficile, sans avoir discuté préalablement des conditions d'éligibilité, de prévoir les modalités qui s'appliqueront. Je pense qu'à ce niveau il faut dire que le ministre nous a effectivement donné les assurances que la SDI verrait à ce que les critères de création d'emplois et les critères en matière de contenu québécois, c'est-à-dire de produits fabriqués au Québec avec de la main-d'oeuvre ou des matières premières québécoises, seraient une composante importante de ces sociétés avec lesquelles la SDI entrerait en partenariat.

Le ministre nous a également confirmé que la mise de fonds de 25 000 000 $ dans la Société d'investissement au commerce international que la SDI sera appelée à fournir sera puisée non pas à même les disponibilités de la SDI, mais sera transférée par le ministère des Finances, ce qui nous assure que le budget actuel de la SDI pourra continuer à être utilisé aux fins pour lesquelles il était originalement assigné.

Nous allons voter contre ce projet de loi, M. le Président, parce que, somme toute, nous avons une bien meilleure idée de ce qui devrait être fait pour intensifier et pour faciliter les exportations non seulement à nos petites et moyennes entreprises, mais à nos grandes entreprises également. Nous n'avons pas inventé la roue. Nous n'avons pas l'intention, non plus, de l'inventer, mais je souligne, puisque c'est le ministre lui-même qui l'a relevé lors de nos échanges en commission, que le programme du Parti québécois prévoyait la création d'une société québécoise des exportations qui répondrait davantage aux besoins et aux demandes des intervenants en matière de commerce extérieur.

Fondamentalement, M. le Président, si nous allons voter contre ce projet de loi, c'est parce qu'il n'ajoute strictement rien, à notre avis, aux pouvoirs actuels de la SDI et, particulièrement, parce que nous pensons qu'il est grand temps de regrouper sous une même entité l'ensemble des services mis à la disposition des exportateurs, entre autres, via ce que nous appellerons la société québécoise des exportations dont les mandats, dont les objectifs, en gros, seront – et je vous en donne quelques-uns strictement à titre d'exemple pour vous montrer jusqu'à quel point ils nous apparaissent beaucoup plus pertinents que ce que nous propose le ministre – d'abord, de regrouper divers services éparpillés un peu partout sous un guichet unique; ensuite d'élargir la gamme des services existants et, à titre d'exemple, l'appui aux entreprises gagnantes sous forme de marges de crédit garanties pour permettre aux PME qui ont réussi des ventes à l'exportation d'avoir accès aux liquidités supplémentaires dont elles ont besoin pour être en mesure de donner suite à leur succès; l'extension de l'aide financière à l'exportation aux produits québécois qui font l'objet d'une vente locale, mais dans le but exclusif d'être ensuite réexportés; un appui aux exportations adossé sous forme de garantie de marge de crédit préautorisée et automatique dans le cas de tout contrat adossé par la CCC; un appui aux maisons de commerce, qui jouent un rôle de plus en plus important dans la promotion de nos exportations, particulièrement en matière de diversification des marchés.

J'aimerais ici rappeler une donnée assez significative: alors que les maisons de commerce du Québec représentent quelque chose comme 3200 emplois, qu'elles ont une valeur exportatrice d'environ 3 600 000 000 $ et que seulement 4 % de leurs exportations vont vers les États-Unis, c'est-à-dire que le gros de leurs exportations va vers des marchés outre-mer autres que les États-Unis, elles contribuent, de ce fait même, à la diversification de nos marchés d'exportation. Et je tiens à souligner ce fait parce que, dans un contexte où on apprenait tout à fait récemment que le pourcentage des exportations canadiennes et québécoises, d'ailleurs, vers les États-Unis est allé en augmentant, c'est-à-dire qu'il est passé d'environ 76 % à quelque chose comme 80 %, il est important de faciliter la diversification des marchés, et les maisons de commerce jouent, à ce niveau, un rôle important. Par contre, le projet de loi 27 ne facilitera d'aucune façon la participation de la SDI ou l'élaboration de programmes du gouvernement du Québec pour faciliter les activités des maisons de commerce, d'une part, indépendamment du contenu québécois de leurs produits et, d'autre part, de façon plus ciblée lorsque les produits concernés ont un contenu québécois au-delà de 50 %.

(20 h 40)

Également, l'appui aux entreprises dans leurs démarches d'implantation à l'étranger sous forme de «joint venture» ou d'alliance stratégique leur permettant de se positionner sur les marchés internationaux et les marchés mondiaux en prenant avantage des alliances qu'elles pourraient conclure avec des entreprises européennes du Moyen-Orient, d'Amérique latine, ou asiatiques, là où nous avons une possibilité d'apporter une expertise et, avec l'aide de partenaires locaux, d'étendre nos marchés. Également, une liste des répertoires disponibles de partenaires possibles à l'étranger, ainsi de suite.

M. le Président, je ne voudrais pas élaborer plus qu'il ne faut sur cette société québécoise des exportations, mais j'ai simplement voulu, à titre d'exemple, énumérer quelques-unes de ses responsabilités pour montrer jusqu'à quel point le concept de guichet unique que nous voulons introduire en matière de regroupement et de facilitation des exportations à nos petites et moyennes entreprises ne se retrouve pas dans le projet de loi 27 que nous présente le ministre et encore moins dans l'ensemble des programmes existants et éparpillés un peu partout dans les différents ministères.

Alors, voilà pourquoi nous allons voter contre ce projet de loi, non parce qu'il est mauvais en soi, mais parce qu'il nous apparaît tout à fait insignifiant par rapport aux besoins du milieu, par rapport aux demandes que nous ont faites les intervenants. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Alors, sur le même sujet, je vais reconnaître Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée. Ah, je m'excuse! La règle de l'alternance, très bien!


Dépôt de rapports de commissions

M. Doyon: Avec l'accord de cette Chambre, je demanderais qu'on permette au président de la commission de l'économie et du travail de bien vouloir déposer un rapport qui est prêt à être déposé, s'il y a consentement.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Ah, je m'excuse! Je croyais que vous vouliez intervenir sur le projet de loi. Alors, vous voulez déposer un rapport. Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Il y a consentement. Très bien. M. le député de Fabre.


Étude détaillée du projet de loi 23

M. Joly: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai donc l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail, qui a siégé les 1er, 6, 7, 9 et 14 juin 1994, et ce, afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 23, qui est la Loi sur la Société du tourisme du Québec. Le projet de loi a été adopté avec amendements. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Alors, le rapport est déposé.


Projet de loi 27


Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Je vais maintenant reconnaître Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve pour un temps de 30 minutes, je crois. Non, 10 minutes, très bien! Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. M. le Président, vous allez me permettre, d'abord, de remercier mon collègue de Bertrand, mon collègue, le député de Bertrand, qui a fait une excellente intervention et qui a étudié, en commission parlementaire, article par article le projet de loi. Vous savez sans doute que, pour l'Opposition officielle, le député de Bertrand a la responsabilité des dossiers en matière de commerce extérieur. Il a cette vision d'ensemble qui, malheureusement, est difficile à retrouver quand on regarde l'éparpillement dans lequel les programmes et les services du gouvernement se retrouvent.

Je voudrais profiter de l'occasion, M. le Président, ce soir – parce qu'il s'agit de la prise en considération du rapport de la commission, il y a peu de temps qui est à ma disposition – entre autres, puisque c'est sans doute la dernière occasion que je peux utiliser pour le faire étant donné la fin prochaine de la session, pour saluer, comme l'a fait mon collègue, le député de Bertrand, l'infatigable ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Je dois vous dire, M. le Président, que, même quand on est en désaccord profond avec ses choix politiques et économiques, je pense que c'est impossible de ne pas lui reconnaître beaucoup de sincérité et, je dirais même, du dévouement. Alors, M. le Président, je pense que ça vaut la peine d'être souligné. Ha, ha, ha! Et je vous assure, M. le Président, que je n'ai rien à lui demander. Ha, ha, ha! Il va même s'inquiéter de ça, pour la suite de mon discours, sachant que les critiques fuseront.

Ceci dit, c'est sur la SDI que je m'interroge. Et je voudrais prendre le temps qui m'est imparti pour soulever un certain nombre d'interrogations, à ce moment-ci, sur l'avenir de la Société de développement industriel du Québec. Ce n'est pas évident, M. le Président, que la SDI va pouvoir survivre aux difficultés rencontrées au cours des dernières années quand vous pensez que les pertes anticipées totalisent présentement 600 000 000 $ et que le budget est un budget qui rétrécit d'année en année, un budget qui, en l'espace de deux ans, a chuté de 50 %.

Le budget de la Société de développement industriel, qui était d'à peu près 530 000 000 $, il y a deux ans, n'est plus que de la moitié, environ 225 000 000 $. Alors, vous vous rendez compte, M. le Président, que, dans ce budget qui rétrécit, il y a seulement le tiers des montants qui vont au soutien des petites et moyennes entreprises. C'est là une réalité qui est allée en s'aggravant au fil des dernières années du mandat de ce gouvernement. D'autre part, chaque année, depuis deux ans maintenant, les provisions pour pertes totalisent presque 100 000 000 $, c'est-à-dire, je crois, cette année, plus exactement, 90 000 000 $. Alors, c'est quasiment la moitié de ce qui est accordé par le Conseil du trésor pour aider l'entreprise qui s'en va pour éponger des provisions pour pertes.

Alors, il y a certainement des questions sérieuses. Ces questions sérieuses, elles ont d'ailleurs été posées à l'occasion d'une étude sur le positionnement de la Société de développement industriel, qui a été préparée par la firme Raymond, Chabot, Martin, Paré, l'automne dernier. De nombreuses recommandations y sont contenues. Je ne dis pas, pour autant, que toutes les recommandations doivent être aveuglément appliquées. Mais on se serait attendu, raisonnablement, que des orientations gouvernementales, ministérielles soient données sur ce que le gouvernement avait l'intention de faire avec la Société de développement industriel, avec les études qu'il a fait préparer sur les virages à réaliser. Rien, dans le fond, de sérieux n'est venu.

Le journal Les Affaires , samedi dernier, publiait une nouvelle qui – je ne sais pas si elle est confirmée – annonçait que le président de la Société de développement industriel du Québec allait quitter la présidence de la SDI pour devenir le président de la Place des Arts à Montréal. On annonçait même, pour dans deux jours, pour le 17 juin, l'annonce de cette nomination. Cette nomination, nous disait-on, est venue du fait que l'actuel président de la SDI voulait, avait énoncé tout à fait son intention de quitter la Société de développement industriel. Parmi les motifs que le journaliste, M. Gilles Des Roberts, invoque, et je cite, on peut lire ceci: «M. Tremblay – on fait évidemment référence au ministre – aurait fait faux bond à M. Savard en refusant de présenter un projet de loi pour transformer la Société de développement industriel en société d'État autonome, prétextant qu'un tel projet donnerait des munitions à l'Opposition péquiste.» C'est une citation qui est attribuée à un membre du conseil d'administration, qui commentait ce qui se passait à la Société de développement industriel.

Quoi qu'il en soit, je ne dis pas que c'est vrai. Je dis simplement que, faute d'orientations claires, toutes les rumeurs sont permises, M. le Président. C'est ça qui menace, d'une certaine façon, je pense, moi, la crédibilité de la Société de développement industriel, en plus, évidemment, de ses pertes anticipées qui totalisent des centaines de millions de dollars.

(20 h 50)

On fait mention, notamment, de l'une des recommandations contenues dans ce rapport de la firme RCMP, à l'effet qu'il y aurait fermeture du réseau régional de la Société de développement industriel. Là-dessus, on aimerait entendre le gouvernement. Quelle est son intention en matière de services de la Société de développement industriel en région? Il y a de plus en plus de création de fonds régionaux. Ces fonds régionaux, qui sont créés par le gouvernement pour accorder des garanties de prêts aux entreprises, font le travail qui était justement une spécialité de la SDI. Alors, est-ce que le gouvernement va les maintenir? Quel est son point de vue là-dessus?

Quel est le point de vue également sur l'échec... On peut le dire, là, je pense que tous les observateurs le savent: L'intégration de l'AQVIR, la société québécoise pour la valorisation de l'innovation industrielle, à la SDI en 1990, ça a été un échec, M. le Président. Un échec, parce que la SDI n'a pas été capable de se ressaisir, puis de poursuivre un travail performant qui était extrêmement reconnu par l'ensemble des intervenants et qui, vraiment, était important et qui avait été réalisé par l'Agence québécoise. C'est donc dire que, lorsque la SDI s'est vu confier des mandats, notamment en matière d'innovation industrielle, je pense qu'elle n'a pas réussi à vraiment sérieusement les accomplir.

Alors, là, on voit un nouveau mandat, avec le projet de loi 27, en matière de financement des exportations, au moment où, au ministère des Affaires internationales, il y a également des services et des programmes. Cet éparpillement-là, M. le Président, on n'a plus les moyens de se le payer. C'est la raison pour laquelle l'Opposition va voter contre le projet de loi 27.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, il n'y a pas d'autres intervenants sur le projet de loi. Donc, ça met fin au débat. Est-ce que le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi 27, Loi modifiant la Loi sur la Société de développement industriel du Québec, est adopté?

Une voix: Adopté sur division.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Il est adopté sur division. Très bien. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Je vous demanderais, M. le Président, d'appeler l'article 31 du feuilleton.


Projet de loi 17


Adoption

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le leader. Alors, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives. Alors, je suis prêt à reconnaître une première intervenante, Mme la ministre de la Santé.


Mme Lucienne Robillard

Mme Robillard: M. le Président, tous les parlementaires se souviendront que nous avons adopté une réforme de la santé et des services sociaux, il y a deux ans, et que nous avons adopté une loi fort importante à cette Assemblée sur les services sociaux et les services de santé; tout le monde appelle cette loi la loi 120. C'est vraiment la loi de base, la loi générale qui nous guide dans tous nos services de santé et nos services sociaux au Québec. Mais, en même temps, M. le Président, nous savons aussi que nous avions une autre loi qui s'adressait de façon particulière aux populations sur le territoire du Conseil cri et du Conseil Kativik. Et, suite à l'adoption de la loi générale, M. le Président, nous avons eu des négociations avec les représentants du Conseil cri pour, justement, que la loi générale s'applique aussi à toutes les personnes qui se retrouvaient sur le territoire du Conseil Kativik.

Et, M. le Président, je dois vous dire que nous sommes arrivés à une entente, de sorte que, le 13 décembre dernier, le 13 décembre 1993, nous avons adopté en cette Chambre une partie de la loi qui s'adresse maintenant de façon particulière au Conseil régional Kativik de la santé et des services sociaux. Donc, dorénavant, toute la population qui vit sur ce territoire est couverte par notre projet de loi général, dans une partie tout à fait particulière.

Ce que nous avons fait avec le projet de loi 17, M. le Président, c'est d'avoir une loi d'application qui permettait le régime transitoire entre les deux systèmes. Vous savez, quand on change toute une organisation, quand on change les structures, il faut toujours prévoir des mesures transitoires qui vont nous permettre d'assurer la continuité des services qui sont donnés à la population. Et le projet de loi 17, qui est une loi d'application, dans le fond, de la loi que nous avions adoptée en décembre 1993, nous permet d'avoir des mesures transitoires, tant au niveau des structures comme telles, pour rendre les structures conformes à la nouvelle loi, les conseils d'administration ou les plans d'organisation, que des procédures de plainte pour les usagers; en somme, différents articles qui nous permettent vraiment de faire la transition entre les deux systèmes.

Mais, ce qui est le plus important, M. le Président, je pense qu'il faut retenir que, maintenant, par ce projet de loi 17 qui est une loi d'application, cette loi va permettre à la population inuit du territoire de profiter du renouveau et des avantages de la réforme de la santé et des services sociaux. Nous avons étudié ce projet de loi en commission parlementaire, le 24 mai; aucun amendement ne fut apporté par les parlementaires au niveau de cette loi-là. Et, donc, M. le Président, j'ose espérer que, de façon unanime, les parlementaires adopteront cette loi 17, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, Mme la ministre. Donc, il n'y a pas d'autres intervenants sur ce projet de loi. Alors, est-ce que le projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté. Très bien. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Doyon: Maintenant, je vous demanderais d'appeler l'article 33.


Projet de loi 31


Adoption

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Alors, l'article 33. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse. Alors, Mme la ministre.


Mme Lucienne Robillard

Mme Robillard: M. le Président, nous sommes à l'étape finale de l'adoption du projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse. M. le Président, la Loi sur la protection de la jeunesse est une loi fort importante au Québec. Il faut se rappeler que nous l'avons adoptée dans cette Assemblée nationale en 1977, que nous l'avons mise en application en 1979.

À ce moment-là, quand nous avons décidé d'avoir au Québec une Loi sur la protection de la jeunesse, il était très clair que nous avions des objectifs de protéger, d'abord et avant tout, l'enfant. Et nous pouvons être fiers de cette loi que nous avons au Québec, M. le Président. Lors de son adoption, en 1979, je me souviendrai que, moi-même, j'étais dans la pratique, dans la clinique au niveau des services sociaux. Et je me rappelle très bien comment cette loi avait été bien accueillie par tous les intervenants et les intervenantes sociaux, mais, en même temps, avait bouleversé complètement leurs façons de faire et leurs méthodes d'approche au niveau des enfants et au niveau des parents, je dois vous dire.

Donc, c'est une loi qu'on a mise en application au Québec en 1979, avec des nouvelles instances, avec la création du poste de directeur de la protection de la jeunesse, avec un mandat très particulier pour protéger nos jeunes au Québec. On a créé le Tribunal de la jeunesse. Et, en 1984, on a fait un premier bilan de cette loi et on a apporté des modifications suite à une commission parlementaire spéciale.

(21 heures)

Mais, par la suite, M. le Président, il y a eu différents rapports, parce que le domaine de la protection de la jeunesse est un domaine tellement important pour notre société qu'on se doit de suivre l'évolution de cette loi de façon régulière. On a eu ce qu'on appelle le rapport Harvey 1, le rapport Harvey 2, et d'autres analyses qui se sont poursuivies. Mais, il y a quelques années – en 1992, pour être plus précise – le ministre de la Justice et le ministre de la Santé et des Services sociaux confiaient un mandat très clair à un groupe de travail, qui était présidé par le juge en chef adjoint de la Cour, Me Jasmin, pour étudier les difficultés d'application de cette loi ou, à tout le moins, regarder s'il y avait des écarts dans l'application de la loi dans différentes parties de la province. Et le juge Jasmin nous a déposé un rapport, le fameux rapport Jasmin dont tout le monde parle, sur l'application de la Loi sur la protection de la jeunesse.

Suite au dépôt de ce rapport, M. le Président, ce que nous avons fait, premièrement, nous l'avons analysé au sein du ministère de la Santé et des Services sociaux, la même chose au niveau de la Justice. Nous avons commencé à envisager certaines modifications législatives telles que suggérées par le rapport Jasmin et nous sommes allés consulter les gens qui sont sur le terrain, autant les intervenants sociaux que les intervenants du milieu judiciaire, pour voir si oui ou non on retenait, au plan législatif, les recommandations qui nous étaient faites.

Dans le rapport Jasmin, M. le Président, il y avait comme trois volets importants. Le premier volet touchait au principe même de la loi et aux objectifs poursuivis par cette loi. La deuxième dimension, c'était l'intervention sociale. La troisième dimension, l'intervention judiciaire. Dans les consultations qui ont été faites, se sont dégagés très rapidement des consensus sur les deux premiers volets. Quant au troisième volet, c'est toujours un volet qui est sous analyse présentement, qui est beaucoup plus global, qui touche toute l'intervention judiciaire. Mais, M. le Président, étant donné que c'est un projet de loi qui touche la protection de nos jeunes, nous avons décidé, comme gouvernement, d'apporter immédiatement des modifications, de façon particulière, au niveau des principes et des objectifs de la loi et de l'intervention sociale pour, justement, améliorer toute l'approche qui est faite au niveau de la protection des enfants.

M. le Président, l'Opposition, en particulier le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, a commencé à le décrire en disant: Ce n'est qu'un demi-projet de loi. Pourquoi? Parce qu'il y avait moins de modifications apportées au niveau de l'intervention judiciaire. M. le Président, il faut se rappeler que ce sont des modifications à une loi qui existe déjà. Toutes les améliorations nécessaires se doivent d'être apportées immédiatement. Si le consensus ne se dégage pas présentement pour les changements à apporter au niveau de l'intervention judiciaire, attendons. Mais, au niveau de l'intervention sociale et au niveau des principes et des objectifs de la loi, c'était très clair – les intervenants sur le terrain nous le disaient – que nous avions besoin de repréciser très clairement et de compléter dans la loi toute la dimension des principes et des droits des enfants, ce que nous avons fait avec le projet de loi 31.

M. le Président, on dit dans ce projet de loi, de façon très claire, quel est l'objectif de cette loi: mettre fin à toute situation de compromission quant à la sécurité ou au développement de l'enfant. Maintenant, quand on agit sous l'égide de cette loi, nous devons le faire avec certains principes et certains objectifs qui nous guident.

Là, M. le Président, et ça, c'est une nouveauté dans la loi, nous avons émis un certain nombre d'objectifs: que tous les intervenants qui agissent sous le couvert de cette loi doivent tenir compte, bien sûr, de la situation de l'enfant, en premier lieu; de traiter cet enfant-là avec équité et compréhension, dans le respect de la dignité et de son autonomie; bien sûr, de s'assurer que l'enfant comprend aussi les informations et les explications qui se doivent de lui être données; mais, aussi, les parents.

Là, M. le Président, je vais ouvrir une parenthèse. Tout ce projet de loi 31 nous fait remettre, je pense, là où ça doit être fait la responsabilité des parents, de façon précise, au coeur de la loi. Nous avions l'objectif, en 1979, de protéger les enfants. Oui, on se doit de protéger les enfants, mais en même temps on doit reconnaître, dans cette loi, que la responsabilité première de la protection des enfants appartient aux parents, que les parents se doivent de participer les premiers à la protection des enfants, donc, aux mesures mises de l'avant par le directeur de la protection de la jeunesse. Je dirais, ramener un certain équilibre entre, d'une part, la protection des enfants et, de l'autre côté, la responsabilité parentale. Donc, redonner aussi aux parents leur place à l'intérieur de ce projet de loi.

Alors, tout au long du projet de loi, nous le voyons, nous avons réajusté les articles en conséquence pour que les parents aient leur place. Nous spécifions de façon très précise ce que le directeur de la protection de la jeunesse doit faire par rapport aux parents: leur donner l'information, les impliquer dans les décisions, etc. Vraiment, les impliquer, dans le fond, dans la notion de protection des enfants.

Alors, M. le Président, nous avons donc clarifié les principes et le droit des enfants, la place des parents en tant que tels, mais nous avons aussi abordé toute la question de l'intervention sociale, où nous devions apporter certaines modifications. Je pense, de façon particulière, à toute la question des mesures volontaires. Outre le fait que nous avons apporté des clarifications sur la notion d'entente et de mesures volontaires, nous avons, à l'intérieur du projet de loi 31, statué aussi sur la durée des mesures volontaires. Vous savez, M. le Président, quand un enfant est signalé au directeur de la protection de la jeunesse et qu'il retient ce signalement, par la suite, il n'est pas obligé de judiciariser, entre guillemets, donc de saisir le tribunal de la situation de l'enfant. Il peut convenir avec l'enfant et les parents de mesures pour mettre fin à la compromission de l'enfant.

Par ailleurs, il n'y avait pas de délai au niveau des mesures volontaires. Donc, elles pouvaient être renouvelées de façon, je dirais, assez longues dans certains cas. Ce que nous avons fait dans ce projet de loi 31, c'est de limiter les mesures volontaires, de permettre une entente d'un an, de permettre une nouvelle entente d'une autre année, donc un maximum de deux ans. Si, après deux ans, la sécurité ou le développement de l'enfant est toujours compromis, alors, là, le directeur de la protection de la jeunesse se verra dans l'obligation de saisir le tribunal: il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans le cadre des mesures volontaires.

Mais nous avons été plus restrictifs dans le cas des mesures volontaires qui impliquent l'hébergement d'un enfant de moins de 14 ans. Une fois que la première entente est terminée, donc un délai d'un an, le renouvellement, la nouvelle entente n'est permise que sur une période de six mois. Vous comprendrez bien, M. le Président, que, dans le cas d'hébergement des enfants, donc de placement d'enfants, on se doit d'être plus prudents en termes de durée. On le dit, d'ailleurs, dans cette loi; la notion du temps chez un enfant est différente de la notion d'un adulte. Six mois dans la vie d'un enfant, c'est très différent de six mois dans la vie d'un adulte, encore plus quand on parle d'un placement d'enfants. Donc, on doit tenir compte de la notion de temps, non seulement dans les mesures qu'on met de l'avant pour l'enfant, mais aussi dans la diligence qu'on a pour mettre en application ces mesures-là, et on le reconnaît à l'intérieur du projet de loi 31.

C'est la même chose, M. le Président, dans le projet de loi 31, nous donnons l'obligation au directeur de la protection de la jeunesse de réviser la situation de tous les enfants placés à tous les ans. On se souviendra que nous avions une mesure dans cette loi qui obligeait le directeur de la protection de la jeunesse à réviser la situation des enfants placés à tous les deux ans. Cet article n'avait pas été mis en vigueur, M. le Président. Cette fois-ci, non seulement nous le mettons en vigueur, mais nous réduisons le temps, nous obligeons à une révision. Même les enfants qui ne sont pas placés en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, même dans ces cas-là, les situations devront être révisées par le directeur de la protection de la jeunesse.

Je pense qu'il faut faire très attention quand on décide d'utiliser une mesure de placement d'enfant, c'est-à-dire qu'on le sort de son milieu familial naturel pour le mettre dans un autre milieu. On se doit, après un an, d'avoir une révision officielle par des personnes en autorité pour statuer si, oui ou non, la sécurité ou le développement de cet enfant-là est compromis, et vous le voyez à l'intérieur de ce projet de loi, M. le Président.

Il y a aussi d'autres mesures qui ont été apportées pour améliorer toute cette intervention sociale au niveau de l'enfant, mais j'en nommerais une autre peut-être, M. le Président, avant de terminer, c'est toute la question du régime de confidentialité à l'intérieur du projet de loi sur la protection de la jeunesse. Vous savez que le directeur de la protection de la jeunesse détient des informations fort importantes quand il étudie le signalement d'un enfant ou quand il décide de retenir une situation et de s'en occuper. Cette information-là est strictement confidentielle, à moins que l'enfant, s'il a 14 ans ou plus, ait donné son autorisation, ou que les parents donnent leur autorisation si l'enfant a 14 ans ou moins, ou s'il a un ordre du tribunal.

Le juge Jasmin a étudié cette question de très près et nous a fait la recommandation – et c'est ce que nous avons apporté dans le projet de loi 31 – de permettre, dans certaines situations exceptionnelles, au directeur de la protection de la jeunesse, de pouvoir passer outre à ce régime de confidentialité et d'être capable de saisir soit le Procureur général soit un corps de police dans les cas urgents où la gravité de la situation le demandait ou dans des cas où les personnes qui ont abusé de l'enfant sont ce qu'on appelle des tiers abusifs – ce sont des gens différents des parents, des tierces personnes – et qu'à ce moment-là le directeur puisse passer outre au régime de confidentialité de base qui est quand même reconnu au niveau du projet de loi 31.

(21 h 10)

M. le Président, il y a toute une autre série d'améliorations qui ont été faites aussi, même dans les situations où le signalement d'un enfant n'est pas retenu, où le directeur de la protection de la jeunesse... non pas le signalement, mais quand on a mis fin aux mesures volontaires, où le directeur de la protection de la jeunesse a des obligations d'offrir des services aux parents, de les orienter en conséquence dans le réseau de la santé et des services sociaux. C'est, en somme, pour améliorer notre loi existante.

Quand nous avons procédé à la commission parlementaire, M. le Président, nous avons bonifié ce projet de loi avec la collaboration des députés ministériels et des députés de l'Opposition. Nous avons travaillé, je pense, avec minutie pour essayer de bonifier davantage ce projet de loi. Nous avons réussi à le faire dans plusieurs articles. Et c'est ce pourquoi, M. le Président, je suis très fière de présenter aux membres de cette Assemblée l'adoption finale de ce projet de loi qui modifie la Loi sur la protection de la jeunesse, et qui prouvera que la jeunesse est toujours prioritaire pour les parlementaires. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, Mme la ministre. Je vais maintenant reconnaître M. le député d'Anjou pour son temps qui est à sa disposition, environ 30 minutes, je crois. M. le député d'Anjou.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Tremblay): Pardon? Je m'excuse. Je m'excuse, M. le député d'Anjou, vous avez une heure à votre disposition.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. Vous comprendrez, je pense, que je ne prendrai pas mon heure sur ce projet de loi; nous en avons abondamment débattu. Disons qu'il n'y a pas beaucoup de points de désaccord. Je pense qu'il n'y a aucun point de désaccord entre l'Opposition et le côté ministériel relativement à ce projet de loi. Comme l'a dit la ministre, je pense qu'on peut être très fiers de notre Loi sur la protection de la jeunesse qui avait été adoptée en 1977 et qui a été mise en vigueur en 1979.

Je pense qu'encore une fois le Québec a démontré qu'il sait faire les choses relativement à toute la gestion, à toute la législation qui touche notre jeunesse, M. le Président, et je pense qu'à ce niveau-là les autres provinces, les autres parties du Canada – pour l'instant, nous en faisons toujours partie – les autres provinces envient la situation du Québec et l'approche du Québec en matière de législation en matière de jeunesse.

J'aimerais peut-être corriger un point qu'a mentionné la ministre tout à l'heure quand elle disait qu'immédiatement le gouvernement avait réagi suite au rapport Jasmin. Il faut comprendre que c'est en 1992 que le rapport Jasmin a été déposé, non pas qu'on a confié le mandat au juge Jasmin, mais c'est en 1992 que le rapport a été déposé. Donc, deux ans et demi plus tard, en 1994, on se retrouve avec la suite, finalement, on pourrait dire, l'aboutissement du rapport Jasmin. Donc, on ne peut pas dire que la réaction du gouvernement relativement aux recommandations du rapport Jasmin a été immédiate, deux ans et demi. Mais il faut comprendre aussi que le rapport Jasmin est un rapport volumineux, 146 recommandations. On peut comprendre, à ce moment-là, M. le Président, que de traduire ces recommandations, ces 146 recommandations, en éléments d'articles de loi, ce n'est pas toujours évident, et on peut, à ce moment-là, mieux comprendre le délai de deux ans et demi qui s'est écoulé entre le moment du dépôt du rapport Jasmin et le moment du dépôt de ce projet de loi.

L'Opposition, tout au long de l'étude de ce projet de loi et lors de l'étude en particulier article par article, a collaboré avec le côté ministériel et avec les ministres concernés. On sait que c'est une loi qui est un peu spéciale, parce qu'il y a deux ministres responsables, on pourrait dire, de l'application de cette loi, à la fois la ministre de la Santé et des Services sociaux et le ministre de la Justice relativement au volet judiciaire. Je pense que les échanges ont été fructueux. On a aussi regardé, comme l'a dit la ministre, avec beaucoup de minutie, article par article, l'application, la volonté, l'intention du législateur, vous savez, cette fameuse intention qui est scrutée par nos tribunaux et recherchée. Et, parfois, M. le Président, on se rend compte que les tribunaux trouvent une intention du législateur et qu'on peut se demander: Mais comment le législateur a pu, des fois, avoir pensé à ce qui a été quelquefois interprété? Alors, c'est pour ça qu'il faut bien faire attention que, quand un article de loi a été élaboré, il atteint le but qu'on a recherché en le créant, cet article.

Alors, on a obtenu les amendements. La ministre a parlé tout à l'heure au niveau de la participation des parents, dans tout le processus au niveau des mesures, au niveau du traitement du cas de l'enfant mineur. Je pense que, oui, on a visé par ces amendements un juste équilibre, car ce qu'on peut reprocher, on pourrait dire, à notre système de justice, c'est que, avec les chartes des droits et libertés, qui, maintenant, gouvernent, on pourrait dire, l'ensemble de nos décisions judiciaires, on en est plus maintenant enclins à donner des droits. Mais on oublie parfois les devoirs et les obligations qu'ont les gens envers la société, qu'ont les gens envers les personnes dont ils sont responsables. Et je pense que, oui, ce juste équilibre sera justement dans nos projets de loi, dans nos lois, de faire en sorte que, justement, on parle de cette notion de devoir, qu'on parle de cette notion de responsabilité, parce que ce n'est pas tout de donner des droits. Si on ne fait que donner des droits individuels, à ce moment-là, on peut arriver à des situations assez aberrantes dans notre système judiciaire.

L'autre mesure dont on a fait mention, celle de mettre une limite d'une durée d'un an relativement aux mesures qui sont imposées relativement au cas d'un jeune, je pense, encore là, que c'est tout à fait souhaitable d'avoir mis ce délai de révision afin de voir si la mesure est toujours appropriée relativement à la situation vécue par le mineur.

Il faut évidemment déplorer le fait qu'au niveau de l'intervention judiciaire il y a très peu de modifications apportées à la Loi sur la protection de la jeunesse. Car, dans le rapport Jasmin – il faut dire que c'est le premier rapport Jasmin, puisqu'il y en a un deuxième qui va faire un bilan de l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants – dans ce premier rapport Jasmin, il y avait de nombreuses recommandations qui touchaient le volet judiciaire, le volet de l'intervention judiciaire. Alors, on se serait attendu, dans ce projet de loi, à avoir, justement, d'une façon concrète, des articles là-dessus. Je comprends que, sur le terrain, ce n'est pas facile d'avoir des consensus, surtout au niveau des différents intervenants dans ce domaine-là. Ce n'est pas facile, le ministre de la Justice en a fait part. On a eu un échange là-dessus, mais, où on diffère au niveau de l'approche, c'est que nous pensons que, quand il n'y a pas de consensus, il faut, à ce moment-là, un peu forcer le débat. Nous aurions voulu, à ce moment-là, peut-être un avant-projet de loi ou sinon des articles tout simplement proposés, quitte à ce qu'ils soient retirés si on voit qu'on ne réussit pas à faire consensus autour de ces articles-là. Mais, quand on n'a pas consensus, il faut faire quelque chose. Il faut, à un moment donné, que le ministre de la Justice prenne ses responsabilités et dise: D'accord, on va modifier la loi, on va forcer le débat un peu sur ces questions.

Et, suite à l'échange que j'ai eu avec le ministre de la Justice, il n'y a rien qui nous permet de penser que, dans un avenir rapproché, justement, ce consensus, qui n'existe pas présentement, va se trouver prochainement. Je ne vois pas quel est l'événement enclencheur qui pourrait faire en sorte que ce consensus existe. Surtout quand on considère que le deuxième rapport Jasmin ne touchera pas ou très peu, mais très peu, l'intervention judiciaire, puisque, avant tout, il va faire un bilan d'application de la Loi sur les jeunes contrevenants. Donc, il ne faut pas s'attendre à ce que ce deuxième rapport Jasmin débloque la situation au niveau des consensus, au niveau de l'intervention judiciaire.

Donc, à ce moment-là, qu'est-ce qu'il va falloir faire, M. le Président? Soit qu'on procède un peu de la même façon qu'on a procédé avec le Code des professions, c'est-à-dire un avant-projet de loi ou projet de loi pour susciter un débat. Je pense que c'est ça qu'il faut faire. On a eu des projets de loi comme ça qui ont été proposés. Je me souviens, en particulier, de la loi sur la magistrature, je pense que c'était le projet de loi 144, qui avait été proposé par le ministre d'alors, le ministre Rémillard, et qui, à ce moment-là, était loin de faire un consensus. Mais le projet de loi a été présenté. Il y a eu un échange. On s'est aperçu qu'on ne s'entendait pas à la fois sur la finalité et sur les moyens qu'on voulait y mettre. Et ce projet de loi a été retiré, mais ç'a au moins forcé des réactions, on a obtenu des réactions de la part de certains membres de la magistrature, on a obtenu des réactions du Barreau. Je pense que ç'a fait quand même avancer le dossier. Et, quand un prochain projet de loi sera déposé, à ce moment-là, je pense qu'il pourra prendre en considération ces réactions qui nous sont venues. Donc, il faut, à ce moment-là, quand il y a une impasse, quand il y a absence de consensus, susciter le débat, forcer un peu le débat pour forcer certaines personnes, qu'on pourrait dire des acteurs clés dans le domaine de cette intervention, à en arriver à des consensus. Alors, c'est la chose, je pense, qu'on peut regretter le plus dans ce projet de loi.

(21 h 20)

Quant au contenu de ce projet de loi, nous avons collaboré, nous sommes d'accord avec le contenu, ce qui est inclus dans ce projet de loi. Quand on parlait de demi-projet de loi, oui, c'est vrai qu'on peut le considérer comme un demi-projet de loi, mais ce n'est pas nécessairement péjoratif, c'est tout simplement, pour nous, qu'il ne contient qu'un volet des amendements qui auraient dû être apportés à la Loi sur la protection de la jeunesse.

Évidemment, une autre déception, on pourrait dire, qu'on constate dans ce projet de loi... c'est un consensus qui était apparu dès 1992 dans le milieu judiciaire et qui touchait tout le domaine de la législation sur la jeunesse. Lors du Sommet de la Justice en 1992, M. le Président, auquel je suis fier d'avoir assisté, à ce Sommet québécois de la Justice, en compagnie de ma collègue, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, il était apparu rapidement un consensus, lors de ce Sommet québécois de la Justice, à l'effet qu'il était urgent de créer au Québec un tribunal unifié de la famille. Alors, vous me direz, M. le Président: C'est quoi, un tribunal unifié de la famille?

Il faut comprendre que, présentement, c'est la Cour supérieure qui applique une législation fédérale relativement au divorce. Donc, si vous divorcez, c'est une loi fédérale qui réglemente, qui régit votre cas de divorce. Si vous vous séparez, M. le Président, c'est une loi provinciale qui va, à ce moment-là, édicter tous les motifs, toutes les conditions de votre séparation. Si vous avez un cas qui implique la protection de la jeunesse, c'est la Cour du Québec, chambre de la jeunesse, qui aura compétence et juridiction relativement au dossier du jeune impliqué. Donc, on peut comprendre, à ce moment-là, qu'il y a des situations qui viennent toucher plusieurs champs de compétence et, quand on veut une intervention cohérente, efficace, je pense qu'il est important de faire en sorte que ce soit le même tribunal qui soit saisi de l'ensemble de ces dossiers, c'est-à-dire divorce, séparation et protection de la jeunesse.

On comprend tout de suite les cas qui peuvent arriver. Quand j'ai pratiqué le droit, M. le Président, pendant près de neuf ans, j'ai constaté, moi, certains de ces dossiers où, justement, on avait à la fois la chambre de la jeunesse, division Cour du Québec... je veux dire, Cour du Québec, division chambre de la jeunesse, et la Cour supérieure qui étaient impliquées en même temps dans un dossier. On avait des parents qui divorçaient et, dans une requête en divorce, il y avait un allégué à l'effet qu'il y avait, relativement à l'enfant, une situation qui compromettait sa sécurité relativement à la situation dans le couple. À ce moment-là, c'est un cas de protection de la jeunesse, signalement au DPJ. Alors, que se passe-t-il avec le dossier de divorce?

Évidemment, quand on en arrive dans le dossier de divorce à délimiter les droits de sortie, les droits de garde de l'enfant, s'il y a un signalement au DPJ relativement à ce qu'un des conjoints a peut-être une relation qui est non souhaitable avec l'enfant, qu'est-ce qu'on fait? Alors, on suspend le dossier de divorce en attendant que le DPJ ait statué. Après ça, on obtient un jugement du DPJ qu'on doit insérer ou qu'on doit inclure et dont le juge qui va prononcer le jugement de divorce avec les conditions devra tenir compte, de ce jugement, et, si on en appelle de ce jugement de la Cour du Québec, chambre de la jeunesse, on peut comprendre, à ce moment-là, qu'on a deux dossiers différents, avec deux juges différents dans le dossier, puis, dans le fond, c'est le même dossier. Dans le fond, c'est le même dossier, ça devrait être le même juge qui devrait avoir à se prononcer, à établir toutes les conditions dans lesquelles l'enfant, maintenant, devra être traité, avec quel conjoint il devra être, et quelles sont les conditions qui devront être imposées relativement au droit de visite, au droit de sortie. Donc, on peut comprendre la nécessité d'un tribunal unifié de la famille.

Le problème, vous le comprendrez tout de suite, commence par un c, c'est-à-dire la Constitution. C'est la Constitution, notre sacrée Constitution, sacro-sainte, je pourrais dire, Constitution. On sait à chaque fois les débats qu'elle a causés. C'est cette fameuse Constitution, M. le Président, qui nous empêche encore de bouger. Sans amendement constitutionnel ou entente constitutionnelle, nous ne pouvons toucher au champ de juridiction de la Cour supérieure et de la Cour du Québec.

Le ministre Rémillard, en 1992, suite au Sommet de la Justice, avait pris l'engagement d'entreprendre, dans les plus brefs délais, des démarches et des négociations avec le gouvernement fédéral pour en arriver rapidement ou prochainement à l'annonce d'un tribunal unifié de la famille. Pas besoin de vous dire qu'on n'a plus jamais entendu parler de ces fameuses négociations. D'ailleurs, on sait, à chaque fois qu'on commence ces négociations, comment ça finit. Alors, on n'a jamais plus entendu parler de ces négociations. Le tribunal unifié de la famille, on peut en rêver, mais ce n'est pas dans le système actuel qu'on pourra en voir le bout. Et, pourtant, c'est un consensus unanime au Québec, qui va au-delà des partis politiques, qui va... Tous les intervenants sont unanimes pour dire qu'un tribunal unifié de la famille sera plus efficace et, oui, s'il faut en parler, moins cher aussi à administrer, puisque ça sera une seule cour, et qui rendra un bien meilleur service à notre système de justice.

Alors, je pense qu'il faut espérer que le prochain gouvernement... Alors, je sais que la ministre dira que ce sera son gouvernement qui le fera. Vous me permettrez, M. le Président, de penser que ce sera le nôtre. Ce sera à la population de décider quel sera le gouvernement qui aura le mandat de faire bouger ce dossier. Mais vous comprendrez, M. le Président, que le prochain gouvernement devra s'attaquer à ce problème, qui est de créer, de constituer un tribunal unifié de la famille. Il en va de l'intérêt de nos enfants. Il en va, je pense, de l'intérêt de notre système de justice.

En terminant, M. le Président, oui, ce projet de loi a, je pense, été bien reçu par l'Opposition. Il y a eu un esprit de collaboration tout au long de ces travaux. J'espère qu'il pourra être mis en vigueur le plus rapidement possible, parce que, vous savez, ce n'est pas tout de le sanctionner, ce n'est pas tout de l'adopter. On a un projet de loi... Je me souviens encore, le projet de loi 33, je pense, qui vise la perception automatique des pensions alimentaires, mais sans retenues à la source – nuance. Ça fait cinq ans que ce projet de loi, M. le Président, a été adopté par cette Assemblée, et il n'est toujours pas en vigueur – cinq ans. Alors, vous comprendrez que j'espère... Je ne crois pas que ce projet de loi prenne cinq ans avant d'être mis en vigueur, mais j'espère qu'il pourra être mis en vigueur dans les plus brefs délais, car, comme l'a dit la ministre de la Santé et des Services sociaux, quand il en va de la santé de nos enfants, de la sécurité de nos enfants, nous devons agir rapidement. Et j'espère que ce projet de loi pourra, à ce moment-là, être mis en vigueur le plus rapidement possible. Il en va, je pense, de l'intérêt de tout le monde. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Maintenant, il n'y a pas d'autre intervenant. Donc, ceci met fin au débat. Est-ce que le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse est adopté?

M. Bélanger: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté, très bien. M. le leader du gouvernement.

M. Doyon: Je vous demanderais de suspendre pour quelques minutes, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Les travaux sont suspendus pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 28)

(Reprise à 21 h 31)

Le Vice-Président (M. Tremblay): Mmes, MM. les députés, si vous voulez reprendre vos places, s'il vous plaît, nous allons reprendre nos travaux. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Oui, M. le Président, vous voudrez bien appeler l'article 23.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le leader adjoint. Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 28, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, ainsi que l'amendement transmis par M. le ministre des Affaires municipales...

Mme Juneau: ...

Le Vice-Président (M. Tremblay): Pardon?

Mme Juneau: M. le Président, je m'excuse. Est-ce que c'est possible de passer le projet de loi 30 pour commencer, s'il vous plaît? C'est parce qu'il n'y a qu'un amendement...

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Il y a consentement pour qu'on revienne au projet de loi 30. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, si vous voulez donner votre consigne, s'il vous plaît.

M. Doyon: Alors, nous allons suspendre le débat à l'article 23 de notre feuilleton. Je vais vous demander d'appeler l'article 25 du feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi 30


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le leader adjoint du gouvernement. Je vais appeler l'article 25. Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 30, Loi modifiant la Loi sur les immeubles industriels municipaux. Alors, je suis prêt à entendre un premier intervenant. Il n'y a pas d'intervenant? Très bien. Alors, ceci met fin au débat.


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi 30, Loi modifiant la Loi sur les immeubles industriels municipaux, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté. Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Alors, nous allons revenir à l'article 23.


Projet de loi 28


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et de l'amendement du ministre

Le Vice-Président (M. Tremblay): Donc, nous sommes prêts à entreprendre l'article 23. Très bien. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 28, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, ainsi que l'amendement transmis par M. le ministre des Affaires municipales en vertu de l'article 252 du règlement. Cet amendement est déclaré recevable. Est-ce qu'il y a des interventions? Il n'y a pas d'interventions. Très bien. Alors, l'amendement proposé par M. le ministre des Affaires municipales est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Il est adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Oui, M. le Président, je vous demanderais de bien vouloir accorder une suspension de quelques minutes, s'il vous plaît.

Mme Juneau: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui.

Mme Juneau: ...vous avez demandé si l'amendement était adopté. L'amendement est adopté, mais le projet de loi, tel qu'amendé...


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui. Je m'excuse, Mme la députée, vous avez bien raison, il aurait fallu rajouter ceci. Alors, après l'adoption de l'amendement, le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi 28, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Il est adopté. Très bien. Voilà. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Alors, je vous fais la même demande que je vous faisais il y a un instant, c'est que vous nous accordiez une suspension de quelques minutes.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, les travaux sont suspendus pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 34)

(Reprise à 21 h 54)

Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, Mmes et MM. les députés, si vous voulez vous asseoir. Nous allons reprendre nos travaux.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Si vous voulez bien, M. le Président, appeler l'article 21 du feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi 26


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements de l'Opposition

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le leader adjoint. Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 26, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et d'autres dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest, aux articles 75, 76.1 et 78 du projet de loi.

Les amendements de M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest aux articles 75 et 78 du projet de loi sont déclarés recevables. En ce qui concerne l'amendement de M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest à l'article 76.1 du projet de loi, en application des dispositions de l'article 193 du règlement, j'en corrige la forme pour le rendre recevable. En l'occurrence, le nouvel article introduit par M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest portera le numéro 76.01 au lieu de 76.1 qui avait déjà été donné en commission de l'aménagement et des équipements lors de l'étude détaillée du projet de loi.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur les amendements? Il n'y a pas d'interventions? M. le ministre.

M. Ryan: Sur le rapport, je n'ai pas d'intervention pour tout de suite, mais je crois comprendre que le député d'Abitibi-Ouest vous a fait part de propositions de modification sur lesquelles, après qu'il se sera exprimé, je voudrai réagir.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Je vais reconnaître M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le député.


M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Il fallait que j'attende d'abord si le ministre voulait s'exprimer sur le rapport; moi, je ne pouvais pas le savoir, il ne me l'a pas dit. Là, il m'indique qu'il ne veut pas intervenir. C'est normal que ce soit celui qui vous parle qui intervienne.

Alors, sur le rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 76 article par article, je ne veux pas faire une très longue... projet de loi 26, pardon, oui. Je ne veux pas faire une très longue intervention, mais je veux indiquer quand même, M. le Président, que le projet de loi 26 est un projet de loi qui donne suite à l'invalidation du projet de loi 145 sur la fiscalité municipale. Suite au jugement Tessier, le législateur a fait le choix, à la demande des municipalités du Québec, dans une très forte majorité, de donner une assise juridique plus certaine aux municipalités du Québec qui voudront bien se prévaloir de l'usage de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels. C'est essentiellement le contenu du projet de loi 26 que je ne reprendrai pas ce soir parce que nous ne faisons qu'un rapport de ce qui s'est passé en commission.

Je me dois cependant de rappeler que, quant à nous, on persiste dans l'erreur. J'ai eu l'occasion de le dire dans les remarques préliminaires, on a eu l'occasion d'entendre un certain nombre de groupes qui avaient des revendications à faire valoir quant au projet de loi 26. Il y a cinq ou six représentants d'organismes et de groupes qui sont venus donner leur point de vue: l'Institut de développement urbain est contre le projet de loi 26; le regroupement des associations des propriétaires contre la taxe d'affaires est venu nous dire qu'il était contre le projet de loi 26; l'Union des artistes qui aurait souhaité, et j'y reviendrai tantôt, qu'on prenne en considération leurs demandes qui ne m'apparaissaient pas terribles et on s'est rendu compte que le législateur a fait le choix de ne pas prendre en considération leurs demandes; le réseau des garderies qui aurait souhaité que le législateur soit plus sensible à leurs demandes. Mais, essentiellement, M. le Président, je veux rappeler dans quelques phrases que l'attitude de celui qui vous parle et de l'Opposition officielle, tout en étant en désaccord avec le projet de loi 26, ça a été de travailler sérieusement article par article pour apporter un certain nombre d'allégements qui étaient souhaités par des gens qui étaient en désaccord avec le projet de loi. Je pense en particulier à réduire le pourcentage de taux d'inoccupation des loyers commerciaux vacants. On a réduit le taux de 25 %, qui était proposé à 20 %, et, à ma connaissance, il s'agit d'une bonification intéressante.

Il y a eu également l'arrivée d'un amendement pour lequel le législateur a décidé de donner suite, c'est toute la question d'un plafonnement quant à la hausse des taxes suite à l'affaissement du rôle d'évaluation, et je pense que c'était important que le législateur soit sensible à cette légitime demande.

C'est à peu près les modifications les plus importantes et significatives. Il restait un gros morceau du projet de loi 26 qui est toute la question de redonner les, je vais appeler ça les titres de noblesse aux créances des municipalités qui, par le Code civil... Comme on a changé la notion de privilège concernant les actes, le législateur a donné suite à notre demande. Nous avons reçu les amendements sur la fin, et le ministre accepte de faire, lors de l'adoption finale du projet de loi 26 en plénière, l'étude de ces articles-là. Donc, je ne les commenterai pas pour l'instant parce qu'on aura l'occasion de les étudier en plénière.

(22 heures)

Essentiellement, dans les propos que je veux tenir aujourd'hui, c'est qu'il y a également une omission, et, là-dessus, j'aimerais ça, avoir l'attention du ministre. Je reste un peu surpris que le ministre n'ait toujours pas l'intention – à moins qu'il l'ait et qu'il ne me l'ait pas communiquée, ça c'est possible – de déposer des amendements au projet de loi 26 concernant les actes translatifs. Dans les actes translatifs, la ville de Montréal, la ville de Laval, l'Union des municipalités du Québec souhaitent que le ministre apporte des modifications au projet de loi 26 afin que la loi concernant les droits sur les mutations immobilières... pour que, en plus des actes se rapportant aux droits sur ces dites mutations, les autres actes enregistrés soient également acheminés aux municipalités, par l'officier de la municipalité... Je ne ferai pas, à ce moment-ci, lecture de lettres de la ville de Laval, de l'UMQ, de la ville de Montréal, mais je fais juste indiquer, M. le Président, à ce moment-ci, que ça aurait été l'occasion, lors de l'étude article par article, de donner suite à cette demande légitime. Quant à nous, pour ce qui est des actes translatifs, on est toujours ouverts, disponibles à regarder un certain nombre d'amendements qui permettraient de donner suite à une demande d'un certain nombre d'intervenants. Quand c'est l'Union des municipalités, ville de Montréal et ville de Laval – et là je ne veux pas le faire ici mais, à ma connaissance, la ville de Québec aussi était d'accord – il me semble qu'on le prend en considération parce que ça constitue, en tout cas en termes d'importance, plus des deux tiers de l'importance des municipalités du Québec.

Il y a également une remarque qui m'a été faite, qui a été faite au ministre – et le ministre aime mieux écouter ses conseillers juridiques du ministère, c'est son droit le plus strict, mais, là-dessus, je ne suis pas d'accord – c'est la demande, entre autres, qui a été acheminée à vos bureaux par, encore là, la ville de Laval, concernant l'article 56, paragraphe 3°, où on a suggéré, contrairement à ce que les officiers du ministère maintiennent, parce que c'est eux qui ont ajouté le troisième paragraphe, de retirer ce troisième paragraphe puisqu'on a fonctionné pendant des années sans ce dispositif, et, selon l'avis de plusieurs que j'ai consultés, ça va être très difficile d'application parce qu'il n'y a pas là une application qui nous permet de conclure à ce que j'appellerais quelque chose de plus souple. Le paragraphe 3° de l'article 56, M. le ministre, c'est un paragraphe qui a été ajouté à la suggestion de vos officiers qui vous conseillent. C'est une suggestion qui provient du ministère des Affaires municipales. Ça fait probablement l'affaire du ministère des Affaires municipales. Mais le sujet – juste une minute, de mémoire, parce que je ne veux pas prendre l'ensemble des notes, mais on me l'a expliqué assez longuement ce matin – à ma connaissance, c'est toute la question des informations liées au rôle d'évaluation. Le troisième paragraphe de l'article 56, ce n'est pas compliqué, on voudrait qu'il soit retiré. La demande était très claire, la lettre qui le soutient est très explicative à cet effet-là et j'aurais souhaité que le ministre en prenne compte, en prenne note...

Une voix: En tienne compte.

M. Gendron: ...en tienne compte. Merci, ma collègue. C'est à peu près les ajouts dont j'aurais souhaité que le ministre tienne compte.

Et le dernier élément que je veux peut-être faire remarquer avec plus d'insistance, c'est cette fameuse demande qui a été acheminée, tant au ministre des Affaires municipales qu'à celui qui vous parle, concernant les artistes en arts visuels qui ont démontré on ne peut plus clairement, lors de la commission parlementaire, que d'aucune façon on ne peut interpréter et conclure que ces gens-là font des activités commerciales. Les artistes en arts visuels ne font pas des activités commerciales. Ils font des activités qui n'ont aucune mesure par rapport à des activités commerciales. Ils souhaitaient s'appuyer sur le projet de loi 78 qui a été sanctionné par le même gouvernement, aux articles 2, 7 et 8. Il me semble qu'ils avaient très bien encadré leur demande pour que la surtaxe ne s'applique pas à eux.

Et, moi, je porte toujours leurs demandes. C'est pour ça que, dès le départ, quand vous avez présenté l'étude du projet de loi 26 en faisant rapport de la commission, vous avez reconnu recevables les trois amendements que j'ai proposés. Je voudrais rappeler non pas la quintessence des amendements, mais uniquement le titre, à l'article 75 du projet de loi 26. En ajoutant un quatrième paragraphe à la fin de l'article 75, ça permettrait de soustraire les artistes à l'application de la taxe d'affaires. Et je pense toujours que le ministre devrait donner suite à cette requête légitime.

Même chose à l'article 244.23 introduit par l'article 78 du projet de loi 26. On a présenté un amendement qui a été jugé recevable. Il permettrait, encore là, de soustraire les activités des artistes en arts visuels de la taxe sur les immeubles non résidentiels. Et, toujours par voie de concordance, on a ajouté un autre article, que vous avez changé d'appellation numérique, mais ça ne change pas le fond; c'est également pour faire la corrélation du troisième amendement avec la surtaxe sur les immeubles non résidentiels.

Je persiste à croire qu'il serait important que les législateurs ne renvoient pas la balle dans le camp des municipalités. Le ministre a essayé de nous faire accroire que la ville de Montréal modifierait sa charte et qu'elle accorderait des subventions. Parce que, au moment où on se parle, les villes n'ont pas l'autorité de poser des gestes d'annulation de surtaxes. Elles ont peut-être le droit de verser des subventions, mais c'est une autre mécanique qui complexifie... J'ai reçu une lettre de la ville de Montréal et les informations que j'ai, aujourd'hui, c'est qu'il n'est pas question de modifier la charte de la ville de Montréal pour donner suite à la demande légitime des artistes.

Donc, d'après moi, le seul biais qu'il nous reste, c'est le projet de loi 26 que nous étudions. J'espère que le ministre sera sensible à ces revendications légitimes et que, d'ici l'étape finale qui s'appelle l'adoption du projet de loi en troisième lecture, il saura donner suite à ces diverses demandes. Voilà, M. le Président, les considérations que je voulais faire à ce moment-ci.

C'est évident que, lors de l'étude de l'étape finale du projet de loi 26, quand nous aurons l'occasion de prendre connaissance de ces centaines d'amendements que le ministre devra apporter parce que son gouvernement refuse toujours de faire ce qu'il serait logique de faire, c'est-à-dire modifier le Code civil... Mais, plutôt que de modifier le monument, il préfère, dans la loi de la fiscalité, redonner aux créances privilégiées des villes le rang de privilège qu'elles avaient dans l'ancien Code civil. À l'étape finale, on aura l'occasion, en plénière, de revenir plus fondamentalement sur le fond du projet de loi 26. Mais, pour ce soir, voilà les commentaires que je voulais faire suite au rapport de la commission, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Est-ce que, M. le ministre, vous voulez ajouter quelque chose? Oui. Alors, je vais entendre M. le ministre sur le rapport et ses amendements. M. le ministre.


M. Claude Ryan

M. Ryan: Volontiers, M. le Président. J'ai écouté avec attention le député d'Abitibi-Ouest commenter le projet de loi 26. Je voudrais revenir brièvement sur les principaux sujets qu'il a soulevés.

La disposition principale du projet de loi 26 consiste en la création d'une nouvelle forme de taxation sur les immeubles non résidentiels. La surtaxe sur les immeubles non résidentiels que nous avions instituée en 1991 lors de l'adoption de la loi 145 a été déclarée inconstitutionnelle par un juge de la Cour supérieure de Montréal. Le gouvernement en appelle, évidemment, de cette décision. Mais, avant que les procédures ne soient terminées, il faudra peut-être encore quelques années. En attendant, les municipalités demandaient que nous leur donnions un instrument fiscal capable de leur procurer une sécurité juridique plus grande au plan constitutionnel. La taxe sur les immeubles non résidentiels que nous instituons avec le projet de loi 26 pourra servir de mesure fiscale alternative à la surtaxe sur les immeubles non résidentiels, c'est-à-dire que, là où une municipalité utilisait ou aurait voulu utiliser la surtaxe, mais voudrait pouvoir obtenir les mêmes résultats avec une sécurité juridique plus grande, elle pourra prendre, en lieu et place de la surtaxe, la taxe sur les immeubles non résidentiels.

Le juge Tessier, de la Cour supérieure, avait jugé, encore une fois avec toutes les réserves que j'ai indiquées tantôt, que la loi 145 était inconstitutionnelle en ce qui touche la surtaxe sur les immeubles non résidentiels. Il avait invoqué à l'appui de sa décision certaines caractéristiques dont était assortie la surtaxe, en particulier, ce dégrèvement qui était accordé sur les immeubles où on observait un taux de vacance assez important. Il avait invoqué également la faculté qui était donnée aux propriétaires de modifier pleno jure, de plein droit, un bail déjà en existence, de modifier le bail en cours de réalisation. Il imposait également aux municipalités l'obligation d'accorder des subventions à des organismes qui étaient exempts de la taxe d'affaires, parce qu'ils sont des organismes de charité, de bienfaisance ou de culture. Une autre raison avait également retenu l'attention du magistrat; elle m'échappe pour l'instant.

(22 h 10)

Nous avons fait disparaître de la nouvelle taxe ces caractéristiques qui avaient retenu l'attention du magistrat, et nous croyons offrir, avec cette disposition, aux municipalités qui voudront aller chercher une part de revenu appréciable du côté non résidentiel un instrument qui offre de meilleures garanties de sécurité juridique.

On nous avait fait des représentations à ce sujet-là. En particulier, on est venu nous dire qu'on permet à une municipalité, avec le projet de loi qui a institué la taxe sur les immeubles non résidentiels, d'établir un dégrèvement là où il y a un taux de vacance prononcé. Disons que le taux de la taxe, c'est 1 $ des 100 $ d'évaluation; elle pourrait dire, par exemple: J'introduis un dégrèvement de 5 % ou de 10 % qui permettrait au propriétaire de l'immeuble où il y a un taux de vacance élevé de bénéficier d'un taux de taxe moins élevé. Cette forme de taxation nous apparaît parfaitement défendable au plan constitutionnel.

Mais nous avions dit: Elle pourra s'appliquer facultativement, au gré de chaque conseil municipal concerné, pourvu que le taux minimum de vacance soit de 25 %; c'est 25 % que nous avions mis dans le projet de loi. On nous a dit: C'est trop élevé; là où il y a des vacances de 20 %, de 15 %, vous devriez tenir compte de ça aussi. On a consenti à un compromis; on l'a ramené à 20 %. Si on prenait un taux de vacance de 15 % ou de 10 %, ce qui arrive, c'est que là vous allez être obligés de distribuer des compensations ou des déductions, des abattements de taxe en très grand nombre et, à un moment donné, vous allez donner un abattement de 25 $ ou de 50 $ qui ne rapportera pratiquement rien au propriétaire, en même temps que la ville va perdre des revenus, puis ceux qui ont vraiment un problème sérieux de ce côté-là recevront une compensation d'autant plus légère. Or, nous avons fait un compromis. Nous avons mis le taux de vacance minimum à 20 %, ce qui va permettre de tenir compte d'un bon nombre de cas qui eussent été ignorés autrement.

Alors, voilà pour la taxe sur les immeubles non résidentiels. Nous offrons aux municipalités intéressées un instrument de travail très intéressant. Je causais tantôt avec le député de Hull qui représente une ville où sont situés plusieurs immeubles fédéraux. Comme nous le savons tous ou comme nous devrions peut-être le savoir, le gouvernement fédéral ne payait pas la taxe d'affaires autrefois. Il ne payait pas la taxe d'affaires. Il se considérait exempt. Il avait décidé ça de sa propre autorité. Mais la surtaxe sur les immeubles non résidentiels, il la paie au complet. La nouvelle taxe sur les immeubles non résidentiels, il va la payer, la même chose. Je suis content, parce que, là, il avait décidé de geler ses «en lieu» de taxes l'année passée et, avec le nouveau gouvernement libéral, il a décidé de payer le plein montant et de tenir compte de l'augmentation raisonnable que dicte la hausse du coût de la vie. Alors, de ce point de vue là, pour les municipalités, il y a des gains très appréciables.

On avait porté à mon attention, M. le Président, les craintes qu'entretiennent, non sans raison, les propriétaires d'immeubles non résidentiels, en particulier dans la région de Montréal, dans l'attente du nouveau rôle d'évaluation qui doit être déposé en septembre prochain en vue des trois prochains exercices financiers des municipalités, en particulier sur l'île de Montréal où l'on trouve quand même près du tiers de la population de la province de Québec. Alors, là, on anticipe qu'il y aura des baisses de valeur très importantes sur les immeubles non résidentiels. Il y en aura également sur les immeubles résidentiels, mais dans une proportion beaucoup moins prononcée.

Alors, là, on a été obligés de faire des projections. À supposer que le fardeau fiscal demeure exactement ce qu'il est actuellement, il en résulterait une augmentation de charge très prononcée dans certains cas. Si on commence à jouer avec les taux de taxation, on risque d'entraîner des réactions très fortes dans certains milieux. Il y a des immeubles qui seront frappés plus que d'autres: s'ils ont perdu plus de valeur et que le taux de taxation demeure le même, c'est évident que le rendement ne sera pas le même du tout.

Alors, pour parer aux difficultés qui pourraient résulter de ces variations prononcées que nous anticipons dans les rôles d'évaluation pour le triennat qui commencera en janvier prochain, nous avons introduit ce que nous appelons une mesure de plafonnement du taux de taxation, du taux d'augmentation. À supposer, par exemple, qu'une propriété soit en butte à une augmentation de 25 % du fardeau fiscal qui pèse sur elle, en vertu de la mesure que nous introduisons, il y aura une augmentation maximum... Il y aura l'augmentation, là, découlant du budget de la municipalité; disons que c'est 2 % ou 3 %, il y aura cette augmentation-là. Puis, par-dessus cette augmentation, il ne pourra pas y avoir plus que 10 % d'augmentation. La municipalité pourra le décider. Et la deuxième année, la même chose, et la troisième année, bien, la différence. Ce qui veut dire que, sur une base de trois ans, toute l'augmentation du fardeau fiscal aurait été absorbée, mais par degrés, par étapes, de manière que le propriétaire de l'immeuble soit frappé de manière moins brutale.

Alors, voilà pour les mesures proprement fiscales. Je pense que nous avons introduit des mesures très intéressantes. Les municipalités, le député d'Abitibi-Ouest le sait très bien, sont éminemment favorables à ces mesures. Il y a certains milieux qui ont fait entendre des protestations vigoureuses, en particulier les grands propriétaires immobiliers et certains représentants d'associations regroupant des propriétaires d'immeubles moins importants. Ils ont eu l'occasion de se faire entendre.

Certains d'entre eux nous ont raconté des histoires à propos de baux qui ne seraient pas terminés ou qui devraient s'échelonner sur des périodes de 10 à 15 ans. Fort heureusement, la démonstration a été faite en commission parlementaire, à partir d'un relevé complet effectué dans la ville de Laval, que les histoires qu'on essayait de nous raconter ne résistaient pas au test de la réalité, que, finalement, les mesures que nous adoptons vont pouvoir s'ajuster très bien. Et ce que ces gens-là oubliaient, c'est qu'il y a bien des ajustements qui ont été faits dans les baux au cours des quatre dernières années. Se rappelant ce qui est arrivé en 1991, les propriétaires, quand ils signent un bail, aujourd'hui, ils pensent à inclure une clause d'ajustement pour les changements dans le fardeau fiscal. Par conséquent, on vivait encore dans le passé, de ce côté-là.

Mais il y a des articles qui ont paru dans certains journaux; il y a des journaux qui sont bien bons pour ça, vous savez. Jamais, jamais il ne leur viendrait la pensée de venir écouter ce qui se dit en commission parlementaire. Le député d'Abitibi-Ouest sait qu'on ne les voit pas souvent. À un moment donné, une semaine ou deux après, ils arrivent avec un commentaire dont la lecture ne fait que révéler leur absence aux délibérations; parce qu'ils verraient que c'est bien plus compliqué que les histoires qu'on est allé leur colporter, là, dans des campagnes de propagande qui n'ont souvent rien à voir avec l'étude objective des dossiers.

Alors, de ce point de vue là, l'étude a été faite, tous les points de vue ont été entendus abondamment. J'ai été déçu de constater que plusieurs, qui avaient participé aux travaux d'une table ronde créée spécialement pour l'examen de ces problèmes, de janvier à mai dernier, après avoir dit qu'ils acceptaient les modifications que nous apportions, sont venus dire en commission parlementaire qu'ils ne voulaient rien entendre. Il y a des gens qui ont deux langages, M. le Président, là: un pendant cinq mois et un autre quand ils pensent avoir une chance de faire fléchir le gouvernement à la dernière minute. Ils sont à la mauvaise adresse quand ils s'adressent à celui qui vous parle; je pense que vous le savez depuis longtemps. Il faut être consistant avec soi-même et, quand on tient un langage, il faut le tenir jusqu'au bout ou, encore, il faut avoir des raisons majeures de tenir un autre langage. Alors, voilà pour cet aspect du problème.

Le député d'Abitibi-Ouest a soulevé quelques sujets sur lesquels je reviendrai brièvement. Il dit: On ignore les demandes des réseaux de garderies pour l'exemption de taxes municipales, en particulier de la taxe d'affaires et des taxes sur les immeubles non résidentiels. D'abord, je dirai au député d'Abitibi-Ouest que le réseau des garderies publiques bénéficie d'exemptions de taxes municipales; il le sait très bien. Ceux qui nous ont approchés sont les propriétaires de garderies privées à but lucratif, et nous avons considéré qu'il n'y avait pas lieu de leur accorder l'exemption demandée.

Nous l'avons fait dans un cas, en 1991, pour des centres d'accueil pour personnes âgées à but lucratif et la raison qui nous a inspirés, c'est que ces centres d'accueil offrent un service résidentiel. Ils pouvaient, par conséquent, être assimilés à des immeubles résidentiels et non pas à des immeubles commerciaux. Je pense que le mot le dit lui-même: ils offrent un service résidentiel. Moi, mon propriétaire, chez moi, exploite sa maison sur une base commerciale. Il ne me fait pas de faveur; le gouvernement ne lui en fait pas non plus, alors il paie la taxe. On dit: La même chose pour ceux-là. Ils paient la taxe foncière générale, mais ne seront pas astreints aux taxes d'affaires et aux taxes sur les immeubles non résidentiels.

On ne pouvait pas appliquer ce raisonnement-là aux garderies parce qu'elles n'offrent pas un service résidentiel. Dans le cas des garderies à caractère public ou non lucratif, il y en a, dans certains cas, qui ont des bureaux, c'est purement administratif. Ça n'a rien à voir avec le service de garderie; c'est un service administratif qu'ils ont, un beau bureau, un édifice qui, des fois, d'ailleurs, comporte des locaux qui sont loués à d'autres pour des fins commerciales. Ceux-là, il n'y a pas de raison qu'ils soient exempts des taxes d'affaires, des taxes sur les immeubles non résidentiels. C'est normal qu'ils les paient comme les autres.

(22 h 20)

D'ailleurs, on va appliquer la même politique aux commissions scolaires, puis aux établissements hospitaliers, sanitaires et sociaux. Ceux qui sont propriétaires d'immeubles loués à des occupants qui y sont installés à des fins d'opérations commerciales ou industrielles vont payer leurs taxes, là. Il est temps que cessent ces situations. Une commission scolaire peut être propriétaire de 15 immeubles loués pour des fins commerciales ou industrielles; elle ne paie pas une cent de taxes municipales là-dessus. Ça n'a pas de bon sens. Il faut qu'elle paie ses taxes comme les autres. Les revenus, c'est elle qui les encaisse. Qu'elle prenne une partie de ces revenus-là pour les donner, en toute justice, à la municipalité, ça, c'est de l'équité fiscale. C'est de l'équité fiscale. Je pense que, sur ce point, le député d'Abitibi-Ouest est d'accord avec nous, d'ailleurs. Ça, c'est un autre ajustement que nous faisons avec le projet de loi.

Le député a parlé à propos des droits sur les mutations immobilières. Quand vous vendez votre maison, il y a une petite taxe qui consiste en une redevance qui va être versée à la municipalité où est située la maison. C'est payé, ça, par l'acquéreur et non pas par le vendeur. Alors, l'acquéreur, quand il a acheté la maison, quelques mois plus tard, en général, il reçoit une note: Vous devez tant. C'est 0,5 % si le montant de la transaction était inférieur à 100 000 $, c'est 1 % si la transaction était de 100 000 $ à 250 000 $ et 1,5 % en haut de 150 000 $.

Alors, pour que la municipalité puisse percevoir ses taxes, il faut bien qu'elle reçoive les documents, les actes de vente, puis ces choses-là. Dans les modifications apportées au Code civil, on n'avait pas prévu ça. Les municipalités nous ont fait des représentations. Nous avons fait des corrections très importantes, l'an dernier, mais il reste encore un certain nombre de documents qui ne sont pas obligatoirement transmis aux municipalités par les bureaux d'enregistrement. Le député d'Abitibi-Ouest a soulevé un point très réel. Je lui ai indiqué en commission parlementaire que, moi, j'ai besoin d'un accord avec le ministère de la Justice pour effectuer cette modification. À ce stade-ci, nous n'avons pas encore pu établir un accord là-dessus. Nous l'avons établi et 80 % à 90 % des documents sont maintenant transmis automatiquement aux municipalités. Il reste cette petite partie que nous réglerons dans les meilleurs délais, mais je ne suis pas sûr d'être en mesure de déposer un amendement qui finirait de disposer de ce problème parce qu'il y a des implications juridiques complexes que le ministère de la Justice, suivant sa responsabilité, veut examiner avec le maximum d'attention.

Il y avait une modification qui nous avait été proposée par les évaluateurs concernant les informations reliées au rôle d'évaluation. Est-ce que c'est la modification qui avait été proposée par l'évaluateur en chef de la Communauté urbaine de Québec, ça? Je crois que nous pourrons très probablement l'introduire en amendement, lors du débat de troisième lecture. Nous l'avons retenue, celle-là, et, à moins que ma mémoire ne me fasse défaut, je pense que nous pourrons y donner suite maintenant, parce que c'est une modification qui nous était apparue raisonnable.

J'ajoute un dernier point à propos des ateliers d'artistes en arts visuels. J'indiquais en commission parlementaire pourquoi nous ne pouvons pas accepter un amendement du type de ceux qu'a proposés ce soir le député d'Abitibi-Ouest. Ces amendements, dans la forme que leur donne le député d'Abitibi-Ouest, font renaître le débat qui a donné lieu au jugement de la Cour supérieure invalidant la loi 145, en particulier les articles qui traitent de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels. Si nous allions introduire un élément comme ça, nous réintroduirions un des quatre éléments qui ont retenu l'attention du magistrat. Si nous gagnons en Cour suprême, je n'ai pas d'objection, on y reviendra en temps et lieu. Je pense bien que le gouvernement s'empressera de confirmer cette taxe avec les caractéristiques qu'elle possédait alors. Mais, là, le but de l'exercice défini par le projet de loi 26, c'est d'éliminer ces obstacles, et la proposition du député les ferait renaître.

On pourrait accepter une modification qui ne traiterait que de l'exemption de la taxe d'affaires là où elle existe encore – elle existe encore dans une couple de centaines de municipalités – mais ça ne réglerait qu'une partie du problème à Montréal et à Québec où la difficulté se pose surtout. Dans le contexte actuel, dans le contexte actuel, je dis bien, la meilleure solution consisterait, pour la ville de Montréal, à demander que, dans sa charte, soit introduite une modification semblable à celle que nous avons introduite dans la charte de la ville de Québec l'an dernier et dont doit se souvenir le député d'Abitibi-Ouest. La ville de Québec l'a accepté, la ville de Québec peut recourir à ce pouvoir que nous lui avons donné d'accorder des subventions, ou des rabais de taxes, ou des crédits fiscaux à des ateliers d'artistes en arts visuels qui sont possédés ou occupés, à titre de propriétaires ou de locataires, par des artistes de cette catégorie professionnelle pour laquelle nous avons énormément de respect.

Comme le problème se pose surtout à Québec et à Montréal, nous pourrions apporter une solution transitoire à cette question pendant que l'examen du dossier procéderait devant les tribunaux et, éventuellement, une solution plus complète applicable partout pourrait intervenir. Mais, dans l'immédiat, le problème se pose à 90 % à Montréal et à Québec. La ville de Québec l'a acceptée l'an dernier et je parlerai demain à la ville de Montréal pour plaider une dernière fois en faveur d'une modification de cette nature. Et, pour aider la ville de Montréal, nous lui avons même transmis un projet de texte qui va exactement dans le sens dont je viens de parler.

Alors, voilà, M. le Président, comment nous envisageons les sujets dont il est question dans le projet de loi 26. Je pense avoir fait le tour convenablement. Nous apportons une souplesse plus grande à plusieurs dispositions de la Loi sur la fiscalité municipale.

Il y a une chose dont je n'ai point parlé. Nous faisons des modifications importantes au Bureau de révision de l'évaluation foncière. Nous supprimons la division qui existait entre Montréal et Québec, une division administrative lourde et tout. Nous simplifions les choses. Nous pourrons ainsi effectuer une meilleure utilisation des ressources de cet organisme très important qui accomplit une mission essentielle dans notre système fiscal municipal. Mais nous avions proposé un réaménagement complet des procédures d'appel et de révision des décisions du BREF. Nous voulions supprimer les appels à la Cour du Québec, réduire les droits d'appel à des questions de droit pouvant découler d'une décision du BREF et donner au BREF un pouvoir de révision de ses propres décisions, moyennant des modalités qui étaient définies dans le projet de loi.

L'Union des municipalités du Québec, le Barreau du Québec, d'autres intervenants nous ont fait voir qu'ils étaient étonnés des modifications que nous proposions. Ils nous ont demandé de les examiner d'une manière plus approfondie, peut-être avec des consultations plus élargies, plus poussées avec les milieux concernés, dans le souci d'écoute que nous avons toujours lorsque le sujet s'y prête, évidemment. Il y a des sujets qui exigent des décisions et non pas de l'écoute ou de la parlote continuelle. Il y a d'autres sujets qui exigent qu'on s'y prête. Voici un sujet de très grave portée à propos duquel il n'y avait aucune urgence d'agir immédiatement. Nous pensions bien faire. Nous avions reçu des recommandations à cette fin, puis nous avions jugé devoir y donner suite, mais, devant les représentations qui nous ont été faites par des représentants éminents du Barreau, nous avons décidé de retirer du projet de loi toutes ces dispositions qui entraînaient des modifications au système d'appel et de révision des décisions, de manière qu'au cours des prochains mois nous puissions conduire une consultation plus approfondie et plus large à la suite de laquelle, je pense bien, on en viendra à un consensus.

Sur des questions fondamentales comme celles-là, la volonté d'un ministre ou d'un parti, même d'un gouvernement, ne peut pas être le seul élément d'une décision. Il faut voir plus large que ça. Il faut vraiment que tout le monde se sente à l'aise avec la protection de droits fondamentaux. Et j'ai bien apprécié les remarques qu'on nous a faites. En particulier, le Barreau du Québec avait envoyé deux représentants qui ont plaidé la cause d'un report de décision avec beaucoup de rationalité, beaucoup d'éloquence et beaucoup de réalisme aussi. Nous avons entendu leur voix, nous en sommes très heureux et je pense qu'un gouvernement qui accepte de modifier un projet de loi, quand on lui fait valoir de bonnes raisons à l'appui d'un tel geste, se grandit au lieu de se diminuer. Alors, voilà l'esprit dans lequel nous avons préparé et débattu ce projet de loi. J'espère que nous l'adopterons dans le même esprit, M. le Président.


Mise aux voix des amendements de l'Opposition

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le ministre. Est-ce que les amendements proposés par M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest sont adoptés?

M. Ryan: Rejetés.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Tremblay): Ils sont rejetés. Très bien. Donc, le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi 26, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

M. Gendron: Sur division.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté sur division. Très bien. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

(22 h 30)

M. Doyon: Maintenant, je vous demanderais d'appeler l'article 24, M. le Président.


Projet de loi 29


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien. Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 29, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives. Je suis prêt à entendre un premier intervenant. M. le ministre des Affaires municipales. Ça va? Vous n'intervenez pas? M. le député d'Abitibi-Ouest et critique de l'Opposition officielle en cette matière.


M. François Gendron

M. Gendron: Très rapidement, M. le Président, je veux vous indiquer que le projet de loi 29... Moi, je ne ferai pas l'historique de tous les aspects du projet de loi 29 mais, pour le monde qui pourrait écouter ça, c'est un projet de loi qui modifiait la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives parce que le gouvernement, c'est normal, dans certaines législations, reçoit un certain nombre de requêtes pour moderniser, rafraîchir et permettre que certaines dispositions, qui n'ont pas toujours la même signification aujourd'hui, compte tenu de l'évolution des choses, correspondent davantage aux besoins et à la réalité des milieux.

Dans les modifications qui ont été proposées, on avait un certain nombre de sujets sur lesquels le législateur voulait apporter des amendements. Je vous donne des exemples: les emprunts municipaux, les fonds d'investissement locaux, parce que, essentiellement, la modification majeure, c'était de permettre la création de solide pour le développement de certaines communautés qui veulent avoir une participation à l'implication de leur localité dans le développement industriel.

Mais l'exemple que je voulais donner, qui est plus significatif, c'est qu'il y a de plus en plus de municipalités qui souhaitent être associées avec le gouvernement dans l'achat d'un certain nombre d'équipements, ce qu'on appelle «la notion des achats regroupés». Et le législateur a tenu compte de la demande des cités et villes du Québec qui voudraient s'associer avec le gouvernement pour participer à un achat plus large, plus collectif, qui fait que les contribuables ont des économies d'échelle suite à ce que j'appelle «des enveloppes beaucoup plus larges d'acquisition de biens». Et, dans ce sens-là, je pense que c'était une demande légitime, et le législateur a décidé d'y donner suite.

Toute la question des systèmes de conversion d'éclairage des rues. On sait qu'il y a de plus en plus de municipalités qui opèrent, fonctionnent avec des systèmes de prêts avec Hydro-Québec et le moment était venu d'apporter des correctifs pour faciliter ces questions-là. Essentiellement, je ne veux pas résumer le projet de loi. Je veux tout simplement vous dire que je pense qu'en commission parlementaire, sur le projet de loi 29, on a fait un travail correct d'adaptation, de rafraîchissement. Le gouvernement a tenu compte d'un certain nombre de demandes qu'on lui a apportées. Comme c'est l'habitude, il a également apporté un certain nombre d'amendements par rapport au projet de loi que nous connaissions.

Souvent les amendements dépassent le nombre d'articles du projet de loi mais, en soi, ce n'est pas une mauvaise habitude, en autant qu'on ne le fasse pas aux 15 jours. Ça démontre un certain souci de sensibilité par rapport à ce que je discute.

Ce soir, pour ce qui est du rapport de la commission, je veux faire une remarque. Je serai peut-être un petit peu plus long lors de l'adoption finale du projet de loi 29. La seule remarque que je veux faire, c'est que le ministre a oublié de donner suite à une demande que je trouve significative. Je vous indique tout de suite que nous sommes d'accord avec cette demande. On s'est adressés au ministre des Affaires municipales, par le biais d'une lettre du président de l'Union des municipalités du Québec, en souhaitant qu'il y ait une modification à la loi 29 concernant le fonds de gestion des liquidités.

Je ne veux pas rappeler la lettre. Le ministre l'a reçue. Il doit sûrement l'avoir lue. Et je ne me rappelle pas qu'il avait des arguments fondés pour ne pas donner suite à cette requête que nous agréons. Nous, nous l'appuyons, et nous pensons que les balises dans la lettre du président étaient là pour indiquer précisément ce qu'il voulait. Je fais juste résumer deux phrases: Qu'il nous suffise de préciser que ces questions portent sur le pouvoir des municipalités d'investir, conjointement avec d'autres, leurs deniers; l'élargissement des types de placements qu'elles pourraient souscrire, et la référence au trésorier comme agent placeur par opposition à un conseiller en placements qui relève directement du conseil.

Le ministre a sans doute pu prendre le temps qu'il lui faut pour faire les évaluations qui importent, et j'aimerais ça, à ce moment-ci, qu'il nous dise s'il a l'intention d'apporter des amendements lors de l'étape finale, parce qu'il me semble que c'est une disposition qui n'a pas été vraiment évaluée au mérite et pour laquelle on n'a pas reçu d'indications de la part du législateur.

Quant au reste des modifications, on l'a dit en commission, ça nous apparaît des modifications heureuses, qui, dans certains cas, simplifient, allègent et précisent davantage ce que j'appelle une loi qui doit être plus moderne et plus adaptée à la réalité des municipalités d'aujourd'hui. Parce que, de plus en plus, je pense, les deux formations politiques souhaitent que les municipalités puissent jouer un rôle de plus en plus significatif. C'est une instance significative, importante, et il faut qu'elles aient les outils législatifs pour s'acquitter des nombreuses missions qu'on leur confie – pas toujours avec les pouvoirs fiscaux qui devraient les accompagner, mais, ça, c'est une autre histoire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le député. Alors, M. le ministre, pour votre temps de réplique.


M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, j'ai toujours du plaisir à écouter le député d'Abitibi-Ouest parce que, même s'il lui arrive, malheureusement, d'être dans l'erreur plus souvent qu'à son tour, il parle rarement en vain, il parle toujours pour dire des choses consciencieuses. Il les dit simplement, et une chose que j'apprécie énormément, c'est qu'il ne les répète pas trois fois: il fait confiance à l'intelligence de l'interlocuteur. Ça nous permet d'avoir, autant en commission parlementaire qu'au salon bleu, des débats qui sont généralement productifs.

La manière, pour le gouvernement, de réagir aux critiques qu'on lui adresse, ça ne peut pas être autre chose que de procéder par voie de modification à ses propres projets. Une critique qu'on m'adresse souvent, on dit que nous faisons beaucoup de modifications à nos projets de loi. Je pense que c'est la rançon de quelqu'un qui écoute. Quelqu'un qui est persuadé qu'il a raison dès le départ et tout, on peut lui dire n'importe quoi et il dit: C'est ça, puis c'est ça! Nous autres, franchement, nous faisons beaucoup de modifications en cours de route. Même, des fois... On avait un cas aujourd'hui, je pense, qui était patent: on faisait allusion à une modification, et le député d'Abitibi-Ouest n'en avait pas eu connaissance. C'était une version préliminaire d'une modification qui, finalement, a été déposée. C'est signe que nous essayons d'avoir un esprit qui évolue continuellement dans la recherche du bien général, au sens le plus élevé du terme.

Le projet de loi 29, M. le Président, est un projet de loi plutôt simple mais qui apporte de nouveau d'importantes améliorations au régime législatif gouvernant le fonctionnement des institutions municipales. Je vous donne un exemple: Moi, j'ai, dans mon comté, deux municipalités qui ont une entente, là, en matière de protection contre les incendies, qui dure depuis déjà plusieurs années, et l'entente arrivait à renouvellement cette année. Là, il faut venir à Québec obtenir l'approbation du ministre des Affaires municipales. Mes services ont examiné l'entente de près et ont trouvé plusieurs poux, plusieurs faiblesses dans l'entente. Moi, j'ai été obligé de dire à la municipalité: Il y a des points sur lesquels votre entente laisse à désirer, il faudrait redresser les choses.

Savez-vous ce que nous faisons avec le projet de loi 29? Deux municipalités qui passeront une entente entre elles ne seront plus obligées d'aller chercher la bénédiction du ministre, sauf si l'entente doit entraîner la création d'une nouvelle régie. En dehors de ça, elles pourront s'entendre, elles vont partager leur service de protection incendie, elles vont se passer leurs appareils pour nettoyer les rues et ces choses-là, elles vont fournir toutes sortes de services réciproques. Elles ne seront pas obligées de venir quêter continuellement la bénédiction de Québec, avec ce que ça comporte de dépenses de conseillers juridiques, de conseillers techniques, etc., et ce que ça comporte de bureaucratie pour nous autres également. Alors, on n'en parle pas beaucoup, mais, ça, c'est un geste concret, pratique. Et, moi, je ne sais pas si le maire de Brownsburg et le maire des cantons de Chatham écoutent ce soir, mais je leur avais dit: Je vais vous en rédiger, des paragraphes, moi, qui seront acceptables au ministre. Je ne serai même pas obligé de faire ça parce qu'ils vont pouvoir le faire eux autres mêmes. Ils sont capables. Cette entente-là marche depuis des années déjà. Et je me disais: Voici, là... Ce n'est pas en fonction d'eux que nous avons fait ça, remarquez bien, mais il nous arrive des douzaines et des douzaines de cas dans une année. Là, les municipalités prendront leurs responsabilités et pourront agir.

(22 h 40)

Les règlements d'emprunt des municipalités, il y a toutes sortes de règles d'approbation ministérielle qui accompagnent le cheminement d'un dossier d'emprunt. On enlève un grand nombre de contrôles ministériels. On va faciliter la tâche pour les municipalités, qui l'apprécient, d'ailleurs, au plus haut point. Tout ce que l'Union des municipalités du Québec a trouvé a réagir, au sujet de ces dispositions qui modifient les règles concernant les règlements d'emprunt, ça a été de dire: Bien, on ne peut pas critiquer, vous avez mis toutes les suggestions qu'on vous avait faites. Et, nous autres, on peut leur dire: Vous avez mis, dans vos suggestions, toutes les idées qu'on vous avait communiquées au cours des années. C'est une espèce d'influence réciproque qui s'exerce et en vertu de laquelle nous arrivons à des améliorations que tout le monde apprécie. Mais les bonnes nouvelles font plus difficilement la manchette que les mauvaises nouvelles. S'il y a un point dans un projet de loi qui accroche, ça peut faire la manchette, ça, pendant deux, trois, quatre jours de suite. Mais, s'il y a 50 points qui marchent, ça n'intéresse pas ou très peu nos amis de la presse, mais ça intéresse le public, parce que c'est lui qui va bénéficier d'une administration municipale simplifiée, plus efficace, moins coûteuse. Et c'est ça que vise le gouvernement continuellement dans les choses qu'il fait.

En matière d'achats municipaux, nous avons déjà introduit des améliorations, il y a deux ou trois ans, permettant à plusieurs municipalités de se regrouper pour effectuer des achats ensemble. Ça leur permet d'effectuer des millions et des millions de dollars de transactions. En passant par leur union respective, en particulier l'Union des municipalités du Québec, deux ou trois municipalités peuvent se mettre ensemble; ça arrive de plus en plus souvent. Savez-vous ce qu'on nous a dit récemment? Il y a des municipalités qui observaient ça. À un moment donné, ils disent toujours, dans le monde municipal: Nous autres, donnez-nous ça, ça coûte bien moins cher, quand c'est nous autres qui le faisons, qu'au gouvernement. Vous autres, ça coûte des fortunes et tout. Savez-vous ce qu'ils ont découvert récemment? Les municipalités d'une certaine importance doivent acquérir des véhicules de police, régulièrement. Alors, ils les achetaient. Ils ont constaté que, quand c'est les municipalités qui les achètent, ça coûte 23 000 $, 24 000 $, 25 000 $ l'unité. Ils ont regardé du côté du gouvernement. Nous autres, nous en achetons seulement pour la Sûreté du Québec. Nous en achetons 300, 400, véhicules par année. Ils ont constaté que la dernière soumission qu'on a retenue l'an dernier, ça nous coûte à peu près 17 000 $, 18 000 $ l'unité. On sauvait 3000 $, 4000 $, 5000 $ par rapport à ce que les municipalités font. Et savez-vous ce qu'ils nous ont demandé: Donnez-nous donc dans la loi le pouvoir de faire nos achats par l'intermédiaire de l'acheteur général du gouvernement. C'est formidable!

Alors, c'est bon de souligner ces faits, parce qu'on entend toutes sortes de légendes, des Jos connaissants, des faux connaisseurs. Il faut leur dire les côtés positifs aussi de l'administration gouvernementale. Et je le dis avec d'autant plus de fierté que ce contrat fut octroyé pendant que j'étais ministre de la Sécurité publique. J'avais veillé de très près à ce que les spécifications, dans les appels d'offres, soient formulées de telle manière que nos fournisseurs qui ont des implantations au Québec puissent avoir une chance raisonnable de soumissionner comme les autres. Et, finalement, l'appel d'offres a donné lieu à une décision qui a été très intéressante pour tout le monde, y compris pour les entreprises établies au Québec. Mais ça a été à la meilleure offre qu'est allé le contrat. Et c'est tellement bon que l'Union des municipalités du Québec est venue nous voir et nous a dit: On voudrait participer avec vous autres. «Welcome aboard, my friends!» Vous êtes bienvenus à bord, il y a de la place pour ceux qui veulent économiser. Et un des meilleurs endroits où on puisse s'adresser, c'est le gouvernement du Québec, avec sa politique d'achat, et tout, qui comporte beaucoup de bons aspects. Ce n'est pas mauvais de le signaler; ça, c'est du concret, ce n'est pas de la théorie, c'est du concret. Inutile de vous dire que, dans le projet de loi, nous ajoutons des dispositions à cette fin.

Nous permettons aux MRC de participer à la création de fonds d'investissement pour le développement d'emplois au plan local. Ça nous était demandé depuis longtemps, ça. Même, il y avait quatre, cinq MRC qui étaient déjà engagées là-dedans, de manière probablement illégale. Au lieu de les condamner et de leur dire: Vous n'avez pas le droit de faire ça, on a dit: Vous n'avez rien qu'un défaut, vous y avez pensé avant nous autres. On va essayer de vous accompagner. Au lieu de vous condamner et de vous nuire, on va essayer de vous aider. On a une belle disposition dans le projet de loi qui va permettre aux MRC de s'engager dans des choses comme celles-là. Celles qui l'ont déjà fait, on a une petite clause rétroactive disant: Moyennant vérification, tout ça sera considéré comme ayant été fait de manière légale. Ça, je trouve que c'est de la législation encourageante, incitative. Plutôt que de la législation qui vous encarcane, qui vous étouffe, qui vous empêche d'agir, on dit: Vous voulez bien agir, aller-y, on vous encourage, on vous appuie, et, si on peut collaborer ensemble, on le fait. Voilà l'esprit dans lequel tout ça est fait.

Il y avait un autre point. J'avais été saisi d'un cas, récemment, c'est une municipalité... il y avait un projet, une résidence privée pour personnes âgées – mais sans but lucratif – qui avait fait des grosses transformations. À un moment donné, elle a un besoin d'emprunt de 200 000 $, 300 000 $. Pas moyen de le faire dans l'immédiat, ça prenait une caution. La municipalité est intéressée à garder ce centre d'accueil là sur son territoire. Elle voulait se porter caution. Elle pensait pouvoir le faire, naturellement. Elle examine la loi, et ce n'était pas possible. Elle pouvait le faire pour un aréna, elle pouvait le faire pour une patinoire, elle pouvait le faire pour toutes sortes de raisons, un gymnase, mais, quand c'était un centre d'accueil à but privé, non lucratif, elle ne pouvait pas le faire. Si ça avait été une institution à but culturel ou social, elle ne pouvait pas le faire non plus. Alors, nous modifions, avec le projet de loi 29, cette partie de la législation pour qu'une municipalité puisse agir quand il y a une institution située sur son territoire qui est menacée de disparition. Elle peut donner un petit coup de coude, puis ça l'aide elle-même à garder cette institution-là à préserver les revenus qu'elle rapporte puis à rendre des services également aux personnes qui sont concernées. Alors, voilà quelques exemples d'améliorations que le projet de loi apporte à l'occasion de la présente session.

Et je voudrais remercier tous les députés qui ont concouru à l'étude du projet de loi, en particulier, évidemment, le député d'Abitibi-Ouest, lequel, à la fin de son intervention, a porté à mon attention une demande de modification soumise au gouvernement par l'Union des municipalités du Québec en vertu de laquelle les municipalités seraient autorisées à acquérir des unités dans des fonds de placement qui seraient gérés par des institutions financières, mais dans lesquelles seraient propriétaires d'unités uniquement les municipalités. Ça peut devenir une affaire considérable. C'est une très bonne idée sur laquelle nous sommes d'accord à 100 %. Maintenant, il faut mesurer l'impact de ceci. Éventuellement, ça peut devenir la grenouille qui va devenir aussi grosse que le boeuf, ça ne prendra pas tellement de temps parce que le potentiel financier des municipalités n'est quand même pas négligeable. Elles vont chercher chaque année au Québec au moins 8 000 000 000 $ à 9 000 000 000 $ en revenus fiscaux. Ce n'est pas négligeable.

Alors, moi, j'ai dit: Je suis très sympathique à l'idée, mais je veux avoir l'opinion du ministère des Finances, je veux avoir l'opinion de l'Inspecteur général des institutions financières, afin de m'assurer qu'on va prévoir toutes les conséquences possibles d'une décision comme celle-ci. J'ai demandé à nos services de procéder à des vérifications. Nous ne pourrions pas avoir l'opinion de ces deux autorités dont j'ai parlé dans si peu de temps.

Mais il y a peut-être moyen de modifier notre loi d'une manière qui permette d'agir quand même en préservant un certain pouvoir réglementaire pour le ministre. Il y a peut-être des choses que nous pouvons faire. Mais la porte n'est pas fermée, M. le Président, et, d'ici le stade où nous en viendrons au débat de troisième lecture, il se pourrait que nous ayons débouché sur une clarté suffisante pour nous autoriser à déposer une proposition de modification.

Voilà différentes améliorations que nous apportons à la législation municipale. Toutes ces améliorations sont le fruit d'un travail de consultation et d'échanges constants entre les deux unions de municipalités, des centaines de municipalités individuelles et le ministère des Affaires municipales.

Je prends connaissance, moi-même, M. le Président, de toutes les propositions de modification à nos lois qui émanent des 1450 municipalités que nous avons à travers le Québec. Chaque fois que je reçois une proposition, je l'examine moi-même, je l'envoie à nos services pour qu'ils me donnent un avis à ce sujet-là; je reçois l'avis, nous travaillons ensemble. C'est pourquoi nous avons, à chaque session, un menu abondant, consistant surtout en des améliorations de notre régime fiscal.

L'autre jour, il y a quelqu'un qui m'a dit: Au rythme où vous marchez, vous êtes en train de semer la confusion partout. C'est absolument faux. Nous améliorons les choses considérablement, et le projet de loi 26 en est une magnifique illustration. Merci.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Tremblay): Bien, M. le ministre. Alors, est-ce que le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi 29, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté. Très bien. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Oui. Ça épuise l'ordre du jour, M. le Président. Je vous demanderais de bien vouloir ajourner nos travaux à demain, 10 heures, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le leader. Alors, les travaux sont ajournés à demain, 15 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 22 h 50)