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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 13 mai 1998 - Vol. 35 N° 178

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Table des matières

Affaires du jour

Nomination des chef, leader, leader adjoint, whip et whip adjoint de l'opposition

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures sept minutes)


Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Pinard): Bonjour! Je vous souhaite la bienvenue aux affaires du jour et je vous prierais maintenant de prendre place.

M. Blais: Vous êtes bien bon, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Ça me fait plaisir, M. le député de Masson.


Affaires prioritaires


Débat restreint sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1998-1999

Alors, ce matin, aux affaires prioritaires, à l'article 1 de votre feuilleton, l'Assemblée entreprend le débat restreint sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1998-1999.

À la suite d'une discussion avec les leaders, le partage du temps pour ce débat restreint de deux heures a été établi de la façon suivante: cinq minutes seront accordées à chacun des députés indépendants; le reste du temps sera partagé également entre le groupe ministériel et celui de l'opposition officielle; le temps non utilisé par l'un des groupes ou par les députés indépendants pourra être redistribué. Dans ce cadre, les interventions ne sont pas limitées.

Je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant. M. le leader adjoint du gouvernement.


M. André Boulerice

M. Boulerice: J'ai l'impression, M. le Président, qu'il y en a qui souhaitent qu'on finisse tôt ce soir.

M. le Président, nous entreprenons effectivement le débat restreint sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année 1997-1998. Pour l'ensemble de nos concitoyens qui, très nombreux d'ailleurs, nous regardent, il serait peut-être bon d'expliquer un peu ce que signifie ce jargon parlementaire: étude des crédits budgétaires.

Il y a eu le dépôt du budget, excellent budget d'ailleurs, nous en convenons tous. La presse, l'ensemble des milieux ont accueilli ce budget avec un enthousiasme certain. Suite à ce budget, l'étude des crédits budgétaires signifie que, dans chacune des commissions, chaque ministère... Donc, le ministre est allé expliquer à l'ensemble des parlementaires de cette commission comment il entendait disposer du budget qui lui a été alloué. Le budget de l'État, M. le Président – vous me corrigerez, mais je donnerai un approximatif – est d'environ 40 000 000 000 $ et quelques. De ce montant, combien va à l'éducation, à la santé, aux services sociaux, aux transports, à la culture, bref, à l'ensemble des ministères qui forment l'État?

(10 h 10)

À l'étude de ces crédits, M. le Président, nous avons pu constater quelque chose d'essentiel. La première, c'est la première fois depuis 20 ans que les parlementaires ont regardé les crédits des ministères en se disant que tous les employés de l'État, pour la première fois, ont été payés avec de l'argent que nous avions et non pas de l'argent emprunté. C'est la première fois depuis 20 ans que l'État québécois a pu payer ses employés avec de l'argent qu'il avait et non pas de l'argent qu'il empruntait. Et de l'argent emprunté, on le sait, il y a toujours un loyer au prix de l'argent que nous empruntons. C'est, au départ, quelque chose d'extrêmement significatif. Cela signifie moins d'intérêts, moins d'intérêts à payer, plus d'argent à remettre dans des programmes et plus vite, également, nous allons alléger la dette de l'État québécois, dette d'ailleurs affreuse qui nous a été laissée par le gouvernement précédent pour qui dépenser était une propension tout à fait naturelle. On l'a vu d'ailleurs, M. le Président, terminer avec un déficit de 6 000 000 000 $.

Quand on dit 6 000 000 000 $, c'est un chiffre tellement gros. Et, pour l'ensemble de nos concitoyens qui vivent en moyenne avec à peu près 25 000 $, 26 000 $, 30 000 $, 40 000 $ par année, c'est extrêmement difficile de conceptualiser ce que peut représenter 6 000 000 000 $. Si 6 000 000 000 $, on mettait ça en billets de 20 $ ou de 100 $, eh bien, on pourrait facilement remplir le salon bleu de l'Assemblée nationale. Je ne sais pas si ça nous aide à comprendre la somme considérable que ça peut être, alors que, nous, dans nos vies quotidiennes, nous comptabilisons en quelques dizaines, au maximum, de milliers de dollars.

À l'étude de ces crédits, comme je le disais tantôt, M. le Président, nous avons vu la volonté du gouvernement de préserver les deux grandes missions essentielles de l'État, et mon collègue ministre et président du Conseil du trésor corrigera si je me trompe, mais j'ai bien l'impression de ne pas me tromper, les deux grandes missions essentielles de l'État... les trois grandes missions, dis-je, essentielles de l'État, la première étant la santé et les services sociaux, où nous avons dû faire des correctifs qui étaient impérieux, sinon nous mettions en péril notre système de santé à cause de l'incurie du gouvernement précédent qui n'a pas su prendre les décisions à temps et qui laissait la chaloupe aller à la dérive, ne sachant pas qu'une cascade s'en venait et qu'après il y avait une chute. Donc, une large partie du budget de l'État va à la santé et aux services sociaux de façon à consolider les nouveaux programmes et notre nouvelle approche dans le domaine de la santé.

La deuxième mission est l'éducation avec, encore là, une réforme tout à fait importante. On a dit que nous avions connu, en 1960, la réforme Parent et qu'aux années quatre-vingt-dix nous connaissions la réforme des parents, c'est-à-dire un système d'éducation qui répond à la fois aux besoins des enfants, mais qui répond également aux besoins des parents. Nous avons pu voir à l'étude des crédits du ministère de l'Éducation les sommes considérables qui sont consacrées à ces classes de maternelle pour ces tout petites bonnes femmes et bonhommes qui, d'une part, reçoivent dans ces classes, comment dirais-je, M. le Président, qui vivent dans ces classes des moments de socialisation qui sont tout à fait exceptionnels, avec également des apprentissages, et ce qui permet aux parents, d'une part, d'avoir un peu plus de temps pour faire autre chose, ce qui est normal, et ce qui permet dans bien des cas aussi à certains parents d'effectuer un retour au travail, donc une façon d'augmenter le revenu familial, ce qui est tout à fait légitime.

Donc, nous avons vu la volonté manifeste du gouvernement du Québec, c'est-à-dire d'un gouvernement du Parti québécois, de voir à ce que notre système d'éducation continue d'être un des meilleurs au monde. Nous sommes trop souvent, à l'occasion, un peu masochistes, en disant que notre système ne va pas, qu'il y a ci et qu'il y a ça. Certes, la perfection, malheureusement, n'est pas de ce monde, mais il suffit d'être quand même sortis un peu de nos frontières et de s'apercevoir que tous les pays occidentaux... Regardons nos voisins du Sud, de l'Est ou de l'Ouest; notre système supporte très bien la comparaison. À preuve, M. le Président, en mathématiques, ce sont les étudiants québécois qui sont les meilleurs dans l'ensemble canadien. S'ils sont bons en mathématiques, c'est que l'enseignement qu'on donne des mathématiques aussi doit être bon, en plus de l'intelligence des petits Québécois et des petites Québécoises.

La troisième mission essentielle pour l'État québécois, puisque nous sommes le seul endroit en Amérique du Nord qui soit majoritairement francophone, où existe cette culture tout à fait authentique, c'est la culture et c'est les communications. Et nous avons pu voir, à l'étude des crédits, la volonté encore une fois répétée du gouvernement du Parti québécois de préserver la culture québécoise dans toutes ses expressions, sachant pertinemment, toutefois, qu'elle s'exprime majoritairement en français. Nous avons pu constater, M. le Président, que, dans des moments financièrement difficiles, il aurait peut-être été tentant de réduire le budget du ministère de la Culture. Eh bien, non, le budget n'a pas été amputé d'un sou, le budget est resté le même, puisque c'est l'essence même de notre existence sur ce continent.

Donc, le gouvernement du Parti québécois entend, encore cette année, comme les années précédentes et les années à venir, favoriser l'expression culturelle québécoise, aider ces jeunes créateurs et créatrices qui font que notre culture est là, vivante, riche.

Et, M. le Président, vous l'avez vous-même remarqué – vous sachant d'ailleurs tellement soucieux de ces choses – les produits culturels québécois – je n'aime pas tellement cette expression, mais c'est celle que nous utilisons – comptent énormément dans la balance commerciale du Québec, et je serais intéressé d'entendre notre collègue ministre président du Conseil du trésor nous en parler. Les produits culturels québécois sont maintenant de grands produits d'exportation du Québec vers l'étranger. Ce n'est pas négligeable. Il est bon d'exporter notre bois, il est bon d'exporter notre fer, notre électricité, mais exporter nos produits culturels n'est pas nécessairement mauvais non plus. Pensez au succès du Cirque du Soleil. Je lisais récemment qu'il s'installe à Cincinnati, je crois, voilà, en plus d'être présent en Europe, présent en Asie, présent dans plusieurs autres villes américaines. Donc, trois missions essentielles.

(10 h 20)

Il y a également une autre mission qui est d'importance, c'est la mission économique de l'État. Et nous avons pu voir, à l'étude des crédits du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, comme de ceux du ministère d'État de l'Économie et des Finances, la volonté ferme de se servir de ce puissant levier qu'est l'État pour favoriser au maximum la création d'entreprises, les investissements au Québec et, par voie de conséquence, M. le Président, la création d'emplois, et cela, dans les domaines qui sont porteurs au niveau de la nouvelle économie.

Pensons que Montréal à elle seule... Et ciel! que l'on dit du mal de Montréal ces derniers temps. Certains esprits chagrins voient Montréal comme une ville dévastée. Je vous avoue qu'il y a certaines difficultés – qui seront corrigées, il va de soi – mais c'est à Montréal plus qu'ailleurs en Amérique du Nord que l'on trouve des travailleurs qui travaillent directement ou indirectement dans des emplois reliés aux nouvelles technologies. Montréal, malgré ses difficultés, a – pour employer cette expression militaire, mais que voulez-vous – trouvé le bon créneau et, avec ces entreprises de haute technologie, notamment dans le domaine du multimédia qui est en train de révolutionner notre planète, Montréal se classe très bien. Et vous savez, M. le Président, que, si l'on cesse de courir, on est vite dépassé par ceux qui sont en arrière, et c'est la volonté d'un gouvernement du Parti québécois de faire en sorte que, dans ces créneaux porteurs d'emplois, d'investissements, le Québec taille sa place. Et si nous sommes bons en aéronautique, que nous avons fait preuve d'excellence en biopharmacologie, eh bien, il est important de continuer dans ce domaine.

Et puis, on a pu remarquer – cela était présent dans le budget, mais cela était manifeste dans l'étude des crédits de chacun des ministères – la volonté de ce gouvernement de s'occuper des jeunes. C'est Rivarol qui disait: «Un politicien s'occupe de la prochaine élection.» Ça, c'est un libéral. «Un homme politique s'occupe de la prochaine génération.» Ça, c'est une attitude péquiste, se préoccuper de la prochaine génération et non pas nécessairement de la prochaine élection. On a pu remarquer la volonté d'un gouvernement du Parti québécois de faire en sorte que ce cercle, où sont malheureusement emprisonnés trop de nos jeunes diplômés, soit brisé, et ce cercle est: pas d'emploi, pas d'expérience; pas d'expérience, pas d'emploi. Avec ce magnifique programme, auquel d'ailleurs les ministères sont appelés à contribuer, c'est 20 000 places de stages qu'ils vont créer pour les jeunes diplômés des niveaux secondaire, collégial, universitaire. Je vois un jeune homme dans nos galeries là, sans doute que cela l'intéresse, c'est de son avenir dont on parle. Eh bien, ils pourront acquérir l'expérience, l'expérience de travail, qui est reliée à la formation technique, académique qu'ils ont reçue soit au collège – enseignement professionnel – ou à l'université.

Donc, M. le Président, un budget qui tient compte de deux grandes réalités... de trois grandes réalités, dis-je, plutôt: maintien des services essentiels que la population a voulu se donner et auxquels elle tient, par contre, en les adaptant à l'univers dans lequel nous vivons, celui du XXIe siècle; deuxième, préservation de notre identité profonde; troisième – M. le Président, je l'ai dit tantôt – volonté de ce gouvernement, à travers des finances saines, de consacrer le maximum d'argent à la création d'entreprises et d'emplois, sachant que les Québécois sont originaux, ingénieux, inventifs, créatifs et que, de surcroît, ce que nous produirons en biens ou en services contribuera également aux exportations du Québec vers l'étranger, où nous atteignons des sommets, ce qui nous place d'ailleurs dans une situation fort enviable par rapport à d'autres sociétés. Voilà, M. le Président, les grands axes des crédits budgétaires qui ont été déposés.

Je terminerai là-dessus, en invitant notre collègue ministre président du Conseil du trésor à apporter, sans aucun doute, des remarques plus pointues et également à détruire certains arguments, j'oserais dire fallacieux, employés par l'opposition officielle qui, n'ayant rien eu à dire du budget... Il y a eu deux, trois questions après, et ça a été terminé. Pourquoi n'a-t-on pas questionné? Parce qu'ils se sont rendu compte que ce budget était bon et qu'il était difficilement attaquable. Donc, ils ont préféré le silence parce que, poser une question sur le budget, c'était, comme on dit en langage courant, se faire ramasser à chaque fois. Alors, il se peut que, pour l'étude des crédits, ils aient quelques remarques chagrines. M. le Président, je suis persuadé qu'en notre nom le ministre président du Conseil du trésor saura y répondre. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Nous cédons maintenant la parole à M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. M. le Président, tout au long de l'opération des crédits, nous avons voulu répondre à la question: Est-ce que, avec le dépôt des crédits de cette année, avec le dépôt des crédits depuis maintenant quatre ans, depuis l'arrivée du gouvernement du Parti québécois, tous les Québécois, nous sommes plus riches ou plus pauvres? Malheureusement, M. le Président, la réponse, je pense, est venue très, très rapidement. On s'aperçoit qu'au Québec on s'appauvrit depuis l'arrivée du gouvernement du Parti québécois.

Dans le domaine de la santé, eh bien, on assiste maintenant à des niveaux de déficit records. Les dernières prévisions nous indiquent qu'on devrait avoir un déficit de près de 500 000 000 $ pour l'ensemble des établissements de santé. Je voudrais rappeler cette belle promesse du Parti québécois au moment des élections, alors qu'on devait arrêter les coupures aveugles des libéraux, ce qu'ils disaient à l'époque. Alors, ils les ont amplifiées et de beaucoup, M. le Président, avec des résultats comme des listes d'attente, particulièrement dans des secteurs ciblés extrêmement importants, là où le taux de mortalité est encore le plus élevé.

On pense à cardiologie, chirurgie cardiaque. Eh bien, les listes d'attente sont de plus en plus longues. On pense au domaine du cancer aussi, les patients qui souffrent de cancer et qui ne peuvent pas être opérés. Le cancer est diagnostiqué, mais ils n'ont pas la chance d'être opérés, et les listes d'attente augmentent. On pense à l'orthopédie, particulièrement pour les personnes âgées qui ont des problèmes au niveau des hanches, aux greffes de hanches dont ils ont besoin. Eh bien, ces gens-là ne crient pas. Ils ne sont pas en état de mort subite, donc on les fait patienter davantage parce qu'on ne veut pas donner les ressources nécessaires pour les opérer.

(10 h 30)

Là aussi, il y avait eu cette belle promesse, M. le Président, du Parti québécois qui disait: Avec nous au pouvoir, on va diminuer de moitié les listes d'attente. Je pense que la population est à même de faire le bilan dans le domaine de la santé. Et tout le monde sait maintenant que les listes d'attente sont de plus en plus longues, particulièrement dans les secteurs où le taux de mortalité augmente.

Les salles d'urgence, M. le Président. En très peu de temps, on devait régler tous les problèmes, dont celui de l'engorgement des salles d'urgence. Eh bien, là aussi, il n'y a pas grand-chose de réglé. Je suis toujours surpris maintenant, lorsqu'on regarde la télévision, aux bulletins de nouvelles, eh bien, on voit les objectifs de chacun des hôpitaux qui ont des salles d'urgence importantes: le nombre de lits au permis versus le nombre de lits dépassant le nombre de patients qui dépassent le nombre de lits au permis. Et, là aussi, on nous avait fait tant de promesses.

M. le Président, je demeure toujours dans le domaine de la santé. Je voudrais rappeler aussi l'augmentation importante des coûts de la bureaucratie. Je vous rappelle les coûts associés aux régies régionales. C'est une espèce de monument à la bureaucratie, ça coûte près de 100 000 000 $ par année; et lorsque vous avez dépensé 100 000 000 $, vous n'avez pas encore payé 1 $ pour les patients.

Un article des universitaires, MM. Pierre Ouellet et Pierre-Yves Crémieux, indique que les dépenses d'administration dans le système de santé québécois ont augmenté au cours des dernières années, alors même que les sommes consacrées aux soins diminuent. Les sommes consacrées aux bureaucraties du ministère et des régies régionales ont augmenté en moyenne de 7,7 % par année par habitant tandis que celles réservées au recouvrement de la santé, essentiellement dans les hôpitaux, ont baissé de 1,9 %. Un peu plus loin, on indique que la réduction de la taille du ministère s'est révélée plus difficile à réaliser que la croissance de celle des régies, notent les économistes.

M. le Président, ce n'est pas le député de Robert-Baldwin qui le dit, ce sont des économistes, des universitaires qui confirment l'augmentation des frais d'administration dans tout ce système de santé. Et finalement, lorsqu'on écoute le ministre nous parler ici, en Chambre, le ministre a toujours des lunettes roses, il dit que tout va bien dans le système de la santé, alors qu'on sait, tous les députés en cette Chambre savent très bien – nous avons des appels dans nos bureaux, nous avons des patients qui sont en détresse qui nous demandent de les aider – nous savons tous que c'est faux, et la population n'est pas dupe.

M. le Président, dans le domaine de l'éducation, la question qu'on voulait se poser, c'est: Est-ce que tous les étudiants vont avoir leurs manuels scolaires? La réponse, en tout cas, n'est jamais venue de la part de la ministre de l'Éducation. On est encore à discuter les choix, les priorités qui sont faites au ministère et, malheureusement, au Québec, on n'est pas en mesure de donner à tous les étudiants les manuels nécessaires pour parfaire leur éducation.

Les universités, M. le Président, est-ce qu'elles sont capables de maintenir les hauts standards qu'on a toujours eus au Québec à travers les années? J'ai eu l'occasion de participer à une émission de Maisonneuve à l'écoute avec des experts universitaires qui sont venus dire à la télévision que les standards habituellement reconnus sont vraiment menacés au Québec à cause des coupures qui sont imputées au ministère de l'Éducation. M. le Président, nos cégeps auront-ils les ressources nécessaires pour bien former la prochaine génération? Là aussi, M. le Président, on commence à avoir des doutes. Hier, mon collègue le député de Verdun questionnait la ministre, à savoir si c'était vrai qu'on voulait instaurer une nouvelle taxe sur l'utilisation des ordinateurs. Il faut le faire, M. le Président. Il a donné l'exemple du cégep de Maisonneuve. Et la ministre n'a pas nié et n'a pas non plus choisi de dire: Non, ça n'arrivera pas. Alors, il faut s'attendre à ce genre de taxe déguisée dans le domaine de l'éducation.

De plus, M. le Président, toujours en éducation, baisse des bourses consécutives aux prêts de 39 000 000 $ pour l'année 1998-1999 – c'est dans les crédits – ce qui aura pour conséquence d'augmenter l'endettement des étudiants et leur pauvreté.

Augmentation des crédits budgétaires 1998-1999 – c'est rare, une augmentation – mais pour les créances douteuses. Qu'est-ce qu'il faut lire, M. le Président, c'est les faillites des étudiants, de 32 000 000 $, cette augmentation pour créances douteuses, lesquelles ont augmenté de 72 % depuis l'élection du Parti québécois.

À l'enseignement collégial, c'est une baisse des crédits de 56 000 000 $ pour la prochaine année. Depuis l'élection du Parti québécois, ce sont des compressions de 213 000 000 $, lesquelles ont eu comme conséquence la diminution de surplus accumulés grâce à la bonne gestion des différentes commissions scolaires et cégeps.

Coupures de services directs aux étudiants par l'abolition de plus de 1 200 postes de professeurs, professionnels, employés de soutien et cadres. L'enseignement universitaire baisse les crédits budgétaires de 20 000 000 $. Alors, à ceux qui étaient déjà bien touchés, affectés par les compressions, eh bien, on continue encore cette année.

Depuis l'élection du Parti québécois, ce sont des compressions de 332 000 000 $ qui ont eu les conséquences suivantes: augmentation des déficits accumulés de 72 000 000 $ pour les universités et abolition de 900 postes de professeur, de milliers de postes de personnel de soutien et de cadre.

Toujours dans les crédits, dans le domaine de la justice, M. le Président, là aussi, on coupe cette année, plus de 12 000 000 $. Diminution de 9 700 000 $ qui résultera en moins de services aux citoyens dans les palais de justice et moins de personnes pour rendre ces services. Les coupures dans le système de justice sont aussi graves que dans le système de santé. Mais, dans le système de justice, c'est plus long, en sentir les effets.

Diminution également de 13 000 000 $ dans l'aide aux justiciables. La diminution est en grande partie due à la réforme de l'aide juridique sur le dos des pauvres et des démunis, car les changements se trouvent dans les services juridiques subventionnés. Et une partie du 10 000 000 $ a été faite à l'aide juridique et 3 000 000 $ dans l'indemnisation des victimes d'actes criminels, encore là, des coupures sur des personnes qui sont les plus vulnérables.

M. le Président, est-ce qu'on est plus riche, est-ce qu'on est plus pauvre? Je pense que c'est assez facile... Un exemple qu'on peut faire, c'est demander à qui que ce soit. On pourrait demander, ici, aux députés, mais on pourrait demander aussi aux gens de la rue: Est-ce que, depuis l'arrivée du Parti québécois, vous êtes plus riches ou plus pauvres? Et la réponse elle vient très rapidement. Est-ce qu'il vous reste plus d'argent dans vos poches, sur votre chèque de paie? Et les gens nous indiquent que, non, ça a vraiment diminué.

Je lisais, ce matin, un rapport de La Presse canadienne , Les Canadiens se sont appauvris . Et on donne des exemples. Dans la ville de Québec, le revenu moyen des familles est passé de 54 900 $ à 52 570 $, des baisses de 4,3 %; à Sherbrooke, des baisses de 2,6 %; à Trois-Rivières, baisses de 3,2 %; à Montréal, baisses de 6,4 %. C'est ça, l'appauvrissement, M. le Président.

Dans un article du Soleil intitulé De plus en plus de pauvres, surtout au Québec : 1 500 000 Québécois vivent d'un revenu insuffisant . Et ce qu'il faut regarder, M. le Président, c'est comment on se situe par rapport à l'ensemble canadien, par rapport aux autres provinces. Alors, l'article indique: «Malgré la reprise économique, la pauvreté est toujours en hausse au Canada, particulièrement au Québec, qui distance toutes les autres provinces à ce chapitre, a rapporté hier le Conseil national du bien-être social.» Alors, on identifie, pour le Canada: La pauvreté, telle que définie par le Conseil, touchait 17,6 % de la population canadienne. Ça, c'est en 1996. Et le Québec lui, se détache du peloton pour arriver à la queue, en affichant un taux de pauvreté de 21,2 %, le plus élevé de toutes les provinces canadiennes, ce qui veut dire que 1 500 000 Québécois en sont affectés. En 1995, le Québec arrivait également en tête de liste, avec un taux de 20 %, mais partageait cette position ex aequo avec Terre-Neuve. Et, en 1996, la situation s'est améliorée à Terre-Neuve mais pas au Québec, M. le Président. Il semble que ce soit les femmes et les hommes âgés qui connaissent un sort peu enviable au Québec, en regard de ce qui se passe dans le reste du pays.

M. le Président, donc, à la question: Sommes-nous plus riches ou plus pauvres, avec ce gouvernement du Parti québécois? la réponse est de plus en plus claire, nous sommes plus pauvres.

(10 h 40)

J'aimerais, M. le Président, rappeler les engagements du premier ministre. Les gens ne devaient pas être touchés dans l'effort de compression. Ce sont surtout les machines, les structures qu'on devait toucher. Eh bien, en octobre 1997, le premier ministre et le ministre de la Santé allaient faire une conférence de presse spectacle à la télévision en disant: C'est fini, les coupures dans la santé. Dans les crédits qui ont été déposés ces derniers jours, eh bien, des coupures additionnelles de 158 000 000 $ dans le secteur de la santé. C'est le premier ministre lui-même qui s'est engagé devant tout le peuple du Québec à dire qu'il n'y aurait plus de contraintes dans le domaine de la santé. Eh bien, c'est ce même premier ministre qui vient aujourd'hui ordonner des coupures de 158 000 000 $ dans la santé. Et il faut ajouter que, dans l'éducation, ce n'est pas beaucoup mieux, c'est des compressions, des coupures de 323 000 000 $.

La question que les gens se posent, les gens de la rue, c'est: Comment se fait-il que le gouvernement du Parti québécois est capable de trouver de l'argent quand ça fait son affaire, puis, quand ce sont les démunis qui en ont besoin, les patients, les étudiants, c'est beaucoup plus difficile, et là on assiste à de la redondance dans le domaine des coupures? Comment se fait-il que le gouvernement du Parti québécois est en mesure de trouver 100 000 000 $ pour faire un référendum? Comment se fait-il que le gouvernement du Parti québécois est en mesure de trouver 60 000 000 $ pour financer un hippodrome, pour financer des chevaux? Comment se fait-il que le gouvernement du Parti québécois peut trouver 11 000 000 $ pour une publicité raisin dans le domaine de la santé? Tout le monde se souvient du patient qui aurait glissé sur un raisin puis qui est allé à l'hôpital. Ça, c'était la publicité du ministre de la Santé. 11 000 000 $ pour regarder ça, M. le Président.

Tout le monde se souvient du gaspillage du plan Paillé avec ses studios de massage, de bronzage et plusieurs autres dossiers extrêmement discutables. D'ailleurs, il y avait eu un rapport du Vérificateur général dans ce dossier-là. Tout le monde se souvient des sommets-spectacles. On en avait de l'argent pour ça, les sommets, les commissions sur la souveraineté, les études sur la faisabilité de la souveraineté, 10 000 000 $, 12 000 000 $ à l'époque. Les gens se souviennent aussi des bonbons qui ont été donnés juste avant le référendum, les augmentations de salaires, l'équivalent de 1 %. Ce que ça veut dire dans les faits, c'est 300 000 000 $ par année pendant trois ans, c'est près de 1 000 000 000 $.

Comment se fait-il que le gouvernement du Parti québécois, quand il veut trouver de l'argent, il est capable de trouver de l'argent, mais, quand c'est le temps d'aider les patients qui souffrent dans les corridors des urgences... Comment se fait-il qu'on n'a pas d'argent pour les étudiants, ceux qui vont diriger, les prochains dirigeants, nos prochains gouvernants? Eh bien, c'est la grande question que les Québécois sont en mesure de se poser à la fin du bilan d'un mandat de quatre années de ce gouvernement.

M. le Président, je pourrais continuer, mais le temps file très rapidement. Je voudrais simplement rappeler aussi que l'économie québécoise accusera un retard en 1998-1999. Le taux de croissance de l'économie québécoise demeurera inférieur à la moyenne canadienne au cours des deux prochaines années, et, pendant cette période, le taux de chômage ne diminuera que légèrement au Québec. Ce sont les prévisions de la Banque Royale.

Quand on regarde quelques chiffres sur l'absence de gestion, je dirais, du gouvernement du premier ministre, du Parti québécois, on constate, pour les investissements privés, qu'on est vraiment à la queue du peloton, huitième ou neuvième. Nous avons un produit intérieur brut qui n'augmente pas au même rythme que les autres provinces, des taux de chômage à des niveaux records.

Et c'est hier dans un article de M. Jean-Philippe Décarie qui donne des fleurs jusqu'à l'an 2000-2001: «Toutes les prévisions convergent: d'ici le changement de millénaire, l'activité économique sera non seulement favorable au Québec, mais même florissante, selon un dernier rapport...» Il se base sur la Banque de Montréal. Mais il ajoute: «La moins bonne nouvelle, c'est que cette poussée de croissance restera inférieure à la moyenne canadienne. Pourquoi sommes-nous toujours à la queue? Pourquoi sommes-nous toujours les derniers?

M. le Président, j'aimerais rappeler ici quelques affirmations qui ont été faites au sujet de l'incertitude politique et je voudrais citer des gens extrêmement influents et non pas faire des affirmations en tant que député, mais beaucoup plus prendre l'avis d'experts dans le domaine. Le président de la Banque de Montréal disait, il y a un an: «Les gens d'affaires doivent faire face à des incertitudes de toute façon, que ce soit pour des questions d'expansion ou d'investissement stratégique. Mais, si vous y ajoutez l'incertitude politique, cela devient une autre variable dont ils doivent tenir compte.» Et il disait ceci, il estimait que «le débat concernant la séparation et le prochain référendum», et ça, c'est cité dans La Presse ... le président de la Banque de Montréal dit que «cette incertitude empoisonne l'atmosphère des gens d'affaires qui doivent prendre des décisions pour les 10 ou 15 prochaines années». Ça, c'est la Banque de Montréal.

La Banque Royale disait, il y a quelques mois, en octobre 1997, et ça avait été rapporté là aussi dans le journal La Presse ... M. McCullum avait invoqué une autre raison pour expliquer la croissance plus lente au Québec, c'est-à-dire l'incertitude politique. Il affirmait qu'«il était très difficile de mesurer les conséquences, mais qu'il s'agissait quand même d'un facteur important». Il a fait observer que, «depuis le dernier référendum, le Canada avait créé 473 000 emplois alors que le Québec n'en avait créé que 35 000. Normalement, le Québec devrait être à l'origine du quart environ de la création d'emplois au pays.» Et ça, c'est le président de la Banque Royale.

On peut continuer et on pourrait même citer cette compagnie de cotation, Standard & Poor's, qui, elle aussi, ajoutait sa voix au même chapitre et qui laissait entendre jusqu'à quel point le Québec était perdant, particulièrement en termes d'investissement, à cause de cette incertitude politique.

M. le Président, le temps me manque, mais il faudrait aussi rappeler, dans le cadre de l'opération des crédits, que depuis quelques années ce gouvernement nous a habitués à des augmentations de budget aussi. Des nouvelles taxes ont été apportées et sont récurrentes d'année en année. La plus récente, c'est la taxe de vente qui vient d'être augmentée, le 1er janvier, de 1 %. On pense au transfert aux municipalités de près de 400 000 000 $. On pense à l'assurance-médicaments, et là je vous rappelle que les gens d'en face, les députés péquistes à l'époque avaient déchiré leur chemise parce que les libéraux chargeaient des frais de 2 $ pour une prescription jusqu'à un montant maximum de 100 $. On m'a dit qu'au niveau des galeries les gens envoyaient des 2 $ en bas pour protester contre cette augmentation dans les frais d'assurance-médicaments. Eh bien, eux, ils ont choisi d'augmenter, non pas de 2 $, mais jusqu'à un maximum de 750 $. Et ce qui est le plus triste là-dedans, c'est qu'on nous a toujours dit que ce n'était pas un impôt déguisé, alors que les gens doivent déduire de leur rapport d'impôts – ça vient d'être fait, le 30 avril dernier – un montant de 175 $, et ça, c'est sans avoir reçu un seul médicament.

M. le Président, on pourrait continuer quant aux nouvelles taxes, je crois qu'ils en ont rajouté pour près de 2 500 000 000 $. Alors, c'est le gouvernement qui est le champion des taxes, c'est le gouvernement qui a mis une épée de Damoclès au-dessus de tous les Québécois, et cette épée de Damoclès là, elle a un coût, c'est l'incertitude politique et économique. Est-ce qu'on peut avoir de l'espoir? Eh bien, oui, M. le Président, on peut avoir de l'espoir, et l'espoir, c'est de ce côté-ci de la Chambre, c'est le Parti libéral du Québec, M. le Président, et avec son nouveau chef. Je voudrais vous mentionner en passant que, depuis l'arrivée de notre nouveau chef, M. Charest, plus de 25 000 nouveaux membres ont été rajoutés au Parti libéral, dont beaucoup, plusieurs jeunes. C'est intéressant de voir tout le phénomène des jeunes qui viennent au Parti libéral du Québec. Je pense que, si on prend l'exemple où il y a eu une motion ici, qui a été faite par le député de Kamouraska-Témiscouata et qui souhaitait voir l'abolition des clauses orphelin, eh bien, les gens du gouvernement, les députés du gouvernement ont voté contre l'abolition des clauses orphelin. Vous savez c'est quoi, une clause orphelin? C'est lorsque les jeunes n'ont pas le même salaire que les plus seniors dans une entreprise. Eh bien, les gens du Parti québécois, les députés ont voté contre l'abolition des clauses orphelin. Ça, c'est aider les jeunes, M. le Président.

(10 h 50)

Tantôt on parlait des 20 000 stages qu'on veut donner aux jeunes dans les entreprises, eh bien, on oublie de dire que déjà il y avait eu un programme avec 1 000 stages et que, sur les 1 000, il y en a seulement 50 étudiants qui ont pu s'en prévaloir. C'est beau de faire des objectifs ronflants, on y a été habitué, mais le résultat, il n'est pas là.

M. le Président, de nouveau, j'aimerais souligner en conclusion: on peut discuter longtemps, de chacun des côtés de la Chambre, mais je pense que le moment est venu de dresser le véritable bilan de ce gouvernement et de laisser à toutes les Québécoises, à tous les Québécois le soin de choisir. Ce dont nous avons besoin actuellement, ce sont des élections. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Nous allons maintenant céder la parole au côté ministériel, à M. le président du Conseil du trésor. En vous rappelant, M. le président, qu'il vous reste un temps de parole de 33 minutes. M. le président.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, le 25 mars dernier, je déposais ici, en cette Chambre, le budget de dépenses du gouvernement du Québec pour l'exercice 1998-1999. C'est le sujet de nos débats aujourd'hui et non pas tout ce que nous avons entendu tout à l'heure de la part de l'opposition. Mais, par suite de ce dépôt, comme chacun sait, les commissions parlementaires ont effectué l'étude détaillée des crédits de chacun des ministères, des organismes dont le budget doit être voté par l'Assemblée nationale, ici. Au terme de ces travaux, l'Assemblée nationale est appelée à clore maintenant cette opération.

Je veux vous rappeler les grandes caractéristiques de ce budget de dépenses et les priorités gouvernementales qui y sont reflétées. Les dépenses prévues pour 1998-1999 totalisent 41 800 000 000 $, dont 35 400 000 000 $ au titre des dépenses de programmes et 6 400 000 000 $ pour le service de la dette du gouvernement. Sur base comparable, les dépenses de programmes sont légèrement à la hausse par rapport à l'exercice 1997-1998, soit une somme de 246 000 000 $ ou 0,7 %. Le poids des dépenses de programmes dans l'économie québécoise diminue. Il y a 10 ans, avant la récession du début de la décennie, le poids des dépenses de programmes dans l'économie était de 19,5 %; en 1994-1995, au moment où le Parti libéral a quitté le pouvoir, il atteignait 21,7 %. Depuis, ce ratio, ce rapport s'améliore constamment, de sorte en 1998-1999, il sera ramené à 17,9 %, donc à un taux inférieur à celui d'il y a 10 ans.

Lorsqu'on observe le budget par ministère maintenant, on constate qu'après avoir diminué au cours des deux dernières années l'enveloppe du ministère de la Santé et des Services sociaux est en hausse de 378 000 000 $ ou de 3 %, ce qui marque un tournant pour ce ministère. Ce changement témoigne de la volonté du gouvernement de consacrer davantage de ressources à ce secteur névralgique, très névralgique, à la population, ressources qu'il a dégagées par voie de réallocation à l'intérieur du budget de dépenses et par l'injection de sommes additionnelles.

Deuxièmement, après avoir elle aussi diminué au cours des deux dernières années, l'enveloppe 1998-1999 du ministère de l'Éducation est en hausse de 31 000 000 $ ou de 0,3 %. En hausse de 31 000 000 $. Le ministère pourra, par ailleurs, compter sur les économies découlant des mesures prises en 1997-1998.

Troisièmement, l'enveloppe du ministère de l'Emploi et de la Solidarité est en baisse de 233 000 000 $ en raison de la diminution de 20 600 ménages bénéficiaires de l'aide sociale prévue en 1998-1999 au-delà de celle qui avait été faite ou réalisée en 1997-1998. Cette diminution manifeste la vigueur de l'économie québécoise et elle survient malgré la réforme fédérale de l'assurance-emploi qui nous a fait beaucoup de tort. Il faut noter, par ailleurs, que ces données comparatives excluent le montant transféré du gouvernement fédéral à la suite de l'Entente Canada-Québec sur le marché du travail. Les crédits correspondants de 519 000 000 $ ont pour effet de porter les crédits totaux du ministère à 4 249 000 000 $ pour l'exercice 1998-1999.

Quatrièmement, l'enveloppe du ministère de la Famille et de l'Enfance est en hausse de 255 000 000 $, une hausse de 25,6 %. Ce niveau reflète la poursuite de la mise en oeuvre de la politique familiale, notamment le développement des places en service de garde. Voilà quatre grandes enveloppes, quatre enveloppes principales qui sont toutes en hausse.

Les dépenses des autres ministères sont en baisse, elles, de 185 000 000 $, soit de 2,5 %. Le budget de dépenses traduit aussi la volonté du gouvernement d'appuyer la prise en charge des outils de développement économique par le milieu. C'est ainsi que des crédits de 60 000 000 $ ont été réaffectés au ministère des Régions et au ministère de la Métropole pour la mise en place des centres locaux de développement. Avec ces CLD, un nouveau partenariat prend forme entre le gouvernement et les communautés locales pour le soutien et le développement de l'entrepreneurship individuel et collectif.

Globalement, l'année 1998-1999 est donc marquée par une stabilisation des dépenses de programmes. À l'intérieur du budget de dépenses, des réaffectations de ressources ont été effectuées en faveur de la santé et des services sociaux, en faveur de l'éducation, en faveur du développement local et régional. Et les ministères, quant à eux, ont largement réduit leurs dépenses de fonctionnement comme leurs coûts de main-d'oeuvre.

Depuis le budget de 1995-1996, le gouvernement s'est résolument engagé sur la voie de l'assainissement des finances publiques. La situation à cet égard s'est constamment améliorée. Bien que le travail ne soit pas terminé, les progrès enregistrés jusqu'ici témoignent de la détermination du gouvernement. Dans la foulée de la lutte contre le déficit, le gouvernement du Québec a effectivement réduit ses dépenses de manière importante depuis 1995-1996, et cela constitue un changement radical par rapport aux années précédentes. Sur une base comparable, le niveau des dépenses de programmes est passé de 36 819 000 000 $ en 1995-1996 à 34 888 000 000 $ en 1998-1999, soit une diminution de 1 900 000 000 $ ou de 5,2 %, sans tenir compte de l'inflation. Il faut noter que tout au long de cette période le niveau des dépenses de programmes a diminué constamment, à l'exception de l'exercice 1998-1999 où on prévoit une légère augmentation de 0,7 %.

L'action entreprise en matière de contrôle des dépenses a permis au gouvernement de respecter les objectifs financiers que nous étions fixés, contribuant à rétablir la crédibilité financière du Québec. À cet égard, la décision de l'agence de crédit Standard & Poor's d'améliorer la perspective associée à la cote de crédit du Québec de A plus négative à A plus stable est un signe tangible que les efforts déployés par la société québécoise depuis quatre ans pour assainir les dépenses publiques portent fruit.

Et j'entendais tout à l'heure le critique de l'opposition signaler des discours de la Banque de Montréal qui datent d'au moins un an, de M. Matthew Barrett et du président de la Banque Royale, je dirai que l'agence de cotation de crédit du Québec, elle, nous a, comme on dit, «upgradés», nous a augmentés, a amélioré la cote. Je pense que cette question d'insécurité politique en est une qui existe dans l'esprit de nos adversaires et non pas ailleurs.

(11 heures)

Le redressement budgétaire des dernières années suscite de nombreux commentaires traitant le plus souvent de l'impact du redressement sur l'un ou l'autre des services à la population sans référer au contexte général des finances publiques. Il importe de situer la question dans une perspective globale, car le financement de chacun des services particuliers provient, en définitive, de la même source et, de ce fait, le redressement budgétaire concerne tous les secteurs.

Il est, à ce propos, une dimension de la question qui mérite d'être tirée au clair. Il s'agit de la part des réductions budgétaires touchant la gestion même des ministères du gouvernement. En fait, les efforts demandés à l'appareil gouvernemental ont été considérables. Sans être aussi visibles, ils sont néanmoins bien réels et affectent essentiellement le palier administratif, principalement les dépenses de rémunération et de fonctionnement.

Lorsque le gouvernement du Québec a entrepris d'assainir ses finances publiques, il fut clairement établi que chacun serait appelé à faire sa part et, au premier chef, le gouvernement lui-même. Il fut également entendu que la répartition de l'effort tiendrait compte de la situation de chacun, dans un esprit d'équité. En outre, il était exclu de faire porter le fardeau de la lutte contre le déficit par les plus démunis de notre société.

La réduction a été proportionnellement plus importante dans les ministères et les organismes du gouvernement que dans les réseaux de l'éducation, de la santé et des services sociaux. À l'exception du ministère de la Famille et de l'Enfance, créé en 1997, et qui n'est donc pas concerné par l'effort budgétaire depuis quatre ans, le niveau de dépenses de l'ensemble des autres ministères a été réduit de 12,6 %, plus dans les dépenses de fonctionnement, un peu moins dans les dépenses de rémunération. Je répète, le niveau des dépenses de l'ensemble des autres ministères a été réduit de 12,6 %, globalement.

Notons que les efforts budgétaires consentis par l'ensemble du secteur public n'auraient pu être envisagés sans prendre en compte les coûts de main-d'oeuvre, car ceux-ci accaparent 56 % des dépenses de programmes du gouvernement. Nous avons négocié avec les syndicats et les cadres du secteur public la mise en place d'un programme de départs volontaires qui a permis une économie récurrente de plus de 1 000 000 000 $.

L'assainissement des finances publiques, pour être durable, passe par le changement des modes de gestion. Le contexte de gestion est transformé, les ressources sont limitées, l'effectif a été réduit, c'est pourquoi le plan que s'est donné le gouvernement ne vise pas seulement à assainir les finances publiques et à réévaluer nos grands programmes, il vise aussi à revoir le mode de fonctionnement de l'appareil gouvernemental et à repenser la façon de rendre les services publics. Des gestes significatifs et nombreux ont été posés pour gérer autrement et rendre nos services publics plus performants.

Le gouvernement entend maintenant consolider ces initiatives et assurer des bases solides au processus de modernisation de l'appareil sur chacun des quatre volets suivants: un, une gestion axée sur les résultats et sur la qualité des services; deux, une information financière conforme aux normes de comptabilité actuelles; trois, la mise en valeur des ressources humaines; quatre, le déploiement de l'inforoute gouvernementale.

Je les reprends. L'orientation du gouvernement à l'égard de la gestion au sein de l'appareil public se caractérise par la détermination d'objectifs stratégiques et par l'attention portée aux résultats obtenus. C'est ainsi que, depuis 1996, le Comité des priorités a été chargé de coordonner un exercice de planification stratégique auprès des ministères et des organismes. Cette opération permet de gouverner à partir d'une vision d'ensemble et d'assurer la cohérence des actions gouvernementales.

Le gouvernement s'emploie aussi à passer d'un mode de contrôle des gestes administratifs à une gestion stratégique axée sur les résultats. Depuis plus de trois ans, il revoit systématiquement les règles et les directives internes de gestion. De nombreux assouplissements ont été apportés, toujours dans la perspective de laisser plus de latitude aux gestionnaires de l'État sur le choix des moyens. En contrepartie, les gestionnaires sont responsabilisés en regard de l'atteinte d'objectifs qui leur sont signifiés en termes de résultats. Voilà notre orientation, nous la poursuivrons et nous l'intensifierons.

Dans cette veine, des unités autonomes de service ont été implantées. À ce jour, on en compte 14. Ces unités s'engagent à réaliser des objectifs précis de qualité, de services et de résultats. En contrepartie, elles obtiennent une plus grande flexibilité de gestion. Le gouvernement a l'intention d'étendre l'approche des unités autonomes de service à toutes les unités opérationnelles qui s'y prêtent de façon à favoriser la performance de l'administration publique et l'amélioration des services publics.

Le gouvernement améliore par ailleurs l'information publique sur la gestion des ministères. Ainsi, dans le volume III du Budget de dépenses, les ministères présentent leurs orientations stratégiques, leurs objectifs, leurs priorités et leurs plans de dépenses. Il faut voir ces plans ministériels de gestion des dépenses comme un outil de gestion à la disposition des parlementaires. D'ailleurs, plusieurs commissions parlementaires les ont utilisés lors de l'étude des crédits. Il faut poursuivre dans cette voie, car une plus grande transparence et l'exercice d'une véritable reddition de comptes sont des facteurs essentiels. Par exemple, les rapports annuels des ministères devraient être de véritables instruments de reddition de comptes. De même, il faut accélérer le développement d'indicateurs permettant de mesurer la performance des programmes et la qualité de leur gestion.

Sur un autre plan, nous entendons amorcer au cours de l'année une réflexion sur le cadre légal de la gestion gouvernementale, lequel trouve son assise dans la Loi sur l'administration financière. Tous ces gestes visent à assurer une gestion de l'appareil public basée sur l'atteinte de résultats et la qualité des services.

Tel qu'annoncé lors du discours sur le budget, le gouvernement a décidé de moderniser ses règles comptables pour ainsi donner suite aux recommandations du Vérificateur général. Il faut remercier ce dernier pour la constance de ses remarques et de ses recommandations visant à revoir radicalement nos conventions comptables. C'est à la suite du dépôt des comptes publics 1996-1997, en décembre 1997, qu'a été mis en place un comité d'étude sur la comptabilité du gouvernement composé de représentants du Contrôleur des finances, du ministère des Finances et du Vérificateur général. Depuis, ce comité a déposé son rapport qui a permis la présentation d'un document intitulé La réforme de la comptabilité gouvernementale qui accompagnait le discours sur le budget.

Il faut être bien conscient qu'il s'agit là d'un projet de grande envergure. En effet, plusieurs équipes de travail interministérielles regroupant des membres du Contrôleur des finances, du ministère des Finances, du Secrétariat du Conseil du trésor et de certains autres ministères sont présentement à l'oeuvre et s'activent pour être en mesure de respecter un échéancier des plus serrés visant la présentation d'états financiers consolidés à compter de l'exercice terminé le 31 décembre 1998. Les travaux en cours portent sur la modification des conventions comptables du gouvernement à l'égard des régimes de retraite, des immobilisations, des mesures de restructuration du secteur public, des emprunts et de la présentation d'états financiers consolidés.

Les changements les plus significatifs portent sur les aspects suivants. Tous les engagements du gouvernement à l'égard des régimes de retraite des employés du secteur public seront inclus en totalité à la dette du gouvernement. C'est depuis plus de 20 ans que le Vérificateur général réclame cette correction.

Deuxièmement, le coût des immobilisations du gouvernement sera amorti pour se conformer à une recommandation de l'Institut canadien des comptables agréés de 1997. Dorénavant, seul l'amortissement de ces immobilisations sera inscrit à la dépense.

La consolidation des états financiers, troisièmement, signifiera, dès le 31 mars 1998, l'inclusion des résultats de 92 entités de plus à ces états. De plus, la consolidation permettra de régulariser la situation des 34 fonds spéciaux existants.

Les effets de la révision des conventions comptables sont multiples, notamment au niveau de la présentation de l'information financière et du suivi des organismes qui seront dorénavant dans le périmètre budgétaire du gouvernement. À cet égard, elle sera revue en profondeur, du livre des crédits jusqu'aux comptes publics.

(11 h 10)

Après plusieurs années d'analyse et d'évaluation, le gouvernement se met à l'heure de la modernité en se conformant aux prises de position du Conseil sur la comptabilité et la vérification des organismes du secteur public de l'Institut canadien des comptables agréés. Il est important de noter que ce changement majeur ne vient en rien remettre en question l'agenda de l'atteinte du déficit zéro.

La qualité des services publics dépend d'abord et avant tout de la compétence des personnes qui dispensent ces services à la population. Est-il besoin de le souligner, les employés des ministères et des organismes sont la première ressource du gouvernement. C'est avec leur collaboration et avec leur imagination que nous avons pu, ces dernières années, traverser une période d'austérité budgétaire sans précédent tout en maintenant des services de qualité. C'est en partenariat avec eux que nous avons amené de nouvelles formes d'organisation du travail.

Depuis 10 ans, l'effectif de la fonction publique a diminué de 15 %. De nombreux changements sont actuellement en cours: redéploiement d'effectif, transformation des mandats et des façons de faire, implantation accélérée des nouvelles technologies. Et ces changements ont des impacts sur les ressources humaines. Aussi devons-nous viser la meilleure utilisation possible des compétences et en faciliter l'adaptation continue et prévisionnelle.

C'est ainsi que des plans de formation spécifique, des outils et des services-conseils ont été développés afin de soutenir les gestionnaires et de leur permettre de mieux gérer les transitions qu'imposent ces changements. De même, la concertation interministérielle a été renforcée pour assurer la pleine mobilité professionnelle et favoriser la meilleure adéquation entre les besoins des organisations et les ressources humaines de la fonction publique.

Enfin, c'est notre volonté de moderniser l'administration publique par l'intégration des nouvelles technologies de l'information et des communications. Un État plus moderne implique une plus grande proximité aux citoyens et des structures plus légères. Le plan de mise en oeuvre de l'inforoute gouvernementale dévoilé récemment vise à rendre les citoyens plus autonomes, les services publics plus accessibles et les entreprises plus concurrentielles en simplifiant et en accélérant leurs transactions avec l'État.

La mise en place de l'inforoute gouvernementale se fonde sur un certain nombre de principes comme la transparence. En effet, l'information doit être accessible dans les limites de la loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels; la sécurité et la confidentialité doivent être assurées lors de toutes ces transactions. Autre principe, la convivialité, c'est-à-dire que la simplification de l'information, de l'accès et des transactions doit devenir la préoccupation constante de l'administration publique. Le libre choix des technologies représente un moyen de plus pour améliorer les services. Il faut cependant respecter les préférences des citoyens et continuer d'offrir les services de personne à personne, par téléphone ou encore par l'échange de documents sur support papier.

La transformation de l'administration publique par l'autoroute de l'information est déjà amorcée. Il n'y a qu'à constater le foisonnement de projets. Déjà, il existe plus de 130 sites Internet gouvernementaux accessibles à tous. Ces sites diffusent de l'information sur les organisations en question, leur administration, leurs activités, leurs programmes, les biens et les services qu'elles dispensent, leurs réalisations, leurs publications, les lois et les règlements qui les régissent. De plus, on compte actuellement 117 nouveaux projets dans les ministères, projets visant à offrir ou à améliorer l'accès à l'information et aux services pour les citoyens et les entreprises.

Je vous en livre quelques exemples. Toute personne intéressée à occuper un emploi dans la fonction publique peut, depuis novembre dernier, par le truchement du site Internet du Conseil du trésor, consulter la description des emplois disponibles. Ce site reçoit environ 20 000 consultations par mois. Le grand public aura bientôt accès à la banque de renseignements de Communication-Québec par le biais du réseau Internet. Il s'agit de 4 000 dossiers d'information vulgarisée sur les programmes et les services offerts par les gouvernements du Québec et du Canada.

Les employeurs, pour leur part, ont déjà la possibilité de verser les cotisations dues à la CSST en utilisant un formulaire électronique. Ils pourront de la même manière transmettre sommaires et relevés au ministère du Revenu. En éducation, il sera possible dans moins d'un an d'obtenir par Internet des relevés de notes et différentes attestations d'études secondaires. Par la suite, ce sont les demandes d'aide aux études qui pourront ainsi être formulées. Ce sont là quelques exemples seulement, mais qui illustrent que les technologies de l'information et des communications conduisent à réinventer littéralement les services directs offerts par l'administration publique.

Par ailleurs, à l'interne, c'est à une véritable révolution qu'est convié le personnel de la fonction publique, dont l'inforoute gouvernementale décuplera le potentiel d'innovation. La plupart des processus de travail seront affectés, voire transformés. Les citoyens et les entreprises pourront communiquer de façon électronique avec les employés affectés directement à la prestation des services. Les efforts consacrés à la formation des employés de l'État seront donc majeurs. La formation est, en effet, une condition essentielle pour tirer tous les bénéfices des changements technologiques. Permettre aux citoyens et aux entreprises d'effectuer des démarches administratives et d'accéder à l'information gouvernementale sans égard aux contraintes de temps ou de distance est devenu une caractéristique de base de toute administration moderne. Un État plus simple, plus transparent, plus accessible et performant, voilà ce que nous devons réaliser.

M. le Président, notre gouvernement s'est engagé à assainir les finances publiques. Cet engagement est en bonne voie d'être tenu. L'action du gouvernement en matière de dépenses a permis au gouvernement de respecter les objectifs financiers que nous étions fixés, contribuant à rétablir la crédibilité financière du Québec. À compter de 1998-1999, il s'agit de stabiliser les dépenses à un niveau permettant de conserver la solidité financière de l'État. Les plus exigeantes mesures d'économie sont donc chose du passé, mais la rigueur et la vigilance seront toujours de mise. Ce redressement aura été une occasion de changements en profondeur. Nous devons dorénavant gérer de façon encore plus efficace les services publics afin d'en améliorer sans cesse la qualité et d'en abaisser le coût.

Stabilisation des dépenses et modernisation de l'État, voilà qui résume la signification de ce budget de dépenses 1998-1999. Dès l'an prochain, le déficit sera éliminé. Nous aurons ainsi redonné aux Québécoises et aux Québécois un État qui sera doté de services publics mieux adaptés, plus efficaces et plus près des citoyens, et qui disposera dorénavant d'une véritable marge de manoeuvre pour faire face aux défis du XXIe siècle. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le président du Conseil du trésor. Nous céderons maintenant la parole au député de LaFontaine, en lui rappelant qu'il reste un temps de 29 minutes à votre groupe parlementaire. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Contrairement au ministre des Finances, nous ne partageons pas son euphorie et son nombrilisme lorsqu'il parle de son budget, et pour des raisons très simples. Il n'est de secret pour personne en cette province, au Québec, en ce pays, que nous traversons actuellement une période extrêmement difficile, que des dizaines de milliers de nos concitoyens, de nos compatriotes sont sans emploi, que les hôpitaux connaissent des coupures extrêmement importantes, que nos concitoyens ne reçoivent plus les soins de santé pour lesquels ils ont payé et dont ils ont besoin pour assurer leur santé, pour assurer leur bien-être et leur survie en cette société.

Il est évident aussi pour nos concitoyens, contrairement aux allégations du ministre qui semble dire que tout va bien, que ça va mal: l'emploi ne se crée pas, la croissance n'est pas au rendez-vous. Et ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les derniers chiffres, les dernières statistiques qui sont sorties. En effet, alors que partout dans le monde occidental et industrialisé il y a croissance importante, il y a création d'emplois, il y a réduction du fardeau fiscal, eh bien, au Québec, nous connaissons le contraire: nous connaissons une croissance inférieure à celle du Canada, d'une façon très importante. Au Canada, actuellement, la croissance est aux environs de 3,7 %. Et qu'avons-nous ici, au Québec? Nous avons un maigre 2,6 %.

(11 h 20)

Comment se fait-il? Pourquoi? Quelles sont les raisons qui justifient cela? Quels sont, M. le Président, les effets et les causes de ce manque de croissance? Les réponses devraient être dans le budget. Les réponses auraient dû être dans un budget qui permette aux Québécois et Québécoises d'espérer la reprise de cette croissance, d'espérer retrouver grâce à cela leur emploi et voir leur fardeau fiscal baisser.

Que retrouvons-nous à la place? Des coupures, des coupures et encore des coupures. M. le Président, juste au niveau de l'éducation, s'il y a un domaine qui est très important, qui est primordial pour une société, c'est bien celui de l'éducation, car c'est là que nous allons former les futurs travailleurs, les futurs cadres et les futurs dirigeants de notre société. C'est là que les Québécois et les Québécoises vont acquérir les connaissances nécessaires à pouvoir affronter l'avenir, se placer sur le marché du travail et devenir autonomes et indépendants. Car la vraie indépendance, en effet, contrairement à nos amis qui la voient dans les textes constitutionnels, elle passe par l'autonomie, par le travail et par l'indépendance financière de chacun lorsqu'il est capable de gagner sa vie sans dépendre de l'État. C'est ça, la vraie indépendance.

Alors, M. le Président, juste rappeler rapidement, dans ce budget, l'aide financière aux études. On baisse les bourses... pour des prêts de 39 000 000 $ par année pour l'année 1998-1999. Ça, ça va avoir des conséquences. C'est quoi, les conséquences de baisser ces bourses-là sur les étudiants? Deux conséquences: ou les étudiants vont s'endetter encore plus ou certains jeunes ne pourront pas avoir accès à l'éducation parce qu'ils n'auront pas les moyens de se la payer. C'est ça, le problème lorsqu'on baisse les bourses. Alors, une grande partie vont s'endetter, vont, après avoir terminé leurs études, commencer avec une dette très importante.

Est-ce que c'est là les préparer et les aider à affronter l'avenir, leur dire: Écoutez, les jeunes, allez-y, relevez vos manches, travaillez, allez bâtir, gagnez, faites évoluer notre société québécoise, vous avez étudié, on vous a donné cette formation, on vous a donné cette habileté? Non, M. le Président. On retrouve dans le budget une coupure de leur taux de bourse. C'est ça, le message qu'on leur envoie. Étudiez, les jeunes, mais, nous autres, on va vous taxer parce que, plus tard, vous aurez à le payer ou à le rembourser ou alors vous n'avez pas le droit, vous ne pouvez pas y aller parce que vous n'êtes pas capables d'assumer l'entièreté des dépenses. Ça, M. le Président, c'est extrêmement déplorable et c'est dommage.

Prenons l'enseignement collégial, M. le Président. Et je le sais, j'ai moi-même dans ma circonscription un cégep très intéressant, très important qui a été réalisé par l'ancien gouvernement, par M. Bourassa et moi-même comme député à l'époque, qui est le cégep Marie-Victorin qui est maintenant un des phares dans la mode au Québec. Eh bien, 56 500 000 $ de baisse des crédits. Depuis que le Parti québécois a été élu, depuis que ce gouvernement a été élu, 213 000 000 $ de baisse. Les conséquences, c'est quoi, M. le Président? Eh bien, les conséquences, c'est les coupures directes aux étudiants. C'est clair, on les envoie dans les écoles, on coupe leurs bourses, on baisse leurs bourses pour essayer de les limiter ou de les endetter et, quand ils arrivent là, on coupe les services et on coupe les moyens de leur donner de l'enseignement, on coupe les moyens de leur donner de la formation.

Qu'est-ce qu'on a coupé, M. le Président? Pas loin de 1 200... On a aboli 1 200 postes de professeurs, de professionnels, d'employés de soutien et de cadres dans l'enseignement collégial. Pas 200, pas 150, 1 200! Imaginons l'impact que ça a sur la qualité d'enseignement de nos jeunes. Et le ministre a le culot de nous dire que c'est un budget qui va regarder sur l'avenir et qui va créer de l'emploi, qui va assurer le développement du Québec. Il restreint, au contraire, la formation. Il restreint nos jeunes. Il restreint leur capacité d'acquérir des habiletés pour eux, pour regarder sur l'avenir et pour se lancer dans la société. C'est ça qu'il fait, son budget, lorsqu'il coupe dans l'enseignement collégial, dans les services aux étudiants du collégial, M. le Président.

Ce n'est pas regarder vers l'avenir, ça. C'est bêtement un comptable qui additionne des colonnes de chiffres et qui dit: J'équilibre les plus et les moins. C'est ça, l'exercice. Ce n'est pas un exercice de gouvernement, ce n'est pas un exercice d'avenir, un exercice d'espoir, de mobilisation, d'encouragement; exercice de comptable, le ton monocorde. Au lieu de la feuille d'impôts qui sort à la fin, c'est le compte de taxes ou de coupures que les citoyens doivent absorber.

Enseignement universitaire, M. le Président. Si l'enseignement primaire, secondaire est très important, l'enseignement collégial, très important aussi, eh bien, l'enseignement universitaire, c'est là que nos futurs cadres, c'est là que les dirigeants, c'est là que les élites de notre société vont se former. Dans tous les pays du monde, les universités sont le lieu où les élites d'un pays, eh bien, vont acquérir leur formation.

Nous, au Québec, on a encore une responsabilité plus importante. Étant le seul État, ou la seule province francophone, ou le seul endroit où il y a des francophones en Amérique du Nord, on doit voir des dirigeants et des élites qui, lorsqu'ils vont à l'université, puissent acquérir le maximum de formation afin de performer encore plus que les autres, parce que le défi est plus difficile à relever pour un francophone en Amérique du Nord que pour un anglophone au même niveau. Et qu'est-ce qu'on fait, M. le Président? On n'encourage pas nos universités, on ne bâtit pas dans les universités, on ne met pas de nouveaux programmes, on ne donne pas des crédits nouveaux. Non. On coupe, M. le Président.

Crédits budgétaires: 20 000 000 $ en 1998-1999, 20 000 000 $ de moins. Est-ce que c'est normal? Est-ce que c'est logique à une époque où, dans la région de Montréal, 40 000 emplois de haut niveau ne sont pas comblés parce qu'on ne trouve pas les ressources humaines nécessaires par manque de formation, des emplois de haute technologie? Et on coupe 20 000 000 $ dans ce domaine-là.

Ça, c'est un budget qui regarde vers l'avenir? Ça, c'est un budget intéressant? M. le Président, c'est un budget qui est désolant, un budget qui, encore une fois, regarde vers l'arrière et fait assoupir et ratatine la société québécoise dans ce qu'elle a de plus dynamique et de plus d'espoir et d'avenir: sa jeunesse universitaire. La voilà, la vraie réalité.

M. le Président, depuis que ce gouvernement a été élu, en 1994, des compressions de 332 000 000 $ ont eu lieu dans le système universitaire au Québec. 332 000 000 $. On ne parle pas de petits chiffres, là, 332 000 000 $ dans le domaine qui est celui dans lequel on devrait mettre le plus d'efforts pour aller vers l'avenir. Ne pas regarder le passé. Pour l'avenir. Bien non, on coupe.

Qu'est-ce que ça a fait, M. le Président? Les universités ont accumulé des déficits. On pellete le déficit du gouvernement dans les universités, 72 000 000 $ de déficits accumulés dans les universités. Ah! ils ne paraissent plus dans les livres du gouvernement. Le ministre peut se targuer d'avoir baissé ses dépenses, mais il les refile aux universités, en particulier dans le domaine de l'enseignement universitaire.

Est-ce que c'est une bonne manière d'agir? Moi, je crois que c'est encore là quelque chose qui va à l'encontre du discours nombriliste et jovialiste du ministre. M. le Président. 900 postes de professeurs abolis dans les universités au Québec, est-ce que vous trouvez normal dans cette situation que nous connaissons actuellement qu'on abolisse 900 postes de professeurs dans les universités québécoises? Bien, moi, je dis: Non. Au contraire, nous devrions engager des professeurs afin de pouvoir enseigner aux jeunes les nouvelles technologies, les nouvelles façons de travailler, afin d'enseigner aux jeunes de quoi regarder pour l'avenir, l'an 2000.

Nous sommes à l'aube de l'an 2000 et que se passe-t-il au Québec, dans ce beau Québec administré par ce gouvernement? Il se passe, M. le Président, que, contrairement à partout dans le monde, on coupe. On coupe dans l'éducation, dans l'enseignement, et en particulier dans les universités alors qu'il y a un taux de chômage très important dans notre jeunesse. Et on sait, M. le Président, que, lorsque les jeunes font des études collégiales ou alors universitaires, eh bien, ils en trouvent, du travail.

La grande majorité des Québécois et des Québécoises qui peuvent avoir des études universitaires dans les bons domaines, dans les bons secteurs, finissent par décrocher un travail dans les six à huit mois de leur sortie de l'université. Alors, ça devrait encourager ce gouvernement. Et, au lieu de couper, au lieu d'enlever de l'argent dans ce domaine-là, de couper des professeurs, eh bien, encore investir un peu plus. Lorsque ces jeunes-là travailleront, ils rapporteront, ils feront évoluer notre société, ils feront évoluer l'économie, et ça nous permettra, M. le Président, d'avoir des rentrées fiscales, ça repartira la croissance.

Et, si la croissance n'est pas au rendez-vous, c'est, entre autres choses, à cause de cette mentalité, de cette manière du gouvernement du Parti québécois, qui est non pas de regarder pour l'avenir, pour le futur, d'encourager les forces vives de notre société, non, de les restreindre, de les taxer, de les couper, de les diviser entre les bons et les pas bons, les jeunes et les pas jeunes, ceux qui vont à l'université et ceux qui ne pourront pas y aller parce qu'on augmente leurs bourses, ceux qui sont endettés et ceux qui ne sont pas endettés, les anglophones et les francophones. C'est ça, la priorité de ce gouvernement, c'est ça, sa seule préoccupation, ce n'est pas vraiment de faire en sorte de remettre le Québec sur les rails.

Alors, M. le Président, en même temps, que fait-on pour les familles québécoises? Pour les familles québécoises, on a coupé les allocations familiales, on a coupé l'allocation pour jeunes enfants et on a coupé l'allocation à la naissance. Et on l'a remplacé par quoi? Par des places de garderies à 5 $, pas accessibles pour tout le monde.

(11 h 30)

Bien, moi, je vais vous dire, M. le Président, une jeune mère de famille qui accouche d'un enfant, à qui on a coupé l'allocation à la naissance, d'abord, elle n'a pas une cenne alors qu'il y a des frais très importants qui rentrent dans la famille; en plus de ça, pour avoir peut-être une petite compensation, il va falloir qu'elle attende que son enfant ait trois ans pour aller à la garderie, puis peut-être sans avoir de place non plus. C'est ça, la politique familiale du Parti québécois? C'est ça, la politique familiale du Québec? C'est avec ça qu'on veut relancer la Québec? Non, M. le Président.

Encore une fois, on voit la manière comptable de ce gouvernement: les chiffres, la colonne de chiffres, pas d'imagination. L'oeil fixé sur un chiffre magique: On a atteint le déficit zéro. Mais ils ne l'atteignent pas. Ils ne l'atteindront pas, M. le Président, parce qu'ils le camouflent, ils font en sorte de délier, de mélanger les fonds, d'endetter les universités et de faire des fonds dédiés dans le transport. On répartit les argents ailleurs et, en même temps, on est en train de détruire notre société.

M. le Président, les coupures dans le domaine familial sont inadmissibles. Après le scolaire, après l'enseignement secondaire, universitaire, collégial, voilà qu'on coupe maintenant dans l'aide aux familles. Et c'est ce qu'une société devrait chérir le plus aussi, parce qu'une société qui n'a pas de politique familiale et qui n'encourage pas les familles autrement que par des places à 5 $ dans les garderies est une société qui ne fera plus d'enfants, et qui va se restreindre, et qui ne regardera pas vers l'avenir, et qui ne progressera pas. Et ça, M. le Président, je ne peux pas l'accepter.

Alors, j'aurais longtemps à parler sur ce budget. En ce qui me concerne, ce n'est pas un budget d'avenir; c'est un budget qui taxe plus les gens, c'est un budget qui coupe les services, qui n'aide pas la société à évoluer et un budget surtout qui touche ce qu'il y a de plus sensible dans une société, soit la santé, l'éducation et la famille, M. le Président. Alors, c'est un mauvais budget. Nous ne sommes pas d'accord avec ça.

Ce que nous demandons au gouvernement, vu qu'il n'a plus d'idées, qu'il est juste capable de mettre des chiffres les uns après les autres, nous lui demandons de prendre ses responsabilités et de déclencher des élections. Ça fait quatre ans que vous êtes là. Le chômage n'a pas changé, la croissance est en retard, les coupures sont partout, les Québécois, M. le Président, sont rendus sans espoir. Il est temps de redonner à cette société de la vigueur et un regard sur l'avenir. Pour ce faire, déclenchez donc les élections, ça presse. Les gens l'attendent, car il y a d'autres personnes, si vous n'êtes pas prêts à le faire, qui sont prêtes à relever les défis de l'avenir pour le Québec et les Québécois.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Nous allons maintenant céder la parole... M. le député de Vachon.

M. Payne: Non, non, c'est plutôt une question de règlement, M. le Président, 213. Est-ce que le député accepterait de ma part une question, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: M. le Président, si je comprends bien, c'est en vertu de...

Le Vice-Président (M. Pinard): De l'article 213 de notre règlement.

M. Gobé: ...l'article 213. Alors, je disais, M. le Président: S'il a des questions à poser, qu'ils déclenchent les élections puis on leur répondra aux élections.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de LaFontaine. Nous cédons maintenant la parole au député de Vachon en vous rappelant, M. le député, qu'il vous reste un temps de parole de sept minutes.


M. David Payne

M. Payne: Très bien. À ce moment-là, je m'en doutais un peu, M. le Président, que le député ne prendrait pas une question à laquelle il n'est pas facile à répondre pour un parti de l'opposition. Je dis bien «opposition» parce qu'ils sont en opposition par rapport à notre politique pour les bourses du millénaire du gouvernement d'Ottawa qui vise à arracher 2 000 000 000 $, pour les prochaines années, des contribuables à travers le Canada pour faire en sorte que, nous, au Québec, on recevrait théoriquement à peu près 250 000 000 $. Bref, ils assumeraient à notre place la juridiction qui appartient au Québec. Et le parti d'en face n'a rien dit, ni son chef, pour dénoncer cela. Lorsqu'il parle de coupures, de compressions budgétaires, il devrait faire référence à la vérité, la réalité d'un gouvernement d'Ottawa qui abroge, qui retire de l'argent des Québécois, pour faire quoi? Pour donner ça aux organismes non lucratifs, les organismes non gouvernementaux, qu'ils puissent à leur façon saupoudrer les subventions. Et ça, à l'encontre de la position de nos universités.

Est-ce que le député aussi, en parlant de ça, peut admettre le fait qu'en ce qui concerne les bourses nous avons le système de bourses le plus généreux au Canada? Est-ce qu'il peut admettre le fait que le taux d'endettement à travers le Canada, en moyenne, les étudiants, c'est aux alentours de 25 000 $? Nous autres, c'est beaucoup moins, aux alentours de 11 000 $ par étudiant. Nous, au Québec, on gère nos fonds depuis des années avec une certaine habileté, avec une responsabilité qui est très évidente dans les chiffres.

Est-ce qu'il admet que notre système est bien plus généreux? Est-ce qu'il peut regarder le dernier budget? Est-ce qu'il peut voir et admettre avec nous ce que nous avons fait pour la création d'emplois? Est-ce qu'il peut imaginer ce qu'on avait fait, combien de milliers de foyers voient maintenant le fardeau fiscal réduit? Est-ce qu'il peut admettre avec nous que les investissements pour les prochains 18 mois vont aller jusqu'à 5 000 000 000 $? Est-ce qu'il est témoin d'un mouvement de l'économie qui était parfaitement absent pendant le temps de l'opposition? Est-ce qu'il peut admettre avec nous que son propre gouvernement n'avait que de l'irresponsabilité à l'égard d'un déficit absolument honteux? Est-ce qu'il peut admettre avec nous, que ce soit Moody's, que ce soit Poor's, que ce soit n'importe quelle maison internationale de crédit, que la réputation du Québec était dans la cave parce qu'on était du monde qui n'avait pas de parole? Est-ce qu'il peut admettre avec nous qu'il y a une corrélation directe entre le «credit rating», le crédit qui est accordé à une province, une relation directe entre cela et la liberté de dépenser pour les programmes essentiels? 1 000 000 000 $, 2 000 000 000 $, 3 000 000 000 $, 5 000 000 000 $, 6 000 000 000 $.

Pensez, imaginez l'extraordinaire, l'incroyable fatalité à laquelle faisait face le Québec avec la situation budgétaire de son gouvernement il y a quatre ans. Est-ce qu'il veut vraiment poser la question? Est-ce qu'il veut que, nous, on pose la question aux Québécois lors d'une élection, lui qui refuse de prendre une question de moi en ce qui concerne le fonds du millénaire du gouvernement d'Ottawa? Est-ce qu'il est prêt à accepter le fait que, nous, on va poser les questions aux Québécois: Est-ce qu'on veut retourner en arrière? Est-ce qu'on veut vraiment retourner en arrière ou est-ce qu'on veut garder une économie qui est en pleine expansion?

Je n'ai pas besoin de regarder plus loin que dans mon propre comté, mais, s'il le veut, on peut regarder les chiffres à travers le Québec, et ils sont évidents. Nous avons vu ça à la période des questions hier. Il n'est pas capable de revenir à la charge pour poser des questions à nos ministres en ce qui concerne l'extraordinaire envol que la relance économique a pris au Québec depuis les derniers quelques mois. Oui, très bientôt on va être prêts à poser les questions aux Québécois, avec quelque chose à défendre. On se souvient très bien des commentaires de son ancien ministre, Marc-Yvan Côté, qui avait dit que le ministre de la Santé était le meilleur qu'on ait jamais vu, qu'il avait fait, bien sûr, ce qu'eux ils ont peur de faire. C'est ça, le gouvernement qu'ils étaient, un gouvernement de peureux. Alors, je pense que, lorsque le député refuse de prendre une question, c'est parce qu'il n'a pas la bonne réponse, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Vachon. Nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de La Pinière en lui rappelant qu'elle a un temps de parole de 20 minutes. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, à entendre le député de Vachon, je pourrais abonder dans le même sens que lui sur un point: oui pour les élections. Pour ce qui est du reste, c'est la population du Québec qui va le déterminer. Étant une députée présente sur le terrain, notamment dans le comté de Vachon, je peux vous dire que, si ce gouvernement veut déclencher les élections, il va avoir une réponse immédiate de la population du Québec, la population du Québec qui souffre des politiques de ce gouvernement, des coupures drastiques dans les services de la santé et dans les services de l'éducation, dans les services directs à la population. La population n'attend que ce moment approprié pour envoyer un signal clair à ce gouvernement. Le taux d'insatisfaction à l'égard de ce gouvernement est tel qu'il est en train de fondre à vue d'oeil.

(11 h 40)

M. le Président, j'ai parlé à des gens sur le terrain. À ce qu'on me dit, les gens ne réalisent même plus que ce gouvernement est au pouvoir depuis quatre ans à peine tellement les dommages sont grands. Les gens pensent qu'il est là depuis deux ou trois mandats tellement il est usé. Alors, on veut parler d'élections, on est prêts, n'importe quel temps. Dans le comté de Vachon, je peux vous assurer que, si ce gouvernement annonce des élections, le prochain député de Vachon, ça va être un député libéral ou une députée libérale, parce que la population en a assez des politiques de ce gouvernement.

Alors, M. le Président, à cette étape de l'adoption des crédits 1998-1999, je tiens à exprimer, au nom de la population que je représente dans le comté de La Pinière et au nom de l'ensemble de la population du Québec, mon insatisfaction, je dirai ma profonde insatisfaction à l'égard de ce gouvernement, un gouvernement qui s'est fait élire sur des belles promesses. On se rappellera du slogan alléchant L'autre façon de gouverner . Oui, M. le Président, L'autre façon de gouverner , on en a une petite idée maintenant. Aussitôt que le Parti québécois est arrivé au pouvoir, ce gouvernement s'est mis à saccager littéralement tous les acquis majeurs de la société québécoise. Des coupures drastiques ont été opérées dans les domaines de la santé, de l'éducation, mettant carrément en péril les soins aux malades. On n'a jamais vu autant de gens s'adresser à leur député pour avoir accès à des soins, à des lits dans les hôpitaux, à des opérations chirurgicales que depuis que ce gouvernement est au pouvoir.

Et, à défaut de pouvoir générer des revenus à cause de son option de séparation, M. le Président, qui nous pèse par-dessus la tête comme une épée de Damoclès, à cause de son incapacité à générer des revenus, à dynamiser l'économie, ce gouvernement est en train d'appauvrir les Québécois. Il est en train de les appauvrir parce qu'il n'a pas cessé de les taxer, il n'a pas cessé de couper dans les services directs à la population. Encore aujourd'hui, au moment où on aborde l'adoption des crédits, on note une diminution de 128 000 000 $ dans le budget de la santé et de 323 000 000 $ dans celui de l'éducation.

Et qu'est-ce que ce gouvernement nous dit? Il sort le credo du déficit zéro qui, M. le Président, on se rappellera, est une idée issue du programme du Parti libéral du Québec. Et nous étions d'accord avec l'idée du déficit zéro à condition de l'appliquer sans mettre en cause les missions essentielles de l'État, sans mettre en cause les services directs à la population, sans mettre en cause les services de santé, parce qu'on touche aux personnes les plus vulnérables, les plus démunies de notre société. Et nous sommes tous, autant que nous sommes, dans cette Assemblée, des personnes vulnérables dès lors qu'on aura besoin de soins de santé.

Et j'inviterai les députés de l'autre côté de la Chambre, M. le Président, à aller faire un tour dans les hôpitaux. Moi, je l'ai fait dans les hôpitaux de ma région. Je peux vous dire qu'en parlant avec le personnel soignant, avec le personnel administratif, avec les médecins et surtout avec les malades on réalise à quel point ce gouvernement a saccagé les services de santé au Québec, et c'est dramatique. Et, si chacun et chacune de ces députés de l'autre parti, M. le Président, décidait d'aller faire un tour dans leurs hôpitaux respectifs, dans les centres d'accueil pour les personnes âgées, il se rendrait compte à quel point les services ont été détériorés par l'action de ce gouvernement, par les politiques de ce gouvernement, par ses coupures drastiques et aveugles.

On nous chante le déficit zéro pour justifier toute cette improvisation, toute cette catastrophe. M. le Président, il y a des façons de faire avec lesquelles on aurait pu être d'accord pour atteindre l'objectif du déficit zéro, mais ce n'est pas la façon que le gouvernement a adoptée. Parce que tout ce qu'il a fait, c'est de pelleter dans la cour des autres administrations, son déficit à lui. Mais, ultimement, ce sont les citoyens qui paient, ultimement le déficit est rendu dans la poche des contribuables parce qu'ils n'arrêtent pas d'être taxés par ce gouvernement.

Vous voulez une indication? Le député de Vachon qui grogne là-bas, M. le président. Le ministre... Il faut dire qu'actuellement on parle du déficit zéro, mais on l'a pelleté dans la cour des hôpitaux, déficit de près de 400 000 000 $ dans les hôpitaux; des universités, 400 000 000 $ de coupures; des cégeps, 30 cégeps sur 48 sont déficitaires; des commissions scolaires, on leur a pelleté 500 000 000 $. Et on a créé une multitude de fonds spéciaux pour cacher le déficit et les dépenses du gouvernement.

Et on parle d'avoir atteint le déficit zéro, alors que les comptes publics, en dehors de ceux du gouvernement, sont en souffrance. On ne peut pas accepter, on ne peut pas tolérer un tel procédé. La population du Québec en a assez de ce gouvernement. Qu'ils aient le courage de déclencher des élections, et on va leur donner la réponse, M. le Président; elle va être éclatante et sans équivoque.

Alors, revenons aux coupures dans la santé, M. le Président, pour rafraîchir la mémoire des gens de l'autre côté de cette Assemblée. Je citerais un article de La Presse , sous la signature d'André Pratte, Québec dépense-t-il plus ou moins d'argent pour la gestion du système de santé? Et qu'est-ce qu'on peut lire dans cet article de La Presse du 30 octobre 1997? Je le cite au texte: «Les dépenses d'administration dans le système de santé québécois ont augmenté au cours des dernières années alors même que les sommes consacrées aux soins diminuent.»

M. le Président, ce gouvernement, c'est un gouvernail sans boussole; ils ne savent même pas quel est l'ordre des priorités. C'est l'une des conclusions d'une analyse produite par deux économistes de l'UQAM. Et ce n'est pas l'opposition qui parle, ce n'est pas de la partisanerie, c'est des chercheurs de l'Université du Québec à Montréal, une université qu'on ne peut pas accuser d'être partisane de ce côté de la Chambre. Alors, deux professeurs d'économie à l'université, deux spécialistes en économie de la santé, disent ceci: «Les dépenses d'administration à l'intérieur du domaine de la santé et des services sociaux sont hors de contrôle par rapport aux dépenses dans les services à la population.» Et qui signe, M. le Président, ce constat? C'est deux chercheurs de l'Université du Québec, Pierre Ouellette et Pierre-Yves Crémieux. Ça, c'est une indication que ce gouvernement a perdu le sens des priorités et qu'il est temps qu'il aille faire ses devoirs. Dans l'opposition, on lui offre ça. On est prêts, nous, à prendre le pouvoir et à remettre le Québec sur les rails.

Dans le domaine de l'éducation, une autre mission essentielle du gouvernement, encore une mission qui est saccagée par les politiques improvisées de ce gouvernement. Qu'est-ce qu'on constate, M. le Président, dans le domaine de l'éducation? Bien, encore une fois, on a vu des gens sortir sur la place publique pour dénoncer les coupures du gouvernement. La situation est très dramatique en Montérégie, une région que je connais bien et que la ministre de l'Éducation et ministre responsable de la Montérégie devrait connaître, mais elle passe tellement en coup de vent, avec les courts briefings de ses attachés politiques, qu'elle n'a même pas encore intériorisé la géographie de la Montérégie dans sa tête. Elle la trouve d'ailleurs trop vaste pour ses dossiers.

(11 h 50)

Donc, la région de la Montérégie, M. le Président, souffre, comme bien des régions du Québec, mais je vais focaliser sur la Montérégie. Les coupures de la ministre dans le domaine de l'éducation, et plus spécialement au niveau collégial, ont été dénoncées. Elles ont été dénoncées, ces coupures, par les gens du milieu. Mais le gouvernement préfère investir dans les chimères de la séparation au lieu d'investir dans la relève, dans la formation de nos jeunes, dont ceux, M. le Président, qui vont nous succéder aux postes de commande. La qualité de l'enseignement se détériore de plus en plus dans nos écoles, dans nos cégeps, dans nos universités. Et pourquoi? Parce qu'il y a un manque de ressources. Tout le monde le dit. On a des bons professeurs, on a du personnel qui est motivé, des étudiants qui veulent étudier, mais il n'y a pas de ressources. Ce gouvernement refuse de leur donner les ressources appropriées.

Et le budget 1998-1999 n'apporte aucune solution tangible à ce problème, et encore moins les crédits sur lesquels on s'est penchés il y a deux semaines. Je vous donne un exemple. Le 18 février dernier, un événement exceptionnel a eu lieu dans le comté de Taillon, représenté par la ministre de l'Éducation. Les cloches des églises de Longueuil ont sonné pendant que des manifestants scandaient aux portes du bureau de la ministre de l'Éducation, et je cite: «Oui à l'éducation, finies les compressions». Un événement qu'on n'a jamais vu, que même les gens du milieu oecuménique sonnent la cloche pour dire à la ministre: Assez, c'est assez! Et ça, au moment où il y avait des manifestants à la porte de son bureau. Alors, à la une du Courrier du Sud du 22 février 1998, François Laramée écrit ceci, et je le cite: «Pour la première fois dans l'histoire du collège Édouard-Montpetit, la direction, les élèves et les syndicats se sont rassemblés pour demander au gouvernement que cessent toutes nouvelles compressions dans les cégeps.»

Les crédits, M. le Président, nous annoncent encore des coupures drastiques dans le milieu de l'éducation. La ministre de l'Éducation et députée de Taillon n'a rien compris, n'a rien entendu, à telle enseigne que le président du syndicat des professionnels du collège Édouard-Montpetit a même déclaré, et je le cite, parce que c'est assez évocateur et révélateur: «Si vous pensez que l'éducation coûte cher, dit-il, essayez donc l'ignorance pour voir.» Ça veut tout dire, M. le Président.

Ce gouvernement-là, c'est un gouvernement qui veut niveler l'éducation par le bas, au moment où tous les spécialistes nous disent que, pour l'an 2000, le marché du travail exigera des aptitudes et des attitudes et des compétences extrêmement complexes. Il exigera jusqu'à 15 ans de scolarité pour entrer au marché du travail. La ministre de l'Éducation ne comprend absolument rien à cela. Elle se laisse couper par le ministre dans la mission essentielle qui est celle de l'éducation.

La situation au collège Édouard-Montpetit est très grave, et c'est un exemple édifiant pour la cause qui nous concerne ici aujourd'hui. Le collège Édouard-Montpetit aura 10 000 000 $ à 11 000 000 $ de moins chaque année. Qu'est-ce que cela représente? Ça représente 1 500 $ de moins par étudiant. 1 500 $ de moins par étudiant, M. le Président! Une telle situation ne tardera pas, bien entendu, à se traduire par des coupures de services essentiels aux étudiants.

On le voit, M. le Président, ce gouvernement n'a pas de priorités. Ce gouvernement est un gouvernement de fin de régime. C'est un gouvernement sans gouvernail, un gouvernement qui navigue à vue, poussé par une seule obsession, celle de la séparation. Toutes les décisions économiques, culturelles, sociales et politiques sont prises à travers une seule lunette, celle de la séparation. D'ailleurs, le climat d'incertitude ne cesse de ronger l'économie du Québec. Et tous les spécialistes le disent, l'économie québécoise accusera encore un retard en 1998 et 1999. C'est honteux de lire des choses pareilles alors qu'on nous annonce qu'il y aura une croissance économique dans l'ensemble de l'Amérique du Nord.

Les Québécoises et les Québécois méritent mieux que ce gouvernement. Ils méritent qu'ils aient un ordre des priorités, que le gouvernement se penche sur leurs propres préoccupations et non pas sur son option. C'est le moment approprié pour dire haut et fort à ce gouvernement que, au lieu de passer du temps dans les discussions sur Calgary et sur toutes sortes de choses, au lieu d'inventer des chicanes, au lieu d'inventer des conflits, il faut que ce gouvernement focalise sur l'essentiel. Et l'essentiel, la population du Québec va le lui rappeler, c'est la priorité de la santé, c'est la priorité de l'éducation.

On le voit au niveau des investissements, le Québec traîne de la patte. On est au huitième rang par rapport aux autres provinces dans l'ensemble canadien alors qu'on forme 25 % de la population. Comment ça se fait? Ce sont toutes des indications claires, tangibles qui nous indiquent que ce gouvernement est dû pour aller faire ses devoirs, et ses devoirs, c'est dans l'opposition. Il n'est pas qualifié pour être au pouvoir.

Alors, pendant tout ce temps-là, M. le Président, pendant qu'on discute de choses hypothétiques, notre économie, elle, elle pique du nez. On est à la remorque du Canada. Depuis l'arrivée au pouvoir du Parti québécois, l'économie du Québec a accusé un retard de 1,6 % par rapport à l'Ontario, la province voisine. Pourtant, il y a des coupures en Ontario aussi, mais l'économie va bien. C'est 5 % de déficit dans notre croissance économique sur trois ans, l'équivalent de 1 500 000 000 $ de revenus de moins que le gouvernement n'est pas capable de générer et d'injecter dans notre économie, 1 500 000 000 $ en revenus supplémentaires que le gouvernement aurait pu investir dans l'éducation, investir dans la santé pour donner les services et des services appropriés et adéquats à la population qui ne cesse de le demander, M. le Président.

Alors, je terminerai, M. le Président, en vous disant que, dans l'étude des crédits du ministère dont je suis la porte-parole, j'ai vu que, pendant qu'on demande aux citoyens du Québec de faire des efforts considérables, il y a des dépenses de l'ordre de 400 000 $ dans le protocole: les cocktails, les tapis rouges. Ça, c'est un gouvernement qui est prêt à faire ces dépenses-là, 1 200 000 $ dans les dépenses de voyages à l'étranger après avoir eu l'odieux de saccager la mission essentielle du gouvernement en matière d'affaires internationales où on pouvait, M. le Président, compter sur un réseau de délégations et de bureaux à l'étranger qui faisait l'honneur du Québec et de l'ensemble des Québécois. Ce gouvernement, M. le Président, est un gouvernement usé. Il faut qu'il aille faire ses devoirs. C'est fini. Alors, il faut appeler les élections, et on est prêts.

(12 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de La Pinière. Nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin. Mme la députée.


Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Je vous remercie. M. le Président, j'ai écouté avec attention les propos de la députée de La Pinière. Vous me voyez tout à fait estomaquée par ses propos, parce qu'on habite, en fait, la même région, la Montérégie, et nous n'avons pas tout à fait la même vision. Vous me direz: C'est probablement vrai, puisqu'on n'occupe pas tout à fait les mêmes banquettes. Mais, par contre, il y a des réalités à côté desquelles on ne peut passer, et notamment il y a des statistiques qui démontrent que, en Montérégie, c'est là où le taux de chômage est le plus faible, et notamment chez les jeunes. Il faut croire qu'il y a une certaine synergie au niveau de l'économie qui fait en sorte qu'il y a des choses qui se passent, qu'il y a des choses qui se créent, qu'il y a de l'emploi qui se crée et qu'il y a des entreprises et des industries qui sont assez prospères chez nous, M. le Président, d'autant plus qu'il faut dire aussi que nous avons une société de développement économique qui favorise les exportations avec certaines missions à l'extérieur du pays.

Et j'entendais aussi la députée de La Pinière nous dire, nous faire la leçon dans nos comtés en disant: Oups! Attention, c'est dangereux dans vos comtés. Il y aura tous des libéraux dans certains de vos comtés, notamment celui de Saint-Hubert. Je lui ferai rappeler que La Pinière, ce n'est pas très loin de Saint-Hubert. Et, à la venue de son nouveau chef qui est M. Charest, il a annoncé qu'il y aurait des conventions, lui, dans tous les comtés du Québec pour les députés, parce qu'il y aurait peut-être certains choix. Parmi ces choix, M. le Président, je dirais et je ferais un avertissement très amical à la députée de La Pinière, il se pourrait peut-être que, pour le comté de La Pinière, le nouveau chef soit tenté par le maire Paul Leduc qui, lui, a une réputation, une connaissance, en tout cas, de ce milieu-là très développée.

Alors, il faut faire attention. Nous habitons tous des jardins de verre, dans ce contexte, M. le Président, et nous sommes tous et toutes... Nous devons tous faire face à des situations qui, pour le moment, peuvent changer assez rapidement. Ça fait partie de la politique. Donc, à mon avis, j'espère que la députée de La Pinière ne fera plus de leçon à personne parce qu'elle devra, elle aussi, tenir compte de certaines situations qui pourraient lui arriver dans son comté, tout en tenant compte aussi qu'il y a des gens qui pourraient être intéressés aussi, dans son coin. Alors, c'est tout simplement très amical, la façon dont je voulais lui faire le message.

M. le Président, dans la Montérégie, c'est une région où ça fonctionne relativement bien par rapport à la moyenne québécoise. Nous sommes une région dynamique, en pleine croissance. Nous essayons, avec les moyens que nous avons, de développer cette région en concertation, en partenariat et nous sommes en train de réaliser ces objectifs grâce à notre gouvernement. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Marie-Victorin. À ce stade-ci, avant de reconnaître le député de Gaspé, je tiens à mentionner que, sur le temps des indépendants, il vous resterait un temps, après calcul, de deux minutes. Alors, je cède maintenant la parole au député de Gaspé et je vous mentionne qu'il vous reste un temps de... M. le député de Gaspé, je vous indiquerai le temps qu'il vous reste.


M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Il est assez paradoxal d'entendre les députés de l'opposition faire la morale au gouvernement. En fin de semaine, je me suis amusé à réviser une série d'articles de journaux du temps du Parti libéral alors qu'il était au pouvoir et j'ai constaté à mon grand étonnement que dans la santé, par exemple, le gouvernement libéral avait proposé de faire en sorte que les gens aient accès à un seul examen médical annuellement, que le ministre responsable de la Sécurité du revenu à l'époque coupait dans l'aide sociale, se foutait éperdument des conséquences, et, aujourd'hui, on nous accuse d'avoir mis en place des politiques qui feraient en sorte qu'on appauvrit la population. M. le Président, c'est tout le contraire. Le gouvernement du Québec a mis en place une des plus grandes réformes de la décennie en instaurant le régime d'assurance-médicaments au Québec. M. le Président, 1 000 000 de personnes au Québec n'avaient accès à aucune assurance-médicaments. Il y a des familles qui n'avaient pas les moyens de se payer des médicaments, il y a des enfants qui étaient privés de médicaments, il y a des personnes âgées qui étaient privées de médicaments, et l'opposition vient nous dire que ce que nous faisons comme réforme, ce n'est pas bon. M. le Président, aujourd'hui, qu'ils aillent demander à ces gens qu'est-ce qu'ils en pensent de la réforme que M. Rochon a entreprise, le ministre de la Santé.

Dans leur dernier budget, qu'est-ce qu'ils ont fait, les libéraux, antérieurement, pour les régions? Pas grand-chose, M. le Président. Ils nous ont augmenté le chômage, ils nous ont mis en place des politiques qui faisaient en sorte qu'on était moins compétitifs. Nous, on a mis en place, avec le ministre des Finances, les Innovatech Régions ressources, Innovatech qui va permettre à une région comme la Gaspésie, à des régions comme la Côte-Nord, le Bas-Saint-Laurent, le Saguenay–Lac-Saint-Jean, l'Abitibi, de faire lever des projets et de faire en sorte que les nouvelles technologies vont aussi bien s'implanter dans les régions que dans les grands centres.

Récemment, j'entendais le député des Îles-de-la-Madeleine questionner le ministre des Finances concernant un projet de haute technologie à Gaspé. Qu'est-ce qu'il visait, le député des Îles-de-la-Madeleine? Visait-il à faire en sorte que ce projet-là avorte? Le gouvernement a l'intention de soutenir le projet de Surgi-Cure. Le gouvernement a l'intention de leur donner tout le soutien nécessaire pour faire en sorte que, dans les régions, il s'établisse des industries qui vont faire en sorte qu'on va être à la fine pointe de l'actualité, à la fine de la technologie, de faire en sorte que les étudiants qui sortent des universités et des collèges vont pouvoir travailler dans les régions. Et c'est ça qu'on veut faire.

Lorsqu'on regarde le budget, M. le Président, la réduction d'impôts qu'on adresse aux contribuables qui sont moins nantis, la ministre de l'Emploi a annoncé qu'à compter du 1er juin prochain 16 000 familles monoparentales ne subiront plus la coupure du partage du logement que les libéraux avait instaurée. Qui a contribué à l'appauvrissement des familles? Nous, on a créé un nouveau régime. On partage, on identifie c'est quoi, l'allocation pour les enfants et on identifie c'est quoi, l'allocation pour les parents, la prestation de l'aide sociale et la sécurité du revenu pour les adultes, mais on identifie également à quoi correspond le montant que l'on verse mensuellement pour les enfants. Et, quand on explique aux gens qu'il n'y a pas de réduction mais plutôt une différence entre les deux, à ce moment-là les gens se rendent compte qu'effectivement on a tout simplement identifié les données.

Alors, M. le Président, les nouvelles, hein, 14 557 familles monoparentales admises au programme APTE et 14 000 familles monoparentales qui participent au programme APPORT bénéficieront de l'abolition, de la réduction de la prestation pour partage du logement. Qu'est-ce qu'ils ont fait? Eux, ils les ont appauvris, les assistés sociaux, eux, ils ne se souciaient pas du tout des conséquences que pouvait avoir une mesure radicale de coupure sur les prestations. Un montant de 5 $ par mois, c'est important. Nous, la façon dont on veut faire en sorte que les gens s'appauvrissent moins, on a mis le Fonds de lutte contre la pauvreté par l'insertion à la l'emploi, c'est ça que nous avons fait, et nous allons continuer à travailler dans ce sens-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Gaspé. Avant de céder la parole au député de Saint-Laurent pour compléter le débat, je considère, après avoir discuté avec les deux porte-parole des groupes parlementaires, le leader adjoint du gouvernement et le député de Robert-Baldwin, à ce débat que j'ai eu effectivement l'autorisation pour poursuivre le débat après midi. Alors, pour compléter notre débat, ce matin, M. le député de Saint-Laurent.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. Bien sûr, vous m'indiquez en ce moment que la période qui m'est allouée pour compléter le débat n'est que de deux minutes. Alors, ce qui m'incite à me lever, c'est à l'écoute du discours qu'a fait ma collègue la députée de La Pinière, quand elle rappelait, et à juste titre, qu'un des moyens qu'a trouvés la population pour signaler à ce gouvernement son signal de détresse face à la façon dont la population est traitée, ils ont fait sonner les cloches des églises dans le comté de Taillon et dans les environs, ça m'a rappelé que, tout jeune, en revenant de l'école, j'avais entendu les cloches sonner et que la signification qu'on m'avait donnée au retour à la maison, c'est que ça signifiait la fin de la guerre. Les gens avaient trouvé que c'était un moment de réjouissance. Celui de Taillon en était un signal de misère et de détresse.

Le peu de temps qui m'est alloué, M. le Président, et vous m'indiquez que je dois conclure... J'ai la certitude que, dans de nombreux endroits au Québec, quand ce gouvernement de fin de régime signalera à la population qu'il est prêt à se présenter devant elle, en d'autres mots, qu'il déclenchera des élections, le résultat du scrutin permettra à nouveau à l'ensemble du territoire québécois de faire sonner les cloches, d'être libéré d'un gouvernement comme celui que nous avons en face de nous. Merci, M. le Président.

(12 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Laurent. Cette intervention met fin au débat sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1998-1999.


Mise aux voix des rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1998-1999 et présentation, adoption du principe et adoption du projet de loi n° 418

L'Assemblée ayant déjà statué sur les motions de censure ainsi que sur la motion de M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances proposant l'adoption de la politique budgétaire du gouvernement présentée dans le cadre du débat sur le discours sur le budget, conformément à l'article 288 du règlement, l'Assemblée doit maintenant se prononcer sur les rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1999 et sur le projet de loi n° 418, Loi n° 3 sur les crédits 1998-1999. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.


Votes reportés

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Si nous appelions au vote immédiatement, nous serions obligés de faire résonner les cloches comme le souhaite le député de Saint-Laurent. Alors, vous me permettrez d'invoquer l'article 223 de notre règlement et de vous demander de bien vouloir reporter ce vote à la période des affaires courantes, cet après-midi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, ces votes par appel nominal seront donc tenus à la période des affaires courantes, cet après-midi. Considérant l'heure, nous allons maintenant suspendre nos travaux à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 12)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien, veuillez vous asseoir.


Nomination des chef, leader, leader adjoint, whip et whip adjoint de l'opposition

Alors, chers collègues, avant de débuter les affaires courantes, je vous avise que j'ai reçu de M. le whip en chef de l'opposition officielle une lettre datée d'aujourd'hui dont je vous fais lecture:

«M. le Président, au nom de mes collègues de l'opposition officielle, je désire vous informer de certaines décisions prises par le caucus des députés du Parti libéral du Québec.

«La députée de Saint-François, Mme Monique Gagnon-Tremblay, a été désignée pour occuper le poste de chef de l'opposition officielle.»

Des voix: Bravo!

Le Président: «M. Pierre Paradis, député de Brome-Missisquoi, occupera – il continue d'occuper – le poste de leader parlementaire de l'opposition officielle».

Des voix: Bravo!

Le Président: «Et finalement le soussigné, député des Îles-de-la-Madeleine, a été confirmé au poste de whip – en chef – de l'opposition officielle.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, deux nouveautés également, «M. Jean-Marc Fournier, député de Châteauguay, a également été confirmé au poste de leader adjoint...

Des voix: Bravo!

Le Président: ...ainsi que M. Norman MacMillan, député de Papineau, au poste de whip adjoint.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, le député de Papineau étant très calme aujourd'hui... «Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments distingués.» C'est signé: Georges Farrah, député des Îles-de-la-Madeleine.


Document déposé

Alors, je dépose cette lettre.


Affaires courantes

Aux affaires courantes, il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Mais je crois qu'il y a présentation de projets de loi. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, veuillez prendre en considération l'article b de notre feuilleton.


Projet de loi n° 432

Le Président: Très bien. À l'article b du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi n° 432, Loi modifiant l'article 21 du Code civil et d'autres dispositions législatives. M. le ministre de la Justice.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Alors, M. le Président, ce projet de loi modifie l'article 21 du Code civil pour habiliter plus de personnes à consentir, pour une personne majeure subitement inapte, à une expérimentation qui, en raison du court délai dans laquelle elle doit être effectuée, ne permet pas de lui attribuer un représentant légal en temps utile.

De plus, il transfère aux comités d'éthique, désignés ou institués par le ministre de la Santé et des Services sociaux, l'approbation des expérimentations concernant les mineurs ou les majeurs inaptes, qui relève actuellement du tribunal ou du ministre.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, un projet d'intérêt privé, l'article i.


Projet de loi n° 271

Le Président: Alors, à cet article du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 271, Loi remplaçant la Charte de la Ville de Sainte-Foy. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce rapport.


Mise aux voix

Et M. le député de La Peltrie présente le projet de loi d'intérêt privé n° 271, Loi remplaçant la Charte de la Ville de Sainte-Foy. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi?

Des voix: Oui.

Le Président: Adopté. Très bien. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Jolivet: Je fais donc motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre d'État des Ressources naturelles et ministre des Régions.


Rapport annuel du Secrétariat au développement des régions

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je dépose le rapport annuel 1996-1997 du Secrétariat au développement des régions.

Le Président: Alors, le document est déposé. Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Rapport annuel de la Société de la Place des Arts de Montréal

Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. Je dépose le rapport annuel 1996-1997 de la Société de la Place des Arts de Montréal.

Le Président: Le document est également déposé. M. le ministre de la Justice.


Rapport annuel de l'Office des professions du Québec

M. Ménard: Je dépose le rapport annuel 1996-1997 de l'Office des professions du Québec.

Le Président: Alors, ce document est déposé aussi. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Rapport d'activité de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre

M. Rochon: M. le Président, je dépose le rapport d'activité 1996-1997 de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre.

(14 h 10)

Le Président: Très bien. Ce rapport est déposé. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Jolivet: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que, conformément à l'article 392 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, le rapport annuel 1996-1997 de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude et que le ministre de la Santé et des Services sociaux soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Président: Très bien. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.


Nouveau diagramme de l'Assemblée

Alors, pour ma part, je dépose le nouveau diagramme de l'Assemblée nationale, daté du 13 mai, donc d'aujourd'hui.

Alors, il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Sauvé.


S'assurer que la Société d'habitation du Québec demeure l'unique propriétaire des HLM

M. Parent: Oui, M. le Président. M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 92 pétitionnaires qui résident au 6800, boulevard Gouin Est, à Montréal-Nord, dans le comté de Sauvé.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que les 65 000 logements à prix modique (HLM), construits au Québec depuis 30 ans, constituent un patrimoine social et un actif économique important qui mérite d'être conservé au profit de l'ensemble des citoyennes et des citoyens;

«Attendu que le projet de transférer la propriété des HLM vers les municipalités, contenu dans le plan d'action en habitation du gouvernement, menace la survie même des HLM;

«Attendu que le gouvernement promet, depuis mars 1997, des mesures afin de protéger les ménages travailleurs à faibles revenus mais que celles-ci tardent à être adoptées;

«Attendu que les locataires souhaitent obtenir un règlement leur garantissant le droit de participer pleinement à la gestion démocratique et transparente de leur HLM;

«L'intervention réclamée, M. le Président, se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir afin de: s'assurer que la Société d'habitation du Québec demeure l'unique propriétaire des HLM et n'en transfère pas la responsabilité aux municipalités; s'assurer que la SHQ adopte ces mesures positives à l'égard des ménages de travailleurs à faibles revenus à l'intérieur des HLM et n'en augmente pas les loyers; s'assurer, M. le Président, que la loi de la SHQ soit modifiée afin que les associations de locataires puissent s'impliquer réellement dans l'administration de leur logement.»

Je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Merci, M. le député de Sauvé. Cette pétition est déposée. M. le député de La Peltrie.

M. Côté: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition à l'Assemblée nationale par 378 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Louis-Hébert.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que les 65 000 logements à prix modique (HLM) construits au Québec depuis 30 ans, constituent un patrimoine social et un actif économique important qui méritent d'être conservés au profit de l'ensemble des citoyens, citoyennes;

«Attendu que le projet de transférer la propriété des HLM vers les municipalités, contenu dans le plan d'action en habitation du gouvernement, menace la survie même des HLM;

«Attendu que le gouvernement promet, depuis mars 1997, des mesures afin de protéger les ménages travailleurs à faibles revenus, mais que celles-ci tardent à être adoptées;

«Attendu que les locataires souhaitent obtenir un règlement leur garantissant le droit de participer pleinement à la gestion démocratique et transparente de leur HLM;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir afin de: s'assurer que la Société d'habitation du Québec (SHQ) demeure l'unique propriétaire des HLM et n'en transfère pas la responsabilité aux municipalités; s'assurer que la SHQ adopte des mesures positives à l'égard des ménages travailleurs à faibles revenus à l'intérieur des HLM et n'augmente pas les loyers; s'assurer que la loi de la SHQ soit modifiée afin que les associations de locataires puissent s'impliquer réellement dans l'administration de leurs logements.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition, M. le Président.

Le Président: Très bien. Merci, M. le député de La Peltrie. Votre pétition est également déposée. M. le député de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition à l'Assemblée nationale, déposée par 141 pétitionnaires citoyens et citoyennes du comté de Matapédia.

«Les faits évoqués sont les suivants:

«Attendu que les 65 000 logements à prix modique (HLM) construits au Québec depuis 30 ans constituent un patrimoine social et un actif économique important qui méritent d'être conservés au profit de l'ensemble des citoyens, citoyennes;

«Attendu que le projet de transférer la propriété des HLM vers les municipalités, contenu dans le plan d'action en habitation du gouvernement, menace la survie même des HLM;

«Attendu que le gouvernement promet, depuis mars 1997, des mesures afin de protéger les ménages travailleurs à faibles revenus, mais que celles-ci tardent à être adoptées;

«Attendu que les locataires souhaitent obtenir un règlement leur garantissant le droit de participer pleinement à la gestion démocratique et transparente de leur HLM;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir afin de: s'assurer que la Société d'habitation du Québec (SHQ) demeure l'unique propriétaire des HLM et n'en transfère pas la responsabilité aux municipalités; s'assurer que la SHQ adopte des mesures positives à l'égard des ménages travailleurs à faibles revenus à l'intérieur des HLM et n'augmente pas les loyers; s'assurer que la loi de la SHQ soit modifiée afin que les associations de locataires puissent s'impliquer réellement dans l'administration de leurs logements.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Bien, cette pétition est également déposée.

Alors, puisqu'il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, je vous avise qu'après la période de questions et des réponses orales seront tenus les votes reportés sur les rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1999 et sur le projet de loi n° 418, Loi n° 3 sur les crédits 1998-1999.


Questions et réponses orales

Alors, nous allons aborder maintenant la période de questions et de réponses orales. Mme la chef de l'opposition officielle.


Propos du vice-premier ministre concernant des commentaires du chef du Parti libéral du Québec

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Le premier ministre nous a annoncé que lors de son voyage aux États-Unis il entendait, entre autres, corriger les perceptions négatives du Québec. Or, M. le Président, au même moment, on entendait son vice-premier ministre, qui n'en est pas, d'ailleurs, à ses premières frasques, faire une analyse historique biaisée en insultant non seulement le chef du Parti libéral, mais je dirais aussi tous les Québécois et Québécoises qui ne partagent pas cette option, ou son option.

Ma question au premier ministre, M. le Président, est fort simple: Est-ce qu'il entend corriger les perceptions négatives laissées par son vice-premier ministre et lui demander de se rétracter publiquement?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, d'abord, je voudrais féliciter la députée de Saint-François d'avoir accédé à la fonction de chef de l'opposition officielle. Que je sache, c'est la première fois dans l'histoire du parlementarisme québécois qu'une femme occupe ces hautes fonctions, et je voudrais lui dire que nous nous en réjouissons tous. J'aurai donc le plaisir, M. le Président, de répondre à la première question qu'elle aura posée en cette qualité.

Nous allons aux États-Unis, M. le Président, à l'intérieur d'une mission qui s'inscrit dans la continuité du Sommet économique de Montréal. Durant ce Sommet, un groupe de gens d'affaires a fait rapport d'une enquête qui a été menée auprès de décideurs, dans le domaine économique en particulier, sur les perceptions de Montréal et du Québec comme terre d'investissement et comme terre d'accueil pour les travailleurs stratégiques qui sont appelés à se déplacer afin de travailler pour le compte d'entreprises internationales qui opèrent à Montréal.

Au nombre des recommandations, il y avait la proposition que des gens d'affaires et des décideurs de différentes natures au Québec soient mobilisés pour jouer le rôle, de facto, d'ambassadeurs – l'expression a été utilisée comme une image – afin de rencontrer les vis-à-vis à l'extérieur du Québec, dans le reste du Canada comme aux États-Unis en particulier, pour discuter avec les vis-à-vis sur les questions qu'ils se posent sur Montréal et profiter de ce dialogue pour dissiper des mauvaises perceptions et souvent des choses qui ne sont pas connues dans ce que nous faisons à Montréal, les atouts économiques que nous avons, les atouts linguistiques, les choses que nous faisons en termes de tolérance et d'ouverture aux autres.

Et cette mission que nous allons entreprendre la semaine prochaine est la première du genre. Elle a été préparée, je dirais, minutieusement. Ça s'est fait de concert avec le milieu des décideurs de Montréal. Il y aura une soixantaine de personnes qui vont venir avec moi, essentiellement des gens d'affaires de haut niveau, et qui m'accompagneront dans quatre villes américaines où nous aurons des ateliers de travail, des discussions avec des journalistes, des rencontres avec des décideurs de toute nature, et je pense que ce sera très bon pour diffuser les bonnes nouvelles que nous avons à Montréal.

Par contre, je crois comprendre que le chef du Parti libéral s'est ému des propos qu'a tenus le ministre des Finances récemment. Je n'ai pas vu le détail de ce qu'a dit le ministre des Finances, mais j'ai vu ce qu'a dit le nouveau chef du Parti libéral, qui compte sur la bonne volonté du Canada anglais pour assurer la survie du français et qui croit que, si nous parlons français, c'est grâce au Canada anglais, M. le Président.

(14 h 20)

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la chef de l'opposition.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, le premier ministre ne devrait pas changer l'histoire du Québec. Et je lui répète ma question: Lui qui entend redorer l'image du Québec à l'extérieur, est-ce qu'il entend demander à son vice-premier ministre de se rétracter, lui qui, finalement, jette encore de l'huile sur le feu et qui divise les Québécois et les Québécoises?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, nous ne voulons pas changer l'histoire du Québec. Ce n'est pas changer l'histoire du Québec et du Canada que de rappeler que Lord Durham voulait une seule nation au Canada, une nation unique. Ce n'est pas changer l'histoire, c'est rappeler des choses. Justement, il y a actuellement une tentative de camoufler l'histoire, des choses profondes qui sont survenues ici. Il y a des gens, par exemple, qui prétendent, croyez-le ou non, que, si nous parlons français au Québec, c'est grâce au Canada anglais. Imaginez-vous, M. le Président! Ça, c'est changer l'histoire!

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la chef de l'opposition.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, le premier ministre devrait reconnaître que si, justement, on a pu conserver notre français, c'est grâce aussi à une coalition de gens qui ont permis, justement, soit à La Fontaine, lorsque, par exemple, il travaillait pour garder le français au Québec, c'est avec une coalition de démocrates canadiens qu'on a réussi à le faire.

Et je reviens à ma question principale: Est-ce que le premier ministre – parce qu'il faut bien le dire, M. le Président, c'est le vice-premier ministre qui remplacera le premier ministre la semaine prochaine, qui jouera le rôle de premier ministre alors que le premier ministre s'en va au États-Unis pour redorer l'image du Québec, pour essayer d'enlever ces perceptions négatives – entend demander à son vice-premier ministre de se corriger et d'arrêter de diviser les Québécois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Je crois comprendre que la chef de l'opposition officielle fait siens les propos tenus par le chef de son parti à l'effet que c'est grâce à des coalitions avec le Canada anglais que nous avons maintenu le français au Québec, M. le Président. Dois-je comprendre que c'est généralisé, maintenant, cette opinion qui déforme l'histoire, qui tend à nous faire oublier que les francophones en dehors du Québec sont tous en diminution, que le seul endroit au Canada où il y a un maintien du contingent francophone, c'est au Québec, et qu'ailleurs, surtout dans l'Ouest, ils disparaissent? Est-ce que c'est grâce à la bonne volonté des gens de l'Ouest si nos frères francophones de l'Ouest sont en train de disparaître comme francophones? Enfin, qu'on dise la vérité une fois pour toutes! Est-ce qu'on est satisfait de ce qui se passe dans le traitement des francophones dans l'ensemble du Canada? Il faut nous le dire si c'est le cas. Si on pense qu'il faut d'abord se fier sur la volonté du Canada anglais pour survivre comme français, M. le Président, on s'inquiète sur des gens qui prétendent ensuite diriger le Québec.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je n'ai pas de leçon à recevoir du gouvernement ou du premier ministre, puisque c'est le Parti libéral, justement, qui a fait du français la langue du Québec. Mais, M. le Président, je voudrais revenir, lorsque le premier ministre était ambassadeur du Canada et ministre du gouvernement canadien, est-ce qu'il participait, à cette époque, à une entreprise ou à une tentative d'assimilation des Québécois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'inviterai la chef de l'opposition officielle à demander à ses services de recherche d'examiner ce que j'ai fait quand j'étais secrétaire d'État à Ottawa. Jamais Ottawa n'en a autant fait pour les francophones hors Québec que lorsque j'étais là. Et je sais aussi quel traitement les francophones en dehors du Québec ont subi, n'importe quel lecteur de l'histoire du Canada et du Québec le sait. Et je dirai également à la chef de l'opposition qu'elle a raison de dire que c'est M. Bourassa qui, par la loi 22, pour la première fois, a fait décider par ses assemblées que le français était la langue officielle du Québec, elle a raison de le dire. C'est donc très grave de voir un successeur de M. Bourassa insulter sa mémoire en disant le contraire de ce qu'on doit à M. Bourassa.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la chef de l'opposition.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, puisque le premier ministre ne devait pas demander au vice-premier ministre de se rétracter, est-ce qu'il peut au moins se dissocier de ses propos?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, s'il y a un homme honorable, s'il y a un homme talentueux, s'il y a un homme constant, s'il y a un homme respectueux de la démocratie, enfin, c'est bien le ministre de l'Économie. J'ai pour lui la plus grande des amitiés et la plus grande des admirations.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, en principale.


Fermeture de lits pour les personnes âgées dans la MRC de Bellechasse

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. La semaine dernière, 400 citoyens de Bellechasse manifestaient leur colère et leur révolte face à la fermeture de 69 lits en centres d'hébergement pour personnes âgées dans leur région. Quand j'ai demandé au ministre de la Santé d'intervenir rapidement afin d'éviter la fermeture de ces lits, le ministre de la Santé m'a répondu, et je le cite: «Il y a un consensus qui s'établit dans la région, il y a eu de bonnes discussions.» Tout un consensus, M. le Président, beau consensus, parce que, à peine il me répond ça, quelques jours plus tard, 600 autres citoyens de la même région dénonçaient avec vigueur non plus la fermeture de 69 lits pour leur région, mais bien la fermeture de 89 lits, 20 lits supplémentaires pour la région de Bellechasse...

Une voix: Suite à l'intervention du ministre.

Mme Loiselle: Comment, M. le Président, le ministre de la Santé a-t-il pu me répondre dans cette Chambre qu'il y avait un consensus dans cette région quand plus de 1 000 personnes du comté de Bellechasse ont crié leur désaccord et leur déception face à ces coupures de lits qui détériorent complètement la qualité de soins et de services pour les personnes âgées de leur région?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, je pense que c'est important de replacer les événements et la situation...

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je disais qu'il était important, si on veut bien comprendre ce qui passe, de replacer les événements dans leur contexte. Ce qui se passe dans la région de Chaudière-Appalaches, comme dans beaucoup d'autres régions au niveau des territoires locaux où les gens sont à compléter la réorganisation des services de santé, c'est que les gens présentement veulent s'assurer que les personnes âgées qui ont besoin de services auront des services complets et qui vont être adaptés à leur situation, c'est-à-dire qu'il va y avoir un ensemble puis une continuité de services entre ce qui peut être fait au domicile, ce qui peut être fait de différentes façons sur une base de services ambulatoires, en centre de jour, en hôpital de jour, ou ce qui doit être offert aux gens comme milieu de vie substitut quand les gens ne peuvent pas demeurer vraiment dans leur milieu à cause d'une trop grande perte d'autonomie.

Alors, la première chose qu'il faut avoir à l'esprit si on veut comprendre, c'est l'équilibre qui existe sur chaque territoire de CLSC – chaque territoire de MRC, puisque les deux concordent, en général – que les personnes âgées ont la gamme complète des services, n'ont pas juste des lits, n'ont pas juste du maintien à domicile, elles ont la gamme selon les besoins qu'elles ont et le type de services qu'elles désirent recevoir. C'est ça qui est à décider.

Quand la question a été soulevée la dernière fois – je pense que c'est la semaine dernière – par la députée, la décision qu'il y avait à prendre et le consensus qu'il y avait à établir, c'était: quel est à peu près le nombre de lits dont ils peuvent avoir besoin? Et il y avait des gens qui s'opposaient encore à une diminution du nombre de lits sur le territoire de la MRC en question pour pouvoir développer plus d'autres genres de services. La décision a été prise, et j'ai pu confirmer dans cette Chambre, sur la base d'informations que j'avais, qu'au niveau de la région, avec les maires, les gens étaient d'accord qu'on pouvait diminuer le nombre de lits pour ce qui avait été prévu. Ça, c'est la première décision qui a été prise.

(14 h 30)

Là, ça revient à l'établissement qui, lui, doit voir comment il organise ça. Oh surprise! L'établissement lui-même, M. le Président, qui est formé, par son conseil d'administration, de citoyens de la MRC, propose, voudrait diminuer un peu plus le nombre de lits pour développer plus de maintien à domicile, pour développer plus d'autres services et...

Le Président: Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, en complémentaire.

Mme Loiselle: M. le Président, ma question au ministre interplanétaire: Comment le ministre de la Santé...

Des voix: ...

Mme Loiselle: Mais non, mais non! Mais, M. le Président, il vit sur une autre planète.

Le Président: Je pense que vous savez très bien que c'est le genre de commentaires qui mettent le feu aux poudres, et qui n'apportent rien, et qui, en plus, ne sont pas réglementaires. Alors, Mme la députée, de façon réglementaire.

Mme Loiselle: M. le Président, comment le ministre peut se lever dans cette Chambre et me dire que les maires sont d'accord, quand le maire de Saint-Anselme est contre, quand le maire de Saint-Michel est contre? Et comment a-t-il pu, la semaine dernière, encore une fois me répondre dans cette Chambre que la norme de 4,3 lits pour 100 personnes âgées était maintenue dans cette région? Parce que, avec la coupure de 20 lits annoncée hier, ça vient de dégringoler à 3,8 lits, puis il me disait que la norme de 4,3 était maintenue dans la région. Une autre demi-vérité, M. le Président.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: S'il y en a qui sont interplanétaires, regardez la façon dont ça revient de l'autre côté, ça ne vole même pas au ras des pâquerettes.

Le Président: Je vous inviterais, d'un côté ou de l'autre, à ne pas voler trop haut puis à rester sur le terrain réglementaire de l'Assemblée. M. le ministre.

M. Rochon: Les questions amènent des réponses, M. le Président.

Bon, je le sais bien, ce qu'ils veulent faire, l'opposition, là. Ils veulent créer l'impression qu'on coupe des lits, qu'on enlève des ressources et qu'on enlève des services. C'est ça qu'ils veulent faire, c'est clair. C'est rien que ça qu'ils comprennent.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît! Alors, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Rochon: Alors, on va dire n'importe quoi pour faire croire, donner l'impression...

Est-ce que la règle de grammaire vaut toujours, que «on» exclut la personne qui parle? M. le Président, ils disent n'importe quoi pour créer cette impression-là. Et il y a une autre chose: ils n'ont pas l'air d'avoir compris que des services, à des personnes âgées comme à d'autres, ça peut se donner autrement que dans des lits. Ça, ils n'ont pas l'air d'avoir compris ça, depuis trois ans qu'on en parle, malgré ce qui se passe sur le terrain.

Je redis que, présentement, ce qui faisait une discussion la semaine dernière, c'était le nombre de lits à garder comme point de référence sur ce territoire, et, effectivement, j'ai rappelé que, au Québec, la norme moyenne, c'est quatre lits par 100 de population de 65 ans et plus, et, dans les différentes régions, dans les différentes MRC, les gens prennent les décisions qui amènent ça, quand on circule, entre 3,7 et 4,3. Ça joue un peu comme ça, dépendamment de comment les gens font l'équilibre entre les façons différentes de rendre les services: sur une base ambulatoire, à domicile ou dans des lits. C'est ça qui est la réalité.

La région a pris une première décision que les ressources que cette municipalité-là va avoir, la municipalité régionale de comté et le CLSC, vont correspondre à une norme de 4,3 lits. Au niveau de l'établissement, ils voudraient réorganiser autrement: avoir les ressources pour 4,3 lits, avoir les ressources pour ça, mais utiliser ça autrement pour faire des services différents de juste des lits.

Où il y a encore un désaccord, c'est où ils vont transformer des lits, où. Et, comme il y a trois ou quatre petits centres, là, la discussion qui se prend présentement, ce n'est pas la même que la semaine passée – il y a eu un consensus, ils ont fait un bout de chemin – c'est: comment ils vont répartir la transformation des lits. C'est sûr que, si le conseil d'administration a proposé qu'on les prenne tous, une bonne partie, dans un des quatre petits centres, je pense, qui existent présentement, qui est à Saint-Anselme, le maire de Saint-Anselme n'est pas d'accord là-dessus. Mais, à l'étape où on est, c'est un conseil d'administration de citoyens, d'abord, qui a pris ça, je voudrais bien le dire, ce n'est pas des fonctionnaires mystérieux. Et, deuxièmement, avant qu'une décision comme ça soit appliquée, on a un système qui a ses vérifications. C'est ce que les gens, localement, ont pris comme décision, recommandent. La Régie régionale va revérifier avec eux et le ministère pour s'assurer que c'est équitable.

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet, en complémentaire.

M. Gauvin: Oui, en complémentaire, M. le Président. Dans le même ordre d'idées, est-ce que le ministre de la Santé, suite à la réponse qu'il vient de nous donner, peut nous confirmer que, suite à la fermeture d'au-delà de 80 lits dans la seule MRC de L'Islet, le budget qui a été alloué va être transféré aux soins à domicile?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: C'est le genre de question qu'il faut poser et c'est le genre d'assurance qu'il faut donner à la population, M. le Président, parce que l'équité, ça veut dire qu'entre les régions on donne à chacune des régions les ressources qui correspondent à celles des autres régions, compte tenu de leur population. Et là ce qui se passe, c'est encore plus fin que ça: c'est à l'intérieur des régions, c'est au niveau des territoires de MRC qu'on s'assure justement que les ressources de santé et de services sociaux sont équitables entre les régions, avec un minimum de balises nationales à l'intérieur desquelles les gens peuvent faire les ajustements qu'ils veulent.

Alors, je ne connais pas les détails, mais je peux assurer le député que l'objectif qui est visé et dont on va s'assurer qu'il va arriver, c'est que le territoire va avoir, dans l'ensemble des ressources de première ligne, la part qui est équitable comparativement aux autres territoires de MRC ou de CLSC, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Gauvin: Est-ce que M. le ministre peut nous assurer qu'il y aura de l'argent additionnel pour les soins à domicile dans la MRC de L'Islet suite à la fermeture de lits?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je ne connais pas assez, là...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, je n'ai pas assez à l'esprit l'état actuel de la répartition des ressources pour les services de santé et les services sociaux entre les différentes MRC de l'ensemble de la région de Chaudière-Appalaches. Mais ce dont je peux assurer le député, c'est que, si la MRC en question, le territoire du CLSC en question est en déficit par rapport aux autres... Ça fait trois ans qu'on fait des réallocations, constamment. En plus des réelles diminutions de ressources, il y a eu beaucoup de réallocations de faites. Et, si ce territoire-là de CLSC est en déficit de ressources par rapport aux autres, oui, il va y avoir des réallocations qui vont être faites dans ce territoire-là, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon, en principale.


Fermeture éventuelle de centres d'hébergement pour personnes âgées rénovés récemment

Mme Delisle: M. le Président, en juillet 1997, le député de Limoilou, représentant le ministre de la Santé et des Services sociaux procédait à la traditionnelle pelletée de terre inaugurant des travaux de l'ordre de 6 000 000 $ au pavillon Saint-Charles-de-Limoilou, un pavillon qui regroupe des personnes âgées. D'ailleurs, c'est le seul centre d'hébergement public dans Québec-Centre pour les personnes âgées en perte d'autonomie.

On a appris hier et encore aujourd'hui que la régie régionale envisage une fermeture de ce pavillon-là. M. le Président, j'aimerais demander au ministre responsable de la Santé et des Services sociaux, lui qui a tout planifié dans le moindre détail, comment il a pu inaugurer des travaux de rénovation d'un pavillon en juillet dernier, donc il y a 10 mois, et aujourd'hui envisager la fermeture de ce même pavillon. Est-ce qu'il n'y a pas là double langage? Est-ce qu'il n'y a pas là dichotomie, finalement, entre le geste, le discours et les actes? Qu'est-ce qui se passe, là, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: La question commence: On entend parler que, puis ça finit en disant qu'on envisage de faire. Bon, tu sais, ça évolue dans l'espace d'une phrase. La situation à Québec, dans la région de Québec, comme dans la région de Chaudière-Appalaches, comme dans beaucoup des régions du Québec maintenant, on est en train de finaliser l'organisation des ressources de première ligne, qu'on appelle, sur chacun des territoires de CLSC. Et une des choses que ça veut dire, ça, c'est de s'assurer que, dans chacun des territoires de CLSC, les ressources de CLSC, les soins médicaux, les groupes communautaires, les soins de longue durée, il y a ce qu'il faut pour répondre aux besoins de la population et le plus proche possible du territoire.

(14 h 40)

À ma connaissance, et j'ai revérifié encore ce matin, il n'y a pas eu de décision de prise. Il y a une rumeur, parce que la Régie regarde comment elle va faire les derniers équilibres. Je pense qu'un des porte-parole de la Régie a même dit que ce n'est pas vrai de dire ce qu'on disait il y a quelques jours, qu'il y a trop de lits et qu'on va fermer des places. Non, dans l'ensemble de la région, il y a le nombre de places qu'il faut. Là, ce que la Régie essaie de voir avec ses partenaires sur le territoire, c'est comment vont se faire les ajustements avec les territoires locaux pour que ces ressources-là soient le plus près possible du monde.

Mais, aussitôt qu'une régie ou qu'un établissement considère des scénarios possibles pour mieux faire évoluer les ressources pour qu'elles soient plus proches du monde, on saute aux conclusions tout de suite et on crie aux fermetures. Il n'y a pas, à ma connaissance, j'ai encore vérifié ce matin, de décision prise en ce sens. Et, si jamais une décision devait être prise comme ça, il faudrait qu'elle soit justifiée, que ça soit à l'avantage de tout le monde, et c'est seulement dans ces conditions-là qu'on irait dans ce sens-là. Mais on n'en est pas là du tout et on fait un plat aussitôt qu'il y a une rumeur qui part. Et c'est avec ça qu'on perd notre temps et qu'on énerve le monde pour rien, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé peut réaliser qu'à chaque fois qu'on parle de fermeture il y a fermeture? Peut-il nous expliquer une si mauvaise gestion des fonds publics? Peut-il nous expliquer comment ça se fait qu'il y a un tel cafouillis et une telle improvisation dans ces dossiers-là, celui-là en particulier? Peut-il donner la garantie aujourd'hui, étant donné l'investissement de 6 000 000 $, qu'il n'y en aura pas, de fermeture du pavillon Saint-Charles-de-Limoilou?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: La garantie que je donne et que je redonne et ce pourquoi tout le monde travaille, c'est de s'assurer que, sur chacun des territoires de CLSC, les gens vont avoir, le plus près possible de chez eux, tout ce dont ils ont besoin pour les services de santé et les services sociaux.

Et là, si les gens regardent des scénarios différents, je ne ferai pas de commentaires puis je ne donnerai pas des garanties sur des rumeurs. Si on ne veut pas qu'il y ait tant de cafouillis, qu'on arrête de dire n'importe quoi aussitôt qu'une rumeur part, puis ça va aider pas mal plus le monde, ça, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé peut nous dire aujourd'hui pourquoi il a inauguré des travaux de l'ordre de 6 000 000 $? Il a délégué le député de Limoilou pour inaugurer ces travaux de 6 000 000 $, je ne les ai pas inventés. Ça a été fait, ça. C'est dans les journaux.

Comment il peut justifier ça, puis aujourd'hui nous dire qu'on rêve en couleur puis qu'on parle de rumeurs? On parle de fermeture 10 mois après qu'on ait inauguré des travaux.

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Je peux assurer la population qu'on va garder la cohérence dans ce qui a été fait, ce qui se fait puis ce qui va se faire. Mais pourquoi partir en peur parce que certains auraient dit qu'on fermerait un établissement? Il n'y a pas de décision de prise dans ce sens. Si jamais, au niveau d'une régie régionale, on avait une idée – puis je ne le sais pas, là – qu'un établissement pourrait être utilisé pour des fins différentes, pour avoir une gamme plus complète de services, on «peut-u» les laisser regarder comment ils peuvent le mieux utiliser les ressources? On «peut-u» leur donner une chance de nous faire une recommandation?

Pourquoi ne pas faire confiance à ces gens-là qui sont sur le terrain, qui connaissent la situation bien plus en détail que nous, de nous faire des propositions qu'ils trouvent sensées, leur donner la chance de s'expliquer? Puis là on décidera compte tenu de tous les paramètres, quand on les aura dans les mains. Mais arrêtons de partir sur des rumeurs, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne, en complémentaire ou en principale?

Mme Loiselle: En complémentaire, M. le Président. Au-delà des rumeurs, des réalités, j'aimerais demander au ministre de la Santé comment se fait-il qu'on vient de fermer le Pavillon de l'âge d'or de Saint-Anselme dans lequel vous avez investi 2 000 000 $ tout récemment et...

Le Président: La semaine dernière, je pense que j'ai donné des indications assez claires. On commence sur une question; si on veut faire une question élargie sur l'ensemble des fermetures ou des problèmes qui peuvent se poser, à ce moment-là allez en principale.

Mme Loiselle: Toujours en additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre peut m'expliquer sa logique interplanétaire quand il a gaspillé des fonds publics en investissant 2 000 000 $ dans le Pavillon de l'âge d'or de Saint-Anselme et annoncé cette semaine que vous le fermez? Quelle est votre logique, M. le ministre?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Encore une fois, M. le Président, je ne veux pas exagérer, mais, si l'information ne se rend pas, il y en a qui sont assez en souterrain qui ne l'entendent pas, là. Je pense que c'est ça qui est l'autre extrême.

Je viens d'expliquer que localement les gens ont fait une proposition, puis ils voudraient faire le réaménagement dans un sens qui voudrait dire que, si c'est appliqué comme ça, oui, à Saint-Anselme, on fermerait. Je viens d'expliquer qu'avant que ça soit décidé, ça, il y a une régie régionale qui va s'en mêler puis il y a un ministère qui va s'en mêler pour finaliser une décision comme ça.

Alors, ce n'est pas décidé. Ça ne va pas se faire demain matin. Et, avant d'appliquer une solution, on va être capable de l'expliquer dans toute sa cohérence et de montrer des avantages, si c'est ça qui devait être fait. Mais ce n'est pas décidé encore, ce n'est pas vrai. Alors, non, l'établissement a dit qu'ils veulent faire ça, mais ils ne peuvent mettre ça en oeuvre avant que la Régie régionale confirme une décision comme ça. C'est elle qui est responsable de l'allocation des ressources et le ministère surveille ça aussi. C'est de même que ça s'est passé depuis trois ans.

Alors, c'est beau de dire: «Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose», mais ça peut revenir de l'autre sens, ça, ce...

Des voix: Bravo!

Le Président: M. ministre de la Santé et des Services sociaux, je pense qu'on convient que...

Des voix: ...

Le Président: On perd du temps, parce que finalement le président n'est pas capable de faire son travail correctement, pour ne pas dire sa job effectivement, puisqu'il y en a beaucoup qui veulent la faire à sa place.

Alors, à ce moment-ci, M. ministre de la Santé et des Services sociaux, je pense que vous êtes connu comme un gentilhomme, alors je vous demanderais simplement de retirer des propos qui n'étaient pas parlementaires.

M. Rochon: M. le Président, j'ai simplement cité Voltaire, je pense.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Je comprends, mais, en citant Voltaire de la façon que vous l'avez fait, vous avez visé clairement un collègue de l'Assemblée. Je pense que, en ce cas-là, Voltaire ne s'appliquerait pas. M. le député de Marquette, en principale.


Sécurité du transport scolaire

M. Ouimet: M. le Président, j'aimerais vous citer le Journal de Québec du 28 janvier dernier intitulé Écrasée par l'autobus scolaire dont les feux clignotaient . Voici le témoignage de la petite fille: «Quand j'ai traversé avec mes amis, les feux de circulation de l'autobus clignotaient et le panneau d'arrêt était ouvert. L'autobus a avancé quand même. J'ai crié et levé les bras, mais l'autobus m'a frappée. Je ne veux pas que cela arrive à mes amis.» La petite fille est maintenant infirme.

Voici ce que répondait la déléguée du comité de parents à cet accident tragique: «Les chauffeurs d'autobus ont de plus en plus de travail à cause des coupures.»

M. le Président, qu'a fait...

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Je ne sais pas, M. le Président, si la petite Joanie trouve cela aussi drôle que les députés d'en face. Qu'a fait la ministre de l'Éducation...

Le Président: Bon. Je pense que les commentaires, d'un côté ou de l'autre, qui ne sont pas pertinents, on pourrait peut-être les garder pour soi. On va continuer la période de questions. M. le député de Marquette, s'il vous plaît.

M. Ouimet: Qu'a fait la ministre de l'Éducation pour améliorer les choses? Elle a coupé 70 000 000 $ cette année, en plus du 50 000 000 $ coupé l'année passée. Résultat: plus d'enfants marchent de longues distances sur la route en traversant des intersections et des boulevards qui sont dangereux.

Les autobus sont encore plus chargés qu'ils ne l'ont jamais été. Pire encore, en juillet dernier, alors que tout le monde était en vacances, la ministre et son gouvernement ont émis un règlement qui entasse 12 enfants de plus dans un autobus déjà bondé. Résultat: 84 enfants de six à 16 ans sont entassés dans un autobus jaune pendant de longues périodes de temps. Les transporteurs d'écoliers en sont rendus à se demander, M. le Président, si on transporte des écoliers ou du bétail. On dit que c'est rendu dangereux, même très dangereux.

La question que je pose aujourd'hui à la ministre de l'Éducation: Se rend-elle compte de tout le mal qu'elle est en train de faire à nos enfants au niveau du transport scolaire? Et que répond-elle à la Coalition pour le transport scolaire qui a émis un communiqué aujourd'hui même disant qu'on est en train de jouer à la roulette russe avec la vie de nos enfants? L'oeuvre de la ministre de l'Éducation et du premier ministre, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

(14 h 50)

Mme Marois: Je ne qualifierai pas les propos de mon collègue le député de Marquette, M. le Président.

Une voix: C'est inqualifiable.

Mme Marois: Je crois que d'abord, oui, c'est inqualifiable, mais que de toute façon, quand il s'agit de la question de la sécurité et de la santé, cela va toujours et avant tout passer devant toute chose. Il est absolument inimaginable... Voyons donc! Il est absolument inimaginable que l'on rogne sur les règles de sécurité et de santé. Et, quand le député de Marquette nous dit que nous avons coupé 70 000 000 $, il le sait lui-même, puisque à plusieurs reprises j'ai eu à lui expliquer devant cette Assemblée, en commission parlementaire, qu'il n'y avait pas eu de coupure de 70 000 000 $ dans le transport scolaire et que, lorsque nous avons modifié les règlements en ce qui a trait au transport scolaire, ça a été des modifications pour améliorer la santé et la sécurité de nos enfants dans les autobus. Et le ministre des Transports pourra vous en parler, M. le Président, puisque c'est sous sa responsabilité, toutes les règles de sécurité dans les autobus.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: M. le Président, je pense que tout le monde trouve triste, regrettable et déplorable l'accident évoqué par le député. Mais je dois vous dire cependant qu'en matière de sécurité du transport scolaire au Québec cela se fait dans des conditions qu'on peut sans aucun doute qualifier d'exemplaires, oui, tout à fait. Par rapport à d'autres administrations, à d'autres sociétés, le transport scolaire au Québec se fait dans des conditions sécuritaires, en vertu des règlements qui s'appliquent aussi bien concernant la formation des chauffeurs que les équipements qui doivent être installés sur les autobus. Et ce que dit le député concernant...

Une voix: Il y a plus de monde dans les autobus.

M. Brassard: Ce n'est pas vrai, justement. Ce que dit le député concernant le nombre d'enfants dans les autobus, ça dépend tout simplement du type d'autobus. Il y en a plus quand il y a plus d'espace. C'est aussi simple que ça.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Comment le ministre peut-il faire de telles affirmations alors qu'ils ont adopté un règlement, le 1er juillet, où ils ont ajouté, ils n'ont pas allongé l'autobus, ils ont ajouté deux banquettes de plus pour pouvoir accueillir 12 enfants de plus, les entasser davantage dans les autobus? Ils ont également adopté un règlement, contre tous les avis des experts, pour ajouter un bras d'éloignement. Est-il en train de dire que la coalition pour le transport scolaire dit des conneries, elle aussi, lorsqu'elle dit qu'on est en train de jouer à la roulette russe avec nos enfants? Et je me permets de citer des témoignages où on dit...

Le Président: Un instant. Vous aviez terminé? M. le ministre.

M. Brassard: M. le Président, le député de Marquette serait-il un analphabète fonctionnel qui ne sait pas lire le règlement? Bien, qu'il lise le règlement correctement et au complet. Le règlement stipule que, lorsqu'il y a plus d'espace dans un autobus, il peut y avoir plus de sièges. C'est simple. Il y a plusieurs types d'autobus. Il y a des autobus sans nez, comme on dit, à nez plat. Il y a des autobus à nez plat, l'espace est plus grand, on peut mettre plus de sièges. Ce n'est pas difficile à comprendre, ça.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Est-ce qu'on doit bien comprendre du ministre des Transports, alors qu'il existait des autobus à nez plat antérieurement, il y avait 72 places...

Des voix: ...

Le Président: Un instant. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, doit-on comprendre de la réponse du ministre... Il existait des autobus à nez plat avant. Il y avait 72 places dans ces autobus-là. Ils sont présentement entassés. La solution que vous avez apportée, c'est de dire: On va ajouter deux banquettes de plus pour accueillir 12 enfants de plus. Ça donne les résultats que ça donne. Les parents sont très inquiets de voir leurs enfants subir des accidents tragiques parce qu'on a coupé 125 000 000 $ sur un budget de 450 000 000 $ en deux ans. L'oeuvre de ce gouvernement-là. Ça va être aussi sécuritaire? Il y a des accidents qui se sont produits au mois de janvier.

Le Président: M. le ministre.

M. Brassard: M. le Président, c'est inconcevable qu'un député, membre de l'Assemblée nationale, terrorise de cette façon les parents du Québec sur le transport scolaire. M. le Président, je le répète, le transport scolaire au Québec se fait dans des conditions éminemment sécuritaires; les règlements sont respectés. Et ce que le député de Marquette vient de dire par ses propos, c'est qu'il vient d'accuser les transporteurs scolaires de manquer de professionnalisme. Il accuse les chauffeurs...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Brassard: De tels propos, M. le Président, c'est d'abord accuser les commissions scolaires de mal gérer le transport scolaire, ce qui est faux; c'est accuser les transporteurs scolaires de manquer de professionnalisme, ce qui est faux également; c'est accuser les chauffeurs d'autobus scolaire d'être incompétents, ce qui est faux également.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Le ministre a-t-il bien compris que je n'accuse ni les chauffeurs d'autobus ni les propriétaires d'autobus...

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Le ministre a-t-il compris que les personnes que j'accuse, qui sont des irresponsables, c'est son gouvernement. Et le prochain décès, vous l'aurez sur votre conscience, messieurs.

Le Président: M. le ministre.

M. Brassard: Là, on sombre dans la démagogie de bas étage. C'est triste de voir un membre de cette Assemblée, M. le Président, lancer ainsi à tout le Québec un message, un signal que le transport scolaire se fait dans des conditions d'insécurité et de risque pour les enfants, alors que c'est faux. C'est faux. Ça se fait dans des conditions sécuritaires, et les budgets qui sont consacrés au transport scolaire sont suffisants pour que le transport se fasse dans des conditions sécuritaires.

Le Président: En principale, M. le député de Beauharnois-Huntingdon.


Agrandissement de l'école primaire de Saint-Michel, dans le comté de Beauharnois-Huntingdon

M. Chenail: M. le Président, dans mon comté, à Saint-Michel, on a agrandi l'école de quatre classes pour la prématernelle, 220 enfants, bientôt 300; aucune toilette de plus pour les enfants, aucun lavabo de plus pour les enfants. M. le Président, les enfants dînent au sous-sol, la moitié du sous-sol en ciment, l'autre moitié en gravelle, parmi des cases, et il n'y a aucune toilette au sous-sol. Au ministère de l'Agriculture, on a des normes très strictes: la grandeur de la ferme, la grandeur de l'étable et la grandeur de la fosse à fumier sont déterminées par le nombre d'animaux.

M. le Président, ma question s'adresse à la ministre de l'Éducation: Qu'entend faire la ministre de l'Éducation pour que des fonds nécessaires soient débloqués pour que les enfants de Saint-Michel soient mieux considérés que les animaux?

(15 heures)

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Ça ne s'améliore pas. J'aurais préféré que ce soit le député de Marquette qui me pose la question...

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Bon an mal an, le ministère de l'Éducation a investi quelques centaines de millions de dollars soit pour de la réfection, de la mise à niveau, de la correction ou de la construction d'édifices scolaires. Il y a des normes à respecter selon la Régie du bâtiment, le Code du bâtiment, le Code municipal, et évidemment on comprendra que les institutions publiques respectent à la lettre ces exigences, respectent aussi, normalement, à la lettre les exigences et les obligations fixées dans nos règles, au ministère de l'Éducation.

Ce que je peux faire dans le cas précis de cette école, M. le Président, puisque comme nous en avons probablement rénové ou construit quelques centaines l'année dernière, c'est que je prenne avis et que je puisse répondre plus spécifiquement à la question à une séance subséquente.

Le Président: Très rapidement, parce qu'il reste moins d'une minute. M. le député de Chomedey.


Réaction du ministre de la Justice aux propos de la juge Monique Dubreuil

M. Mulcair: Merci, M. le Président. M. le Président, en vertu de l'article 268 de la Loi sur les tribunaux judiciaires, quand il y a une plainte contre un juge, il y a deux étapes: on examine la plainte et on fait une enquête, le cas échéant. Toutefois, le ministre de la Justice a un pouvoir de référer directement au Conseil de la magistrature. C'est ce qu'a fait Gil Rémillard dans le cas de certaines déclarations par un juge à la Cour municipale concernant le foulard islamique; c'est ce qu'a fait le député de Louis-Hébert lorsque le juge Bienvenue a parlé de la bassesse des femmes et du fait que les juifs n'avaient pas souffert à Auschwitz. C'est la responsabilité du ministre de la Justice.

Au mois de janvier, Mme la juge Dubreuil, dans un cas de viol collectif, a dit qu'elle ne mettait pas les gens en prison et qu'elle mettait ça sur le compte du contexte culturel.

Nous voulons savoir, de notre côté, M. le Président, puisque le premier ministre a dit, aussi récemment que le 21 avril, qu'il n'y aurait pas deux justices au Québec, comment ça se fait que ce ministre de la Justice et Procureur général a fait exactement le contraire de ses prédécesseurs: non seulement il n'a pas utilisé son pouvoir en vertu de la loi, mais, en plus, il a dit que c'est son amie puis qu'il ne faut pas la juger sur une seule erreur. C'est précisément ce que, malheureusement, le Conseil de la magistrature doit faire. Alors, on veut savoir, s'il n'y a pas deux justices, comment ça se fait que, de toute évidence, il y a une règle pour les amis du gouvernement puis une autre pour tous les autres juges.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Ménard: Déformer les paroles des ministres à ce point-là, c'est absolument incroyable! D'abord, c'est encore un piège qu'on me tend, puisqu'on me reprochait... puisque le même député...

Le Président: Très bien. M. le ministre de la Justice.

M. Ménard: ...puisque, la semaine dernière, dans cette enceinte, le même député me reprochait d'avoir répondu à l'une de ses questions, au moment où on étudiait les crédits, alors – disait-il – que cette question était justement devant le Conseil de la magistrature.

Alors, évidemment, je ne retomberai pas dans ce piège, puisque ça en était un. Et puis, en plus de ça, c'est exagéré, il parle d'«une amie». Il parlait d'une «vieille connaissance» avant. Nous étions 30 criminalistes quand j'ai commencé à pratiquer, je les connaissais tous; Mme Dubreuil était une de celles-là. C'est dans ce contexte que ces paroles ont été prononcés, les paroles auxquelles il réfère. Les autres paroles aussi, c'était dans le contexte d'une question d'un journaliste qui m'annonçait que Mme Dubreuil avait dit qu'elle regrettait ses paroles. Alors, je ne veux pas élaborer.

Actuellement, le Conseil de la magistrature est saisi des paroles dont parle le député, qui avaient été prononcées par Mme Dubreuil; je ne me prononcerai pas sur ce sujet. Mais, lui qui est toujours absolument parfait, je lui rappellerai certaines de ses paroles, ses paroles à lui, même de ses écrits, à l'occasion de la création du Tribunal administratif du Québec, le 1er avril, plusieurs semaines après que M. Charest ait annoncé sa venue, dans lesquels il disait – vous pourrez l'apprécier, je suis convaincu qu'on va être d'accord qu'il y a du faux et du vrai dans cette déclaration: «M. Mulcair a aussi déploré que le mandat des juges, de cinq ans, renouvelable deux fois au gré du gouvernement Bouchard, est beaucoup trop court et ne présente pas les garanties nécessaires d'indépendance.»

Alors, d'abord, en lisant la loi, vous verrez qu'il n'y a pas de mandat renouvelable deux fois. «Au gré du gouvernement Bouchard» demanderait certainement certaines nuances, sur lesquelles il n'est pas particulièrement porté. Mais une dernière chose, c'est que, pour renouveler des mandats de cinq ans deux fois, le gouvernement Bouchard devra être au pouvoir 10 ans, ça, c'est vrai!

Des voix: Bravo!


Votes reportés

Le Président: Alors, très bien, la période des questions et des réponses orales est terminée pour aujourd'hui. Nous avons deux votes reportés; je vais céder le fauteuil au vice-président Pinard, député de Saint-Maurice, pour présider aux votes reportés. Alors, M. le Vice-Président.


Rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1998-1999

Le Vice-Président (M. Pinard): Je mets d'abord aux voix les rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1999.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), Mme Charest (Rimouski), M. Paquin (Saint-Jean), M. Jutras (Drummond), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Garon (Lévis), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Duguay (Duplessis), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), Mme Vaive (Chapleau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Dumont (Rivière-du-Loup). M. Filion (Montmorency).

(15 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:61

Contre:40

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion est donc adoptée et les reports regroupés des commissions sont par le fait même adoptés.


Présentation, adoption du principe et adoption du projet de loi n° 418

M. le leader du gouvernement, au nom de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances, propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi n° 418, Loi n° 3 sur les crédits 1998-1999, qu'elle en adopte le principe et qu'elle adopte le projet de loi proprement dit. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Même vote.

Le Vice-Président (M. Pinard): Même vote. Alors, la motion est adoptée.

Nous passons maintenant à la rubrique Motions sans préavis. Alors, Mme la ministre déléguée aux Mines et aux Terres. Si vous le permettez, nous allons permettre aux députés de se rendre en commission parlementaire. Merci.


Motions sans préavis

Comme je le disais tout à l'heure, nous en sommes à la rubrique Motions sans préavis. Mme la ministre déléguée aux Mines et aux Terres.


Souligner la tenue de la Semaine minière

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée pour que soit présentée la motion suivante:

«Que cette Assemblée souligne la tenue de la Semaine minière, activité permettant aux Québécoises et aux Québécois de mieux connaître l'importance économique de cette industrie qui génère 17 000 emplois directs et représente une valeur de production de 3 500 000 000 $ en 1997.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Des voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, puisqu'il y a consentement, Mme la ministre.


Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Alors, chaque année, l'Association minière du Québec organise la Semaine minière en collaboration avec l'Association des prospecteurs du Québec, l'Association des géologues et des géophysiciens du Québec, l'Institut canadien des mines, de la métallurgie et du pétrole et le ministère des Ressources naturelles. Cet événement annuel a comme objectif de donner au public l'occasion de mieux connaître une industrie d'une grande importance pour le Québec, l'occasion aussi de bien apprécier les bienfaits que nous procure cette industrie.

Cette année, la semaine qui a commencé lundi pour se poursuivre jusqu'au 17 mai a pour thème: L'industrie minière, moteur de développement... pour le Québec. L'industrie minière, je le mentionnais, contribue fortement au développement du Québec, et ce, sur plusieurs plans. Permettez-moi ici de citer quelques chiffres à l'appui de cette affirmation.

L'industrie minière québécoise, ça veut dire actuellement une cinquantaine de mines en exploitation, 175 entreprises d'exploration, environ 500 autres établissements miniers: sablières, carrières, tourbières, entreprises de forage. Ça veut dire aussi une production qui est évaluée à 3 500 000 000 $ en 1997; des salaires versés pour au-delà de 950 000 000 $; de l'emploi pour tout près de 18 000 travailleurs. Et ça ne compte pas les milliers d'autres emplois qui sont soutenus indirectement par l'industrie minière. Ça veut dire aussi un investissement total de tout près de 1 000 000 000 $ en 1997. Ce sont des chiffres, bien sûr, mais ce sont des chiffres qui sont significatifs.

Et ceux de 1998 devraient l'être tout autant, avec tous les projets qui sont en cours. Par exemple, on achève, à la mine Laronde, à Preissac, en Abitibi – où je me trouvais en début de semaine, lundi, pour le lancement de la Semaine minière, avec les gens des Mines Agnico-Eagle, qui fêtaient cette année leur dixième anniversaire – le fonçage d'un troisième puits, à Laronde, qui permettra d'exploiter un nouveau gisement situé à 7 000 pi de profondeur. C'est un investissement de 250 000 000 $. Je pense aussi à la réalisation du projet Magnola, à Asbestos, un investissement de plus de 700 000 000 $, et également celui de Ressources MSV, à Chibougamau, où le gouvernement du Québec a annoncé, lundi aussi – en fait, ça a été annoncé par mon collègue le député d'Ungava, M. Létourneau, en compagnie des gens de MSV – une garantie de prêt couvrant 70 % d'un emprunt de 30 000 000 $. Cent soixante-quinze emplois y seront créés, et ce projet permettra de conserver à Chibougamau une expertise dans le secteur minier.

On aurait tort, toutefois, de juger de l'importance de l'industrie minière uniquement sur l'aspect économique, aussi impressionnant que ça puisse paraître compte tenu des chiffres que je vous disais. Comment oublier que l'industrie minière a souvent été associée à des progrès importants dans différents domaines d'activité? Encore aujourd'hui, les travaux de recherche poussés et les travaux d'expérimentation réalisés par l'industrie minière permettent de nouvelles percées et sont sources de développement. Les outils mis au point par l'industrie trouvent souvent des applications dans plusieurs autres domaines. Les découvertes en matière de fonte et d'affinage des métaux et en matière de production d'alliages rendent possible la fabrication de nouveaux produits ouvrant la voie au progrès dans des domaines aussi variés que la médecine, l'électronique, les communications.

Par ailleurs, les efforts déployés par l'industrie minière pour accroître le recyclage des métaux et restaurer les sites miniers se traduisent par des réalisations qui nous permettent de dire que l'industrie minière est réellement un moteur de développement durable pour le Québec et pour ses régions. C'est entre autres pour cette raison, M. le Président, que j'invite la population du Québec à participer en grand nombre aux activités variées qui auront lieu un peu partout au Québec cette semaine dans le cadre de cette Semaine minière. Je voudrais, bien sûr, en profiter pour souhaiter à tous les intervenants du milieu minier, les travailleurs, une excellente Semaine minière. Il faut dire que la contribution de l'industrie minière à notre qualité de vie et à notre développement mérite d'être mieux connue.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre déléguée aux Mines, aux Terres et aux Forêts. Nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition en la matière, le député de Frontenac. M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci. Alors, M. le Président, je m'associe, au nom de ma formation, l'opposition officielle, à la motion déposée par Mme la ministre déléguée aux Mines, motion qui veut souligner la Semaine minière courant du 11 au 17 mai 1998 et dont le thème cette année est, comme ça a été mentionné par Mme la ministre: L'industrie minière, moteur de développement... durable.

(15 h 20)

M. le Président, si je suis porte-parole en matière de mines, c'est évidemment parce que mon comté, Frontenac, est un comté où on retrouve des mines d'amiante. Tous les Québécois le savent: il y a des mines d'amiante au Québec. L'industrie minière au Québec, particulièrement dans l'amiante, est située dans deux régions précises: la grande région de Thetford Mines, qui est le centre géographique, ou à peu près, du comté de Frontenac, avec la ville, également minière, de Black Lake et d'autres villes de moindre importance, dans le comté de Frontenac, où on a déjà retrouvé de l'activité minière qui aujourd'hui n'existe plus, pour les raisons que l'on connaît. Il y a une autre région, évidemment, où on retrouve des mines d'amiante, M. le Président, une mine d'amiante, c'est la région d'Asbestos. Il y a évidemment d'autres régions minières au Québec. Je pense, entre autres, à la Côte-Nord, je pense à l'Abitibi.

Peu importe où on se retrouve au Québec, il y a une constante, c'est que les régions minières, peu importe le minerai qu'on exploite, se ressemblent quant aux mentalités, quant à la façon de vivre. Et c'est vrai aujourd'hui peut-être un peu moins que ça l'était dans le temps; aujourd'hui, M. le Président, les régions minières sont, et c'est bien, de moins en moins mono-industrielles.

M. le Président, la ministre a souligné avec raison que l'activité minière au Québec – et, effectivement, c'est extrêmement important – c'est tout près de 18 000 emplois directs. Il y a plus ou moins, au Québec présentement, 45 mines en opération dans tous les secteurs. Est-ce que l'activité minière est importante pour les régions? Oui, M. le Président. C'est essentiellement en région que l'on retrouve ces activités économiques.

Il y a évidemment, pour plein de gens au Québec... Cette semaine du 11 au 18 sera une semaine heureuse pour ceux et celles qui auront l'occasion de participer aux différentes activités qui vont se tenir un petit peu partout au Québec pour souligner l'importance de l'activité minière. Il y en a qui vont vivre des moments plus heureux que d'autres, M. le Président. Lorsqu'on parle de plus ou moins 18 000 emplois, ça veut dire qu'il y a plein de gens qui trouvent le moyen de bien gagner leur vie dans cette activité économique extrêmement importante pour le Québec, et évidemment les familles en profitent.

Il y a malheureusement, M. le Président, des régions où c'est moins facile par les temps qui courent, et particulièrement les régions où on retrouve des mines d'amiante. La ministre déléguée aux Mines le sait très bien, elle est un député de la grande région Chaudière-Appalaches, elle connaît les difficultés que vit la région du grand comté de Frontenac. Ce sont des difficultés semblables que l'on retrouve dans le comté de Richmond, représenté par mon collègue Vallières. Autant la mine de JM Asbestos que la mine Lab Chrysotile ou la Société en commandite Lab Chrysotile, qui regroupe, comme vous le savez, M. le Président, trois entités, trois mines, autant ces deux régions vivent, au moment où on se parle, des difficultés extrêmement sérieuses.

Vous ne m'en voudrez sûrement pas, M. le Président, si je prends quelques minutes pour justement commenter, élaborer les difficultés que l'on connaît. De façon générale, l'activité minière au Québec va bien. Il n'y a pas eu de croissance dans l'activité minière, sinon très peu. Entre cette année puis l'an passé, c'est à peu près la stabilité, autant quant au nombre d'emplois que quant aux investissements que l'activité minière, en général, génère.

Il y a eu une chute dramatique dans le secteur de l'amiante. C'est ce que je vous soulignais il y a quelques secondes. Parce que c'est plus facile, évidemment, d'aborder les situations heureuses. C'est plus délicat, M. le Président, lorsqu'on a à aborder des situations comme celle que je voudrais décrire au cours des prochaines minutes, autant dans ma région que dans le comté de mon ami le député de Richmond, la difficulté que connaît l'industrie de l'amiante.

M. le Président, jamais une richesse naturelle n'a été autant attaquée, décriée injustement que la fibre d'amiante, qui est une fibre naturelle. Depuis plus ou moins une vingtaine d'années, l'industrie a été attaquée de façon absolument inacceptable, inqualifiable par ses adversaires, que l'on a retrouvés il y a quelques années surtout aux États-Unis. L'Agence de protection de l'environnement, M. le Président, qui était un organisme paragouvernemental qui n'avait pas un pouvoir, évidemment, décisionnel, n'avait pas le pouvoir de bannir l'amiante parce que n'étant pas, comme telle, une instance, n'étant pas le gouvernement mais étant tout simplement un organisme qui avait la responsabilité et qui a encore la responsabilité en matière d'environnement; l'Agence américaine de protection de l'environnement n'a que le pouvoir de faire des recommandations.

Mais, il y a quelques années, cet organisme américain avait recommandé le bannissement de l'amiante sur tout le territoire américain, et à l'époque, le Parti libéral, on était au gouvernement. Je me souviens très bien de la position extrêmement ferme qu'avait prise le premier ministre, M. Bourassa, avec le ministre délégué aux Mines du temps, M. Raymond Savoie, une position claire, ferme, avec évidemment la complicité des députés concernés, le député de Frontenac, le député de Richmond. Tous les intervenants, on avait fait front commun, avec une complicité exceptionnelle du gouvernement fédéral, pour justement contrer cette décision de l'Agence américaine de protection de l'environnement. Après une très longue bataille devant les tribunaux, on a réussi puis on a évité que le gouvernement américain prenne la décision de bannir l'amiante.

Partant de 1990-1991 jusqu'à 1996, les marchés de l'amiante, un petit peu partout dans le monde, sans être en croissance, se sont stabilisés, jusqu'à la malheureuse décision, la très malheureuse décision du gouvernement français, en 1996, en juillet 1996, de bannir l'amiante sur tout le territoire français. Décision basée sur rien d'autre que des émotions, décision basée sur un préjugé défavorable à l'amiante, qui ne tenait d'aucune façon à aucune rigueur scientifique, décision basée sur une approche politique, décision d'aucune façon basée sur une analyse rigoureuse ou une analyse scientifique.

On a tous reconnu – puis ça fera deux ans dans quelques mois, dans deux mois – pour ceux et celles qui ont à coeur la défense de l'industrie de l'amiante et de ses travailleurs, que la France faisait erreur. La France n'est pas et n'était pas non plus à l'époque – évidemment plus aujourd'hui parce que le bannissement a pris effet le 1er janvier 1997 – la France n'a jamais été un gros consommateur d'amiante, sauf que, compte tenu de l'influence de ce pays à l'intérieur de la grande Europe, on a tout de suite compris qu'il y avait un risque énorme d'effet d'entraînement. C'est malheureusement ce qui est arrivé.

J'avais, à l'époque, en juillet 1996, qualifié la décision du gouvernement français de purement politique, aucunement scientifique, et, parce que c'était une décision politique, j'avais insisté sur une réaction politique. Je me souviens que le gouvernement français, par son premier ministre du temps, s'était exprimé sur la question, avait expliqué avec détails les raisons qui justifiaient le gouvernement français de bannir l'amiante.

J'ai toujours déploré, je l'avais dit à l'époque, la ministre sait avec quoi je vais enchaîner, j'ai toujours déploré le silence du premier ministre, député de Jonquière. Jamais, M. le Président, jamais, en aucun moment, sur aucune tribune, y compris ici, à l'Assemblée, jamais le premier ministre, député de Jonquière, n'a dit clairement qu'il dénonçait la décision du gouvernement français. À une décision politique commandait une réplique politique. J'ai toujours déploré, tout comme mon collègue député de Richmond et comme d'autres intervenants, ce silence complice du premier ministre, député de Jonquière. La ministre me répondra, c'est toujours ce qu'elle m'a répondu à date: Nous avons fait ce qu'il fallait, nous avons pris fait et cause en faveur de l'amiante par des programmes de défense de l'amiante. Pas de promotion, M. le Président.

(15 h 30)

Lorsqu'on est en situation de défense, comme on l'est présentement, je ne pense pas qu'on puisse plaider qu'on fait en même temps la promotion. Lorsqu'on vise, comme c'est le cas présentement, à bannir – parce que la France a provoqué justement l'effet domino qu'on appréhendait – en Belgique, en Grande-Bretagne...

Et c'est maintenant le Conseil de l'Europe, qui est une instance, un regroupement de parlementaires, pour bien se comprendre, M. le Président, qui n'a pas un pouvoir décisionnel, qui s'est prononcé, il y a quelques semaines, sur une recommandation qu'on allait faire à la Communauté économique européenne qui, elle, la Communauté économique européenne, a un pouvoir décisionnel. Elle a, cette instance politique européenne, elle a le pouvoir de bannir l'amiante partout en Europe. Voici que le Conseil de l'Europe, il y a quelques semaines, c'est tout récent, a indiqué que l'on souhaitait combattre l'utilisation de l'amiante partout en Europe et ailleurs dans le monde. Et prochainement, sous peu, la Communauté économique européenne va se prononcer, va légiférer, va décider de cette suggestion du Conseil de l'Europe.

Je n'ai pas à vous dire à quel point les citoyens de mon comté, qui comprennent bien ce qui se passe, les citoyens, les citoyennes du comté de Richmond, qui sont au fait du débat sur le bannissement de l'amiante en Europe, à quel point tous ces citoyens-là, et évidemment au premier chef les travailleurs, sont inquiets. M. le Président, est-ce qu'il est trop tard?

Moi, je dis non, évidemment. Je l'ai dit à plusieurs reprises chez nous: Jamais il ne faudra baisser les bras, jamais il ne faudra reconnaître que les adversaires de l'amiante qui ont souvent, j'oserais presque dire à peu près tout le temps... Les adversaires les plus virulents contre l'industrie de l'amiante sont ces entreprises qui ont un intérêt évidemment économique à remplacer la fibre naturelle par des substituts qui n'ont jamais, d'aucune façon, subi le test qu'a subi l'amiante au cours des 15, 20 dernières années. Alors, il faudra continuer à se battre, il faudra regrouper nos forces, le gouvernement du Québec, le gouvernement fédéral, les syndicats, les producteurs, continuer à se battre parce qu'il n'est pas trop tard, mais le temps presse. Il faudra trouver le moyen de faire reculer le Conseil de l'Europe au cours des prochaines semaines, c'est peut-être encore possible.

J'invite Mme la ministre, M. le Président, à m'indiquer, dans sa réplique, ce qu'elle entend faire au-delà du fait qu'elle suggère au gouvernement fédéral de déposer une plainte à l'Organisation mondiale du commerce, ce qui est, je pense, effectivement, un geste que le gouvernement fédéral aurait intérêt à poser. Le gouvernement fédéral a, au cours des deux dernières années, fait plein de démarches d'ordre diplomatique qui ont donné des bons résultats mais qui n'ont pas donné tous les résultats qu'on aurait souhaités. J'ai moi-même écrit au gouvernement fédéral et à son premier ministre, suggérant le dépôt d'une plainte devant l'Organisation mondiale du commerce pour attaquer la décision du gouvernement français; il est encore temps de le faire. Ça aurait, quant à nous, les défenseurs de l'amiante, l'effet suivant. Ça ne pourrait pas, je pense, très rapidement...

Parce que ça prendrait un certain temps avant qu'on connaisse l'issue du débat, si une plainte semblable était déposée. Alors, on ne peut pas espérer, à court terme, que le gouvernement français revienne sur sa décision, mais ça pourrait bloquer le processus des autres pays européens ou ailleurs dans le monde qui envisagent, qui sont présentement à réfléchir sur une décision, M. le Président, de bannir l'amiante.

Je voudrais saluer les travailleurs, particulièrement les travailleurs de l'amiante de la mine BC. La mine BC, M. le Président, c'est une mine qui a un très, très long passé, c'est une des vieilles mines d'amiante au Québec. La mine BC, on la retrouve, cette mine-là, dans ma ville natale, à Black Lake, M. le Président.

La conséquence du bannissement de l'amiante en France – parce que, je le disais tout à l'heure, en 1996, il y avait une espèce de stabilité des marchés, ce n'était pas l'euphorie, mais ce n'était pas trop mal: depuis ce temps, on a perdu 300 emplois, depuis le bannissement de la France, graduellement la mine BC a connu une progression vers sa fermeture définitive annoncée il y a quelques mois. C'est 300 travailleurs, 300 travailleurs qui sont en chômage depuis janvier dernier, 300 travailleurs dont un nombre considérable sont âgés de 55 ans et plus, un nombre considérable également qui se situent quelque part entre 50 et 55 et les autres travailleurs sont relativement âgés, mais en bas de 50 ans. Ce sont des travailleurs qui ont une scolarité moyenne. Ce sont des travailleurs manuels qui ont des qualifications absolument exceptionnelles et extraordinaires dans leur métier.

Il y a des discussions depuis des mois entre le gouvernement du Québec, le gouvernement fédéral, l'entreprise Lab Chrysotile pour essayer de dégager, M. le Président, un programme conjoint de préretraite pour les travailleurs, particulièrement les plus âgés. Le gouvernement du Québec, par sa ministre de l'Emploi, a laissé entendre qu'on serait peut-être d'accord pour participer à ce programme conjoint. Je me souviens d'avoir questionné la ministre il y a quelques mois. Elle nous a dit: Oui, si le gouvernement du Canada bouge.

Le gouvernement fédéral a bougé. On a mis en place des mesures actives, des programmes de mesures actives. Ça n'a pas donné les résultats que l'on souhaitait. Vous le savez, les mesures actives, ce sont des interventions du gouvernement fédéral pour permettre à des travailleurs de se recycler, pour permettre à des travailleurs de mettre en place leur propre entreprise. Ce n'est pas un programme, quant à moi, qui est adapté pour la situation que vivent les travailleurs de la mine BC. Ça peut aider un certain nombre de travailleurs, mais c'est un nombre extrêmement restreint.

Ce qu'il faut, selon moi, je l'ai dit publiquement, il faut dégager un programme spécial avec la complicité des trois intervenants, je l'ai dit tout à l'heure: le Québec, le fédéral et Lab Chrysotile. Lab Chrysotile, l'entreprise, a annoncé il y a quelques semaines qu'elle était prête à mettre sur la table – et c'est chose faite – un montant de plus ou moins 1 600 000 $ pour permettre justement la mise en place d'un programme de préretraite conjointement avec les deux paliers de gouvernement, ou avec l'un, ou avec l'autre. Je n'ai pas, moi, réagi sur la proposition de l'employeur. J'ai dit publiquement qu'il appartenait aux responsables ou dirigeants syndicaux, à ceux et celles qui ont la responsabilité de protéger les intérêts des travailleurs de la mine BC, de réagir sur la proposition de l'employeur. C'est cependant, puis il faut le reconnaître, un geste qui a été posé par l'employeur qui pourrait, je pense, faire débloquer des choses.

On a rencontré le ministre Pettigrew il y a quelques semaines. C'est une initiative que j'ai prise avec le maire de la ville de Thetford Mines, avec le maire de Black Lake, les représentants syndicaux. On a rencontré le ministre Pettigrew pour le mettre bien au fait de ce qu'on vivait chez nous. Il y a les travailleurs de la mine BC, mais, au-delà de tout ça – et ça, c'est extrêmement important d'avoir à l'esprit le sort des travailleurs et de leurs familles – également se rappeler que chez nous, depuis quelques années, on vit une situation difficile, pas tragique.

C'est tragique pour les travailleurs de la mine BC, ce qu'ils vivent, mais l'économie en général dans le comté de Frontenac va quand même relativement bien. On a développé au cours des dernières années un réseau de petites et moyennes entreprises qui fait que maintenant la région de l'Amiante dans le comté de Frontenac n'est plus une région monoindustrielle, sauf que l'amiante est encore le moteur de l'économie de la région. Il y a encore au-delà de 1 000 travailleurs qui gagnent leur vie dans ce secteur d'activité. C'est encore extrêmement important.

(15 h 40)

M. le Président, il faut penser aux travailleurs de la mine BC et il faut avoir à l'esprit ce que je viens de dire, que la région continue sa progression vers une diversification de ses activités économiques. Puis on a besoin de l'aide des deux paliers de gouvernement. On a besoin de l'aide des deux gouvernements pour compléter cette diversification économique. On a besoin d'un coup de pouce solide des deux paliers de gouvernement pour venir en aide à des travailleurs qui, dans quelques mois, pour des centaines d'entre eux, vont se retrouver sans emploi – c'est chose faite, malheureusement – plus de prestations d'assurance-emploi et, M. le Président, rien, rien à l'horizon. C'est tragique pour des gens qui ont gagné leur vie pendant 25 ans, 30 ans, 40 ans dans une industrie très précise qui est l'industrie de l'amiante. Puis ce n'est pas, je le répète, évident qu'on peut recycler ces travailleurs-là, en quelques mois, dans d'autres activités.

Je conclus en souhaitant que, dans les plus brefs délais, on trouve une solution aux travailleurs de la mine BC. Je conclus, M. le Président, en disant à ces travailleurs, à leur famille, de continuer à espérer, de ne surtout pas penser qu'il ne se fait rien, de ne surtout pas penser qu'il n'y aura pas de solution à leur situation. Je leur dis qu'il y a encore – et ça, ça tient depuis plusieurs mois – plein d'intervenants qui travaillent à trouver une solution, un, pour eux et leur famille et, également – c'est évidemment extrêmement important et nécessaire – un combat pour éviter le bannissement. Parce que, si, par hypothèse, la Communauté économique européenne bannissait sur tout le territoire européen l'amiante, ça aurait des conséquences désastreuses pour l'ensemble des travailleurs de l'amiante, qu'ils soient dans le comté de Frontenac, dans le comté de Richmond, ça aurait un effet catastrophique sur les marchés d'amiante que l'on retrouve en Asie, particulièrement.

Et, M. le Président, je conclus en disant que c'est une situation difficile. Il faut continuer à se battre. Je salue les travailleurs de l'amiante, je salue particulièrement leur famille, et je conclus en disant qu'on a une pensée très spéciale pour les travailleurs de la mine BC et pour leur famille. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac. Toujours sur la motion de Mme la ministre, je cède maintenant la parole au député d'Abitibi-Ouest. M. le député.


M. François Gendron

M. Gendron: Merci, M. le Président. Bien, assez rapidement, parce que je n'ai pas l'intention de dénaturer le sens de l'exercice qu'on doit faire. Normalement, c'est une motion de félicitations, de considération pour la Semaine minière. Alors, on peut bien avoir des propos intéressants, mais un collègue de l'autre côté, la semaine dernière, indiquait que ce n'était pas l'occasion pour faire des débats de fond, et je partage son point de vue. Je voulais juste dire ça.

Oui, je veux souscrire à la Semaine minière pour trois ou quatre raisons principales, M. le Président. Je pense qu'on pourrait toujours dire qu'au Québec il y a plusieurs régions minières, mais il y en a une en particulier qui a toujours été très présente dans l'activité minière, c'est la région que je représente, l'Abitibi-Témiscamingue, puisque 70 % de l'activité minière du Québec est concentrée là. Mais, essentiellement, j'ai trois raisons que je voudrais rappeler rapidement. Je pense que, quand un ministre des Mines, au Québec, décide d'inaugurer la Semaine minière dans la région par excellence des mines, il faut le considérer puis le souligner. Alors, je remercie la ministre d'être venue lundi dernier, donc lundi de cette semaine, faire l'annonce officielle de la Semaine de l'industrie minière en Abitibi-Témiscamingue, dans une région où l'activité minière a toujours pris énormément de place.

Elle a rappelé, avec raison, l'importance de cette industrie sur le plan économique, mais également sur d'autres considérations, parce qu'on l'a trop souvent fait uniquement sous l'angle des retombées économiques, des emplois. L'activité minière au Québec, c'est un fleuron, un joyau pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Parce que, moi, j'ai l'occasion de voyager un petit peu, au moins Abitibi-Témiscamingue, Québec, Montréal, et je rencontre régulièrement des travailleurs miniers, des gens de l'industrie minière qui sont à l'étranger présentement. Et c'est un peu malheureux, j'y reviendrai dans une phrase tantôt.

Je suis content de les voir à l'étranger exporter l'expertise minière absolument extraordinaire qu'on a développée, que ça soit au niveau de la recherche, que ça soit au niveau des méthodes très sophistiquées pour maximiser le plus possible toute la question des coûts d'exploitation qui doivent être réduits compte tenu que le prix des mines et métaux malheureusement est cyclique et parfois s'affaisse. Et, quand le prix est un peu bas, il n'y a pas beaucoup d'autres solutions que de tenter de baisser les coûts de production pour arriver à demeurer compétitif, parce que c'est très important de l'être.

Donc, je suis toujours très content de constater que nous sommes un chef de file à plusieurs égards dans l'industrie minière, que ça soit au niveau de la R & D, recherche et développement, que ça soit au niveau des techniques, que ça soit au niveau des méthodes, que ça soit au niveau du travail professionnel. Les travailleurs et les travailleuses des mines aujourd'hui – parce qu'il y a quelques femmes, et j'espère qu'il y en aura de plus en plus, du moins comme géologues et autres... Le travail de l'industrie minière n'est pas tout à fait ce qu'il était, et c'est important d'en parler pour donner le goût à des jeunes gars et filles d'aujourd'hui de se spécialiser dans ce domaine-là pour prendre la relève, pour être en mesure d'assumer le développement de l'industrie minière.

Quand on souligne la Semaine minière, c'est pour dire ces choses-là – merci à l'industrie, merci aux travailleurs, merci à tous celles et ceux qui y croient – mais en même temps lancer un peu un petit cri d'alarme, et c'est celui-là que je voudrais lancer à la ministre et à tous ceux et celles qui pourront prendre connaissance de toutes les activités qu'on fera durant la Semaine minière dans l'ensemble du Québec. Nous vivons présentement un certain drame, au Québec. S'il n'y a pas une plus grande prise de conscience qu'on doit mettre davantage d'argent dans l'exploration minière, on va creuser notre propre difficulté pour la suite des choses.

Parce que, si on ne fait pas d'exploration, comme ça prend en moyenne sept ans avant de donner concrètement une mine en fonctionnement... Parce qu'il faut distinguer l'exploration de l'exploitation, et on a réduit depuis quelques années la somme des argents pour faire de l'exploration, alors qu'il faut maximiser l'exploration – la ministre est venue en parler en Abitibi. Et on doit faire de l'exploration en plus grande profondeur plutôt que de strictement la faire comme on l'a faite pendant des années parce qu'on avait la chance de la faire à la surface.

Alors, moi, je dis à tous ces gens de l'industrie, à tous ces gens qui sont préoccupés: Pour assurer un meilleur devenir des Québécois et des Québécoises, pour que l'industrie minière demeure forte, prospère, dynamique, il faut se soucier davantage de poser plus de gestes liés à l'exploration afin que, dans quelques années, nous puissions assurer le développement des mines au Québec. Parce que l'industrie minière demeure toujours importante, capitale, et, oui, elle offre plusieurs possibilités d'emploi. Mais ce qui est surtout, je pense, à signaler lors de cette semaine-là, c'est qu'il faut garder l'avance que nous avions dans ce secteur-là, et pour ça il faut être vigilant, il faut être attentif, et j'espère qu'au cours de la semaine d'autres le rappelleront. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Nous cédons maintenant la parole au député de Lévis.


M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je n'avais pas l'intention de parler au point de départ, mais c'est en entendant mes collègues parler qu'il m'est venu à l'idée que je devrais dire un mot.

Vous savez, on s'occupe souvent, au Québec, de parler d'emplois plus souvent dans le high-tech, dans le post-doctoral, dans le doctoral, dans l'informatique, etc. Mais on remarque aussi qu'on manque beaucoup d'emplois et qu'il y a beaucoup de gens qui manquent de revenus au Québec, qui ne sont pas dans le haut de l'échelle mais qui sont plutôt dans le bas de l'échelle. Et on dit que l'indice de pauvreté a augmenté considérablement.

Je pense qu'il faut s'occuper de développer dans nos régions – et on regarde dans les régions à quel point les taux de chômage peuvent être élevés – les secteurs qui vont créer des emplois dans nos régions. Dans les régions habituellement, ça peut être les mines, ça peut être la forêt, surtout la transformation – traiter la forêt comme une culture des arbres – et également dans le domaine agroalimentaire, en créant des emplois dans un secteur où... à condition de faire la transformation dans les différentes régions du Québec.

Actuellement, il y a beaucoup de régions du Québec où c'est un drame. La population baisse, il y a un vieillissement considérable de la population parce que la jeunesse s'en va. Regardons ce qui se passe dans le Bas-Saint-Laurent–Gaspésie, où la population a baissé de 25 % entre 1981 et 1991, et, sur la Côte-Nord, de 20 %, alors que, en plus d'avoir un niveau de chômage élevé, et sans doute parce qu'il y a un niveau de chômage élevé, beaucoup de gens quittent ces régions-là pour s'en aller dans les milieux urbains. Et on se rend compte au fond que dans les milieux urbains on se retrouve dans la même situation. Parce que les gens qui ne sont pas préparés à occuper des métiers, des fonctions, ne trouvent pas plus d'emplois dans les milieux urbains parce qu'ils n'ont pas la préparation requise.

(15 h 50)

Je pense que ça va être la principale préoccupation du temps qui vient, de faire travailler des gens qui n'ont pas d'ouvrage, pour régler le problème de la pauvreté. Ça, ça ne veut pas dire seulement par des gens qui vont avoir une préoccupation... par des emplois de haute qualification, mais aussi des emplois ordinaires qui permettent de faire ce dont on a besoin dans nos activités quotidiennes pour faire en sorte que tous les gens trouvent de l'ouvrage. Pas seulement ceux qui ont des diplômes universitaires, pas seulement ceux qui ont des hautes qualifications, pas seulement ceux qui ont de la facilité dans les écoles pour apprendre dans l'abstraction, mais également ceux qui sont plus manuels, ceux qui ont plus de talent dans des choses concrètes que dans des choses abstraites. Parce qu'on va s'en aller vers un drame au Québec si on ne règle pas ces problèmes-là dans un avenir immédiat.

À mon avis, dans la plupart des régions du Québec, on a besoin d'un plan de développement de l'emploi. Et l'activité minière peut faire partie de ce plan de développement de l'emploi à la condition que le maximum de retombées économiques se fasse dans les régions, qu'on ne fasse pas seulement creuser des trous dans les régions pour envoyer au plus sacrant le produit ailleurs. Il faut que les régions aient les retombées des ressources que l'on trouve chez elles. Pour ça, ça va prendre un plan d'action majeur. Parce que regardons les chiffres. Actuellement, les chiffres nous démontrent, au contraire, qu'il y a des gens actuellement qui ne trouvent pas leur compte dans la société dans laquelle on vit et qu'il y a des inégalités qui sont criantes qu'il faut corriger. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Lévis. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, comme il n'y a pas d'autres intervenants, Mme la ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique en vertu de l'article 216?

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président, quelques mots seulement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la ministre déléguée aux Mines, aux Terres et aux Forêts.


Mme Denise Carrier-Perreault (réplique)

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Quelques mots seulement, puisque le député de Frontenac m'a interpellée quelque peu dans son intervention. Alors, j'aurais quand même quelques points à repréciser.

Je voudrais remercier, bien sûr, mes collègues pour leur intervention. Je pense que ça démontre qu'au gouvernement du Québec le parti que je représente, le gouvernement, nous sommes très préoccupés et nous sommes tout à fait convaincus de l'importance du secteur minier dans notre économie. Donc, là-dessus, je peux tout de suite rassurer mes collègues puis les collègues de l'autre côté, M. le Président. Le gouvernement du Québec est fort préoccupé.

On a l'intention de poursuivre au niveau de l'exploration. Je pense que l'an dernier il y a eu des décisions qui ont été prises par le gouvernement, suite au retrait du gouvernement fédéral, d'ajouter des budgets pour l'exploration au Québec et aussi pour mettre l'emphase sur des coins, des régions où l'exploration minière était fort déficiente, où on avait très peu de renseignements concernant le territoire. Alors, là-dessus, M. le Président, tant au niveau de l'exploration, au niveau des accréditives, il y a eu des décisions qui ont été prises pour favoriser effectivement l'exploration, parce que, on le sait, s'il n'y a pas d'exploration, il n'y aura pas d'exploitation.

Le député de Frontenac me disait tout à l'heure aussi qu'il n'y a pas de gros changements, ça ne fluctue pas beaucoup, on reste à peu près stable. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le domaine minier, les mines comme telles, la ressource n'est pas renouvelable. C'est une ressource non renouvelable. Donc, une mine, ça a une durée de vie. Alors, au Québec, il y a des mines qui ouvrent parce qu'on fait des découvertes puis on continue de chercher, puis il y a des mines qui ferment aussi année après année.

Il y a des contextes particuliers. Le député de Frontenac a longuement discouru sur le dossier de l'amiante. Je partage très sérieusement ses préoccupations, il le sait. On a eu l'occasion d'en discuter encore récemment lors de la commission parlementaire. Nous partageons effectivement les mêmes préoccupations par rapport à ce qui se passe au niveau de l'amiante, surtout par rapport à l'Europe, entre autres.

Ce que je voudrais dire, c'est que le gouvernement du Québec ne fait pas que s'inquiéter ou partager les inquiétudes du député de l'opposition. C'est vrai que c'est ma région, la région Chaudière-Appalaches, donc je suis absolument sensible à ce que les gens pensent, à ce que les gens vivent dans notre région. Ce n'est peut-être pas mon comté, mais c'est des gens de chez nous, c'est ma région. Je peux donc très bien comprendre les difficultés auxquelles ils font face.

Il y a, bien sûr, toute cette histoire du bannissement qui a un impact majeur sur le produit comme tel, mais il y a un autre facteur, et on a négligé un petit peu, lors du discours de mon collègue, d'en faire état. Un des facteurs majeurs, je pense, sur la chute qu'on vit actuellement au niveau de l'amiante, c'est la crise asiatique. On sait que l'Asie est le continent qui est le client majoritaire, c'est le plus grand client du Québec au niveau de la production d'amiante. Alors, ce faisant, M. le Président, vous comprendrez que la crise asiatique, ce qui se vit présentement en Asie, fait en sorte que ça vient causer des problèmes d'autant plus importants.

Pour ce qui est du dossier de l'amiante, par rapport à la défense de ce dossier, le député de Frontenac sait très bien, est tout à fait au courant... Et je pense que les gens de sa région, les gens de notre région, les gens d'Asbestos sont tout aussi au courant des actions du gouvernement. Et ce n'est pas seulement la ministre des Mines, là. Quand on parle du gouvernement, M. le Président, on parle de l'ensemble des membres du gouvernement qui siègent au Conseil des ministres et qui prennent les décisions.

Donc, dans ce sens-là, le premier ministre du Québec, sa position, elle est connue. Il a lui-même rencontré les intervenants du milieu, que ce soit d'Asbestos ou de Thetford. Les élus municipaux, l'industrie, les syndicats ont eu l'occasion de discuter de ce dossier avec le premier ministre. Donc, ils connaissent, eux, très bien la position du premier ministre dans ce dossier-là.

Et, s'il y a une personne qui ne sait pas ce que c'est, la position du premier ministre, je pense que c'est seulement le député de Frontenac, qui n'a aucune espèce d'idée, qui n'a jamais compris. Je ne sais pas s'il a eu l'occasion, lui, d'échanger, mais je sais que les gens de chez eux, les gens de chez nous, les gens d'Asbestos connaissent très bien la position du premier ministre et de l'ensemble du gouvernement du Québec.

Effectivement, on a fait une demande. Et j'apprécie que le député de Frontenac, récemment, ait fait parvenir, lui aussi, à son tour, une demande au premier ministre du Canada. Mais il y a une demande qui est sur la table depuis au-delà d'un an maintenant, M. le Président, qui a été réitérée en octobre dernier, qui a été reprise par mon collègue des Affaires intergouvernementales canadiennes, suite à une décision du Conseil des ministres, de faire en sorte que le Canada dépose une plainte devant l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, par rapport justement à la décision de la France et des pays qui ont banni l'amiante. Bien sûr, on n'a pas de réponse du gouvernement du Canada.

Ce qu'il faut comprendre, M. le Président, c'est que, pour déposer une plainte à cet organisme, il faut être un pays. Malheureusement, vous le savez comme moi, M. le Président, le Québec n'est pas encore un pays. Un jour, peut-être qu'on pourra nous-mêmes prendre en main nos décisions, et j'espère que ce sera pour bientôt. Mais, pour l'instant, ce que le député a négligé de dire tout à l'heure, c'est qu'on en est là. On est dans l'attente d'une décision du gouvernement canadien, tout comme dans le cas de la mine British Canadian, la BC, à laquelle il faisait référence tout à l'heure.

Il y a eu des problèmes à BC, et pas seulement à cause du bannissement de l'amiante. Le député connaît quand même un peu mieux son dossier. On sait qu'il y a des difficultés, parfois, qui font en sorte que les dépôts miniers ne sont plus économiquement rentables. Donc, il s'agissait d'une décision d'affaires par rapport à une situation particulière. Et je suis convaincue que le député de Frontenac, même s'il a négligé ou s'il a omis d'en faire mention, est quand même plus au courant que ça de ce dossier-là.

Alors, dans le cas de la mine BC, encore là, M. le Président, encore là, on était toujours dans l'attente d'une réponse du gouvernement du Canada. Dès le départ, ma collègue du ministère de l'Emploi et de la Solidarité avait fait appel au ministre responsable, au gouvernement du Canada, M. Pettigrew, à savoir: Est-ce qu'on peut recréer le programme PATA pour les travailleurs, pour essayer de rendre les choses plus faciles?

Je sais que ma collègue avait fait la demande. L'industrie, le patron de l'industrie lui-même a réitéré qu'il était prêt à participer. Et finalement tout ce qu'on a eu du gouvernement canadien, c'est une proposition de mesures actives qui, malheureusement, ne donnent pas vraiment satisfaction. On comprendra pourquoi. Les travailleurs sont plutôt âgés. Donc, ce n'est pas la solution idéale.

Donc, encore une fois, il y a des décisions comme ça qui, malheureusement, ne nous appartiennent pas. Tout ce que j'espère et ce que je dis à mon collègue de Frontenac ainsi qu'à tout le monde qui nous écoute: Peut-être un jour pourrons-nous enfin prendre nos propres décisions et les appliquer. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Le débat étant maintenant terminé, est-ce que cette motion qui souligne la Semaine minière est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Toujours sous la rubrique Motions sans préavis, y a-t-il d'autres motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint du gouvernement.

(16 heures)

M. Brassard: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des institutions entreprendra des consultations particulières sur le projet de loi n° 406, Loi modifiant le Code des professions, demain, le jeudi 14 mai 1998, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'économie et du travail se réunira en séance de travail aujourd'hui, mercredi 13 mai 1998, de 16 heures à 18 heures, à la salle RC-161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de faire le point sur les mandats d'initiative en cours.

Rubrique renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

D'accord. Alors, nous avons maintenant terminé les affaires courantes. Nous allons passer aux affaires du jour.

Aux affaires du jour, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: Alors, M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 51 du feuilleton.


Motions du gouvernement


Procéder à des consultations particulières sur la déclaration de Calgary

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 51 de votre feuilleton, M. le leader adjoint du gouvernement propose la motion qui suit:

«Que la commission des institutions procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur la "Déclaration de Calgary, notamment en ce qui a trait à une future entente-cadre sur l'union sociale, et ce, en regard des droits et compétences de l'Assemblée nationale, du gouvernement du Québec et des revendications historiques de ces derniers", à compter du 2 juin 1998 et qu'à cette fin entende les individus et groupes suivants:

«Jean Allaire, Pierre Blache, Henri Brun, André Burelle, François Chevrette, Jean-François Desbiens, Christian Dufour, Nicole Duplé, Jacques Frémont, Alain Gagnon, Patrice Garant, Micheline Labelle, Guy Lachapelle, Guy Laforest, Andrée Lajoie, Simon Langlois, Vincent Lemieux, Jacques-Yvan Morin, Pierre Noreau, Ghyslain Otis, Pierre Patenaude, Réjean Pelletier, Daniel Proulx, Guy Rocher, Claude Ryan, Charles Taylor, André Tremblay, Luc Tremblay, Yves Vaillancourt, José Woehrling, l'Action démocratique du Québec, le Parti libéral du Québec et le Parti québécois.

«Qu'une période de 60 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires partagées également entre le groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque individu soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 30 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 60 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes soit membre de la commission pour la durée du mandat;

«Au surplus, que la ministre de l'Éducation, le ministre d'État de l'Économie et des Finances et la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité soient également membres de ladite commission pour la durée du mandat;

«Que les individus et organismes transmettent au Secrétariat des commissions leur mémoire au plus tard le jeudi 28 mai 1998.»

Avant que le débat sur cette motion ne s'engage, je vous rappelle que cette motion ne peut être amendée et fait l'objet d'un débat restreint d'au plus une heure, conformément à l'article 146 de votre règlement.

Également, je vous informe qu'après réunion avec les leaders la répartition du temps de parole établie pour la discussion de cette motion, mises à part la réplique de cinq minutes accordée à l'auteur de la motion et les cinq minutes allouées à l'ensemble des députés indépendants, les deux groupes parlementaires se partageront également la période consacrée à ce débat. Également, je vous avise que, dans ce cadre, les interventions ne sont pas limitées.

Je cède maintenant la parole à M. le leader adjoint du gouvernement et ministre des Affaires intergouvernementales. M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, je voudrais tout d'abord, en premier lieu, disposer de l'argument clé de l'opposition exprimé par cette dernière lorsque, en déclaration ministérielle, la semaine dernière, au nom du gouvernement, j'ai annoncé la mise en place d'une commission parlementaire pour examiner la déclaration de Calgary. Cet argument clé, et je suis à peu près sûr qu'elle va le reprendre tout à l'heure, c'est de dire: Voilà un exercice futile; le gouvernement devrait consacrer son temps et son énergie à l'économie et à l'emploi.

Eh bien, M. le Président, c'est ce qu'on fait. Je veux prendre quelques minutes pour justement indiquer et dire aux membres de l'Assemblée que c'est ce que le gouvernement fait depuis 1994. Depuis que nous avons accédé au pouvoir, à la suite de l'élection de 1994, nous nous occupons d'économie et d'emploi. Dieu sait que la situation était lamentable, situation héritée du gouvernement précédent: un État pratiquement en faillite, avec un déficit astronomique et monstrueux de 6 000 000 000 $. Donc, nous nous sommes mis à la tâche et nous avons entrepris cette opération difficile à maints égards de restaurer les finances de l'État, de réduire le déficit et de le ramener à zéro d'ici l'an 2000.

Ai-je besoin de vous dire, M. le Président, que cette opération-là a des impacts sur l'économie, à n'en pas douter? Faire cette opération, c'est certainement se préoccuper prioritairement d'économie et d'emploi. Depuis 1994, le gouvernement du Québec, également et au premier chef le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances, a entrepris une lutte acharnée au chômage. Avec succès. Avec succès, puisque le taux de chômage a été ramené à 10 %, passé de 12 % à 10 % depuis un an. Je suis convaincu qu'on va franchir la barre fatidique du 10 %, tomber en dessous de la barre fatidique du 10 % au cours des mois qui viennent. Une lutte efficace au chômage. Tout un ensemble de mesures – je ne veux pas insister, mais vous les connaissez – de politiques, de programmes, des crédits budgétaires, aussi, qui visent à favoriser l'investissement et à créer des emplois au Québec. Et ça réussit, ça marche.

En termes d'investissements, vous le savez très bien, M. le Président, le Québec est en tête du peloton pour tout le Canada. En termes de croissance d'investissements, le Québec performe remarquablement. Et ça se traduit, entre autres, par des bonnes nouvelles, comme celle qui concerne ma circonscription particulièrement, à Alma: un investissement de l'ordre de 2 200 000 000 $ fait par l'Alcan pour y construire une aluminerie qui va produire quelque 375 000 tonnes d'aluminium.

(16 h 10)

Ça, M. le Président, tout ça se fait dans un climat d'incertitude politique épouvantable, aux dires du chef du Parti libéral, M. Charest: L'incertitude politique est terrible au Québec; ça nuit aux investissements, ça nuit à l'économie, ça nuit à la création d'emplois. Bien, on ne s'aperçoit pas de ça beaucoup, nous, dans la région, chez nous, ni ailleurs au Québec, d'ailleurs, puisque les investissements connaissent une croissance remarquable, exceptionnelle, au Québec, particulièrement depuis un an.

Donc, M. le Président, le gouvernement, dès le départ, dès 1994, a fait de l'économie, de l'emploi et de la création d'emplois ses priorités et toute son action, toutes ses mesures et toutes ses politiques ont été conçues et mises en oeuvre justement dans le but de relancer l'économie, de relancer les investissements et de créer de l'emploi.

Alors, l'argument de l'opposition ne tient pas la route. De prétendre que parce qu'une commission parlementaire va se pencher pendant quelques jours sur la déclaration de Calgary pour l'examiner, la scruter, de prétendre et d'affirmer que, ce faisant ou parce qu'on fait ça, on néglige l'économie puis on ne se préoccupe pas de création d'emplois, c'est un argument fallacieux, et de peu de poids, et qu'on peut qualifier, je pense, d'inconsistant.

Je pense que tout le monde reconnaît que, selon l'expression populaire, on peut marcher et mâcher de la gomme en même temps. Vous connaissez l'expression? On peut faire deux choses à la fois. Alors, on peut s'occuper d'économie et d'emploi, on peut s'occuper de santé et d'éducation aussi puis, en même temps, tenir une commission parlementaire pour scruter, examiner sérieusement la déclaration de Calgary.

D'ailleurs, le député de Châteauguay est de cet avis aussi. Il est d'accord avec ça. Dans une entrevue qu'il accordait à M. Brunet, de la radio de Radio-Canada, M. Brunet lui disait, lui rappelait le programme du Parti libéral, où l'on peut lire: L'avenir du Canada est lourdement hypothéqué tant que la Constitution ne reconnaît pas le Québec. C'est dans le programme du Parti libéral. M. Brunet disait à M. Fournier... Et ce que dit M. Charest: Non, ce n'est pas une priorité, il faut laisser le reste du Canada agir. Et la réponse du député de Châteauguay est tout à fait lumineuse, à M. Brunet, le député de Châteauguay répond: Moi, à mon avis, il n'y a rien de contradictoire entre s'occuper de la santé et de l'éducation et s'occuper en même temps de la question identitaire. Bon, alors, ça veut dire, M. le Président, selon l'avis même du député de Châteauguay, que le gouvernement peut continuer de se préoccuper d'économie et d'emploi et en même temps tenir une commission parlementaire sur la déclaration de Calgary. Alors, l'argument ne tient pas la route. J'espère qu'il ne le reprendra pas tout à l'heure dans son intervention. Ça ne lui ferait pas honneur.

M. le Président, il y a quand même de la part des députés du Parti libéral, des députés de l'opposition officielle, un comportement pour le moins étrange et curieux qui mérite qu'on s'y attarde et qu'on essaie de comprendre – qu'on essaie de comprendre. D'après, maintenant, ce qu'on entend de la part de M. Charest, le nouveau chef du Parti libéral, de la part du député de Châteauguay également, l'opposition officielle, le Parti libéral du Québec ne veulent pas discuter de la déclaration de Calgary. Ça ne mérite pas qu'on s'y attarde. Ils disaient, la semaine dernière, qu'il s'agit d'une fuite en avant, de la manipulation grossière.

Bon, on sent chez eux qu'ils ne souhaitent pas, ils ne sont pas intéressés à discuter puis à examiner la déclaration de Calgary. Pourquoi? Pourquoi? La question se pose. La question est pertinente. Pourquoi cette attitude? Parce qu'il y a un changement dans leur comportement, il y a un changement dans leur attitude, un changement radical. Comment expliquer ce coup de frein soudain de la part du Parti libéral à l'égard de la déclaration de Calgary? Comment expliquer cette réduction brutale de leur ardeur, de leur enthousiasme vis-à-vis de la déclaration de Calgary?

Il faut se rappeler un peu l'histoire – ce n'est quand même pas si loin, ça date de quelques mois seulement – lorsque, avant la déclaration de Calgary, le député de Châteauguay a accompagné son chef d'alors, l'ancien député de Vaudreuil, qui était le chef de l'opposition, M. Johnson – maintenant on peut dire son nom, il n'est plus en cette Chambre – alors, le député de Châteauguay a accompagné M. Johnson et ils ont tous deux parcouru le Canada. Ils ont fait toutes les capitales pour convaincre les premiers ministres des provinces de faire un geste, de donner une réponse aux Québécois, de faire une offre aux Québécois, de regarder le résultat référendaire. C'est ce que le député de Châteauguay leur a sûrement dit: Regardez le résultat référendaire. On a failli perdre. On a gagné de peu. Alors, écoutez, il faut faire quelque chose. Il faut que le Canada anglais réponde au Québec, aux Québécois, il faut faire un geste, il faut faire une offre, il faut donner suite aux aspirations des Québécois. C'était privé, ces rencontres-là. Je suppose que c'est ce que le député de Châteauguay disait et ce que M. Johnson, aussi, disait aux premiers ministres des provinces: Faites quelque chose. Et c'est ce que le Canada anglais a fait. Il a adopté la déclaration de Calgary comme réponse aux aspirations du Québec, à la demande du député de Châteauguay et de M. Johnson qui était alors chef du Parti libéral.

Et vous vous rappellerez également qu'à ce moment-là, avant même que la réunion, la conférence de Calgary ait mis fin à ses travaux, M. Johnson s'attribuait déjà le mérite des résultats de cette conférence. Dans Le Soleil de cette époque, on pouvait lire une déclaration de M. Johnson qui disait: Je vais tirer tout le crédit de la déclaration pour moi-même et mon parti, et avec raison, d'avoir pris mon bâton de pèlerin et d'avoir convaincu les premiers ministres du Canada que le problème de l'unité canadienne, ce n'est pas le «rebalancing», le rééquilibrage administratif ou l'union sociale, c'est la reconnaissance du Québec. Ça, c'est M. Johnson qui disait ça. Les travaux n'étaient pas terminés. C'est la reconnaissance du Québec, c'est ça, le problème. Et ce que M. Johnson demandait sans doute aux premiers ministres des autres provinces: Dites quelque chose. Adoptez, donnez une réponse relativement à la reconnaissance du Québec. Parce que, pour M. Johnson, c'était ça, le problème majeur.

Comment comprendre maintenant, quand on sait tout ça et quand on se rappelle tout ça, le cheminement, quand on se rappelle l'enthousiasme de M. Johnson alors qu'il disait de la déclaration de Calgary: C'est une offre merveilleuse, remarquable? Propos tout aussi enthousiastes de la part du député de Châteauguay. Comment comprendre l'absence de volonté, maintenant, des libéraux du Québec de discuter de cette déclaration qui, il n'y a pas si longtemps, était une réponse extraordinaire aux aspirations du Québec? Comment comprendre que l'ancien chef de l'opposition, M. Johnson, déclarait, pas plus tard qu'en septembre 1997, que ce gouvernement, parlant du gouvernement du Parti québécois, faisait fausse route en affirmant que la déclaration était moins que Meech et Charlottetown? Parce que vous vous rappelez les première déclarations de ma part, de la part également du premier ministre du Québec, ça a été de dire: Après analyse – puis on maintient ce jugement-là, je le maintiens – la déclaration de Calgary, c'est moins que Charlottetown et c'est aussi évidemment moins que Meech.

Ce n'était pas ce que croyaient M. Johnson et le député de Châteauguay, j'imagine. Ils étaient convaincus que l'on faisait fausse route en affirmant de telles choses. Donc, par conséquent, on peut présumer que, pour eux, la déclaration de Calgary, c'était l'équivalent de Meech. Et il disait aussi, M. Johnson: Ce n'est pas une proposition constitutionnelle. C'est vrai, c'est une déclaration, mais ça en deviendra une. Donc, dans l'esprit de M. Johnson, il était clair pour lui que si – ça n'arrivera pas, je fais une hypothèse, là, je suis dans l'hypothétique pur – le Parti libéral se retrouvait au pouvoir – c'est ça, l'hypothèse pure – eh bien, la proposition de Calgary, la déclaration de Calgary pourrait être, comme on dit, constitutionnalisée, c'est-à-dire pourrait donner lieu à des amendements formels de la Constitution. Ça en deviendrait une, dit M. Johnson à l'époque.

(16 h 20)

Alors, c'est ça, l'état d'esprit, le jugement des libéraux à l'époque, il n'y a pas si longtemps, portant sur la déclaration de Calgary. Et on s'étonne maintenant que quand on leur dit: Bien, écoutez, on va faire une commission parlementaire puis on va regarder ça, on est pour le moins surpris de voir que leur réaction, c'est une réaction de refus d'amorcer, d'entamer un processus d'analyse de cette déclaration. Ils ne veulent pas le faire. Manifestement, ils sont mal à l'aise devant cette initiative du gouvernement et ils voudraient bien que cette commission n'ait jamais lieu.

Pourtant, le député de Châteauguay, quand on a analysé, en deux heures seulement, les crédits du Secrétariat aux affaires intergouvernementales, j'ai évoqué à quelques reprises, à l'occasion de l'étude de ces crédits, la déclaration de Calgary, puis là il a dit: Écoutez, on n'a pas le temps. Je le cite d'ailleurs au texte: «On pourrait avoir une bonne discussion, j'en suis persuadé, on pourrait avoir une très bonne discussion.» C'est ce qu'il disait, je le cite, à l'époque. Mais, évidemment, compte tenu des deux petites heures qu'on avait à consacrer à l'étude des crédits des affaires intergouvernementales, je pouvais conclure de son affirmation qu'on pourrait se reprendre une autre fois, dans un autre forum. Eh bien, ça arrive maintenant. Donc, j'espère que je réponds en quelque sorte à son attente. Comme on n'avait pas suffisamment de temps à ce moment-là, la semaine dernière, maintenant on en aura beaucoup, un peu plus, à l'occasion de cette commission parlementaire portant sur la déclaration de Calgary.

L'occasion lui est maintenant offerte, en quelque sorte, et nous l'invitons à venir discuter clairement, sans complaisance et avec le même enthousiasme qu'il avait il n'y a pas si longtemps à l'égard de la déclaration de Calgary. Si son nouveau chef, M. Charest, lui, est plutôt froid à l'égard de la déclaration de Calgary, ce n'est pas une raison pour que l'enthousiasme du député de Châteauguay à l'égard de cette déclaration disparaisse ou s'envole comme fumée.

D'ailleurs, cette commission est souhaitée, et ça, je pense que c'est un argument de poids. Cette commission est souhaitée par l'un des pères de la déclaration de Calgary, en l'occurrence l'homme d'affaires M. d'Aquino, Thomas d'Aquino, du Conseil canadien des chefs d'entreprise. Je ne sais pas si vous avez vu le reportage de l'émission Le Point . C'était vraiment très instructif, édifiant, comme dit ma collègue députée de Sherbrooke, vraiment édifiant, parce que là on a vu d'où originait, on a constaté d'où originait cette déclaration. Évidemment, M. Johnson s'en est attribué le mérite. On a cru un temps que c'était lui, que c'était M. Johnson accompagné de son député, le député de Châteauguay, ayant parcouru avec son bâton de pèlerin toutes les capitales des autres provinces pour convaincre les premiers ministres de donner une réponse au Québec. Bien là, je dirais, il y a un problème historique. Probablement que les historiens vont le résoudre, mais il y a un problème historique. Quel est le père ou l'initiateur de la déclaration de Calgary? Est-ce que c'est Daniel Johnson ou Thomas d'Aquino? Un problème historique. Probablement que, avec les recherches, au fil des années, les historiens en arriveront à conclure.

Mais il n'en reste pas moins que M. d'Aquino, lui, très clairement, se considérait comme étant le père de cette déclaration, s'attribuait la paternité de cette déclaration, y compris d'ailleurs le changement de concept, le passage du concept de «société distincteb au concept de «caractère unique». C'est M. d'Aquino qui s'attribuait la paternité de ce passage conceptuel subtil et un peu brumeux, le passage du concept de «société distincte» au concept de «caractère unique».

Alors, M. d'Aquino, lui, il est d'accord avec une commission parlementaire. Il a dit, et je le cite: «J'espère que les membres de l'opposition vont défendre la déclaration de Calgary – donc, n'en seront pas gênés, n'en auront pas honte; c'est ce qu'il espère, on verra – elle est une déclaration importante. Ce n'est pas seulement une déclaration des premiers ministres. On doit accepter que la déclaration de Calgary passera dans tous les Parlements du Canada dans les prochaines semaines, sauf le Québec et le Parlement fédéral. C'est vrai qu'il en reste trois, et on pense que d'ici peu ces trois Parlements, ces trois Législatures, comme on dit, auront sans doute adopté la déclaration de Calgary. Et, dans ce contexte-là, M. d'Aquino presse l'opposition officielle de participer à la commission parlementaire avec empressement et en appuyant la déclaration de Calgary. Et il a aussi souhaité, M. d'Aquino, que M. Charest se présente au nom du Parti libéral du Québec devant la commission.

Comment expliquer cette réserve soudaine, encore une fois, de la part du Parti libéral du Québec? Il est clair que l'explication se retrouve dans le changement de chef, le changement de garde; c'est clair que c'est le changement de garde qui en est l'explication. L'arrivée de M. Charest, je pense, explique cette attitude nouvelle à l'égard de la déclaration de Calgary, parce que M. Charest a pris ses distances à l'égard de la déclaration de Calgary, mais, en même temps, il a adopté des comportements qui sont, je dirais, dangereux, ou en tout cas qui comportent des risques à l'égard des intérêts et des compétences du Québec. Et je voudrais en particulier mettre en relief l'attitude pour le moins inquiétante du nouveau chef du Parti libéral du Québec à l'égard d'une revendication qu'on peut, je pense, qualifier d'historique et de traditionnelle de tous les gouvernements qui se sont succédé à Québec. C'est cette revendication d'un droit de retrait avec pleine compensation financière lorsque le gouvernement fédéral prend des initiatives ou met en oeuvre des programmes dans des champs de compétence du Québec.

Ça, c'est une revendication historique. Tous les gouvernements depuis Duplessis, et on pourrait même remonter jusqu'à Taschereau, tous les gouvernements qui se sont succédé, gouvernements fédéralistes comme gouvernements souverainistes, ont toujours revendiqué que non seulement le pouvoir fédéral de dépenser soit balisé, encadré, mais ils ont également revendiqué un droit de retrait pour le Québec avec pleine compensation financière lorsque le gouvernement fédéral, utilisant son pouvoir de dépenser, met en oeuvre des programmes et des politiques qui sont carrément dans des champs de compétence du Québec. C'est ce qu'on réclame, nous, en matière de négociation d'une entente-cadre sur l'union sociale, c'est ce qu'on réclame, c'est ce que je suis allé exprimer au nom du Québec à Toronto l'autre jour. C'est ce qu'on réclame également dans le cas des bourses du millénaire.

Et c'est extrêmement malheureux que, sur ce point-là, sur ce dossier-là, l'Assemblée nationale ne parle pas d'une seule voix. Parce que, quand on regarde le programme du Parti libéral, que brandissait l'autre jour le député de Châteauguay, oui, bien, dans ce programme-là, il y a la revendication historique du Québec en matière de droit de retrait lorsque le gouvernement fédéral s'ingère dans des champs de compétence du Québec.

(16 h 30)

Pourquoi, dans le dossier des bourses du millénaire, l'opposition officielle, le Parti libéral du Québec ne respecte-t-il pas son propre programme? Pourquoi ne respecte-t-il pas son propre programme également en matière d'union sociale, de négociation de l'accord-cadre sur l'union sociale? Pas un mot, on ne les entend pas parler là-dessus. C'est pourtant dans leur programme. Il le brandissait fièrement la semaine dernière. Est-ce que ça signifie, leur silence à cet égard, que le nouveau chef, M. Charest, n'est pas d'accord avec cette revendication historique? Je pense que la commission parlementaire qui va examiner la déclaration de Calgary va, je l'espère, éclairer la population, l'Assemblée nationale aussi sur cette question cruciale.

Quelle est l'opinion, quelle est la position de M. Charest à l'égard d'une revendication historique aussi centrale dans l'histoire du Québec? Je pense qu'on mérite de le savoir. Les Québécois méritent de le savoir, doivent le savoir. Et j'espère que le député de Châteauguay va s'engager sans équivoque sur ce plan-là, et, je ne sais pas, peut-être qu'il va parler aussi au nom du parti et au nom de son chef, M. Charest, qui est pour le moins peu loquace sur cette question depuis qu'il est devenu chef du Parti libéral du Québec.

Alors, M. le Président, je pense que, à partir du moment où presque tous les Parlements des provinces ont adopté la déclaration de Calgary, il est maintenant temps que l'Assemblée nationale, par le biais d'une de ses commissions, prenne quelques heures, quelques jours pour examiner cette déclaration. Et je le dis sans ambages, on vise deux objectifs.

Le premier objectif, le plus important, c'est évidemment de mieux informer les Québécois. Les Québécois méconnaissent le contenu et la nature de cette déclaration de Calgary. Les sondages le démontrent, il y a une profonde méconnaissance, de la part des Québécois, du contenu même de la déclaration. Alors, il faut mieux les informer, et on le fait, dans un premier temps, en tout cas, en invitant des experts à venir donner leur point de vue sur la déclaration et que les députés puissent après échanger avec ces experts.

Mais le deuxième objectif qu'on vise aussi – on ne s'en cache pas, on le dit ouvertement – c'est qu'il n'est pas normal qu'un parti politique de la taille du Parti libéral, de l'importance du Parti libéral du Québec, qui fait partie de l'histoire du Québec – ce n'est pas un groupuscule, là, je l'espère, en tout cas, c'est un parti qui a été présent dans l'histoire du Québec depuis fort longtemps – ce n'est pas normal qu'un tel parti soit silencieux sur la déclaration de Calgary et qu'on ne sache pas à quelle enseigne il loge, quelles sont ses couleurs.

Alors donc, je pense que la commission va donner l'occasion au Parti libéral de se commettre, de se brancher, d'adopter des positions claires et précises à l'égard de la déclaration de Calgary. Voilà, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Châteauguay et leader adjoint de l'opposition. Vous avez 25 minutes à votre disposition, et il restera cinq minutes de réplique pour le ministre.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Avant de commencer à faire mon intervention sur la motion, peut-être reprendre très, très, très brièvement quelques lignes au ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes qui, parlant de notre parti, disait que le Parti libéral faisait partie de l'histoire. Je lui annonce que nous faisons aussi partie de l'avenir. À n'en pas douter, dès que nous aurons la possibilité de voir les Québécois consultés, ce que nous souhaitons le plus rapidement possible, il verra la véracité de ce propos.

Il parlait de notre programme. Je le brandis à nouveau. Il s'appelle Reconnaissance et interdépendance . Nous en sommes très fiers. Et le ministre s'est arrêté à mi-chemin, mais il était presque parti pour nous dire qu'il trouvait que le programme était bon, et je l'en remercie. Je le remercie de citer des passages de ce programme et de rappeler qu'il constitue une alternative crédible, solide, réaliste à la chicane perpétuelle dont lui-même se fait porteur, et l'ensemble de son gouvernement.

Il a parlé brièvement – encore une fois, c'est deux dernières notes que j'ai prises de son allocution – des bourses du millénaire, disant qu'il serait mieux que l'Assemblée parle d'une seule voix. Je lui réplique qu'il serait préférable que le gouvernement parle d'une seule voix. J'ai entendu dire que sa ministre de l'Éducation appuie notre démarche à l'égard des bourses du millénaire. Elle a fait cette déclaration il y a quelques minutes, m'a-t-on dit, et il sera intéressant de voir les dépêches de presse à cet effet.

Pour ce qui est de M. d'Aquino, je l'ai entendu moi-même aux actualités de Radio-Canada à la radio, il a dénoncé la partisanerie dans laquelle on a inscrit la commission dont on dit qu'elle doit servir d'information. Et je regrette que le ministre ait préféré omettre les éléments des propos de M. d'Aquino qui dénonçaient la façon dont le gouvernement a décidé d'entreprendre tout à coup non pas une consultation pour que le gouvernement se fasse une tête, ce qui est le cas, d'habitude, des commissions comme celle-là...

D'habitude, on appelle les gens pour venir nous faire des commentaires pour tirer une conclusion. Ça, on appelle ça des consultations parlementaires aux fins d'instruire les parlementaires sur les actions à prendre par la suite. Ici, on a inversé complètement le processus. Le gouvernement a tiré les conclusions d'abord et il essaie de trouver des gens qui vont répéter la même chose que lui pour essayer de convaincre.

Alors, la motion qui fait suite à la déclaration, je dis qu'elle confirme, cette motion – et on va le voir – et fournit la preuve qu'il s'agit d'une consultation bidon, d'une consultation de camouflage, d'une consultation téléguidée par la partisanerie.

D'abord, un mot sur cette motion, M. le Président. Tantôt, de votre siège, vous avez rappelé que c'était une motion en vertu de l'article 146 et vous avez rappelé qu'elle ne pouvait pas être amendée. On s'aperçoit que le «bunker» a pris toutes les mesures nécessaires pour s'assurer qu'il avait le contrôle entier sur la machine de propagande qu'il mettait en route.

C'est évidemment une manigance péquiste, on l'aura compris. Et la première manigance péquiste qui se cache derrière cette manoeuvre, c'est de faire venir des spécialistes de l'analyse juridique qui vont venir scruter, regarder le libellé de Calgary pour jouer le jeu du PQ. Parce que le PQ – enfin, on l'a écouté, même tantôt le ministre le disait – tente de faire croire que c'est un texte juridique, tente de faire croire que c'est une offre finale, tente de faire croire que c'est la réponse au Québec. Il nous prête toujours des intentions. On ne le rappelle pas à l'ordre, on est habitués. Mais on ne voit pas, on ne peut pas voir, on ne peut pas dénaturer Calgary au point d'en faire une offre finale et globale au Québec.

Je tiens à mettre en garde les invités du Parti québécois contre cette mascarade. Calgary ne constitue pas un texte juridique, ce n'est pas une offre finale. Calgary, c'est un dialogue qui commence sur le devenir du Canada qui fait une place au Québec. C'est le contraire d'une porte fermée au nez des Québécois. Calgary – et je vois que j'en instruis bon nombre de députés péquistes qui ne sont vraiment pas au courant de ce qui se passe – c'est un élément d'un ensemble de changements qui sont autant de pas dans la bonne direction. Seuls ceux qui veulent briser le pays peuvent s'en plaindre.

C'est un élément, Calgary, d'un ensemble, dans lequel ensemble on retrouve l'entente sur la main-d'oeuvre de mai 1997, l'approfondissement de l'union économique d'août 1997. D'ailleurs, le ministre, aux crédits, disait qu'il était très heureux de cet approfondissement de cette union économique. On se souvient, M. le Président, que, lors des élections de 1994, le Parti québécois était contre l'accord sur le commerce interprovincial. Maintenant, il louange cette union économique que nous avons entre les provinces, évidemment que l'on perdrait s'il fallait qu'il y ait séparation. Mais, quoi qu'il en soit, il y a eu approfondissement l'année passée de l'union économique, en août.

Je parle d'un ensemble. Je dis: Calgary est un élément d'un ensemble. Je continue de regarder les différents éléments de cet ensemble. J'ai dit la main-d'oeuvre en mai, j'ai parlé de l'union économique en août. L'amendement constitutionnel sur les commissions scolaires linguistiques en décembre, une modification à la Constitution. M. le Président, combien de fois on a entendu le Parti québécois nous dire en cette Chambre, à l'extérieur de la Chambre, un peu partout: On ne pourra jamais changer la Constitution qui fait l'affaire des Québécois? Bien, voyez-vous, oui, c'est possible, c'est fait, c'est fait.

(16 h 40)

Ce sont là des succès, des réalités auxquels il faut ajouter des processus de changement qui progressent dans la bonne direction. Et, parmi ces processus de changement, il y a l'union sociale et le contrôle du pouvoir fédéral de dépenser qui accompagne ces discussions. Concrètement, ce que ça veut dire, les discussions sur l'union sociale, c'est: comment mieux faire collaborer les gouvernements, comment mieux gérer l'interdépendance pour le mieux-être des Québécois, pour de meilleurs services.

Là, il faut revenir sur terre deux minutes et là se dire: Au-delà de la rhétorique des partis politiques sur la Constitution, les articles, la gauche et la droite, qu'est-ce qui nous anime quand on parle de ça? Ça devrait être nos concitoyens, ceux qui se demandent où sont rendus nos services de santé et d'éducation que ce gouvernement du Parti québécois détruit – c'est un derby de démolition auquel on assiste depuis quatre ans avec ce gouvernement à l'égard des services de santé et d'éducation – auxquels nous sommes redevables; c'est à nous de nous battre pour nos concitoyens.

Ce gouvernement baisse les bras, abdique ses responsabilités et refuse de voir comment on pourrait amener les gouvernements à travailler ensemble pour le mieux-être de nos concitoyens. Moi, je vous le dis honnêtement, je pense que c'est une bataille que vous avez perdue. Les Québécois n'en veulent plus, de la chicane, ils n'en veulent plus, de vos mythes que vous inventez à chaque jour; ils veulent du monde qui vont s'occuper que ça marche pour eux autres qui vont se lever debout et qui vont dire: Eux autres, ils prennent leurs responsabilités, ils défendent nos services. C'est ce qu'est l'alternative libérale, et je pense que ça vous fait peur.

Alors, il y a donc, je le disais, des éléments. Calgary est un des éléments parmi un ensemble. J'ai parlé de la main-d'oeuvre, j'ai parlé de l'union économique, j'ai parlé de l'amendement constitutionnel sur les commissions scolaires. Je vous ai dit que ça, c'était réalisé, qu'il y a des processus de changement. Les discussions sur l'union sociale, sur le pouvoir fédéral de dépenser qui doit être contrôlé, voilà des processus. Calgary est un autre élément dans les processus de changement. Concrètement, c'est quoi, Calgary? C'est une discussion, je le disais tantôt, sur le devenir du Canada qui fait une place au Québec.

Voilà donc deux chantiers: l'union sociale, le contrôle du pouvoir fédéral de dépenser; Calgary. C'est deux chantiers différents que le PQ veut fondre en un seul. Et évidemment il essaie de nous tromper, il essaie de nous faire croire des choses qui n'existent pas. C'est de la déformation, on continue de dénaturer. C'est l'habitude, je dirais, du ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes. Pour un séparatiste, M. le Président, voir ces changements réalisés et ces processus de changement continuer d'évoluer dans le sens des intérêts du Québec, ça fait peur, ça fait paniquer, parce que ça fait la preuve qu'il y a une alternative à la chicane.

Une porte s'ouvre sur un avenir meilleur. Ne la ratons pas en succombant aux cris de ralliement de ceux qui veulent nous maintenir dans l'obsession de la séparation, dans l'obsession des campagnes référendaires, préréférendaires et postréférendaires, dans l'obsession de la division entre nous, Québécois. Une porte s'ouvre pour nous permettre de bâtir une véritable solidarité pour une croissance économique, pour de meilleurs services de santé et d'éducation. Les Québécois ont assez souffert du régime péquiste. Entre la porte du PQ, qui donne sur la chicane et le recul, et la porte de l'alternative libérale, qui donne sur le dialogue et le progrès, il n'y a pas de doute que le choix que les Québécois feront sera celui du dialogue et du progrès. Et, si le gouvernement a assez de courage pour aller s'en informer, qu'il appelle des élections, il aura la réponse des Québécois à son action.

M. le Président, la consultation proposée, je le dis carrément, elle est paquetée, dirigée par le «bunker». Ce n'est pas une consultation objective, c'est une opération de propagande – organisée probablement par Jean-François Lisée en arrière. Et ça a été une grosse discussion au Conseil des ministres. Ils ont dû se dire: Oui, là on est en arrière dans les sondages, comment est-ce qu'on va faire ça? Bien, on va mettre un petit peu de chicane, on va essayer de déformer la réalité. Les Québécois sont en train de voir que leur maudit programme, il marche, alors il faut leur montrer que ce n'est pas vrai, il faut essayer de dénaturer les choses. C'est ça qu'ils se sont dit, au Conseil des ministres. Je n'étais pas là, mais je peux me douter que ça a dû les faire jaser un bon petit bout. Je sais qu'ils aiment ça, jaser sur ces sujets-là.

Alors, quand on regarde la motion, on s'aperçoit de quoi, M. le Président? Je regarde défiler les noms que le «bunker» a choisis. Il y en a cinq parmi ces noms-là qui sont des membres d'un groupe qui s'appelle Des intellectuels pour la souveraineté. Je n'apprendrai pas au ministre ni au groupe en question qu'ils sont plutôt copain-copain. C'est quand même ce ministre-là qui, à partir de son discrétionnaire, a subventionné le groupe Des intellectuels pour la souveraineté. On en retrouve maintenant cinq, témoins, dans cette liste-là. Il y a aussi deux coauteurs, parmi cette liste, de la Déclaration de souveraineté de septembre 1995. Il y en a un autre, lui, il est coauteur de l'alternative qui avait été proposée au vice-premier ministre, vous savez, sur les référendums de pratique, là. Ça a été envisagé par le Parti québécois un bout de temps. Le premier ministre a dit: Ce n'est pas bon. Ça ne levait pas de terre, vous savez, le référendum de pratique pour en faire un autre. L'obsession référendaire est tellement présente.

M. le Président, ces gens-là que je viens de décrire, ils ont le droit à leur opinion. Je ne veux pas leur enlever le droit à leur opinion. Je veux simplement qu'on s'arrête deux minutes ici pour se rendre compte de quoi on parle. Qu'on ne vienne pas me dire qu'on va apporter un éclairage neutre. Surtout, qu'on ne me parle pas d'informer la population. Là, il ne faut quand même pas étirer l'élastique trop loin.

Je disais que la commission était paquetée. Je vous ai parlé des témoins, mais, si on regardait un peu ceux qui seront membres de cette commission-là, juste pour voir comment ça va être objectif. Alors, on s'en va à la commission des institutions, il y a sept députés péquistes, quatre libéraux. La motion nous propose – dans une vision, je dirais, péquiste – d'améliorer la parité et l'équilibre. Alors, quand on regarde comme il faut, on s'aperçoit qu'on va ajouter quatre ministres. Faites-vous-en pas, ce n'est pas des ministres libéraux, c'est des ministres péquistes qu'on ajoute à cette commission. Alors, dans cet esprit de parité, d'objectivité, d'équilibre entre des opinions, on se retrouve maintenant avec 11 péquistes et quatre libéraux.

Bon. Si vous voulez savoir ce que je pense de la consultation, M. le Président, je vous dis qu'elle est bidon. Je pense en avoir fait une démonstration assez claire. J'ai dit aussi que cette commission, j'en ai parlé la semaine dernière, était un détournement d'institution et que, s'ils voulaient informer les électeurs – et je ne veux pas empêcher un parti politique d'informer les électeurs – peut-être qu'ils devraient suivre un autre chemin, un chemin qu'ils se sont tracé eux-mêmes.

Moi, je disais, la semaine dernière: S'ils veulent tenir ce genre de colloque, pourquoi ils ne font pas un conseil national du Parti québécois? Je vous encourage à faire un conseil national du Parti québécois là-dessus. Il n'y a pas de problème. Vous avez le droit, c'est votre forum. Et pourquoi je dis ça? Bien, c'était le 20 juin dernier, c'est un article du Soleil , ça s'appelait Réviser l'option péquiste , un court passage que je vais vous lire, c'est le premier ministre actuel qui parle. Il dit: «Il faut mettre plus de chair sur le squelette du partenariat. En effet, il faut se préparer à répondre à des questions plus précises sur ce programme. C'est certainement quelque chose qui va occuper la vie du Parti québécois au cours de la prochaine année, a affirmé le premier ministre qui entrevoit des débats intéressants à l'interne.»

Ah! curieux, curieux. Il y a un an, le Parti québécois se disait: Pour l'année qui vient, nous allons discuter de notre programme à l'interne. Et je vous encourage à le faire. Je sais que vous ne l'avez pas fait, là, puis je sais que c'est encore un squelette, mais c'est vos affaires. Mais vous disiez: On va le faire à l'interne. Mais, justement, et c'est pour ça que je parle de détournement d'institution, pourquoi ne pas faire votre patente de propagande à l'interne? Il n'y a pas de problème, c'est chez vous.

Mais, ici, c'est chez les Québécois, tous les Québécois. Même si vous pensez que seuls sont Québécois ceux qui sont membres du Parti québécois, bien, j'ai des petites nouvelles pour vous, il y en a d'autres. Les membres du Parti québécois sont Québécois, les membres du Parti libéral du Québec sont Québécois, les membres de l'ADQ sont Québécois, ceux qui ne sont pas dans un parti politique sont Québécois, ceux qui ne pensent pas comme vous sont Québécois, et ils ont le droit à ce que leurs institutions soient respectées et pas détournées.

(16 h 50)

C'est une consultation bidon. Bidon parce que le Parti québécois, le régime péquiste qui est en face de nous, a refusé de respecter le choix référendaire. Combien de fois avons-nous entendu le ministre et d'autres dire qu'ils n'avaient pas l'intention de travailler à améliorer le fédéralisme? Combien de fois ils nous ont dit ça? Ils font au contraire tout pour détruire, tout pour semer querelles et chicanes, tout pour embourber. Alors, le Parti québécois a été absent de la discussion sur l'unité à St. Andrews, l'été passé, absent à Calgary. Quelques heures après la rencontre de Calgary, ah! bien, là, par exemple, là, ça revient vite. Point de presse, communiqué incendiaire pour attaquer la volonté d'ouverture et de reconnaissance.

C'est bidon parce que le Parti québécois n'a pas respecté les Québécois et n'a pas fait entendre la voix des Québécois. Évidemment, puisqu'il ne respecte pas le choix référendaire, il ne respectera pas les Québécois. C'est bidon parce que le Parti québécois est toujours absent. Et c'est pareil sur l'union sociale. Et là je vais vous lire un bout de la déclaration ministérielle du ministre. Ça ne date pas du mois de septembre. La semaine passée, je lui ai montré qu'entre septembre et la semaine dernière il avait quand même fait un virage plutôt impressionnant. Là, je vais vous lire un bout. Et ça, c'est la déclaration de la semaine passée. Honnêtement, quand je l'ai lu, je n'en revenais pas que ça ait été écrit, puis je me suis dit: Il ne le lira probablement pas en Chambre. Mais il l'a lu, M. le Président, il l'a lu.

Ça dit ceci: «Il y a quelques semaines avaient lieu à Toronto les premières discussions formelles des ministres responsables de ce dossier sur le pouvoir fédéral de dépenser.» C'est dans la discussion sur l'union sociale. Je le relis, juste pour qu'on catche comme il faut, là: «Il y a quelques semaines avaient lieu à Toronto les premières discussions formelles des ministres responsables de ce dossier sur le pouvoir fédéral de dépenser.» Et il dit, et je le cite, je complète, je dis tout: «J'y ai fait entendre la voix du Québec.»

Qu'est-ce qu'il essaie de nous dire? Il essaie de nous dire que le Parti québécois, il a fait entendre la voix du Québec lorsqu'il y a des rencontres sur ces discussions-là. Je ne suis pas remonté à 1995, mais on se souviendra que les discussions sur l'union sociale ont commencé à Terre-Neuve, c'était en pleine campagne préréférendaire. Jacques Parizeau était alors premier ministre et il avait dit que ça ne l'intéressait pas, cette affaire-là. Alors, il était sorti rapidement.

Une voix: Ce n'était pas à Toronto...

M. Fournier: Non. Alors, là, par la suite, il y a eu des rencontres qui ont commencé. Et je vais juste faire état de ce qui s'est passé en 1996-1997, 1997-1998.

M. le Président, le 2 octobre 1996, à Calgary, le gouvernement péquiste n'a pas fait entendre la voix du Québec, le 26 novembre 1996 non plus, ni le 27 d'ailleurs. En 1997, le 29 janvier, il n'a pas fait entendre la voix du Québec; en 1997, le 10 juin, à Calgary, toujours absent, le gouvernement du Parti québécois; le 6 octobre 1997, encore absent. Et ça continue. Le 9 janvier, à Toronto, le 19 janvier, à Toronto, le 18 février, le 27 février, le 13 mars, M. le Président.

Ça, c'est des documents qui viennent du ministère des Affaires intergouvernementales canadiennes, le ministère du ministre qui est devant moi. Il n'a jamais été présent à ces rencontres. Il est allé une fois, la dernière fois, et il essaie de nous faire croire qu'il a toujours été présent. Il n'a jamais été là. Il ne nous a jamais représentés. Il n'a jamais fait entendre la voix du Québec, n'a jamais travaillé à améliorer le fédéralisme, à améliorer le système pour que nos concitoyens aient de meilleurs services. C'est la chaise vide qu'il a pratiquée sans cesse et sans cesse. Et, par son absence, le Parti québécois a bâillonné le Québec et les Québécois.

La vérité, c'est que la chaise vide est malheureusement accompagnée d'une autre stratégie. La stratégie qui l'accompagne, c'est de s'isoler, de monter un mur autour des Québécois, de s'assurer qu'il n'y ait aucune relation intergouvernementale entre le Québec et les autres provinces.

Parce qu'imaginons, M. le Président, qu'il y ait un gouvernement qui veut défendre les intérêts du Québec et qu'il y a des discussions sur l'union économique, sur l'union sociale, sur la reconnaissance, bien, il me semble que ce serait juste logique que notre ministre des Relations intergouvernementales parle à quelques ministres des autres provinces. C'est comme juste... C'est élémentaire.

À chaque année, je demande au ministre s'il a rencontré ses homologues des autres provinces, question routinière de notre étude des crédits. Lors de l'étude de l'année dernière, pas cette année, donc, pour 1996-1997, parmi ses homologues des autres provinces, notre ministre actuel, qui nous représente, M. le Président, avait rencontré un seul ministre, Bernard Richard, du Nouveau-Brunswick. Il l'avait rencontré, je suis sûr que vous voulez savoir combien de fois, une. En 1997, nette amélioration, nette amélioration: il a rencontré deux ministres de deux provinces le même jour. Une seule fois pour chacun: Mme Cunningham, de l'Ontario, et M. Thériault, du Nouveau-Brunswick.

Le point que je veux amener, c'est le suivant. La chaise vide, d'une part, le refus de parler aux homologues des autres provinces, d'autre part, n'est-ce pas là la preuve que ce gouvernement ne cherche en rien à améliorer le sort des Québécois, à s'inscrire dans ces discussions pour faire entendre la voix du Québec? Comment peut-il par la suite se lever, s'indigner des résultats ou des démarches qui sont faites, se disant: Mais on ne nous respecte pas? Mais vous refusez de faire entendre la voix du Québec. Et on veut nous parler, M. le Président, on veut nous servir maintenant les revendications historiques. On a mis ça dans le mandat, les revendications historiques. Et, toujours à propos de l'union sociale, on veut nous faire dire: L'union sociale, vous savez, sociale, c'est les provinces. Je le rappelle, on aura l'occasion d'en discuter, M. le ministre.

Le premier ministre actuel, en 1993, il était chef du Bloc québécois à l'époque, disait ceci, et je pense que c'est central: Je suis de ceux qui croient que le Canada, ce n'est pas rien que des échecs. On n'a pas vécu ensemble pendant 125 ans pour ne faire que des erreurs. Et l'une des grandes réussites canadiennes, c'est qu'on s'est soucié des démunis et qu'on a essayé de partager la richesse. On a créé des programmes sociaux qui comptent parmi les meilleurs au monde, et ça, il faut le préserver. C'est lui, le premier ministre actuel, qui disait ça, M. le Président, en 1993. Maintenant, dans la même journée, vous allez avoir quelqu'un du Parti québécois qui va nous dire: On ne peut pas participer à ces rencontres sur la santé parce que c'est de compétence du Québec. Mais l'hépatite C, par exemple, ça, c'est au fédéral de payer. La loi sur le tabac, ah! bien, ça, c'est au fédéral de l'adopter, puis les transferts sociaux, c'est au fédéral de les augmenter.

La vérité, c'est que le régime péquiste a un double discours. La vérité, M. le Président, c'est qu'il y a interdépendance des gouvernements. Le Québec doit être jaloux de ses compétences en matière sociale, et les Québécois doivent bénéficier de la richesse créée à la grandeur du Canada et répartie entre tous les Canadiens. Comment s'assurer que le tout soit fonctionnel, que l'on évite les dédoublements et qu'on améliore la qualité des services pour nos concitoyens? C'est ça qui doit nous guider. C'est ça, la véritable question. C'est à ça que s'adressent les discussions sur l'union sociale. Ce n'est pas le grand péril que veut inventer le ministre des Affaires intergouvernementales.

Que fait le gouvernement péquiste? Eh bien, il tente de faire dérailler le train, il pratique la politique de la terre brûlée. Je lui dis que les Québécois en ont assez. La preuve est faite, M. le Président, et je termine là-dessus, c'est une consultation bidon. C'est encore plus vrai aujourd'hui que la semaine dernière. La preuve est faite que cette consultation est téléguidée par la partisanerie et repose sur des faussetés. Calgary n'est pas une offre finale. Calgary n'est pas la réponse finale au Québec. Calgary, c'est une discussion qui commence entre citoyens sur le devenir d'un pays qui ferait une place et qui fait une place au Québec.

(17 heures)

Je vois que ça vous embête quand on fait une place au Québec, quand on prouve que ça marche. Je comprends que vous soyez embêtés parce que ça attaque directement votre programme de parti. Mais, quand on pense aux Québécois qu'on représente, on devrait se dire: Voilà qui est bon pour le Québec. Et je vous dis, M. le Président, que les choix sont clairs: d'un côté, il y a ce régime péquiste qui ne vit que de cette obsession de référendum, de cette obsession de séparation, qui n'est animé par rien d'autre que de la chicane, que de bloquer les systèmes, de faire en sorte de tout faire pour que ça ne marche pas, pour s'indigner à la seconde près et de dire: Vous voyez, ça ne marche pas.

Moi, je dis qu'il y a une alternative à cette politique de chicane. Et je suis convaincu que les Québécois en ont marre de votre politique de chicane. Il y a une alternative. Elle est crédible. Elle est l'articulation du choix référendaire des Québécois, que nous avons respecté dans Reconnaissance et interdépendance . Pendant un an de temps, en 1997, il y a déjà eu assez d'éléments qui prouvent que nous sommes sur la bonne voie, que cette alternative, elle est crédible. Je dis au gouvernement qu'il y a lieu et que c'est possible de réaliser tout ça en ayant de véritables interventions en matière économique, de véritables préoccupations en matière sociale et en matière de santé et d'éducation. Et que votre gouvernement ne se lève jamais le matin en se demandant: Comment je peux améliorer les services des Québécois? Il se lève le matin en se disant: Est-ce que je peux encore gagner un point pour forcer dans la gorge des Québécois la séparation? Ils vous ont déjà dit non. Aux prochaines élections, ils vont vous renvoyer dans l'opposition. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay et leader adjoint de l'opposition. Je vais maintenant céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement et ministre des Affaires intergouvernementales pour une réplique de cinq minutes.


M. Jacques Brassard (réplique)

M. Brassard: M. le Président, on voit bien la manoeuvre, elle est assez grossière, que d'assimiler la défense vigoureuse des intérêts, des pouvoirs, des compétences du Québec qui sont menacés par les interventions multiples du gouvernement fédéral utilisant son pouvoir de dépenser, ce gouvernement fédéral qui actuellement, depuis quelques mois, multiplie les ingérences, les empiétements dans des champs de compétence qui sont les nôtres. L'opposition officielle cherche à faire croire que de défendre farouchement, avec détermination les intérêts et les compétences du Québec, c'est entretenir la chicane. M. le Président, à ce compte-là, le gouvernement de Jean Lesage était chicanier, le gouvernement de Daniel Johnson père était chicanier; à ce compte-là, même le gouvernement de Robert Bourassa était chicanier.

Ce que souhaite et ce que veut l'opposition officielle, le Parti libéral du Québec, au fond, on s'en rend compte, c'est que le gouvernement du Québec se taise, s'aplatisse devant le gouvernement fédéral, silencieusement, et accepte comme un... les empiétements et les ingérences du gouvernement fédéral sans rien dire. C'est ça qu'ils souhaitent, c'est ça qu'ils veulent et, dans le fond, c'est ce qu'ils vont faire et c'est ce qu'ils font présentement.

Quand Jean Chrétien, tout content de voir arriver Jean Charest à la tête du Parti libéral, dit que c'est un homme raisonnable, Jean Charest, vous savez ce que ça veut dire, un homme raisonnable? Vous savez ce qu'on dit dans les familles, des fois, quand on dit d'un enfant: Qu'il est donc raisonnable? Il est tranquille, il ne bouge pas, il ne bouge pas l'eau, il est soumis, il est docile. C'est ça quand on dit: Un enfant raisonnable. Là, on va avoir un chef raisonnable. Un chef raisonnable, ça veut dire qu'il va être aux ordres de Jean Chrétien, qu'il ne bougera pas, qu'il va se soumettre, qu'il va être assujetti au Parti libéral du Canada. C'est ça que ça veut dire, être raisonnable. C'est ça, un homme raisonnable, dans l'esprit de Jean Chrétien, et Jean Charest en sera un.

M. le Président, de quoi a peur le Parti libéral en tenant une commission parlementaire pour examiner la déclaration de Calgary? De quoi vous avez peur? C'est quoi, cette panique soudaine devant cette initiative, somme toute, tout à fait normale que d'examiner une déclaration? De quoi avez-vous peur? Je commence à le deviner un peu, en écoutant tout à l'heure les propos du député de Châteauguay, quand il dit: Ce n'est pas une offre finale. C'est un premier pas dans la bonne direction et non pas tout le chemin parcouru, que la déclaration de Calgary. Ça veut dire qu'elle est pleine de trous et de lacunes, et ça veut dire qu'ils auront la responsabilité de combler les trous et de combler les lacunes puis d'indiquer à la population: Voici ce qui manque dans la déclaration de Calgary, voici ce qu'il faudrait y ajouter. Et, à partir de là, à ce moment-là, vous allez voir comment va réagir le Canada anglais, comment vont réagir les gouvernements des provinces du Canada anglais. Parce que, pour elles et pour ces gouvernements, je vous le dis, M. le Président, ce n'est pas un premier pas seulement, non, non, ce n'est pas un premier pas, pour les provinces et ces gouvernements, c'est une offre finale, c'est le maximum qu'ils sont en mesure d'offrir au Québec.

Évidemment, l'opposition officielle, le Parti libéral ne voudrait pas que cette faille majeure dans la déclaration de Calgary apparaisse au grand jour devant les Québécois et qu'ils se rendent compte que, au fond, pour le Canada anglais, ce n'est pas un premier pas, c'est tout le chemin parcouru, c'est une offre finale. C'est ce que ne veut pas le Parti libéral. Il ne veut pas que ça apparaisse au grand jour, cette lacune majeure, fondamentale de la déclaration de Calgary. Eh bien, ça va apparaître quand même à l'aide d'experts. Et je trouve un peu méprisant de la part du député de Châteauguay de prétendre que, parce que des experts sont favorables à la souveraineté, ils ne sont pas crédibles puis ils ne peuvent pas exprimer leur point de vue sur la déclaration de Calgary. Il y en a là-dedans aussi qui sont fédéralistes, on le sait: Claude Ryan, en particulier; M. Burelle; André Tremblay. Il y en a plusieurs là-dedans dont l'allégeance fédéraliste est connue et qui vont venir, eux aussi, exprimer leur point de vue, M. le Président. J'espère que l'opposition officielle va y être, puis j'espère qu'on va savoir où elle loge en matière de réforme constitutionnelle.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. Ceci met fin au débat.

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Alors, M. le...

M. Brassard: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...oui?

M. Brassard: Vote reporté, vote enregistré, demain, à la période des affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Par appel nominal?

M. Brassard: Par appel nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Et reporté demain?

M. Brassard: Oui.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le vote est donc reporté demain, à la période des affaires courantes.

M. Fournier: Simplement pour faire remarquer que je comprenais que nous avions déjà voté, mais je vois que les manigances, les astuces et le théâtre se poursuivent. Alors, on continuera dans le théâtre que ce gouvernement veut faire autour de cette question. Il serait plus approprié qu'il s'occupe d'autre chose: de la santé et de l'éducation, notamment.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Le débat est terminé, et le vote aura lieu demain, à la période des affaires courantes, vote par appel nominal. Alors, ceci met fin à ce débat, et j'inviterais le leader du gouvernement à nous proposer la suite des discussions.

M. Brassard: M. le Président, je voudrais que vous preniez en considération l'article 7 du feuilleton.


Projet de loi n° 404


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, à l'article 7, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 404, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, ce projet de loi se situe dans le cadre et en continuité de la réorganisation de nos services de santé et de la transformation du réseau de la santé et des services sociaux qui sont en marche depuis maintenant à peu près trois ans.

(17 h 10)

On se rappellera qu'il y avait trois grands objectifs qui étaient visés, qui sont toujours visés, dans cette transformation de nos services de santé et de nos services sociaux. Un premier qui était de prendre tous les moyens pour mieux adapter les services qui sont offerts à la population aux besoins de la population, aux besoins qui changent avec les changements démographiques de notre population, avec des problèmes différents, soit que ce soit autour de la violence, de problèmes de santé associés à la pauvreté chez ceux parmi nous qui sont des plus démunis, et qu'on s'assure que, à mesure qu'on progresse, on a un système qui ne force pas les gens à se contenter de ce qu'on leur offre comme services mais un système qui s'adapte à ce dont les gens ont besoin, un système qui s'adapte aussi en tenant compte de tout ce que le développement des connaissances et des technologies permet d'offrir de services de meilleure qualité et avec une plus grande efficacité. Donc, un premier objectif d'adaptation.

Un autre objectif qui est de tenter le plus possible de faire favoriser des interventions, des actions, des services qui viennent agir le plus possible en amont des problèmes, de façon préventive, pour au mieux promouvoir la santé, mais, dans tous les cas où c'est possible, de prévenir que se développent des problèmes de santé ou d'au moins agir le plus précocement possible, de façon la plus rapide et intensive possible, donc mieux adaptée, action qui est plus à point, plus efficace pour régler des problèmes de santé parce qu'on intervient plus vite.

Et tout ça visait un troisième objectif qui était celui de décentraliser, de décentraliser des décisions, de donner les services de santé et des services sociaux le plus possible dans les mains, en termes de décision, de responsabilité, des gens qui les reçoivent et qu'on puisse bien équilibrer entre le niveau local, le territoire de la MRC, du CLSC, la région ou le niveau national pour l'ensemble du Québec selon le type de service, le type de décision à prendre, qu'on soit le plus possible au bon niveau et que les gens puissent s'approprier leur système de santé et de services sociaux.

Alors, pendant que s'est faite cette réorganisation, il y a plusieurs discussions, des consultations qui ont été faites régulièrement, et on a pu identifier un certain nombre de modifications qui seraient souhaitables à la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour mieux favoriser l'atteinte de ces objectifs, pour mieux appuyer le travail qu'il reste à faire pour compléter cette transformation, pour aider à consolider ces changements. C'est beau d'avoir transformé, mais on sait que c'est fragile dans une société quand on évolue, que ce n'est pas facile de faire des changements – quand on les fait, il y a toujours une période de fragilité de la nouvelle configuration – et on souhaite être capable de consolider ça.

On est rendu à ce point-là présentement, compléter ce qu'on a entrepris et s'assurer qu'on puisse consolider ce qu'on a fait, et tout ça en favorisant, encore une fois, une action le plus localement possible, le plus régionalement possible quand c'est indiqué, et s'assurer que les bons décideurs sont ceux qui sont en prise de possession des moyens qu'il faut, dont ils ont besoin, pour faire les arbitrages nécessaires et s'assurer que notre système répond aux besoins de la population.

Alors, dans le projet de loi qui... Je tenais à rappeler ça, parce que c'est un projet de loi qui amende, donc, plusieurs sections. Ce n'est pas comme une loi qui arrive avec un principe puis qui définit une nouvelle activité, crée une nouvelle organisation, mais c'est une loi, le projet de loi n° 404, qui intervient dans une autre loi qui est celle qui régit l'ensemble de notre système de santé et de services sociaux.

Pour le présenter de façon la plus succincte possible, je vais identifier les principales têtes de chapitre, les principaux thèmes sur lesquels interviennent l'ensemble des modifications qui sont proposées, d'abord qui visent cette question fondamentale pour aider la décentralisation, à voir comment on peut alléger des processus administratifs de notre système, qui est assez lourd et assez centralisé présentement, mieux répartir les pouvoirs réglementaires, qui sont à peu près tous concentrés au ministère présentement, et clarifier les rôles. Si on veut décentraliser, répartir autrement la capacité de prendre des décisions, il faut que les rôles et les missions soient très clairs, à ce moment-là, au niveau local, au niveau de la région et au niveau de l'ensemble du Québec. Donc, ça, c'est un thème et un chapitre très importants.

Le deuxième est celui qui vise notre système de traitement des plaintes. On a dans notre réseau une organisation qui fait que, malgré tous les efforts pour satisfaire les gens, au nombre de services médicaux, d'interventions qui sont faites par jour, c'est par milliers qu'on les compte dans un système comme celui-là pour l'ensemble du Québec, il y a une soupape qui est prévue. C'est que, quand les services ne satisfont pas les gens, les gens ont une possibilité de revenir et d'intervenir pour obtenir satisfaction. C'est ce qu'on appelle le système de traitement des plaintes. Alors, là aussi, on doit apporter des améliorations sur la base de l'expérience des dernières années.

Au titre des ressources humaines, et plus particulièrement dans des amendements qu'on propose la ressource humaine qui est le médecin, on a aussi une proposition qui va aider à intégrer mieux, impliquer plus et mieux les médecins dans le fonctionnement des services de santé.

On a aussi un quatrième thème qui vise ce qu'on appelle les ressources intermédiaires, ces différents types de ressources, que ce soient des foyers adaptés, que ce soient des familles d'accueil, que ce soient des pavillons, qui sont en lien avec nos établissements et qui permettent de reconfigurer régulièrement, qui apportent beaucoup de souplesse justement pour adapter les services de santé et les services sociaux selon les régions, selon les personnes pour que, le plus possible, les gens se retrouvent soit en lien avec un point de services ou dans un établissement qui développe des formules qui s'adaptent à ce dont les gens ont besoin, mais toujours en lien avec un établissement public qui assume la continuité et la qualité des services. Donc, ces ressources intermédiaires là seront aussi améliorées.

On a voulu aussi... À l'expérience de la deuxième élection qui a eu lieu dans ce réseau, on sait que les établissements, et ça, c'est important de se le rappeler, tous les établissements – il n'y en a plus que 400 dans le réseau de la santé et des services sociaux maintenant – beaucoup se sont intégrés, se sont fusionnés. On a diminué de près de 40 % le nombre d'établissements parce qu'ils se sont intégrés. Ils ont des masses critiques plus importantes et ils sont dirigés par des conseils d'administration qui sont formés de gens qui représentent la population, qui représentent les groupes socioéconomiques, qui représentent les groupes communautaires, qui représentent les villes, les villages et les municipalités régionales de comté. Alors, c'était il y a à peu près un an, on a eu la deuxième élection. Il y avait eu une première élection qui s'était faite au moment où la loi qu'on amende aujourd'hui avait été adoptée, en 1991 ou 1992. Je pense que la première élection s'était passée en 1992 ou 1993, après que la loi eut été adoptée. Et là on y venait pour une deuxième expérience et on a pu voir qu'il y a des améliorations qui pourraient être apportées.

Finalement, pour l'ensemble du système, on a un certain nombre de modifications où on voudrait renforcer le sens de la responsabilité, l'imputabilité. On dit qu'on décentralise, qu'on confie à différents niveaux la responsabilité de donner des services, de répondre aux besoins de la population; bien, il faut que ceux qui prennent ces décisions-là, les conseils d'administration, les gestionnaires, les professionnels soient vraiment dans une situation où ils puissent rendre compte, bien sûr, à leurs autorités à l'intérieur de l'établissement, de la région, au ministère, ultimement au ministre qui est le responsable final vis-à-vis de l'Assemblée nationale, ici, mais aussi être capables de plus en plus de rendre compte à la population qu'ils desservent. Si on veut vraiment que ce système évolue graduellement pour que la population se l'approprie, bien, la population a un plus grand rôle à jouer, par un meilleur système électoral, pour nommer des gens qui prennent des décisions au nom de la population. Il faut que ces gens-là puissent rendre compte à la population.

Et, finalement, on a quelques changements plus pointus qui visent une région, la région du Nord-du-Québec, qui est une région assez particulière dans ce sens que c'est une petite population sur un très grand territoire et qui a souhaité faire une intégration complète de ses services de santé, où la régie régionale, le centre hospitalier, les centres de soins de longue durée et les CLSC ne formeront maintenant qu'un seul établissement qui aura les pouvoirs et les responsabilités d'une régie régionale et d'un établissement. Comme il s'agissait d'une situation très spéciale où l'application de la loi, avec tous les accommodements, même, qu'on pouvait y faire, laissait beaucoup d'insatisfaction, les gens eux-mêmes ont structuré le système qu'ils voudraient. Maintenant, les amendements, quand on les aura adoptés, vont légaliser ce qui est devenu pour eux une nouvelle situation.

(17 h 20)

Alors, M. le Président, je n'irai pas dans tous les détails, parce que, quand on change une loi, il y a beaucoup d'aspects qui sont assez techniques, et on va, en commission parlementaire, pouvoir aller dans les détails article par article. Mais la commission parlementaire a déjà tenu une consultation et on a entendu – je pense que c'est une vingtaine – au moins une vingtaine, entre 20 et 30 groupes, représentants d'associations, à peu près tous ceux, là, qui sont impliqués dans le réseau de la santé et des services sociaux, parce qu'ils reçoivent des services, parce qu'ils collaborent avec les réseaux, comme les organismes communautaires, ou parce qu'ils font partie du réseau en tant que professionnels ou en tant que gestionnaires, ont pris connaissance du projet de loi. Et, même s'il y avait eu des consultations plus informelles, au cours des deux dernières années, qui auraient impliqué beaucoup de gens pour l'élaboration de ces modifications que l'on souhaite, que l'on présente à notre loi constitutive du système de santé et de services sociaux, on a tenu à ce que, en bout de ligne, sur l'ensemble du projet tel qu'il se présente, les gens puissent venir encore faire leurs commentaires. Et il y a d'ailleurs beaucoup de suggestions très intéressantes qui ont été faites, que nous avons retenues et qui nous amèneront à proposer un certain nombre de modifications au projet de loi lorsque nous serons en commission pour adopter le projet de loi article par article.

Alors, je repasse rapidement les différents thèmes que j'ai identifiés, pour donner un peu une idée plus concrète de ce qu'il y a dans ce projet de loi, de quel genre de changements on parle.

Alors, j'ai dit d'abord que le premier thème était celui, en lien avec la décentralisation, qui voulait alléger, répartir les pouvoirs réglementaires autrement, clarifier les rôles. Et on verra qu'il sera possible, si on adopte les propositions de ce projet de loi, par exemple, que les différentes ententes qui sont conclues entre l'établissement et les organismes pour assurer une meilleure continuité de services, assurer une meilleure collaboration... Il y a de plus en plus d'ententes, de protocoles qui sont faits. Et, comme on avait un système très centralisé, toutes ces ententes devaient finalement être approuvées ultimement, même, par le ministère ou par le ministre, ce qui mettait une lourdeur énorme dans notre système. Et il sera désormais possible que la plupart de ces ententes-là puissent être conclues et mises en application immédiatement.

S'il faut des vérifications, s'il faut des validations, elles pourront toujours se faire par après, mais le processus ne sera pas retardé pour autant. Si les gens s'entendent, établissent un consensus pour faire des choses ensemble... L'expérience des trois dernières années nous a montré qu'il n'y a pas lieu d'attendre de donner une permission particulière, dans la mesure où les gens agissent dans le cadre de leurs responsabilités, dans le cadre de ce qu'est la mission qui leur est confiée.

Il y avait beaucoup de règles qui visaient, par exemple, la composition du comité des usagers. On sait que, surtout dans des établissements où les gens sont des résidents pour des longues périodes de temps, il y a un comité de résidents. Pour différents établissements, ceux qui utilisent les services nomment des représentants sur un comité qui est en lien constant avec l'organisation pour aider, justement, à faire l'ajustement des services à la population. Il y avait des règles assez complexes à cette composition-là, qui restreignaient beaucoup les possibilités que les gens ont voulu explorer à l'expérience au cours des dernières années, et il y aura des assouplissements d'apportés de ce côté-là.

Et, finalement, on avait un système qui obligeait les gens à faire plusieurs rapports – les régies régionales, chacun des établissements – qui étaient transmis à différentes étapes. Et là, pour avoir une meilleure vue d'ensemble, comme les rapports ont quand même un sens... Les rapports annuels qui doivent être faits, par exemple, ont un sens et ils sont utiles en termes d'évaluation dans la mesure où on a une vision globale de ce qui est fait, que ce n'est pas toute une série de petits rapports parsemés. Alors, à l'avenir, il sera possible pour les régies régionales de présenter un seul rapport qui pourra prendre en compte l'ensemble de leurs activités et les activités des établissements de leur région et qui, au plus tard au 30 septembre de chaque année, pourra être présenté, et qui, dans un seul document, fera le point sur les services de santé. Et il sera un outil de gestion beaucoup plus utile, a-ton vu à l'expérience, encore une fois, qu'une série de petits rapports où on n'a pas fait un effort d'intégration et de réflexion.

Donc, tout ça, ce que ça vise vraiment, c'est d'aider, de favoriser la responsabilisation au niveau des établissements et de rendre, aussi, plus fluide l'échange d'information et plus facile la collaboration entre les différents établissements. Alors, il y a plusieurs recommandations qui nous ont été faites pour les ajustements dans les détails de ces mécanismes, et nous pensons qu'il sera possible rapidement d'avoir des modifications qui vont simplifier un peu la vie des gens dans le quotidien.

C'est la même chose en ce qui regarde les pouvoirs réglementaires. Tout ne sera pas nécessairement réglementé par le ministère. On pourra, à mesure qu'on clarifie les responsabilités, attribuer à chaque niveau, à l'établissement, à la région, sa marge de manoeuvre pour pouvoir déterminer comment on pourra procéder. Et tout ce qui se présentait comme un peu superflu... il y a un tas de règlements que la loi, telle qu'elle existe, prévoyait et qui, dans plusieurs cas... il y en avait tellement, il y en a plusieurs qui n'ont jamais été élaborés, comme règlements, qui n'ont jamais été adoptés. Alors, on était souvent dans une impossibilité d'agir en fonction de certains articles parce qu'un règlement qui devait déterminer la façon d'appliquer l'article n'était pas fait; et, pour d'autres règlements, on s'est aperçu à l'expérience que c'était un peu superflu. Alors, tout ce qui était là comme règlement, qui n'avait pas été utilisé ou qui n'avait pas été fait et que personne en sentait le besoin, ce sera des règlements qui seront abolis de la loi, de sorte qu'on aura vraiment allégé.

Maintenant, ici, je tiens à préciser – et on l'a vu à l'expérience de l'élaboration de cette loi-là – que ce n'est peut-être pas encore aussi loin, comme déréglementation, que certains l'auraient souhaité, parce qu'il y a des éléments qu'il faut pousser un peu plus loin comme analyses, comme études, malgré toutes les consultations qu'on a faites. On met d'emblée un chantier – il y en aura trois, chantiers. Avec les travaux qu'on a faits et l'adoption du projet de loi qu'on propose, on aura une base qui nous permettra d'aller plus loin pour la déréglementation. Donc, on va assurer une continuité, là. Il y a d'emblée un chantier qui se mettra sur pied pour voir comment on peut pousser plus loin sur la base des décisions qui sont prises dans le cadre de ce projet de loi ci, pour aller plus loin dans le sens d'une déréglementation et d'un assouplissement de notre système.

J'ai parlé, dans cet effort de décentralisation, d'une clarification des rôles. Et là l'objectif qui est visé, c'est vraiment de mettre beaucoup plus clairement dans la loi, pour venir confirmer ce qui est une pratique qui s'est établie et qui se consolide présentement, que le ministère cible vraiment son rôle pour être le niveau de décision des politiques, des orientations qui doivent s'appliquer pour l'ensemble du Québec, de s'assurer qu'en décentralisant notre système on ne balkanise pas l'organisation des services de santé et des services sociaux et que l'ensemble des québécois et des québécoises puissent savoir qu'il y a des services de base en termes de types de services, de la façon dont certains services doivent être rendus, qui doivent correspondre à des normes et des standards professionnels reconnus, que ces normes seront enchâssées, si vous voulez, dans des politiques et des orientations ministérielles et que tout le monde au Québec saura qu'ils ont accès, peu importe où ils sont, aux mêmes types de services partout.

En plus de s'assurer qu'on a le droit, en termes de qualité, aux mêmes types de services, les gens, au Québec, peuvent aussi être assurés qu'ils ont la part de services, quantitativement, la part de ressources auxquelles ils ont droit. Et, là aussi, le ministère assume et se voit confirmer dans la loi ce rôle d'assurer, de suivre, de vérifier qu'il y a bien une équité dans la répartition des ressources entre les différentes régions. On n'envoie plus les budgets simplement à différents établissements, souhaitant qu'à peu près tout le monde en ait pour sa part, ce ne sont plus non plus des programmes un peu en silos, de santé physique, de santé mentale, de services sociaux, qui servent pour gérer et distribuer des ressources, mais c'est des enveloppes selon les régions.

Et les régions préparent, elles, des enveloppes selon les territoires de CLSC, ce qui donne donc une marge de manoeuvre pour que les preneurs de décisions, localement ou régionalement, puissent faire des ajustements qui sont favorables à leur population. Mais, pour ça, il faut un cadre, il faut que chacun soit assuré qu'il a sa part équitable du gâteau, si je peux m'exprimer de cette façon, et qu'à l'intérieur de ça toute décision ne risque pas de lui enlever, au profit d'un autre – que ce soit le territoire du CLSC ou la région – des ressources, mais lui permette d'allouer autrement, d'utiliser autrement, toujours dans ce souci d'adapter constamment les services aux besoins de la population.

Et, finalement, le ministère assume une responsabilité de suivre, d'évaluer et de s'assurer, en termes de meilleure santé, un meilleur bien-être de la population, qu'on atteint les résultats et, si on ne peut pas les atteindre, qu'on comprenne pourquoi on ne réussit pas et qu'on apporte les correctifs nécessaires.

(17 h 30)

Au niveau des régions, le rôle est beaucoup plus ciblé pour établir clairement que c'est au niveau de la région, qu'on a une régie régionale qui assume la responsabilité d'organisation des services et des activités sur l'ensemble du territoire, pour s'assurer que chacun des territoires locaux a les ressources qu'il faut et que la coordination d'ensemble pour s'assurer que les collaborations entre les territoires et les établissements sont harmonieuses. Il y a une responsabilité de base de la régie régionale, en plus de s'assurer qu'il y a régulièrement une participation, des consultations de la population quand on prévoit des changements ou quand on fait l'analyse de résultats qui sont obtenus au niveau de la région.

Finalement, les établissements auront une responsabilité mieux campée quant à la gestion des ressources humaines. Le personnel du réseau travaille au niveau d'un établissement, en lien avec l'établissement. Et c'est là que doit s'assumer la responsabilité de la gestion des plans de carrière, de l'encadrement du personnel et, avec le personnel, de la distribution des services dont la population a besoin.

Alors, clarification des rôles, déréglementation jusqu'à un certain point, départ d'un chantier pour aller plus loin dans la déréglementation et des allégements administratifs où on pense que beaucoup d'irritants seront enlevés.

Un autre thème important est celui du traitement des plaintes. Je vous disais qu'on a ce système où c'est possible, pour quelqu'un qui, malgré tous les efforts qui ont été faits... où il n'y a pas satisfaction qui a été obtenue, que les gens puissent revenir à la charge et obtenir satisfaction. Là, il y a deux types de changement, en gros, qu'on fait. Un qui est de s'assurer de mieux couvrir l'ensemble des services. Et on s'est aperçu qu'il y a ce qu'on appelle des ressources intermédiaires qui ne sont pas un établissement public, qui ne sont pas des groupes communautaires mais qui sont une collaboration entre le public et le privé: le propriétaire d'un pavillon, d'une résidence, d'une famille d'accueil, d'un foyer adapté pour des jeunes en difficulté ou pour des personnes handicapées. Il y a beaucoup de contrats qui sont établis entre des établissements qui assument la responsabilité de base mais qui peuvent offrir une plus grande variété de services en travaillant avec ces ressources intermédiaires, qui peuvent aussi permettre que ces services soient accessibles plus localement sur l'ensemble du territoire.

Alors, on a réalisé que, pour les ressources intermédiaires, le mécanisme des plaintes ne s'appliquait pas. Ce n'était pas prévu dans la loi. Alors, là, en lien avec l'établissement, l'établissement qui établit un contrat, qu'on appelle une ressource intermédiaire, on voit aussi à s'assurer que, si une plainte doit être formulée, l'établissement est responsable de recevoir la plainte et de s'assurer, avec les responsables de la ressource intermédiaire, de donner l'information au patient ou à l'utilisateur du service et d'apporter les correctifs qui pourraient être indiqués. Donc, ce type de changement pour une meilleure couverture.

Aussi, on aura un certain nombre de changements pour favoriser un fonctionnement plus rapide. En général, on nous a dit qu'à peu près, je pense, 80 % des plaintes qui sont faites sont traitées dans la semaine qui suit et que, sur 13 000 plaintes à peu près qui sont faites par année, il y en a peut-être à peu près 500 ou 600 qui donnent lieu à un recours de l'établissement à la régie régionale parce qu'on n'a pas obtenu satisfaction, et ultimement un recours de la régie régionale au Commissaire aux plaintes. Et ça, c'est un système qui fonctionnait assez bien, mais les délais étaient assez longs.

Par exemple, l'établissement, même si 80 % des plaintes étaient vraiment traitées dans la semaine qui suivait, il y avait quand même un délai possible qui pouvait aller jusqu'à 60 jours. Et toujours où le bât blesse, ce n'est pas la grande majorité où ça va bien, mais c'est le petit nombre. Même si c'est une faible proportion de plaintes qui pouvaient être réglées sur une période de temps plus longue, comme on dit, les humains étant ce qu'ils sont, quand une plainte est plus difficile à traiter, si on a 60 jours pour le faire, on a des bonnes chances de prendre 60 jours pour le faire. Et, à l'expérience, les gens nous ont dit qu'on pourrait faire mieux, et on pourrait se donner un délai de 30 jours, couper de moitié, et s'assurer que les délais de transmission de l'information, et tout ça, roulent beaucoup plus vite et que les gens obtiennent satisfaction beaucoup plus rapidement.

On avait aussi, pour favoriser une meilleure fluidité, une contrainte, en ce sens que les gens, s'ils pensaient, en formulant une plainte, souhaiter, au besoin, demander un deuxième recours à une régie régionale, on exigeait que la plainte soit écrite. Si la plainte n'était faite que verbalement... Et on peut comprendre que les gens, sur le plan de la logistique, voyaient comment tu peux aller, entre guillemets, en appel d'une plainte qui n'a été faite que verbalement. Bon, bien sûr, les gens qui reçoivent la plainte vont la consigner par écrit, ils vont avoir un petit dossier qu'ils vont monter, mais ce n'était pas la plainte telle que formulée par la personne. Donc, ça ne donnait pas d'ouverture pour aller plus loin. Alors, ça, ça a été corrigé. Et les gens, au besoin, sont aidés pour que la plainte qu'ils formulent soit consignée d'une telle façon que, s'ils ne sont pas satisfaits, ils pourront exiger qu'on examine plus longtemps la plainte qu'ils ont.

Maintenant, avec tout ça, meilleure couverture, un système plus fluide. L'orientation que les changements voudront donner, et qui est partagée par la Commissaire aux plaintes présentement, c'est de donner à ce service de traitement de plaintes un sens de service à la clientèle. Ce n'est pas un système que les gens souhaitent voir se judiciariser, provoquant des réactions défensives de la part du personnel et développant un peu une relation contentieuse entre un client ou un patient et les professionnels de l'établissement, mais ils souhaitent plutôt un service à la clientèle, de sorte que et le client, évidemment, et l'établissement sont assurés d'une façon de travailler ensemble pour corriger des choses et que, pour les gestionnaires du système, ce soit un des plus beaux moyens d'évaluation et de rétroaction, les services qu'ils rendent.

Et s'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas bien, on n'a pas besoin d'attendre le rapport annuel de la fin de l'année, une analyse de ce rapport-là, pour voir comment on peut apporter des améliorations. Ça, ça nous donne une vue d'ensemble. Mais, dans le quotidien, ce qui est important, c'est que les gens soient dans une relation de collaboration et que ce service de plaintes soit vraiment un service qui vise à améliorer les services et à satisfaire les clients en favorisant une bonne collaboration entre les professionnels et ceux qui reçoivent les services.

Je vous ai parlé tout à l'heure de chantier. On en a un pour aller plus loin dans la déréglementation. On en aurait un autre qui va aller plus loin dans l'analyse du droit des usagers, parce qu'on nous a dit: C'est beau de faire évoluer votre système comme un service à la clientèle, c'est ce qu'on souhaite. On ne veut pas judiciariser à outrance ce système-là, mais il peut être question, à un moment donné, de plus qu'une insatisfaction d'un service. Il peut être question d'un droit qu'on n'aurait peut-être pas respecté. Et, comme on voudrait être complet à cet égard et ne pas échapper ce qui pourrait être amélioré, il y aura aussi un chantier où on va prendre le temps d'aller plus à fond dans l'examen de cette question et de revenir éventuellement pour d'autres modifications à la loi pour consolider cette partie-là de notre système de plaintes.

Un autre thème dont je vous ai parlé est celui des ressources intermédiaires. Je ne veux pas revenir là-dessus, je vois que le temps passe rapidement, mais retenons que ce qu'on aura, avec les amendements qui sont proposées, c'est qu'on aura organisé notre système pour que la continuité, pour que la personne qui reçoit des services d'une ressource intermédiaire ne soit pas simplement un transfert, en quelque part, à celui qui donne un service d'une organisation privée, mais sera vraiment, restera sous la même responsabilité, dans le même système et dans la même continuité que l'établissement, que ce soit le CLSC, que ce soit le centre hospitalier, que ce soit le centre jeunesse qui assume la responsabilité vis-à-vis de la population, qui gardera une responsabilité et un meilleur lien, un meilleur travail de continuité avec les ressources intermédiaires qui, elles, pourront se déployer de façon beaucoup plus souple et avec beaucoup plus de diversité et moins de rigidité qu'on avait auparavant.

Au chapitre des ressources humaines, là il y a un changement très important qui est fait, c'est le seul élément nouveau qui est créé, qu'on rajoute, avec ces amendements-là, à notre système de santé, qui est celui d'un département de médecine régionale, de médecine générale. Et là c'est un changement majeur qui va venir aider à véritablement consolider sur la base du territoire d'un CLSC la collaboration essentielle entre le CLSC, les médecins et les groupes communautaires. Présentement, les médecins, au niveau des médecins de famille, sont en pratique dans leur cabinet, seuls avec un petit groupe ou des fois dans une clinique médicale qui est plus considérable, chacun offrant les meilleurs services qu'il peut offrir à la population, mais chacun travaillant un peu de son côté, sans mécanisme vraiment efficace, et le but est de faire que tout ça soit mieux concerté, que le patient, lui, soit assuré, 24 heures par jour, sept jours par semaine, d'avoir accès à la gamme complète des services.

(17 h 40)

On sait que ce n'est pas la seule cause, mais c'est une des raisons qui amènent des difficultés par moment dans les urgences au Québec, parce que beaucoup de gens se retrouvent là, parce qu'après huit heures le soir ou pendant la fin de semaine on n'a trouvé ni au CLSC ni dans les cabinets un médecin ou les médecins dont les cabinets étaient ouverts, ou au CLSC, étaient débordés. Et on se retrouve à l'urgence avec des files d'attente qu'on devrait éviter s'il y avait une meilleure concertation entre les médecins en pratique, le CLSC. On devrait retrouver aussi une équipe médicale et des groupes communautaires, qui sont les trois portes d'entrée. Le débat de la porte d'entrée, c'est un peu artificiel. Il n'y a pas une porte d'entrée dans le système. Les gens y entrent selon le problème qu'ils ont et par différentes façons d'offrir l'accessibilité.

Alors, les médecins ont accepté. On est en négociations, à travailler sur les modalités, mais on aura une assise légale bien claire, bien transparente qui dira comment, au niveau de la région, et comment, au niveau de chacun des territoires de CLSC... Les médecins seront dans une équipe et travailleront ensemble, assumeront ensemble, collectivement, comme ils le font très bien au sein d'un département hospitalier, cette gamme complète de services et sur des plages de temps complètes, encore une fois, 24 heures par jour et sept jours par semaine.

Alors, ça, je pense qu'il y a là une innovation très intéressante qui va demander certains ajustements avec le rôle des commissions médicales régionales, mais où on aura vraiment une implication beaucoup plus grande des médecins. Je sais que les médecins ont trouvé par moments que tout se passait, dans cette transformation-là, un peu vite et qu'ils étaient un peu laissés à côté. Ils ont eu un peu l'impression, à un moment donné, qu'ils étaient laissés sur la bande pendant que la partie se jouait sur la glace, pour prendre une image d'un sport qui est très populaire chez nous.

Alors, même s'il y a déjà différentes structures où les médecins peuvent donner leur avis, au niveau des conseils d'administration des régies régionales ou au niveau des établissements par les conseils des médecins dentistes et pharmaciens ou par les commissions médicales régionales, il n'y avait pas, au niveau de l'organisation des services, une articulation qui faisait que les médecins pouvaient être impliqués dans le cadre de ce qu'est leur responsabilité et travailler en harmonie avec les autres éléments: le CLSC, les groupes communautaires, les hôpitaux et la régie régionale.

Et ça, il y a un accord de principe avec les médecins. On aura les bases légales pour le faire. Je pense qu'on prévoit qu'au cours de la prochaine année on pourra mettre en place le département. Et je suis convaincu que ça va être un élément très important pour améliorer l'accessibilité aux services de santé de première ligne, y compris les services médicaux.

M. le Président, finalement, un autre thème important qui est traité dans ce projet de loi est la question des procédures électorales. On a vu à l'expérience qu'en ce qui regarde soit la publicité, le financement, le pouvoir des officiers d'élection, le matériel électoral qui peut être utilisé, après l'expérience de deux élections comme ça, on pense qu'on pourrait, profitant de ce qu'on connaît, par ailleurs, comme système électoral au Québec, au niveau de l'ensemble du Québec, au niveau municipal, tirer une meilleure application de ce système-là pour s'assurer qu'on pourra établir, prévoir dans la loi qu'un règlement d'élection, si vous voulez, pourra être élaboré pour, là aussi, assurer un fonctionnement plus standard à travers le Québec et des modalités d'application tenant compte des régions urbaines ou rurales, par exemple, d'application de la procédure électorale pour que, le plus possible, tout le monde ait la possibilité de participer à ce système électoral et que nos conseils d'administration des établissements et des régies régionales représentent le mieux possible la population, que ceux qui viennent à ces conseils couvrent assez bien, par leur origine territoriale, leur origine géographique, l'ensemble du territoire et que la population puisse être confiante que ceux qui sont là, qui ont à assumer un mandat pour une période de quatre ans, prennent vraiment des décisions en connaissant l'ensemble de la population et du territoire où vit cette population-là, soient des gens qui sont connus de la population et qui peuvent rester en contact avec la population, et que les citoyens qui font ça de façon bénévole et qui viennent servir sur ces conseils-là sentent aussi qu'ils peuvent rendre compte, qu'ils peuvent rejoindre la population régulièrement.

Et là je vous parlais d'un troisième chantier. En plus de la déréglementation, du droit des usagers, on en mettra un autre sur pied qui visera à voir comment, sur la base d'une procédure électorale améliorée, on peut pousser plus loin nos mécanismes de reddition de compte.

Alors, M. le Président, ça fait le tour. C'est peut-être un peu fastidieux parce que c'est beaucoup d'éléments qui sont touchés, mais je souhaitais donner un peu un sens de ce qu'on peut retrouver dans ce projet de loi là, et je suis convaincu que l'étude article par article nous réserve des heures très intéressantes. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Oui. Je vous remercie, M. le Président, de me laisser un peu de temps. Je suis un peu surpris qu'on ait appelé le projet de loi. J'ai assisté aux audiences publiques, où nous avons reçu un bon nombre de groupes très, très impliqués dans le réseau de la santé et des services sociaux, et j'étais sous l'impression qu'il y avait un message qui avait été passé au ministre de la Santé qui était peut-être de dire: Écoutez, il y a des éléments là-dedans qu'on est prêts à regarder, mais, dans l'ensemble, c'est un projet qui touche à beaucoup de dossiers différents, c'est un projet qui manque peut-être un peu de vision. J'avais l'impression que le message qui avait été passé, c'était de demander au ministre de refaire ses devoirs et de nous présenter un projet de loi un peu plus complet. Alors, je pense que ce message n'a pas été bien passé, et nous allons être obligés, M. le Président, de reprendre un peu les arguments qui ont été faits par plusieurs des gens qui se sont présentés en commission parlementaire.

Mais peut-être, avant de prendre ces arguments, simplement rappeler le portrait actuel, la situation actuelle dans le domaine de la santé. Ça ne va pas bien. Je pense que la santé est en crise – je n'apprends absolument rien à personne – les hôpitaux vont atteindre un déficit record, près de 500 000 000 $, cette année. Je voulais simplement rappeler que lorsque le gouvernement du Parti québécois, lorsque M. Parizeau était le ministre des Finances, il avait laissé dans sa première série de mandats un déficit de 250 000 000 $ au niveau des hôpitaux; c'était le Parti libéral – et, à l'époque, c'était Mme Thérèse Lavoie-Roux – dans le cadre de l'opération blitz, qui avait injecté... il avait fallu faire les injections nécessaires pour rééquilibrer les finances des hôpitaux. J'ai l'impression que le scénario se répète, et on assiste à des déficits vraiment records qui auront un impact extrêmement important, où les hôpitaux devront présenter des plans de redressement, donc couper davantage dans les services à la population.

On nous avait promis en campagne électorale de mettre fin aux coupures aveugles des libéraux. Bien, M. le Président, on va laisser la population bientôt décider qui vraiment aura fait des coupures aveugles. On nous avait promis de diminuer les listes d'attente. Par une transformation du réseau, on devait avoir un impact et diminuer les listes d'attente, sauf que, lorsqu'on regarde de près la situation des listes d'attente dans les secteurs importants où le taux de mortalité est très important – on pense à la chirurgie cardiaque, on pense en cancérologie, on pense aussi en orthopédie, peut-être le taux de mortalité est moins important, mais les patients souffrent à la maison, ceux qui ont besoin d'une greffe de la hanche particulièrement – ces gens-là sont dans des attentes de plus de six mois. Là aussi, cette belle promesse du gouvernement du Parti québécois, qui était de diminuer de moitié les listes et les durées d'attente, rien n'a été fait; au contraire, les listes d'attente ont été amplifiées.

Les salles d'urgence. On nous avait promis, là aussi, des améliorations. Maintenant, depuis peut-être six mois, on regarde les nouvelles et on s'aperçoit... nous recevons les bulletins d'information: salle d'urgence de tel hôpital, lits... nombre de patients sur civière, un dépassement. Ça fait dur, M. le Président, quand on commence à regarder ça de cette façon-là et quand on sait le nombre de patients qui souffrent! Et je pense qu'il y a plusieurs cas qui ont été rapportés ici même par notre formation, démontrant les difficultés que les patients ont à recevoir les soins nécessaires.

Les coûts de la bureaucratie. On en a souvent parlé, eh bien, on va en parler encore dans le projet de loi. De nouveau, on enlève des pouvoirs au ministre, on les donne aux régies. Alors, c'est toujours d'ériger un système bureaucratique en véritable système, alors que, dans tout ça, on n'est bien loin du patient. Quand est-ce qu'on a parlé du patient dans l'énoncé du ministre tantôt? Jamais. Quand est-ce qu'on entend le ministre parler du patient? C'est très, très rare, M. le Président.

(17 h 50)

Alors, vous voyez le portrait de la situation dans laquelle nous sommes. Et là le ministre nous amène un projet de loi qui voudrait modifier plusieurs dossiers en même temps. On va faire des amendements sur le cadre législatif des établissements, sur les départements régionaux de médecine générale – c'est une nouvelle structure, en passant, M. le Président – le plan des effectifs médicaux va être touché également, le processus de traitement des plaintes, les élections dans les établissements. Nous avons une difficulté à suivre le fil d'Ariane, le dénominateur commun entre tous ces dossiers. Ça nous fait passer plus à un bill omnibus, et on se demande le pourquoi, la vraie raison d'apporter à ce moment-ci ces changements de façon aussi disparate. Je prends le dossier des élections, M. le Président. C'est la deuxième fois que le ministre nous amène un projet de loi pour modifier les élections dans les établissements de santé. Il l'avait fait dans le cadre de la loi n° 116; il le fait maintenant dans le cadre de ce projet de loi. Alors, pourquoi? J'espère qu'on sera en mesure d'avoir des réponses à nos questions.

M. le Président, je me permets – le temps file rapidement – de reprendre quelques-uns des mémoires assez intéressants que nous avons eus en commission parlementaire. Je pense d'abord au mémoire de la CSN, qui est un des partenaires de la séparation, un partenaire du gouvernement actuel dans son projet de séparation, et ces gens-là ont fait des remarques extrêmement pertinentes en commission parlementaire: «Une lecture attentive de l'ensemble du projet de loi nous a cependant convaincus que plusieurs des modifications proposées auront des effets importants. Ainsi, le projet de loi accélère le processus de décentralisation administrative des ministères aux régies – on en a parlé tantôt. Cette décentralisation se place cependant dans un contexte où rien n'a été tenté pour augmenter l'imputabilité des régies régionales.»

Je voudrais rappeler, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 116, en accord avec le député de Lévis, que nous avions proposé au ministre – et là on travaillait vraiment ensemble – de rendre imputables les régies régionales. On avait proposé des alternatives, aussi. Et, à l'époque, le ministre avait refusé que les régies puissent rendre des comptes. Et, de nouveau – on en fait la critique, c'est la CSN qui l'a faite cette fois-ci – je doute que le ministre puisse accepter ce genre de recommandation.

D'autre part, plusieurs aspects du projet de loi n'auront de sens que pour les personnes familières des rouages politiques et administratifs du réseau. Elles ne parlent qu'aux administrateurs du réseau, seuls en mesure d'en apprécier la pleine portée et la pertinence. C'est là qu'on vous disait que c'est tellement technique, le projet de loi qui nous est présenté.

M. le Président, il y a eu d'autres mémoires qui ont été présentés. Je pense à celui de la Fédération des médecins spécialistes qui dit: «Le recours à un cadre rigide et autoritaire est parfois nécessaire pour corriger une situation où le statu quo devient intolérable. Mais, à notre avis, le recours à un cadre rigide, nettement pyramidal, quoi qu'on en dise, est par ailleurs tout à fait inadapté à la planification à long terme et surtout à l'adaptation continue des services de santé dans un monde en profonde mutation.»

M. le Président, je voudrais vous mentionner que les médecins, lorsqu'ils se sont présentés en commission parlementaire, ont lancé un grand cri au ministre. Ils ont dit: Écoutez, on est là, on est une force extrêmement importante au Québec. Voulez-vous nous utiliser? Voulez-vous prendre nos avis? Nous sommes ceux qui sont les plus près des patients. Est-ce que vous pouvez nous écouter?

M. le Président, on est en 1998, et lorsque les représentants des médecins sont obligés de venir en commission parlementaire dire au ministre: Bien, écoutez, on est prêts à vous aider, mais écoutez-nous donc. Et le ministre, depuis bientôt quatre ans, a toujours refusé cette aide tellement importante, préférant laisser, je pense, à des technocrates le soin de gérer l'ensemble du réseau de la santé.

M. le Président, je peux continuer avec d'autres mémoires. Je pense à celui de l'Association des hôpitaux qui dit: «Le projet de loi n° 404 n'est pas à la hauteur des attentes des établissements en matière d'allégement législatif et de déréglementation. De façon plus fondamentale, il déçoit parce qu'il ne reflète pas une volonté d'ajuster l'encadrement législatif au système de santé, qui s'est prêté à une transformation profonde – on le sait – laquelle a touché tous les niveaux de sa structure décisionnelle et opérationnelle.»

M. le Président, je pourrais continuer. Plusieurs, presque l'ensemble des mémoires présentés avaient comme dénominateur commun: M. le ministre, il y a des choses qui ne fonctionnent pas dans ce projet de loi là. Il n'y a pas de trait d'union dans l'ensemble des chapitres qui sont présentés. On peut parler d'élection à un conseil d'administration, à la page suivante, on va parler du processus de traitement des plaintes. Je me demande encore une fois pourquoi le ministre n'a pas choisi de refaire ses devoirs, de regarder d'autres alternatives. Il y a eu les médecins qui lui ont offert leurs services, les infirmières également, beaucoup d'autres corps professionnels qui pourraient bonifier, enrichir un tel projet de loi. Dans un moment où tout le système de santé vit des moments extrêmement pénibles et difficiles, il me semble que c'est un peu une bouée de sauvetage que le ministre aurait dû prendre.

Je peux continuer. Toujours selon l'Association des hôpitaux, notre système de santé se transforme, continue d'évoluer, avec toute la diversité qu'on lui a toujours reconnue, et je pense qu'il faut au moins rendre hommage à tous les participants du système de santé, que ce soient les gestionnaires, les employés, les infirmières, qui, au premier chapitre, font des efforts extraordinaires pour maintenir une qualité de soins dans des conditions des plus difficiles. De cette diversité émergent de nouveaux et solides arguments sur la question du partage des pouvoirs entre les différents niveaux décisionnels du système – et là on parle des établissements multivocationnels, les centres hospitaliers, les CLSC et les établissements de longue durée – qui couvrent des territoires et qui deviendront une force que le palier régional ne peut pas négliger. Eh bien, là aussi, M. le Président, on aimerait étudier ou travailler avec le ministre pour trouver des solutions beaucoup plus adaptées plutôt que des solutions technocratiques, des solutions qui répondent véritablement aux besoins des patients.

M. le Président, il y a eu d'autres mémoires extrêmement importants. Je pense au mémoire du Comité provincial des malades, qui sont venus, eux aussi, faire leurs représentations, faire des suggestions, et, là encore, on ne sait pas si les suggestions qui ont été faites par le Comité provincial des malades sont retenues ou vont être retenues par le ministre. Le Protecteur du citoyen, quelqu'un que vous connaissez bien, M. le Président, eh bien, lui aussi y est allé de ses suggestions, de son mot pour bonifier ou pour enrichir cette discussion. Est-ce que le ministre va le prendre en considération? Lui-même disait: «Le ministre demeure responsable des politiques, et les régies régionales le deviennent en ce qui a trait aux programmes. Mais, dans les faits, ce modèle crée une situation où la responsabilité ultime du gouvernement en matière de santé se dilue dans une structure organisationnelle. Les modifications semblent faire en sorte qu'il n'y ait plus un seul responsable de l'organisation des services de santé au Québec, et il faut se rappeler que la décentralisation, contrairement à la délégation, retire au ministre l'imputabilité sur l'application des programmes.»

M. le Président, je pense que nous avons des signaux qui nous viennent du réseau. Ce sont des lumières rouges qui nous disent: Maintenant, attention! Il y a des difficultés majeures dans le domaine de la santé actuellement. Je lisais ce matin un court rapport, une douzaine d'hôpitaux qui ont accumulé 200 000 000 $ de déficit. On parle, je pense: le CHUM, à Montréal, 27 300 000 $; l'Hôpital général Juif, 29 000 000 $; l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, 7 600 000 $; Louis-H. Lafontaine, 7 500 000 $; Sainte-Justine, 7 500 000 $; et plusieurs autres, M. le Président. J'espère que le ministre n'ira pas blâmer les conseils d'administration, les dirigeants d'établissement, les employés comme il l'a fait dans le dossier des urgences, parce que les gens travaillent actuellement à essayer de sortir du bourbier dans lequel ils ont été placés.

M. le Président, je voudrais terminer en rappelant ce qu'on nous avait tellement promis, cette autre façon de gouverner. Si on prend l'exemple de la santé, eh bien, je pense que bientôt il y aura un bilan à faire et que la population, qui aura le droit et le choix de trouver un nouveau gouvernement, eh bien, le fera. On pense également à ce grand oublié du gouvernement du Parti québécois qui est le patient. Je pense que toutes les réformes qui ont toujours été faites ont été des réformes pour ajouter des structures, pour augmenter le fardeau, pour distancer le patient des décideurs, particulièrement le ministère de la Santé.

(18 heures)

Alors, M. le Président, nous souhaitons que le ministre puisse refaire ses devoirs. Dans l'état actuel du projet de loi n° 404, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives, eh bien, nous sentons l'obligation de voter contre ce projet de loi. Nous espérons, M. le Président, que le ministre révisera le projet de loi et pourra nous le présenter soit sous une nouvelle forme ou une série d'amendements, ce qui nous permettra de l'étudier et de voir si les patients en seraient les grands bénéficiaires. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Étant donné qu'il est 18 heures, nous allons ajourner nos travaux à demain matin.

M. Brassard: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah bon! Alors...

M. Brassard: ...alors, on peut faire l'adoption. Vous avez terminé?

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...très bien. Si le débat est terminé, s'il n'y a plus d'autres...

M. Brassard: C'est justement, est-ce que le député a terminé? Oui?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Le député a terminé.

M. Brassard: Alors, on peut adopter le principe.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, s'il n'y a plus d'autres intervenants, je croyais qu'il pouvait y avoir d'autres intervenants.

M. Brassard: Il n'y a pas d'autres intervenants, non.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons soumettre aux voix le principe du projet de loi n° 404, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives. Ce principe du projet est-il adopté?

M. Marsan: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.

M. Brassard: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors là, je crois qu'étant donné l'heure...

M. Brassard: Bien, il faudrait que je fasse une motion pour référer...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, oui.

M. Brassard: Si vous le permettez.

Le Vice-Président (M. Brouillet): On va compléter.


Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Brassard: Je voudrais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, c'est la bonne fois. Nous allons ajourner nos travaux à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 2)