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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le jeudi 21 mai 1998 - Vol. 35 N° 182

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Table des matières

Affaires du jour

Présence du ministre de l'Éducation, des Universités et de la Recherche du gouvernement autonome du Pays basque, M. Inaxio Oliveri Albisu

Affaires courantes

Motion proposant que l'Assemblée dénonce l'intolérance manifestée à l'égard de David Levine à la suite de sa nomination comme directeur général du nouvel hôpital d'Ottawa

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Affaires du jour

Alors, nous débutons notre séance aux affaires du jour. Et j'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer le menu, s'il vous plaît.

M. Boulerice: Oui. Alors, M. le Président, le menu de cet avant-midi sera un peu Metrecal, si vous me permettez l'expression. Non, je vous prierais de bien vouloir considérer l'article 10 de notre feuilleton, pour lequel d'ailleurs j'aurais immédiatement des remarques à vous faire.


Projet de loi n° 425


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 10 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 19 mai 1998 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 425, Loi modifiant la Loi sur les impôts et la Loi sur le ministère du Revenu concernant le contrôle de certains abris fiscaux. Y a-t-il d'autres intervenants?

M. Boulerice: M. le Président, Mme la ministre déléguée au Revenu ayant renoncé à son droit de réplique et l'opposition ayant fait savoir qu'elle n'avait pas d'autres intervenants, donc nous passerions à l'adoption, et après je ferai le renvoi en commission.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le principe du projet de loi n° 425, Loi modifiant la Loi sur les impôts et la Loi sur le ministère du Revenu concernant le contrôle de certains abris fiscaux, est-il adopté? Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Boulerice: Oui, alors, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Excusez, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Une seule question: Est-ce que, comme j'ai demandé avant, on peut avoir des consultations avec les groupes impliqués dans cette question avant de commencer l'étude détaillée de ce projet de loi?

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, brièvement, j'aimerais informer notre collègue qu'il y a forcément discussion entre les deux cabinets, c'est-à-dire leader du gouvernement et leader de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien. Alors, cette motion est adoptée. Le renvoi, je crois qu'on l'a adopté. Oui? Très bien. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. Bon. Alors, M. le Président, pour la suite des choses, je vous réfère à l'article 45 du feuilleton.


Projet de loi n° 415


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 45 du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique, président du Conseil du trésor propose l'adoption du projet de loi n° 415, Loi instituant le Fonds relatif à la tempête de verglas survenue du 5 au 9 janvier 1998. Alors, M. le président du Conseil du trésor, je vous cède la parole.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, quelques mots seulement pour rappeler en quoi consiste ce fonds. Ce fonds va servir à comptabiliser toutes les ressources, tous les revenus que nous avons pour faire face aux dépenses relatives au verglas. Il y a celles qui sont encourues directement par le ministère, mais ce fonds va servir aussi à comptabiliser les sources de revenus qui vont provenir du gouvernement fédéral, dans la mesure où elles vont nous parvenir. Je rappelle toujours que le gouvernement fédéral a exclu Hydro-Québec du remboursement, des compensations. Et cela nous coûtera quelques ou près de 400 000 000 $. Je n'ai pas entendu de l'autre côté l'opposition se plaindre de leurs amis d'Ottawa là-dedans. Je trouve qu'ils ont raté une bonne occasion de démontrer qu'ils défendaient les Québécois et non pas le fédéralisme uniquement, qu'ils devaient défendre les Québécois.

Ceci étant dit, M. le Président, l'opposition a voté pour le principe du projet de loi, a voté pour tous les articles du projet de loi, que nous avons adoptés en commission sans aucun amendement, et je comprends que, aujourd'hui, vraisemblablement, elle va voter avec nous. Donc, elle approuve nos techniques de comptabilisation des dépenses comme de comptabilisation des revenus. Le seul point qui nous différencie, c'est que, nous, nous maintenons qu'Hydro-Québec a droit à quelque 390 000 000 $ qu'elle ne recevra pas du fédéral, et je cherche encore l'appui de l'opposition dans ce dossier. J'espère que le député de l'opposition qui me fait face a une dernière occasion pour dire qu'il nous appuie et qu'il interviendra au fédéral vis-à-vis de ce dossier, ou publiquement à tout le moins.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président. C'est la dernière fois que nous intervenons sur le projet de loi n° 415, Loi instituant le Fonds relatif à la tempête de verglas survenue du 5 au 9 janvier 1998. Le but du projet de loi, c'est de créer un fonds spécial pour bien gérer les revenus et les dépenses qui sont associés à cette crise.

Toujours, M. le Président, rappeler que nos premières pensées vont d'abord aux sinistrés, qui ont eu beaucoup de courage, beaucoup de patience et de détermination, qui ont traversé cette crise avec une détermination peu équivoque. Nous les remercions et nous les félicitons.

Également, les nombreux bénévoles qui ont été associés de près ou de loin à cette crise du verglas, qui oeuvraient dans les centres d'accueil, dans les centres d'hébergement. Je pense également aux différents maires qui étaient souvent sur la ligne de feu, sur la première ligne, les maires des municipalités, les conseillers municipaux.

(10 h 10)

M. le Président, je prends toujours l'occasion pour remercier particulièrement les maires de mon comté, le comté de Robert-Baldwin. Alors, je pense au maire Marcel Morin, de la ville de Pierrefonds, le maire Janiszewski, de la ville de Dollard-des-Ormeaux, et le maire Baciu, de la ville de Roxboro. C'est des gens qui ont travaillé avec leurs conseillers à tous les instants, plusieurs heures par jour, 20 heures sur 24 dans certains cas, d'autre fois 24 heures sur 24, et je veux souligner leur contribution.

Également, les travailleurs des municipalités, qui, eux aussi, ont été mis à contribution directement, les travailleurs d'Hydro-Québec, les monteurs de lignes et tous ceux qui étaient associés à ce redémarrage du réseau électrique, eh bien, ils méritent nos félicitations. Également, l'armée, qui est venue ici, au Québec, eh bien, c'était rassurant de voir ces nombreux jeunes aider la population.

Je voudrais également remercier tous les Canadiens qui ont contribué et sympathisé avec les difficultés que nous avions et remercier par leur biais le gouvernement du Canada pour nous avoir aussi aidés à traverser ces moments difficiles.

M. le Président, notre formation a dit oui au projet de loi parce que ce projet de loi met d'abord et avant tout l'aide aux sinistrés sur la première ligne. Et c'est ça qu'on est prêt à supporter, parce qu'on s'occupe des sinistrés. C'est un des rares projets de loi où on pense d'abord et avant tout à la population.

M. le Président, tantôt, le président du Conseil du trésor faisait allusion à une réclamation d'Hydro-Québec, réclamation qui n'aurait pas reçu d'écho à ce moment-ci du gouvernement fédéral. J'ai proposé tout au long du processus de la législation qu'on puisse de part et d'autre déléguer un haut fonctionnaire, un haut fonctionnaire du gouvernement du Québec – ça peut être un sous-ministre – et un haut fonctionnaire du gouvernement canadien.

Moi, je demeure convaincu qu'on est capable, en se parlant, en évitant les chicanes, de régler ces différends-là. Je pense qu'on l'a fait dans le passé. On l'a fait pour l'entente de la main-d'oeuvre. Un peu plus loin, on l'avait fait pour l'entente sur l'immigration, les commissions scolaires linguistiques, et ce n'était pas peu dire, c'était un amendement constitutionnel.

Alors, M. le Président, de nouveau je demande au ministre de négocier avec ses partenaires fédéraux en identifiant une personne de chaque côté qui aurait les mandats nécessaires pour s'assurer que les Québécois comme les autres Canadiens sont toujours bien traités dans ce pays.

M. le Président, même si nous donnons notre accord sur le projet de loi, je voudrais manifester trois inquiétudes extrêmement présentes encore aujourd'hui. D'abord, la première. Vous souvenez de la crise que nous avions connue au Saguenay, c'étaient les pluies diluviennes. Eh bien, il y avait eu une enquête à ce moment-là, le premier rapport de la commission Nicolet, et ce rapport blâmait de façon vraiment claire la Sécurité civile et demandait au gouvernement de prendre des mesures draconiennes, drastiques pour améliorer le fonctionnement de la Sécurité civile. Eh bien, le gouvernement n'avait pas agi suffisamment rapidement et on a dû se présenter devant une deuxième crise alors qu'on n'était pas prêt encore du côté de la Sécurité civile. Il y avait beaucoup de recommandations de M. Nicolet et elles n'ont pas été suivies, M. le Président.

La deuxième inquiétude, c'est la commission qui vient d'être créée, la commission n° 2, si vous me permettez, celle de M. Roger Nicolet toujours, qui, lui-même, avait reçu le mandat... Et là je vais citer au texte, c'est le journal Le Devoir d'avril dernier: «La commission Nicolet sur le verglas de janvier basera ses travaux sur la prémisse que l'effondrement de plus de 900 pylônes est d'abord et avant tout le fait d'un accident météorologique plutôt que la conséquence d'un mauvais entretien ou de la détérioration progressive d'une partie du réseau de transport d'Hydro-Québec.»

Eh bien, c'est une inquiétude. Nous avons l'impression que la commission Nicolet, M. Roger Nicolet, a déjà décidé qu'il n'y avait personne à blâmer dans toute cette gestion-là, alors qu'on sait, pour avoir parlé avec les maires, pour avoir parlé avec des conseillers, pour avoir été sur le terrain... Nous-mêmes, dans l'Ouest-de-l'Île, nous avons tenu des audiences publiques, et il apparaît clair que la Sécurité civile n'était pas prête à affronter une telle crise et que tout le système de communication n'a vraiment pas fonctionné. M. le Président, c'est notre deuxième inquiétude.

Notre troisième inquiétude, c'est la vitesse avec laquelle Hydro-Québec et le gouvernement se sont entendus pour passer des décrets en toute vapeur, évitant des études d'impact au niveau de l'environnement particulièrement. Et là-dessus je rappelle un passage d'un éditorial de M. Alain Dubuc, qui disait, en janvier dernier: «Grâce à un décret adopté mercredi dernier par le cabinet Bouchard, Hydro-Québec peut passer outre aux recommandations du BAPE et construire une ligne aérienne. La raison: il faut se dépêcher d'installer de nouvelles connexions avant l'hiver prochain au cas où le verglas nous recouvre à nouveau. La formulation nébuleuse du décret, que Québec s'est bien gardé de publiciser, permet de craindre qu'Hydro-Québec pourra se permettre d'autres dérogations, toujours au nom de la crise. La tempête du verglas, aussi grave ait-elle été, ne justifie pas ces entorses qui ne reposent sur aucune forme logique. Pour éviter de nouvelles erreurs, il faudrait, au contraire, éviter d'agir à la sauvette et à la vapeur.» Alors, c'est notre troisième inquiétude, M. le Président.

Une dernière fois, toute notre reconnaissance aux sinistrés de cette crise du verglas. Et c'est la raison, en pensant à ces sinistrés, pour laquelle notre formation politique, nous allons voter pour l'adoption du projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais à mon tour intervenir sur le projet de loi n° 415, loi instituant le Fonds de verglas. J'ai eu l'occasion d'intervenir à différentes étapes de l'étude de ce projet de loi, et vous comprendrez tout l'intérêt et toute l'importance que j'accorde à ce projet de loi, ayant moi-même été sinistrée dans une région qui a été la plus sinistrée. Et on commence à peine à mesurer l'impact économique de cette tempête de verglas et surtout de la panne d'électricité qu'elle a engendrée pour la population des régions sinistrées, notamment la Montérégie, et aussi pour les entreprises et particulièrement pour les producteurs agricoles dans les différentes productions.

Mes mots de fin de débat sur ce projet de loi, M. le Président, sont pour souligner d'abord la solidarité exemplaire qui s'est manifestée dans la population de façon très spontanée pour venir en aide aux populations sinistrées, aux agriculteurs, aux petites et moyennes entreprises qui ont aussi été affectées dramatiquement par cette tempête de verglas.

Ceci étant dit, M. le Président, cette solidarité qui s'est manifestée dans les groupes communautaires, la Croix-Rouge, l'armée canadienne et également la GRC, et tout ça, a été un exemple à citer. Mais on ne peut pas dire qu'on ait été très fier du travail qui a été fait par le gouvernement du Québec sur le terrain, notamment via la Sécurité civile, qui a le mandat premier d'organiser les services d'urgence dans de telles situations. Au moment où on se parle, la deuxième commission Nicolet, celle qui porte sur l'étude des conséquences du verglas, est en cours actuellement. Et il y a plusieurs groupes qui sont venus devant cette commission pour souligner les défaillances chroniques de la Sécurité civile en matière d'organisation des services d'urgence dans les zones sinistrées.

(10 h 20)

Donc, M. le Président, tout en soulignant le travail remarquable qui a été fait par les municipalités, par les groupes communautaires, par les groupes d'entraide, par la Croix-Rouge et par tous les groupes qui se sont mobilisés dans cette crise exceptionnelle, je tiens cependant à souligner l'absence chronique du leadership qui n'a pas été manifesté par la Sécurité civile. Et j'ose espérer qu'après ce débat et qu'après toutes ces critiques bien fondées par ailleurs la Sécurité civile va se ressaisir, va se doter des moyens et de ressources pour qu'à l'avenir elle soit en mesure de se déployer, si jamais le Québec était confronté à une crise comme celle que nous avons vécue.

Donc, M. le Président, ce projet de loi n° 415 dont nous terminons l'étude aujourd'hui, nous y avons accordé notre accord de principe parce que nous avons à coeur les intérêts des personnes qui sont touchées par ce verglas et par ses conséquences. Mais, au-delà de l'accord de principe, je tiens à souligner qu'il y a beaucoup de questionnement quant à la gestion de ce fonds-là, et on le voit. Chaque jour, chaque semaine, on voit apparaître des manchettes de gens et de groupes qui manifestent aussi ces inquiétudes quant aux programmes qui ont été mis sur pied et surtout quant à la gestion de ces programmes.

M. le Président, je ne veux pas revenir sur tous les dégâts qui ont été causés par la tempête de verglas dans les différents secteurs de l'économie. Si je prends par exemple le secteur agricole, on le sait que la production acéricole a été douloureusement affectée. On sait également que la production porcine, laitière, avicole, la production en serre ont également été affectées.

Et à ce jour, M. le Président, lorsqu'on écoute le milieu, ce qu'on apprend, c'est que les compensations pour les entreprises agricoles qui ont été douloureusement touchées par cette catastrophe tardent à venir. Et pourquoi? Pour toutes sortes de raisons. D'abord parce que le ministre responsable de ce dossier ne parvient pas à établir une relation constructive avec le fédéral pour pouvoir établir les règles qui vont s'appliquer au niveau des compensations et dégager le plus rapidement possible les fonds qui vont se rendre aux personnes et aux groupes sinistrés.

Je regarde ici, M. le Président, le mémoire qui a été présenté par l'Union des producteurs agricoles intitulé La crise du verglas, une opération de solidarité en agriculture et qui a été présenté à la commission Nicolet. Et je lis à la page 14: «Un second facteur qui, à notre point de vue, contribue très certainement à rendre le programme "régulier" – on parle ici des programmes de compensation – peu attrayant et accessible aux producteurs réside en la complexité des formulaires et des informations à fournir.» Et nous y voilà, M. le Président, les programmes existent, mais la complexité de la bureaucratie fait en sorte que les agriculteurs ont une barrière de plus à traverser pour y accéder.

Et je cite le mémoire de l'Union des producteurs agricoles: «De faire une demande d'assistance financière dans le cadre de ce programme représente un exercice très long et fastidieux.» M. le Président, ce n'est pas l'opposition qui parle, c'est l'Union des producteurs agricoles qui dit que présenter une demande d'assistance financière dans le cadre du programme régulier qui est mis sur pied par le gouvernement représente un exercice très long et fastidieux. Alors, j'en appelle au gouvernement, M. le Président, aujourd'hui, pour simplifier au maximum les formulaires pour que la bureaucratie ne soit pas une barrière de plus pour accéder aux programmes de compensation.

Et j'ajoute, M. le Président – et c'est un chiffre qui nous est fourni par l'Union des producteurs agricoles – que, au moment d'écrire ces lignes, seulement 1 000 demandes avaient été reçues au ministère de l'Agriculture sur les 7 688 avis de dommages déclarés. Alors, le ministre de l'Agriculture est parmi nous, et j'espère, M. le Président, qu'il va saisir l'opportunité que nous avons pour rassurer les agriculteurs qui attendent, justement, d'avoir accès à ces programmes.

Et, lorsque je regarde, M. le Président, l'édition du 30 avril au 6 mai 1998 de La Terre de chez nous , qui est aussi le journal de l'Union des producteurs agricoles, il y a un article qui dit que le MAPAQ n'a reçu que 700 demandes d'aide pour le verglas. Et je cite l'article, à la page 3 du journal La Terre de chez nous : «Le MAPAQ n'a reçu que 700 formulaires de demande d'assistance financière sur les 7 688 exploitations agricoles qui ont déclaré des dommages au lendemain du verglas du mois de janvier.» Et, au nombre des raisons qu'on donne, M. le Président, ils disent que les agriculteurs se retrouvent finalement face à des difficultés, notamment en ce qui concerne «les différents programmes de main-d'oeuvre, d'avances et de remise en état annoncés jusqu'ici par le provincial et le fédéral. Et c'est sans parler qu'il n'y a pas de guichet unique pour le traitement des demandes des producteurs parce que Québec et Ottawa ne s'entendent pas toujours sur la part respective dans l'aide aux producteurs à temps partiel.»

C'est extrêmement important, M. le Président, et là-dessus le gouvernement peut compter sur notre collaboration s'il veut adopter une attitude de concertation, une attitude positive avec le gouvernement fédéral pour négocier de bonne foi, comme cela a été le cas dans le cadre du déluge du Saguenay. Et on se rappellera que, dans le cas du déluge du Saguenay, le fédéral et le gouvernement du Québec ont contribué à 50 % en ce qui concerne les indemnisations aux agriculteurs à temps partiel. Alors, dans ce cas-ci, M. le Président, le fédéral contribue à 50 %; le provincial à 10 %. Il reste les autres 40 % à trouver pour aider les agriculteurs qui ont eu à faire face à une catastrophe extrêmement importante et qui a endommagé leurs productions et leurs revenus. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Alors, le prochain intervenant, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le ministre.


M. Guy Julien

M. Julien: Merci, M. le Président. Je viens d'écouter la députée de La Pinière faire ses petits commentaires concernant le verglas. D'abord, j'aimerais lui rappeler que je me suis promené pendant 15 jours sur le terrain et que je ne l'ai pas vue. Elle n'était nulle part. Elle était peut-être en Floride. Elle était en voyage. Je ne sais pas à quoi elle s'occupait. Elle devait regarder dans sa boule de cristal.

Mme Houda-Pepin: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le règlement prévoit qu'à la fin de l'intervention quelqu'un peut se lever pour apporter des rectifications mais pas pendant l'intervention. Alors, vous pourrez voir l'article, là. Alors, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: Alors, M. le Président, je pense qu'il faut qu'elle assume ses responsabilités. Elle n'était pas là. Ça, c'est acquis. Puis, d'ailleurs, je n'ai pas vu grand monde du côté libéral, même pas le critique de l'opposition. Je ne l'ai pas vu souvent. Non, on ne les a pas vus du tout. Alors, qu'est-ce qu'on a fait? Moi, j'ai fait ma tournée pendant 15 jours. Je les ai rencontrés, les producteurs et les productrices. Première mesure qu'on a faite au début de la tournée: 3 000 $ d'avances qu'on a donnés à nos producteurs et productrices pour pouvoir passer au départ une partie de cette crise-là. Ça, c'est la première affaire.

La deuxième chose, on a mis sur pied un centre à Saint-Hyacinthe pour faire les analyses de toutes les plaintes, de tous les problèmes de dommages avec des conseillers spécialisés de notre ministère pour leur donner un coup de main.

Troisièmement, tout ce qui s'appelle innocuité, alimentation, on s'est occupé de ça dans tous les centres qui ont été touchés par le verglas. On a eu je ne sais plus combien de milliers de téléphones à nos bureaux pour avoir des commentaires sur comment gérer la nourriture en cas de crise.

Le ministère a été très impliqué et a travaillé en étroite collaboration avec l'Union des producteurs agricoles. Ça, c'est pour la première partie.

Deuxièmement, nous avons préparé un plan pour permettre aux producteurs et productrices de traverser cette crise-là. J'avais le choix entre deux choses: ou j'imposais un programme sans consultation, ou je négociais avec les fédérations concernées le plan qu'on négocierait avec le fédéral. Et c'est la solution que j'ai préférée. Donc, pendant les semaines qui ont suivi, nous avons négocié avec les fédérations, nous sommes entendus sur le programme le plus adéquat pour répondre aux problématiques des producteurs, et maintenant nous sommes en négociations avec le gouvernement fédéral.

(10 h 30)

Qu'est-ce que fait le Canada là-dedans? La députée de La Pinière a mentionné que, dans le cas du Lac-Saint-Jean, ça a très bien été. C'est évident. Un, ils se sont mêlés de leurs affaires, ils n'ont pas dédoublé les guichets. On l'a demandé, ça, qu'il y ait un guichet unique, que nos clientèles ne soient pas pénalisées par des intrusions du Canada au Québec dans ce cadre-là. Ils ne nous ont pas écoutés puis ils l'ont fait pareil. Aujourd'hui, puis on l'a vu dans des programmes annoncés par le ministre des Finances, de l'Industrie et du Commerce, deux guichets.

On avait toute l'infrastructure, nos bureaux régionaux, nos relations avec l'UPA, le monde agricole, ils ont fait fi de ça, ils ont fait de la petite politique sur le dos d'un problème qu'on a vécu, qui était majeur au Québec, qu'était le verglas. Mais ça, c'est la nature même du Canada, c'est de faire de la petite politique sur des éléments comme ceux-là.

M. Vanclief, le 17 février, a dit: Nous allons traiter, sur le même pied, les producteurs et productrices à temps partiel de la même façon que les producteurs à temps plein. Qu'il respecte son engagement. Il est venu faire de la petite politique, en février, pour faire des promesses aux producteurs et productrices qu'il n'est pas capable de tenir. Ça, c'est le Canada. Ça, c'est la maison mère de l'autre bord.

C'est pour ça qu'eux autres ils disent: Il faudrait travailler en collaboration. Moi, je n'ai pas de problème avec ça en autant qu'ils respectent nos champs de compétence et nos façons de faire. Qu'il y ait des ententes. Ça, c'est nos taxes.

Une voix: Bravo!

M. Julien: Je n'accepterai pas de nous faire dire qu'on ne veut pas le faire. On veut le faire, on veut le faire sur un guichet unique et c'est notre demande. J'espère que la députée de La Pinière écoute quand je parle. C'est notre demande à laquelle le Canada n'est pas capable de donner suite, pour faire de la petite politique. Ça, je trouve ça très malheureux pour les producteurs et les productrices. Ça, j'en ai ras le bol, de ça.

Alors, que le Canada respecte ses ententes, que Vanclief respecte son entente du 7 février qu'il a publiée dans un communiqué de presse. Puis, si elle en veut une copie, je lui en donnerai une. Qu'elle lise ses dossiers, puis elle va s'apercevoir que le Canada a pris des ententes qu'il ne veut pas respecter, tout ça pour faire encore de la très petite politique.

M. le Président, nous allons finaliser nos ententes avec le Secrétariat, aussi le ministère des Affaires intergouvernementales, et nous aurons un programme adéquat pour répondre aux différentes problématiques. Et tout ça a été fait en concertation avec l'UPA et les fédérations spécialisées.

Et je vais terminer en disant ceci, je lui en donnerai une, copie de la lettre. J'ai reçu une lettre du président de l'UPA, la semaine dernière, nous remerciant, nous félicitant pour notre excellente collaboration dans le dossier du verglas. Ça, c'est clair, c'est là, c'est écrit. Si elle veut une copie, je lui donnerai.

Ça fait que, si elle veut faire de la petite politique, qu'elle aille en faire chez elle. Puis, quand il arrivera des événements comme le verglas, qu'elle soit présente, qu'elle aille voir le monde, qu'elle se promène sur le terrain de 6 heures à 17 heures, puis 22 heures. Qu'elle fasse sa job. Mais, en attendant, qu'elle ne profite pas de ces occasions-là pour montrer qu'on n'a rien fait. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Maintenant, Mme la députée de La Pinière, je voudrais simplement vous rappeler que l'article 212 – parce que je ne veux pas que ce soit la poursuite d'un débat – prévoit uniquement après une intervention, s'il y a des propos qui ne correspondent pas à votre dire, que vous pouvez les rectifier mais sans engager d'éléments nouveaux en vue d'un débat. Alors, sur ce point-là, je vous donne la parole. Tenez-vous-en à quelques brèves explications pour rectifier peut-être les propos qui auraient été mal interprétés.

Mme Houda-Pepin: Très bien, M. le Président. Les propos du ministre de l'Agriculture ne sont pas seulement mal interprétés, mais sont entièrement faux. M. le Président, la députée de La Pinière a été une députée sinistrée. Elle a eu le courage de rester dans son comté, de sillonner sa région, de travailler avec les partenaires, de faire des interventions quasiment à tous les jours à la radio, puisque c'était le moyen de communication le plus approprié. Et ça se voit que le ministre était déconnecté parce que, après 20 interventions à la radio, M. le Président, tout le monde en Montérégie m'a écrit, m'a téléphoné après le verglas pour me remercier sur les interventions que j'ai faites. Ça prouve, M. le Président, que c'est un ministre qui est complètement déconnecté de la réalité. Alors, M. le Président, ça lui bouche un trou.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, c'est terminé. Quand on reprend l'article ici, du règlement, c'est pour rectifier de vos propos qui auraient été mal interprétés. Maintenant, si vous commencez à relancer le ministre et de l'attaquer, lui, il aura le même droit que vous, à se lever pour rectifier les paroles que vous avancez sur lui. Alors, on n'en finira plus. Ce n'est pas le sens de l'article. C'est uniquement rectifier des propos qui auraient été mal interprétés. Je crois que vous l'avez fait actuellement. Ce n'est pas une apologie indéfinie, là.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très, très brièvement, mais il faut que vous en teniez uniquement à rectifier un propos qui aurait été mal interprété. Et vous l'avez assez fait là. Soyez brève.

Mme Houda-Pepin: Je complète, M. le Président, mon intervention très rapidement. Donc, je rectifie non seulement...

Une voix: Non, non, M. le Président, quand même, pas de discours.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Rapidement, M. le Président. Vous allez comprendre que ce n'est pas à moi que ça doit s'adresser mais plutôt à madame. M. le Président, vous l'avez clairement dit, l'article 68 se limite à de brèves explications qui ne font l'objet d'aucun débat. Et de surcroît, M. le Président l'article 71 dit bien: «Tout député peut, avec la permission du président – c'est-à-dire vous-même – s'expliquer sur un fait qui, sans constituer une violation de droit ou de privilège, le concerne en tant que membre de l'Assemblée.» Et l'article, M. le Président, vous le connaissez très bien: «Il peut, notamment, relever l'inexactitude du compte rendu d'un de ses discours.» Donc, elle pourrait profiter de l'article 71 et avouer que ce qu'elle a dit n'était pas tout à fait exact, puis que finalement le principal sinistre dans La Pinière, ce fut son élection.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, là. J'ai expliqué le 212, j'ai permis à madame d'intervenir sur le 212, et l'intervention du leader n'a absolument rien apporté de nouveau à mon intervention. Alors, brièvement et terminez sur ça.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Donc, je disais que, premièrement, le ministre a dit une fausseté parce qu'il a dit que j'étais en Floride alors que c'est complètement faux, M. le Président. Je vous prends à témoin, j'étais présente dans mon comté, ce que, lui, il ne savait même pas. Deuxièmement, deuxième inexactitude, quand il dit que le Canada, c'est de la petite politique, je lui ai offert ma collaboration...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. S'il vous plaît! C'est terminé, là. Ce n'est pas un débat qu'on relance. Je vous ai laissé suffisamment de temps. Je crois que vous êtes intervenue sur les points qui vous concernaient. Alors, ceci va mettre fin, donc, à cette intervention. Et le prochain intervenant, M. le député de Vachon.


M. David Payne

M. Payne: Bon! Merci, M. le Président. C'est mon tour, finalement. On peut au moins dire que la députée de La Pinière n'a pas fait d'exemple de sérénité dans les dernières quelques minutes. Nous, au gouvernement, justement, pendant la période de crise qu'on a vue, pendant la période de verglas, ça exigeait une remarquable sérénité, une concertation, une action ponctuelle, vigoureuse dont on a fait preuve. Et, pour ma part, comme un des députés qui étaient représentants d'un des comtés les plus affligés, le comté de Vachon, la ville de Saint-Hubert, où on a vu des records au niveau du verglas, je dois féliciter le gouvernement pour un travail absolument remarquable.

Commençons par le premier ministre. Bien sûr, comme tout le monde devrait le faire, je pense, j'invoquerai comme témoin le chef de l'opposition du temps, M. Daniel Johnson, qui avait souligné le travail remarquable de M. le premier ministre Bouchard, lors de ces événements, comme coordonnateur de toutes les forces d'intervention pendant la tempête de verglas.

Revenons au projet de loi, le Fonds relatif à la tempête de verglas survenue du 5 au 9 janvier passé. On dit que c'était une tempête de verglas exceptionnelle, effectivement, frappant Drummondville, Granby et Salaberry-de-Valleyfield surtout, dans le triangle de glace, et d'autres villes, qui étaient très affectées. On dit exceptionnelle parce que, à titre d'exemple, on a enregistré à Montréal, au cours de cette période, au-delà de 100 mm de pluie verglaçante, alors que le record jusqu'à ce moment-là se situait à 30 mm à Ottawa, en 1986, et à 40 mm à Montréal, en 1961.

Il faut bien se le dire, lorsque j'écoute la députée de La Pinière, j'ai l'impression qu'elle accuse le gouvernement de ne pas avoir prévu la crise de verglas. On pourrait le faire, si on veut paniquer, et, si on veut être un peu farfelu, suggérer que le gouvernement n'était pas prévoyant. Mais un des éléments d'une catastrophe, c'est précisément son imprévisibilité.

(10 h 40)

Mais aussitôt, le 5 janvier, et je me souviens, ce jour-là, avant même le début de la tempête, la Sécurité civile du gouvernement du Québec transmettait par télécopieur une alerte météorologique à toutes les municipalités des régions visées par ce message. C'est à ce moment-là que bien des municipalités, la mienne comprise, ont commencé immédiatement à mettre en place les mesures d'urgence. Il faut rappeler que, dans le domaine d'hébergement des personnes – nous, on en avait trois, réduits à deux après quelques jours – le nombre de centres d'hébergement, il y avait un total de 454 centres qui étaient ouverts dans l'espace de quelques jours. Et, au plus fort du sinistre, il y avait 7 800 personnes qui étaient hébergées et à peu près 60 000 repas par jour étaient servis. C'est assez remarquable ce qui a été fait en si peu de temps. Et tout cela s'est fait en collaboration avec le Centre de coordination et le centre de coordination régional, faisant en sorte que nos municipalités, surtout les plus organisées, qui avaient un plan d'urgence déjà rôdé comme le nôtre, ont été capables de prévoir les besoins jusqu'à une certaine mesure. Nous avons offert l'hébergement à plus de 86 000 personnes; on a distribué 3 500 t de nourriture, avec l'apport majeur de la Croix-Rouge; et en 48 heures nous avons ouvert à Saint-Hubert, dans mon comté, un des centres les plus impressionnants qu'on n'a jamais vus dans l'histoire du Canada, à la base militaire de Saint-Hubert. Nous avons distribué 3 500 t de nourriture à partir de plusieurs points comme cela, et c'était remarquable. Nous avions de la nourriture qui venait de partout en Amérique du Nord, des hélicoptères qui arrivaient, des grands avions, avec une façon de distribuer qui était absolument remarquable. Et je parlais moi-même, je faisais du porte-à-porte avec les militaires qui étaient fortement impressionnés par la capacité du premier ministre à diriger cette crise-là.

On a répondu très rapidement à près de 1 200 demandes de génératrices, et à peu près 50 000 cordes de bois ont été livrées aux municipalités sinistrées. Elles venaient de partout: elles venaient de la région de mon collègue de Gaspé; elles venaient de Rimouski; du nord, l'Abitibi. Elles venaient de partout, les offres de bois, pour faire en sorte que nos municipalités puissent bouger vite. On n'avait pas le temps, M. le Président, contrairement aux insinuations de la députée de La Pinière, de niaiser, comme on dit en bon québécois. On s'est mis au travail conjointement, sans égard à une affiliation politique ou partisane, on s'est mis à l'oeuvre pour faire en sorte que ce sinistre-là puisse être rencontré de la façon la plus responsable pour apporter de l'aide immédiate. C'était une question de vie ou de mort. On voit aussi que les directives, par exemple, du premier ministre ont fait en sorte que personne dans les maisons ne devait être mis dehors de force. Malgré la possibilité par la loi de les évincer, on a réussi à faire en sorte que pas une seule personne, dans un seul foyer, n'a été évincée de force de son foyer. Coordination absolument remarquable des forces militaires, des forces de police, de la Sûreté du Québec, de la GRC, des personnes de la Croix-Rouge, des bénévoles.

Chez nous, dans notre propre comté, il y avait 150 organismes qui étaient impliqués dans la crise et la gestion de la crise. Il fallait coordonner ces groupes-là avec l'équipe d'urgence de la ville de Saint-Hubert; ce qu'on a fait. Et je dois féliciter le travail du maire Latendresse, de cette façon de travailler en coordination avec les responsables du gouvernement du Québec. Notre première préoccupation, c'était la sécurité, et la sécurité, ça ne se négocie pas. Ce dont on a besoin ici, avec tous les coûts que nous avons eus pendant cette crise-là... Nous avons eu un coût de presque 1 500 000 000 $, et il faut gérer ça, faire en sorte qu'on puisse coordonner toutes les activités qui sont entreprises depuis pour faire en sorte que ce fonds-là puisse arriver aux personnes à qui il est destiné. La façon dont nous avons travaillé fait en sorte que nous pouvons effectivement apporter de l'aide, que ce soit dans l'agriculture... Je voulais dire quelques mots là-dessus. Mon collègue le ministre de l'Agriculture vient d'indiquer nos interventions ponctuelles. N'oubliez pas que c'était la deuxième fois en deux ans que nous avions une crise de ce genre-là. On a été confronté à un cas de catastrophe naturelle majeure jamais vu dans l'histoire de l'Amérique du Nord. Toutefois, les inondations comme celles vécues lors du déluge du Saguenay, ça a été quelque chose où le gouvernement a été tout à fait capable de montrer la responsabilité et le leadership pour apporter l'aide nécessaire. D'où vient l'importance d'un fonds spécial, tout le monde est d'accord là-dessus.

Et restons solidaires et sereins face à cet incroyable moment dans notre histoire et mettons de côté... M. le Président, n'écoutez pas trop les interruptions ou les suggestions de la députée de La Pinière, qui, peut-être, si elle était membre d'un autre gouvernement, n'aurait pu montrer la même sérénité. Et tout le monde a félicité pas nécessairement le gouvernement, mais tous les intervenants. Je suis bien content de cela. Et nous avons fait en sorte que maintenant nous avons toutes sortes de groupes, chez nous, dans notre comté comme ailleurs, pour faire en sorte qu'on puisse être encore mieux la prochaine fois. C'est bien évident, il y aura des enquêtes pour faire un peu mieux ce qu'on a déjà fait. Soyons fiers de ça, comme Québécois et Québécoises.

Pour ma part, en terminant, je voudrais féliciter le travail de tous ceux qui ont apporté de l'aide aux sinistrés, les organismes communautaires de mon comté comme d'ailleurs, les membres de la municipalité, les conseillers, les conseillères, les maires un peu partout, qui ont fait en sorte que ce qui est le plus grand chez les Québécois, c'était bien évident, dans ces jours-là, c'est la solidarité. Félicitations, M. le Président, à tous les Québécois et Québécoises qui ont participé à cet extraordinaire effort. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Vachon. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. J'interviendrai brièvement, tout simplement pour remettre les choses dans leur contexte. M. le Président, comme vous le savez, le comté de Shefford, particulièrement la région de Granby, a fait partie du fameux triangle de glace. Et, lorsqu'on entend des choses comme celles qu'on a entendues ce matin, particulièrement du ministre de l'Agriculture lorsqu'il dit que les députés, certains députés n'étaient pas présents dans leur comté lors de la crise de verglas, je pense qu'il faut dénoncer ce genre de petit discours là, puis il faut le dénoncer immédiatement.

Je prends la députée de La Pinière comme exemple. On semble vouloir l'attaquer. La députée de La Pinière a été, à tous les instants, présente non seulement dans son comté, mais dans toute la région. Le député de Vaudreuil, l'ancien chef de l'opposition, a fait le tour. M. le Président, du 7 janvier et toutes les semaines qui ont suivi, chacun des députés libéraux ont été sept jours par semaine puis parfois 15 heures par jour sur le terrain. Donc, on ne doit pas accepter ce genre d'affirmation là gratuite, c'est intolérable, ici, dans cette Chambre.

M. le Président, si on parle de présence, il faut parler de présence physique et d'aide à ces citoyens-là. Ce n'est pas un tour d'hélicoptère au-dessus de mon comté qui a fait changer les choses, ce n'est pas une conférence de presse aussi de la part du premier ministre... Je n'ai rien contre les conférences de presse, pour la télé, pour les gens qui n'ont pas subi la crise du verglas. Mais, quand on l'a reçu dans notre comté, on l'a reçu bien amicalement, sauf qu'il est venu faire une conférence de presse pour parler aux gens de l'extérieur qui n'avaient pas subi la crise du verglas. C'est autre chose que ça, M. le Président, c'est autre chose que gérer de la perception pour les gens qui ne subissent pas les effets du verglas.

M. le Président, on se doit de féliciter nos citoyens, les gens qui se sont pris en main dans chacun des comtés. Chez nous, on n'a pas compté sur le gouvernement. Même si on veut s'approprier... Parce que le gouvernement s'approprie le travail de mes concitoyens, des concitoyens de ma collègue du comté de La Pinière. Si on avait attendu après le gouvernement pour s'en sortir, on ne s'en serait pas sorti encore. Même, on avait l'impression... On demandait du bois, chez nous, on passait ailleurs que par le ministère pour en avoir, sinon on se faisait court-circuiter, à un moment donné.

Donc, lorsqu'on félicite les gens, il faut féliciter les gens sur le terrain, les gens qui ont su s'organiser. Chez nous, la ville de Granby a fait un travail extraordinaire. M. le Président, nous avons manqué d'électricité à 22 heures le soir. À 23 heures, le comité d'urgence était sur pied, et ces gens-là, le lendemain, avaient déjà établi quatre centres d'hébergement. Ce n'est pas le gouvernement qui a établi ces centres d'hébergement là. J'entendais le député de Vachon s'approprier tout le travail de ces bénévoles-là. M. le Président, c'est honteux. On se doit de les féliciter, mais pas de s'approprier le travail de ces gens-là. On se doit de dénoncer ça.

(10 h 50)

Dans mon comté, j'ai beaucoup d'agriculteurs, des acériculteurs, des gens qui ont eu des dommages importants. On a des appels tous les jours, M. le Président, tous les jours, de gens qui sont insatisfaits, qui attendent encore des chèques, qui ont été sinistrés et qui ont perdu le travail d'une vie. Et, encore ici, ce qu'on fait, on se pète les bretelles, disant qu'on a été extraordinaires. Mais, dans les faits, hors des discours, M. le Président, il n'y a pas grand-chose qui s'est fait.

La députée de La Pinière, il y a quelques instants, citait tout simplement le rapport de l'UPA qui a été déposé à la commission Nicolet. M. le Président, c'est des choses qui se passent sur le terrain: les agriculteurs, les autres personnes n'ont pas eu les compensations qu'ils se devaient d'avoir. On a parlé aussi des petites entreprises. Des petits commerçants chez moi, M. le Président, qui créent des milliers d'emplois, des gens qui ont un, deux, trois employés, ils n'ont eu, pour ainsi dire, aucun dédommagement. Donc, lorsqu'on parle de création d'emplois aussi puis qu'on se pète les bretelles dans d'autres discours disant qu'on va créer des emplois... On avait 45 000 emplois en danger, il y a des gens qui ont perdu leur emploi, il y a des entreprises en difficulté, il y a des petits commerçants en difficulté, puis on n'a encore rien fait.

M. le Président, ce gouvernement a des choix. Du côté économique, ils ont mis 400 000 000 $ dans le plan Paillé; on en a presque 200 000 000 $ de perdus. Pourquoi on n'aurait pas aidé ces gens-là qui ont des vrais emplois présentement, des gens qui cherchent à s'en sortir? Là, le gouvernement avait le choix de mettre des sous là-dedans. Il a eu le choix aussi d'aider les agriculteurs. On a fait des grandes promesses: Oui, on va vous donner un coup de main. En pratique, il n'y a pas un chèque qui est rentré encore.

Et lorsqu'on s'attribue le travail des gens chez nous, des gens dans la grande Montérégie, tous ceux qui ont subi cette crise de verglas, je pense que, M. le Président, là, on exagère un peu. Là, il faut différencier entre les discours et les actes. Outre les voyages en hélicoptère au-dessus des comtés sinistrés, outre les conférences de presse qui disent que tout est sous contrôle... pour les gens qui ne subissent pas la crise du verglas, M. le Président, sur le terrain, on s'est arrangés nous autres même sans compter sur le gouvernement.

M. le Président, présentement, les gens qui sont là, les sinistrés, les agriculteurs, les gens qui avaient des commerces ont besoin d'aide et ont besoin d'autre chose que des discours et de s'approprier le travail des gens qui ont fait un travail extraordinaire lors de la crise du verglas. Donc, au-delà des discours, je demande au gouvernement tout simplement d'agir et d'aider ces gens-là qui ont été sinistrés et qui attendent l'aide du gouvernement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le député de Shefford. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre pour son droit de réplique. M. le ministre.


M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: Merci, M. le Président. Je viens d'entendre les gens de l'opposition critiquer, et critiquer de toutes sortes de façons, et dire que les autres discours étaient de la petite politique et des petits discours. Celui que je viens d'entendre n'est pas très relevé non plus. Mais je voudrais souligner un fait. L'opposition a manifesté son intention de voter pour le projet de loi, de voter pour la création du fonds du verglas dans lequel nous allons comptabiliser et les revenus et les dépenses, et donc ils sont d'accord avec le gouvernement. Ils en profitent pour essayer de tirer la couverture de leur côté. Je comprends le rôle de l'opposition, c'est un rôle très ingrat, quand on est dans l'opposition et que les choses se sont passées relativement bien, et j'emploie le mot «relativement», puisqu'il s'agit d'une tempête de verglas qui a causé des torts énormes, immenses à la population. Il reste que, pour faire face à cette situation inédite, le gouvernement a déployé des moyens majeurs.

Cette tempête de verglas est arrivée évidemment subitement au mois de janvier, quelque temps après le 1er janvier, et, après des alertes météo – mon collègue de Vachon a fait la séquence des événements, nous avons eu l'occasion de la faire ici en discours de deuxième lecture et aussi en commission parlementaire, j'ai rétabli les faits là-dessus – la sécurité civile a joué son rôle, a averti les municipalités. Là-dessus, il n'y a aucun reproche à lui faire, bien qu'il se soit passé aussi des endroits où on n'était pas prêts à faire face à des circonstances comme celle-là. Cela nous remet devant l'obligation d'examiner ce qui s'est fait, ce qui devrait se faire, ce qui aurait dû être fait peut-être. Mais on constate que, de façon générale, il faut féliciter la sécurité civile de son rôle, des gestes qu'elle a posés, de sa façon de répondre aux événements, de la coordination qu'elle a entreprise, qu'elle a réalisée.

Et je rappelle une chose fondamentale, c'est que le système de sécurité civile repose avant tout sur les municipalités. Il y a une coordination, il y a une direction d'une quarantaine de personnes, au ministère de la Sécurité publique, qu'on appelle la sécurité civile, mais chaque municipalité doit avoir un plan d'urgence.

Cela a été demandé à différentes reprises par le passé, par l'intermédiaire aussi des MRC, mais il n'y en avait pas dans toutes les municipalités. Là où il y en avait, les choses se sont déroulées correctement, toujours entre guillemets, relativement bien, parce qu'on faisait face à des circonstances qu'on ne voudrait pas voir se renouveler, évidemment. Mais, effectivement, il faut constater qu'il y avait des municipalités qui étaient plus prêtes les unes que les autres et qui ont réagi immédiatement, correctement, avec les moyens qu'il fallait dans les circonstances.

La commission Nicolet fera le point sur cette question. Elle nous fera des recommandations; nous allons les appliquer. Nous l'avons mise en route non seulement pour examiner cet aspect de la sécurité civile, de la réaction de la population par rapport à des événements, des catastrophes comme celle-là, des gestes que doivent poser les municipalités, mais elle fera aussi le point sur les mesures que doit prendre Hydro-Québec pour sécuriser son réseau.

Mais je vous rappelle, M. le Président, que, en Amérique du Nord, la norme, c'est qu'un réseau hydroélectrique, un réseau de transport d'électricité doit répondre à 22 mm de verglas. Les lignes de transport doivent résister à 22 mm de verglas, que ce soit transport et distribution, les deux. Or, les lignes d'Hydro-Québec pouvaient résister à 45 mm de verglas. Mais la tempête a atteint 70 mm, a atteint même 100 mm, a dépassé 100 mm.

Donc, il peut y avoir de ces tempêtes de verglas extraordinaires. On se rend compte qu'il y en a eu, l'automne dernier, sur la ligne de Churchill Falls, qu'il y en a eu dans Lanaudière, il y a un an, un an et demi maintenant, ou presque, et que cela se produit plus fréquemment que par le passé ou que par ce qu'on prévoyait.

Donc, la norme de 22 mm n'est pas suffisante, et même la norme d'Hydro-Québec à 45 mm – qui était le double de la norme nord-américaine – probablement, devra être améliorée, renforcée. C'est ce que nous dira aussi la commission Nicolet.

On peut s'interroger puis tirer des conclusions par rapport à cette situation, mais le gouvernement, à l'époque... Hydro-Québec, à l'époque, avait mis en place toutes les dispositions pour résister à des tempêtes de verglas, le double de ce qu'on avait mis ailleurs. Alors, nous aviserons, au rapport de la commission Nicolet dorénavant.

Je voudrais simplement souligner aussi un autre élément. C'est un accident météorologique majeur comme il y en a eu au Saguenay, il y a un an et demi, presque deux ans, et je vois que le discours de l'opposition consiste à rendre le gouvernement responsable de cet accident météorologique, mine de rien, en glissant, avec une espèce de responsabilité par association. Je le vois très bien.

Est-ce qu'on peut dire que le gouvernement est responsable d'un accident météorologique «act of God», comme on dit? Même dans les polices d'assurance, on en tient compte. Alors, je vois que c'est la tendance qu'ils ont prise. Ils votent pour le projet de loi, mais ils laissent sous-entendre où ils voudraient bien que le gouvernement soit accusé d'irresponsabilité par rapport à un accident météorologique de cette ampleur.

Je ne pense pas qu'on puisse prévoir tout ce qu'il y aura dans le monde puis dans l'avenir. Des catastrophes, il s'en produit, malheureusement. Ce n'est pas parce qu'on les souhaite, mais elles arrivent et il faut s'y préparer. De là la nécessité d'avoir des plans d'urgence.

(11 heures)

Mais, sur cette question, M. le Président, je pense qu'il faudrait que l'opposition en rabatte. Les gens, simplement par le bon sens, comprennent que ce n'est pas le gouvernement qui est à l'origine de cet accident météorologique. Il y a réagi – et d'ailleurs j'y reviendrai – très bien. Il a réagi. Le critique de l'opposition reproche, encore une fois, d'avoir adopté des décrets à toute vapeur. C'est son expression, je ne la retiens pas. Nous avons adopté des décrets pour faire face à la situation.

J'ai rappelé tout à l'heure que, depuis un an et demi, il y a eu trois événements importants, majeurs, de type verglas, des tempêtes de verglas qui ont amené des problèmes importants, et nous ne pouvons pas attendre pour faire des correctifs aux lignes. Nous prenons les mesures correctement, je le pense, parce que nous avons aussi des comités de consultation qui sont à l'oeuvre chez Hydro-Québec à l'heure actuelle. Mais nous prenons des mesures pour être prêts pour la prochaine année dans un certain nombre de cas, dans deux ans, dans la mesure où nous ne pouvons pas cette année, parce qu'il y a des travaux importants à faire sur les lignes d'Hydro-Québec. Mais nous avons adopté ces décrets, effectivement, pour ne pas, justement, être accusés d'irresponsabilité si jamais un autre accident ou une autre tempête de verglas de cette nature frappait le territoire du Québec. Je pense que l'opposition doit reconnaître qu'on doit poser des gestes, qu'il faut le faire et que, si on prend deux ans à délibérer, l'an prochain, s'il y avait une catastrophe, elle serait la première à nous le reprocher. Et je les vois, je suis sûr qu'ils ne s'en priveraient pas, M. le Président, pas du tout. Alors, nous avons procédé, en bons gestionnaires qui prévoient, qui essaient de minimiser les risques le plus possible et qui posent les gestes à temps pour qu'on soit prêt, si jamais d'autres tempêtes comme celle-là se faisaient.

J'ai relevé la déclaration ou, en tout cas, les mots du député en ce qui concerne la non-compensation du fédéral pour les coûts d'Hydro-Québec. Il a dit: Qu'on désigne chacun un haut fonctionnaire pour qu'ils se parlent. M. le Président, dès les premières heures, nous avons discuté avec le gouvernement fédéral, dès les premiers jours, nous les avons informés des coûts énormes que devrait encourir Hydro-Québec, 815 000 000 $, dès les premiers jours. Les fonctionnaires se parlent, se sont parlé, étaient d'accord, pratiquement d'accord, et au cabinet fédéral, on a dit: Non. Alors, il faudrait, dans l'opposition, qu'ils prennent acte de cette volonté du gouvernement fédéral de ne pas compenser Hydro-Québec pour 391 500 000 $: c'est le chiffre exact de nos estimations de la compensation qui devrait nous parvenir du gouvernement fédéral. Je demande leur appui pour réclamer ce 391 500 000 $. Je demande leur appui à fond, qu'ils mettent ça aussi sur le compte du fédéralisme, parce qu'on a l'impression que, parce que c'est Hydro-Québec, parce que c'est le gouvernement du Québec, on ne veut pas compenser, alors qu'on l'a fait dans le cas de Terre-Neuve et du Manitoba, on l'a fait ailleurs.

On l'a fait, alors pourquoi on ne le ferait pas ici? À cause de l'ampleur des coûts? Justement, parce que c'est énorme ce que le fédéral a accumulé: 4 000 000 000 $ de surplus, cette année. Il avait de l'argent pour le payer; il en avait. Donc, ils essaient d'étrangler, oui, encore une fois. Le coût du fédéralisme, on n'en parle jamais. On pense que la souveraineté coûte des choses? Non, ça nous rapportera beaucoup, M. le Président, quand on voit ce que nous coûte le fédéralisme. On est encore là, on en est encore là. Mais je vois qu'on glisse, on dit: Désignez des hauts fonctionnaires. Comme s'ils n'étaient pas désignés déjà. Mettez-vous à la page, à l'opposition! Mettez-vous à l'heure! Ça fait des mois qu'ils sont désignés, ça fait des mois qu'ils se parlent. Mais c'est bloqué, au plan politique, au fédéral.

M. le Président, je voudrais simplement terminer en soulignant toujours que l'opposition est d'accord avec le projet de loi. Donc, ce serait un projet de loi adopté unanimement par l'Assemblée nationale. Je voudrais souligner la solidarité des Québécois. Je sais que ce mot a l'air non pas usé mais galvaudé, parce qu'on l'a utilisé beaucoup, mais comme je parle en dernier lieu sur ce projet de loi, je voudrais la rappeler, cette solidarité qui s'est manifestée au cours du mois de janvier, remercier tous ceux qui l'ont pratiquée et rappeler que cette solidarité s'est exercée dans les lieux mêmes où il y a eu cette tempête de verglas qui a couvert largement le Sud du Québec, qui a couvert l'île de Montréal durant une semaine. Il n'y a pas juste la députée de La Pinière qui a été affectée. C'est comme s'il n'y avait qu'elle qui aurait été affectée. Non, il y a eu des centaines de milliers de personnes. À un moment donné, il y avait près de 3 000 000 de personnes dans la noirceur ou sans électricité.

Alors, il y a eu cet instant de solidarité ou cette période de solidarité que nous devons tous souligner. Elle s'est manifestée chez les gens, au départ, par des gestes d'entraide personnelle, interpersonnelle, collective. Elle s'est manifestée au plan des institutions locales, que ce soit dans les écoles, que ce soit dans les municipalités, que ce soit dans toute espèce de groupe qui s'est organisé pour faire face à la situation. Elle s'est manifestée aussi de la part des fonctionnaires du gouvernement du Québec, parce qu'ils ont été à la page, ils ont été là, ils ont répondu. Ils n'ont pas répondu dans la minute qui a suivi parce que c'est impossible, mais ils ont répondu dans la mesure de leurs moyens, le plus tôt possible. Et je peux rendre témoignage qu'à la Sécurité civile notamment il y a eu une organisation qui s'est mise en place rapidement. Ils sont partis de 40 personnes, ils sont montés à 800 personnes dans l'espace de quelques heures, de quelques jours et ils ont répondu aux attentes dans la mesure de leurs capacités.

Alors, je pense qu'il convient de remercier tous les Québécois qui ont participé à cette solidarité. Je parlais de ceux qui ont subi cette tempête et qui l'ont exercée par force majeure, mais aussi d'autres qui se sont manifestés de tous les coins du Québec, à partir de la Gaspésie, de Sept-Îles, des Laurentides et d'ailleurs, de partout au Québec et même aussi les Américains, le long de la frontière, qui l'ont fait. Je voudrais leur rendre hommage, rendre hommage aussi à tous ceux qui étaient en dehors du Québec et qui sont venus.

Alors, M. le Président, c'est un projet de loi de nature technique, mais vous voyez très bien que, derrière, il y a aussi cette immense solidarité qui s'est manifestée et dont nous devons rendre grâce aux Québécois. Ils sont capables de beaucoup de choses, dans des instants comme ceux-là, dans des tempêtes comme celle-là, dans des accidents météorologiques, et ils l'ont démontré. Et je veux leur rendre hommage et les remercier. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor. Alors, je vais mettre aux voix le projet de loi n° 415, Loi instituant le Fonds relatif à la tempête de verglas survenue du 5 au 9 janvier 1998. Ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous propose de reporter à cet après-midi, 14 heures...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 9)

(Reprise à 14 h 7)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Présence du ministre de l'Éducation, des Universités et de la Recherche du gouvernement autonome du Pays basque, M. Inaxio Oliveri Albisu

Alors, avant de débuter, j'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes du ministre de l'Éducation, des Universités et de la Recherche du gouvernement autonome du Pays basque, M. Inaxio Oliveri Albisu.


Affaires courantes


Motion proposant que l'Assemblée dénonce l'intolérance manifestée à l'égard de David Levine à la suite de sa nomination comme directeur général du nouvel hôpital d'Ottawa

Alors, pour débuter les affaires courantes, de façon exceptionnelle, de consentement, les groupes parlementaires ont demandé à la présidence de l'Assemblée nationale du Québec de présenter la motion qui suit:

«Que l'Assemblée nationale du Québec dénonce vigoureusement l'intolérance manifestée à l'égard de David Levine à la suite de sa nomination comme directeur général du nouvel hôpital d'Ottawa et qu'elle réitère l'importance de respecter, dans notre société démocratique, le principe fondamental qu'est la liberté d'opinion.»


Le Président

Alors, si vous me le permettez, quelques instants, au nom des membres de l'Assemblée nationale, je voudrais rappeler à tous ceux que nous représentons ici, dans cette Assemblée, que la démocratie se fonde sur des valeurs fondamentales, en particulier le respect de la volonté et de la liberté de chacun. Le respect signifie la tolérance, et la tolérance, si on s'en réfère à n'importe quel dictionnaire, on va se rendre compte qu'il s'agit tout simplement mais beaucoup de cette attitude qui consiste à admettre chez autrui une manière de penser et d'agir différente de celle que l'on adopte soi-même.

(14 h 10)

L'Assemblée nationale du Québec croit tellement à ces valeurs que régulièrement elle adopte des motions unanimes pour commémorer certains drames historiques où l'intolérance a été la règle principale qui a causé ces situations. Elle adopte aussi régulièrement des motions pour souligner les actes de courage ou les actes particuliers de gens qui se sont justement illustrés ou de groupes qui se sont illustrés pour promouvoir et défendre ces valeurs fondamentales.

L'Assemblée nationale du Québec croit tellement à ces valeurs qu'elle s'en fait également la championne un peu partout dans le monde. À travers son énorme réseau de relations interparlementaires, les parlementaires du Québec, le président et tous ses collègues qui ont la chance de circuler un peu partout dans ces réseaux font en sorte que ces valeurs sont au coeur des actions qui nous guident et sont au coeur, aussi, des collaborations que nous établissons avec les uns et les autres.

La démocratie exige qu'on la protège comme un bijou précieux, parce que la démocratie, nous le savons tous, c'est à la fois le système politique et les valeurs les plus fondamentales, les plus solides, mais également les plus fragiles. Le vrai test des démocraties, en particulier, c'est lorsque celles-ci sont secouées par des débats intenses et émotifs et que les valeurs démocratiques doivent alors être placées au-dessus de tout.

La société québécoise n'est pas à l'abri de manifestations d'intolérance, pas plus que n'importe quelle autre société, mais la responsabilité des élus, des parlementaires et de l'Assemblée nationale, c'est de donner la direction et de rappeler aux uns et aux autres, à chaque fois que c'est nécessaire, que la tolérance et la démocratie doivent primer. Et la démocratie, finalement, au coeur de celle-ci, il y a un mot qui résume tout: la liberté.


Dépôt de documents

Alors, au dépôt de documents, M. le leader du gouvernement, au nom du ministre de l'Environnement et de la Faune.


Rapport annuel du Comité consultatif de l'environnement Kativik

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je dépose le rapport annuel 1996-1997 du Comité consultatif de l'environnement Kativik.

Le Président: Très bien.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député d'Orford.


S'assurer que la Société d'habitation du Québec demeure l'unique propriétaire des HLM

M. Benoit: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 98 pétitionnaires de la Fédération des locataires d'habitations à loyer modique du Québec de la région de Coaticook.

«Les faits invoqués sont les suivants...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Elle me semble bien bonne, mais malheureusement je ne l'ai pas comprise. Alors, M. le député d'Orford.

M. Benoit: Ils vont venir faire une motion sur la liberté d'expression, M. le Président!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: «Attendu que les 65 000 logements à prix modique (HLM), construits au Québec depuis 30 ans, constituent un patrimoine social et un actif économique important qui méritent d'être conservés au profit de l'ensemble des citoyens et citoyennes;

«Attendu que le projet de transférer la propriété des HLM vers les municipalités, contenu dans le plan d'action en habitation du gouvernement, menace la survie même des HLM;

«Attendu que le gouvernement promet, depuis mars 1997, des mesures afin de protéger les ménages travailleurs à faibles revenus mais que celles-ci tardent à être adoptées;

«Attendu que les locataires souhaitent obtenir un règlement leur garantissant le droit de participer pleinement à la gestion démocratique et transparente de leur HLM;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir afin de: s'assurer que la Société d'habitation du Québec (SHQ) demeure l'unique propriétaire des HLM et n'en transfère pas la responsabilité aux municipalités; s'assurer que la SHQ adopte des mesures positives à l'égard des ménages travailleurs à faibles revenus à l'intérieur des HLM et n'augmente pas les loyers; s'assurer que la Loi de la SHQ soit modifiée afin que les associations de locataires puissent s'impliquer réellement dans l'administration de leurs logements.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député d'Orford. Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, maintenant.


Assurer la poursuite des activités de l'unité de réadaptation du CHSLD Lucille-Teasdale, pavillon Jules-Henri-Charbonneau

M. Boulerice: Oui. M. le Président, la pétition est non conforme. J'ai obtenu le consentement; j'en remercie les membres de l'Assemblée. Toutefois, le Secrétariat général de l'Assemblée me suggère d'apporter immédiatement le correctif que j'ai malheureusement noté. C'est l'extrait d'une pétition signée par 4 333 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de la région de Montréal – et non pas du comté de Sainte-Marie–Saint-Jacques exclusivement, comme cela semble prouvé.

«Et les faits invoqués, M. le Président, sont les suivants:

«Considérant l'expertise détenue au CHSLD Lucille-Teasdale, pavillon Jules-Henri-Charbonneau, en matière de réadaptation, intégrant l'ensemble du processus de réadaptation sous un même toit;

«Considérant la rareté des lits en réadaptation dans l'est de Montréal;

«Considérant l'urgence et la nature des besoins auxquels l'unité de réadaptation du CHSLD Lucille-Teasdale, pavillon Jules-Henri-Charbonneau, répond avec efficacité depuis des années;

«Considérant l'annonce imminente de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre de fermer l'unité de réadaptation du CHSLD Lucille-Teasdale, pavillon Jules-Henri-Charbonneau, alors que la fusion récente des établissements Éloria- Lepage, Résidence Maison-Neuve-CHSLD Jules-Henri-Charbonneau intégrait leurs programmes respectifs (soins de longue durée, réadaptation, hôpital de jour, centre de jour, ressources intermédiaires) – ça ne vous intéresse pas?;

«Considérant l'alourdissement inévitable des structures et la dégradation des services aux patients que cette décision entraînera;

«Considérant les pertes d'emplois générées par cette décision;

«Considérant que la fermeture éventuelle de l'unité de réadaptation du CHSLD Lucille-Teasdale, pavillon Jules-Henri-Charbonneau n'entraînera aucune économie budgétaire puisque les ressources libérées seront redistribuées dans d'autres secteurs...» Ha, ha, ha! Non, mais, écoutez, c'est difficile de prononcer une série de sigles comme celui-là.

Des voix: ...

Le Président: Alors, en terminant, M. le leader.

M. Boulerice: Virago, que j'ai dit à votre endroit, madame.

Des voix: ...

Le Président: Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, en terminant, s'il vous plaît.

M. Boulerice: «Considérant que la fermeture éventuelle de l'unité de réadaptation du CHSLD Lucille-Teasdale, pavillon Jules-Henri-Charbonneau, n'entraînera aucune économie budgétaire, puisque les ressources libérées seront redistribuées dans d'autres secteurs de la ville de Montréal, au détriment de la population de l'est de la ville;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux pour faire en sorte que l'unité de réadaptation du CHSLD Lucille-Teasdale, pavillon Jules-Henri-Charbonneau, puisse poursuivre ses activités.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Bien. Alors, cette pétition est déposée.


Questions et réponses orales

Puisqu'il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous allons immédiatement aborder la période des questions et des réponses orales. Mme la chef de l'opposition officielle.


Diminution des heures d'ouverture de cliniques médicales à Montréal ayant atteint leur quota trimestriel

Mme Gagnon-Tremblay: Malheureusement, M. le Président, les Québécois vont devoir faire encore les frais de l'inaction du ministre de la Santé, quand ce n'est pas de son improvisation. On apprend que, dans la région de Montréal notamment, plusieurs cliniques médicales sont fermées jusqu'en juin, privant ainsi plusieurs milliers de patients d'un accès normal à leur médecin, et cette situation dénote toute l'insensibilité du ministre et de son gouvernement qui placent le malade, le patient au dernier rang de leurs préoccupations.

Le ministre de la Santé, M. le Président, peut-il nous donner la garantie, donner la garantie à ces patients que les cliniques médicales ouvriront et que ces derniers auront accès à leur médecin pour se faire soigner en toute quiétude?

(14 h 20)

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, si on regarde vraiment la situation telle qu'elle est, M. le Président, on s'aperçoit que c'est beaucoup moins dramatique que ce qu'on essaie de faire voir. D'abord, ce n'est pas les cliniques médicales de Montréal qui ferment, il y a un certain nombre de cliniques – je pense que l'article fait référence à cinq cliniques – et ça, c'est depuis le début des années quatre-vingt. La difficulté qu'on essaie de régler avec les quotas dont les gens parlent, on n'a pas inventé ça, là; ça existe depuis le début des années quatre-vingt et depuis que les médecins de famille ont des quotas trimestriels. Et, depuis le début des années quatre-vingt, il y a un certain nombre de cliniques à fort volume qui atteignent leur quota une semaine, une semaine et demie avant que le trimestre finisse – on est à une semaine et demie de la fin d'un trimestre. Ces cliniques ralentissent leur rythme et diminuent le nombre d'heures où elles sont ouvertes, mais l'ensemble des cliniques et des bureaux médicaux à Montréal continuent de fonctionner. Alors, ce n'est pas les cliniques médicales de Montréal qui sont fermées, il s'agit de cinq cliniques. C'est une situation qui existe depuis quasiment 20 ans.

Présentement, dans les propositions qui sont en discussion avec les médecins de famille, la Fédération des médecins omnipraticiens, sur la mise en place des départements territoriaux de médecine générale, c'est justement ce genre de situation qu'on veut régler pour l'avenir, M. le Président. Mais il y a loin d'y avoir un drame. La population de Montréal peut continuer d'être assurée des services. Là, on en fait une nouvelle, mais il n'y a rien de nouveau dans ce qui se passe là, c'est ce qui se passe à tous les trois mois depuis presque 20 ans.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la chef de l'opposition.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé reconnaît qu'il a des responsabilités envers les patients qui veulent se faire soigner et qui en ont marre des beaux discours et des belles excuses et qu'il nous reste 10 jours d'ici le 1er juin? Ça signifie environ 100 patients par jour, donc 1 000 patients qui auront besoin d'être reçus par leur médecin, de voir leur médecin. Il y a 1 000 patients qui seront privés... Et ça, M. le Président, c'est à part de ce qui pourrait arriver le 29 mai prochain. Alors, peut-on demander au ministre qu'il nous donne cette garantie et qu'il donne la garantie aux patients qui attendent de voir leur médecin qu'ils pourront véritablement se faire soigner en toute quiétude?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Je peux donner la garantie, sûrement, à la population qu'il n'y a pas de raison que ça se passe différemment au cours de la prochaine semaine que ça s'est passé à la dernière semaine de chacun des trimestres depuis quasiment 20 ans que ça fonctionne. Alors, là, la seule différence, c'est qu'on essaie de faire une nouvelle à partir d'une situation qui existe et qui, idéalement, ne devrait pas se retrouver. On devrait avoir une meilleure collaboration, sur chaque territoire de CLSC, entre les bureaux, les cabinets privés des médecins, les cliniques et les CLSC. Ça, c'est un problème qui existe depuis longtemps, on ne l'a pas créé. On est en voie d'apporter des solutions très importantes à cette situation-là. Alors, je peux rassurer la population, et, si la population a marre des beaux discours, peut-être bien qu'elle a marre des nouvelles qu'on invente, aussi.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Est-ce que le ministre, M. le Président, conviendra qu'il a fermé des hôpitaux à Montréal? Est-ce que le ministre conviendra que les salles d'urgence sont déjà débordées? Est-ce qu'il conviendra qu'il a demandé aux patients de se diriger vers les CLSC ou les cliniques privées plutôt que dans les salles d'urgence et qu'il est incapable de garantir aujourd'hui que les cliniques privées vont être ouvertes pour les recevoir?

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Il ne faudrait pas essayer de tout mêler, M. le Président. C'est la spécialité des gens d'en face, mais ça n'aide pas à comprendre. Les lits qui ont été fermés à Montréal, ça fait déjà presque deux ans que c'est fermé, et je vous rappellerai que Montréal a encore, en per capita, plus de lits de courte durée que Toronto et que la plupart des grandes agglomérations urbaines presque partout. Et le problème dont on parle, il existait déjà avant, il a déjà été beaucoup plus aigu auparavant, et c'est quelque chose qui est en voie de changer comme genre de situation.

Mais, encore une fois, présentement on essaie de faire une nouvelle de quelque chose qui n'a rien de nouveau, qui existe depuis 20 ans: à tous les trois mois, il y a un certain nombre de cliniques de fort volume qui atteignent le quota qui existe depuis le début des années quatre-vingt. Je répète qu'on n'a pas inventé ça, cette affaire-là, on essaie de s'en débarrasser, et je pense qu'on va y arriver. On fait une nouvelle avec rien. Alors, la population peut être rassurée, il n'y aura pas plus de différence dans la prochaine semaine pour elle que ce n'est le cas dans toutes les autres semaines et toutes les fins de trimestre à Montréal, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Jacques-Cartier?

M. Kelley: En additionnelle, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Est-ce que le ministre est au courant qu'hier, à Pointe-Claire, la clinique médicale Statcare a dû fermer, qu'il n'y a pas de médecins au CLSC Lac-Saint-Louis et que ça a créé un engorgement à la salle d'urgence de l'hôpital Lakeshore qui est juste en face, de l'autre côté de la rue, des attentes de 10 heures à cause de la fermeture de la clinique? Et qu'est-ce que le ministre va faire pour s'assurer qu'il n'y aura pas une autre fermeture, tel que prévu, la semaine prochaine à la clinique médicale Statcare?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, encore une fois, on essaie d'inventer une nouvelle. Cette situation, à la fin de chaque trimestre, se présente, où il y a une semaine ou une semaine et demie où des cliniques ralentissent leur volume. S'il devait y avoir une situation qui poserait problème, la régie régionale est en lien avec la Fédération des médecins omnipraticiens, avec les CLSC, avec les cliniques qui sont ouvertes. Parce que la grande, grande majorité des bureaux des médecins continuent de fonctionner pour s'assurer que la population va recevoir des services, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Bourassa, en principale?

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président...

Le Président: En principale?


Services de réadaptation physique pour les enfants de la région des Laurentides

Mme Lamquin-Éthier: En principale, M. le Président. Les enfants de zéro à 18 ans souffrant de déficience physique ne reçoivent pas les traitements auxquels ils ont droit dans la région des Laurentides. En effet, M. le Président, les parents ne savent plus à qui s'adresser, ne savent plus à quelle porte frapper pour que leurs jeunes enfants aient de l'ergothérapie, de la physiothérapie sans avoir à attendre des années pour des traitements.

M. le Président, comment le ministre de la Santé peut tolérer des délais d'attente qui sont absolument insupportables au niveau de la réadaptation physique des jeunes enfants, quand on sait que le succès du traitement est directement relié au délai d'intervention?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, M. le Président, la députée n'est pas très, très spécifique sur le problème auquel elle réfère dans la région des Laurentides. Dans chacune des régions du Québec au cours des dernières années, les services de réadaptation, autant physique que pour déficience sensorielle ou déficience intellectuelle, ont été organisés sur une base régionale.

Il y a certaines régions, surtout dans la périphérie de Montréal, on le sait, la Montérégie, jusqu'à un certain point Lanaudière, les Laurentides, qui sont des régions où il y a une certaine pénurie de ressources parce que le développement de la population, ce qu'on a appelé l'étalement de la population et l'augmentation rapide de la population dans le sud de la région des Laurentides, a fait – et ça, ce n'est pas d'hier – que graduellement au cours des 10 dernières années les ressources ne se sont pas développées au même rythme que la population s'est développée, et il faut intensifier le développement des ressources dans cette région-là, M. le Président, et ça fait partie des objectifs de ce à quoi on travaille présentement.

Maintenant, encore une fois, ce n'est pas dans l'époque qu'on vient de traverser, de trois années de contraintes importantes, qu'on a pu accélérer le rythme. Le mieux qui a pu être fait, c'est de maintenir les services qu'il y avait dans ces secteurs-là qui étaient un peu en déficience. Et là on commence à avoir un peu d'oxygène, on commence à sortir de cette période. Puis, il faut se le rappeler, les gens qui nous posent ces questions-là et qui essaient d'exagérer des situations qui sont chroniques dans ces régions-là, de les exagérer tout d'un coup aujourd'hui, c'est un héritage qu'ils nous ont laissé! Ils les ont ou créées ou ils les ont laissé s'aggraver, ces situations-là. On a maintenu le cap et on a commencé à améliorer. Alors, je pense que les gens peuvent avoir espoir parce que le pire est vraiment passé à cet égard-là, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, est-ce que le ministre est conscient qu'à cause de lui des jeunes enfants doivent maintenant attendre jusqu'à trois ans pour avoir de l'ergothérapie, de la physiothérapie et que ces délais d'attente là vont causer des torts irréparables à ces jeunes enfants?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Bon, alors, encore une fois, M. le Président, c'est facile de lancer des chiffres en l'air. Ce que je vous dis, c'est qu'il y a des déficiences chroniques dans certains types de services. Dans la plupart des cas, non seulement ça ne s'est pas aggravé, mais ça a commencé à s'améliorer lentement. Et, quand des régions sont vraiment en difficulté, il existe aussi des collaborations entre les régions. Alors, encore une fois, les gens qui sont sur le terrain, les professionnels qui donnent ces services-là, ce sont les mieux placés pour s'assurer qu'on va donner des services aux gens le mieux possible dans les circonstances actuelles et qu'on va les améliorer au meilleur rythme possible.

(14 h 30)

Le Président: Mme la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne, en principale.

Mme Loiselle: En additionnelle, s'il vous plaît.

Le Président: En complémentaire? Très bien.

Mme Loiselle: Merci. M. le Président, comment le ministre de la Santé peut dire à ma collègue qu'elle lance des chiffres dans les airs? J'ai ici le tableau qui vient de la régie régionale du centre de réadaptation Le Bouclier, de la région des Laurentides. Le délai moyen d'attente pour obtenir des traitements en réadaptation pour les enfants de zéro à 18 ans: 1 000 jours en ergothérapie – ça, c'est trois ans – deux ans en éducation spécialisée, trois ans en orthophonie, deux ans en physiothérapie. Ça, là, ça vient du centre de réadaptation, c'est les chiffres du centre de réadaptation. Et, quand le ministre dit qu'on commence à avoir de l'oxygène, là, faut vraiment, vraiment vivre sur une autre planète, comme le ministre de la Santé du Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Je ne sais pas sur quelle planète était la députée, M. le Président, quand on a passé les trois dernières années où on a dû faire face à des constrictions budgétaires importantes pour régler les dettes qu'ils nous avaient laissées. Qui est-ce qui nous avait laissé des dettes? Qui est-ce qui nous les avait laissées, ces dettes-là?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rochon: À quelle place elle regardait, la députée, quand Ottawa nous a coupé les transferts? Pour les trois quarts des coupures qu'on a pu faire, Ottawa, ça venait des transferts...

Le Président: M. le ministre.

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, est-ce que, de sa galaxie, la députée voyait que les transferts fédéraux ne venaient plus, que ça nous a causé des coupures... Non mais, c'est ça qu'est la situation. C'est ça. C'est beau d'essayer de dire aujourd'hui qu'il y a des délais d'attente qui sont longs. Oui, c'est vrai. Ils sont trop longs. Oui, c'est vrai. Mais pourquoi? Pourquoi ils sont trop longs, M. le Président? Mais ça fait des années que c'est comme ça! Pendant des années où ils dépensaient au-dessus du budget qu'ils avaient, où ils mettaient l'argent s'ils ont laissé ces situations-là se créer, devenir une situation chronique pendant qu'ils dépensaient de l'argent à je ne sais pas quoi, à regarder je ne sais pas sur quelle planète? Ils nous ont laissés avec ça. C'est la situation qu'on doit régler dans des conditions terriblement difficiles qui nous ont été laissées.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.

Mme Loiselle: M. le Président, M. le Président... Le club des Duracell.

M. le Président, pourquoi le ministre de la Santé n'a-t-il pas l'honnêteté de dire aux parents de la région des Laurentides que leurs enfants n'auront pas de traitement, qu'ils n'auront pas de traitement du moins jusqu'à l'an 2002? Et pourquoi le ministre n'a-t-il pas l'honnêteté de le dire aussi à Mme Chantal Bareil qui vous a écrit à cinq reprises pour vous demander de l'aide? Et vous n'avez même pas eu la décence de lui répondre, même pas la politesse de lui envoyer un accusé de réception. Peut-être lui dire: Je m'excuse, madame, pour votre petite fille de 22 mois, moi, j'ai préféré investir 11 000 000 $ dans ma publicité raisin. Vous auriez dû lui dire.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président...

Le Président: Bien. M. le ministre.

M. Rochon: Alors, comme ministre de la Santé, ce que je peux dire aux gens de la région et à ceux qui attendent, c'est justement qu'ils peuvent avoir un peu d'espoir, oui, qu'ils peuvent avoir de l'espoir parce que, dans les trois dernières années, malgré le contexte très difficile que j'ai rappelé, au-delà des coupures énormes qu'on a dû prendre, on a réussi à réallouer déjà beaucoup de ressources sur tous les services de première ligne: on a augmenté les services de maintien à domicile, on a développé pour 2 000 places de soins de longue durée, on a développé le système Info-Santé dans l'ensemble du Québec, les CLSC offrent maintenant des plages de services de 60 heures, partout. Il y a déjà beaucoup qui a été fait et on continue à faire le tour, M. le Président.

Alors, mon plus grand espoir et la confiance, je pense, qu'on peut avoir, c'est que, maintenant qu'on a réglé la plupart des problèmes, on va être capable de changer cet horizon. Si les choses n'étaient pas changées, si on avait continué sur la lancée qui nous a été laissée, ce n'est pas un an, deux ans, on continuerait. Parce que, avant qu'on arrive, les délais s'allongeaient tout le temps. Ils nous ont laissés avec des délais qui s'allongeaient tout le temps, qui sont rendus à ce qu'ils sont aujourd'hui. Alors, c'est ça que je veux dire à la population, d'avoir confiance. Ils sont obligés d'être encore un peu patients. Les efforts vont continuer encore à être faits et...

Le Président: Alors, en terminant, M. le ministre.

M. Rochon: Je veux redire que tant qu'on va continuer...

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Et je veux redire aussi que la population a le droit d'avoir une information complète sur les problèmes, sur les solutions et sur ce qui est fait pour continuer d'améliorer ces services. Plus on va continuer à propager toutes sortes d'informations et à déformer la réalité, plus on va devoir mettre de l'argent pour informer correctement la population, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.

Mme Loiselle: M. le Président, à part du manque d'intérêt...

Le Président: De façon réglementaire. Vous êtes en complémentaire, de façon réglementaire.

Mme Loiselle: M. le Président, est-ce que le ministre peut réaliser que, à cause de son manque de coeur et de son manque d'intérêt...

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement, ça n'aide pas, ça, ce genre de commentaire. Je pense, Mme la députée, que je vous inviterais à prendre connaissance à nouveau des dispositions de l'article 35.6° et 35.7° où on ne peut «imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole» ni «se servir d'un langage violent, injurieux ou blessant à l'adresse de qui que ce soit».

Vous posez la question à un ministre du gouvernement. Vous pouvez questionner son administration, mais je pense que la règle que nous sommes donnée les uns et les autres, c'est de ne pas faire d'attaque personnelle et de ne pas franchir un certain seuil. Alors, à ce moment-ci, je vous demanderais de...

Mme Loiselle: M. le Président, je ne faisais que citer Mme Diane Hébert, une grande citoyenne du Québec.

Le Président: Et vous savez très bien, Mme la députée, maintenant vous avez suffisamment d'expérience, qu'on ne peut pas faire indirectement ce que le règlement ne nous permet pas de faire directement. Et en l'occurrence l'Assemblée ne peut fonctionner correctement qu'avec un minimum de respect de chaque côté.

Mme Loiselle: M. le Président, pourquoi le ministre n'a-t-il pas eu au moins la politesse de répondre à Mme Chantal Bareil qui lui a écrit à cinq reprises pour lui demander d'intervenir pour sa petite fille de 22 mois qui n'a pas de traitement? Êtes-vous au moins au courant que cette mère de famille, qui est en pleurs, M. le Président, qui est déchirée pour sa petite fille, vous a écrit au moins cinq fois? Le savez-vous, ça, M. le ministre?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, je suis convaincu que les gens qui sont responsables de donner les services ont eu les informations nécessaires et ont pris contact avec les gens. Je vais vérifier. Je ne peux pas me rappeler de mémoire. Est-ce que, effectivement, il y aurait par erreur une lettre qui aurait glissé et qui serait demeurée sans réponse? Je vais vérifier.

(14 h 40)

Le Président: Mme la députée de Bourassa, s'il vous plaît. M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, il y a effectivement un courrier très important au ministère de la Santé et des Services sociaux, et les gens seront peut-être surpris de l'apprendre, mais il y a beaucoup aussi, et de plus en plus même, de gens qui écrivent avec des messages très positifs et des signes de satisfaction. Il y a aussi de ça, M. le Président. Beaucoup. Ceux-là, on ne les publie pas en général, par exemple...

Une voix: On devrait le faire.

M. Rochon: Mais ce que je veux dire, M. le Président...

Le Président: Alors, M. le ministre, en terminant.

M. Rochon: Alors, encore une fois, M. le Président, je vais sûrement vérifier si... Sur le volume de courrier qui arrive au ministère, il peut y avoir eu erreur, il peut y avoir eu un oubli. Si c'est le cas, tout sera fait pour la réparer. Mais, encore une fois, en plus de répondre à la correspondance, le ministère se tient en lien régulièrement avec les régies et les établissements pour s'assurer que les suivis sont donnés et qu'on s'occupe des gens, que, au-delà du courrier, au-delà de la paperasse, s'il y a des situations qui se présentent où les gens peuvent être en difficulté, les premières réactions de fonctionnement du ministère avec l'ensemble des établissements, c'est de s'assurer qu'il n'y a pas de gens qui sont laissés pour compte et qu'il n'y a pas de gens pour qui on n'a pas fait tout ce qu'il est possible de faire, et ça, on va continuer à le faire et on va même intensifier nos actions de ce côté-là, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.

Mme Loiselle: M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé est au courant que la directrice générale du centre de réadaptation Le Bouclier, elle, a eu la générosité de répondre à Mme Bareil pour les difficultés à obtenir des services de réadaptation pour sa fille et qu'elle lui disait: «Comme vous, ces personnes doivent frapper à plusieurs portes avant que, enfin, on puisse leur répondre, et souvent il se passe des semaines, des mois, voire des années avant qu'elles obtiennent satisfaction, et cela, madame, je n'exagère malheureusement pas»?

Savez-vous aussi, M. le Président, que la Régie régionale a aussi eu la générosité de répondre à Mme Bareil en lui disant que, malheureusement, la Régie régionale de la santé des Laurentides a un manque de ressources pour sa région, pour répondre aux difficultés des enfants en réadaptation? Est-ce que le ministre est au courant de ce qui se passe dans la région des Laurentides?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, c'est quand même une confirmation d'une partie de ce que j'ai dit. Quand il y a des problèmes qui sont soulignés, on est dans un système décentralisé et, rapidement, au niveau des régions et au niveau des établissements, on s'assure d'être en contact avec les gens. Mais c'est ça, la réalité. Le ministre, je le répète, M. le Président, à la question de la députée, il est très au courant de la situation, singulièrement dans la région des Laurentides, parce que c'est depuis trois ans qu'on réorganise les services de santé qu'on travaille pour améliorer cette situation-là. Il est très au courant, c'est une des situations qu'on a constatées quand on a commencé la réorganisation des services de santé.

Mais tout ce que met en lumière la députée par ces questions-là – tout ce qu'elle met en lumière – c'est l'incurie du gouvernement précédent qui a créé ces situations-là. Pendant que la population se développait dans cette région-là, qu'est-ce qu'ils ont fait? Ils n'ont pas développé les services, ils n'ont pas suivi. Ils ont fait des déficits, ils ont mis l'argent je ne sais pas où. Ils étaient sur une galaxie, en quelque part, puis ils ne voyaient même pas la situation, puis là ils se surprennent de ça aujourd'hui. C'est leur incurie qui leur revient à la face, M. le Président.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis, en principale.


Projet de demande de hausse salariale des syndicats du secteur public

M. Chagnon: M. le Président, vous souviendrez que, en 1981, juste avant les élections, comme par hasard, ce gouvernement, dont plusieurs membres sont encore dans le même gouvernement, avait donné, avant les élections, un règlement aux employés du secteur public qui était très généreux. On sait ce qu'il est advenu par la suite.

En 1995, M. le Président, nous souviendrons que, même s'il annonçait être fauché, ce gouvernement avait, avant le référendum, annoncé qu'il donnerait 1 000 000 000 $ aux employés des secteurs public et parapublic en guise d'augmentation de rémunération. On sait ce qu'il est advenu par après.

M. le Président, ce matin, les membres du secteur public ont demandé 1 000 000 000 $, et cela, avant les prochaines élections qui sont imminentes. Devons-nous nous attendre du président du Conseil du trésor qu'il cède encore une fois, qu'il donne encore une fois ce que les syndicats ont demandé avant l'élection?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, j'entends bien le député de Saint-Louis faire des affirmations ou me demander indirectement des commentaires sur les déclarations qui ont été faites hier. Je dois rappeler qu'il s'agit d'une proposition pour consultation auprès des membres de la CSN, de la FTQ et de la CEQ. Il ne s'agit pas des demandes déposées devant le Conseil du trésor dans le cadre des négociations, à tout le moins pas encore. Cela arrivera éventuellement, d'ici quelques semaines, je suppose bien, mais disons qu'à ce stade-ci les demandes qui sont acheminées aux membres des centrales nous apparaissent pour le moins surprenantes, à hauteur de 3,5 % en 1998-1999 et de 4 % pour chacune des deux autres années, parce que, sur le plan budgétaire, cela équivaudrait, sur trois ans, en récurrence, à une demande valant 2 155 000 000 $ par année, et l'on comprendra que cela dépasse les moyens du gouvernement, de l'avis de tous. Sur le plan annuel, c'est une demande qui vaut 2 370 000 000 $. Alors, il s'agit d'une opération de consultations à l'intérieur des centrales syndicales, ce sont les membres qui en décideront, mais j'émets ce commentaire qu'elles sont pour le moins surprenantes.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, le ministre comprendra et nous comprendrons ensemble. Est-ce qu'il ne peut pas présumer que les syndiqués ne rejetteront pas les offres de leur centrale? Est-ce que je dois comprendre qu'aujourd'hui le ministre refuse la demande des centrales qui lui parviendra cette semaine?

Le Président: M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, je viens d'expliquer qu'il s'agit de demandes qui sont acheminées aux membres. Je n'ai pas à prendre une position puis à dire non, à ce stade-ci. On ne négociera pas non plus sur la place publique, tout le monde sait que c'est un principe bien connu si l'on veut arriver à des résultats.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata, en complémentaire.

M. Béchard: M. le Président, est-ce que le président du Conseil du trésor, à l'aube des négociations dans le secteur public, peut aujourd'hui, dans un geste de sincérité et de solidarité envers les jeunes, nous dire s'il veut...

Le Président: Non, non, non. Un instant! Je pense que, dans ce cas, les questions principale et complémentaire du député de Westmount–Saint-Louis, c'était sur le montant global des demandes et non pas sur un item particulier. Si vous voulez poser une question additionnelle mais principale, vous pourrez le faire après le député de Rivière-du-Loup. M. le député de Rivière-du-Loup.


Mesure législative imposant une clause orphelin aux jeunes à l'aide sociale

M. Dumont: Merci, M. le Président. Alors que le gouvernement vient de provoquer, par ses actions et sa loi sur les municipalités, une recrudescence des clauses orphelin, alors qu'il ne semble pas particulièrement pressé de corriger la situation, d'adopter des mesures pour corriger la situation, et ce, pour les jeunes en emploi, il s'apprête, par l'article 53 de sa Loi sur l'aide sociale, à adopter maintenant une clause orphelin pour les jeunes qui sont sans emploi. La présidente du Conseil permanent de la jeunesse, et je la cite, disait, hier: «Le parcours obligatoire pour les jeunes assistés sociaux, c'est la nouvelle clause orphelin que le gouvernement tente d'imposer aux sans-emploi.» Si l'objectif du gouvernement est de responsabiliser les gens et si son objectif est d'exiger des gens un effort réel pour leur remise en emploi plutôt que de donner des chèques à des gens pour rester à la maison, c'est sûrement un objectif auquel je peux souscrire.

La question, à ce moment-là, c'est: Pourquoi cette mesure-là doit s'appliquer seulement aux jeunes? Et qu'est-ce qu'une catégorie d'âge vient faire là-dedans? Ma question à la ministre: Est-ce qu'elle reconnaît que cette mesure-là constitue une discrimination très simple basée sur l'âge? Est-ce qu'elle a l'intention de revoir cette disposition de son projet de loi?

Le Président: Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.

(14 h 50)

Mme Harel: Alors, je comprends, M. le Président, que le député de Rivière-du-Loup reprend à son compte cette idée qu'il y aurait une discrimination à offrir à des jeunes de 18-24 ans qui sont sur l'aide sociale, qui ne travaillent pas, qui n'ont pas d'enfant, qui n'ont pas de handicap, qui sont 36 000, dont les deux tiers sont des garçons, dont 56 % n'ont pas complété leur secondaire III, alors je comprends que le député de Rivière-du-Loup considère de la discrimination de leur offrir un parcours individualisé vers la formation et l'emploi qui leur alloue un montant supplémentaire qui totalise, prestations additionnées, 610 $ par mois. Je pense que c'est un coup de pouce et qu'il ne s'agit aucunement de discrimination.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Est-ce que la ministre peut nous expliquer pourquoi ce qu'elle appelle un coup de pouce, mais qui va devenir un coup de pied s'il n'est pas accepté, pourquoi, si c'est si bon, c'est seulement pour les jeunes que c'est appliqué? Pourquoi ça ne serait pas appliqué à l'ensemble...

(Panne d'électricité)

M. Dumont: ...qui est punitive est une mesure qui s'applique strictement à la classe des jeunes et vient réintroduire ce qu'on a connu auparavant, une discrimination basée sur l'âge dans l'aide sociale?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, c'est bien évident que c'est parce qu'on privilégie des jeunes qui sont en difficulté. La durée moyenne d'un jeune qui a 24 ans et qui aujourd'hui est sur l'aide sociale, la durée moyenne sur l'aide sociale est de 50 % de sa vie active en tant qu'adulte. La moyenne de la durée est de 44 mois pour un jeune qui a 24 ans et de 33 mois pour un jeune qui a 23 ans.

M. le Président, je pense que 18, 19, 20 ans, 21 ans, le meilleur service qu'on peut rendre à un jeune qui a décroché, la plupart du temps – les deux tiers ont décroché – le meilleur service qu'on peut leur rendre, c'est ce parcours individualisé. D'aucune façon, je ne vois pas en quoi il y aurait discrimination, pour la bonne raison que le projet de loi prévoit un dispositif où le jeune aura même un recours et il pourra invoquer un motif valable pour ne pas accepter le parcours qui lui est offert. Je rappelle qu'il n'y a pas de pénalité s'il n'y a pas de proposition de parcours. Il n'y a pas d'obligation de s'inscrire à un parcours. Mais, par ailleurs, lorsqu'il y a une proposition raisonnable de parcours qui est proposée, oui, il y a une obligation d'aller de l'avant.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Dumont: La question est bien simple: Pourquoi le parcours que la ministre nous décrit comme bon et positif pour des jeunes de 23 ou 24 ans ne serait pas positif pour des gens de 27 ans, 30 ans, 32 ans, 35 ans ou plus qui sont dans la même situation? Est-ce qu'on doit comprendre de la ministre qu'elle veut créer un statut d'occasionnel ou de temporaire sur l'aide sociale pour les jeunes puis, après ça, rendus à 26 ans, c'est une sorte de permanence qu'il va y avoir sur l'aide sociale, qu'elle a inscrit dans le projet de loi? Puis en vertu de quel principe elle nous applique ça?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, le parcours individualisé, là, c'est pour tout le monde, tout le monde qui en a besoin, pas seulement les chômeurs à l'aide sociale. Le parcours individualisé pour l'insertion, la formation et pour l'emploi est offert à toute personne qui risque une situation de chômage prolongée.

Savez-vous, M. le Président, que, dans les pays industrialisés avec lesquels on peut favorablement se comparer, il n'y a même pas de prestations de sécurité sociale? En France, par exemple, il n'y en a pas pour les moins de 25 ans. Le revenu minimum d'insertion, qu'on appelle le RMI en France, ça commence à 25 ans seulement, à moins que le jeune s'inscrive justement dans un parcours. Il en va de même avec la nouvelle loi adoptée par les travaillistes en Angleterre, il en va de même au Danemark, il en va de même en Suède. Or, pourquoi cette réalité de jeunes en difficulté qui donne lieu à un accompagnement particulier dans tous les pays démocratiques, sociaux-démocrates, industrialisés, ce ne serait pas bon pour nous aussi?

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Dumont: Une dernière complémentaire au ministre responsable des Relations avec les citoyens et responsable du dossier jeunesse et successeur de la présidente du Comité national des jeunes du Parti québécois, qui s'était tant battu contre la discrimination à l'aide sociale, en faveur de la parité à l'aide sociale, est-ce qu'il peut nous dire si maintenant il est d'accord avec le retour de la discrimination à l'aide sociale? Est-ce qu'il n'a pas l'intention de faire pression sur sa ministre pour maintenir la parité de l'aide sociale, pour laquelle il a été le successeur de quelqu'un qui s'est battu?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, peut-on rappeler au député de Rivière-du-Loup qu'un jeune de 18 ans, comme une personne qui en a 30 ou 40, a la même prestation et, donc, qu'il n'y a aucune différenciation. L'offre qui est faite, c'est celle de participer à un parcours de son choix, mais de participer avec une allocation supplémentaire de participation. Et puis-je rappeler au député de Rivière-du-Loup que le gouvernement n'a pas beaucoup de leçons à recevoir après avoir investi, dans une période d'adversité, 27 000 000 $ cette année dans les carrefours jeunesse-emploi pour justement donner le coup, le virage qu'il fallait pour accompagner des jeunes vers une vie active, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Frontenac.


Lieu de détention de Maurice «Mom» Boucher

M. Lefebvre: M. le Président, on a appris il y a quelques heures que Maurice «Mom» Boucher faisait du tourisme. On est informés que ce matin, vers 9 h 30, sous escorte de Carcajou, on aurait décidé de prendre M. Maurice «Mom» Boucher dans sa prison dorée à Tanguay, à Montréal, et on aurait décidé de l'amener à la prison Talbot à Sherbrooke. Cependant, M. le Président, ce qui est encore...

Des voix: ...

Le Président: Bien. Est-ce qu'on peut maintenant revenir à la question?

M. Lefebvre: Alors, M. le Président, vous aurez remarqué que tout le monde rigole de l'autre côté, sauf le ministre. Je le comprends.

Alors, chemin faisant, M. le Président, il semblerait que des ordres seraient venus d'en haut, au ministère de la Sécurité publique, ou du «bunker», à vérifier, on aurait décidé de faire demi-tour et de ramener M. Boucher à sa résidence principale, à la Maison Tanguay.

Ma question au ministre de la Sécurité publique, M. le Président: C'est quoi encore, cette autre histoire absolument incroyable et bizarre, qu'après avoir installé M. Boucher dans une prison spéciale au coût d'à peu près 1 000 000 $ on décide de le ramener dans une autre prison à Sherbrooke et que, chemin faisant, on change d'idée et on le ramène à sa résidence principale, à la prison Tanguay? C'est quoi, cette histoire de fous là, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

(Panne d'électricité)

M. Bélanger: ...à dire au député de Frontenac et à rassurer le député de Frontenac que M. Boucher est toujours détenu à Tanguay et qu'il est de notre intention qu'il soit détenu à Tanguay jusqu'à la fin de son procès aux assises criminelles.

Maintenant, M. le Président, il arrive régulièrement et souvent qu'il puisse y avoir des déplacements de détenus pour des raisons que... Je crois qu'il n'est pas d'intérêt public pour le ministre de la Sécurité publique de commencer à dire publiquement pourquoi des déplacements peuvent arriver.

Donc, c'est pour ces raisons, M. le Président, que je tiens à rassurer le député de Frontenac qu'il a beaucoup d'imagination, mais M. Boucher est toujours détenu à Tanguay.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, je veux savoir du ministre: Est-ce qu'il sait ce qui s'est passé? Est-ce qu'il sait pourquoi – parce qu'il me confirme, à tout le moins pour l'essentiel, que c'est vrai, ce que je viens de raconter – on aurait décidé de déplacer M. Boucher pour qui on a construit une aile spéciale dans la prison Tanguay au coût d'à peu près 1 000 000 $, pourquoi on aurait décidé de le changer de prison et de l'amener à Sherbrooke? C'est ça, ma question au ministre. Est-ce qu'il le sait? S'il ne le sait pas, M. le Président, il va prendre avis et il va nous en parler mardi, en même temps qu'il nous éclairera sur l'artificier Hell's Angel à Rivière-des-Prairies.

Le Président: M. le ministre.

(15 heures)

M. Bélanger: M. le Président, relativement aux dépenses qui ont été effectuées pour le centre de détention Tanguay, j'ai déjà expliqué au député de Frontenac que la moitié de cette somme, en particulier, c'était de l'équipement, que c'est un investissement qui va être récupérable, qui va servir pour d'autres détenus. Donc, c'est faux de dire que le montant qui a été imputé relativement à Tanguay, c'est uniquement pour un détenu. C'est tout simplement pour s'assurer que cette aile va pouvoir servir pour plusieurs détenus qui pourraient, à ce moment-là, nécessiter une surveillance particulière. Je crois que même le député de Frontenac va reconnaître avec moi qu'avoir quelqu'un comme M. Boucher dans un centre de détention représente une problématique particulière tant pour la sécurité du public que pour la sécurité de nos employés, et aussi pour prévenir les tentatives d'évasion. Je pense que même le député de Frontenac est capable, en faisant un effort, de comprendre ça.

Maintenant, M. le Président, il ne m'appartient pas, et je crois qu'il n'est pas dans l'intérêt public, pour le ministre de la Sécurité publique, de commencer à dire publiquement les raisons pour lesquelles il pourrait y avoir un déplacement de détenus, et je ne le ferai pas. Aucun de mes prédécesseurs ne l'a fait, et je ne commencerai pas à faire ça, M. le Président.

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que c'est vrai que ça serait l'avocat de Maurice «Mom» Boucher qui aurait demandé à ce que son client soit déplacé de Tanguay à la prison Talbot de Sherbrooke? Est-ce que c'est vrai, oui ou non?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: M. le Président, il me semble que c'est clair, la réponse que j'ai donnée, qu'il est dans l'intention du ministère de la Sécurité publique que M. Boucher soit détenu à Tanguay jusqu'à la fin de son procès aux assises criminelles. Telle est l'intention du ministère de la Sécurité publique, telle est la situation présentement.

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que je dois comprendre que le va-et-vient qui s'est passé ce matin, le ministre ne sait pas pour quelle raison ça s'est produit? C'est ça, la réponse?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, je suis parfaitement au courant des faits relativement aux déplacements de M. Boucher. Cependant, ce que j'ai dit, c'est qu'il n'est pas d'intérêt public de commencer à donner des explications, à donner des spéculations sur les déplacements des détenus. Il me semble que, pour des raisons de sécurité, c'est assez évident. Même le député de Frontenac est capable de comprendre ça.

Le Président: En question principale, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


Fermeture des magasins Légaré

M. Béchard: M. le Président, le 21 avril dernier, la direction des magasins Légaré annonçait qu'elle fermait ses 46 magasins et provoquait ainsi la mise à pied de 422 personnes à travers le Québec. Et la fermeture des magasins est prévue pour le 7 juin prochain. M. le Président, est-ce que le ministre du Travail peut nous dire ce qu'il a fait depuis cette date, depuis qu'on a annoncé cette fermeture, pour éviter cette fermeture et éviter la mise à pied de 422 personnes partout, dans toutes les régions du Québec?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, concernant les informations sur le cas que soulève le député de Kamouraska-Témiscouata, les dernières nouvelles à ce sujet ne me sont pas parvenues ce matin. Ce que je donnerais comme information, ce n'est pas des informations très précises, alors je prends acte de la question et je reviendrai la semaine prochaine.

Le Président: Ça va. M. le député de Verdun.


Dépôt d'une pétition concernant les compressions budgétaires dans le réseau collégial

M. Gautrin: M. le Président, enfin! Merci, M. le Président.

Alors, M. le Président, le 29 avril dernier, la ministre de l'Éducation a reçu une pétition de plus de 20 000 personnes qui se plaignaient des compressions dans les cégeps – je vais vous la lire, si vous le voulez – qui disaient:

«Considérant que le réseau collégial a assumé plus que sa part de rationalisation avec des compressions budgétaires de 200 000 000 $ depuis 1982, dont 136 000 000 $ depuis deux ans;

«Considérant que toutes les catégories de personnel ont vu leur tâche augmenter et que les étudiants et étudiantes n'ont plus accès aux services auxquels ils ont droit;

«Considérant la hausse des frais exigés des étudiants et étudiantes au moment où le régime des prêts et bourses devient de moins en moins généreux;

«Considérant que la qualité de la formation offerte aux élèves est essentielle pour la réussite;»

Et la pétition demandait:

«Nous, soussignés – et soussignons – demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès de la ministre de l'Éducation et du président du Conseil du trésor afin qu'ils renoncent aux compressions budgétaires et améliorent la situation dans les cégeps.»

Alors, ma question à la ministre est très simple: Quand et quels moyens va-t-elle faire pour que cette pétition soit déposée à l'Assemblée nationale?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, écoutez, M. le Président, je n'ai jamais empêché quelque pétition de se déposer. On se souviendra d'ailleurs que j'en avais eu plutôt un grand nombre, l'année dernière, concernant l'implantation de la maternelle à temps plein, même tous les jours. Alors, je comprends un peu difficilement la question de mon collègue. Je n'ai donc pas empêché le dépôt de pétitions.

Par ailleurs, il sait, d'autre part, que nous avons procédé à des ententes sur l'ensemble des efforts budgétaires qui sont demandés à nos institutions et que nous respecterons les objectifs qui nous ont été fixés, tout en respectant la qualité des services offerts aux jeunes et aux adultes qui fréquentent nos cégeps, M. le Président. Merci.

Le Président: Je regrette, mais la période des questions et des réponses orales est terminée.

Alors, il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés.

Est-ce qu'il y a des motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Sinon, nous allons aller aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de la culture procédera à l'étude du projet de loi n° 423, Loi modifiant la Loi sur l'immigration au Québec et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Président: Très bien. Alors, aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous rappelle que l'interpellation prévue pour demain, le vendredi 22 mai 1998, portera sur le sujet suivant: La gestion du tourisme au Québec. À ce moment-là, M. le député de LaFontaine s'adressera au ministre délégué au Tourisme.


Affaires du jour

S'il n'y a pas d'autres renseignements sur les travaux de l'Assemblée, nous allons passer aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 21.


Projet de loi n° 438


Adoption du principe

Le Président: Alors, à cet article, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance. Alors, qui est le prochain intervenant? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Avant que vous ne reconnaissiez le ministre de la Santé, quand...

Des voix: ...

Le Président: Juste... Je vais demander aux collègues qui doivent travailler à l'extérieur du salon bleu de quitter l'enceinte maintenant.

Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Avant que vous ne reconnaissiez le ministre de la Santé sur ce projet de loi, en vertu des dispositions des articles 66 et suivants de notre règlement, je souhaiterais, au nom de tous les parlementaires, proposer une motion d'atteinte aux droits et aux privilèges de l'Assemblée nationale, compte tenu de l'attitude du ministre, du ministère et des fonctionnaires qui entourent ce dossier, dans cet important dossier qui touche le sang contaminé.

Le Président: Alors, si vous le permettez, à ce moment-ci, compte tenu de ce que vous venez d'indiquer, puisque, comme vous le savez, M. le leader de l'opposition officielle, le président doit quitter à ce moment-ci, je vais céder le fauteuil à un vice-président pour qu'il puisse entendre la suite des choses, et je pense que ce sera à lui de procéder. Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 9)

(Reprise à 15 h 21)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, nous reprenons nos travaux aux affaires du jour. Et je crois qu'on avait appelé le...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vais vérifier rapidement. Alors, il nous manque quelques députés pour avoir quorum. Alors, je donne quelques secondes. Si on ne l'a pas, on va suspendre encore quelques minutes. Alors, j'inviterais les préposés à faire en sorte que nous puissions avoir quorum dans les secondes qui suivent.

Alors, nous avons quorum et nous pouvons poursuivre. Je crois qu'on avait... Est-ce qu'on avait indiqué l'article au menu? Oui? L'article 14?

M. Brassard: Je vous ai demandé, M. le Président, de prendre en considération l'article 21 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 21, le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance.

Alors, je céderai la parole à M. le ministre. M. le leader de l'opposition, vous voulez intervenir sur...


Question de privilège concernant des gestes posés par le ministre de la Santé et des Services sociaux présumant de l'adoption du projet de loi n° 438


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Simplement, à ce moment-ci, une question de règlement qui découle d'une décision – et je vous l'indique tout de suite pour que ce soit plus facile sur la compréhension comme telle – rendue par le président Jean-Pierre Saintonge le 25 avril 1990, décision qui est résumée comme suit:

«Si un ministre se prévalait sciemment de dispositions législatives encore à l'étude à l'Assemblée nationale, il pourrait faire l'objet d'une accusation pour outrage au Parlement et le président pourrait en arriver à la conclusion que, prima facie, il y a eu violation des droits de l'Assemblée nationale. Dans le cas soumis par le leader de l'opposition officielle – à l'époque – les faits ne permettent pas, prima facie, d'en arriver à la conclusion que le ministre s'est prévalu des dispositions d'un projet de loi à l'étude à l'Assemblée nationale. En effet, la Société en question ne tire aucunement son existence d'un tel projet de loi et est plutôt créée en vertu de la partie III de la Loi sur les compagnies.»

M. le Président, le président Saintonge ajoutait, dans le texte complet de sa décision, que, dans chaque cas, il s'agissait d'un cas d'espèce et que la présidence se devait d'apprécier si les gestes posés allaient à l'encontre ou violaient les privilèges et les droits des membres de l'Assemblée nationale.

Dans le cas qui nous concerne, nous sommes devant un projet de loi, nous débutons l'étude du projet de loi en deuxième lecture. Je vous soumets très respectueusement, M. le Président, que beaucoup de gestes ont été posés, certains gestes sont les mêmes ou de même nature que les gestes où la présidence avait, à l'époque, rejeté la question de droits et de privilèges soumise par le leader de l'opposition officielle. D'autres s'ajoutent à ces gestes-là et font en sorte qu'aujourd'hui le ministre de la Santé et des Services sociaux a agi complètement et totalement, dans ce dossier-là, comme si l'Assemblée nationale lui avait déjà donné son aval en adoptant un projet de loi.

Les éléments de fait, M. le Président, qui soutiennent cette argumentation sont les suivants. Les lettres patentes d'Héma-Québec ont été émises le 26 mars 1998 pour créer la société Héma-Québec, avant même que le projet de loi soit soumis à l'Assemblée nationale du Québec. Si vous mettez en parallèle l'émission par l'Inspecteur général des institutions financières avec l'article 1 de la loi, on n'a pas attendu l'adoption par l'Assemblée nationale de l'article 1 de la loi, qui se lit comme suit: «Héma-Québec, créée le 26 mars 1998 par lettres patentes émises en vertu de la partie III de la Loi sur les compagnies, continue son existence en vertu des dispositions de la présente loi.»

Est-ce que cet article-là remplace les lettres patentes? Est-ce que le ministre, comme tel, n'a pas tenté de créer Héma-Québec sur le plan légal avant même que l'Assemblée nationale du Québec ne l'autorise à fonctionner en vertu d'une loi à cet effet? C'est la première question que je vous adresse, M. le Président.

La deuxième question qui nous préoccupe relève des dispositions de l'article 3 du projet de loi, et plus particulièrement – et non exclusivement – des alinéas 1°, 2° et 6°...

Une voix: Non, 10°, 11°.

M. Paradis: ...excusez, 10° et 11° du projet de loi. Ces alinéas se lisent comme suit:

«Héma-Québec a pour mission d'assurer aux établissements de santé et de services sociaux du Québec et à la population un approvisionnement suffisant en sang et en produits et constituants sanguins[...]:

«10° à maintenir des liens de collaboration et d'échanges d'informations avec les autres organisations analogues, au Canada et à l'étranger, de manière à connaître et à échanger l'expertise;

«11° à collaborer étroitement avec les intervenants du service d'approvisionnement canadien de façon à ce que chacun puisse se procurer les services et produits de l'autre en cas de besoin.»

À l'occasion d'une commission parlementaire tenue à l'Assemblée nationale le lundi 4 mai 1998, le ministre de la Santé nous avouait carrément que c'était déjà en fonction, que les ententes étaient déjà en négociations, malgré le fait que le projet de loi n'avait pas été adopté par l'Assemblée nationale du Québec. Je fais quelques citations des propos que le ministre a tenus à cette commission parlementaire. La première se lit comme suit: «Mais il y a un consensus largement partagé sur la mise en place d'Héma-Québec, qui est présentement une réalité, qui se met en place, et, avec les autres provinces canadiennes, il y a un accord d'établi là-dessus.» Vous comprenez, M. le Président? Il demande à l'Assemblée nationale d'adopter un projet de loi pour lui donner la possibilité de faire un accord, et il a déjà conclu l'accord avec les autres provinces canadiennes!

Deuxième citation à partir de la commission parlementaire, M. le Président: «Cette décision du Québec a été acceptée, et l'évolution a été faite en étroite collaboration et en liaison avec les autres provinces.» Avant de recevoir la permission de l'Assemblée nationale du Québec de s'exécuter, le ministre nous dit carrément que c'est réglé avec les autres provinces canadiennes.

Une troisième citation de la même commission parlementaire se lit comme suit, parce qu'il a parlé beaucoup en commission parlementaire, le ministre: «Oui, oui, on est en discussion, à moins qu'on pense qu'il y a des jeux d'ambassades où des crocs-en-jambe de protocole viennent nous compliquer la vie. Si ce n'est pas la situation, moi, ce qu'on me dit, c'est que les discussions sont en marche en même temps, conjointement avec les services canadiens, pour que les licences nécessaires soient émises», etc. Il n'a pas attendu d'obtenir l'autorisation de l'Assemblée nationale du Québec pour procéder dans ce sens.

M. le Président, également d'autres citations au moment de la tenue de cette même commission parlementaire, et, cette fois-ci, ces dispositions vont dans le sens d'avoir opéré sans avoir l'adoption de l'article 4 du projet de loi. L'article 4 stipule qu'«Héma-Québec peut, pour l'exercice de ses attributions, conclure, conformément à la loi, une entente avec un gouvernement autre que celui du Québec, l'un de ses ministères, une organisation internationale ou un organisme de ce gouvernement ou de cette organisation.

(15 h 30)

«Elle peut également recevoir des dons, legs, subventions ou autres contributions pourvu que les conditions qui peuvent y être rattachées soient compatibles avec l'exercice de ses attributions.»

M. le Président, le ministre déclarait en commission parlementaire qu'il s'était déjà exécuté sans l'autorisation de l'Assemblée nationale. Le ministre parlait en ces termes. Et on a convenu, lors de la dernière conférence fédérale-provinciale, à Toronto, où ça a été, à part les discussions sur le programme d'indemnisation, un autre point majeur à l'ordre du jour, on a convenu que les deux organisations travailleraient ensemble, à tel point qu'il y a une résolution formelle de la Conférence des ministres provinciaux et territoriaux de la Santé à l'effet que le Service canadien du sang désigne un membre sur son conseil d'administration pour siéger sur le conseil d'administration d'Héma-Québec, et vice versa. Et le président...

M. Brassard: M. le Président, une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du gouvernement pour un point de règlement.

M. Brassard: Je voudrais bien être sûr de quoi on parle. Je voudrais savoir, d'abord, en vertu de quel article du règlement le leader de l'opposition soulève cette question, en vertu de quel article. Là, il est en train de faire une plaidoirie, de plaider comme si l'invocation d'un article du règlement qu'on ne connaît pas avait été jugée par vous pleinement recevable. Et il est en train de faire la plaidoirie. Alors, d'abord, en vertu de quel article du règlement il invoque cette question? À partir de là, je pense qu'on aura des décisions à prendre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader, j'aimerais que vous précisiez un peu, parce que j'attendais toujours que vous arriviez à préciser un tout petit peu. Est-ce que c'est un appel à une question de droit et de privilège?

M. Paradis: M. le Président, le leader adjoint du gouvernement est tardif, là, dans sa demande. On ne lui en tiendra pas rigueur. C'est en vertu des articles 66 et suivants du règlement de l'Assemblée nationale, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vous savez qu'en vertu des articles 66 et suivants, il est question de signaler une violation de droit ou de privilège. L'article 69 est très clair: «Le député qui constate une violation de droit ou de privilège peut la signaler tout de suite après le fait.» Sinon, l'autre moyen, c'est de le faire par écrit, un avis par écrit adressé au président de l'Assemblée nationale, au moins une heure avant la période des affaires courantes, et nous pouvons y revenir dans le cadre des affaires courantes. Et ça, vous avez ça à l'article. Donc, je ne vois pas ici que ce soit immédiatement après le fait.

Et, pour aborder cette question de privilège qui est peut-être fondée, là – je ne peux pas en préjuger – il faudrait le faire par avis écrit au président de l'Assemblée nationale, et ça pourrait revenir, si vous voulez, dans le cadre des affaires courantes. Alors, brièvement, sur ça; s'il y a d'autre chose, ajoutez brièvement.


Débat sur la recevabilité


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Techniquement, vous avez raison, sauf que le projet de loi a été appelé, et je ne blâme pas... le leader du gouvernement est responsable de l'ordre dans lequel il appelle les travaux. Ça a changé au moins quatre fois au cours de l'avant-midi, si je peux m'exprimer ainsi, et je n'en tiens rigueur à personne.

Maintenant, vous avez, vous, comme président de l'Assemblée nationale, au moment où on s'apprête à étudier un projet de loi, une responsabilité à exercer, qui est la vôtre, et vous avez une marge de discrétion, M. le Président, dans l'exercice de vos pouvoirs.

Je vous réfère à ce moment-ci à une décision rendue le 12 décembre 1989 par, encore une fois, le président de l'époque, M. Saintonge. Et je résume strictement la décision: «Les pouvoirs octroyés au président de l'Assemblée nationale ne lui permettent pas d'intervenir dans un cadre qui n'est pas conforme aux règles de procédure. Puisque le leader de l'opposition officielle n'a soulevé aucune question de règlement ou de privilège, le président pourrait simplement déclarer irrecevable sa requête qui n'est qualifiée nulle part dans les règles de procédure. Considérant l'importance de la question, le président décide de sa propre initiative d'examiner la question soulevée par le leader de l'opposition.»

Nous sommes dans une situation, M. le Président, où si, à ce moment-ci, vous n'entendez pas la question de droit et de privilège concernant les actes du ministre de la Santé, dans ces circonstances qui – je vous le soumets, là – prima facie portent atteinte aux droits et privilèges de l'Assemblée nationale, que l'on procède à l'adoption du projet de loi, nous serons dans une situation où il sera impossible de faire respecter les droits et les privilèges de l'Assemblée nationale.

Et votre première obligation – je vous le soumets très respectueusement, M. le Président – c'est de vous assurer que ces droits et privilèges sont respectés. Maintenant, il ne s'agit pas des droits et privilèges de l'opposition. Je fais appel également au leader adjoint du gouvernement. Il s'agit des droits et privilèges de tous les députés de l'Assemblé nationale du Québec. Je ne plaide pas contre le projet de loi du ministre comme tel; je plaide quant à des agissements qui ont été faits sans que la loi soit adoptée, sans que l'Assemblée nationale du Québec autorise le ministre à procéder. Si vous nous demandez, à ce moment-là, de vous donner un avis écrit pour la période de mardi, moi, je demanderais, à ce moment-là, que vous demandiez au leader adjoint du gouvernement de ne pas appeler cet après-midi avant d'entendre la question de droit et privilège, sinon ça deviendrait inutile.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader du gouvernement, brièvement.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, d'abord, je pense que vous avez invoqué les bons articles et la bonne procédure à suivre et je constate que, à tout le moins sur le plan purement réglementaire, le leader de l'opposition vous donne raison, il faut que ces dispositions-là soient invoquées immédiatement après le fait. Or, ce projet de loi, je vous le signale, a été déposé le 12 mai 1998, alors ça fait déjà plusieurs jours. Certains faits évoqués – puisque, tout à l'heure, le leader de l'opposition avait commencé, d'une certaine façon, à plaider – dataient de mars, entre autres les lettres patentes qui créaient la société Héma-Québec, et la loi, si elle est adoptée, va évidemment se substituer, après coup, aux lettres patentes. Mais, pour le moment, Héma-Québec existe en vertu de lettres patentes qui datent de mars 1998, donc un fait déjà assez ancien, pourrait-on dire, relativement en tout cas.

Je vous signale d'ailleurs que, en cette matière, en matière d'articles 66 et suivants, l'ancienneté n'est pas très longue. En 1995, on a rejeté immédiatement une demande portant sur une violation de droit et privilège – ça concernait la députée de Sherbrooke. La demande a été faite par le leader d'alors, le député de Joliette, et elle a été refusée même si le fait datait de cinq minutes. Cinq minutes, M. le Président, et elle avait été refusée. Trop tard, a dit le président d'alors. Alors donc, là, on est devant des faits – 12 mai 1998, mars 1998 pour ce qui est des lettres patentes – manifestement, qui ont eu lieu il y a déjà plusieurs jours. Donc, le «tout de suite après le fait» ne s'applique pas, évidemment.

Ceci étant dit, je pense que la procédure est tout indiquée, c'est l'avis au président. Et, même si on fait le débat sur l'adoption de principe, le projet de loi n'est pas adopté pour autant, là, il y a encore d'autres étapes à venir, la commission parlementaire, l'adoption proprement dite. Alors, le projet de loi va continuer d'être soumis à l'Assemblée nationale, d'être, je dirais, la propriété de l'Assemblée nationale, puisqu'il n'aura pas été encore adopté – loin d'être adopté – même si on amorce cet après-midi l'adoption de principe, le débat sur le principe. Alors donc, dans ces circonstances-là, M. le Président, je pense que vous devez de dire au leader de l'opposition que l'article 69 doit s'appliquer tel quel, sans plus, et qu'il a un avis à vous remettre à la prochaine séance.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très brièvement, parce que je crois qu'on a fait le tour de la question.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, très brièvement, M. le Président, sur l'argument «immédiatement après le fait». Immédiatement, quand le leader a appelé le projet de loi, je me suis levé. Je n'ai pas attendu cinq minutes, je me suis levé immédiatement pour que l'Assemblée nationale ne débatte pas de ce projet de loi là sans que la présidence ait eu l'occasion de trancher la question de droit et privilège. Et, je le répète, M. le Président, ce sont les droits et privilèges de tous les membres de l'Assemblée. À ce moment-ci, moi, je pense que la question, elle va être soulevée soit immédiatement si vous décidez immédiatement, soit mardi si vous décidez, M. le Président, que c'est mardi que ça va être fait.

Moi, je tente simplement de soulever une question qui est, à notre avis, fondée: défendre les droits et privilèges des membres de l'Assemblée nationale. Et, à cet effet-là, peut-être que, avec la collaboration du leader du gouvernement, à moins qu'il veuille vous obliger à décider, si on s'entend que le projet de loi ne sera pas rappelé avant mardi, moi, je n'ai pas d'objection, je n'insisterai pas pour être entendu à ce moment-ci et je vais même m'engager à communiquer le dossier au complet qui est en notre possession aux ministériels, parce que je ne tente pas, à ce moment-ci, d'empêcher un projet de loi d'évoluer. Je tente, comme leader de l'opposition officielle, de protéger les droits des parlementaires. Et, si le leader adjoint peut convenir de cette procédure-là, moi, je suis ouvert à cette procédure-là. Sinon, M. le Président, il vous appartient de trancher.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, ça fait assez longtemps que je siège en cette Chambre pour faire preuve d'un respect scrupuleux des droits et des privilèges des membres de cette Chambre. Mais je ne pense pas que j'aie entendu plaider, commencer à plaider... Parce qu'il a parlé déjà pendant plusieurs minutes sur la question même, la question de fond, et il ne m'apparaissait pas qu'il y avait là une violation. Entre autres, son argumentation concernant l'article 1, l'article portant sur les lettres patentes, ne m'apparaissait pas justifiée. Mais, enfin, on verra, puis vous aurez à prendre une décision à cet égard.

(15 h 40)

Mais, encore une fois, si on en était à l'adoption, à la dernière étape du processus législatif, et qu'une fois cette étape franchie, cet après-midi, le projet de loi avait complété son cheminement, là je pense que la demande du leader de l'opposition pourrait apparaître légitime. Mais ce n'est pas le cas, on est à la première étape, l'adoption de principe. Et, encore une fois, le fait qu'il invoque, quand il dit «immédiatement après le fait», c'est-à-dire considérant le fait que je vous ai demandé de prendre en considération l'article 21 du feuilleton, il considère que c'est ça, le fait. Enfin, beau sujet de débat. Moi, je pense plutôt que le fait, c'est le 12 mai 1998. C'est ça, le fait, au moment où le ministre de la Santé s'est levé en cette Chambre et a déposé le projet de loi. C'est ça, le fait, et il date du 12 mai.

Alors donc, dans ces circonstances, M. le Président, moi, je vous demande d'appliquer les articles 66 et suivants et qu'on amorce le débat sur le principe. Vous aurez le temps, à ce moment-là, d'entendre, à l'occasion d'autres séances, les arguments de l'opposition sur une hypothétique violation des droits et privilèges.


Décision du président sur la recevabilité

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, pour ce qui est de la première partie, je maintiens l'interprétation de 69 que j'ai mentionnée tantôt. C'est un fait connu, et il y aurait eu des possibilités d'envoyer un avis au président avant les affaires courantes d'aujourd'hui et d'hier, depuis quelque temps. Parce que l'intention du gouvernement de présenter le projet était manifeste dès le dépôt et on a même accepté en cette Chambre d'être saisi du projet de loi. Vous savez, quand on fait une présentation, et vous avez dit: Oui, j'accepte d'être saisi du projet de loi, donc on reconnaissait très bien qu'il y avait une législation qui s'en venait en référence à Héma-Québec, là. Donc, ce n'est pas l'appel de l'étude du principe qui nous a mis en connaissance du fait.

Et, pour le reste, bien, ça, que voulez-vous, je ne peux pas imposer, moi, quoi que ce soit, le reporter. On a appelé... Je laisse au leader du gouvernement et au gouvernement de décider s'ils veulent poursuivre le principe aujourd'hui, parce que, effectivement, ce n'est pas l'adoption du projet de loi, c'est du principe. Et on aura le temps de voir à débattre cette question de droit et privilège en temps et lieu.

Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, je vous cède la parole.


Projet de loi n° 438


Reprise du débat sur l'adoption du principe


M. Jean Rochon

M. Rochon: Bon. Alors, M. le Président, je voudrais présenter, pour l'adoption de principe, le projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance.

C'est bon de se rappeler le contexte historique qui nous a amenés à ces modifications et ces développements que l'on réalise présentement dans notre système intégré de distribution du sang et des produits sanguins au Québec. Auparavant, jusqu'en 1995, il existait une agence canadienne qui était formée des ministres de la santé, qui voyait à assumer les coûts de la distribution du sang et des produits du sang, et la Croix-Rouge canadienne, qui, elle, avait la responsabilité, comme organisation sans but lucratif, de la collecte du sang et de la distribution du sang dans les hôpitaux des différentes provinces du Canada.

Pour différentes raisons – il serait un peu long de revenir à ces détails – l'ensemble des provinces avait convenu que la situation qui existait était insatisfaisante à plusieurs égards. Il y a surtout eu, vous rappellerez, l'enquête Krever qui a fait ressortir beaucoup de difficultés et de vices de système dans l'organisation du sang dans l'ensemble du Canada et des différentes provinces. Pour améliorer la situation, les différentes provinces ont convenu, en 1995, de modifier, de remodeler cette agence pour tenter une autre fois un effort pour faire mieux fonctionner une agence qui serait formée de l'ensemble des ministres de la santé et de mieux resserrer les liens et la collaboration avec la Croix-Rouge.

La même année, en 1995, le juge Krever a rendu une première partie de son rapport, un rapport préliminaire mais qui faisait une bonne série de recommandations sur tout l'aspect de l'organisation du sang. Le rapport final du juge Krever, qui nous est arrivé au début de l'automne 1997, visait plus les responsabilités et les recommandations du juge quant aux victimes, aux gens qui avaient été contaminés par les produits du sang. On se rappellera que cette deuxième partie du rapport a donné lieu à un certain nombre de décisions, et il y a certains débats qui continuent encore actuellement quant à l'indemnisation des gens qui ont contracté l'hépatite C à cause des produits du sang, tandis qu'il y a déjà eu des programmes de compensation qui ont été convenus avec le gouvernement du Canada pour les gens qui ont eu une contamination du virus du sida.

Le premier rapport du juge Krever faisait assez de propositions sur ce que devrait être l'organisation du sang que les ministres de la santé ont dû conclure, après une année d'expérience de la nouvelle agence, à un échec de cette formule et à une incapacité totale de la faire fonctionner en tenant compte des recommandations du juge Krever.

Ça nous a amenés au début de l'année 1996, et on a décidé à ce moment-là, au Québec, de voir comment on pourrait procéder pour s'assurer que la population pourrait avoir accès à des produits du sang qui seraient de qualité, qui seraient sécures et en quantité suffisante. On a confié à un comité d'experts de médecins spécialistes en hématologie et de spécialistes de la médecine transfusionnelle, des gens qui sont impliqués dans l'organisation des services de santé, et qui s'est appelé le Comité québécois sur l'approvisionnement, la gestion et la distribution du sang... Le Comité a fait un travail assez en profondeur, a rencontré et a consulté, sur le territoire du Québec et dans tout le réseau de la santé, tous les gens qui sont impliqués d'une façon ou d'une autre avec le sang, et a remis un rapport, le 27 novembre 1996, qui nous faisait des propositions quant à l'organisation du sang au Québec.

Dès le début des travaux de ce comité-là, j'avais pris le soin de prévenir mes collègues, les ministres des autres provinces du Canada, que, dans les efforts qu'ils faisaient conjointement pour trouver une autre façon de réorganiser l'approvisionnement en sang, le Québec s'associerait à ces efforts mais gardait l'option ouverte, quant à lui, de voir comment, au Québec, on aurait l'organisation du sang, comment on s'arrimerait avec les autres provinces sur la base d'une étude complémentaire que l'on faisait, qui était notre Comité québécois sur l'approvisionnement, la gestion et la distribution du sang.

Quand ce rapport a été proposé, on a décidé d'en suivre les recommandations, parce que, en fait, les recommandations du Comité faisaient une intégration de ce qu'avaient été les recommandations du juge Krever et nous permettaient d'aller même plus loin dans l'organisation des services du sang pour assurer qu'on aurait vraiment un système qui serait le système de l'avenir, réparant les erreurs du passé et profitant d'un système qui serait en position pour éviter, à l'avenir non seulement les erreurs du passé, mais d'autres difficultés qui pourraient se présenter.

(15 h 50)

Alors, pour comprendre ce système, c'est assez complexe, mais je pense qu'on peut simplifier en se rappelant qu'il y a essentiellement trois modules, trois éléments dans le système qui est proposé pour le Québec. Un voit à assurer la distribution du sang et la qualité du produit, c'est-à-dire la gestion, l'utilisation optimale du sang et des différents produits du sang, parce qu'il y a beaucoup de conditions présentement pour lesquelles on donnait des transfusions sanguines, et, de plus en plus, on utilise différents produits du sang, et on peut prévoir que dans l'avenir... C'est, là aussi, un secteur où le développement technologique amène des approches très, très différentes par rapport à ce qu'on a connu.

Alors, il y a donc besoin – et c'étaient les recommandations du comité québécois – de responsabiliser les hôpitaux parce que les transfusions sanguines ou l'administration des produits du sang, c'est essentiellement dans les hôpitaux que ça se fait. Auparavant, les hôpitaux recevaient le sang et le donnaient directement aux patients sans en faire une gestion clinique médicale, comme il est fait pour tous les autres services qui sont donnés aux patients. Alors, on a d'abord un premier module qui a été la création; et ça, c'est en cours présentement. Ça s'est organisé au cours de la dernière année.

Il y a une vingtaine d'hôpitaux, donc il y a au moins un hôpital dans chacune des régions du Québec, l'hôpital régional. Dans des grandes régions plus populeuses, il y a quelques hôpitaux qui assument la responsabilité d'avoir mis sur pied des comités de médecine transfusionnelle où des médecins spécialistes en hématologie et en médecine transfusionnelle assument maintenant une responsabilité de gérer des protocoles cliniques pour s'assurer qu'on fasse une utilisation la plus adéquate possible, que les risques cliniques soient contrôlés et que le patient puisse avoir toute la sécurité et la garantie qu'il aura ce dont il a besoin le plus – le sang ou un produit du sang – et qu'il aura un produit de qualité et tout à fait sécure.

Ces hôpitaux de médecine transfusionnelle sont reliés à l'ensemble des autres hôpitaux où peuvent se faire des transfusions, et, à l'intérieur de chaque région, on est maintenant assuré, à mesure que les hôpitaux ont monté ce système, que, contrairement à ce qu'il y avait auparavant quand on ne faisait qu'administrer directement ce qui était reçu de la Croix-Rouge, il y a maintenant une gestion clinique, comme on fait pour le médicament, comme on fait pour tout autre traitement qui est fait à l'hôpital, que les médecins collectivement assument la responsabilité au sein de l'établissement, et que l'hôpital, par son conseil d'administration, assume la responsabilité d'une bonne gestion du sang.

Et, pour donner aux hôpitaux les moyens d'assumer cette responsabilité, les budgets que le ministère utilisait auparavant pour payer l'Agence canadienne qui existait sont transférés aux hôpitaux qui, eux-mêmes, vont transiger pour obtenir les produits qu'il faut grâce à un système d'achats en commun qui sera assuré complètement en dehors du ministère et du gouvernement, rejoignant par là une des recommandations importantes du rapport Krever d'avoir une gestion du sang qui soit complètement détachée du gouvernement et où aucune décision de nature politique ou budgétaire dans l'ensemble du gouvernement pourrait risquer ou mettre qui que ce soit en position de conflit d'intérêt. Donc, premier module, le réseau des hôpitaux dans chacune des régions pour ce qui regarde la personne qui reçoit du sang ou un produit du sang.

Deuxième module, celui – et c'est la loi qui est présentée aujourd'hui – d'avoir un organisme responsable de fournir le sang, d'en assurer la collecte, le traitement du sang ainsi que des produits et de les distribuer aux hôpitaux et d'être responsable de la qualité du produit au moment où on le reçoit du donneur et où on le prépare, on le traite pour qu'il puisse être remis aux hôpitaux. Pour ça, Québec est dans une situation assez privilégiée dans un sens, parce qu'il existe à Montréal le centre de la Croix-Rouge canadienne pour tout l'Est du Québec avec une équipe très, très compétente.

Et c'est important de se rappeler que, dans toutes les difficultés qu'il y a eu autour du sang, dans toutes les recommandations et les conclusions de la commission Krever, la compétence professionnelle des personnes qui travaillent pour la Croix-Rouge que l'on voit quand on va donner notre sang dans une clinique n'a jamais été mise en cause. Le juge a vraiment pu identifier des problèmes de système. C'était un système qui ne clarifiait pas assez les missions, les responsabilités réciproques et ne mettait pas les moyens à la bonne place. Et ça a été un système où des décisions qui devaient se prendre ne se sont pas prises ou ne se sont pas prises en temps utile pour éviter les problèmes qu'on a eus avec la santé.

Alors, le personnel qui est dans le centre de la Croix-Rouge pour l'Est du Québec situé à Montréal... C'est un des centres les mieux organisés, une des équipes les plus compétentes qu'a la Croix-Rouge et qui offrait donc la possibilité au Québec d'acquérir les acquis de la Croix-Rouge éventuellement et de faire de cette unité qui existe déjà, de lui permettre de continuer le travail qu'elle fait pour le Québec, pour le reste de l'Est du Canada – ce sera à voir avec les autres provinces – mais de continuer à faire ce travail-là en lien très étroit avec les hôpitaux plutôt que de devenir tout simplement intégré dans une organisation pancanadienne avec une administration ailleurs qui n'aurait pas d'emprise – par une organisation pancanadienne – sur le système hospitalier qui, lui, doit assumer la responsabilité de donner le sang aux patients. Alors, deuxième module, l'organisation issue de ce qu'était la Croix-Rouge auparavant, qui assume la responsabilité de la collecte, du traitement du sang.

On a voulu rajouter, pour les fins de sécurité du produit, un autre module à ce système-là, qui s'appelle le Comité d'hémovigilance et qui est le deuxième objet de cette loi. Si on a le producteur du sang et de ses produits – la partie clinique pour les donneurs – c'est pour bien s'assurer que, dans l'avenir, s'il y a d'autres problèmes qui peuvent se présenter, si des gens qui reçoivent des transfusions ont des réactions différentes, on ne s'en remette pas, comme c'était le cas dans le passé, simplement à l'observation qui peut se faire dans chacun des hôpitaux et qui peut faire que ça peut prendre, comme c'était dans le passé, assez de temps avant qu'on s'aperçoive, à un moment donné, qu'il y a quelque chose de peut-être anormal qui commence à se développer.

Alors, pour ça, il faut un système intégré d'information et un comité d'hémovigilance qui ait vraiment une fonction de santé publique, une fonction d'analyse épidémiologique pour faire un suivi, un monitoring régulier de ce qui se passe dans l'ensemble du réseau hospitalier et que le système d'information permette de colliger toute l'information sur comment ça se passe cliniquement compte tenu des dossiers qui sont tenus par les médecins quand quelqu'un reçoit du sang, quelles complications peuvent survenir, comment on les a traitées et ce qui s'est passé. De sorte que, si quoi que ce soit se développe dans l'avenir, très, très tôt on en verra, sur une base épidémiologique, le profil, et ça permettra d'intervenir auprès de l'hôpital ou de la région qui est impliquée, d'intervenir, au besoin, avec le producteur et de tout de suite apporter les corrections nécessaires. Alors, on voit donc que les trois grandes missions – de production, de distribution aux patients et de surveillance épidémiologique du système – deviennent très bien identifiées, confiées à trois organismes qui auront les moyens de remplir ces fonctions-là.

Et on a bien convenu deux choses. Parce que, pendant tout ce temps-là, on a maintenu le contact, comme je vous le disais tout à l'heure, avec l'ensemble des autres provinces pour voir si l'organisation du système canadien pour l'ensemble des provinces offrirait un système mieux intégré et plus fonctionnel pour le Québec. Les travaux qui ont été faits en excellente collaboration avec les autres provinces nous ont amenés à conclure qu'il était préférable pour le Québec d'avoir notre organisation, mais d'établir un lien d'affaires avec l'organisation canadienne pour les autres provinces, de sorte que l'on puisse partager l'information, comme on le fait présentement avec les autres provinces du Canada pour le contrôle des maladies infectieuses, par exemple, qu'on puisse avoir un partage d'information avec les autres provinces canadiennes, avec d'autres pays éventuellement, de sorte que les connaissances continuent à se développer parce que, comme je le disais tout à l'heure, les technologies et les façons d'utiliser le sang et ses produits évoluent rapidement.

(16 heures)

Donc, on ne s'isole pas en créant le système québécois; au contraire, on assume une responsabilité localement et on établit un lien fonctionnel avec la Société canadienne du sang. Ce lien existera grâce à un partage d'information. Les logiciels de base seront les mêmes – on en a déjà convenu avec les autres provinces – et à la suggestion même de collègues, ministres d'autres provinces – et c'est ce à quoi on a fait référence tout à l'heure – il y a une résolution qui a été adoptée par la conférence des ministres des provinces et des territoires pour que les deux organisations, celle du Québec et celle pour les autres provinces du Canada, s'échangent, même au niveau de leur conseil d'administration, deux membres.

Alors, le président d'Héma-Québec – qui existe déjà maintenant comme une organisation sans but lucratif en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies – siège déjà, il a déjà participé à des réunions de la Société canadienne, et la Société canadienne désigne, elle aussi, un membre sur le conseil d'administration d'Héma-Québec. Donc, on a un lien qui est créé, qui est assuré, de sorte qu'on peut aussi permettre et garantir les échanges avec les autres provinces, pas seulement d'information mais de produits.

S'il y a des pénuries ailleurs dans des provinces et que, nous, on sait qu'au Québec, en ce qui regarde le sang comme tel, on a, vu la population importante du Québec, suffisamment de production, même au-delà de nos besoins, en temps normal, on peut donc aider d'autres provinces s'il manque du sang. Mais on n'est pas sans risque de pénurie, nous aussi, dans certaines périodes, alors on a déjà convenu des protocoles pour que le sang et ses dérivés puissent être échangés indépendamment des frontières administratives.

Un autre élément qui nous garde en contact avec le monde est celui des standards, des normes de qualité qui présentement sont celles qui sont édictées par le Bureau des produits biologiques et radiopharmacologiques, et ça, c'est une fonction, dans le système qu'on a au Canada présentement, qui est une fonction du gouvernement fédéral, d'assurer la sécurité des médicaments, des produits comme le sang ou des constituants sanguins. Et on a déjà, dès le début de ce processus-là, établi très clairement que les normes et les standards qui seront appliqués au Québec sont ceux du Bureau des produits biologiques. D'ailleurs, Héma-Québec, avec son existence légale qui est la sienne présentement, est déjà en travail avec la Société canadienne et le Bureau des normes et des standards pour s'assurer que le permis que détenait la Croix-Rouge canadienne soit transmis aux deux nouvelles organisations. Et, vérification faite encore il y a quelques jours, on me dit que ça se passe très, très bien présentement et qu'on peut être confiant que, pour le 1er septembre, quand la Croix-Rouge cessera ses opérations, on sera prêts, au Québec – il faudra que ça soit le cas aussi pour la Société canadienne – à prendre la relève et à assurer le fonctionnement pour l'ensemble du Québec et pour les gens qui ont besoin de sang.

Alors, voilà donc comment on en est arrivés à cette décision, en comparant très bien les avantages et les inconvénients des deux formules possibles, et je pense très sincèrement, et ça, avec l'appui de tous les spécialistes au Québec, de tous les experts dans le domaine de la médecine transfusionnelle, de tout le réseau hospitalier, qu'on peut assurer aux Québécois qu'on a là un système complet qui s'occupe du donneur et du receveur et un système qui assure une surveillance de santé publique épidémiologique de ce qui se passe, de sorte que la quantité soit assurée, que la qualité soit là et surtout que la sécurité du produit soit garantie, aussi, de façon absolue.

Comme deuxième partie de ma présentation, je vais peut-être décrire un peu comment va fonctionner Héma-Québec, sans rentrer dans tous les menus détails du projet de loi mais pour donner un peu une idée du fonctionnement de cette organisation, qui sera assumé, si cette loi est adoptée, grâce à la loi que l'on a actuellement et qui lui donnera un statut légal plus stable, plus transparent et plus responsable, en fait, que peut le permettre l'organisation actuelle en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies, qui est un statut confortable pour assurer le transfert et pour assurer la préparation mais qui ne donne pas une assise légale aussi forte que le donnera ce projet de loi là pour les opérations courantes, qui commenceront au mois de septembre.

Alors, la mission d'Héma-Québec en est une de recruter les donneurs, d'assumer la responsabilité d'organisation des collectes, de traitement du sang et de ses produits et la distribution à tous les hôpitaux. Héma-Québec assume la responsabilité d'avoir suffisamment de produits pour la demande des gens du Québec, et en assume la responsabilité aussi quant à la qualité du produit, et doit maintenir à cet égard des ententes avec les Services canadiens du sang et toute autre organisation, même sur une base internationale, qui permettrait de mieux réaliser sa mission.

Comme toute organisation, il y a un conseil d'administration, qui sera formé de gens qui viennent de différents secteurs pour assurer à ce conseil une information complète. Alors, par exemple, on aura une personne qui sera nommée, représentant les consommateurs de produits sanguins, deux personnes qui seront suggérées par l'Association des hôpitaux du Québec, un membre qui représentera les donneurs et les bénévoles qui régulièrement, au Québec, sont sollicités pour donner de leur sang; il y aura deux personnes qui sont suggérées par la Fédération des médecins spécialistes du Québec et, singulièrement, à l'intérieur de la fédération et des associations d'hématologues et d'experts en médecine transfusionnelle, il y aura un membre qui sera issu du secteur de biotechnologies, du milieu universitaire du Québec, il y aura quelqu'un qui viendra du domaine de la santé publique, et deux membres viendront de différents groupes socioéconomiques, pour avoir une représentation de citoyens et de citoyennes, M. et Mme Tout-le-Monde qui n'y est pas impliqué, d'une façon ou d'une autre, en tant qu'expert ou bénévole ou actif dans le domaine du sang mais qui peut avoir une vue générale sur la situation.

Donc, je pense qu'on a là un conseil assez bien équilibré, avec un directeur ou une directrice générale qui fera aussi partie du conseil d'administration. Il est à remarquer que c'est là, et ça, c'est une autre recommandation du juge Krever, une organisation complètement autonome qui est créée, complètement indépendante du gouvernement, qui n'a aucun fonctionnaire et évidemment aucun politicien qui est sur cette organisation-là. Elle a son mandat, elle a son budget, elle a ses liens et ses ententes avec les hôpitaux; elle aura ses liens, qu'elle établit déjà présentement avec d'autres organisations qui s'occupent du sang au Canada et à travers le monde, et pourra fonctionner de façon tout à fait autonome.

Pour remplir sa mission, la loi prévoit qu'Héma-Québec aura les pouvoirs de former des comités, et, ça aussi, ça respecte des recommandations qui avaient été faites par le rapport du juge Krever: comité de consommateurs, comité médical et scientifique, comité de recherche et de développement. Alors, on aura vraiment, comme organisation, la possibilité d'aller chercher tous les appuis, toutes les collaborations qui lui sont nécessaires pour réaliser sa mission.

Afin de permettre à cette organisation de faire face à toute éventualité, la loi prévoit, et ça, je pense que c'est assez important, que tous emprunts ou toutes obligations qui seront contractés pour les fins de sa mission seront garantis par le gouvernement, de sorte que, si on suppose, par exemple, qu'il se produit quelque chose d'inattendu et que l'organisation, au-delà de son budget régulier, doit développer des nouvelles activités, doit lancer une recherche ou des études ou quoi que ce soit pour faire face à une situation qui n'était pas prévue selon le calendrier budgétaire, l'organisation pourra emprunter pour retrouver l'argent qu'il lui faut et le faire sans aucune difficulté parce que, pour assurer sa mission, le gouvernement garantira les emprunts qu'elle devra faire éventuellement si c'est nécessaire. Et, pour garantir aussi toute la transparence de gestion de la collecte et de la production de sang et des produits du sang, les livres et les comptes d'Héma-Québec seront vérifiés par le Vérificateur général du Québec. Alors, voilà pour Héma-Québec, la production.

Quelques mots sur le troisième module, qui est celui de l'hémovigilance, le Comité d'hémovigilance. Alors, je le rappelle, Héma-Québec, producteur, assure la qualité du produit, les centres hospitaliers assurent une utilisation judicieuse, adéquate, en fonction des besoins des gens du sang et de ses produits, et le Comité d'hémovigilance, lui, assure la surveillance des risques qui peuvent être reliés à l'utilisation du sang ou à toute activité autour d'une transfusion.

Alors, ce Comité est formé aussi d'experts et a, par exemple, une personne qui provient du Laboratoire de santé publique du Québec, deux personnes qu'on choisira parmi les directions de santé publique dans les régions du Québec, un médecin spécialisé en épidémiologie, un éthicien, quatre médecins et hématologues ou experts en médecine transfusionnelle qui exercent, qui sont des cliniciens qu'on retrouve dans les hôpitaux du Québec présentement, trois personnes qui utilisent les services du réseau, trois citoyens et citoyennes qui utilisent les réseaux du Québec et une personne qui sera désignée par la société canadienne du sang pour assurer le lien dont je vous parlais tout à l'heure.

(16 h 10)

Le mandat de ce Comité est donc d'examiner et de suivre toutes les données qui sont recueillies par le système de surveillance, autant en ce qui regarde les donneurs que les receveurs, d'examiner et de suivre tous les effets inattendus, imprévus qui pourraient se manifester à la suite d'utilisation du sang ou d'un de ses produits, de s'assurer que toute la littérature qui existe dans le monde, les études qui sont faites, soient revues constamment, synthétisées et que ça fasse partie de la banque d'information. Et le Comité pourra donner des avis sur toute question qui se présente pour signaler un problème, signaler une situation, proposer comment faire, autant au ministre, aux centres hospitaliers ou à Héma-Québec, pour s'assurer qu'on intervient de façon rapide. S'il y a des situations – ça fait partie aussi du mandat – urgentes qui se présentent, Héma-Québec aura aussi les moyens de développer les activités nécessaires pour s'assurer que l'on comprend ce qui se passe et que l'on agit rapidement.

Finalement, à chaque année, en termes de reddition de comptes, le Comité d'hémovigilance fait un rapport détaillé de la situation au ministre, qui aura à prendre les actions nécessaires pour s'assurer de la continuation du fonctionnement du système.

Je terminerais, M. le Président, pour rappeler la vue globale de ce système – il faut voir Héma-Québec, le Comité d'hémovigilance, dont parle la loi, et les hôpitaux – en citant le Dr Francine Décary, qui est présentement la directrice générale d'Héma-Québec, dans sa structure légale actuelle, qui est médecin elle-même, hématologiste mais spécialiste en médecine transfusionnelle, et qui était auparavant la directrice du centre pour l'Est du Québec de la Croix-Rouge canadienne. Le Dr Décary est une des spécialistes reconnus à travers tout le Canada et même mondialement dans ce domaine.

Dans une présentation qu'elle faisait d'Héma-Québec, qu'elle présentait comme le fournisseur intégré au système de santé... Et c'est vraiment ça. C'est un système intégré du sang, intégré, sur le plan de l'ensemble du Québec, avec le système de santé du Québec. Elle concluait sa présentation de la façon suivante, et je la cite: «Un fournisseur du sang intégré au système de santé québécois, une gestion transparente, souple et efficace répondant aux besoins des hôpitaux, un partage clair des responsabilités, des normes de sécurité reconnues mondialement et enfin un rapprochement entre les donneurs et les receveurs potentiels.» Voilà ce que sera Héma-Québec, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais céder la parole maintenant à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Le projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance; Bill 438, An Act respecting Héma-Québec and the haemovigilance committee.

M. le Président, j'espère que vous avez écouté l'intervention du ministre. Avez-vous écouté? Je sais que c'est difficile de garder le quorum cet après-midi, mais avez-vous écouté? Il n'a rien dit, il n'a absolument rien dit comme raison pour Héma-Québec. Il a dit, et je vais entrer plus dans le détail plus tard, ce séparatiste sanguin a dit qu'il doit mettre la politique avant la santé de la population québécoise. Mais il a tout mêlé les choses. Il a dit: Ne vous inquiétez pas, ça va être le même système que le reste du Canada. Nous allons utiliser le même système de surveillance, le même logiciel. Après ça, il a parlé des normes et standards pancanadiens, mondiaux. Nous allons utiliser les mêmes.

Qu'est-ce que ça veut dire, tout ça, M. le Président? Est-ce que nous allons avoir un système différent – et je peux discuter de ce système plus tard – ou est-ce que ça va être exactement le même? Et, si c'est le même, pourquoi nous avons Héma-Québec? Il peut faire toutes les choses qu'il a expliquées avec les hôpitaux, etc., les centres, les comités, comme membre des services canadiens. Ça, c'est clair. Avec ça, comme les journalistes l'ont clairement trouvé tout de suite, tout le monde commence à comprendre la stratégie de ce ministre. Ils ont dit: C'est une décision purement politique, une décision purement politique basée sur la politique, sur une obsession de séparation. Il veut traiter notre système sanguin comme si le Québec était déjà séparé. Nous sommes une partie du pays Canada, nous sommes une province du Canada. Nous avons nos voisins, nos partenaires canadiens, et on doit travailler ensemble.

Là, on peut faire le débat politique, mais on parle de sang, on parle de virus. On parle du sang. Les virus ne connaissent pas les frontières. Nous avons besoin d'un système qui assure la sécurité et la qualité du sang partout au Canada, pour nous et pour nos voisins. Mais ce séparatiste sanguin a décidé qu'il va mettre la politique avant la santé de la population québécoise.

Il a négocié, selon moi, monsieur, de mauvaise foi. Et je peux montrer ce que les autres provinces pensent de ses façons de négocier. Est-ce que notre sang est aussi différent des autres? Là, je pense qu'il exagère sa position pas mal. Est-ce que c'est effectivement le même système que nous avons ou est-ce que nous allons avoir un autre système?

Je pense qu'aujourd'hui j'ai entendu une logique de pretzel. Il est tout mêlé. Est-ce que ça va être exactement le même ou nous allons faire quelque chose de différent? Si nous sommes en train de faire quelque chose de différent, est-ce que c'est mieux que le reste du Canada ou est-ce que le reste du Canada est mieux que nous? Et, si nous avons quelque chose de mieux que le reste du Canada, pourquoi le ministre a évacué sa responsabilité d'être un partenaire avec le reste du Canada, d'assurer qu'il fait la même chose? Parce qu'on voyage, on parle ensemble, on visite les autres provinces et les autres pays, on doit assurer... Parce que le sang, quand on donne le sang dans ces sacs, ce n'est pas juste comme ça, ils sont fusionnés, fractionnés, ils sont mélangés ensemble. On doit assurer hors de tout doute, sans question, M. le Président, qu'il a la qualité la meilleure dans le monde. Mais le ministre a décidé: Non, il y a une autre structure, il y a une autre création avec son nom, avec une autre dépense. C'est plus important que le système de santé et de services sociaux.

Ce ministre de la Santé n'a aucune crédibilité devant la population québécoise. Laissez-moi juste expliquer quelques décisions récentes. Ici, dans cette Chambre, cette semaine, on discute la création de l'Institut national de santé publique, parce qu'il veut créer une autre structure, il veut déménager les travailleurs de Montréal à Québec parce qu'il était incapable de créer du travail ici, à Québec. Avec ça, il veut juste créer sa propre structure. Bien, il va dépenser plus d'argent. Il dépense de l'argent pour sa publicité, il dépense de l'argent pour des choses qui ne sont pas importantes. Moi-même, j'ai parlé avec lui – c'est un autre sujet que je vais discuter – sur les compensations des victimes du sang contaminé. Lui, avant que nous ayons mis de la pression sur lui, a préféré dépenser 60 000 000 $ sur les chevaux, l'hippodrome, plutôt que de dépenser de l'argent pour les victimes du sang contaminé, les victimes de l'hépatite C.

M. le Président, l'Institut national de santé publique, une autre structure, Héma-Québec, une autre structure. N'oubliez pas que c'est le même ministre – il n'a pas changé; peut-être qu'il va changer bientôt – qui essaie de transférer le centre de greffes pulmonaires de Montréal à Québec. Pour une raison de santé? Parce que c'est efficace? Bien non! Pour une raison politique. C'est le ministre politique. Ce n'est pas un ministre qui met d'abord et avant tout la santé des citoyens québécois...

M. le Président, c'est clair et net, et je peux montrer ce que les journalistes disent sur ce projet de loi nettement politique. Il peut faire toutes les choses qu'il veut faire comme membre du système canadien: l'Institut national de santé publique déménagé de Montréal à Québec, création d'un autre établissement. Greffes pulmonaires, complètement une décision de fou, complètement une décision inacceptable pour eux autres. Et, finalement, à cause de la pression qui vient d'un réseau, il dit: Vous n'avez pas le droit de détruire la haute qualité de soins dans le centre de Montréal.

Finalement, fort probablement avec la pression de la population et devant le Conseil des ministres, il a fait une de ses fameuses volte-face et il n'a pas transféré ça. Dans le dossier du sang, le dossier des victimes, parce que n'oubliez pas ça, M. le Président, on parle d'êtres humains, des victimes du sang contaminé, lui – et j'ai les lettres – a décidé qu'il préférait une stratégie légaliste basée sur un avis juridique et une analyse des comptables et il a décidé qu'il va accepter, avec ses partenaires provinciaux, d'indemniser juste les victimes entre 1986 et 1990. La première date artificielle, c'est le 1er janvier 1986, la dernière date artificielle, c'est minuit, 30 juin 1990. C'est ça qui est dit. Il a dit: Non, c'est ça que je vais offrir, et pas plus que ça. Malgré que nous ayons eu deux motions unanimes dans cette Chambre.

(16 h 20)

M. le Président, nous avons un ministre qui ne tient pas compte des vrais intérêts et besoins de la population québécoise, parce que, après la pression que nous avons mise sur ce ministre, 24 heures après, j'ai questionné le ministre: Est-ce qu'il était prêt, lui-même – je parle de lui-même – à pousser pour avoir un programme d'indemnisation pour les victimes de sang contaminé, les victimes de l'hépatite C, avant 1986 et après 1990? Il a dit: Non, non, pas un autre sou pour ces victimes. Vingt-quatre heures plus tard, pouf! Avec le premier ministre, le ministre de la Santé a suivi le premier ministre et il a trouvé un autre 75 000 000 $. Dans 24 heures, dans 24 heures!

Avec ça, où est la crédibilité? Le ministre n'a pas de crédibilité dans le dossier. Comment on peut l'écouter aujourd'hui dire que, là, c'est dans l'intérêt de la population québécoise? Il n'y a personne qui croit ça. Il n'y a personne qui croit ça, parce qu'on sait que, pour lui, peut-être, parce qu'il compte les jours, il compte les jours comme ministre de la Santé et des Services sociaux et il veut laisser une série de nouvelles structures avec son nom, que lui a créées. Est-ce que, pour une minute aujourd'hui, il a défendu les raisons pourquoi il a décidé de se séparer des services canadiens du sang? M. le Président, comme père, comme mari, comme être humain, comme Québécois, comme Canadien, je voudrais m'assurer que mon système de sang est garanti, est sécure, avec des produits de haute qualité. Aujourd'hui, je ne suis pas sûr, parce que le ministre a décidé de mettre la politique avant le bien-être de la population québécoise.

M. le Président, pourquoi nous sommes ici aujourd'hui? Pourquoi nous sommes ici avec un projet de loi comme 438? Parce que, dans l'histoire du Canada, avec le Québec et les autres provinces, nous avons une pointe noire dans notre histoire, nous avons une tragédie monumentale: la façon dont nous avons traité les personnes qui ont utilisé le sang et les produits sanguins. Malheureusement, plusieurs ont reçu du sang contaminé. Maintenant, elles sont déjà décédées, elles ont le VIH, elles ont l'hépatite C, elles ont d'autres maladies. Je suis convaincu, M. le Président, qu'il y a unanimité de cette Chambre sur la tristesse de cette situation. Il n'y a personne qui veut que nous ayons une telle tragédie encore.

Nous n'avons pas le droit de faire les mêmes erreurs du passé, et ce ministre est en train de faire les mêmes erreurs. Nous n'avons pas le droit de faire les mêmes erreurs de l'histoire. On doit apprendre. On doit dire clairement que... Il peut faire son débat politique, son obsession de séparation ailleurs, il peut faire ça s'il veut – je suis carrément contre cette option, il le sait – mais, dans les questions du sang, il doit avoir assez de courage pour mettre ça de côté. Mais, pour lui, non, l'image d'avoir sa propre agence, de dire que nous sommes différents était plus important pour lui que d'avoir un système qui respecte les recommandations de Krever.

M. le Président, le juge Krever a déposé un rapport de 1 300 pages après des années d'études. Est-ce que ce ministre pense que, lui, ce ministre, est plus sage que tous les experts qui ont participé à cette commission? Est-ce qu'il dit aujourd'hui qu'il a un monopole sur la vérité, que c'est juste lui-même qui peut faire mieux que tous les autres partout au Canada? C'est assez arrogant comme stratégie et comme approche, M. le Président.

M. le Président, la rapport Krever a entendu beaucoup de personnes, beaucoup de victimes. Je ne sais pas si vous avez eu la chance d'écouter pendant la Commission Krever. Ça m'a touché beaucoup. Nous sommes chanceux, nous, dans cette Chambre, que nous n'ayons pas par accident reçu de sang contaminé. Nous sommes parmi les chanceux. On connaît les mille et les mille autres citoyens qui ont reçu du sang contaminé quand ils sont entrés pour une transfusion, parce qu'ils sont hémophiles, ou quand ils sont entrés à cause d'un accident, d'une maladie. Et le don de vie est devenu le don de mort. C'est triste comme histoire.

Avec ça, on doit être absolument certain qu'on ne fait pas les mêmes erreurs du passé. Le juge Krever a recommandé beaucoup de choses. Je veux faire quelques points saillants: le Canada devrait se doter d'un système national de collecte de sang; les provinces devraient indemniser les victimes infectées; le service de transfusion autologue – qu'on donne du sang pour nous-mêmes – devrait être élargi. Où sont les concepts comme ça dans ce projet de loi? Où sont ces concepts? Ils ne sont pas là.

Le ministre, pendant une demi-heure, a parlé de son conseil d'administration, comment il va nommer ses amis, comment il va placer les personnes qu'il veut placer. Parce que, s'il place les personnes qu'il veut placer, il peut contrôler ces personnes, malgré que le juge Krever, de la Commission Krever, a dit exactement le contraire: Nous avons besoin d'avoir un système qui n'est pas contrôlable. Particulièrement par ce gouvernement.

M. le Président, c'est clairement une décision politique. Laissez-moi lire – parce que le ministre a cité la Commission Krever – la recommandation 3, M. le Président: «Il est recommandé que le Canada se dote d'un système national pour la collecte et la distribution des constituants sanguins et des produits sanguins. Il faut éviter d'avoir une multitude de systèmes d'approvisionnement en sang locaux ou régionaux, et ce, pour plusieurs raisons. Un système national d'approvisionnement en sang permet l'application des normes nationales grâce auxquelles toutes les personnes au Canada qui ont besoin des constituants sanguins ou des produits sanguins auront accès à des produits de qualité uniforme. Un système national nous permettra de disposer d'un stock de constituants sanguins et de produits sanguins pour tout le pays; de cette façon, les personnes des différentes régions du Canada bénéficieront d'un accès égal à ces constituants et produits.» J'arrête là, M. le Président.

Recommandation 4 de la Commission Krever – le ministre a assisté à la Commission Krever: «Il est recommandé que les fonctions principales d'un système national d'approvisionnement en sang soient exécutées par un seul exploitant et qu'elles ne soient pas imparties à d'autres.» Un seul exploitant. Recommandations 3 et 4.

Si le ministre veut avoir le rapport Krever, je peux prêter mes copies s'il veut, parce que je pense que c'est le temps de lire ça. C'est le temps, pas parce que c'est un rapport, mais c'est le résumé de plusieurs années de travail, des centaines de témoins, des experts mondiaux. Et c'est ça qu'ils ont dit. Comment le ministre aujourd'hui peut dire que lui a le monopole sur la vérité? Comment il peut dire que c'est un système qui est plus efficace que le reste du pays? C'est complètement illogique, M. le Président, complètement illogique.

(16 h 30)

Mr Speaker, we are talking about a very serious subject today. A subject that touches each and everyone of us, a subject that is based on history, and unfortunately a tragedy in history. A black mark in history books of Québec, Ontario, the other provinces in Canada and other countries in the world. A black mark. We can't be proud of what happened years gone by. What happened was because of improper procedures; innocent people received tainted, contaminated blood. It could have been you, Mr. Speaker, it could have been my colleague the deputy for Robert-Baldwin, it could have been your children, it could have been your parents, it could have been your friends. But, by the grace of God, it wasn't us. And those people, Mr. Speaker, either have deceased – unfortunately, many of them have died already – or they suffer from aids, they suffer from hepatitis C or other illnesses caused by contaminated blood. We have to make sure that we do not make the mistakes of the past. We have no right, as legislators, to make the same mistakes of the past; and part of the mistakes of the past was bad communications, bad decision making, not clear enough roles, I could go on, but part of it, Mr. Speaker, is that the system wasn't working in a fair and equitable way.

Mr. Speaker, as I said before, as a father, as a husband, as a human being, as a Quebecker, as a Canadian, whatever definition you want to give yourself, we all are looking for a safe and secure blood system. Héma-Québec, as proposed by this Minister, is putting that in doubt, putting that in doubt because he's creating two systems, two systems when we could have one. The Minister talked about his plans of involving the hospitals – and I'll talk about that later. It has some merit – I have some suggestions to make it better, but it has some merit – but he could do all of that, all of it, as a member of the Canadian Blood Service. The Minister talked about the Krever report. Let me read two articles of the Krever report.

Recommendation 3: «It is recommended that Canada have a national system for the collection and delivery of blood components and blood products. A series of local original blood supply systems should be avoided for several reasons. A national blood supply system will have national standards to ensure that all persons in Canada needing blood components or blood products have access to products of uniform quality. A national system will have a national inventory of blood components and blood products that will give persons in all parts of Canada equal access to them.»

Recommendation 4, Mr. Speaker: «It is recommended that the core functions of the national blood supply system be performed by a single – a single – operator and not be contracted out to others.» What part of these two recommendations doesn't the Minister understand? Seems to me clear and obvious.

M. le Président, c'est loin d'être clair, encore une fois aujourd'hui, pourquoi le ministre a décidé de faire sa nouvelle agence qui va coûter plus cher. Ce n'est pas clair, et, comme je l'ai mentionné, il est un drôle de négociateur – et j'utilise le mot «drôle» d'une façon figurative – il a fait une entente avec ses amis les autres ministres de la Santé. J'ai des lettres signées par lui qui disent: Moi, là, je ne veux pas donner d'argent pour les victimes avant 1986 et après 1990. En Chambre, il a voté unanimement avec nous pour donner un programme d'indemnisation pour toutes les victimes. Je sais que je ne peux pas dire certains mots ici, dans cette Chambre, mais, au moins, on peut voir que c'est une contradiction flagrante signée par lui. Il dit: No way, il suit ses avocats et ses comptables, il ne veut pas donner un programme d'indemnisation, et il vote ici, en Chambre, comme tout le monde parce qu'il pense que c'est politiquement correct. Ce n'est pas correct, M. le Président! Et, dans le même temps, il est à la table avec les autres ministres, il est supposé être en négociations pour créer un service canadien sanguin. Il n'a pas dit aux autres qu'il veut faire son obsession de séparation avec le sang aussi. Il n'a pas dit ça.

The Minister did not tell his Canadian partners that he's going to put separatism before the healthcare of Quebeckers. He didn't tell his ministers, his colleagues that he was going to put his political obsession – he's a prisoner of that obsession – he was going to put that ahead of the health and social service needs of Quebeckers.

Le ministre fédéral était pas mal étonné, M. le Président, une fois qu'il a compris ça. Moi, je ne lis pas toute la lettre, mais laissez-moi juste lire quelques paragraphes de la lettre signée par le ministre de la Santé fédéral: «En tant que ministre fédéral de la Santé – et c'est daté du 31 mars – et responsable de la réglementation sur le sang et les produits sanguins, il m'apparaît opportun de vous faire part de mes préoccupations en ce qui a trait à la sécurité du système d'approvisionnement en sang.»

Et je saute quelques paragraphes: «Le fait que vous insistez pour avoir votre propre système de sang crée une situation qui soulève de nombreuses questions qu'il faut régler.» Il a parlé du système national intégré qui aide tous les Québécois et Canadiens, il a parlé de l'économie d'échelle.

«Compte tenu de mes responsabilités face à l'administration de la Loi sur les aliments et drogues, je m'inquiète qu'on ne nous ait pas encore soumis de plan détaillé sur les intentions du ministère de la Santé et des Services sociaux, compte tenu de l'échéancier prévu pour la mise en place de services sanguins. Ma préférence demeure que le Québec fasse partie d'un système pancanadien d'approvisionnement en sang dans l'intérêt du Québec et des Québécois.»

Avec ça, le ministre de la Santé fédéral dit que, lui, il a beaucoup de questions. Parce que, lui, il n'a pas dit à ses homologues que lui va mettre la politique devant les préoccupations de santé. Il n'a pas dit ça. C'est le même ministre qui signe la lettre et dit: Pas d'indemnisation. Et j'ai une preuve, si vous voulez que je la dépose, il a signé: Non, non, 1986 à 1990, «that's it, that's all». C'est ça qu'il dit dans la lettre, là. En Chambre, bon politicien, il vote pour la motion unanime qui dit qu'il est prêt à faire l'indemnisation pour toutes les victimes. À quel moment est-ce que ce ministre a dit la vérité? Parce qu'il y a deux contradictions assez flagrantes. Comment on peut avoir confiance en ce ministre?

M. le Président, le ministre... Avec Héma-Québec – et j'ai le décret, ils ont déjà demandé un autre 5 000 000 $ pour ça – ça va être plus cher, il va y avoir dédoublement des coûts. Il y a une manchette qui a dit que, selon un certain analyste, ça va coûter 39 000 000 $ plus cher, 40 000 000 $. Il va dépenser plus d'argent pour une autre boîte, une autre structure avec son nom, quand le même ministre, jusqu'à sa volte-face, n'était pas capable de trouver un autre sou pour les victimes du sang contaminé. Quel type de priorité est-ce ça, M. le Président? La même semaine, il dit: Pas un sou, pas un sou de plus, et il dépense plus d'argent pour une structure. Ce n'est pas logique, M. le Président. Ce n'est pas logique. Certainement, ça va être un projet plus cher, beaucoup plus cher.

Mr. Speaker, it is clear and evident that the Minister has put political priorities before health priorities. He has decided to build a system that will be more expensive. It will be more expensive, it is clear. Whether it's 10 000 000 $, 20 000 000 $, 30 000 000 $, 40 000 000 $, 50 000 000 $, more, we don't know yet. I challenge him today to table his analysis. If it's going to be cheaper – he pretends it's going to be – prove it. I asked him in parliamentary commission, he couldn't do it. He doesn't have the figures. He knows that he can give more money to victims, he knows that, and he refuses to give them until we put political pressure on him to do it. He knows that, but he doesn't know how much Héma-Québec is going to cost. I don't believe him, Mr. Speaker.

Le ministre lui-même – et vous pouvez sortir les galées de cet après-midi – il dit: «Nous allons utiliser le même système de surveillance, le même logiciel, les mêmes standards.» Les mêmes, «the same». Avec ça, où est la différence? Pourquoi il a besoin de créer son propre système? Parce qu'il veut jouer sa politique sur le dos des citoyens québécois. Mais c'est dangereux, ce qu'il est en train de faire, parce que deux organisations peuvent avoir des problèmes de communication, peuvent avoir des problèmes.

(16 h 40)

Il y a plein de questions qu'on doit demander, pas politiquement mais comme êtres humains. On doit demander qui sonnera la cloche s'il y a un problème. Avec tous ces comités, l'échange d'information, au moins deux réseaux, un au Québec, un pour le reste du Canada, qui sonnera la cloche s'il y a un problème? Il n'y a personne, et je sais... Je ne veux pas donner l'impression que je pense que l'autre côté souhaite qu'il y ait un autre problème dans notre système; on espère tous que nous n'allons jamais, jamais avoir ce problème que nous avons vécu pendant les années quatre-vingt. Mais, si ça arrive, qui sonnera la cloche? Qui pourra dire: Sortez ce produit du marché maintenant? Qui va avoir le contrôle? Qui va décider de tout ça?

Le ministre est complètement illogique avec son rationnel, parce que, avec une main, il dit qu'ils vont faire quelque chose de mieux et de différent du reste du Canada et que, dans le même souffle, il dit qu'ils vont faire la même chose. C'est quoi, la vérité? Est-ce qu'ils vont utiliser le même système? Ou – et c'est ça que je commence à croire – effectivement ils vont, dans plusieurs cas, utiliser le même système que le reste du Canada. Mais il a évacué sa responsabilité comme ministre de la Santé, parce que lui n'est pas à la table décisionnelle, lui est là comme observateur. Vous avez entendu qu'ils vont faire un échange d'observateurs canadiens ici, à Québec, et Québec, ici, au Service canadien; observateurs, pas décideurs. Ils vont avoir un droit de regard. Avec ça, il a encore une fois – et nous avons vu cette tendance chez ce ministre assez souvent – abdiqué sa responsabilité comme ministre de la Santé et des Services sociaux, abdiqué, parce que, lui, il est à la remorque des autres. Il va prendre le même logiciel, le même système de surveillance, ils vont avoir le même système nominal sur les donneurs, il va utiliser les mêmes normes et standards, mais c'était tout décidé ailleurs. Lui est à la remorque de ça. C'est une abdication de sa responsabilité.

Je voudrais avoir mon ministre de la Santé et des Services sociaux à la table, et, s'il a d'autres idées mieux que les autres, il a sa responsabilité de dire ça aux autres provinces: Nous avons une meilleure idée. Parce que, comme j'ai dit, M. le Président, les virus et le sang ne connaissent pas les frontières. Une fois qu'on donne du sang... Et j'espère – j'ouvre une petite parenthèse – que tout le monde donne du sang. Je sais que nous allons avoir une chute des donneurs depuis l'implication de ce ministre dans le dossier. J'espère que tout le monde donne du sang. Mais, une fois que je donne du sang, souvent ce n'est pas un sac de sang que je donne qui est donné à quelqu'un d'autre, ce n'est pas ça, là. Il y a le fractionnement, il y a le mélange, il y a beaucoup de traitements et beaucoup de temps avant qu'on utilise un produit sanguin. Avec ça, souvent le don d'un litre, le don d'un sac peut aider quatre personnes. Mais ça peut être un mélange de sang, ça peut être un mélange de sang de partout. Avec ça, par définition, si nous voulons avoir un système qui peut garantir hors de tout doute que nous avons un système sécure, de haute qualité, nous avons besoin des mêmes normes, nous avons besoin d'avoir une façon de décider vite, avec une bonne connaissance de tous les enjeux. Bien, ce n'est pas ça que le ministre dit. Il dit, avec une main, que c'est ça qu'il va faire, mais il est en train de créer une autre structure.

Il y a beaucoup de questions soulevées par le ministre aujourd'hui, avec presque aucune réponse. Où est le concept d'autosuffisance dans le projet de loi? Où est la stratégie d'encourager que Québec puisse avoir assez de sang? L'approvisionnement de sang, c'est une chose assez importante. Où est la stratégie? Où est l'argent pour ça? Il veut mettre tout ça en place le 1er septembre, on commence le débat sur le projet de loi aujourd'hui. Comment on peut croire qu'il va mettre tout ça en place en temps pour le 1er septembre? Où est la stratégie pour les dons autologues?

Le ministre a cité le rapport Gélineau. Où est-ce qu'on dit, dans le rapport Gélineau, qu'on doit pratiquer la séparation dans le système sanguin? Où est-ce que c'est, ça? Je l'ai lu plusieurs fois, M. le ministre. Gélineau n'a jamais recommandé de pratiquer l'obsession de la séparation dans le système sanguin. Il ne l'a jamais recommandée. Il a recommandé beaucoup de bonnes choses; et rien n'empêche de faire le programme des hôpitaux désignés, des centres désignés, mais comme un membre des Services canadiens.

Pourquoi le ministre décide de mettre la politique avant la santé et les services sociaux? Est-ce qu'il cache quelque chose? Pourquoi il n'a pas assez de courage? Est-ce qu'il n'est pas assez fier de son système? Ou, si le système est aussi bon que ça, je voudrais voir le Québec à la table décisionnelle. Parce que, quand je voyage, j'espère que je n'aurai jamais besoin d'utiliser du sang. Jusqu'à date, je suis juste un donneur, pas un receveur. Je suis chanceux. Mais, si j'ai une maladie, si j'ai besoin d'utiliser du sang, je voudrais avoir une garantie que le Québec, avec tous les autres partenaires canadiens, s'est assuré au-dessus de tout doute que nous avons le meilleur système sanguin. Mais on ne trouve pas ça dans le projet de loi, M. le Président.

Juste la question sur la mission. Laissez-moi lire le premier article de la mission: «Héma-Québec a pour mission d'assurer aux établissements de santé et de services sociaux du Québec et à la population un approvisionnement suffisant en sang et en produits et constituants sanguins.» Où est le mot «qualité» dans ce premier paragraphe? Est-ce qu'il veut vraiment avoir une qualité ou est-ce que, pour lui, c'est plus important de créer une autre structure qui coûte plus cher, qui fait un dédoublement de ce qui se passe dans le reste du Canada?

M. le Président, j'ai encore beaucoup de questions. J'ai déjà mentionné le temps, le délai. Nous sommes le 21 mai. On veut avoir tout ça en place pour le 1er septembre. Est-ce que c'est possible? Et qu'est-ce qui se passe si ce n'est pas tout en place pour le 1er septembre? Nous allons avoir un problème, et on doit travailler ensemble pour s'assurer que nous n'allons pas avoir certains problèmes.

Les licences. Le ministre, en commission parlementaire, a dit: On est en train de négocier les licences avec le bureau biologique, la FDA, etc. Où en sommes-nous? Est-ce qu'il va mettre un système de sang québécois en vigueur sans avoir 100 % de ces licences? C'est dangereux, M. le Président. Moi, je voudrais avoir la réponse à cette question avant que nous ayons le vote final.

Qu'est-ce qu'il fait pour l'autosuffisance sanguine pour la population québécoise? Le ministre a mentionné ça un peu. Mais là qu'est-ce qui se passe s'il y a une pénurie de sang? Et vous voyez dans les journaux que, à cause du manque de confiance que la population a en ce ministre, il y a de plus en plus une pénurie de sang. Qu'est-ce qui se passe? Il a dit: Ne vous inquiétez pas, j'ai un arrangement avec le reste du Canada. Ils vont nous donner du sang, et vice versa. C'est ça qu'il dit. Qu'est-ce qui se passe s'il y a une pénurie de sang partout au Canada, en même temps? Qu'est-ce qui se passe? Pensez-vous que les membres des Services canadiens sanguins vont dire: Nous avons une entente, mais, malgré que vous ayez décidé de sortir et de jouer votre propre agence vous-mêmes, nous allons vous donner du sang, s'il y a une pénurie partout au Canada? Pensez juste à ça, là. Je présume qu'il veut, qu'il va faire son possible. Mais ce n'est pas ça. Je présume que l'aide des Services canadiens, ça va être un service d'entraide, d'assurer que effectivement il y a un bon échange. Qu'est-ce qui se passe s'il y a une pénurie de sang? Je ne connais pas la réponse. S'il y a une pénurie de sang partout au Canada, je ne sais pas ce qu'il va arriver demain ou une fois qu'Héma-Québec sera installée.

(16 h 50)

M. le Président, le ministre a parlé des hôpitaux désignés, 20 hôpitaux désignés, ce qui, jusqu'à date, a un appui bien fondé dans la communauté, parce qu'il me semble qu'il y a une certaine responsabilisation de leur... Je trouve que c'est un pas dans la bonne direction, et on doit peut-être aller un peu plus loin. On va discuter de ça pendant la discussion de ce projet de loi. Mais il y a une étape tellement dangereuse, et je souligne le mot «dangereuse».

C'est compliqué, cette question, mais le ministre est en train de transférer les budgets sanguins, les budgets pour le sang, aux 20 hôpitaux désignés. Ils vont avoir la responsabilité de la distribution de ce sang. Pour trois ans, le ministre a dit: Inquiétez-vous pas, je coupe partout, mais je ne coupe pas là. Trois ans. Après ça, «who knows»? On ne sait pas ce qui se passe avec ça. Une garantie, pas plus que trois ans.

Qu'est-ce qui se passe une fois que le ministre contrôle ce budget? Il peut couper le budget, comme il a fait avec les anesthésistes. Nous n'avions pas de problème dans ce système avant que le ministre touche ce secteur. Nous en avons eu assez, plus ou moins. Mais il a décidé, non, il va donner un «buy out package», un programme de pré-retraite assez généreux, merci, jusqu'à 300 000 000$. 300 000 $, je m'excuse, M. le Président, c'était généreux, mais pas aussi généreux que ça. Selon mon information, maintenant, il y a toute une pénurie d'anesthésistes.

Non, le ministre n'a pas arrêté là. Après qu'il ait payé 300 000 $ à tous ces médecins, ils ont engagé, selon notre information, 17 médecins pour retourner au travail, 1 000 $ par jour jusqu'à un maximum de 60 jours. Un autre 60 000 $ pour eux. C'est pas mal, M. le Président! Mais nous avons une pénurie d'anesthésistes. En arrière de sa stratégie avec les 20 hôpitaux désignés, il peut, une fois qu'il contrôle le budget – parce que maintenant c'est un budget central – une fois que les hôpitaux contrôlent ce budget, il peut contrôler les hôpitaux. Pas de sang, pas d'interventions chirurgicales, M. le Président, les médecins ne peuvent pas faire le travail pas de sang. C'est incroyable, le contrôle que le ministre est en train d'avoir.

M. le Président, il y a beaucoup de lacunes qu'on peut trouver dans ce projet de loi. Il n'y a aucune espèce de philosophie dont nous avons discuté et que nous avons supportée dans la commission Krever. C'est une philosophie d'avoir un programme sans faute. C'est la dernière recommandation du juge Krever, que nous avons besoin d'un système d'assurance sans faute. Et là, statistiquement, vous le savez, M. le Président, de partager les risques avec 30 000 000 de personnes, c'est beaucoup plus sage, efficace et moins cher, que si on fait ça avec 7 000 000. Je ne fais pas un débat politique, c'est juste simple, logique, un calcul assez simple. Mais aucune mention de ce concept, de cette philosophie de base. Un programme sans faute dans le système de santé. Mais, encore une fois, ce double langage de ce ministre et de ce gouvernement est assez clair, parce que dans la motion et l'annonce du premier ministre qu'il est maintenant en train de privilégier une position qui va donner une indemnisation pour toutes les victimes de sang contaminé avant 1986 et, plus important, après 1990, c'est basé sur un concept sans faute. Mais je ne retrouve pas ça dans le projet de loi.

L'autre chose qui m'inquiète beaucoup dans ce projet de loi, comme d'habitude, le ministre de la Santé, qui a abdiqué ses responsabilités, qui joue son rôle comme adjoint parlementaire du ministre des Finances plus souvent que ministre de la Santé, a mis beaucoup de rapports dans le projet de loi. Héma-Québec doit envoyer ses rapports à l'Assemblée nationale, ses rapports fiscaux, les opérations. C'est un débat sur la qualité de sécurité. Avec ça, si nous allons avoir un audit, ce n'est pas juste une vérification financière qu'on veut, c'est une vérification des mesures de sécurité dans le système du sang. On peut avoir le Vérificateur général sur les questions financières, et j'ai beaucoup confiance en lui. La chose qui m'intéresse comme parlementaire, ici, dans cette Chambre: Est-ce que nous sommes en train de bâtir un système qui va protéger tous les receveurs et les donneurs de sang? Je ne trouve pas ça dans le projet de loi.

M. le Président, comme je l'ai mentionné, il y a des choses intéressantes proposées dans le plan d'action du ministre. Je peux aider le ministre à améliorer ça. On doit responsabiliser nos professionnels, on doit donner les outils pour faire le travail, parce que, lui, il est en train de couper, couper, couper. Nous avons eu des questions aujourd'hui en Chambre à cause du virage ambulatoire, des fermetures de lits, des fermetures d'hôpitaux, des programmes de préretraite, tous les problèmes causés par ce ministre; les cliniques doivent fermer et maintenant il arrive avec un ajout de responsabilités. Comment nos médecins peuvent faire tout ça? Je ne sais pas, M. le Président, mais on peut travailler ensemble sur cette question.

Mais ça m'inquiète beaucoup, M. le Président, que je ne trouve pas, dans la philosophie de ce projet de loi, les cinq principes de base qu'on trouve dans le rapport Krever: le système de sang doit être une ressource fondamentale; les donneurs ne peuvent pas être rémunérés; le Canada doit avoir un système autosuffisant; les produits sanguins devraient être gratuits et accessibles à tous; et la sécurité est d'une importance capitale. Les cinq principes de Krever, pourquoi le ministre n'a pas mis ça dans le projet de loi? Parce qu'il veut changer ça plus tard? Il n'appuie pas ces principes? Est-ce qu'il n'appuie pas ça? J'espère qu'on pourra l'apprendre aujourd'hui.

M. le Président, comme je l'ai mentionné, il y a beaucoup de questions. Une autre question – comme d'habitude, parce que le ministre «check» tout ce qu'il fait avec le ministre des Finances – il y a un article dans le projet de loi qui dit que le gouvernement peut donner les ressources financières pour faire fonctionner Héma-Québec. Un des problèmes du passé, c'est quand tous les gouvernements ont commencé à apprendre qu'il y avait d'autres tests qui pouvaient faire mieux que les tests existants, mais ils se sont tous chicanés avec les ministres des Finances, ils ont tous pris le temps de décider s'ils dépensaient de l'argent. C'est une des raisons du problème, parce que les gouvernements, Québec inclus, toutes les autres provinces n'ont pas bougé assez vite. Là, ça prend une marge de manoeuvre pour les situations urgentes, ça prend une certaine flexibilité parce que nous avons besoin d'un système qui peut bouger vite. S'il y a une urgence, je ne veux pas que tout le monde doive téléphoner au ministre. Il va vérifier avec le ministre des Finances, il va retarder ses décisions, et nous allons avoir un problème. M. le Président, on doit aller beaucoup plus vite que ça.

Le ministre a parlé des conseils d'administration. Moi, je ne suis pas impressionné par la façon qu'il veut choisir les personnes. J'espère que ce ne sera pas d'une façon partisane, comme nous avons vu dans plusieurs autres cas. J'espère que non, c'est trop important, dans ce cas-là. Je voudrais voir plus de receveurs impliqués, il y en a juste un. Il trouve ça correct d'en avoir juste un. Des personnes, des êtres humains, des clients, des usagers, des patients représentés, ce n'est pas correct. On discute beaucoup que ça prend l'implication de nos universités, il y a juste un représentant. Je pense que, au moins, nous avons besoin de deux. Et les socioéconomiques peuvent en nommer plus que les receveurs, deux, et on doit insister pour que ces personnes aient une connaissance et un rôle dans le système de santé et services sociaux.

Il est question de recherche-développement. J'ai le nom... Le juge Krever a dit qu'on doit s'assurer que 10 % des budgets sanguins, c'est pour la recherche-développement. J'ai entendu que Québec n'est pas prêt à dépenser plus que 5 %. On doit avoir une garantie, parce qu'on doit apprendre, on doit, chaque jour, améliorer notre connaissance dans cette situation, parce que, comme j'ai mentionné, M. le Président, les virus ne connaissent pas les frontières.

M. le Président, c'est clairement une décision politique. Sa petite chose, toutes les flèches partout, là, parce qu'il veut assurer que tout le monde parle ensemble, il ne peut pas même mettre une flèche directe entre le reste du Canada et le Québec. Non, voyons donc, M. le Président, s'il vous plaît, jouez vos politiques ailleurs. Jouez votre obsession pour la séparation ailleurs. Quand on parle de santé, nous avons besoin d'assurer que, d'abord et avant tout, on ne met pas la politique, mais, avec Héma-Québec, c'est ça que vous êtes en train de faire. C'est ça que vous êtes en train de faire.

(17 heures)

The Minister, in his «organigramme», can't even put a direct link between the rest of the country and Héma-Québec. Yet, we're supposed to believe that everything is going to work fine, communications will be like this. We're going to put observers on each others' board. Well, if we're going to work so well together, in the first place, why don't we start together? Why don't we build a system that we're all members of? Why don't we build a system that Québec can build... a different system with the hospitals?

But, more importantly, it seems to me that Québec is abdicating its responsibility for health care. Because, if we have better ideas, if we have some interesting new ideas... And the Minister, in private, says: Russ, there are many provinces interested in what we're doing in the hospitals. Well, get there and tell them about them! Get there at the table and make sure that's happening. Because I want to make sure that my blood system is safe. I want to make sure that it's safe for you, and for you, and for you, for me, my family, my friends, my neighborhood.

It is unacceptable that this Minister has decided to put politics before health. It's unacceptable that the Minister has decided to spend more money on building structures, more money in duplicating – duplicating, duplicating! – structures that aren't necessary than putting it in health care.

Mr. Speaker, it seems to me that we could do what the Minister wants. And I offer my collaboration to work with him. But we could do it as members of the Canadian blood service. Is he so afraid to say, because their strategy, across the road here, is: Don't do anything with the rest of the country? So he goes for these incredible permutations, turning himself like a pretzel to pretend that he's doing something differently. Yet, out of his own mouth today, and it's not what I've said today, it's what this Minister has said today, he said: The system will be the same.

Parce que c'est complètement illogique, M. le Président, si on veut retracer – et c'est assez important et c'est une des lacunes que nous avons eues dans le passé – le don jusqu'au receveur, veine à veine, comme on dit... Une fois qu'on donne le sang, on veut savoir ce qui se passe parce que, entre temps, quand il y a des vérifications, s'il y a un problème ou s'il y a un problème après, on veut retracer ça au donneur. Parce que, si on ne peut pas faire ça, nous allons avoir les mêmes problèmes que par le passé.

Avec ça, par définition, nous avons besoin d'avoir le même système de logiciel, le même système de coordination d'informations. Qui décide ça avec Héma-Québec? Le ministre était fier de dire qu'il va être un observateur de la décision. Je voudrais que mon ministre de la Santé et des Services sociaux soit un décideur. Je ne veux pas que le ministre de la Santé du Québec soit à la remorque des autres. L'image qui m'arrive, là... Je ne veux pas faire de blague avec une situation aussi sérieuse que ça, mais souvent tu vois, à l'arrière des voitures, un petit chien qui a une tête comme ça. Bien, c'est ça que ce ministre est en train de faire, il suit tout le reste des autres provinces. Et peut-être qu'il prend les bonnes décisions, je ne mets pas ça en doute. Mais, s'il y a un rôle pour le Québec, c'est là. On peut décider ensemble c'est quoi, le meilleur système.

Avec ça, sur les questions de logiciel, c'est fondamental. Sur les questions de surveillance, comment on peut assurer... Parce que nous avons mis beaucoup d'énergie dans nos hôpitaux, mais le problème du passé, c'était le contrôle du produit. Nous avons eu un produit contaminé, du sang contaminé. Ce n'était pas le problème dans les hôpitaux. C'était, une fois que le donneur qui avait un sang contaminé avait donné ça, ça a été fusionné avec tout le monde, ça a été distribué. C'est là. Avec ça, si on veut mettre toutes nos énergies, c'est là qu'on doit contrôler la qualité du système sanguin. Quand je reçois du sang, je voudrais m'assurer que le Québec est à la table décisionnelle pour s'assurer qu'il y a un système qui est assez bon au Québec.

Mais le ministre a dit: Non, nous allons utiliser les mêmes standards et normes que le reste du Canada. Bon, les mêmes standards et normes. Je trouve ça une bonne idée d'utiliser la même surveillance, le même monitoring, le même contrôle de qualité, les mêmes normes et standards. Mais, si nous avons tous la même chose, pourquoi il veut dépenser plus d'argent dans Héma-Québec? Il peut faire ça comme partenaire des Services canadiens. C'est assez logique. Je présume, M. le Président, je pense que vous êtes d'accord avec moi, avec cette analyse. Rien n'empêche le Québec de faire son programme de responsabilisation de nos hôpitaux et d'être membre du système canadien. Rien n'empêche le Québec de commencer un programme sans faute. Et, juste pour vous dire, M. le Président, un programme sans faute, c'est assez important. Parce que, dans le système maintenant, à cause des possibilités de poursuites, souvent, quand les réactions négatives sont vues, elles ne sont pas rapportées parce qu'ils ont peur des poursuites. Si nous avons un système sans faute, nous n'allons pas avoir ce problème; nous allons avoir plus de participation, de communication. Parce que c'est complexe, oui, je sais, c'est technique, mais c'est absolument essentiel.

Le dossier peut-être le plus important que nous allons discuter dans cette session, c'est comment on peut assurer que notre système sanguin est le meilleur dans le monde, comment on peut assurer que notre sang qu'on donne et qu'on reçoit n'est pas contaminé. Le ministre n'arrive pas avec une réponse à cette question. Il dit: Ah, je vais créer une autre structure. J'ai maintenant déjà créé... J'ai mon conseil d'administration, j'ai mes lettres patentes avant que je dépose ce projet de loi; je suis en train de négocier tout; j'ai mis les articles... que je peux exproprier. Le ministre a décidé, avec l'article 60, qu'il peut exproprier tous les biens de la Croix-Rouge, tous les biens de la Croix-Rouge. Avec ça, c'est une drôle de façon de négocier, M. le Président.

Le ministre a fermé nos hôpitaux, il a fermé des lits, il a mis souvent des personnes malades à la porte de nos hôpitaux. Il appelle ça le virage ambulatoire. Il ne donne pas assez d'argent à nos CLSC. Il oblige nos cliniques à fermer. Il a essayé, politiquement, de transférer le centre de greffes pulmonaires de Montréal à Québec. Il est en train de créer son Institut national de santé publique parce qu'il veut déménager les professionnels de Montréal à Québec. Il a refusé d'indemniser les personnes, les victimes de sang contaminé. Nous l'avons forcé à changer d'opinion. Mais, lui, il a de l'argent pour créer une autre structure, doublement plus chère.

La politique d'achat, comment Québec se base... sur 7 000 000? Les produits vont être plus chers. Alors, le ministre a dit: Pas de problème, Russ, pas de problème. Je vais utiliser le même programme de politique d'achat en commun avec le reste du Canada. Bon. Avec ça, il veut être membre sans le dire à personne. Parce que, s'il dit que le système pancanadien marche, ce n'est pas bon pour son option politique. C'est ça, là. Il met la politique avant la santé de la population québécoise, parce qu'il ne veut pas dire qu'ils peuvent travailler ensemble.

Le reste du Canada garde une chaise pour lui à la table. Il veut Québec à la table. Il veut profiter de l'expérience québécoise. Le ministre a évacué sa responsabilité, parce que, lui, il s'est levé aujourd'hui, il a dit: J'ai des bonnes idées, on peut faire des choses bien correctes. Mais allez à la table négocier avec les autres, pas comme observateur, pas comme non-décideur, pas à la remorque des autres. Assurez-vous que vous avez quelque chose à dire. Les absents ont toujours tort. M. le Président, on doit s'assurer que le Québec est à la table. Si ça cause un problème politique pour lui, il doit peut-être réfléchir sur ça, mais c'est sa responsabilité comme ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. le Président, dans les brefs commentaires que je fais aujourd'hui, je pense que vous comprenez qu'il n'y a aucune raison de créer Héma-Québec. On peut mettre beaucoup de programmes en place dans nos hôpitaux, avec un comité d'hémovigilance. On peut faire beaucoup de choses et être membre des Services canadiens.

(17 h 10)

M. le Président, la population a perdu confiance en ce ministre. De plus en plus, les personnes ne veulent pas donner de sang. Quand on donne du sang, c'est un don de vie. On doit encourager tout le monde à donner du sang. Mais, maintenant, le ministre trouve ça plus important d'assurer qu'il y ait une vision politique, une image politique strictement québécoise sur ça. Je pense qu'on peut être tous fiers de ce que nous sommes ici, à Québec, il n'y a aucun doute sur ça, mais on peut travailler avec le reste du Canada. On peut Canada pour s'assurer que le sang est bel et bien protégé. Laissez-moi juste le répéter encore une fois parce que j'essaie de m'assurer que le ministre me comprend: Quand vous donnez du sang, c'est fusionné avec d'autres. Avec ça, par définition, on doit s'assurer que les autres systèmes sont exactement comme le nôtre. Mais le ministre a décidé que non.

So the Minister has decided that politics are more important than health. He has money for his publicity, his Government has money for horses, he doesn't have money for the victims of contaminated blood. He has money for structures, for staff, he already went to the Cabinet, got an extra 5 000 000 $, but he doesn't have enough money to build a proper health system. He's going to spend more money on this than necessary.

Dédoublement, plus cher. Décision politique, c'est clair, M. le Président. Et ce n'est pas juste moi qui dis ça, il y a tous ces articles, un après l'autre, qui questionnent. Le ministre fédéral questionne ce qui se passe dans ça. Est-ce que nous allons avoir assez de sang? C'est la Société de l'hémophilie qui demande ça. Des gros problèmes de crédibilité, M. le Président, un après l'autre. Nettement politique, M. le Président. Avec ça, je pense que, avec le comportement de ce ministre, il n'y a aucune confiance, et j'espère que, après cette journée, au Conseil des ministres, ils vont dire: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, vous avez mal fait votre travail, c'est incorrect que vous ayez mis la politique devant la santé de la population, c'est incorrect. C'est incorrect, ce que le ministre va faire, il va augmenter les risques. Potentiellement, nous allons avoir une mauvaise communication entre deux réseaux. C'est exactement le contraire de ce que la commission Krever a dit. C'est exactement le contraire que ce dont nous avons besoin; nous avons besoin de nous assurer qu'ensemble on protège tous les citoyens du Canada. Nous n'avons pas le droit de faire les mêmes erreurs du passé, il doit mettre en place un système qui sert le Québec mais qui est aussi un membre du service canadien. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la députée de Rimouski. Mme la députée.


Mme Solange Charest

Mme Charest: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, j'aimerais rappeler certaines choses concernant Héma-Québec. Il faut se rappeler qu'Héma-Québec a été créé le 26 mars dernier, que c'est avant tout un organisme sans but lucratif et que c'est le seul organisme reconnu comme étant responsable de l'approvisionnement en sang et produits sanguins au Québec. Ça, je pense qu'il faut que ça soit très clair pour l'ensemble de la population. Et je vous dirais que ce qui caractérise Héma-Québec, c'est qu'Héma-Québec est avant tout un système intégré au réseau de la santé du Québec, et c'est ce qui va garantir en quelque sorte à la population l'accès à des produits sanguins sécuritaires et de grande qualité. Et, vous savez, Héma-Québec, à l'encontre du système canadien du sang, dont le fonctionnement est très centralisé, celui du Québec, au contraire, s'articule sur un mode de fonctionnement décentralisé, orienté vers les centres hospitaliers, qui sont depuis toujours les principaux utilisateurs du sang, de ses dérivés et de ses substituts.

Héma-Québec est avant tout un modèle organisationnel qui s'inscrit dans la mouvance de la régionalisation des services de santé du Québec. Héma-Québec, il faut le dire et le redire, ne crée pas de nouvelles structures mais utilise celles qui sont déjà en place. Héma-Québec permet l'utilisation optimale des ressources humaines et financières qui existent déjà au sein du réseau de la santé. Héma-Québec sert aussi en quelque sorte à réitérer la volonté du Québec d'assumer la pleine responsabilité de l'ensemble des domaines de la santé relevant de sa juridiction, y compris la gestion du système de sang, et je pense que, dans le contexte actuel, il n'est pas mauvais de rappeler que la santé est du ressort des provinces, donc est du ressort du Québec. Je voudrais également, M. le Président, vous parler de façon plus spécifique de la mission d'Héma-Québec confiée dans le cadre du projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance. Alors, comme je le disais tout à l'heure, Héma-Québec a comme principale mission d'assurer aux établissements de santé et de services sociaux du Québec ainsi qu'à la population un approvisionnement suffisant en sang et en produits et constituants sanguins, mais sa mission particulière est en quelque sorte de développer et de mettre en application des normes de qualité et de sécurité rigoureuses, ceci afin de se donner et de mériter à nouveau la confiance du public et des personnes qui recevront des produits sanguins distribués par Héma-Québec. Vous savez, l'expérience que les citoyens et les citoyennes canadiens, hein, à la grandeur du Canada ont connue dans les années passées leur a fait perdre quelque peu confiance dans le système qui existait. Nous avons tourné la page, au Québec, et nous nous donnons le moyen d'assurer à la population du Québec de recevoir des produits sanguins de qualité et en nombre suffisant.

Je voudrais également souligner qu'un des éléments de la mission d'Héma-Québec, c'est de recruter les donneurs de sang et de plasma et c'est d'établir des partenariats avec ces gens-là, parce que ces gens-là, les donneurs, sont souvent regroupés en organismes. Il y a également les organisateurs bénévoles de collectes, et ça fait partie de la mission d'Héma-Québec de créer des partenariats avec ces personnes et ces organismes. Naturellement, Héma-Québec sera responsable de la collecte du sang et du plasma à la grandeur du Québec. Peu importe l'endroit où on se trouve, l'on pourra continuer à donner du sang, et l'organisme responsable sera Héma-Québec. Naturellement, Héma-Québec devra également assumer la gestion des dossiers des donneurs de sang et de plasma, et ça, toujours dans le respect des normes de qualité, de sécurité et de confidentialité rigoureuses qui existent partout à travers le monde pour ce même genre d'exercice.

Naturellement, Héma-Québec devra voir à traiter et à transformer les produits recueillis. Elle sera également responsable de la conservation, de la distribution et de la gestion des stocks provinciaux. Elle devra fournir aux établissements de santé le sang de même que les produits et constituants sanguins dont ils ont besoin et, sur demande d'un organisme de gestion de l'approvisionnement en commun des établissements qui a été désigné par le ministre de la Santé et des Services sociaux, se procurer, entreposer et fournir aux établissements les produits de fractionnement ou les produits de remplacement dont ils ont besoin.

Ce que je vous dis là, M. le Président, c'est pour vous expliquer de façon la plus claire possible qu'il n'y aura pas de changement dans les obligations d'Héma-Québec par rapport à tout système intégré de sang qui existe ailleurs à travers le monde et qui a les mêmes exigences. Alors, nous ne serons pas particuliers, dans le sens que nous ne ferons pas les choses selon ce qu'elles doivent faire; au contraire, nous allons les faire correctement avec l'expertise et l'expérience que nous possédons déjà au Québec et qui se retrouvent déjà à l'intérieur du réseau de la santé. Je pense que, là-dessus, c'est important de le souligner, parce que, quoi qu'en dise l'opposition officielle, Héma-Québec pourra très rapidement faire ses preuves en termes de qualité, d'accessibilité et de conformité aux normes internationales qui existent dans le domaine.

On devra aussi, à Héma-Québec, effectuer de la recherche et du développement pour élaborer de nouvelles méthodes, de nouvelles technologies et de nouveaux produits pour répondre aux besoins du système québécois. Là encore, il faut que le Québec puisse maintenir son expertise et puisse avoir les données suffisantes pour maintenir ce haut niveau d'excellence qu'il a toujours eu ici même, au Québec. Et je pense que, là-dessus, en lui donnant comme mission d'effectuer de la recherche et du développement, on s'assure en quelque part de toujours être dans la course.

(17 h 20)

Alors, il faudra également, pour maintenir cette expertise, maintenir des liens de collaboration et d'échange d'information avec les autres organisations analogues, que ce soit au Canada ou à l'étranger, de manière à connaître et à échanger l'expertise. Et, à ce sujet, M. le Président, j'aimerais rappeler que la conférence des ministres de la Santé des provinces et des Territoires a adopté, lors de sa dernière conférence, le 27 mars dernier – il n'y a pas tellement longtemps, et ça s'est passé à Toronto, chez nos voisins d'à côté – une résolution assurant un échange de réciprocité entre les conseils d'administration de leurs fournisseurs de sang respectifs. Ainsi, dans le concret, ce que ça veut dire, c'est qu'un membre du conseil d'administration de Héma-Québec siégera au conseil d'administration du service canadien du sang et, vice versa, un membre du service canadien du sang siégera au conseil d'administration de Héma-Québec. Alors, l'opposition officielle pourra repasser, quand elle dit que nous nous isolons et que nous coupons tous nos liens avec les systèmes de sang similaires au nôtre. Je pense que, là-dessus, elle fait fausse route et elle donne une mauvaise information à la population, et non seulement elle ne les rassure pas, mais elle ne leur donne pas l'heure juste par rapport au système.

Alors, je voudrais aussi rappeler qu'Héma-Québec peut recevoir aussi d'autres mandats du ministre de la Santé et des Services sociaux si celui-ci trouve et pense qu'il serait pertinent de le faire. Je pense, entre autres, que le ministre de la Santé peut confier également à Héma-Québec des attributions semblables, entre autres, pour la moelle osseuse ou pour tout autre tissu humain. Alors, ça peut paraître spécial, mais je pense que, dans ce secteur-là, les gens qui connaissent bien le système comme tel trouveront que c'est tout à fait logique et normal.

Héma-Québec doit conclure également une entente avec le service d'approvisionnement canadien pour échanger de l'information sur les donneurs de sang ou de plasma afin de prévenir les risques de contamination des produits. Ce que ça veut dire, M. le Président, c'est que, tel que recommandé par le juge Krever, il a suffi de mettre sur pied des comités de médecine transfusionnelle et des comités d'hémovigilance. Et ça, je voudrais y revenir parce que je pense que c'est très important, et que le projet de loi n° 438, lorsqu'il prévoit, dans la loi comme telle, la mise sur pied du Comité d'hémovigilance, ce qu'il fait, dans le fond, c'est de donner à ce Comité un statut permanent et légal et il fait en sorte que son mandat soit pleinement légitime et qu'il puisse garantir à la population du Québec une plus grande sécurité en matière de produits sanguins.

Alors, le Comité d'hémovigilance, son mandat, en réalité, c'est d'aviser le ministre sur les risques reliés à la transfusion sanguine, sur les infections transmissibles par voie sanguine et toute nouvelle information pertinente sur les produits sanguins. Alors, ça, je pense que, là-dessus, il faut être précis. C'est que les avis du Comité d'hémovigilance vont être basés notamment à partir d'informations qui vont être recueillies tout au long de la chaîne transfusionnelle. La chaîne transfusionnelle, ça part du donneur du sang à la personne qui le reçoit, en passant par le fournisseur du produit, en passant par les centres hospitaliers, pour finir par arriver au receveur comme tel. Ces informations, elles vont avoir été cueillies du début à la fin, elles vont être uniformes partout à la grandeur du système comme tel et elles vont être reliées et intégrées dans un seul système d'information qui va nous permettre en tout temps de connaître, s'il y a des problèmes qui se posent, à quel endroit ils se posent, de quels types de problèmes il s'agit, qui a reçu un produit qui peut occasionner à l'occasion certains effets indésirés.

Et, à travers ce système d'information, nous pouvons remonter la chaîne et aller à la source du problème, si jamais il y en a un, ce qui n'existait pas dans le système canadien auparavant et ce que la commission Krever recommandait pour la poursuite du dossier comme tel, pour revoir les façons de faire. Le Québec s'est assuré d'avoir ce Comité d'hémovigilance. Non seulement il s'est assuré de le mettre sur pied, mais il l'a inscrit dans la loi n° 438, parce que, comme ça, il n'y a personne qui pourra le faire sauter à un moment ou l'autre; il va toujours exister, tant et aussi longtemps que le système comme tel va exister.

Je voudrais revenir, M. le Président, sur les centres hospitaliers et les comités de médecine transfusionnelle, parce que les centres hospitaliers sont et ont toujours été les principaux utilisateurs du sang et de ses dérivés, et ceux-ci vont voir leurs responsabilités accrues.

Déjà, les centres hospitaliers assurent la gestion et le contrôle des activités qui seront liées à la transfusion, hein; qu'on pense, entre autres, à la conservation, à la gestion des stocks ou à la transfusion comme telle. Il y aura – et c'est déjà commencé – 20 centres hospitaliers désignés, dont celui du Centre hospitalier régional de Rimouski, qui seront reliés à des centres hospitaliers associés. Ceux-ci devront maintenant mettre en place des comités de médecine transfusionnelle pour encadrer les pratiques médicales en matière de transfusion en fonction des normes et des standards internationaux. Ces comités vont relever, dans chacun des centres hospitaliers désignés, du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens. Ce Conseil des dentistes et pharmaciens, là, et des médecins, ça existe dans tous les hôpitaux du Québec. C'est eux qui encadrent la pratique médicale et qui voient à la bonne marche de la pratique comme telle. De plus, les centres hospitaliers devront financer l'achat des produits sanguins grâce à des budgets additionnels qui leur seront octroyés à même les argents qui sont actuellement consacrés au système de sang comme tel.

Vous savez, les centres hospitaliers, par ces nouvelles responsabilités, vont nous permettre d'assurer ainsi une utilisation adéquate, pertinente, sécuritaire et optimale des produits sanguins. Vous savez, lorsque l'on paie pour quelque chose, on fait bien attention à son utilisation, et je pense que, là-dessus, c'est une garantie de voir les responsabilités du centre hospitalier augmenter.

Je voudrais rappeler aussi que, dans la foulée des rapports Gélineau et Krever, le système de gestion du sang du Québec respecte leurs recommandations, et c'est pourquoi Héma-Québec a opté pour un système intégré d'information du donneur au receveur et qu'il y a de prévu des comités de médecine transfusionnelle qui veillent à une meilleure utilisation des produits sanguins. Et, il faut toujours le rappeler parce que je pense que c'est très important, Héma-Québec est une corporation indépendante du gouvernement pour l'approvisionnement en sang. Ça lui donne toute sa marge de manoeuvre, et les comptes à rendre sont à la population, et sa marge de manoeuvre est en soi le reflet des besoins de la population avant tout. Alors, je pense que, là-dessus, le fait que ce soit une corporation indépendante donne des garanties de plus à la population.

Naturellement, des budgets d'achat des produits sanguins sous la responsabilité des centres hospitaliers – je viens de vous en glisser un mot – ça augmentera non seulement l'efficacité, mais aussi l'efficience et l'assurance des meilleurs standards de qualité et de sécurité parce que Héma-Québec sera toujours en contact avec le BPBR, le système des normes reconnues internationalement, et qu'Héma-Québec aura, par l'entente qui a été signée lors de la conférence des ministres de la Santé à Toronto en mars dernier, des échanges continus avec les Services canadiens du sang, notamment l'information épidémiologique et l'accès au sang et à ses dérivés. Alors, je pense que le système d'Héma-Québec est caractérisé par une clarification des rôles et des fonctions et surtout qu'il est caractérisé aussi par une imputabilité de chacun des éléments du système. Chacune de ses composantes est étroitement interreliée pour garantir aux Québécoises et aux Québécois une plus grande sécurité non seulement dans la collecte, mais dans la production et l'utilisation des produits du sang.

(17 h 30)

Alors, M. le Président, c'étaient quelques données que je voulais souligner à l'attention de la population pour lui dire que nous avons à coeur de lui donner, de lui offrir un système du sang intégré, de qualité, accessible et que, pour cela, nous avons choisi, à l'intérieur du projet de loi n° 438, de signifier clairement, à l'intérieur de la mission d'Héma-Québec, ces principaux éléments dont je viens de vous entretenir. Il y aurait bien d'autres choses à vous dire, mais je pense que, là-dessus, M. le ministre de la Santé vous en a entretenu tout à l'heure. Et je vous dirais que, dans quelques mois, nous pourrons revenir sur le sujet. Nous pourrons évaluer le système, et je suis persuadée que les Québécoises et les Québécois qui auront accès aux services en seront pleinement satisfaits parce que, dans le projet de loi, on a prévu les éléments d'encadrement qui vont nous permettre de rendre responsables chacun et chacune des partenaires associés au système. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Rimouski. Nous allons maintenant céder la parole au député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président. Vous allez me permettre de prendre le projet de loi et tout de suite de regarder les notes explicatives du projet de loi et de vous les commenter. Ce projet de loi confie à Héma-Québec la mission d'assurer notamment à la population un approvisionnement en sang et en produits et constituants sanguins. La première question qu'on se pose, à la lecture même de cette première note, bien, c'est: Pourquoi? Quelles en sont les véritables raisons? On peut également se questionner: Quelles sont les garanties qui vont être associées à cette nouvelle structure d'Héma-Québec? Combien ça va coûter? On va y revenir.

La seconde note. Le projet de loi précise qu'Héma-Québec n'est pas un mandataire du gouvernement et qu'aucun fonctionnaire ne peut être membre de son conseil d'administration. Le projet accorde cependant au ministre de la Santé et des Services sociaux certains pouvoirs d'intervention... En passant, M. le Président, on n'a jamais eu autant de projets de loi qui augmentaient le nombre de pouvoirs d'intervention du ministre de la Santé dans toute l'histoire du Québec. Je pense qu'il a le record, le championnat. Je ne sais pas quel est le besoin si grandiose d'avoir autant de pouvoirs. Je poursuis: ...si le ministre constate, entre autres, que la qualité et la sécurité des produits distribués par Héma-Québec ne sont pas suffisamment assurées.

M. le Président, dans les notes explicatives du projet de loi, le ministre laisse entendre qu'il a besoin de plus de pouvoirs parce qu'il n'est pas certain de la qualité et de la sécurité des produits distribués par Héma-Québec. Je pense que c'est une note qui est quand même révélatrice de toute la possibilité d'avoir une difficulté majeure avec Héma-Québec. Je voudrais poursuivre, au moins mentionner en tout cas que, quand le ministre est obligé de mettre ça dans la loi, eh bien, je pense qu'on peut se poser de sérieuses questions.

Le projet de loi prévoit aussi qu'Héma-Québec devra financer ses activités, particulièrement à l'aide des sommes qui lui seront payées par les établissements de santé et de services sociaux pour la fourniture de ses produits. M. le Président, quand on sait comment ça fonctionne, le budget d'un hôpital, eh bien, qu'est-ce qui va arriver avec ses revenus, qu'est-ce qui va arriver avec ses dépenses? On sait qu'habituellement les hôpitaux ont des enveloppes fermées, on sait qu'ils ont eu des contraintes budgétaires énormes, qu'ils en ont encore; et non seulement il y a des contraintes, mais il y a aussi des déficits passés. Alors, est-ce que le ministre ne sera pas tenté, comme il l'a fait très souvent, d'aller là aussi chercher des argents à même ces revenus? Quelles sont les garanties que, lors d'une coupure budgétaire importante dans un établissement de santé, eh bien, ce ne sera pas au détriment d'Héma-Québec? On n'en parle pas du tout dans ce projet de loi.

Je poursuis. Le projet de loi crée, de plus, le Comité d'hémovigilance dont la principale fonction est de donner au ministre de la Santé et des Services sociaux des avis sur l'état des risques reliés à l'utilisation du sang, des produits et des constituants sanguins, et ce Comité sera composé de personnes nommées par le ministre. M. le Président, il y en a un, actuellement, un comité d'hémovigilance et il a fait une seule demande au ministre, c'est-à-dire une analyse comparative des avantages et des inconvénients des deux systèmes, et ça, ça a été demandé depuis plusieurs mois. Jamais, jamais le ministre n'a acquiescé à la demande du Comité d'hémovigilance. Alors, on peut sûrement se demander ce qui va arriver d'un comité québécois nommé par le ministre. Eh bien, on commence déjà à penser qu'il pourrait y avoir des nominations qui seront faites en fonction de la pensée du ministre, et ça, ce serait déplorable dans tout le système sanguin que nous connaissons.

Enfin, le projet de loi prévoit les mesures permettant de déterminer le moment où Héma-Québec commencera ses activités de collecte, de traitement et de distribution des produits. La question qu'on se pose, c'est: Est-ce qu'on sera prêt? On sait que ça devrait être très bientôt, début de l'automne, en septembre, et nous doutons que le gouvernement du Québec, par Héma-Québec, puisse être en mesure de donner ce nouveau produit.

M. le Président, cette décision, comme l'a vraiment très bien souligné le député de Nelligan, est une décision du gouvernement péquiste, une décision politique: créer sa propre agence de sang. On met donc les considérations politiques avant celles de la santé et la sécurité de la population. En se désistant du système canadien, le ministre ne se préoccupe pas des appréhensions de l'ensemble des Québécoises et des Québécois qui éprouvent un malaise face aux récentes failles du système de collecte de sang. On va dédoubler. C'est donc la création de deux systèmes, deux structures, l'un québécois, l'autre canadien, qui va entraîner un dédoublement des coûts, des problèmes de communication, sûrement des manques de coordination. Cette décision entraînera l'émission de deux permis différents pour deux systèmes qui ont le même rôle, M. le Président.

La question la plus importante qu'il faut se poser, c'est celle de la qualité et de la sécurité des produits. Le système québécois doit offrir des garanties de sécurité à toute épreuve afin que la santé et la sécurité de la population soient entièrement protégées. Il doit s'assurer qu'il y ait un système identique pour la surveillance et le contrôle. Le Comité d'hémovigilance existant s'inquiète des dangers potentiels du système québécois. M. le Président, ce n'est pas les députés de l'opposition, c'est le Comité d'hémovigilance existant qui formule ces inquiétudes.

Les échéances, M. le Président. La nouvelle agence canadienne doit assumer la gestion du système national d'approvisionnement et de distribution de sang à compter du 1er septembre 1998. La Société canadienne de l'hémophilie doute – c'est la Société canadienne de l'hémophilie, ce n'est pas les députés de l'opposition – cette Société doute que Québec soit capable de respecter les échéanciers pour cette date. Ses inquiétudes portent surtout sur l'obtention d'une licence et l'absence d'un département d'affaires réglementaires à Héma-Québec, le transfert de la licence et du département se faisant de la Croix-Rouge vers les Services canadiens du sang seulement. De plus, le ministre n'a jamais répondu à la demande du Comité d'hémovigilance – je l'ai dit tantôt – de livrer une simple analyse comparative des avantages et des inconvénients des deux systèmes, M. le Président.

Les coûts. Selon notre analyse, le nouveau système coûtera plus cher, le budget passant de 86 000 000 $ à 110 000 000 $. De plus, un montant additionnel de 17 000 000 $ en trois ans sera consacré à sa mise en place et cette agence québécoise du sang nécessitera un budget annuel de quelque 125 000 000 $ en 1998-1999, comparativement à 86 000 000 $ en 1997-1998 versés à la Croix-Rouge.

Les nouveaux systèmes de gestion de sang québécois proposent un système intégré d'information qui contiendra toutes les données pertinentes sur les donneurs. Cette base de données sera en contact avec les Services canadiens du sang pour maintenir à jour la liste des donneurs qui sont exclus partout au Canada. C'est toutefois Héma-Québec qui assurera la coordination des liens avec l'agence canadienne. Un membre de l'organisme québécois siégera au sein du conseil d'administration des Services canadiens du sang, et vice versa, comme on l'a mentionné. En adoptant un système travaillant en parallèle avec l'agence canadienne, un système qui n'est ni transparent ni imputable, cela créera des barrières entre les deux services. Nous agissons ainsi à titre d'observateurs et non de décideurs, M. le Président.

(17 h 40)

M. le Président, j'aimerais à ce moment-ci rappeler les grands points saillants du rapport de M. Krever et les principales recommandations extrêmement importantes et pertinentes. Je pense que c'est sûrement la personne la plus qualifiée à travers le Canada pour nous faire ce genre de recommandations. D'abord, le Canada devra se doter d'un système national de collecte du sang, pas d'un système séparé, pas d'un système divisé, un système national complet, M. le Président.

Les provinces devraient indemniser les personnes infectées. M. le Président, je souhaite, au nom sûrement de tous les patients qui doivent subir les affres de ces erreurs, que notre gouvernement puisse reconnaître, lui aussi, et donner les indemnités nécessaires à ceux qui en ont vraiment besoin.

Autres recommandations du rapport Krever. Il faudrait inspecter annuellement les différents centres de transfusion. Il faudrait examiner tout constituant sanguin exigé par un médecin. Le service de transfusion autologue – c'est le don de sang à soi-même – devra être élargi; on peut penser particulièrement aux greffes. Il faudra obtenir le consentement des patients face aux risques des transfusions de sang. Les dossiers sur les transfusions sanguines devraient être conservés indéfiniment. Les patients ayant reçu du sang entre 1978 et 1985 devraient être informés des risques de contamination au VIH. Il faudra retracer les dates et l'emplacement des dons de sang à risque. Les donneurs de sang ne devraient pas être payés. C'est l'ensemble des points saillants des principales recommandations du rapport Krever.

M. le Président, quand j'ai préparé ce court 20 minutes, je me suis dit: Je vais essayer de trouver des témoignages des gens plutôt que d'aller faire des affirmations – on nous accuse de tous les noms, à tort ou à raison. Mais j'ai pensé aller chercher des témoignages de gens crédibles, particulièrement ceux qui travaillent avec nous, sur la colline de la presse; je pense à celle qui est la présidente de la tribune, Mme Katia Gagnon, qui s'est vraiment intéressée au dossier, qui l'a suivi depuis ses tout débuts.

Elle mentionne dans un article: «Lors d'une rencontre d'une journée avec le Comité québécois d'hémovigilance, qui constitue désormais la plus haute instance pour la surveillance des produits sanguins, M. le ministre a longuement mis de l'avant les avantages du système purement québécois, moins cher et mieux adapté, selon le ministre. En plusieurs heures de réunion, le ministre n'a pas dit un mot sur les aspects positifs du système canadien. Aucune discussion sérieuse n'a d'ailleurs eu lieu sur une possible inclusion du Québec dans l'agence canadienne. Plusieurs membres du Comité d'hémovigilance sont ressortis ulcérés de leur rencontre avec le ministre de la Santé, puisqu'ils avaient transmis au ministre une liste précise de questions auxquelles ils demandaient une réponse. Le ministre n'a pas daigné – comme c'est maintenant son habitude; on le connaît, ça fait plusieurs années – répondre aux représentants du Comité d'hémovigilance. On voulait, en gros, une liste des avantages comparatifs entre les deux systèmes et, de cette façon, on serait sûrement mieux en mesure de se prononcer par la suite. Les membres du Comité demandaient notamment au ministre de dresser un portrait des coûts des deux systèmes, de préciser l'encadrement légal de son système québécois et le type d'arrimage qu'il comptait conserver avec le réseau canadien. Au total, une liste d'une douzaine de questions. Le constat de la réunion est clair, le ministre n'a pas l'intention de consulter le Comité d'hémovigilance avant de décider. Les membres du Comité seront d'ailleurs mis devant le fait accompli.» Et c'est ce qui est arrivé, M. le Président.

On peut s'inquiéter de la façon de travailler du ministre. Nous, on est habitués. On l'a connu sur d'autres tribunes ou dans d'autres dossiers, celui de la fermeture des hôpitaux, celui de l'assurance-médicaments, et on sait qu'il a une difficulté à consulter. Mais là on est dans un dossier extrêmement grave, le dossier du sang contaminé. Par la suite, la solution et, nous l'espérons, un système vraiment utile à la population et sécuritaire. Eh bien, le ministre refuse lui-même de faire une analyse parallèle entre les avantages et les inconvénients du système canadien, les avantages et les inconvénients du système québécois, celui d'Héma-Québec.

«De ce compte rendu, il apparaît – et je poursuis toujours, là, Mme Gagnon – évident que la majorité des membres s'inquiètent des dangers potentiels du système québécois.» On y souligne que le modèle canadien est mieux connu que le modèle québécois. Il reste beaucoup de points d'interrogation, M. le Président. Et cette étude, qui aurait été vraiment utile si elle avait été faite par des experts et sûrement bien faite, elle nous aurait permis un éclairage beaucoup plus apprécié sur le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui.

M. le Président, une éditorialiste chevronnée et très connue et reconnue, Mme Lysiane Gagnon. Elle intitule son éditorial d'avril dernier: Un gros problème de crédibilité . Elle commence ainsi: «Compte tenu de ce qu'il a fait de nos services de santé, faut-il faire confiance au ministre actuel, quand il nous vante les mérites de son nouveau système de gestion du sang – un système "souverain" en "partenariat" avec le reste du Canada – et elle met entre parenthèses – tiens, tiens? Faut-il applaudir ou s'effrayer?» M. le Président, ce n'est pas les critiques libéraux qui disent ça, c'est des gens qui sont familiers avec les relations avec les citoyens, qui sont en mesure de bien faire des commentaires appropriés, surtout dans un dossier aussi important.

Elle poursuit: «Les hémophiles, eux, sont effrayés. Ils estiment que ce système a été improvisé et ne pourra pas prendre efficacement la relève de la Croix-Rouge en septembre. L'un de leurs porte-parole, Pierre Desmarais, a carrément déclaré qu'il craignait pour la sécurité des Québécois.

«Le lancement de Héma-Québec a certainement été improvisé – ...la décision finale n'était pas encore arrêtée! En plus, il s'est ouvert sur une grosse entorse à la vérité.» Ce n'est pas l'opposition qui dit ça, c'est une éditorialiste chevronnée.

«"Le système de gestion du sang du Québec respecte les recommandations de la Commission Krever", proclame le communiqué du ministre. Faux.» C'est faux, M. le Président. «La Commission Krever recommandait l'établissement d'un système d'approvisionnement centralisé.» Et on sait qu'on veut en faire un pour le Canada, un pour l'ensemble des provinces et un pour le Québec. Pareil comme si le sang, ce n'était pas la même chose au Québec par rapport au Canada, M. le Président. «Mais c'est une option que le ministre de la Santé a manifestement écartée dès le début, pour des raisons qui ont probablement à voir avec la politique et un insatiable besoin de contrôle.» On en a parlé tantôt, M. le Président.

«"Aucune discussion sérieuse n'a eu lieu sur la possibilité d'inclure le Québec dans l'Agence canadienne".» On n'a même pas fait l'effort, M. le Président. Alors, là, vous pouvez facilement comprendre. On est tout près d'avoir des élections; on le souhaite le plus tôt possible. Vous le savez, on a même présenté une motion, M. le Président. Et de l'autre côté, du côté du gouvernement péquiste, on cherche à avoir des chicanes pour montrer que ça ne peut pas marcher. Ça a marché, par exemple, dans d'autres dossiers: la main-d'oeuvre, les commissions scolaires linguistiques. Il y a quelques années, c'était le dossier de l'immigration. Il y en a eu des ententes, puis ça marche quand on a de la bonne foi de chaque côté.

M. le Président, je voudrais poursuivre en mentionnant que Mme Lysiane Gagnon souligne, elle aussi, que «le Comité d'hémovigilance, malgré le rôle crucial qu'il devra jouer, a été mis devant le fait accompli. Ce comportement autoritaire, qui fait fi de l'expertise médicale, est tout à fait caractéristique de la façon d'agir habituelle du ministre qui préfère prendre ses conseils auprès de ses fidèles disciples».

Et je pourrais poursuivre, M. le Président, vous me faites signe qu'il ne reste pas beaucoup de temps. Il y a plusieurs commentaires. Même, je pense que le ministre de la Santé du Canada s'inquiète sérieusement de ce qui peut arriver. Il l'a fait dans une lettre qu'il a envoyée au ministre. Le ministre Allan Rock désapprouve, à mots couverts, le choix de Québec de faire cavalier seul avec Héma-Québec. Mis devant le fait accompli lui aussi, il a mentionné au ministre de la Santé du Québec certains extraits du rapport Krever: «Il faut éviter d'avoir une multitude de systèmes d'approvisionnement en sang locaux ou régionaux», écrit celui qui a passé quatre ans à enquêter sur le scandale du sang contaminé.

M. le Président, j'avais même un article de celle qui prend les rênes de Héma-Québec. S'il n'avait tenu qu'à Mme Décary, la patronne du nouveau fournisseur de sang québécois, Héma-Québec n'aurait jamais vu le jour. La Croix-Rouge, dont elle tenait fermement les rênes, aurait tout simplement continué de collecter le sang dans la province.

(17 h 50)

Alors, M. le Président, vous me faites signe qu'il ne reste presque plus de temps. J'aimerais conclure et mentionner, comme mon collègue de Nelligan l'a très bien fait, que la création d'Héma-Québec tourne à l'affrontement politique Ottawa-Québec, alors que cette question devrait transcender les lignes partisanes, les préoccupations de partisanerie politique, même si c'est à la veille d'une élection. La décision du gouvernement de créer sa propre agence était prévisible. Ceux qui connaissent bien le gouvernement du Parti québécois savaient qu'il voyait là une chance de faire une chicane puis de se manifester.

Le scandale des urgences, les compressions dans les hôpitaux, les fermetures, le transfert de Québec-Transplant vers Montréal, son retour à Québec, voilà plusieurs exemples qui démontrent l'incohérence du ministre de la Santé dans ses décisions, ce qui a lieu de nous faire craindre que derrière Héma-Québec se cache un ministre dont la réputation se trouve gravement entachée et un ministre qui se sert des victimes pour rebâtir sa crédibilité politique. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Nous allons maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 438 qui est devant nous est un projet de loi certainement très important pour nos concitoyens, pour les Québécois et les Québécoises, parce que c'est un projet de loi qui touche directement la santé. Et c'est un projet de loi qui fait écho à une situation que nous avons connue non seulement au Québec et au Canada, mais dans beaucoup de pays occidentaux: le problème des transfusions sanguines, le problème de la conservation du sang, le problème de sa disponibilité, lorsque nécessaire, pour venir soigner des personnes, pour leur permettre de subir des opérations ou, lors d'accidents, pour leur permettre d'avoir des transfusions sanguines. Donc, M. le Président, c'est un problème de vie, c'est un problème fondamental. Alors, on ne peut pas le traiter à la légère.

Je pense que c'est un projet de loi, une situation qui doit être traitée par les parlementaires, par les gens qui sont autour des députés et des ministres avec tout le sérieux et l'attention possibles. Car, on le sait, on va vu dernièrement les débats qui ont eu lieu à travers le pays, à travers le Canada, à travers le Québec, le débat qui a mis en évidence la souffrance et les séquelles que les personnes qui ont eu des transfusions de sang qui était contaminé ou de mauvaise qualité ont subies ou peuvent avoir. C'est des drames humains, M. le Président. Ça peut changer la vie et l'existence de familles entières de citoyens. Et quand même qu'après on va aller les rembourser ou les indemniser avec de l'argent, on ne remplace jamais une vie ou on ne remplace jamais une vie familiale ou une qualité de vie.

Alors, M. le Président, ce projet de loi là me semble un peu particulier. Nous avons un ministre qui, ayant constaté, comme les autres provinces canadiennes, les séquelles et les manquements au système sanguin canadien, au lieu d'aller s'asseoir avec ses collègues des autres provinces, décide qu'il va faire lui-même son propre système. Nous sommes dans un monde d'interrelations, nous sommes dans un monde où les barrières économiques, les barrières politiques tombent de plus en plus. Il suffit de regarder l'Europe pour les barrières économiques et politiques, bien sûr, il suffit de regarder l'Amérique du Nord, pour l'instant, les barrières économiques, avec ce que ça entraîne comme barrières politiques qui tombent de facto sans même que les politiciens s'en rendent compte. Car, lorsqu'on prend des décisions économiques, eh bien, ça a un impact sur les décisions sociales, sur les lois, sur les coûts et sur les manières de donner des services ou même de gouverner les pays et de les administrer.

Et là, M. le Président, on a un projet de loi qui, en matière de santé, devrait suivre ce mouvement-là, particulièrement dans le Canada. Eh bien, non! Que retrouvons-nous dans ce projet de loi là? On trouve le plus pur isolationnisme que l'on puisse voir actuellement. On ne voit ça dans aucun pays. Même les pays qui sont soumis à l'embargo, comme Cuba, veulent sortir de l'isolationnisme. Nous, on y rentre au niveau médical, quelque chose là de paradoxal de la part d'un gouvernement dont le premier ministre se promène actuellement aux États-Unis pour leur dire: Nous sommes ouverts sur le monde, nous sommes prêts à vous accueillir. Mais, lorsqu'il s'agit de collaborer avec nos propres voisins actuels en matière de santé, en matière de sécurité de nos compatriotes, eh bien, non, ce n'est pas le même discours, ce n'est pas la même application.

Alors, M. le Président, je déplore cette attitude, je déplore cette approche. Il m'aurait semblé qu'il serait préférable que le ministre s'assoie avec ses collègues des autres provinces, avec le gouvernement fédéral, si c'est nécessaire, et que nous discutions tous ensemble sur le meilleur moyen, la meilleure solution pour avoir un système de collecte et de distribution sanguine efficace, sécuritaire et peu cher au Canada. Et ce n'est pas ça qui a été fait.

Alors, Héma-Québec est dans la plus pure ligne de ce gouvernement: l'isolationnisme, le repli sur soi-même, le refus de collaborer avec les partenaires, avec les voisins. Et ça va créer des problèmes, M. le Président. Il ne faut pas croire que ça n'aura pas de conséquences. Il va y avoir des conséquences. Certes, on peut en étaler aujourd'hui quelques-unes, et je vais y venir un peu plus tard. Mais cette décision politique, qui n'est pas une décision dans le meilleur intérêt des Québécois et des Québécoises, aura dans le futur, certainement, des effets ou créera des difficultés que nous ne pouvons même pas connaître maintenant, alors que, si nous étions tous ensemble, il serait peut-être plus facile de les prévoir ou d'y remédier. Et c'est une des raisons pourquoi, moi, je m'oppose à cette chose-là, M. le Président, pourquoi je ne suis pas d'accord avec ce projet de loi là, avec cette manière de procéder.

Prenons un exemple, M. le Président. À une époque où on coupe dans les hôpitaux un certain nombre de services avec pour prétexte des raisons des fois d'économie, des raisons de meilleure efficacité, où on ferme des hôpitaux dans l'est de Montréal ou dans Montréal pour des raisons d'efficacité, en disant que ceux qui sont ensemble, les plus gros, auront une meilleure synergie, auront une meilleure facilité de capacité de soigner les citoyens et de répondre à leurs besoins, eh bien, M. le Président, on fait le contraire avec ce projet de loi là. On va dédoubler un système qui, s'il avait été fait en accord, en coopération avec nos amis canadiens, nos compatriotes canadiens, aurait certainement permis des économies, premièrement. Mais il y a d'autres problèmes qui vont venir après.

Juste au niveau des économies, M. le Président, je lisais dernièrement – et c'est quelqu'un qui travaille bien ces dossiers-là – un journaliste, un doyen de la Tribune de la presse, M. Normand Girard, qui disait, dans un article, qu'il y a une étude qui a été faite et, après avoir discuté avec des gens dans le milieu, des gens qui sont des spécialistes de ça, la nouvelle agence, donc ce que le ministre est en train de créer par son projet de loi n° 438, coûtera aux Québécois 39 000 000 $ de plus, juste pour ça. Moi, j'estime qu'à une époque où on n'est pas capable, pour des raisons strictement budgétaires, de donner des fois tous les services à nos compatriotes, tous les services dont ils ont besoin actuellement et qu'on reporte à plus tard...

J'écoutais le ministre cet après-midi, qui disait: Dans des cas... Certes, il ne peut pas avoir le contrôle de tous les cas. Je ne dis pas que le ministre, il dirige lui-même un hôpital, mais il dirige au moins les budgets. Et lorsqu'il nous disait: Oui, cette année, on a fait des compressions, le système n'était pas en place, puis, maintenant, ça commence à aller, puis, un peu plus tard, on pourra en avoir, ça va s'améliorer... Bien, on va dépenser 39 000 000 $. Il me semble, puis je ne tombe pas dans la démagogie de dire: Il dépense de la publicité ou pas... Mais juste dans le propre système, 39 000 000 $, est-ce qu'on a vraiment besoin de dépenser 39 000 000 $ de plus pour donner aux Québécois et aux Québécoises le même service qu'ils pourraient avoir en travaillant avec le Canada? Moi, je ne crois pas. Je pense que le 39 000 000 $ pourrait aller à deux endroits: premièrement, à des soins à des Québécois et Québécoises qui en ont besoin; mais, si encore on découvrait qu'ils n'en ont pas besoin, bien, qu'ils servent donc à baisser le déficit plus rapidement. Ça, ce serait de la bonne administration, de la bonne gestion. Alors, M. le Président, déjà ça, au départ...

Il y a beaucoup d'autres choses. Le dédoublement n'amène pas seulement des problèmes financiers; il va amener des problèmes de coordination. Qu'est-ce qui va se passer, s'il y a une pénurie de sang dans une certaine région au Québec? Il y a une pénurie de sang, là, puis on a de la difficulté à en trouver. J'ai vu ça, moi, aux États-Unis, à l'occasion, ou même en Europe, et on voit des annonces à la radio, à la télévision: Il y a une pénurie de sang. S'il vous plaît, d'urgence, les donneurs, voulez-vous venir donner du sang parce qu'il y a une pénurie?

Bien, au Québec, en étant associés avec nos amis Canadiens dans une même agence, nous pourrions, à ce moment-là, appeler nos amis à Toronto, ou eux-mêmes, en gérant ça avec eux, diraient: Ah! on a une pénurie dans la région du Québec, dans la province de Québec. Vite, on en envoie! Ou vice versa, pour Toronto, le Nouveau-Brunswick et à travers le Canada. Ce serait une solution, il me semble, logique, la plus raisonnable, la plus pratique. Ça, c'est un des effets du dédoublement.

Un autre petit... Un autre problème important, M. le Président, pas petit, important: les régions frontalières. Si on manque de sang dans la région de l'Outaouais, comment ça va se passer? Les gens qui travaillent à Ottawa puis qui dorment à Hull, qui retournent dormir chez eux, ils vont le donner où, leur sang? Puis c'est lequel qui va marcher? Puis comment ça va fonctionner? C'est quoi, la coordination? Et ça va être compliqué, là. On a vu, dans certaines circonstances, que c'était difficile de coordonner les services, même au Québec, entre nous. On l'a vu, dans la crise du verglas, quand des services de protection civile, de pompiers, de police avaient de la difficulté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi, M. le député de LaFontaine. À ce stade-ci, nous avons maintenant atteint la fin de nos débats, puisqu'il est maintenant 18 heures. Donc, comme vous n'avez pas fini votre intervention, je tiens à vous rappeler qu'il vous restera maintenant un temps de 12 minutes pour terminer votre allocution, la semaine prochaine.

Alors, étant donné qu'il est 18 heures, j'ajourne maintenant les travaux au mardi 25 mai 1998, à 10 heures.

(Fin de la séance à 18 heures)


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