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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mardi 30 mars 1999 - Vol. 36 N° 13

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de M. Roger Dehaybe, administrateur général de l'Agence de la francophonie, et du consul général de la République hellénique à Montréal, M. Ioannis Gabriel Papadopoulos

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures deux minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Affaires du jour

Alors, nous entreprenons aujourd'hui notre séance par les affaires du jour, et j'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer l'item à l'ordre du jour, s'il vous plaît.

M. Boisclair: M. le Président, à cette étape-ci, je comprends qu'il y aurait consentement pour déroger à l'article 87 et procéder immédiatement à la plénière sur les crédits budgétaires.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement pour déroger à l'article 87. Selon l'article 87, on devrait procéder au débat sur le discours du budget. Alors, comme nous passons à l'étude des crédits immédiatement, ça prend une dérogation. Alors, il y a consentement.

Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: En conséquence, M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 13.

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 13 du feuilleton, il s'agit des crédits budgétaires pour l'année financière se terminant le 31 mars de l'an 2000 déposés par le ministre d'État à l'Économie et aux Finances le 25 mars 1999 et renvoyés en commission plénière en vue de l'adoption de un quart de ces crédits. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, je fais motion, à la suite d'une entente avec l'opposition concernant l'étude des crédits provisoires, pour que nous procédions à l'adoption du quart des crédits en vertu de l'article 280 de notre règlement, et ce, selon les modalités suivantes:

D'abord, à partir de maintenant, et ce, pour une période d'une heure, qu'il y ait échange entre le ministre des Régions et le député de Montmagny-L'Islet en accordant à un représentant de chaque groupe parlementaire une période maximale de cinq minutes pour des remarques préliminaires ainsi qu'une période de cinq minutes au député indépendant;

Ensuite, pour une période d'une heure, qu'il y ait échange entre la ministre de la Justice et le député de Marquette en accordant à un représentant de chaque groupe parlementaire une période maximale de cinq minutes pour des remarques préliminaires ainsi qu'une période de cinq minutes au député indépendant;

Après les affaires courantes, pour une période d'une heure, qu'il y ait échange entre le ministre de l'Environnement et le député d'Orford en accordant à un représentant de chaque groupe parlementaire une période maximale de cinq minutes pour des remarques préliminaires ainsi qu'une période de cinq minutes au député indépendant;

Ensuite, pour une période d'une heure, qu'il y ait échange entre le ministre de la Sécurité publique et le député de Saint-Laurent en accordant à un représentant de chaque groupe parlementaire une période maximale de cinq minutes pour des remarques préliminaires ainsi qu'une période de cinq minutes au député indépendant;

Finalement, pour une période d'une heure, qu'il y ait échange entre le président du Conseil du trésor et ministre d'État à l'Administration et à la Fonction publique et le député de Vaudreuil et le député de Westmount– Saint-Louis en accordant à un représentant de chaque groupe parlementaire une période maximale de cinq minutes pour des remarques préliminaires ainsi qu'une période de cinq minutes au député indépendant;

Qu'au terme de ces échanges, l'Assemblée se prononcera sur le rapport de la commission plénière ainsi que sur le projet de loi y faisant suite, le tout conformément à l'article 281 de notre règlement. Après quoi, conformément à l'article 281, l'étude de l'ensemble des crédits budgétaires, sauf ceux de l'Assemblée, sera renvoyée en commission permanente.

Je propose donc, M. le Président, que nous fassions un ordre de la Chambre de cette motion.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté.

M. Boisclair: Alors, en conséquence, M. le Président, je ferais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. En conséquence, l'Assemblée se constitue en commission plénière afin d'entreprendre l'étude des crédits provisoires pour l'année 1999-2000, et je suspends donc les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 6)

(Reprise à 10 h 8)


Commission plénière


Étude des crédits provisoires 1999-2000

M. Brouillet (président de la commission plénière): Je rappelle que la commission plénière se réunit afin d'étudier les crédits provisoires pour l'année 1999-2000 conformément à l'ordre adopté par l'Assemblée.


Régions

Au cours des 60 prochaines minutes, nous allons procéder à un échange entre M. le ministre des Régions et M. le député de Montmagny-L'Islet. Au cours de cet échange, une période maximale de cinq minutes sera accordée à un représentant de chaque groupe parlementaire pour les remarques préliminaires et une période de cinq minutes sera réservée au député indépendant. Vous avez devant vous les cadrans qui vont vous permettre un peu de voir le déroulement de l'échange. On pourra réserver quelque deux minutes à la fin pour la conclusion du ministre, ce qui est dans les coutumes; habituellement, celui qui défend les crédits conclut. On réservera deux ou trois minutes, à la fin, pour sa conclusion, et, le reste, on partagera, comme d'habitude équitablement, selon l'ordre des questions et réponses.


Remarques préliminaires

Alors, M. le ministre, je vous cède la parole pour vos remarques préliminaires. Si vous voulez...

(10 h 10)

M. Jolivet: Non. En fait, je vais laisser plutôt le député de Montmagny-L'Islet commencer les remarques préliminaires, d'autant plus que je profiterai de la circonstance pour lui souhaiter bonne fête. C'est sa fête, aujourd'hui.

M. Gauvin: On ne vous cache rien.

M. Jolivet: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Brouillet): Alors, vous êtes d'accord? Vous désirez que, M. le député de Montmagny-L'Islet...

M. Gauvin: Oui.

Le Président (M. Brouillet): Bon, ça va. Alors, je vous cède le premier cinq minutes.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: M. le Président, c'est le souhait du ministre. Je pense que ça me fait plaisir, d'entrée de jeu, de prendre les quelques minutes qui me sont allouées pour rappeler que, à l'occasion du dépôt de ces crédits, plus particulièrement ceux du ministère des Régions, qui est un nouveau ministère, qui date de quelques mois, évidemment qui, comme nous le savons tous, joue un rôle important dans les régions du Québec, susceptible de jouer davantage un rôle important dans le futur, considérant le mandat que le gouvernement s'est donné, d'une part...

On se rappelle tous, à l'occasion de la loi qui a mis en place ce nouveau ministère, le ministère des Régions, les objectifs qui y avaient été présentés et défendus, à ce moment-là. Ça a créé beaucoup d'attentes dans chacune de nos régions. Ça avait pour effet de rassurer, concerter la plupart des organismes en région qui jouaient déjà un rôle. Je pense qu'ils ont pu, avec la venue du nouveau ministère des Régions... Ils ont cru comprendre que le ministère serait l'organisme, serait l'instance qui les aiderait à revoir leur mandat, à préciser les responsabilités de chacun et à se donner des objectifs très clairs pour supporter le développement local et régional, pour mettre en place les tables, ce qui a déjà été fait, mais des tables vraiment fonctionnelles pour que chacune des sous-régions ou des régions puisse, dans ce forum, définir de façon particulière les besoins et le souhait de chacune des régions qui sont, dans certains cas, assez différentes l'une de l'autre, dépendamment de la situation économique, ou de la situation géographique, ou des secteurs d'économie plus forts d'une région à une autre.

On réalise, M. le Président, qu'à l'occasion du dépôt des crédits le nouveau ministère des Régions a vu ses crédits diminuer pour son fonctionnement et, dans certains cas, les enveloppes dédiées dont il aura la responsabilité ont aussi été diminuées. Je ne sais pas quel message ça peut envoyer dans chacune de nos régions, mais je pense qu'on devra tous se questionner. Et j'ose croire que le ministre est en mesure de nous expliquer qu'est-ce qui a motivé le ministre des Finances, le gouvernement et le Conseil du trésor de confirmer tout récemment – le débat qu'on fait aujourd'hui est basé sur le dépôt des crédits – de nous confirmer quel rôle et qu'est-ce que le ministre entend défendre au sein de son gouvernement pour donner à son ministère aux régions la place qu'ils avaient souhaitée, la place qui leur revient, les outils nécessaires et le support nécessaire pour leur permettre... que ce soit d'abord au niveau de l'économie telle qu'on la connaît, le support à l'industrie pour le développement de l'emploi, que ce soit pour initier ou permettre aux régions de développer de nouvelles initiatives au niveau de l'économie sociale et donner plus d'espoir aux jeunes, davantage d'espoir aux jeunes qui ont eu une formation dans chacune de nos régions, avec la venue des services additionnels, comme celle que je représente, par exemple, avec un nouveau service collégial à Montmagny, si les gens de cette grande région pouvaient espérer que les jeunes, ayant leur formation dans leur propre région, puissent davantage se développer et espérer se créer des emplois dans des sous-régions. Et je prends la région de Montmagny comme exemple, mais ça représente assez bien plusieurs régions du Québec.

L'exode des jeunes, je pense que le ministère des Régions va avoir un rôle à jouer, un rôle à jouer au niveau du support à des organismes qui se cherchent une voie pour aller aider et supporter, que ce soient les municipalités qui veulent donner des mandats à des regroupements de citoyens, je pense que le ministère des Régions peut envoyer des indications très claires. Mais là ce qu'on réalise et ce qu'on va souhaiter que le ministre nous explique, c'est pourquoi il a, lui, au sein de son groupe du Conseil des ministres, de son groupe de parlementaires, accepté des diminutions de crédits pour les enveloppes qu'on aura à préciser tantôt à l'occasion d'échanges entre le ministre responsable et la formation politique.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Je vais céder la parole à M. le ministre pour son cinq minutes de remarques préliminaires. M. le ministre.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Je vous remercie, M. le Président. J'écoutais le député de Montmagny-L'Islet puis je me posais des questions, parce que nous sommes sur les crédits supplémentaires alors qu'il est en train de me parler des crédits qu'on aura la chance de débattre pendant quelques heures lors des crédits en commission parlementaire.

Je vais y revenir quand même et je répondrai aux questions qu'il a soulevées depuis tout à l'heure, mais je vous dirai qu'il y a eu un changement fondamental – je ne sais pas si le député s'en est aperçu – depuis 1994 avec l'adoption d'une politique sur le développement local et régional en 1997, la mise en place du ministère au mois de décembre 1997 et, finalement, le ministère avec ses pleins pouvoirs au 1er avril 1998.

Vous savez que la politique, à ce moment-là, en termes de ce qu'elle devait être, a changé, est diamétralement opposée par rapport à ce qu'ils avaient fait dans le passé. C'est une politique qui favorise la prise en charge du développement du milieu par le milieu. C'est une politique qui vise la simplification, la rationalisation et l'harmonisation des services. C'est une politique qui repose sur un État qui est associé avec des régions et qui travaille en concertation avec eux autres, mais des régions responsables. Puis c'est la fin du mur-à-mur. C'est donc un travail qui, depuis un an, a été accompli avec beaucoup de diligence et beaucoup de concertation avec les conseils régionaux et les centres locaux de développement.

Je suis un peu surpris de la position du député, d'autant plus que, pendant la campagne électorale, son chef avait dit, dans son milieu, à Rivière-du-Loup en particulier, et dans ma région, qu'il ne croyait pas au ministère des Régions, qu'il ferait disparaître les régions. Alors, il vient nous faire un peu la leçon. Je suis un peu surpris.

Mais, au palier local, 15 régions qui sont sous ma responsabilité, il y a 104 centres locaux de développement qui ont été agréés et pour lesquels des ententes de gestion ont été signées en élaborant un plan avec eux, pour l'année qui vient, d'action pour l'économie et l'emploi, avec des obligations de résultat définies dans les milieux locaux et par les milieux locaux. Les centres locaux de développement sont donc un des éléments du modèle original dont le Québec s'est doté en matière de développement local et régional, un modèle contrôlé et géré par les gens du milieu dans le cadre d'un partenariat avec le gouvernement visant la prise en charge de leur propre développement.

Et là on peut regarder ce qu'on a mis durant l'année 1998-1999. C'est une enveloppe globale de 43 100 000 $ pour leur permettre de remplir leur mandat, dont 3 400 000 $ pour les jeunes promoteurs dont il faisait mention, 15 000 000 $ sous la forme de prêts dans le fonds local d'investissement et 24 700 000 $ qui est au niveau de fonctionnement et soutien au niveau de l'économie sociale.

Au niveau régional, c'est 15 conseils régionaux de développement sous ma responsabilité, avec un budget de 54 500 000 $, et en tenant compte que Mme la ministre de la Métropole et des Affaires municipales est responsable des autres dans Laval et Montréal, mais 16 800 000 $ dans le Fonds de développement régional, 10 200 000 $ pour permettre d'exercer leur rôle de concertation et de planification régionale et 27 500 000 $ pour permettre d'assumer leur engagement antérieur. Et là on y reviendra tout à l'heure, sur cette question-là, en regard du dossier concernant le Fonds d'aide aux entreprises et le Fonds d'interventions régionales.

Donc, nous avons, à côté de ça, consolidé le réseau des CLD pour l'année 1999-2000. Vous l'avez remarqué: 3 900 000 $ pour les CLD les plus démunis, 2 600 000 $ pour les jeunes promoteurs, plus 1 000 000 $ dans la région de Montréal et de Laval, ce qui donne 3 600 000 $ pour les jeunes entrepreneurs, et 3 000 000 $ pour les entreprises d'économie sociale par le ministère de l'Environnement en regard de ce qui est inscrit dans les ressourceries.

Donc, c'est un renforcement entre l'État et les CRD. Il y a eu plusieurs ententes-cadres qui sont à être renouvelées; donc, il y en a sept à ce moment-ci. On a fait ensemble le bilan; on aura à proposer la façon dont on fera les prochaines ententes-cadres au niveau du Québec. Mais ce que je peux vous dire, c'est qu'on a développé dans l'ensemble du Québec des ententes spécifiques. Et, sur les ententes spécifiques, je peux vous dire – on aura l'occasion d'y revenir – c'est des ententes qui permettent à des ministères, des organismes gouvernementaux et autres de travailler de concert avec les régions en même temps que le ministère des Régions a la responsabilité.

Donc, les jeunes sont au coeur de nos préoccupations, et il faut assurer pour eux un cadre, une relève entrepreneuriale. Donc, dans ce contexte-là, j'aurai l'occasion de répondre – parce que le cinq minutes, ça passe vite, M. le Président. Mais je vous dirai que nous avons en même temps, en cours de route, à élaborer deux autres politiques: le développement rural – et ça va toucher votre région – et le développement nordique pour lequel, la semaine dernière, en fin de semaine, j'étais à Chibougamau et au Waskaganish, je serai à Radisson dans deux semaines et je serai dans le nord de la région, mais une région limitrophe, en Abitibi-Témiscamingue, dans la semaine de Pâques.

(10 h 20)

Donc, je vous le dis, il y a des choses qui sont en train de se faire. Dans ce contexte-là, nous aurons, en réponse à la commission parlementaire sur le Nord-du-Québec, dans l'année qui vient, une politique de développement nordique et de développement rural en cours de route. Et j'aurai l'occasion de revenir sur d'autres choses.

Mais, pour terminer, M. le Président, il y aurait une façon de régler bien des choses et de nous permettre d'avoir plus d'argent disponible au Québec, c'est, avec le fédéral, la discussion qui est amorcée avec M. Martin Cauchon pour une entente fédérale et québécoise sur le développement local et régional.


Discussion générale

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. Alors, vous savez qu'il vous reste encore quand même 49 minutes pour échanger. Vous aurez le temps d'aborder à peu près tous les sujets. Alors, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Merci, M. le Président. J'aimerais rappeler à M. le ministre que nous sommes, ce matin, présentement à étudier 25 % des crédits déposés par le Conseil du trésor en référence à l'ensemble des crédits pour l'année 1999-2000. Donc, nous ne sommes pas au niveau des crédits supplémentaires.

M. le ministre a fait allusion à la prise en charge, à la concertation. Bon. Il faudrait bien se rappeler que les régions se questionnent sur la réaction du ministère des Régions depuis qu'il est en place, le rôle qu'il a joué, de quelle façon il réagit, et là, il ne faut pas se le cacher, le Vérificateur général nous a dit des choses. Je ne sais pas comment le ministre va réagir, mais il ne pourra pas avoir toujours le même discours, à moins qu'il fasse le point sur les commentaires et les constatations que le Vérificateur général a faits.

Évidemment, je pense qu'on va lui donner quelques jours, quelque temps, quelques semaines, s'il le faut, pour corriger certaines choses, à l'occasion de sa visite, comme il vient de nous la présenter, en région, M. le Président. Il nous indique qu'il va faire le tour de plusieurs régions du Québec. Évidemment, c'est une belle occasion pour aller sécuriser et rassurer les gens, parce qu'il y a une hésitation... Je sais qu'on est à une période d'échanges, de questions, M. le Président, mais je m'en viens à des questions plus spécifiques. C'est une belle occasion pour aller sécuriser, comme je le mentionnais, ces régions-là, parce qu'il y a encore une hésitation de la part des structures municipales, du monde municipal à investir dans les CLD, comme l'avait prévu la loi, comme le souhaitait le gouvernement, comme avait promis le gouvernement à l'occasion de la mise en place de ces nouvelles structures, soit les CLD; ça devait être 50-50. Le gouvernement mettait un montant d'argent dans chacune des régions, défini pour chacun des CLD, selon le protocole d'entente, et la région devait en mettre autant. Donc, on n'en est pas encore rendu là. Il y a peut-être des explications à tout ça.

Qu'on y croit ou pas, là, au ministère des Régions – on y a fait référence à la dernière campagne électorale – ça, c'est une affaire d'appréciation pour chacune des régions, dépendamment comment elle va. Qu'on y croit ou pas, le ministère des Régions est là, il a un budget, il a un rôle à jouer, et le ministre a un mandat. M. le ministre a un mandat d'aller supporter chacune des régions. Donc, ce n'est plus la question. On doit travailler pour essayer, à partir de votre ministère, M. le ministre, de donner le meilleur aux structures qui veulent faire des choses dans chacune de leur région.

Pourquoi le ministre a-t-il accepté, au sein de son ministère, des baisses de crédits, pensant que son ministère – en fait, c'était la perception de tous ceux et celles qui comprennent le rôle du ministère – croyant que le ministère aurait un mandat additionnel, si on se réfère au discours de son groupe politique à la dernière campagne électorale, lors du discours inaugural et lors de la présentation par le ministre des Finances? C'est le message qu'on avait cru recevoir.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Jolivet: Premièrement, M. le Président, ce que nous avions entendu avec l'ensemble des gens dans le milieu local et régional, c'était de mettre 1 $ pour 1 $, maximum 60 000 000 $ au niveau des CLD, 30 000 000 $ au niveau des CRD. Alors, c'est ce que nous avons fait. Il y a bien des municipalités qui n'ont pas, par l'intermédiaire de leur municipalité régionale, mis le 1 $, mais, nous, on l'a mis. On est allés au maximum de ce qu'on pouvait.

Dans l'ensemble de tout le territoire dont j'ai la responsabilité, j'ai 104 CLD à être vérifiés, et ces 104 CLD, M. le député, ont tous signé et ont été agréés comme CLD. Il reste, à ce moment-ci, trois CLD où les ententes de gestion – et là c'est d'un commun accord que nous faisons ces ententes de gestion – sont à être finalisées. Mais les trois dernières ententes qu'il restait à faire, CLD de Champlain, CLD Ouest de Québec et le CLD cri, tout ça est en marche, on devrait signer ça bientôt. Donc, 104 sur 104 devront être signées bientôt, et on a des ententes de gestion. Donc, quand vous me dites que les gens ne veulent pas intervenir, je vous le dis, on a des ententes.

Deuxièmement, quand vous dites, maintenant, au niveau du Vérificateur général, je veux juste vous dire une chose, ça touche le moment où vous étiez là vous autres mêmes. Dans le contexte de la mise en place des CLD qui sont tout derniers, le Vérificateur général n'a pas porté de jugement à ce moment-ci, laissant le soin de les regarder lorsqu'on aura fait les démarches nécessaires pour y arriver. Justement pour répondre au Vérificateur général, la mise en place, en 1997, de la politique de développement local et régional, les ententes de gestion que nous avons avec chacun des CLD, les ententes-cadres qui sont signées avec les CRD et qui devront être renouvelées selon la nouvelle formule, entendues avec eux et vérifiées avec tous les ministères concernés, je vous dirai qu'on a en main tous les éléments nécessaires pour répondre justement aux critiques qui ont été faites. Il a été bien conscient, le Vérificateur général, que les efforts ont été faits dans ce sens-là. La politique de développement régional et de développement local répond à ces difficultés-là.

Deuxièmement, quant à la question des baisses, bien, si vous connaissez votre dossier comme il faut, vous allez vous apercevoir que la mise en place des Fonds d'aide aux entreprises, le Fonds d'interventions régionales, ce qu'on appelait le FAE et le FIR, c'est ceux-là qui, dans le cadre de la fin des programmes, incluant ce qu'on appelle Fonds d'interventions régionales, développement communautaire et économie sociale... c'est la diminution majeure que vous avez dans le budget. Quant au Fonds d'aide aux entreprises, bien, c'est la continuité des intérêts que nous sur les remboursements qui sont faits.

Donc, dans ce contexte-là, à ce moment-ci, ce qu'on peut vous dire, c'est la fin de ces programmes qui ont été remplacés par la nouvelle politique dans un fonds de développement régional, entendu avec des conseils régionaux de développement, entendu, au niveau local, avec les centres locaux de développement au niveau de ce qu'on a appelé le fonds pour les jeunes, les fonds pour l'économie sociale, et vous avez, en même temps, le fonds local d'investissement.

Donc, quand on regarde tout cet ensemble-là, là, la philosophie a changé. Je ne sais pas si vous vous êtes aperçu de ça, qu'il y a eu une politique déposée en avril 1997. Cette politique, avec la mise en place du ministère au mois de décembre 1997, et sa mise en vigueur légale au 1er avril 1998, il y a eu des changements. Donc, c'est ces changements-là qui nous permettent de dire aujourd'hui que la façon de redistribuer les argents entre le conseil régional de développement et le centre local de développement fait en sorte qu'il y a des changements qui ont été apportés. Mais, au bout de la course, ce qu'on peut vous dire – puis je comprends mal votre intervention – dans le budget, 3 900 000 $ de plus pour les CLD démunis, 3 600 000 $, incluant Montréal et Laval, sur les jeunes entrepreneurs dans la mesure d'aide et de suivi et 3 000 000 $ au niveau de l'environnement pour les ressourceries, je pense que c'est de l'argent de plus que vous n'avez pas dans les crédits qui étaient déposés, parce que le budget est arrivé avant. Mais, dans les crédits qu'on aura de disponibles, c'est des montants, à ce moment-ci, qu'on aura.

Le Président (M. Brouillet): Alors, Merci, M. le ministre. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: M. le Président, je suis bien prêt, moi, à ce qu'on m'explique certains comparatifs, mais on étudie des crédits. Il y a de l'argent de moins à la disposition, il y a des programmes qui ont pris fin. Ça, on en conçoit, d'une part. Mais M. le ministre nous mentionnait: le Vérificateur général n'a pas tenu compte, n'a pas analysé à fond les CLD parce que c'était de nouvelles structures. Évidemment, il y a plusieurs CLD qui n'ont pas encore commencé à être fonctionnels. Ils ont pris un certain nombre de temps pour mettre en place la structure, coordonner, se donner des objectifs et définir ça clairement et le faire approuver, d'une part. Ça, il faut le comprendre. Mais le Vérificateur a fait un rapport pour l'année 1998. Donc, c'était de façon générale. Il nous dit, là: C'est un fouillis, un fouillis au niveau de la concertation, les gens se pilent sur les pieds entre groupes et organismes, ça ne peut plus durer comme ça; c'est de la perte de temps, de la perte d'énergie et de la perte d'argent qui devrait être mis à profit au profit des régions.

Que la philosophie ait changée, on l'a tous réalisé. Mais ce qu'on veut vraiment vérifier, là: Est-ce que c'est à l'avantage des régions?

Je me rappelle, on se rappelle tous, M. le ministre – et vous étiez là, à ce moment-là, assez près – de la mise en place du nouveau ministère des Régions, où le ministre responsable du temps, qui était le député de Joliette, nous disait: Les nouveaux CLD vont remplacer... on va se concerter, ça va remplacer un certain nombre d'organismes.

(10 h 30)

On essayait de faire spécifier, préciser au ministre combien d'organismes vont être remplacés par cette nouvelle structure, une nouvelle table de concertation locale, le CLD. Alors, il disait: Il y en a au-delà de 400. Tantôt, c'était 500, 600. D'autres chiffres. Il disait: Ça devrait revenir à 100 et quelques. Ce n'est pas ce qu'on a connu et ce n'est pas là-dessus que je veux faire le débat. C'est que nous avons encore beaucoup trop d'organismes. Le ministre des Finances, dans la présentation de son budget, a ajouté un autre organisme, les carrefours de la nouvelle économie. Ça n'aurait pas pu être un mandat qui aurait été donné aux organismes déjà en place? On veut que les régions aient plus d'autonomie, on veut que le ministre des Régions joue un rôle, conseille le ministre des Finances, conseille son gouvernement au nom des régions.

Et, moi, je suis particulièrement fier aujourd'hui de pouvoir échanger avec le ministre des Régions, sachant très bien qu'il a reçu du premier ministre la responsabilité comme ministre responsable du Bas-Saint-Laurent, qui est une région limitrophe à celle que je représente – et il y a des journées où nous sommes sur la frontière du Bas-Saint-Laurent au niveau de certains programmes – donc le ministre des Régions, qui doit se faire un portrait assez réel de la région dont il aura à répondre, soit celle du Bas-Saint-Laurent qui, je pense, peut se comparer assez facilement à une très grande partie de la région Chaudière-Appalaches. Il y a d'autres régions au Québec, j'en conçois, comme celles que vous allez visiter prochainement.

Pourquoi le ministre des Régions n'est pas celui qui prend en main... conseille son gouvernement pour... responsabiliser davantage, je pense qu'ils l'ont joué, leur rôle, mais donner plus d'autonomie plutôt que responsabiliser ces organismes, soit le CLD, le CRCD, un peu plus haut, dans chacune de nos régions?

Et le ministre nous demande de vérifier nos dossiers, nous invitant à mieux connaître nos dossiers. On a beau regarder la plupart des programmes qu'il aura à gérer, c'est toutes des diminutions de budget. Je suis bien prêt à revoir nos dossiers, M. le ministre, à les analyser davantage, mais, si on fait la liste de tous les programmes de transfert, c'est des diminutions de budget.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. Jolivet: J'ai de la misère à comprendre. Au niveau des CLD, augmentation. Je ne sais pas où est-ce que vous voyez la diminution. Au niveau des CRD, même montant. Je ne sais pas où est-ce que vous voyez la diminution. Si vous me disiez que le CRD avait l'habitude de programmes... Je donne l'exemple: Fonds d'interventions régionales, développement communautaire, économie sociale, il y avait des programmes là, puis ces programmes-là, ils sont à la fin, ils étaient prévus pour fin mars 1999. Vous ne pouvez pas nous demander de les continuer quand c'est enlevé, là! Ça, c'est les diminutions que vous voyez en grosse majorité incluant, dans le cadre de Fonds d'aide aux entreprises, le fait que ça continue dans le temps, ça, là. On ne peut pas arrêter ça demain matin, là. Il faut payer ce qu'on a à payer, ce qui est engagé là.

Alors, quand on fait ça, c'est ça, la diminution majeure. Le reste, c'est qu'on a justement demandé par l'intermédiaire des CRD à la Table Québec-régions et au niveau des CLD... Puis vous avez peut-être manqué quelque chose, vous avez dit: Le CLD, c'est concertation. Je m'excuse, CLD, c'est l'action; concertation, c'est CRD. Et, dans ce contexte-là, il y a eu des discussions aux deux niveaux. Et, dans la façon dont on a partagé les montants d'argent avec les critères qu'on a mis, on les a discutés avec le conseil régional de développement par la Table Québec-régions et on a demandé de le regarder dans chacune des régions.

Donc, quand vous le regardez, là, c'est sûr et certain, si vous regardez le budget du ministère en regard des programmes qui disparaissent, parce que c'est prévu de disparaître là, mais remplacé par d'autres choses, vous avez raison, mais ce n'est pas ça, la réalité des choses. Il y a plus d'argent au niveau des CLD qu'on en avait proposé à l'époque, puis, au niveau des CRD, c'est le même montant d'argent.

Quant à ce que vous appelez les carrefours de la nouvelle économie, nous avons eu l'occasion, le ministre des Finances et moi-même, d'aller un peu plus bas que chez vous, dans la Gaspésie, et on a regardé ce que les gens disaient: Vous avez, à Montréal, un centre de développement des techniques de l'information; pourquoi on n'aurait pas dans nos régions des choses semblables? Vous savez comment ça fonctionnait jusqu'au 1er juillet prochain, c'était 60 % au niveau des crédits d'impôt puis 25 000 $, maximum, au niveau de l'emploi. Puis, à partir du 1er juillet, le carrefour de la nouvelle économie dans chacune des régions du Québec, qui va être plus souple, va avoir droit, comme le centre – ce qu'on appelle le CDTI – à 40 % de crédits d'impôt, maximum 15 000 $ par emploi.

Quant au rôle que nous avons à jouer, si vous avez regardé dans les documents annexes au discours du budget – puisque vous dites: On veut parler de ces crédits-là, on va en parler – si vous avez regardé comme il faut comment c'est fait là, nous sommes dedans, nous sommes partenaires avec le conseil régional de développement, nous sommes partenaires avec le ministère de l'Industrie et du Commerce à ce niveau-là. Regardez la façon dont on va mettre les comités aviseurs dans chacun des milieux où le CRD va avoir la pleine responsabilité de faire les recommandations.

Déjà, dans la partie du Bas-Saint-Laurent, vous avez des gens qui sont en avance parce que c'était eux qui le demandaient, au niveau du Bas-Saint-Laurent. Quand je les ai rencontrés dernièrement, dans votre région, plus basse que la vôtre mais dans la région du Bas-Saint-Laurent, ils nous ont fait mention du document qu'ils avaient présenté, avec des satellites un peu partout, ce qui donne un peu plus de souplesse aux carrefours de la nouvelle économie, incluant – et vous l'avez bien remarqué si vous avez bien lu vos documents – que, à l'intérieur de ça, il pourrait y avoir des formules de CDTI, centre de développement des techniques de l'information. Les deux peuvent s'ajuster ensemble.

Je ne vois pas en quoi c'est négatif. Au contraire, c'est très positif. On donne aux régions le soin de pouvoir prendre leurs pleines responsabilités et de ne pas faire de mur-à-mur à travers le Québec, parce que ce qu'ils vont nous proposer ailleurs va probablement être différent du Bas-Saint-Laurent, comme en Estrie ou en Abitibi-Témiscamingue.

Alors, moi, je pense que, si vous vous bornez à dire qu'au niveau des programmes qui sont terminés ça diminue, bien, oui, mais, dans l'ensemble des argents disponibles séparés entre le CRD et le CLD, c'est des montants qui sont additionnels, à ce moment-ci.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: M. le Président, M. le ministre, quand je vous réfère aux CLD, cette nouvelle structure qui est encore à avoir des réflexes de concertation, la mise en place de cette structure-là, il y a un certain apprentissage...

M. Jolivet: Voulez-vous donner des exemples? Parce que vous affirmez une chose qui dit que le CLD fait de la concertation. Dites-le-moi.

M. Gauvin: C'est ce que je suis en train de vous expliquer, là.

M. Jolivet: O.K.

M. Gauvin: C'est que la mise en place de cette structure-là a nécessité une forme d'apprentissage aux gens, aux citoyens, au niveau local, pour travailler ensemble. La table se réunit fréquemment dans plusieurs régions du Québec, encore aujourd'hui, et le choix à faire pour décider de quelle façon ils vont travailler, les objectifs qu'ils vont se donner pour cette région-là, il y a eu une période où les gens ont dû apprendre à se concerter au niveau local. Je comprends que le CLD, sa responsabilité sera d'être à l'action au niveau local.

Dans le moment, la très grande partie du budget, la première partie du budget pour la première année a servi à mettre en place cette structure-là. C'est ce que je vous explique. Dans le futur... Donc, vous dites que le Vérificateur général n'a pas analysé l'action des CLD. Je le comprends. J'avance un chiffre que je n'ai pas vérifié, mais près de la moitié des CLD ne sont pas encore en vitesse de croisière, ils sont à se définir, après un an. Il y a eu, dans certaines régions, une certaine hésitation. Donc, c'est ce que je voulais vous mentionner et préciser, d'une part. J'y crois, aux CLD, moi.

M. Jolivet: Mais on fera le bilan, et vous allez voir que vous vous trompez. Au niveau des CLD, j'ai eu l'occasion de les rencontrer à leur congrès de fondation au Mont-Sainte-Anne, où ils ont fait mention de ce qu'ils sont en train de se donner comme possibilités au niveau de l'action quotidienne, dans l'action qu'ils ont à mener au niveau local. Ils ont une entente de gestion qui est signée avec le ministère et les gens responsables, par la MRC. Vous avez, au niveau des gens, le plan local d'action et de création d'emplois, ce qu'on appelle, dans le langage, communément le PLACE. Vous avez l'obligation de le préparer pour l'année en cours. Des ententes de gestion.

Les gens, c'est sûr et certain que, avec l'arrivée de l'élection, quand ils ont un parti d'opposition qui dit qu'ils n'en veulent pas, bien ils ont freiné la machine. Il y avait des organisateurs libéraux dans vos organisations – c'est correct, c'est normal – qui, eux autres, définissaient comment ils pouvaient agir pour empêcher que ça fonctionne. On l'a vécu, ça. Mais, quand le gouvernement a été réélu, ils ont compris qu'on demeurait dans la même politique puis ils ont commencé à vouloir agir, ceux qui étaient plus réticents. Mais ceux qui ont avancé... Allez voir dans ma région, les cinq CLD fonctionnent, puis les cinq CLD fonctionnent en coordination avec le conseil régional de développement. Comme partout ailleurs au Québec, on a eu des échos venant de ces gens-là. Il y a, en tout cas, certaines personnes qui ont mis un peu du sable dans l'engrenage, mais là, avec l'arrivée au pouvoir du même gouvernement, avec la même philosophie, ils ont commencé à déterminer qu'il fallait agir.

(10 h 40)

Et ça, je vous dis que c'est faux, de prétendre que la moitié des CLD ne fonctionnent pas. Allez voir au Québec, ça fonctionne mieux que vous pensez, puis au-delà peut-être de nos espérances, puis on espère que ça va aller encore mieux dans le futur.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député.

M. Gauvin: M. le ministre, je n'ai jamais dit que les CLD ne fonctionnaient pas. La moitié des CLD ou à peu près, vous me reprendrez si je me trompe, n'ont pas encore pris la vitesse de croisière, n'ont pas encore commencé vraiment à jouer le rôle qu'ils vont pouvoir jouer dans le futur. C'est toute la différence, d'une part.

Tantôt, vous avez fait allusion à certains membres qui siègent au niveau de certains CLD en région et vous avez tenté de politiser la mise en place de ces structures-là. Évidemment, je pense que c'est votre appréciation à vous, mais ce n'est pas comme ça qu'on le voit en région. La plupart de ceux avec lesquels j'ai échangé ou que j'ai vus ont évité de politiser justement les débats au niveau des CLD. Donc, ça m'apparaît une affirmation assez gratuite, M. le ministre, au moment où on se parle aujourd'hui, de prétendre que c'étaient des représentants qui étaient identifiés à certains partis politiques plutôt qu'à d'autres qui ont retardé la définition et le rôle que devaient jouer certains CLD dans chacune de nos régions. Je vous laisse la responsabilité d'y répondre, en région, des conséquences de ce que vous avancez aujourd'hui.

Vous avez parlé de concertation, d'obligation. À aucun moment dans le livre des Renseignements supplémentaires sur les mesures budgétaires on dit que la nouvelle structure, les carrefours de la nouvelle économie, va devoir se concerter soit avec les CRD soit avec d'autres organismes en place connus. En aucun moment – on a beau relire les pages 38 ou 39 – ça a été dit par le ministre des Finances. Ce que je vous dis aujourd'hui, on reprend... C'est les crédits que nous défendons, ici, aujourd'hui. Vous avez, au niveau des crédits de transfert dans l'économie sociale... Oui...

M. Jolivet: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Jolivet: Est-ce que je pourrais demander au député de répondre à la question du carrefour de la nouvelle économie? Je laisserais à M. Simon Chabot le soin d'y répondre.

Le Président (M. Brouillet): Oui, M. Chabot? Très bien.

M. Chabot (Simon): M. Chabot, oui. On retrouve l'information dans un document que le ministre des Finances a déposé en poursuite de la stratégie de développement économique, Québec Objectif emploi , où, dans ce document-là, sur l'économie du savoir, c'est clairement décrit que les CRD vont avoir un rôle de consultation, de concertation au niveau de la mise en place des CNE en nommant leur directeur général et quatre représentants de chacune des régions sur le comité aviseur.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Jolivet: C'est ça que je disais. Si vous aviez lu l'ensemble de tous les documents qui sont la suite du budget, vous auriez probablement retrouvé cet organigramme-là, dans lequel, je vous le disais tout à l'heure, il y avait le ministère des Régions, avec les conseils régionaux de développement, avec le ministère de l'Industrie et du Commerce en région qui vont être au comité aviseur. Ça fait que lisez bien les documents.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: M. le Président, ça revient à ce qu'on vous disait tantôt: Pourquoi ajouter cette nouvelle structure? On n'en fera pas un débat aujourd'hui de... Le CNE, pourquoi? Sachant que les CRD de chacune des régions, ça aurait pu être une partie de leurs responsabilités très directes...

M. Jolivet: Ce n'est pas une structure, M. le député, pour bien comprendre, ce n'est pas une structure. C'est la même chose qui existe à Montréal, qui s'appelle le centre de développement des technologies de l'information. Puis, quand nous sommes allés en région, les gens disaient: Pourquoi nous n'aurions pas, nous aussi, un centre de développement des techniques de l'information? Vous savez comment ça fonctionne, ça, un centre de développement des technologies de l'information? C'est un lieu physique dans lequel se trouvent les entreprises.

Tandis que ce que les gens dans les régions nous disaient: Nous ne voulons pas être confinés cependant dans un lieu, nous voulons avoir une centrale, s'il le faut, mais avec des satellites. Bien, c'est ça qu'on a donné comme réponse. C'est le carrefour de la nouvelle économie qui va être formé sous une formule totalement souple, disponible pour les régions, au même titre que pour l'économie du savoir au niveau de Montréal, de Laval, de Hull, de Québec et, le dernier arrivé, de Sherbrooke.

Donc, nous sommes dans un contexte – et lisez bien vos documents – qui indique que toutes les autres régions du Québec ne peuvent pas être soustraites à cette politique du savoir, d'autant plus que je dis souvent à des gens: Je ne suis jamais plus éloigné de vous que mon doigt du bouton du téléphone. Alors, il y a des nouvelles techniques aujourd'hui où, de Rivière-du-Loup ou de chez vous, à Montmagny-L'Islet, on peut communiquer avec des gens à travers le monde. Pourquoi ils n'auraient pas droit à ça alors qu'il y a des possibilités au niveau de Montréal et des autres régions qui étaient déjà dotées d'un CDTI? Alors, c'est ça.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Je pense que vous allez devoir l'expliquer à nouveau au Vérificateur général quand il reproche justement au gouvernement actuel toutes ces structures qui se chevauchent et qui travaillent de façon... qui interpellent le même monde à des moments différents. C'est ce qui mêle la population.

M. Jolivet: Mais non, mais non. Vous vous mêlez pour rien puis vous mêlez le monde pour rien, là. D'autant plus que le CDTI, c'est les technologies de l'information, tandis que le carrefour de la nouvelle économie, c'est toute valeur ajoutée, additionnelle dans l'économie du savoir. Donc, il y a quelque chose qui était demandé par les régions. Nous sommes allés sur la Côte-Nord, nous sommes allés en Gaspésie, nous sommes allés chez vous, et les gens nous disaient: Pourquoi, nous autres, on ne peut pas être dans la façon de faire de Montréal? Vous savez très bien que, pour un centre de développement des technologies de l'information, ça prend une masse critique, puis, dans les régions, on ne l'a pas, mais on a d'autres choses, par exemple, qui peuvent s'ajouter. Et c'est dans cette possibilité nouvelle que le carrefour de la nouvelle économie est mis en place et va permettre aux gens de nous proposer des formules qu'ils veulent par le conseil régional de développement avec l'aide du comité aviseur. «C'est-u» pas beau, ça?

M. Gauvin: M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: ...on a juste à regarder ce tableau-ci pour voir jusqu'à quel point ceux et celles qui ont le goût de s'impliquer dans chacune de nos régions, au niveau de ces structures-là... que ce n'est pas facile à suivre. On a juste à regarder ce tableau-là. Les gens sont confrontés à tous ces organismes-là dans chacune de nos régions. En fait, c'est ce qu'on disait, c'est ce que nous avons débattu à l'occasion de la mise en place de la loi qui a mis en place le nouveau ministère des Régions. Le ministre nous rassurait dans le temps: Il va disparaître certains organismes, ça va être simplifié pour une meilleure compréhension de la population.

M. Jolivet: ...parce que les gens dans le milieu, ce ne sont pas des gens qui sont dénués de sens. Au contraire, je considère que les gens dans le milieu qui sont au conseil régional de développement, les gens qui sont dans des groupes comme le CRCE, qui est le conseil régional de la culture, le CRC, les gens au niveau du conseil régional de l'environnement, tous ces gens-là sont en train de faire au Québec des choses très intéressantes, en particulier ce qu'ils ont appelé, eux autres, «La Maison de la région», où là les gens vont se donner des moyens de travailler ensemble, de se concerter ensemble, de donner le meilleur avec l'argent public qu'ils ont à gérer pour les citoyens et les citoyennes de chacune des régions.

Moi, je peux vous dire que là on est en train de faire les changements qui s'imposent. Et ce que vous avez montré, qui provient fort probablement du document de Solidarité rurale... vous avez aussi des responsabilités, vous autres, au niveau de vos décisions que vous avez prises dans le temps et qu'on est en train de corriger, là. Et c'est pour ça que la politique de développement local et régional, c'est une politique qui est en train de faire le changement qu'il faut, mais ça ne se change pas en virant sur un 10 cennes, ça, là.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Vous avez parlé justement de la responsabilité que les CRD dans chacune des régions ont à vouloir planifier au niveau de l'environnement les décisions et les gestes à poser. Dans le discours du budget de 1999-2000, récent, le gouvernement annonce 3 000 000 $, comme vous l'avez mentionné tantôt, par année, pour susciter le démarrage d'entreprises communautaires oeuvrant dans le domaine de la récupération, du recyclage.

(10 h 50)

J'aimerais vous rappeler, M. le ministre, que, le 26 septembre 1997, Collecte sélective déclarait que plusieurs municipalités qui ont implanté un programme depuis 1995 n'ont pas reçu la totalité de l'aide demandée et quelques-unes en attente du premier versement – c'étaient déjà des premières initiatives. Ces demandes en suspens dépassent actuellement plus de 18 000 000 $, puis on annonce 3 000 000 $ additionnels.

Est-ce que les critères de fonctionnement... Vous demandez aux régions: Soyez imaginatifs, présentez-nous des projets à caractère comme défini ici, dans la loi, et le ministère, nous avons un budget pour vous aider, mais c'est nous comme ministère qui allons définir les règles et les critères. On veut vous responsabiliser, on sait que vous êtes capables et, nous, on le reconnaît, qu'en région ils sont capables de prendre leurs responsabilités adaptées à chacune des régions parce qu'elles sont différentes, d'une part, mais c'est nous, le ministère, qui allons édicter les règles, les critères et le guide dans lequel vous allez devoir fonctionner.

Est-ce que c'est ça que vous appelez, M. le ministre: Nous allons corriger des choses et nous allons vous donner plus d'autonomie parce qu'on sait très bien, comme nous le reconnaissons – c'est ce que vous avez mentionné – que vous êtes capables d'en faire plus?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Jolivet: Premièrement, si vous avez bien suivi, ou encore si vous avez bien lu, le 3 000 000 $ est au ministère de l'Environnement, qui a la responsabilité, mais, parce qu'il veut que ces argents-là servent au mieux, il fait des demandes au niveau des organismes régionaux et locaux, le CLD en particulier, de lui faire des suggestions. D'ailleurs, ça a bien adonné parce que mon groupe, chez moi, au niveau de l'environnement, ils sont venus me voir. C'est ce qu'on appelle les ressourceries. Qu'est-ce qu'on ferait avec cet argent-là puis comment on le ferait? Est-ce qu'on l'enverrait dans chacun des CLD de façon à éparpiller l'argent, ou si on a un montant d'argent global au ministère qui, lui, reçoit les demandes et qui y répond?

Et c'est dans ce sens-là que j'ai communiqué avec le ministère de l'Environnement, au bureau du ministre, pour savoir comment il fonctionnerait. Et la réponse que je peux vous donner, à ce moment-ci: Vous irez poser la question à la bonne place, d'abord, quant aux critères puis aux sélections, mais je vous dirai que le ministère veut avoir, pour savoir comment il va pouvoir dépenser ces 3 000 000 $, les recommandations venant du milieu. Donc, il dit aux gens: Faites-nous des recommandations, proposez-nous des choses, puis dans le montant d'argent qui est disponible on pourra essayer d'y répondre.

Mais, si vous me dites que les gens demandent 25 000 000 $ puis ils n'ont pas 25 000 000 $, je vous comprendrais très bien, avec le déficit que vous nous avez laissé, les difficultés qu'on a eues pendant les quatre dernières années... Puis, moi, je l'ai vécu pendant la campagne électorale. Ce n'était pas facile de l'expliquer aux gens, pourquoi on avait été obligé de faire des actions très, très difficiles parce que vous aviez mis le Québec dans la dèche. Bien, là, soyez sûr d'une chose, c'est qu'on ne gaspillera pas l'argent, on va l'utiliser comme il faut, et le ministère de l'Environnement pourra répondre plus adéquatement que moi au niveau de l'utilisation des argents.

Mais je vous dirai que le ministère de l'Environnement a demandé, justement pour respecter les instances locales, de pouvoir avoir des recommandations venant de leur milieu. Et je trouve ça correct.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: M. le Président, M. le ministre devrait se rappeler que nous sommes en 1999-2000. Le gouvernement actuel est dans sa cinquième année.

M. Jolivet: Oui, mais il y a des effets de long terme sur un déficit de 6 000 000 000 $.

M. Gauvin: M. le ministre...

Le Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, M. le ministre!

M. Gauvin: M. le ministre, le gouvernement actuel est dans sa cinquième année. Parlons d'aujourd'hui et de ce que vous proposez à la population.

M. Jolivet: Oui.

M. Gauvin: Aujourd'hui, là.

M. Jolivet: On va le faire avec les moyens qu'on a.

M. Gauvin: Tantôt, vous m'avez invité à poser la bonne question aux bons services gouvernementaux. Moi, la question que je pose aujourd'hui, c'est au ministre responsable des Régions. Ces structures-là créent beaucoup d'espoir. Je vous ai mentionné tantôt...

Une voix: Quelles structures?

M. Gauvin: ...le CLD, entre autres, et la table qui est la plus près des citoyens qui est la table qui accepte de gérer des actions locales, qui représente très bien sa population, d'une part. Mais l'UMRCQ dit très bien: Oui, nous sommes capables de nous prendre en main si vous acceptez de nous donner plus d'autonomie; oui, les municipalités sont capables d'investir davantage dans leur prise en charge, d'une part, à la condition que le gouvernement reconnaisse notre différence, d'abord, pour chacune des régions. Et ça n'a pas nécessairement été facile, même si le ministre vient d'ajouter: Davantage, nous allons permettre à des CLD de s'adapter à la réalité de chacun des milieux. Mais ça n'a pas été facile suite à l'adoption de la loi, parce qu'il y a eu une résistance de la part du gouvernement à signer des protocoles d'entente proposés par chacune des régions, qui répondaient davantage aux besoins et à la volonté des gens du milieu, d'une part. Donc, Mme Simard, de l'Union des municipalités, dit: On devrait y investir plus d'argent.

Il y a eu des expériences dans le passé, M. le ministre, qui ont été heureuses. Rappelons-nous... En fait, on a peut-être pu avoir, à certains égards, des commentaires négatifs, mais vous aviez les MRC qui avaient été identifiées dans un programme qui avait été administré par notre ancien collègue, M. Picotte, les MRC désignées. Il y a eu des expériences heureuses. Ça avait été une table qui conseillait le ministre, qui priorisait des projets. Quelques-uns auraient pu être questionnables, mais des projets qui étaient identifiés par les gens du milieu. Pourquoi ne pas donner à cette table, qui est le centre local de développement, lui confirmer que vous lui faites confiance, plus d'autonomie, et ajouter des budgets?

Tantôt, vous avez dit: On ajoute 3 000 000 $ pour les CLD. Je reviens au niveau des CLD, évidemment, c'est un certain nombre de régions qui vont être identifiées, j'en conçois. Il faut peut-être commencer par supporter ceux qui ont d'avantage besoin par des projets-pilotes comme ceux-là.

Mais qu'est-ce que vous répondez quand Mme Simard nous dit: L'Union des municipalités, nous sommes capables de faire d'avantage? Donnez-nous plus de support financier, puis, nous, on va en ajouter. Par contre, on aimerait avoir un peu moins d'ingérence gouvernementale dans la priorisation des projets et des priorités que nous allons nous donner dans chacune de nos régions.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Jolivet: Premièrement, d'une part, vous me demandez de vivre en 1999-2000 puis, d'autre part, vous me parlez de ce que votre collègue Picotte avait fait dans les années 1985 et montant.

Je dois vous dire au départ qu'il est évident que l'Union des municipalités régionales de comté va en demander toujours plus, puis c'est correct, ce n'est pas anormal. Je ne vois pas de difficulté à ce niveau-là, mais je vous dirai que le centre local de développement, actuellement, avec les possibilités qu'il a d'agir, voudrait en avoir plus, puis c'est correct. Mais sauf que, pour le moment, l'argent que nous avons de disponible, nous l'avons mis à leur disposition. On ajoute cette année, je vous le redis, 3 900 000 $ au niveau des CLD qui sont plus démunis, 3 600 000 $ au niveau des jeunes entrepreneurs. Nous avons 3 000 000 $ au niveau des ressourceries, ce qui va avoir des effets au niveau local, j'en suis sûr.

Donc, au bout de la course, on en a ajouté. C'est évident que ce n'est pas suffisant. Mme Simard voudrait peut-être en avoir 50 000 000 $, mais, au départ, nous allons mettre ce que nous sommes capables de mettre. Et, si on a signé 101 ententes de gestion et que nous allons signer les trois dernières – 104 sur 104 – c'est que nous nous sommes entendus, puisqu'une entente prévoit que la MRC et le ministère s'entendent sur la gestion au niveau du CLD.

Donc, dans ce contexte-là, il y a de l'argent municipal qui est mis puis il y a de l'argent gouvernemental qui est mis. Les deux mis ensemble forment les enveloppes dont on a fait mention. Mais à ça – non, non – ajoutons que maintenant ce n'est pas seulement les municipalités qui ont la responsabilité de la décision, que ce soit l'UMQ ou l'UMRCQ, mais il y a aussi, à côté de ça, des gens qui viennent du milieu du travail, que ce soient des employeurs ou des syndiqués, que ce soient les femmes, les jeunes, que ce soient les groupes au niveau de la société, au niveau social, que ce soit le groupe communautaire, que ce soient les gens qui proviennent de différents autres secteurs d'activité, mais nous avons voulu que le CLD ne soit pas gouverné par l'un ou l'autre en majorité, mais qu'il donne au milieu local la capacité de prendre ses propres décisions.

Donc, c'est dans ce sens-là que c'est évident qu'ils peuvent nous en demander beaucoup, mais ce qu'on est capable de donner, on va le donner. Et on a pris des engagements pendant la campagne électorale qui vont, dans le mandat qui vient, comme on l'a fait pour les premiers, être réalisés.

Donc, ça, là, il faut dire qu'à ce moment-ci de l'histoire de la mise en place des CLD nous croyons que les gens sont de bonne foi, que les gens veulent travailler avec nous et que nous allons travailler avec eux. Et je leur ai dit que je pouvais être complice avec eux à condition qu'ils soient complices avec moi, et ça va bien. Complices dans le sens de travailler ensemble, de travailler pour faire en sorte que le milieu local détermine son plan d'action et d'économie pour l'année qui vient. Et d'autant plus que je vous dirai qu'au CRD maintenant 90 ententes spécifiques, qui sont différentes de l'une à l'autre...

Je vous en donne un exemple bien typique: ici, Chaudière-Appalaches avec l'Estrie, entente sur l'exploration minière entre deux CRD, ce qui serait difficile à faire dans le passé, sur une entente avec le ministère des Mines, sous la responsabilité du ministre qui est responsable des Ressources naturelles. Pour vous dire qu'il y a eu, avec le ministère des Régions, signature de cette entente-là avant la campagne électorale avec des gens du milieu de Chaudière-Appalaches et de l'Estrie pour déterminer la volonté des gens du milieu et du ministère de travailler ensemble. Donc, ne venez pas dire que les gens n'ont pas tous les moyens de se rendre spécifiques d'une région à l'autre.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Montmagny-L'Islet.

(11 heures)

M. Gauvin: M. le ministre, vous venez de parler: 3 900 000 $ vont être injectés dans les nouveaux... sont réservés à un certain nombre de CLD, à la condition qu'ils trouvent un montant égal. Si vous mettez 1 $ à condition que la région y mette 1 $, donc on vise des régions où la situation économique est plus difficile que d'autres – on a mentionné tantôt que ça pouvait être normal, mais, si on dit, par la même occasion, que la situation économique... – ou qui sont, sur le plan statistique, plus pauvres que d'autres, vous leur exigez un effort additionnel, 1 $ en montant égal. Donc, c'est aussi un questionnement pour chacune des régions. Il n'y aurait pas lieu d'avoir une formule plus souple, d'une part?

D'autre part, je pense que je ne veux pas m'attarder trop longtemps sur ce sujet-là. On a fait le tour. On aura la chance d'y revenir.

M. Jolivet: Non, mais est-ce que je pourrais y répondre?

M. Gauvin: Oui.

M. Jolivet: Parce que ce que vous affirmez est faux. Excusez-moi, je n'ai pas le droit de dire ça. Ce n'est pas vrai, on n'a jamais demandé ça. C'est 0,01 $ de 100 $ d'évaluation. Et d'autant plus que nous avons proposé aux CRD le montant de leur propre région à être redistribué avec les CLD. Dans certaines circonstances, c'est possible qu'il y ait des demandes, mais pas aux montants demandés de 1 $ pour 1 $. Mais, dans l'ensemble, ce n'est pas ce qu'on nous demande.

M. Gauvin: Le message reçu dans les derniers jours par le monde municipal était à l'effet que nous vous donnions de l'argent à condition que la municipalité trouve le financement.

M. Jolivet: Non. On met 3 900 000 $. Puis l'effort demandé pour le 3 900 000 $, dans l'ensemble, réparti selon les critères, c'est 400 000 $. Donc, ce n'est pas 1 $ pour 1 $.

M. Gauvin: On en prend bonne note, M. le ministre.

M. Jolivet: Ah bien, ce n'est pas juste bonne note; c'est vrai.

M. Gauvin: On en prend bonne note, M. le ministre.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: On se rappelle tous que le Bureau de la statistique du Québec prévoit une décroissance démographique qui va affecter 49 municipalités au Québec. Je pense qu'on est tous interpellés, M. le ministre. Vous êtes d'une région du Centre-du-Québec. Je suis...

M. Jolivet: De la Mauricie. Ce n'est pas pareil! Le Centre-du-Québec, c'est dans le sud; nous, c'est dans le nord.

M. Gauvin: ...oui, mais, vu de Québec, ici, il s'agissait juste de traverser le fleuve.

M. Jolivet: Ah! mais je les connais, mes régions! Je suis Centre Mauricie mais pas Centre-du-Québec.

M. Gauvin: Ah bien, je pense que ça vous revenait de préciser vos origines. Pour nous, évidemment, c'est une explication qu'on va retenir, mais, de toute façon, vous comprenez ce que je veux dire: on vient de régions où c'est important, la décroissance démographique. La population plus jeune quitte nos régions. Il y a un effort à faire. Et ça, je ne pense pas que je suis en train, à matin, de vous apprendre ça, de vous sensibiliser à ça. La question que je vous pose: Quel rôle votre ministère a-t-il à jouer au niveau de chacune de ces régions? Un rôle de tous les jours. Quand il y a un débat pour la fermeture d'une école, quand il y a un débat pour le déplacement, M. le ministre, de services gouvernementaux d'une sous-région à une autre, quel rôle va jouer votre ministère? Et je vais y revenir, si vous nous laissez du temps, sur l'importance d'avoir à supporter les jeunes et les impliquer dans chacun de ces milieux.

M. Jolivet: Je vais vous laisser du temps, parce que le président va m'obliger à vous en laisser. Mais je vous dirai que vous avez raison sur certaines perspectives d'avenir, s'il n'y a pas de changements majeurs qui sont faits. Quand vous dites: Les jeunes quittent une région, je vais vous donner l'exemple que j'ai chez moi, à La Tuque, dans la Haute-Mauricie: le jeune s'en va à l'université, mais il passe par le cégep, alors il va s'installer, pour une première fois, dans la municipalité où il va aller à l'université, puis il va faire son cégep là. Ça veut dire que, s'il va à Trois-Rivières, ce sera Trois-Rivières; si c'est à Montréal, c'est à Montréal, si c'est à Québec, c'est à Québec. Donc, le jeune quitte. Un jour, il décide de faire ses études au niveau cégep et au niveau universitaire, puis il trouve un emploi à Montréal, ou à Québec, ou à Trois-Rivières, et là les parents suivent, dans bien des cas, si c'est le dernier de la famille, puis, bon, la population diminue des deux côtés: des jeunes et des personnes âgées.

M. Gauvin: Il y a un rôle à jouer auprès de certains organismes gouvernementaux.

M. Jolivet: C'est ça, c'est ce que je m'en vais vous dire. Donc, à partir de ça, il faut avoir une vraie politique où nous sommes responsables de la préparation de la politique de développement rural qui va permettre à l'ensemble des collectivités de pouvoir gérer, dans leur milieu, la capacité de croissance au niveau de l'économie et de l'emploi. Et les carrefours de la nouvelle économie pourraient être un des moyens, d'ailleurs, en passant. Et, à partir de tout ça, pour vous dire que, auprès des ministères, je n'ai pas à prendre la responsabilité du ministère, mais j'ai à lui conseiller des choses, peut-être. Mais une chose qui est certaine, c'est qu'on va devoir être chien de garde des décisions qui sont prises soit par des ministères, soit par des organismes paragouvernementaux ou gouvernementaux. Donc, dans ce contexte-là, M. le député, je ne peux pas, à ce moment-ci, vous dire que demain matin je vais prendre la décision à la place du ministre de l'Éducation ou de la ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais cependant, dans la politique que nous sommes à développer au niveau du développement rural, prévoir des possibilités et faire en sorte qu'on essaie de maintenir les services et de diversifier l'ensemble de l'économie – donc je vous parlais, là, de carrefours de la nouvelle économie en particulier.

Je vous dis que, comme ministère, nous ne sommes pas le ministère qui prend la décision, mais nous sommes facilitateurs de certaines décisions, et je vous donne un exemple: dans le Bas-Saint-Laurent, nous avons rencontré des gens au niveau des petites écoles et nous avons parlé avec le ministre de l'Éducation sur des possibilités à être regardées puis à être examinées. On regardera, mais la décision finale appartient au ministre de l'Éducation.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Ce n'était pas le sens de ma question. Quel rôle allez-vous jouer en support...

M. Jolivet: Chien de garde.

M. Gauvin: ...auprès des autres services gouvernementaux, d'une part? Est-ce que vous allez continuer à laisser les municipalités, par exemple, intervenir pour supporter, garder l'ouverture d'une dernière école de village? C'est un engagement de votre formation politique en 1994 et encore récemment. Quel rôle allez-vous jouer? Est-ce que ce sera toujours les municipalités qui seront interpellées? On l'a vu récemment dans le domaine de la santé, est-ce que ça va être vrai dans le domaine de l'éducation et dans d'autres services gouvernementaux que les taxes municipales auront à réagir pour conserver leurs structures?

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. Jolivet: Là je vais vous rappeler d'abord que, comme ministère, nous ne prenons pas la décision pour le ministère concerné ni pour l'organisme paragouvernemental concerné. Cependant, je vous ai dit que nous serions chien de garde.

Puis, deuxièmement, nous sommes en train de préparer une politique de développement rural incluant les difficultés dont vous faites mention. Dans un contexte où il y a plusieurs ministères qui sont à ce moment-ci au comité interministériel, nous avons formé un comité de députés de notre formation politique pour regarder toute cette question-là, suggérer à ce moment-là au ministre et au comité interministériel des décisions à prendre pour proposer au Conseil des ministres plus tard, dans ce que j'ai appelé le cadre de référence, pour le mois de juin, avec un cadre d'intervention au mois de décembre prochain, pour arriver à des conclusions qui permettront de voir dans quelles circonstances on peut aider, dans l'action que nous allons mener, au développement du milieu rural plutôt qu'à sa déstructuration.

Et, dans ce contexte-là, M. le député, vous verrez en cours de route, dans la politique que nous allons présenter, quels sont les moyens que nous allons mettre à la disposition de tout le monde. Mais, pour ça, il faut que je suive les étapes dont je vous ai fait mention. Mais il y a une chose qui est certaine, on veut être chien de garde, on veut être des gens qui travaillont de concert avec les gens des ministères, des services paragouvernementaux pour trouver des solutions.

M. Gauvin: Est-ce que vous êtes en mesure de demander un moratoire...

Le Président (M. Brouillet): ...puis, après ça, le ministre pourra terminer avec le temps qu'il nous reste. Il reste peu de temps.

M. Gauvin: Êtes-vous en mesure de demander un moratoire sur les fermetures d'école, les projets de fermeture d'école? Des journaux venaient d'en annoncer encore dans trois régions du Québec, des régions... soit Témiscouata, ma propre région, une prévision de fermeture d'école. Ce serait peut-être une belle occasion d'annoncer un moratoire jusqu'à ce que votre politique soit définie.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, il vous reste un...

M. Jolivet: Oui, il y a juste une réponse que je peux vous donner: Y «a-tu» quelque chose de plus décentralisé au Québec qu'une commission scolaire? Quand une commission scolaire prend des décisions au niveau local, il y a toujours un phénomène, c'est de dire: Québec devrait régler le problème. Nous, par le développement d'une politique du développement rural, nous allons essayer de trouver des solutions nécessaires pour que les gens qui prennent une décision au niveau local puissent le faire dans un contexte où ils ont à regarder l'ensemble de toute la politique d'aide au milieu rural plutôt que sa déstructuration.

Le Président (M. Brouillet): Vous avez encore 40 secondes pour votre conclusion.

M. Jolivet: Bien, moi, M. le Président, j'aurai l'occasion de rencontrer le député dans d'autres débats, lorsque nous étudierons à fond les crédits du ministère. Déjà, il s'est préparé, par les questions qu'il m'a posées, à ce questionnement-là. Il y a une chose qui est certaine, M. le Président, c'est que nous avons beaucoup de travail sur la planche. Nous allons faire beaucoup de travail, mais j'ai confiance qu'avec les centres locaux de développement, avec les conseils régionaux de développement, nous allons arriver à des conclusions heureuses pour les citoyens et les citoyennes du Québec, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Alors, sur ce, la commission plénière termine cet échange. Et je remercie M. le ministre, M. le député et toutes les autres personnes qui ont participé. Afin de permettre à la commission de pouvoir poursuivre sa séance, j'inviterais tous ceux qui ont à quitter à le faire, s'il vous plaît. Et je vais donc suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 10)

(Reprise à 11 h 16)


Justice

Le Président (M. Brouillet): Alors, la commission plénière poursuit ses travaux sur l'étude des crédits provisoires pour l'année 1999-2000, et, au cours des 60 prochaines minutes, nous allons procéder à un échange entre Mme la ministre de la Justice et M. le député de Marquette. Au cours de cet échange, une période maximale de cinq minutes sera accordée à un représentant de chaque groupe parlementaire pour ses remarques préliminaires et une période de cinq minutes sera réservée au député indépendant. Et, entre ça, bien, c'est un échange questions-réponses, et je réserve les quelques dernières minutes, deux ou trois dernières minutes, à la ministre pour conclure.

Vous avez devant vous... C'est des cadrans qui vous permettent de voir l'écoulement du temps. Alors, dans quelques minutes, nous partirons de 60 secondes... 60 minutes, excusez, pas 60 secondes.


Remarques préliminaires

Alors, j'accorde donc immédiatement la parole à Mme la ministre de la Justice pour ses remarques préliminaires.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. le député de Marquette. D'abord, j'ai le don des premières et je vous remercie parce que aujourd'hui vous me permettez de faire ma première analyse des crédits. Première femme députée de Lévis, première femme ministre de la Justice puis première, alors c'est agréable qu'on puisse le faire en parlant de la justice.

D'abord, c'est avec un grand plaisir qu'aujourd'hui je participe à cette étude des crédits en tant que ministre responsable des dossiers de la justice et également de la condition féminine. Étant donné le peu de temps qui m'est alloué, je serai brève. Je me contenterai d'abord d'attirer votre attention sur un certain nombre de dossiers qui seront actifs au cours des prochains mois et sur lesquels je me propose de vous revenir dans le temps qui me sera alloué lors de la poursuite de l'étude des crédits.

Le ministère de la Justice a d'abord l'ambition d'accroître la confiance de la population dans le système québécois de justice en le rendant plus accessible, plus simple, plus humain et plus rapide afin qu'il corresponde aux aspirations des Québécois et des Québécoises, et les activités qu'il poursuivra tout au cours du prochain exercice vont concourir à lui permettre de réaliser cette ambition.

D'abord, la déclaration concernant les témoins. En juin dernier, le ministère de la Justice, la magistrature et le Barreau du Québec ont signé la déclaration de principe concernant les témoins. C'est un événement particulièrement significatif et porteur d'avenir. Pour la première fois, les principaux intervenants concernés par l'administration de la justice ont reconnu officiellement que le témoin, qui est souvent la victime d'un acte criminel, est un acteur important dans notre système judiciaire et ils se sont engagés en ce sens à poser des gestes concrets. Il va sans dire que le ministère de la Justice compte, lui aussi, poser au cours des prochaines années un certain de gestes pour respecter son engagement à cet égard.

La réforme du Code de procédure civile. Le comité de révision, qui a commencé ses travaux à la fin d'août 1998, a maintenant atteint sa vitesse de croisière et il devrait entreprendre à l'automne la formulation des recommandations devant amener la rédaction d'un projet de code. Une rencontre tripartite, magistrature et Barreau, aura lieu d'ici peu pour faire le point sur l'état des travaux. J'ai d'ailleurs l'intention de tenir une telle réunion annuellement. Les travaux devraient conduire au dépôt d'un projet de loi à l'Assemblée nationale à l'automne 2001 si tout va bien.

Une unité autonome de services pour la perception des amendes. Alors, le ministère entend créer cette année une unité autonome de services qui intégrera la gestion des infractions et la perception des amendes. Étant ainsi mieux à même de percevoir en toute équité les sommes qui lui sont dues, le ministère ne sera plus obligé de provisionner à même ses crédits les sommes non recouvrées. De la sorte, il pourra mieux affecter ses disponibilités financières aux services à la population, ce qui est, je crois, sa principale mission.

(11 h 20)

Les mesures de rechange pour les criminels adultes. Le 3 septembre 1996, le Code criminel était modifié afin de permettre le recours à des mesures de rechange selon certains critères désignés par la loi fédérale et à la condition que ces mesures de rechange fassent partie d'un programme autorisé par le Procureur général de la province. La Direction générale des affaires criminelles et pénales du ministère de la Justice a d'ailleurs commencé à recueillir des données à partir des dossiers qui pourraient éventuellement faire l'objet de mesures de rechange. Cette cueillette se déroulera dans trois régions, et la décision d'implanter des projets-pilotes ne sera prise qu'après l'analyse de ces données. Pendant cette période, en matière de violence conjugale, comme en toute autre matière, aucune mesure de rechange ne sera appliquée.

Une gestion par les résultats. Le ministère a décidé de mettre en oeuvre son plan stratégique selon une approche de gestion par résultats, ce qui l'obligera à se doter des mécanismes qui lui permettront de le concrétiser. C'est là un des défis majeurs que nous devrons relever au cours de l'année. Il me semble que c'est de cette façon que le ministère pourra le mieux répondre à ses actions face aux attentes des citoyens et citoyennes.

À égalité pour décider. Le Secrétariat à la condition féminine entend, pour sa part, mettre en oeuvre un nouveau programme d'aide financière intitulé: À égalité pour décider. Doté d'une enveloppe annuelle de 1 000 000 $, ce programme va financer des initiatives et des projets novateurs pour encourager les femmes à occuper des postes décisionnels, électifs ou non, tant au niveau local que régional.

Les programmes budgétaires. Comme vous le constaterez à la lecture du document intitulé Plan ministériel des gestions de dépenses , le portefeuille Justice et Condition féminine est composé des cinq programmes suivants: un premier concernant la formulation des jugements, l'administration de la justice, la justice administrative, l'aide aux justiciables, la condition féminine. Le budget prévu: en légère diminution par rapport à l'an dernier.

Pour réaliser ces activités en 1999-2000, le portefeuille de la Justice et de la Condition féminine disposerait, aux livres des crédits, d'un budget de dépenses de l'ordre de 447 000 000 $, soit une diminution de 7 400 000 $ par rapport au précédent exercice. Depuis l'impression du document, le gouvernement a accepté de réajuster l'enveloppe de la Commission des services juridiques en octroyant 4 200 000 $ à ce poste, réduisant ainsi de 3 200 000 $ l'écart net avec l'exercice 1998-1999. La variation des crédits s'explique de la façon suivante: D'une part, le ministère a reçu une somme additionnelle lui permettant de faire face temporairement à l'augmentation de sa provision pour créances douteuses. C'est pourquoi le ministère mettra en place, au cours de la prochaine année, l'unité autonome de service dont je vous ai parlé précédemment.

D'autre part, le budget du ministère a été réduit par l'effet de ses mesures de réduction de dépenses, dont, notamment, une diminution de ses coûts de loyer. De plus, le ministère a accepté de participer à l'effort collectif pour soutenir les priorités gouvernementales en consentant cette année une réduction des sommes prévues pour la mise en oeuvre de la médiation familiale. En effet, nous avons constaté que l'implantation de la médiation s'effectuait à un rythme plus lent que nous l'espérions. Ceci dit, j'accorde une grande priorité à ce dossier et entends prendre toutes les mesures nécessaires pour accélérer l'utilisation de ce mécanisme important pour toutes les familles du Québec.

Je suis maintenant à la disposition des membres de la commission et je pourrai répondre à vos questions avec l'aide de mes collaborateurs.

Le Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Comme c'était une première, on a permis d'aller encore au-delà du cinq minutes qui était indiqué par la Chambre. Ça me fait plaisir de vous avoir permis de terminer, finalement, votre présentation. Je vais demander maintenant au député de Marquette de faire ses remarques préliminaires et d'emboîter le pas avec les questions. M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. À mon tour, je souhaite la bienvenue à la ministre de la Justice et ministre responsable de la Condition féminine, qui est nouvelle dans ses fonctions. Lorsqu'elle a été nommée, au mois de décembre dernier, je ne savais pas que j'allais devenir son vis-à-vis, mais je me réjouissais pour elle. Étant jeune avocate et, tout d'un coup, promue à un poste senior au niveau du ministère de la Justice, alors, je la félicite de cela.

Cela étant dit, lorsqu'on regarde le livre des crédits, on se rend compte cependant que le premier ministre ne lui a pas rendu service, avec des coupures budgétaires quand même assez importantes. Et le gouvernement a atteint l'équilibre financier, nous en sommes rendus au déficit zéro. Et pourtant, et malgré cela, on assiste encore cette année, comme ça a été le cas au cours des trois ou quatre dernières années, à une réduction à la fois des effectifs et à la fois des budgets, une réduction assez importante qui vient s'ajouter à d'autres réductions qui ont été imposées au cours des trois ou quatre dernières années. Alors, je vais vouloir entendre la ministre s'expliquer un petit peu là-dessus tantôt, et comment son ministère va gérer à nouveau les compressions budgétaires, parce que ça s'est fait à un coût assez important pour l'ensemble des justiciables et des contribuables, les mesures imposées au cours des dernières années.

Je constate également – et c'est un commentaire que je voulais faire – que la ministre est très bien entourée. Je pense que j'ai devant moi 23 ou 24 personnes. Alors, la ministre, sans doute, va avoir réponse à toutes les questions que l'opposition va vouloir lui adresser, et je la remercie d'avoir mobilisé les personnes dans des postes importants au niveau du ministère de la Justice.

Il y a plusieurs dossiers qui ont également défrayé l'actualité au cours des dernières semaines et des derniers mois pour lesquels la ministre est maintenant responsable. Il y en a un, entre autres, où j'aurai l'occasion de questionner la ministre, c'est la question de la rémunération des juges de la Cour du Québec. Ça fait quand même maintenant un sacré bout de temps que le rapport Bisson a été déposé; il a été déposé le 4 août dernier. La ministre ou les membres du gouvernement n'ont strictement rien dit sur les recommandations. Alors, je vais vouloir l'entendre un petit peu plus tantôt, parce que les délais courent dans ce dossier-là. On sait qu'il y a des requêtes également qui sont devant les tribunaux, une devant la Cour d'appel du Québec, où le procureur plaide que les magistrats, les juges n'ont pas la sérénité voulue, l'indépendance voulue pour traiter de ces questions-là. On voit le risque si jamais la Cour d'appel disait oui à une telle requête dans un dossier qui a défrayé l'actualité, et on parle bien sûr du dossier du juge Flahiff où il y a une requête devant la Cour d'appel.

Alors, M. le Président, moi, j'irais, si vous me le permettez, dès à présent avec une première question pour bien clarifier les affaires. À la page 162 du volume III du budget de dépenses déposé par le président du Conseil du trésor, là où on a les chiffres pour le ministère de la Justice, pour la colonne 1998-1999, les dépenses probables – puis l'exercice financier va se terminer demain – sont de 465 880 000 $. Le budget de dépenses autorisées pour l'année 1999-2000, lui, il est de l'ordre de 447 499 000 $, un écart d'à peu près 18 000 000 $. La ministre, lorsqu'elle a avancé ces chiffres, a parlé du budget de dépenses qui avaient été autorisées l'année passée, mais après avoir vécu les dépenses, 12 mois plus tard, on constate que les dépenses ont été plutôt de l'ordre de 465 000 000 $. Alors, moi, je pense que c'est le chiffre avec lequel on doit travailler pour mesurer l'ampleur des compressions budgétaires qui vont se situer autour de 18 000 000 $.

(11 h 30)

Alors, la question que je pose à la ministre de la Justice, c'est: Comment va-t-elle répartir ces compressions budgétaires là? Comment est-ce qu'elle va gérer une telle chose? Et peut-elle nous ventiler la liste des personnes, les 112 effectifs temps complet qui devront quitter le ministère de la Justice? Je suis toujours à la page 162, et on voit, on présente les chiffres et, au niveau de la colonne Effectif temps complet excluant les fonds spéciaux, on parle d'une variation de l'année qui s'en vient par rapport à l'année en cours de 112 postes. Pourrait-elle me fournir plus d'information à cet égard-là? Et comment va-t-elle répartir les compressions budgétaires?

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.


Discussion générale

Mme Goupil: Si vous me permettez, M. le député, étant donné que vous avez pu rencontrer le personnel qui travaille avec moi, une équipe extraordinaire, vous allez me permettre de pouvoir faire l'exercice pour que les gens qui nous entendent puissent aussi savoir quelles sont les personnes qui travaillent avec nous. Alors, j'ai ma chef de cabinet qui est ici, à ma droite, Mme Esther Gaudreault; j'ai également le sous-ministre en titre, Me Michel Bouchard, qui est ici; j'ai également Mme Louise Roy, qui est juste ici. Nous avons aussi M. Mario Bilodeau, qui est aux affaires pénales, juste ici en arrière; j'ai M. Rodrigue Desmeules, qui est aussi à la Direction générale des services de justice; M. Louis Borgeat, qui est à la Direction générale des affaires législatives; j'ai également, à la Commission des services juridiques, Me Pierre Lorrain; et aussi, au Secrétariat à la condition féminine, Mme Michèle Laberge; ainsi que Mme Anne Samson, qui est au Conseil du statut de la femme.

C'est une belle équipe et je suis très fière qu'elle m'ait accompagnée, non pas à cause de ma jeunesse mais parce que, quand on travaille en équipe, il est extraordinaire d'avoir une belle complicité, et c'est ce qui fait en sorte que notre système judiciaire est un des meilleurs au monde. Je le dis en toute humilité mais avec fierté aussi.

D'abord, pour répondre à votre question concernant notre budget, les dépenses, et tout cela, d'abord, au niveau des mesures de réduction... Parce que vous me permettrez de vous dire que, les compressions, elles ont été faites d'abord pour qu'on puisse faire face au déficit auquel nous étions confrontés. À ce titre-là, vous savez, le déficit qui a été accumulé depuis de nombreuses années, il a fallu que tous les ministères puissent faire un effort collectif, et ce, dans l'intérêt de tout le Québec. À ce titre-là, la Justice, elle aussi, a été mise à contribution, et jusqu'à maintenant les efforts ont été faits de façon importante mais surtout en s'assurant que les gens du Québec aient un système judiciaire qui leur soit accessible et qui soit capable aussi de répondre aux besoins des gens d'aujourd'hui. La société évolue...

Une voix: ...

Mme Goupil: Pardon?

M. Ouimet: Le déficit, il est résorbé, hein?

Mme Goupil: Oui.

M. Ouimet: Avec le dépôt du budget. Là, on regarde les crédits pour l'année qui s'en vient, qui va s'amorcer à partir du 1er avril.

Mme Goupil: En fait, il faut être capable de répondre aux réorganisations et aux choix que nous faisons comme société, et c'est dans cette optique que le budget a été préparé.

D'abord, au niveau des dépenses, le budget des dépenses tel qu'il apparaît, vous avez des facteurs qui expliquent les variations, et c'est assez simple comme exercice. Ça a été fait correctement, et je me ferai un plaisir de vous les présenter.

D'abord, au niveau des mesures de réduction des dépenses, il est évident qu'il y a eu une baisse de l'activité judiciaire. Donc, en soi, cela permet d'avoir certaines réductions de dépenses parce que le volume a diminué au cours des dernières années. Également, au niveau... Excusez-moi.

M. Ouimet: Pourriez-vous préciser la baisse des activités judiciaires? Ventilée à quel niveau et attribuable à quoi? Parce que, à première vue, oui, vous avez raison, mais, lorsqu'on cherche les facteurs qui expliquent cela, on comprend mieux aussi ce qui s'est passé au cours des dernières années. Il y a moins de justiciables qui ont accès à la justice, comme vous le savez.

Mme Goupil: ...je vous dirais que l'accessibilité, c'est une chose, mais il y a aussi le fait que, au niveau de la déjudiciarisation des dossiers... Vous savez, la société a évolué et les moyens que les gens utilisent pour régler leurs problématiques amènent parfois des choix de solutions qui sont autres que la judiciarisation.

Donc, au niveau de la baisse de l'activité judiciaire, le pourcentage qui a été calculé est de l'ordre d'à peu près 2,7 %, en considérant entre autres la diminution de volume devant les tribunaux, le fait que les citoyens choisissent d'autres modes, alternatifs, pour régler leurs conflits, ce qui nous amène finalement à une baisse d'à peu près 2,7 %. Et aussi, il ne faut pas...

M. Ouimet: Pardon... Je me permets d'interrompre, juste pour clarifier les choses. 2,7 %, est-ce que c'est au niveau des affaires criminelles et pénales ou au niveau des affaires civiles?

Mme Goupil: Au total.

M. Ouimet: Ce sont tous services confondus.

Mme Goupil: Oui, tous services confondus, effectivement.

M. Ouimet: Est-ce qu'elle pourrait me le ventiler de façon précise, peut-être civiles, pénales, criminelles et autres?

Mme Goupil: Oui. Je vais dire, c'est ce que nous allons... Les prévisions ont été faites à partir des éléments que nous avons, et ultérieurement nous allons être en mesure de le ventiler davantage, selon l'année que nous allons connaître et selon ce que les citoyens vont choisir comme modes, aussi, pour régler leurs différends.

M. Ouimet: C'est pour une année de calendrier, vos statistiques, ou pour une année fiscale? Est-ce que c'est de janvier à décembre, vos statistiques, ou est-ce que c'est d'une année fiscale à l'autre, la baisse de volume?

Mme Goupil: C'est à compter de janvier, et nous allons être en mesure, lors de notre prochaine étude de crédits, de vous en dire davantage, parce que pour le moment c'est en préparation.

M. Ouimet: Vous ne l'avez pas là. Pour l'année qui s'est terminée au 31 décembre 1998, vous n'avez pas de chiffres?

Mme Goupil: Non.

M. Ouimet: Mais ça vous permet d'avancer quand même que...

Mme Goupil: Nous en avons, excusez-moi. Nous en avons, mais je vous dirais que, pour qu'ils soient présentés avec le plus de justesse possible, nous allons faire également des comparables avec l'année que nous allons vivre, soit le prochain exercice financier.

M. Ouimet: Rien avant l'an 2001?

Mme Goupil: Pardon?

M. Ouimet: Rien avant l'an 2001, en termes de statistiques?

Mme Goupil: Non.

M. Ouimet: Si vous comparez l'année qui s'est écoulée entre le 1er janvier et le 31 décembre 1998, j'aimerais avoir accès à ces données-là. Si vous me dites que maintenant vous les comparez, ces données-là, avec les données entre le 1er janvier 1999 et décembre 1999, on n'aura rien avant l'an 2000.

Mme Goupil: En fait, je vous dirais qu'avec la venue de la médiation familiale, aussi, vous savez, pour être capable de comptabiliser des chiffres, il faut avoir du vécu. Nous en arrivons à une première année d'exercice, et aussi nous allons être en mesure de faire des comparables avec les années antérieures à 1998. On se donne des outils et on sera en mesure, tout au long de l'année, de répondre avec le plus d'exactitude possible, à quel endroit ces chiffres peuvent être ventilés.

M. Ouimet: Je comprends, Mme la ministre, mais... Je comprends l'exercice que vous voulez faire, mais l'exercice que, moi, j'aimerais faire, ça serait d'avoir les données pour l'année 1998, admettons, par rapport à l'année 1997, et on pourrait remonter par rapport à l'année 1996. Déjà là, on aurait un tableau comparatif sur trois ans ou quatre ans, au fur et à mesure. Vous pouvez remonter en arrière pendant une période de cinq ans. Moi, je pense que ça pourrait nous éclairer. Mais de me dire à ce moment-ci: Je ne peux pas vous déposer les chiffres parce qu'on veut avoir les chiffres pour l'année 1999... Bon, lorsque les chiffres pour l'année 1999 seront disponibles, je vous demanderais, à ce moment-là, de les rendre publics, mais les chiffres pour 1998, 1997, 1996 sont disponibles. Moi, je vous demande de m'en faire parvenir une copie pour voir un petit peu ce qui s'est passé.

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, nous allons être en mesure de répondre, au courant de l'année, avec le plus d'exactitude possible au niveau de la ventilation par rapport aux chiffres. Ce que je peux vous dire, c'est que, pour ce qui est du passé, je n'étais pas présente, mais je peux vous dire que lorsqu'on a pris le temps de regarder le budget pour la prochaine année qui s'en vient, où les budgets ont été alloués, ça a été fait correctement, et on essaie de s'ajuster en fonction de la réalité de la justice québécoise. Donc, avec la venue de différents modes alternatifs, avec des façons nouvelles de faire aussi, il y a une baisse de l'activité judiciaire, c'est ce que je peux vous confirmer aujourd'hui. Et on vous dit que, toutes proportions confondues, elle est de l'ordre d'à peu près 2,7 %. Cependant, avec les outils que le ministère a entre les mains, nous allons être en mesure ultérieurement, dans l'étude de nos crédits pour la nouvelle année, de vous répondre avec le plus d'exactitude possible.

M. Ouimet: Si je comprends bien, lorsqu'on se livrera à un 10 heures ensemble, à quelque part d'ici quelques semaines, à ce moment-là vous aurez les chiffres. O.K.

Mme Goupil: Tout à fait.

M. Ouimet: Très bien. Ça va.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui. Sur la question des effectifs, maintenant, les 112, pourriez-vous me donner plus d'information? À la page 162, on dit que pendant l'exercice qui va s'amorcer à partir du 1er avril il va y avoir 112 effectifs temps complet en moins. Ça, c'est à la page 162.

Mme Goupil: À quelle page?

(11 h 40)

M. Ouimet: La page 162 du volume III, Budget de dépenses. Si vous regardez, vous avez un tableau 1999-2000, puis par la suite 1998-1999, juste au bas, juste après le total, vous avez Effectif, ETC. Vous regardez le nombre de personnes qui sont à l'emploi du ministère de la Justice et de la Condition féminine, et vous avez entre parenthèses la variation par rapport à 1998-1999 et 1999-2000, il y a 112 personnes de moins. Je voudrais avoir plus d'information sur les 112 personnes de moins.

(Consultation)

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Goupil: Oui, merci. Alors, pour les catégories d'emplois, parce que nous avons... Pour l'année 1999-2000, il y a à peu près une dizaine de catégories d'emplois. Au niveau des cadres supérieurs, il y en a 15 et, pour l'année 1998-1999, il y en avait également 15. Donc, à ce niveau, il n'y a aucune variation.

Pour ce qui est des cadres intermédiaires, il y en avait, pour l'exercice 1998-1999, 74 et il y en a, pour l'exercice 1999-2000, un de moins, soit 73.

Au niveau des avocats, avocates et notaires, il y en avait, pour l'exercice 1998-1999, 23 et, pour ce qui est de l'exercice 1999-2000, il y en a 20.

Quant aux professionnels, il y en avait, pour 1998-1999, 97 et, pour ce qui est de 1999-2000, il y en a 101.

Au niveau des techniciens et des...

M. Ouimet: Il y en a quatre de plus?

Mme Goupil: Oui.

M. Ouimet: O.K.

Mme Goupil: Pour ce qui est des techniciens et techniciennes, il y en avait 287 pour 1998-1999 et, pour 1999-2000, il y en aura 268. Quant... Pardon?

M. Ouimet: Une baisse de combien? Avez-vous la baisse?

Mme Goupil: Dix-neuf personnes.

M. Ouimet: Dix-neuf?

Mme Goupil: Oui.

M. Ouimet: Ça, ce sont pour les techniciens judiciaires?

Mme Goupil: Les techniciens, oui, tout à fait. Quant au personnel de bureau, il y en avait 736 et il y en a maintenant 678 de prévus, soit une baisse, une variation de 58. Au niveau du personnel de bureau, c'est ceux que je viens de vous donner, je m'excuse.

Quant aux ouvriers et ouvrières, il y en avait trois, il y en a encore trois.

M. Ouimet: Bien, on n'arrive pas à 112, là.

(Consultation)

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Goupil: Oui. Et quant au personnel des affaires juridiques et législatives, il y en a 12 de moins, soit six juristes et six soutien.

M. Ouimet: Les juristes faisaient quoi? Je sais que c'est assez technique, là, et sûrement qu'un des collaborateurs de la ministre a l'information.

Mme Goupil: Oui, tout à fait. Alors, évidemment, la baisse des techniciens, notamment, s'explique par la baisse des activités judiciaires. Alors, évidemment, si on a moins de volume, il est normal aussi qu'il y ait du personnel en moins. Et, dans ce cas-là, ce sont des contractuels qui n'ont pas été renouvelés.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui. Au niveau des compressions de 18 000 000 $ et des effectifs en ce qui concerne les substituts du Procureur général, est-ce que vous prévoyez des baisses à ce niveau-là? Est-ce que vous prévoyez l'embauche de substituts?

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Goupil: Oui. D'abord, au niveau des effectifs qui relèvent de la Direction générale des affaires criminelles et pénales, il n'y en a pas, de coupures de prévues pour le prochain exercice. Il y avait, pour l'exercice 1998-1999, 292 personnes et, pour l'exercice 1999-2000, le nombre de personnes demeure le même, soit 292.

D'abord, dans un premier temps, il y a différents programmes qui relèvent des affaires criminelles. Il y avait le programme Accès, qui avait été mis sur pied d'abord pour une durée d'une année et qui a été renouvelé par la suite, et ce programme a permis l'engagement de substituts occasionnels. C'est ce qui permettait de contrer toute l'économie souterraine en matière de criminalité.

Le programme de récupération des retards en matière pénale qui avait été mis sur pied parce qu'il y avait un retard de l'ordre de plus de 65 000 dossiers, ce qui fait en sorte qu'on avait prévu pour ce programme de récupération l'emploi de 10 personnes, et ça s'est échelonné sur une période de 17 mois. Pendant ces 17 mois, 95 % des objectifs ont été rencontrés, ce qui fait en sorte qu'en cette matière les 10 personnes qui ont travaillé, ces personnes ayant atteint l'objectif, il est évident que leur contrat n'a pas été renouvelé.

M. Ouimet: Je vais préciser davantage ma question. Dans un article du 19 février dernier intitulé Justice de brousse au Québec – convaincu que vous-même ainsi que tous vos collaborateurs en ont pris connaissance – les 300 procureurs de la couronne vous exhortaient, entre autres, à revenir sur votre décision d'abolir 15 postes au 1er avril prochain, donc dans deux jours. Dans un autre communiqué, ils vous exhortaient à engager 150 nouveaux procureurs de la couronne.

Le témoignage qu'ils donnaient dans l'article du 19 février était quand même assez éloquent. On dit qu'ils n'ont pas le temps de rencontrer avant le procès les témoins et les victimes qui sont appelés à témoigner. Ils ne disposent que de 60 secondes par accusé pour étudier leur dossier de remise en liberté. En région, ils alléguaient que la quasi-totalité des procureurs n'ont pas le temps de lire la jurisprudence ou de se tenir à jour. Ils comparaient le système judiciaire à ce qui se passe dans le domaine des hôpitaux au niveau des urgences. Je pourrais lire de grands extraits de ce qu'ils disaient, mais je pense que, vous ainsi que vos collaborateurs, vous en avez pris bonne note.

C'est grave, là, lorsqu'on dit que les gens qui sont mandatés par l'État pour poursuivre des criminels ne peuvent pas rencontrer les témoins, ne peuvent pas rencontrer les victimes. Ils ont une cinquantaine de dossiers, ils ont à peu près une minute par dossier pour décider de la remise en liberté des accusés. Ils vous disent deux choses, ils passent deux messages à la ministre de la Justice. Ils vous disent dans un premier temps: Les 15 postes que vous prévoyez abolir au 1er avril, de grâce, ne le faites pas. Dans un deuxième temps, ils vous disent également: Il nous manque d'effectifs de façon importante au Québec.

On est face, cette année, à l'atteinte du déficit zéro. On constate des compressions budgétaires encore au niveau de la Justice. La question que je vous pose, Mme la ministre, c'est: Qu'est-ce que vous avez à leur répondre, à vos substituts qui sont devant tous les tribunaux du Québec à représenter le ministère de la Justice pour le compte de la province?

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la ministre.

Mme Goupil: D'abord, je vais continuer l'exercice que je m'étais apprêtée à faire tout à l'heure concernant l'explication de l'affectation des 292 personnes qui travaillent sous la Direction générale des affaires criminelles, et je pense que vous serez à même d'avoir la réponse à la question que vous venez de me poser.

M. Ouimet: Deux cent quatre-vingt-douze et non pas 300? Dans le document, on faisait référence à 300 ou 297. C'est 292 substituts?

Mme Goupil: C'est 292 personnes qui relèvent de la Direction générale des affaires criminelles et pénales.

M. Ouimet: Mais ma question: Combien de substituts du procureur de la couronne?

Mme Goupil: Exactement. C'est vraiment...

M. Ouimet: Deux cent quatre-vingt-douze?

Mme Goupil: Y compris les substituts en chef.

M. Ouimet: O.K.

Le Président (M. Brouillet): Alors, vous pouvez poursuivre, Mme la ministre.

Mme Goupil: Et le nombre de personnes auxquelles nous faisons référence, il s'agit de permanents et non pas d'occasionnels. Donc, les 292 personnes qui étaient affectées de façon permanente le demeurent pour le prochain exercice. Les besoins des emplois occasionnels à la Direction générale des affaires criminelles et pénales pour l'exercice 1998-1999 avaient été regroupés en cinq catégories. Je vous ai parlé tout à l'heure du programme Accès. Il y avait également la récupération des retards en matière pénale et, comme je vous l'ai mentionné, les effectifs qui avaient été engagés de façon occasionnelle pour répondre à cette problématique des retards ont fait en sorte qu'actuellement nous avons été capables de traiter plus de 95 % des dossiers qui étaient en retard, ce qui fait en sorte que les personnes qui avaient été engagées, effectivement, leur besoin n'existe plus, puisque nous avons répondu aux dossiers en retard.

(11 h 50)

Il y avait également la mesure qui s'appelait mesure antigang qui, elle – cette mesure – a nécessité, à ce moment-là, l'affectation de substituts d'expérience à la conduite des dossiers forts complexes. Ces substituts expérimentés ont dû être replacés dans leur unité habituelle de travail, les engagements des substituts occasionnels les remplaçant ont été calculés pour une période d'une année.

Les besoins en remplacements, tels les congés de maternité et des congés sans solde, font en sorte que les emplois occasionnels qui avaient été justifiés, lorsque les gens reprennent leur travail, évidemment, les emplois occasionnels n'ont pas à être renouvelés. Seuls, finalement, les programmes de récupération des retards en matière pénale n'ont pas été renouvelés, soit 10 substituts du Procureur général.

M. Ouimet: Occasionnels?

Mme Goupil: Pardon?

M. Ouimet: Dix occasionnels?

Mme Goupil: Dix occasionnels. Et ils avaient été engagés pour une année, et leur contrat vient à échéance le 31 mars 1999.

M. Ouimet: Si je comprends bien, ils ne seront pas renouvelés.

Mme Goupil: Oui.

M. Ouimet: Pour parler en clair, là.

Mme Goupil: Si vous me permettez de continuer ma réponse, le travail...

M. Ouimet: Je comprends que vous lisez ce qu'on vous a préparé, mais ce que je veux savoir, puis je ne veux pas être... Je veux juste bien comprendre. La question que j'ai posée précisément, c'est: Dans la lettre des substituts du procureur de la couronne, dans le communiqué de presse qu'ils ont déposé en date du 17 mars 1999, ils parlaient de 15 occasionnels. Là vous me dites: Il n'y en avait pas 15, il y en a 10. Et là ce que vous me dites également, c'est que les 10 ne seront pas renouvelés.

Mme Goupil: Alors, je vais continuer à répondre à la question. D'abord, le fait que je réfère à mes notes ou à mon texte, c'est un signe de responsabilité, justement, pour répondre aux vraies questions, et, si on me donne le temps d'y répondre correctement, vous allez avoir toute l'information, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: La réponse était écrite avant que je pose la question. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Brouillet): Écoutez, s'il vous plaît...

Mme Goupil: Nous avons... Oui?

Le Président (M. Brouillet): ...on n'interviendra pas trop, trop comme ça. Alors, on va laisser Mme la ministre terminer, puis, si ce n'est pas satisfaisant, vous pourrez revenir avec une autre question. Alors, Mme la ministre.

Mme Goupil: Vous savez, pour ce qui est des substituts du Procureur général, comme leurs contrats viennent à échéance le 31 mars – il y en avait 10, il n'y en avait pas 15... Et, comme nous avons récupéré le retard, lorsque ces gens ont été engagés, dans le cadre de leur contrat, ils connaissaient, tout comme l'Association connaissait de quelle façon ces substituts occasionnels étaient engagés. Ils ont été engagés pour un contrat spécifique, ils ont répondu à la demande, ce qui fait en sorte que, les retards n'existant plus, il n'était pas justifié de renouveler ces postes.

Et, quant au personnel qui relève également de la Direction des affaires criminelles, il y a le renouvellement de 37 substituts, dont 10 pour le programme Accès et 17 qui étaient pour le programme – M. Bilodeau...

Une voix: Antigang...

Mme Goupil: Antigang.

Une voix: ...et des remplacements de tout ordre.

Mme Goupil: O.K. Et, pour ce qui est des remplacements de tout ordre, justement pour combler les postes vacants suite à un congé de maternité ou suite à un congé de maladie, on s'assure d'avoir toujours le personnel pour remplacer les permanents lorsque les besoins se font sentir.

Le Président (M. Brouillet): Alors, c'est terminé pour ce point-là. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: La ministre estime-t-elle qu'il y a suffisamment de substituts du procureur de la couronne, à la lumière des déclarations de M. Girard qui est président de l'Association, qui disait ceci: «80 % des procureurs affirment ne pas avoir le temps de rencontrer les témoins avant un procès et la moitié craignent des erreurs qui pourraient résulter en un acquittement, une réalité inquiétante qui met en péril la sécurité du public et bat en brèche les principes d'équité et d'accessibilité – qui sont si chers à la ministre et au critique de l'opposition – au système judiciaire»?

Et, là je pourrais continuer, il y a un constat qui vient de l'interne, partagé par 80 % de ces substituts qui disent: On n'a pas assez d'effectifs pour bien faire notre travail. On ne peut pas garantir au public qu'il va avoir accès à un système de justice de qualité, en ce qui les concerne. On ne peut pas donner de garanties. Les conditions de travail qu'on vit présentement sont tout simplement inacceptables. Nous avions 10 occasionnels; la ministre vient de confirmer qu'ils ne seront pas renouvelés. Ils vous demandent des substituts du procureur de la couronne en plus pour assurer aux justiciables un meilleur accès et une meilleure qualité de justice.

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

M. Ouimet: La ministre...

Le Président (M. Brouillet): Excusez. Ce n'est pas terminé.

M. Ouimet: ...dernier volet. La ministre a-t-elle pris connaissance de la lettre de M. Girard et partage-t-elle ce qu'il évoque dans cette lettre-là?

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la ministre.

Mme Goupil: D'abord, M. le député de Marquette, je vous ferai le commentaire suivant: Tout ce qui touche les procureurs de la couronne, comme tout ce qui touche la justice, lorsqu'il y a des lettres, que ce soit rendu public ou qu'elles me soient adressées directement, j'en prends toujours connaissance.

D'abord, pour ce qui est des procureurs et des substituts, je peux vous dire que, dès le début de ma nomination, j'ai fait... Pour moi, il était important que je puisse rencontrer ces hommes et ces femmes que, de par ma pratique privée, il n'y a pas tellement longtemps, j'ai côtoyés aussi. Et je sais que ces gens-là, les décisions qu'ils ont à prendre, ils les prennent avec courage, avec jugement et avec un bon discernement. Et je peux vous dire que, de l'interne, comme vous sembliez y faire référence, en aucun cas on m'a informée – et j'ai rencontré ces gens-là, que ce soit à Montréal, que ce soit à Québec ou à différents autres endroits, Sherbrooke même – et en aucun cas je n'ai senti que ces personnes ne faisaient pas leur travail correctement, loin de là. Je peux vous dire que nous sommes privilégiés, au Québec. Parce que, même, vous avez pu constater, à la lecture des journaux ce matin, le taux de criminalité est en diminution, ici même, au Québec. Et même au niveau de la Loi sur les jeunes contrevenants – c'est assez exceptionnel – le taux de criminalité est le moins élevé ici, au Québec.

Et je suis convaincue que le député de Marquette, qui est lui-même avocat, qui a sûrement déjà eu l'occasion de travailler avec la Loi sur les jeunes contrevenants, sera en accord avec moi pour dire qu'ici, au Québec, nous avons un système judiciaire qui est reconnu par tous les intervenants du milieu, au niveau de la Loi sur les jeunes contrevenants, et qu'il serait fort dommage que l'on ait à changer une disposition qui a fait ses marques et qui a fait ses preuves.

Maintenant, je me permettrais d'ajouter aussi que, quant aux citoyens et citoyennes du Québec, ils peuvent avoir très confiance en leur système judiciaire. Et, lorsque vous rencontrez les gens, individuellement, qui ont eu à utiliser le système judiciaire, dans la grande majorité des cas ces gens ont été bien accueillis, ces gens ont eu toutes les informations dont ils avaient besoin, et les procureurs de la couronne et les substituts font un travail exceptionnel. Quant aux coupures que vous venez de rappeler, il n'y en a pas, de coupures, et on demeure avec le même nombre de personnes.

Maintenant, vous savez, lorsque nous sommes en moyens de négociation ou en moyens de pression, il peut arriver que, pour aider une cause, parfois l'on puisse se permettre de laisser quelques messages, justement pour justifier notre cause. Alors, il est important qu'au ministère de la Justice on soit au fait de la réalité. Nous sommes au fait de la réalité des substituts et des procureurs, et actuellement ils font un travail extraordinaire, et les citoyens n'ont pas à craindre... Je n'ai été informée d'aucun dossier où il y avait eu une problématique majeure. S'il en était le cas, soyez assuré qu'ils auraient toute l'attention et l'écoute nécessaires pour qu'on ne mette pas en doute notre système de justice.

Et quant à la lettre à laquelle vous avez fait référence, également, j'en ai bien pris connaissance et je me permettrais un peu de vous rappeler que, d'abord, il existe, suite au député libéral fédéral, M. Masse, en 1987...

Une voix: Provincial.

(12 heures)

Mme Goupil: ...provincial, excusez-moi, où on avait la réforme du Code pénal et, suite à cela, le nouveau Code de procédure pénale permettait, en fait, de déléguer à certaines personnes la possibilité de faire d'abord des nouvelles formules pour faire des constats courts et des constats longs – ça existe dans plusieurs autres pays – et les personnes qui sont mandatées pour le faire en lieu et place du Procureur général sont nommées par acte de nomination. Je n'en ai pas nommé encore personnellement, ils l'ont été par mon prédécesseur, mais, quand viendra le temps de renouveler, j'y apporterai toute l'attention concernant ces personnes. Et cette loi a été adoptée à l'Assemblée nationale, de façon générale à l'unanimité, pour que l'on puisse travailler.

Quant à la plainte à laquelle on faisait référence dans cette lettre-là, je peux vous assurer que j'ai pris avec grand respect l'opinion juridique qui pouvait y apparaître. Mais la ministre de la Justice a une équipe en place qui connaît bien le droit, et nous allons avoir des éléments et des arguments de taille à faire valoir eu égard à la plainte qui aurait été portée devant le syndic du Barreau.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: En d'autres termes, deux choses, pour conclure là-dessus: de un, la lettre de M. Girard, vous l'interprétez comme un moyen de pression qui ne reflète pas la réalité, d'après ce que vous avez vu et entendu lorsque vous avez rencontré les substituts du procureur de la couronne; dans un deuxième temps, eu égard à la plainte, ce que vous dites, c'est qu'elle vous apparaît non fondée en droit. C'est ça?

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Je vous dirais que les procureurs, comme tous les autres profesionnels, ont des horaires parfois qui sont chargés et que cependant ça ne met nullement en doute que, ici, au Québec, nous avons un des meilleurs systèmes judiciaires au monde, et que la justice n'est pas en péril d'aucune façon, et que nous ne manquons pas de procureurs de la couronne.

Le Président (M. Brouillet): Merci, Mme la ministre. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui. M. le Président, sur une autre question. Le 30 juin prochain, 1999, la clause «nonobstant», qui avait été invoquée par le député de Westmount–Saint-Louis alors qu'il était ministre de l'Éducation, vient à échéance. La ministre y a sûrement réfléchi et songé. Il s'agissait d'une clause qui, ni plus ni moins, disait: Nonobstant les dispositions de la charte québécoise et de la charte canadienne en ce qui concerne la liberté de religion et la liberté de conscience, pour maintenir notre système éducatif en place tel que nous le connaissons actuellement, on doit invoquer la clause «nonobstant». Cette clause vient à échéance le 30 juin prochain. J'aimerais entendre la réflexion de la ministre et sa recommandation au gouvernement comme jurisconsulte.

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Goupil: Je vous remercie, M. le député de Marquette, de me poser cette question. Ça me permet d'expliquer un peu à tous les citoyens et citoyennes du Québec notre façon de faire, notre façon de travailler. Il est évident que, lorsque nous avons à informer et indiquer clairement les implications juridiques, nous travaillons d'abord avec les gens de mon ministère où on m'informe des aboutissants de la portée d'une telle clause. Comme nous sommes encore en début de mandat, j'ai un beau grand jardin avec une équipe extraordinaire qui travaille correctement, et c'est avec grand plaisir que nous pourrons revenir devant vous et devant l'Assemblée pour répondre à cette question en temps et lieu. Il nous reste encore un certain temps pour y travailler. Nous avons débuté des débuts de discussions, nous nous sommes donné un canevas de travail pour être capables de répondre avec justesse et être capables aussi que les citoyens comprennent bien les tenants et aboutissants de cette clause-là «nonobstant». Alors, nous allons faire le travail avec célérité et nous allons être en mesure d'y revenir en temps et lieu.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: En ce qui concerne la ministre, elle y a sûrement réfléchi. Je comprends que d'autres personnes au niveau du ministère réfléchissent à la question, mais je voudrais entendre la réflexion de la ministre de la Justice. Qu'est-ce qu'elle en pense? Est-ce qu'on devrait reconduire la clause «nonobstant» ou est-ce qu'on devrait ne pas la reconduire? Parce qu'elle est également la gardienne des chartes. Comme ministre de la Justice, Procureur général, jurisconsulte, elle est la gardienne des chartes. Quelle est sa réflexion?

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Goupil: Justement parce que je représente tout ce que vous venez d'exprimer, c'est avec un travail consciencieux qui est fait, et je vais faire d'abord mes représentations au Conseil des ministres, dont je suis membre de l'Exécutif, et c'est avec grand plaisir que nous allons par la suite vous informer des décisions que nous allons prendre dans ce dossier.

Le Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Très bien. Sur la question, maintenant, de la rémunération des juges, j'espère qu'elle ne me servira pas la même réponse. Ça fait longtemps que la magistrature est en attente, et il y a des risques considérables. Chaque jour que le gouvernement tarde à annoncer sa décision, c'est un risque de plus que le gouvernement prend par rapport à des procureurs qui ont allégué que les magistrats n'ont pas l'indépendance voulue pour traiter des questions. On a qu'à penser lorsque le gouvernement est une partie impliquée dans un dossier comme demanderesse ou défenderesse par rapport à un autre justiciable, le problème se pose de façon importante. Quelle est la réflexion de la ministre? Est-ce que la ministre est en accord avec le rapport Bisson? Est-ce qu'elle est en désaccord? Est-ce qu'elle est en accord en partie?

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la ministre.

Mme Goupil: M. le Président, je suis très heureuse que le député de Marquette me pose la question parce que, d'abord, je vais me permettre d'expliquer le rapport Bisson. Vous savez, le rapport Bisson, c'est le rapport qui...

M. Ouimet: Ce n'est pas de ça qu'il s'agit, c'est de connaître la position de la ministre à l'égard du rapport Bisson.

Mme Goupil: M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): Alors, vous avez droit à votre réponse, Mme la ministre. J'inviterais M. le député à être patient. Alors, Mme la ministre.

M. Ouimet: Je ne sais pas si la députée de Lévis est allée à la même école que la députée de Taillon pour manger le temps, mais ça n'a pas servi les intérêts de la députée de Taillon.

Le Président (M. Brouillet): Bien, ce sont des crédits provisoires, et il y aura encore des heures et des heures, je pense, en crédits, en commission. Alors, Mme la ministre.

Mme Goupil: D'abord, j'espère que le député de Marquette va collaborer à faire en sorte que les parlementaires puissent être bien informés pour qu'ils prennent la décision, justement, la meilleure décision dans ce dossier.

Je vais vous dire que nous attendons toujours d'avoir la réponse du député de Marquette et de l'opposition en ce qui a trait à la commission parlementaire que nous souhaitons pouvoir obtenir pour, justement, informer correctement les parlementaires qui ont à prendre la décision.

Comme vous le savez, comme ministre de la Justice, les propos que j'ai tenus depuis ma récente nomination font en sorte que je crois sincèrement à cette indépendance judiciaire. Et, comme ministre de la Justice, je peux vous dire que le rapport Bisson est un rapport qui fait suite à un jugement de la Cour suprême dans lequel il avait été clairement indiqué qu'il existait trois pouvoirs au Québec: le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire.

Pour ce qui est des juges, lorsque l'on parle du pouvoir judiciaire, la Cour suprême a exprimé clairement que, pour que les juges puissent maintenir, entre autres, leur indépendance judiciaire, la rémunération des juges ne pouvait pas être négociée au même titre que celle d'autres membres de la fonction publique.

Ceci étant dit, lors d'une loi qui a été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale l'année dernière, il y a un comité qui a été créé sur lequel des personnes de grande compétence ont été mandatées pour justement faire des recommandations aux parlementaires de l'Assemblée nationale. Dans ce rapport-là, qui a été très bien fait, on explique d'abord quelle est la fonction des juges de la Cour du Québec et de ceux de la Cour municipale. On a également fait l'exercice de comparer les juges de la Cour du Québec avec ceux des autres provinces du Canada. Et je suis heureuse de vous annoncer – parce que c'est la première fois qu'on me pose la question – que, comme ministre de la Justice, je suis en accord avec les recommandations du rapport Bisson.

Et, ceci étant dit, il est important que les gens du Québec et les parlementaires soient bien au fait de ce rapport-là, parce que ce n'est pas tout le monde qui a eu le privilège de lire ce rapport-là. Aussi, il a été décidé que c'était l'Assemblée nationale qui, de façon démocratique, allait avoir à se prononcer par rapport à ce rapport-là, qui est le rapport Bisson. Dans ce même contexte, je vous rappellerai, M. le député de Marquette, que nous avons demandé votre collaboration pour pouvoir tenir une commission parlementaire pour informer les parlementaires de chaque côté de la Chambre et que nous attendons toujours après votre réponse. Et l'exercice...

Une voix: ...

(12 h 10)

Mme Goupil: ...si vous me permettez de terminer la question, M. le Président. Le but de cet exercice-là – parce que justement j'ai un grand respect pour la justice – c'est que les parlementaires qui auront à se prononcer suite aux recommandations soient informés correctement.

Lorsque la société et les parlementaires, les gens qui ont été choisi par les hommes et les femmes du Québec, comprennent bien notre système judiciaire... Mieux nous allons le comprendre, plus nous allons en être fiers. Nous avons un des meilleurs systèmes judiciaires au monde, et je vais continuer à travailler pour faire en sorte qu'il soit mieux connu des justiciables. Et j'ose espérer que j'aurai votre entière collaboration pour annoncer dans les prochains jours la tenue de cette commission. Mais, jusqu'à maintenant, nous n'avons toujours pas eu de vos réponses.

Le Président (M. Brouillet): Alors, merci. Alors, M. le député de Marquette, on vous...

M. Ouimet: Je vais donner ma réponse sur-le-champ à la ministre de la Justice. On pourrait même faire une annonce ensemble en conférence de presse que nous sommes tous les deux d'accord avec le rapport Bisson. Pas besoin de commission parlementaire. Saisissez l'Assemblée nationale d'une proposition, et nous allons l'appuyer, nous allons voter. Et on passera à autre chose. Mais pourquoi, pourquoi, aller devant une commission parlementaire alors que tous ont pris connaissance – ou je présume que tous ont pris connaissance – du rapport Bisson? C'est un rapport qui est extrêmement bien fait, bien détaillé, avec des comparaisons par rapport aux autres juridictions où on plaide également la lourde tâche des juges de la Cour du Québec par rapport à d'autres tribunaux. Je veux dire, tout est là, on n'a qu'à se donner la peine de lire le rapport pour être éclairé. Combien d'autres provinces, Mme la ministre, ont utilisé une commission parlementaire pour statuer sur un rapport similaire? Il n'y en a pas beaucoup, à ma connaissance.

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la ministre.

M. Ouimet: Et les consultations, dernier point...

Mme Goupil: M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): Excusez. Une petite minute, s'il vous plaît. Pour terminer, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Si vous me permettez. Juste sur un dernier point. Les consultations ont déjà été faites. Les membres du comité Bisson ont rencontré toutes les personnes qui étaient intéressées à faire entendre leur point de vue. Pourquoi s'embarquer dans une nouvelle consultation alors que vous avez choisi vous-même, votre gouvernement, les trois personnes qui allaient siéger sur le comité? Elles ont fait leur travail. Moi, je n'ai pas à contrevérifier ce qu'elles ont fait. J'ai, comme législateur, à prendre une décision sur la foi du rapport qui a été déposé, à moins que le gouvernement et la ministre aient d'autres intentions cachées ou non avouées en tenant une commission parlementaire. Si sa position, elle est arrêtée, elle n'a qu'à convaincre le premier ministre, le président du Conseil du trésor et le ministre des Finances pour dire: Je dépose une proposition. Je demande qu'on en fasse un débat à l'Assemblée nationale puis, par la suite, qu'on passe au vote.

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Goupil: M. le Président, je vous dirais que je suis tout à fait respectueuse des pouvoirs qui existent, d'abord le pouvoir législatif. Nous avons choisi, par une loi votée à l'unanimité de chaque côté de la Chambre, que ce soit aux parlementaires de pouvoir décider unilatéralement et ultérieurement de la décision finale. D'abord, le but de cet exercice-là n'est pas de rien cacher. Je vous dirais qu'il est important que l'on puisse mieux connaître notre Cour du Québec. Il est important que tous ceux et celles qui se sentent interpellés par notre système de justice soient bien informés et qu'ils puissent prendre leurs décisions avec toute la lumière nécessaire pour pouvoir les prendre.

Ceci étant dit, l'objet de la commission parlementaire, d'abord, est de pouvoir permettre aux gens de pouvoir poser des questions s'il y a des éléments dans ce rapport-là qui ne semblent pas être clairs. Il est important que les gens puissent bien comprendre, et je vous dirais que le rapport Bisson n'a pas fait l'objet... et ce n'est pas tous les parlementaires qui en ont pris connaissance.

Faire cet exercice-là permettra aussi aux municipalités d'être entendues, et, pour moi, il est important que tous ceux et celles qui le souhaitent puissent être entendus pour justement – parce que j'ai grand respect à l'égard de tous les parlementaires – qu'ils puissent bien comprendre le rapport Bisson, qu'on y accorde toute l'importance que cela doit avoir, et ce, dans l'intérêt de notre système judiciaire. Et je ne cache absolument rien. Au contraire, je veux, avant que la décision finale soit prise, que les députés de cette Assemblée nationale, de chaque côté de la Chambre, puissent être tout à fait au fait. Et, si vous m'aviez donné votre réponse avant tout à l'heure, la commission aurait déjà été entendue, et nous aurions probablement fait l'exercice, et les gens auraient obtenu toute l'information qu'ils auraient souhaitée.

M. Ouimet: Avec le même résultat, Mme la ministre?

Le Président (M. Brouillet): Alors, il reste...

M. Ouimet: En 10 secondes.

Le Président (M. Brouillet): Très bref, pour laisser le dernier temps à la ministre.

M. Ouimet: Oui, oui, bien sûr.

Le Président (M. Brouillet): Question brève.

M. Ouimet: En 10 secondes, M. le Président. C'est curieux, parfois, lorsqu'on demande des commissions parlementaires pour faire le débat sur les urgences, sur les hôpitaux par rapport à la crise qu'on vit depuis des années, on accuse des fins de non-recevoir, et, lorsque maintenant il s'agit de servir les intérêts... peut-être pas les intérêts immédiats de la ministre de la Justice, mais de servir les intérêts du président du Conseil du trésor et du premier ministre, alors, là, on s'empresse de tenir des commissions parlementaires pour inviter des gens qui, on le sait, vont s'objecter aux recommandations du rapport Bisson. Ces gens-là ont déjà été entendus. L'UMQ, l'UMRCQ ont déjà été entendues par le comité Bisson. Pourquoi répéter l'exercice à nouveau?

Le Président (M. Brouillet): M. le député... Alors, Mme la ministre, vous avez une minute pour votre conclusion.

Mme Goupil: D'abord, je pense que... Vous savez, de bien informer les gens, d'en faire un exercice de pédagogie pour que l'on puisse bien comprendre en quoi consistent nos tribunaux, en quoi consiste la juridiction, je vais vous dire que c'est respectueux à l'égard des parlementaires de le faire et je souhaite vraiment que l'on puisse informer correctement les gens qui désirent en connaître davantage, parce qu'il y va de notre système judiciaire. Et vous le savez que nous avons une décision à prendre ensemble, les députés de chaque côté de cette Chambre. Nous avons un outil qui est le rapport Bisson, et je pense qu'il est important que les gens... Parce que ce seront des gens qui seront invités à participer, et, si j'ai votre collaboration, ça va se faire dans les plus brefs délais. Merci.

Le Président (M. Brouillet): Alors, ceci met fin à l'échange, et je vous remercie, Mme la ministre de la Justice ainsi que M. le député de Marquette et toutes les autres personnes qui nous accompagnent. Et nous devons maintenant revenir en assemblée plénière, et je remercie toutes les personnes, donc, qui sont ici et de bien vouloir se retirer le plus rapidement possible pour que nous puissions revenir en assemblée plénière. Merci.

Alors, je vais suspendre pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 12 h 17)

(Reprise à 12 h 19)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous invite, M. le député de Marquette, à présenter le rapport de la commission plénière, s'il vous plaît.

M. Ouimet (président de la commission plénière): Alors, M. le président de la commission plénière, j'ai l'honneur de vous faire rapport que la commission plénière a étudié les crédits provisoires pour l'année 1999-2000 et qu'elle n'a pas fini de délibérer.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Marquette. Et, sur ce, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 20)

(Reprise à 14 h 1)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.


Présence de M. Roger Dehaybe, administrateur général de l'Agence de la francophonie, et du consul général de la République hellénique à Montréal, M. Ioannis Gabriel Papadopoulos

Très bien, veuillez vous asseoir. Nous avons des visiteurs de marque aujourd'hui. J'ai d'abord le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes de l'administrateur général de l'Agence de la francophonie, M. Roger Dehaybe.

Alors, j'ai également le plaisir de souligner la présence du consul général de la République hellénique à Montréal, M. Ioannis Gabriel Papadopoulos.

Alors, nous abordons les affaires courantes. Il n'y a pas de... M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Tout simplement, également pour souligner la présence dans nos galeries de l'honorable Don Boudria, leader gouvernemental à la Chambre des communes et ministre responsable des Jeux de la francophonie.

Le Président: Avoir su, j'aurais invité M. Boudria à être dans la tribune du président. Ha, ha, ha!


Affaires courantes

Alors, aux affaires courantes, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


Rapport annuel du Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche

M. Legault: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1997-1998 du Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche.

Le Président: Alors, le document est déposé.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commission, M. le président de la commission des finances publiques et député de Richelieu.


Poursuite du débat sur le discours sur le budget

M. Simard (Richelieu): M. le Président, je dépose le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé les 23, 24, 25 et 30 mars 1999 afin de poursuivre le débat sur le discours du budget, conformément à l'article 275 de notre règlement.

Le Président: Le rapport est déposé également.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Papineau.

M. MacMillan: Oui, M. le Président. Je demande le consentement de cette Assemblée nationale pour déposer deux pétitions, s'il vous plaît.

Le Président: Il y a consentement, M. le député de Papineau.


Permettre la mobilité de la main-d'oeuvre dans le domaine de la construction entre le Québec et l'Ontario

M. MacMillan: Merci, M. le Président. La première, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec par 892 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de l'Outaouais.

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Afin de conserver notre emploi et notre dignité, le gouvernement du Québec se doit d'éliminer toutes les barrières empêchant la libre circulation des travailleurs de la construction du Québec et de l'Ontario. Nous demandons que le gouvernement nous écoute une fois pour toutes.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député, vos pétitions sont déposés. Est-ce que vous avez...

M. MacMillan: J'en ai une deuxième, M. le Président.

Le Président: C'est parce que je pensais que vous aviez fait les deux en même temps. Alors, allez-y.

M. MacMillan: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec par 619 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de l'Outaouais.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement de l'Ontario s'apprête à prendre des mesures pour obliger le gouvernement du Québec à enlever toutes les restrictions qui rendent l'accès difficile à l'industrie de la construction pour les travailleurs ontariens;

«Attendu que les travailleurs québécois travaillent sans aucune restriction dans la province de l'Ontario;

«Attendu que, si les négociations échouent, nous, travailleurs de la construction résidents de la province de Québec, serons forcés à déménager dans la province de l'Ontario;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, supportons la démarche des membres de l'ADAT pour obtenir une zone limitrophe, zone tampon, pour la région de l'Outaouais. Cette zone permettrait de garantir les emplois de ces travailleurs.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition, M. le Président.

Le Président: Cette seconde pétition est également déposée.

Puisqu'il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous allons aborder la période des questions et des réponses, mais auparavant je voudrais vous indiquer qu'après celle-ci sera tenu un vote reporté sur la motion de M. le leader adjoint du gouvernement et ministre de la Solidarité sociale, au nom du vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances, proposant l'adoption du projet de loi n° 13, Loi n° 4 sur les crédits 1998-1999.


Questions et réponses orales

À ce moment-ci, je vais céder la parole au chef de l'opposition officielle, en principale.


Mesures fiscales à l'égard des jeunes familles et des aînés


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au premier ministre, et ça fait suite au budget du gouvernement actuel, le budget de l'exode. Le premier ministre sait que, dans son budget, il a choisi de mettre en place un programme encourageant les jeunes du Québec à quitter le Québec pour aller vivre ailleurs. Les députés de l'Outaouais savent maintenant qu'il y a un programme pour encourager les travailleurs de la construction du Québec à aller vivre en Ontario.

Ma question s'adresse au premier ministre et touche cette fois les familles et son programme pour encourager les familles du Québec, justement, à voir si leur avenir ne serait pas mieux servi ailleurs et, entre autres, sur ce qu'on a décrit comme étant une nouvelle passe fiscale, c'est-à-dire le revenu familial net, qui fait en sorte que le gouvernement du Québec augmente substantiellement les impôts des jeunes familles, entre autres, du Québec cette année: Est-ce que le premier ministre peut nous expliquer pourquoi il cherche maintenant à nuire aux jeunes familles du Québec? Pour quelles raisons il les vise en particulier? Après s'être attaqué aux jeunes, après s'être attaqué maintenant aux travailleurs de la construction du Québec, de l'Outaouais, pourquoi il vise cette fois les jeunes familles, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, il y a au moins deux questions dans ce qui a été formulé par le chef de l'opposition. Je voudrais très rapidement disposer de ce qui concerne le contentieux que nous avons présentement avec l'Ontario dans le domaine des travailleurs de la construction.

Nous avons signé avec l'Ontario en 1996 une entente sur la mobilité du personnel dans le domaine de la construction. Cette entente est en application depuis. Il se trouve que depuis quelques mois certains aspects de l'entente trouvent une application plus difficile, parce qu'il semble que tous les aspects de l'activité de construction n'ont pas été couverts par l'entente intervenue. Depuis lors, donc, il y a des négociations intenses entre des représentants du Québec et de l'Ontario afin de trouver des terrains d'entente sur ces questions qui ne sont pas encore résolues. Il est entendu, M. le Président, que c'est une démarche difficile, puisque nous avons des systèmes qui sont à peu près totalement asymétriques dans le domaine de la qualification de la construction et qu'il y a là un casse-tête que nous sommes en train de résoudre et que nous résoudrons.

Quant au revenu personnel disponible, M. le Président, je voudrais faire remarquer au chef de l'opposition que les dernières statistiques nous indiquent que le revenu personnel a augmenté de 5 000 000 000 $ en tout, en 1998, ce qui est la plus forte augmentation depuis 1990, que les revenus de rémunération ont augmenté de 2 900 000 000 $ – avec le 3 000 000 000 $ de plus de l'année passée, c'est encore la plus forte augmentation depuis 1990 – et qu'en conséquence, si on compare les revenus per capita et non pas les revenus personnels, on verra que le Québec, de même que le reste du Canada, a augmenté son revenu personnel per capita de 6 % depuis 1994.

(14 h 10)

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Je constate, M. le Président, que le premier ministre ne comprend pas la question, sinon il aurait sans doute voulu répondre au sujet du revenu familial net.

Permettez-moi d'aborder un autre groupe qui est visé par ce gouvernement, celui qui a bâti le Québec, c'est-à-dire les aînés, les personnes âgées. Et je ne sais pas si son leader est en train de lui expliquer la question ou...

Des voix: Ah!

M. Charest: M. le Président, le premier ministre doit savoir, cette fois-ci, que les aînés en particulier font l'objet d'un traitement spécial par son gouvernement, que son ministre des Finances dans son budget, l'an dernier et cette année, a annoncé une mesure qui entre en fonction cette année et qui fait en sorte qu'on tient compte du revenu des deux personnes, et que les aînés sont touchés particulièrement, de telle sorte qu'ils avaient chacun droit à une déduction jusqu'à l'équivalent de 26 000 $, c'est maintenant un revenu net de 52 000 $, et que ça a un impact en particulier sur les femmes du Québec.

Et, pour aller dans le détail, M. le Président, son gouvernement va chercher 80 000 000 $ de plus dans les poches des aînés cette année. Pourquoi viser, en plus, les aînés après avoir visé les jeunes familles, les jeunes et tous les autres travailleurs du Québec? Pourquoi s'acharner maintenant sur les aînés, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement ne s'acharne pas sur les aînés. Le gouvernement vise une politique d'équité, et, quand il s'agit d'un couple et d'un ménage, il est normal qu'on considère l'ensemble du revenu du ménage quand il s'agit d'établir le régime fiscal. Je ne vois pas en quoi le chef de l'opposition puisse manifester autant d'indignation.

Le Président: En principale, M. le député de Papineau.


Mobilité de la main-d'oeuvre dans le domaine de la construction entre le Québec et l'Ontario


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Déjà deux semaines qui sont passées depuis que nous avons demandé à la ministre de l'Emploi et du Travail des solutions au problème de la mobilité des travailleurs de l'Outaouais et d'Argenteuil qui travaillent en Ontario. Mme la ministre nous avait répondu alors qu'il y avait un comité qui serait formé d'intervenants du milieu, l'ACO, l'APCHQ, la Commission de la construction du Québec, sans la présence des travailleurs autonomes et sans la présence des députés de la région de l'Outaouais. Depuis ce temps, aucune rencontre de ce comité bidon.

Ma question à la ministre: À part ce comité bidon là qui n'a eu aucune réunion depuis deux semaines, comment la ministre entend-elle régler le problème des 6 000 travailleurs de l'Outaouais et d'Argenteuil?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, on a beaucoup fait ces dernières semaines et ces derniers mois du côté du Québec, et je dirais que, pour régler ce problème de la mobilité de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, il faudra s'assurer d'être deux partenaires pour négocier. Or, à ce moment-ci, l'Ontario ne bouge dans aucun des dossiers, alors que le Québec a fait passablement de compromis.

Deuxièmement, je rappellerais au député de Papineau qu'il faudrait distinguer les choses. Il y a bien sûr cette entente de mobilité de la main-d'oeuvre qui a été signée en 1996, mais il y a aussi un autre débat dans lequel le député de Papineau ne devrait pas nous entraîner, c'est-à-dire celui de mettre en péril le régime de qualification que nous nous sommes donné au fil des ans. Je ne crois pas, M. le Président, que les Québécoises et les Québécois apprécieraient qu'à partir de maintenant il n'y ait plus de qualification qui soit assurée, qu'on ne soit pas assuré que les travailleurs de la construction aient une compétence qui soit reconnue pour travailler dans nos maisons et dans les chantiers de construction.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: En additionnelle, M. le Président. La crainte du caucus de l'opposition officielle sur la déclaration de la ministre, quand elle dit qu'il ne faut pas mettre en péril le régime de qualification, c'est qu'il risque peut-être de se régler autrement, avec des travailleurs qui vont déménager en Ontario pour faire leur vie là à la place.

Moi, j'aimerais demander au premier ministre aujourd'hui, compte tenu de l'urgence, compte tenu du fait que depuis le mois de décembre le gouvernement de l'Ontario a dit clairement que le 1er avril, c'était la date butoir, qu'ils avaient l'intention de bouger, qu'ils l'ont dit dans leur discours du trône, en 1996, que ça fait 30 ans que ça existe comme contentieux malgré l'entente de 1996, malgré l'entente de 1993... M. le Président, comme sa ministre n'est pas capable de régler le problème, ne semble pas le comprendre, ne semble pas capable de faire avancer les intérêts du Québec, est-ce que le premier ministre va aujourd'hui communiquer avec son vis-à-vis ontarien pour lui demander de s'asseoir avec lui et régler ce problème-là au nom des 6 000 travailleurs de la construction du Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je pense que la ministre a affirmé avec beaucoup de justesse la nécessité de maintenir un modèle de qualification qui a fait ses preuves au Québec, le modèle des qualifications professionnelles dans le domaine de la construction. Nous voyons bien que, face à un autre modèle, qui est différent, il y a lieu de trouver des façons d'arrimer les régimes. Donc, nous y travaillons très positivement, en ce qui nous concerne. Nous commençons à comprendre mieux pourquoi le chef de l'opposition, durant la campagne électorale, a choisi le modèle ontarien.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Est-ce que le premier ministre va prendre ses responsabilités, au lieu de parler de modèle aux 6 000 familles de l'Outaouais qui dépendent d'un membre de leur famille pour gagner leur pain et leur beurre? Est-ce qu'il va prendre ses responsabilités et communiquer avec son vis-à-vis de l'Ontario, M. Harris, et s'asseoir avec lui pour régler le problème, ou est-ce qu'il va juste nous parler de modèle jusqu'à la file d'attente au bureau de chômage ou à la frontière de l'Ontario, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, c'est justement avec notre ami commun, M. Harris, que je me suis assis pour signer cette entente qui existe, une entente qui compte parmi les plus élaborées du genre que le Québec ait jamais signées et qui doit maintenant subir le feu de l'application. Alors, c'est tout à fait normal que des ententes aussi complexes, lorsqu'il s'agit de régler des contentieux qui ont des enjeux considérables, doivent traverser quelques difficultés. Ce que j'apprécierais, c'est d'avoir l'appui de l'opposition dans cette démarche où le Québec défend les intérêts du Québec. Je compte sur M. Harris pour défendre les intérêts de l'Ontario, c'est tout à fait légitime.

Et il m'est arrivé très souvent de communiquer avec M. Harris dans les dossiers qui le nécessitaient, et je n'exclus pas l'opportunité, comme j'en ai saisi mes collaborateurs ce midi, de communiquer avec lui au sujet de ce dossier encore.

Le Président: M. le député de Marquette, en principale.


Non-renouvellement du mandat de juges au Tribunal administratif du Québec


M. François Ouimet

M. Ouimet: En principale, M. le Président. La réforme de la justice administrative visait essentiellement deux choses. Premièrement, diminuer les délais d'attente au niveau des instances judiciaires et, deuxièmement, empêcher les nominations partisanes des juges administratifs. Quant aux délais, plus de 65 000 personnes sont présentement en attente d'une décision devant les instances administratives du Québec, dont plus de 17 000 personnes au seul Tribunal administratif du Québec. Quant aux nominations partisanes, les mandats de Mme Louise Cobetto, M. Pierre Mercier et M. J.-Vincent Fleury n'ont pas été renouvelés, même si tous les trois ont été jugés compétents par le comité prévu à cette fin. La raison alléguée du non-renouvellement: l'absence des besoins du Tribunal. En d'autres termes, le gouvernement leur dit: On n'a pas assez d'ouvrage pour vous autres.

La question que je pose à la ministre: Pourquoi la ministre, qui a elle-même reconnu les besoins criants du Tribunal, n'a-t-elle pas renouvelé les mandats de ces trois personnes jugées compétentes par un comité?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, je suis heureuse que le député de Marquette m'ait posé cette question, parce qu'il faut rappeler que la réforme du Tribunal administratif est une réforme qui avait été demandée depuis de nombreuses années. Ce n'est qu'avec le gouvernement du Parti québécois qu'on a eu le courage de mettre cette réforme en place.

Des voix: Bravo!

Mme Goupil: En ce qui a trait aux nominations des personnes pouvant siéger au Tribunal administratif, pour s'assurer, effectivement, de toute la transparence dont un tribunal a besoin pour faire un travail avec toute l'indépendance judiciaire qui est nécessaire, il y a un comité qui a été formé avec des gens compétents, trois personnes qui, effectivement, ont l'expertise du Tribunal et sont à même de faire les recommandations en regard des nominations ou de la reconduction de leur mandat. Récemment, il y a eu effectivement des recommandations qui ont été faites par le comité, et nous avons suivi intégralement les recommandations telles qu'elles avaient été soumises par ce comité.

Je pense que tous les Québécois et les Québécoises peuvent être rassurés quant à la compétence et à la transparence avec lesquelles notre gouvernement agit. Il y a des comités qui sont en place, ce sont des gens compétents, et nous n'avons aucune intention de modifier cette façon de faire qui correspond à des nominations qui sont faites à partir de recommandations d'un comité, faites tout à fait correctement et selon les règles qui imposent l'indépendance de nos tribunaux.

(14 h 20)

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, qui est responsable de l'administration de la justice, la ministre ou le comité? Il y a 65 000 personnes qui sont en attente, dont 17 000 personnes au seul TAQ. Pourquoi la ministre a-t-elle décidé, avec le Conseil exécutif, de ne pas renouveler les trois personnes en question, qui ont été jugées compétentes, alors que les besoins sont criants au Tribunal administratif?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, est-ce que je dois comprendre de mon vis-à-vis le député de Marquette qu'il m'invite à passer outre aux recommandations d'un comité qui a été fait selon des normes que nous nous sommes données? Est-ce que c'est une invitation à vouloir aller à l'encontre des recommandations qui nous ont été faites dans le cadre de la loi? J'ose espérer que ce n'est pas cela, parce que ce n'est pas de cette façon que nous allons fonctionner.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, je vais répéter la question: Pourquoi la ministre – pour que la ministre comprenne bien – n'a-t-elle pas renouvelé les mandats des trois personnes jugées compétentes, alors qu'elle reconnaît elle-même qu'il y a des besoins criants? Et le motif qu'on donne aux trois juges compétents, c'est que le Tribunal n'a pas besoin de leurs services. Pourquoi n'a-t-elle pas renouvelé le mandat de ces trois personnes-là?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, en regard de la nomination des membres du Tribunal administratif, il y a un comité qui a été en place, dont trois personnes y siègent, et ces personnes ont fait des recommandations à la ministre de la Justice, et nous avons suivi intégralement les recommandations de ce comité.

Le Président: M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, comment la ministre peut-elle expliquer qu'à peine deux semaines après le non-renouvellement exprimé à ces trois juges administratifs un autre juge administratif a été affecté à leur section, tel qu'en fait foi la note interne du Tribunal administratif datée du 1er mars 1999?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, lorsque le comité a fait ces recommandations, nous les avons suivies intégralement, et en aucun cas la compétence des gens n'avait été mise en doute. Le fait était qu'ils n'avaient pas besoin d'être renouvelés, considérant les besoins du Tribunal administratif.

Et, quant aux membres qui y siègent, ils ont été affectés, pour un grand nombre de personnes, aux endroits où les besoins étaient le plus criants, et nous avons, avec mon collègue, pris des arrangements nécessaires pour que l'on puisse justement s'assurer qu'il y ait de moins en moins de délais, parce que, M. le Président, tant et aussi longtemps qu'il y aura des délais, nous avons du travail à faire.

Cependant, il ne faut pas oublier qu'avec la réforme du Tribunal administratif il y a quand même plus de 13 000 dossiers qui ont été traités, comparativement à ce qui existait auparavant.

Le Président: M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, comment la ministre peut-elle expliquer qu'elle n'a pas réaffecté les trois juges compétents dans une autre section, alors que son prédécesseur, le député de Laval-des-Rapides, disait ceci, dans le journal du 6 avril 1998: Si le volume vient à baisser dans une section, on pourra les réaffecter dans un autre domaine?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, le président du Tribunal administratif est la personne qui réaffecte le personnel qui est engagé pour répondre justement aux besoins particuliers. Dans le cas des renouvellements, le tribunal où les demandes sont en plus grand nombre, il y a déjà des affectations qui ont été faites justement pour s'assurer que l'on puisse entendre le plus grand nombre possible de personnes au tribunal, principalement celui des affaires sociales.

Quant aux affectations, le président, qui connaît bien son Tribunal, est à même d'affecter le personnel disponible et compétent pour entendre les causes, et il est évident que des efforts seront faits justement pour s'assurer que les délais puissent être plus courts, pour entendre le maximum de personnes.

Le Président: M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, la ministre peut-elle cesser de se cacher derrière le comité et le président? Comment la ministre peut-elle expliquer que ces mêmes trois juges n'ont pas été affectés dans le domaine des affaires sociales, alors qu'une autre note interne du même Tribunal administratif, datée du 12 mars dernier, démontre la réaffectation de cinq autres juges aux affaires sociales?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, le député de Marquette devrait savoir que le Tribunal est autonome et qu'il assume sa gestion.

M. le Président, en ce qui a trait aux renouvellements en matière d'expropriation, les besoins n'étaient pas justifiés. C'est dans les autres domaines, et les membres du Tribunal administratif ont été affectés aux endroits où on en avait besoin. Au niveau de l'expropriation, ça ne justifiait pas de renouveler des personnes à cette Chambre qui est celle de l'expropriation.

Le Président: M. le député de Marquette.


Évaluation des ressources requises au Tribunal administratif du Québec en matière d'expropriation


M. François Ouimet

M. Ouimet: Question principale, M. le Président. Oui, le Tribunal est autonome, mais, oui, elle est responsable de l'administration de la justice, et c'est le Conseil exécutif qui a pris les décisions dans ce dossier. La Conférence des juges administratifs du Québec a envoyé une lettre extrêmement sévère au gouvernement. Je me permets d'en citer de longs extraits: «Il est de commune renommée que le besoin de membres additionnels au Tribunal est criant. Les besoins du Tribunal ne constituent aucunement la véritable cause de non-renouvellement des membres concernés mais constituent un prétexte commode pour éliminer des membres dont on ne veut plus, ce qui mine profondément la crédibilité du processus de renouvellement, que l'arbitraire demeure la règle, bien qu'occulté, ce qui rend la réforme de la justice administrative complètement illusoire.»

Cinq autres lettres d'autres tribunaux administratifs allaient extrêmement dans le même sens. Que répond la ministre de la Justice devant cette Assemblée nationale?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, je rappellerai que les besoins au niveau du tribunal de l'expropriation ne justifiaient pas de maintenir en poste des gens dont les besoins ne le justifiaient pas.

Ceci étant dit, j'aimerais bien que le député de l'opposition m'informe de la provenance des documents d'un tribunal interne auxquels il fait référence.

Le Président: M. le député.


M. François Ouimet

Document déposé

M. Ouimet: Je vais les déposer avec plaisir. M. le Président, question additionnelle.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Que répond la ministre de la Justice à son prédécesseur, député de Laval-des-Rapides, alors que lui, quand il était ministre de la Justice, avait dit ceci pour rassurer les membres du Barreau, et je cite: «Toutefois, un gouvernement va payer un prix très sévère s'il décide de ne pas renouveler le mandat de quelqu'un qui a été jugé apte à poursuivre ses fonctions»? Que répond-elle à son prédécesseur?

(14 h 30)

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, j'aimerais rappeler au député de Marquette qu'effectivement il s'agit d'une réforme importante et nous nous sommes donné des règles de conduite pour faire en sorte que la nomination des gens soit faite conformément aux besoins du Tribunal. Nous avons également pris soin qu'il y ait un comité qui soit à même de faire les recommandations et qui soit interpellé par les règles de droit qui s'appliquent.

Par rapport aux nominations, les nominations auxquelles on a fait référence tout à l'heure étaient à l'effet de ne pas renouveler ces mandats, considérant que, en matière d'expropriation, la demande et les causes qui étaient entendues ne justifiaient pas qu'on renouvelle ces mandats. Alors, nous avons suivi intégralement les recommandations de ce comité. C'est un comité sur lequel siègent des gens compétents, et nous avons suivi intégralement les recommandations, parce que, avec les causes qui étaient entendues en matière d'expropriation, il n'y avait rien qui justifiait que l'on renouvelle les personnes qui siégeaient en matière d'expropriation.

Le Président: M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, pourquoi la ministre, elle qui participait il n'y a pas si longtemps à une étude où elle dévoilait que les femmes, dans la région de Québec, étaient sous-représentées aux instances décisionnelles, alors qu'il y a une femme, Mme Louise Cobetto, qui vient de la région de Québec, qui siège dans une instance décisionnelle, qui a des compétences comme conciliatrice, alors que la ministre est à la recherche de nouveaux conciliateurs, et qui a reçu une fin de non-recevoir... La question s'adresse à la ministre de la Condition féminine.

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, je suis heureuse que le député de Marquette m'ait posé cette question, parce que je pense que son gouvernement n'a aucune leçon à présenter à mon gouvernement concernant les nominations féminines. Ceci étant dit, bien que je suis fière d'avoir à la fois la Condition féminine et le ministère de la Justice, nous avons suivi intégralement la recommandation d'un comité qui disait que les gens étaient compétents mais que rien ne justifiait de renouveler pour le tribunal d'expropriation.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Bourassa, en principale.


Conflit entre les hôpitaux de Chicoutimi et de Jonquière


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, la semaine dernière, la ministre de la Santé et des Services sociaux a induit les membres de cette Chambre en erreur dans le conflit qui sévit...

Des voix: ...

Le Président: Mme la députée... Parce qu'on peut induire, volontairement ou involontairement, en erreur des membres d'une assemblée, je vous invite néanmoins à la prudence. Je vous rappelle les dispositions du paragraphe 6° de l'article 35 de notre règlement, qui dit qu'il est interdit à un député qui a la parole d'imputer des motifs indignes à un autre collègue ou de refuser d'accepter sa parole. Je sais que vous n'aviez pas encore outrepassé le sens, mais je vous invite à la prudence parce que c'est le genre de propos où on peut facilement glisser. Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, la semaine dernière, la ministre de la Santé et des Services sociaux a induit les membres de cette Chambre en erreur dans le conflit qui sévit toujours à l'hôpital de Jonquière: il n'y a jamais eu de conseil des médecins, dentistes et pharmaciens unifié. L'entente du premier ministre n'a jamais été signée, le processus de recrutement n'a jamais vu le jour et jamais il n'y a eu de progrès, comme le dit la ministre, puisque la population de Jonquière demande au premier ministre de décréter l'état d'urgence pour avoir accès à des soins de qualité.

Le premier ministre réalise-t-il que le seul progrès constaté, c'est que la population de Jonquière a fait un appel d'urgence à l'armée canadienne pour avoir des médecins pour venir assurer des soins à une population qui en a besoin?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Mme Marois: Merci, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Effectivement, la semaine dernière, j'ai indiqué aux membres de cette Assemblée, en toute bonne foi, que je croyais que le conseil des médecins, dentistes et pharmaciens était unifié, puisque dans les faits, suite à la formation du conseil d'administration unifié, l'autorisation en avait été donnée et je croyais que le geste avait été posé. Cependant, après vérification, j'ai constaté qu'effectivement on devait d'abord et avant tout confirmer la personne qui allait être en poste à la direction générale et qu'ensuite on procéderait à l'unification du conseil des médecins, dentistes et pharmaciens de ces deux hôpitaux, dont le conseil d'administration sera unifié.

M. le Président, j'inviterais notre collègue à demeurer la plus sereine possible devant la situation qui existe là-bas, puisque je crois que les administrateurs qui sont là sont des gens responsables. C'est vrai qu'il y a des groupes qui ont manifesté certaines demandes, je ne le nie pas. Cependant, les personnes en responsabilité m'assurent qu'elles ont proposé certaines avenues pour faire en sorte que des services de qualité soient disponibles, et je compte toujours sur ces personnes responsables, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, outre les belles promesses faites le temps d'un vote et outre le fait que l'armée canadienne semble faire partie de la solution, qu'est-ce que le premier ministre attend pour régler ce conflit?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, M. le Président...

Le Président: Bien. Mme la ministre, s'il vous plaît.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: On me dit, d'ailleurs, M. le Président, que ce serait une personne bien connue de notre collègue la députée de Bourassa, puisqu'il s'agirait de la candidate défaite dans le comté qui a fait cette demande auprès du conseil municipal. Elle a le droit, cependant, elle a le droit de le faire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Bien. Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je suis en contact régulier – je suis persuadée que nos collègues le comprendront – tant avec mon premier ministre qu'avec les gens responsables dans la région. On me dit que le directeur général ou que la personne devant occuper le poste à la direction générale sera présente d'ici quelques jours à peine. Cela, évidemment, aidera aussi à la suite des choses. Et, par ailleurs, encore une fois je le dis, le président du conseil d'administration a proposé différentes possibilités aux médecins, tant à ceux de Jonquière qu'à ceux de Chicoutimi. Il semble qu'un certain groupe soit plutôt en désaccord, et si c'était le cas, M. le Président, le président du conseil d'administration de même que son directeur ont des pouvoirs pour nommer des médecins, pour appeler de nouveaux médecins.

Le Président: En principale, Mme la députée de Bonaventure.


Contenu du documentaire L'Erreur boréale


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. La diffusion de L'Erreur boréale dimanche dernier sur les ondes de Télé-Québec, film produit par Richard Desjardins, révélait des faits troublants en ce qui a trait à la gestion de la forêt publique et ses effets et conséquences sur l'environnement et la faune. Le ministre des Ressources naturelles, responsable de la gestion de nos forêts, peut-il nous dire pendant combien de temps encore son gouvernement se fera le complice des coupes à blanc, pratique qui dévaste et hypothèque la gestion de notre patrimoine forestier?

(14 h 40)

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, je voudrais simplement rappeler à la députée de Bonaventure, qui vient tout juste d'arriver parmi nous, que le régime forestier dont elle parle a été mis en vigueur en 1987, lors du premier mandat du gouvernement de M. Bourassa, avec l'appui d'ailleurs unanime de cette Assemblée, hein? Je pense que c'est important, sur le plan historique, qu'elle ait ça en mémoire. Le gouvernement du Parti libéral a mis en place ce régime forestier qui est dénoncé par Richard Desjardins, à tort, d'ailleurs. À tort. Je dois dire «à tort», parce que...

Évidemment, une période de questions ne se prête pas beaucoup pour commenter ce film, mais je dirais cependant que, à la base, la donnée essentielle de ce film n'est pas, quant à moi, fondée, c'est-à-dire que la forêt québécoise est saccagée, mise à sac, transformée en désert. Je pense que nous possédons suffisamment de données et de contrôles pour affirmer que la forêt québécoise soit se régénère naturellement, soit qu'on le fait par la voie du reboisement, de la plantation d'arbres. On en plante quelque 100 000 000 par année, et le taux de survie est très élevé. Donc, évidemment, quand on montre des parterres de coupe, ce n'est pas un tableau de Monet. Si on veut voir un tableau de Monet, on va au Musée des beaux-arts. Ce n'est pas très beau à voir, mais il faut voir aussi une forêt en régénération. Une forêt reboisée, ça aussi, ça fait partie de la réalité.

Le Président: En principale?

M. Benoit: Oui, M. le Président.

Le Président: M. le député d'Orford.


Mesures de protection de la forêt publique


M. Robert Benoit

M. Benoit: M. le Président, au ministre de l'Environnement: Est-ce que ce ministre de l'Environnement réalise qu'il a une responsabilité morale comme protecteur des biens publics du Québec? Il s'est écrasé dans le dossier de Hertel–des Cantons, il s'est écrasé dans le dossier des Éboulements et maintenant il s'écrase dans le dossier des forêts. Avant que le dernier arbre du Québec s'écrase, est-ce que ce ministre de l'Environnement va faire l'ouvrage pour lequel il a été nommé, élu, pour protéger le bien des Québécois?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, la forêt est une ressource naturelle renouvelable. Nous devons nous assurer de préparer les conditions les plus adéquates pour qu'après avoir fait les prélèvements dont nous avons besoin et avec lesquels tout le monde est d'accord, donc, on ait les meilleures conditions pour assurer ce renouvellement-là. Il faut donc que les moyens et les techniques utilisés soient les meilleurs pour assurer ce renouvellement.

Je pense que dans le film on voit des choses qui sont préoccupantes, mais aussi on doit savoir qu'effectivement il y a actuellement une révision du régime forestier, dans laquelle le ministre de l'Environnement est consulté et sur laquelle j'aurai à me prononcer de façon plus complète. Mais, oui, M. le Président, nous devons faire des prélèvements dans la forêt, nous devons avoir le souci de bien le faire. Nous avons probablement à améliorer les techniques que nous utilisons. Nous sommes en train de réviser ces méthodes-là, et je pense que nous obtiendrons des résultats satisfaisants. Mais, comme disait mon collègue, ce n'est pas parce que l'on voit, le lendemain d'une coupe forestière, une terre qui ne comporte plus d'arbres que définitivement on a renoncé à s'assurer du renouvellement de la ressource.

Le Président: En principale, M. le député de Saint-Laurent.


Conflit de travail au Centre de détention de Rivière-des-Prairies


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Oui. M. le Président, il y a 12 jours, confronté à un problème de débrayage au Centre de détention de Rivière-des-Prairies, un débrayage de quelques heures seulement, le ministre de la Sécurité publique réagissait de façon draconienne et dramatique pour les intéressés en sévissant à leur endroit par l'imposition de la peine capitale: le congédiement pur et simple. Puis, contre toute attente et aussitôt fait, plutôt que d'assumer ses responsabilités et de rester ici pour gérer les effets de sa décision, il quittait pour se refroidir les esprits en ski dans l'Ouest canadien. M. le Président, le ministre...

Des voix: ...

Le Président: Votre question, M. le député.

M. Dupuis: M. le Président, le ministre peut-il nous assurer que, cette semaine, il ne se sauvera pas, qu'il va rester ici et qu'il va rencontrer les agents des services correctionnels...

Le Président: J'ai rappelé à votre collègue tantôt le sens autant que la lettre des dispositions des articles de notre règlement. L'article 35: On ne peut pas imputer des motifs indignes à un député. Et de prétendre qu'un député a fui ses responsabilités à l'Assemblée, c'est, à ce moment-ci, prêter des motifs indignes. Je vous demande de poser votre question selon les règles.

M. Dupuis: M. le Président, le ministre peut-il nous assurer qu'il va mettre ses priorités au bon endroit, finalement, cette semaine, qu'il va rester ici et qu'il va consentir à rencontrer le Syndicat des agents de la paix qui le lui demande depuis plusieurs jours?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Serge Ménard

M. Ménard: M. le Président, le ministre de la Sécurité publique est appelé régulièrement à répondre à des urgences, des urgences qui arrivent en pleines vacances parfois. Alors, il cancelle des vacances. Et, comme tout autre, il a des promesses faites à sa famille, qu'il doit rembourser à un moment donné. J'avais promis à ma famille, après avoir passé une semaine à Kangiqsualujjuaq, que nous nous reprendrions au printemps. Donc, c'était organisé depuis longtemps. Et je me suis assuré avant de partir qu'il n'y avait aucun danger au fait que je parte.

J'ai toujours été prêt à rencontrer les agents de la paix. D'ailleurs, quand il y a eu un saccage à Bordeaux, je suis allé à Bordeaux et j'ai convoqué les représentants syndicaux pour les rencontrer. Mais ce qui a été fait à Rivière-des-Prairies lors de ce débrayage est absolument inadmissible. Supposément pour montrer à la population que de laisser 27 agents seulement le dimanche matin... On laisse la prison avec cinq agents, alors que les prisonniers n'ont pas reçu leur repas, certains n'ont pas reçu leurs médicaments et certains sont appelés – et c'était imaginable – à déclencher des petits incendies pour déclencher le système automatique d'ouverture des portes. On aurait voulu provoquer une émeute qu'on n'aurait pas agi autrement.

Je me suis assuré, M. le Président, qu'avant que le ministère ne congédie les 32 personnes chacune d'entre elles soit rencontrée individuellement pour qu'elle puisse s'expliquer. Et c'est à la lumière des explications qui ont été données, ou pas données dans la plupart des cas, que la décision a été prise. Maintenant, je suis convaincu que le problème n'en était pas un de sécurité.

Le Président: Je m'excuse. Je vous ai demandé de conclure, M. le ministre. Alors, M. le député.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Oui, en additionnelle, M. le Président. Le ministre conviendra-t-il qu'il y a maintenant lieu de rétablir le dialogue avec le Syndicat des agents de la paix et de les rencontrer?

Le Président: M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: J'accorde énormément d'importance au dialogue avec les représentants syndicaux de tous les employés du ministère de la Sécurité publique. Ils ont été élus par leurs collègues, leurs confrères, leurs consoeurs, et c'est pourquoi je leur accorde beaucoup d'importance. Mais ce qui a été fait à Rivière-des-Prairies était contraire à une entente signée avec les représentants syndicaux. C'est un mouvement purement local, quelque chose qui était absolument irresponsable. Je suis convaincu que, quand les autres réalisent la gravité des gestes posés, ils sont d'accord que ces choses étaient inadmissibles.

Maintenant, je suis prêt à discuter des questions de fond. Je le sais, il y a des questions qui me préoccupent énormément sur la façon dont on traite les jeunes dans notre système. Je voudrais apporter des améliorations. Nous sommes en négociations. C'est un problème, je peux leur dire, qui me préoccupe énormément, la façon dont on traite les nouveaux arrivés. Mais, pour ça, il faudrait que les anciens aussi acceptent de travailler avec nous pour améliorer leur sort.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis, en principale.


Négociations avec les éducatrices et les éducateurs en garderie


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, ayant reçu des mandats de grève depuis quelques semaines, les employés des garderies tomberont en grève jeudi. La CSN et la CEQ ont réclamé depuis déjà un mois et demi une nouvelle table de négociation pour les employés des garderies. Est-ce que le président du Conseil du trésor est prêt à leur accorder, oui ou non?

(14 h 50)

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: M. le Président, je tiens à redire que nous avons des services de garde de qualité extraordinaire au Québec, et nous le devons en partie aux travailleuses et aux travailleurs du Québec dans les garderies. On doit reconnaître l'importance de leur travail, et c'est pourquoi c'est sans la moindre hésitation que j'ai clairement indiqué que j'étais en faveur d'une amélioration significative... du redressement salarial.

Par contre, je travaille actuellement, comme je le disais la dernière fois, à élaborer une formule de redressement qui permettrait aux conseils d'administration de s'assurer d'une marge de manoeuvre nécessaire.

Le Président: En principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Disponibilité des places à 5 $ dans les garderies


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Dans son discours inaugural, le premier ministre s'est engagé à l'égard des places à 5 $ dans les garderies, et je le cite: «De faire en sorte que les enfants de tous les âges soient admissibles au programme dès septembre 2000.»

Or, une étude faite par le Bureau de la statistique du Québec nous apprend ce matin – et c'est confirmé par le ministère de la Famille et de l'Enfance – que ça prendrait 100 000 places additionnelles pour satisfaire à la demande. Cette année, le gouvernement devrait créer 18 000 places. J'aide la ministre dans ses calculs mathématiques, M. le Président.

Devant l'impossibilité de combler ce déficit de 82 000 places dans une seule année, est-ce que la ministre de la Famille et de l'Enfance – la ministre déléguée – n'est pas en train de démentir les paroles du premier ministre, ou est-ce qu'on attend simplement que ces enfants-là soient rendus à l'âge primaire, dans les écoles pour éviter des listes d'attente déjà qu'on connaît dans le système?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: M. le Président, j'ai effectivement demandé au ministère de réaliser une enquête sur les besoins des parents en services de garde au Québec. Cette étude confirme que la politique familiale est un vif succès au Québec et que les garderies à 5 $ sont très appréciées.

Durant les dernières années, nous avions en moyenne 2 500 places que nous offrions actuellement dans les services de garde. En 1998-1999, nous avons développé près de 18 000 places au Québec et, l'année prochaine, encore près de 18 000 places. Alors, je suis bien contente d'entendre M. le député dire qu'il est très content de cette politique familiale du Québec, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: Alors, cela met fin à la période des questions et des réponses orales pour aujourd'hui.


Votes reportés


Projet de loi n° 13


Présentation, adoption du principe et adoption

Comme je l'ai indiqué au départ, nous avons maintenant un vote reporté. Alors, nous allons procéder au vote sur la motion de M. le leader adjoint du gouvernement et ministre de la Solidarité sociale au nom du vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

La motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée soit saisie du projet de loi n° 13, Loi n° 4 sur les crédits 1998-1999;

«Que le principe de ce projet de loi soit adopté;

«Que le projet de loi soit adopté.»

Alors, que les députés en faveur de cette motion se lèvent, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Baril (Arthabaska), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), Mme Papineau (Prévost), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Signori (Blainville), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Désilets (Maskinongé), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:66

Contre:42

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion est adoptée. En conséquence, le projet de loi n° 13, Loi n° 4 sur les crédits 1998-1999, est donc adopté.

Nous allons maintenant passer à l'étape des motions sans préavis. M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je sollicite le consentement de l'Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale réitère aux Terre-Neuviennes et Terre-Neuviens l'amitié du Québec à l'occasion du 50e anniversaire de leur entrée dans la Confédération canadienne, suivant la décision démocratique majoritaire qu'ils ont prise par référendum en 1949 de rompre les liens avec la Grande-Bretagne et d'accéder au statut de province du Canada.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion...

M. Brassard: Consentement pour qu'il y ait également un intervenant de chaque côté, M. le Président.

Le Président: Mais je voudrais d'abord qu'on consente à débattre. Est-ce que vous consentez au débat, M. le chef de l'opposition officielle?

M. Charest: M. le Président, j'ai pris connaissance de la lecture de la motion. Je constate à regret qu'elle est teintée de partisanerie et que, pour cette question-là...

Des voix: Ah!

Le Président: Très bien. Alors, il n'y a pas consentement pour débattre de cette motion. Il n'y a donc pas lieu de fixer des règles de débat.

Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, s'il n'y a pas d'autres motions sans préavis, nous allons aller aux avis touchant les travaux des commissions. Je vous avise que la commission des affaires sociales va se réunir en séance de travail demain, le mercredi 31 mars 1999, à compter de 10 heures, à la salle 3.31 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'informer les membres sur les activités et les ressources de la commission et de procéder à l'organisation de ses travaux.

Je vous avise également que la commission de la culture se réunira en séance de travail demain, le mercredi 31 mars 1999, de 10 heures à 12 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette rencontre est d'organiser les travaux de la commission.

S'il n'y a pas de renseignements particuliers sur les travaux de l'Assemblée, nous allons aller aux affaires du jour.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Simplement, la présidence s'était engagée à remettre aux parlementaires un inventaire des questions posées par la députation depuis un certain nombre d'années. Simplement une information: Quand les parlementaires seront-ils saisis d'une telle documentation?

Le Président: Normalement, dès cet après-midi, parce que la présidence a été saisie ce midi finalement des statistiques que nous avions demandées, et nous avons convenu que dorénavant, chaque semaine, les chefs, les leaders, les whips, les présidents de caucus et le député indépendant seraient saisis des statistiques évolutives à cet égard. D'accord? M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Sur un autre sujet, M. le Président. En arrivant à l'Assemblée aujourd'hui, j'avais sur mon bureau, comme les autres collègues, un avis de convocation: Veuillez prendre note que le ministre des Ressources naturelles, M. Jacques Brassard, livrera ses commentaires sur le film L'Erreur boréale quelques minutes après le caucus. Quelle est la politique de distribution des communiqués de presse sur les...

Des voix: ...

M. Paradis: ...non, non, simplement, si c'est ouvert à tout le monde, M. le Président, que tout le monde s'en prévale. Quelle est la politique présidentielle quant à la distribution de ces communiqués de presse aux membres de l'Assemblée, à l'Assemblée?

Le Président: Écoutez, en ce qui me concerne, j'apprends que le document a été distribué à l'ensemble des collègues. Alors, je vais voir qu'est-ce qui en est exactement, et, s'il y a lieu d'émettre une directive particulière, cela sera fait. Mais je ne sais pas si le leader du gouvernement, puisque c'est une invitation que...

M. Brassard: M. le Président, je l'apprends moi aussi. Alors, j'attends votre directive.

Le Président: Alors, le secrétaire général de l'Assemblée m'indique que lui également l'apprend au moment où la question est présentée à l'Assemblée. Nous allons donc prendre la question en délibéré.

Alors, nous allons procéder maintenant aux affaires du jour. M. le député de Rivière-du-Loup, toujours aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée?

(15 heures)

M. Dumont: Oui, certainement. Je veux revenir sur la question du leader de l'opposition officielle quant à la distribution des questions. Je comprends que vous compilerez des statistiques qui sont basées sur des législatures qui découlaient d'élections dont les résultats sont sans précédent par rapport à la dernière élection, alors je comprends bien que vous tiendrez compte de ces statistiques-là dans un contexte nouveau et qui ne devrait aucunement influencer les décisions que vous avez à prendre en matière de gestion de la période des questions, dans le sens d'un suivi démocratique de l'élection du 30 novembre dernier.

Le Président: En fait, ce que j'ai indiqué la semaine dernière, c'est que, lors d'une rencontre avec les leaders, nous avons convenu... S'il vous plaît, les collègues députés qui doivent travailler à l'extérieur de l'enceinte du salon bleu, je les prierais de le faire en silence et rapidement.

Pour répondre, donc, à la question du député de Rivière-du-Loup, ce que j'ai indiqué la semaine dernière, c'est qu'à la suite d'une rencontre avec les leaders il avait été convenu que la présidence gardait une latitude. Donc, on a convenu avec les leaders qu'il n'était pas question d'encarcaner la présidence dans des règles très strictes, ce qui me convient parfaitement. Et les statistiques qui vont vous être fournies ne sont pas nécessairement uniquement en fonction des législatures passées ou des sessions antérieures, mais en fonction aussi des semaines que nous venons de vivre. Et je pense que c'est au fil du temps que nous allons évaluer et ajuster les choses en conséquence.

M. Dumont: Merci, M. le Président. Je suis heureux d'entendre ces propos-là, et je vous demanderais aussi de vous inspirer des propos récents du chef de l'opposition officielle qui demandait que, dans l'organisation de nos travaux, etc., on tienne compte davantage de la proportionnalité. C'est des propos qu'il tenait dans ma région, à Pohénégamook, alors j'espère qu'ils vous inspireront, M. le Président.

Le Président: M. le leader.

M. Paradis: Dans ce temps-là, M. le Président, si vous en tenez compte, à la rigueur, vous inverserez les positions des groupes parlementaires.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Bien, dans ce cas-là, il faudrait savoir si on tient compte du nombre du voix ou du nombre d'électeurs, parce que dans certains cas ça ne coïncide pas toujours.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, je comprends que, de part et d'autre, on vient de donner des paramètres additionnels à la présidence. On verra finalement à faire en sorte que tout ça se fasse de façon correcte et équitable.

Donc, aux affaires du jour maintenant, conformément à l'ordre adopté ce matin, l'Assemblée va poursuivre l'étude des crédits provisoires pour l'année financière 1999-2000 déposés par le ministre d'État à l'Économie et aux Finances le 25 mars dernier et renvoyés en commission plénière en vue de l'adoption d'un quart de ces crédits. Alors, à ce moment-ci – je sais que j'ai la mauvaise habitude de dire «à ce moment ici» – nous allons suspendre nos travaux durant quelques instants afin que l'Assemblée puisse se constituer en commission plénière. Alors, les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 15 h 5)

(Reprise à 15 h 16)


Affaires du jour


Commission plénière


Reprise du débat sur l'étude des crédits provisoires 1999-2000

M. Pinard (président de la commission plénière): Nous débutons les affaires du jour. Alors, conformément à l'ordre adopté ce matin, l'Assemblée va poursuivre l'étude des crédits provisoires pour l'année financière 1999-2000 déposés par le ministre d'État à l'Économie et aux Finances le 25 mars 1999 et renvoyés en commission plénière en vue de l'adoption d'un quart de ces crédits.


Environnement

Donc, la commission plénière poursuit ses travaux sur l'étude de ces crédits provisoires 1999-2000. Au cours des 60 prochaines minutes, nous allons procéder à un échange entre M. le ministre de l'Environnement et M. le député d'Orford. Au cours de cet échange, une période maximale de cinq minutes sera accordée à un représentant de chaque groupe parlementaire pour des remarques préliminaires et une période de cinq minutes sera réservée au député indépendant. Tel que convenu également entre les parties, chacun des ministre et du critique de l'opposition aura un temps de parole de deux minutes pour clore le débat.

J'accorde immédiatement la parole à M. le ministre de l'Environnement pour ses remarques préliminaires de cinq minutes. Alors, M. le ministre.


Remarques préliminaires


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue et en même temps féliciter mon collègue le député d'Orford qui a été élu et nommé critique en matière d'environnement.

Par ailleurs, je voudrais présenter les personnes qui m'accompagnent: à ma gauche, j'ai M. Tardif, aux services financiers; à ma droite, M. Normand Carrier, qui agit comme sous-ministre en titre par intérim, mais qui est le sous-ministre aux opérations; également M. Denys Jean, sous-ministre à l'Environnement; M. Bernard Dubois, qui travaille également à la direction de M. Jean; il y a ma directrice de cabinet, Mme Brigitte Pelletier; ma directrice adjointe, Josée Tremblay; et M. Arsenault, qui est sous-ministre à la Faune – on se rappellera qu'il y a quand même un sous-ministre ici; et également M. Bob Van Oyen, qui est des Affaires institutionnelles.

Alors, M. le Président, le livre des crédits fait état des crédits du ministère pour l'année 1999-2000, également des résultats de la planification stratégique 1998-1999 ainsi que des orientations pour les années 1999-2000. Les crédits révèlent notamment les décisions budgétaires du gouvernement concernant la réhabilitation des terrains contaminés et la gestion des matières résiduelles, qui sont deux des mesures à caractère environnemental annoncées dans le cadre du discours du budget, et je voudrais me limiter peut-être à aborder ces deux questions.

Il y a deux ans, le gouvernement a annoncé qu'il y aurait un programme de décontamination des sols applicable aux villes de Montréal et de Québec. Un budget de 30 000 000 $ était prévu pour la ville de Montréal et un budget de 10 000 000 $ pour la ville de Québec, ce montant devant être appuyé par un montant équivalent des deux municipalités, ce qui faisait un budget de 80 000 000 $ pour la décontamination des sols.

Je fais remarquer que la décontamination des sols est quelque chose d'extrêmement important, puisque ces terrains sont des terrains qui se retrouvent généralement au coeur des municipalités, qu'elles soient de Québec ou de Montréal, mais également de l'ensemble du Québec, particulièrement les villes qui ont connu un essor industriel au début du siècle. On pense entre autres à la région de la Mauricie, d'où provient le président, et entre autres à la ville de Shawinigan, d'où il est également, ces villes ayant connu un essor industriel très marqué au début du siècle, comme Trois-Rivières et aussi d'autres villes situées dans d'autres régions: Sherbrooke, Chicoutimi, Sorel, bref, un ensemble de petites et moyennes municipalités situées à travers le Québec qui ont vu l'implantation de l'industrie massive et qui ont connu, malheureusement, vers la fin de années soixante un déclin de cette industrie généralement accompagné d'un abandon des terrains sur lesquels s'étaient pratiquées ces activités industrielles.

(15 h 20)

Or, malheureusement, on a découvert – et c'est nouveau aussi, la notion de l'environnement – après leur départ que ces terrains étaient hautement contaminés et qu'ils ne pouvaient être réutilisés sans qu'on les décontamine. Par contre, cette décontamination-là représente des sommes faramineuses dans certains cas, et c'est pourquoi il fallait penser à aider les municipalités à pouvoir décontaminer ces sols, puisque... Je dis «municipalités» parce que les municipalités se retrouvent avec ces terrains souvent ayant été abandonnés par leurs propriétaires pour ne pas avoir à payer les taxes. C'était plus intéressant pour eux de perdre la valeur du terrain que de vouloir le conserver et payer les taxes et décontaminer.

Donc, ce plan devait être fait. Il a été fait pour les villes de Montréal et de Québec. Les autres municipalités du Québec demandaient que l'on puisse faire la même chose chez elles, et des demandes ont été faites en ce sens. Alors, ça a été une très grande nouvelle, à mon point de vue, que le ministre des Finances annonce dans le budget qu'une somme de 100 000 000 $ serait investie pour la décontamination des terrains à l'extérieur de Québec et de Montréal. C'est donc dire que beaucoup de municipalités pourront en bénéficier, et ce, de façon très rapide, puisque la première année du programme Québec-Montréal a été consacrée à l'élaboration des normes, des règles, de la procédure, des mécanismes qu'il fallait établir. Maintenant, c'est chose faite. On sait exactement de quelle manière procéder et on peut dire que ça pourra procéder rapidement. Au moment où on se parle, il y a 12 000 000 $ de tels travaux qui sont en cours dans les villes de Québec et de Montréal, et j'espère que les autres municipalités pourront faire pareil prochainement.

Le deuxième sujet dont je voulais parler était celui de la gestion des matières résiduelles. On se rappellera qu'au mois de septembre 1998, après une démarche que je devrais qualifier de longue...

Le Président (M. Pinard): Je m'excuse, M. le ministre, vos remarques préliminaires de cinq minutes sont déjà expirées.

M. Bégin: Je compléterai tout à l'heure, M. le Président. On aura le temps de reprendre.

Le Président (M. Pinard): Alors, sûrement que vous aurez l'occasion de revenir sur le sujet. Alors, M. le député d'Orford et critique officiel de l'opposition en la matière. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Moi aussi, je veux d'abord féliciter le ministre pour son élection et avoir été nommé, au Conseil des ministres, ministre de l'Environnement. Je salue aussi le personnel, autant politique que les autorités du ministère, qui l'accompagne.

Je veux, d'entrée de jeu, dire au ministre – c'est notre premier débat que nous faisons – que l'opposition officielle aura toujours une approche très positive quand nous parlerons d'environnement, et à chaque fois que nous serons capables, de ce côté-ci, d'aider le ministre à aider l'environnement, il peut être assuré de notre aide. D'autre part, quand il ne prendra pas ses responsabilités, comme nous croyons, de l'opposition, qu'il devrait prendre à titre de responsable de l'environnement, ça sera notre rôle, ça sera notre job de le déplorer et de le dire haut et fort, et de le dire avec les groupes d'environnement. C'est pour ça que nous avons été élus et c'est pour ça que nous devrons le dire.

M. le Président, en relisant une partie de la biographie du premier ministre du Québec – et c'est l'entrée de jeu, je pense – le premier ministre dit dans sa biographie, à l'époque où il était ministre de l'Environnement: «Tout ce qui pouvait ressembler à un projet de société se heurtait à l'obsession du déficit.» C'est M. Bouchard qui dit ça dans sa biographie. Et un peu plus tard, il dit, à la page 284: «Les ministres qui ont compris le fonctionnement de cette république de comptables se contentent le plus souvent possible de tenir la boutique.» Eh bien, M. le Président, je pense que c'est ça exactement, c'est le premier ministre qui le dit: «Se contentent de tenir la boutique.»

D'abord, coupure des budgets. On va y revenir tantôt, les budgets ont été coupés. Coupure du personnel. J'ai des chiffres ici, c'est effarant, les coupures de personnel. Le rôle moral du ministre, je lui en ai parlé à la période de questions, ils ont levé le moratoire sur l'eau alors que les autres provinces sont après faire exactement le contraire. Alors que le fédéral nous invite à faire le contraire, ici – on va y revenir tantôt, j'espère – combien de demandes on a en ce moment pour forer dans nos nappes phréatiques?

Hertel–des Cantons. Nous, notre position a été claire depuis le début dans ce dossier-là. Dans le milieu du verglas, M. Johnson est sorti avec l'aide du porte-parole en environnement et il a dit: Ce que nous demandons, c'est que les gens puissent s'exprimer, sur une voie rapide, bien sûr, et même, aidons à financer ces groupes-là et, après ça, vous irez de l'avant avec l'étude du BAPE. Ça prendra un an plus tard, 350 000 000 $ plus tard, deux jugements, trois décrets pour revenir à ce que, nous, on a toujours dit au début, à l'époque du verglas.

La côte des Éboulements. Ça, ça ne fait que commencer, et on va en parler pas mal. Voilà que les grands mouvements internationaux en environnement sont après se mettre le nez là-dedans, cette histoire-là.

Dimanche soir, on a eu le plaisir de voir ce film: L'Erreur boréale . On attend les explications. On n'en a pas eu à la période de questions aujourd'hui. Ce qu'on a pu voir, c'est un désastre, c'est le bien de l'ensemble des Québécois qui est dilapidé d'une façon irresponsable. Et tout ce que le ministre a daigné nous répondre tantôt, c'est qu'ils font des prélèvements. On s'attendrait à plus que ça.

La scission de la Faune et de l'Environnement. Alors, on avait souscrit à ce regroupement, on avait félicité le gouvernement, à l'époque, d'avoir mêlé les grandes gens de l'environnement. Je pense aux gens du Devoir , les journalistes là-bas, à l'époque, avaient dit: C'est dans la bonne direction, ça. Bien, là, on doit vous dire: On ne sait pas trop pour qui ils l'ont fait. Et je relisais encore cet article: Un partage hétéroclite, une décision déplorable . Et ça, c'est les mêmes gens qui, il y a quelques années, avaient félicité le ministre d'avoir regroupé ces missions gouvernementales, et on ne peut que le déplorer, M. le Président.

Les groupes d'environnement – et ça, ce n'est pas l'opposition officielle – ont donné leur cote à ce gouvernement dans les dernières semaines. Alors, Le Devoir disait: Environnement, E pour échec. Et La Presse – c'est toujours les mêmes regroupements – disait: Un autre zéro au gouvernement. Alors, ce n'est pas exactement très fort. Les gens qui regardent ça de plus près, les alliés du ministre, normal, les alliés du ministre qui lui disent: Cote E pour échec; un autre zéro pour le gouvernement. Ses propres employés, M. le Président, ce n'est pas l'opposition, ses propres employés qui émettaient un communiqué pas plus tard que vendredi, et là il y en a une série...

Le Président (M. Pinard): Je m'excuse, M. le député d'Orford, de vous couper en plein milieu de votre phrase, mais le temps pour vos remarques préliminaires est maintenant expiré.

M. Benoit: ...très bien.

Le Président (M. Pinard): Alors, immédiatement, je vous invite à débuter les travaux sur les budgets.


Discussion générale

M. Benoit: Oui. Alors, peut-être la première question au ministre. M. le ministre, nous voyons une baisse constante du personnel dans votre ministère. Le poids relatif du personnel en 1993-1994, donc avant l'arrivée de la Faune, représentait 6,2 % de l'ensemble du personnel de l'État québécois. En 1997-1998, nous en sommes rendus à 5,2 %, et ça, c'était avant, bien sûr, que la Faune nous quitte. Alors, toutes proportions gardées, je comprends que tous les ministères ont eu des baisses, mais, vous, votre baisse, elle a été beaucoup plus importante: 1 % dans le cas du personnel, c'est énorme.

Alors, avec les nouvelles baisses que vous aurez dans la prochaine année, est-ce que vous pouvez me dire combien de personnes on aura au ministère de l'Environnement, en excluant la Faune?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bégin: Alors, je n'ai pas le chiffre précis des fonctionnaires qu'il y aura. Cependant, je peux dire que, suite à la décision du premier ministre, j'ai rencontré mon collègue Guy Chevrette afin de discuter de la suite des choses, de la division du ministère de l'Environnement et de la Faune, pour s'assurer que le départ des gens de la Faune se fasse le plus harmonieusement possible. Et je dois vous dire que nous avons fonctionné très harmonieusement dans les faits, puisque déjà les ententes sont conclues, les personnes ont travaillé à établir qui devait rester et qui devait partir. Cependant, je n'ai pas une réponse spécifique au nombre d'employés. Dans quelques minutes, peut-être serai-je en mesure de le faire.

Mais ce que je sais, c'est que nous avons effectivement, depuis quatre ans, fait des efforts considérables pour réduire les dépenses, que ce soit au ministère de l'Environnement ou ailleurs, et vous savez pourquoi, vous connaissez bien la réponse, on l'a déjà donnée à plusieurs reprises: on avait un déficit de 6 000 000 000 $ quand nous sommes arrivés, et nous avons pris l'engagement de réduire celui-ci à zéro. Et nous avons pendant quatre ans travaillé très fort à y arriver, et on peut dire qu'on est extrêmement fiers de nous, puisque, au moment où on se parle, on a atteint le déficit zéro. C'est quelque chose que nous espérions atteindre l'an prochain.

C'est donc dire que pendant ce temps, oui, des décisions difficiles ont été prises, que ce soit pour la réduction de certaines dépenses, le contrôle des dépenses, que ce soit aussi pour certains départs, et dans d'autres cas ça a été des départs qu'on appelle «des départs assistés», où un nombre de personnes ont quitté. Or, dans l'année qui vient, 1999-2000, il n'y aura aucune réduction de personnel au ministère. On me souligne ici que le grand total des personnes à temps plein... Elles sont au nombre de 1 448 ETC, et je devrais dire 1 448,85. Alors, c'est le nombre de personnes qu'il y aura au ministère.

Deuxièmement, il y a une augmentation des crédits au ministère de l'Environnement pour l'an 1999-2000, et on retrouve ces budgets dans le livre des crédits, où on voit qu'il y a entre autres des sommes de – pour les matières résiduelles – 3 000 000 $, le Programme de réhabilitation des terrains contaminés, dont j'ai parlé tantôt, 1 600 000 $, et les audiences sur la gestion de l'eau, de 1 600 000 $.

(15 h 30)

M. Benoit: M. le ministre, vous me dites qu'il y aura, au ministère de l'Environnement, 1 448 personnes. Combien quitteront pour la Faune?

M. Bégin: Un instant. Ça ne sera pas long.

(Consultation)

M. Bégin: Il y aurait 900...

(Consultation)

M. Bégin: Oui, 1 810, pardon, personnes à l'Environnement et 1 078 à la Faune. Je m'excuse pour le chiffre de tout à l'heure, là, on m'avait montré ce document-là.

M. Benoit: Donc, le chiffre de 1 448 n'est pas valable; le chiffre que vous nous avez donné plus tôt.

M. Bégin: Effectivement, on m'avait montré ce chiffre-là, mais ce n'est pas le bon.

M. Benoit: En ce moment, vous auriez 2 888. C'est exact?

M. Bégin: C'est ça.

M. Benoit: Et, de ça, va quitter...

M. Bégin: 1 078.

M. Benoit: ...1 078.

M. Bégin: Oui.

M. Benoit: Parfait. À quel moment ces gens-là vont quitter?

M. Bégin: Bon. Alors, écoutez, il n'y a pas de réponse totale, globale pour l'ensemble des choses. D'abord, on a fait des ententes pour que dans certains cas, pendant un certain temps, on puisse conserver les mêmes ressources utiles pour les deux ministères. Dans d'autres cas, il y aura des départs. Mais est-ce que, là, on a un calendrier spécifique?

Une voix: ...

M. Bégin: Il faut dire également que la nouvelle structure qui va être en place n'a pas encore été adoptée. Alors, tant et aussi longtemps que ces mesures n'auront pas été prises, évidemment, il ne peut pas y avoir de transfert de personnes sous la nouvelle autorité. Donc, actuellement, les choses continuent de la même manière qu'elles ont fonctionné jusqu'à présent, mais, dès que les lois nécessaires auront été adoptées, là les transferts pourront commencer à se faire selon la capacité de, comment je dirais, gestion du nouvel organisme.

M. Benoit: Mais, quand vous me dites «nouvelle structure»... Ma compréhension était à savoir que la faune, les parcs – les piscicultures, on y reviendra – devaient être transférés dans la SEPAQ. Est-ce que c'est exact?

M. Bégin: Oui, mais, avant qu'ils le soient, encore faut-il que tous les actes aient été pris. Mais M. Carrier, qui est le sous-ministre en titre et qui est le ministre responsable des opérations, a procédé au travail de division entre les deux. Peut-être pourrait-il compléter les éléments de réponse auxquels vous posez...

M. Benoit: Si vous permettez, M. le ministre, s'il pouvait nous donner quels sont les aspects du ministère qui vont être transférés. Les piscicultures, à titre d'exemple.

M. Bégin: O.K. M. Normand Carrier.

M. Carrier (Normand): Normand Carrier, sous-ministre par intérim.

Le Président (M. Pinard): Pour les fins d'enregistrement, M. Normand Carrier.

M. Carrier (Normand): Ce qui sera transféré, c'est tout ce qui était, tant au niveau des opérations que du central, dans le secteur Faune et parcs. Il y aura une séparation qui se fera rapidement dans le secteur des parcs, pour lequel secteur une annonce gouvernementale a été faite à l'effet que les activités, les opérations des parcs étaient confiées, à compter du 1er avril, à la SEPAQ. Alors, à cet égard-là, comme ça ne nécessite pas de projet de loi, il y a eu un contrat d'autorisation entre le ministre Guy Chevrette et la SEPAQ pour que le transfert des activités se fasse rapidement, et la date qui est prévue, c'est le 1er avril.

M. Benoit: Est-ce que le personnel va, à ce moment-là, transférer immédiatement?

M. Carrier (Normand): Les activités seront déjà sous la responsabilité de la SEPAQ le 1er avril. Le personnel sera avisé à compter du 1er avril, et, à ce moment-là, le personnel aura 30 jours pour réagir, pour savoir s'ils acceptent ce transfert-là. Ils pourront demander une extension du délai de 30 jours. Donc, ils ont 60 jours pour prendre leur décision d'accepter de transférer à la SEPAQ, et ils ont par la suite un droit de retour dans la fonction publique, en vertu de la loi de la fonction publique. Alors, ce qui se fera le plus rapidement, c'est au niveau de la SEPAQ.

Par ailleurs, concernant la faune, c'est-à-dire conservation de la faune et aménagement et exploitation de la faune, le ministre Chevrette devrait présenter à l'Assemblée nationale un projet de loi avant la fin de cette session-ci pour déterminer quelle sera la structure qui va recevoir ces activités-là. Alors, c'est prévu à la présente session, et le ministre Chevrette va déposer vraisemblablement son projet de loi dans les prochaines semaines ou les prochains mois.

Le Président (M. Pinard): M. le député?

M. Benoit: Oui. Pourriez-vous être plus spécifique? Les gens qui nous écoutent, quand on parle de faune, vous, bon technicien que vous êtes, vous comprenez exactement de quoi on parle, mais, pour les gens qui nous écoutent, on parle de quoi, là? On parle des...

M. Carrier (Normand): On parle de deux grands secteurs d'activité. On parle de la conservation de la faune. Alors, ça représente à peu près 450 agents de conservation de la faune, plus à peu près 90 qui sont non permanents, pour un budget autour de 25 000 000 $. Alors, tout le secteur de la conservation de la faune sera transféré. Et le secteur de l'aménagement et de l'exploitation de la faune, dit autrement, c'est la gestion des habitats fauniques. Ce sont les deux grands secteurs qui vont être transférés, de même que la définition des orientations dans le secteur des parcs, de la conservation de la faune et de l'aménagement et de l'exploitation de la faune.

M. Benoit: Parfait. Oui, je veux revenir au ministre. Le ministre nous disait: On a travaillé bien fort pour arriver au déficit zéro. Je le félicite. Il a travaillé plus fort que tous les autres, parce que le poids relatif de son personnel dans l'État québécois, encore une fois, au moment où on quittera, était de 6,2 % et, au moment où on se parle, est en bas de 5 %. Alors, il a travaillé plus fort que les autres ministres. Moi, comme environnementaliste, je ne le féliciterai pas d'avoir finalement baissé les bras, autant lui que ses prédécesseurs, pour que l'Environnement soit rendu au niveau où il est rendu au Québec. Et si ça continue, finalement... Et là on entend du sous-ministre qu'ils sont peut-être après privatiser. C'est ce que je crois lire. Il y a un bout qui s'en va à la SEPAQ, il y a un autre bout que le député de Joliette va nous annoncer éventuellement. Ce qu'on croit lire entre les lignes, c'est qu'il pourrait y avoir privatisation. Alors, je ne pense pas, en tout cas, que ce soit rien pour améliorer l'environnement au Québec, et vous comprendrez qu'on ne peut que déplorer ça.

Maintenant, on pourrait peut-être passer à d'autres sujets. M. le ministre...

Le Président (M. Pinard): Un instant, M. le député d'Orford. Est-ce que vous avez un commentaire à formuler là-dessus? M. le ministre.

M. Bégin: Merci, M. le Président. Juste un élément que je voudrais mettre. Dans les décisions qui ont été prises et qui ont eu pour effet de réduire le nombre des effectifs, je voudrais souligner qu'il y a eu, entre autres, des délégations de responsabilités qui ont été faites pour les réserves fauniques, le Jardin de Métis et le Jardin zoologique et l'Aquarium. Ça, ça représente 269 ETC. Ça ne veut pas dire qu'ils ont cessé de s'occuper de ça, mais ils ne sont plus dans les crédits du ministère. Alors, c'est un montant qui m'apparaît extrêmement important. Ça pondère sensiblement les pourcentages et les chiffres auxquels vous référez.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Benoit: Oui. Étant donné qu'on est tellement limité dans le temps – on a presque déjà la moitié de notre temps de fait – peut-être aller sur certains des grands enjeux environnementaux du Québec.

Le ministre de l'Environnement, qui a été vice-président du PQ à l'époque où on a écrit le programme Des idées pour mon pays , programme du Parti québécois en 1994, avait 27 pages sur l'environnement. Alors, je le félicite. Les environnementalistes du Québec, autant moi que les autres, on était heureux de voir que ce gouvernement se donnait des priorités, tout comme nous, d'ailleurs, les libéraux, en 1994.

On est un peu moins heureux quand, quelques années après, on regarde ce qu'il est advenu de ce programme-là. Et, pour son information – il n'est plus vice-président du PQ, mais pour son information – dans le dernier programme électoral – en 1994, ils avaient 27 pages, c'était vraiment important – aujourd'hui, dans le dernier programme, celui qui fait que le ministre a été élu il y a quelques mois, il y a deux pages exactement sur l'environnement. Alors, vous pouvez voir l'importance qu'on a donnée dans ce parti-là et qu'on y donne, toutes proportions gardées: deux pages.

(15 h 40)

Ceci dit, en 1994, M. le Président – j'aimerais que le ministre nous parle un peu de la situation des sites de déchets au Québec – il y avait un engagement, à la page 45 de leur programme, et je le lis parce qu'il est tellement simple à comprendre: «Le gouvernement du Québec verra à: restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public – c'était bien clair – pour éviter tout abus dans ce dossier névralgique de la gestion des déchets, par exemple une MRC, un regroupement de MRC, communauté urbaine...» Bon, là, il y en avait plein, mais on n'était pas contre les incinérateurs.

Mais revenons aux sites de déchets. Qu'est-ce qui s'est passé depuis 1994, M. le ministre? Comment ça se fait que ça a déraillé tellement chez vous? On est rendu qu'on émet des sites sans audience du BAPE, dans le cas de Joliette. Ce que je crois comprendre, c'est que ce n'est plus des sites publics, les sites de déchets, ça va être des compagnies américaines qui vont être propriétaires. Alors, j'aimerais ça que vous me parliez un peu de la très pénible situation des sites de déchets au Québec et de ceux pour qui vous avez failli émettre, finalement, des permis, si ce n'avait été des citoyens qui ont été très vigilants et qui ont essayé de vous arrêter, à Saint-Jean-de-Matha.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bégin: Je pense que le député d'Orford va comprendre que nous fonctionnons légèrement différemment de ce qu'ils font. Le parti a un programme et adopte un programme que vous avez – effectivement, il date de 1994 – entre les mains. Lorsqu'il y a une élection, ce n'est pas un programme que nous faisons, c'est une plateforme électorale. Et il est bien sûr que la plateforme électorale n'a pas pour objet de remplacer le programme, mais simplement de cibler parmi ce programme les actions que nous voulons mettre en évidence dans le cadre d'une élection. Alors, c'est bien sûr que, si l'on veut comparer l'un avec l'autre, on n'arrivera certainement pas, ni dans le domaine de l'environnement ni dans aucun autre programme, sauf dans un peut-être, c'est celui de l'article 1 où on a dans le programme et dans la campagne le même texte, le même objectif... Donc pour mettre de côté cette question-là.

Deuxièmement, les sites de matières résiduelles. On se rappellera qu'il y a eu le débat important qui a été tenu, entre 1994 et 1998, autour de la gestion des matières résiduelles. Et mon collègue Jacques Brassard, du temps qu'il était ministre de l'Environnement, a déclenché une enquête publique du BAPE, à laquelle 400 personnes ou organismes ont jugé à-propos de déposer des mémoires. C'est la plus vaste consultation publique qui ait jamais été faite dans une matière au Québec.

Or, cette consultation a abouti dans un rapport du BAPE extrêmement fouillé, qui reprenait l'ensemble de ce que les intervenants à travers le Québec, de quelque origine qu'ils soient, qu'ils soient des individus, des groupes environnementaux, des municipalités, des entreprises... bref, tous ceux qui avaient un intérêt à l'égard des matières résiduelles se sont prononcés.

Cependant, il restait un élément bien important qui n'a pas été abordé par le BAPE, c'était celui du financement de la gestion des matières résiduelles. Donc, un des volets, je dirais, le plus important de toute cette question-là n'avait pas été abordé. C'est ce que j'ai dû faire avec... Quand je suis arrivé au ministère, nous avions le rapport du BAPE. Certains de mes collègues avaient travaillé à préparer un plan de gestion, mais les travaux n'étaient pas terminés. C'est ce que j'ai eu le plaisir de faire pendant l'année dernière, avant le mois de septembre, ce qui m'a permis, le 15 septembre 1998, d'annoncer un plan de gestion des matières résiduelles. Et, dans ce plan, il est prévu, entre autres, pour revenir spécifiquement à l'aspect que vous soulevez à l'égard des sites d'enfouissement sanitaire, qu'ils devront, d'une part, être dotés pour l'avenir de membranes imperméables qui vont s'assurer que la nappe phréatique ne soit d'aucune manière contaminée et, d'autre part, il y aura des mesures requises pour le captage des gaz qui se dégagent de la décomposition des matières que l'on enfouit. En ce faisant, on s'assure que les gaz ne causent aucun problème sur le plan de la santé, mais aussi sur le plan de la sécurité, puisque ces gaz peuvent être extrêmement explosifs et causer des dommages importants.

Alors, nous avons donc pris les mesures qui s'imposent pour s'assurer que les sites d'enfouissement sanitaire soient bien gérés et soient construits de manière adéquate sur le plan santé et sur le plan sécurité. Alors, les sites d'enfouissement, dorénavant, vont devoir respecter ces règles, et bien sûr que nous devons tenir compte de ce qui existe déjà. Nous ne pouvons pas rétroagir au point de dire, par exemple, que les sites qui sont là devront être défaits, enlevés et transformés en des sites modernes, mais nous devons nous assurer que la suite des choses, elle va se faire correctement. Le plan de gestion des matières résiduelles, qui va être complété par l'adoption des lois pertinentes durant cette session de même que par les règlements adéquats pour mettre tout ça en vigueur, sera adopté durant le printemps 1999.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. M. le député.

M. Benoit: Si je résume la pensée du ministre, ce qu'il me dit, c'est: Oui, j'étais vice-président quand on a écrit le programme du Parti québécois en 1994, mais c'est un programme, on ne s'en tient pas à ce programme-là. Restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public, nous, on ne se sent pas liés d'aucune façon par ça.

Et là il semble dire que le débat du BAPE, ils n'ont pas été partie prenante avec ça. Le débat du BAPE, il a été lancé par vous, et vous en avez contrôlé tous les éléments, hein? Dans le document original du BAPE, M. le ministre, qui a été lancé quelques semaines après votre arrivée – non pas vous, mais vos prédécesseurs, parce que vous êtes le troisième ministre de l'Environnement en quatre ans – il était bien évident que les instructions que vous donniez au BAPE à l'époque, on n'était pas pour restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public, alors que bien du monde vous l'a demandé d'ailleurs pendant les consultations.

Je comprends que les présidents du PQ en environnement sont bien désolés de leur propre gouvernement. Il n'y a pas rien que nous autres, là, il n'y a pas rien que les groupes d'environnement, votre propre commission de l'environnement, chez vous, vous dit régulièrement, et l'a encore fait dans le cas de Hertel–des Cantons: Ce n'est pas un ministre de l'Environnement, ce n'est pas un gouvernement environnementaliste qu'on a. Mais enfin.

Alors, ce que vous me dites, c'est que votre nid est fait, cet engagement-là, il est flushé, c'est ce que je retiens, et les sites vont demeurer des sites privés, propriétés privées opérées par le privé. C'est ce que je retiens?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bégin: Nous avons, dans le cadre du plan de gestion des matières résiduelles, demandé aux MRC comme aux communautés urbaines d'élaborer un plan de gestion des matières résiduelles sur leur territoire. Une MRC pourra s'adjoindre deux, trois, quatre, cinq, 10 MRC. Encore une fois, je prends à témoin le président, dans sa région, il y a 13 MRC qui se sont entendues ensemble pour faire un plan de gestion recouvrant ce territoire de 13 MRC.

Par ailleurs, dans les communautés urbaines, les communautés urbaines devront élaborer des plans de gestion, et là, dans ce plan de gestion, elles devront évidemment prévoir, entre autres choses, de quelle manière. Ils vont certainement faire la collecte sélective. Est-ce qu'ils vont avoir sur leur territoire une ou des ressourceries? Est-ce qu'ils auront un site d'enfouissement sanitaire? Si oui, de quelle manière sera-t-il opéré? Avec un comité de surveillance de ce site? Et, à ce moment-là, on pourra avoir soit des sites propriétés privées, soit des sites qui appartiennent à des municipalités, et/ou encore à des MRC, et/ou encore à des régies intermunicipales de gestion des déchets, propriétés, évidemment, des corps publics qui le composent.

Donc, on aura un éventail d'hypothèses, mais, partout sur le territoire, les autorités publiques devront élaborer, pour les 20 prochaines années, un plan de gestion qui comprendra entre autres les sites d'enfouissement sanitaires, mais aussi les ressourceries et la collecte sélective.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Benoit: M. le ministre, essayons de comprendre, vous et moi, le calendrier de ces événements-là. La semaine dernière, je lisais encore de vos communiqués. Je suis probablement un des plus fervents lecteurs de tout ce que vous imprimez. Mon épouse me le reproche régulièrement le soir, quand je suis après lire vos distingués discours. D'abord, je lisais, la semaine dernière, à titre d'exemple, que, dans un cas, vous allez aller jusqu'à l'an 2003; dans un autre cas, l'an 2011. L'an 2011, ça commence à être loin, ça, là. Dans le cas où vous nous parlez des déchets – j'essaie de comprendre cet agenda que vous venez de nous dire – donc, est-ce que je crois comprendre que vous déposerez la réglementation avant la fin de cette session parlementaire? Est-ce que c'est ce que je crois comprendre?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bégin: La réponse est brève, c'est oui.

M. Benoit: Donc, nous connaîtrons, citoyens du Québec, depuis le début du BAPE, 1985, maintenant, la réglementation. La consultation du BAPE a commencée en 1986?

M. Bégin: En 1995.

M. Benoit: En 1995, excusez. Oui, 1995. La consultation a commencé en 1995. Donc, nous connaîtrons la réglementation avant la fin de la session.

Là vous me dites: Une fois que la réglementation va être connue, les MRC – il y en a un bon nombre au Québec, tout près de 100 – il y aura des plans de gestion. Quand on sait comment certaines MRC ont des difficultés à s'entendre... Mais prenons pour acquis que tout le monde s'entend bien, ça va bien, là, tout le monde il est beau, tout le monde il est fin, combien de temps on prévoit avant que les plans de gestion de tout ce beau monde là vous soient déposés, approuvés et les permis émis pour que la compagnie ABC – parce que ça ne sera plus des propriétés publiques, ça va être des propriétés privées – puisse commencer à recevoir des déchets, ou agrandir son site, ou partir une ressourcerie, etc.?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bégin: Alors, dès que les règlements seront en vigueur, les MRC auront un délai de deux ans pour la confection, l'élaboration et la publication de leur plan de gestion pour la MRC et/ou pour l'ensemble des MRC composant une entité. Alors, ils auront deux ans.

(15 h 50)

Et, je le répète, il n'est pas exact de prétendre qu'il y aura uniquement des sites appartenant aux MRC. Il y aura des sites qui appartiennent actuellement à des propriétaires privés qui pourront continuer à les opérer selon les autorisations qu'ils ont reçues dans le passé, mais, bien sûr, les MRC ou les communautés urbaines devront tenir compte de la présence de ces sites-là, mais aussi de ce qu'elles anticipent faire soit directement maintenant ou encore plus tard, lorsque le site d'enfouissement, par exemple, aura été comblé complètement. Alors, qu'est-ce qu'elles veulent faire pour le futur? Elles auront à préparer un plan de gestion sur une projection de 20 ans, parce que dans ces matières il faut justement regarder loin devant soi. Remplir un site, on trouve ça long, pour des individus, 15 ans ou 20 ans, mais, pour une collectivité, ça passe comme ça. Et il faut donc très tôt, maintenant, que les MRC et les communautés urbaines s'attaquent à ce problème-là et prévoient ce qui va arriver dans 20 ans. Pour une communauté, c'est absolument une durée de vie normale.

M. Benoit: Qu'est-ce qui arrive, M. le ministre, des sites qui sont à vous demander des permis, à ce point-ci? Alors, je dois comprendre que la réglementation sera déposée d'ici la fin de la session; après ça, les MRC ont deux ans. Qu'est-ce qui arrive des sites, les MRC qui n'ont pas de sites, les sites qui sont pleins, qui sont en voie de déposer chez vous des permis? Vous avez failli en approuver un. Le bon Dieu est bon, les environnementalistes ont levé, et puis vous avez reculé, et puis bon... Qu'est-ce que vous allez faire avec les autres, là, qui vous avaient même fait des demandes avant que ça commence, avant les audiences du BAPE et qui là vous reviennent? Comment vous allez gérer ça?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Benoit: Parce qu'il n'y a pas de moratoire là-dessus, là. Il y a des chapeaux mais pas de moratoire.

M. Bégin: J'aimerais savoir quel est le site dont vous parlez, monsieur.

M. Benoit: Pardon?

M. Bégin: J'aimerais connaître le site dont vous venez de parler.

M. Benoit: Je ne parle pas d'un site, je parle d'un certain nombre de sites où vous avez eu des demandes.

M. Bégin: Mais vous avez parlé d'un site où les gens se sont opposés puis ils n'ont pas été autorisés. J'aimerais savoir lequel.

M. Benoit: Bien, la région de Joliette.

M. Bégin: Ah! Joliette. Parlez-vous du contrat qui a été accordé?

M. Benoit: Oui.

M. Bégin: Ah, bien, voici. Là, je pense que vous me donnez une belle occasion d'expliquer quelque chose. Il y a dans la politique ou dans le plan de gestion des matières résiduelles une clause à l'effet que les MRC, dans l'élaboration de leur plans de gestion, pourront prévoir que, à l'avenir, des matières résiduelles provenant de l'extérieur du territoire sur lequel elles ont juridiction ne pourront plus être enfouies chez elles. Cependant, bien sûr que, si quelqu'un est propriétaire de son site actuellement et qu'il a une autorisation pour six ans et à raison de tant de tonnes par année, ils ne pourront pas empêcher ce propriétaire de recevoir, jusqu'à l'expiration du terme, la quantité de déchets requise pour compléter l'opération. Mais, pour l'avenir, elles vont pouvoir dire: Dorénavant, chez nous, il y aura un site qui sera autorisé: c'est ce site que nous installons nous-mêmes, par exemple, ou qu'on donne par appel d'offres à une entreprise. Peu importe le choix qu'elles feront, chacune sera libre de le faire, et on établira que, sur ce territoire-là, il y aura un site d'enfouissement. Ce site, à ce moment-là, sera autorisé dorénavant en tenant compte que le moratoire qui existe depuis – c'est 1995 – ...

Une voix: Oui.

M. Bégin: ...depuis 1995 va devoir cesser lorsque les règlements dont on parlait tout à l'heure auront tous été adoptés, pour s'assurer qu'il n'y ait pas de rupture ou de trou, si vous me permettez l'expression, sur le plan législatif et/ou réglementaire. À ce moment-là, les demandes qui seront en instance verront à devoir avoir une réponse, positive ou négative, selon les circonstances.

M. Benoit: Mais, dans la vraie vie – d'abord, vous n'avez pas répondu à ma question – qu'est-ce qui se passe avec ces compagnies qui demandent à ce point-ci à leur MRC et qui demandent au ministère, de fait, l'approbation de leurs plans? Est-ce que vous allez attendre que les plans de gestion des MRC soient mis en place pour les approuver, ou allez-vous les approuver, sujets à ce qu'une fois que la MRC et tout ça soient rétroactifs, ou bien vous allez permettre ce qui s'est passé ailleurs, c'est-à-dire que des municipalités ou des MRC signent des ententes de 20 ans et dans lesquelles on va se retrouver dans des... Moi, je ne suis pas avocat de formation, mais j'imagine à peu près dans quel capharnaüm juridique il y a du monde qui va se retrouver demain matin.

M. Bégin: Il faut savoir effectivement qu'il existe une disposition, depuis de très nombreuses années, dans la Loi des cités et villes et le Code municipal qui régit les municipalités, une clause à l'effet qu'on ne peut pas engager le crédit de la municipalité plus long qu'un certain nombre d'années sans obtenir l'autorisation du ministère des Affaires municipales. Alors, si vous avez un contrat de 20 ans, ce contrat-là ne peut pas être accordé et être accordé légalement tant et aussi longtemps que le ministre ou la ministre des Affaires municipales n'a pas donné son approbation.

Or, la ministre des Affaires municipales fait partie du même gouvernement que moi et est bien consciente que notre plan d'action prévoit qu'on ne doit pas accorder des contrats à long terme sans qu'on ait eu l'occasion de permettre à la population de se prononcer sur le plan de gestion que nous voulons élaborer. C'est donc dire que, si un projet comme celui que vous soulevez, qu'on envisage, 20 ans, normalement, le ministre devrait tenir compte du fait que, dans cette MRC, oui ou non, le plan de gestion a été adopté, et si la consultation publique a eu lieu, pour s'assurer que tout ça se fasse correctement. Cependant, si on est dans la période transitoire, comme aujourd'hui, le ministre détient le pouvoir, devant une demande d'octroi d'un contrat pour plus que cinq ans ou trois ans – là, je ne suis plus certain – de demander que la MRC ou la municipalité consulte la population, et de la manière dont elle le désigne. C'est donc dire qu'on est actuellement dans la possibilité de s'assurer qu'il n'y aura pas de contrat accordé pour des périodes très longues sans que la population n'ait été consultée et que ce contrat s'inscrira dans un plan global applicable à la MRC.

M. Benoit: Revenons à ces consultations-là, et après ça on passera à un autre sujet, M. le ministre. Pour ces consultations-là, dans cette nouvelle réglementation que vous déposerez d'ici la fin de la session, il y a deux écoles de pensée dans le milieu de l'environnement. La première, c'est que les gens disent: Il doit obligatoirement y avoir des audiences du BAPE à partir du moment où on va demander un agrandissement ou un nouveau site. De facto, il devrait y avoir des audiences publiques. Et là, ce que vous me dites, ce n'est pas tout à fait ça. Ce que vous me dites, c'est: La municipalité pourrait, si les citoyens le demandent, faire une consultation. C'est pas mal plus large, ça, là, et, moi, j'en ai vu, de ces consultations en plein été, dans les sous-sols d'église, qui avaient été annoncées le 24 juin. Dans ma propre MRC, la régie régionale a essayé de fermer un hôpital le 23 juin. Une chance que le député d'Orford était là! Ils ne l'ont pas fermé, l'hôpital, le 23 juin, je les ai vus venir de loin. C'est le genre de patente, là, où, si c'est statutaire, t'es obligé de faire une audience du BAPE. Les citoyens n'ont pas besoin de lire la dernière petite ligne dans le dernier journal de la place pour être sûrs qu'il va y en avoir, des audiences, alors que, si tu laisses ça un peu à tout le monde, là... On en a vu d'autres.

Est-ce que ce sera obligatoire, à partir du moment où, pour un site, on demande un agrandissement ou une ouverture, qu'il y ait des audiences publiques, que les citoyens le demandent ou pas?

M. Bégin: Suite au moratoire, il y a actuellement obligation d'avoir une consultation publique pour une demande de site d'enfouissement. Dans le futur, mon projet est de faire en sorte que les sites d'enfouissement sanitaire nouveaux soient sujets à des consultations du BAPE de sorte que ce que vous craignez ne se produise pas.

Faut faire la distinction entre deux choses: la consultation sur le plan de gestion des matières résiduelles et la consultation qui pourrait avoir lieu concernant un site d'enfouissement sanitaire. Alors, j'ai parlé de deux types de consultation. Ce n'est pas la même consultation.

M. Benoit: Là, vous venez de mettre un mot très nuancé pour les nouveaux sites. Ça, il n'y a aucun doute dans mon esprit qu'il va y avoir une consultation, les citoyens vont prendre les armes. Alors, ça, j'espère qu'il va y en avoir. Moi, je vous parle d'agrandissement de sites, où, là, le truc avec les chapeaux, puis l'expropriation du voisin, etc., vous pouvez avoir un... Parce que, finalement, à partir d'un très petit site, vous pourriez en faire un très, très, très grand, site, hein? On a vu ça, là. Alors, est-ce que, pour l'agrandissement de sites aussi, on devra obligatoirement avoir des audiences publiques?

M. Bégin: Oui.

M. Benoit: Ça sera dans la réglementation.

M. Bégin: Oui.

M. Benoit: Parfait. Vous avez, M. le ministre, lancé votre consultation sur l'eau. Je vous en félicite. Je pense que les panélistes sont de grande qualité. Prenez-le pendant que ça passe. Je pense que c'est un panel de grande réputation. Ce sont des philosophes, ce sont des gens qui connaissent le terrain, et j'ai toujours eu une grande admiration pour le BAPE, et vous allez m'entendre souvent vous le dire, autant au niveau des crédits que... que, dans la mesure où on est capable de me pas politiser cet organisme-là, je pense qu'il fait une très bonne ouvrage.

Ceci dit, j'étais heureux de voir – et je pense qu'on aurait dû le faire depuis longtemps – cette consultation sur l'eau. Mais, une fois ça dit, on est en avant d'autres. Alors, on ne doit pas être si pire que ça. Ils étaient d'ailleurs à Sherbrooke pas plus tard qu'aujourd'hui et hier. Ce qui me fatigue un peu dans tout ça, c'est que, au même moment où on va remplir les sous-sols d'église du Québec, où on va demander au bon peuple de venir se prononcer sur leurs états d'âme, on a levé le moratoire sur l'eau. Vous pourriez peut-être, dans un premier temps, nous répondre à cette question: Il y a combien de demandes de permis pour forer les nappes phréatiques au Québec? Et quelle est l'ampleur de ces demandes en ce moment?

M. Bégin: Je vais vous répondre volontiers, mais avant j'aurais une question à vous poser. Ce n'est pas pour renverser la proposition, mais c'est parce que vous venez de dire que vous étiez un grand fervent du BAPE. C'est à quelle page du programme de la campagne électorale de l'automne 1998 que le Parti libéral dit qu'il n'y aura plus d'audiences du BAPE, sauf pour les très, très, très grands projets? Parce que, là, vous avez un problème de votre bord, c'est qu'on envisage de supprimer même ce qui existe déjà en ce qui concerne le BAPE.

(16 heures)

M. Benoit: Je vous invite à relire notre programme avec beaucoup plus d'attention que vous ne l'avez fait. Moi, ce que je vous dis, j'ai lu vos 27 pages dans le programme et vos deux pages dans le dernier programme. Il y a deux pages. Vous n'avez pas dit grand-chose dans le dernier programme, il y avait deux pages. Vous en avez 27 ici, exactement. Moi, je vous ai lu textuellement. Si vous voulez relire ce passage-là de notre programme, ça me fera plaisir. Moi, je peux vous en citer 27 pages ici, de choses que vous avez dites, que vous n'avez pas tenues, et deux pages qu'on va vous suivre à l'oeil, ne vous en faites pas.

Alors, il y a combien, M. le ministre, de demandes en ce moment pour forer les nappes phréatiques du Québec, alors que le bon peuple, avec l'opposition... Et j'invite les députés du gouvernement à être présents dans ces salles-là et à aller entendre ce qui va se dire. Il y en a combien en ce moment, de demandes, là?

M. Bégin: Il y a actuellement six demandes qui sont déposées au ministère concernant ces captages-là. Ce n'est pas considérable. C'est un nombre qui est dans l'ordre de ceux qu'on avait régulièrement devant le ministère. Alors, ce n'est pas très nombreux.

M. Benoit: On parle de quelle quantité d'eau qu'on veut forer dans ces six sites?

M. Bégin: Je ne peux pas vous donner la réponse, mais on va vous la transmettre dans les prochains jours. Mais on n'a aucune indication que c'est des captages particulièrement massifs, par rapport à d'autres demandes que nous avons déjà reçues.

M. Benoit: Quel est le rationnel, M. le ministre – vous, homme de loi – au même moment où on invite les gens... Cette consultation-là, elle va durer un an. Elle ne va pas durer 23 ans, 22 ans, 21 ans, elle va durer un an, là, puis le BAPE est reconnu pour être efficace dans ses rapports; mettons un an et demi avant que vous ayez le rapport sur votre bureau. Il y en avait déjà un, moratoire. Quelle mouche vous a piqué, alors que les autres provinces canadiennes essaient de faire exactement le contraire? Je comprends qu'on est une société distincte, mais, dans le captage de l'eau, on ne doit pas être si distinct que ça. Quelle mouche vous a piqué, M. le ministre, d'enlever le moratoire?

La ministre fédérale – pour qui j'ai énormément d'admiration – vous a rappelé à l'ordre. Je comprends que vous n'aimez pas ça, vous faire rappeler à l'ordre par des gens qui sont, eux, environnementalistes et qui prennent les intérêts autant des Québécois que des Canadiens, et qui vous ont dit: Pourquoi vous ne garderiez pas ce moratoire en place? L'ensemble du pays, à ce que je sache, souscrit à l'idée que pendant qu'on consulte les gens, pendant qu'on regarde la problématique... Surtout que vous avez, je pense, là, des gens de grande qualité, au BAPE, vous n'avez pas à avoir peur, je pense que c'est des philosophes, des gens de bonne qualité. Moi, j'ai été bien surpris de cette décision-là, je le suis encore, et les environnementalistes l'ont tous été au Québec.

M. Bégin: Il y a plusieurs éléments dans votre question. Je vais d'abord commencer par dire que le BAPE doit remettre son rapport dans un an, c'est-à-dire pas au gré de sa volonté. Il a un délai d'un an maximum pour rendre son rapport.

Deuxièmement, je n'ai pas enlevé le moratoire. Le moratoire était expiré, en vertu de la loi que nous avions adoptée à l'Assemblée nationale, et se terminait le 31 décembre 1998. Donc, il n'y a eu aucune décision de ma part, et c'était inscrit dans la loi elle-même.

Troisièmement, la ministre fédérale peut vouloir donner des leçons, mais, je le soumets respectueusement, elle n'a pas compétence pour faire un moratoire. C'est pour ça, d'ailleurs, qu'elle a demandé aux provinces de prendre la décision, elles, les provinces, d'imposer ou pas un moratoire. Alors, la ministre n'avait pas juridiction pour le faire.

Par ailleurs, contrairement à ce que vous énonciez, trois autres provinces n'ont pas voulu imposer un moratoire: l'Alberta, le Manitoba et le Nouveau-Brunswick. Le Québec n'a pas imposé un nouveau moratoire, parce que nous avons une audience publique qui est en cours, nous avons également des moyens d'étudier validement les demandes qui pourraient être faites, et il m'apparaîtrait présomptueux de prendre une décision pendant que nous sommes en train de consulter l'ensemble de la population québécoise quant à la suite des choses. Alors, il m'apparaît qu'il n'est absolument pas requis d'imposer un moratoire comme vous le demandiez ou comme d'autres l'ont demandé.

M. Benoit: Là on joue sur les mots. On n'a pas levé le moratoire, mais on n'a pas reconduit la loi. Les gens qui nous écoutent, M. le ministre... J'espère que vous n'êtes pas après essayer de nous faire ce que vous avez fait sur Hertel–des-Cantons, là, nous lire un communiqué de presse et, quand on se met à lire ça, on s'aperçoit que ça dit exactement le contraire que le communiqué de presse, là, je veux dire... Le monde, ce qu'il a compris, que ça soit le journaliste du Devoir , que ce soient les groupes d'environnement, si vous avez levé le moratoire et que les gens, au moment où on se parle, peuvent faire des demandes pour forer les nappes phréatiques... Si c'est ça, le net-net, vous pouvez dire: Je n'ai pas reconduit. Vous avez raison.

En ce qui a trait au fédéral – et je ne veux pas faire un débat là-dessus – vous avez l'air de vous enligner pour un autre référendum... On pourra le faire allègrement à ce moment-là; ça me fera plaisir. J'en serai à mon quatrième référendum grâce à vous, messieurs dames. Alors, je parfais mes connaissances, de référendum en référendum, sur les relations provinciales-fédérales en environnement. Et je vous rappellerai que votre premier ministre a eu des attitudes pas mal plus pancanadiennes, à l'époque où il était là, que les ministres de l'Environnement en ce moment, qui vous ont suggéré seulement, qui ne vous ont pas obligé. Et je pense qu'il faut reconnaître que d'autres ministres de l'Environnement que vous connaissez très bien ont eu des attitudes pas mal plus cavalières que celle-là à l'égard du Québec. Réglementation.

M. Bégin: M. le Président, suite à l'intervention du député, peut-être que je pourrais d'abord apporter une correction. Je pense qu'il y a confusion concernant le mot «moratoire». On parle de deux moratoires. Ce n'est pas le même. Le moratoire que j'avais fait adopter par cette Assemblée l'an dernier, c'est un moratoire sur le captage des eaux souterraines, et il se terminait, comme je viens de le dire, en vertu de la loi, le 31 décembre 1998. Mme Stewart, ministre fédérale de l'Environnement, a demandé qu'il y ait un autre moratoire. Mais ce moratoire-là, ce n'était pas sur le captage des eaux souterraines, c'était sur le captage en général. Et l'expression utilisée, c'est le «prélèvement massif d'eau». Alors, c'est un autre moratoire qu'elle demandait d'imposer. Donc, il ne faudrait pas mêler les gens, là, en disant que c'est la même chose. C'est deux moratoires différents: un que le Québec avait déjà imposé mais qui était terminé; un autre que la ministre fédérale nous demande d'imposer et à qui on a dit que nous n'avions pas besoin de le faire. Et, là-dessus, on est en compagnie de l'Alberta, du Manitoba, du Nouveau-Brunswick.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. Benoit: Il y a des nuances, là. Je ne suis pas sûr que ça n'incluait pas aussi... Non? Bon, alors, avec l'équipe de techniciens que vous avez et ma technicienne, je vais prendre votre parole.

M. Bégin: Pour être précis, là, même la demande de moratoire excluait le captage d'eau. C'est très clair: c'est tout le captage massif d'eau, excluant le captage souterrain.

M. Benoit: Bon, enfin, mon point, c'est qu'on avait ici...

Le Président (M. Bissonnet): Bon, poursuivez.

M. Benoit: ...un moratoire. Il n'a pas été reconduit, et je le déplore. Pendant qu'on parle de toutes les formes d'eau, finalement, au Québec... Et là quelle est l'intention du ministre? C'est d'émettre ces permis pour les... vous m'avez dit: six ou sept demandes de permis? C'est d'émettre ces permis-là ou finalement d'attendre que les consultations soient finies? Parce qu'il y a bien des manières de faire les choses. Quelle est l'intention du ministre?

M. Bégin: Écoutez, en principe, une demande du type de celle dont on parle prend généralement deux ans avant d'être étudiée et autorisée. Alors, l'audience publique sur l'eau aura été complétée, nous aurons les recommandations du BAPE et nous serons en mesure de prendre des décisions appropriées en temps voulu sans qu'on ait de quelque manière compromis le futur.

M. Benoit: Dans le livre des crédits, à la page 116, vous avez là un certain nombre de règlements avec les dates. Alors, Règlement sur les déchets dangereux, novembre 1999. C'est le seul, d'ailleurs, avec le plan d'action Saint-Laurent et Vision 2000, en juin 1999. Tout le reste nous arrive en l'an 2000, M. le Président. Ce n'est pas un peu long, tout ça, là? Je veux dire, les citoyens du Québec sont prêts en ce moment à aller de l'avant. Les citoyens du Québec aimeraient que les affaires aillent un peu plus vite que ça. Il y a assez que vous ne prenez pas vos responsabilités dans plein d'affaires. Il n'y a pas moyen qu'on accélère la cadence dans tous ces règlements-là?

(16 h 10)

Vous étiez, la semaine dernière, à cette grande réunion à Montréal. Malheureusement, j'ai dû siéger ici tard jeudi soir pour faire les devoirs du gouvernement, je n'ai pas pu être là, dans Américana 1999. Mais ces gens-là, ils vous ont rappelé à l'ordre dans les communiqués de presse, vous disant: Aboutissez, dites-nous les règlements, qu'on aille de l'avant. Et ça, c'est un changement de cap important dans l'industrie. Pendant des années, l'industrie nous disait: Le moins possible, on ne veut pas en avoir, de règlements. Là, ils vous disent – je ne prendrai pas l'expression qu'ils prenaient: Donnez-nous les règlements, on va jouer ensuite avec ces règlements-là, on va aller de l'avant, on va s'adapter avec les règlements. Là, je vois qu'il y en a une série.

Et les gens d'affaires, les centaines de gens d'affaires qui étaient là, ils vous ont demandé d'accélérer la cadence. Y «a-tu» moyen qu'on accélère la cadence au ministère? Je comprends que vous coupez vos budgets. Je comprends que vous coupez votre personnel. Mais si vous voulez créer de l'emploi au Québec, c'est l'industrie probablement la plus créatrice. Vous avez bien ri des grappes de l'environnement de notre confrère Gérald Tremblay, là. Je me souviens encore du député de Joliette qui ridiculisait ça jour après jour. C'est probablement la grappe qui fonctionne le mieux en ce moment au Québec; c'est la grappe de l'environnement, puis c'est les libéraux qui l'ont fait, ça. Alors, c'est un secteur qui est créateur d'emplois, particulièrement dans l'Estrie, d'où je viens. Il faut voir toutes ces compagnies dynamiques.

Mais ce qu'elles vous demandent, c'est d'accélérer la cadence, M. le ministre, et vous ne semblez pas le faire. Je regarde les échéanciers, puis on sait que ces échéanciers-là, c'est reporté, puis c'est reporté. Alors, c'est quoi, les engagements que vous prenez avec les gens d'affaires puis l'environnement aussi? Parce que tout le monde va être gagnant là-dedans. À chaque fois que vous améliorez l'environnement, il y a rien que des gagnants.

M. Bégin: Je pense que, M. le député d'Orford, il va falloir apporter des corrections parce que vous confondez deux choses. Vous confondez le plan d'évaluation de programmes, c'est-à-dire à quel moment un programme qui est existant va être réévalué... C'est ce que l'on retrouve à la page 116, où on dit, par exemple: Le règlement sur les déchets dangereux sera réévalué en novembre 1999. Il y a une raison à ça, c'est que c'est moi qui l'ai mis en vigueur en novembre 1997. Alors, il a à peine un an et demi d'existence et il va être revisé. Donc, ce que vous retrouvez à la page 116, c'est à quelle date on va réévaluer les règlements que nous avons. Quand vous m'avez posé la question, tout à l'heure, concernant les règlements relatifs à la gestion des matières résiduelles, je vous ai parlé du printemps 1999, et ça, c'est les règlements qui sont à être adoptés. Ils vont l'être, et ils vont l'être rapidement. Alors, il ne faudrait pas confondre les deux systèmes, comme vous venez de le faire.

Le Président (M. Bissonnet): J'attire votre attention qu'il reste cinq minutes à votre débat.

M. Benoit: Oui. Alors, ce sera la dernière question.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, vous avez une petite entente, apparemment. On m'a dit que vous vouliez avoir une conclusion chacun de deux minutes.

M. Benoit: D'accord.

Le Président (M. Bissonnet): Si vous en preniez 2 min 30 s, ça serait...

M. Benoit: Ça sera la dernière question au ministre.

Le Président (M. Bissonnet): Ça va être la dernière question.

M. Benoit: Ma recherchiste et moi avons assisté à un colloque organisé par les gradués de maîtrise en environnement de l'Université de Sherbrooke il y a deux semaines. Il y avait des conférenciers de grande classe qui étaient là, Roger Nicolet et plein d'autres, et le représentant du CN nous disait que les lois en environnement du Québec étaient faites pour gérer par secteur, par classe, et jamais regardées globalement. C'est textuellement ce qu'il a dit. Est-ce qu'effectivement ce n'est pas une autre des demandes des gens d'affaires du Québec, qu'on arrête de regarder par secteur, par classe, et qu'on regarde un peu... qu'on refonde tout ça finalement, comme on a fait avec le Code civil du Québec? Et est-ce que ce n'est pas un beau défi pour vous, M. le ministre?

M. Bégin: Je pense que je vais prendre le reste pour répondre. Ha, ha, ha! Non, en bref, vous soulevez une question qui est la suivante: Est-ce qu'on devrait réévaluer l'ensemble des règlements que nous avons adoptés en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement? Je pense qu'on peut poser le problème de façon plus large encore. Je l'ai fait justement à Américana la semaine dernière, dans mon discours où je concluais de la manière suivante: Devrions-nous, 25 ans après l'adoption de la Loi sur l'environnement, au détour d'un siècle, au début d'un mandat, revoir cette question du régime environnemental? Devrions-nous nous questionner, les environnementalistes, le gouvernement, les entreprises, sur notre façon de gérer l'environnement? Devrions-nous le conserver tel quel? Est-ce que ça donne tous les résultats escomptés? Est-ce que toutes les modifications que nous avons apportées au cours du temps ont permis justement de garder une loi parfaitement adaptée à la situation ou si, au contraire, comme certains le pensent, il y a des inadéquations entre le régime environnemental et la situation que nous vivons à tous les jours et qu'en conséquence il faudrait procéder d'abord à une grande réflexion et par la suite à une revision de notre système?

J'ai dit que je formais un comité chargé de faire ça et qui aurait pour mandat, d'ici quelques mois, de répondre à la question: Devons-nous le faire? Et, si la réponse est positive, enclencher à ce moment-là une grande réflexion à travers tout le Québec avec tous les intervenants concernés.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, pour vos conclusions, il vous reste 1 min 20 s chacun. M. le député d'Orford, je vous écoute sur vos conclusions à cet échange.


Remarques finales

M. Benoit: Alors, ça va être assez court, M. le Président. Bien, je veux remercier le ministre de l'attitude, de son approche. Il va nous avoir sur son chemin de la même façon qu'on a fait ici. Tout ce qu'il va nous faire parvenir, on va le lire. Et, encore une fois, je vous dirais que, de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes déçus. Nous avons été déçus dans Hertel-des-Cantons. Nous sommes déçus, bien sûr, de la levée du moratoire. Nous sommes déçus que, dans les Éboulements, ce qui se passe là... Et non seulement nous le sommes, mais les groupes d'environnement le sont, les gens d'affaires le sont, les municipalités le sont en ce moment dans plein de dossiers qu'elles m'ont transmis.

Alors, le ministre va devoir se lever de bonne heure et s'assurer que son monde travaille fort, parce qu'il y a de grandes déceptions au Québec en environnement.

Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Orford. Je cède maintenant la parole au ministre de l'Environnement. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Bégin: Oui. Je voudrais dire qu'il s'est produit des choses extrêmement importantes et intéressantes en matière de l'environnement depuis que je suis ministre de l'Environnement. Je voudrais dire, entre autres choses, qu'il y a eu dépôt d'un plan de gestion des matières résiduelles en septembre 1998 et que les règlements et les législations requises vont être adoptés au printemps 1999; ce plan a été accueilli très favorablement par tout le monde.

Deuxièmement, il y a eu une consultation du BAPE sur l'eau et les travaux sont en cours. Et je suis content de voir que le député de l'opposition est d'accord avec la composition de ce bureau du BAPE.

Troisièmement, il y a eu il y a deux jours un grand rassemblement à Québec, qui est un rendez-vous des décideurs en matière agricole, où on a annoncé que la norme phosphore était modifiée et qu'elle faisait le consensus de l'ensemble des intervenants, que ce soit l'UPA, les unions municipales, le gouvernement, le MAPAQ, en somme tous les intervenants dans le domaine. On a donc un nouveau départ en cette matière, et ça m'apparaît extrêmement important. Nouveau programme en matière de décontamination des sols, 100 000 000 $ d'argent qui s'ajoutent aux 80 000 000 $ existants. C'est énorme.

Alors, je pense que, dans tous les domaines, on est à assister, dans le milieu de l'environnement, à des transformations majeures qui sont extrêmement positives et dont jouiront et bénéficieront tous les Québécois et toutes les Québécoises. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Ceci met fin à l'échange entre vous et le député d'Orford.

Je voudrais annoncer trois débats de fin de séance. Nous avons reçu dans les délais requis trois demandes de débats de fin de séance. Je dois apporter une correction de forme à vos demandes de fin de séance, et je vais vous expliquer. Les trois députés qui ont demandé un débat de fin de séance ont référé à leur... Je vais commencer avec le premier, les autres se feront automatiquement.

Alors, c'est un débat de fin de séance à la demande du député de Papineau, qui a posé aujourd'hui une question concernant la mobilité de la main-d'oeuvre entre le Québec et l'Ontario dans le domaine de la construction, et donc il demande à la présidence qu'il y ait un débat de fin de séance aujourd'hui. Mais, dans sa lettre, on demande de soulever un débat de fin de séance demain, pour le jeudi 25 mars. Donc, c'est une erreur de forme. Alors, je corrige cette erreur de forme là et j'informe l'Assemblée qu'il y aura un débat de fin de séance avec le député de Papineau et Mme la ministre du Travail.

Également, il y a une demande de débat de fin de séance entre M. le député de Notre-Dame-de-Grâce et la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance concernant le nombre de places en garderie. Et je fais cette même correction de forme pour informer cette Assemblée que le débat de fin de séance aura lieu aujourd'hui entre le député de Notre-Dame-de-Grâce et Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.

Et nous avons reçu une demande de débat de fin de séance entre Mme la députée de Bonaventure et le ministre des Ressources naturelles concernant la gestion de la forêt québécoise. Et je fais également cette même correction de forme pour que ce débat de fin de séance ait lieu aujourd'hui.

Donc, ceci met fin aux annonces de débats de fin de séance qui auront lieu ce soir.

Donc, je vais suspendre les travaux de cette commission pour permettre au personnel et à M. le ministre de bien pouvoir se retirer, et je suspends les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 18)

(Reprise à 16 h 21)


Sécurité publique

Le Président (M. Bissonnet): Alors, bonjour. La commission plénière poursuit ses travaux sur l'étude des crédits provisoires pour 1999-2000. Au cours des 60 prochaines minutes, nous allons procéder à un échange entre M. le ministre de la Sécurité publique et M. le député de Saint-Laurent. Au cours de cet échange, une période maximale de cinq minutes sera accordée à un représentant de chaque groupe parlementaire pour des remarques préliminaires et une période de cinq minutes sera réservée au député indépendant.

J'accorde immédiatement la parole à M. le ministre de la Sécurité publique pour ses remarques préliminaires de cinq minutes, les vôtres de cinq minutes, puis après c'est un échange entre vous deux. Et puis, nous, on vous regarde aller. M. le ministre.


Remarques préliminaires


M. Serge Ménard

M. Ménard: Merci, M. le Président. Il m'est agréable aujourd'hui de participer à cet exercice concernant l'adoption d'une partie des crédits budgétaires 1999-2000. J'aimerais, en tout premier lieu, rappeler que la mission du ministère fait partie, avec celles de la justice, de la santé et de l'éducation, des grands secteurs de base d'intervention de l'État.

M. le Président, nous aurons sûrement l'occasion, lors de l'étude détaillée des crédits, dans quelques semaines, d'aborder les questions de fond qui interpellent le ministère de la Sécurité publique. Permettez-moi tout de même de souligner brièvement les grandes orientations que nous entendons privilégier au cours de l'année qui vient. En matière d'organisation policière, il incombe au ministère d'assurer les conditions propices au développement d'un sentiment accru de sécurité et à la mise en place de services conformes aux besoins de la population. Dans cette perspective, le ministère devra d'abord analyser, conjointement avec le ministère de la Justice, l'ensemble des recommandations du rapport Poitras sur la Sûreté du Québec afin d'assurer un suivi approprié des recommandations qui seront retenues par le gouvernement. Également, la carte policière devra être révisée pour l'aspect des services spécialisés et des efforts additionnels devront être consacrés à la formation du personnel policier et civil oeuvrant au sein de nos forces policières.

En matière correctionnelle, le ministère bénéficie depuis peu d'un nouveau cadre d'action qui jette les bases de l'implantation de changements en prestation de services aux personnes contrevenantes. Ce cadre permettra d'orienter et de canaliser les efforts du ministère vers l'actualisation des deux grands volets de son mandat correctionnel, soit l'administration des décisions des tribunaux et l'éclairage des intervenants judiciaires. La mise en oeuvre de ce nouveau cadre et les transformations qu'il suppose contribueront à assurer des services de qualité sur l'ensemble du territoire québécois.

En ce qui a trait à la sécurité civile, le ministère devra formuler, en 1999, des propositions au gouvernement. L'état de réflexion actuel du ministère quant aux différents gestes à poser pour que les citoyens soient mieux protégés contre les risques inhérents à certains phénomènes naturels ou technologiques est assez avancé mais pas tout à fait complété, puisqu'il doit tenir compte des conclusions de la commission Nicolet chargée d'examiner ce sinistre, conclusions qui sont attendues sous peu.

La violence faite aux femmes demeure une préoccupation majeure du ministère. Déjà, des engagements formels portant, entre autres, sur la saisie des armes à feu, la mise à jour du Guide de pratique policière , l'information aux victimes et l'inscription rapide des données qui concernent les cas de violence conjugale au Centre de renseignements policiers du Québec, que l'on connaît sous ses initiales de CRPQ, ont été pris et respectés par le ministère. Dans ce sens, le ministère continuera à collaborer activement au Comité interministériel chargé de veiller à l'application et à la cohérence des actions gouvernementales en matière de violence conjugale.

Par ailleurs, le comité Accès, pour Action concertée contre les économies souterraines, mène depuis quelques années des opérations efficaces de lutte au commerce illégal de boissons alcooliques et de surveillance en matière de jeux illégaux. Ces actions concertées des forces policières et des intervenants gouvernementaux ont permis de freiner la progression de ce commerce et de hausser les revenus de l'État dans le secteur du jeu et de l'alcool. Ces actions se poursuivront au cours de la prochaine année de même que les opérations visant à contrer la guerre entre certains groupes criminels pour le contrôle de la distribution des stupéfiants. Enfin, les dernières années ont été particulièrement exigeantes pour notre organisation et nous ont rappelé la nécessité de la moderniser et d'en adapter le fonctionnement interne afin de lui insuffler un dynamisme nouveau.

L'atteinte des objectifs découlant de ces six grandes orientations est tributaire des moyens financiers qui y sont assortis. Et je voudrais prendre le temps qu'il me reste pour expliquer globalement les différentes composantes des variations qu'on peut observer au portefeuille du ministère de la Sécurité publique. Les crédits initiaux à voter s'élèvent à 645 300 000 $ et l'effectif total à 8 721 équivalents temps complet. Pour la gestion interne, le budget de dépenses de 131 000 000 $ est en diminution de 13 800 000 $, résultant principalement du retrait de 6 800 000 $ afférents à la commission Nicolet, de dépenses non récurrentes de 3 200 000 $ et d'économies de 3 000 000 $ découlant de la poursuite d'une gestion rigoureuse.

À la Sûreté du Québec, le budget de dépenses est en diminution de 6 900 000 $ par rapport à l'an dernier. Cette baisse résulte de l'effet combiné du retrait de 3 900 000 $ reliés à la gestion de la Loi sur les armes à feu, dont les activités seront dorénavant comptabilisées dans un compte à fin déterminée, enfin...

Le Président (M. Bissonnet): Vous reviendrez tantôt.

M. Ménard: ...de certaines dépenses non récurrentes, mais, par contre, d'un ajout de 7 200 000 $.

Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Laurent.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: M. le Président, j'ai eu avec plaisir l'occasion de connaître le ministre depuis plusieurs années dans d'autres forums, et je me souviens très bien de l'avoir entendu plaider avec beaucoup plus de dynamisme et d'enthousiasme qu'il ne vient de le faire. Je lui reconnais une autre compétence, celle de bien lire des notes, mais je dois dire que j'avais beaucoup plus de plaisir à l'écouter quand il plaidait plutôt que lorsqu'il lisait.

Je veux lui souhaiter la bienvenue cette semaine; malheureusement, nous avons manqué sa présence la semaine dernière. J'avais constaté, la semaine dernière, que les fonctionnaires qui l'accompagnaient avaient une mine réjouie. Ils étaient bien sûr avec le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration à ce moment-là, qu'ils avaient déjà eu l'occasion de connaître – sauf M. le sous-ministre aux affaires policières – alors que le député de Mercier était ministre de la Sécurité publique. Et j'avais constaté que le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration s'était très certainement créé des sympathies, puisqu'on pouvait constater cette sympathie par la mine réjouie des fonctionnaires qui l'accompagnaient. Je constate aujourd'hui que la mine est moins réjouie un petit peu, et probablement que c'est parce qu'ils ont été obligés de regarder comme il faut le budget et le livre des crédits qui est déposé à l'occasion de cet exercice.

Je dois dire au ministre de la Sécurité publique que son collègue des Relations avec les citoyens et de l'Immigration nous a expliqué, la semaine dernière, et nous a fait une affirmation qui est la suivante: trahissant le secret du Conseil des ministres, il nous a dit que le ministre de la Sécurité publique avait bien plaidé la cause de la Sécurité publique au Conseil des ministres.

Force nous est de constater, quand on lit le livre des crédits, que, malheureusement, M. le ministre, vous avez perdu votre cause, puisqu'on doit constater que le budget ou le livre des crédits qui est déposé, en ce qui concerne le ministère de la Sécurité publique, contient évidemment des baisses de budget appréciables, si on considère les prévisions budgétaires qui sont déposées pour 1999-2000. Par rapport aux dépenses probables en 1998-1999, il y a une différence de 100 000 000 $, un petit peu moins de 100 000 000 $.

Et j'ajoute que je fais la pondération nécessaire, M. le ministre, en ce qui concerne les crédits qui avaient été alloués pour ce qu'il a été convenu d'appeler la crise du verglas, qui sont de l'ordre de plus ou moins, pardonnez-moi les quelques milliers de dollars d'erreur ou de chiffres ronds, 36 000 000 $.

(16 h 30)

Si on regarde le budget des dépenses de 1999-2000, celui qui est prévu par rapport au budget des dépenses qui avait été déposé en 1998-1999, il y a là une baisse de budget de l'ordre de 21 000 000 $, la crise du verglas ayant été à toutes fins pratiques considérée. Bien sûr, si les actions du ministère ne souffraient pas de la baisse de budget, on n'aurait pas l'occasion de s'en plaindre. Mais voilà qu'il y a des déceptions importantes qui découlent de ce dépôt du livre des crédits. Je sais que mon temps achève et je vais mentionner une déception importante qui est celle du suivi qu'on donnera au rapport du Protecteur du citoyen. Et j'ai eu l'occasion de le mentionner. Je vois M. Roberge qui est présent. On aura l'occasion d'en parler dans les nombreuses heures de crédits que nous avons à notre disposition dans les prochaines semaines. Et je veux dénoncer aussi, cet après-midi, une supercherie qui est celle du suivi qu'on va donner aux recommandations qui ont été faites à l'occasion de la commission Poitras, où, dès le dépôt du rapport de la commission Poitras, le premier ministre du Québec avait dit: Québec va agir. Et le premier ministre disait: «Le gouvernement va agir rapidement pour accomplir la réforme exigée dans la Sûreté du Québec.»

En réponse à une de mes questions à l'Assemblée nationale un petit peu plus tard, le ministre actuel de la Sécurité publique disait qu'il entendait agir dès le printemps. S'il entend agir dès le printemps, ça va prendre de l'argent, oui, de l'argent pour le suivi des recommandations de la commission Poitras. Le gouvernement nous a dit qu'il voulait agir rapidement. On reconnaît bien là le discours de ce gouvernement: double langage, déclaration faite aussitôt le dépôt du rapport de la commission Poitras pour faire taire tout le monde, puis ensuite on l'oublie, on le met en-dessous de la table, on bâtit une tablette et on l'installe sur la tablette. C'est ça, la constatation qu'on doit faire. Ça va?

Le Président (M. Bissonnet): Ça va. Il reste 40 secondes. Ça va? Alors, on poursuit le débat. On commence le débat, l'échange entre les deux. Alors, avez-vous une question?


Discussion générale

M. Dupuis: Oui, M. le Président. Il y a une chose, un détail technique que j'aimerais savoir dès l'ouverture de ce débat. Est-ce que les offres qui ont été faites par le gouvernement aux employés de la fonction publique et parapublique, les augmentations de salaires présumées en fonction de l'offre qui a été faite, celle qui a été déposée par le président du Conseil du trésor, ont-elles été comptabilisées à la fois – je reviens sur une question que j'ai posée la semaine dernière, M. le ministre – en partie, ont-elles été comptabilisées dans le budget des crédits supplémentaires qui a été déposé la semaine dernière, pour une partie de l'année, sur lesquels elle s'appliquerait si elle devait être conclue, cette entente-là, ou, si ces offres devaient être acceptées, ont-elles été budgétées et sont-elles budgétées dans le livre des crédits qui a été déposé pour le budget 1999-2000?

Autrement dit, l'offre qui a été faite par le gouvernement, pour une partie de l'année qui se termine au 1er avril et pour l'année qui vient, est-elle comptabilisée dans le budget des dépenses qui a été déposé?

M. Ménard: La réponse est simple, et c'est non.

M. Dupuis: Bon. Dans ces circonstances-là, s'il devait y avoir une entente – et j'imagine qu'il y aura une entente ou un décret ou, enfin, que les conditions seront imposées, il y aura possiblement, au minimum, l'offre que le gouvernement a déposée sera acceptée ou, enfin, imposée – où est-ce que vous allez prendre l'argent, si vous ne l'avez pas déjà budgété dans le budget?

M. Ménard: Comme vous savez, c'est le Conseil du trésor qui est responsable des négociations. À la clôture des négociations, à la suite d'une entente, il est probable que le Conseil du trésor devra faire voter pour les différents ministères les crédits supplémentaires nécessaires pour respecter les ententes. Mais, pour le moment, on se base sur la situation actuelle.

M. Dupuis: À ma connaissance, M. le Président – et il est possible que le ministre n'ait pas la réponse cet après-midi ou que cette vérification-là n'ait pas été faite depuis que j'ai posé la question, la semaine dernière, ou à moins que la vérification ait été faite par M. Brind'Amour et que la réponse soit certaine, et si la réponse est certaine, vous pouvez être assuré que nous allons la vérifier – à ma connaissance, dans le livre des crédits supplémentaires qui a été déposé la semaine dernière, il y avait... La convention collective est terminée depuis un certain temps. Lorsque l'entente va intervenir, il va y avoir un certain nombre de mois dans l'année 1998-1999 sur lesquels l'augmentation qui va être consentie devra s'appliquer, et, à ma connaissance, le président du Conseil du trésor et le ministre des Finances font déjà dans leur budget des provisions relativement à ces augmentations-là, au moins en ce qui concerne l'offre qui est faite aux employés de la fonction publique et parapublique, d'une part.

D'autre part, comment peut-on penser, M. le ministre, que le ministre des Finances et que le président du Conseil du trésor ont déposé un livre des crédits 1999-2000 sans déjà prévoir les augmentations de salaires en fonction des offres qui ont été déposées? Alors, ma question est la suivante, plus précise, si vous voulez: A-t-on vérifié cette information-là qui est nous donnée par M. le sous-ministre? Est-ce que cette information-là a été vérifiée? Si elle ne l'a pas été, je ne vous chicane pas, mais j'apprécierais qu'on la vérifie pour qu'on sache sur quelle base on va discuter. Parce que, écoutez, si c'est ça, votre budget, si c'est ça, vos crédits pour 1999-2000 et qu'ils ne contiennent pas les provisions qui sont faites pour les augmentations de salaires, on ne discute pas des mêmes choses. Et là votre budget subit des compressions encore plus importantes.

M. Ménard: Les sommes n'ont pas été prévues dans nos enveloppes.

M. Dupuis: Si vous me permettez, la raison pour laquelle j'insiste pour que la vérification se fasse, en tout respect, c'est qu'on m'indique, on m'informe que, pour les ministères de la Santé et de l'Éducation, par exemple, la rémunération est prévue dans les crédits supplémentaires qui avaient été déposés la semaine dernière et est prévue, bien sûr, dans le livre des crédits 1999-2000. Mais ça tombe sous le coup du sens. S'il fallait qu'une entente intervienne et que ces crédits-là n'aient pas été prévus dans les budgets que vous déposez, ou dans les crédits que vous déposez, à ce moment-là, on n'a aucune idée du budget de votre ministère, absolument aucune idée du budget du ministère. Il faudrait aller chercher ces crédits-là dans les budgets que vous avez déjà. Vous seriez incapable de planifier quelque action que ce soit.

Alors, si vous me permettez, M. le ministre, et en tout respect parce que j'ai beaucoup d'estime pour vous, vous le savez, plutôt que de répondre n'importe quoi, seriez-vous assez aimable d'aller vérifier? Pas immédiatement, on va se revoir. On a 12 heures au cours desquelles on va se revoir, dans les prochaines semaines après Pâques. Alors, amputez de quelques minutes vos vacances de Pâques – je sais qu'elles sont importantes pour vous, je respecte ça – et vérifiez donc l'information. On peut passer à un autre sujet, si vous voulez. Moi, je vais prendre pour acquis que, la réponse, je ne l'ai pas eue parce que vous ne l'avez pas.

M. Ménard: M. le sous-ministre, qui est un expert en gestion au gouvernement, me dit qu'elles ne sont pas dans les enveloppes de mon ministère. Il est probable, par contre, que, dans le cas des grands réseaux, éducation et santé, il y ait des réserves qui sont faites pour les offres qui ont déjà été faites par le gouvernement, mais pas dans le cas du ministère de la Sécurité publique, qui, je le reconnais avec vous, est un des ministères qui, parmi les ministères qui ne sont pas à réseau, comptent le plus grand nombre d'employés; on le disait tout à l'heure, là, au-delà de 8 200. En tout cas, au-delà de 8 000 ETC.

Maintenant, vous avez une bien mauvaise idée, en effet, du budget du ministère. Il faut que vous considériez, là, que, si on part de 704 000 $ en 1998-1999 pour aboutir à 647 000 $, c'est quand même parce qu'il y a au-delà de 97 000 000 $ de dépenses non récurrentes.

Une voix: 744 000 000 $.

M. Ménard: Ah oui. Bien, de dépenses probables, là. Alors, 744 000 000 $ à 647 000 000 $, il y a au-delà de 97 000 000 $ de dépenses. Pour le verglas, ce n'est pas 39 000 000 $, c'est 72 000 000 $. Pour les commissions d'enquête, c'est 10 500 000 $. Pour les Inuit et les Cris, c'est 5 400 000 $. Pour les armes à feu, c'est 3 900 000 $, parce que là-dessus il y a un compte à fin déterminée qui est financé par le gouvernement fédéral. Alors, nous avons avancé 3 900 000 $ qui nous seront remboursés. Mais, pour continuer à opérer le système d'enregistrement d'armes à feu, nous avons un compte à fin déterminée qui est alimenté par les subventions fédérales pour ce programme en particulier.

(16 h 40)

Il y a des événements spéciaux, aussi, de la Sûreté du Québec, pour 3 000 000 $, donc des dépenses non récurrentes. Il y a aussi une somme de 2 300 000 $ pour le règlement de l'équité salariale avec les constables spéciaux. Donc, soustrayez 97 000 000 $ de 744 000 000 $, puis vous allez vous apercevoir que, par rapport au budget de dépenses, on prévoit une légère augmentation. Et cette légère augmentation va se traduire en services, parce que, dans l'administration, nous faisons, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, quand même une économie de 1 000 000 $.

M. Dupuis: J'imagine que le ministre comprend bien que, même en nous entendant sur le fait – et ce que je ne fais pas, mais pour les fins de la discussion – qu'il y aurait une légère augmentation de son budget de dépenses, il y a sans aucun doute un problème avec les sollicitations qui seront faites après du ministère de la Sécurité publique dans les mois qui viennent et dans les années qui viennent, et particulièrement en relation avec le rapport de la commission Poitras et les recommandations qui ont été faites.

Je suis certain que le ministre admettra avec moi que les recommandations qui sont faites au sein du rapport Poitras sont des recommandations qui, pour plusieurs – moi, j'en ai compté environ 150 – demanderaient un ajout de crédits si elles devaient être entérinées. Il y a, d'autre part, plus ou moins une quarantaine de recommandations qui ne requièrent pas d'ajout de crédits, en principe, si on devait y donner suite.

J'ai bien entendu le ministre il y a déjà quelques semaines, au moment du dépôt du rapport de la commission Poitras, lorsque je lui avais reproché d'avoir institué et mis sur pied un comité de fonctionnaires – aussi compétents soient-ils; il n'est pas question pour moi de contester la compétence des fonctionnaires qui siègent sur ce comité-là – et je m'étais quand même montré très déçu de l'attitude du ministre et du fait qu'il ait mis sur pied ce comité de fonctionnaires pour ce que j'avais appelé une étude du rapport, en fait un comité qui devait faire rapport sur le rapport. Et j'estimais que le ministre devait avoir eu le temps, au cours de sa lecture du rapport de la commission Poitras, déjà de se faire une tête sur un certain nombre de recommandations qui étaient faites, sans vouloir évidemment le pousser à donner des décisions sur toutes les recommandations. Mais le ministre devait démontrer une volonté politique. Et je pense que c'était demandé non seulement par l'opposition officielle, mais j'ai bien écouté les commentateurs de la chose politique lorsque le rapport de la commission Poitras est sorti, et tous, tout le monde était unanime, à degrés différents, sur le verdict et sur le diagnostic qui étaient posés, et tout le monde était unanime sur le fait qu'il devait y avoir des recommandations.

Mais le ministre a pris sa décision, il supportera le poids de sa décision. Il a décidé de confier à un comité de fonctionnaires le soin de faire un rapport sur le rapport. Est-ce qu'il a donné des échéances à ce comité-là? Et quelles sont-elles, s'il a des échéances, ce comité-là?

M. Ménard: Le député a une drôle d'attitude, M. le Président. D'abord, il semble très bien comprendre qu'il y a un coût à l'application des recommandations des différents rapports qui me seront soumis, que ce coût-là n'a pas été chiffré par la commission ni par les autres... parce qu'il n'y a pas que la commission Poitras, il y a d'autres rapports que j'ai lus. J'ai lu récemment, avec beaucoup d'intérêt, le rapport Corbo, qui est magistral, soit dit en passant, sur la formation policière, qui exprime d'une façon extraordinaire la même philosophie que j'ai sur le fonctionnement des organismes policiers et sur le besoin de la formation pour créer la police de l'an 2000.

Mais ce que ces commissions et ces rapports n'ont pas fait, c'est l'évaluation du coût de leurs recommandations. J'accepte la lecture du député, que 150 sur 175 de ces recommandations supposent un coût. Il appartient à un gouvernement, avant d'entrer dans ces coûts, de les évaluer. Cette évaluation est longue, difficile et parfois aléatoire parce qu'il est difficile de savoir exactement dans quels paramètres et combien l'application d'une recommandation va coûter. C'est l'exercice qu'il fallait que quelqu'un fasse. Qui devait le faire, puisque les commissions ne l'ont pas fait? C'était donc les fonctionnaires compétents, habitués, puis ensuite d'établir, une fois que l'évaluation des coûts est bien faite, d'établir un programme d'action, des priorités pour appliquer.

J'ai très bien reçu le rapport Poitras. Je l'ai lu et je ne doute pas que le député l'ait lu lui aussi et comprenne parfaitement le temps que ça prenait non seulement pour le lire superficiellement, mais pour le comprendre en profondeur, pour s'en pénétrer. Puis il se rappellera aussi qu'il n'a pu être rendu public, au grand public, qu'à partir du 25. Or, nous l'avons rendu public le 28 janvier. Et, à ce moment-là, je crois bon aussi d'avoir, dans certains choix qui vont être faits, dans l'établissement des priorités aussi – que nécessairement un gouvernement qui doit payer doit établir – l'opinion d'un certain nombre de personnes. Et, pour ces personnes-là aussi, ça prend quand même un certain temps avant de le lire, le rapport, pour nous donner leur opinion.

Alors, cet exercice, bien, il a commencé à se faire à partir du mois de janvier et il n'a pas pu être complété au moment de la préparation des crédits. C'est certain que, dans ce cas-là comme d'ailleurs dans le cas de... Enfin, dans d'autres cas dont nous reparlerons sûrement, on devra présenter un programme avec des mesures budgétaires. Et ces exercices qui sont... Puis je pense que c'est une bonne façon de gérer. On s'en apercevra, c'est plus compliqué de gérer un gouvernement que de gérer une compagnie privée, parce qu'on n'a pas...

Une voix: Le plus lentement possible.

M. Ménard: Ce n'est pas le plus lentement possible, c'est parce que ce n'est pas la même chose. Les compagnies privées n'ont qu'une mesure de leur excellence, c'est le profit. Le gouvernement, lui, ce n'est pas le profit, parce que justement, par définition même, le gouvernement, surtout à la Sécurité publique, s'occupe de choses où il n'y a pas de profit. Donc, il s'occupe de valeurs.

Par exemple, que vaut la formation des enquêteurs? Que vaut le temps? Que vaut l'enregistrement des déclarations faites par les détenus? Que vaut... Est-ce que nous allons... Bon. Mais c'est certain que toutes ces choses-là ont un prix et que, pour un gouvernement qui veut respecter, qui veut gérer de façon responsable, qui, lui, a l'odieux de taxer... Il n'a pas juste le plaisir de dépenser. Comme nous le rappelle le ministre des Finances souvent, pour avoir le plaisir de dépenser, il faut supporter l'odieux de taxer, et aujourd'hui la population – je ne sais pas si vous l'entendez de la même oreille que nous – ne veut pas être taxée plus qu'elle l'est et elle ne veut pas non plus que nous empruntions. Donc, on doit établir nécessairement des priorités, et ça, ça suppose que des fonctionnaires compétents et responsables, ce que vous reconnaissez, prennent le temps qu'il faut pour évaluer le coût des différentes mesures que nous allons devoir prendre à la suite de ces rapports, et ça viendra.

Eh puis, coudon, ça a pris quand même plus que deux ans à la commission Poitras pour faire le tour, et, eux, ils n'ont pas eu à évaluer le coût. Alors, qu'on nous donne quand même le temps qu'il faut, et qui était très difficile à évaluer. Mais je peux vous dire, sur le rapport Poitras, que c'est en bonne marche, hein, et que je pense que ça devrait arriver dans les prochaines semaines.

M. Dupuis: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Oui, M. le député.

M. Dupuis: Le ministre nous demande de prendre sa parole sur le fait que le rapport Poitras, c'est en marche, et il dit dans son intervention qu'il ne comprend pas l'attitude que j'ai cet après-midi relativement aux recommandations du rapport Poitras. Ce que je veux expliquer, c'est la chose suivante: Il m'est apparu absolument indéniable que le diagnostic qui était posé dans le rapport de la commission Poitras était accepté par tous les intervenants et tous les intéressés qui étaient concernés par le rapport et concernés par les études qui avaient été faites au cours de la commission Poitras. Ça, il m'est apparu ça dès le début.

D'autre part, il m'est apparu également... Et on peut différer d'opinion, diverger d'opinion sur l'une ou l'autre des recommandations qui sont faites, mais il y a une chose qui est certaine, je pense qu'on s'entend, tout le monde ensemble, la société, au Québec, nous nous entendons sur le fait qu'il doit y avoir, compte tenu du diagnostic qui est posé par la commission Poitras, une réforme importante et que des recommandations doivent être faites.

(16 h 50)

Ce qu'il y a d'absolument fondamental dans le rapport de la commission Poitras et dans ce que la commission Poitras révèle... Et j'indique tout de suite que, selon moi – et je pense que le ministre va être d'accord avec moi là-dessus – les policiers de la Sûreté du Québec eux-mêmes souhaitent que les recommandations du rapport Poitras soient suivies de façon importante. Il est absolument, donc, indéniable qu'une réforme doit être faite. Il est absolument indéniable que le diagnostic qui est posé est juste. Et donc, il y a là une urgence à agir. Et le ministre voudrait traiter cette question-là et en faire une question budgétaire strictement, alors qu'il y a là des valeurs qui doivent être véhiculées par un corps de police qui est extrêmement important. Et le corps de police en question doit être capable d'effectuer son travail sur le territoire du Québec et d'avoir l'autorité nécessaire pour être capable d'effectuer son travail. N'oublions pas que ces gens-là, ces policiers-là non seulement assurent la sécurité du public sur le territoire du Québec, mais font également des enquêtes criminelles. Ils doivent donc être capables d'agir avec autorité et ils doivent avoir le respect et la confiance des citoyens.

Le rapport de la commission Poitras risquait, au moment où il est sorti et dans les rapports qui ont suivi dans les médias par la suite, de mettre en péril cette autorité de la Sûreté du Québec. Et je continue de croire que l'autorité de la Sûreté du Québec risque d'être mise en péril par les constatations qui ont été faites. Le ministre se devait de réagir immédiatement. Le ministre se devait d'exercer son autorité, son sens des responsabilités et, dès le dépôt du rapport de la commission Poitras, de donner une volonté politique. Il ne l'a pas fait à ce moment-là. Et on lui a posé la question en Chambre, on lui a posé la question à l'extérieur de la Chambre: Où était-elle, cette volonté politique? On n'était pas capable de la voir.

L'un des endroits où on aurait pu voir la volonté politique du ministre – et on lui a donné la chance jusqu'à la dernière seconde – c'était dans le livre des crédits, pour voir si au moins le ministre avait réussi à plaider sa cause auprès du premier ministre, auprès du ministre des Finances, auprès du Conseil des ministres, et qu'on en voie le résultat dans le livre des crédits. Là, le ministre nous dit, bien, que c'est long, qu'il faut évaluer les impacts budgétaires des recommandations, alors qu'on est devant une situation où il faut agir, pas de façon échevelée, pas de façon improvisée – j'en conviens parfaitement – mais où il fallait que le ministre donne une indication.

Ce qui est arrivé depuis le dépôt du rapport de la commission Poitras, c'est strictement rien, absolument rien, aucune indication de la volonté politique du ministre d'agir; au contraire. Dans le livre des crédits, on ne voit rien sinon qu'il y aurait une disponibilité peut-être en 2000-2001 pour un certain nombre de recommandations qui ont été faites. Alors, évidemment, il y a de la déception, c'est clair, chez tous les intéressés. Chez tous les observateurs, il y a une déception. Et tout le monde est en droit de se poser la question: Est-ce que le ministre a bâti sa tablette sur laquelle il veut déposer le rapport?

M. Ménard: Je ne sais pas si on va me passer mon micro, on s'est trompé de micro. Merci. D'abord, il y a une chose sur laquelle je vais rejoindre l'opposition. Je n'ai peut-être pas assez parlé, mais c'est parce que j'avais beaucoup à faire et beaucoup à gérer. Dès que j'ai pris les fonctions de ministre de la Sécurité publique – j'avais quand même suivi les travaux de la commission Poitras – et avant même de recevoir le rapport, j'ai voulu m'assurer de la façon dont on conduisait les enquêtes maintenant. Et puis ça, ce sont toutes des réformes qu'on fait à même les budgets récurrents que nous avons. Et je peux vous assurer que la façon dont les... Écoutez, le problème de la commission Poitras, là, c'est que vous avez dans la conduite d'une enquête criminelle des policiers qui, ce qu'on appelle en termes populaires, «ont planté de la preuve», et par la suite ils ont cherché à se couvrir. Et donc, ça a amené un petit mensonge qui est devenu de plus en plus gros, comme il arrive quand on met le doigt dans...

Alors, la première chose dont je me suis assuré, c'est effectivement comment on faisait les enquêtes et quel était le contrôle qu'on avait de la façon dont étaient conduites les enquêtes. Et je peux vous dire que la façon dont les enquêtes sont maintenant contrôlées correspond, et de très, très près, aux suggestions du rapport Poitras. Mais il reste des choses à ajouter. Essentiellement, on a adopté le système HOLMES, qui est celui qui est suggéré par le rapport Poitras. HOLMES, c'est anglais, ça vient des initiales H-O-L-M-E-S, pour je ne me souviens pas exactement quoi, mais c'est ce qui est analysé. C'est essentiellement celui qu'on a. L'application de ce système va nous permettre éventuellement de développer un outil informatique pour permettre la meilleure gestion des enquêtes. J'avais l'impression, après un certain temps – puis c'est ça, entre autres, dont je veux m'assurer au départ, parce qu'il faut que j'en assure le Conseil du trésor – que ça devrait permettre aussi de faire des économies, le moment venu, de communiquer la preuve à la défense lorsque des accusations seront portées.

Maintenant, si on est pour développer un outil informatique comme ça, ce qui est une dépense fort coûteuse qu'il faut planifier sur plusieurs années, on n'est pas pour en développer plusieurs à travers la province, à travers le Québec. Alors, il fallait s'assurer aussi que le système qui est utilisé à la CUM, qui est l'autre très grand corps de police, et même dans des corps de police qui ont une certaine envergure, comme celui de la police de Québec, que leur système de gestion des enquêtes soit compatible avec cette méthode anglaise recommandée dans la commission Poitras qui va nous amener éventuellement à informatiser la gestion des enquêtes et à faciliter la transmission de la preuve, tout en assurant justement que... Je pense que l'opposition l'a lu, a pu se faire expliquer comment fonctionne le système et, entre autres, un détail important qui devrait rassurer les citoyens: d'abord, sur une perquisition importante, il y a un sergent, ou enfin un sous-officier qui n'est chargé que d'une chose, c'est de recevoir tout ce qui est saisi, de l'identifier, de le numéroter, de mettre une étampe de couleur dessus pour qu'on reconnaisse les originaux, de faire les copies nécessaires, de l'entrer par la suite.

Ensuite, tous les enquêteurs, par la suite, doivent entrer leurs rapports, lesquels sont photographiés, numérisés, de façon, plus tard, à être gérés de façon informatique. Et s'ils croient le besoin de changer ces choses-là, bien, ils peuvent le faire, mais, au moins, on saura qu'ils ont changé quelque chose. Tout sera parfaitement transparent. Tout cela aurait assuré que, dans le cas de l'enquête Matticks, ce qui a été fait... et je sais qu'il y a encore des policiers qui prétendent que ça n'est pas ça qui a été fait, mais, comme l'aura signalé la commission Poitras, même si vous prétendez ça encore, si le système qu'on vous propose avait été en vigueur, jamais vous n'auriez fait cette erreur.

Ensuite, il y a l'évaluation de mesures que j'avais moi-même prises à mon premier passage au ministère de la Sécurité publique, l'enregistrement des déclarations faites par les prévenus. Cet enregistrement suppose une formation. Il fallait voir si elle était disponible. Oui, elle est disponible à l'Institut de police, parce que, là aussi, j'ai pu voir les progrès faits par les personnes que j'avais nommées en 1995, notamment Mme Louise Gagnon- Gaudreau qui a fait un travail extraordinaire à l'Institut de police.

Alors, il y a énormément de choses qui sont faites sur la gestion des enquêtes, sur la prise de déclarations des détenus. Reconnaissez qu'il y a là à peu près 95 % à 97 % des problèmes qui se posent devant les tribunaux et pour lesquels les corps policiers de tous les États démocratiques sont parfois blâmés. Alors, ça, je veux dire, c'est quand même déjà beaucoup. En plus de ça, je veux intégrer là-dedans le rapport Corbo sur la formation policière.

Tout ça demande une planification financière. Cette planification financière là, comprenez bien, personne ne l'a faite avant nous. Donc, il faut laisser le temps aux fonctionnaires à qui je l'ai demandée de la faire. Puis, pendant qu'ils font ça, on s'aperçoit qu'il y a des choses dont il est difficile d'évaluer le coût. Je ne peux pas vous dire aujourd'hui combien va nous coûter ce logiciel nécessaire pour la gestion des enquêtes, ni l'évaluation complète des économies éventuelles qui pourront être faites.

(17 heures)

Alors, tout ce travail n'a pu être fait avant la préparation des crédits, qui, eux, arrivent à date fixe, et puis je pense que c'est une bonne chose. Mais ne vous en faites pas là-dessus. Je dirai: On me jugera au bout d'un an. J'ai retrouvé un ministère de la Sécurité publique où le ministre avait beaucoup plus de décisions à long terme à prendre que quand je suis arrivé là la première fois. Quand je suis arrivé là la première fois, je suis arrivé à un ministère de la Sécurité publique où il y avait un paquet de décisions qui devaient être prises, qui étaient prêtes à être prises, et donc on les a prises tout de suite. Là, c'est à partir de rapports d'enquêtes. Puis, en plus, il n'y a pas eu juste la police, il n'y a pas eu juste le rapport Poitras, il y a la situation des prisons, il y a la réorganisation de la sécurité civile, hein? Puis comprenez bien que j'ai tout fait ça, là, avec un sous-ministre qui venait d'arriver, avec deux sous-ministres qu'il me manquait. Il n'y avait pas de sous-ministre aux affaires policières quand je suis arrivé là, pas de sous-ministre à la sécurité civile. Il y avait rien que, finalement, pour les prisons qu'il y avait une sous-ministre qui était là depuis un certain temps, et qui avait constaté aussi les mêmes choses qu'a constatées le rapport du Protecteur du citoyen, parce que, si vous lisez le rapport du Protecteur du citoyen jusqu'à la fin, vous allez vous apercevoir que pratiquement toutes les informations qu'il a données, c'est le ministère qui les lui avait fournies. Donc, je veux dire, en tout cas... O.K.

Le Président (M. Bissonnet): Un instant.

M. Dupuis: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. Dupuis: ...le plaideur que j'ai connu à l'époque, particulièrement quand il avait une mauvaise cause. Un flot de paroles ininterrompu pour noyer le poisson, c'est ce que je viens d'entendre. L'essentiel de l'intervention que je veux faire cet après-midi est le suivant, M. le ministre: personne ne croit que la réforme qui doit intervenir au sein de la Sûreté du Québec sera facile à appliquer. Personne ne croit ça. Il va y avoir des résistances, c'est normal, et il doit y avoir des résistances pour que le choc des idées fasse son chemin, et je pense que vous allez en convenir, notamment – je ne veux donner que des exemples sans entrer dans le détail; on aura l'occasion de faire ça, j'en suis certain, pendant plusieurs heures – sur les relations qui existent entre l'Association des policiers provinciaux du Québec, le syndicat des policiers, la direction de la Sûreté du Québec, les relations qui existent entre l'APPQ et le ministère. Toutes ces choses-là doivent être discutées.

Ce que j'ai de la difficulté à concevoir, c'est que, pour un personnage politique, ministre de la Sécurité publique, qui est confronté à un rapport de la nature du rapport de la commission Poitras, un ministre qui sait, parce qu'il doit être responsable et parce qu'il connaît ses dossiers, que, oui, certaines recommandations peuvent être appliquées assez facilement mais que d'autres, d'autres, d'autres vont très certainement être plus difficiles à appliquer, un ministre qui doit reconnaître qu'il y a un certain travail qui doit se faire au niveau des esprits, au niveau de la mentalité, tant chez les policiers que chez les dirigeants, que dans la société, jamais le ministre ne s'est levé et n'a fait preuve d'autorité politique et donné des indications, donné des directions, donné son opinion, donné une idée de ce vers quoi il veut aller. Jamais.

Après midi, il nous dit: Bon, il y a un certain nombre de réformes qui ont été entreprises. Il nous en donne le détail, mais jamais il n'a donné de direction. Exemple, le comité de surveillance qui est recommandé par la commission Poitras, qui pourrait ressembler, si on se donnait la peine de réfléchir, au Comité de sécurité de la Communauté urbaine de Montréal, où il y a des élus qui siègent au Comité de sécurité. Jamais le ministre n'a donné d'indication. Quelle est son opinion sur cette recommandation-là? Pourquoi le ministre se retranche-t-il derrière un certain nombre d'exemples précis pour tenter de faire éviter les vraies questions? Ce que le ministre doit faire – et c'est ce que je lui suggère bien respectueusement – c'est donner une indication, donner une direction. Par exemple, a-t-il, à son comité de fonctionnaires qu'il a créé, donné une certaine direction? Est-ce que, avec la direction de la Sûreté du Québec, il a donné une certaine direction? Est-ce que, auprès des troupes, auprès des policiers, il a donné une certaine direction? Est-ce qu'il a donné son opinion? Le ministre n'a même pas été foutu – pardonnez-moi l'expression, M. le Président – de suivre la recommandation la plus simple du rapport de la commission Poitras qui est celle de faire une inspection de l'administration de la Sûreté du Québec.

Je donne un autre exemple. Le ministre a commencé son mandat comme ministre de la Sécurité publique en 1995 en disant: Moi, je trouve que les policiers ne sont pas assez polis, première chose, puis, deuxièmement, qu'ils ne sont pas assez instruits. Il a commencé comme ça. Or, la commission Poitras donne un certain nombre de recommandations importantes sur la formation policière. Et je donne des exemples précis simplement pour faire comprendre au ministre qu'on a besoin d'une direction. Il va falloir y avoir une direction. Mandats de perquisition: la commission Poitras donne un certain nombre de recommandations relativement à l'émission des mandats de perquisition par les juges de paix, par les policiers qui vont voir les juges de paix et elle suggère que les mandats de perquisition soient d'abord soumis à un procureur de la couronne avant qu'ils ne soient apportés au juge de paix afin que celui-ci les signe.

Il me semble que, au niveau de la formation policière, c'est une recommandation sur laquelle le ministre devrait donner une direction. Par exemple, il est facile de décider, pour un ministre, et ça donne une indication aux policiers: dorénavant, quand vous allez demander l'émission d'un mandat de perquisition, vous le montrerez au procureur de la couronne, comme ça se fait à Québec. Comme ça se fait à Québec, M. le ministre! Comme ça se fait à Québec, M. le ministre!

Alors, il aurait été facile et il serait facile de donner suite à cette recommandation-là, et ça donnerait une direction. Ce que les gens veulent, c'est une direction. Ce que les gens veulent, c'est que le ministre, qui est l'autorité politique responsable en grande partie de ce dossier-là, donne une direction, ce qu'il n'a pas fait encore. Et est-ce que le ministre entend le faire?

M. Ménard: Mais c'est fait, et c'est fait dans le quotidien. C'est parce qu'il y en a beaucoup, et on est en train justement d'établir les... Par exemple, j'accorde, c'est évident, une importance capitale à la formation. Puis il faut que ce soit accepté par un certain nombre de personnes, notamment par les instances syndicales. Je préfère chercher à les convaincre d'abord que de les affronter, parce que je préfère toujours convaincre plutôt que d'affronter. Parce que, quand on convainc les gens, ils appliquent d'autant plus facilement ce dont on les a convaincus que quand on les... On ne mène plus les gens au bâton, hein!

Mais, dans la première conférence de presse que j'ai donnée en rendant public le rapport, j'étais parfaitement conscient d'une des préoccupations qu'exprime l'opposition: c'est que la police doit continuer à travailler. Et je suis certain, il n'y a personne qui m'a dit... Au contraire, on m'a dit exactement le contraire, à la Sûreté du Québec, que j'avais eu exactement le bon ton. Et je pense que j'ai orienté ça – j'ai quand même parlé une heure – autour du thème de la professionnalisation, du professionnalisme, qui implique justement ce que vous dites, la formation permanente, donc nécessairement des études.

J'ai rencontré tous les organismes policiers importants actuellement, les directions. D'abord, je vais à la Sûreté du Québec régulièrement, presque... J'essaie d'y aller une fois par semaine. Je ne réussis pas toutes les semaines, parce que des fois il y a des problèmes qui me retiennent ailleurs. Mais je suis convaincu que la façon dont les enquêtes se font actuellement se rapproche progressivement... Ça ne sera pas quelque chose qu'on pourra réaliser du jour au lendemain. D'ailleurs, la commission Poitras a prévu que ça durerait au moins cinq ans, parce qu'ils ont prévu un comité de suivi pour cinq ans. Mais les enquêtes se rapprochent de plus en plus de la façon dont le rapport Poitras le suggère.

Même chose aussi pour les... Vous parlez des mandats de perquisition qui doivent être révisés par les procureurs de la couronne. Oui, c'est une pratique que nous cherchons à établir, qui d'ailleurs est largement suivie à la Sûreté du Québec. Il paraît, vous me dites, à la Sûreté de Québec aussi. Tant mieux! Là où on a un problème, c'est au Service de police de la Communauté urbaine de Montréal. Par contre, ils ont eux-mêmes leurs conseillers juridiques. Mais c'est sûr que c'est une des choses qu'on veut faire.

Mais, encore là, regardez bien, vous reconnaîtrez avec moi que 95 %, au moins, des problèmes policiers, c'est ou bien dans la conduite des enquêtes ou bien dans l'obtention des déclarations. Dans l'obtention des déclarations, je me suis assuré que justement la façon d'interroger les suspects, qui est celle qui est recommandée par la commission Poitras, c'est la formule Reid, en neuf étapes, une formule américaine. Bien, c'est justement celle qu'on enseigne à l'Institut de police, et c'est ce qui fait, me dit-on, qu'il n'y a à peu près qu'un quart des enquêteurs actuels qui sont capables... enfin qui acceptent d'appliquer cette formule et de se soumettre aux interrogatoires vidéographiés. Mais il y a quand même au-delà de 300 interrogatoires qui ont été vidéographiés depuis que j'ai commencé à instaurer le système la première fois.

(17 h 10)

Et c'est sûr que ça donne d'excellents résultats parce que ça coupe beaucoup les procès, mais la commission Poitras elle-même dit... Ils ont leurs doutes sur des méthodes psychologiques d'obtenir des déclarations et ils nous demandent de faire une étude approfondie sur les méthodes psychologiques, dont la formule Reid aussi. Mais ils nous suggèrent quand même de l'appliquer. Mais c'est exactement ce que l'on fait actuellement. Donc, on va en entraîner plus. Mais c'est sûr, si on me donnait plus d'argent, que ça irait plus vite, pour en former plus vite. Alors, il va falloir que je présente des mesures budgétaires, mais dans le contexte d'un gouvernement actuel qui sait qu'il ne peut pas dépenser au-delà des moyens des citoyens, de ce qu'ils acceptent. Donc, il va falloir établir des priorités, mais je pense que j'ai mis mes priorités à la bonne place.

Ma première préoccupation, c'était justement de ne pas démoraliser un corps de police dont l'immense majorité des membres sont extrêmement honnêtes. Et d'ailleurs, s'il y a bien quelque chose que le rapport de la commission Poitras démontre, c'est qu'on peut dire: Quand je me regarde, je me désole, mais quand je me compare, je me console, parce que, quand il comparait à ce qui est arrivé en Australie, à New South Wales, et puis à New York, on est loin de ça dans l'affaire Matticks. Dans l'affaire Matticks, on a une chose inadmissible qui est de contourner la loi, même pour la bonne cause, ça veut dire même pour poursuivre ceux que l'on estime des vrais bandits. Mais, à New York et à New South Wales, ils étaient rendus à rançonner les honnêtes citoyens, à avoir des... Mais c'est certain qu'il faut arrêter la déviance dès le départ, même quand la déviance... Alors, ça, déjà, c'est prêt.

Ensuite, ma priorité, c'était sur le contrôle des enquêtes, et puis, ensuite, c'est sur l'obtention des déclarations. C'est sûr qu'après ça la commission de contrôle, ça aussi... D'abord, il faut en discuter, quelle sera sa forme. Le procureur de la commission nous a suggéré deux modèles qui sont fort différents l'un de l'autre: le comité qui surveille le Service canadien du renseignement et puis, d'un autre côté, celui de la CUM. Il faut bien choisir entre les deux quelque part. Il faut savoir si, ça, ça doit relever des élus ou si ça doit relever de gens qui sont nommés et qui ne sont responsables devant personne sauf eux-mêmes. Alors, ça, c'est une décision fondamentale, c'est vrai, qui n'est pas encore prise.

Mais, dans le reste, tout ce qui concerne les enquêtes, la formation, l'obtention des déclarations, je peux vous dire que nous avons agi. Je ne l'ai peut-être pas assez dit, parce que justement j'ai passé trop de temps à m'assurer que ce serait fait, mais vous pouvez être certain que c'est fait.

Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. M. le député.

M. Dupuis: M. le ministre, au-delà de ces paroles-là, quel est l'échéancier que vous avez fixé à votre comité de suivi du rapport de la commission Poitras? Votre comité de fonctionnaires, il doit rendre un rapport, j'imagine, avec un certain nombre de recommandations, les impacts budgétaires, etc. Quelle est l'échéance? C'est quand? Quand attendez-vous le rapport de ce comité-là? Là, il va falloir avoir des réponses puis il va falloir que les gens sachent où on s'en va. Avez-vous donné des échéances, et quelles sont-elles?

M. Ménard: Bien oui, mais je ne peux pas tout prévoir, n'est-ce pas. Ça, c'est...

M. Dupuis: Quelles sont-elles?

M. Ménard: C'était maintenant.

M. Dupuis: Pardon?

M. Ménard: Mais il y a des discussions entre nous, et puis c'est ces discussions-là qui font que ce n'est pas encore arrivé, puis il y a autre chose qui est arrivé aussi: vous avez vu, on a eu des problèmes dans les prisons, là.

M. Dupuis: Alors, entendons...

M. Ménard: Mais, je veux dire, j'avoue que, là-dessus, on est peut-être un petit peu en retard sur... Mais j'étais conscient, quand on fixe des échéances – on tient absolument à nous en fixer – qu'on ne peut pas prévoir dans le menu détail comment ça va se dérouler, vous savez. On n'est pas mieux à prévoir ces choses-là que de prévoir la météo dans un mois, hein.

M. Dupuis: Simplement qu'on sache, pour bien partir nos discussions, qui vont être longues... Êtes-vous en train de me dire que l'échéance que vous aviez fixée au comité de fonctionnaires qui a fait un rapport sur le rapport, c'était maintenant, et que, donc, vous avez eu un rapport?

M. Ménard: Non, non. C'est vrai que j'étais censé les avoir au ministère, moi. Mais, une fois que je les ai, il faut que je les traduise dans un programme que je présente éventuellement au Conseil des ministres, et pour le présenter au Conseil des ministres, il faut que je passe à travers les comités ministériels. Vous connaissez la structure gouvernementale. Alors, avant que ce soit rendu public, c'est sûr que ça va prendre un certain temps. Mais, en tout cas, je pense que je fouette mes troupes assez là-dessus et puis je m'impose un temps de travail considérable. Vous disiez que j'étais en vacances, mais c'est quand même en vacances que j'ai pu terminer les trois rapports les plus importants dans les moindres détails: les deux rapports Corbo, le rapport de Jacoby, plus, enfin, tout un paquet d'autres choses.

Mais, je veux dire, vous me demandez dans... La commission Poitras a demandé combien de délais, hein? La commission Poitras a demandé combien de délais? Vous savez très bien que ces choses-là, je ne peux pas déterminer au départ combien de temps ça va me prendre. C'est sûr que j'ai le temps de le faire d'ici un an ou deux, mais, quand même, je ne peux pas vous dire ça au nombre de semaines.

M. Dupuis: J'essaie de mesurer, cet après-midi, le taux de sincérité du ministre et son taux de volonté politique et celle de son gouvernement parce que, malheureusement, M. le ministre, je n'ai pas été en mesure d'obtenir de réponses à mes questions en écoutant le discours inaugural du premier ministre, dans lequel il y avait deux lignes relativement à la commission Poitras. Si ça avait été deux lignes extraordinairement prometteuses d'avenir, je me tairais, mais c'étaient deux lignes complètement vides de sens dans le discours inaugural. Alors, je n'ai pas vu de volonté politique là.

J'ai ensuite tenté de voir la volonté politique du gouvernement dans le budget que le ministre des Finances a déposé. Et malheureusement, là non plus, je n'ai pas été en mesure de voir la volonté politique du gouvernement.

Cet après-midi, ce que j'essaie de faire, c'est de voir la volonté politique du ministre, au sujet duquel son collège des Relations avec les citoyens nous a dit la semaine dernière: Il a bien plaidé votre cause au Conseil des ministres. Évidemment, quand je lis le livre des crédits, je suis obligé de constater que ça ressemble un peu à la pratique du droit criminel, quand le juge rend jugement et qu'on est certain qu'il va rendre un jugement contre nous, quand il commence en disant: L'avocat a bien plaidé le dossier. Alors, le ministre a peut-être bien plaidé le dossier au Conseil des ministres; malheureusement, il a perdu sa cause. Vous savez ce que je veux dire, M. le ministre? Je ne suis pas tout seul à en avoir perdu, vous en avez perdu aussi. Bon.

Alors donc, je cherche à savoir quelle est la volonté politique du ministre d'aller de l'avant relativement aux recommandations de la commission Poitras. Et le ministre me dit: Bon, j'avais fixé des échéances pour le comité de fonctionnaires, c'était maintenant. On est un petit peu en retard et actuellement on est en discussion. Alors, je vais réitérer avec une seconde question, puisque maintenant on sait que le comité de fonctionnaires a rendu son rapport. On peut prendre ça pour acquis, là. On ne peut pas prendre ça pour acquis? Moi, j'ai compris que vous m'aviez dit que les échéances avaient été respectées, un petit peu en retard, puis qu'on avait déposé auprès de vous un résultat de réflexion et que vous êtes maintenant en discussion. C'est ça que j'ai compris. Est-ce que c'est ça?

M. Ménard: On me tient au courant de la réflexion au fur et à mesure qu'elle avance, et d'ailleurs il y a des documents qui parsèment cette réflexion, puis que je lis, mais il y a encore des discussions entre nous sur certaines choses. Je peux vous dire qu'il y a 95 % des choses, à mon avis, de choses essentielles qui ne posent pas de problèmes: contrôle des enquêtes, formation des enquêteurs, prise de déclarations, façon dont on va dérouler les perquisitions à l'avenir, puis tout ça. Je pense qu'on peut le faire à l'intérieur des budgets existants.

Mais, quand on commence à aller sur des choses qui vont demander des budgets supplémentaires, bon, il y a ça d'abord, il faut les calculer, il faut savoir combien, il faut savoir quel va être notre ordre de priorité, comme il va falloir demander s'il y a quelque chose de particulier pour le logiciel qu'on veut se procurer, puis il faut convaincre du monde, puis il faut convaincre les organisations syndicales de l'accepter. Mais aussi, puis c'est inévitable dans une affaire comme ça, qu'on ait des discussions entre nous. Bien, on a actuellement des discussions entre nous sur quelques points fondamentaux, puis quand on aura terminé...

M. Dupuis: Je ne comprends pas, M. le Président, je ne comprends pas.

M. Ménard: Moi, je ne peux pas tout vous dire. Vous savez bien que je ne peux pas tout vous dire, hein?

M. Dupuis: Ça ne m'entre pas dans l'esprit que le ministre puisse affirmer cet après-midi, sans rire, ou, en tout cas, sans rire à la caméra, qu'il est capable de donner suite à certaines des recommandations du rapport Poitras, notamment en ce qui concerne la formation policière, à l'aide des budgets existants, alors que dans son budget de 1999-2000 on constate, au pire, une diminution importante de son budget et, au mieux, si on en croit ses paroles, une légère augmentation, et toutes les missions sont reconduites pour cette année. Où va-t-il prendre l'argent pour être capable d'ajouter des crédits en ce qui concerne n'importe laquelle des recommandations qui sont faites dans le rapport Poitras relativement notamment à la formation policière, les mandats de perquisition? Si ça prend de l'argent, vous ne l'avez pas, M. le ministre. Arrêtez de nous dire que vous voulez donner suite à ces recommandations-là, vous n'avez pas l'argent. Bon. Ça m'apparaît comme étant clair.

M. Ménard: Là-dessus, le député est vraiment fidèle à son parti – je sais bien que vous êtes dans le même – pour un, il n'y a qu'une solution: c'est de mettre de l'argent sur les problèmes. Mais ce n'est pas vrai, ça dépend de la qualité de ce qu'on travaille. S'il n'y a pas d'argent, il n'y a pas de solutions. Non. Il y a des choses qu'on peut faire à l'intérieur des... Des enquêtes, on va continuer à en faire, hein, et on va les faire d'une façon plutôt de les faire d'une autre. Je reconnais que cette façon est probablement plus coûteuse, mais je pense qu'à long terme on peut réaliser des économies. C'est une des choses qu'on est en train de calculer, bien qu'il y ait beaucoup d'impondérable là-dedans. Je pense qu'on peut faire des économies sur la communication de la preuve, par rapport à: Est-ce que ça va coûter plus cher dans la façon dont on va gérer des enquêtes?

(17 h 20)

La formation, bien, on a quand même un Institut de police qui a entrepris cette formation. Je vous dis, 95 % de ce qui est dans le rapport Poitras, c'est en train actuellement, mais il reste un 5 % sur lequel j'ai, c'est vrai, des discussions. Puis j'avoue que, quant à moi, ma réflexion n'est pas complète.

M. Dupuis: Est-ce que le comité de surveillance fait partie de ces discussions-là? La recommandation concernant le comité de surveillance fait partie...

M. Ménard: Bien, exactement. C'est ce qu'il y a de plus fondamental. Puis c'est là-dessus... Il faut savoir quelle va en être la forme. Je suis convaincu d'une chose, absolument, c'est qu'on doit augmenter le degré d'imputabilité de la Sûreté du Québec par rapport aux autorités civiles. Ça, je suis absolument convaincu de ça à la suite du rapport. Quelle forme ça doit prendre? Celle du SPCUM? Celle vis-à-vis, comme on dit, du comité de surveillance du Service canadien de renseignements? J'avoue que, là-dessus, je ne le sais pas. Une formule tout à fait originale qui aurait l'apport... Puis ça, c'est des choses que j'aimerais bien, l'apport de gens de diverses disciplines, comme c'est suggéré dans la commission Poitras. C'est sur cette forme-là qu'on a actuellement à réfléchir un peu plus, puis savoir combien ça va coûter aussi, hein.

M. Dupuis: Il nous reste 45 secondes. Est-ce que, sur cette recommandation qui est majeure, évidemment, dans le rapport de la commission Poitras, sur le comité de surveillance, est-ce que le ministre entend faire des consultations? Est-ce qu'il entend soumettre la question et en faire un débat public? Ou enfin, en faire un débat public sur une consultation particulière, ça n'a pas d'importance, mais est-ce qu'il entend consulter ou est-ce que c'est dans le fond de son bureau avec ses conseillers qu'il va prendre une décision tout seul pour la soumettre à la Chambre? Est-ce qu'il entend d'abord consulter?

Le Président (M. Bissonnet): Rapidement, M. le ministre.

M. Ménard: C'est certain qu'éventuellement il va y avoir une consultation publique, mais il faut d'abord qu'on se fasse notre propre idée, et actuellement je consulte là-dessus. Je vois beaucoup de monde.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, ceci met fin à notre échange. Merci, M. le député de Saint-Laurent. Merci, M. le ministre. Alors, je vais suspendre les travaux de cette commission plénière pour quelques instants afin de permettre aux autres intervenants de pouvoir nous joindre. Alors, merci beaucoup de votre collaboration. Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 23)

(Reprise à 17 h 29)

Le Président (M. Bissonnet): Alors, rebonjour. La commission plénière poursuit ses travaux sur l'étude des crédits provisoires pour 1999-2000.


Conseil du trésor

Au cours des 60 prochaines minutes, nous allons procéder à un échange entre M. le président du Conseil du trésor, ministre d'État à l'Administration et à la Fonction publique, et M. le député de Westmount–Saint-Louis. Mais on me dit qu'il y a consentement aussi pour que M. le député de Verdun puisse assister à cet échange. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Léonard: ...les deux qui décident, ça?

Une voix: Oui, oui.

Le Président (M. Bissonnet): Consentement? Est-ce qu'il consentement?

M. Léonard: Il faut qu'il y ait consentement?

Le Président (M. Bissonnet): Bien oui. Habituellement, c'est... Le député de Vaudreuil devait être ici, mais il ne peut pas, alors l'opposition propose que ce soit le député de Verdun, puis ça prend le consentement. Consentement? Consentement.

(17 h 30)

Alors, au cours de cet échange, il y a une période maximale de cinq minutes qui est accordée à chaque représentant de chaque groupe parlementaire pour des remarques préliminaires et une période de cinq minutes sera réservée au député indépendant. Alors, je vous cède la parole, M. le ministre, pour vos remarques préliminaires, pour une durée maximum de cinq minutes.


Remarques préliminaires


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, je veux d'abord vous présenter les personnes qui m'accompagnent.

Le Président (M. Bissonnet): Avec plaisir!

M. Léonard: Mon sous-ministre en titre, M. Roy; M. Arsenault; M. Lessard; M. Cliche, ici; M. Dion; M. Bouchard; M. Charlebois; et, à côté de moi, ma chef de cabinet, Mme Régimbald; M. Turgeon et M. Bourcier. C'est mon cabinet.

Le Président (M. Bissonnet): Bienvenue à l'Assemblée nationale.

M. Léonard: Merci bien. Alors, M. le Président, nous sommes aujourd'hui réunis en commission plénière pour procéder à l'étude du budget de dépenses 1999-2000. Le discours sur le budget présenté le 9 mars dernier ainsi que le budget de dépenses 1999-2000 que nous avons déposé jeudi dernier marquent un tournant majeur pour les finances publiques du Québec. En effet, nous savons maintenant que l'objectif du déficit zéro a été atteint, et ce, un an plus tôt que prévu. Le travail qui a été accompli afin d'atteindre cet objectif a été exigeant pour tous. Il fallait cependant le faire afin de restaurer la santé financière du Québec et de rétablir la marge de manoeuvre que nous avions perdue.

Il y a quatre ans, la situation financière du Québec était dans un état lamentable, le gouvernement avait perdu toute marge de manoeuvre, notre déficit avait atteint un sommet de 5 800 000 000 $. Il fallait redresser la situation. Tous ensemble, nous nous sommes donné des objectifs ambitieux. Les cibles budgétaires fixées pour éliminer le déficit ont fait l'objet d'un consensus lors de la Conférence socioéconomique de Québec, en 1996. Ces cibles ont par la suite été consignées dans une loi adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Notre gouvernement avait le devoir de maintenir une gestion rigoureuse afin de respecter ces cibles. Nous constatons aujourd'hui que les efforts consentis ont porté fruit: pour la première fois en 40 ans, le déficit a été éliminé, nous n'empruntons plus pour payer les services à la population.

L'atteinte de l'équilibre financier ouvre de nouvelles perspectives pour l'avenir de nos services publics. Notre gouvernement a pris des engagements envers la population: d'abord, atteindre cet équilibre, puis réinvestir en priorité dans la santé et l'éducation. C'est ce que nous avons fait dans le dernier budget: 592 000 000 $ pour le secteur de la santé et des services sociaux, 393 000 000 $ pour l'éducation et la jeunesse et 160 000 000 $ pour la création d'emplois et le passage à l'économie du savoir.

Les crédits pour l'exercice débutant le 1er avril 1999 incorporent des dépenses de programmes de 36 238 000 000 $, soit 1 256 000 000 $ de plus que ce qui avait été prévu au discours sur le budget de l'année dernière. Cette somme comprend les investissements de 1 145 000 000 $ mentionnés précédemment ainsi que d'autres variations de 111 000 000 $. Par ailleurs, les données publiées dans les documents budgétaires montrent que la progression des dépenses de programmes par rapport à l'exercice précédent s'établit, sur base comparable, à 293 000 000 $, soit 0,8 %. Cette variation découle du fait que le dernier discours sur le budget a également annoncé des investissements ponctuels applicables à l'exercice financier 1998-1999.

En conséquence, la croissance des dépenses une année sur l'autre est moindre que ce qui avait été prévu aux investissements prévus pour 1999-2000. En incluant le service de la dette, le budget de dépenses 1999-2000 s'établit à 43 172 000 000 $, ce qui représente une hausse de 1,4 % par rapport à l'exercice précédent. Au moment du dépôt des crédits, j'ai cru bon d'insister sur le fait que notre premier défi à relever était de gérer nos priorités. Les données publiées montrent que la croissance budgétaire se retrouve principalement dans trois portefeuilles, à savoir: la Santé et les Services sociaux, l'Éducation, et la Famille et l'Enfance. Pris globalement, l'ensemble des autres ministères est en décroissance budgétaire.

Cela dit, je comprends mal que, dans la conférence de presse qu'il a donnée au moment du dépôt des crédits 1999-2000, le député de Westmount–Saint-Louis allègue que les gagnants du budget de dépenses 1999-2000 étaient des organismes administratifs sans clientèle, comme le Conseil du trésor, le Conseil exécutif et le ministère des Finances. Selon lui, les ministères perdants seraient ceux qui donnent des services à la population, comme la Culture et les Communications, la Recherche, Science et Technologie et la Sécurité publique.

Je voudrais prendre quelques instants, M. le Président, pour démontrer que les allégations du député de Westmount–Saint-Louis sont absolument non fondées. Lorsqu'on y regarde de plus près...

Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, M. le ministre.

M. Léonard: ...on constate en effet que les investissements additionnels réalisés touchent d'abord des services directs à la population. M. le Président, je ne sais pas comment mon collègue veut procéder. J'ai encore un texte, sinon je reviendrai à mon prochain...

Le Président (M. Bissonnet): Voulez-vous qu'il poursuive, puis on va vous donner plus de temps? Alors, poursuivez.

M. Léonard: ...je vais poursuivre.

Le Président (M. Bissonnet): On va balancer ça. Allez-y.

M. Léonard: Ainsi, l'enveloppe de dépenses 1999-2000 du Conseil du trésor montre une augmentation de 99 000 000 $, ou 24,8 %, par rapport à la dépense probable 1998-1999. Cette augmentation découle principalement de la variation des crédits budgétaires qui sont inscrits au Fonds de suppléance pour pallier les imprévus. Je voudrais juste que le député de Westmount–Saint-Louis m'écoute bien parce que je réponds à sa question, et à ses interrogations, et aux choses inexactes qu'il a dites lors de la conférence de presse. Parce que, lorsqu'on exclut le Fonds de suppléance, la variation s'élève plutôt à 24 900 000 $, ou 8 %, et résulte principalement des investissements additionnels de 7 200 000 $ en 1999-2000 pour le programme de stages, qui vise à accueillir 215 nouveaux diplômés – nouveaux diplômés, des jeunes – de l'ajout de 3 000 000 $ pour l'autoroute de l'information ainsi que des coûts relatifs à la tempête de verglas, qui sont passés mais qui ont été encourus 1999-2000, évalués à 9 900 000 $, qui étaient imputés antérieurement au ministère de la Sécurité publique.

Si l'on regarde maintenant le ministère des Finances, la hausse de 92 500 000 $, ou 28 %, par rapport à la dépense globale résulte essentiellement des investissements additionnels faits au programme FAIRE ainsi que des variations aux programmes Soutien au développement de l'économie et Provision pour des initiatives concernant les revenus. Lorsqu'on exclut ces programmes, la croissance pour le reste du ministère s'élève plutôt à 6 800 000 $.

De la même manière, la hausse de 15 900 000 $, ou 36 %, au Conseil exécutif découle des investissements faits à l'intérieur du programme Affaires autochtones, pour la mise en place d'un fonds de développement pour les autochtones, et du programme Jeunesse, pour la tenue du Sommet du Québec et de la jeunesse. Et, en excluant ces programmes, la croissance s'élève à 2 300 000 $, ou 6 %.

Je reviendrai, M. le Président, je vais laisser le député intervenir.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député, vous avez cinq minutes pour vos remarques préliminaires.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Le dépôt des crédits, évidemment, demande une approche toujours un peu particulière, surtout depuis qu'on a commencé à déposer le budget de revenus avant le budget de dépenses. Évidemment, je voudrais, plutôt que de profiter du cinq minutes que vous m'offrez, M. le Président, commencer à entrer tout de suite dans le vif du sujet. La dernière fois qu'on s'est rencontrés ici, c'était sur les crédits additionnels, et, finalement, à force d'arracher poil par poil l'épiderme du ministre, on avait réussi à ramasser le fait qu'il y avait des crédits périmés d'un niveau qui était assez important. Si je me fie au document que le ministre a rendu public, à la page 33, vous aviez annoncé que vous aviez 490 000 000 $ de crédits périmés pour l'an dernier. Les crédits périmés, c'est des crédits qui ont été repris par le Conseil du trésor ou, tout simplement, n'ont pas été dépensés dans certains ministères.

Il y en a pour 166 000 000 $, dit-on dans le volume, qui sont susceptibles d'être retournés au Conseil du trésor pour une bonne cause, dans le fond, ce sont ceux relatifs à l'aide sociale. Le coût de l'aide sociale a été moins important que prévu, donc il y a 166 000 000 $ qui sont revenus. Est-ce que vous pourriez ventiler le restant de ces crédits périmés de façon plus explicite que ce que votre document nous suggère?


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, est-ce que le député...

Le Président (M. Bissonnet): Oui, allez-y.

M. Léonard: ...qui me laisse beaucoup de temps... Je veux terminer le message que j'étais en train de lire, parce que je trouve ça important qu'on situe les crédits 1999-2000 dans leur juste perspective.

(17 h 40)

Il est vrai que les budgets 1999-2000 de certains ministères qui offrent des services à la population sont en baisse par rapport à 1998-1999. Cependant, ces diminutions sont principalement causées par des investissements ponctuels réalisés en 1998-1999 et n'affectent en rien le niveau des services offerts. Ainsi, au ministère de la Culture et des Communications, des crédits supplémentaires de 71 000 000 $ ont été présentés en 1998-1999, représentant, entre autres, des dépenses exceptionnelles de 47 000 000 $ annoncées dans le dernier discours sur le budget ainsi que d'autres mesures annoncées depuis le dépôt des crédits 1998-1999, notamment pour l'aide au cinéma et à la chanson ainsi que pour la politique de la lecture et du livre. Mis à part ces crédits supplémentaires de 71 000 000 $ pour 1998-1999, l'enveloppe de dépenses de ce ministère passe de 389 800 000 $ à 419 600 000 $ en 1999-2000.

Dans le cas du portefeuille Recherche, Science et Technologie, le dernier discours du budget a annoncé une somme non récurrente de 100 000 000 $ en 1998-1999 pour Valorisation-Recherche Québec, un organisme indépendant voué à la valorisation de la recherche et du savoir universitaire québécois. C'est ce qui fait que l'enveloppe de dépenses de ce portefeuille est en baisse malgré de nouveaux investissements de 32 000 000 $ en 1999-2000 pour la création d'Innovation Québec.

Finalement, au ministère de la Sécurité publique, des dépenses exceptionnelles relatives à la tempête de verglas et aux autres sinistres ont été réalisées en 1998-1999. Il est donc normal que l'enveloppe de dépenses soit en baisse en 1999-2000.

Par ailleurs, le député de Westmount–Saint-Louis a également allégué que le gouvernement joue avec les chiffres parce qu'il aurait périmé, au ministère de la Santé et des Services sociaux, des crédits de 100 000 000 $ après avoir annoncé des investissements de 110 000 000 $ en juin 1998. Or, il faut savoir que les crédits qui n'ont pas été utilisés en 1998-1999 n'affectent aucunement les services à la population et qu'ils découlent d'une contrainte technique reliée à la réforme comptable annoncée lors du discours sur le budget 1998-1999, ce que je lui ai dit en Chambre, ainsi que ma collègue de la Santé.

En effet, le projet de loi, M. le Président...

M. Chagnon: Arrêtez! Arrêtez tout de suite le stéréo là, on va revenir là-dessus.

M. Léonard: Oui, oui.

M. Chagnon: Mais, si vous pouviez répondre à ma question, on pourrait commencer à en discuter.

M. Léonard: On y répondra en temps et lieu.

M. Chagnon: Comment, en temps et lieu?

M. Léonard: M. le Président...

M. Chagnon: Ce n'est pas deux monologues sur la planète Mars ici, là.

M. Léonard: ...j'ai un message que je veux donner sur les crédits.

M. Chagnon: Le message de votre commanditaire, on le connaît, là, ça fait 12 minutes qu'on l'entend. Et il reste 47 minutes – j'ai pris 30 secondes – on «peut-u» passer à la question que je vous ai posée?

M. Léonard: M. le Président, j'ai le droit à cinq minutes, là?

M. Chagnon: Bien oui, vous êtes rendu à 12.

Le Président (M. Bissonnet): Non. Écoutez, là, la pratique est très simple, c'est qu'il y a des remarques préliminaires de chaque côté, puis après ça c'est un échange. Alors, si vous voulez conclure rapidement parce que... Puis, si on veut que l'échange ait lieu, il faut... Ça en prend deux pour participer à l'échange.

M. Léonard: Merci. Merci, M. le Président.

M. Chagnon: ...échanger...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. Léonard: Alors, M. le Président...

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre.

M. Léonard: ...le projet de loi n° 2 sur la réforme de la comptabilité prévoit des frais de restructuration initialement prévus dans les crédits du ministère de la Santé et des Services sociaux en 1998-1999 qui vont dorénavant être imputés dans l'année au cours de laquelle ils ont été encourus, de sorte que les crédits qui étaient prévus à cette fin en 1998-1999 sont périmés. Le projet de loi n'a pas été adopté, mais je tenais à répondre – il n'a pas encore été adopté, il va l'être – au député qui lance des chiffres comme cela qui n'ont aucun impact là-dessus.


Discussion générale

Maintenant, sa question.

M. Chagnon: La première.

M. Léonard: Sa première question. Les crédits non dépensés en 1998-1999, oui, 490 900 000 $. Selon les données publiées à la prévision de dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 1999, il y a trois facteurs qui expliquent cette situation. Premièrement, lors du dépôt...

M. Chagnon: Ça, je suis capable de le lire. C'est dans votre document, je le lis. J'ai demandé: Est-ce que vous avez une ventilation plus précise que ce que vous allez me lire parce que, dans le fond...

M. Léonard: Laissez-moi lire. M. le Président, il m'a posé une question, je vais lui donner la réponse que je veux lui donner et qui est une bonne réponse.

Le Président (M. Bissonnet): Bon, donnez votre réponse.

M. Chagnon: Non, non, c'est...

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. La parole est à vous pour le moment.

M. Léonard: Alors, il y a une rationalisation, d'abord, de 90 000 000 $ des dépenses de fonctionnement qui a été escomptée, et la cible d'économie établie pour chaque ministère afin de réaliser cette mesure a entraîné la péremption de crédits équivalents.

Deuxièmement, la réforme comptable entraîne une péremption de crédits de 111 000 000 $ qui avait été prévue dans les crédits 1998-1999, ce qui comprend, en détail, cette fois, des crédits de 80 000 000 $ prévus pour des frais de restructuration au ministère de la Santé et des Services sociaux, des crédits de 31 000 000 $ prévus au Conseil du trésor pour le Fonds de gestion des départs assistés. Et la réforme comptable prévoit, quant à elle, que ces dépenses de 111 000 000 $ doivent être inscrites dans l'année budgétaire où elles ont été engagées, c'est-à-dire 1997-1998 ou antérieurement, et le projet de loi n° 2 sur la réforme prévoit des autorisations requises à cet égard.

Troisièmement, la dépense probable escomptée pour 1998-1999 implique que d'autres crédits de 289 000 000 $ ne seront pas dépensés dans l'ensemble des programmes administrés par les ministères. C'est ainsi qu'il y a des crédits, comme je l'ai dit, de l'ordre de 166 000 000 $ qui sont dus à la baisse du nombre de ménages prestataires de la sécurité du revenu. Aux Affaires municipales et à la Métropole, il y a aussi des crédits non dépensés de près de 30 000 000 $. Les autres crédits, vraiment, ce qu'il en reste est beaucoup moindre et est réparti dans toutes sortes de ministères.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le Président. On vient d'apprendre que le ministre sait lire. Ce n'était pas vraiment une grande surprise pour l'ensemble du monde. C'est évident. La question que je lui ai posée, il m'a lu ce qui est écrit textuellement dans son livre. La question que je lui demandais, c'était justement d'extrapoler à partir de ce qui était écrit dans son livre. Il semble qu'il ne le sache pas. On va passer à d'autres choses.

Alors, allons à la page 80, dans ce cas-là. Vous me parliez de votre technicalité en ce qui concerne le dossier des fonctions régionales du ministère de la Santé et des Services sociaux. Les fonctions régionales, je le rappelle, c'est les hôpitaux, les CLSC, les centres d'accueil. Il y a 100 000 000 $ de périmés là. Budget de dépenses, 9 900 000 000 $; dépenses probables, 9 800 000 000 $. Là vous allez m'expliquer c'est quoi, votre technicalité.

M. Léonard: Où est-ce qu'il est?

M. Chagnon: Bien, c'est facile, on en parle depuis deux semaines.

M. Léonard: Votre dépense probable, 9 809 000 000 $...

M. Chagnon: Oui, 9 908 000 000 $.

M. Léonard: Le budget était de 9 908 000 000 $.

M. Chagnon: Voilà. Alors, il y a 100 000 000 $ de différence. C'est 100 000 000 $ de périmés. Il est où votre périmé? Vous m'avez dit – faites un «rewind», là – tout à l'heure que c'était une technicalité.

M. Léonard: Oui.

M. Chagnon: Expliquez-moi-la.

M. Léonard: Votre 80 000 000 $...

M. Chagnon: C'est 100 000 000 $, là, dans Fonctions régionales: 9 900 000 000 $; 9 800 000 000 $. C'est une technicalité, ça doit être simple. Expliquez-moi ça.

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre, vous savez qu'il y a quelqu'un qui peut répondre en votre nom.

M. Léonard: Oui, oui, je le sais.

Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez l'utiliser, vous pouvez le faire, si vous voulez.

M. Léonard: Ces crédits proviennent du fait qu'il y avait des comptes, des dettes dans les régies régionales, lesquelles, par suite de la réforme comptable, ont été assumées par le gouvernement, et cela a produit des crédits périmés, lesquels vont être résorbés effectivement lorsque nous voterons la loi n° 2 sur la réforme de la comptabilité.

M. Chagnon: Bon, partons de là. Je devrais les retrouver ailleurs, dans mes crédits. Si j'ai un 100 000 000 $ qui est pris là puis, parce qu'on change la convention comptable, en principe, ce 100 000 000 $ là, il ne disparaît pas, je devrais le retrouver ailleurs. À quel endroit ailleurs, dans le livre, je le retrouve?

M. Léonard: Ça fait partie des périmés. Ils n'ont pas été dépensés, donc votre dépense probable...

M. Chagnon: Bien, ils n'ont pas, donc...

M. Léonard: ...elle est de 80 000 000 $ de moins. Il y a peut-être un autre 20 000 000 $ ailleurs, dans toutes sortes de dépenses, mais...

M. Chagnon: Mais, s'ils n'ont pas été dépensés, ça me donnerait raison quand je disais qu'il y a 100 000 000 $ d'argent des hôpitaux, des centres d'accueil, des CLSC qui n'ont pas été dépensés, qui ont été retournés au Trésor. Par contre...

M. Léonard: Ils n'ont pas été retournés.

M. Chagnon: ...on a fait une annonce...

M. Léonard: Ils n'ont pas été retournés au Trésor, ils ont été considérés périmés. Ils n'ont pas été utilisés.

M. Chagnon: Ça revient exactement à la même chose. À partir du moment où je donne une conférence de presse, comme le premier ministre l'a fait avec M. Rochon à l'époque, puis qu'il dise, le 4 avril: On ajoute 110 000 000 $ dans le budget de la santé, puis qu'on regarde le programme à la fin de l'année puis il manque 100 000 000 $, on peut se dire une chose, c'est que le 100 000 000 $ qui a été périmé a été 100 000 000 $ de moins d'argent que les services régionaux ont reçu dans le ministère de la Santé, puis l'annonce du 110 000 000 $, bien, c'était de la frime. On est obligé de penser comme ça.

M. Léonard: M. le Président, je veux juste allumer... tenter d'allumer les lumières du député.

M. Chagnon: Essayez.

M. Léonard: Parce que ce 80 000 000 $ est relatif...

M. Chagnon: Ce n'est pas 80 000 000 $, c'est 100 000 000 $, là, 9 900 000 000 $.

M. Léonard: Cent millions. Il y a 20 000 000 $ en total sur un budget de 13 000 000 000 $. Bon, le 20 000 000 $ de dépenses, de certaines dépenses différentes...

M. Chagnon: Je vous parle des hôpitaux, là, 100 000 000 $ dans les hôpitaux.

M. Léonard: Je ne veux pas l'interrompre, moi, là. Je ne l'interromps pas quand il parle.

Le Président (M. Bissonnet): Vous allez vous parler chacun votre tour.

M. Léonard: Oui, je pense que ce serait une bonne chose parce que...

Le Président (M. Bissonnet): Là, c'est à votre tour.

M. Léonard: Bon, c'est à mon tour, là?

Le Président (M. Bissonnet): Allez-y.

(17 h 50)

M. Léonard: Alors, dans les crédits du ministère il y avait une somme de 80 000 000 $ relative au service de dette des établissements. Ce service de dette a été pris en compte par le gouvernement et donc... Mais nous ne pouvons pas l'effacer des crédits des établissements ou du ministère tant que la loi n° 2 n'a pas été votée. Cela n'a aucun impact sur les services à la clientèle. C'est ce que les journalistes qui vous ont posé des questions, M. le député, ont tenté de vous expliquer, que vous n'avez pas compris et que vous ne comprenez pas encore ce soir. Est-ce que vous voulez un tableau noir avec de la craie blanche et puis qu'on vous envoie un boulier compteur? Ça pourrait vous aider, peut-être.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Westmount–Saint-Louis, la parole est à vous.

M. Chagnon: Merci beaucoup. Eh bien, je pense que le président du Conseil du trésor a besoin non seulement de son tableau puis de sa craie, mais il va nous expliquer à quelle place il est passé, le 87 000 000 $ du financement des services de santé. Je devrais le trouver ailleurs. Il n'est pas disparu dans la brume. Il est où? Montrez-moi ça, dans le livre, à quel endroit on le trouve.

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre, la parole est à vous.

M. Léonard: Ha, ha, ha! Il est là. Toutes les dépenses qui ont été faites sont consignées là. Il y en a 80 000 000 $ qui n'ont pas été faites pour assumer le service de dette des établissements. Ça n'a pas d'impact sur les services, ça. Et le 110 000 000 $ que nous avons annoncé a été utilisé pour des services à la clientèle intégralement.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Bien, il manque encore 20 000 000 $. Uniquement dans le secteur des fonctions régionales, j'ai 100 000 000 $, là. Puis, quand vous parlez du 87 000 000 $, j'arrive, vous avez bien raison, il y a 87 000 000 $ de périmés pour le dossier de la santé. Je veux bien croire qu'il y a une partie de ce périmé-là qui irait au financement du service de la dette qui n'aurait pas été fait, ou du moins c'est peut-être des investissements qui n'ont pas été faits puis qui font en sorte que t'as... Alors, il vient d'où, ce 80 000 000 $ là?

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, les établissements de santé avaient des dettes, d'ailleurs que nous avons repayées cette année dans le budget 1998-1999 intégralement. À l'époque, ils avaient des crédits pour assumer ce service de dette. Ils n'ont pas eu à le faire, compte tenu de la réforme de la comptabilité, et donc ils n'ont pas eu à assumer cette dépense. Ça veut dire que finalement ils n'ont pas émis les chèques. Mais l'ensemble des services à la clientèle ont été assumés par les crédits du ministère. Il y a effectivement quelque 20 000 000 $ en tout sur un budget de 13 200 000 000 $, ou 13 353 000 000 $ au total. Alors, il y a au plus 20 000 000 $ de crédits périmés à la Santé. Cela signifie qu'il n'y en a pas eu, pratiquement, de crédits périmés à la Santé.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. Chagnon: Le 87 000 000 $... 80 000 000 $... On s'entend...

M. Léonard: Non, non, non. Là, il y a le 80 000 000 $. Ça fait trois fois que je lui donne l'explication, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Minute.

M. Chagnon: Oui, oui, oui, mais vous me dites que vous l'avez périmé.

M. Léonard: Qu'il comprenne!

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Un seul à la fois. M. le député, vous avez la parole.

M. Chagnon: Ha, ha, ha! Merci. Bon, je comprends le 80 000 000 $ du service... Mais, en principe, ce 80 000 000 $ là, c'est une dépense qui n'a pas été faite; ou bien donc la dépense a été passée à un autre poste budgétaire.

M. Léonard: Étant donné que la dette a été assumée par le gouvernement, c'est paru au service de dette du gouvernement. C'est un autre ministère qui l'a fait.

M. Chagnon: Alors, je devrais le retrouver aux Finances en service de la dette.

M. Léonard: Finances, oui.

M. Chagnon: O.K.

M. Léonard: Dans la dette.

M. Chagnon: Une question comme ça: Dans la loi n° 2, sur vos crédits supplémentaires, là, à quelle place on retrouve le 78 390 000 $ pour le ministère des Transports, dans Infrastructures de transport?

M. Léonard: Un instant. Vous êtes à quelle page, s'il vous plaît?

M. Chagnon: Je suis dans le projet de loi n° 2. C'est parce que j'essaie de concilier le projet de loi n° 2 avec mes crédits pour être capable de comprendre.

M. Léonard: Je ne l'ai pas, ici.

M. Chagnon: Vous le citez, je...

M. Léonard: Le projet de loi n° 2, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bissonnet): On va vous le sortir.

M. Léonard: On va le faire venir.

M. Gautrin: C'est quoi, le projet...

M. Chagnon: C'est l'Annexe 4 de la page 9 du projet de loi n° 2.

M. Gautrin: C'est les crédits supplémentaires?

M. Chagnon: Non, c'est une modification sur la réforme de la comptabilité gouvernementale.

M. Léonard: Quelle page?

M. Chagnon: Page 9, Annexe 4. J'ai 78 390 000 $ aux crédits supplémentaires pour l'année financière, Infrastructures de transport, mais je ne le retrouve pas.

M. Léonard: Où? Où est-ce que vous voulez le retrouver?

M. Chagnon: On devrait le retrouver dans les crédits supplémentaires.

(Consultation)

M. Léonard: Il est dans la loi n° 2.

M. Chagnon: Oui, mais comment est-ce que ça se fait que la loi n° 2 et les crédits supplémentaires ne se concilient pas?

M. Léonard: Ça doit s'additionner.

M. Chagnon: Regardez. Vous avez programme 1, Infrastructures de transport, 78 300 000 $. Dans les crédits supplémentaires que vous avez déposés, dans le programme 1, Infrastructures de transport, 61 100 000 $. Il y a 17 000 000 $ de différence, là.

M. Léonard: M. Roy peut vous donner l'explication. C'est deux choses différentes mais... Livre des crédits. Allez-y donc.

Le Président (M. Bissonnet): Vous êtes monsieur?

M. Roy (Pierre): Roy. Pierre Roy.

Le Président (M. Bissonnet): Pierre Roy, pour M. le ministre. M. Roy, vous avez la parole.

M. Roy (Pierre): Essentiellement, M. le député, la loi n° 2 vise à pourvoir en crédits les postes budgétaires qui requièrent de tels crédits suite à la réforme de la comptabilité gouvernementale, alors que le livre des crédits supplémentaires 1998-1999 vise à pourvoir en crédits supplémentaires pour des dépenses additionnelles en 1998-1999. Donc, les deux ne se comparent pas. Les deux, je dirais, s'additionnent, d'une certaine façon. L'une découle essentiellement de la réforme de la comptabilité gouvernementale, alors que l'autre est la conception, je dirais, traditionnelle de crédits supplémentaires.

Le Président (M. Bissonnet): Merci. M. le député.

M. Chagnon: Alors, on doit les additionner? Bon. Si on doit les additionner, on va faire le même exercice partout dans la loi n° 2. À partir du moment où nos dossiers se retrouvent... Une fois que la loi n° 2 va être adoptée, je présume que les crédits de l'an prochain vont être organisés sur une... les dépenses vont être faites par mission puis par portefeuille mais sur des crédits comparables, sur des programmes sur base comparable, comme cette année.

M. Léonard: Oui.

M. Chagnon: D'ailleurs, c'est pour ça que je ne comprenais pas votre 80 000 000 $, parce que, en principe, le 80 000 000 $ dans la santé, si effectivement le document avait été fait sur base comparable, il aurait été intégré de façon à le retrouver en récurrence sur une année, à tous les ans. C'est ce qui...

(Consultation)

M. Léonard: 80 000 000 $, je l'ai expliqué, là. On ne peut pas le faire disparaître tant que la loi n° 2 n'est pas votée. Quand on dépose les crédits, on ne peut pas parce que...

M. Chagnon: Le 80 000 000 $, le 87 000 000 $ du 100 000 000 $ dans le dossier de la santé, je ne peux pas m'imaginer que, si le document est fait sur une base comparable année sur année, il puisse disparaître, justement, puis qu'on puisse se retrouver...

M. Léonard: ...on pourra rectifier après. La séquence des années, par la suite, va en tenir compte, c'est évident.

M. Chagnon: Bien, en tout cas, est-ce que je peux vous suggérer ceci pour l'exercice de l'an prochain, du prochain budget de dépenses: Que vous mettiez les notes de bas de page pour qu'on puisse être capable de trouver ces références-là. Parce que évidemment, malgré le fait qu'on nous dise que le programme est fait sur base comparable puis qu'on a fait des modifications sur les conventions comptables qui fassent en sorte qu'une partie du service de la dette, par exemple des immeubles dans le secteur de la santé, se retrouve dans le budget général du service de la dette aux Finances, ce n'est pas évident. Ce n'est pas ça que ça dit. C'est peut-être ça que vous vouliez dire, mais ce n'est pas ça que ça dit.

Parce que, quand on nous dit, page 80: Dépenses par missions, portefeuilles et programmes sur base comparable puis que les données sur base comparable ont fait l'objet des redressements suivants: Ajout des dépenses compensées par des revenus à la politique familiale; Exclusion des dépenses extraordinaires de l'exercice 1998-1999 qui totalisent 1 170 000 000 $, eh bien, on aurait pu penser que les modifications au service de la dette étaient prévues, puisque la base était comparable.

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre.

(18 heures)

M. Léonard: Bon, M. le Président, je sais bien que le fait d'avoir changé la comptabilité puis de l'avoir rendue très moderne – on nous a dit, c'est le Vérificateur lui-même qui le dit, que c'est une des plus adaptées aux principes comptables actuellement – a fait qu'il y a des difficultés à rendre toutes choses comparables; c'est un fait. On en a un exemple puis on l'a donnée, l'explication en ce qui concerne le 80 000 000 $. Mais je sais que le député voulait conclure rapidement qu'il y avait 100 000 000 $ de crédits périmés à la Santé, alors que, au fond, c'était tout au plus de l'ordre de 16 000 000 $, 17 000 000 $ qu'il y avait de crédits périmés dans l'ensemble du ministère. Sur 13 000 000 000 $, vous allez être d'accord avec moi que ce n'est relativement rien. Mais il y avait ce 80 000 000 $, et les obligations, même, comptables nous obligeaient à le laisser là où il était, le 80 000 000 $. Nous avons donné les explications lorsque la question est venue, de façon très transparente.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. Chagnon: Puisqu'on sait maintenant que, dans l'autre sujet qui concerne la loi n° 2 puis le dossier des crédits supplémentaires, puisqu'il faut les additionner... Donc, si j'additionne 17 000 000 $ sur le 61 000 000 $ des crédits supplémentaires, comment je vais faire pour arriver à avoir un équilibre budgétaire au bout de la ligne, si j'ai 17 000 000 $ de plus? Ou 78 000 000 $, si c'est 78 000 000 $ qu'il faut additionner? Comment on fait pour équilibrer avec cette formule-là?

M. Roy (Pierre): M. le Président, juste un complément d'abord...

Le Président (M. Bissonnet): Un instant. Un instant. M. Pierre Roy, pour M. le président du Conseil du trésor. M. Roy, la parole est à vous.

M. Roy (Pierre): Le montant de 78 390 900 $ au ministère des Transports est le seul montant apparaissant à la loi n° 2 qui concerne les crédits supplémentaires 1998-1999. Les autres crédits invoqués à la loi n° 2 sont les crédits 1997-1998.

M. Chagnon: Exact.

M. Roy (Pierre): Et le montant de 78 000 000 $ est déjà inclus dans les équilibres globaux qui ont été présentés lors du discours du budget.

M. Chagnon: O.K. Ça répond. Pas de problème avec ça.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. Chagnon: On ferme le dossier.

Dans le secteur de la santé, on avait prévu 300 000 000 $, à peu près, de déficit pour l'année 1998-1999. Il va être corrigé avec le 700 000 000 $ d'investissements. À quoi on s'attend, dans le secteur hospitalier, comme niveau possible de déficit pour 1999-2000?

M. Léonard: C'est qu'on s'attend à l'équilibre.

M. Chagnon: Alors, 1998-1999 consolidé, le déficit est de combien dans les hôpitaux? On ne le sait pas encore. Ce n'est pas fini.

M. Léonard: Écoutez, l'année va se finir le 31 mars, là.

M. Chagnon: Oui.

M. Léonard: Alors, nous allons le savoir à la fin de l'année.

M. Chagnon: Ça veut dire que 350 000 000 $, à peu près, de cette année...

M. Léonard: Je n'avancerai pas de chiffre ce soir. D'ailleurs, c'est plus le ministère qui pourrait le donner, là, à ce stade-ci.

M. Chagnon: Vous vous attendez à zéro pour 1999-2000.

M. Léonard: Oui.

M. Chagnon: Vous attendez zéro déficit dans les hôpitaux. On va prendre ça en note. On a un an pour...

M. Léonard: Ça a été l'objectif de ce que nous avons fait.

M. Chagnon: On a un an pour le vérifier.

M. Léonard: Pardon?

M. Chagnon: On va avoir un an pour le vérifier.

M. Léonard: Vous aurez un an pour le vérifier. Nous avons vérifié vos états financiers à vous, puis je peux vous dire que les déficits que vous faisiez quand vous étiez au gouvernement, ce n'était pas un cadeau. Parce que c'est ceux-là qu'on paie aujourd'hui.

M. Chagnon: Je peux vous rappeler qu'on n'a jamais fait de déficit dans les hôpitaux, puis quand on a repris le pouvoir, en 1985, vous aviez laissé 450 000 000 $ de déficit dans les hôpitaux, puis on a été obligé de le nettoyer.

Ceci étant dit, vous avez aussi...

M. Léonard: Vous nous avez laissé... Vous avez doublé le déficit accumulé du Québec, la dette...

M. Chagnon: M. le Président, je peux parler?

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Westmount–Saint-Louis a la parole.

M. Chagnon: Alors, vous avez aussi, dans les crédits, fait l'annonce d'une nouvelle façon d'administrer: plus d'imputabilité. Je vous en félicite, d'ailleurs, parce que je sens que, chez vous, ce n'était pas naturel, il y a quelques années, de faire en sorte que... L'imputabilité, qui corrigeait un peu la responsabilité ministérielle, n'était pas nécessairement bienvenue. Mais tout le monde a le droit d'évoluer, et je vous félicite d'entrer dans le club, de faire en sorte de s'assurer que dans l'avenir les parlementaires soient le mieux informés possible sur la reddition de comptes des ministères.

J'aimerais vous entendre un peu là-dessus, et je suis certain que mon collègue aura aussi quelques questions à poser sur ce sujet. Nous avons tous les deux eu de longues heures épiques – je pourrais même dire – de discussions avec le ministre et député de Labelle sur le sujet. J'aimerais comprendre ce qu'il entend améliorer, quels sont les principes qu'il entend améliorer. Il nous a parlé beaucoup d'indicateurs de performance, mais je voudrais comprendre comment il veut le faire, ça.

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre.

M. Léonard: Alors, M. le Président, je note l'intérêt du député pour la question qui est soumise. Je voudrais cependant lui rappeler aussi quelques souvenirs. La loi 198 avait été déposée par son collègue de Verdun vers l'année 1993, je crois, et son gouvernement ne l'avait pas appuyée beaucoup, mais...

M. Gautrin: ...1993.

M. Léonard: À peu près. Déposée en 1991, adoptée en 1993. Vous voyez que ça a cheminé longuement parmi les banquettes avant d'arriver à l'adoption. Mais c'est parce que ça me rappelle des souvenirs, M. le Président, parce que j'étais son critique devant son projet de loi, et il a dû le suspendre à plusieurs reprises pour le bonifier, et les suggestions que je lui ai faites ont permis, en quelque sorte, qu'il soit acceptable, ce projet de loi. Il pourrait relire les galées, c'est très édifiant, parce que, sur un article en particulier, nous avions suspendu trois fois pour nous mettre d'accord finalement sur une formulation. Et je vous rappellerai, M. le Président, que ce...

M. Gautrin: Je fais la même chose avec certains de vos projets de loi, alors...

Le Président (M. Bissonnet): ...député de Verdun, que vous allez intervenir bientôt.

M. Léonard: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bissonnet): Alors, M. le ministre, si vous voulez poursuivre. Ce ne sera pas long, M. le député.

M. Léonard: Mais, M. le Président, finalement, le projet de loi 198 était resté sur la table, et c'est finalement notre gouvernement qui en a intégré les principales parties.

M. Gautrin: Ce n'est pas vrai, ça. Ça, ce n'est pas vrai.

M. Léonard: Oui, il y a des nuances, effectivement, qu'il faudrait apporter, mais c'est nous qui en avons adopté le principe et intégré à l'administration publique, en ce qui concerne le projet de loi.

Alors, je vois que le député de Westmount–Saint-Louis s'intéresse beaucoup à la question. Il va voir, lorsque nous publierons l'énoncé de politique – qu'il pourra lire plusieurs fois pour s'édifier de la question – pour améliorer l'administration gouvernementale, qu'il y a eu beaucoup de chemin de fait et qu'il y en a encore aussi à faire. Et, quant à moi, je me prépare bientôt, au printemps, à déposer cet énoncé de politique. Il verra là. S'il me demande de tout lui livrer ce soir, il n'aura pas de nouvelles à ce moment-là, puis lui-même ne pourra pas exciter sa curiosité, et je tiens à ce qu'il lise ce document de long en large.

M. Chagnon: Je peux vous assurer que ce sera fait, mais...

M. Léonard: De bout en bout.

M. Chagnon: ...est-ce que je peux me permettre de vous faire quelques suggestions avant qu'il ne soit publié? Comme ça, je pourrai...

M. Léonard: Allez-y donc. Faites toujours, cher collègue.

M. Chagnon: ...toujours vous dire: Ah, ah, je vous l'avais bien dit, et puis je ne le retrouve pas dans votre document.

M. Léonard: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: C'est une des responsabilités du Conseil du trésor d'émettre des directives pour l'organisation des rapports annuels des différents ministères et des organismes publics. Si, dans ces directives-là, on retrouvait justement ce que l'on sous-entend dans les documents que vous avez rendus publics la semaine dernière, si on exigeait des ministères, dans leurs rapports annuels, qu'ils fassent la liste des indicateurs qu'ils recherchent, des objectifs qu'ils recherchent, des indicateurs de performance qu'ils recherchent et qu'ils nous donnent année après année les performances qu'ils ont eues, on serait probablement plus à même d'avoir une idée de la qualité de la performance qu'on retrouve dans chacun des ministères ou organismes.

M. Léonard: C'est exactement ce que ça vise, M. le Président. Une gestion par résultats amène aussi la mesure de ces résultats, donc de déterminer des indicateurs, de se fixer des objectifs quantifiés, et puis ces indicateurs vont permettre de suivre les résultats, et puis, par la suite, venir à l'Assemblée nationale. Nous le ferons, et c'est ce que vise ce projet, d'autant plus qu'il y a en élaboration actuellement le projet GIRES, qui est la fusion des systèmes d'information au gouvernement. Nous avions deux systèmes: un sur les ressources humaines, qui est SAGIP, et SYGBEC pour les ressources financières, nous voulons y ajouter deux autres modules, qui sont les ressources matérielles et les ressources informationnelles, et donc d'avoir un système informatique complet, ou d'information complet en temps réel, ce qui est très différent de ce que nous avons et qui va impliquer que les processus de décision, comme les processus administratifs plus larges, vont être profondément modifiés.

Alors, ce que nous avons l'intention de faire, c'est de déposer un énoncé de politique et de le faire accompagner d'un projet de loi pour bien indiquer ce que nous entendons poursuivre. L'opposition sera conviée à collaborer. Nous espérons qu'elle pourra concourir positivement à l'adoption d'un tel projet de loi qui va affecter un jour un gouvernement que possiblement elle pourrait assumer, dans 25 ans!

(18 h 10)

M. Chagnon: Prochainement, prochainement. Mais, ceci étant dit...

M. Léonard: Mais disons que la conception que j'en ai, c'est: l'État, quel que soit le gouvernement au pouvoir, va utiliser un tel système, une telle conception.

M. Chagnon: ...outil pour pouvoir au moins être capable de publier la qualité de l'administration de chacun des ministères, le rapport annuel... Parce que actuellement le rapport annuel, c'est un peu malheureux à dire, mais c'est assez bidon. On n'apprend pas grand-chose de l'activité d'un ministère quand on lit ça. C'est un rapport assez complaisant, généralement, puis qui nous donne des grandes lignes de l'orientation d'un ministère. Ce n'est vraiment pas adéquat pour être capable d'assumer la reddition de comptes que des parlementaires, de quelque côté qu'ils soient, peuvent avoir à faire.

Je terminerai là-dessus en vous remerciant puis en laissant mon collègue de Verdun peut-être finir notre entretien particulièrement sur cette approche-là. Mais il faudra aussi regarder l'efficience des deux premiers systèmes, financier et du personnel, que vous avez au Conseil du trésor actuellement. Ils commencent à vieillir un peu, ces systèmes-là.

Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de... M. le député de Verdun.

Une voix: ...

M. Gautrin: Non, non, mais allez-y.

M. Léonard: ...sur les rapports annuels. Il est sûr que les rapports annuels vont changer de facture. Ça me paraît évident, d'autant plus que normalement ils devraient être disponibles beaucoup plus tôt que maintenant, après la fin de la période financière. Beaucoup plus tôt.

Le Président (M. Bissonnet): Je vous remercie. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci. Pour poursuivre dans cette dimension-là, vous savez que la commission du budget et de l'administration avait, à l'époque, échangé – je pense que vous étiez déjà président du Conseil du trésor – quant à la possibilité d'avoir une loi-cadre sur la manière de faire les rapports annuels. Est-ce que, ça, c'est tombé complè3tement à l'eau?

M. Léonard: Ce n'est pas une loi-cadre sur les rapports annuels. Il y aura une loi qui va...

M. Gautrin: Je vais échanger avec vous sur ça. Essentiellement, si j'ai compris – parce que, dans le fond, le gouvernement et l'administration ne sont pas totalement imperméables, même à l'opposition – votre démarche à l'heure actuelle, c'est une démarche dans laquelle vous allez généraliser le concept des unités autonomes de services, c'est-à-dire avoir une entente de gestion entre ce qui ne serait plus tout à fait un Conseil du trésor mais l'équivalent du Conseil du trésor et chacun des ministères et faire une surveillance a posteriori de la manière dont cette entente de gestion a été remplie ou non. Bon, c'est ce qui circule dans les officines des fonctionnaires, disons, du gouvernement actuellement, puis je ne vous demande pas de me dire si c'est oui ou non, parce que je sais que c'est oui, mais enfin, ce n'est pas la peine que vous trahissiez ce que vous avez à dire.

Ma préoccupation face à ça, ça reste que la dimension d'imputabilité entre le Conseil du trésor et les différents ministères va bien être remplie, et, vous le savez parce que vous l'avez rappelé tout à l'heure, on a échangé longtemps sur les liens qu'il doit y avoir entre l'imputabilité envers les parlementaires... Et, moi, je reste extrêmement préoccupé actuellement, si tant est que je puisse être d'accord avec la réflexion qui se fait sur le contrat de gestion auquel vous semblez être en train de réfléchir. Bon, je ne voudrais pas vous demander de déposer votre projet de loi avant de l'avoir déposé, mais enfin, sur le contrat de gestion auquel vous êtes en train de réfléchir, ce que, moi, je n'ai pas encore comme clarification, c'est la manière dont vous allez être imputable envers les parlementaires, et ça, ça m'inquiète beaucoup.

Je suis d'accord avec vous et je pourrais vous dire à quel point l'historique de la loi 198... Vous savez à quel point ça n'a pas été facile de traverser un conseil des ministres quand vous n'êtes pas membre de ce Conseil des ministres. Si vous voulez savoir ce que c'est – ha, ha, ha! – je peux vous le raconter en moult détails. Mais ce n'est pas l'objet de notre entretien aujourd'hui. Mais la préoccupation que nous avions et que nous continuons à avoir, c'est-à-dire qu'il y a aussi une imputabilité envers les parlementaires, est-ce que vous la maintenez, dans votre réflexion actuellement?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Tout à fait?

M. Léonard: Oui, mais c'est, pour moi, une interrogation, parce que je suis convaincu que les parlementaires vont avoir à s'interroger sur leur façon d'assumer leur rôle, y compris celui de critique, à partir du moment où il y aura une information très différente qui va être devant eux, qui va leur être disponible et qui va être beaucoup plus élaborée, à mon sens, peut-être moins en termes de textes mais en termes d'informations factuelles.

M. Gautrin: O.K. Et vous comprenez bien, la dimension et la divergence que nous avions entre vous et moi à l'époque était... Vous pensiez, vous étiez un tenant à l'époque, en disant: C'est le ministre qui est imputable devant l'Assemblée. Moi, je défendais et je continue à défendre – ça a été l'objet de la loi 198 – que l'ensemble de l'appareil de l'État est imputable devant l'Assemblée. Donc, éventuellement, un sous-ministre peut avoir à rendre compte de sa gestion, pas strictement à travers son ministre, mais directement devant l'Assemblée. Je ne voudrais pas refaire nos débats de l'époque, mais je comprends que l'imputabilité envers l'Assemblée ne va pas disparaître complètement.

M. Léonard: Bah! ce n'est pas dans nos intentions à l'heure actuelle.

M. Gautrin: Parfait. Moi, j'ai quelques petites questions, puisque j'ai la chance de vous parler. On va revenir maintenant sur les chiffres. Vous saviez ma préoccupation au moment où on a changé le périmètre comptable – et je suis d'accord avec vous, c'était une bonne chose de faire cette réforme de la comptabilité, ce n'est pas moi qui vais vous critiquer – j'ai été de ceux qui se sont opposés à la multiplication des fonds, etc. Mais, vous vous rappelez – et je vais revenir sur les régimes de retraite – il y avait un fonds sur les régimes de retraite qui était amorti sur, je pense, 13 ans. Il y a le Fonds des départs – je n'ai jamais su, assistés ou volontaires? je ne me rappelle plus. C'est «assistés»?

M. Léonard: Seize ans.

M. Gautrin: Seize ans, et il s'appelle «assistés»?

M. Léonard: C'est selon la règle qu'on appelle la règle de...

Le Président (M. Bissonnet): La parole est au député.

M. Léonard: Bien, il m'a posé une question.

Le Président (M. Bissonnet): Non, non, la parole est au député.

M. Gautrin: Non, non, excusez-moi, c'est parce qu'on...

Le Président (M. Bissonnet): Il va revenir à son tour. Si vous voulez poursuivre.

M. Gautrin: Excusez-moi. C'est parce qu'on échangeait cordialement, selon notre habitude.

Le Président (M. Bissonnet): C'est pour vous expliquer, M. le ministre, des fois, que ce n'est pas toujours facile. M. le député, la parole est à vous.

M. Gautrin: Alors, voyez-vous, si je reviens sur le Fonds des départs assistés, qui était – vous aviez raison de me corriger – amorti sur 16 ans... Bon, vous avez choisi à ce moment-là de ne plus imputer aux dépenses de chaque année l'amortissement de ce fonds mais de verser la totalité du coût à la dette, qu'on retrouve d'ailleurs dans la loi, qui était la loi n° 2 – d'ailleurs dans la loi n° 2, vous l'avez à l'Annexe de la loi n° 2, l'Annexe 2 de la loi n° 2 – et, si je ne me trompe pas, vous avez versé 13 907 755 000 $ à la dette.

Une voix: Incluant les régimes de retraite.

M. Gautrin: Oui, les régimes de retraite, c'est ça. Donc, essentiellement, le fait qu'on a comptabilisé... ce qui était avant dans le fonds, on l'a versé à la dette, c'est 13 907 000 000 $. Alors, moi, ce que je voudrais savoir: Le fait que vous avez donc augmenté la dette à ce moment-là, ça a été une augmentation de combien du service de la dette par rapport à ce qu'aurait été le calcul précédent, c'est-à-dire d'un amortissement, le seizième de cela, que vous auriez dû amortir cette année? Vous comprenez ma question? Autrement dit, je voudrais savoir: Ce jeu de périmètre comptable, combien ça a fait économiser au gouvernement?

M. Léonard: Le 13 000 000 000 $ lui-même, 13 900 000 000 $, qui a été versé... l'Annexe 2 de la loi n° 2...

3 M. Gautrin: Oui, absolument, il y a 13 907 000 000 $...

M. Léonard: ...

M. Gautrin: Attendez un instant. C'est ça. Je l'avais tout à l'heure, 13 907 755 700 $.

M. Léonard: M. le Président, le 13 907 000 000 $ n'était pas une dette inscrite, c'était une dette qui apparaissait toujours en note aux états financiers et que nous avons intégrée dans les états financiers.

M. Gautrin: Attendez. Un instant. Moi, ce que je voudrais savoir...

M. Léonard: Dans la dette du gouvernement.

M. Gautrin: ...au moment où le changement de périmètre comptable... On va revenir ensemble, hein. Le montant qui a été inscrit à la dette et qui, avant, se trouvait dans le Fonds des départs assistés...

Une voix: ...

M. Gautrin: Ah! c'est ça, essentiellement. Je croyais, à ma lecture de ça, qu'il s'agissait du 13 000 000 000 $ en question. Et ma question a été: Combien était le seizième de cela que vous auriez dû amortir sur cette année et combien l'augmentation du service de la dette vous a coûté? Autrement dit, comment le changement de comptabilité vous a permis d'économiser dans les états financiers?

M. Léonard: Oui, mais le fonds, c'était 2 000 000 000 $?

Une voix: ...

(18 h 20)

M. Léonard: Écoutez. Là, je vais vous donner les chiffres de mémoire, sous toute réserve. Je ne les ai pas ici. Le Fonds des départs assistés a coûté à la partie syndicale, du côté des réserves, l'utilisation de l'excédent des provisions actuarielles, 800 000 000 $ et quelques, 835 000 000 $ et quelque chose.

Par ailleurs, le gouvernement lui-même a assumé un coût d'environ 2 090 000 000 $ pour compléter ce que cela a coûté, d'autant plus qu'il devait mettre à l'origine 800 000 000 $, mais, le programme ayant connu plus de succès, ayant doublé, ça a coûté 2 000 000 000 $. Bon. Ce 2 000 000 000 $ est amorti sur 16 ans. Lui, il a été amorti sur 16 ans. Il était – l'ancienne comptabilité – amorti sur 16 ans.

M. Gautrin: L'ancienne comptabilité. Dans la nouvelle, il ne l'est plus.

M. Léonard: Il ne l'est plus parce que...

M. Gautrin: Il est versé à la dette.

M. Léonard: La dette. Il est passé complètement à la dette. Alors, là, vous retrouvez...

M. Gautrin: O.K. Mais, à ce moment-là, ça a augmenté de combien le service de la dette, par rapport à l'amortissement sur 16 ans? Autrement dit, vous comprenez, vous avez augmenté votre service de la dette, mais vous n'avez plus à amortir le seizième de ce montant-là. Alors, c'est le rapport entre les deux que je cherche.

(Consultation)

M. Léonard: Je vais vous donner deux chiffres, mais je ne suis pas sûr que c'est bon, ça.

M. Gautrin: Vous pourrez nous les transmettre plus tard.

M. Léonard: Oui. C'est parce qu'il n'y a pas juste...

M. Gautrin: Écoutez...

M. Léonard: En toute hypothèse, je vous réfère à la page 17 du budget 1998-1999, Réforme de la comptabilité gouvernementale, de l'an dernier, qui en tenait compte, à la page 17. Sur l'amortissement du fonds, de la dette de 2 000 000 000 $ sur 16 ans, ça, c'est une partie qui passait à la dépense. Mais l'intérêt sur une telle dette, qu'elle soit assumée par les Finances ou qu'elle soit assumée autrement, par le fonds du régime de retraite, ça l'est de toute façon.

M. Gautrin: Oui, oui, je sais. Écoutez. J'ai quelques petites questions qui arrivent. Vous avez annoncé une offre, quand même, aux tables de négociation, de hausses salariales. Est-ce qu'elles sont actuellement comptabilisées à l'intérieur du budget de dépenses?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Oui?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Vous me le garantissez?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: De chaque ministère?

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: Parce que certains de vos collègues semblent avoir répondu différemment.

M. Léonard: Sauf une chose. Chaque ministère, 1999-2000. Dans le cas de 1998-1999, c'est en bloc, au Trésor.

M. Gautrin: Si je comprends bien, 1999-2000, c'est dans les ministères, et pour ce qui serait des arrérages, c'est en bloc, au Trésor. C'est ce qu'on se dit actuellement.

M. Léonard: Un instant.

(Consultation)

M. Léonard: O.K. Pour 1999-2000, c'est prévu dans les crédits de la santé et de l'éducation. Pour 1999-2000, c'est pourvu. Mais, pour l'ensemble des autres ministères, c'est au Fonds de suppléance. Deuxièmement...

M. Gautrin: Donc, santé et éducation, c'est prévu parce que c'est des paiements de transferts, à ce moment-là. Pour 1999-2000, ils sont dans les ministères...

M. Léonard: Oui.

M. Gautrin: ...tandis que le reste, donc la SQ, par exemple, ne se trouve pas dans les budgets du... ils sont encore au Conseil du trésor.

M. Léonard: Non, ils sont au Fonds de suppléance. Et, en 1998-1999, parce qu'il y a un 1 % du 1er janvier au 31 mars, ils sont aussi au Fonds de suppléance.

M. Gautrin: C'est ça.

M. Léonard: Il y avait une correction d'un 7 000 000 $. J'en ai débattu l'autre jour avec le député. Il y a une correction de 7 000 000 $. La somme, c'est 49 000 000 $. C'est très facile à calculer, c'est global, c'est 1 % d'une masse salariale de 19 300 000 000 $ pour trois mois.

M. Gautrin: Les coûts de système, à la fois du réseau de la santé et du réseau de l'éducation, de manière qu'on puisse être en mesure de voir quand même... Est-ce que vous avez une idée de ce que c'est que les coûts de système actuellement pour le réseau de la santé et les coûts de système dans le réseau de l'éducation?

M. Léonard: Les coûts, oui, on a...

(Consultation)

M. Léonard: 170 000 000 $ à la santé, 228 000 000 $ à l'éducation, excluant les salaires.

M. Gautrin: L'éducation est plus importante actuellement en termes de coûts de système que la santé. C'est ça?

M. Léonard: Oui, c'est ça. Oui, oui.

M. Gautrin: Mais, ça, ça veut dire que vous excluez la RAMQ alors, probablement.

M. Léonard: Oui, ça exclut la RAMQ.

M. Gautrin: La RAMQ doit être exclue, parce que, autrement, ça ne balance pas dans votre affaire. Vous excluez la RAMQ, à ce moment-là, des coûts de système.

M. Léonard: Oui, ça exclut la RAMQ.

M. Gautrin: O.K. Est-ce que vous avez... Parce que, là, actuellement, dans les annonces qui ont été faites par le gouvernement – je ne reviendrai pas sur les détails – vous avez dit que vous allez nettoyer les déficits accumulés, particulièrement dans les régies régionales. Est-ce que vous avez une idée du montant des déficits accumulés actuellement dans le réseau de la santé?

M. Léonard: 700 000 000 $.

M. Gautrin: 700 000 000 $?

M. Léonard: 700 000 000 $. Mais là on saura le chiffre exact après la...

M. Gautrin: Mais, au 31 mars 1998, par rapport à 1999, c'est-à-dire savoir combien il y a eu de...

M. Léonard: Oui, mais on va savoir ça au 31 mars 1999, l'année n'est pas finie encore.

M. Gautrin: Mais, au 31 mars 1998, ça, vous devez le savoir.

M. Léonard: Un instant.

M. Gautrin: ...nous le transmettre à un moment ou à un autre.

(Consultation)

M. Léonard: Au 31 mars 1998, le déficit accumulé était, dans les établissements de santé en déficit, de 384 500 000 $ et, au 31 mars 1999, l'estimé, c'est qu'ils atteindraient 675 900 000 $.

M. Gautrin: La différence entre les deux, c'est ce qui serait...

M. Léonard: La différence est de 326 000 000 $ pour l'année.

M. Gautrin: Parfait. M. le Président, je pense comprendre qu'on finit à 18 h 30. Donc, j'ai encore...

Le Président (M. Bissonnet): Il vous reste encore deux minutes.

M. Gautrin: Il me reste deux minutes. Alors, très rapidement. Je vais revenir dans les variations de l'enveloppe de dépenses entre portefeuilles. Il y a un point qui m'a semblé bizarre. Je vois «personnes désignées par l'Assemblée nationale», et là il y a une compression de 56,8 %. Je suis au volume II, page 41: personnes désignées, budget de dépenses – ce n'est pas beaucoup, je suis bien d'accord – 42 000 000 $, et c'était 97 000 000 $. Alors, à moins que vous ayez tué le Protecteur du citoyen ou le Vérificateur général, qui vous ennuient trop, ou...

M. Léonard: Est-ce que vous vous souvenez qu'au mois de novembre il y a eu une élection?

M. Gautrin: Alors, ça, c'est les budgets... Vous allez me dire que les dépenses de... a été de la différence entre les deux? Le coût de l'élection a été entre les deux? Il est assumé complètement sur ce budget-là.

M. Léonard: Le coût de l'élection n'avait pas été mis dans les crédits parce qu'on ne pouvait pas savoir s'il y avait vraiment des élections durant l'année. Alors, il n'était pas provisionné. Donc, cette année, les dépenses ont été augmentées d'une somme de, mettons, 56 000 000 $. Aux crédits supplémentaires, il y en a 49 000 000 $. Oui, c'est ça.

M. Gautrin: Ça marche. Alors, si je comprends bien, comme vous ne provisionnez pas, vous ne pourriez pas faire de référendum cette année.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Merci.

M. Léonard: On prendra les coûts lorsqu'ils arriveront.

M. Gautrin: Ha, ha, ha!

M. Léonard: On n'a pas provisionné.

M. Gautrin: Merci.

M. Léonard: L'an passé, on n'a pas provisionné les élections; ça ne nous a pas empêchés de les faire.

M. Gautrin: Mais vous étiez obligés de les faire à un moment ou à un autre, hein.

(18 h 30)

M. Léonard: Non, non, mais on aurait pu les faire en 1999-2000. Ça aurait été mieux, même, après avoir fait le déficit zéro un an plus tôt que prévu, avoir équilibré nos comptes et avoir assuré aussi... fait tout ce qu'on a fait. Depuis l'élection, il s'est fait des choses très positives pour le Québec.

Alors, voilà, nous avons ces crédits, cette année, qui sont des crédits raisonnables...

M. Gautrin: Ha, ha, ha!

M. Léonard: ...très raisonnables.

Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Merci, M. le député de Verdun. La commission plénière ayant terminé cet échange, je remercie les personnes qui y ont participé. Alors, ceci met donc fin à l'étude des crédits provisoires pour l'année financière 1999-2000.


Adoption des crédits

Est-ce que ces crédits provisoires sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. La commission plénière ayant accompli son mandat, je remercie les personnes qui y ont participé.

M. Léonard: Est-ce que je peux remercier...

Le Président (M. Bissonnet): Oui, oui, allez-y.

M. Léonard: ...avant que vous fermiez cette commission, tous les fonctionnaires et tous ceux qui ont contribué à l'élaboration de ces crédits, y compris les membres de mon cabinet? Vous voyez qu'ils sont de très grande qualité, ces crédits, à tout point de vue...

Le Président (M. Bissonnet): Merci.

M. Léonard: ...sur la forme et sur le contenu.

Le Président (M. Bissonnet): Ça va, ça va. Merci, M. le ministre. Alors, la commission plénière ayant accompli son mandat, je remercie les gens qui y ont participé et je suspends les travaux pour qu'on puisse poursuivre les travaux.

(Suspension de la séance à 18 h 31)

(Reprise à 18 h 32)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez vous asseoir. Mme la présidente de la commission plénière.

Mme Loiselle (présidente de la commission plénière): Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de vous faire part que la commission plénière a étudié les crédits provisoires pour l'année 1999-2000 et qu'elle les a adoptés sur division.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la présidente de la commission plénière. Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Projet de loi n° 14


Présentation, adoption du principe et adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le ministre de la Solidarité sociale, au nom de M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances, propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi n° 14, Loi n° 2 sur les crédits 1999-2000, qu'elle en adopte le principe et qu'elle adopte le projet de loi proprement dit. Cette motion est-elle adoptée? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Vote nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le vote nominal est demandé. Il y a cinq députés. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Sans surprise, M. le Président. Conformément à l'article 223 de notre règlement, je vous demande de reporter le vote aux affaires courantes de demain, le mercredi 31 mars 1999.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, le vote sur le projet de loi n° 14, Loi n° 2 sur les crédits, aura lieu demain aux affaires courantes.

M. Paradis: M. le Président, j'ai été informé que les députés étaient tous présents dans l'enceinte de l'Assemblée nationale, autant du côté ministériel que de l'opposition. À moins qu'on ne soit pas prêt à voter ces crédits.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, le vote est reporté.

M. Boisclair: ...le député a suffisamment d'expérience et de respect pour les institutions démocratiques pour comprendre que nous sommes réunis en caucus et que...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le leader. Le vote est reporté à demain aux affaires courantes. Alors, ceci met fin aux travaux de cette Assemblée.


Débats de fin de séance


Mobilité de la main-d'oeuvre dans le domaine de la construction entre le Québec et l'Ontario

Nous avons cependant trois débats de fin de séance. Le premier débat de fin de séance est une demande de M. le député de Papineau à Mme la ministre du Travail concernant la mobilité de la main-d'oeuvre entre le Québec et l'Ontario dans le domaine de la construction. Alors, les temps de parole: M. le député qui demande ce débat de fin de séance, cinq minutes; cinq minutes à la ministre; et deux minutes de droit de réplique. Ce sont des temps de parole qui sont restrictifs. M. le député de Papineau.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Nous avons demandé un débat de fin de séance... Comme je le disais à la période de questions cet après-midi, depuis deux semaines, nous, les gens de l'Outaouais, les représentants, les députés libéraux sont inquiets de la manière que le gouvernement a en main le dossier de la mobilité des travailleurs. On est au milieu d'une tempête et on ne réalise pas, de l'autre côté, qu'il y a 6 000 emplois en jeu, ce qui veut dire 15 000 personnes qui sont touchées par le travail de ces personnes-là qui travaillent du côté de l'Ontario. Le vrai problème, que Mme la ministre ne comprend pas...

Une voix: ...

M. MacMillan: ...et voilà, c'est qu'il faut protéger les emplois des gens qui travaillent en Ontario. Il y en a de 3 500 à 6 000, qu'on me dit. Ce ne sont pas les faits exacts. C'est ça, le problème.

On dit qu'il y a une entente depuis 1996, M. le Président, mais, dans la vraie vie, c'est autre chose. Ce n'est pas ça. Ça ne se passe pas comme ça. Sur un côté, il y a de 400 à 1 000 personnes qui travaillent, qui disent qu'elles veulent venir travailler au Québec, et, à cause des lois, de la loi des cartes de compétence, nous, de ce côté-ci, en 1993, avons formé un comité sur la construction qui avait recommandé de déréglementer le résidentiel, et on l'a fait.

Suite à ça, M. le Président, la loi 142 a été abolie par le gouvernement actuel, et vous comprenez pourquoi: leurs amis des syndicats du Québec. Encore, il y a eu une réunion dernièrement où Mme la présidente était présente, et il y avait des représentants des syndicats qui étaient là, à cette rencontre-là. Et, à ma grande surprise, ce n'étaient même pas les gens de l'Outaouais qui sont payés par ces grands et gros syndicats là: la FTQ, la CSN, pour ne pas les nommer, ont envoyé des gens de Montréal pour venir défendre l'Outaouais. De 3 000 à 6 000 personnes qui travaillent, il n'y a personne qui les protège, ces gens-là. Il y a une association qui s'appelle l'ADT, l'Association des droits des travailleurs de l'Outaouais, dont M. Jocelyn Dumais en est le président; eux les défendent très bien. Ils défendent les gens qui travaillent du côté de l'Ontario. Ces gens-là n'ont même pas le droit de venir travailler chez nous, M. le Président. Ils n'ont pas de carte de compétence. Ça, le débat n'est pas là. Qu'on laisse, pour le moment, tranquilles ces gens-là qui travaillent de l'autre côté de la rivière.

Pourquoi on empêcherait ces gens-là de travailler? Depuis 1960, M. le Président, que ces gens-là – pas tous les gens, pas tous les travailleurs – travaillent du côté de l'Ontario sans aucun problème. Sans aucun problème! Tout à coup, tout le monde a des problèmes. On veut mettre des barrières. Pourquoi? On ne s'en occupe pas, M. le Président. Mme la ministre est venue dans l'Outaouais. Elle a rencontré l'ACO, l'Association de construction de l'Outaouais, l'APCHQ, la Chambre de commerce, le président de la CUO. Pas aucune invitation des cinq élus, qui sont élus puis qui représentent ces gens-là de l'Outaouais, puis personne de ces travailleurs-là autonomes, ces travailleurs-là qu'on baptise chez nous des «sans-papier», M. le Président, des «sans-papier», parce que ces gens-là, à cause de la rigidité de la construction du Québec, la CCQ, la fameuse CCQ, grâce à eux, ces gens-là sont obligés de travailler l'autre côté de la rivière, puis il n'y a personne qui les achale.

Puis là, soudainement, on veut barrer tous les ponts. Et les ponts, c'est le cas de le dire, M. le Président... ces gens-là, dorénavant, à partir du 1er avril, n'auront plus le droit, semble-t-il, d'aller là, s'il y a des négociations qui se font entre les deux gouvernements.

Et on apprend aujourd'hui, suite à nos questions, suite aux questions de notre chef qui a demandé au premier ministre du Québec de s'en occuper... On commence à se poser la question: Qui est le vrai boss? Mais, ça, on le savait, il y a une personne qui mène tous ces ministres-là de l'autre côté de cette Chambre-là, puis c'est M. Bouchard... c'est le député de Jonquière, excusez.

Alors, on se pose la question de ce côté-ci, M. le Président: Qui va prendre soin ou va protéger ces 6 000 travailleurs-là? Il n'y a personne qui est capable, qui veut les protéger, ici, à l'Assemblée nationale. On forme des comités bidon, on annonce ça pour nous calmer un petit peu, puis, après ça, on ne fait aucune réunion. Alors, on condamne la manière dont ce gouvernement-là prend soin de 6 000 travailleurs. Il n'y a personne qui est porte-parole, à part les députés libéraux de l'Outaouais et notre chef, Jean Charest. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Papineau. Mme la ministre du Travail, la parole est à vous.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, merci, M. le Président. D'abord, la première chose, c'est que la tempête à laquelle le député de Papineau fait allusion n'a pas été provoquée par le Québec mais bien par l'Ontario. Parce que, en 1996, le Québec et l'Ontario ont signé dûment et en haut lieu une entente pour augmenter la mobilité de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction entre l'Ontario et le Québec. Cette entente-là prévoyait un certain nombre de choses. D'abord, cette entente-là est arrivée à résoudre un certain nombre de difficultés entre le Québec et l'Ontario et elle prévoyait également, comme toute entente de ce genre, un certain nombre de mécanismes pour résoudre d'autres difficultés qui pourraient se poser.

(18 h 40)

Parmi ces mécanismes, il y a un comité bipartite, et c'est un mécanisme assez normal dans ce genre d'entente. On peut imaginer que, dans les accords de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, il y a ce genre de mécanisme là aussi. Donc, il y a eu un comité bipartite qui a été prévu, qui s'est réuni à plusieurs reprises et de manière très intense – très intense – depuis le mois de décembre, parce que, depuis le mois de décembre, pour une raison qui m'échappe, tout d'un coup des difficultés nouvelles sont apparues.

Il faut comprendre, M. le Président, que l'objet de l'entente est d'augmenter la mobilité de la main-d'oeuvre entre le Québec et l'Ontario et non pas de résoudre tous les problèmes du monde qui existent entre l'Ontario et le Québec. Une des difficultés actuellement, c'est que l'Ontario change les règles du jeu. Par rapport à l'entente, l'Ontario introduit des sujets dont il n'avait jamais été question, et ça complexifie considérablement la résolution de ces situations-là.

J'ai effectivement personnellement mis beaucoup d'efforts dans ce dossier-là. Je suis allée dans l'Outaouais il y a une dizaine de jours et j'ai rencontré des intervenants pertinents du milieu. Il y avait là des gens de tous les niveaux – oui, malgré le langage non verbal du député, il y avait là des gens de tous les niveaux – et nous avons effectivement convenu de mettre en place un comité formé de représentants de la région pour tenter de mieux faire saisir toute la portée de l'entente auprès du Québec et de l'Ontario.

Ce comité va se réunir la semaine prochaine, parce que j'ai laissé le choix aux intervenants, aux grands secteurs, de désigner leurs propres représentants. Ce qu'ils ont fait. La liste de ce comité est maintenant connue, et je pense que les gens qui ont été identifiés vont nous aider à avancer dans la résolution des problèmes.

Par ailleurs, M. le Président, je suis un peu étonnée que le député de Papineau défende autant un élément de ce dossier: la question des travailleurs qui n'ont pas de carte de compétence. Et je pose la question: Qui le député de Papineau et qui le chef de l'opposition officielle défendent-ils? Est-ce qu'ils défendent le Québec ou l'Ontario?

Je pense qu'il faut réaliser qu'au fil des ans, au Québec, nous avons réussi à mettre la paix dans le secteur de la construction parce qu'on s'est donné des règles du jeu. Je pense aussi que les Québécois et les Québécoises s'attendent que les gens qui vont construire leurs maisons et construire les édifices et qui travailleront dans différents chantiers seront capables de démontrer qu'ils ont un minimum de compétence. Nous avons donc un système qui reconnaît, pour un certain nombre de métiers, que les gens ont des compétences pour exercer leur métier dans la construction.

Alors, quand le député de Papineau s'insurge du fait que des travailleurs québécois réclament de travailler alors qu'ils n'ont pas de carte de compétence, je suis extrêmement étonnée, parce que, pour moi, ce n'est pas défendre le Québec, c'est défendre l'Ontario.

En terminant, M. le Président, c'est bien évident qu'à ce moment-ci, comme c'est une entente qui a été négociée en haut lieu, il est tout à fait normal et souhaitable que les deux premiers ministres fassent le point dans les prochaines heures – c'est ce qu'ils vont faire – et que par la suite nous puissions retrouver un climat qui va nous permettre d'aller au bout de ce processus-là le plus sereinement possible. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, Mme la ministre du Travail. Alors, en vertu de votre droit de réplique de deux minutes, M. le député de Papineau, la parole est à vous.


M. Norman MacMillan (réplique)

M. MacMillan: Merci, M. le Président. On vient de faire la preuve que Mme la ministre ne comprend pas le dossier du tout. J'ai parlé de carte de compétence, puis, au Québec, on l'a toujours accepté, ça. C'est 6 000 travailleurs qui travaillent en Ontario, qui demeurent au Québec. 200 000 000 $ de revenus pour le Québec: c'est ça qu'on veut défendre. Ce n'est pas la carte de compétence puis vos syndicats qui vous disent quoi dire ici, à l'Assemblée nationale, à tout bout de champ. C'est eux qui vous mènent, ce n'est pas les travailleurs. Vous ne défendez pas les travailleurs du Québec, les travailleurs du Québec qui demeurent dans l'Outaouais.

Vous ne comprenez pas le dossier, Mme la ministre. Je m'excuse, M. le Président, mais vous insultez ces gens-là qui travaillent et qui paient des impôts au Québec. Puis, depuis 1960 que ça se passe, là, tout d'un coup, vous voulez mettre des règlements, comme de dire: Ils n'ont pas leur carte de compétence. Bien, ça, c'est ne pas comprendre qu'est-ce qui se passe chez nous. Ces gens-là travaillent 40 heures, 50 heures par semaine, 52 semaines par année du côté de l'Ontario. Les travailleurs du Québec, du côté du Québec, ne sont même pas capables de travailler autant que ça.

C'est vraiment de ne pas comprendre. Et je me répète: des comités bidon, des gens qui sont impliqués ne sont même pas à la table. Puis là, parce qu'on a posé la question aujourd'hui, vous décidez de faire une réunion. Le 1er avril, c'est demain. C'est demain, le 1er avril, puis il n'y a aucune entente sur la table. Alors, hein! Ou après-demain. Parfait! C'est parce que vous ne le savez pas, mais ils vont annoncer des affaires demain, je vous avertis. On trouve ça drôle, M. le Président, mais il y a 6 000 personnes, carte de compétence ou pas, ces gens-là sont choisis pour travailler en Ontario parce qu'ils sont compétents, les gens du Québec, pour travailler en Ontario. Puis c'est eux qu'on va défendre. Vous ne comprenez même pas c'est quoi, le dossier. Lâchez de parler aux syndicats du Québec, Mme la ministre.


Disponibilité des places à 5 $ dans les garderies

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ceci met fin à ce débat de fin de séance. Nous avons un deuxième débat de fin de séance, avec M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, suite à une question qu'il a posée aujourd'hui à la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance concernant le nombre de places en garderie. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, la parole est à vous.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. La situation est fort simple. Ce n'est pas difficile à comprendre. Ce n'est pas compliqué. C'est très clair. Pendant la campagne électorale, le chef du Parti québécois, le premier ministre du Québec, a promis que tous les enfants de moins de cinq ans seront admissibles dès l'an 2000 aux garderies à 5 $. C'était la promesse du premier ministre du Québec, chef du Parti québécois, avant les élections pour se donner des manchettes dans les journaux: Le premier ministre accélère le programme des garderies. Tous les enfants de moins de cinq ans auront accès aux places à 5 $ en septembre 2000. C'était avant les élections, M. le Président.

Lors de son discours inaugural, le premier ministre a repris les mêmes propos. Puis là on nous sert des sermons comme quoi un discours inaugural, il faut que ça reflète les engagements pris lors d'une campagne électorale. Oui, mais il faut que ça reflète la réalité aussi, parce que, si ça ne reflète pas la réalité, les engagements, on peut les appeler autrement, dans un langage parlementaire que je ne peux pas utiliser ici. Vous le savez. Mais quelque chose qui est promis et qui n'est pas livré, ça a un nom dans la vraie vie. Quand mes enfants à moi ne disent pas la vérité, je leur dis: Vous avez menti, mes enfants. M. le Président, des promesses non respectées, ça a à peu près le même effet.

Lors du discours inaugural, le premier ministre l'a dit main sur le coeur – je le cite – qu'il est «pour accélérer le calendrier d'implantation des garderies à 5 $ pour faire en sorte que les enfants de tous les âges soient admissibles au programme dès septembre 2000». L'engagement du premier ministre, M. le Président.

Maintenant, les faits. Le Bureau de la statistique du Québec termine un vaste sondage auprès des parents, qui donne la conclusion suivante. La conclusion, même, M. le Président, est endossée par le ministère de la Famille et de l'Enfance, que ça va prendre 100 000 places de plus pour respecter la promesse du premier ministre. Ce n'est pas moi qui invente le chiffre, c'est le ministère de la Famille et de l'Enfance, en travaillant avec le Bureau de la statistique du Québec, qui a décidé que ça prend 100 000 places de plus pour que les familles québécoises puissent vraiment avoir accès aux garderies à 5 $, M. le Président.

Or, dans les crédits de cette année, on prévoit le développement de 18 000 places, 18 000 sur 100 000 qu'il faut en septembre 2000. Petit calcul mathématique, M. le Président: 100 000 moins 18 000, ça donne 82 000 places nécessaires pour arriver à respecter la promesse du premier ministre pour le 1er septembre 2000.

(18 h 50)

M. le Président, c'est très clair, là, c'est impossible de respecter cette promesse-là. C'est impossible au niveau des coûts; les crédits ne sont pas là et ne seront pas là d'ici le 1er septembre pour respecter cette promesse-là. On parle de centaines de millions de dollars. La capacité du réseau n'est pas là pour absorber dans un an un autre 100 000 places. C'est impossible. Tous les observateurs vont vous dire la même chose. Même la ministre va être d'accord avec moi, que le réseau ne peut pas accepter 100 000 enfants d'ici le 1er septembre 2000. C'est physiquement impossible. Il n'y a pas assez d'éducatrices pour répondre aux besoins, et ce, parce que les salaires sont tellement minimes qu'il va y avoir une pénurie bientôt.

C'est très clair, soit les prévisions du Bureau de la statistique du Québec et du ministère de la Famille et de l'Enfance ne sont pas exactes ou soit le premier ministre du Québec, quand il a lancé cette idée, cette promesse, cet engagement que tous les enfants seront éligibles dès septembre 2000... il y a soit l'un ou l'autre qui est fautif, M. le Président, fautif. C'est clair, le premier ministre a induit la population en erreur, la ministre continue d'induire la population en erreur en disant que c'est disponible pour tout le monde. Le BSQ démontre que c'est soit disponible pour un sur cinq ou un sur trois. Le ministère de la Famille répond: C'est une sur trois des familles qui y a accès. Là, un sur trois, ce n'est pas tout le monde. Le premier ministre ne peut pas respecter sa promesse, et c'est très grave, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, je cède maintenant la parole à Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance. Mme la ministre, la parole est à vous.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: M. le Président, j'ai demandé à mon ministère de la Famille et de l'Enfance de mener une enquête sur les besoins de garde des familles québécoises afin de mettre à jour les données qui avaient été recueillies en 1989 et en 1993. C'est donc la première enquête sur les besoins des parents depuis l'implantation des places à contribution réduite, c'est-à-dire les places à 5 $.

L'enquête a été réalisée par le Bureau de la statistique du Québec, le BSQ, en collaboration avec le ministère. Elle a été menée entre le 3 août et le 26 septembre 1998 auprès de 9 000 parents d'enfants de moins de 12 ans, avec un taux de réponse de 61 %. Cette enquête visait à connaître l'impact de la politique familiale sur l'utilisation des services de garde, l'utilisation actuelle des services, ainsi que les besoins et les préférences des parents pour les divers modes de garde, c'est-à-dire la garde en garderie ou en milieu familial pour les enfants d'âge préscolaire et la garde en milieu scolaire pour les enfants qui vont à l'école.

M. le Président, l'enquête nous apprend notamment que près de la moitié des enfants de moins de 12 ans se font garder de façon régulière en raison du travail ou des études de leurs parents. Par ailleurs, 29 % des parents travaillent de façon occasionnelle ou selon un horaire irrégulier et, dans 87 % des cas, ils font garder leurs enfants dans leur domicile ou dans une autre famille. On y apprend également que 2,2 % des parents font garder leurs enfants en dehors des heures habituelles, de soir, de nuit ou la fin de semaine.

Je suis heureuse, M. le Président, que M. le député de Notre-Dame-de-Grâce me donne l'occasion de dire à ces parents que j'ai demandé à mon ministère de trouver des solutions pour permettre aux centres de petite enfance d'offrir des services selon des plages horaires non usuelles. J'ai d'ailleurs l'intention, M. le Président, de déposer un projet de loi qui permette de faire des projets-pilotes pour déterminer les règles de sécurité et de financement adaptées à ce type de garde.

En ce qui concerne la préférence des parents, la tendance observée au cours des enquêtes antérieures se maintient. La préférence des parents pour la garde régie par le ministère augmente et varie selon l'âge des enfants. Les résultats indiquent en effet qu'à coût égal les parents québécois privilégient la garde dans un milieu familial pour les enfants de zéro à deux ans et qu'ils préfèrent la garderie pour les enfants de trois à quatre ans. Pour les enfants de cinq ans et plus, ils choisissent la garde en milieu scolaire, et pour la garde durant l'été, la garde de type camp de jour ou camp de vacances.

On note, M. le Président, que 66 % des parents québécois identifient la qualité des services comme premier critère dans le choix d'un service de garde. Je suis heureuse d'informer mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce que l'enquête confirme ce que l'on avait observé depuis l'implantation de la politique familiale: les places à contribution réduite entraînent une augmentation de la demande des services de garde régis. Ainsi, la majorité des parents, 52 %, dont les enfants de moins de cinq ans se font déjà garder changeraient leur mode de garde actuel pour bénéficier d'une place à 5 $ par jour. De plus, la politique familiale inciterait la moitié des parents qui ne font pas garder leurs enfants de cet âge à utiliser les services de garde. En intégrant ces nouvelles données au calcul de l'estimation des besoins en nouvelles places en services de garde, on constate que nous devons développer 100 000 nouvelles places pour répondre aux besoins exprimés par les familles du Québec.

Il faut tout d'abord rappeler que la politique familiale est une politique qui se déploiera sur cinq ans. Mon objectif est de créer 200 000 places en services de garde d'ici 2006 et que les enfants de tous âges aient accès à des places à 5 $. Les places à 5 $ ont suscité un tel engouement chez les parents que nous avons accéléré le rythme. Alors qu'auparavant on créait environ 2 500 places par année au Québec, dans le temps de l'opposition, cette année, nous en créons 15 000, et l'an prochain, 20 000. Par la suite, nous créerons environ 13 000 nouvelles places par année jusqu'en 2006. Alors, je m'engage à maintenir un rythme accéléré afin d'offrir aux parents et aux enfants du Québec des places dans un environnement sécurisant, sécuritaire et de qualité. Je suis persuadée qu'ensemble nous saurons atteindre l'objectif de 200 000 places d'ici 2005-2006 et ainsi mieux répondre aux besoins des parents.

M. le Président, en matière de services de garde, le bilan des libéraux, lorsqu'ils étaient au pouvoir, est lamentable, et je pèse mes mots. Je vous rappelle que, lorsqu'ils étaient au pouvoir, les libéraux créaient 2 500 places par année, alors que nous en avons créé six fois plus cette année. Alors, pouvez-vous vous imaginer, M. le Président, que les libéraux ont voté contre la politique familiale, lorsqu'on sait qu'il s'agit de l'une des plus belles réussites du gouvernement du Parti québécois et qu'elle fait l'unanimité chez les Québécois? Cela démontre encore une fois le manque de courage des libéraux...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée. Mme la ministre. Mme la ministre, je m'excuse, c'est terminé. Non, je ne peux pas. C'est terminé, Mme la ministre.

Alors, je voudrais céder la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce, en vertu de son droit de réplique de deux minutes. M. le député, la parole est à vous.


M. Russell Copeman (réplique)

M. Copeman: M. le Président, je prends acte de plusieurs choses, dans les cinq minutes de la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance. Premièrement, elle accepte que ça prend 100 000 nouvelles places pour satisfaire aux besoins. C'est très bien. En deuxième temps, elle avoue que ça va prendre au gouvernement jusqu'à l'an 2006 pour satisfaire à cette demande.

M. le Président, je regrette, l'engagement de son premier ministre n'était pas d'arriver à l'an 2006 pour combler les besoins, il était d'arriver dès septembre 2000: tous les enfants seront admissibles en l'an 2000. M. le Président, il y a un écart de six ans dans la pensée de la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance. Elle nie complètement, elle renonce, elle renonce complètement à une promesse électorale, à une promesse dans le discours inaugural que tout le monde a compris, que tout le monde sera éligible dès septembre 2000. Là, c'est 2006, M. le Président.

Qu'est-ce qui est arrivé entre l'élection et aujourd'hui qui fait en sorte que la ministre déléguée avoue devant cette Chambre qu'elle n'est pas capable de respecter la promesse de son premier ministre? C'est très grave, ça, M. le Président. C'est excessivement grave.

Et ce n'est pas des chiffres lancés en l'air, M. le Président, il s'agit des parents qui attendent des places aujourd'hui. Il y a 600 personnes dans le quartier de Notre-Dame-de-Grâce qui sont en attente de places dès septembre de cette année. Pas en l'an 2006. Pas pendant que mes enfants seront à l'école primaire ou secondaire, ou collégiale, ou universitaire, cette année, ils attendent déjà des places.

La ministre vient d'avouer qu'ils vont attendre encore plus longtemps et elle renie complètement l'engagement de son gouvernement par la voix de son premier ministre...


Mesures de protection de la forêt publique

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Nous avons maintenant également un troisième débat de fin de séance, à la demande de Mme la députée de Bonaventure suite à une question aujourd'hui qu'elle a posée au ministre des Ressources naturelles concernant la gestion de la forêt québécoise. Mme la députée de Bonaventure, la parole est à vous.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, cet après-midi, comme vous y avez fait référence dans votre introduction justement, j'ai eu l'occasion d'interroger le ministre des Ressources naturelles sur le contenu du film réalisé par Richard Desjardins.

D'entrée de jeu, je tiens à préciser que mon intervention visait principalement à m'enquérir auprès du ministre des moyens qui sont mis en oeuvre pour assurer que l'exploitation forestière puisse se poursuivre dans un cadre qui assurera la pérennité de la ressource et, conséquemment, de l'industrie et des emplois qui en découlent.

(19 heures)

La réponse que nous a fournie le ministre cet après-midi, M. le Président, est choquante et, j'ajouterais, décevante. Le ministre a banalisé la situation en affirmant, et je le cite, que «la donnée essentielle de ce film n'est pas fondée». Dans un premier temps, il nous a indiqué que le régime forestier est dénoncé à tort par Richard Desjardins.

M. le Président, une image vaut mille mots. Pour ceux et celles qui ont visionné le film L'Erreur boréale , plus d'une image, plus d'un chantier ont démontré que la réalité est tout autre que celle que tente de nous présenter le ministre. Je rappelle d'ailleurs au ministre que le journal Le Quotidien , un journal qu'il connaît bien puisque c'est un journal de sa région, rapportait, le 20 mars dernier, et je prends la peine de citer l'extrait du journal: «Pendant que 500 Québécois du milieu littéraire célèbrent Le printemps du Québec à Paris , 2 000 Saguenéens et Jeannois crient leur détresse après avoir visionné le film L'Erreur boréale du chanteur Richard Desjardins.»

Dans un deuxième temps, M. le Président, le ministre a voulu nous faire croire qu'il possédait suffisamment de données et de contrôles pour affirmer que la forêt québécoise se régénère soit naturellement, soit par la voie du reboisement. Le ministre n'est pas sans savoir que le logiciel Sylva, que son ministère utilise pour faire des projections sur 120 ans ou encore sur 150 ans, est du même type que celui qui a assuré la gestion de la morue dans l'Atlantique. Je suis convaincue qu'il y a une cloche qui s'allume dans la tête du ministre lorsqu'on parle de gestion de la morue dans l'Atlantique. Alors, M. le Président, on voit, bien sûr, ce que ça a donné, et je suis très bien placée, évidemment, pour vous en parler. Il est donc totalement irresponsable de la part du ministre de se contenter uniquement de planification virtuelle alors que 70 000 emplois directs et 10 000 000 000 $ de revenus d'exportation par an dépendent d'une gestion intelligente de la ressource.

Troisièmement, M. le Président, le ministre nous a dit cet après-midi: Une forêt reboisée, ça aussi, ça fait partie de la réalité. Je suis bien d'accord avec lui, sauf que la réalité, c'est celle-ci, et j'espère que le ministre la connaît. Dans le film de Richard Desjardins, on nous apprend donc la stratégie de la nature mais pas celle du forestier. Le film nous démontre qu'à l'usage les techniques de reboisement utilisées n'ont pas forcément le dessus sur la nature et que l'on n'obtient pas nécessairement les résultats escomptés, malheureusement. J'aimerais également rappeler au ministre que le développement de la région qu'il représente, tout comme la mienne ainsi que l'ensemble des régions ressources du Québec, est directement relié à un développement harmonieux et rentable du patrimoine forestier.

Le ministre cet après-midi a voulu prendre prétexte du type de forum que représente la période de questions pour répondre, somme toute, des banalités. Il devait commenter auprès des médias à 13 h 30, cet après-midi; il ne l'a pas fait. Il devait également commenter vers 18 heures, mais il ne l'a toujours pas fait, prétextant que des raisons incontrôlables l'empêchaient de faire part de sa position publiquement sur cette importante question de la gestion de nos forêts.

M. le Président, je suis inquiète. Du côté de l'opposition, nous sommes inquiets du manque de sérieux avec lequel le ministre aborde cette question et gère la problématique. Les intervenants du secteur forestier et du milieu environnemental méritent mieux que ce que leur offre le ministre. Il est temps que le ministre accepte la réalité, qu'il prenne ses responsabilités et tienne un discours clair. La population du Québec et l'industrie doivent être informées des mesures que le gouvernement entend prendre pour assurer la pérennité de la ressource, de l'industrie et des emplois qui en découlent. C'est une question extrêmement sérieuse dont nous discutons cet après-midi. Merci beaucoup.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Bonaventure. Alors, M. le ministre des Ressources naturelles, la parole est à vous.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui, M. le Président, c'est vrai que c'est une question très sérieuse, parce qu'il s'agit d'une industrie qui emploie autour de 80 000 personnes au Québec. C'est la branche de l'économie qui constitue 20 % de nos exportations, sans compter les emplois directs et indirects. Alors, c'est sûr qu'il faut prendre ça au sérieux. Il y a plus de 200 municipalités qui vivent de l'industrie forestière, dont l'économie dépend presque exclusivement de l'industrie forestière. Il y a des régions entières, la mienne, la Gaspésie, oui, sans doute aussi l'Abitibi, qui dépendent de l'industrie forestière. Alors, il faut prendre ça au sérieux, c'est bien évident.

Il y a un régime forestier qui est en vigueur depuis plus de 10 ans. Il a été adopté unanimement à cette Assemblée nationale en vertu d'une loi que le gouvernement d'alors, le gouvernement libéral de M. Bourassa, a présentée. On l'a adopté unanimement. D'ailleurs, ça c'était enclenché vers la fin du deuxième mandat de M. Lévesque.

C'est un régime forestier qui constitue un net progrès. Dans le film de Richard Desjardins, il donne l'impression ou il prétend que ce nouveau régime forestier est pire que l'ancien. Mais l'ancien, c'est le régime des concessions forestières. Là, on était vraiment dans le féodalisme forestier, les barons de la forêt. Alors, la loi de 1987 constitue un progrès en matière de gestion de nos forêts parce que désormais les entrepreneurs auront – ce qui n'était pas le cas auparavant – des responsabilités en matière d'aménagement et de gestion, pas uniquement des responsabilités en matière de récolte de la matière ligneuse.

Et il y a eu des progrès considérables en cette matière. D'abord, du reboisement, il s'en fait de façon soutenue. Bon an, mal an, on plante autour de 100 000 000 de plants en forêt, et, selon les chercheurs et selon d'ailleurs les vérifications, le taux de survie des plants approche les 90 %. Pour le reste, on compte sur la régénération naturelle, parce que la forêt boréale a ceci de particulier qu'elle se régénère de façon exceptionnelle. Que ce soit après un feu, ou après un chablis, ou après une épidémie de la tordeuse de bourgeon de l'épinette, ou encore après une coupe, elle a une capacité extraordinaire de se régénérer. Mais, là où ça manque, là où la régénération n'est pas là, il faut à ce moment-là planter. Également, depuis quelques années maintenant, on fait ce qu'on appelle de la coupe précommerciale, de l'éclaircie, de la coupe d'éclaircie parce que ça pousse trop. Quand une forêt qui s'est régénérée a atteint 10 à 15 ans, on constate que ça pousse trop dru, et il faut éclaircir, il faut en couper pour permettre aux meilleures tiges de croître plus rapidement.

Alors, en matière de travaux sylvicoles, on a progressé considérablement, et ce n'est pas vrai que c'est virtuel, la forêt québécoise. Les inventaires qu'on fait... À chaque 10 ans, on fait un inventaire exhaustif de la forêt québécoise et on en arrive, là, à un inventaire décennal. Savez-vous combien de relevés terrains on a pris, là – ce n'est pas juste en pitonnant sur l'ordinateur? On a 92 000 relevés terrains. Ça, il faut aller sur le terrain puis faire l'analyse du sol, mesurer les tiges, également les dimensions. C'est à partir de ces inspections terrains qu'on en arrive à déterminer l'inventaire de la forêt.

Et, moi, quand je disais cet après-midi que le film ne donnait qu'un côté de la réalité, c'est vrai. C'est vrai. Oui, les images sont parlantes, oui, éloquentes. Mais les seules images du film – c'est très sélectif – c'est des territoires de coupes récentes. Où sont les images, dans le film, d'une forêt de 15 ans, d'une forêt de 20 ans, d'une forêt de 25 ans, d'un parterre qui a été reboisé au bout de cinq ans, six ans? Aucune. Il n'y en a pas du tout. C'est très partial et c'est très sélectif. Et, évidemment, à ce moment-là, ça projette une image, je dirais, très négative de la façon dont les Québécois gèrent la forêt. Et je trouve ça malheureux, surtout à cause des répercussions que ça peut avoir à l'étranger auprès de nos compétiteurs.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. En conformité de votre droit de réplique de deux minutes, Mme la députée de Bonaventure, la parole est à vous.


Mme Nathalie Normandeau (réplique)

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, je suis très heureuse que le ministre souligne que la loi adoptée en 1987 constitue un progrès, contrairement à ce qu'il affirmait cet après-midi.

M. Brassard: Non, non, non, non.

Mme Normandeau: Le gouvernement libéral, après 1987, ne s'est pas arrêté là. En 1994, sept ans après la mise en place du nouveau régime et à la suite d'audiences tenues par le BAPE – c'est important de le souligner – le ministre libéral de l'Énergie de l'époque a rendu publique une nouvelle stratégie de protection des forêts qui réduisait les superficies maximales de coupes et qui remplaçait les coupes à blanc par des coupes sélectives.

Le ministre devrait parler à son collègue de l'Environnement, qui affirmait cet après-midi, et je le cite, que, «dans le film, on voit des choses qui sont préoccupantes». Il devrait aussi parler aux gens de son ministère qui ont admis que presque la moitié des plans d'aménagement ne sont pas conformes aux exigences et qu'ils ne possèdent pas d'indicateurs pour évaluer l'efficacité des travaux d'aménagement. La désinvolture, M. le Président, du ministre m'étonne, surtout au moment où on murmure, au ministère, que la préparation de la réplique – qui n'est toujours pas venue – aurait mobilisé, à des degrés divers, plus d'une cinquantaine de personnes.

(19 h 10)

M. le Président, devant tant d'improvisation et d'inaction, il est impératif que l'ensemble des intervenants soient consultés en commission parlementaire, et nous en formulons aujourd'hui formellement la demande en cette Chambre. L'audition d'organismes du milieu nous ramènerait au consensus de 1994 et permettrait que le régime forestier en élaboration soit respectueux des intérêts des industriels, des travailleurs de la forêt, des environnementalistes et des écologistes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Bonaventure. Ceci met fin à nos travaux. Et j'ajourne les travaux de cette Assemblée à demain, mercredi le 31 mars, à 10 heures. Bonne soirée à tous!

(Fin de la séance à 19 h 11)