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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 6 juin 2002 - Vol. 37 N° 111

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Table des matières

Présence du consul général de la Confédération suisse, M. Bernard Pillonel,
et de l'ambassadeur de la Confédération suisse au Canada, M. Urs Ziswiler

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures six minutes)

La Présidente: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir. Alors, je demanderais à tous les membres de l'Assemblée de prendre place, s'il vous plaît.

Présence du consul général de la Confédération
suisse, M. Bernard Pillonel, et de l'ambassadeur
de la Confédération suisse au Canada,
M. Urs Ziswiler

Alors, j'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes ce matin de M. Bernard Pillonel, consul général de la Confédération suisse à Montréal. Il est accompagné de Son Excellence M. Urs Ziswiler, ambassadeur de la Confédération suisse au Canada.

Affaires courantes

Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la présentation de projets de loi, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Simard (Montmorency): Alors, Mme la Présidente, je dépose la réponse à la pétition du 24 avril dernier... Oh, pardon, pardon, pardon, excusez-moi, j'étais dans la lune. L'article a, je vous prie, Mme la Présidente, avant de faire le dépôt d'un document. Merci beaucoup.

Projet de loi n° 110

La Présidente: Oui. Alors, à l'article a, Mme la ministre des Finances présente le projet de loi n° 110, Loi modifiant la Loi sur les assurances et d'autres dispositions législatives. Mme la vice-première ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Ce projet de loi modifie la Loi sur les assurances afin d'introduire de nouvelles règles concernant les pratiques de gestion des assureurs. Il confère à l'Inspecteur général des institutions financières le pouvoir de leur donner des lignes directrices et de leur imposer des sanctions administratives. Il modifie également les règles relatives à la suffisance du capital et des liquidités, aux conflits d'intérêts et aux transactions entre les assureurs et des personnes intéressées.

Par ailleurs, ce projet de loi modifie les règles concernant la constitution des compagnies d'assurances et il donne aux compagnies déjà constituées le choix d'être régies par la partie 1A de la Loi sur les compagnies. Il élargit le champ des activités que des assureurs sont autorisés à exercer, leurs objets ainsi que leurs pouvoirs de placement. Il introduit de nouvelles règles concernant l'attribution des actions d'une compagnie d'assurances à une société de gestion de portefeuille et permet la transformation de compagnies mutuelles d'assurances en compagnies à capital-actions. Il vise de plus à interdire la constitution de nouvelles sociétés de secours mutuel.

Ce projet de loi modifie également les dispositions du Code civil concernant la clause d'exclusion stipulée dans un contrat d'assurance et applicable en cas de suicide de l'assuré.

Et, de plus, ce projet de loi modifie la Loi sur les compagnies afin de permettre aux actionnaires, y compris les actionnaires des compagnies d'assurances et les membres des compagnies mutuelles d'assurances de présenter des propositions et de prendre la parole aux assemblées générales de la compagnie.

Enfin, ce projet de loi contient des dispositions transitoires et des modifications de concordance.

Mise aux voix

La Présidente: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

Dépôt de documents

Alors, au dépôt de documents, Mme la vice-première ministre, ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

Rapport annuel de l'Association des courtiers
et agents immobiliers du Québec

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Je dépose le rapport annuel 2001 de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec.

n (10 h 10) n

La Présidente: Ce document est déposé. M. le ministre des Ressources naturelles.

Rapport annuel de la Société
nationale de l'amiante

M. Gendron: Mme la Présidente, je dépose le rapport annuel 2000-2002 de la Société nationale de l'amiante.

La Présidente: Ce document est déposé. M. le ministre d'État aux Ressources humaines et au Travail. Alors, j'invite le ministre d'État aux Ressources humaines et au Travail.

Rapports annuels 1997-1998 à 2000-2001
du Conseil consultatif
du travail et de la main-d'oeuvre

M. Rochon: Mme la Présidente, je dépose les rapports annuels de 1997 à 2001 du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.

La Présidente: Ces documents sont déposés. M. le leader adjoint du gouvernement.

Réponse à une pétition et amendements
proposés au projet de loi n° 106

M. Simard (Montmorency): Merci, Mme la Présidente. Alors, je dépose la réponse à la pétition du 24 avril dernier, présentée par le député de L'Assomption, ainsi que les amendements qui devraient être déposés lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 106, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal.

La Présidente: Alors, ces documents sont déposés.

Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, j'invite M. le président de la commission des institutions et député de Bellechasse.

Étude détaillée du projet de loi n° 68

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. Comme vous le constatez, ça travaille fort à la commission des institutions. Je dépose donc le rapport de cette commission qui a siégé le 5 juin 2002 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 68, Loi modifiant la Loi sur les cours municipales, la Loi sur les tribunaux judiciaires et d'autres dispositions législatives. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

La Présidente: Ce rapport est déposé. Mme la présidente de la commission des affaires sociales et députée de Saint-François.

Consultations particulières
sur le projet de loi n° 96

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme la Présidente. Je dépose le rapport de la commission des affaires sociales qui, les 4 et 5 juin 2002, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 96, Loi sur les services préhospitaliers d'urgence et modifiant diverses dispositions législatives.

La Présidente: Alors, ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

Nous en sommes au dépôt des pétitions. M. le député de Masson.

M. Labbé: Alors, merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de déposer un extrait de pétition non conforme.

La Présidente: Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Consentement.

La Présidente: Consentement. M. le député de Masson.

Implanter un service de train de banlieue
entre Mascouche et Montréal

M. Labbé: Alors, merci, Mme la Présidente.

Je dépose l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 7 193 pétitionnaires. Alors, désignation: citoyennes et citoyens de la MRC des Moulins.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant qu'un train de banlieue diminuera au maximum l'achalandage automobile sur nos routes aux heures de pointe pour les travailleurs, les étudiants, les gens d'affaires et la population en général;

«Considérant que le train de banlieue permettra aux gens d'affaires, pendant la durée du transport, de faire leurs retours d'appels via le cellulaire, de travailler sur leurs dossiers avec leur ordinateur et d'arriver à l'heure à leur rendez-vous;

«Considérant que le train de banlieue permettra à nos étudiants qui fréquentent le cégep ou l'université de poursuivre leurs études à Montréal tout en demeurant dans notre MRC;

«Considérant que le train de banlieue sera à tous les niveaux de notre société, pour les jeunes et les aînés, un moyen supérieur de qualité de vie;

«Considérant que le train de banlieue abaissera le taux de fatigue et de stress des usagers;

«Considérant que le train de banlieue offrira un transport sécuritaire et rapide en tout temps;

«Considérant que le train de banlieue réduira le taux de pollution en offrant un environnement plus sain;

«Considérant que le train de banlieue permettra à nos jeunes de demeurer dans notre MRC;

«Considérant que le train de banlieue facilitera l'accès à certains services de Montréal [...];

«Alors, l'intervention réclamée se résume ainsi, Mme la Présidente:

«Nous, soussignés, pour toutes ces raisons, voulons un train de banlieue Mascouche-Montréal.»

Et je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

La Présidente: Alors, cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période des questions et réponses orales M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux répondra à deux questions: la première, posée le 30 mai dernier par M. le député de Richmond, concernant l'accessibilité des services de santé dans la MRC de L'Amiante; et la deuxième question, posée le 4 juin dernier par Mme la députée de Jonquière, concernant les services d'urgence de l'hôpital de Jonquière.

Questions et réponses orales

Alors, nous en sommes maintenant rendus à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au député de Westmount?Saint-Louis, en principale.

Pertinence d'un référendum sur le déséquilibre
fiscal entre Ottawa et les provinces

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme la Présidente, nous avons appris cette semaine que, pour tenter de relancer son gouvernement, le premier ministre envisageait la tenue d'un référendum sur le déséquilibre fiscal. Rappelons qu'un référendum coûterait, au bas mot, environ 50 millions de dollars aux contribuables québécois. Or, il s'agit d'un sujet pour lequel il y a déjà eu un consensus au Québec, qu'il y aura un consensus dans cette Chambre, Mme la Présidente.

Est-ce que le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques trouve justifiable un gaspillage de 50 millions de dollars de fonds publics pour la tenue d'un référendum inutile, puisque tout le monde s'entend déjà?

La Présidente: Alors, je cède la parole à Mme la vice-première ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, Mme la Présidente. Je ne crois pas qu'on gaspille quelque argent que ce soit lorsqu'on consulte la population et lorsqu'on lui demande son opinion, Mme la Présidente.

Cette question, elle est majeure, puisque les Québécois et les Québécoises sont privés de 50 millions de dollars par semaine qui pourraient être investis pour répondre aux besoins de la population en matière de santé, de services sociaux, pour lutter contre la pauvreté, pour investir en éducation, Mme la Présidente. Et, malheureusement, je n'ai pas encore constaté l'unanimité, puisqu'il y a quelques Québécois, dont M. Dion, par exemple, qui sont en désaccord, à ce que j'ai compris, sur cette question du déséquilibre fiscal. Or, il existe, Mme la Présidente. Il y a un problème, puisque Ottawa, année après année, se retrouve avec des surplus et que le Québec est obligé de racler les fonds de tiroirs pour accrocher les deux bouts, Mme la Présidente, et pour parvenir à répondre aux besoins de ses concitoyens, ses concitoyennes.

Nous allons donc évaluer tous les moyens normaux, disponibles, pour nous assurer que la population, d'une part, soit informée de cela et en saisisse l'ensemble des enjeux et aussi appuie, en ce sens, l'orientation qui, je comprends, aussi reçoit l'appui de l'opposition et sans doute du chef de l'Action démocratique, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Westmount?Saint-Louis.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci beaucoup, madame. Est-ce que la ministre réalise que ce qui apparaît très clairement, c'est que la tenue d'un référendum à ce stade-ci, qui vise exclusivement dans le fond des objectifs stratégiques pour relancer son parti puis son gouvernement... Est-ce que, comme ministre des institutions démocratiques, le ministre des institutions démocratiques ne réalise pas qu'un référendum se doit d'être un instrument appartenant au peuple, à la population, et non pas de devenir la bébelle des stratèges politiques du gouvernement? Il s'agit tout simplement, dans ce cas-ci, Mme la Présidente, d'un détournement d'institution démocratique.

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Des voix: ...

La Présidente: La parole est à Mme la vice-première ministre, et je souhaiterais qu'il y ait le même niveau d'écoute pour la réponse que pour la question. Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Vous savez, il y a des États à travers le monde qui n'hésitent pas à consulter leur population pour des décisions qu'ils ont à prendre, autant en ce qui concerne le changement des institutions démocratiques que des enjeux majeurs pour leur population, Mme la Présidente.

Je crois qu'on va convenir ensemble, Mme la Présidente, qu'il y a là un enjeu majeur et que nous devons partager ensemble ? et j'espère qu'à cet égard l'opposition est toujours d'accord ? que nous devons partager ensemble cette évaluation quant au fait qu'Ottawa actuellement a des ressources considérables. Nous avons la responsabilité de répondre aux besoins urgents, immédiats des Québécois et des Québécoises en matière de santé, d'éducation, de lutte à la pauvreté.

Ce que nous demandons, c'est l'équité, c'est la justice, c'est plus de moyens pour répondre aux besoins des Québécois et des Québécoises. Et nous évaluons toutes les avenues possibles pour nous permettre d'aller chercher l'appui de la population québécoise. Et, dans ces moyens, il y a la possibilité d'un référendum, comme il peut y avoir aussi d'autres avenues qui seraient privilégiées. Mais l'important, Mme la Présidente, c'est qu'il y a urgence d'agir et urgence que nous ayons l'argent nécessaire pour répondre aux besoins des Québécois et des Québécoises.

Des voix: Bravo!

n(10 h 20)n

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Westmount?Saint-Louis.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Mme la Présidente, comment la ministre explique-t-elle son enthousiasme récent, nouveau, à écouter ce que les gens ont à dire par le biais de référendums, lorsqu'il y a à peine un an des gens en ont fait dans plusieurs municipalités du Québec, des référendums, et la première chose que le gouvernement a faite est de se couper de ces réalités, de se couper des réponses et de dire non, merci, à la population?

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. J'ose croire et espérer surtout que le député de Westmount? Saint-Louis n'est pas en train d'envoyer un message aux municipalités du Québec quant à leur volonté de défaire ce qui était nécessaire en termes d'action et donc de proposer des défusions. J'espère que ce n'est pas le cas, Mme la Présidente, quand on voit d'ailleurs actuellement comment les maires élus travaillent dans chacune de leur municipalité à créer ces nouvelles villes, à offrir des services à leurs citoyens et à leurs citoyennes.

Mme la Présidente, nous avons toujours été à l'écoute de la population du Québec, et je crois que nous devons continuer de l'être en utilisant tous les outils normaux sur lesquels peut compter un État démocratique. Et, parmi ces outils, il y a la possibilité de la tenue d'un référendum. Encore une fois, n'oublions pas que l'enjeu, il est majeur. Non seulement il est majeur, mais il est urgent. Moi, je voudrais, je voudrais ajouter des sommes pour aider les personnes âgées dans les centres d'hébergement; j'aimerais ça, aider les familles qui vivent des difficultés, qui vivent des problèmes de pauvreté. Actuellement, je suis à la corde, à la limite, Mme la Présidente, pendant qu'à Ottawa il y a des surplus. Et ces surplus, ils sont considérables. La dernière année, on a parlé de près de 10 milliards de dollars, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Westmount?Saint-Louis.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Oui, Mme la Présidente. Est-ce que la ministre réalise que, dans le fond, la première dépense qu'elle veut faire est égale au coût de son déséquilibre fiscal pour une semaine? La première chose qu'elle cherche à faire, c'est de dépenser l'argent qu'elle n'a pas, premièrement, 50 millions dépensés de façon tout à fait inutile, puisque nous nous entendrons tous sur le même sujet, sur la question du déséquilibre fiscal. Est-ce que la ministre est consciente du fait que, dans le fond, si on avait à investir un 50 millions de dollars de façon intelligente dans les mois qui viennent, on pourrait le faire très bien en déclenchant une élection générale, Mme la Présidente?

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci beaucoup. Je répète, Mme la Présidente, qu'il s'agit d'une somme de près de 2,4 milliards de dollars qui est en jeu dans le cas présent.

Une voix: ...

Mme Marois: Par année, effectivement. Et pour longtemps, et année après année. Et je répète qu'il est important d'avoir le point de vue de la population sur cette question; d'une part, qu'on l'informe bien de cet enjeu. Je crois que c'est notre responsabilité à tous et à toutes, autant aux gens de l'autre côté de la Chambre que de ce côté-ci, Mme la Présidente, que nous informions, que nous expliquions et que nous ayons le point de vue de la population. Je crois qu'il est normal que dans un État démocratique nous procédions de cette façon-là.

L'ordre des moyens, qu'il s'agisse d'un référendum, qu'il s'agisse d'une autre forme de consultation, qu'il s'agisse d'appui à ce projet, on doit les évaluer, constater celui, ce moyen qui sera le plus efficace, Mme la Présidente, parce qu'en bout de piste c'est au service de la population québécoise que... nous devons nous assurer que tous les moyens... et c'est à leur service qu'on doit s'assurer que tous les moyens vont être utilisés pour que les besoins auxquels nous avons à répondre en matière de santé, en matière d'éducation, de lutte à la pauvreté... trouve les sommes nécessaires pour que nous y arrivions, Mme la Présidente.

La Présidente: En deuxième principale, M. le député Châteauguay.

Réduction du nombre d'unités d'accréditation
syndicale dans les établissements
de santé et implantation
des groupes de médecine de famille

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, Mme la Présidente. Le rapport de la commission Clair, déposé il y a plus d'un an, soulignait certains problèmes concernant l'organisation du travail qui démontrent que chaque dollar santé investi au Québec n'est pas pleinement efficace. Permettez-moi de vous citer un passage de la page 130, et je cite: «Nous considérons [...] que la faible mobilité du personnel, attribuable en grande partie au nombre important d'unités d'accréditation, entrave indûment la marge de manoeuvre des établissements.» En gros, si, un jour donné, un département est en surnombre alors que, pour un autre département de l'établissement de santé, il y a un manque, il est impossible de transférer, de déplacer le personnel d'un département à un autre pour répondre pourtant aux besoins réels du jour, là.

Dans la même lignée du rapport Clair, en septembre dernier, le rapport du vérificateur externe du CHUM demandait au gouvernement de légiférer pour réduire le nombre d'unités d'accréditation.

Ma question au gouvernement: Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de donner suite aux recommandations de faire le ménage dans les unités d'accréditation, ce qui nous permettrait d'avoir un meilleur rendement pour nos dollars santé?

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé.

M. François Legault

M. Legault: Oui, Mme la Présidente. J'ai déjà mentionné au député de Châteauguay, en commission parlementaire, que j'étais d'accord qu'il y avait trop d'unités d'accréditation actuellement dans le réseau de la santé. Nous avons un groupe de travail actuellement qui est en train de se pencher sur le cas de chacun des établissements, chacun des établissements. On a déjà eu aussi des discussions avec des dirigeants d'établissements, avec les syndicats aussi, Mme la Présidente. Donc, il y a un inventaire complet qui est fait. Il y aura des mesures qui seront déposées. Donc, on est d'accord avec cette proposition.

Maintenant, le député de Châteauguay nous parle du rapport Clair. Il y avait une autre recommandation dans le rapport Clair: la mise en place de groupes de médecine de famille. Le député de Châteauguay nous a dit, et je le cite: «Oui, le gouvernement parle des GMF. Non, ils ne seront pas mis en place avant la prochaine élection.» Bien, il s'est trompé sur les GMF, comme il va se tromper aussi sur la réorganisation du travail, parce qu'on va continuer à travailler, Mme la Présidente, à ce que l'argent des Québécois et des Québécoises soit bien réparti, équitablement, entre les régions, incluant dans sa région, en Montérégie, même si le Parti libéral du Québec n'est pas d'accord avec ça, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Châteauguay.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, rapidement. Est-ce que le ministre est conscient de ce que le rapport Clair disait à propos des GMF, et je cite à la page 55: «Dans un an, au moins 30 à 40 projets devraient avoir vu le jour au Québec»? On est un an et demi après, vous en avez parlé de 20, qui ne sont pas encore lancés, parce que la négociation sur la rémunération mixte, ce n'est même pas commencé. On n'a même pas vu le début de l'ombre d'une solution là-dessus. Pourtant, la commission Clair en parlait. Vous ne l'avez pas encore fait. Alors, pour le reste, ça reste sûrement de la poudre aux yeux.

Sur la question que je vous ai posée, comment vous pouvez expliquer qu'après 18 mois après le rapport Clair... Puis vous m'avez dit, le 10 avril, Mme la Présidente, le ministre a dit: «Ce que je souhaiterais faire au cours des prochaines semaines, c'est de déposer un projet de loi pour fusionner ces unités d'accréditation.» Et il me disait qu'il connaissait très bien la situation. Il me disait: Au CHUM, il y a 49 unités d'accréditation syndicale, à McGill, il y en a plus d'une centaine, unités d'accréditation syndicale; ça ne peut pas fonctionner, il faut que je fusionne ça.

Moi, ce que je demande au ministre aujourd'hui: Qui est-ce qui vous a empêché, qui, autour de la table du Conseil des ministres, vous a arrêté? Pourquoi vous avez reculé sur votre intention de régler la question des unités d'accréditation? Parce que, en ce moment, il y a des gens qui sont sur des listes d'attente, qui ne sont pas opérés parce que les budgets d'opération sont consacrés à du personnel qu'on ne peut pas amener là où il y a des besoins. Pourquoi avez-vous reculé? Pourquoi on n'en a pas pour notre argent dans la santé?

La Présidente: M. le ministre d'État.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, on n'a pas reculé, je l'ai mentionné, je le répète, il y a plusieurs mesures, plusieurs moyens qui existent pour fusionner des unités d'accréditation. C'est possible de le faire aussi d'une façon consensuelle, c'est-à-dire avec l'accord de la direction et des syndicats. Donc, il y a déjà des travaux qui se font dans ce sens-là.

Maintenant, Mme la Présidente, quand le député de Châteauguay nous dit que le délai a été un peu long pour l'implantation des GMF, je veux juste rappeler les propos du Dr Dutil, le président de la FMOQ, qui nous disait cette semaine: «Ce temps était nécessaire pour rendre opérationnel le modèle proposé et indispensable pour réunir les conditions optimales de démarrage des premiers GMF, mais aujourd'hui ce temps a porté fruit et l'entente est signée.» C'est ça, Mme la Présidente, du beau travail. On va avoir une première ligne qui va être plus accessible, des médecins de famille qui, avec les infirmières, avec l'appui des CLSC, avec l'appui d'infirmières, vont pouvoir offrir du support 24 heures par jour, sept jours par semaine.

Mme la Présidente, à l'intérieur des budgets limités qu'on a, on fait un travail exceptionnel pour faire avancer ce réseau, le protéger aussi pour qu'il reste accessible, qu'il reste public et qu'on évite les vents de privatisation qui viennent de la droite, Mme la Présidente.

La Présidente: En troisième principale, Mme la députée de Laviolette.

Mme Boulet: Ça peut être une additionnelle?

La Présidente: En additionnelle?

n(10 h 30)n

Mme Boulet: C'est une additionnelle, oui.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Merci, Mme la Présidente. Est-ce que le ministre peut nous dire, parce qu'il nous vante grandement les GMF, là, les groupes de médecine familiale, est-ce qu'il peut me dire comment ça va répondre aux besoins des urgences à Shawinigan, à La Tuque et à Jonquière? Notre problème, M. le ministre, ce n'est pas de les regrouper, les médecins, c'est d'en trouver, c'est d'en trouver, des médecins en région.

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, je peux essayer d'expliquer. Peut-être qu'elle pourrait lire le rapport Clair, la députée de Laviolette. Elle pourrait comprendre que, oui, l'implantation des GMF va avoir un impact sur l'achalandage dans nos urgences.

Mme la Présidente, grâce aux GMF, on aura des groupes de médecine de famille qui seront disponibles 24 heures par jour, sept jours par semaine. Donc, ce que ça veut dire... C'est qu'il y a des personnes qui actuellement n'ont pas accès à un médecin ou une infirmière le soir, les fins de semaine, et ces personnes se retrouvent à l'urgence, Mme la Présidente. C'est ça qu'on essaie de régler avec les groupes de médecine familiale. C'est ça qui est visé. C'est ça qui fait consensus. Et, grâce à ces groupes, Mme la Présidente, on pourra rendre notre première ligne plus accessible, on pourra décharger aussi, enlever la pression sur la deuxième et la troisième ligne.

Mais, pour être capable d'être encore plus efficace, Mme la Présidente, il faudrait aussi investir des centaines de millions dans les soins à domicile, parce que actuellement il y a des personnes âgées, qui se retrouvent soit dans des établissements soit dans des lits de courte durée, qui deviennent finalement des lits de longue durée dans nos hôpitaux. Pour être capable, Mme la Présidente, d'avoir un système efficace, il faudrait être capable d'ajouter des sommes. Je le sais, que l'opposition n'aime pas ça. L'opposition a choisi sa stratégie en fin de semaine: remplacer Jean Chrétien par Paul Martin. Mme la Présidente, ça ne marchera pas. Paul Martin l'a déjà dit. Je veux le citer: «Le ministre Paul Martin...»

Des voix: ...

M. Legault: Mme la Présidente, je termine là-dessus. En conclusion...

La Présidente: En conclusion, M. le ministre.

M. Legault: ...Mme la Présidente, je cite Le Journal de Québec du 9 mars dernier. On dit: «Le ministre Paul Martin a repoussé hier ? a repoussé hier ? la main tendue par le chef libéral Jean Charest en excluant toute réforme en profondeur des transferts aux provinces, en niant le déséquilibre fiscal.» Mme la Présidente, ça ne marche pas, ce n'est pas crédible, ce qui est proposé par le Parti libéral du Québec.

La Présidente: En principale, M. le député Châteauguay.

M. Fournier: En additionnelle, Mme la Présidente. Est-ce que le ministre...

La Présidente: En complémentaire.

Nombre de lits disponibles
dans les établissements de santé
et de services sociaux

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Est-ce que le ministre, qui nous parle des lits de longue durée et des gens qui sont dans les lits de courte de durée, sait que son gouvernement a coupé 11 000 lits, dont 7 000 de longue durée? C'est son gouvernement qui a fermé les lits.

Et il nous parle beaucoup, là, des stratégies de leadership, il se réfère à des articles de journaux. Je voudrais lui citer Michel Vastel, le 30 mai dernier: «Les rumeurs de démission de Bernard Landry sont nourries de Québec même, des cabinets ministériels en particulier. Voilà que plusieurs candidats se signalent, laissent courir leur nom dans les chroniques. François Legault et André Boisclair sont de ceux-là.» Je comprends que ce que le ministre... Je comprends que ce que le ministre...

Des voix: ...

Des voix: Bravo!

La Présidente: Écoutez, alors, si je cède la parole au ministre, c'est que je la considère comme une question principale. Alors, M. le ministre, c'est une question principale. M. le ministre.

Des voix: ...

La Présidente: Non. Non. Alors, M. le ministre d'État à la Santé.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, on sait, on sait que le député de Châteauguay ? il n'aime pas ça qu'on lui rappelle ça ? a été l'organisateur de Paul Martin. Ça ne le dérange pas, il travaille probablement encore pour lui.

Des voix: ...

La Présidente: Je veux bien qu'il y ait de l'agitation, là, mais on est en train de transformer l'Assemblée aujourd'hui, devant tous ces jeunes publics qui sont venus, là, en assemblée turbulente. Alors, je demanderais au ministre d'État à la Santé de terminer la réponse à la question.

M. Legault: Mme la Présidente, je sais que le député de Châteauguay continue, puis ça ne le dérange pas, comme il vient de nous le dire, de continuer à appuyer Paul Martin. Mais Paul Martin a dit que les nouveaux arguments, selon lui, que la commission Séguin a avancés... que cette commission Séguin fait fausse route en concluant qu'Ottawa affame les provinces au plan fiscal. «M. Charest peut bien croire que sa seule présence forcerait Ottawa à changer d'idée et à céder aux...»

Des voix: ...

La Présidente: Un instant. Bon. Je vous rappelle à nouveau que nous ne pouvons pas, dans cette Chambre, interpeller autrement que par la fonction, même en citant des textes de journaux ou de magazines. Alors, en conclusion, M. le ministre de la Santé.

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, Paul Martin a déjà... l'ex-ministre des Finances à Ottawa,  qui est supporté actuellement par le député de Châteauguay, a déjà mentionné qu'il n'était pas d'accord avec le déséquilibre fiscal, qu'il n'était pas d'accord avec un transfert de points d'impôt à Québec. Donc, quand le député de Châteauguay nous dit que sa solution, c'est de remplacer Jean Chrétien par Paul Martin, Mme la Présidente, je l'inviterais à défendre davantage les intérêts du Québec, des Québécois et des Québécoises, à aller chercher notre argent pour le mettre dans la santé, en éducation et en famille.

Des voix: Bravo!

La Présidente: En question principale, M. le député de Vaudreuil.

Transmission des paramètres d'allocation
budgétaire aux commissions scolaires

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, Mme la Présidente. Alors, les commissions scolaires n'ont pas encore reçu du ministre de l'Éducation les paramètres d'allocation budgétaire, soit le document financier qui est requis pour que les commissions scolaires puissent adopter de façon définitive leur budget 2002-2003, pour l'année financière 2002-2003, qui commence le 1er juillet, soit dans quelques semaines.

Alors, est-ce que le ministre de l'Éducation peut nous indiquer à quelle date il rendra publics et transmettra aux commissions scolaires ces paramètres d'allocation budgétaire?

La Présidente: M. le ministre d'État à l'Éducation.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Si la poste royale canadienne est suffisamment efficace, Mme la Présidente, dans les prochains jours.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente: En complémentaire... En complémentaire, M. le député de Vaudreuil.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Oui. Est-ce que le ministre est au courant que ces paramètres, normalement, c'est toujours envoyé à la fin du mois de mai? Parce que les commissions scolaires doivent approuver les budgets. Il y a des avis publics à donner pour la tenue des séances du conseil des commissaires. Donc, comment peut-il expliquer le retard? Et à quelle date seront transmis les paramètres d'allocation budgétaire aux commissions scolaires? Est-ce que le ministre peut nous donner la réponse ici au lieu de la donner en catimini peut-être après à d'autres?

La Présidente: M. le ministre.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, nous avons eu la chance, parce que nous avons un gouvernement qui a décidé, depuis son arrivée au pouvoir, de faire de l'éducation une des grandes priorités de l'État, nous avons eu la chance, encore cette année, d'avoir un budget remarquable pour l'éducation. À la suite du dévoilement des crédits à la fin mars, nous avons entrepris, dans l'ensemble des commissions scolaires du Québec, une tournée de consultations sur les règles budgétaires. Nous avons ajouté des éléments extrêmement intéressants, et je suis étonné que le député de Vaudreuil ne fasse pas allusion au plan de lutte contre le décrochage scolaire, Agir autrement, dans lequel nous investissons 125 millions sur cinq ans, 25 millions cette année. Et cela faisait aussi partie des règles budgétaires pour lesquelles nous sommes allés en consultation.

Alors, tout ça étant maintenant attaché, les commissions scolaires connaîtront dans les prochains jours de façon officielle ? même si elles ont été consultées et les connaissent de façon officieuse ? les règles budgétaires qui s'appliqueront. Et je n'ai rarement vu ici, en cette Chambre, soulever un aussi beau faux problème, Mme la Présidente.

n(10 h 40)n

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Vaudreuil.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Oui. Mme la Présidente, est-ce que le ministre réalise encore une fois qu'il ne répond pas à nos questions? Depuis deux mois, on lui a parlé de la réforme scolaire. Est-ce que la réforme, ça procéderait en cinquième et sixième année? Pas de réponse encore. On lui a parlé de l'évaluation de la politique d'apprentissage, la date. Pas de réponse. On lui a parlé des manuels scolaires pour cinquième et sixième année. Pas de réponse. On lui pose une question aujourd'hui pourtant très simple, importante pour les commissions scolaires, les conseils d'établissement doivent également adopter leur budget. Quelle date seront transmis les paramètres d'allocation budgétaire? Est-ce que le ministre est au courant, Mme la Présidente?

La Présidente: M. le ministre.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Puisque le député a fait allusion à la réforme de l'éducation, réforme qui, je le rappelle, reçoit l'appui de tous les parents du Québec, 1 200 délégués des conseils d'établissement de l'Association des parents du Québec étaient à Québec la semaine dernière, et les 1 200 ont réitéré leur appui total, de l'ensemble des parents et des groupes de parents au Québec, à la réforme telle que nous l'implantons. Nous avons également une réforme qui reçoit l'appui de toutes les commissions scolaires, de toutes les directions et de tous les cadres scolaires, et je crois que dans la population également... un vaste appui à cette réforme. Malheureusement, le Parti libéral traîne la patte. Le Parti libéral n'a pas encore compris qu'il s'agissait de la voie de l'avenir, qu'il s'agissait de la voie du progrès, faire en sorte que nos élèves aient les meilleurs outils pour devenir les plus compétitifs au monde, nous assurer que l'école soit le lieu d'un meilleur encadrement, d'une meilleure concertation. Alors, ça, ce sont des vrais débats d'éducation. C'est dommage que le Parti libéral s'entête à demeurer hors de ces débats en menant un combat d'arrière-garde contre la réforme, alors que le Québec entier est en train de réaliser cette réforme.

Quant aux règles de financement, Mme la Présidente, je veux, en conclusion, rappeler ma réponse de tout à l'heure: si la poste de Sa Majesté veut bien se dépêcher, dans les prochains jours toutes les commissions scolaires du Québec, y compris le Littoral, à Sept-Îles... aura reçu ses règles budgétaires.

La Présidente: En principale, Mme la députée de Bonaventure.

Crédits alloués aux fonds miniers régionaux

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, les régions de la Gaspésie, du Bas-Saint-Laurent, du Saguenay?Lac-Saint-Jean, de l'Estrie, de Chaudière-Appalaches ont signé une entente de cinq ans avec le ministère des Ressources naturelles dans le secteur minier en créant les fonds miniers régionaux. Le ministère des Ressources naturelles s'engageait alors à investir une somme de 250 000 $ par année, à laquelle s'ajoutait une contribution de 100 000 $ de la région. Après avoir pris un engagement ferme de cinq ans, le ministre des Ressources naturelles, sans qu'on comprenne trop pourquoi, a décidé de faire marche arrière et a confirmé, par la voie de son sous-ministre aux mines, que le fonds minier verrait son budget amputé de 40 %, faisant passer la contribution de son ministère de 250 000 $ à 100 000 $ par fonds minier par année.

Alors, dans ce contexte, comment le ministre des Ressources naturelles peut justement justifier une telle décision alors qu'il a pris un engagement ferme sur une période de cinq ans? Et est-ce qu'il est conscient qu'en reniant son engagement il signe l'arrêt de mort de la prospection minière dans ces régions?

La Présidente: M. le ministre des Ressources naturelles.

M. François Gendron

M. Gendron: Je remercie la députée de sa question, je remercie également tous les députés de la région concernée et des cinq régions concernées d'avoir fait des représentations. Le dossier est juste un petit peu plus compliqué que ça. C'est que, dans une gestion responsable des finances publiques, quand il y a deux ministères... Le ministre des Régions avait lancé un vaste programme de support aux régions-ressources, de 800 et quelques millions de dollars, et, à même les argents du ministère des Ressources, on a décidé, le ministère des Régions, d'étaler le financement d'une année de plus que prévu. Et, cette année, dans les crédits, le ministère des Ressources naturelles n'a pas pu avoir les crédits requis pour donner suite aux ententes spécifiques.

C'est un problème que nous discutons entre nous, et je peux dire que, d'ici une semaine ou deux, on va trouver une solution et on va donner suite à l'engagement qui était pris. Je l'ai dit d'ailleurs aux concernés. Et tous les fonds miniers des régions concernées recevront, là, 250 millions, tel que prévu.

Une voix: Bravo!

La Présidente: En principale?

M. Béchard: Non, en additionnelle.

La Présidente: En complémentaire.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, Mme la Présidente. Est-ce que le ministre des Ressources naturelles peut nous dire comment il peut accepter de délaisser ses responsabilités, de renier les engagements de son gouvernement et la signature de son gouvernement parce qu'il n'est pas capable de se tenir debout pour défendre les prospecteurs des régions minières qui n'ont pas ce fonds-là? Est-ce que vous vous rendez compte, M. le ministre, que, finalement, la gestion est beaucoup plus compliquée, comme vous le dites, quand on fait des annonces, on prend des engagements, mais qu'on n'a pas d'argent pour les respecter?

La Présidente: Avant de céder la parole au ministre des Ressources naturelles, je rappelle qu'ici, dans cette Assemblée, on peut utiliser un langage offensif, mais il ne doit pas être offensant. Alors, M. le ministre des Ressources naturelles.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui. Je veux bien que le député de Kamouraska-Témiscouata se mette dans le portrait, là, par une question additionnelle, mais d'aucune façon ce qu'il vient de dire ne correspond à la réalité, puisque, cette année, le ministère des Ressources, globalement, dans tous les programmes, par exemple... Lui, il a une vision très étroite, il lui arrive des fois de ne prendre qu'une parcelle d'un programme. Je vous donne un exemple: en aménagement forestier, comme ministre des Ressources, cette année, il y a 45 millions de plus pour faire de l'aménagement forestier intensif, ce que vous souhaitez quand vous êtes en pèlerinage électoral. Alors, nous, effectivement, on prend nos responsabilités.

Au niveau de l'exploration minière, je crois qu'il est nécessaire d'augmenter les programmes d'exploration minière; c'est ce que nous avons fait. Et ce n'est pas parce qu'il y a un autre ministère qui comprend la même logique, la même réalité, qui ajoute, par le biais du programme de la ministre des Finances, pour mieux supporter les régions-ressources... On a mis une rallonge budgétaire au soutien de l'exploration budgétaire, mais ils ne sont pas capables d'additionner, eux autres, quand ça vient dans deux ministères différents. Alors, en ce qui nous concerne, c'est clair qu'on n'abandonnera pas la nécessité d'avoir un vaste programme d'exploration, c'est l'avenir de l'industrie minière.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Est-ce que le ministre des Ressources naturelles se rend compte que je ne veux pas l'offenser, je veux juste lui demander de tenir ses engagements, de prendre ses responsabilités et d'éviter que ce qui était simple avec un fonds minier devienne compliqué? Parce que, vu que vous n'êtes pas capable de le faire tout seul, il faut que vos autres ministres autour de vous vous aident. Prenez vos responsabilités, ça va être plus simple pour les régions et plus simple pour tout le monde.

La Présidente: M. le ministre.

M. François Gendron

M. Gendron: Mme la Présidente, il y a là davantage un commentaire qu'une question, mais, nos responsabilités, nous les prenons. Dans le ministère des Régions, il y a eu une offensive majeure pour mieux soutenir les régions-ressources. Que le ministère des Régions prétende qu'à l'intérieur du 860 millions sur cinq ans pour soutenir les régions-ressources on ajoute un volet de soutien à l'exploration minière, moi, j'applaudis à ça. Mais il vient en complémentaire aux responsabilités du ministère des Ressources que nous avions de toute façon. L'important, là, c'est: Est-ce que, oui ou non, c'est de soutenir l'exploration minière? Si la réponse est oui, c'est ce qu'on fait.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Mme la Présidente, merci. Est-ce que le ministre des Ressources naturelles convient que ses tergiversations, le fait qu'il a renié son engagement, privent actuellement ces régions d'investissements importants? Je vais lui donner un exemple. En Gaspésie, parce que le ministre n'a pas été capable de se brancher, il y a une trentaine de dossiers qui sont en attente actuellement. Et, plutôt que de faire jouer un rôle politique au ministère des Régions, qu'est-ce qu'il attend pour prendre ses engagements? Et qu'est-ce qu'il répond aussi à l'Association des prospecteurs du Québec qui, dans un communiqué publié le 19 avril dernier, déplorait justement le rôle politique joué par le ministère des Régions? L'industrie de l'exploration minière du Québec ne comprend pas le rôle politique que se donne le ministère des Régions dans l'établissement des budgets de ses programmes et leur répartition. Alors, Mme la Présidente, est-ce que le ministre des Ressources naturelles peut prendre ses engagements et essayer... arrêter de nous monter des beaux gros bateaux? Puis est-ce qu'il peut prendre justement ses engagements pour éviter que ces régions soient pénalisées?

Des voix: Bravo!

La Présidente: M. le ministre des Ressources naturelles.

M. François Gendron

M. Gendron: Avec beaucoup de plaisir, Mme la Présidente. Je ne vois pas, parce qu'il y a des sommes dans un fonds, en quoi ça change la responsabilité politique du ministère des Ressources naturelles. Même avec pas beaucoup de formation, on comprend ça. Alors, je répète, là, il y a des argents au ministère des Ressources pour soutenir l'exploration. Qui a la responsabilité de l'affectation des sommes, de l'évaluation des demandes? Ça a toujours été le ministère des Ressources naturelles par sa direction minière.

n(10 h 50)n

Et, en passant, comment on aurait fait pour recevoir la mention internationale récemment, en disant que le meilleur endroit au monde pour faire du développement minier, c'est le ministère des Ressources naturelles, par son support à l'industrie, par ses programmes? C'est parce que, eux autres, ils ont compris que c'est nous qui avons la responsabilité.

La Présidente: En principale, M. le député d'Orford.

Construction d'une tour d'habitation
sur un site contaminé, à Verdun

M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, Mme la Présidente. Une situation absolument exceptionnelle prévaut dans un nouvel édifice de 12 étages à Verdun. Il s'agit du projet nommé Les Brises du Fleuve. Après une visite des lieux, après une rencontre avec des résidents, des voisins, des experts, après la lecture des documents, tous se demandent comment le ministère de l'Environnement a-t-il pu, en novembre 2002, laisser construire sur ce terrain hautement contaminé un projet résidentiel. Déjà en 1989, l'étude de la firme Lavalin révélait que ce site était contaminé, écoutez-moi bien, par du plomb, du zinc, du cadmium, du cuivre, du chrome, de l'arsenic, du nickel, du cyanure, de l'huile, des graisses et du BPC. Lavalin allait plus loin dans son rapport, et je cite: «Les déchets d'origine industrielle sont contaminés au-delà des critères reconnus par le ministère de l'Environnement pour le développement résidentiel et même, dans plusieurs cas, le développement industriel.»

Mme la Présidente, comment les copropriétaires, M. Paquin et la ville de Verdun, ont-ils pu construire un édifice de 12 étages sur un site de déchets sans que le ministère de l'Environnement n'intervienne pour stopper les travaux? Pourtant, le ministre était au courant depuis 1992 de la situation.

Des voix: Bravo!

La Présidente: M. le ministre de l'Environnement.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, avant de répondre, j'aimerais bien qu'on puisse faire appliquer l'article 35, parce que, depuis le début de cette période de questions, ça chahute beaucoup. Et j'ai hâte au jour où, Mme la Présidente, vous pourrez rendre une décision où les caméras pourront cibler celles et ceux qui dans cette Chambre chahutent le plus, et brisent le rythme de nos travaux, et brisent l'esprit du parlementarisme britannique. Ceci étant dit...

Des voix: Bravo!

La Présidente: La réponse. Alors, pour appliquer justement notre règlement, je vous demanderais...

Des voix: ...

La Présidente: Alors, pour appliquer notre règlement, je vous demanderais, M. le ministre, de répondre à la question.

M. Simard (Montmorency): Avec très grand plaisir, Mme la Présidente. Alors, je tiens d'abord à souligner qu'il s'agit d'un dossier que suit de très près mon collègue et ami le député de Gouin, ministre donc d'État à l'Environnement. Mais, pour déjà donner certains éléments de réponse au député d'Orford, j'aimerais lui rappeler que 1992, c'est une date qui me rappelle quelque chose. Et ça me rappelle qu'à cette époque mon ami le leader de l'opposition était donc au gouvernement. Il était, si je ne m'abuse, le ministre de l'Environnement, Mme la Présidente. Et, à cette époque, un certain nombre de décisions avaient été prises quant à l'émission du permis. On se rappelle qu'il y avait des mesures très importantes de mitigation qui avaient été imposées, notamment concernant la détection des biogaz, notamment concernant...

Ah! Mme la Présidente, voyez-vous, là, le leader, il rouspète beaucoup, il semble ne pas être content, il parle beaucoup avec le député d'Orford. Ils auraient peut-être dû se parler avant la période des questions, ça aurait peut-être pu permettre...

Des voix: ...

La Présidente: Je considère que la réponse est terminée, étant donné le temps utilisé pour faire le préambule. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. C'est un dossier dont je me souviens...

La Présidente: Est-ce que c'est en complémentaire?

M. Pierre Paradis

M. Paradis: En complémentaire, oui. C'est un dossier dont je me souviens très bien, Mme la Présidente. Est-ce que le ministre peut nous dire quand l'édifice a été bâti, quand... Le ministère de l'Environnement était dirigé par qui quand ça a été autorisé?

La Présidente: M. le ministre.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Mme la Présidente, comme on le sait, les articles publiés récemment, notamment par M. Francoeur, dans Le Devoir, font état donc à ce dossier... On sait que ce dossier est très complexe. Je serai prudent dans mes réponses, parce que le leader de l'opposition, qui est lui-même avocat, sait très bien qu'il y a des procédures qui sont présentement en cause et que, comme des procédures judiciaires sont engagées, comme le prévoient nos règlements ? et je suis nos règlements à cet égard ? il nous faut, je crois, faire preuve de la plus grande prudence dans les commentaires que l'on émet. Mais le ministre connaît très bien le dossier, il connaît très bien la réponse à la question qu'il m'a posée et il sait très bien que ce dossier fait l'objet de plusieurs phases de construction, donc plusieurs phases de construction, à telles étapes de construction différentes, c'est bien évident. C'est donc une vérité de La Palice.

Et j'aimerais vous rappeler, M. le Président, que le ministère de l'Environnement a tout fait en sorte pour que des mesures de mitigation très importantes soient apportées, notamment au niveau de la détection des biogaz. On sait qu'il y a des indices qu'il ne faut pas dépasser, notamment 5 % d'émission de biogaz. On appelle ça des indices d'explosivité. On a donc des mesures présentement qui nous permettent d'avoir une vision très approfondie de la chose. Il n'y a pas eu de construction au sous-sol, par exemple, Mme la Présidente. Il y a un certain nombre d'autres mesures dont je pourrai vous reparler, puisque vous me faites signe qu'il faut que je conclue ma réponse.

La Présidente: En complémentaire?

M. Benoit: Oui, bien sûr.

La Présidente: M. le député d'Orford.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Mme la Présidente, en ce qui a trait à l'édifice bâti à l'an 2000, est-ce que le ministre de l'Environnement peut nous dire de qui relève maintenant le contrôle du lixiviat qui s'échappe de cet ancien dépotoir? Est-ce qu'on doit demander aux 84 propriétaires de cette tour d'habitation de 12 étages de gérer à leurs frais ce site hautement contaminé? Et est-ce que le ministère de l'Environnement va reconnaître sa négligence et va maintenant assurer la surveillance et le contrôle que les citoyens attendent d'un vrai ministre de l'Environnement?

La Présidente: M. le ministre délégué à l'Environnement.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Bien, Mme la Présidente, je peux assurer le député d'Orford, comme l'ensemble de la population de Verdun, que nous sommes non seulement à l'écoute, mais très vigilants dans un dossier qui, je le rappelle, fait maintenant l'objet de procédures judiciaires. Le dossier est déjà assez complexe pour ne pas volontairement rajouter de l'huile sur le feu, Mme la Présidente.

La Présidente: En principale, Mme la députée de Bourassa.

Aide accordée aux maisons d'hébergement
pour les femmes victimes de violence

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci. Mme la Présidente, vous vous souviendrez que, le 16 mai dernier, le Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale a présenté une pétition à l'Assemblée nationale, laquelle comportait 110 579 signatures. Le Regroupement réclamait, par la pétition, les ressources nécessaires pour aider des femmes et des enfants qui vivent de la violence et pour les aider à sortir du cycle de la violence.

Mme la Présidente, je pense que personne ne peut mettre en doute la qualité et le caractère essentiel des services qui sont dispensés par ces maisons qui hébergent en moyenne 20 000 femmes et enfants qui sont, encore une fois, victimes de violence. Le caractère essentiel ne pose pas problème, parce que d'ailleurs le député de Matane, lors du dépôt de la pétition, avait ajouté: Je pense que, comme État, et comme gouvernement, et comme société, on a le devoir de s'attaquer aux causes de cette violence.

Mme la Présidente, est-ce que la ministre qui est responsable de la Condition féminine peut nous dire ce qu'elle entend faire pour aider ces femmes et ces enfants qui sont victimes de la violence? Et surtout, pouvez-vous nous dire quelles seront vos intentions concrètes? Avez-vous ou non l'intention de leur donner les ressources nécessaires?

La Présidente: Mme la ministre d'État.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, Mme la Présidente, je remercie la députée de sa question, parce que c'est un sujet qui est extrêmement préoccupant. Vous savez, nous avons développé, notre gouvernement, une politique globale pour être capables d'intervenir le mieux possible, que ce soit en amont, que ce soit par la prévention, que ce soit par des politiques qui sont reconnues par les gens qui travaillent dans le milieu, pour justement faire en sorte qu'il y ait moins de personnes qui soient victimes, et particulièrement moins de femmes. Nous avons rehaussé de façon extrêmement importante les budgets pour permettre de mieux soutenir à la fois les maisons d'hébergement qui...

En passant, on peut rendre un hommage à ces femmes qui y travaillent parce qu'elles donnent de leur temps et elles accompagnent des personnes à un moment de leur vie où c'est extrêmement important. Nous avons également rehaussé, grâce au travail qui a été fait particulièrement par ma collègue, Mme Caron... pour justement faire en sorte que nous puissions ensemble rehausser, au niveau des centres de femmes... justement pour mieux les soutenir.

n(11 heures)n

Nous avons également, à même nos budgets, suite à la Marche mondiale des femmes, Mme la Présidente, réinvesti 50 millions d'argent supplémentaire pour être capables de se doter, pour la première fois en Amérique du Nord, d'une première politique au niveau des orientations en matière d'agression sexuelle. Et, malgré tout cela, Mme la Présidente, il faut le dire, il faut que chacun et chacune en cette Chambre se sentent interpellés, qu'ils soient conscients que, lorsqu'il y a une problématique de violence, on soit capable d'intervenir pour les soutenir et faire en sorte que, dans notre société, la violence, elle est inacceptable. C'est la tolérance zéro, et c'est l'ensemble de la société qui est interpellée pour lutter efficacement contre la violence.

La Présidente: C'est donc la fin de la période de questions et de réponses orales. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: ...intervenir au moment où la ministre répondait à la question. Mais est-ce que vous pouvez demander au ministre de la Santé d'arrêter de donner le mauvais exemple à sa collègue de droite qui utilise encore les noms des députés en cette Assemblée?

Des voix: ...

La Présidente: Bon. Je rappelle à tous que le règlement prescrit de s'adresser aux personnes par l'appellation de leur fonction et non par leur nom.

Alors, aux réponses différées, M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux répondra maintenant à la question posée le 30 mai dernier par M. le député de Richmond concernant l'accessibilité des services de santé dans la MRC de L'Amiante. M. le ministre d'État à la Santé.

M. Legault: Oui, Mme la Présidente, effectivement, le député de Richmond a posé une question concernant les services de santé à Disraëli. D'abord, vous mentionner...

La Présidente: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Je m'excuse d'interrompre le ministre de la Santé, mais, comme ces réponses différées s'adressent à des députés qui ne pourront pas, malheureusement, poser une question additionnelle, il y aurait entente avec le leader adjoint du gouvernement pour que les réponses soient transmises mardi prochain.

La Présidente: Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on puisse...

M. Simard (Montmorency): Mme la Présidente...

La Présidente: Oui.

M. Simard (Montmorency): ...étant donné l'absence de mon collègue d'en face, le ministre de la Santé consent très gentiment à reporter ses réponses à mardi prochain.

La Présidente: Bon. Alors, il y a consentement. Nous allons donc immédiatement...

Il n'y a pas non plus de votes reportés.

Motions sans préavis

Et nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Aux motions sans préavis, M. le député de LaFontaine.

Féliciter M. Gilles Houde, récipiendaire
de la médaille d'or du tourisme français

M. Gobé: Alors, merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec félicite M. Gilles Houde, ancien député de cette Assemblée nationale, qui a reçu la médaille d'or du tourisme français le vendredi le 31 mai 2002.»

La Présidente: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion?

Une voix: ...

La Présidente: Donc, je comprends qu'il y a consentement pour qu'il y ait une intervention de part et d'autre.

M. Simard (Montmorency): Au moins une intervention du côté de l'opposition libérale, Mme la Présidente.

La Présidente: Donc, une intervention. M. le député de LaFontaine.

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, comme je le disais dans la présentation de cette motion, tout le monde dans le Québec touristique connaît M. Gilles Houde, qui fut député du comté d'Orford dans cette Assemblée nationale et par la suite délégué du Québec pour le tourisme en France auprès de la Délégation du Québec à Paris.

M. Gilles Houde, qui vient de recevoir cette décoration émérite de la part du gouvernement français, l'a reçue à titre de délégué, d'ancien délégué bien sûr, qui a fait la promotion du Québec et de ses attraits auprès des Français sur le territoire français d'une manière très, très, très, très efficace, très, très, très forte. Et il l'a reçue aussi parce qu'il a contribué à faire en sorte qu'un certain nombre de Québécois aillent en France aussi, car M. Houde a fait le trait d'union, ce qu'on peut appeler le trait d'union en matière d'échange touristique. Et c'est tant mieux pour le Québec, tant mieux pour les Québécois et c'est aussi très bien pour la France, car n'oublions pas que le Québec reçoit à peu près 500 000 visiteurs venant de France à chaque année et que nos cousins français... nos vis-à-vis français, pardon, en reçoivent un nombre sensiblement équivalent.

Et imaginez un peu, M. le Président, quelle richesse ça donne au Québec, aux Québécois et aux Français que cet échange. Vous savez que, quelquefois, on met des programmes d'échange pour faire en sorte que des gens, dans différents milieux, économiques, sociaux, culturels, éducatifs, aillent visiter ou passer quelque temps dans d'autres pays pour acquérir des expériences, des nouvelles connaissances, s'ouvrir les idées à des expériences nouvelles. Eh bien, le tourisme le fait d'une manière encore plus efficace parce que les gens y vont d'eux-mêmes, décident d'y aller eux-mêmes, et cela, grâce à la promotion, grâce aux publicités aussi, grâce à l'intérêt de certaines agences gouvernementales qui font en sorte de les intéresser à venir visiter. Alors, c'est très bien pour nous, c'est très bien pour le Québec.

Et nous ne pouvons faire, aujourd'hui, que féliciter le travail acharné de M. Gilles Houde, qui, je vous le rappelle, lorsqu'il était à la Délégation du Québec à Paris, fut un fonctionnaire de l'État du Québec exemplaire et qui obtient de très grands résultats en ce qui concerne le développement du tourisme québécois vers la France. Et je vous rappellerai que le tourisme est certainement, M. le Président, une des activités économiques fondamentales du développement économique du Québec, particulièrement dans les régions, là où sont situés des gîtes ruraux, des maisons d'hôte, des petits hôtels, des pourvoiries, des organismes qui font des festivals de toutes sortes et où les touristes venant de France, bien sûr, sont très heureux et pour lesquels ils sont très friands.

Alors, voilà, M. le Président, nous ne pouvons que le féliciter. Et je suis heureux aujourd'hui de pouvoir présenter cette motion en Chambre et bien sûr en même temps encourager tous les compatriotes québécois à faire du tourisme au Québec, mais aussi à aller visiter nos cousins français et aussi encourager tous les Français qui ont intérêt et qui veulent venir voyager à l'étranger, bien, de venir au Québec, de nous rencontrer. Et, bien sûr, ils seront accueillis, comme à chaque fois lorsqu'ils viennent ici, comme des gens de la famille, comme de la parenté et il nous fera plaisir, bien sûr, toujours de les considérer comme nos amis. Et donc, nous souhaitons qu'ils viennent de plus en plus nombreux. Alors voilà, M. le Président, ceci met fin à ma motion. Et, encore une fois, félicitations à M. Gilles Houde pour avoir reçu cette médaille directement du gouvernement français.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je vais céder la parole maintenant à M. le ministre de la Jeunesse, du Loisir et du Sport. M. le ministre.

M. Richard Legendre

M. Legendre: Merci, M. le Président. Alors, je joins ma voix à celle du député de LaFontaine afin de féliciter M. Gilles Houde, qui a reçu la médaille d'or du tourisme français. Cette reconnaissance internationale lui a été remise récemment par M. Charles Barbier, directeur général de la Maison de la France au Canada.

Gilles Houde, qui signe chaque semaine une chronique sur le tourisme dans le quotidien La Tribune de Sherbrooke, a connu une longue carrière politique, notamment comme porte-parole de l'opposition libérale en matière de jeunesse, de sport et de tourisme puis comme adjoint parlementaire au ministre du Tourisme. Il a oeuvré par la suite au Palais des congrès de Montréal, à la Commission touristique Magog-Orford et a été délégué à l'Office du tourisme du Québec à Paris. M. Houde a donc consacré une grande partie de sa carrière au tourisme québécois.

Le directeur général de la Maison de la France, M. Charles Barbier, dit de M. Houde qu'il était un véritable ami de la France. Et j'ajouterai qu'il est évidemment d'abord et avant tout en amour avec le Québec et qu'il sait très bien ce que le Québec peut offrir comme expérience touristique aux touristes du monde entier, et je pense qu'il a fait partager à bien des gens son grand amour pour le Québec.

M. Houde est encore très actif aujourd'hui évidemment. Il continue, à travers sa chronique dans le quotidien La Tribune, à faire partager ses découvertes sur le Québec. Alors, je lui souhaite, en terminant, M. le Président, de poursuivre encore très longtemps sa retraite fort active. Merci.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, nous en sommes maintenant rendus aux avis touchant les travaux des commissions. Et j'inviterais M. le leader du gouvernement à nous faire part de ces travaux.

M. Simard (Montmorency): Alors, merci à vous, M. le Président.

J'avise donc cette Assemblée que la commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 76, Loi modifiant les régimes de retraite des secteurs public et parapublic, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Que la commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 104, Loi modifiant la Charte de la langue française, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des affaires sociales entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 98, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 21 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des institutions entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 86, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, la Loi sur les cours municipales et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.

n(11 h 10)n

J'avise également cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre: projet de loi d'intérêt privé n° 211, Loi concernant la Ville d'Alma; projet de loi d'intérêt privé n° 213, Loi concernant la Ville de Saint-Hyacinthe; projet de loi d'intérêt n° 215, Loi modifiant la Charte de la Ville de Laval; projet de loi d'intérêt privé n° 239, Loi concernant la Régie d'assainissement des eaux usées de Boischatel, L'Ange-Gardien et Château-Richer; projet de loi d'intérêt privé n° 216, Loi concernant la Municipalité de Caplan; projet de loi d'intérêt privé n° 218, Loi concernant la Ville de Chandler, le jeudi 13 juin 2002, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 21 h 30 à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et

Que la commission des finances publiques entreprendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre: projet de loi d'intérêt privé n° 210, Loi modifiant la Loi constituant en corporation Les Frères du Sacré-Coeur; projet de loi d'intérêt privé n° 212, Loi concernant l'Église Adventiste du Septième Jour ? Fédération du Québec, le jeudi 13 juin 2002, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le leader du gouvernement.

Pour ma part, je vous avise que la commission des institutions se réunira en séance de travail, aujourd'hui, de 18 heures à 20 heures, au salon Johnson du restaurant Parlementaire. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous sommes maintenant rendus à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le député de Marquette, vous avez une question.

M. Ouimet: Le leader adjoint, en Chambre, a déposé une série d'amendements, ce matin, du ministre des Affaires de la Métropole et des Affaires municipales. Il manque quelques pages au niveau des amendements, parce que le dernier amendement que j'ai se termine avec le mot «et», et, donc, manifestement, il manque du texte. Alors, si on pourrait, dans le courant de la journée, corriger. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien, M. le leader, vous prenez note et puis vous verrez à corriger. Très bien.

Alors, ceci met fin, donc, à la période des affaires courantes.

Affaires du jour

Nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Et j'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer l'affaire à l'ordre du jour.

M. Simard (Montmorency): Avec plaisir, M. le Président. Je porte à votre attention l'article 8 au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 80

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 8, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 80, Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme.

Est-ce que M. le ministre... Il arrive à grands pas? Alors, M. le ministre de la Justice, je vous cède la parole.

M. Paul Bégin

M. Bégin: Projet de loi n° 80, M. le Président. Alors, M. le Président, il me fait plaisir de soumettre à cette Assemblée le projet de loi n° 80, qui porte sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme et qui a pour but de rendre transparentes les activités de lobbyisme exercées auprès des titulaires de charges publiques et à assurer ainsi le sain exercice de ces activités sur le plan de l'éthique. Il s'agit là, M. le Président, d'un projet de loi qui s'inscrit dans la lignée des législations similaires initiées dans plusieurs états modernes au cours des dernières années.

M. le Président, nul ne saurait remettre en cause la légitimité qui s'attache aux activités de lobbyisme. De telles activités, qui, comme on le sait, visent à influencer ou à orienter les décisions de nos parlementaires, de nos administrateurs publics ou encore de nos élus municipaux, ressortent étroitement du droit de chacun à la libre défense de ses intérêts, de la liberté d'association pour la promotion d'intérêts collectifs et, ultimement, de la liberté de participation à la vie démocratique. En fait, les activités de lobbyisme constituent un moyen efficace d'assurer la circulation de l'information dans le processus décisionnel public et, par conséquent, contribuent aux échanges souhaitables entre le secteur public et le secteur privé.

Tout en reconnaissant la légitimité des activités de lobbyisme, le projet de loi n° 80 introduit des mesures destinées, d'une part, à rendre plus transparentes ces activités et, d'autre part, à mieux encadrer sur le plan de l'éthique l'exercice même de celles-ci. Le projet de loi propose de couvrir les activités de lobbyisme visées et, sous réserve, toute communication orale ou écrite avec un titulaire d'une charge publique destinée à influencer ou susceptible d'influencer la prise de décision relativement à l'élaboration, à la présentation, à la modification ou au rejet de propositions législatives ou réglementaires, de résolutions, d'orientations ou de programmes et à l'attribution de subventions ou d'autres avantages pécuniaires, de permis, d'autorisations, de certificats ou d'autres formes de présentations déterminées par règlement.

En ce qui concerne les lobbyistes eux-mêmes, le projet de loi touche trois grandes catégories de lobbyistes: les lobbyistes-conseils, dont l'occupation ou le mandat consiste, en tout ou en partie, à faire du lobbyisme pour le compte d'autrui moyennant contrepartie; les lobbyistes d'entreprise, dont l'emploi ou la fonction au sein d'une entreprise à but lucratif consiste pour une partie importante à faire du lobbyisme pour le compte de l'entreprise; et finalement les lobbyistes d'organisation, dont l'emploi ou la fonction au sein d'une association ou d'un groupement à but non lucratif constitué... constitue à des fins patronales, syndicales ou professionnelles ou dont les membres sont majoritairement des entreprises à but lucratif.

Alors, le projet de loi propose également de couvrir, au titre des titulaires de charges publiques, toute personne susceptible de prendre les décisions en cause ou d'influer sur sa décision, c'est-à-dire, entre autres: les ministres et les députés, ainsi que les membres de leurs personnels; les personnes nommées à des organismes par le gouvernement ou un ministre; les administrateurs et les employés du gouvernement ou d'un de ses organismes; les maires, les conseillers municipaux, les employés des municipalités et les employés des organismes municipaux.

Je vous rappellerai également, M. le Président, que le projet de loi n° 80 comporte pour l'essentiel deux grands volets. Un premier volet, celui de la transparence, est consacré à la divulgation et à la mise à jour obligatoire, sur un registre public aisément accessible, d'un certain nombre de renseignements afférents aux activités de lobbyisme exercées auprès des titulaires de charges publiques. Un second volet, celui de l'éthique, vise à prévenir et à sanctionner les manquements à l'intégrité souhaitée auxquels peut donner lieu la pratique du lobbyisme.

En ce qui a trait à la divulgation et à la mise à jour obligatoire des renseignements portant sur les lobbyistes et leurs activités, le projet de loi crée un registre public, le registre des lobbyistes, dont la tenue serait confiée à l'officier de la publicité des droits personnels et réels mobiliers. Cet officier, en tant que conservateur du registre des lobbyistes, aurait principalement pour fonction de vérifier si les déclarations et avis de mise à jour correspondent aux exigences requises, de refuser les déclarations ou avis qui, à leur face même, sont non conformes à ces exigences et de donner des renseignements sur les conditions et modalités d'inscription de ces déclarations et avis de mise à jour.

En matière d'éthique, le projet de loi propose d'introduire une série d'interdictions pour les lobbyistes de même que des règles destinées à mieux circonscrire l'exercice par des titulaires de charges publiques d'activités de lobbyisme à la fin de leur mandat.

Le projet de loi propose également de créer la fonction de commissaire au lobbyisme chargé d'assurer la surveillance et le contrôle des activités de lobbyisme et aussi d'élaborer un code de déontologie destiné à régir la conduite des lobbyistes.

Enfin, M. le Président, je voudrais rappeler que le projet de loi prévoit des mesures disciplinaires et des sanctions pénales sévères en cas de manquement grave aux prescriptions de la loi ou au code de déontologie. Il impose également au ministre de la Justice l'obligation de faire, dans les cinq ans qui suivraient la sanction du projet de loi, un rapport sur la mise en oeuvre de la loi et du code de déontologie, de même que sur l'opportunité, le cas échéant, de les modifier.

n(11 h 20)n

Par ailleurs, M. le Président, ce projet de loi a été soumis à la consultation générale les 28, 29 et 30 mai cette année, devant la commission des finances publiques, et il a donné lieu à plusieurs propositions de modifications de la part de personnes ou groupes qui ont été entendus à cette occasion. Parmi ces propositions de modifications, certaines ont été retenues. Ainsi, des amendements seront introduits au projet de loi pour: affirmer plus clairement, dans les dispositions relatives à l'objet même du projet de loi, que le lobbyisme constitue un moyen légitime d'accès aux institutions parlementaires, gouvernementales et municipales: ajouter au titre des lobbyistes d'organisation visés par le projet de loi les lobbyistes agissant pour le compte de groupements constitués non seulement à des fins patronales, mais aussi à des fins syndicales ou professionnelles; couvrir, au titre des titulaires de charges publiques, les maires, les conseillers municipaux et les employés de l'ensemble des municipalités et des organismes municipaux et non uniquement ceux des municipalités ou organismes appartenant à une catégorie déterminée par règlement ? il y aura, à ce moment-là, M. le Président, deux dates où ça se fera, mais, dans un premier temps, pour les municipalités de plus de 10 000 et, dans un second temps, les autres; ensuite, attribuer au commissaire au lobbying le pouvoir d'ordonner pour un certain temps la confidentialité de renseignements qui concernent un projet d'investissement d'une entreprise lorsque la divulgation de ces renseignements sur le registre des lobbyistes risquerait de porter sérieusement atteinte aux intérêts économiques ou financiers de cette entreprise. Ces propositions de modifications sont de nature à modifier le projet de loi présenté sans remettre en cause les objectifs qu'il sous-tend.

Et, M. le Président, je n'ai fait que mentionner les principaux changements. Il y en a plusieurs autres qui tiennent compte de remarques qui nous ont été faites, par exemple sur des questions de délais, et qui ont leur importance dans la vie courante mais qui ne sont pas de la même ampleur que ceux que je viens de mentionner. J'ai transmis d'ailleurs à mon vis-à-vis de l'opposition ces amendements, qui font suite à une décision du Conseil des ministres en date d'hier, où j'ai soumis évidemment le rapport sur ce qui s'était produit en commission parlementaire, des suggestions que je croyais utiles de retenir et d'autres suggestions que pourraient faire mes collègues. Et le tout s'intègre dans des amendements que nous étudierons, je l'espère, dans un avenir rapproché, au moment de l'étude article par article. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Le prochain intervenant sera M. le député de Westmount?Saint-Louis. M. le député, je vous cède la parole.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci beaucoup, M. le Président. Nous sommes à l'étude sur le principe du projet de loi n° 80, Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. M. le Président, ce projet de loi n'est pas arrivé par génération spontanée. Ce projet de loi est le fruit du travail des gens du ministère de la Justice mais avec une commande bien spéciale.

Au début du mois de février, M. le Président, vous vous souviendrez que de nombreuses révélations journalistiques ont levé le voile sur des activités des anciens chefs de cabinet politique des députés de Rosemont et des députés de Verchères. Les chefs de cabinet politique, disais-je, ont été recyclés en courroies de transmission pour obtenir des subventions gouvernementales. Les fonds de substitution des commandites du tabac ont été signalés comme ayant été dans la mire des préoccupations lucratives de MM. Bréard et Desroches et au nom de la firme Oxygène 9.

Des membres de cabinets politiques et même au moins un ministre membre du cabinet actuellement, M. Simard... le député de Richelieu, je devrais dire, aurait référé des demandeurs de subvention à la compagnie Oxygène 9. L'affaire a fait grand bruit, au point où M. Bréard a dû démissionner de son poste de directeur général du Parti québécois. De même et de plus, un membre du Conseil des ministres, M. Gilles Baril, l'ancien député de Berthier, a annoncé sa démission du cabinet et éventuellement de son poste de député, entre autres, à cause des relations étroites qu'il entretenait avec M. Desroches et M. Bréard. Tout le monde a plaidé l'innocence. Et il n'en demeure pas moins que le gouvernement s'en trouva fortement ébranlé, et la réaction du premier ministre a été évidemment de déclarer que le gouvernement préparait la meilleure Loi sur le lobbying au monde.

Préalablement, M. Jean-Jacques Samson écrivait, dans Le Soleil du 12 février 2002: «Il faudra se rappeler, toutefois, que la future loi servira beaucoup plus, à court terme, dans une tentative pour redonner une virginité au Parti québécois, à freiner des manquements trop flagrants à l'éthique de la part des amis du régime qu'à discipliner et contrôler les véritables professionnels du démarchage. Une enquête policière, sinon publique sur ces pratiques serait plus urgente.» Ça, c'était le 12 février.

Le 13 février 2002, M. le Président, le premier ministre Bernard Landry a annoncé... le premier ministre et député de Verchères a annoncé son intention de déposer un projet de loi dès l'ouverture de la session pour faire en sorte qu'un projet de loi sur le lobbying soit déposé. Or, le projet de loi a été déposé, en fait, le 16 avril. Et nous avons fait des... Nous avons fait, depuis particulièrement la semaine dernière, trois ou quatre jours de consultations publiques sur le projet de loi. Il y a une trentaine de mémoires qui ont été présentés. Et, de l'avis d'à peu près tout le monde, on a tous trouvé que le projet de loi avait été fait et écrit dans une approche un peu... dans une période un peu dramatique pour l'écriture de ce projet de loi là, mais surtout que c'est un projet de loi qui a été un véritable festival de précipitation.

On a vu apparaître le projet de loi n° 80, Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, et, en fait, on a octroyé simplement cinq semaines, cinq semaines pour la préparation des mémoires. Ce n'est pas beaucoup, cinq semaines, pour la préparation des mémoires quand le projet de loi vient de sortir. On vous demande... Vous avez cinq semaines entre le moment où le projet de loi vient de sortir puis le moment où vous voulez déposer des mémoires, puis parfois des mémoires qui, malgré le peu de temps, ont été quand même fortement instructifs, mais surtout substantiels et évoquant plusieurs situations dans le domaine du lobbying qui font en sorte de nous faire réfléchir sur les objectifs mêmes que cherche à faire respecter ce projet de loi.

Et, M. le Président, on a particulièrement été sensibles, lorsque les gens sont venus discuter du sujet avec nous... D'abord, une des premières remarques ? puis c'est une remarque générale que j'avais faite d'ailleurs préalablement dans mes notes préliminaires ? ce projet de loi là a été fait comme si le démarchage ou le lobbying, comme celui que nous avons vu, que nous voyons ici, auprès des membres... des dirigeants soit de l'Assemblée nationale, des membres de l'Assemblée nationale, des membres du cabinet, était comme une espèce de péché, comme une espèce de chose sale, et au moment où, au contraire, même le Protecteur du citoyen est venu nous dire, est venu interpeller le ministre en lui disant: M. le ministre, vous avez une opinion très, très différente de ce qu'est la mienne, Protecteur du citoyen, de ce qu'est le lobbying. Le lobbying, c'est une institution qui, dans un modèle démocratique, est à peu près... une institution qui est incontournable dans un modèle démocratique parce qu'il permet justement à des groupes, à des gens d'avoir une courroie de transmission pour pouvoir justement rejoindre des décideurs et faire valoir un point de vue. Puis, faire valoir des points de vue, dans un système démocratique, eh bien, c'est une chose qui, à notre avis, en tout cas, est non seulement incontournable, mais souhaitable.

Ce qui n'est pas souhaitable, ce à quoi le projet de loi que nous avons devant nous ne répond pas, c'est évidemment à toutes ces questions qui relèvent du copinage ou qui relèvent de problèmes dont on a entendu amplement parler depuis le début du mois de février, du fait que des gens ou des amis du régime réussissent à avoir une partie des subventions qui s'en vont au financement de leurs activités privées ou encore des gens qui, parce qu'ils sont près des amis du régime, près des décideurs politiques, réussissent soit à élargir des crédits d'impôt pour des groupes particuliers ou encore créer de nouveaux crédits d'impôt pour des ambitions qui sont, ma foi, très limitées et qui sont dans l'ordre du privé, non pas d'intérêt public mais d'intérêt strictement privé. Et l'intérêt privé, laissez-moi vous dire, dans l'intérêt de quelques poches, parce qu'il ne s'agit plus de l'intérêt public lorsqu'on parle de cette façon de tenter de chercher des pourcentages sur les crédits d'impôt ou sur des subventions gouvernementales. Donc, bref, notre projet de loi n° 80 n'aura aucun impact sur ce qui s'est passé, sur le genre de chose qui s'est passé en début d'année au sein du gouvernement.

n(11 h 30)n

Il y a eu une précipitation, on la comprend. L'éditorialiste du Soleil appelle ça, lui, a un terme, «une tentative pour redonner une virginité au Parti québécois». On peut comprendre, on peut comprendre. Mais, même au-delà de cette question-là, même si le projet de loi ne répond pas à ce pour quoi il a été commandé, nous, nous comprenons que, comme dans d'autres législatures comme, par exemple, la Chambre des communes, donc le gouvernement du Canada, il y a près de 15 ans, la Chambre législative, l'Assemblée législative de l'Ontario, de la Nouvelle-Écosse, de la Colombie-Britannique ont déjà adopté des lois concernant le lobbying, des lois concernant l'organisation du lobbying par rapport... avec les gens, les décideurs de ces provinces et le gouvernement canadien, eh bien, nous comprenons que le gouvernement puisse avoir l'intention, et nous acceptons, et nous appuyons le gouvernement dans sa volonté d'avancer dans le principe d'avoir une loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme.

Toutefois, encore une fois, ce projet de loi là ne viendra pas répondre aux problèmes soulevés par les affaires Bréard, Desroches, Duhaime, Vaugeois et compagnie. Ça, c'est clair. Mais, d'un autre côté, si on veut s'attaquer au dossier du lobbying, du lobbyisme, comme outil de travail démocratique, eh bien, nous, on est tout à fait disposés à travailler dans ce sens-là. Et, d'ailleurs, c'est ce que nous avons fait tout au long de l'étude des mémoires et tout au long des auditions que nous avons eues. Nous avons eu près de 23 heures d'auditions, M. le Président.

Et, si on en vient à la conclusion, comme les gens qui sont venus nous le dire, que le projet de loi ne vient pas régler des questions soulevées en début de l'année, le projet de loi quand même a un intérêt à ce qu'il fait en sorte de réunir, trouver le moyen de définir qui peut au Québec faire du lobbying, qui peut... qui, selon le point de vue gouvernemental, doit être enregistré pour venir faire du lobbying auprès du gouvernement du Québec, et de ses instances, et de ses hauts fonctionnaires, évidemment de ses ministres et de ses députés, mais aussi auprès des municipalités, des municipalités de toutes les grandeurs. Que vous soyez à Sainte-Rose-du-Dégelis ou Montréal, le projet de loi a pour vous les mêmes, aura pour vous les mêmes... créera les mêmes obligations. Si vous voulez rencontrer le maire de Sainte-Rose-du-Dégelis, vous devrez vous enregistrer dans un registre spécialement prévu à cet effet ici, à Québec. Et, si vous voulez rencontrer le maire de Montréal, c'est la même chose. Si on veut vous rencontrer, M. le Président, ou encore le ministre de la Justice, il faudra s'enregistrer aussi.

Il y a des corrections qui se doivent d'être apportées. J'ai reçu ? et je remercie le ministre de nous les avoir fournies ? j'ai 30 pages de papillons, 30 pages de corrections, 30 pages d'amendements, qui seront apportés éventuellement lorsque nous étudierons le projet de loi article par article. Mais, pour l'instant, puisqu'on en est au principe puis qu'on a devant nous le projet de loi original, permettez-moi de souligner quelques-unes des défaillances que ce projet de loi là, qui a été encore une fois écrit de façon précipitée, ne permet pas de trouver... en tout cas, que, comme projet de loi, il comporte dans son économie tout l'équilibre que nous lui souhaiterions.

Au départ, le projet de loi est basé sur une vision un peu manichéenne de l'organisation sociale dans un État. Le projet de loi fait état d'une séparation entre les organismes à but lucratif et des organismes à but non lucratif, les organismes à but lucratif étant des organismes, dans la vision du gouvernement, comme... étant des organismes qui se doivent d'obliger leurs lobbyistes ou les gens qui les représentent à s'enregistrer. Et, d'autre part, les organismes à but non lucratif n'ont pas cette obligation.

D'ailleurs, c'est un peu spécial, ça va à l'encontre et c'est contraire à tout ce qu'il y a comme lois en Amérique du Nord sur le lobbying. Que ce soit au Canada, que ce soit en Colombie-Britannique, Ontario, Nouvelle-Écosse, dans tous les cas il y a une définition du mot «organization». Ici, on s'y est pris autrement. À mon avis, on s'y est mal pris.

Et, même dans les États américains, si on regarde la législation américaine, des États et des grandes villes américaines, je pense, entre autres, à Chicago, New York, Los Angeles, Atlanta qui ont, eux-mêmes, un code de déontologie pour l'organisation du lobbying vis-à-vis leur propre cité, et les États américains qui sont aussi à peu près tous organisés avec des lois sur le lobbying, dans tous les cas, la définition du mot «organization» ne fait pas de dichotomie entre des organismes qui seraient soi-disant à but lucratif, soi-disant à but non lucratif.

Ça amène, dans le projet de loi que nous avons devant nous, un problème de fond au départ, qui a été soulevé par beaucoup, beaucoup de groupes. Les gens ne comprenaient pas pourquoi, par exemple, le Conseil du patronat, une chambre de commerce, la Chambre de commerce de Lac-aux-Saumons étaient considérés comme un lobbyiste, mais pas la CSQ, pas la CSN, pas la FTQ, pas les syndicats, pas les associations. Les corporations professionnelles, le Barreau, le Collège des médecins, l'Ordre des architectes, l'Ordre des ingénieurs, ça, ce n'est pas des lobbyistes. Mais la Chambre de commerce, encore une fois, de Valleyfield, elle devient un lobbyiste important qui doit être obligé de s'enregistrer s'il veut parler à un ministre, à un député ou...

Alors, il y a un problème. On ne peut pas avoir deux poids, deux mesures. On ne peut pas vivre dans une société qui discrimine comme ça, M. le Président. Le projet de loi va être modifié, j'ai la copie de l'amendement. La copie de l'amendement est un peu, passez-moi l'expression... a une approche un peu jésuite. Je ne veux pas tout de suite discuter de l'amendement, M. le Président, ce n'est pas le temps, mais un amendement qui vient stipuler que les syndicats seront inclus, tout comme les corporations professionnelles, à l'intérieur des groupes qui seront considérés comme des lobbys dans l'avenir, est intéressant.

À partir du moment où on commence à faire une démarcation que les syndicats, lorsqu'ils sont en négociation, ne sont plus des lobbys, c'est un peu comprendre difficilement, puis mal comprendre, puis mal saisir c'est quoi, le rôle des syndicats. C'est un rôle qui est tout à fait pertinent. Mais, quand on est en négociation ? puis j'ai joué dans ce film-là pas mal, ayant été pendant huit ans, huit ans et demi membre du comité ministériel, coordonnateur des négociations au Conseil du trésor, ayant négocié régionalement et ayant négocié localement dans le secteur de l'éducation, et plus tard au CMCN dans tous les secteurs d'activité de l'État, eh bien, ce n'est pas... Si on spécifiait qu'il y a des syndicats aux tables de négociations qui ne sont pas en train de faire du lobbying, j'en conviendrais rapidement. Mais, quand le président de la CSN appelle le ministre de la Santé pour essayer de faire changer quelque chose dans l'organisation des tables CPN ? comité patronal de négociation, pour utiliser un vocabulaire que tout le monde comprend ? eh bien, évidemment il fait du lobbying. Puis il fait du lobbying, puis je le comprends, puis il a bien droit de le faire, puis c'est normal qu'il le fasse.

Mais c'est carrément ça, faire du lobbying: il appelle le ministre, ou il appelle le premier ministre, ou il appelle le président du Conseil du trésor dans le but d'influencer une orientation qui va avoir pour objet de changer le cours des négociations. Or, le cours des négociations au Québec, M. le Président, la valeur des négociations avec nos différents syndicats est exactement 50 % du budget de l'État. Il y a pour 24 milliards de dépenses salariales dans l'État du Québec sur un budget de 48. Ce n'est pas rien. Et aujourd'hui, bien, on est en train de... Le cabinet hier aurait accepté d'inclure les syndicats mais de les exclure en période de négociation. Alors, des syndicats, c'est toujours en période de négociation. Bref, on aura une bonne discussion lorsque le projet de loi sera à l'étude article par article.

Une discussion aussi parce que le projet de loi enlève les organismes à but non lucratif de son contrôle immédiat. Mais des organismes à but non lucratif, M. le Président, il faut regarder combien il y en a puis qu'est-ce qu'ils font. Ils font tous du bien. Partons de cette évidence: tout le monde fait du bien. Mais si on regarde l'expérience, par exemple américaine, l'expérience américaine dans le lobbying, on va s'apercevoir que le lobby le plus important aux États-Unis, c'est l'American Association of Retired People, AARP.

Des voix: ...

M. Chagnon: Je vois que j'ai au moins quelques auditeurs. Je vais leur permettre de continuer mon...

Une voix: Nommez-les.

n(11 h 40)n

M. Chagnon: Je vais les nommer. Et, M. le Président, l'American Association of Retired People regroupe 33 millions d'adhérents ? 33 millions d'adhérents. Ils ont, dans leur bureau de Washington, 22 à 25 personnes dûment enregistrées. Ils n'ont pas rien que 22 à 25 personnes, ils ont 22 à 25 personnes enregistrées comme lobbyistes au Parlement du congrès, au Congrès américain et au Sénat. C'est énorme et c'est d'ailleurs... Aux États-Unis, dans la majorité des dossiers ou dans la majorité des études où on parle de lobbying, on fait référence à cette association-là comme étant «the Grey Power», le pouvoir gris, et cette expression-là est devenue... s'est francisée et elle s'est latinisée, et on la retrouve d'ailleurs aujourd'hui non seulement en français, mais on la retrouve dans plusieurs langues, parce que dans tous les pays occidentaux où on voit puis où il y a un vieillissement de la population, on voit jusqu'à quel point les organismes ont réussi à se regrouper et à prendre la défense de citoyens, de groupes de citoyens. Ici, qu'on pense à l'AQDR ou la FADOQ, l'AQDR et la FADOQ, si, à votre avis, ce n'est pas des organismes qui font du lobby, moi, je ne sais pas comment on appelle ça. Mais, d'un point de vue gouvernemental, ce n'en serait pas, ce n'en seront pas.

Le deuxième organisme américain, deuxième lobby le plus important aux États-Unis, c'est le National Rifle Association, NRA, National Rifle Association, dont le seul but, dans le fond, c'est de faire en sorte que la Constitution américaine puisse continuer de garantir aux citoyens américains le pouvoir de porter des armes. C'est assez curieux, là. Ce n'est pas un organisme à but lucratif, là, c'est un organisme sans but lucratif. Mais vous voyez l'importance d'organismes sans but lucratif et vous savez, parce que vous l'avez sûrement lu, jusqu'à quel point cet organisme-là est puissant puis important puis qu'il fait pression chez les représentants au Congrès, et les sénateurs au Sénat américain, et même aussi dans tous les États des États-Unis. Or, le National Rifle Association, eh bien, est un organisme qui est un organisme à but non lucratif. Si on était au Québec ? bien, pas si on était, on est au Québec ? avec la législation que nous suggère le gouvernement du Québec, ces associations-là ne seraient pas considérées comme des lobbys ici. C'est assez curieux. Il y a comme des grands trous dans le projet de loi, même amendé, tel qu'on veut l'amender, que nous retrouvons ainsi aujourd'hui.

Je mentionnerai, M. le Président, que le projet de loi a été écrit un peu rapidement. Et, quitte à regarder quelques amendements, on dit ici, l'article 2: «Constituent des activités de lobbyisme au sens de la présente loi toutes les communications orales ou écrites avec un titulaire d'une charge publique en vue d'influencer ou susceptibles d'influencer la prise de décisions relativement:

«1° à l'élaboration, à la présentation, à la modification ou au rejet de propositions législatives ou réglementaires, de résolutions, d'orientations ou de programmes;

«2° à l'attribution de contrats, de subventions et d'autres avantages pécuniaires, de permis, de licences, de certificats ou d'autres autorisations, ou à l'attribution de toute autre forme de prestation déterminée par règlement du gouvernement.»

Eh bien, M. le Président, on a reçu, dans nos rencontres, un organisme qui a pour but de représenter les gens qui font de la prospection, du démarchage dans le secteur informatique, et un des problèmes qu'ils nous soulevaient, problème pratico-pratique, ils nous ont dit: Écoutez, si on lit votre projet de loi comme on le lit, tous nos représentants qui sont actuellement dans le coeur des ministères en train de travailler sur des programmes informatiques ne sont pas des consultants, ne sont pas des vendeurs, mais deviennent des lobbyistes pour la bonne et simple raison que, lorsque ces gens-là sont invités à venir travailler dans un ministère ou dans un organisme public, ils y viennent, ils regardent la situation, ils préparent un plan et devis pour faire en sorte éventuellement que le ministère en question puisse aller en contrat pour le développement de son programme informatique, tant pour le hardware que le software, tant pour la machinerie que le ministère devra acheter pour pouvoir travailler, que les logiciels ou les progiciels qui seront nécessaires pour les fins déterminées puis les besoins du ministère. Or, on s'aperçoit que, par exemple, lorsqu'on s'en va dans le dossier de l'informatique, généralement, pour ne pas dire presque tout le temps, le montant qui est alloué, au départ, pour l'achat d'équipements informatiques et le montant qui, à la fin du programme, est réellement dépensé subit une variable de 3 à 4 puis, parfois, 500 %.

Je vais vous donner un exemple: le programme GIRES au ministère du Conseil exécutif, mais plus particulièrement au Secrétariat du Conseil du trésor. Le programme GIRES, dont l'objectif est louable, chercher à réorganiser une grande partie de l'activité informatique du Conseil du trésor et des ministères, devait coûter 85 millions de dollars. Depuis que les gens sont dedans, depuis que les spécialistes en informatique sont à travailler dessus, la dépense prévue, on l'a vu, hier, dans le dernier document publié par le Vérificateur général, la dépense aujourd'hui est rendue à 345,2 millions de dollars. On était parti à 85, il y a deux ans et demi; aujourd'hui, on est à 345; et la complétion de ce programme-là, c'est pour 2006.

Ça vous donne une idée. Il y a encore quatre ans pour dépenser, pour trouver le moyen de dépenser plus que 345 millions, et je vous promets à l'avance, je peux vous dire à l'avance, M. le Président, que le gouvernement va, évidemment, faire en sorte de trouver le moyen de dépenser plus que 345 millions, parce qu'il y a des gens qui vont arriver avec de nouvelles solutions, plus modernes, plus ci, plus ça. Plus le temps court, plus la recherche se fait dans le secteur informatique, plus les appareils prennent de la vigueur et de la force et plus les besoins en termes de progiciels risquent de se compliquer.

Alors, bref, tous les gens qui travaillent dans ce secteur-là, dans le secteur informatique, risqueraient, puis selon CGI, selon IBM, d'être considérés comme des lobbyistes. Le ministre leur a dit: Non, non, moi, je vous considère comme des consultants. Le problème, c'est que, lorsqu'on relit la loi: «Constituent des activités de lobbyisme au sens de la présente loi toutes les communications ? toutes les communications ? orales ou écrites avec un titulaire d'une charge publique en vue d'influencer ou susceptibles d'influencer la prise de décisions [...] à l'attribution de contrats [...] est assimilé à une activité de lobbyisme.» C'est ça qu'il dit, l'article 2.

Alors, M. le Président, on va se ramasser avec d'immenses problèmes d'organisation un beau matin, parce qu'il y aura toujours quelqu'un qui va venir se plaindre, qui va venir se plaindre à un autre sujet qui est le choix du gouvernement, c'est-à-dire d'avoir un commissaire au lobbyisme, qui ? et là je le dis parce que je pense que c'est une qualité qu'on lui attribuera ? ce commissaire au lobbyisme, sera désigné par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale, sera une des personnes nommées par l'Assemblée nationale, donc ayant subi le test de l'acceptation par les deux tiers des membres de l'Assemblée nationale.

À mon avis, c'est une approche qui est supérieure à celle qu'on retrouve, par exemple, au gouvernement fédéral, où le conseiller à l'éthique du gouvernement fédéral est nommé par le premier ministre du Canada et donc est redevable au premier ministre du Canada. Je préfère de loin la situation qui nous est proposée dans ce projet de loi là et qui fait en sorte que le commissaire au lobbying sera désormais une personne nommée par l'Assemblée nationale, et elle devra en même temps répondre ? et nous verrons plus tard à faire en sorte que, dans le projet de loi, ce soit mieux exprimé ? elle verra à répondre aux membres de l'Assemblée nationale sur ces questions.

M. le Président, on a déjà ici, à l'Assemblée nationale, pour les membres de l'Assemblée qui veulent s'en servir, un conseiller, un conseiller à l'éthique. Nous avons déjà notre conseiller à l'éthique qui s'appelle le jurisconsulte. Le jurisconsulte de l'Assemblée nationale est une personne, généralement un juge à la retraite, qui, à la demande d'un député, peu importe son parti, mais à la demande d'un des 125 députés de l'Assemblée, peut répondre à ce député, s'il est questionné, à savoir si le député pourrait faire un geste, acheter un équipement ou éviter, en tout cas, de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts.

n(11 h 50)n

Si un député pense qu'il pourrait être dans une situation de conflit d'intérêts, il peut faire appel au jurisconsulte et faire en sorte que le jurisconsulte lui dise: Oui, bien sûr, il y a possibilité de conflit d'intérêts, ou non, bien sûr, il n'y en a pas. Mais, s'il n'y en a pas, évidemment que le jurisconsulte a donné le blanc-seing à un député en fonction de ce qu'il compte faire, évidemment, ce député est libéré de toute éventuelle plainte ou accusation de conflit d'intérêts. C'est très bien ainsi. Mais le gouvernement aurait peut-être intérêt à faire en sorte que son commissaire au lobbying soit aussi un conseiller en éthique, ou qu'on ait aussi un conseiller en éthique, pour s'assurer que non seulement les députés, mais aussi que les hauts fonctionnaires, que tous les gens qui sont susceptibles d'être approchés parce qu'ils ont ou qu'ils sont dans une zone d'influence... soient aussi susceptibles de pouvoir recevoir ce genre de conseil. Et même, et même un conseiller en éthique devrait avoir une capacité de pouvoir déposer des plaintes lorsqu'il le juge à propos. On ne retrouve pas cela dans le projet de loi du ministre. Ce serait l'objet d'une bonne discussion, je pense, qu'on devrait avoir. Et, en tout cas, une chose est certaine, on peut faire en sorte d'essayer d'améliorer le projet de loi qui, encore une fois, a été un peu proposé de façon rapide à l'Assemblée nationale.

Le professeur Hudon, un spécialiste dans les questions de lobbying à l'Université Laval, disait dans son mémoire que les élus québécois ne devaient pas donner suite au rapport d'étape de la commission des finances publiques de l'Assemblée nationale qui, dans le cadre d'un mandat d'initiative sur l'examen de l'activité du lobbying au Québec, recommandait, en 1997, l'établissement, au moyen d'une loi, d'un cadre juridique basé sur un mécanisme d'autoréglementation confié à une personne morale qui regrouperait tous les lobbyistes sous une même entité juridique. Eh bien, c'est probablement la définition puis l'organisation de ce qu'on pourrait le mieux chercher ou même surtout trouver dans l'exercice dans lequel nous convie le ministre de la Justice, et c'est probablement cette approche-là qui serait, sinon supérieure à celle d'un commissaire au lobbying, à tout le moins qui devrait être complémentaire à l'idée d'avoir un commissaire au lobbying. Et le professeur Hudon, en page 4 de son mémoire, signale aussi qu'elle contraste avec l'apparente urgence qui marqua la préparation et le dépôt du projet de loi, de la présente consultation, consultation de la semaine dernière, il s'agissait bien sûr.

Alors, on se retrouve avec un projet de loi qui conserve des germes de discrimination à l'endroit des groupes qui seront considérés comme lobbyistes ou étant considérés comme lobbyistes et ceux qui n'en sont pas. Je vous rappelle, M. le Président, que la définition qu'on retrouve du mot «organization» dans toutes les autres législations concernant le lobbying font le tour de tout ce qui grouille, grenouille ou scribouille, comme disait le général, en matière de groupes, qu'ils soient privés, publics, à but lucratif, sans but lucratif, avec des fonctions nationales, charitables, patrimoniales, charismatiques, tout ce que vous voulez, se retrouve dans la cible, dans le giron, dans le collimateur des législateurs des autres provinces de façon à s'assurer que chacun des groupes, chacun des groupes qui représente véritablement un intérêt puisse être considéré sur le même pied face à l'État, l'État du Québec dans ce cas-ci.

J'aurais personnellement grandement, et c'est encore le temps peut-être de convaincre le ministre, essayer de reconvaincre le ministre de faire en sorte de prendre la définition du mot «organisation», qu'on retrouve tant dans la législation canadienne que dans la législation des autres provinces, ou encore... j'ai d'autres exemples de législations, j'en ai fourni trois ou quatre durant la commission parlementaire, mais j'en ai encore une dizaine d'autres pour, comme je le soulignais tout à l'heure, des législations qui viennent d'États américains ou de certaines grandes villes américaines comme New York, Atlanta, Chicago et Los Angeles, qui ont une définition beaucoup plus large des gens qui doivent être considérés comme étant des groupes reconnus pour faire du lobbying avec l'État.

Une autre question qui a été posée à plusieurs reprises et dont les amendements semblent en partie répondre, c'est toute la question qui repose sur la confidentialité. Lorsque vous faites affaire avec un gouvernement et que, par lobbying, puisque vous avez l'intention d'avoir un objet, ou d'aller chercher une oreille discrète, ou d'avoir au moins éventuellement peut-être une subvention, ou peut-être parce que vous avez un projet, eh bien, évidemment, la discrétion s'impose dans certains cas. Et plusieurs groupes nous ont fait part de l'incapacité ou de l'impossibilité que la législation actuelle leur fournissait de pouvoir faire affaire au Québec sans que toute leur concurrence sache et connaisse d'avance quelles étaient ou quelles seraient leurs intentions de financement ou d'investissement. Il y a une partie, il y a un règlement, il y a quelques amendements qui viendront faire en sorte de corriger cette question-là qui est essentielle pour l'organisation du développement économique du Québec.

Il y a, d'autre part, d'autres questions qui sont laissées en plan. On n'a pas eu beaucoup l'occasion d'en discuter avant le dépôt des amendements. Mais le Protecteur du citoyen, M. le Président, rappelle que, dans le fond, il ne comprend pas, ou elle ne comprend pas, que tous les membres de l'Assemblée nationale ne soient pas considérés comme étant des gens qui... auprès de qui les lobbyistes devraient s'enregistrer. Le gouvernement s'en tient, dans le fond, à la liste des membres, des gens qui sont assermentés pour assister aux réunions du cabinet et les attachés politiques. Les autres députés se trouvent en grande partie exemptés de cette loi. C'est questionnable, M. le Président, le Protecteur du citoyen questionne, et je questionne. Je trouve que... je comprends mal en tout cas pourquoi les députés ne sont pas, eux aussi, assujettis, peut-être avec un degré en termes de délai de carence pour retourner faire du lobbying après avoir été députés, peut-être avec des délais de carence différents, mais je ne comprends pas qu'on ne considère pas les députés comme étant des décideurs. Et c'est une question en tout cas qu'on aura à discuter en commission parlementaire. Bref, c'est quand même un sujet qui mérite d'être approfondi.

Il y a d'autres sujets qui sont intéressants. Il y a cet article qui stipule qu'«aucun lobbyiste ne peut exercer ses activités moyennant une contrepartie conditionnelle à l'obtention d'un résultat ou subordonnée au degré de succès de ses activités.

«Aucun lobbyiste ne peut, non plus, exercer ses activités moyennant une contrepartie provenant d'une subvention ou d'un prêt du gouvernement, d'une municipalité ou d'un de leurs organismes.»

Ça, ça veut dire qu'en principe, puis je comprends l'intention du législateur... Ce que ça veut dire, c'est que vous ne pourriez pas utiliser une partie de la subvention ou d'un prêt gouvernemental, d'une municipalité ou d'un organisme municipal, pour financer les travaux de votre lobbyiste. Je comprends l'intérêt...

Une voix: ...

n(12 heures)n

M. Chagnon: On me dit qu'il y a un amendement qui s'en vient là-dessus. Oui, j'ai vu qu'il y avait un amendement. Mais, mon problème, c'est que je suis obligé de travailler avec non seulement l'amendement, mais le texte initial. Là, on verra peut-être un peu plus loin l'amendement. Mais «aucun lobbyiste ne peut exercer ses activités moyennant une contrepartie conditionnelle à l'obtention d'un résultat ou subordonnée au degré de succès de ses activités». Plusieurs groupes sont venus nous dire que leur fonctionnement, parce qu'ils font affaire avec des sociétés multinationales, leur fonctionnement est très souvent conditionné au résultat qu'ils vont recevoir ou qu'ils vont obtenir. Et, évidemment, là devient... on peut se poser de nombreuses questions. Est-ce qu'une partie de la subvention a servi à financer les travaux d'un groupe ou d'un autre?

D'un autre côté, le gouvernement est pris avec un problème parce qu'une partie des effets, là, une partie de ce qu'il voudrait éviter, c'est qu'on se serve d'une subvention pour financer le lobbyiste, parce qu'il deviendrait non seulement un démarcher à taux ou à pourcentage sur les subventions gouvernementales, ce qui est extrêmement rare dans le monde des lobbyistes et qui sont des gens qui fonctionnent plus souvent qu'autrement avec des ? passez-moi l'expression ? «retainers», des sommes qui leur sont fournies sur une base mensuelle ou annuelle, des avances de services, je pourrais dire, hein, des avances de services qui sont fournies sur une base hebdomadaire ou mensuelle plutôt que par pourcentage. Le gouvernement cherche à éviter que des montants ou les pourcentages puissent devenir suffisamment intéressants pour intéresser non pas des lobbyistes, mais des gens qui seraient peut-être plus près du trafic d'influence que du lobbying.

Je comprends, je comprends l'intention du législateur, mais le problème, c'est qu'il y a beaucoup de groupes qui sont... il y a beaucoup, beaucoup de groupes, y compris des avocats, qui sont venus nous dire: Écoutez, nous sommes souvent rétribués par la qualité du travail que l'on fait. On est souvent rétribués en fonction du niveau de satisfaction de notre client, de satisfaction financière de notre client.

Et en même temps le Protecteur du citoyen est venu nous dire... Parce que, si on avait rien que le Barreau pour nous guider dans ces questions-là, on aurait un guide qui serait un peu comme le cyclope dans le pays des aveugles. Mais, si on se fie aussi au Protecteur du citoyen, bien, le Protecteur du citoyen est venu nous dire: Écoutez, ça m'achale parce que, si vous fermez la porte au fait que les organismes qui se financent par... Les organismes, ça peut être... Pensez à des organismes, entre autres, dans le secteur des arts. Le secteur des arts est venu nous le dire exactement de cette façon-là aussi. Pensez à des petits organismes qui vont faire des démarches auprès des gouvernements pour recevoir une subvention. C'est clair qu'ils vont financer leurs lobbyistes en fonction puis avec la subvention qu'ils vont recevoir. En deux mots, ce que le Protecteur du citoyen nous disait: Faites attention, cet article-là vient condamner de petits organismes à ne plus être capables de faire affaire avec le gouvernement parce qu'ils n'auront pas les moyens de se financer autrement que par le biais de la subvention ou du prêt que le gouvernement pourrait leur émettre, et c'est très pertinent.

L'ADISQ, la société, l'ADISQ, tout le monde connaît le Gala de l'ADISQ, mais l'ADISQ est venue nous rencontrer puis nous dire à peu près la même chose en nous disant: Écoutez, il y a des festivals, par exemple, qui sont financés en partie avec des subventions, et les gens qui courent après ces subventions-là sont eux autres mêmes financés en partie avec la subvention qu'ils vont chercher. Donc, pour plusieurs événements, les subventions qu'ils reçoivent sont la différence entre la vie, la survie ou la mort d'organismes ou d'activités qui sont socialement très, très louangés, par ailleurs. Bref, M. le Président, ce projet de loi connaîtra ? et cet article connaîtra, le ministre me le signale ? un amendement. Alors, j'aurai d'autres discussions sur le fonds de cet amendement-là plus tard en commission parlementaire, mais il n'en demeure pas moins que ce point-là a été soulevé et demeure un dossier important.

J'ai soulevé plusieurs questions concernant le pouvoir du commissaire, le pouvoir que je trouvais extrêmement important du commissaire quand il peut autoriser, à l'article 38, «peut autoriser toute personne à agir comme inspecteur pour vérifier l'application des dispositions de la présente loi ou du code de déontologie. La personne ainsi autorisée à agir comme inspecteur...» Puis je vous invite à bien écouter ça: «La personne ainsi autorisée à agir comme inspecteur peut:

«1° pénétrer, à toute heure raisonnable, dans l'établissement d'un lobbyiste ou d'un titulaire d'une charge publique, ou dans celui où ils exercent leurs activités ou fonctions.»

Je trouvais ça un peu draconien comme approche et j'en ai fait part au ministre, puis on a eu une longue discussion. On a fait venir un spécialiste en droit constitutionnel du ministère qui nous a expliqué un peu que, cette situation-là, on pouvait la retrouver dans d'autres cas de législation.

«2° l'inspecteur peut exiger des personnes présentes tout renseignement relatif aux activités ou fonctions exercées par le lobbyiste ou par le titulaire de la charge publique, ainsi que la production de tout livre, registre, compte, dossier ou autre document s'y rapportant;

«3° examiner et tirer copie des documents comportant des renseignements relatifs aux activités ou fonctions exercées par le lobbyiste ou par le titulaire d'une charge publique.

«Toute personne qui a la garde, la possession ou le contrôle des documents visés au présent article doit, sur demande, en donner communication à la personne qui procède à l'inspection et lui en faciliter l'examen.»

Je trouvais, M. le Président, que c'était pas mal fort. On peut rentrer chez vous, pénétrer à toute heure raisonnable dans votre établissement, si vous êtes lobbyiste ou un titulaire d'une charge publique, ou dans celui où ils exercent leurs activités ou fonctions. J'avais fait la remarque qu'on ne traitait même pas les Hell's Angels de cette façon-là. On demandait au moins, pour entrer chez un Hell's, d'avoir un mandat de perquisition. Mais il est vrai que, dans certaines autres législations, concernant, par exemple, la curatelle publique ou encore les lois sur la fiscalité, les lois sur le ministère du Revenu, il y a des choses qui semblent s'approcher de ça comme pouvoirs qui sont donnés à l'inspecteur. Ça m'apparaît quand même extrêmement gros, extrêmement puissant.

Le Barreau est venu nous dire que, si le lobbyiste est un avocat, «tough luck», là on ne pourra pas rentrer chez l'avocat, dans son bureau, comme ça, avec les dispositions de l'article 38. Parce que, si vous voulez faire une perquisition dans un bureau d'avocat, la première chose qu'on va exiger, que l'avocat va exiger, c'est que le syndic soit là et un représentant, que le syndic du Barreau soit représenté.

Et, en ce qui nous concerne, là, j'ai demandé au ministre de chercher à trouver le moyen de faire en sorte que l'on trouve un tiers ? le tiers qu'il a trouvé, c'est le commissaire, le commissaire au lobbying ? mais de trouver un tiers qui pourrait regarder ces dispositions-là comme un juge le fait avant d'émettre un mandat de perquisition, et le ministre a réfléchi à cette question-là. Je pense l'avoir sensibilisé suffisamment. La suggestion qu'il nous fait ? je suis un peu mal pris, j'ai tendance à vouloir un peu parler des amendements ? mais la proposition qu'il nous fait, c'est que le commissaire au lobbying devienne cette personne qui soit ce tiers. Mais c'est un peu curieux. Je vous relis l'article. L'article 38 dit: «Le commissaire ? le commissaire au lobbying, là ? peut autoriser toute personne à agir comme inspecteur pour vérifier l'application des dispositions de la présente loi ou du code de déontologie. La personne ainsi autorisée à agir comme inspecteur peut...» Alors, l'inspecteur vient représenter le commissaire au lobbying, et la disposition et l'amendement que nous suggère le ministre, c'est de faire en sorte que le commissaire soit celui qui accepte la plainte ou qui accepte le fait qu'on pénètre à toute heure raisonnable. Ça me paraît un peu bancal.

On dirait que le juge de cette situation-là est elle-même partie au dossier. C'est un peu comme si la police demandait au ministre de la Justice la possibilité de pouvoir faire une perquisition. La raison pour laquelle, dans notre système de droit, on demande à un tiers qui n'est pas membre, par exemple, de l'Exécutif de pouvoir faire un mandat de perquisition...

On va, par exemple, on va dans le secteur judiciaire, on demande à un juge la possibilité d'avoir ou pas le droit de faire un mandat de perquisition. Il m'apparaît qu'il y a quelque chose qui est tordu un peu dans ce qui s'en vient là-dedans. Mais on en discutera plus tard en commission parlementaire et on aura, somme toute, probablement beaucoup d'occasions de regarder ces questions-là.

Il y a d'autres sujets qui semblaient... en tout cas pour lesquels le ministre avait beaucoup de... attachait beaucoup de valeur. Moi, personnellement, j'en attache moins. La déclaration initiale du lobbyiste, le dixième point de la déclaration initiale, c'est: «Parmi les tranches de valeurs qui suivent, celle dans laquelle se situe le montant ou la valeur de ce qui a été reçu ou sera reçu en contrepartie de ses activités de lobbyisme: moins de 10 000 $, de 10 000 $ à 50 000 $, de 50 000 $ à 100 000 $ et 100 000 $ ou plus.» Je ne suis pas certain, je suis loin d'être certain que ce soit une bonne idée que les revenus, ou les dépenses, là, qu'on le regarde d'un côté ou de l'autre de la lorgnette, que les revenus ou les montants demandés par les firmes de lobbyistes doivent être rendus publics. Il s'agit, à mon avis, d'un contrat privé. Mais ce que je cherche à faire... contrat privé, donc, en principe, ne devant intéresser que les parties qui sont concernées.

Ce qui intéresse le ministre ? et il me le disait, puis je le comprends ? il me dit: Quand le National Rifle Association, pour reprendre l'expression de l'organisme qui ne serait pas, au Québec, un lobby, a dépensé 50 millions dans une année, il dit, j'aimerais ça le savoir, ça m'aiderait de savoir que le National Rifle Association a dépensé 50 millions et non pas 75 000 $. Je le comprends. Bien, ce n'est pas bien, bien compliqué à trouver, ça, parce que le National, n'importe quel organisme, National Rifle Association y inclus, a un rapport annuel dans lequel ils nous disent, dans le rapport annuel, inévitablement ? ils n'ont pas le choix ? ils nous disent qu'est-ce qu'ils ont dépensé en cours d'année. Que ce soit tel lobbyiste ou tel autre lobbyiste qui a eu telle part ou telle autre part de la dépense, l'intérêt pour nous est secondaire. Ce qu'il est intéressant de savoir, c'est quelles sont les dépenses faites par un organisme comme celui-là pour faire valoir son point de vue. Or, dans le fond, que l'inscription d'un lobbyiste-conseil soit faite par la présentation au registre d'une déclaration contenant les renseignements suivants ? puis, celui-là encore, je le répète: parmi les tranches de valeurs qui suivent, celle dans laquelle se situe le montant ou la valeur de ce qui a été reçu ou sera reçu en contrepartie de ses activités: moins de 10 000, plus de 10 000, 50 000 à 100 000, 100 000 et plus, c'est un intérêt, à mon avis, tout à fait relatif, et on aura certainement des discussions à ce sujet-là en commission parlementaire.

n(12 h 10)n

Bref, M. le Président, c'est un projet de loi intéressant...

Une voix: ...

M. Chagnon: Je ne dirais pas ça, mais intéressant et qui ? je l'avais suggéré en commission... J'avais suggéré en commission que... Il y a plusieurs articles qui méritent d'être modifiés. Donc, j'avais suggéré qu'on en fasse une réécriture, mais le ministre nous dit: Au lieu de faire une réécriture, je vais amener des amendements. Mais j'ai quasiment autant d'amendements que l'objet pour faire une réécriture, mais... Et j'ai d'autres amendements à vous suggérer, évidemment, parce qu'il faudra regarder des amendements que nous proposait chacun des groupes qui sont venus nous rencontrer en commission de façon à examiner comment on peut faire en sorte d'améliorer encore ce projet de loi là.

Alors, bref, en commission parlementaire, lors de la fin des audiences, j'avais suggéré comme méthodologie de travail que le ministre dépose un projet de loi modifié en Chambre, que nous l'adoptions, et je comprends... La mécanique ne me dérange pas beaucoup, on a les amendements. En fait, ce que je suggère, c'est qu'on adopte, dans le fond, le principe du projet de loi le plus rapidement possible dans cette session-ci, et je suggérerais aussi que nous étudiions, pendant la période intersessionnelle... faire l'étude article par article du projet de loi, en prenant tout le temps qu'il faut pour éviter justement encore une fois d'être accusés de précipitation, puis en même temps faire le travail le plus sérieusement possible. Je pense avoir soulevé quelques questions qui vont mériter une bonne discussion entre le ministre et moi, et peut-être d'autres qui voudront s'y approcher, soit du groupe ministériel, ou du groupe de l'opposition, ou... bien, on ne les a jamais vus, mais ou de l'ADQ. Mais c'est un sujet qui est intéressant puis qui est important.

Alors, j'avais suggéré donc qu'on fasse l'étude article par article dans l'intersession et que, finalement, au début de la session suivante, nous adoptions le projet de loi. Le gouvernement, je pense, semble être plus pressé. Si j'ai bien compris, on veut faire l'article par article quelque part la semaine prochaine, alors on se soumettra évidemment au calendrier gouvernemental, mais j'aimerais... Je le répète ici, je cherche à faire un travail sérieux et je voudrais qu'on prenne le temps qu'il faut pour passer à travers chacun des amendements que l'on a devant nous, mais aussi ceux que j'aurai à fournir, puis qu'on regarde aussi les amendements qui nous ont été apportés par les groupes que nous avons reçus pendant 23 heures, M. le Président, la semaine dernière.

Sur ce, je pourrais peut-être conclure en disant ceci ? je l'avais dit, d'ailleurs, j'avais écrit ça pour mes remarques préliminaires, et c'était ma conclusion: que le sens de l'éthique, la compréhension déontologique, bref la fibre morale des individus ne se codifiera jamais. Malgré tout, on aura du travail et du pain sur la planche dans les semaines à venir, semble-t-il. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Westmount?Saint-Louis. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le député de Marquette. Alors, je vous cède la parole.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir à mon tour de prendre la parole sur ce projet de loi, loi intitulée Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme. Mon collègue député de Westmount?Saint-Louis s'est plutôt attardé à examiner le contenu du projet de loi. M. le Président, je préférerais, en ce qui me concerne, regarder le contexte du projet de loi, les faits qui ont donné naissance au projet de loi, les commentaires que nous avons entendus de la part de, je dirais, la plupart des journalistes, des commentaires des commentateurs, des analystes, et vous me permettrez de commencer par la demande qui avait été faite par l'opposition officielle parce qu'il est important, je pense, que nos concitoyens et concitoyennes comprennent bien dans quel contexte ce projet de loi arrive, dans quel contexte il est déposé par le gouvernement.

Jean-Jacques Samson écrivait, dans Le Soleil du 12 février dernier, et je le cite: «Il faudra se rappeler toutefois que la future loi servira beaucoup plus, à court terme, dans une tentative pour redonner une virginité au Parti québécois, à freiner des manquements trop flagrants à l'éthique de la part des amis du régime, qu'à discipliner et contrôler les véritables professionnels du démarchage. Une enquête policière, une enquête publique sur ces pratiques serait plus urgente.»

M. le Président, j'ai eu l'occasion de le dire à d'autres occasions, que ce qui est en cause ici, c'est toute la question de l'intégrité du gouvernement, l'intégrité du gouvernement qui a donné lieu à quelques démissions: démission de ministres, démission du directeur général du Parti québécois parce que les faits qui ont été rapportés par les journalistes étaient troublants. Vous me permettrez de citer Mme Lysiane Gagnon qui écrivait dans le journal La Presse du 16 février dernier, sous le titre La république des copains. Elle disait ceci: «Ce projet de loi fabriqué en catastrophe ne répond aucunement aux inquiétudes suscitées par les magouilles subventionnaires du gouvernement Landry. Non seulement l'on embrasse trop large, mais l'on cible mal le problème.»

Le vrai problème, c'est sur le plan politique qu'il se trouve, pas chez les lobbyistes, et le projet de loi que nous avons entre les mains aujourd'hui, M. le Président, s'attaque aux lobbyistes, mais jamais est-ce que le gouvernement n'a pris la décision de s'attaquer au véritable problème, c'est-à-dire le problème sur le plan politique. Le vrai problème, c'est le système mis en place par l'ancien ministre des Finances pour faire transiter les subventions par huit OSBL. Et là Mme Lysiane Gagnon décrivait très bien le système qui a été mis en place. Le système mis en place, M. le Président, et on peut le résumer de façon assez succincte: des organismes sans but lucratif qui échappent au contrôle des parlementaires, qui échappent au contrôle du Vérificateur général nommé par l'Assemblée nationale, qui échappent au contrôle et à la vigilance des journalistes. Ces organismes se sont vus subventionnés par le gouvernement à la hauteur de 750 millions de dollars. Par la suite, les organismes ont versé des fonds à d'autres organismes. Il y avait des intermédiaires entre ces deux organismes, et les intermédiaires collectaient des commissions, des commissions assez importantes, à même les fonds publics qui étaient consentis par le gouvernement.

André Pratte a très bien décrit le système qui a été mis en place par le gouvernement. Sous le titre Une loi ne suffit pas, M. Pratte disait ceci dans son éditorial du 11 février dernier: «Mais le gouvernement Landry doit aussi permettre que la lumière soit faite sur ces affaires, de même que sur les autres informations embarrassantes publiées ces derniers temps. Nous avions réclamé la tenue d'une enquête indépendante sur les agissements du ministre fédéral Alfonso Gagliano et de son entourage. Le besoin est tout aussi grand dans le cas des allégations faites au sujet du directeur général du Parti québécois, M. Raymond Bréard, du ministre Gilles Baril et de son ami et lobbyiste André Desroches, et du ministre Sylvain Simard, d'autant plus que trois de ces personnes font partie de la garde rapprochée du premier ministre. Une loi encadrant le lobbying aura des effets bénéfiques pour l'avenir, mais elle ne réglera pas le solde du passé. En plus de lever le brouillard de plus en plus épais enveloppant ce gouvernement, une telle enquête rendrait bien plus crédible sa démarche de réglementation du lobbying.»

n(12 h 20)n

M. le Président, comme nous l'avons constaté, le gouvernement avait deux moyens à sa disposition: le moyen d'une loi pour encadrer le lobbying, ce qui a été déposé, ce qui interpelle les parlementaires de l'Assemblée nationale, mais il avait un autre moyen qu'il a choisi de ne pas exercer, qui était pourtant réclamé par l'opposition officielle, par les éditorialistes, par les commentateurs, par bon nombre de personnes, citoyens, citoyennes ordinaires. Les gens réclamaient une enquête publique et indépendante, voire une enquête policière pour faire la lumière sur le système qui a été mis en place, qui a fait en sorte que les personnes proches de l'entourage du premier ministre se sont enrichies à même les fonds publics.

Ce sont des accusations très graves qui ont été largement documentées. Les journalistes ont fait un travail colossal à déterrer un certain nombre d'affaires. On a en tête l'affaire Bréard, l'affaire Desroches, l'affaire Vaugeois, l'affaire Duhaime, toutes des personnes, M. le Président, qui ont gravité à un moment ou à un autre dans l'entourage du premier ministre et qui ont bénéficié de fonds publics pour s'enrichir en touchant des commissions.

La question s'est toujours posée: Pourquoi fallait-il y avoir un intermédiaire entre les organismes qui sollicitaient des commandites de la part du gouvernement ou des organismes qui sollicitaient des subventions du gouvernement? Pourquoi fallait-il qu'il y ait un intermédiaire? Cette question-là n'a jamais été élucidée. On n'a jamais apporté de réponse convenable à ces questions-là.

Et on a bien vu, nous, de notre côté, le choix du gouvernement: c'est de tenter de faire porter le chapeau à ce qu'on appelle le lobbyisme au Québec, alors que le problème est d'une tout autre nature, comme le résumait si bien le député de Westmount?Saint-Louis. C'est un problème de moeurs politiques, un problème de moeurs politiques que la population, normalement, juge très sévèrement à l'occasion d'élections générales. Lorsque arrivent les élections générales, la population porte un jugement, et, règle générale, les gouvernements qui se sont livrés à de telles manoeuvres dans une fin de régime sont, règle générale, jugés très sévèrement, très sévèrement par l'électorat, l'électorat qui comprend, M. le Président, que les fonds publics doivent servir les fonds auxquels ils sont destinés. Les fonds publics ne doivent jamais, jamais, en aucun cas servir à enrichir des gens qui profitent de leurs relations de proximité avec les décideurs du gouvernement. Et, malheureusement, ça a été le cas, et jamais ces gens-là ne seront punis parce que le gouvernement a refusé de décréter une enquête publique et indépendante qui aurait permis de faire toute la lumière sur l'ensemble de cette situation.

Je comprends que, du côté gouvernemental, on a hâte de tourner la page sur ce triste épisode dans l'histoire politique du Québec. Le gouvernement a hâte de tourner la page, a hâte de faire en sorte que la population pense que le problème est maintenant réglé avec l'adoption de la loi qui est présentement à l'étude à l'Assemblée nationale. Mais je trouvais important, M. le Président, de rappeler le contexte, de rappeler les faits parce qu'on sent, de la part du ministre responsable de la Justice et Procureur général, qu'il a hâte de faire oublier ce qui s'est passé au cours des derniers mois.

Pourtant, la population aurait le droit de savoir comment les fonds publics ont été utilisés, surtout à la lumière... Parce que, lorsqu'on écoute les débats à l'Assemblée nationale, on pourrait peut-être croire qu'il y a de l'exagération de la part de l'opposition officielle dans sa tentative de prendre la place et former le prochain gouvernement. Mais, M. le Président, les textes que j'ai cités tantôt sont des textes de nos journalistes au Québec, et je pourrais citer encore Le Devoir du 19 mars 2002, sous le titre Encore les amis, où là le journaliste, le commentateur Michel David concluait son article en disant: «C'est très bien d'adopter une loi sur le lobbying, mais ça ne peut pas constituer une absolution rétroactive» de ce qui s'est passé dans les différentes affaires que nous avons connues.

Alors, M. le Président, vous comprendrez que, de ce côté-ci de la Chambre, on réitère toujours notre demande d'enquête publique et indépendante pour faire la lumière sur tout ce qui s'est passé parce que la population ne peut pas accepter d'avoir été témoin de nombreuses révélations troublantes dans les journaux, dans les médias, ici même, à l'Assemblée nationale, pendant des mois et des mois sans que cette lumière ne soit faite, , et je pense que la population jugera très sévèrement un gouvernement qui a tenté de camoufler cette affaire. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je dois attirer l'attention sur le mot «camoufler», que vous avez employé. Ce n'est pas un terme qui est parlementaire, parce que ça va à l'encontre évidemment de l'article 35, que vous connaissez très bien, dans le règlement. Alors, pour la suite, je vous inviterais à être prudent.

C'est votre tour, maintenant, Mme la députée? Est-ce que vous intervenez sur ce projet de loi? Non?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): À la suite. Bon, très, très bien.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie. Alors, sur ce projet de loi, y a-t-il d'autres intervenants? Alors donc, s'il n'y a plus d'autres intervenants, je vais mettre aux voix le principe.

Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 80, Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des finances publiques

M. Simard (Montmorency): Alors, M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques et pour que le ministre de la Justice en soit membre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Simard (Montmorency): Oui. Merci, M. le Président. Alors, j'ai l'honneur de vous référer à l'article 39 inscrit au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 84

Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, l'article 39. M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 84, Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation. Je suis prêt à céder la parole au premier intervenant. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, le Québec a toujours été reconnu pour son ouverture et pour son grand respect des différences. Je sollicite donc aujourd'hui l'appui des membres de cette Chambre afin que l'Assemblée nationale adopte le projet de loi n° 84 intitulé Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation.

Ce projet de loi, qui représente une avancée importante dans l'égalité des droits, offrira aux couples homosexuels ainsi qu'aux couples hétérosexuels un nouveau type d'état civil: l'union civile. Ce régime permettra aux couples homosexuels de s'unir afin de pouvoir, tout comme les couples hétérosexuels, prendre un engagement solennel et officialiser leur relation.

Tout d'abord, je tiens à remercier mes collègues de la commission des institutions ainsi que les nombreux représentants des groupes et les individus qui sont venus nous faire part, lors des deux périodes de consultation, de leur vécu, de leurs préoccupations, de la vision qu'ils se font d'une société où ils aimeraient vivre et s'épanouir comme individus, comme couples ou comme familles. En effet, depuis le dépôt de l'avant-projet de loi le 7 décembre 2001, les membres de la commission ont entendu au-delà d'une cinquantaine de groupes ou individus venus leur faire part de leur expérience personnelle ou de leur opinion sur le projet de loi, lors des deux consultations qui ont été tenues. Lors de ces représentations, des amendements ont été apportés au projet de loi afin de le bonifier et de le rendre plus conforme aux commentaires reçus. Je crois donc qu'aujourd'hui nous pouvons adopter un projet de loi qui fera du Québec l'un des États les plus progressistes en matière d'égalité des droits. En effet, le nouveau régime d'état civil présenté aux membres de cette Assemblée permet aux couples qui le désirent de s'unir civilement devant un célébrant. Les droits et obligations qui découleront de cette union sont les mêmes que ceux du mariage. Cependant, il y a quelques différences majeures entre les conditions du mariage et celles de l'union civile. Ainsi, les conjoints qui désirent s'unir civilement doivent être âgés d'au moins 18 ans. Autre distinction, l'union civile est ouverte aux couples homosexuels et hétérosexuels. Et, finalement, la dissolution de l'union civile peut être faite devant notaire lorsqu'il n'y a pas d'enfant impliqué.

n(12 h 30)n

M. le Président, ce projet de loi abolit également le deuxième alinéa de l'article 365 du Code civil qui spécifie qu'un mariage ne peut être célébré qu'entre un homme et une femme. Cette modification est apportée à la suite de nombreuses représentations faites en commission parlementaire par différents groupes ou individus qui voyaient cet alinéa comme discriminatoire à l'égard des couples de même sexe.

Une autre situation est corrigée par la modification de l'article 15 du Code civil, qui a pour effet d'élargir au conjoint de fait ainsi qu'au conjoint uni civilement la notion de «consentement aux soins d'un majeur». Ainsi, nous nous assurons que ne se reproduisent plus des situations où un conjoint homosexuel ou de fait, en couple depuis 10, 15 ou 20 ans, ne peut consentir aux soins qui doivent être donnés à son conjoint.

Le gouvernement du Parti québécois a toujours été sensible aux questions de justice et d'équité. C'est donc en continuité avec ces grands principes qu'il propose à cette Assemblée par ce projet de loi, M. le Président, d'offrir aux enfants les mêmes droits, qu'ils soient issus d'une famille mariée, unie civilement ou encore d'une union de fait. Ainsi, des modifications importantes dans le domaine de la filiation sont incluses dans ce projet de loi. Ces dernières rétablissent une équité essentielle pour les enfants membres à part entière de la société québécoise. En effet, la loi permettra aux couples unis civilement d'établir un lien de filiation avec un enfant issu du désir des conjoints de fonder une famille. Un enfant né au sein d'une famille homoparentale sera désormais assuré des mêmes droits que celui né au sein d'une famille hétéroparentale. Le deuxième parent pourra, par exemple, aller chercher le bulletin scolaire ou encore consentir aux soins de son enfant grâce aux modifications apportées au Code civil du Québec.

De plus, même si l'adoption par des couples homosexuels était déjà permise, plusieurs groupes nous ont fait valoir les difficultés pratiques qu'ils rencontrent. Les articles concernant l'adoption sont donc modifiés afin de rendre plus claires les règles d'adoption.

Tous ces changements législatifs proposés suivent l'évolution de notre société. Ils ont pour effet de garantir à tous les enfants québécois l'égalité des droits, qui doit demeurer en tout temps présente à l'esprit du législateur. Il m'apparaît clair que l'intérêt supérieur de l'enfant doit prévaloir dans tous les choix que nous choisissons de faire en matière de parentalité. Nos enfants sont ce que nous avons de plus cher. Cela est vrai sur le plan collectif comme sur le plan individuel. Il est, je le pense, de notre devoir comme personnes, comme parents, comme membres de cette Assemblée, de leur assurer les meilleures conditions pour leur développement et leur épanouissement. Nous ne pouvons rester insensibles à ce que nous avons entendu en commission parlementaire. Je suis sûr que, sur cette question, nous nous rejoignons tous.

Lors de la deuxième série de consultations, nous avons pu réentendre les témoignages de trois jeunes personnes qui sont venues nous dire que, déjà après la tenue des premières consultations, il y avait eu un changement dans leur vie. En effet, Mme Annick Gariépy déclarait, lors de son second passage: «Je pense que toutes les familles doivent être reconnues et valorisées, la mienne y compris. Et c'est dans ce sens-là que j'ai rédigé un deuxième mémoire, un deuxième témoignage, parce que, suite à ma première présentation, en février dernier, il y a beaucoup de choses qui ont changé dans ma vie. Moi, je peux dire que déjà, le projet de loi n'est même pas encore adopté, et ça change déjà des choses dans ma famille, à l'intérieur même de ma famille. Alors, c'est dans ce but-là que j'ai voulu mettre sur papier... j'ai réalisé que j'avais parlé au nom de plusieurs enfants qui restent silencieux, malheureusement, et c'est pour ça que je récidive avec un deuxième témoignage.» Fin de la citation.

D'ailleurs, lors de son passage à l'Assemblée nationale, Mme Gariépy a mentionné que ce projet de loi devrait avoir un impact allant au-delà du caractère strictement juridique. Et je cite: «Je l'ai pensé comme je le dis dans mon deuxième témoignage, qui dépasse l'affaire juridique, parce que là on atteint les préjugés, les regards auxquels on est souvent victime», nous dit Mme Gariépy.

Maintenant, j'espère qu'avec la nouvelle institution qu'est l'union civile ces préjugés seront moins forts à l'égard des enfants et de leurs parents. Je suis particulièrement fier de partager avec vous, membres de l'Assemblée nationale, ce moment qui m'aura permis, comme législateur, de faire changer les choses et de participer à l'évolution de la société.

M. le Président, j'ai, en cette Chambre, fait adopter beaucoup de projets de loi, et je dois vous dire que, dans ce cas-ci, je suis vraiment ému du geste que nous nous apprêtons à poser, parce qu'il atteint ce que nous avons ? et je l'ai dit tout à l'heure ? de plus cher dans notre société, ce sont nos enfants. Et il m'apparaît que, comme ministre responsable de la Justice, s'il y a une chose que je dois faire, c'est m'assurer avec vous, et pour tout le monde, que nos enfants aient tous les mêmes droits dans la société. Malheureusement, malgré des efforts antérieurs, ils ne sont pas égaux actuellement. Ceux nés dans un mariage, ceux nés dans une union de fait, ceux nés dans une union civile n'ont pas les mêmes droits. Et ça, c'est inacceptable. Et il me semble que c'est un moment privilégié où, comme Assemblée, et j'espère unanimement, nous allons dire: Nous voulons que tous dans notre société soient égaux, que ce soient les enfants, comme je viens de mentionner, mais également les hommes et les femmes qui décident de vivre et qui vivent d'une manière différente de ce que peut-être la majorité a comme mode de vie. Mais je crois que nous devons respecter leur décision, leur façon d'être et qu'ils puissent, dans notre société, avoir exactement les mêmes droits, les mêmes responsabilités, la même reconnaissance, le même amour que nous voulons tous avoir. Et ça, M. le Président, c'est rare que nous avons l'occasion de le faire, et je voulais le dire, parce que des jeunes sont venus nous dire: Vous savez, nos parents, nos deux papas ou nos deux mamans, nous les aimons, nous en sommes fiers et nous voulons leur dire que nous les aimons tels qu'ils sont. Et, en conséquence, ils nous ont donné tellement que nous ne voyons pas pourquoi la société se comporterait différemment à leur égard. Alors, merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Alors, nous allons donner la parole maintenant à la prochaine intervenante, Mme la députée de Bourassa. Mme la députée.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, nous en sommes rendus à l'étape finale quant à l'adoption du projet de loi n° 84, qui s'intitule Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation.

Vous savez, M. le Président, je suis devenue députée en 1997, et j'ai, dès ce moment-là, convenu de respecter l'engagement que j'avais pris d'être à l'écoute des citoyens du comté de Bourassa et de me faire le porte-parole de leurs préoccupations. Le travail de député comporte plusieurs aspects. L'un des aspects les plus visibles, c'est la période des questions, alors qu'à tour de rôle mes collègues et moi-même pouvons intervenir en cette Chambre pour soulever des questions et faire écho à différentes préoccupations. Il y a un autre aspect du travail des députés, qui est par ailleurs un peu moins visible, et, quand on parle de l'adoption d'un projet de loi, évidemment, ce sont des travaux qui sont liés au processus d'adoption, un processus qui va en différentes étapes, là on est rendu à la dernière étape... Alors, j'ai pris la peine ? si vous me le permettez... Étant entendu que ce côté-là du travail des parlementaires est extrêmement important. C'est un travail qu'on doit aborder de façon responsable parce qu'on fait face à un projet de loi. Et ce projet de loi, comme tout projet de loi, aura des impacts pour la population du Québec. Quand on dit «union civile», c'est bien sûr qu'on vise un segment important de la population du Québec. On vise donc des personnes qui veulent ? des homosexuels et des lesbiennes ? consacrer l'amour qu'ils éprouvent l'un pour l'autre dans une union qui s'appelle l'union civile que le projet de loi vient instituer.

n(12 h 40)n

Les travaux reliés au projet de loi n° 84, je crois comprendre... parce que M. le ministre de la Justice a déposé effectivement beaucoup de projets de loi, mais, de mémoire, je crois que nous aurions commencé les travaux le ou vers le 7 décembre 2001. Effectivement, plus de 50 groupes ont été entendus. Et, quand on dit que ce n'est pas visible, l'aspect du travail du député comme législateur, je prends la peine d'apporter avec moi la copie des mémoires qui ont été déposés. Il y aura eu, je crois, plus de 50 mémoires ? 56, si ma mémoire est bonne ? qui ont été transmis par différents groupes, personnes, individus, associations qui sont intéressés par ce projet de loi là qui, rappelons-le, a un impact important pour les citoyens du Québec.

Alors, si... Je sais que c'est difficile pour vous de vous représenter la somme du travail. Mais seulement pour le projet de loi n° 84... j'ai apporté la pile, et je n'en ai pas mis plus, là, croyez-moi, je n'ai mis que ceux qui sont reliés au projet de loi. Le projet de loi n° 84, que nous devions... que je devais, comme législateur, aborder de façon responsable, c'est celui que je tiens entre les mains. Alors, vous comprendrez bien que ça demande une étude extrêmement attentive parce que ce projet de loi là va avoir des impacts. Évidemment, vous le comprenez très bien, mais, je le répète, il y avait 236 articles, et il y a eu des amendements qui ont été ajoutés, au surplus.

Il fait partie du travail de l'opposition officielle, du député, lorsqu'il aborde le travail dans un projet de loi, de soulever ? pas pour le principe de soulever, pas pour le principe de parler, de le soulever parce qu'on doit être responsable et l'aborder de façon sérieuse ? des éléments, des points qui peuvent nous avoir été rapportés par les groupes qui se sont donné la peine de nous soumettre des mémoires et qui sont venus se faire entendre. Ils sont venus pourquoi? Pour nous dire: Écoutez, tel article est ambigu, vous laissez une porte ouverte, il y aurait intérêt à combler, il y a des inexactitudes. Alors, on doit donc prêter oreille aux propos des groupes qui sont venus nous voir, pour justement pouvoir approcher ce projet de loi là dans une perspective constructive, positive, parce que la population du Québec, et un secteur plus particulier, va devoir vivre avec le projet de loi. Alors, c'est le travail que l'opposition officielle a voulu faire lorsqu'elle a commencé ses travaux en relation avec le projet de loi n° 84 sur l'union civile.

Alors, le projet de loi n° 84, ce que ça fait, grosso modo, et ça a été dit lors des autres étapes, il institue l'union civile et il va également établir de nouvelles règles de filiation. Alors, quand on dit «instituer l'union civile», ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'on introduit un nouveau type d'union, un nouvel état juridique qui va faire en sorte que deux personnes qui s'aiment ? et je pense qu'on doit s'ouvrir à cette réalité-là, ça aussi, ça fait partie de notre devoir comme législateurs, on doit s'ouvrir aux réalités... Il ne s'agissait pas de débattre de l'homosexualité. Ce n'était pas ça, le propos. Le propos, c'était de regarder l'union civile et de faire en sorte qu'on adopte un régime, un nouveau régime qui soit respectueux des droits des personnes qui vont vouloir s'unir civilement, un régime respectueux parce qu'il va leur donner des devoirs et des obligations l'une envers l'autre, mais également envers les enfants qui peuvent être issus de ces unions-là.

Parce que, une autre réalité à laquelle on doit s'ouvrir, c'est qu'il y a actuellement de nombreux enfants au Québec qui sont issus d'unions homosexuelles par différents processus, soit l'adoption, soit l'insémination et, à l'intérieur de l'insémination, de par différentes façons également. Alors, ça aussi, c'est une réalité. Un autre aspect de la réalité, c'est que ces enfants-là, compte tenu du choix de leurs parents, peuvent avoir ou ne pas avoir de droits. Or, il s'avérait que les enfants issus de ces couples-là n'avaient pas les mêmes droits que les enfants qui sont issus de conjoints mariés. Alors, l'opposition officielle a également approché le projet de loi n° 84 dans la perspective du meilleur intérêt de l'enfant. Notre devoir comme législateurs, c'était de nous assurer que ces enfants-là qui existent, qui sont bien en chair et en os, qui sont issus de projets parentaux, donc de la volonté commune de deux personnes qui s'aiment et qui désirent ensemble avoir des enfants, c'était de nous assurer que ces enfants-là, indépendamment du choix de leurs parents, aient les mêmes droits que les autres enfants au Québec.

Alors, la première préoccupation s'est donc limitée à l'union civile, au régime comme tel, au nouvel état, au cadre juridique qui vient normer ou réglementer la relation des deux conjoints qui vont décider de s'unir civilement. Donc, ça vient leur donner un cadre, et de ce cadre-là évidemment, comme pour toute autre personne, vont découler des obligations et des responsabilités qui sont extrêmement importantes. Donc, ces conjoints-là n'auront pas plus de droits, n'en auront pas moins, mais vont avoir les mêmes droits que les autres personnes qui choisissent de s'unir, et c'est important de le dire. Et elles vont également pouvoir, de la même façon, bénéficier des protections habituelles, et ça, vous aurez compris que ça émane du droit à l'égalité: toute personne doit être traitée de la même façon, toute personne étant égale devant la loi. Donc, il est normal que ces personnes aient les mêmes droits et les mêmes obligations.

Lorsqu'on parle d'union civile, il y a un point qui a été discuté, et la majorité des groupes l'ont soulevé en commission parlementaire et ça a fait l'objet d'un consensus: il fallait étendre le régime de l'union civile à l'ensemble des citoyens du Québec, donc aux hétérosexuels qui voudront également s'en prévaloir. Ceux qui voudront s'en prévaloir pourront donc également se marier, s'unir civilement. L'union civile est réservée à des gens qui auront 18 ans, et je pense que c'est important. Là aussi, on avait une responsabilité. On doit être sûr que c'est un choix qui va être responsable, éclairé, donc il est important de mettre la barrière à 18 ans.

Ce qui distingue l'union civile et continuera de la distinguer du mariage, c'est la façon avec laquelle on peut y mettre fin. Vous savez que les conjoints mariés doivent, lorsque malheureusement les circonstances font en sorte que c'est irrémédiablement compromis, qu'il n'y a plus d'espoir de réconciliation, doivent procéder par le divorce. Ce régime-là offre plus de souplesse parce qu'il va permettre de dissoudre l'union civile en passant devant notaire, à moins qu'il y ait des enfants qui soient issus de ces unions-là. Lorsqu'il y aura des enfants issus de l'union, pour protéger les droits des enfants, le tribunal pourra intervenir et pourra s'assurer que les conjoints auront convenu dans le meilleur intérêt des enfants et se seront d'abord et avant tout préoccupés du meilleur intérêt des enfants.

Évidemment, le projet de loi dit «établir de nouvelles règles de filiation». Ça, c'est un chapitre extrêmement important, et je dois remercier mes collègues, principalement ma collègue de Viger et mon collègue de Verdun, qui m'ont prêté main forte, de même que ma collègue de Mercier, qui sont intervenus en Chambre. Et rappelons-le, que la préoccupation principale, majeure, unique, de l'opposition officielle, c'était de nous assurer qu'on avait tous le même angle et qu'on travaillait tous dans le même sens, à savoir le meilleur intérêt des enfants, qu'on travaillait tous pour la protection des enfants. Ce sont donc les enfants qui ont été et qui sont et qui demeureront au centre de notre réflexion.

Vous savez, M. le Président, je le disais tout à l'heure, on s'ouvre aux réalités et, comme législateurs, on doit en tenir compte. Alors, il y a donc des enfants qui sont actuellement issus de couples homosexuels, principalement de couples lesbiens. Il y a des enfants qui naissent de ces couples-là, et ces enfants-là se retrouvaient sans droits, et c'était, et je suis certaine que vous en convenez également, inacceptable. Il n'y a aucune raison que des enfants soient pénalisés en raison du choix de leurs parents, du choix d'union de leurs parents.

Et je vous parlais tout à l'heure de projet de parentalité. Nous en avons entendu parler, nous avons pu constater qu'il est possible. On a eu de très beaux témoignages. On en a eu un en ouverture où un homosexuel est venu nous dire, nous déclarer l'amour qu'il avait toujours pour le conjoint avec lequel il était depuis 25 ans. Je l'évoque et j'ai encore le frisson. Au moment où je l'ai entendu dire, j'avais le frisson. J'ai trouvé ça extrêmement beau. Il venait le dire publiquement, il aimait cet homme avec lequel il vivait depuis 25 ans et il était prêt à consacrer cet engagement-là ultérieurement dans une union civile pour venir accorder à leur amour tout le caractère solennel que ça requiert.

n(12 h 50)n

Les projets de parentalité. On a eu des témoignages où des gens sont venus nous dire ? des lesbiennes ? à quel point il était important pour elles ? et je pense que vous pouvez en convenir également ? de s'unir et de former, d'entretenir un projet de parentalité. C'est donc une rencontre de deux volontés qui a un seul objectif, avoir des enfants. Et ce projet-là, ce qu'il veut, c'est de donner de l'amour aux enfants. Il y a des enfants qui sont venus nous dire qu'ils aimaient leurs parents et il y a aussi des parents qui sont venus nous confirmer l'amour qu'ils avaient pour leurs enfants, et c'était extrêmement important qu'on en tienne compte, et c'est ces préoccupations-là que nous avions plus particulièrement quand nous avons abordé les règles de la filiation.

Je dois dire que nous avons travaillé sérieusement, et M. le ministre a reçu des propositions d'amendement que nous avons soumises. Et, je me souviens, quant à l'une d'elles, on a travaillé presque une journée et demie sur cette proposition-là qui avait pour but de nous assurer... Lorsqu'on parle, évidemment, de lesbiennes qui veulent avoir des enfants, on parle d'avoir recours à l'insémination artificielle ou on peut parler également d'avoir recours à un tiers donneur extérieur. Alors, pour nous, il était très important, parce qu'on s'est aperçu qu'il y avait un trou, de boucher ce trou-là, et on voulait préserver le droit du donneur initial, donc du tiers qui va venir donner des gamètes, pour faire en sorte que celui-ci puisse assumer, dans la mesure où il le voulait totalement, la paternité. Alors, on a fait une disposition à ce niveau-là. Et, bien sûr, dans la mesure où un donneur, un tiers veut conserver l'anonymat, et les conditions étaient telles au départ, il n'y a rien de changé, ça va demeurer tel quel.

En ce qui a trait à l'adoption, on doit comprendre qu'au Code civil du Québec, un Code qui est actuellement en vigueur, il y a déjà un article de loi qui existe et qui fait en sorte que toute personne, seule ou conjointement, peut adopter. Ça n'excluait pas évidemment homosexuels et lesbiennes. Cependant, la commission des centres jeunesse était venue nous dire qu'il y avait des imprécisions, des ambiguïtés. Et, à l'égard de ces dispositions-là, notre préoccupation, c'était de faire en sorte qu'on puisse préciser les règles actuelles qui existent au Code civil du Québec. Donc, on n'a rien ajouté, on n'a rien créé de nouveau. Le Code civil comporte déjà un article qui, je le répète, reconnaît formellement que toute personne, seule ou conjointement, peut adopter. Ça n'excluait pas les homosexuels. Il y avait des ambiguïtés, notre devoir a été de faire en sorte que celles-ci puissent être précisées.

Donc, si je résume la table des matières, le premier élément, union civile, le cadre légal, donc s'assurer que ça soit bien organisé, voir à ce qu'il y ait des devoirs et des obligations réciproques pour les conjoints. Deuxième cadre, la filiation. Là, on parlait plus particulièrement des enfants. Il y avait des imprécisions, il y avait même un trou. Ça nous a pris une journée et demie pour pouvoir soumettre un amendement qui soit conséquent, et on a donc travaillé très fort au niveau des règles de filiation. Troisième niveau, nous avons également abordé plus largement... comme disait mon collègue de Verdun lorsqu'il était intervenu, un collègue qui a une expérience parlementaire très grande, et il a dit qu'on avait également abordé le corpus législatif. En langage un petit peu plus adapté, ça veut dire que le projet de loi sur l'union civile venait aussi modifier d'autres lois en venant inclure les conjoints en union civile. Et on a donc abordé, M. le Président, 53 lois. Et ça, c'est la table des matières des 53 lois que nous avons abordées. C'est donc ce qu'on appelle le corpus législatif. Là aussi, ça peut vous donner une idée de l'ampleur du travail qu'on a fait. Et, parce qu'on a fait cet examen-là de façon attentive, on a pu constater qu'il y avait des variables dans le corpus législatif, donc dans les différents textes de loi, en ce qui avait trait à la définition de «conjoint de fait». Ça varie d'une loi à l'autre. Le ministre de la Justice était bien conscient de cette difficulté-là, et je pense que subséquemment il va y avoir quelque chose qui sera fait pour qu'on puisse faire en sorte d'uniformiser et de reconnaître dans tous les textes de loi une définition qui soit la même pour les conjoints.

Alors, il y a une incohérence à l'heure actuelle au niveau du corpus législatif, il y a différentes définitions, je pense qu'il y en a 12 ou 13 globalement, si je peux vous les résumer, et elles sont différentes. Alors, d'un texte de loi à l'autre, ce n'est jamais la même chose, les éléments varient, soit la cohabitation, soit la communauté, soit trois ans, soit un an, soit avec enfants. Alors, il va falloir à un moment donné que le législateur aborde cette incohérence-là au niveau du corpus législatif et qu'il apporte les amendements qui sont nécessaires. Je ne vous parlerai pas, évidemment, de d'autres amendements qu'on a voulu apporter, qui aussi ont été reçus, pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de trous qui soient laissés.

Et je pourrais vous dire qu'un dernier bloc touchait spécifiquement la célébration de l'union civile. Encore là, on a voulu baliser, normer, réglementer pour faire en sorte que l'union civile soit célébrée avec la solennité, le caractère solennel dont elle a besoin puis qui va de soi qu'elle reçoive également.

On a abordé la question des personnes autorisées à célébrer l'union civile. Alors, évidemment, encore là, ça touche en particulier les personnes qui ont des charges religieuses, qui sont reconnues par l'État. Ça touche aussi les greffiers. Mais, changement important, il y aura possibilité pour le ministre de la Justice d'introduire de nouvelles personnes, en particulier d'introduire les notaires. Il y aura également possibilité pour le ministre de la Justice d'introduire d'autres personnes, tels certains maires, certains conseillers municipaux, qui pourront également et de la même façon procéder à la célébration du mariage ou de l'union civile. Et ça, évidemment, ça va venir faciliter... ça va donner plus de chances ou un éventail plus large pour les citoyens. Et on s'est également attaqué à d'autres amendements, dans la même perspective, pour protéger les droits du citoyen, on parle de décorum pour faire en sorte que, si on célèbre ça ailleurs qu'au palais de justice, les endroits où ces unions-là pourront être célébrées, tout comme le mariage civil, ce soit respectueux de la cérémonie.

Et on a parlé des tarifs. L'opposition officielle a, encore là, soumis des amendements. Le ministre de la Justice les a reçus. Parce qu'on parle de coûts. Vous savez, aller ailleurs, ça peut coûter bien cher. Si on va dans un jardin botanique, je ne veux pas dire que le jardin botanique coûte plus cher, ce que je veux dire, c'est que, dépendamment du lieu, les frais peuvent varier. Alors, notre préoccupation, c'était d'éviter... Parce que, dans le rapport du ministère de la Justice, on avait fait état de projets-pilotes qui avaient été très intéressants pour les lieux, mais les citoyens avaient dénoncé les coûts... alors, notre préoccupation, c'était qu'il y ait un maximum et un minimum. M. le ministre de la Justice a reçu ça. Évidemment, il y a une période... dans l'intervalle, on a proposé une clause, ça a été reçu également.

Ce qu'il est important de dire, en terminant, c'est qu'on a fait un travail comme on devait le faire, comme législateurs, de façon responsable. On l'a fait dans la meilleure perspective, c'est-à-dire dans la perspective du meilleur intérêt de l'enfant. Et, effectivement, le Québec, par la loi sur l'union civile, fait un pas extrêmement important, un pas qui témoigne de son ouverture, un pas qui vient reconnaître l'égalité et un pas qui fait en sorte que les enfants, à l'avenir, peu importe le choix de leurs parents, auront les mêmes droits.

Alors, je pense que c'est important, je vous le mentionne, M. le Président, et il va de soi que l'opposition officielle maintient sa décision de voter en faveur du projet de loi n° 84.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bourassa. Il n'y a pas d'autres intervenants?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, c'est ça que je veux, là. Bon. Très bien. Alors, s'il y a d'autres intervenants, nous allons attendre pour l'adoption. Nous arrivons à 13 heures. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

 

(Reprise à 15 h 3)

Le Vice-Président (M. Beaulne): Alors, chers collègues, bon après-midi. Nous allons poursuivre nos travaux, et je vous prierais de vous asseoir.

Alors, nous sommes toujours à l'article 39 du feuilleton, selon lequel M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 84, Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation. Y a-t-il des députés qui souhaiteraient intervenir?

M. Gautrin: ...M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): M. le député de Verdun.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi qui, somme toute, est relativement simple et a un caractère banal, mais qui va faire faire à la société québécoise un énorme pas en avant dans ce qui nous caractérise, le respect des différences et la tolérance qui caractérise cette société.

D'emblée, M. le Président, au début de mon intervention, je dois dire que le résultat du projet de loi qui est devant nous est celui obtenu par une collaboration assez exceptionnelle du travail du ministre de la Justice et de la porte-parole de l'opposition, la députée de Bourassa. Dans un but commun de donner aux Québécois et aux Québécoises un cadre juridique pour pouvoir exprimer leurs différences, ils ont su collaborer. Et ceux d'entre vous qui croyez que parlementaires ministériels et parlementaires de l'opposition doivent toujours être en opposition les uns aux autres auraient dû suivre les travaux de cette commission et voir à quel point l'esprit de collaboration qui a animé ma collègue députée de Bourassa et le député de Louis-Hébert, ministre de la Justice, était exceptionnel.

Qu'y a-t-il dans ce projet de loi? Des choses relativement simples, M. le Président. Nous introduisons d'abord un nouveau cadre juridique pour permettre aux personnes qui le veulent de pouvoir avoir un cadre qui balise leur union. Ces nouvelles balises seront ouvertes à l'ensemble des Québécois et des Québécoises ? ça s'appellera l'union civile ? mais, et ceci est important, M. le Président, seront aussi ouvertes aux couples homosexuels, deux lesbiennes, deux homosexuels, mais un couple hétérosexuel pourra dorénavant bénéficier de ce que la loi leur donne, à savoir la possibilité de légaliser en quelque sorte leur union dans le cadre de ce que l'on appellera l'union civile. Il y a là peut-être une banalité, mais un pas important, un pas important dans le respect de la différence et de la tolérance qui caractérise, M. le Président, pour la plupart de nos concitoyens, leur vision de leurs voisins. Donc, premier élément, introduction de ce nouveau régime qu'on appelle l'union civile.

Deuxième élément dans le projet de loi, il est important de le rappeler, nous voulons et nous avons constamment, de ce côté-ci de la Chambre de même que du côté des ministériels, nous avons eu toujours en tête la protection des enfants. La protection des enfants a été une priorité qui n'a pas caractérisé nécessairement les parlementaires de l'opposition, pas plus que les parlementaires ministériels, mais qui a caractérisé l'ensemble des parlementaires lorsque nous avons étudié ce projet de loi, la protection des enfants dans le sens suivant: vous savez, M. le Président, qu'il existe... D'abord, le Code civil permettait déjà de faire l'adoption, pour un couple homosexuel, d'adopter un enfant. Ce n'est pas quelque chose de nouveau. Contrairement à ce qu'écrivent les journaux, nous n'avons rien introduit de nouveau.

Deuxièmement, vous savez, M. le Président, que, dans des couples homosexuels lesbiennes, il existe aussi fréquemment des personnes qui ont un projet de parentalité ensemble. Et, parce qu'elles ont un projet de parentalité vécue par une technique d'insémination artificielle ? on a parlé de médicalement assisté, technicalement assisté, on a même utilisé le terme «amicalement assisté» ? par ces techniques, on peut permettre, à l'heure actuelle, dans des couples de lesbiennes, d'avoir des enfants. Mais la nature du droit aujourd'hui ne permettait pas aux deux mères, c'est-à-dire celles qui ensemble avaient conçu ce projet de parentalité, de pouvoir assumer ensemble les responsabilités envers cet enfant ou ces enfants qui naissaient, ne permettait pas aux deux mères de pouvoir assumer les responsabilités, que ce soit en termes de responsabilité alimentaire, que ce soit en termes de responsabilité pour conduire les enfants soit chez le médecin soit au niveau des écoles.

Nous introduisons, M. le Président ? et c'est une nouveauté actuellement pour ces enfants qui sont issus d'un projet commun, d'un projet commun de parentalité ? nous introduisons la possibilité de dire: Ces enfants auront deux parents. Ils auront deux parents, ils ne seront pas anormaux par rapport aux autres. Ils auront la protection de deux parents, mais ces parents pourront être, M. le Président, deux parents qui sont du même sexe. Nous ne sommes pas en train de créer une révolution, nous ne sommes pas en train de changer quoi que ce soit d'important, nous protégeons ces enfants qui sont issus d'un projet de parentalité dans un couple homosexuel. Il me semble actuellement que, de la part des parlementaires, quels qu'ils soient, qu'ils soient ministériels ou qu'ils soient de l'opposition, nous avons eu constamment à l'esprit, M. le Président, le fait que ces enfants ont droit aussi d'avoir une protection analogue à celle dont jouissent les enfants nés dans des couples hétérosexuels.

n(15 h 10)n

M. le Président, nous avons entendu en commission, c'est bon de le rappeler, des témoignages extrêmement émouvants, émouvants, d'enfants nés dans ces couples qui parfois avaient de la difficulté à reconnaître l'homosexualité de leurs parents, étaient amenés à devoir le cacher, et je dois dire que la loi ici créera pour ces enfants un cadre, un cadre juridique qui les inclura dans ce qu'on a coutume d'appeler la normalité, la normalité. Et, même s'il y en a peu, même s'il n'y en a pas un nombre énorme, il me semble important, de ce côté-ci de la Chambre, que, quels qu'ils soient, les enfants ont droit à une protection. Donc, ça a été un élément de réflexion de notre côté. Donc, comprenez bien la loi: nous introduisons d'abord un cadre juridique pour prévoir l'union de conjoints, y compris les conjoints de même sexe, et nous voulons protéger les enfants.

La loi précisera aussi un lieu... de protéger aussi la possibilité de déclarer sa paternité lorsque l'enfant est né d'une relation normale mais qui ne correspondait pas à un projet commun de parentalité. Donc, nous n'avons pas, et nous l'avons travaillé en amendement, voulu rejeter complètement la possibilité, le droit à la paternité.

Dernier élément, à l'intérieur de cette loi, qui est extrêmement important: la célébration de l'union et la célébration du mariage va être élargie, élargie. Autrement dit, dorénavant, vous allez pouvoir non plus célébrer vos unions ou vos mariages dans le cadre parfois un peu rigide du palais de justice et du greffier, sachant que le palais de justice, et un greffier, n'est pas nécessairement associé au geste d'amour que constitue exactement une union, mais, mais, dorénavant, les notaires et les personnes qui pourront être désignées par le ministre de la Justice... Dorénavant, les lieux qui seront désignés par le ministre de la Justice... Pas n'importe quel lieu. Il ne s'agit pas de se marier n'importe où, dans n'importe quel sous-sol, mais les lieux qui ont une caractéristique de décorum suffisante pour être un lieu où on peut célébrer un mariage. Le ministre de la Justice permettra que dorénavant ce ne sera pas seulement, seulement dans le cadre relativement rigide et froid d'un palais de justice, mais aussi dans des cadres beaucoup plus accueillants que peut être... par exemple un jardin botanique à Montréal, M. le Président, ou un parc zoologique, voire quelques éléments...

Une voix: ...

M. Gautrin: ...non, non, quelques éléments...

Des voix: ...

M. Gautrin: ... ? pardon? ? ou quelques éléments, M. le Président, de permettre de célébrer dans un cadre beaucoup plus accueillant l'union civile et le mariage.

Donc, M. le Président ? vous me dites qu'il me reste peu de temps ? une loi qui doit, premièrement, faire l'honneur aujourd'hui de tous les Québécois et Québécoises parce que nous faisons un pas important en avant, une loi qui est relativement simple: un, elle prépare un cadre juridique pour l'union des Québécois et Québécoises, y compris les Québécois et Québécoises de même sexe qui voudront bénéficier de cette union; deuxièmement, une protection absolument équivalente pour les enfants qui sont issus d'un projet de parentalité de cette union, et je pense qu'il est important de pouvoir les protéger; et une ouverture quant à la célébration du mariage et de l'union civile. M. le Président, il s'agit d'une loi dans laquelle nous qui siégeons aujourd'hui dans cette Législature allons être fiers parce que nous faisons aujourd'hui un pas en avant dans l'esprit de tolérance qui caractérise notre société. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Verdun. Y a-t-il d'autres interventions sur ce projet de loi?

Mme Maltais: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Oui, Mme la députée de Taschereau et ministre...

Mme Maltais: Déléguée à l'Emploi.

Le Vice-Président (M. Beaulne): ..ministre déléguée à l'Emploi. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Au très beau discours d'une grande élévation du député de Verdun j'ajouterai quelques mots, si vous permettez, M. le Président. Ce projet de loi est majeur pour moi, en ce sens qu'il incarne une valeur profonde de la société québécoise, qui est... Certains disent le mot «la tolérance», mais, M. le Président, moi, je ferai un pas de plus, si vous permettez. Il ne s'agit pas ici seulement de tolérance, parce que, quand on dit qu'on tolère quelque chose ou qu'on tolère quelqu'un, on accepte que l'autre fasse partie, mais la tolérance signifie qu'il y a une norme établie et qu'on accepte un impair, on accepte un dérangement. Il ne s'agit pas ici seulement de tolérance, M. le Président, il s'agit de respect. Il s'agit d'un droit incarné dans cette société libre qui a des valeurs profondes qui sont des mots comme «liberté», qui sonnent comme «égalité». Cette société a des valeurs profondes qui disent que nous devons le respect à tous les êtres humains de cette société, quel que soit leur âge, quel que soit leur sexe, quelle que soit surtout, dans ce cas-ci, leur orientation sexuelle. Du moment où on a accepté ce fait que le respect doit s'incarner dans nos valeurs ? il est une valeur ? il doit s'incarner donc dans nos institutions.

Et ce projet de loi fait passer de la normalité à l'égalité ce droit des homosexuels de voir leur union reconnue par le biais de la légalité. Il ne s'agit pas ici de mariage, pour moi, parce que le mariage est une institution qui vient d'une société ou d'une tradition religieuse. C'est ainsi qu'on a institué le mariage, et les gens qui disent: Oui, mais les homosexuels n'ont pas droit au mariage, ce qu'ils tentent d'exprimer, je pense, c'est que l'institution religieuse n'a pas, effectivement, n'a pas traduit le mariage envers les homosexuels comme étant accepté. Mais l'union civile, ça veut dire que nous reconnaissons...

Du moment d'ailleurs où nous avons accepté qu'il est tout à fait correct, légal et que nous devons respecter le fait que deux personnes vivant l'homosexualité décident de vivre en couple, que leur union est normale, la reconnaître devant la loi, comme le propose le ministre de la Justice d'une très belle façon, c'est reconnaître qu'automatiquement ils ont droit à tous les égards, eux et leurs enfants, ont droit à tous les égards avec lesquels la société accueille les gens qui ont décidé de vivre ensemble. C'est donc une question de respect face aux choix du couple que font aussi les homosexuels.

Et là-dessus c'est donc égalité devant la santé, parce que, du moment où il y a union civile, ça va permettre ces accommodements et de résoudre les difficultés que vivent les homosexuels quand ils ont, par exemple, à se présenter devant un conjoint, une conjointe qui est à l'hôpital puis qui est malade. Des gens qui vivent depuis 15, 17, 20 ans ensemble vont aller à l'hôpital, et on leur demande tout de suite: Est-ce que vous êtes de la famille? Euh, je suis... Enfin, vous savez, le doute, tout à coup, l'hésitation, ce qui se passe. Tout à coup, il y a des gens qui hésitent ou ne peuvent pas avoir accès, hésitent à dire leur lien avec la personne parce qu'ils savent que ce lien ne leur donne pas accès à la personne.

Et égalité devant la mort, avant la mort, après la mort aussi, égalité à l'accès à la personne, à l'accès à ses biens. Il y a des gens qui ont vécu ensemble 20, 30 ans, qui ensuite vont se faire refuser l'accès à leurs biens communs parce qu'il n'y a pas eu égalité devant la loi. Devant la mort.

Et égalité devant l'enfance, devant le respect de l'enfance, devant le respect de ces enfants qui ont vécu avec des couples pendant des années, que la société leur reconnaisse qu'ils ont eu des parents, que ces parents les ont aimés, ont vécu avec eux et qu'on les reconnaît comme leurs parents. Ils ont droit à la protection de leurs parents, ils ont droit d'assumer l'amour de leurs enfants devant la société. Ils ont droit, les parents, d'assumer l'amour de leurs enfants et, les enfants, d'exprimer l'amour envers leurs parents et à les nommer: Ce sont mes parents. Ceci est légitime, la loi le reconnaît. C'est ça que signifie ce projet de loi. Ce n'est pas un projet de loi coercitif. C'est-à-dire, si vous voulez exprimer... Parce que encore faut-il que ces couples homosexuels désirent s'exprimer à travers l'union civile, et ça, c'est leur choix parce que, nous devons le dire, l'homosexualité n'est pas toujours facile à exprimer publiquement. Et, si vous voulez l'exprimer de cette façon-là, la société va vous le reconnaître, ce droit. Alors, c'est pour moi, donc, plus que de la tolérance, c'est une question de respect qu'exprime ce projet de loi. Et je félicite le ministre de la Justice d'avoir osé. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la ministre. M. le ministre délégué à l'Immigration et aux Relations avec les citoyens. M. le ministre.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. J'informerai immédiatement les collègues de l'Assemblée que ce que je vais dire est impromptu. Tout le monde sait que les impromptus les meilleurs sont ceux qu'on a préparés, mais ce n'est pas le cas pour mon intervention.

n(15 h 20)n

M. le Président, finalement, il y a très peu de chose qu'on choisit dans la vie. Je n'ai pas choisi mes parents ? et ce n'est pas un reproche, c'est d'extraordinaires parents que j'ai eus ? je n'ai pas choisi mes parents, je n'ai pas choisi le pays dans lequel je suis né, donc je n'ai pas choisi ma nationalité, je n'ai pas choisi ma langue, je n'ai pas choisi ma culture, je n'ai eu rien à dire sur mon sexe, je n'ai eu rien à dire sur mon orientation sexuelle. Et, lorsque, pour la première fois, M. le Président, j'ai voulu devenir le représentant de ces êtres merveilleux que sont les femmes et les hommes du Centre-Sud, du Plateau Mont-Royal et du Vieux-Montréal, j'ai décidé que la plus belle et la meilleure des attitudes à avoir était de leur dire: Voilà ce que j'attends de vous, voilà ce que je souhaite faire avec vous. J'aimerais que vous m'exprimiez ce que vous attendez de moi également. Mais, par contre, je vous dirai tout de suite qui je suis, sans ambages, sans réserve aucune. Et, quand je vous ai dit le plaisir, la joie, le privilège même que j'ai de représenter ces femmes et ces hommes exceptionnels de la circonscription de Sainte-Marie?Saint-Jacques, eh bien, les réactions quant à mon orientation sexuelle ont été: Bien, on vous demande d'être un bon député. Certaines personnes disaient: Ça ne nous regarde pas, André. C'était Mme Parenteau, c'était Mme Leduc, c'était M. Legault, des figures qui malheureusement sont disparues dans ma circonscription mais que je continue à porter dans mon coeur, tellement ces gens étaient pleins d'affection ? pleins d'affection, pleins d'espoir ? et acceptaient que je puisse travailler ce grand rêve collectif qui est le nôtre, mais que je puisse assumer, moi, mes rêves individuels.

M. le Président, si vous saviez quelle fierté et quelle émotion je ressens aujourd'hui de voir que nous sommes à la quasi-étape finale, puisqu'il restera le vote de l'adoption de cette loi. Cette loi-là... Et j'étais très heureux d'entendre ma collègue et amie la députée de Taschereau, ministre déléguée à l'Emploi, dire: C'est une loi qui n'est pas coercitive. Ce n'est pas une loi d'obligation, c'est une loi de droit, qui s'accompagne, il va de soi, de devoirs. C'est une option qui est offerte à celles et ceux qui souhaitent vouloir l'exercer.

Comme le dit si bien Vigneault, chacun à sa manière, chacun à sa façon a le droit d'aimer. Et, si c'est pour la plénitude du bonheur que chacun et chacune d'entre nous souhaitent avoir, exercer ce droit qui est accordé par la loi, eh bien, voilà une étape fort importante dans la vie d'une société, une société qui a résolument décidé de se projeter à l'avant-plan de l'ensemble des sociétés non pas uniquement nord-occidentales, nord-américaines, dis-je plutôt, mais même occidentales et à travers le monde.

Je ne vais pas vous apprendre à vous, M. le Président ? vous le savez tout aussi bien que moi ? que bien des sociétés manifestent la plus grande des intolérances. Et je me rattacherai de nouveau au discours de ma collègue et amie ministre déléguée à l'Emploi. Cette société n'est plus à l'époque de la tolérance, cette société est à l'époque de l'acceptance. De l'acceptance. C'est-à-dire que c'est l'acceptation de l'autre, une acceptation inconditionnelle de l'autre. Je trahis peut-être mes études académiques. C'était un magnifique livre d'Ericksson qui faisait partie de nos lectures obligatoires, qui était L'acceptation inconditionnelle d'autrui. Voilà où en est la société québécoise.

Et c'est l'opposition elle-même, par la voix du directeur de cabinet du leader de l'opposition, qui l'exprimait d'une façon très belle: «Nous vivons un moment qui est historique, national et transpartisan.» Transpartisan, puisque les députés de l'opposition, les députés du gouvernement y ont travaillé, y ont travaillé d'une façon consciencieuse, y ont travaillé avec un humanisme parce qu'ils savaient que cette loi n'était pas uniquement qu'une loi technique, mais qu'elle affectait la vie de plusieurs milliers de leurs concitoyens et de leurs concitoyennes.

Dans une vie antérieure, une vie politique antérieure, j'aurais sans doute pu participer entièrement à cette commission. Je n'y ai été que de passage. Je le regrette. J'étais le premier malheureux. Et j'ai pu me rendre compte avec quel sérieux, avec quel sérieux les membres de la commission, peu importe leur appartenance politique, ont exercé leur travail, et je voudrais, M. le Président, leur en rendre hommage, au même titre d'ailleurs que je rends hommage à notre collègue et ami le député de Louis-Hébert et ministre de la Justice qui, dès son entrée en fonction comme ministre de la Justice en 1994, a fait preuve d'une grande sensibilité et a vraiment illustré par ses gestes, ses actions ministérielles la portée du mot «acceptance».

Je suis, de par les attributions que le premier ministre m'a confiées, quotidiennement en contact avec cette immense diversité québécoise. Je dis toujours, M. le Président, que la somme de nos différences, la somme de nos différences n'est pas une division, n'est pas une soustraction, mais la façon dont nous les vivons au Québec ? et nous donnerons bientôt un nouvel exemple ?fait que la somme de nos différences est sans aucun doute la plus belle et la plus merveilleuse des additions, et cela, c'est l'opinion largement majoritaire, quasi unanime de l'ensemble de nos compatriotes.

M. le Président, je ne pourrais compléter sans vous raconter une anecdote. Il y a un club d'âge d'or... J'ai banni le mot «âge d'or» dans ma circonscription. Je ne l'aime pas. Je leur ai imposé une nouvelle appellation, ça s'appelle des clubs de jeunesse prolongée. Et il y en a un très important, c'est celui de la paroisse Sacré-Coeur. La présidente, Gisèle Gagné, traditionnellement invite son député au souper de la fête des Mères et appelle au moins une dizaine de fois pour s'assurer que le député sera présent. C'est probablement le harcèlement le plus affectueux que je puisse connaître. Gisèle Gagné ne recevant pas de confirmation de ma présence, je l'ai appelée en lui disant: Gisèle, je ne serai pas présent à ce dîner de la fête des Mères que tu organises. J'aimerais tellement rencontrer tous les gens qui seront là, que je connais, que j'aime bien, et je t'expliquerai à toi la raison pour laquelle je n'y serai pas. La raison, Gisèle, elle est fort simple: je serai, durant ce weekend, à l'extérieur du pays, fêtant un trentième anniversaire de vie commune avec celui qui partage ma vie. Quatre jours après, Gisèle Gagné est arrivée à mon bureau avec un belle boîte où il y avait deux coupes de champagne avec les chiffres 30 en étain. Cette dame a 80 ans. Elle illustre très bien la mentalité québécoise. Merci, Gisèle. Et merci encore une fois aux membres de la commission. Merci, M. le ministre.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres collègues qui souhaitent intervenir sur le projet de loi? Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais l'ajournement du débat, selon l'article 100 de notre règlement, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Alors, s'il y a consentement, le débat est ajourné. Donc, nous ajournons le débat. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Oui. Alors, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 35 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 54

Adoption

Le Vice-Président (M. Beaulne): À l'article 35 du feuilleton, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Bégin: M. le Président, avant de commencer mon allocution, je voudrais vous mentionner que, dans le cas de cet article, il y a des amendements, je crois, qui sont rendus devant la présidence. Je voudrais m'en assurer.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Est-ce qu'on les a sur la table? Les avez-vous, les amendements?

M. le ministre, il semblerait que nous n'ayons pas encore reçu les amendements, malheureusement.

M. Bégin: ...avec les gens de la table, mais ils ont peut-être pensé à un autre numéro de projet de loi. Les voici, M. le Président. Ça va? Alors, je les dépose, et je pense que c'est la façon de faire pour être en mesure d'étudier ces amendements-là avant l'adoption finale. Alors, avec votre permission, je commencerais mon allocution, et c'est après, je crois, qu'on fait les amendements, à moins que vous ne me donniez des indications contraires. On se transforme immédiatement en plénière?

n(15 h 30)n

Une voix: En plénière.

M. Bégin: Alors, M. le Président, on me dit qu'il faudrait d'abord passer en plénière étudier ces amendements, et par la suite faire l'adoption.

Le Vice-Président (M. Beaulne): M. le ministre, nous allons suspendre quelques instants pour vérifier la suite de la procédure à suivre.

(Suspension de la séance à 15 h 31)

 

(Reprise à 15 h 32)

Le Vice-Président (M. Beaulne): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: M. le Président, je ferais motion pour que l'Assemblée puisse se constituer en commission plénière, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Cette motion est-elle adoptée? Alors, je suspends quelques instants pour nous permettre de nous métamorphoser en séance plénière.

(Suspension de la séance à 15 h 33)

 

(Reprise à 15 h 35)

Commission plénière

Étude des amendements du ministre

M. Beaulne (président de la commission plénière): Bien. Alors, conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier les amendements proposés par M. le ministre de la Justice au projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile. M. le ministre.

M. Bégin: Alors, M. le Président, je proposerais un amendement à l'article 168, qui se lirait comme suit: Remplacer, dans les deuxième et troisième lignes de l'article 168 du projet de loi, ce qui suit: «(indiquer la date d'entrée en vigueur du présent article)» par ce qui suit: «(indiquer ici la date de la sanction de la présente loi)».

Le Président (M. Beaulne): Voulez-vous dire quelques mots?

M. Bégin: Je pense, M. le Président, que c'est une erreur qui s'est glissée, alors c'est simplement pour ajuster à ce que nous voulions faire.

Le Président (M. Beaulne): Mme la députée de Bourassa et porte-parole de l'opposition, voulez-vous dire quelques mots sur cet amendement?

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, M. le ministre, nous devons donc comprendre qu'il s'agit ici purement d'un amendement de nature technique?

M. Bégin: Très simplement.

Mme Lamquin-Éthier: O.K.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'amendement est-il adopté?

M. Bégin: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Est-ce que l'article 168, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, pouvez-vous nous présenter votre prochain amendement?

M. Bégin: Oui, M. le Président. C'est un amendement à l'article 169.1: Insérer, après l'article 169 du projet de loi, l'article suivant:

«169.1. Les articles 953 et 957.1 du Code de procédure civile sont modifiés par le remplacement, partout où il se trouve, du nombre "3 000" par le nombre "7 000".»

Alors, M. le Président, nous avons adopté justement ce changement de 3 000 à 7 000. Cependant, dans l'autre section, nous l'avons omis, de sorte que nous aurions une discordance entre une première partie du Code et une seconde. Il s'agit tout simplement de faire l'ajustement en conséquence.

Le Président (M. Beaulne): Mme la députée de Bourassa.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Donc, il s'agit d'une erreur qui a été constatée et, pour éviter de provoquer une discordance, nous avons apporté le présent amendement.

Le Président (M. Beaulne): L'amendement est-il adopté?

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): L'article 169.1, tel qu'amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): M. le ministre, pour votre prochain amendement.

M. Bégin: J'ai un troisième amendement, à l'article 171: Remplacer l'article 171 du projet de loi, tel que remplacé par l'amendement 187, par l'article suivant:

«171. Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur le 1er janvier 2003, à l'exception des articles 4, 168 et 169.1 qui entreront en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi).»

Alors, M. le Président, c'est encore une question d'exprimer la volonté que nous avions, mais, malheureusement, nous avons omis d'adopter cette disposition-là, et il s'agit simplement de rendre conforme à ce que les législateurs voulaient adopter, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: Je crois comprendre que, encore ici, c'est une modification d'ordre technique, de concordance.

M. Bégin: Exact.

Le Président (M. Beaulne): Alors, l'amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Mme Lamquin-Éthier: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Beaulne): L'article 171, tel qu'amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Beaulne): Merci. Alors, la commission plénière ayant accompli son mandat, je mets fin à nos travaux et je remercie ceux et celles qui ont participé. Pour permettre à l'Assemblée de poursuivre notre séance, je prierais toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement. Et je suspends quelques instants pour nous permettre de reprendre nos travaux habituels.

(Suspension de la séance à 15 h 38)

 

(Reprise à 15 h 40)

Le Vice-Président (M. Beaulne): Alors, je demanderais à la députée de Viger de nous transmettre le rapport de la commission plénière. Mme la députée.

Mme Mancuso (présidente de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié l'amendement proposé au projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile.

Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Beaulne): Alors, ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté. Nous allons donc poursuivre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile, et j'invite le ministre de la Justice à prendre la parole. M. le ministre.

M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. J'aimerais profiter de l'occasion pour parler des objectifs et des orientations majeures du projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile.

M. le Président, pour l'ensemble de la population, c'est un projet de loi qui ne signifie pas beaucoup de choses. C'est un peu comme si vous leur offriez de dire: Connaissez-vous mieux les menus que vous mangez que le livre de recettes qui vous permet d'y arriver?

Alors, ce que l'on a dans le droit. Nous avons, par exemple, nos lois qui disent les droits que nous avons, le Code civil, des lois particulières qui donnent l'ensemble de ce que nous avons comme droits, responsabilités et obligations. Mais, pour faire ressortir ces droits et quand on est devant le tribunal, il faut avoir des règles qui nous indiquent de quelle manière les avocats, les juges, les témoins, doivent se comporter. J'ai l'habitude de dire que le Code de procédure civile, c'est un peu comme le livre de recettes du droit civil, par rapport à une recette en matière de cuisine. Maintenant, c'est donc quelque chose d'extrêmement important.

Le Code de procédure civile a été modifié année après année depuis son adoption en 1966, mais fondamentalement il n'a pas été changé dans son organisation. Ce que ce projet de loi fait et vise à faire, c'est entre autres de faire en sorte qu'on ait une justice civile qui est plus rapide, plus efficace, moins coûteuse, susceptible d'améliorer l'accès à la justice et d'accroître la confiance du citoyen dans le système de justice.

De quelle manière y arriverons-nous? Tout d'abord, à faire un resserrement des délais pour mettre une cause en état. Mettre une cause en état, c'est quoi? C'est faire en sorte qu'après que les avocats aient échangé les moyens, les écrits, qu'ils aient interrogé des gens, c'est faire en sorte que le dossier soit prêt, sur le plan de la procédure, à être entendu par un juge afin qu'il rende jugement. Donc, mettre la cause en état, ça peut prendre des fois trois mois, et, dans certains cas, ça a pu prendre quatre ou cinq ans.

Nous voulons faire en sorte que la justice soit plus rapide, il faut donc faire en sorte que nous arrivions rapidement à ce que le dossier soit prêt. Pour le faire, nous croyons ? et ceci est une croyance partagée à la fois par les avocats qui pratiquent comme par la magistrature, que ce soit la Cour du Québec, la Cour supérieure et/ou encore la Cour d'appel ? donc on juge qu'il faut resserrer les délais pour mettre une cause en état. Et c'est ce que le Code de procédure civile fait, entre autres choses.

Deuxièmement, pour y arriver, on veut faire en sorte qu'il y ait une plus grande responsabilité des parties. Il faut que les parties se sentent et soient plus impliquées dans la préparation et faire en sorte qu'on arrive à temps.

Et, troisièmement, il y a un rôle accru du juge. À défaut par les parties de s'entendre sur un calendrier pour arriver à respecter un délai qui deviendra la règle, c'est-à-dire qu'un dossier devra être en état dans les 180 jours du début de son ouverture ? c'est la règle, il y aura des exceptions ? donc, pour y arriver, on fait en sorte que les parties s'entendent sur un échéancier pour faire l'ensemble des moyens, des mesures qu'elles jugent à propos pour mettre le dossier en état.

Si les parties arrivent à s'entendre sur un tel calendrier, il n'y aura aucune intervention de la cour; ce sera simplement l'observance par les parties de ce calendrier qui permettra d'arriver avant le délai de 180 jours. Advenant le cas où les parties ne s'entendent pas sur ce calendrier, au bout d'un délai relativement court de 30 jours, la cour pourra et tranchera les litiges entre les parties et établira avec elles ou d'autorité le calendrier qu'elles devront suivre pour arriver à faire en sorte que le dossier soit prêt au bout du délai de 180 jours. Donc, c'est extrêmement important.

J'ai déposé ce projet de loi à l'automne dernier. Il y a eu manifestation d'objections importantes de la part du Barreau, et j'ai donc suspendu l'étude de ce projet de loi et je l'ai reportée à ce printemps afin de faire en sorte que nous nous entendions mieux, puisque le projet de loi reposait non pas sur quelque chose qui avait été initié au ministère de la Justice lui-même, mais sur une étude qui avait pris trois ans et qu'un comité avait menée à terme, comité composé de représentants de la magistrature, du Barreau, du ministère de la Justice et du milieu universitaire, donc, où on avait travaillé l'ensemble du Code de procédure et remis... et on m'avait remis, dès mon arrivée en fonction ou presque au ministère l'an dernier, ce rapport de quelque 300 pages et où on disait de quelle manière le Code devait être modifié.

Donc, afin de permettre de mieux s'entendre, j'ai reporté le tout à ce printemps, et, entre-temps, il y a eu des échanges nombreux et fructueux avec les partenaires. Particulièrement, nous avons tenu, au mois de févier, une rencontre qu'on appelle tripartite ? magistrature, Barreau et ministère de la Justice ? où on s'est échangé sur les différents points de vue et surtout sur les points qui étaient vus comme étant litigieux, que ce soit pour des dossiers de la Cour d'appel, pour des cheminements devant la Cour supérieure ou devant la Cour du Québec ou encore le Barreau, comme les avocats qui utilisent ce Code. On a fait en sorte que nous fassions des arrimages, nous nous entendions sur l'ensemble de la procédure.

C'est ce qui a été fait, M. le Président, et nous avons donc été en mesure de procéder à des changements qui tenaient compte de ce que nous avions convenu lors de cette rencontre. Et, par la suite, nous avons donc pu tenir des consultations particulières, qui se sont tenues effectivement les 21 et 26 mars dernier, où les parties, y compris celles que je viens de mentionner, sont venues exprimer de manière beaucoup plus pointue, puisque nous nous étions entendus sur les principes et sur les grandes orientations, donc de manière beaucoup plus pointue sur des changements qui devraient quand même être apportés. Donc, nous avons fait ce travail et, par la suite, nous avons tenu, les 1er et 15 mai, une commission parlementaire où nous avons étudié article par article la nouvelle version en question.

Bien sûr, le Barreau, qui est le... évidemment dont les membres sont les utilisateurs de ce Code de procédure civile, ont continué leur travail et ont fait de nouvelles représentations afin de bonifier... On se comprend, M. le Président, il ne s'agit pas de changer les orientations mais de faire en sorte que chaque virgule, que chaque point, que chaque paragraphe reflètent exactement ce que l'on pensait être la meilleure manière de faire les choses. Il était important de faire ce travail que je qualifierais, dans certains cas, de bénédictin, puisque c'est une oeuvre qui va non seulement être utilisée régulièrement, mais pendant de très nombreuses années. Et, comme il s'agit d'assurer le respect des droits ou faire en sorte que les droits des citoyens soient reconnus et sanctionnés, il faut donc que nous ayons la meilleure rédaction possible.

Quelles étaient donc ces matières? Je les ai mentionnées tout à l'heure. J'ajouterais une autre, c'est des règles, par exemple, relatives à ce qu'on appelle une défense orale, c'est-à-dire qu'au lieu de faire un écrit pour dire: J'ai pris connaissance d'une requête, voici ce que j'en pense, voici les moyens que j'invoque, on peut et on favorise une défense orale, ce qui permet de procéder beaucoup plus rapidement. Mais encore faut-il que cette question-là soit bien encadrée. Donc, on a pu le faire.

Deuxièmement, on a travaillé beaucoup aussi sur ce qu'on appelle, dans le jargon des avocats, la gestion des causes, c'est-à-dire l'intervention du tribunal pour s'assurer que toutes les parties voient leurs droits bien respectés et qu'on respecte aussi les échéances que le législateur a fixées et, par hypothèse, a fixées en s'entendant entre les principaux intéressés, les avocats, la magistrature, le gouvernement qui représente, bien sûr, l'ensemble, mais aussi les citoyens. Alors, nous l'avons fait et nous avons aussi apporté des modifications importantes qui concernent l'appel, et elles sont vraiment le reflet de ce que nous avions convenu avec les juges en particulier.

Nous voulons donc améliorer les délais, faciliter l'accès à la justice en faisant en sorte que les appels soient moins dilatoires, «dilatoire» voulant dire qu'on ne va pas en Cour d'appel pour gagner comme tel, mais pour gagner du temps. Alors, «dilatoire» est ce volet, et, certaines fois, nous sommes en présence de moyens qui sont dilatoires, ce qui occasionne évidemment le retard d'un jugement final et ce qui cause également des préjudices à la partie qui est obligée d'attendre beaucoup plus longtemps avant que son jugement puisse être exécutoire. Et, dans certains cas, M. le Président, on assiste à des appels qui sont abusifs et qui sont vraiment nuisibles. Alors, nous donnons à la cour la possibilité de mieux gérer les causes, faire en sorte que, par exemple, si quelqu'un utilise des moyens qui peuvent nous paraître abusifs ou dilatoires, de faire en sorte qu'on soit beaucoup plus rapidement devant le tribunal et que celui-ci puisse sanctionner ces abus de procédure.

n(15 h 50)n

Alors, voilà, M. le Président, quelque chose qui est un effort considérable. Normalement, on souligne les participations de nos collègues, et je pense qu'on le fait sincèrement. Mais, dans ce cas-ci particulièrement, je dois dire que ma collègue la députée de Bourassa a fait un travail remarquable. Elle a utilisé toutes les ressources qui étaient à sa disposition, mais elle les a utilisées de manière extrêmement constructive, que ce soit le rapport du Comité de révision sur le Code de procédure civile, que ce soient les deux ou trois rapports que le Barreau a faits pour amener des modifications, que ce soient les interventions que d'autres personnes ont faites devant le Comité, bref, que tous les argumentaires qui avaient été fournis pour chaque point... Et, quand je dis «chaque point», je parle de points détaillés qui faisaient que le texte était mieux construit, amélioré par rapport à son texte original.

Elle l'a fait, mais de manière constructive, non pas pour faire en sorte qu'on gagne du temps, mais pour véritablement faire ce qui m'apparaît être notre rôle de parlementaires, c'est construire les meilleures lois qui soient, puisqu'il s'agit d'instruments ? surtout le Code de procédure civile ? d'instruments qui vont servir à faire ressortir le droit des citoyens. Alors, ce n'est pas banal. Une loi, généralement, donne des grands principes, et on dit: Bon, à partir de là, on va de l'avant. Mais, un code de procédure civile, c'est là-dessus que repose une victoire, une défaite, un délai, pas de délai, bref l'ensemble de nos droits, et c'est par ce moyen-là qu'on les a. Donc, c'est important, ce travail-là, et la députée de Bourassa a fait un travail remarquable, que je tiens à souligner de manière spéciale, parce que ça va au-delà de la simple collaboration, que l'on trouve normale ou que l'on dit normale, où on travaille ensemble à l'amélioration de ça.

Alors, elle avait tout à l'heure devant elle ce qui a été utilisé pour faire l'union civile. C'est très volumineux, mais je pense qu'elle aurait dû apporter ce qui a été utilisé pour le Code de procédure civile, parce que c'est encore plus volumineux, si on y avait inclus les mémoires, le rapport de Comité de révision, les trois ou quatre lettres du Barreau ? qui étaient nombreuses ? les nombreux amendements que nous avons apportés, ce sur quoi nous avons discuté. Bref, c'est un travail remarquable, que je tiens à le souligner.

Je remercie aussi mes collègues qui ont été là-dedans. Mais je dois dire, en toute franchise, que, dans ce cas-là, étant donné qu'on est dans des questions extrêmement pointues, sophistiquées, vraiment, là, ce que les gens appellent du travail d'avocats, mes collègues ont été assez généreux d'être présents pour qu'on puisse faire avancer les travaux, mais ils sentaient peut-être qu'une intervention aurait peut-être été difficile dans ce cas-ci. Alors, je les remercie de nous avoir permis de faire ce travail minutieux et de donner aux Québécois et aux Québécoises, dans l'exercice de leurs droits, un instrument qui va leur être extrêmement utile. Alors, merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant la députée de Bourassa et porte-parole de l'opposition en cette matière à nous adresser la parole. Mme la députée.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Permettez-moi d'emblée d'emboîter le pas à M. le ministre de la Justice et de le remercier des bonnes paroles qu'il vient d'avoir à mon égard. J'aimerais partager ses remerciements plus particulièrement, évidemment, avec l'ensemble de mes collègues de l'opposition officielle, mais plus particulièrement avec ma collègue de Viger, qui est ici présente, qui a participé aux débats concernant le projet de loi n° 54. Je voudrais remercier plus particulièrement mon collègue de Chapleau, ma collègue de Jonquière. Ils sont venus à point nommé m'aider, parce que, vous savez, le projet de loi n° 54, on est rendu à la dernière étape du projet de loi n° 54, donc l'adoption, c'est un projet de loi qui porte sur la réforme du Code de procédure civile.

M. le ministre disait que, et il a raison: Il s'agit d'une pièce législative qui est extrêmement importante. Et il convenait, je pense, qu'elle soit abordée avec sérieux, et ça fait partie des tâches des parlementaires. Malheureusement, c'est un volet qui n'est pas visible pour le public, alors j'ai apporté avec moi... Ça, c'est effectivement les documents que... Et je ne les apporte pas simplement pour les montrer à la télévision. Je pense que les onglets vont pouvoir paraître. Parce que le travail de l'opposition officielle, lorsqu'il aborde un projet de loi, c'est de le faire dans une perspective constructive et positive. Alors, M. le ministre parlait des documents que nous avons pu être appelés à regarder dans le temps de l'étude du projet de loi. Alors, pour votre bénéfice et le bénéfice de nos auditeurs, ça, c'est le projet de loi n° 54, donc celui que nous devions procéder à étudier. Et, quand on dit «regarder un projet de loi», c'est bien sûr qu'on ne fait pas juste le regarder, là, on l'annote, on regarde d'autres textes, des documents. Parce que, le droit, vous savez, un article peut s'interpréter avec un autre, ça doit se tenir, c'est extrêmement important.

Alors, c'est un projet de loi qui à l'origine contenait 171 articles. Peu après son dépôt, M. le ministre a déposé une centaine d'amendements. À ce moment-là, je croyais pratique de les insérer dans le texte, mais je me suis aperçue, à l'usure, que c'était très difficile, parce qu'il y a des amendements qui ont été apportés subséquemment, toujours au projet de loi n° 54, et ils étaient apportés au fur et à mesure. Alors, à chaque fois que des amendements étaient déposés, évidemment, de la même façon, l'opposition officielle entreprenait un examen sérieux et attentif de ces amendements-là pour s'assurer... Comme le disait M. le ministre, parfois des bonifications peuvent s'intéresser à une ponctuation; parfois, ça peut s'intéresser au texte, à la lettre même, et d'autres fois ça concerne le fond, donc des éléments extrêmement importants. Et, vous voyez, M. le Président, j'ai encore des amendements ici. Et nous ne sommes que dans la phase 1 de la révision du Code de procédure civile. C'est un projet d'une ampleur telle qu'il va être fait en trois étapes. Nous n'aurons fait à cette session-ci que la première étape, et nous entreprendrons subséquemment les phases 2 et 3.

Lorsque M. le ministre parle du comité qu'il a mis sur pied... voici le rapport qui avait été déposé par le Comité de révision de procédure civile. Évidemment, c'est un rapport qui contient plus de 300 pages et qui contenait 300 recommandations. On a eu beaucoup de mémoires qui ont été déposés, mais je dois souligner plus particulièrement la collaboration du Barreau du Québec, qui ont déposé des mémoires extrêmement substantifs, bien documentés, avec, lorsque c'était requis, des preuves documentaires, des tableaux statistiques, parce qu'on s'intéressait notamment à la compétence monétaire de différents paliers. Alors, pour pouvoir prendre une bonne décision, vous comprenez bien que ça prend des éléments d'information. Donc, on a eu une collaboration exceptionnelle du Barreau du Québec, plus particulièrement de Me Vadboncoeur, qui a suivi d'ailleurs les débats au jour le jour. Elle a toujours été présente. Et, de la même façon, on s'intéressait à d'autres lois, et il y avait aussi d'autres mémoires que j'ai apportés avec moi.

Et le but de l'exercice, M. le Président, c'est pour vous montrer qu'un texte de loi, c'est important. Le Code de procédure civile, c'est une pièce législative majeure, qui va avoir des impacts évidemment, parce qu'on parle de procédure civile. Alors, la phase 1 voulait apporter des modifications, aborde quatre chapitres principaux: l'introduction et le déroulement de l'instance, l'appel, le recouvrement des petites créances et le recours collectif.

Je vous donne un exemple. Ça a un impact certain pour les citoyens du Québec, et je vous donne un exemple. Je recevais hier une lettre d'une dame qui me déclarait être en attente d'avoir une date pour aller en procès après cinq ans d'attente. Alors, quand on parle de vouloir simplifier la procédure, l'alléger, s'assurer du respect des délais, vous comprenez bien que, ce qu'on vise en bout de ligne, c'est l'accessibilité à la justice, de faire en sorte que des citoyens puissent avoir accès à cette justice-là, être entendus dans des délais raisonnables et avoir un jugement aussi dans des délais qui sont raisonnables.

n(16 heures)n

M. le ministre a rappelé tout à l'heure, et je pense qu'il me permettra d'insister davantage là-dessus... Le comité Ferland, depuis plus de trois ans, il faisait une consultation auprès des milieux juridiques, alors: magistrats, avocats, professionnels, spécialistes dans certains secteurs du droit ? il suffit de penser aux petites créances, aux recours collectifs ? pour déposer un rapport, et évidemment c'est un travail d'envergure, extrêmement important, et il allait de soi que nous avons référé à chaque fois au rapport. Et, lorsque M. le ministre, à l'intérieur de sa juridiction, prenait la décision de s'écarter de la recommandation qui avait été formulée par le comité Ferland, il allait de soi que nous nous devions de lui demander exactement pourquoi il avait pris une décision contraire.

Alors, l'étude article par article, c'est justement l'occasion pour l'opposition officielle, suivant les témoignages... Lorsqu'il y a des commissions parlementaires, il y a des groupes qui viennent, qui nous font des commentaires. Lorsqu'on a des mémoires, notre responsabilité, bien sûr, c'est de les lire pour nous assurer que le projet de loi va tenir compte des points de vue, des recommandations qui ont été formulés par des experts en la matière. Alors, dès le dépôt du projet de loi n° 54, le ministre de la Justice voulait que l'opposition officielle fasse connaître sa position à ce moment-là, ce qui était tout à fait impensable. C'était déraisonnable vu l'ampleur du projet de loi. Alors, évidemment nous avons jugé que le processus était inacceptable vu, encore une fois, l'ampleur et l'importance de la législation.

Il y a eu une contestation qui s'est organisée, à bon droit, à juste titre, parce qu'on ne pouvait pas, à la vitesse, prendre position sur un projet de loi qui va avoir des impacts majeurs probablement pour les 30 prochaines années pour les citoyens du Québec. Alors, M. le ministre avait convenu, et je l'en remercie, de ralentir la cadence, et nous avons commencé par la suite, lorsque d'autres étapes ont été complétées, l'étude du projet de loi article par article.

Alors, c'est un travail extrêmement important qui a été fait. Encore une fois, ça touche à l'introduction de l'instance. Je ne rentrerai pas, vu le temps dont je dispose, dans le détail, mais je pense que c'est important qu'on puisse savoir exactement à quoi ça touchait, donc à l'introduction de l'instance, au déroulement. Et il convient de mentionner qu'on a introduit... le projet de loi introduit un délai de 180 jours à l'intérieur duquel une cause devra être inscrite pour enquête et audition. Alors, ça, c'est extrêmement important. Et, encore une fois, l'objectif poursuivi, c'est de permettre un accès à la justice.

On s'ouvre également sur la négociation, favoriser le plus possible la négociation entre les parties pour arriver à une entente, et c'est possible. On accroît le rôle des tribunaux. Je pense que tous reconnaissent que les tribunaux peuvent effectivement jouer un rôle extrêmement important, et ils ont un rôle qui se voit augmenter en ce qui a trait à la gestion de l'instance. Donc, l'utilisation de la conciliation va être favorisée. Et, évidemment, le projet de loi, dans le même ordre d'idées, va introduire la possibilité de tenir des conférences de règlement à l'amiable. Évidemment, ces conférences-là ont pour but de permettre aux parties d'exposer leur point de vue, de convenir des points d'intérêt, de négocier des ententes et d'arriver à des règlements. Je pense que c'est extrêmement important.

Évidemment, il y a des nouveaux... il y a des délais aussi qui sont introduits au niveau des jugements pour ne pas qu'une partie attende, attende et attende après un jugement. Alors, il y a des délais qui vont être prévus pour que les jugements puissent être rendus. Je vous donne un exemple. L'article 80 de la loi fait en sorte qu'un jugement devrait être rendu dans les quatre mois suivant la prise en délibéré. Ça veut dire: le moment où la preuve est close, le juge s'empare de tout ça, se retire, et là pourra délibérer, c'est-à-dire réfléchir davantage pour arriver à commettre un jugement, à rendre un jugement. Donc, il y a des délais qui sont donc prévus, encore une fois favoriser l'accessibilité, et je vous en mentionnais un.

Évidemment, il y a des articles de loi, il y avait un chapitre qui s'intéressait à l'appel. Vous savez que la Cour d'appel, c'est un tribunal général d'appel pour le Québec. Alors, on a vu différents articles s'intéressant à ce secteur ou à ce palier de la procédure. Encore une fois, il y a des amendements importants qui ont été apportés en ce qui a trait à l'appel.

On s'est intéressé au recouvrement des petites créances, un point qui peut rejoindre de nombreux citoyens. Des recommandations avaient été formulées par le rapport Ferland. M. le ministre a pris la décision de hausser la valeur des petites créances, alors il l'a haussée de 3 000 à 7 000. Et, à l'occasion de l'étude article par article, nous avons pu soumettre des questions.

Il y a des changements importants aussi qui ont été faits au niveau du recours collectif, et je dois dire que, pour certains d'entre eux, des modifications ont été apportées. Encore là, il y a des spécialistes qui sont venus déposer un mémoire. Je me souviens de Me David McDevitt, un très grand spécialiste dans ces matières-là, qui a pris le temps et la peine de se déplacer, par intérêt, par intérêt, pour venir alimenter les travaux des membres de la commission, pour venir nous parler de l'évolution du droit en cette matière et pour nous dire quelles modifications devaient être apportées au texte de loi. Certaines des modifications qui ont été apportées vont en partie dans le même sens d'un projet de loi que j'avais moi-même déposé, le projet de loi n° 198. Vous vous souviendrez que j'avais fait le dépôt de ce projet de loi à la dernière session.

Alors, vous savez, M. le Président, on peut dire des fois, à la blague: mission accomplie! Mais je pense que, en ce qui a trait au devoir des parlementaires de regarder des textes de loi de façon responsable, je peux vous assurer que l'opposition officielle a travaillé extrêmement fort. Puis là on est en session intensive. Vous m'excuserez, peut-être que j'ai l'air un petit peu fatiguée, mais vous savez que certaines journées on commence à 8 heures puis certaines journées on peut aller jusqu'à minuit le soir. Vous savez qu'on peut passer d'un projet de loi à l'autre. M. Bégin, je me souviens, une journée, on était sur le projet de loi n° 84, l'après-midi on se retrouvait sur 54. Vous allez avoir l'occasion d'aborder tout à l'heure le projet de loi n° 70 sur lequel effectivement nous avons fait de nombreux travaux également. On va voir un autre projet de loi, qui est 85. Ça, c'est juste pour aujourd'hui. Votre menu pour demain pourra comporter également d'autres projets de loi, toujours à l'intérieur des responsabilités que j'ai comme porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice. Alors, actuellement, j'ai huit projets de loi sous étude. Alors, vous comprenez bien que ça demande beaucoup de travail.

C'est un privilège, et je me plais à le répéter, de représenter les citoyens et les citoyennes du comté de Bourassa. Je sais que c'est la même chose pour ma collègue de Viger. Nous avons le respect de l'engagement, et je sais que ma collègue le partage; elle me l'a dit. Comme tous mes collègues de l'opposition officielle, on respecte l'engagement qu'on a pris envers nos citoyens. On a un privilège de les représenter à l'Assemblée nationale, on a donc le devoir de nous assurer, lorsque nous abordons un texte de loi, de le comprendre. On a toujours la crainte, vous savez, de ne pas être certain de notre compréhension, d'où l'intérêt de demander des consultations, de profiter de l'éclairage de spécialistes. Encore une fois, ici on a pu bénéficier également d'éclairages qui ont été précieux. On a apporté de nombreux amendements au projet de loi n° 54. Les amendements ont été apportés dans une perspective constructive, positive, étant entendu qu'un projet de loi ça a des impacts pour l'ensemble des citoyens du Québec.

Alors, M. le Président, je vous dis merci en terminant et je vous laisse procéder sur les autres étapes.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Bourassa. Mme la députée de Viger.

Mme Anna Mancuso

Mme Mancuso: Merci, M. le Président. Moi aussi, je voudrais prendre l'occasion pour intervenir et apporter mes commentaires concernant la Loi portant sur la réforme du Code de procédure civile. Pour moi, ça a été la première loi que j'ai pu voir en action pendant la commission parlementaire, et disons que ça a été toute une initiation pour moi. Donc, je voudrais, à ce point-ci, remercier aussi ma collègue la députée de Bourassa pour m'avoir assistée dans ce processus, ma première commission parlementaire. Ça a été une expérience mémorable, parce que, effectivement, on était soumis à des amendements et des sous-amendements, et on ne se retrouvait parfois pas dans nos cahiers. Mais évidemment, c'était un processus très important pour nous et pour nos citoyens qu'on représente, et particulièrement pour les avocats.

n(16 h 10)n

Comme vous le savez, je suis aussi avocate. Donc, c'était encore plus intéressant pour moi parce que je pratiquais le droit, et, quand on pratique le droit, on a tendance à... Ici, on est à la phase de l'écrire. Donc, c'est tout une autre perspective, et il faut penser à toutes les situations. Donc, on a pris la peine vraiment, sur chaque article, de s'assurer que toutes les situations étaient considérées. Dans toutes les circonstances, on pouvait trouver un exemple où on s'assurait que les citoyens, leurs droits étaient protégés.

Donc, je voulais aussi porter mes commentaires sur quelques points qu'on a discutés pendant la commission parlementaire, des amendements qu'on a amenés à la pratique du droit. Parce que cette réforme, c'est une réforme fondamentale. Comme le ministre a dit tantôt, la réforme du Code de procédure civile... Ça fait depuis 1966 que le Code a été adopté. Depuis, il y a eu quelques modifications, mais il n'y a jamais eu une modification si importante que celle-ci. Donc, pour moi, c'était important qu'on comprenne bien le processus qu'on est en train d'entamer, et, pendant la commission parlementaire, j'ai pu poser des questions pour m'assurer que, vraiment, on avait une bonne compréhension de qu'est-ce qui se faisait.

Un des grands changements dans le Code de procédure, ça va être le 180 jours pour inscrire une cause pour audition et enquête. C'est majeur pour les praticiens de droit. C'est très majeur pour les avocats, parce que ça voudra dire qu'il faut préparer sa cause à l'intérieur d'à peu près six mois. En pratique, ça va chambarder un peu des choses, parce que, vous savez, en droit, maintenant, une des... c'est que ça prend longtemps pour résoudre des problèmes devant les tribunaux, et cette réforme va aider à resserrer un peu les délais.

Mais 180 jours pour préparer une cause, c'est très, très serré. Donc, le Barreau avait amené des craintes que des parties pouvaient perdre des droits à cause du fait qu'on exige l'inscription à partir du sixième mois. Le ministre a apporté une modification pour permettre une requête en prolongation du délai dans le cinquième mois. Le Barreau avait suggéré qu'on fasse ça au début pour permettre aux parties de bien préparer leur cause. Le ministre n'a pas accepté cette proposition-là considérant que ce serait mieux de le faire dans le cinquième mois.

Je tenais à le dire ici aujourd'hui une autre fois, qu'on aurait préféré que ça se fasse dès le début, la requête en prolongation. En effet, depuis la commission parlementaire, j'ai eu l'occasion de parler avec plusieurs avocats, plusieurs avocats qui m'ont dit que ce serait difficile pour eux, peut-être, de respecter ces délais-là. Parce que, des fois, comme avocats, ce n'est pas nous qui contrôlons toujours nos dossiers, des fois c'est des clients qui sont dans des circonstances qui ne leur permettent pas de régler leurs affaires dans une si courte période.

Et c'est particulièrement le cas en matière familiale. En matière familiale, on sait que c'est des moments qui sont très difficiles pour les parties. Dans un cas de divorce, dans un cas de partage de patrimoine, dans un cas de garde d'enfant, on sait que les émotions sont très, très, très présentes dans ces instances-là. Donc, on aurait préféré que le 180 jours serait extensionné à un an dans les cas de matière familiale. Encore une fois, ça a été aussi la recommandation du Comité, le Comité de révision du Code de procédure civile. Malheureusement, le ministre a choisi d'aller quand même avec le 180 jours. On espère que, dans les quatre ans... Aussi, le ministre a aussi ajouté un article qui permettra de faire révision de ces modifications-là dans quatre ans, donc un rapport pour voir, dans les faits, comment est-ce que cette modification-là a affecté le droit. Donc, ça se peut que, dans quatre ans, on nous amène à faire ce changement une autre fois, parce que, en matière familiale, je crois sincèrement que ça pourrait mettre les droits des parties en péril, ce délai de 180 jours.

Un autre grand changement qui a été apporté, c'est les seuils de compétence. Donc, tel que ma collègue a déjà discuté, le seuil de compétence de la Cour des petites créances va augmenter de 3 000 à 7 000, et la Cour du Québec va augmenter de 30 000 à 70 000. C'était contrairement aux recommandations du Comité. Le Comité aurait souhaité que la Cour des petites créances ait un seuil de compétence maximal, une valeur maximale d'à peu près 4 à 5 000 $. Et, pour la Cour du Québec, on avait suggéré entre 40 et 50 000 $. Donc, le ministre a choisi, de façon arbitraire, d'augmenter les seuils de compétence à 70 000 et à 7 000. Il a aussi suggéré qu'un comité soit formé, et c'était une suggestion qui nous est parvenue du Barreau; il avait suggéré qu'on forme un comité pour évaluer, à l'avenir, comment augmenter ces seuils de compétence. Moi, j'aurais préféré qu'on aurait établi le processus dès maintenant, parce qu'on est en train de faire une révision du Code de procédure civile. C'était vraiment le moment opportun pour évaluer les effets et les conséquences de cette réforme à cette étape-ci. Donc, malheureusement, ça n'a pas été accepté. Donc, on est pris avec cette situation-là.

L'autre grande réforme dans ce Code de procédure civile, c'est la possibilité de contester oralement. C'est quelque chose qui va aussi rendre plus rapide le processus judiciaire. Dans certaines circonstances, c'est bien, mais, dans certaines autres circonstances, je crois qu'on fait un petit pas... on recule, parce qu'on pourrait prendre les parties par surprise. On sait que, maintenant, la divulgation de la preuve, la communication des pièces se fait toujours avant qu'on se rende au procès. Donc, ça pourrait peut-être, dans certaines circonstances, prendre les autres parties par surprise quand on n'a pas tous les faits nécessaires pour bien préparer notre cause. Et, particulièrement dans le cas des poursuites en diffamation, on va permettre de contester oralement les poursuites en diffamation.

Il y a aussi les cas des créances liées à des prix de vente des biens meubles, des contrats de services rendus. Des fois, c'est complexe, ça. C'est plus complexe qu'on le pense. Et, peut-être, contester oralement, ça va faire en sorte que le processus va être beaucoup plus rapide, mais ça va peut-être nous mettre un peu en recul, parce qu'on va devoir consulter nos adversaires de façon différente pour avoir le temps.

Donc, en conclusion, je voudrais aussi féliciter le ministre d'avoir considéré l'importance de la conciliation et des règlements à l'amiable, parce que, ça, c'est l'autre volet qui est très important pour cette réforme. Et donc, cette réforme-là va permettre de solutionner nos litiges à l'extérieur des tribunaux, parce qu'on sait qu'il y a toujours un perdant et un gagnant quand on se présente devant le juge. Mais, en médiation, il y a deux parties qui vont être gagnantes. Donc, je félicite cette initiative-là. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Viger. Avant de passer à l'adoption finale du projet de loi, le ministre de la Justice m'a indiqué qu'il souhaiterait se prévaloir brièvement de sa possibilité de réplique. Il a dû être appelé d'urgence. Alors, je constate qu'il revient parmi nous. M. le ministre de la Justice, vous avez la parole.

M. Paul Bégin (réplique)

M. Bégin: M. le Président, je vous remercie. Je voudrais parler brièvement de trois éléments que j'ai oublié de mentionner, qui m'apparaissent importants. Peut-être ma collègue l'a-t-elle fait, mais je voudrais le faire.

D'abord, dans le Code de procédure, j'ai mentionné tout à l'heure qu'il s'agit d'un livre de recettes, mais, à certaines occasions, ça accorde des droits spécifiques. Entre autres choses, nous avons relevé le niveau des petites créances de 3 000 à 7 000 $. Ça veut dire qu'une personne, un individu qui a une réclamation à faire de 5 500 $, actuellement, ne peut pas aller aux Petites créances, mais doit aller devant la cour, engager un avocat et procéder selon ses règles. Dorénavant, jusqu'à 7 000 $, il pourra aller lui-même ou elle-même devant les Petites créances. Je pense que c'est un changement important.

Deuxièmement, devant la Cour du Québec... La Cour du Québec entendait des causes, jusqu'à maintenant, jusqu'à hauteur de 30 000 $. À compter de l'entrée en vigueur de la loi, elle pourra entendre des causes jusqu'à hauteur de 70 000 $. Ce qui veut dire que c'est là un changement important sur l'étendue du montant. Par contre, dans l'un et l'autre cas, je crois qu'il s'agit là de ramener à peu près au niveau que nous avions fixé antérieurement, compte tenu de la variation de la valeur de l'argent, l'inflation en enlevant une bonne partie. Alors, nous faisons, je dirais, en quelque sorte du rattrapage sur le passé. Donc, c'était deux éléments que je voulais mentionner.

n(16 h 20)n

Un troisième ? et ma collègue, avant que je ne quitte, l'avait abordé ? c'est que ce que nous adoptons par le projet de loi n° 54, c'est une de trois phases. C'est, je dirais, peut-être la plus importante parce que c'est elle qui touche aux mécaniques de fond du Code de procédure civile, mais il y en a d'autres qui s'en viennent. J'ai ainsi adressé au Conseil des ministres un mémoire pour la deuxième phase et j'espère être en mesure de déposer un avant-projet de loi la semaine prochaine afin que nous puissions transmettre et faire connaître à tous les intervenants le contenu de cette deuxième phase et leur permettre de travailler, regarder, voir s'il y a des modifications. Et nous pourrions envisager, à la fin de l'été, fin août, des audiences particulières pour être capables d'entendre les représentants des parties et faire en sorte qu'à l'automne, durant la session de l'automne, nous soyons en mesure d'adopter cette deuxième phase.

Alors, je voulais dire que ceci est important, parce que c'est un travail, bien sûr, de parlementaires, mais qui ne peut pas se faire sans une collaboration importante de la magistrature, et du Barreau, et d'autres intervenants, et je leur dis ainsi que nous serons prêts pour la deuxième phase dans les prochains jours.

Alors, c'est ce que je voulais ajouter à ma déclaration de tout à l'heure, M. le Président. Merci beaucoup.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Alors, puisqu'il n'y a pas d'autres interventions, est-ce que le projet de loi n° 54, Loi portant réforme du Code de procédure civile, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 32, s'il vous plaît, du feuilleton.

Projet de loi n° 70

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude
détaillée et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Beaulne): À l'article 32 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 70, Loi modifiant la Loi sur la justice administrative et d'autres dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le ministre de la Justice.

Les amendements du ministre sont déclarés recevables. Toutefois, l'amendement proposé à l'article 28 du projet de loi devrait être l'objet d'une correction de forme. En conséquence, dans cet amendement, la référence à la Loi modifiant le Code du travail devrait se lire, et je cite: «2001, chapitre 26» au lieu de «2000, chapitre 26».

Alors, y a-t-il des interventions à cette étape-ci sur le rapport et sur les amendements? M. le ministre de la Justice.

M. Paul Bégin

M. Bégin: Très, très, très bref, M. le Président. Le projet de loi n° 70 est un projet de loi portant sur la justice administrative. Fondamentalement, il s'agit d'un projet de loi qui donne suite à un jugement de la Cour d'appel qui portait sur la Loi sur la justice administrative. Cette loi a été adoptée en 1995 et, entre autres choses, avait pour effet de dire que les personnes nommées au Tribunal administratif du Québec le seraient pour une période de cinq ans, renouvelable, et qu'il y aurait la création d'un comité pour évaluer, lors du renouvellement des personnes, s'il y a lieu ou non ou s'il y avait lieu ou non de procéder à ce renouvellement.

Des personnes ont contesté cette loi et ont demandé de dire que le juge ou les membres du TAQ devraient être nommés durant bonne conduite, ce qui revient à dire, dans le jargon juridique, durant la vie de la personne, à moins qu'elle ne commette un geste qui entraînerait sa démission ou sa destitution. Donc, ça a été plaidé devant les tribunaux. La Cour d'appel a rendu une décision nous donnant un an, au mois de septembre dernier, pour corriger notre loi de manière à non pas changer la durée des mandats, mais de dire: Le comité devrait être composé différemment de ce qu'il était, c'est-à-dire qu'au lieu que ce soient le président du Tribunal et la personne chargée des emplois supérieurs qui fassent partie du comité avec quelqu'un du milieu juridique, on a demandé que ce soient des gens à l'extérieur du Tribunal et à l'extérieur de la fonction publique. Donc, nous avons fait cette modification-là.

La deuxième portait sur la rémunération. Actuellement, nous avions des gens ? et ça va continuer ? qui entraient comme membres du Tribunal administratif avec des rémunérations différentes. Là-dessus, il n'y a pas de chicane. Mais il était prévu que la rémunération serait variable d'année en année pour chaque individu à partir d'une évaluation qui serait faite par le président. La Cour d'appel a dit: Nous pensons qu'il ne devrait pas y avoir de variation dans les augmentations de rémunération, mais qu'il devrait y avoir un taux uniforme pour l'ensemble des membres, ce taux étant basé sur, par exemple, la moyenne des augmentations accordées aux cadres supérieurs de l'État. Et le projet de loi, donc, dans son ensemble, vise effectivement à donner suite à ce jugement de la Cour d'appel, et on a ajusté notre loi à cet égard.

Nous avons également profité de l'occasion pour introduire dans la loi des mécanismes qui vont permettre au Tribunal administratif d'accélérer les processus devant le Tribunal, exactement de la même manière que nous l'avons fait pour le Code de procédure civile que nous avons adopté il y a quelques minutes. Nous avons repris ce concept que, dans un délai de 180 jours, le dossier doit être prêt à être entendu par un membre du Tribunal; que, si les parties ne s'entendent pas pour arriver à ce délai, le membre du Tribunal peut intervenir et fixer un calendrier pour imposer aux parties... pour y arriver. Donc, nous avons repris la même mécanique, et il y aura similitude de fonctionnement à cet égard en vue de s'assurer que la justice soit rapide au niveau de la justice administrative comme devant les tribunaux judiciaires.

Alors, voilà, M. le Président, les principales modifications que nous avons faites en plus de donner suite à des recommandations qui nous étaient faites par le président du Conseil de la justice administrative, c'est-à-dire ce Conseil auprès de qui des plaintes peuvent être faites sur le comportement des membres du Tribunal et qu'il puisse y avoir évaluation de cette conduite et en conséquence de quoi un jugement être rendu, soit blâmant quelqu'un, un membre du Tribunal, soit lui disant qu'il est tout à fait... il a eu une conduite tout à fait correcte ou encore allant plus loin, jusqu'à une recommandation de destitution. Nous avons tenu compte de ces recommandations, et il y a eu donc des amendements à cet égard.

Voilà les trois volets principaux de ce projet de loi qui a été étudié, je pense, avec beaucoup de travail de minutie pour s'assurer que les mécanismes en place étaient bien les bons, mais je pense que nous avons travaillé en collaboration à l'élaboration de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition, la députée de Bourassa, à nous adresser la parole.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, nous en sommes rendus à la dernière étape du processus d'adoption concernant le projet de loi n° 70, à savoir Loi modifiant la Loi sur la justice administrative et d'autres dispositions législatives.

Alors, il s'agit ici d'un projet de loi qui comportait 28 articles. Je dois vous souligner que, bien qu'il n'ait contenu que 28 articles, le ministre a apporté subséquemment 28 amendements à ce projet de loi là. Évidemment, il les apportait au fur et à mesure, des fois un petit peu à la dernière minute, là, rapidement. Alors, ils étaient sur feuilles de couleur, je dois souligner par exemple, pour nous permettre de distinguer la première série d'amendements de la deuxième série d'amendements. Il y a effectivement eu beaucoup d'amendements. Je ne sais pas si... C'est difficile pour moi de savoir pourquoi un projet de 28 articles, finalement, s'est vu recevoir plus d'amendements, 35 amendements. Je ne sais pas si c'est parce que ça a été fait trop rapidement; j'ose espérer que ce n'est pas le cas. Mais je ne peux que souligner effectivement que, bien qu'il comprenait 28 articles, il a fait l'objet de 28 amendements.

n(16 h 30)n

Ce projet de loi là, M. le Président, vise à modifier les règles qui sont relatives au renouvellement du mandat des membres du Tribunal administratif du Québec ainsi que les règles relatives à leur rémunération. Évidemment, il introduit également de nouvelles dispositions pour mieux encadrer le déroulement de l'instance et diminuer les délais qui peuvent s'écouler et qui s'écoulent dans les faits entre le dépôt du recours et l'inscription pour audition. Et ça, c'est un secteur, encore là, extrêmement important. Et vous me permettrez, M. le Président, de souligner que, lors de l'étude des crédits pour les deux dernières périodes, nous avions abordé cet aspect-là plus particulièrement, les délais. Parce que, encore une fois, il convient de rappeler qu'un citoyen s'attend toujours à être entendu dans les meilleurs délais et s'attend, évidemment, également à avoir une décision rendue dans les meilleurs délais. Quand on parle d'accessibilité à la justice, on peut parler également de réduire les écueils. Certains d'entre eux sont extrêmement importants, notamment les délais.

En ce qui a trait au Tribunal administratif du Québec, je dois dire que le rapport du Vérificateur ? je crois que c'est pour le dernier exercice ? avait d'ailleurs souligné à quel point les délais étaient très grands, malgré des mesures qui avaient été prises, et qu'il importait de les réduire, et ce, dans le meilleur intérêt du justiciable, encore une fois pour que les valeurs d'égalité, de qualité, d'accessibilité soient reconnues concrètement et se traduisent dans des délais qui soient respectueux du citoyen et qui lui permettent d'avoir une décision rendue dans les meilleurs délais.

Alors, le projet de loi, permettez-moi de vous dire qu'il donne suite à l'arrêt... un jugement qui a été prononcé par la Cour d'appel, ce qui me permet de vous dire que la Cour d'appel est venue rappeler le ministre de la Justice à l'ordre et est venue lui demander, en quelque sorte, de refaire ses devoirs, parce qu'elle a reconnu, dans un jugement qui a été prononcé en septembre 2001, que certains articles de la loi, principalement les articles 48 et 49 de même que le paragraphe 1° de l'article 56 de la Loi sur la justice administrative, n'étaient pas... Elle les a invalidés, ils ont été déclarés nuls et inopérants, et la Cour d'appel a rendu cette décision-là parce qu'elle a considéré que ces articles-là n'offraient pas la garantie suffisante aux membres du Tribunal pour leur assurer l'indépendance dont ils ont besoin. Évidemment, vous comprenez bien que les membres du Tribunal administratif du Québec doivent bénéficier d'une garantie suffisante pour pouvoir avoir l'indépendance requise.

Alors, en substance, ça s'intéresse donc au renouvellement et à la rémunération des membres du Tribunal. Qu'il me soit permis de vous donner quelques informations additionnelles. Par exemple, au niveau de la rémunération, maintenant on va reconnaître... Il y avait une procédure, qui a été déclarée nulle et inopérante, qui consistait à faire une évaluation annuelle du rendement des membres du Tribunal administratif du Québec, et la Cour d'appel est venue dire que cette procédure-là ne respectait pas ou n'offrait pas... n'était pas suffisante pour offrir le degré d'indépendance requis. Alors, il y a des modifications qui ont été apportées à cet égard-là, et, à l'avenir, il s'agira non plus d'une évaluation annuelle du rendement, mais d'un pourcentage qui va être accordé.

Je pense qu'il est peut-être plus intéressant de regarder les modifications au niveau du déroulement de l'instance, parce que ça touche évidemment un processus qui intéresse directement les justiciables, et je dois mentionner ici que la loi introduit un délai de 180 jours à partir... qui va être à respecter entre le dépôt de la requête introductive d'instance et le moment de l'audition. Et j'attire votre attention sur, encore une fois, un délai. La loi précise d'ailleurs d'autres délais, et il s'est avéré que ceux-ci, dans la presque majorité des cas, ne sont pas respectés. Encore une fois, quand le délai n'est pas respecté, celui qui est pénalisé en bout de ligne, c'est le citoyen, parce que ça équivaut à lui dire... ou à le priver d'un accès à la justice. Alors, notre objectif était donc de travailler pour améliorer les délais.

M. le ministre de la Justice nous a dit qu'il s'agissait ici d'une première étape, qu'on introduisait un délai de 180 jours. On a fait une proposition pour que, subséquemment, il puisse y avoir une évaluation pour voir si cette mesure qui a été adoptée atteint la cible. Parce qu'on peut faire des réformes, l'important, quand on en fait, c'est de s'assurer que celles-ci atteignent les cibles qui sont poursuivies, de sorte que l'opposition officielle a notamment proposé comme amendement de prendre du recul, et ce recul-là devait permettre de regarder si, effectivement, la mise en place de cette mesure-là du délai de 180 jours atteignait la cible.

Évidemment, dans le cas de non-respect du délai de 180 jours, le projet de loi prévoit des dispositions qui vont permettre au président du Tribunal, au vice-président responsable de la section ou à un membre qui va être désigné par eux de tenir une conférence de gestion afin de convenir entre les parties d'une entente sur le déroulement de l'instance et de fixer un calendrier des échéances à respecter. Alors, encore là, on convoque les parties, on les assoit et on fait en sorte qu'elles puissent en arriver entre elles à convenir de respecter les délais, donc qu'elles s'astreignent à fixer un calendrier convenu entre elles, après discussion.

Le projet de loi introduit également la possibilité de tenir une conférence de règlement à l'amiable afin d'aider les parties à communiquer, à identifier leur intérêt, à évaluer leur position réciproque et, évidemment, après avoir exploré leur position et les pistes de solution, de voir si elles ne peuvent pas en arriver à une entente ou à des solutions qui soient mutuellement satisfaisantes.

Le projet de loi vise à réduire la composition du nombre des membres qui doivent instruire et décider de certains recours. Il y a des bancs qui étaient composés de deux personnes. Dans la section des affaires sociales, pour certaines matières spécifiques, ces bancs-là vont passer de deux à un. Alors, ce ne sera plus soit deux avocats ou notaires qui vont siéger, mais bien une personne. Alors, pour les secteurs visés, nous avons bien sûr posé des questions pour nous assurer que ça ne conduirait pas à une perte de droits pour les personnes évidemment qui s'intéressent à ces secteurs-là.

La Loi sur le Tribunal administratif, le projet de loi prévoit également qu'en matière de santé et de services sociaux, en matière de régime de rentes, certains recours vont être entendus, comme je viens de vous le dire, dorénavant non pas par deux membres, mais par un membre.

En ce qui a trait à la Loi sur la Régie des rentes, le projet de loi prévoit qu'en matière d'invalidité la formation va être composée de deux membres, dont l'un d'eux va être avocat ou médecin. Donc, dans les annexes, il y avait, pour différents secteurs, notamment les affaires sociales, des dispositions; certaines d'entre elles ont été revues. Dans d'autres secteurs, notamment pour la Régie des rentes, en ce qui a trait au banc, donc le nombre de personnes qui siègent, il y a également des modifications qui ont été faites.

Alors, globalement, c'est un projet de loi qui donne suite à l'arrêt, le jugement qui a été prononcé par la Cour d'appel le 5 septembre 2001. Alors, le ministre de la Justice avait un délai d'un an pour satisfaire au jugement de la Cour d'appel; donc, il devait le respecter, il n'avait pas le choix. Et, encore une fois, il s'est fait taper sur les doigts, puis la Cour d'appel l'a obligé à faire ses devoirs.

Il y a d'autres amendements qui ont été déposés. Évidemment, certains d'entre eux, M. le ministre a pu nous expliquer qu'ils étaient de nature purement technique. D'autres amendements, M. le ministre est venu nous dire qu'ils avaient pour but d'assurer une concordance avec d'autres textes de loi qui avaient pu être adoptés à l'automne 2001.

Ce qui me préoccupe pour l'instant, c'est que je viens de recevoir une communication téléphonique d'un avocat qui porte à mon attention ? et je suis heureuse que M. le ministre puisse entendre ce commentaire-là... Donc, M. le Président, j'ai reçu un téléphone alors que je m'apprêtais à faire mon intervention sur le projet de loi n° 70. Évidemment, le propos de l'avocat qui me contacte a pour objet les projets de règlement que vous avez également déposés. Je ne sais pas, je pense qu'il serait peut-être approprié d'aller en consultation pour vous assurer que ceux-ci, quand ils vont être finalement mis en forme définitive, vont pouvoir recevoir... en tout cas que, vous, vous allez être dans une position où vous aurez reçu tous les commentaires pertinents.

n(16 h 40)n

Et on a également porté à mon attention toute la section des amendements que nous avons vus hier soir, plus particulièrement ceux relatifs au Conseil de la justice administrative. Il semblerait qu'il y ait, pour l'instant, une grande insatisfaction, et c'est dommage que nous n'en ayons pas été informés au préalable à l'égard de 15.0.1.

Vous savez, l'article 167 de la loi prévoyait, au niveau de la commission... au niveau de la composition, qu'il y avait des représentants, et des modifications ont été apportées. Selon les explications que vous nous en avez données ? la composition du Conseil de la justice administrative ? les modifications visaient à permettre la représentation de tous les organismes dont les membres sont assujettis à son autorité en matière déontologique. Donc, on retrouvait la Commission des lésions professionnelles; vous ajoutiez la Commission des relations de travail et la Régie du logement. Sauf qu'il est précisé «le président de la Commission des lésions professionnelles, le président de la Commission des relations du travail et le président de la Régie du logement». Effectivement, vous nous avez dit que ça maintenait la proportion de la représentation majoritaire du public au sein du Conseil, en proposant cependant que les quatre postes actuellement occupés par des représentants, donc des commissaires du TAQ, le soient à l'avenir par des présidents. Alors, on m'informe, et c'est malheureux encore une fois... Les postes étaient antérieurement occupés par des représentants, donc par des commissaires. À l'avenir, suivant la modification qui a été apportée et adoptée, à l'avenir, ça va être des présidents. Et on m'informe qu'il y aurait de grandes insatisfactions à ces égards et également pour les articles suivants, à savoir 15.0.2, 15.0.3, 15.0.4, 15.0.5, 15.0.6, de même que 15.0.7. Alors, on vient de m'en informer. Alors, je tenais à vous le dire.

Alors, encore une fois, M. le Président, pour clore... pour tenir compte du délai dont je dispose, nous avons, je pense... On avait eu accès à moins de mémoires pour ce projet de loi ci, et ça peut se comprendre parce qu'il s'agissait d'un jugement de la Cour d'appel: Le ministre devait refaire ses devoirs, il devait se conformer. Évidemment, ça porte, comme je le disais, sur les aspects touchés dans le jugement, le renouvellement et la rémunération, et également à d'autres sujets, dont le déroulement de l'instance et la diminution des délais. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Et je remarque que vous êtes une députée très occupée. Ha, ha, ha! Alors, M. le ministre de la Justice.

M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. J'aimerais peut-être répondre un peu à ce que la députée de Bourassa vient de mentionner: le fait que les règlements pourraient être publiés. Nous avons mentionné hier que nous déposions les projets de règlement afin d'entendre les personnes qui auraient des représentations à faire, puisque, compte tenu de l'obligation légale d'adopter le règlement avant le mois de septembre et que, deuxièmement, les délais de publication nous empêcheraient de le faire, nous les rendions publics afin qu'on fasse des représentations. Je pense que l'avocat qui a des représentations à faire sur ces règlements devrait se prévaloir de cet avantage et nous faire connaître ce qu'il croit être nécessaire de faire, et nous en tiendrons compte, selon les besoins.

Deuxièmement, en ce qui concerne l'amendement qui aurait créé une insatisfaction auprès de certaines personnes, je rappelle simplement que la composition du Conseil de la justice administrative a été établie il y a cinq ans. Le président de la commission m'a fait état de difficultés de fonctionnement, de désirs, et il s'est fait le porte-parole de l'ensemble du Conseil et des représentations. J'ai jugé que c'était effectivement des représentations adéquates, et nous en avons tenu compte. Il peut arriver que des personnes auraient préféré une option qui était le maintien de ce qui existait. Je peux comprendre cela, mais je crois que nous devons, quand nous croyons que les représentations qu'on nous fait de la part d'un représentant qui est le président du Conseil de la justice administrative sur le bon fonctionnement, l'équilibre à maintenir dans un organisme comme celui-là... que nous devons en tenir compte, à moins que nous ayons des objections fondamentales, ce qui n'était pas le cas.

Alors, soit; qu'il y ait des gens qui ne soient pas satisfaits. Mais je crois que le président a fait des recommandations qu'il croyait les meilleures, et nous les avons endossées. Et je referais la même chose, M. le Président, dans d'autres circonstances.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre de la Justice. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur la prise en considération du rapport?

Mise aux voix des amendements du ministre

Les amendements proposés par M. le ministre de la Justice sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 70, Loi modifiant la Loi sur la justice administrative et d'autres dispositions législatives, est-il adopté tel qu'amendé?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Oui. M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 9 du feuilleton.

Projet de loi n° 85

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 9, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique relativement à certains centres d'aide juridique. M. le ministre de la Justice, je vous écoute.

M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Il s'agit d'un projet de loi d'une envergure beaucoup moindre que ceux que nous avons étudiés précédemment, mais qui a son importance. Il tient compte de l'histoire. Avant que n'existe la Loi sur l'aide juridique, au début des années soixante-dix, il s'était créé deux centres locaux ? c'est le mot «local» qui est important ? d'aide juridique. Quand, en 1973, la loi a été créée, on a créé des centres régionaux de services. Jusqu'à tout à fait récemment, il y avait deux règlements qui régissaient les centres régionaux et locaux de services. Ces deux règlements visaient à établir la rémunération, d'une part, des avocats des centres régionaux et, d'autre part, celle des employés de soutien de ces centres régionaux.

Cependant, dans les deux centres locaux qui existent au Québec ? il y en a seulement deux ? il était d'usage que les rémunérations des avocats et des employés ne suivaient pas la rémunération de ces mêmes personnes dans les centres régionaux. Par exemple, les avocats pouvaient gagner moins cher, et le personnel de soutien plus cher. C'était une façon de partager les revenus qui étaient alloués au centre local pour son fonctionnement, et ça ne posait pas de problème.

Cependant, au cours de l'année 2000-2001, un différend s'est soulevé entre la Commission des services juridiques, chargée de l'application de la loi et sur l'interprétation à lui donner... de sorte que nous nous dirigions vers un affrontement qui n'était, à mon point de vue, pas nécessaire, et j'ai nommé une personne pour agir comme médiateur pour régler le problème. Ceci n'a pas été suffisant, cependant, pour le régler. Il fallait donc faire un choix, ou bien nous continuions à dire ce qui avait existé, c'est-à-dire une différence entre les centres locaux et les centres régionaux, ou nous demandions aux centres locaux de se conformer aux centres régionaux.

Alors, j'ai fait le choix de respecter ce qui avait été fait depuis 30 ans sans vouloir porter de jugement sur le fond, mais de dire que, si des gens désiraient, compte tenu que c'était leur coutume, partager de manière différente l'argent dont ils disposaient pour la rémunération de leurs membres, il n'y avait rien là de catastrophique dans la mesure où l'enveloppe globale n'était pas dépassée.

Alors, ce projet de loi vise à faire en sorte que les centres locaux ? qui sont Petite Bourgogne, dans le centre de Montréal ? puissent continuer à fonctionner comme ils l'avaient toujours fait ? de même que l'autre centre qui est situé à Hull ? et qu'ils bénéficient également de ce projet de loi. Alors, essentiellement, il s'agit de mettre dans la loi ce qui a été finalement convenu et réglé et qui fait en sorte que les parties vont s'entendre et pouvoir fonctionner dans l'harmonie. Voici, M. le Président, le sens de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 85, et je cède la parole à la responsable de l'opposition officielle en matière de justice. Mme la députée de Bourassa, la parole est à vous.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors, nous en sommes rendus à l'adoption de la loi... projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique...

Une voix: ...

Mme Lamquin-Éthier: Ah, l'adoption du principe! Vous savez... Vous voyez, hein? Je vous remercie de me le souligner. D'ailleurs, j'ai un aide-mémoire, je pense que j'aurais dû le regarder. Parce qu'on a abordé tellement de projets de loi ce matin, on est passé de 84, l'union civile, à 54, réforme du Code de procédure civile, on vient de terminer le projet de loi n° 70 sur la justice administrative et là, effectivement, on aborde l'adoption du principe du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique relativement à certains centres d'aide juridique. Et là vous me permettrez de bien regarder ma feuille pour ne pas faire d'autres erreurs.

n(16 h 50)n

Le projet de loi, M. le Président, comme vous le savez... Parce que notre collègue la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne a travaillé bien fort dans ce dossier-là, et elle est avec nous, aujourd'hui, par la pensée. Malheureusement, elle ne pouvait pas être, pour des raisons personnelles, présente physiquement en Chambre, mais elle est tout à fait heureuse de l'aboutissement en ce qui a trait à ce projet de loi là.

Alors, M. le Président, après cet aparté, permettez-moi de vous dire que ça vise à modifier la Loi sur l'aide juridique afin que les pouvoirs de la Commission des services juridiques de déterminer les normes et les barèmes de rémunération se limitent uniquement aux centres régionaux d'aide juridique et ne touchent donc pas aux centres locaux d'aide juridique. Alors... Et vous savez que, parmi les centres existants, il y a deux centres locaux et 11 centres régionaux. En ce qui a trait aux centres locaux, il y a les Services communautaires de Pointe Saint-Charles et Petite Bourgogne inc. et la Clinique juridique populaire de Hull. Alors, ces deux centres-là sont des centres locaux, et la loi vient justement les soustraire des articles faisant en sorte que la Commission détermine les normes et les barèmes de rémunération.

Je vous explique un petit peu le contexte. Depuis un bon moment, le centre des Services communautaires de Pointe Saint-Charles et Petite Bourgogne voyait son action communautaire menacée en raison d'importantes divergences d'interprétation, de la part de la Commission des services juridiques, quant à l'assujettissement du centre aux dispositions de la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic ainsi qu'à l'assujettissement du centre aux dispositions prévues à l'article 80.1 de la Loi sur l'aide juridique. Alors, le projet de loi vise à régler définitivement ce conflit-là qui persistait entre la Commission des services juridiques et les deux centres locaux d'aide juridique, et c'est l'article 1 du projet de loi qui vient donc exclure les deux centres locaux d'aide juridique de l'application des normes et des barèmes de rémunération, qui sont édictés par un règlement qui a été adopté en vertu de l'article 80.1 de la Loi sur les services juridiques.

Alors, évidemment, il va de soi que l'opposition officielle est en faveur du projet de loi, parce qu'il vient justement régler de façon définitive le conflit qui persistait entre la Commission et les centres locaux. Et, grâce à ce projet de loi là, l'action communautaire des deux centres locaux ne sera plus menacée à l'avenir. Donc, les Services juridiques communautaires de Pointe Saint-Charles et Petite Bourgogne inc. ainsi que la Clinique juridique populaire de Hull ont toujours prôné leur autonomie et ont toujours prôné leur indépendance; c'est donc ce que le projet de loi vient faire, il vient reconnaître l'autonomie et l'indépendance de ces deux centres locaux là. Et vous comprendrez que, après vérification auprès des deux centres locaux, ils se sont dits l'un et l'autre satisfaits des modifications législatives contenues dans le projet de loi n° 85.

L'opposition officielle va donc voter en faveur du projet de loi. Et, encore une fois, je pense qu'il convient de souligner toutes les actions, les interventions que notre collègue la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne a faites dans ce dossier-là. Et je pense qu'elle peut être très heureuse du résultat obtenu.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Bourassa, de votre intervention. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique relativement à certains centres d'aide juridique, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission des institutions

Mme Vermette: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des institutions et pour que le ministre de la Justice en soit membre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je fais motion pour que nous suspendions nos travaux jusqu'à 20 heures, ce soir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vous demandez à la présidence de suspendre les travaux, et je vais acquiescer à votre demande, et je vais suspendre les travaux jusqu'à 20 heures, ce soir. Bon appétit à vous tous!

(Suspension de la séance à 16 h 55)

 

(Reprise à 20 h 9)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, mesdames, messieurs, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît!

Alors, nous allons poursuivre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais Mme la leader adjointe du gouvernement de nous indiquer l'affaire à l'ordre du jour, s'il vous plaît.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais de vous référer à l'article 44 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 95

Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 44, Mme la ministre de la Famille et de l'Enfance propose l'adoption du projet de loi n° 95, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance et la Loi sur le ministère de la Famille et de l'Enfance. Mme la ministre, vous êtes la première intervenante. Je vous cède la parole.

Des voix: Bravo!

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, merci, M. le Président. Comme vous pouvez le constater, c'est un projet de loi qui interpelle l'ensemble des parlementaires, puisque nous parlons de nos centres de la petite enfance, M. le Président. Alors, j'aimerais, à l'occasion de la troisième lecture du projet de loi n° 95, rappeler, M. le Président, les principaux objectifs que nous nous étions donnés avant de débuter la commission parlementaire.

n(20 h 10)n

D'abord, comme le propose notre projet de loi, nous avons resserré à cet effet les critères, qui existaient déjà, de notre gouvernement en ce qui a trait particulièrement à la vérification des antécédents judiciaires et également à la sécurité dans les aires de jeu. Nous voulons également apporter quelques allégements quant aux obligations de services de garde en regard d'abord de la diversification, la tenue également d'une garderie par une commission scolaire et enfin la remise d'un rapport financier.

Également, on y retrouve des mesures correctives et quelques mesures transitoires. Parce que, comme j'ai eu l'occasion de le mentionner, cette loi, elle aura cinq ans à la fin de juin, et, depuis les expériences que nous avons connues, nous avons été à même de constater avec ceux et celles qui ont bâti ce réseau, c'est-à-dire celles et ceux qui travaillent dans nos services de garde, également les parents qui siègent sur les conseils d'administration, les trois partenaires de ce réseau ? milieu familial et garderies privées également ? il y a eu, tout au long de ces cinq années, des ajustements qui sont nécessaires.

Il y avait deux questions importantes d'abord, lorsque nous avons eu également nos deux journées de travail intensif et fructueux, lors de l'étude détaillée du projet de loi en commission parlementaire qui nous a permis d'entendre également les représentants et les représentantes de différents organismes, particulièrement la Fédération des centres de la petite enfance du Québec, qui se sont fait entendre et qui ont déposé un mémoire, la Concertation interrégionale des centres de la petite enfance du Québec, l'Association des garderies privées du Québec et également la Confédération des syndicats nationaux, la CSN, qui ont également fait part de leurs commentaires.

Le projet de loi aborde d'abord une préoccupation qui est extrêmement majeure en parlant de la sécurité de nos enfants; cette préoccupation porte particulièrement sur les antécédents judiciaires et sur les aires extérieures de jeu. Lors de la commission parlementaire, je voudrais rappeler que les participants et participantes ont particulièrement débattu le sujet de la vérification des antécédents judiciaires et de la levée du moratoire.

Concernant les antécédents judiciaires, cette dernière question a fait l'objet, il faut le rappeler, de plusieurs échanges lors de l'étude détaillée, notamment en raison des inquiétudes manifestées par quelques intervenants. Il y a eu toutefois un consensus clair, M. le Président: Tous les parlementaires reconnaissent en effet la nécessité d'assurer la sécurité totale et entière des enfants. Nous devons faire en sorte qu'aucun enfant ? et je dis bien «aucun» ? ne soit atteint dans son intégrité physique et morale.

Comme je l'ai souligné lors de la présentation du projet de loi, le gouvernement s'était donné jusqu'à maintenant les moyens légaux lui permettant de vérifier les condamnations de tout demandeur ou de titulaire de permis de services de garde. Mais, il faut en convenir, à la lumière des événements malheureux dont nous avons été saisis au cours des dernières années, il est de notre devoir, M. le Président, de faire en sorte de pouvoir assurer que, dans tous nos services de garde, nous ayons des mesures nous permettant de nous assurer de la plus grande sécurité pour nos enfants.

Alors, ce qui a été discuté au cours des cinq dernières années... nous avons discuté également avec les corps policiers qui, dans des situations où des clientèles vulnérables sont appelées à travailler avec des personnes adultes, ont développé au cours des années, selon la jurisprudence également ? c'est sur le sujet ? des méthodes rigoureuses pouvant nous assurer que les vérifications sont faites de façon respectueuse de nos chartes, tout en respectant le droit des individus et tout en assurant, bien sûr, l'entière sécurité pour les enfants.

Donc, le processus que nous avons mis de l'avant est un processus qui est bien encadré, qui se veut un juste équilibre entre, bien sûr, les droits de nos jeunes enfants et le droit également aux adultes en vertu de nos chartes. Donc, la démarche que nous avons instaurée, rappelons-le, sera rigoureuse; elle sera soutenue par les différents corps de police, avec l'autorisation de la personne concernée.

Advenant qu'il se révèle un empêchement, la personne en cause pourra toujours décider de poursuivre ou non sa démarche, soit pour obtenir une accréditation ou encore pour siéger sur un conseil d'administration. Si cette personne continue sa démarche, elle pourra faire valoir son point de vue auprès de la ministre, qui sera appuyée d'un comité pour la conseiller.

Nous avons, dès le mois de mars, mis en place un comité d'éthique sur lequel siègent cinq personnes qui sont préoccupées par toutes ces questions éthiques pour nous assurer, advenant un cas litigieux, de faire encore une fois une analyse précieuse des informations que nous avons pour en arriver à prendre une décision qui soit totalement éclairée.

À ce sujet, je voudrais rappeler que le député de Verdun, lors du débat sur la prise en considération du rapport, me faisait part de ses inquiétudes de la Commission d'accès à l'information concernant la protection de la vie privée et sur la protection des renseignements personnels. Eh bien, je suis maintenant en mesure de rassurer tous les parlementaires et également le député de Verdun, puisque nous avons fait des échanges téléphoniques entre les juristes du ministère de la Famille et de l'Enfance et ceux de la Commission des droits de la personne, et il y a eu entente, M. le Président, pour que le règlement qui sera adopté à la suite de la sanction du projet de loi n° 95 fasse l'objet de travail commun, c'est-à-dire entre les juristes du ministère de la Famille et de l'Enfance et les juristes de la Commission des droits de la personne pour que l'on puisse faire en sorte que les préoccupations sur le respect de la vie privée soient tenues en compte lors de la rédaction du règlement que nous devrons adopter d'ici peu.

Également, M. le Président, il y a eu deux amendements qui ont été apportés afin de répondre aux inquiétudes légitimes qui se sont manifestées en commission parlementaire, lors de l'étude détaillée. Nous avons apporté deux amendements au projet de loi. D'abord, un amendement concernant le comité d'éthique, bien qu'il ne soit pas coutume que nous instaurions la création de ce comité dans un texte de loi, mais, comme nous avions déjà instauré cette pratique de ce comité d'éthique depuis 2001, nous avons convenu, pour être capables de nous assurer que, ainsi, on rassurait l'ensemble des parlementaires sur la question, que la création de ce comité soit dans le texte de loi.

Ce comité est composé de personnes qui ont une expertise, une expérience et un intérêt marqué pour la protection des enfants et aura encore une fois pour mandat de conseiller la ministre dans l'appréciation des cas d'antécédents judiciaires ou de comportements qui lui sont soumis. L'expérience antérieure que nous avons vécue depuis l'instauration de ce mécanisme nous a démontré que ces cas étaient extrêmement minimes, et nous sommes confiants que la situation demeurera la même dans les années à venir.

Également, nous avons apporté une autre modification concernant, cette fois-ci, celle qui circonscrit davantage les comportements de cas de conduite d'un véhicule à moteur en référant non plus à la conduite fautive, mais à la conduite criminelle. Ainsi, le comportement de certaines personnes dans la conduite d'un véhicule automobile est parfois non compatible avec les qualités requises pour l'exploitation d'un service de garde. Nous pensons ici, M. le Président, à la conduite dangereuse et au délit de fuite laissant des personnes blessées.

Dans ces circonstances, le terme «conduite criminelle» vient circonscrire les comportements en matière de conduite automobile. Là aussi, assurer la vie et la sécurité des enfants est notre priorité. Donc, ces deux amendements répondent de manière satisfaisante aux préoccupations soulevées lors de l'étude détaillée de ce projet de loi. D'ailleurs, nous pouvons le souligner, c'est à l'unanimité que ces modifications ont été apportées, lors de la commission. La sécurité physique et morale des enfants nécessite que toutes les mesures appropriées soient prises, et c'est dans cet esprit que nous avons travaillé lors de cette commission.

Également, M. le Président, il nous est apparu nécessaire de réglementer de façon encore plus, je dirais, contraignante en ce qui a trait aux aires extérieures de jeu. Quelques événements malheureux... il faut en convenir, il s'agit de quelques événements, mais c'est toujours des événements qui sont de trop lorsqu'un enfant se blesse de façon importante. Alors, ce qui nous a été demandé, c'était de nous assurer que la sécurité des enfants, qui est confiée aux services de garde... que ce projet de loi contienne des dispositions visant dorénavant à exiger d'un titulaire de permis un certificat établissant qu'il se conforme aux normes en ce qui a trait aux aires extérieures de jeu et accorder au gouvernement un pouvoir pour déterminer les normes visées par le certificat, si elles étaient nécessaires.

Donc, le présent projet de loi prévoit que, dans le cas d'un espace extérieur de jeu ou d'une aire extérieure de jeu présentant une menace pour la sécurité des enfants, nous puissions adopter des mesures permettant à la ministre, en l'occurrence, d'agir rapidement face aux titulaires de permis. Ainsi qu'il en est de la vérification des antécédents judiciaires, notre gouvernement ne néglige absolument rien pour assurer aux parents la protection pour leurs tout-petits.

n(20 h 20)n

Après la sanction du présent projet de loi, le Règlement sur les centres de la petite enfance et le Règlement sur les garderies seront modifiés également pour que la norme CSA, qui est une norme internationale, soit appliquée de façon uniforme dans toutes les aires extérieures de jeu des services de garde. Lors de l'étude détaillée du projet de loi, les échanges nous ont permis de constater un consensus de l'ensemble des intervenants, quant à ces dispositions concernant les aires de jeu.

Maintenant, M. le Président, j'aimerais revenir sur la levée du moratoire qui est prévue dans la Loi sur le ministère de la Famille et de l'Enfance qui a été adoptée en 1997. C'est donc le 12 juin 2002 que ce moratoire prendra fin, selon le texte de loi. Nous n'avons prévu aucune disposition dans ce projet de loi visant à le prolonger.

Il faut rappeler en premier lieu que ce moratoire allait se terminer cinq ans après que nous ayons atteint les objectifs que nous nous étions fixés. Il faut se rappeler que nous nous étions dit qu'en 2005-2006 nous aurions complété le réseau des services de garde à la petite enfance. Je rappellerais, M. le Président, que nous sommes passés en 1994, avec un budget de près de 98 millions qui était disponible pour à peu près 25 000 places pour l'ensemble du Québec... Lorsque nous avons instauré cette politique familiale, nous avons jusqu'à maintenant développé 147 000 places en plus à contribution réduite à 5 $.

Et il faut se rappeler aussi que c'est un service de garde, un service éducatif qui est basé sur les jeux, qui est basé sur le développement de l'enfant, pour l'accompagner pour lui aider à développer l'estime de soi, le sens des responsabilités, être capable aussi, M. le Président, de détecter lorsqu'un enfant peut avoir une problématique, que ce soit au niveau du langage, que ce soit d'autres niveaux, qu'on puisse le détecter le plus rapidement possible et adapter une intervention qui soit appropriée pour accompagner l'enfant et lui permettre, bien sûr, d'acquérir tous les outils nécessaires pour que, lorsqu'il entrera à l'école, il ait lui aussi le même bagage que l'ensemble des enfants. Alors, dans ce contexte-là, nous avions indiqué que notre priorité était de faire en sorte que nous ayons plus de 100 000 places de développées dans les centres de la petite enfance.

Avec le budget de Mme Marois, lors de son dernier énoncé budgétaire, dans le budget AGIR, nous avons eu un montant de 50 millions de dollars supplémentaires qui ont été injectés au ministère de la Famille et de l'Enfance pour devancer la réalisation des places en installation. Alors, nous avons actuellement autorisé ces places, faisant en sorte que, en 2003-2004, nous allons avoir complété les 100 000 places en installation qui étaient prévues au moment où nous avons adopté ce projet de loi. Alors, nous avons jusqu'à maintenant...

Et, quand je dis «nous», M. le Président, je voudrais être capable d'inclure dans ce «nous», bien sûr, toute l'équipe gouvernementale qui a porté ce projet de loi et qui a fait en sorte qu'il puisse se réaliser, mais c'est grâce à une volonté qui a été exprimée par l'ensemble du Québec, considérant toute cette réalité de la conciliation famille-travail, considérant qu'aujourd'hui 70 % des femmes se retrouvent sur le marché du travail, considérant que ceux et celles qui ont le désir d'enfants doivent être soutenus et accompagnés pour que, au moment où ils se réalisent pleinement au niveau professionnel, ils puissent avoir un lieu où, en toute sécurité, leurs enfants sont confiés et un lieu dans lequel on sait toute l'importance d'avoir une mission éducative pour les accompagner.

Donc, ce que nous avons mis de l'avant dans le cadre de cette politique, M. le Président, c'est un élément de fierté pour l'ensemble du Québec. Qu'une société comme la nôtre qui fait partie du concert des nations dans plusieurs domaines, qui ait choisi, au même moment où il fallait faire l'équilibre des finances publiques, réinvestir une somme qui, aujourd'hui... le budget du ministère de la Famille et de l'Enfance est à près de 1,4 milliard, M. le Président, c'est parce que la volonté de ce gouvernement, conjuguée avec les efforts des femmes et des hommes, et particulièrement les femmes qui ont porté ce réseau, ont fait en sorte que le Québec s'est mobilisé, dans chacune des régions du Québec, où les collègues députés qui soutiennent et accompagnent leur milieu pour réaliser des projets de chantier d'économie sociale... Il faut le rappeler, nous avons créé des emplois de qualité, plus de 15 000 emplois, M. le Président, qui ont été créés, qui ont permis à des jeunes qui ont suivi des formations dans nos maisons d'établissement, de pouvoir retourner dans leur région, de pouvoir y gagner leur vie et d'être capables de se réaliser dans un métier qui les passionne, qui est celui de travailler au quotidien avec de jeunes enfants.

Alors, non seulement c'est un élément de fierté, cette politique familiale, mais, en plus, en toute humilité, je vous dirais que plusieurs personnes de l'étranger viennent chez nous pour constater comment cette mobilisation de société s'est faite pour être capables de réaliser des services de garde de cette qualité, de permettre aussi que ce soient les parents qui siègent au sein des conseils d'administration, qui sont les premiers qui définissent à la fois quel sera le programme qui sera offert à leurs enfants et faire en sorte que nous ayons, à peine sur une période de quatre ans, réussi collectivement à développer 147... et, à la fin du mois de juin, me dit-on, c'est 148 580 places que nous aurons de réalisées. C'est un objectif qui était ambitieux, c'est un objectif... qu'il fallait que nous soyons capables de le supporter financièrement.

Ce choix a été fait, et, dans ce contexte-là, la présente loi fait en sorte qu'avec la levée du moratoire... comme nous avons acquis et atteint notre objectif de 100 000 places en installation, bien, je vais vous dire, M. le Président, nous sommes non seulement heureux et heureuses de voir que nous sommes rendus à ce point, mais nous mettons toutes nos énergies... Et le 50 millions supplémentaire nous a permis aussi d'accélérer, faisant en sorte que, notre objectif de 200 000 places en 2005-2006, nous allons l'atteindre et nous en sommes convaincus.

Alors, la loi, telle qu'elle est actuellement et telle qu'elle demeure, il faut le rappeler aussi, permettra de continuer à autoriser des places à contribution réduite, jusqu'à temps que nous aurons atteint notre objectif de 200 000 places. Et comme nous avons fait en sorte que, sur l'ensemble du territoire, notre réseau est autorisé presque à 97 %, nous ne trouvions pas justifié de pouvoir prolonger ce moratoire, parce qu'il pourra être possible ? dans la mesure, bien sûr, où on respecte la loi qui existe actuellement et celle qui sera adoptée par cette Assemblée nationale, avec les modifications, que l'on respecte intégralement aussi la réglementation ? il sera possible bien sûr, dans le cadre d'une relation contractuelle, d'utiliser des services de garde privés, mais ils ne seront pas à contribution réduite. Les parents pourront bien sûr utiliser les déductions fiscales qui sont en place. Pour les parents qui aujourd'hui n'ont pas encore de place, c'est la même formule, M. le Président. Alors, il y a aussi d'autres éléments de modification que nous avons apportés à la loi. Nous en avons profité pour corriger certaines, je dirais, difficultés qui étaient occasionnées par l'obligation, dans la loi, de se diversifier. Il faut se rappeler que, quand on a mis la loi en vigueur, nous avons soutenu le réseau qui était en place, les invitant à se diversifier pour offrir des services qui correspondaient à la mission éducative que nous nous sommes donnée.

Cependant, il faut en convenir que, dans l'ensemble des régions du Québec, la réalité n'est pas la même d'une région à l'autre. Vous avez sur certains territoires... Et je prends par exemple comme ma région, la région Chaudière-Appalaches, où bien sûr il y a des territoires, des distances qui sont plus grandes entre certaines résidences, et il y a aussi d'autres régions où la concentration de la population fait en sorte qu'il est très difficile d'offrir un nouveau centre de la petite enfance. Alors, à ce moment-là, c'est très difficile de pouvoir obliger des gens à se diversifier, puisque la réalité fait en sorte qu'il leur est extrêmement difficile...

Je vous donne un autre exemple aussi. Si c'est dans un endroit, par exemple en milieu de travail, où a on a mis à la disposition d'un centre de la petite enfance tous les espaces nécessaires pour offrir des services de garde au personnel qui travaille dans cette entreprise, il est évident qu'il n'est pas toujours possible de se diversifier à ce moment-là, c'est-à-dire d'offrir des services de garde en milieu familial en réseau CPE.

Alors, dans des cas exceptionnels, nous allons avoir la possibilité... et c'est la ministre qui aura la possibilité de le faire, bien sûr, en s'assurant qu'il est impossible pour ce centre de la petite enfance de se diversifier... Alors, le projet de loi, tel qu'il a été accepté par tous les membres de la commission, viendra nous permettre cette souplesse.

M. le Président, je voudrais également, en terminant, en profiter pour rendre un hommage particulier, pour souligner le magnifique travail indispensable des femmes et des hommes qui assurent quotidiennement la qualité de nos services de garde. Au nom de tous mes collègues, au nom de notre premier ministre, je tiens à les remercier sincèrement de mettre au service des enfants et de leurs parents leurs compétences et leur expertise à tous les jours.

n(20 h 30)n

Et pour vous-même, M. le Président, et tous les membres de cette Assemblée, lorsque nous visitons des centres de la petite enfance, nous sommes à même de constater la joie qui habite ces enfants, le personnel qui donne le meilleur d'elles-mêmes pour justement nous assurer que nos enfants se développent de façon harmonieuse et finalement ils leur permettent de se réaliser pleinement. C'est l'enthousiasme, le bonheur qu'on y retrouve.

Et quand on inaugure également des centres de la petite enfance, on est à même de constater que tous les partenaires qui ont soutenu ces projets... parfois, ça commence par un organisme communautaire avec un groupe de parents qui ont voulu porter ce projet, une ville ou une municipalité qui a cédé un terrain, ça peut être parfois une bonification par un CLD, ça peut être une institution financière qui décide également de soutenir... et ça devient vraiment un projet collectif, un projet dans lequel les femmes et les hommes se retrouvent, sont fiers, et dans lequel les générations à venir pourront également s'y retrouver.

Alors, je tiens sincèrement à remercier tout le personnel, tous ceux et celles qui ont pu réaliser ces projets jusqu'à maintenant. Vous savez, 147 580 places exactement, c'est la volonté de tout un milieu qui effectivement, je dirais, s'est mis à l'ouvrage et a réussi ainsi à développer des réseaux de qualité.

Et, en terminant, M. le Président, considérant que les enfants constituent notre richesse, une richesse la plus précieuse de notre société, il nous faut aller plus loin également dans notre politique familiale, M. le Président. Et quand je vous dis: Il nous faut aller plus loin, il nous faut également soutenir davantage la famille. Et vous savez, M. le Président, que l'on ne peut passer sous silence l'appui unanime des trois partis politiques en cette Chambre. C'est assez rare, il faut en convenir, qu'unanimement trois partis politiques se mettent d'accord pour voter un projet de loi et pour dire: Oui, nous voulons permettre à ceux et celles qui ont le désir d'enfants au Québec, dans des réalités qui peuvent être différentes, leur offrir un congé pour leur permettre, surtout pendant la première année de vie, d'être avec leurs enfants. C'est ce que l'on appelle le congé d'assurance parentale. M. le Président, comment peut-on penser un seul instant qu'il soit crédible, lorsque, au sein de notre Chambre, trois partis politiques, unanimement, que l'ensemble de la société qui a soutenu le projet de loi des congés d'assurance parentale, que nous n'ayons absolument aucune écoute et entente du gouvernement central? Je vous rappellerais que la caisse d'assurance emploi, qui a des surplus de l'ordre de plus 40 milliards de dollars au cours des cinq dernières années ? uniquement pour cette année, c'est plus de 4,5 milliards d'argent accumulé dans la caisse de l'assurance emploi ? ce sont des contributions qui appartiennent aux femmes et aux hommes du Québec, aux entreprises du Québec. Et ce que l'on veut faire... Et c'est l'ensemble des parlementaires de cette Chambre qui ont dit: Oui, nous voulons récupérer nos cotisations pour être capables de mettre de l'avant notre propre régime.

M. le Président, nous avons tout tenté à l'amiable, par des rencontres, mes collègues qui m'ont précédée, que ce soit Mme Léger ou Mme Marois, on a demandé tout simplement de nous asseoir pour être capables de convenir des modalités pour que nous puissions récupérer les cotisations des travailleurs et des travailleuses du Québec pour être capables de mettre de l'avant notre propre régime. Et pourquoi on veut mettre de l'avant notre propre régime? Parce que, au Québec, actuellement il y a des femmes et des hommes qui n'ont droit à aucun congé, parce que, quand tu es un travailleur ou une travailleuse autonome, l'assurance emploi ne te permet pas d'avoir ce congé. Lorsque tu es à temps partiel et que tu n'a pas cumulé les heures de travail suffisantes non plus, le régime d'assurance emploi ne le permet pas. Vous savez, M. le Président, qu'actuellement il y a des femmes également dans d'autres provinces qui se retrouvent devant les tribunaux parce qu'elles n'ont pas cumulé le total d'heures suffisant au niveau de leur emploi pour avoir droit à l'assurance emploi.

M. le Président, avoir un enfant, ce n'est pas être en chômage, c'est vouloir réaliser un projet extraordinaire de fonder une famille, et il est tout à fait normal que nous puissions mettre de l'avant un congé d'assurance parentale pour être capables de répondre à leurs besoins. Et je peux vous assurer, et notre premier ministre l'a mentionné, qu'avec le déséquilibre fiscal qui est sur la table actuellement ? 50 millions d'argent par semaine que nous perdons, M. le Président ? il est évident que c'est notre argent, que nous voulons le récupérer, que nous allons tout faire pour le faire.

M. le Président, lorsque les Québécois et Québécoises se seront choisis, c'est-à-dire... récupérer les sommes d'argent qui leur appartiennent, nous allons faire plus pour la famille, pour la santé, l'éducation. Mais il sera important que les Québécois et Québécoises se choisissent pour que nous soyons respectés dans nos choix et dans nos valeurs, et nous pourrons mettre en place non seulement notre congé d'assurance parentale, mais également d'autres mesures pour mieux soutenir la famille. Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de la Famille et de l'Enfance. Je vais maintenant céder la parole au prochain intervenant, M. le député de Verdun. Je vous cède la parole, M. le député.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Je me limiterai à intervenir sur ce projet de loi... les débats qui touchent la protection des travailleurs autonomes, tel qu'abordé par la ministre. Ce sont des débats intéressants que nous avons souhaité engager dès le début de la dernière Législature et qui, malheureusement, n'ont donné lieu à aucun projet de loi, strictement des voeux pieux de la part de la ministre en ce qui touche les travailleurs autonomes. Alors, qu'elle ne vienne pas nous raconter des blablas au sujet de la protection soi-disant des travailleurs autonomes, vous n'avez rien fait depuis quatre ans à ce niveau-là. Absence complète.

Des voix: ...

Mme Vermette: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une minute, s'il vous plaît. Mme la leader adjointe.

Mme Vermette: Je pense qu'on devrait s'adresser directement à la présidence mais non pas directement à la ministre. Alors, je demanderais qu'on...

M. Gautrin:...et je rappellerai que la ministre n'a pas parlé de son projet de loi, en fin de mandat, mais à commencé à parler d'une chose qu'elle aurait souhaité faire, qui malheureusement n'a pas été faite et qu'elle aurait pu faire si réellement elle avait eu à coeur la situation des travailleurs autonomes. Absence complète d'idées en ce qui tient lieu des travailleurs autonomes.

Mais revenons donc au projet de loi, M. le Président. Il me semble pertinent d'en discuter et de pouvoir débattre ce qui touche ce projet de loi. Nous, nous sommes profondément d'accord avec la nécessité de protéger les enfants dans les centres de la petite enfance, et je ne crois pas qu'il y a personne dans cette Chambre qui remettra cette question en doute, où de part et d'autre nous pensons que les enfants qui siègent dans les centres de la petite enfance puissent avoir la meilleure protection possible.

Mais faut-il, faut-il accorder cette protection au mépris des lois qui nous régissent? Faut-il, M. le Président, faire fi de l'avis du Barreau du Québec? Faut-il faire fi de l'avis de la Commission des droits de la jeunesse et des droits de l'enfance? Faut-il faire fi de l'avis de la Commission d'accès à l'information pour protéger actuellement les enfants dans les centres de la petite enfance? Ce que la ministre fait à l'heure actuelle, parce qu'elle s'est refusée à comprendre le bon sens, parce qu'elle s'est refusée réellement à écouter le Barreau du Québec, la Commission d'accès à l'information, la Commission des droits de l'homme, parce qu'elle s'est refusée à écouter les avis éminemment valables de mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce, parce qu'il a débattu la question article par article.... crée aujourd'hui, dans le projet de loi, M. le Président, des questions qui posent, à mon sens, difficulté, qui posent difficulté.

n(20 h 40)n

Croyez-vous, M. le Président, vous qui avez quand même une longue expérience en ce qui touche la protection des droits de l'homme, croyez-vous qu'il est normal que l'on puisse enquêter sur quelqu'un sans que cette personne soit au courant du résultat de l'enquête, qu'on demande à une personne qui travaille dans un centre de la petite enfance de faire valoir ses capacités et particulièrement le fait qu'elle n'a pas d'empêchement ou qu'elle n'a pas eu de condamnation, bravo? Mais que ceci se fasse sans que la personne concernée soit au courant de l'enquête faite sur elle, sans que la personne sur laquelle on fait une enquête soit au courant...

Ce que demandait la Commission d'accès à l'information était simple, était élémentaire, dans le projet de loi, ce qu'a demandé le député de Notre-Dame-de-Grâce était simple, mais la ministre, parce qu'elle refuse de comprendre ou qu'elle ne comprend même pas les arguments, on ne sait pas pour quelle raison, ou elle ne comprend même pas le b.a.-ba d'un argument dans une commission comme celle-là... a refusé de comprendre, M. le Président, que, au lieu de transmettre le résultat de l'enquête à la personne et que la personne ait le choix, lorsqu'elle postule un poste dans un centre de la petite enfance ou lorsqu'elle choisit de devoir être demain un administrateur dans un centre de la petite enfance et qu'elle est soumise à une enquête ? et nous ne contestons pas ici la possibilité de faire enquête sur les personnes ? mais qu'elle ait la responsabilité de dire: Si l'enquête qu'on m'a transmise fait en sorte qu'on établit sur moi des éléments qui pensent que je ne peux pas actuellement remplir telle ou telle fonction, elle puisse ne pas poser sa candidature, et c'est ça, toute la question qui est devant nous.

Est-ce que réellement on doit pouvoir enquêter sur les gens, indépendamment du fait qu'ils aient ou non posé leur candidature? Ce qu'a demandé le Barreau du Québec, la Commission d'accès à l'information, la Commission de protection des droits de la jeunesse, c'était la chose suivante, c'est-à-dire: Oui, vous pouvez faire enquête sur les gens, c'est parfaitement normal et c'est parfaitement sain, oui, vous pouvez faire enquête, mais, lorsque vous faites enquête, c'est la personne qui doit faire état qu'elle n'a pas ou qu'elle ne présente pas aucune objection de la part des organismes de police pour pouvoir assumer une responsabilité dans les centres de la petite enfance. Le contraire dans cette loi. Cette loi est une loi dans laquelle on donne pouvoir à l'administrateur du centre de la petite enfance, on donne pouvoir à celui qui gère les centres de la petite enfance d'enquêter sur les gens sans que la personne sur qui on enquête soit au courant.

M. le Président, ça a l'air mineur, mais c'est extrêmement grave. Pour obtenir une action qui est acceptable et à laquelle nous souscrivons, à savoir la protection des enfants dans les centres de la petite enfance ? et je pense qu'il n'y a aucun des parlementaires ici qui souhaiterait que les enfants dans les centres de la petite enfance ne soient pas protégés ? on utilise un moyen, M. le Président, disproportionné, on utilise un moyen qui s'en va écraser certains droits. Ce que, et c'est tout à fait mineur, nous avons demandé à la ministre, ce que nous avons demandé à la ministre est absolument élémentaire, extrêmement élémentaire, nous avons demandé qu'au moment du processus d'enquête la personne qui postule un poste dans un centre de la petite enfance, la personne qui choisit d'être un administrateur d'un centre de la petite enfance puisse faire état d'une enquête policière qu'elle aurait demandée, et, si elle voit que l'enquête policière est négative, sans nécessairement la rendre publique, qu'elle puisse retirer sa candidature, qu'elle puisse retirer à ce moment-là le fait qu'elle postule un poste dans un organisme de gestion ou un conseil d'administration d'un centre de la petite enfance.

Il y a là, M. le Président, un point fondamental. Il y a là un point fondamental qui a été décrié par les organismes dont je vous ai fait état tout à l'heure, et je vais me permettre de vous lire encore une fois ? je l'ai lue moult fois, mais je vais la lire une dernière fois dans ce débat ? la lettre qui a été envoyée à la commission, après l'étude article par article, par la Commission d'accès à l'information. La Commission d'accès à l'information, M. le Président, comme tous les parlementaires dans cette Chambre, ne conteste pas que l'on puisse vérifier les renseignements sur les personnes concernées qui postulent un poste ou qui choisissent de devoir avoir... qui choisissent d'avoir une responsabilité dans un centre de la petite enfance. Nous ne contestons pas que la meilleure protection soit accordée aux enfants. Le point qui fait problème, c'est que... Et la Commission répond... Et je vais vous le lire, c'est important: «La Commission ne peut souscrire à un tel projet que si des mesures destinées à limiter ce genre d'intrusion dans la vie privée sont mises en place. Ces mesures doivent avoir pour effet de restreindre la collecte de tels renseignements au strict minimum et assujettir la transmission de ces renseignements à des tiers à la communication au préalable de ces renseignements à la personne concernée.»

Je répète pour les autres parlementaires qui peut-être n'ont pas écouté. Je répète: «...la transmission de ces renseignements à des tiers à la communication au préalable de ces renseignements à la personne concernée.» Autrement dit, le point qui est devant nous n'est pas, n'est pas, en aucune manière, que l'on puisse demander à quelqu'un qui postule dans un centre de la petite enfance de faire état d'un dossier vierge ou un non-problème quant à ses antécédents judiciaires, là n'est pas la question. Le problème, M. le Président, le problème, c'est que la communication de ces renseignements devrait d'abord être communiquée à la personne qui postule, et ensuite la personne qui postule pourrait ou non retirer sa demande ou la maintenir et, à ce moment-là, avoir son dossier divulgué. Et la ministre n'a jamais, jamais compris ce fait-là.

Actuellement, chers parlementaires devant moi, vous avez devant vous une loi, et, à mon avis ? et je m'adresse à vous, M. le Président ? vous avez une loi actuellement qui inverse le processus de transmission de l'information. Le processus de transmission de l'information va aller de l'enquête policière au dirigeant, à un tiers avant de passer à la personne qui est directement concernée, avant d'aller à la personne qui est directement concernée. Et je dois dire, M. le Président, que mon point de vue est soutenu par les avocats de la Commission d'accès à l'information, par le Barreau du Québec, par la Commission des droits de la personne. et il y a là un accroc important dans le projet de loi. Il y a, de la part de la ministre, une incompréhension, une incompréhension des réalités fondamentales qui touchent les droits de l'individu.

Nous sommes, de ce côté-ci, M. le Président, en faveur de la protection, de la protection des droits des enfants, mais nous pensons, de ce côté-ci, que cet objectif, qui, je crois, est partagé aussi par les parlementaires d'en face, peut être atteint d'une manière extrêmement facile, sans remettre en question un certain nombre de droits fondamentaux. Il aurait suffi, dans le projet de loi, M. le Président, que l'on inscrive clairement que la personne qui postule un emploi dans un centre de petite enfance, que la personne qui choisit ou qui pose sa candidature à un conseil d'administration d'un centre de petite enfance doit faire état ou doit divulguer, si elle le juge à propos, le résultat d'une enquête policière. Ç'aurait été extrêmement simple. Ça veut dire que la personne aurait demandé aux autorités policières de faire état de ses antécédents, éventuellement, de ce qu'elle aurait fait, et elle aurait eu le loisir soit de le divulguer et de continuer à postuler le poste qu'elle aurait voulu avoir, soit de retirer sa candidature sans divulguer les antécédents qui la caractérisaient. Ç'aurait été, M. le Président, un choix qui aurait à la fois assuré la protection des enfants et aussi le respect des droits des individus.

Ce n'est pas la voie qui a été choisie par la ministre. À l'encontre des décisions de la Commission d'accès à l'information, à l'encontre des recommandations du Barreau, à l'encontre des discussions et des propositions faites par la Commission des droits de la jeunesse, elle s'est obstinée, malgré les plaidoyers faits par mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, pour lequel nous avons, dans cette Chambre, le plus grand respect et qui veut à la fois protéger les droits des enfants mais aussi être en mesure de protéger les droits des enfants dans le respect des droits individuels, la ministre s'est obstinée à ne pas entendre raison et à maintenir ce projet de loi avec cette faille énorme à l'intérieur du projet de loi, M. le Président. Et c'est ça qu'on a lorsqu'on refuse d'écouter ou on ne comprend pas les arguments, pour moult raisons. Je ne pourrais pas... de commentaires quant à cet effet-là. Et on se borne à revouloir ne pas bouger, sur aucun des éléments. Cette ministre, M. le Président, malheureusement, n'a pas compris le bon sens, elle n'a pas compris le bon sens, et on est encore, devant nous, avec un projet de loi qui sera bancal, bancal, parce que, pour régler un problème dont je ne nie pas l'importance, dont je reconnais l'importance ici... va mettre en question des principes qui sont des principes importants dans notre société.

n(20 h 50)n

M. le Président, je dois vous dire que j'ai énormément de regret de voir la réaction des parlementaires gouvernementaux, particulièrement... Et, il faut bien le comprendre, on s'adresse strictement non pas à l'ensemble du projet de loi mais à l'article 9 du projet de loi. On ne s'adresse pas à... Et, dans cet article 9, on ne s'adresse pas, M. le Président, à l'opportunité ou à la non-opportunité de demander éventuellement qu'une personne qui va remplir une fonction dans un centre de petite enfance soit assujettie à devoir faire preuve d'un dossier judiciaire absolument limpide, ceci n'est pas la question. La question, M. le Président, est la suivante: c'est la personne qui doit demander le dossier judiciaire, et qu'elle produira ou ne produira pas si elle veut maintenir ou ne maintiendra pas sa candidature. Ce n'est pas le tiers, c'est-à-dire les dirigeants du centre de la petite enfance, qui va pouvoir enquêter sur une personne sans que cette personne soit au courant. Il y a là, M. le Président, un principe qui me semble assez important, sur lequel, je crois, vous devez être sensible, compte tenu de votre passé sur le plan de l'éthique.

Il me semble important ici de bien faire comprendre le point. Il ne s'agit pas ici de refuser le fait que, pour occuper une fonction dans un centre de la petite enfance, une personne doive avoir un dossier juridique ou judiciaire absolument limpide, mais que, si on fait une enquête sur quelqu'un, cette personne ait la liberté, avant qu'on rende publics les éléments qui constituent cette enquête, de retirer sa candidature et de ne pas avoir à postuler, à ce moment-là. Il s'agit d'un point extrêmement important, M. le Président, et je regrette qu'aujourd'hui nous soyons amenés à débattre du projet de loi n° 95 sans qu'un tel amendement qui avait été recommandé par les organismes chargés de la défense des droits de l'homme dans notre société, le Barreau du Québec, la Commission d'accès à l'information... qu'on ne modifie pas ici le projet de loi.

Et je sais, parce que je connais un certain nombre de mes collègues d'en face, qu'il y a chez beaucoup d'entre eux une sensibilité aux droits de l'homme. Et je ne voudrais pas ici interpeller les différents collègues, vous êtes en général sensibles... M le Président, ils sont sensibles aux questions de la protection des renseignements concernant la vie privée. Et, malheureusement, malheureusement, ils n'ont pas réussi aujourd'hui à convaincre leur ministre de changer son projet de loi, et c'est absolument malheureux, c'est absolument malheureux qu'une modification mineure, mineure, où n'importe quel des ministres ayant un peu plus d'intelligence dans les parlementaires d'en face aurait certainement souscrit sans difficulté... Et je ne voudrais pas citer certains des parlementaires avec qui j'ai pu travailler ici et qui certainement ont été en mesure de faire preuve d'ouverture. Mais, avec cette ministre-là, nous n'avons pas eu aucune, aucune ouverture, rien, un esprit borné et qui malheureusement n'a pas été capable de comprendre le b.a.-ba de ce qui lui était recommandé.

Alors, M. le Président, il faut le déplorer, il faut le déplorer, malheureusement, et on ne peut pas tellement aller plus loin aujourd'hui que de déplorer qu'une ministre, un membre de ce gouvernement fasse fi des recommandations qui étaient celles du Barreau du Québec, de la Commission d'accès à l'information, de la Commission des droits de la jeunesse et maintienne ce petit élément, ce tout petit élément qui aurait permis que cette loi soit une loi qui ne vienne pas remettre en question certains des principes fondamentaux. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Alors, il n'y a pas d'autres intervenants. Il y a un droit de réplique qui est possible, et tout.

Une voix: Adopté.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté? Bon. Alors, nous allons aller à l'adoption. Ceci met fin donc aux interventions. Le projet de loi n° 95, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance et la Loi sur le ministère de la Famille et de l'Enfance, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.

Mme Vermette: M. le Président, je vous demanderais de vous référer à l'article 41 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 91

Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 41, M. le ministre responsable de l'Administration et de la Fonction publique, président du Conseil du trésor, propose l'adoption du projet de loi n° 91, Loi concernant la prolongation de certaines conventions collectives des secteurs public et parapublic. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Joseph Facal

M. Facal: Merci beaucoup, M. le Président. Nous en sommes au dernier moment des travaux qui nous conduiront à l'adoption de ce projet de loi. J'ai déjà eu d'innombrables occasions d'expliquer la raison d'être de ce projet de loi. Aussi, je vais être extrêmement bref et je vais vraiment m'en tenir à l'essentiel.

On se rappellera qu'au mois de février dernier le Conseil du trésor a entrepris des négociations avec les centrales syndicales regroupées dans ce qu'on appelle l'intersyndicale et qui comprend la CSN, la CSQ, la FTQ, le SFPQ et la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec. Nous leur avons, à ce moment-là, demandé si elles ne seraient pas intéressées à prolonger d'un an l'échéance des conventions collectives, qui normalement viennent à échéance le 30 juin 2002.

Pourquoi leur avons-nous fait cette demande? Pour deux raisons. La première est que nous avons eu de part et d'autre le sentiment que l'encre était à peine sèche sur les dernières conventions collectives que déjà ce processus, dont on connaît la lourdeur, était de nouveau à nos portes. De part et d'autre, on voulait souffler. Deuxièmement, de part et d'autre, nous avions convenu que, depuis une bonne dizaine d'années, le paysage des relations de travail au Québec dans les secteurs public et parapublic était encombré, bloqué par trois questions majeures que nous voulions régler une fois pour toutes et qui sont l'équité salariale, la durée et l'organisation du temps de travail des enseignants et les régimes de retraite.

Les pourparlers nous ont finalement conduits, au mois d'avril, à une entente de principe que nos partenaires syndicaux ont ensuite entrepris de faire approuver par leurs délégués. Au moment où nous nous parlons, cette entente de principe a été ratifiée par plus de 84 % des syndiqués faisant partie des centrales concernées, ce qui nous permet de dire que cette idée d'une prolongation recueille vraiment un appui d'une remarquable solidité.

J'ajoute évidemment que ceux qui n'ont pas souhaité prolonger les conventions collectives ne tombent pas dans un trou noir juridique. À eux s'applique le processus classique, courant, prévu par nos lois, qui prévoit qu'ils nous présentent d'abord un cahier de demandes, auquel la partie patronale, comme le prévoient nos lois, a 60 jours pour répondre. J'ajoute évidemment que les syndicats qui ont refusé la prolongation ont toujours la possibilité de changer d'avis et de réintégrer cela s'ils en font la demande avant le 30 juin 2002.

n(21 heures)n

Évidemment, il s'est trouvé que, pendant cette négociation, la partie syndicale avait aussi souhaité que le report de l'échéance d'expiration des conventions collectives n'ouvre pas la porte à une nouvelle période de changement d'allégeance syndicale, ce qu'on appelle donc communément le maraudage, et que soient également reconnus les changements d'allégeance syndicale antérieurs. Nous avons consenti à cette demande de la partie syndicale, et par la suite des avis juridiques nous ont confirmé qu'il fallait absolument un projet de loi pour rendre cela effectif. Et c'est l'objet du projet de loi qui est devant nous, cinq courts articles, rien de plus, rien de moins. J'en profite pour signaler que ce report d'un an a déjà été mis à profit.

En ce qui a trait à l'équité salariale, il faut savoir que nous et la partie syndicale avons convenu d'une méthodologie commune que nous sommes maintenant en train d'appliquer à l'évaluation de quelque 600 titres d'emploi, et, sur ces bases-là, nous serons en mesure de calculer les redressements salariaux qui seront consentis.

En ce qui a trait à la question des enseignants, tous auront pris note de l'entente de principe survenue récemment. En échange d'un redressement salarial, que j'estime raisonnable et mérité pour une profession qui, historiquement, avait été sous-payée, le gouvernement a obtenu plus de temps de présence des enseignants à l'école, ce qui devrait permettre la reprise rapide de la réforme et, à terme, augmenter sans aucun doute la réussite éducative des élèves.

Pour ce qui est des discussions sur les régimes de retraite, nous nous apprêtons à intensifier des rencontres qui, pour l'instant, ont été techniques et à rentrer vraiment dans une phase plus intensive.

En conclusion, ce que ceci montre, c'est que le dénouement illustre que le gouvernement a bien fait de proposer cette idée de prolongation des conventions collectives, et le projet de loi qui est devant nous est la concrétisation de l'un des engagements que le gouvernement avait pris pendant cette négociation. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je dois dire ici que j'interviens pour remplacer mon collègue Pierre Marsan, le député de Robert-Baldwin, qui, malheureusement, est pris dans d'autres occupations et qui ne peut être présent aujourd'hui. Il aurait aimé pouvoir participer au débat sur ce projet de loi. Et, d'emblée, M. le Président, je dois dire que nous allons souscrire au projet de loi tel qu'il est proposé actuellement par le ministre président du Conseil du trésor. Je me dois néanmoins de vous faire un certain nombre de remarques qui me posent de nombreux problèmes. Les remarques sont les suivantes.

Si nous sommes d'accord avec la prolongation de la convention collective, si nous sommes d'accord avec ce qui est inclus dans les ententes, c'est-à-dire l'augmentation des salaires de 2 % à partir de l'année... du 1er janvier 2003, nous ne pouvons souscrire, de ce côté-ci de la Chambre, au manque de transparence du gouvernement. Nous ne pouvons souscrire, M. le Président, à la manière dont sera versée cette augmentation de 2 %.

Il est facile de regarder la manière dont les ententes faites par le gouvernement vont répartir le versement de ce 2 %. Les salaires seront augmentés, de fait, à partir du 1er avril 2003, c'est-à-dire juste après l'année financière 2002-2003 du gouvernement. De surcroît, M. le Président, puisqu'on a convenu que les salaires seraient augmentés à partir du 1er janvier 2003, il y a un forfaitaire qui sera versé aux travailleurs et travailleuses du gouvernement, un forfaitaire, M. le Président, qui représentera l'équivalent de l'augmentation salariale de 2 % pour les mois de janvier, février et mars.

M. le Président, le problème, il est où? Et je vais vous le dire tout de suite, il est dans le fait que, dans la comptabilité gouvernementale, la dépense de 120 millions de dollars que représente cette augmentation salariale à partir du 1er janvier 2003 jusqu'au 1er avril 2003, qui sera versée sous forme de forfaitaire au début 2003, n'apparaîtra pas dans les états financiers 2002-2003, mais n'apparaîtra seulement que dans les états financiers 2003-2004. Ce 120 millions de dollars, M. le Président, qui normalement aurait dû apparaître dans les états financiers, sera pelleté en avant dans l'année financière qui viendra après 2003, dans l'année financière 2003-2004, c'est-à-dire que ce gouvernement pourra prétendre avoir atteint l'équilibre financier, l'équilibre budgétaire, avoir un budget équilibré même s'il a, en soi, une dépense de 120 millions de dollars qui est, de fait, renvoyée à l'année 2003-2004.

C'est absolument ce que j'appellerais de l'équilibrisme comptable qui permet, à ce moment-là, d'atteindre en 2002-2003 un équilibre virtuel sur le plan comptable, M. le Président, tout en sachant qu'on a une dépense que l'on effectue de fait en 2002-2003 mais que l'on ne comptabilisera qu'en 2003-2004, donc qui arrivera effet en avril 2004, c'est-à-dire après le rendez-vous électoral, et qui arrivera... au moment où on fera la comptabilité, en mars, aux états financiers du gouvernement, en mars 2004. C'est ? je m'excuse, M. le Président, mais vous me comprenez bien facilement ? actuellement une manière d'atteindre en 2002-2003 un équilibre budgétaire, un déficit zéro, tout en ayant déjà en 2002-2003 un déficit de 120 millions de dollars qui va être pelleté en quelque sorte dans l'année 2003-2004. C'est ça qui est proposé, M. le Président, par le projet de loi.

Si le gouvernement avait voulu vraiment être purement transparent, il aurait réellement commencé à verser, comme il s'était entendu avec ses partenaires syndicaux, à partir du 1er janvier 2003 l'augmentation salariale de 2 % et il aurait dû prévoir dans ses équilibres financiers de 2002-2003 cette somme de 120 millions de dollars qui correspond à l'augmentation salariale de 2 % consacrée aux employés de l'État. Malheureusement, M. le Président, ça n'a pas été le cas, et, en quelque sorte, on s'en va pelleter en avant ce 120 millions de dollars. Et le président du Conseil du trésor pourra se lever et dire: J'ai atteint le déficit zéro, sachant bien que, de l'autre côté... Non, sachant bien que les gens qui lui succéderont en 2003-2004 vont commencer l'année avec une dette de 120 millions de dollars qui normalement auraient été dépensés dans l'année 2002-2003. C'est ça, la réalité devant vous. C'est ça, la réalité. C'est ce qu'on appelle jongler, jongler avec la comptabilité, et c'est ce que vous nous proposez dans le projet de loi.

Il aurait été tellement plus transparent de pouvoir présenter réellement les équilibres financiers, M. le Président, de présenter un redressement salarial dès le 1er janvier 2003 et de faire état au livre des dépenses 2002-2003 de ce que vous avez consenti à vos employés. M. le Président, je dois regretter que ça n'a pas été le cas. Je dois regretter que, en quelque sorte, on hypothèque le prochain exercice financier du gouvernement du Québec de 120 millions de dollars. Et nos amis d'en face, M. le Président, sachant pertinemment qu'ils ne seront plus aux affaires dans un an, se permettent actuellement de laisser à ceux qui leur succéderont une hypothèque de 120 millions de dollars qui correspond à ce qu'ils ont consenti à leurs partenaires, à leurs partenaires syndicaux dans le débat. M. le Président, je m'excuse, j'aurais souhaité, j'aurais souhaité que, dans un geste de transparence, dans un geste de transparence, on puisse faire état dans les exercices financiers 2002-2003 des réelles dépenses qui auraient été consenties.

Il y a un second point, M. le Président, sur lequel, je pense, il est important ici de soulever l'attention des parlementaires et particulièrement de notre collègue la députée de Terrebonne, qui est responsable de la Condition féminine. Et vous savez à quel point la députée de Terrebonne est sensible à tout ce qui touche à l'heure actuelle la promotion des femmes.

n(21 h 10)n

Les ententes, M. le Président, ont été acceptées par une bonne partie des partenaires du gouvernement. Les syndicats qui ne l'ont pas accepté, je pourrais rapidement en faire état: les infirmières dans les hôpitaux, les professeurs de cégep, particulièrement ceux qui sont affiliés soit à la fédération autonome des cégeps, soit à ceux qui sont affiliés à la CSN. Mais, dans l'ensemble, on doit dire que le projet a recueilli une adhésion certaine de la part des partenaires du gouvernement, à l'exception d'un certain nombre de syndicats, dont l'Association des juristes du gouvernement, petit groupe, M. le Président, de 750 personnes. On dira: C'est mineur, cela a peu d'importance, mais, quand même, je crois que les parlementaires que nous sommes ici doivent faire respecter les droits de chacun.

Et je voudrais soulever au président du Conseil du trésor et à sa collègue la députée de Terrebonne, responsable de la Condition féminine, la situation qui est bien particulière aux juristes, M. le Président. Dans la condition de travail des juristes du gouvernement, il y avait la possibilité de choisir un aménagement du temps de travail pour pouvoir arriver à un aménagement du temps de travail, un travail partagé. Par contre, ce qui était convenu de part et d'autre, c'est que, si vous choisissiez une forme de réduction du temps de travail ? souvent, modulation qui était choisie par des femmes ayant des jeunes enfants, qui voulaient pouvoir avoir un équilibre entre, à la fois, leur vie professionnelle et leur vie en milieu de travail ? il était précisé actuellement dans la convention collective, dans les lettres d'entente, qu'un juriste qui était visé par la présence à cette entente n'était pas tenu de verser à la CARRA les cotisations et les contributions normalement exigibles pour le temps non travaillé jusqu'à un maximum de60, 65 heures sur une base annuelle. C'est-à-dire qu'on pouvait dire que même quelqu'un qui choisissait en quelque sorte cet aménagement du temps de travail pour pouvoir poursuivre en même temps sa vie matrimoniale et ses responsabilités maternelles et, de l'autre côté, sa vie professionnelle pouvait avoir une réduction du temps de travail, mais n'aurait pas été pénalisé pour son régime de retraite. C'est la situation telle qu'elle existe actuellement. Mais cette lettre d'entente, M. le Président, arrive à terme le 29 juin 2002.

Il est important de comprendre... Et comme je l'ai répété mille fois au président du Conseil du trésor, ce n'est pas la place ici de soulever les questions de négociations.

Une voix: ...

M. Gautrin: Il n'est pas la place ici... M. le Président, M. le député de Richelieu, permettez-moi de le rappeler, ce n'est pas la place ici de soulever des questions de négociations. Même si vous en doutez, je crois que ce n'est pas ici que nous devons débattre des questions de négociations. Et je pense, M. le Président, que c'est quelque chose extrêmement important à ce niveau-là.

Néanmoins, je dois me permettre de soulever ici une difficulté et de porter à la connaissance du président du Conseil du trésor et de la secrétaire d'État responsable de la Condition féminine de la situation très particulière dans laquelle vont se trouver ces femmes qui ont choisi de marier diminution du temps de travail et poursuite de leur carrière professionnelle quant à leur régime de retraite parce que cette lettre d'entente arrive à terme le 29 juin 2002. Il me semble, M. le Président, qu'une certaine ouverture de la part du gouvernement aurait pu être un geste intéressant pour protéger ces personnes qui choisissaient de marier ces deux fonctions. Je le signale simplement en espérant trouver de la part de nos partenaires d'en face une certaine ouverture.

Alors, M. le Président, comme je vous l'ai rappelé dès le début et comme vous l'a rappelé notre collègue le député de Robert-Baldwin lorsqu'il a fait le débat ici, le débat sur la deuxième lecture de ce projet de loi, nous allons souscrire à la prolongation de la convention collective. Nous trouvons, avec raison, qu'il peut y avoir lieu de prolonger les conventions collectives d'une année. Mais je tiens à rappeler, à rappeler, M. le Président, que cette prolongation peut créer certains problèmes, comme celui que j'ai voulu soulever actuellement et porter à la connaissance du président du Conseil du trésor en ce qui touchait les femmes juristes qui avaient choisi de poursuivre de plein front à la fois et leur projet de maternité et leur carrière professionnelle. Il y aurait peut-être lieu d'accorder une attention spéciale de la part du président du Conseil du trésor à ces personnes. M. le Président, donc, il y a certaines anomalies qui peuvent être créées par la prolongation des conventions collectives, premièrement.

Et, deuxièmement, M. le Président, je tiens a réaffirmer que, de ce côté-ci, nous sommes en faveur de la transparence et nous ne pouvons pas accepter encore que les 120 millions de dollars que ça va nous coûter dans cet exercice financier soient pelletés en avant dans l'année 2002-2003. M. le Président, ceci est un manque de transparence. Ça permettra soi-disant au gouvernement de prétendre qu'il a atteint l'équilibre financier, le déficit zéro, sachant bien... quand, derrière, il y a un 100, 120 millions que leurs successeurs devront payer. M. le Président, ça aurait été tellement plus facile d'être complètement transparent et de faire état ici réellement des dépenses qu'on doit dépenser, qui sont engagées dans l'année 2002-2003. Ceci étant dit, M. le Président, ce que je voulais rappeler, et comme l'a rappelé mon collègue de Robert-Baldwin, nous allons voter en faveur du projet de loi.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Verdun. Il n'y a pas d'autres intervenants? Le projet de loi n° 91, Loi concernant la prolongation de certaines conventions collectives des secteurs public et parapublic, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.

Mme Vermette: M. le Président, je vous demanderais de suspendre pour quelques instants, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Mulcair: M. le Président, ça va être oui, notre réponse à la demande de suspension. Mais, si c'est vraiment juste quelques minutes, on est peut-être mieux d'attendre. Mais, sinon, pour avancer les travaux, le gouvernement était en train de tenir quorum, on peut peut-être appeler d'autres choses. Mais, si c'est vraiment juste une question d'une couple de minutes pour attendre l'arrivée de la ministre des Finances, pas de problème, de notre côté.

Mme Vermette: ...dans le but, justement, là, de suspendre...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Écoutez, nous allons suspendre quelques minutes, puis nous allons vérifier si c'est long ou pas long, nous allons vérifier. Alors, nous suspendons quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 18)

 

(Reprise à 21 h 20)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons poursuivre les travaux. Et j'invite Mme la leader adjointe à nous indiquer l'affaire à l'ordre du jour.

Mme Vermette: Oui. Alors, M. le Président, je vous demanderais de référer à l'article 13 de notre feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 107

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Merci. À l'article 13, Mme la ministre d'État à l'Économie et aux Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier. Je crois que nous allons recevoir la recommandation du lieutenant-gouverneur.

Une voix: Oui.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à l'Assemblée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): D'accord. Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, le projet de loi n° 107, Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier, introduit tout un ensemble de mesures qui visent à moderniser, alléger, simplifier et clarifier la structure d'encadrement du secteur financier au Québec.

Cette restructuration a pour but premier de mieux protéger les intérêts des consommateurs en leur donnant notamment un guichet unique pour l'ensemble des produits et services financiers. Le projet de loi introduit aussi des dispositions visant à améliorer le traitement des plaintes. Ces nouvelles dispositions permettront aux consommateurs de mieux se faire entendre par ceux qui leur fournissent des produits et services financiers et de faire intervenir un organisme d'encadrement comme médiateur en cas de besoin.

Tous les fournisseurs de produits et services financiers régis par le Québec seront visés par ces mesures. Il sera plus facile que jamais et plus efficace de porter plainte en cas de problème concernant un produit ou service financier. Les consommateurs ne seront pas les seuls gagnants des mesures introduites par le projet de loi n° 107, puisque le secteur financier dans son ensemble profitera, lui aussi, d'un encadrement intégré et simplifié. La restructuration permettra aussi au Québec de faire entendre plus clairement sa voix dans les forums canadiens et nord-américains, où une partie de plus en plus grande de la réglementation est initiée.

La restructuration du système d'encadrement du secteur financier au Québec fait partie du processus de modernisation de l'encadrement de ce secteur. Comme vous le savez, M. le Président, nous avons, par le passé, modernisé la réglementation de plusieurs domaines de ce secteur pour tenir compte des grandes tendances qui guident son évolution. Le projet de loi n° 107 s'inscrit dans la même veine et vise à adapter la structure d'encadrement du Québec à ces grandes tendances.

Chacun sait, M. le Président, que le secteur financier joue un rôle vital au sein de l'économie. Lui permettre de fonctionner plus efficacement profite à toute la population, que ce soit directement, lorsqu'elle consomme des produits et services financiers, ou indirectement, par l'entremise d'un développement économique stimulé par un secteur financier performant. Le projet de loi n° 107 répond à un besoin évident, et les mesures qui y sont prévues favoriseront le maintien d'un secteur financier québécois solide et à l'écoute des besoins de la population du Québec.

Permettez-moi, M. le Président, de vous décrire rapidement l'essentiel des mesures prévues par le projet de loi n° 107. D'abord, la Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier instituera l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier. Cette Agence, elle sera chargée de quoi? Elle sera chargée d'administrer les lois relatives au secteur financier qui sont présentement administrées par l'Inspecteur général des institutions financières, la Commission des valeurs mobilières du Québec, le Bureau des services financiers et la Régie de l'assurance-dépôts du Québec.

L'Agence constituera un guichet unique pour le consommateur. En effet, le consommateur pourra s'adresser à l'Agence pour toute question ou pour tout problème relatif aux produits et services financiers. L'Agence, qui aura son siège social dans la capitale nationale et dont sera responsable le ministre des Finances, sera dirigée par un président-directeur général ou une présidente-directrice générale nommé par le gouvernement. Cette personne sera assistée par cinq surintendants. Ces directions seront créées, donc, au sein de l'Agence: la Direction de l'encadrement de l'assistance aux consommateurs, la Direction de l'encadrement de la solvabilité, la Direction de l'encadrement de la distribution, la Direction de l'encadrement des marchés de valeurs et la Direction de l'encadrement de l'indemnisation.

Ces cinq directions seront chargées de réaliser la mission en cinq volets de l'Agence. Le premier volet, M. le Président: prêter assistance aux consommateurs, notamment en établissant des programmes éducationnels en matière de consommation de produits et services financiers, en assurant le traitement des plaintes des consommateurs et en donnant accès à des services de règlement des différends. Le second volet: veiller à ce que les institutions financières et autres intervenants du secteur financier respectent les normes de solvabilité qui leur sont applicables et se conforment aux obligations que la loi leur impose. Le troisième volet est celui d'assurer l'encadrement des activités de distribution des produits et services financiers. Le quatrième volet devra assurer l'encadrement du marché des valeurs mobilières. Et enfin le cinquième volet: voir à la mise en place de programmes d'indemnisation des consommateurs de produits et services financiers et administrer les fonds d'indemnisation prévus dans la législation. On le constate, M. le Président, l'encadrement du secteur financier n'a qu'un but ultime, protéger les consommateurs de produits et services financiers. Et les cinq volets de la mission de l'Agence sont tous axés sur l'intérêt public.

La loi fixe aussi les grandes orientations qui devront guider l'action de l'Agence. Ainsi, l'Agence devra exercer ses fonctions et pouvoirs de manière: d'abord, à favoriser la confiance du public à l'égard du secteur financier québécois; deuxièmement, à promouvoir une offre de produits et services financiers de haute qualité et à un prix concurrentiel, et ce, dans toutes les régions du Québec; troisièmement, l'Agence devra s'assurer de la mise en place d'un cadre réglementaire efficace qui favorise le développement du secteur financier et qui permette l'évolution des pratiques de gestion et des pratiques commerciales dans ce secteur; l'Agence devra aussi exercer ses fonctions de manière à donner aux personnes et aux entreprises accès à une information fiable, exacte et complète sur les institutions financières et autres intervenants du secteur financier; et, finalement, assurer la protection du public contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses et donner accès aux personnes et aux entreprises lésées à divers modes de règlement des différends.

Pour éviter de recréer au sein de l'Agence le dédale administratif que constitue le présent système et pour minimiser le fardeau administratif supporté par l'industrie, l'Agence devra assurer en son sein la coordination des relations avec l'industrie, la coordination des exigences de divulgation à l'Agence et, enfin, la coordination de l'inspection et des enquêtes. Comme présentement, les intervenants du secteur financier continueront à financer leur encadrement respectif au prorata des coûts.

Ayant choisi de confier la direction de l'Agence à une seule personne, nous avons tout de même voulu que cette personne puisse bénéficier des conseils de gens expérimentés en matière de gestion d'entreprise. Ainsi, la loi crée, au sein de l'Agence, un conseil consultatif de la régie administrative composé de sept membres, dont une personne à la présidence nommée par le ministre des Finances. Ce Conseil sera chargé de conseiller l'Agence sur la conformité de ses actions avec sa mission et sur toute question concernant sa régie d'entreprise, comme les prévisions budgétaires, le plan d'activité annuel, le plan d'effectifs ou la nomination des surintendants. De plus, le Conseil consultatif de la régie administrative pourra formuler des avis ponctuels au ministre et il fera rapport annuellement sur ses activités dans le cadre du rapport annuel de l'Agence.

n(21 h 30)n

Plusieurs personnes nous ont mis en garde contre les dangers d'une croissance débridée de l'Agence ou encore d'un possible manque de transparence dans sa gestion. Pour prévenir tout abus, la loi prévoit que les prévisions budgétaires de l'Agence de même que le plan de ses effectifs et ses barèmes de rémunération devront être approuvés par le gouvernement. De plus, à chaque année, l'Agence transmettra au ministre un rapport des ses activités portant notamment sur les résultats atteints par rapport au plan soumis. Le ministre déposera ensuite ce rapport à l'Assemblée nationale. Finalement, à chaque année et lorsque le gouvernement le décrétera, le Vérificateur général du Québec procédera à la vérification des livres et des comptes de l'Agence.

La réglementation est la base même de l'encadrement du secteur financier. Il nous est donc apparu essentiel que le gouvernement en conserve le contrôle. Un contrôle gouvernemental permettra donc d'assurer un respect des orientations gouvernementales en matière de réglementation, notamment en ce qui concerne l'allégement réglementaire. Il permettra ainsi d'éviter une prolifération de règlements qui alourdirait indûment le fardeau réglementaire de l'industrie et, éventuellement, limiterait le choix de produits offerts aux consommateurs. Ainsi, la loi prévoit que tout règlement élaboré par l'Agence devra être approuvé par le gouvernement ou, dans les cas actuellement prévus par la Loi sur les valeurs mobilières, approuvé à ce moment-là par le ministre. Les règlements pourront être approuvés avec ou sans modification. Le gouvernement pourra aussi modifier un règlement existant ou en adopter de nouveaux.

La restructuration mettant fin à la Commission des valeurs mobilières comme nous la connaissons, la création d'un nouvel organisme capable d'exercer des fonctions quasi judiciaires s'est avérée nécessaire pour procéder aux révisions prévues dans la Loi sur les valeurs mobilières dans un contexte de même niveau d'expertise et d'efficacité. Ainsi, un Bureau de révision formé de membres nommés par le gouvernement sera créé pour exercer les pouvoirs de l'Agence relativement à toute demande de révision des décisions rendues en application de la Loi sur les valeurs mobilières. Ce Bureau sera suffisamment indépendant de l'Agence pour qu'il soit en mesure de poser un jugement impartial sur les demandes de révision.

Les organismes d'autoréglementation constituent présentement une composante du système d'encadrement du secteur financier. Il nous est donc apparu souhaitable d'établir un mécanisme d'application générale gouvernant les activités de ces organismes. Ainsi, la loi prévoit qu'un organisme désirant réglementer ses membres dans des domaines financiers régis par les lois du Québec devra se faire reconnaître par l'Agence à titre d'organisme d'autoréglementation. De plus, un organisme qui souhaite se faire déléguer des fonctions et pouvoirs d'encadrement par l'Agence devra se faire d'abord reconnaître par elle à titre d'organisme d'autoréglementation. L'Agence pourra déléguer certaines fonctions uniquement s'il est de l'intérêt public de le faire.

La question des organismes d'autoréglementation à vocation pancanadienne pose un problème particulier de représentation des intérêts québécois. Ainsi, pour assurer le respect des particularités du marché québécois, tout organisme d'autoréglementation reconnu devra prévoir un mécanisme permettant que son pouvoir décisionnel soit exercé au Québec, principalement par des résidents québécois. De plus, pour préserver le contrôle gouvernemental sur la réglementation du secteur, le gouvernement déterminera les règles d'encadrement de l'organisme d'autoréglementation, qui devront lui être soumises pour approbation.

L'activité de courtage en prêts garantis par hypothèque immobilière fait présentement partie des activités régies par la Loi sur le courtage immobilier. Toutefois, étant donné la nature de cette activité qui relève en fait de la distribution d'un produit financier, il convient que sa supervision relève de l'Agence. La loi transfère donc l'encadrement de l'exercice des activités de courtage en prêts garantis par hypothèque immobilière de la Loi sur le courtage immobilier vers la Loi sur la distribution de produits et services financiers. Ainsi, une personne ou une société désirant faire du courtage de prêts garantis par hypothèque immobilière devra obtenir un permis d'exercice de courtier hypothécaire. L'Agence pourra adopter des règlements pour régir cette activité. L'Agence pourra aussi suspendre ou retirer le permis d'un courtier hypothécaire ou encore l'assortir de restrictions ou conditions.

Comme je l'ai mentionné précédemment, le projet de loi n° 107 introduit dans les diverses lois régissant le secteur financier plusieurs dispositions relatives au traitement des plaintes. En fait, la loi établit un régime harmonisé du traitement des plaintes ainsi qu'un mécanisme de règlement des différends. Ainsi, chaque fournisseur de produits et services financiers devra se doter d'une politique concernant le traitement des plaintes et des réclamations ainsi que le règlement des différends. Chaque fournisseur fera annuellement rapport à l'Agence sur sa politique, notamment sur les cas où le plaignant n'aura pas été satisfait de l'étude de sa plainte ou du résultat de cette étude.

L'Agence sera évidemment impliquée. En effet, l'Agence pourra émettre une ligne directrice en matière de traitement des plaintes. Elle pourra aussi donner des instructions écrites aux fournisseurs de produits et services financiers concernant leur politique de traitement de plaintes. L'Agence recevra chacun des dossiers des plaignants insatisfaits de l'examen ou du résultat de l'examen fait par le fournisseur. Et, finalement, elle pourra agir comme médiateur si les parties intéressées en conviennent. Le gouvernement, quant à lui, pourra déterminer par règlement, au besoin, une politique ou des éléments d'une politique que devront adopter les fournisseurs de produits et services financiers pour le traitement des plaintes. Ces mesures mettront encore une fois le Québec à l'avant-garde de l'encadrement du secteur financier.

Bien sûr, le projet de loi prévoit plusieurs mesures de concordance ou autres. Premièrement, le projet de loi prévoit que l'Inspecteur général, sous le nom de registraire des entreprises, continuera de s'occuper de l'administration de lois ou de dispositions d'autres lois à caractère corporatif et non financier. Ainsi, le nouveau registraire des entreprises sera responsable du registre des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Il le sera aussi de l'encadrement de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec prévu à la Loi sur le courtage immobilier. Le registraire des entreprises ainsi que l'application de plusieurs lois de type corporatif dont l'application est présentement confiée au ministre des Finances relèveront désormais du ministre de l'Industrie et du Commerce.

Le projet de loi contient aussi une mesure visant les planificateurs financiers membres d'un ordre professionnel. En effet, présentement, les dispositions de la Loi sur la distribution de produits et services financiers régissant les planificateurs financiers ne s'appliquent pas aux membres d'un ordre professionnel qui a conclu une entente avec le Bureau des services financiers. Il en résulte plusieurs types d'encadrement différents pour une seule et même activité. Ainsi, pour normaliser les conditions d'utilisation du titre de planificateur financier, tous les planificateurs financiers qui voudront utiliser ce titre seront soumis désormais aux exigences de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et seront donc encadrés par l'Agence.

La mise en place d'un organisme comme l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier doit se faire évidemment sans que soient interrompues les activités d'encadrement du secteur financier. Elle implique la mise en commun de beaucoup de ressources et une planification importante. Ainsi, afin de réaliser une transition harmonieuse des organismes actuels vers l'Agence, un Bureau de transition sera créé et aura pour objet de tout mettre en place pour que l'Agence soit en mesure de débuter ses activités à la fin d'un échéancier de 12 mois. Le Bureau de transition sera composé de cinq membres, indépendants des organismes existants. Les membres du Bureau de même que son secrétaire seront nommés par le gouvernement. En plus de son propre personnel, le Bureau pourra faire usage des ressources des organismes actuels.

n(21 h 40)n

Nous profitons de l'occasion pour apporter quelques modifications de concordance dans les lois québécoises assujetties au contrôle du ministre des Finances. Et, finalement, la loi prévoit diverses mesures transitoires. Notamment, la loi prévoit que le gouvernement peut adopter par règlement toute autre mesure transitoire ou utile à la mise en application de la loi.

Voilà donc, M. le Président, ce que vise le projet de loi n° 107. Je crois que cette nouvelle législation facilitera la vie de tous les consommateurs de produits et services financiers au Québec. Je crois aussi que toute l'industrie financière du Québec y gagnera, ce qui se traduira finalement par des gains pour l'économie du Québec en général.

Je recommande donc à cette Assemblée, M. le Président, l'adoption du principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier, et vous remercie de l'attention que vous y avez accordée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre des Finances. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, je sais, M. le Président, que ce projet de loi qui est déposé et l'adoption de principe, ce soir, en particulier... L'intention de la ministre des Finances est bonne. Je suis sûre que la ministre des Finances veut apporter des correctifs à des problèmes qu'il y a dans le milieu financier, que ce soit vis-à-vis les consommateurs qui achètent ces produits financiers ou ces agents du secteur financier qui utilisent ces outils.

Par ailleurs, M. le Président, je vais, de façon très énergique, voter contre ce projet de loi, et je vais vous dire pourquoi. J'en ai déjà discuté d'ailleurs avec la ministre des Finances, et elle connaît un peu les propos que je vais tenir, mais j'en profite, ce soir, pour articuler les raisons qui m'invitent à inviter la ministre des Finances à être extrêmement prudente dans cette démarche de fusion des organismes de réglementation du secteur financier.

Vous savez, M. le Président, ça a l'air bien compliqué pour les gens qui nous écoutent, mais il n'y a pas très longtemps le secteur financier se limitait à quelques intervenants. Vous alliez à la banque et vous ouvriez des comptes de banque, des comptes de chèques ou des comptes d'épargne. Vous alliez chez votre agent d'assurances, et il vendait une police d'assurance pour votre voiture, votre domicile ou votre vie. Vous alliez, n'est-ce pas, chez des maisons de courtage pour faire des émissions. Et le milieu était tellement bien structuré, parce que chaque secteur était très limité.

Or, depuis quelques années, on vit un décloisonnement remarquable. Vous rentrez maintenant dans votre banque, votre succursale de banque ou votre caisse populaire, et c'est bien juste si on vous offre de vous ouvrir un compte d'épargne ou de chèques, parce qu'on vous offre une multitude de produits, que ce soient des REER, que ce soient des façons d'épargner autrement qu'on le fait normalement. Si bien que, à cause de ce décloisonnement, bien sûr, chacun des intervenants, aujourd'hui, doit faire face à une réglementation qui relève parfois d'un secteur et parfois d'un autre, si bien que le secteur financier a vu dans l'évolution des choses un coût énorme pour répondre à toutes les demandes des différents intervenants.

Pourquoi, M. le Président, je m'oppose au projet de loi actuel? Parce que j'estime que la réponse ou le remède que donne la ministre n'est pas le bon remède. D'abord, commençons, quel est le problème? Quel est le problème? Vous avez, d'une part, le citoyen, effectivement, qui parfois trouve difficile de se retrouver dans ce dédale de produits aujourd'hui, ne sait plus vraiment si l'intervenant qu'il a devant lui est qualifié ou pas et, par conséquent, si on lui offre un produit qui va lui permettre justement, en sécurité, de remettre dans les mains de cette personne de l'épargne ou d'autres produits quelconques qu'il a besoin sur.. Le produit financier, ça peut être une hypothèque, ça peut être toutes sortes de produits. Or, vous avez le problème du citoyen qui doit effectivement chercher à la bonne porte où trouver le produit qu'il recherche. Et, à cet égard, l'idée, je dirais, attrayante d'avoir une porte d'entrée offre beaucoup de séduction. Il est clair que d'avoir un intervenant où se présenter pour avoir une réponse apparaît de prime abord avoir beaucoup de vertus.

Arrive maintenant, M. le Président, tout le secteur financier qui, lui, fait appel à ces outils. Vous avez donc l'Inspecteur général des institutions financières, vous avez la Commission des valeurs mobilières, vous avez le Bureau des services financiers, et tous ces intervenants répondent au secteur financier.

Or, ce pourquoi je dis, M. le Président, que ce projet de loi a des dangers, des failles profondes à l'intérieur même du projet de loi, à cause de la façon avec laquelle il a été conçu... Et c'est la raison principale, M. le Président, pourquoi j'ai invité la ministre à énormément de prudence. Je l'ai invitée à avoir des consultations, et elle a accepté, il y aura des consultations au projet de loi. Et je l'invite à entendre beaucoup de gens au niveau de la consultation, parce que ce sont les gens du milieu qui vont pouvoir le mieux lui donner des avis quant à la façon d'harmoniser tous les intervenants de ce secteur.

Or, M. le Président, vous avez donc le consommateur qui, lui, veut possiblement avoir une porte unique. Mais, derrière cette porte, derrière cet intervenant, s'il y a des labyrinthes puis il n'y a pas, finalement, de suivi autant qu'on le souhaite, je pense que c'est un leurre que de faire croire aux gens qu'ils vont pouvoir entrer dans un endroit et trouver une solution à leur problème. Moi, M. le Président, je pense que le domaine financier est devenu si compliqué que ça risque d'être plus problématique qu'on l'estime. Mais imaginons que ce volet au projet de loi soit souhaitable, et je l'endosse, M. le Président.

Par ailleurs, que propose la ministre des Finances? Et c'est là où le bât blesse. La ministre des Finances nous propose une mégastructure qui va incorporer des organismes qui ont des missions et des mandats très différents. Vous avez là-dedans l'Inspecteur général des institutions financières. L'Inspecteur général des institutions financières a pour mission d'évaluer la solvabilité d'une entreprise. Il va déterminer si les réserves, par exemple, d'une compagnie d'assurances sont suffisantes pour rencontrer les obligations de cette compagnie d'assurances. Donc, ce n'est pas sorcier. Mais par ailleurs vous imaginez que l'Inspecteur général des institutions financières est tenu au grand secret. Il est tenu au grand secret parce que l'information qu'il a pourrait être utilisée par un concurrent qui, lui, utiliserait cette information pour aider, n'est-ce pas, à compétitionner contre cette personne qui donne de l'information. Par conséquent, l'IGIF, l'Inspecteur général des institutions financières, lui, vit dans le secret total. Le président de la Commission des valeurs mobilières, lui, au contraire, doit être transparent. Lui, il doit divulguer la totalité de l'information pour être bien sûr que l'information est transparente.

Vous imaginez que, étant le président-directeur général qui est... dans la main gauche, l'information confidentielle que j'ai, et, dans la main droite, je suis le président de la Commission des valeurs mobilières, sous un même chapeau, et là je dois divulguer l'information. Et non seulement je dois divulguer l'information, mais je peux prendre des poursuites ? des poursuites ? contre ma main gauche qui a l'information, contre la personne qui n'a pas eu, par exemple, suffisamment de réserves en termes de solvabilité, ou de fraude, ou de facteurs de ce type, M. le Président. Vous voyez qu'il y a un problème fondamental. Bon. Ça ne veut pas dire qu'il ne peut pas y avoir un lien entre l'Inspecteur général des institutions financières et la Commission des valeurs mobilières.

n(21 h 50)n

Par ailleurs, la proposition que nous avons aujourd'hui, avec un président-directeur général portant tous ces chapeaux: de personne qui fait la réglementation, de la personne qui détermine la solvabilité d'une entreprise, de la personne qui va émettre l'émission publique, qui va déterminer si le prospectus qu'on vous donne est correct, est conforme aux obligations que lui oblige la loi, alors vous allez avoir une personne qui, à un moment donné, va avoir un problème, énormément de conflits. En tout cas, je pense, M. le Président, en termes de transparence et de conflit d'intérêts, cette personne va certainement être aux prises avec des problèmes graves.

Et peut-être, M. le Président, que ce projet de loi risque d'être contesté, parce qu'il n'y a pas d'outil dans le moment pour faire les arbitrages. Vous avez eu un tel cas d'ailleurs, M. le Président, en Angleterre. Il y a eu un cas où il y a eu justement au sein de l'agence, une agence centralisée, un cas où vous avez eu deux volets différents, deux opinions différentes qui émanaient de l'organisme. Or, dans le cas de l'Angleterre, il y avait un conseil d'administration qui a fait les arbitrages, qui a fait les arbitrages et qui a déterminé finalement quel est le volet qui aurait préséance. Mais, dans le présent cas, nous avons un président-directeur général qui a de tels pouvoirs, non seulement a-t-il ou a-t-elle les pouvoirs au niveau de la Commission des valeurs mobilières, au niveau de l'Inspecteur général des institutions financières et du Bureau des services financiers, mais cette personne-là, en plus de ça, va choisir, nommer les personnes, les surintendants qui vont travailler pour lui ou elle. Vous voyez le problème immédiatement, vous voyez les conflits qui risquent de se poser.

M. le Président, ce pourquoi j'oppose le projet de loi, c'est que je pense qu'il fallait qu'il y ait une consultation élargie au niveau du milieu financier pour avoir, n'est-ce pas, des commentaires, des façons de régler certains problèmes. Or, que contient le projet de loi? Le projet de loi contient un Bureau de transition, un Bureau de transition qui, lui, va, à certains égards, faire les arbitrages au niveau du projet de loi. C'est ce Bureau qui va déterminer des problèmes et, pendant un an, va apporter les correctifs, entendre les parties.

Moi, je pense, M. le Président, qu'il aurait été grandement souhaitable que la ministre dépose son projet de loi, qu'elle permette une longue réflexion ? pas un an, mais quelques mois ? pour donner le temps aux gens de bien réfléchir sur ce projet de loi et d'offrir des alternatives à la ministre pour être sûr que le projet de loi réponde aux exigences du milieu. M. le Président, moi, je pense que la ministre, je pense que le gouvernement a raté une occasion, d'une part. D'autre part, M. le Président, parce que ce projet de loi en plus... J'ai la conviction et la certitude que ce projet de loi diminue l'importance de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Et la Commission des valeurs mobilières, c'est, je dirais, l'instrument le plus important dans un environnement économique pour être bien certain que le milieu se sente protégé et en sécurité.

Un autre volet ? la ministre n'y a peut-être pas fait référence. La bousculade à l'endroit du projet de loi actuel, ce serait des vélléités du gouvernement fédéral de légiférer dans ce secteur et de s'approprier, n'est-ce pas, le rôle des commissions des valeurs mobilières au Canada et de centraliser ces commissions des valeurs mobilières qu'on retrouve à travers les provinces. Or, M. le Président, je pense que ce sont là des vélléités du gouvernement fédéral. Parce que vous avez quatre grands centres financiers au Canada. Vous avez Montréal, Toronto, Calgary et Vancouver. Ce sont les principaux centres financiers au Canada. Or, trois de ces commissions des valeurs mobilières s'opposent à une agence centralisée, s'opposent catégoriquement à une agence centralisée. Vous avez le président de la Colombie-Britannique, Doug Hyndman, qui, lui, au contraire, s'est empressé de déréglementer au niveau de la Commission des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique. Vous avez Stephen Sibold, de l'Alberta, qui, lui, propose, plutôt qu'une agence centralisée, un passeport qui va faire que... Quand vous réglementez ou quand vous obtenez d'une commission des valeurs mobilières au niveau d'une province un acquiescement quelconque, vous obtenez un passeport qui vous donne droit d'opérer partout au Canada. Vous avez bien sûr la Commission des valeurs mobilières du Québec qui s'oppose à ce qu'il y ait une agence centralisée.

Je dis donc, M. le Président, que cette démarche de l'actuelle ministre des Finances et de l'ancien ministre des Finances peut sembler avoir quelques vertus de survie, là, pendant quelques... dans les journaux actuellement. Je vous assure que les organismes en place vont faire tout ce qui est possible et plus que possible pour maintenir, n'est-ce pas, les commissions des valeurs mobilières telles qu'elles sont aujourd'hui.

Alors, M. le Président, cette crainte qu'a la ministre à l'endroit du fédéral, à mon avis, l'a envoyée dans une approche précipitée, mal assemblée, avec une mégastructure qui, à certains égards, offre de grands risques. Et je pense que la vertu, dans ce cas-ci, eût été de prendre son temps. Vous savez, je l'ai déjà dit dans cette Assemblée, mon grand-père me disait toujours: Prenez votre temps, les enfants, nous sommes pressés. Bien, parce que parfois on est pressé, il faut faire les choses, il vaut les faire bien.

D'ailleurs, les craintes que la ministre des Finances peut nourrir à l'endroit du gouvernement fédéral qui aurait des velléités de créer une agence centralisée... M. le Président, le Canada ressemble énormément à l'Europe à certains égards au niveau du secteur financier et des organismes de réglementation. Vous avez en Europe... On aurait pu choisir, en Europe, justement de créer une telle agence centralisée. On a préféré justement créer un organisme de reconnaissance mutuelle qui invitait les pays à essayer d'harmoniser d'eux-mêmes et en créant énormément de pression pour qu'il y ait une harmonisation entre les États, sous la juridiction de FESCO, Forum of European Securities Commission, et, par conséquent, M. le Président, on respectait ainsi un principe fondamental qu'on a soutenu en Europe, le principe de subsidiarité, à savoir que plus c'est près... on doit s'approcher le plus possible de l'État le plus proche du citoyen.

En plus de ça, M. le Président, il y a un autre facteur qui n'est pas négligeable: la concurrence. La concurrence. Avoir un organisme de réglementation au Canada, vous avez un monopole. Or, si vous avez plusieurs commissions des valeurs mobilières, vous aurez par ailleurs des approches différentes, vous aurez des innovateurs dans tout ça, vous aurez des créateurs et vous aurez une capacité, n'est-ce pas, d'innovation que vous ne trouvez pas dans une situation de monopole. Alors, on est parfaitement d'accord avec cette situation de ne pas avoir une situation de monopole. Et je pense que la ministre a dû lire les nombreux articles qui ont été publiés dans le National Post, de tous les journaux, n'est-ce pas, et qui s'opposent farouchement à la création d'une agence centralisée, précisément pour permettre la concurrence et s'assurer de la subsidiarité de ce secteur.

n(22 heures)n

M. le Président, je trouve intéressant, aujourd'hui, de voir la ministre nous proposer ce projet de loi alors que, rappelons-nous, il n'y a pas très longtemps, on soulevait des réserves de ce côté-ci de la Chambre quant à la façon qu'avait utilisée le gouvernement pour contrôler, n'est-ce pas, l'enveloppe budgétaire de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Rappelons-nous que c'est un organisme, ça, qui est financé par le secteur en totalité. Et je m'interroge aujourd'hui parce que l'ancien ministre des Finances ? et peut-être que c'est injuste de blâmer l'actuel ministre des Finances pour ceci ? mais je me rappelle que l'ancien ministre des Finances, l'actuel premier ministre, s'était élevé contre la possibilité d'offrir un salaire plus élevé que 130 000 $ à l'ancien président de la Commission des valeurs mobilières, M. Martel, Jean Martel.

Grand déploiement, grande réplique, n'est-ce pas, qu'on m'avait faite à l'effet que, jamais, le gouvernement du Parti québécois n'accepterait de payer des émoluments d'envergure plus élevée. Or, moi, je m'étonne aujourd'hui, quand je lis, dans la même semaine, cette semaine, n'est-ce pas, une entente qui a été conclue avec la Caisse de dépôt pour donner à son président un fonds de retraite de 200 000 $ par année pour quelqu'un qui s'en va à la maison.

C'est peut-être correct ? je vois la ministre des Finances trouver ça tout à fait acceptable ? mais, moi, je lui dis que le président de la Commission des valeurs mobilières, lui qui est le chien de garde, n'est-ce pas, au Québec, de tous les organismes de réglementation... Moi, je dis qu'il aurait fallu à ce moment-là que le ministre des Finances de l'époque réponde au comité qui avait été mis en place et qui avait expressément indiqué qu'il fallait, n'est-ce pas, dans ce secteur, en particulier la Commission des valeurs mobilières du Québec qui se spécialisait dans les produits dérivés, avoir une porte plus grande pour ouvrir des salaires plus élevés, à cause bien sûr de ce secteur qui commande des salaires bien élevés.

Or, M. le Président, on a préféré laisser partir Jean Martel. On a préféré même forcer l'actuelle présidente à commettre des irrégularités parce qu'elle avait payé en plus certains employés et qu'elle n'avait pas reçu l'approbation du Conseil du trésor pour payer ces gens. Alors, M. le Président, moi, je vous dis que je trouve ça inacceptable. Si le gouvernement était sincère, qu'il croyait vraiment à un organisme de réglementation qui soit viable et qui soit moderne et qui soit à l'heure juste quant au secteur financier, bien, je pense qu'il fallait qu'on s'adapte au secteur financier de l'an 2000. Il ne fallait pas qu'on soit encore dans le secteur financier des années quatre-vingt. Il fallait qu'on réponde à ce comité qui a été unanime ? unanime, M. le Président ? pour dire qu'il fallait que les salaires payés non pas seulement au président, mais à plusieurs employés qui relevaient du président, à toute la haute direction, des salaires où il serait possible pour la commission d'attirer des talents, d'attirer des gens de talent pour être capable d'apporter une expertise au secteur financier...

On a préféré jouer, j'appellerais ça de la petite politique. à ce moment-là. Alors, je m'étonne aujourd'hui de constater l'intérêt soudain du gouvernement pour vouloir apporter, n'est-ce pas, faire un grand ménage de modernisation du secteur financier. Parce que, imaginez-vous, pendant que ça, ça se passait au Québec, l'Ontario, elle, elle a modernisé sa Commission des valeurs mobilières. L'Ontario a décidé, elle, qu'elle n'allait pas lésiner avec le service financier et qu'elle allait se positionner comme Commission des valeurs mobilières, comme étant une Commission des valeurs mobilières de premier ordre, et il fallait que, nous aussi, nous ayons la même ambition à l'endroit de la Commission des valeurs mobilières.

Alors, M. le Président, moi, aujourd'hui, les craintes de la ministre des Finances à l'endroit des velléités du gouvernement d'Ottawa, n'est-ce pas, de s'emparer ou de prendre le contrôle des commissions de valeurs mobilières... Je comprends qu'un certain ministre des Finances à Ottawa ait de telles velléités. Je vous dis, M. le Président, qu'ayant de l'opposition comme il y a de l'opposition actuellement venant de trois juridictions importantes au niveau de ce secteur-là, du service financier, je pense que la ministre, elle a bien peur, puis elle serait mieux, M. le Président, de prendre un bâton de pèlerin.

Et je vais vous dire, il y a tout un volet que la ministre des Finances ignore dans son projet de loi. C'est que le Québec ne peut pas être isolé dans le service financier. Il va falloir que le Québec s'harmonise avec les autres, parce qu'on ne peut pas faire comme si les autres n'existaient pas. C'est la même chose, M. le Président, de plus en plus... Si vous êtes une compagnie d'assurances ? et je peux en témoigner ? et que vous êtes dans le secteur financier et que vous avez des compagnies dans d'autres pays, bien, il va falloir que les organismes de réglementation se ressemblent, d'où une harmonisation internationale qui se passe aujourd'hui et qui, de plus en plus, se répand, si bien que la réglementation que vous appelez dans un État, ordinairement, ressemble beaucoup à la réglementation dans un autre État.

Alors, la ministre, dans son projet de loi, ignore totalement le fait qu'il y a d'autres commissions des valeurs mobilières au Canada. Or, pourquoi n'a-t-elle pas pris le bâton de pèlerin et proposé justement quelque chose qui, M. le Président, est utilisé en Europe, un concept de la reconnaissance mutuelle? Parce que vous imaginez que le secteur financier qui oeuvre dans 10 provinces ? imaginons une banque, par exemple, qui oeuvre dans 10 provinces ? et qui se voit obligé de faire appel à toutes les commissions des valeurs mobilières, il y un secret... Il y a un secret d'ailleurs qui est endossé et proposé par l'Alberta, proposé par des gens de la Colombie-Britannique, à savoir la reconnaissance mutuelle. Autrement dit, vous recevez une reconnaissance d'une commission des valeurs mobilières et, automatiquement, vous avez le passeport pour les autres provinces.

Il s'agit donc à ce moment-là, bien sûr, qu'il y ait des ententes bien structurées au niveau de chacune des commissions des valeurs mobilières, et, à cet égard, vous êtes donc en mesure, à ce moment-là, de ne pas mettre, n'est-ce pas, une protection autour du Québec et que, au contraire, le Québec joue un rôle à l'intérieur des organismes de réglementation canadiens, puisque le secteur financier... Si la ministre veut nous dire aujourd'hui que le secteur financier est en train de s'harmoniser, est en train de devenir... et il faut, n'est-ce pas, soulager la réglementation auprès des entreprises, vous imaginez que ça s'impose également entre le Québec et les autres provinces. C'est une réalité. Et ça s'impose également entre le Canada et les États-Unis. Puis ça s'impose entre le Québec et l'Angleterre. Ça s'impose pour tout le monde, M. le Président. Il faut être sûr qu'on favorise, n'est-ce pas, le secteur financier et qu'on diminue tous les volets susceptibles de créer des problèmes inutiles et, M. le Président, qui nuisent à l'innovation et à l'émergence de nouveaux produits.

Par conséquent, M. le Président, vous savez, ce projet de loi, ce n'est pas négligeable, parce que, suite aux affaires Enron, suite à Bre-X, suite à toutes ces transactions tellement malhonnêtes qui ont eu lieu récemment, manifestement le citoyen a perdu confiance. Le citoyen a perdu confiance parce que le secteur financier ne lui donne plus de garanties, si bien que ce que nous propose un projet de loi aujourd'hui doit rassurer les citoyens, doit rassurer les citoyens. Voilà un premier volet.

Deuxièmement, un autre volet, M. le Président, d'un projet de loi comme celui-là, c'est que, à cause justement d'Enron et à cause de Bre-X, les citoyens veulent être mieux informés quant au risque. Quelle est l'envergure du risque? Est-ce que, si je me lance dans tel secteur, je prends plus de risques que dans un autre secteur? Il faut donc que les intervenants du milieu donnent une bonne éducation, donnent une bonne formation et nous informent des risques, parce que, bien sûr, plus on prend de risques, plus il y a de la chance de faire de l'argent, mais, plus il y a de la chance de faire de l'argent, plus il y a du risque également, donc plus on risque, n'est-ce pas, d'avoir un échec.

n(22 h 10)n

En plus de ça, qu'est-ce que souhaite le consommateur? Le consommateur souhaite avoir une protection raisonnable. Il se dit: Bien, je comprends qu'il y a des risques; bon, j'ai raisonnablement confiance et pas confiance. Mais il faut bâtir, rebâtir cette confiance qui est complètement, complètement anéantie depuis l'affaire d'Enron. Parce qu'il y a eu d'autres entreprises qui ont été soupçonnées de faire, de poser des gestes qui n'étaient pas complètement légaux. Vous avez eu Andersen, une des plus grandes maisons de comptabilité, n'est-ce pas, qui est disparue. Ils étaient cinq, ils sont rendus quatre. C'est un désastre pour la concurrence, la perte d'Andersen. Or, vous avez eu... il y a eu une telle perte de confiance que cette compagnie est disparue de la carte, complètement disparue de la carte.

Alors, M. le Président, moi, je vous dis: La ministre, la solution qu'elle a apportée au problème, ce n'est pas la bonne solution. Et je pense qu'elle va l'entendre des intervenants. D'ailleurs, elle a déjà reçu, de M. Michaud, une lettre, une brillante lettre, M. le Président, qui, justement, illustre parfaitement, parfaitement... Et, d'ailleurs, on me dit que le Barreau aura des propos très semblables. On m'informe que le Barreau aura des propos très semblables aux propos tenus par M. Michaud. M. le Président, c'est pas sorcier, ce qu'il dit, c'est exactement ce que je dis aujourd'hui: c'est qu'il y a un problème au niveau non pas de la transparence, mais au niveau des responsabilités, au niveau du conflit d'intérêts. Et j'aimerais ça que la ministre s'informe de ce qui est arrivé en Angleterre dans un des conflits d'intérêts. Je pense qu'elle trouverait intéressant de voir comment on a résolu ce problème. Je l'invite à considérer ce cas, M. le Président, qui fait partie de la littérature maintenant.

Alors, M. le Président, je voudrais bien que tout le monde sache que le Parti libéral du Québec n'est pas pour qu'on n'arrive pas avec un projet de loi qui harmonise, qui mette fin à toute cette réglementation tatillonne qui, parfois, va... dans des démarches contradictoires et qui sont coûteuses pour le milieu et compliquées pour le citoyen. Nous voulons regarder un tel projet de loi. D'ailleurs, M. le Président, en 1994 ou 1993, Louise Robic, n'est-ce pas, avait écrit un document Bilan et propositions pour le secteur financier québécois, et elle proposait, justement, qu'il y ait un tel travail d'harmonisation et de restructuration. Depuis ce temps, il s'est passé beaucoup de choses, il s'est passé beaucoup de choses. Ça, c'est en 1996, c'est déjà, M. le Président, vous comprendrez, à cause du secteur financier, c'est déjà dépassé.

Alors, il faut manifestement moderniser notre secteur financier. Mais, M. le Président, une super agence, comme la ministre le propose, avec un président qui contrôle tous les volets de l'Inspecteur général des institutions financières, la Commission des valeurs mobilières et du Bureau des services financiers, en plus de tous les programmes, n'est-ce pas, d'épargne de la Régie des rentes du Québec, M. le Président, moi, je pense que c'est une erreur, c'est une erreur grave, et la ministre va certainement avoir un feedback à cet effet venant des intervenants.

D'ailleurs, je trouve ça intéressant, M. le Président, parce que la ministre, avec sa liste de gens qu'elle a convoqués pour entendre en commission parlementaire, si c'est vrai qu'on veut être transparent et ouvert, comment se fait-il qu'on n'a pas inclus ici des intervenants qui ont demandé à être entendus, notamment la Commission des valeurs mobilières? La Commission des valeurs mobilières a demandé d'être entendue. Dans la liste proposée par la ministre des Finances, la Commission des valeurs mobilières n'est pas là. Dans la liste fournie par la ministre des Finances, le Barreau n'est pas là, d'accord, le Barreau n'est pas là. M. le Président, il me semble que c'est normal qu'on entende le Barreau, il me semble que la Commission des valeurs mobilières, la première touchée par cette démarche, devrait se faire entendre.

Après tout, est-ce qu'on vit dans un régime de terreur, est-ce que ces gens-là ont le droit de parler? Parce que, M. le Président, imaginez-vous que j'ai entendu dire qu'il y a des employés du ministère des Finances qui ont été, je dirais... ce n'était pas des menaces, mais c'était, genre, intimidation, intimidation, auprès de plusieurs personnes. Je pense, M. le Président, qu'en l'an 2002 c'est là une stratégie inacceptable. On doit... Après tout, on touche au secteur financier, là. On est en train d'examiner une façon de fonctionner au Québec qui répond davantage aux besoins des Québécois et Québécoises, il me semble qu'on devrait être libre de pouvoir s'exprimer librement. Que l'on relève d'un organisme comme la Commission des valeurs mobilières, de l'Inspecteur général des institutions financières ou du Bureau des services financiers, il me semble qu'on devrait être capable d'entendre ces gens-là. Or, ces gens-là n'étaient pas inclus dans la liste.

Alors, M. le Président, si la ministre veut entendre... est sincère quand elle dit qu'elle veut entendre les parties, moi, je lui dis: Mais comment se fait-il que vous n'avez pas pensé d'inclure les premiers affectés par votre projet de loi? Il me semble que c'est le principe n° 1 d'une consultation. Si vous allez changer mon fonctionnement et je crois dans ce que je fais, il me semble que vous allez, bien sûr, m'inviter à aller témoigner pour être sûr que ou je supporte ou je propose des modifications.

M. le Président, ce projet de loi, n'est-ce pas, il se voulait... Je pense qu'il se voulait une espèce de réforme magistrale où tout le monde embarquerait, parce qu'un des messages que laissait courir le ministère des Finances, c'était que tout le monde était d'accord. Là, le chat est en train de sortir du sac. Ce n'est pas vrai, là, que tout le monde est d'accord, il va y en avoir, des gens, qui s'opposent. Il y a plusieurs personnes qui vont s'opposer au projet de loi.

Alors, M. le Président, moi, j'invite la ministre des Finances à bien écouter les intervenants qui vont venir témoigner en commission parlementaire. J'invite la ministre des Finances à démontrer de beaucoup d'ouverture et de ne pas limiter, parce que nous sommes pressés, ce projet de loi, de ne pas limiter les intervenants, parce que c'est trop important. On risque de vivre avec ce projet de loi là, avec cette loi longtemps, et je pense qu'il faut... Si on est pour faire le travail, qu'on le fasse bien, qu'on écoute les gens et qu'on s'assure que les choses vont se dérouler harmonieusement, et que ce ne soit pas encore quelque chose de poussé à toute vitesse pour avoir le projet de loi, comme on le souhaitait, avant la fin de cette session, à la fin de juin.

M. le Président, je pense que c'est évident qu'il fallait réfléchir sur ce projet de loi là, c'est trop important. Et, manifestement, M. le Président, je ne pourrai pas appuyer le projet de loi, tout simplement parce que vous comprenez que, fondamentalement, je suis contre la façon dont c'est formulé et, deuxièmement, je pense qu'il faut qu'on ait au moins... Au moins, qu'on entende les gens, qu'est-ce qu'ils ont à dire sur ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Y a-t-il d'autres collègues qui souhaitent intervenir sur le projet de loi n° 107?

Alors, puisqu'il n'y a pas d'autres interventions, le projet de loi...

Mme Marois: ...

Le Vice-Président (M. Beaulne): Mme la ministre, allez-y.

Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Alors, si vous permettez, M. le Président, je vais faire quelques remarques pour clore les débats sur l'adoption de principe du projet de loi.

D'abord, une première chose, M. le Président, j'ai moi-même indiqué à notre collègue de Marguerite-Bourgeoys que j'étais prête à prendre tout le temps nécessaire pour procéder aux consultations et je n'ai pas d'objection à ce que nous invitions les organismes qui souhaitent se faire entendre. Je suis, à cet égard, tout à fait disponible et je n'ai aucune réserve, M. le Président.

Cependant, il faudrait que la députée de Marguerite-Bourgeoys se souvienne que ce projet de loi a été préparé dans la foulée d'un rapport unanime qui nous a été fait par une commission, présidée par Me Martineau, qui réunissait des représentants de toutes les institutions, les grandes institutions financières et du domaine de l'assurance du Québec, dont certains étaient des gens qui n'avaient plus de lien direct avec le travail au quotidien dans ces institutions, mais qui avaient une longue expérience de ce qui s'y passe, et que ce rapport unanime nous a été remis et recommandait ce que nous retrouvons dans le projet de loi. Donc, je l'inviterais aussi à se rappeler que ce n'est pas un projet qui a été concocté seulement à l'intérieur du ministère des Finances par des professionnels du ministère des Finances, mais il est le résultat d'une consultation auquel a procédé la commission Martineau et, encore une fois, je le répète, d'une recommandation unanime de ses membres.

n(22 h 20)n

Nous avons, pour l'essentiel, retenu ce que nous a proposé la commission Martineau, et le projet de loi qui est devant nous est donc le fruit de ce travail, oui, qui a été fait par le ministère des Finances, que j'ai supervisé, auquel j'ai donné mon aval, pour lequel j'ai recommandé un certain nombre d'orientations. Et, en ce sens, je crois qu'on ne peut dire maintenant qu'il s'agit d'un projet qui ne tiendrait pas compte de divers points de vue qui ont déjà été exprimés auprès de la commission Martineau elle-même.

Alors je voudrais, en réplique, M. le Président, démontrer l'importance, sur le plan des compétences du Québec, d'atteindre l'objectif d'avoir un organisme qui parle fort pour le Québec dans ces forums. Actuellement, dans le reste du Canada, on sent une forte tendance à la centralisation. Il y a bien quelques provinces qui, comme le Québec, tentent de protéger les intérêts et la compétence de leur juridiction, mais, dans plusieurs cas, la volonté d'avoir des règles uniformes et un régulateur unique au Canada y est très présente. Et, jusqu'à maintenant, les interventions publiques en la matière provenaient principalement de membres torontois de l'industrie financière et de l'Ontario en général. Mais, récemment, on se souviendra que l'ex-ministre fédéral des Finances, M. Martin, était intervenu publiquement pour mentionner que le statu quo avec 13 commissions ne fonctionne pas et qu'il y aurait lieu d'établir un ensemble de règles communes à travers le Canada. Il ne proposait pas un régulateur unique, mais un ensemble de règles uniformes au Canada.

En plus des voix qui s'élèvent pour prôner une centralisation, il y a des gestes concrets qui se posent également et qui vont dans le sens d'une telle centralisation. En pratique, cela se traduit, M. le Président, par une diminution ou, du moins, par une intrusion dans les champs de compétence du Québec. M. le Président, il existe, pour les divers domaines du secteur financier ? valeurs mobilières, assurances, etc. ? différents forums pancanadiens auxquels participent les organismes d'encadrement de chaque juridiction. Ces forums, auxquels participe le Québec, visent pour l'essentiel à harmoniser les législations des provinces et à partager les problématiques communes.

Il y a d'abord les Autorités canadiennes en valeurs mobilières, un forum qui regroupe les 13 autorités de réglementation en valeurs mobilières des provinces et territoires canadiens, et c'est la Commission des valeurs mobilières du Québec qui représente le Québec à ce forum. Ensuite, il y a le Conseil canadien des responsables de la réglementation d'assurance, qui regroupe les différents organismes d'encadrement des provinces dans le domaine de l'assurance et auquel participe le palier fédéral par l'entremise du Bureau du surintendant des institutions financières. C'est l'Inspecteur général des institutions financières qui représente le Québec à ce forum. Et, comme dernier forum sectoriel, on retrouve les Organisations d'encadrement des services d'assurance du Canada, un forum qui regroupe des organismes gouvernementaux ou d'autoréglementation qui encadrent la distribution de produits d'assurance. Ce sont trois organismes qui représentent le Québec à ce forum, soit le Bureau des services financiers, la Chambre de la sécurité financière et la Chambre de l'assurance de dommages.

L'Ontario, qui a déjà regroupé l'encadrement des fonds de pension, des institutions financières et de la distribution des produits d'assurance dans la Commission financière de l'Ontario et qui a annoncé la fusion de cet organisme avec la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario pour se doter d'un seul organisme d'encadrement, a une influence prépondérante sur les travaux de ces forums de réglementation du secteur financier dont je viens de faire mention. Suite à la fusion, l'Ontario n'aura plus qu'un seul représentant à chacun de ces forums, soit la Commission ontarienne des services financiers.

Mme la Présidente, actuellement, pardon, M. le Président ? il arrive que ce soit Mme la présidente qui occupe le siège... Alors, M. le Président, actuellement, si vous avez bien compté, ce sont cinq organismes d'encadrement différents du Québec qui siègent aux différents forums. De plus, comme tous ces forums sectoriels se sont regroupés au sein du forum conjoint des autorités de réglementation du marché financier, la présence ontarienne dans tous ces forums y est très forte, notamment parce qu'elle est moins morcelée que celle du Québec. Lorsqu'on sait que c'est l'Ontario qui assume le leadership de ceux qui veulent une centralisation, je crois qu'il faut que le Québec parle d'une voix forte et unie pour être en mesure d'y faire contrepoids.

Un deuxième exemple qui démontre la nécessité d'un encadrement mieux intégré au Québec nous vient des lois fédérales, et plus particulièrement de la Loi sur l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, communément appelé le projet de loi C-8, M. le Président. Dans cette loi qui a modifié plusieurs lois fédérales du secteur financier, le gouvernement fédéral s'est donné un pouvoir d'intervention en matière de protection du consommateur. Ainsi, il s'est octroyé le pouvoir de reconnaître un organisme dont la mission est d'examiner les plaintes des personnes insatisfaites des conclusions de leur réclamation vis-à-vis une personne qui lui a fourni des produits et services financiers. Les banques sont tenues d'y adhérer, tandis que les sociétés d'assurance et les sociétés de fiducie devront y adhérer s'il n'y a pas de système semblable dans la province. Évidemment, selon le gouvernement fédéral, ce système s'appliquera sans distinction des juridictions et sans tenir compte de l'opposition manifestée par le Québec.

Face à cette situation et à l'initiative du gouvernement fédéral, l'industrie financière canadienne, par l'entremise des organisations représentatives, soit l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, l'Association des banquiers canadiens, le Bureau d'assurance du Canada, l'Institut canadien des fonds d'investissement et l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, a créé une organisation qui satisferait les exigences du gouvernement fédéral. Cette organisation a pour nom le Réseau de conciliation du secteur financier. La mise en place d'une telle organisation a un double avantage pour le gouvernement fédéral: premièrement, il peut argumenter qu'il n'a rien à voir avec la création de cette organisation, car elle provient de l'industrie; et, deuxièmement, compte tenu que les organisations regroupent les compagnies à charte provinciale autant que fédérale, il cherche à prendre le contrôle du traitement des plaintes à travers le Canada par l'entremise de ce réseau de conciliation. Ainsi, un consommateur québécois qui fait affaire avec un courtier québécois pourrait voir sa plainte traitée à Toronto. Encore une fois, pour contrecarrer cette initiative, nous devons avoir, de notre côté, un organisme fort dont la mission concernera entre autres l'assistance aux consommateurs québécois.

M. le Président, compte tenu de l'importance d'unifier la voix du Québec aux tables d'harmonisation des réglementations dans la défense de ses champs de compétence, je pourrais vous citer d'autres exemples de cette centralisation. Entre autres, le gouvernement de l'Ontario et certaines autres provinces ont récemment reconnu la Mutual Fund Dealers Association à titre d'organisme d'autoréglementation responsable de la réglementation et de la surveillance de ses membres. Cette Association est une association de courtiers en épargne collective, c'est-à-dire en fonds communs de placement. Tous les courtiers qui font affaire en Ontario ou dans les provinces qui ont reconnu cet organisme d'autoréglementation doivent en être membres. Certains courtiers québécois, régis au Québec par le Bureau des services financiers en vertu de la Loi sur la distribution des produits et services financiers et qui font affaire en Ontario et dans d'autres provinces, doivent donc être membres de cette organisation et se conformer à ses règles. Cela serait normal si cette Association ne profitait pas de l'occasion pour tenter de leur imposer ses règles également sur le territoire du Québec. Encore une fois, il nous faut un organisme fort, crédible pour faire face à cette situation en fonction de nos compétences.

En guise de conclusion, M. le Président, l'analyse des divers éléments que j'ai mentionnés nous amène à conclure que les tendances centralisatrices, dans le secteur financier comme dans plusieurs autres secteurs, menacent le Québec. Ainsi, pour protéger les champs de compétence du Québec, les outils qu'il a mis en place au fil des ans pour le développement de notre secteur financier et de notre économie, il faut avoir un organisme fort, crédible, qui parle d'une seule voix pour faire contrepoids à une vision centralisatrice.

Bien sûr, M. le Président, j'appuierai l'adoption du principe du projet de loi n° 107, car il va dans le sens de l'intérêt du Québec, et j'invite tous les députés à faire de même, M. le Président. Je vous remercie.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la ministre. Puisqu'il n'y a pas d'autres interventions, est-ce que le principe du projet de loi n° 107, Loi sur l'Agence nationale d'encadrement du secteur financier, est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

n(22 h 30)n

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission des finances publiques

Mme Vermette: Oui. M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques et pour que la ministre d'État à l'Économie et aux Finances en soit membre.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci. Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Alors, Mme la leader adjointe.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais de vous référer à l'article 43 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 94

Adoption

Le Vice-Président (M. Beaulne): À l'article 43 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales et de la Métropole propose l'adoption du projet de loi n° 94, Loi concernant la Ville de Montréal.

Une voix: Il n'y a pas d'interventions.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Il n'y a pas d'interventions? M. le leader adjoint du gouvernement... de l'opposition.

M. Mulcair: Oui. C'est pour dans six mois qu'on va passer de l'autre côté, M. le Président. Dois-je comprendre que le ministre des Affaires municipales et de la Métropole ne parlerait pas sur ce projet de loi sur Montréal? Alors, ceci étant, justement, ça va être adopté sur division, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Beaulne): Bien. Alors, le projet de loi est adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais de référer à l'article 38, s'il vous plaît, du feuilleton.

Projet de loi n° 83

Adoption

Le Vice-Président (M. Beaulne): À l'article 38 du feuilleton, M. le ministre de l'Éducation propose l'adoption du projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux études. M. le ministre de l'Éducation.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. J'ai le plaisir de soumettre aujourd'hui le projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux études, pour son adoption par l'Assemblée nationale. Ce projet de loi a été présenté à l'Assemblée le 30 avril dernier et le principe en a été adopté le 9 mai. La commission de l'éducation en a fait une étude détaillée le 30 mai, et nous avons adopté le rapport de cette commission.

Je souhaite profiter de l'occasion pour souligner l'excellente collaboration de tous les membres de l'Assemblée nationale au bon déroulement des travaux sur ce projet de loi. La teneur de nos échanges me permet de dire qu'il se dégage manifestement un consensus autour de ce projet de loi.

Je rappelle, M. le Président, que ce projet de loi modifie la Loi sur l'aide financière aux études afin d'instituer le Programme de prêts pour les études secondaires en formation professionnelle à temps partiel et pour les études postsecondaires à temps partiel. Ce projet de loi prévoit qu'une aide financière sous forme de prêt est accessible aux personnes dont les ressources financières annuelles sont inférieures au seuil d'admissibilité déterminé par règlement. Il prévoit également que le ministre de l'Éducation assumera les intérêts sur le prêt consenti pendant que l'emprunteur est aux études. Enfin, ce projet de loi prévoit des modifications au Programme de prêts et bourses afin de permettre à certaines personnes qui poursuivent leurs études à temps partiel, en raison de leur situation familiale, de bénéficier de ce programme d'aide financière.

Le gouvernement du Québec, vous vous en rappellerez, M. le Président, avait annoncé la mise en place du Programme de prêts pour les études à temps partiel lors du discours sur le budget 2001-2002. La mesure annoncée prévoyait la couverture des frais de scolarité, des frais de matériel scolaire et des frais de garde. Il s'agit d'une mesure qui ajoute 7,2 millions de dollars par année au régime d'aide financière aux études. Cette mesure vise plus de 30 000 élèves, étudiantes et étudiants et représente un volume de prêts totalisant 36 millions de dollars.

La présentation de ce projet de loi permet de concrétiser l'un des engagements que le gouvernement du Parti québécois avait formulés: offrir un soutien financier aux étudiantes et aux étudiants à temps partiel. Ce projet de loi donne également suite à des demandes de certains groupes qui souhaiteraient la mise en place d'un programme d'aide financière pour les études à temps partiel. De plus, la présentation de ce projet de loi s'inscrit dans le contexte de la volonté du gouvernement de favoriser et de soutenir l'éducation des adultes et la formation continue. Nous avons récemment exprimé cette volonté en termes très concrets dans la politique gouvernementale d'éducation des adultes et de formation continue et le plan d'action en découlant que j'ai présentés avec ma collègue la ministre déléguée à l'Emploi.

De plus, je rappelle que ce projet de loi prévoit une modification au Programme actuel de prêts et bourses. Ainsi, certaines personnes qui poursuivent leurs études à temps partiel en raison de leur situation familiale pourront être reconnues sur le même pied que les personnes étudiant à temps plein aux fins de leur admissibilité au Programme de prêts et bourses. Cette mesure touchera principalement les responsables de famille monoparentale et les élèves et étudiantes qui ont des enfants en bas âge. Elle les aidera donc, M. le Président, à concilier leurs obligations familiales et leurs études.

Avant de terminer, je souligne que, pour compléter la mise en place de ce programme, nous apporterons des modifications au Règlement sur l'aide financière aux études. Ce règlement précisera les différentes modalités d'application de ce projet de loi. À la suite des décisions du Conseil des ministres, le projet de loi sera... le projet de règlement, plutôt, sera soumis à la population par voie de prépublication dans la Gazette officielle du Québec. Dans le cadre de cette consultation, nous inviterons le Comité consultatif sur l'accessibilité financière aux études à présenter son avis. Cela se fera conformément aux dispositions de la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation. Je vous rappelle que ce Comité a notamment pour mandat de conseiller le ministre de l'Éducation sur tout projet de règlement relatif à l'aide financière aux études.

En conclusion, M. le Président, ce projet de loi renferme des mesures importantes qui faciliteront l'accès aux études pour les Québécoises et les Québécois. Ce projet de loi s'insère aussi dans la volonté de ce gouvernement de favoriser la formation continue. L'ensemble de ces mesures font consensus auprès de tous les groupes intéressés par les études à temps partiel. J'ai donc le plaisir d'inviter tous les membres de cette Assemblée à voter en faveur de l'adoption du projet de loi n° 83.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le député de Westmount?Saint-Louis et porte-parole de l'opposition officielle, entre autres, en matière d'enseignement supérieur. M. le député, vous avez la parole.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole sur ce projet de loi. Effectivement, nous avons accordé notre appui au principe, nous avons accordé notre appui tout au long du travail en commission parlementaire article par article sur ce projet de loi là parce que, effectivement, il arrive généralement quelques fois par session, je dirais, par session parlementaire... par Législature, je devrais plutôt dire, qu'un ministre de l'Éducation arrive avec des modifications qui viennent apporter une amélioration au régime d'aide financière aux étudiants, et c'est le cas aujourd'hui, et c'est le cas aujourd'hui, il n'y a pas de secret dans cette question-là, des étudiants à temps partiel et particulièrement des étudiantes à temps partiel, je devrais dire ? le ministre aurait pu le dire davantage; je vais me faire le plaisir de le dire à sa place ? des étudiantes à temps partiel et des étudiantes souvent qui sont dans des situations difficiles sur le plan économique, des étudiantes qui sont parfois mères... souvent mères célibataires ou encore des jeunes femmes en charge d'une famille, qui, pour des raisons de motivation personnelle, des raisons d'amélioration de... de volonté d'améliorer leur sort, font en sorte de vouloir retourner sur le marché des études tout en travaillant, mais éventuellement pour améliorer effectivement leurs connaissances et aussi le sort des leurs, leur sort et le sort de leur famille.

Ce projet de loi a donc plusieurs qualités qui vont dans ce sens-là et il permettra à des étudiantes et des étudiants, tant du niveau secondaire, collégial qu'universitaire, de pouvoir justement, dans le cadre d'une formation continue, faire en sorte de parachever des études ou encore d'amorcer des études. Mais, bref, peu importe de quel côté de la Chambre que l'on soit, à partir du moment où on voit des gens qui veulent améliorer leur situation, améliorer leurs connaissances, améliorer leur niveau de formation, nous ne pourrons pas faire autrement que d'être conjointement et solidairement unis pour faire en sorte de s'assurer que cette situation-là soit améliorée.

n(22 h 40)n

Le ministre toutefois conviendra que j'ai un peu la tête dure, et je regrette, malheureusement, que dans son projet de loi il y ait quelque chose de tout à fait particulier, pas très drôle pour l'institution parlementaire que nous sommes, pas très drôle pour l'institution parlementaire que nous sommes et qui va à l'encontre de principes, à mon avis, de droit parlementaire qui sont importants. Je vous fais mention... et j'ai soulevé le problème en commission parlementaire auprès du ministre, soulevé le problème en deuxième lecture ici, et je ne peux pas ne pas soulever le problème une troisième fois, une dernière fois, sollicitant toujours de la part du ministre qu'il corrige cette question qui, pour probablement beaucoup de monde, est secondaire, mais, à mon avis, c'est une question de principe.

Je vais vous faire la lecture de deux articles du projet de loi, un premier article qui nous dit... qui nous signifie finalement ce que l'on définit comme des étudiants à temps partiel. L'article 32, section II, page 4: L'article 32: «Pour l'application de la présente section et sous réserve des règlements, "temps partiel" signifie, pour un trimestre:

«1° à l'ordre d'enseignement secondaire: 76 à 179 heures ? c'est le nombre d'heures dans lesquelles on... ce que l'on qualifie de temps partiel pour le niveau secondaire ? ou de 6 à 11 unités;

«2° à l'ordre d'enseignement collégial: 2 ou 3 cours ou 76 à 179 périodes.»

Donc, deux ou trois cours. On ne parlera pas des heures, mais, en général, les gens comprennent, au cégep, que c'est deux ou trois cours. Quand t'as deux ou trois cours, tu peux être considéré comme étant un étudiant à temps partiel.

«3° à l'ordre d'enseignement universitaire: de 6 à 11 unités.»

Il s'agit évidemment de crédits. Or ? jusque-là, tout va bien ? le problème découle du fait... un peu plus loin dans le projet de loi, au moment où on définit par les articles de règlement, les articles de règlement, c'est-à-dire les règlements qui vont faire en sorte que l'application... Et, en passant, je remercie le ministre de m'avoir fourni la liste des règlements qui m'ont permis de mieux comprendre le projet de loi. Je les lui avais demandés, il me les a gracieusement fournis. Je l'en remercie. Mais il n'en demeure pas moins que, dans le projet de loi, à l'article 8 de ce projet de loi là, 8.5°, on dit ceci, à la page 6: Par l'insertion, après le paragraphe 5° du premier alinéa, du suivant:

«5.1° modifier le sens de la définition de l'expression "temps partiel" prévue à l'article 32, pour chaque ordre d'enseignement ou pour certains programmes d'études.»

En deux mots, M. le Président, ce que l'on nous demande de faire ce soir, c'est ceci: d'adopter une loi qui contient une définition de ce qu'est l'enseignement à temps partiel en définissant, aux niveaux secondaire, collégial et universitaire, ce qu'est le temps partiel et, deuxièmement, en donnant le pouvoir au lieutenant-gouverneur en conseil de modifier par règlement ce que l'on retrouve dans la loi. Je trouve que cela n'a pas de bon sens, M. le Président. Je trouve qu'en droit parlementaire c'est quelque chose que l'on ne devrait jamais faire...

Une voix: Bravo!

M. Chagnon: ...ne jamais faire en sorte de donner au législateur... de donner, c'est-à-dire, au lieutenant-gouverneur en conseil, c'est-à-dire au gouvernement, le pouvoir d'unilatéralement faire en sorte, par règlement, de changer ce que les législateurs ont adopté dans une loi.

Je l'ai dit en commission parlementaire, je l'ai dit en première lecture, je l'ai dit en seconde lecture, je trouve ça éminemment regrettable. Je le dis puis je fais exprès pour venir le dire. Il est onze heures moins quart, je viens vous le dire pareil parce que je ne veux pas qu'éventuellement, dans six mois, un an, deux ans, cinq ans, un autre législateur, d'autres législateurs se servent de ce cas comme étant un cas de référence démontrant que cela pouvait être fait. C'est fait, là. On l'a devant nous. J'aurais préféré que le ministre le corrige soit en disant: Je sors le modèle de la loi et je le mets dans les règlements, ou, encore une fois: Je le laisse dans la loi et une autre loi viendra le corriger si un jour un autre ministre veut corriger les conditions déterminant quels sont les facteurs qui déterminent le temps partiel pour des étudiants. Mais, bref, je voulais faire en sorte et m'assurer que cette Chambre sache que, de mon côté, de notre côté, semble-t-il, en ce qui me concerne, le fait de permettre au lieutenant-gouverneur en conseil de changer par règlement une loi adoptée par l'Assemblée nationale contrevenait aux principes les plus élémentaires de l'organisation de notre droit.

Même si on recule dans la doctrine, même si on va voir de L'Esprit des lois de Montesquieu à ce qui a pu être écrit plus récemment par Bonenfant et autres, on verra partout, partout, partout, M. le Président, chez tous ces penseurs de l'organisation d'une société de droit qu'on ne doit pas laisser, on ne doit pas faire en sorte que des règlements viennent faire en sorte de modifier unilatéralement des lois adoptées par des législateurs.

C'était, M. le Président, le seul... c'était la raison majeure de mon intérêt pour parler particulièrement non seulement sur le fond de ce projet de loi là ? sur le fond, je vous ai dit: Nous sommes d'accord avec l'idée d'aider les étudiants, les étudiantes à temps partiel ? mais nous trouvons et je trouve personnellement qu'il y a une erreur majeure d'écriture sur le plan parlementaire dans ce projet de loi là, et je voulais vous le signifier. Je vous en remercie.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Westmount?Saint-Louis. Y a-t-il d'autres collègues qui souhaitent intervenir sur ce projet de loi? M. le député de Chomedey.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Oui. Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, je vais tenter de sensibiliser le ministre de l'Éducation à l'importance de faire le changement que mon collègue le député de Westmount?Saint-Louis vient de lui suggérer. J'ai connu le ministre de l'Éducation avant qu'il soit ministre. Il était le président de la commission des institutions. Je dois vous dire que, même si on siège de différents côtés dans cette Chambre, c'est un gentleman, quelqu'un qui comprenait les institutions et quelqu'un qui les respectait et les faisait respecter, par ce fait même. Je suis extrêmement surpris de voir le ministre avec la gestuelle qu'il faisait lorsque mon collègue le député de Westmount?Saint-Louis lui parlait très correctement de ça. C'était: Pfft! pas d'importance, ça.

M. le Président, le ministre sait mieux que quiconque que ce qu'il est en train de faire ici est une erreur. Mais ça prouve une chose, et je pense que c'est une leçon pour tous les parlementaires: même les gens les plus forts, les plus intelligents sont capables de se faire avaler tout rond par la fonction publique, par les administrateurs. Le ministre le sait, que ça n'a pas de bon sens de laisser traîner ce projet de loi ? une fois adopté, ça deviendra une loi ? avec une disposition comme celle-là qui ne veut peut-être rien dire. Nul n'est censé ignorer la loi. Et vous savez où les lois se trouvent aujourd'hui, c'est sur l'Internet. Dans les établissements scolaires, le secondaire, le cégep, l'université, lorsqu'on va vouloir savoir c'est quoi, la définition de «temps partiel», c'est facile, on va sur Internet ou on a une copie de la loi dans une brochure, et on regarde, et on dit: Ah! c'est défini à l'article 32, «temps partiel» signifie: pour le secondaire, tant d'heures, pour le collégial, tant d'heures, universitaire, tant de crédits, et ainsi de suite. C'est clair, c'est écrit là-dedans. Sauf que, plus tard dans la loi ? et c'est ça qui n'a pas de bon sens, et c'est pour ça que mon collègue le député de Westmount?Saint-Louis a tellement raison ? plus tard à l'article 9, quand on est en train de changer un tas d'autres choses dans cette même loi, on dit ceci: on a le droit de faire par règlement, on a le droit de modifier le sens de la définition, de l'expression «temps partiel» prévue à 32. Eh oui, c'est ça qui est écrit. Eh bien, oui.

Une voix: ...

M. Mulcair: Bien non. Alors, changeons-le. L'effet de ça, peu importe comment on le prend, M. le Président, c'est que, par règlement, que ce soit pour changer le sens, ça veut dire quoi? Ça veut dire changer la définition. Bien oui! Par règlement on va pouvoir changer la loi, et c'est pour ça que, si le ministre a besoin de s'en convaincre, M. le Président, il n'a qu'à lire la partie liminaire de l'article 32: «Pour l'application de la présente section et sous réserve des règlements...» Alors, on le dit, le règlement va l'emporter sur la loi. Pourquoi alors prendre la peine de le dire?

n(22 h 50)n

De deux choses l'une: ou on fait un article 32 qui dit tout simplement: Pour l'application de la présente section, le sens du terme «temps partiel» est défini par règlement ? pas de problème, on n'induit personne en erreur, ils vont aller chercher dans le règlement, ils vont trouver ? ou encore on dit, dans la section Définitions ? puis on biffe cet article complètement: On peut, par règlement, définir l'expression «temps partiel», pour les fins de la section II, pour chaque ordre d'enseignement ou pour certains programmes d'études. C'est ça qui est écrit. Le ministre est en train de s'en procurer une copie; il fait bien. Il va pouvoir se rendre compte que ce que mon collègue le député de Westmount?Saint-Louis dit et ce que je dis est vrai. Non, l'opposition n'a pas le droit de proposer un amendement à ce stade-ci,, mais tout est permissible par consentement et le ministre peut faire ce changement.

M. le Président, pour nous, ici, à l'Assemblée nationale, il y a des choses qu'on dit qui sont évidentes et qui sont souvent dites différemment dans le public. Combien de fois vous avez entendu aux nouvelles: Le gouvernement vient de faire adopter une loi? Hein, vous entendez ça souvent. Comme vice-président de l'Assemblée nationale, ça doit choquer un peu vos oreilles d'entendre qu'un gouvernement a adopté une loi, car ce n'est pas le gouvernement qui adopte les lois, c'est le Parlement, ce sont les élus ici, avec la sanction de Mme la lieutenante-gouverneure, représentant l'autorité de la monarchie, qui est notre chef d'État ici, au Canada.

Les règlements, c'est quoi? On entend ça tout le temps, les lois puis les règlements, puis le monde ne fait pas la différence. Mais, ici, à l'Assemblée nationale, on adopte les lois, c'est le cadre de référence. Je vais donner un exemple très simple, très clair. En matière de CSST ? puis tout le monde comprend, les accidents du travail ? on fait le cadre ici, on fait la loi, on établit la Commission, on fait ses règles, comment ça va fonctionner pour les réclamations, les appels, et ainsi de suite, mais ce n'est pas vrai qu'ici, à l'Assemblée nationale, on va commencer à s'asseoir entre députés et décider que telle limitation dans les doigts ou telle limitation suite à un accident, ça va être compensé tel, tel pour cent. Et pourtant il y a des livres de règlements qui viennent nous donner ces détails-là, puis c'est une bonne chose, parce qu'on ne pourrait pas faire tout ce détail-là ici, en Chambre.

Le ministre a été très correct, mon collègue le député de Westmount?Saint-Louis l'a dit tantôt: Merci beaucoup, il m'a donné les règlements d'avance. Ça permet de savoir ce sur quoi on est en train de voter. Et c'était effectivement très correct. Parce que souvent on nous demande...

Dans le domaine du cochon, le porc, ça n'a pas de bon sens, ce qu'on nous demande de faire, de voter une loi, puis on ne sait même pas ce qui va être dans le règlement, puis c'est le règlement qui va contenir l'essentiel, puis c'est un débat intéressant pour la santé publique ? en première page du Journal de Québec aujourd'hui encore une fois. Mais le ministre responsable de l'Environnement et de l'Eau, il dit: Ce n'est pas grave, ça, si le public n'est pas au courant de ce que je veux mettre dans le règlement. Mais il y a une grosse différence entre une loi et un règlement. Les lois font l'objet d'un débat public. C'est pour ça que j'ai dit tantôt que c'était surprenant de voir un ministre comme ça en train de se faire avaler tout rond par ses fonctionnaires. Parce que ce qui s'est passé ici, c'est que l'article en question, ça, c'est un article de la fonction publique. Ça, c'est un article qui a été mis là par la machine, pour la machine. Ça, c'est la bureaucratie en train de dire à son ministre: Eh, boss, coudon, là, si, nous, on décide de changer ça, aïe! on n'est pas pour retourner à l'Assemblée nationale! Franchement! On va le faire entre nous autres, puis tu vas juste le mettre dans la Gazette officielle.

Avez-vous passé beaucoup... Vous êtes vice-président de l'Assemblée nationale, M. le Président. Passez-vous beaucoup de temps à tourner les pages de la Gazette officielle du Québec? Il y a 99 % de la population qui ne sont même pas au courant que ça existe, la Gazette officielle du Québec, puis avec raison, ça ne fait pas partie de leur vie. Même quelqu'un qui est sur son chantier, ou dans son atelier, ou dans son laboratoire travaille avec des règlements. Ils ont les bouts qui les concernent, eux autres, mais ils ne regardent pas dans la Gazette officielle du Québec pour voir la publication, dans la première partie, des lois et règlements puis, dans la deuxième partie, des décrets puis toutes ces affaires-là. La Gazette officielle du Québec, pour une année, ça remplit... dans un bureau, là, ça remplit quasiment une bibliothèque complète à chaque année. Le monde ne va pas ça. Mais c'est là-dedans, c'est juste là où le règlement va paraître. Il n'y aura jamais de débat public là-dessus, il n'y a pas de débat sur les règlements, à moins qu'une commission parlementaire se saisisse d'un mandat d'initiative, ce qui est extrêmement rare. On a essayé, nous, plusieurs fois de faire des mandats d'initiative là-dessus. Le gouvernement a la majorité. Devinez quoi. Il nous le refuse.

Alors, ici, on fait appel à l'intelligence évidemment et au gros bon sens d'habitude évident du ministre de l'Éducation puis on lui dit: On est prêts à vous aider, on est capables de réaliser la rédaction en question en dedans de cinq minutes. On peut corriger ce qui est une erreur évidente dans la loi. Pourquoi on ne le fait pas? Si on veut dire dans la loi que ça, c'est la définition de «temps partiel», pas de problème, on enlève le pouvoir de le changer par règlement. J'ai entendu le ministre tantôt vociférer que, ah! ce n'était pas vraiment pour changer, c'était juste pour modifier la définition de l'expression «temps partiel». Allo! Ça veut dire quoi, ça, si ça ne veut pas dire qu'on peut changer ce qui est écrit dans la loi? Puis, par ailleurs, quand on dit, à l'article 32: «Pour l'application de la présente section et sous réserve des règlements», c'est ça que ça veut dire. On est en train de dire que la loi, qui, dans la hiérarchie des règles, est suprême parce que c'est adopté ici ouvertement, publiquement par les élus du peuple de part et d'autre...

Oh! par ailleurs, P.-S.: On est d'accord avec la loi, on va voter pour, mais il y a un bout là-dedans qui, à notre sens, ne marche pas. Et j'espère juste qu'on ne nous fera pas de leçons de morale sur l'importance des prêts et bourses et du système. Je viens d'une famille... Mes parents ont élevé 10 enfants. Je vous garantis que je n'aurais jamais pu faire deux licences en droit à l'Université McGill si ce n'était pas pour notre système de prêts et bourses. J'y crois, je vais voter pour la loi, mais je crois aussi dans l'importance de nos institutions et je crois que le ministre y croit aussi et est capable de se rendre compte qu'il fait une erreur.

Cette loi-là va être publiée, va être distribuée avec ses commentaires, avec cette définition-là, et le monde ne le saura même pas. Ça va continuer à traîner comme ça avec cette définition-là. Puis, si ça a été modifié par un changement à la Gazette officielle du Québec, le monde ne le saura même pas. J'espère que le ministre va être d'accord avec nous. On peut suspendre cinq minutes, trouver une rédaction qui convienne de part et d'autre. On lui offre toute notre collaboration. Il devrait le faire, c'est dans l'intérêt de l'administration des prêts et bourses, dans l'intérêt des gens qui doivent travailler avec cette loi tous les jours et dans l'intérêt du respect de notre Parlement, M. le Président. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Chomedey. Y a-t-il d'autres interventions à cette étape-ci? Alors, M. le ministre, pour votre réplique.

M. Sylvain Simard (réplique)

M. Simard (Richelieu): Quelques secondes, M. le Président, pour répliquer aux arguments juridiques de mon savant confrère. Je suis, comme lui, très soucieux de nous assurer que nous rédigeons des lois qui soient conformes à la volonté du législateur, lisibles par nos concitoyens et, évidemment, fondamentalement justifiées par l'intérêt public. Ici, je veux simplement vous dire que, de façon pratique, concrète, pour reprendre le début de l'exposé du député de Chomedey, les étudiants du Québec, à temps partiel ou à temps complet, qui désirent s'informer sur les prêts et bourses le font à partir de la documentation publiée par le ministère de l'Éducation ou mise sur notre site Internet, et je n'ai encore jamais vu quelqu'un dans ma vie se référer à la loi quant à l'application des différents règlements du régime des prêts et bourses. Donc, au plan pratique, là, je pense que l'argument n'est pas très fort.

Au plan juridique, je suis étonné qu'un juriste de la valeur du député de Chomedey n'ait pas compris que le but de la loi, c'est de définir les grandes orientations qui devront guider les gouvernements dans la rédaction des règlements qui suivent la loi. S'il n'y avait aucun cadre dans la loi, la définition de «temps partiel» pourrait varier de façon considérable.

Ce qui varie, dans la vie, c'est que les universités peuvent définir différemment les différentes unités auxquelles nous référons. On peut très bien décider, dans telle université, que, pour le programme de maîtrise, le nombre d'unités exigé ait changé radicalement. Ça s'est vu très souvent au cours des années. Je suis issu du monde universitaire et j'ai vu régulièrement les systèmes d'évaluation d'unités transformés. Et, à ce moment-là, quel serait le cadre de référence auquel les juristes, y compris d'ailleurs les simples citoyens, devraient se référer pour comprendre la loi, et ensuite les gouvernements, pour modifier la loi? Ce sont les termes de la loi telle que nous la voterons, je l'espère, ce soir.

n(23 heures)n

Le cadre général, le sens de ce qu'est «études à temps partiel» apparaît dans la loi, ensuite pourra être modifié par règlement, mais devra toujours respecter, dans l'interprétation que l'on donnera de la loi et de la validité du règlement, devra toujours respecter l'esprit de l'article de la loi tel qu'il est rédigé. Lorsque le législateur modifiera, comme la loi l'y autorise ? c'est dans le projet de loi lui-même... Il est prévu, dans l'article, que cet article peut être modifié par règlement mais devra nécessairement s'inspirer de l'article tel qu'il est rédigé, puisque que l'esprit des lois, pour revenir à Montesquieu, l'esprit des lois est l'esprit qui est adopté par le législateur et qui ne pourra pas être interprété autrement que techniquement par le rédacteur des règlements, les rédacteurs subséquents des règlements.

Alors, je crois qu'il y a là une erreur de perspective. La loi fixe, pour l'instant, ce qu'est la définition des études à temps partiel, mais, au-delà de cette définition temporaire, puisqu'elle est modifiable dans le temps, puisque la valeur des unités concernées peut être transformée, elle fixe l'esprit de ce qui devra être considéré par les auteurs, les législateurs, les auteurs de règlements pour interpréter ensuite cette loi. Je pense que nous avons là ici non pas une contradiction, mais une logique normale de rédaction qui, dans d'autres systèmes législatifs ? et nous pourrions ici faire un débat intéressant sur le droit français et le droit anglais ? dans d'autres systèmes législatifs pourrait effectivement être totalement inversée.

Mais je crois ici que nous respectons parfaitement l'esprit du parlementarisme pour revenir à l'essentiel de ce projet de loi, qui va permettre, ainsi que le soulignait le député de Westmount, à des mères de familles monoparentales de pouvoir retrouver l'espoir et retourner aux études, pouvoir permettre à des milliers d'étudiants et d'étudiantes québécois d'avoir enfin l'espoir de refaire une vie, de retourner sur le marché de travail parce qu'ils auront pu retourner aux études grâce à ce Programme de prêts. M. le Président, je suis tout à fait convaincu que tous les parlementaires dans cette Chambre seront très heureux, ce soir, d'adopter ce projet de loi tel qu'il est rédigé.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Puisqu'il n'y pas d'autres interventions, est-ce que le projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux études, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Oui. Alors, M. le Président, je vous demanderais de référer à l'article 37, s'il vous plaît, du feuilleton.

Projet de loi n° 66

Adoption

Le Vice-Président (M. Beaulne): À l'article 37 du feuilleton, M. le ministre de l'Éducation propose l'adoption du projet de loi n° 66, Loi modifiant la Loi sur les élections scolaires. M. le ministre.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. À la suite d'une consultation et de l'étude détaillée en commission parlementaire... D'ailleurs, en commission parlementaire, je veux remercier tous les parlementaires qui ont participé à l'étude de ce projet de loi et en particulier le responsable de ce dossier pour l'opposition officielle, le député de Vaudreuil. Je crois que les parlementaires ont fait un travail constructif, ont modifié d'ailleurs le projet de loi sous plusieurs aspects de façon à le rendre plus pertinent. Et nous avons donc adopté article par article le projet de loi modifiant la Loi sur les élections scolaires.

Ce présent projet de loi complète la révision de la Loi sur les élections scolaires. En décembre 2000, nous avons adopté des modifications afin de permettre la mise à jour annuelle de la liste électorale permanente aux fins d'élections scolaires. En décembre 2001, la loi reportant la date de la prochaine élection scolaire générale et modifiant la Loi sur les élections scolaires a établi de nouvelles règles pour la division du territoire des commissions scolaires en circonscriptions électorales.

Ce projet de loi que nous avons devant nous vise d'abord à favoriser la participation électorale. Tous les participants à la consultation sur le projet de loi conviennent de la nécessité de hausser le taux de participation. Nous avons analysé divers moyens pour y arriver et voici ceux que nous avons retenus: d'abord, confier un mandat spécifique au Directeur général des élections en matière d'information du public; ensuite, poursuivre la sensibilisation de la population aux enjeux liés à la réussite éducative et à l'importance du rôle des commissaires; ensuite, favoriser l'utilisation de nouveaux mécanismes de votation, comme le vote par courrier. Nous voulons aussi devancer la période de mise en candidature dans le calendrier électoral et allonger la période de campagne, permettre aux candidats de recueillir des contributions financières, coordonner les élections scolaires et les élections municipales en alternance aux deux ans.

D'ailleurs, dans la foulée des consultations qui ont entouré le présent projet de loi, j'ai l'intention de mettre sur pied un comité regroupant des représentants du ministère de l'Éducation, du ministère des Affaires municipales, des unions municipales, de la Fédération des commissions scolaires et de l'Association des commissions scolaires anglophones. Ce comité, M. le Président, étudiera la possibilité de tenir les élections scolaires à date fixe en même temps que les élections municipales plutôt qu'en alternance.

L'élection des commissaires doit être un événement démocratique mené selon un processus électoral rigoureux et transparent parce que c'est l'occasion pour la population de choisir les personnes les plus représentatives de la collectivité afin d'offrir aux élèves les meilleures conditions d'apprentissage en vue de leur réussite éducative. Le Québec confie annuellement près de 7 milliards de dollars aux commissions scolaires pour leur permettre d'instruire, de qualifier et de socialiser nos enfants. Il appartient donc au Conseil des commissaires de répartir équitablement les ressources financières entre les établissements et d'organiser l'offre de services éducatifs sur un territoire donné.

Le présent projet de loi propose aussi des améliorations au processus électoral. Ces améliorations traduisent notre préoccupation d'harmoniser les dispositions législatives de la Loi sur les élections scolaires avec celles de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités ainsi qu'avec celles de la Loi électorale.

Cependant, nous avons évidemment pris en considération les particularités du monde scolaire, comme nous l'ont signalé d'ailleurs de nombreux intervenants: la dimension étendue de certains territoires; la superposition des territoires des commissions scolaires francophones et des commissions scolaires anglophones; le processus de confection et de mise à jour de la liste électorale continue, de la liste électorale scolaire; le cycle de gestion des commissions scolaires ? vous le savez, l'année scolaire s'étend du 1er juillet au 30 juin, ce qui est évidemment un cycle différent de plusieurs autres activités; les dispositions de la Loi sur l'instruction publique qui font en sorte que le Conseil des commissaires doive siéger pendant la période électorale.

Dans le présent projet de loi, l'organisation et la tenue des élections demeurent une responsabilité des commissions scolaires. La participation du Directeur général des élections consistera à assister et appuyer les présidents d'élection particulièrement au plan de l'information des électeurs. Le DGE assumera la formation du personnel électoral. Il formera aussi les candidats en matière de contrôle des contributions et des dépenses électorales.

Les organismes scolaires ont fait valoir les exigences de l'organisation d'une élection générale sur un vaste territoire et les délais du calendrier électoral prescrits par la loi. Le DGE transmettra donc la liste électorale au plus tard le quarante-cinquième jour précédant le scrutin sans que les commissions scolaires aient à le demander. En raison de son expertise en matière électorale, le Directeur général des élections aurait aussi le pouvoir d'émettre des directives et de faire enquête sur l'application de la loi. En période électorale ou en situation d'urgence, il serait habilité à adapter les dispositions de la Loi sur les élections scolaires.

Le calendrier scolaire conserve les mêmes étapes que celui adopté en 1989. Cependant, il serait sensiblement raccourci, passant de 75 jours précédant le scrutin à 44 jours. Le calendrier électoral proposé prévoit que les campagnes électorales dureront 27 jours plutôt qu'une quinzaine de jours, comme le prévoyait la loi adoptée en 1989. Cela devrait faciliter la tâche du candidat qui désire se faire connaître. Nous sommes des hommes et des femmes impliqués dans la chose publique et nous savons qu'une élection, surtout lorsque c'est la première, il faut d'abord se faire connaître. Quinze jours, c'était très court; 30 jours, cela permettra de présenter un programme mettant de l'avant des enjeux intéressants, et nous le souhaitons.

On produira désormais la liste électorale scolaire à partir de la liste électorale permanente, dont on met à jour les données aux fins scolaires au moins une fois par année. En période électorale, on pourra présenter par écrit une demande de radiation ou de correction ou encore une nouvelle inscription à la liste électorale scolaire du vingt-quatrième jour au dix-septième jour précédant le scrutin. Je sais que, M. le Président, cela demande un peu d'attention. Il y aura peut-être un petit test à la fin auprès de mes collègues pour vérifier s'ils ont retenu toutes ces dates. Il faudra présenter, M. le Président ? plus sérieusement ? cette demande au président d'élection ou à une personne désignée pour recevoir les demandes dans un lieu choisi par le président d'élection en fonction de sa proximité des électeurs ? les écoles, par exemple. Le président d'élection pourra nommer des agents réviseurs au service des commissions de révision. Les décisions des commissions de révision seront transmises au Directeur général des élections pour mettre à jour la liste électorale permanente.

n(23 h 10)n

Le projet de loi maintient le droit de choisir de voter à la commission scolaire anglophone, pour les électeurs qui n'ont pas d'enfants admis aux services éducatifs d'une commission scolaire, là où se trouve leur domicile. On consentira des efforts accrus d'information à l'intention des électeurs avec la participation des commissions scolaires anglophones et du Directeur général des élections. En période électorale, ces électeurs pourront faire leur choix par un avis écrit adressé au président d'élection ou à une personne désignée, ou encore par un avis présenté à la commission de révision de la commission scolaire anglophone.

Les nouvelles technologies permettent d'envisager d'autres mécanismes de votation que le dépôt de bulletin de vote dans l'urne installée dans un bureau de vote. Nous proposons donc de permettre aux commissions scolaires, avec l'accord du Directeur général des élections, d'utiliser un nouveau mécanisme de votation en prenant tous les moyens nécessaires, évidemment, pour protéger le secret du vote et s'assurer de l'identité de l'électeur.

Le projet de loi instaure aussi le contrôle du financement et du pouvoir de dépenser des candidats avant et pendant la période électorale. Les nombreuses dispositions qui encadrent les activités des candidats visent toutes, vous l'aurez compris, à garantir le financement populaire et la transparence dans les pratiques électorales. Les mécanismes de contrôle proposés sont évidemment proportionnels aux sommes mises en cause. Il ne s'agit donc pas d'imposer de lourdes tâches administratives aux candidates et candidats qui assumeraient leurs dépenses électorales à même leurs ressources financières personnelles.

En matière de contribution, seuls les électeurs de la commission scolaire auraient l'autorisation de contribuer au financement des candidats, pour un montant maximal de 1 000 $ par candidat. Pour leur part, les candidats dûment autorisés à solliciter et à recueillir des contributions devraient émettre des reçus et présenter à la commission scolaire, après les élections, la liste des personnes ayant contribué à leur financement pour un montant de 100 $ ou plus.

En matière de contrôle des dépenses électorales, il est proposé de déterminer un montant maximal des dépenses autorisées pendant une période électorale. Pour la très grande majorité des candidats ? 94 %, si on se fie aux dernières élections ? le montant maximal autorisé se situe entre 2 700 et 6 000 $. Il est aussi proposé d'obliger chaque candidat, qu'il fasse ou non partie d'une équipe, de déposer un rapport des dépenses électorales à la commission scolaire. On acheminerait alors une copie du rapport au Directeur général des élections pour lui permettre au besoin de faire enquête.

La mise à jour de la Loi sur les élections scolaires répond à des attentes qui ont été formulées par le Directeur général des élections dans son rapport sur les élections scolaires de 1998 et par des partenaires du monde scolaire, en particulier la Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec. Les changements proposés à la Loi sur les élections scolaires accordent aux commissions scolaires un rôle de premier plan dans l'organisation et la tenue des élections scolaires. Ils misent sur la responsabilité des candidats, font appel au sens civique des électeurs et instaurent des mécanismes de reddition de comptes en matière de contributions et de dépenses électorales.

Il ne s'agit pas, vous l'aurez compris, M. le Président, sans doute, dans l'histoire du parlementarisme, de la dernière loi sur les élections scolaires, mais je crois sincèrement et je crois que tous les parlementaires auront compris que ce projet de loi, que cette loi, que, j'espère, nous adopterons, facilitera grandement le déroulement démocratique de nos élections scolaires et surtout encouragera la participation des citoyens en plus grand nombre. Il est quand même extrêmement dommage que, lors des élections scolaires, très souvent nous voyions des taux de participation extrêmement bas, inférieurs très souvent à 10 %, ce qui, évidemment, entache grandement l'aspect démocratique d'une institution à laquelle nous sommes attachés, ce pouvoir local que constituent les commissions scolaires.

Alors, M. le Président, je crois que ce projet de loi facilitera les choses. Ce projet de loi encouragera les débats d'idées. Ce projet de loi facilitera la gestion du processus électoral. Et nous aurons, j'espère, au cours des prochaines années, une participation plus grande grâce surtout à l'utilisation de moyens modernes, de moyens innovateurs, que nous laissons à la discrétion des commissions scolaires en collaboration avec le Directeur général des élections.

Je tiens, en terminant, M. le Président, à remercier tous ceux et celles qui sont venus en commission parlementaire nous présenter leur point de vue, les parlementaires qui ont travaillé très assidûment à l'étude, à la modification, à l'amélioration et à la bonification du projet de loi que nous avons devant nous ce soir. Et je crois que nous aurons, lors de l'adoption de cette loi, toute raison de dire que nous avons fait un bon travail en améliorant la démocratie scolaire au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre de l'Éducation. Je cède maintenant la parole au député de Vaudreuil et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation. M. le député.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Alors, je suis heureux, à mon tour, de faire quelques commentaires sur le projet de loi n° 66, Loi modifiant la Loi sur les élections scolaires. C'est un projet de loi qui a été déposé le 11 décembre dernier, qui a été discuté ici, pour l'adoption du principe, en mars, qui subséquemment a fait l'objet de consultations particulières en commission parlementaire de l'éducation avec les groupes intéressés dans le domaine de l'éducation et, après, bien, l'étude en commission parlementaire article par article, où un certain nombre de changements ont été apportés à la suggestion soit des organismes qui sont venus faire les présentations devant la commission parlementaire, à la suggestion du ministre et également certains amendements qui ont été discutés, proposés par l'opposition. Et, à ce titre-là, je veux également souligner l'ouverture d'esprit du ministre. Je pense que les discussions ont été très franches, très ouvertes, et ça a permis aux membres de la commission de bonifier le projet de loi, d'apporter des améliorations importantes. Alors, je pense que ça s'est déroulé dans un climat très, très productif.

Ce projet de loi n° 66 fait suite à un premier projet de loi qui avait été adopté en décembre 2000, le projet de loi n° 146, qui, lui, prévoyait des dispositions obligeant les commissions scolaires à fournir au Directeur général des élections des renseignements requis pour permettre à ce dernier de maintenir à jour la liste électorale pour fins des élections scolaires. Il y a eu également, en décembre dernier, donc en décembre 2001, le projet de loi n° 59, qui, lui, d'abord, reportait la date des prochaines élections scolaires générales et, deuxièmement, qui prévoyait tout un mécanisme de division du territoire des commissions scolaires en circonscriptions électorales pour les fins d'organisation des élections scolaires, le tout sous la supervision du Directeur général des élections.

Le projet de loi n° 66, que nous étudions ce soir, d'une part, définit le rôle, définit mieux le rôle du Directeur général des élections dans la supervision de la tenue des élections générales scolaires en termes de formation du personnel, de supervision du déroulement des élections et également d'information des citoyens. D'autre part, ce projet de loi, également, établit tout un mécanisme qui est analogue à celui qu'on retrouve dans la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, touchant le financement des candidats, le contrôle des dépenses électorales, ce qui, d'une part, est susceptible d'encourager davantage, peut-être, de personnes à se présenter comme candidats, ce qui, d'autre part, assure également la transparence dans tout ce qui touche le déroulement des élections, notamment le financement des dépenses électorales.

n(23 h 20)n

Il y a également la date des élections, tout le processus de révision des listes électorales à la fois également pour les commissions scolaires francophones et les commissions scolaires anglophones, l'information qui doit être envoyée aux électeurs à cet égard-là, le déroulement de la journée du scrutin, le bulletin de vote, en somme tout le mécanisme qui est requis pour assurer un déroulement ordonné et harmonieux d'une élection sur le plan scolaire, comme c'est le cas sur le plan des municipalités ou encore lors des élections provinciales, en vertu de la loi provinciale des élections, la Loi électorale provinciale.

L'objectif fondamental qui est visé par le projet de loi, par les autres et, je pense, que nous devons viser, c'est celui du renforcement de la démocratie scolaire au niveau des élections. Vous savez, nous avons fait le choix, au Québec, je pense, comme dans la grande majorité des autres juridictions en Amérique du Nord, de confier la mission de l'éducation à des organismes scolaires qui sont indépendants des structures municipales et qui sont également indépendants de la structure gouvernementale. Dans un pays comme la France, dans le fond, il n'y a pas d'organisme décentralisé sur le plan scolaire; évidemment, c'est le ministère de l'Éducation. Et je pense qu'il est essentiel de maintenir des gouvernements locaux au Québec pour assurer la mission éducative et promouvoir la réussite des élèves. Et, à cet égard-là, on doit, je pense, féliciter et remercier tous les commissaires, ceux et celles qui exercent des fonctions de commissaires au sein des conseils des commissions scolaires. C'est un rôle important sur le plan de la gestion des deniers, on leur confie près de 7 milliards de dollars à gérer, mais également et plus fondamentalement toute la mission éducative, la réalisation de projets éducatifs qui sont de nature à mieux former nos jeunes et également à leur permettre de réussir.

Une des propositions qui est faite dans le projet de loi, visant à assurer une plus grande participation des électeurs, est celle de rendre possible l'utilisation d'autres modes de vote que celui d'être obligé d'aller se présenter au bureau de scrutin pour assurer l'exercice démocratique. Il y a des expériences qui se sont faites beaucoup dans d'autres juridictions, par exemple tout ce qui touche le vote par la poste, qui existe déjà d'ailleurs sur le plan des élections provinciales. Les personnes qui sont à l'extérieur, vous le savez, qui sont dans le Sud, comme on dit, si les élections ont lieu à l'automne ou au début de l'hiver, peuvent voter par la poste. C'est la même chose qui existe également dans la Loi électorale fédérale. Aux États-Unis, dans certains États, notamment en Oregon et dans d'autres, le mode de votation par la poste est permis depuis plusieurs années. C'est également le cas en Angleterre. Et, en Ontario, on permet également le vote par la poste à la fois dans les municipalités et dans les commissions scolaires. Et, au Québec, ici, on a permis le vote par la poste à titre expérimental, sous le contrôle et la supervision du Directeur général des élections, dans une municipalité, lors des dernières élections, et je pense que c'était justement dans le comté de Lotbinière. Il semble que tout l'exercice s'est révélé très fructueux et a été probant.

Donc, le projet de loi, à l'article 282.2, permet à une commission scolaire, avec l'accord du Directeur général des élections ? et je pense que le ministre a proposé d'enlever également l'accord du ministre de l'Éducation, je pense que c'est de nature à faciliter cet exercice-là, et je l'en félicite à cet égard-là ? donc, permet à une commission scolaire de faire l'exercice d'un mode de scrutin, d'un mécanisme de votation qui est différent du mécanisme traditionnel, donc par la poste, ça peut être par téléphone, il y a des expériences qui se font ailleurs avec le vote par téléphone. Et, avec toute la technologie, aujourd'hui, eh bien, on peut également, je pense, penser au mode électronique ou par Internet avec les moyens de sécurité appropriés pour bien identifier l'électeur et éviter qu'il y ait de la fraude. Je pense que les exercices qui se sont faits ailleurs ont permis d'assurer la sécurité. Et il semble également que ces modes de votation ont permis d'accroître la participation des électeurs. Parce que, si nous avons un pourcentage de 5, 7 ou 10 % de participation, c'est très, très peu et évidemment, à ce moment-là, on peut prêter, disons, des arguments à des personnes qui prétendent que les commissions scolaires sont peut-être des organismes dont on a plus ou moins besoin, alors que je pense que nous devons les maintenir et les renforcer.

Également, le ministre a parlé tout à l'heure de la synchronisation possible des élections scolaires avec les élections municipales. C'est la situation qui existe en Ontario, donc ce n'est pas nouveau, ce n'est pas inédit. Nous nous rappellerons qu'en 1998 nous avions proposé à la ministre prédécesseure du ministre actuel de considérer cette avenue, de pouvoir jumeler la tenue d'élections municipales et d'élections scolaires. La ministre m'avait indiqué que, oui, elle considérerait cette proposition. Nous sommes revenus avec cette proposition en 2000, lors de l'étude du projet de loi n° 146, l'an dernier également, lors de l'étude du projet de loi n° 59, et je suis heureux de voir que le ministre aujourd'hui indique et prend l'engagement, avec un groupe de travail, d'examiner les avantages qu'il pourrait y avoir de jumeler les élections scolaires et les élections municipales. Et j'espère que son groupe de travail pourra agir rapidement et arriver avec des recommandations qui, à ce moment-là, pourront être intéressantes. Et je pense que l'objectif, c'est toujours de pouvoir améliorer le taux de participation des électeurs aux élections générales scolaires, donc d'amener une participation plus grande, et ce qui sera de nature, à mon avis, à renforcer l'exercice de la démocratie.

Je voudrais à mon tour remercier les groupes qui sont venus durant la commission parlementaire de l'éducation, qui ont préparé des mémoires qui ont permis de bonifier le projet de loi, remercier également les membres de la commission parlementaire, remercier également le ministre pour sa participation, son ouverture, les discussions très ouvertes que nous avons pu avoir en commission parlementaire. Et ce que je peux souhaiter, c'est que ce projet de loi permette de viser l'objectif que nous voulons atteindre: renforcer la démocratie scolaire, améliorer le taux de participation et l'intérêt d'individus et de personnes à présenter leur candidature comme commissaire lors d'élections scolaires. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Y a-t-il d'autres interventions sur ce projet de loi? Puisqu'il n'y a pas d'autres interventions, est-ce que le projet de loi n° 66, Loi modifiant la Loi sur les élections scolaires, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais de référer à l'article 40 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 87

Adoption

Le Vice-Président (M. Beaulne): À l'article 40, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce propose l'adoption du projet de loi n° 87, Loi modifiant la Loi sur la Société Innovatech du sud du Québec et la Loi sur la Société Innovatech Régions ressources. Mme la ministre.

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, j'aimerais souligner la collaboration exceptionnelle que j'ai reçue de tous mes collègues de l'Assemblée nationale pour en arriver à l'adoption de ce projet de loi. Au cours des différentes étapes menant à l'adoption de ce projet de loi, tous les intervenants ont reconnu la pertinence et l'importance d'outils comme les sociétés Innovatech. Je ne sais pas si c'est parce que les députés de l'opposition commencent à reconnaître les vertus de nos politiques de développement économique, mais je tiens à souligner que j'ai reçu un appui unanime lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 87. Je me devais donc de remercier chacun des membres de la commission de l'économie et du travail pour leur apport dans ce dossier et pour leur grande ouverture en ce qui a trait aux besoins des entrepreneurs québécois en matière d'outils de développement. Je veux surtout souligner la grande collaboration du député de Beauce-Nord dans ce dossier, collaboration qui permet au gouvernement du Québec de poursuivre son travail en faveur du développement des régions.

n(23 h 30)n

J'aimerais maintenant revenir sur l'importance de l'offre de capital de risque pour l'économie du Québec. Le capital de risque dynamise notre économie de plusieurs façons. Il favorise l'innovation technologique, et particulièrement l'appropriation des découvertes scientifiques par notre économie. Il permet l'émergence d'entreprises à haute valeur ajoutée et donc d'entreprises qui sont en mesure d'offrir des conditions de travail supérieures à leurs employés. Il contribue à accroître la compétitivité des entreprises et, par voie de conséquence, la compétitivité de l'économie québécoise. Il permet la naissance et le développement de jeunes entreprises qui viennent s'ajouter aux entreprises existantes ou remplacer celles qui, malheureusement, disparaissent. Il favorise la diversification de notre économie, réduisant ainsi sa vulnérabilité aux fluctuations cycliques.

À l'extérieur de Montréal, particulièrement dans les régions que desservent la Société Innovatech du sud du Québec et la Société Innovatech Régions ressources, la diversification de ces économies régionales est impérative, afin de réduire la dépendance économique de leurs citoyens aux fluctuations du secteur des ressources naturelles. D'ailleurs, pour la Société Innovatech du sud du Québec, les mises de fonds se sont toujours réparties dans les trois secteurs suivants: les sciences de la santé avec 30 % des mises de fonds, les technologies de l'information avec 39 % des mises de fonds et les technologies industrielles avec 31 % des mises de fonds. À la Société Innovatech Régions ressources, on a ciblé le financement de projets d'entreprises en démarrage et en croissance visant le développement de produits à haute valeur ajoutée dans le secteur des ressources naturelles, notamment: les technologies industrielles, mais plus spécifiquement des équipements reliés aux technologies minières et forestières visant à améliorer la productivité de ces secteurs; les nouveaux produits utilisant les ressources forestières, qui ne sont pas exploités à leur maximum; les biomasses marines; les nouveaux produits reliés à l'utilisation de l'aluminium; l'agroalimentaire; les technologies de l'information.

Soit dit en passant, aucune société de capital de risque présente sur ces territoires n'investit autant qu'Innovatech Régions ressources dans le domaine de l'innovation. Le capital de risque au Québec est un phénomène relativement récent qui a pris son essor dans les 10 dernières années. On le définit généralement comme du financement d'entreprises technologiques sous la forme d'équité ou quasi-équité jusqu'à ce que leur croissance en justifie le retrait. L'investisseur en capital de risque fournit non seulement des capitaux, mais fournit également de l'aide technique aux entreprises dans lesquelles il investit. Il devient partie prenante dans ces entreprises, à un moment critique de leur évolution.

Compris dans son sens strict, le capital de risque s'adresse aux entreprises technologiques qui en sont dans les premiers stades de leur évolution. Dans un sens plus large, on convient qu'il s'adresse à toutes les entreprises en forte croissance qui, à cette fin, ont besoin d'apport de capitaux. Tant compris dans son sens strict que dans son sens large, le Québec a comblé ces dernières années un retard important en ce qui concerne le capital de risque disponible sur son territoire par rapport au capital de risque disponible sur l'ensemble du marché canadien, tant et si bien que le Québec bénéficie maintenant de 52 % de la totalité de ces fonds sous gestion, soit 10,7 milliards de dollars.

Ces grands progrès se sont principalement faits dans la région de Montréal. Pour l'économie du reste du Québec, il nous est apparu qu'il importait de combler d'importantes lacunes en matière de disponibilité de capital de risque. Cette détermination est d'autant plus manifeste depuis l'annonce de notre stratégie de développement des régions-ressources. Nous avons ainsi convenu de déployer les efforts requis pour ramener le Québec tout entier sur la voie de la nouvelle économie. C'est donc en prenant connaissance des prévisions de la Société Innovatech du sud du Québec et de la Société Innovatech Régions ressources qui nous indiquaient que leurs besoins de fonds d'ici la fin de l'exercice financier 2002-2003 auraient facilement dépassé les 50 millions de capital social déjà autorisé que nous avons vu une belle opportunité pour les régions du Québec de rejoindre les grands centres au niveau de la diversification de leur économie.

En effet, mieux munies, les régions pourront davantage assurer leur développement économique à leur manière, selon leur spécificité et selon leurs avantages comparatifs. Cette opération témoigne sans aucun doute de notre conviction à l'effet que, en disposant des moyens requis, les régions parviendront à se faire une place enviable dans l'économie mondiale. L'importante contribution que ces sociétés apportent à l'économie des régions qu'elles couvrent aura certainement facilité la tâche du gouvernement du Québec pour amener l'Assemblée nationale à adopter un projet de loi qui aura pour effet de porter leur fonds social autorisé de 50 millions à 100 millions chacune.

C'est donc avec beaucoup de satisfaction, M. le Président, que j'invite les membres de cette Assemblée de procéder à l'adoption du projet de loi n° 87. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Beauce-Sud et porte-parole de l'opposition officielle en matière de petites et moyennes entreprises. Mme la députée.

Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Oui, alors, M. le Président, je ne suis pas vraiment la porte-parole officielle de l'opposition concernant les petites et moyennes entreprises, mais il me fait plaisir d'intervenir ce soir à titre de porte-parole comme joueur de relève, si vous voulez, sur le projet de loi n° 87, Loi modifiant la Loi sur la Société Innovatech du sud du Québec et la Loi sur la Société Innovatech Régions ressources, à l'étape de l'adoption finale, en l'absence de mon collègue de Beauce-Nord.

Alors, M. le Président, comme je le disais hier, ce projet de loi vise à permettre au ministre des Finances, qui est l'actionnaire de ces deux sociétés, finalement, d'augmenter la somme investie dans chacune de ces sociétés à 100 millions de dollars. La Société Innovatech du sud du Québec a été créée en 1995, et la Société Innovatech Régions ressources, pour sa part, a été créée en 1998. Elles ont toutes les deux pour mission de promouvoir et de soutenir les initiatives propres à accroître la capacité d'innovation technologique sur des territoires définis par leur charte.

Alors, M. le Président, qu'est-ce qu'elles font, ces Sociétés Innovatech? Eh bien, elles font principalement des placements dans des entreprises qui sont soit en phase de démarrage, de prédémarrage ou encore en phase de développement. En fait, il s'agit de capital de risque. Le capital émis et payé par la Société Innovatech du sud du Québec s'élève actuellement à 43 millions de dollars. Quant à la Société Innovatech Régions ressources, son capital payé et émis s'élève actuellement à 36 millions de dollars.

Or, ce qu'il faut savoir, M. le Président, c'est que la loi actuelle limite présentement le capital émis de ces sociétés à 50 millions de dollars. On est donc, dans les deux cas, tout près d'atteindre la limite du financement qu'on peut accorder dans des entreprises au Québec. Alors, on n'a pas finalement le droit légalement de dépenser le 50 millions qui est prévu par la loi. C'est pourquoi, par le biais du projet de loi n° 87, la ministre des Finances a décidé d'augmenter son apport financier à ces deux sociétés-là de façon à ce qu'elles puissent continuer à réaliser leur mission.

Le projet de loi, M. le Président, qui contient seulement cinq articles... Et, moi, ça me fait toujours rire, à titre de critique du revenu, je suis sûre que ça fait rire aussi le ministre du Revenu, il est sûrement très jaloux, lui aussi, parce que, nous, au Revenu, on n'a pas de petits projets comme ça, on a toujours des gros projets, 300 à 400, 700 articles, une fois, deux fois, trois fois par année. Alors, on a vraiment quelque chose d'ardu. Alors, quand on voit des projets de loi, cinq articles, c'est toujours du bonbon pour moi.

n(23 h 40)n

Alors, le projet de loi, donc, vise, par ses cinq articles, à augmenter le capital autorisé de chacune des deux sociétés Innovatech en question de 50 à 100 millions de dollars. La première société Innovatech a été créée, M. le Président, en 1992, et je tiens à vous le rappeler parce que c'est une mesure qui a été présentée par un gouvernement du Parti libéral. Alors, tantôt, je voyais la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce se demander comment ça se fait qu'elle avait eu une aussi grande collaboration du côté de l'opposition officielle pour augmenter les crédits des sociétés Innovatech, eh bien, voilà, la raison est fort simple, c'est que c'est une mesure qui émane de notre gouvernement et c'est une mesure qui, vraiment, a sa place, c'est une mesure qui crée... qui réalise vraiment sa mission. Alors, c'est pourquoi mon collègue le député de Beauce-Nord s'est fait un plaisir de collaborer avec la ministre à l'étude et à l'adoption de ce projet de loi.

Alors, aujourd'hui, on le sait, il existe quatre sociétés Innovatech, et je suis heureuse, moi, de dire, de mentionner qu'il y en a une dans ma région, Québec?Chaudière-Appalaches, et c'est une société Innovatech qui fonctionne très bien. Dans les quatres sociétés en question, il y a la Société Innovatech du Grand Montréal qui, elle, possède un capital émis et payé de 300 millions de dollars. En 1993, le gouvernement libéral créait la deuxième société Innovatech, soit la Société Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches, dont je viens vous parler et qui dessert la région chez nous. Il faut savoir que le capital de cette Société-là est maintenant rendu à 100 millions de dollars. Alors, M. le Président, je le répète, il y a quatre sociétés Innovatech qui existent sur l'ensemble du territoire québécois: Grand Montréal, Chaudière-Appalaches, qui ont une plus grande durée de vie, je pourrais dire, mais il y a aussi Innovatech du sud du Québec et Innovatech Régions ressources. Et ce sont les deux dernières qui sont concernées par le projet de loi n° 87.

L'ensemble des sociétés Innovatech, M. le Président, procurent du capital de risque en haute technologie depuis 1992, je l'ai dit un petit peu plus tôt. Les sociétés Innovatech se distinguent en investissant exclusivement dans des projets d'innovation technologique au Québec. Les quatres sociétés Innovatech s'impliquent dans une variété de projets, avec une préférence pour les projets en démarrage et les transferts technologiques pour les première et deuxième transformations. Alors, les sociétés Innovatech, finalement, font du financement. Le portefeuille combiné des sociétés d'investissement Innovatech compte plus de 200 entreprises dans les secteurs des technologies de l'information, des télécommunications, de la biotechnologie, des pharmaceutiques, de l'industrie aéronautique, de l'optique et des nouveaux matériaux.

Le projet de loi vise donc à permettre au ministre des Finances d'augmenter la somme investie dans chacune d'elles à 100 millions de dollars, c'est-à-dire un ajout de 50 millions de dollars chacune. Alors, chacune, je parle toujours de celle du sud du Québec et celle pour les régions-ressources. En fait, il s'agit là de capital de risque, il faut le rappeler. Contrairement à ce qu'on peut penser... à ce que fait peut-être la Société générale de financement, eh bien, les sociétés Innovatech, elles, sont résolument tournées vers l'innovation et elles viennent en aide à des entreprises qui oeuvrent justement dans des secteurs d'avenir.

Innovatech Régions ressources a été créée en 1998, et son territoire regroupe les MRC des régions administratives de l'Abitibi-Témiscamingue, du Saguenay?Lac-Saint-Jean, de la Côte-Nord, du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, des Îles-de-la-Madeleine, de la MRC du Haut-Saint-Maurice, de la MRC d'Antoine-Labelle ainsi que les municipalités constituées en vertu de la Loi sur la réorganisation municipale du territoire qu'on retrouve sur le territoire du Nord-du-Québec.

Les investissements d'Innovatech visent la réalisation de projets innovateurs ayant un contenu technologique important, et ça, peu importe le niveau de développement de l'entreprise, M. le Président. Alors, que vous en soyez à vos débuts ou que vous existiez depuis cinq ans, si vous avez un projet novateur, eh bien, la société Innovatech peut vous aider à pousser votre projet un petit peu plus loin, à aller jusqu'à sa commercialisation, y compris la recherche et le développement, le transfert technologique, la mise en valeur économique de l'innovation, principalement la création d'emplois. Bien entendu, on ne peut faire n'importe quoi non plus pour obtenir de l'aide de la société Innovatech. Il faut vraiment oeuvrer dans un secteur technologique et faire de l'innovation et aussi faire de la recherche et développement.

L'examen des projets tient compte de la rentabilité du projet, bien sûr, mais on tient compte également de l'importance de la création d'emplois en haute technologie. On tient compte également des effets structurants sur l'économie régionale, des impacts sur l'exportation, des niveaux de risque technologique, commercial et financier. La majorité des investissements sont réalisés sous forme de prise de participation au capital-actions de l'entreprise ou encore de débentures convertibles en capital-actions ordinaire.

Pour ce qui est de la Société Innovatech du sud du Québec, elle, elle couvre 12 MRC, dont celles d'Acton, d'Arthabaska, d'Asbestos, de Brome-Missisquoi, de Coaticook, de Drummond, du Granit, de La Haute-Yamaska, du Haut-Saint-François, de Memphrémagog, de la région sherbrookoise et du Val-Saint-François. La Société intervient sur les territoires de 12 MRC, comme je l'ai dit, donc principalement en Estrie, mais également en Montérégie et dans les Bois-Francs. Pour les investisseurs, la Société représente un appui important et un argument convaincant pour intéresser d'autres partenaires financiers. En effet, la crédibilité des sociétés Innovatech auprès des fonds spécialisés du secteur bancaire facilite grandement l'accès aux promoteurs à un financement complémentaire avec Innovatech comme partenaire.

Au Québec, il y a beaucoup, beaucoup de sociétés et d'entreprises qui oeuvrent justement dans le domaine du capital de risque. On n'a qu'à penser au Fonds de solidarité de la FTQ, aux sociétés locales pour l'investissement dans le développement de l'emploi, qu'on appelle communément les SOLIDE, aux centres d'aide aux entreprises, on n'a qu'à penser à la Caisse de dépôt et placement du Québec ou encore à la Société générale de financement. Donc, ce n'est pas le capital de risque qui manque, mais il faut savoir que le capital de risque des sociétés Innovatech est directement relié au secteur de l'innovation. Alors, on croit vraiment qu'Innovatech a un créneau très particulier qu'il lui faut conserver.

En fait, M. le Président, pour toutes ces raisons, je confirme à nouveau que, du côté de l'opposition officielle, nous sommes d'accord avec l'adoption de ce projet de loi, le projet de loi n° 87, puisque c'est un projet de loi majeur pour le développement économique de toutes les régions du Québec, mais particulièrement de celles où elles sont installées. Alors, nous voterons en faveur de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Beauce-Sud. Y a-t-il d'autres interventions?

Des voix: Non.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Beaulne): Non? Alors, puisqu'il n'y a pas d'autres interventions, est-ce que le projet de loi n° 87, Loi modifiant la Loi sur la Société Innovatech du sud du Québec et la Loi sur la Société Innovatech Régions ressources, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Ajournement

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je fais une motion pour ajourner nos travaux à demain, 7 juin, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Beaulne): Bon, puisque la motion est adoptée, j'ajourne effectivement nos travaux à demain, le vendredi 7 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 49)